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Merci, monsieur le président, et je remercie le comité de m'avoir invité. Je m'appelle Dale Marshall. Je travaille pour la Fondation David Suzuki.
Tout d'abord, j'aimerais vous remercier, encore une fois, de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui. Je suis ici pour exprimer mon appui au projet de loi C-377. Il s'agit d'un projet de loi important qui vise à inscrire dans la loi les cibles fondées sur la science qui sont nécessaires pour s'assurer que le Canada prend l'entière responsabilité d'éviter les changements climatiques dangereux.
Si vous me le permettez, j'aimerais revenir en arrière en 1992, quand le Canada et des pays du monde entier ont signé la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. L'objectif premier de cette convention était d'éviter les changements climatiques dangereux. Évidemment, on est en droit de se demander ce qu'on entend par « dangereux ».
Il y a plus de dix ans, l'UE a établi un seuil de deux degrés pour les changements climatiques dangereux: un réchauffement planétaire moyen de deux degrés Celsius par rapport aux niveaux préindustriels. Cette limite est maintenant largement appuyée par des pays et des scientifiques, y compris plus récemment la Déclaration des scientifiques sur le climat à l'occasion de la conférence de Bali.
Le Canada semble s'intéresser à la question des deux degrés Celsius après l'avoir, franchement, laissée de côté pendant longtemps. Un document diffusé par Affaires étrangères Canada a conclu que l'établissement de la limite des deux degrés Celsius a été avantageux pour l'UE parce que cela a permis à ses 27 États membres de, et je cite: « faire converger l'élaboration de politiques ». À la Chambre des communes en décembre 2007, le ministre de l'Environnement du Canada, John Baird, a indiqué qu'une hausse de deux degrés Celsius est inacceptable.
Donc, si l'on applique la logique de l'opinion du ministre, le Canada doit maintenant fixer des limites pour s'assurer que les émissions de gaz à effet de serre ne dépassent pas les deux degrés Celsius et doit faire sa juste part pour garder la planète dans cette limite de réchauffement. C'est ce que prévoit le projet de loi.
Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat a constaté que pour avoir une chance raisonnable de limiter le réchauffement à deux degrés Celsius, les pays développés devraient réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 25 à 40 p. 100 par rapport à leurs niveaux de 1990 d'ici 2020 et de 80 à 95 p. 100 par rapport à leurs niveaux de 1990 d'ici 2050. Je vous fais remarquer que les cibles fixées dans le projet de loi C-377 se trouvent dans ces intervalles, mais dans les fourchettes inférieures.
Ces cibles correspondent également à celles proposées par la Fondation David Suzuki et l'Institut Pembina dans notre rapport d'il y a deux ans, intitulé: « Réduire radicalement les gaz à effet de serre », à la lumière des connaissances scientifiques sur les deux degrés Celsius et d'après la juste part du Canada pour éviter de dépasser cette limite.
Bien sûr, ces cibles permettraient aussi au Canada de s'aligner sur le processus de l'ONU et de la communauté internationale. La fourchette de 25 à 40 p. 100 visée par le GIEC représente également celle que les parties au Protocole de Kyoto, dont le Canada et environ 160 autres pays, ont convenu d'examiner, aussi bien à Vienne qu'à Bali.
Il semble donc y avoir une convergence, tant au Canada qu'à l'échelle internationale, sur les mesures prévues dans ce projet de loi, qu'il s'agisse de la limite des deux degrés Celsius ou des cibles de réduction des gaz à effet de serre.
La prochaine question est de savoir comment le Canada atteint ces cibles. Tout porte à croire que le Canada peut les atteindre avec très peu de perturbation économique, voire aucune. Le travail de modélisation économique effectué par la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie montre que le Canada peut réduire ses émissions de 65 p. 100 dans les 43 prochaines années en se privant d'environ une année de croissance économique. Donc, même avec la technologie en place, nous pourrions sacrifier une année de notre croissance future au cours des 43 prochaines années afin d'atteindre les cibles du gouvernement.
Maintenant, les cibles du gouvernement ne sont pas celles énoncées dans ce projet de loi. Le travail de la TRNEE n'a pas tenu compte de la réduction de 80 p. 100 et n'a pas utilisé l'année de référence de 1990. Elle s'est servie des cibles établies par le gouvernement. Mais dans son rapport, la TRNEE indique bel et bien qu'il est possible de réduire davantage les émissions à des coûts économiques légèrement supérieurs et constate, encore une fois, à la lumière des conclusions du GIEC, que nous pourrions rester dans la limite des deux degrés Celsius à l'échelle mondiale, avec une perte d'environ deux ans de croissance économique au cours des 50 prochaines années.
La Fondation David Suzuki a également commandé une modélisation économique pour examiner la cible à moyen terme de 2020. Malheureusement, ce rapport n'a pas encore été rendu public. Il le sera dans trois semaines. Mais permettez-moi de vous faire part de quelques-unes des constatations.
Le rapport a révélé que le Canada pourrait atteindre la cible de 2020 à 80 p. 100, qui est prévue dans le projet de loi, en imposant tout simplement un prix du carbone suffisamment élevé, sous forme d'une taxe ou d'un système de quotas et d'échange. Évidemment, c'est sans compter les mesures supplémentaires qui pourraient être prises, comme des règlements sur l'efficacité énergétique pour le matériel et les appareils ménagers, des règlements sur l'efficacité énergétique des véhicules automobiles et des codes de construction plus rigoureux pour l'efficacité énergétique.
Quel en serait donc le prix macroéconomique? Le Canada perdrait 1 p. 100 du PIB — environ six mois de croissance — d'ici 2020 et se joindrait à la lutte mondiale contre les changements climatiques. En d'autres termes, d'ici 2020, l'économie canadienne afficherait une croissance de 26 p. 100 au lieu de 27 p. 100, tout en réduisant ses émissions de gaz à effet de serre à un niveau bien inférieur à ce que le gouvernement avait énoncé dans sa cible de 2020.
En passant, toutes ces constatations correspondent parfaitement à celles des études internationales qui ont révélé que dans les cas où des réductions d'émissions se sont produites, elles l'ont été à un très faible coût économique et conformément aux prévisions économiques de réductions d'émissions futures. Des pays comme la Norvège ou le Royaume-Uni et des États comme la Californie ont tous établi des modèles de réductions d'émissions du même genre que ceux que l'on retrouve ici: des réductions de 80 p. 100. Autrement dit, la Norvège, pour sa part, s'est fixé une cible de réductions d'émissions de 100 p. 100 d'ici 2030. La Norvège prévoit avoir une production de carbone neutre d'ici une génération. La Norvège représente un exemple intéressant parce qu'il s'agit d'un pays qui affiche les mêmes caractéristiques que le nôtre, et ces caractéristiques sont, semble-t-il, des obstacles qui empêchent le Canada à s'attaquer sérieusement aux changements climatiques. La Norvège, tout comme le Canada, est un pays nordique. Elle compte une très faible population comparativement à son territoire. Elle exporte du pétrole et du gaz et, pourtant, elle prévoit devenir neutre en carbone d'ici 2030.
Là où je veux en venir, c'est que s'attaquer de front aux changements climatiques entraîne certes des coûts importants, mais ne pas agir du tout ou ne pas agir assez rapidement pour limiter le réchauffement à deux degrés Celsius ou moins est tout aussi coûteux. Dépasser le seuil des deux degrés Celsius coûtera beaucoup trop cher à la planète — le prix va atteindre un niveau inacceptable pour les gens, pour nos économies et pour les écosystèmes naturels dont nous dépendons.
Le rapport économique le plus détaillé sur les changements climatiques, soit l'étude de Stern, a montré que, si nous n'agissons pas, les incidences des changements climatiques seront de cinq à vingt fois pires que si nous agissons. Stern désigne les efforts sérieux contre les changements climatiques par l'expression de « stratégie pro-croissance » pour l'avenir. Le monde doit donc agir pour remédier aux changements climatiques, et le Canada doit faire sa juste part. Ce projet de loi marque un important pas pour s'assurer que le Canada fait exactement cela.
Je vous remercie de votre attention. Merci bien.
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Je vais essayer de ne pas répéter ce qui a déjà été dit et me concentrer un peu plus sur les solutions, mais sans trop entrer dans les détails.
Dale a très bien expliqué ce que je voulais dire à propos de la menace réelle posée par les changements climatiques mondiaux et du coût énorme de l'inaction. Nous avons de bonnes sources de référence pour justifier toutes ces affirmations. J'ai préparé une communication à cet effet et j'ai fourni des références, donc je ne veux pas vraiment m'y attarder.
La raison pour laquelle nous devons songer à appuyer un projet de loi tel que le , c'est que le Canada a échoué dans l'adoption de mesures stratégiques rigoureuses pour maîtriser les gaz à effet de serre à l'instar de certains des chefs de file mondiaux. Nous savons tous que l'Union européenne est en train d'établir des cibles audacieuses. Nous savons que certains États comme la Californie vont de l'avant, tout comme certaines provinces au Canada. Nous devons être des chefs de file dans ce dossier, selon moi.
De plus, l'industrie réclame des directives stables. Différents chiffres sont évoqués dans l'esprit de différentes personnes, mais nous parlons du Conseil canadien des chefs d'entreprises ou, à l'échelle internationale, d'un groupe appelé le Groupe 3C: Combattre les changements climatiques. Quatre entreprises multinationales canadiennes y sont représentées. Leur message: nous devons fixer des cibles.
Le Groupe 3C, en particulier, a endossé la cible de 80 p. 100 d'ici 2050. Ils sont moins résolus quant à ce qu'on peut accomplir d'ici 2020 ou 2030, mais ils croient que nous devons suivre la science, établir des cibles à long terme, puis fixer des buts à court terme pour y arriver. L'industrie demande donc des directives stables.
Et le public est inquiet. Nous avons vu les résultats de divers sondages d'opinion publique sur la position du public face à ce sujet.
Je crois que l'argument en faveur d'un projet de loi qui nous oblige à aller de l'avant est assez clair, car en son absence, nous n'avancerons pas. Nous ne ferons que continuer à nous disputer sur ce que nous pouvons faire et ne pas faire. Je crois donc que sa raison d'être est solide.
La question qui se pose alors est la suivante: comment pouvons-nous y arriver et que devons-nous faire? Nous disposons d'une abondance d'études qui montrent les différentes façons dont nous pourrions y arriver. Je sais qu'il a plus été question d'équité et de justice sur la façon d'y arriver que du fait qu'on a les technologies et les moyens pour y arriver.
J'aimerais diviser les choses en trois catégories très simples: l'infrastructure, la technologie et les prix qui, selon moi, constituent les trois grands moteurs du progrès. Si nous n'investissons pas dans l'infrastructure, et la bonne infrastructure, le problème durera longtemps. Nous devons le faire. Si nous n'obligeons pas les technologies à se conformer aux objectifs de changement climatique et à cette infrastructure, alors nous appliquerons les mauvaises technologies. Bien sûr, nous savons tous que les prix, surtout dans une économie de marché, poussent les gens et les entreprises à bouger.
Sur le plan de l'infrastructure, il est très clair que nous devons penser à grande échelle concernant les routes, les lignes ferroviaires, le transport aérien, le transport public, l'eau potable et le traitement des eaux usées, l'électricité, les pipelines. Tout cela forme l'infrastructure, dont une bonne partie est financée par des fonds publics, d'une façon ou d'une autre. Les politiciens exercent donc une très grande influence par le biais des processus de planification, des processus budgétaires, etc., pour paver la voie à suivre. Nous avons besoin d'une vision de ce qu'il faut avoir accompli en 2050, et cette vision doit englober une certaine notion des objectifs quantifiés que nous devons atteindre.
En ce qui concerne la technologie, là encore, les gouvernements exercent une très grande influence, à la fois par le biais de l'infrastructure mise en place et des technologies qui doivent s'y rattacher, mais aussi par l'établissement de règlements et d'autres incitatifs. Largement axée sur la conception de technologies, l'industrie doit trouver des moyens d'avoir un rendement du capital investi. Nous avons besoin de la technologie. C'est un effort qui doit venir de l'ensemble de la société, avec la pleine participation de l'industrie pour mettre au point les technologies dont nous avons besoin. Nous avons également besoin de prix pour faire en sorte que le tout s'imbrique.
Ces trois facteurs sont interreliés. Comme on l'a dit à la Table ronde nationale, sans des indices de prix à l'échelle de l'économie, nous aurons de la difficulté à convaincre les consommateurs de prendre part à la solution. Sans des indices, par le biais de mécanismes d'échange ou de taxes sur les émissions ou d'autres moyens, nous aurons beaucoup de mal à convaincre les entreprises.
Je crois que c'est un tout dont les parties ne peuvent être examinées séparément. Je ne pense pas qu'on puisse y arriver simplement en imposant un prix au système. Je ne pense pas qu'on puisse y arriver simplement en encourageant des technologies et en espérant qu'elles soient appliquées. Je ne pense pas qu'on puisse y arriver simplement en bâtissant une forme d'infrastructure et en laissant les autres morceaux du système se mettre en place.
Tout cela exige beaucoup de vision — idéalement, beaucoup de coopération. Ce serait la meilleure voie à suivre, particulièrement dans un pays comme le Canada avec ses diverses économies et ses circonstances différentes. Nous devons nous inspirer de l'action et de la détermination des chefs de file du monde entier.
Nous avons besoin d'une vision nationale.
J'ai lu dans le Globe and Mail un article concernant le rapport sur la capture et le stockage de carbone qui vient d'être publié. Un montant de 2 milliards de dollars est demandé pour entreprendre les travaux initiaux afférents. Pour ce qui est de la suite, on n'en connaît même pas le montant, mais ce pourrait être bien plus élevé. Alors, pourquoi ne consacrons-nous pas autant, ou plus, à l'efficacité énergétique des ressources renouvelables? Nous avons besoin de fonds de cette ampleur, et bien plus, pour le développement urbain et l'infrastructure de même que la réfection du réseau de distribution d'électricité pour mettre à profit les deux technologies qui nous permettront d'atteindre la cible de réductions de 80 p. 100.
Pourquoi ne sommes-nous pas en train de réformer notre secteur de l'automobile pour qu'il soit plus dynamique et qu'il construise les bons types de véhicules éconergétiques, au lieu d'essayer de s'en tenir à la construction de mauvais types de véhicules automobiles qui, au bout du compte, connaîtront le même sort que les dinosaures, entraînant avec eux notre économie si nous ne faisons pas attention?
Pour conclure, je crois que nous avons besoin d'un projet de loi qui montre très clairement à l'industrie, au public et à tout le monde que nous avons une cible à long terme et que nous allons exiger des plans pour y arriver. Nous avons besoin d'une vision de ce que nous allons faire avec ces grands leviers stratégiques que sont l'infrastructure, la technologie et les prix, dans une foule de domaines. Nous avons besoin d'investissements tous azimuts dans une sorte de restructuration de l'économie et des structures sociales canadiennes pour nous assurer le type d'avenir qui, selon moi, nous attend. De nombreuses embûches se dressent à l'horizon, mais je crois que cet avenir est possible si nous nous y mettons. Je vous encourage à en tenir compte dans vos délibérations.
Merci.
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Merci, monsieur le président et membres du comité. Merci de m'avoir invitée.
Je m'appelle Julia Langer. Je suis directrice du programme des changements climatiques au Fonds mondial pour la nature au Canada.
Le Fonds mondial pour la nature a pour mission de préparer un avenir qui permettra à tous les êtres humains de vivre en harmonie avec la nature. Nous travaillons à préserver la diversité biologique, à assurer l'utilisation durable de nos ressources renouvelables et à promouvoir la réduction de la pollution et de la surconsommation. Mais tout le travail que nous faisons depuis 40 ans au Canada pour protéger, gérer et restaurer la biodiversité pourrait bien s'avérer vain si nous ne controns pas la grande menace posée par le réchauffement planétaire et le chaos climatique. C'est dans cette perspective que le WWF se prononce en faveur du projet de loi C-377.
Nous estimons que le projet de loi C-377 est le reflet des avis des scientifiques qui préconisent une action immédiate pour réduire considérablement les émissions. Les objectifs de réduction fixés par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat ne sont pas arbitraires; ils tiennent compte des travaux de milliers de scientifiques au fil de nombreuses années. Nous devons réduire la pollution responsable du réchauffement de la planète d'au moins 25 p. 100 d'ici 2020 et de 80 p. 100 d'ici le milieu du siècle par rapport aux données de référence internationales de 1990. Je répète et j'appuie les propos de M. Marshall. C'est notre point de référence. Il n'y a pas d'autre moyen d'envisager la question. J'aimerais également faire remarquer que cela représente un minimum, parce qu'il s'agit des réductions minimales jugées appropriées pour des pays industrialisés comme le Canada.
Qualifier le réchauffement planétaire d'« hypothèse », comme l'a fait le premier ministre il y a moins de quatre ans, est maintenant considéré comme absurde. Partout dans le monde, les gouvernements de toutes les allégeances politiques, y compris le nôtre, tiennent compte de la climatologie dans l'élaboration de leurs politiques. Mais reconnaître le point de vue des scientifiques n'est que le premier pas. Il est absolument nécessaire et approprié, à ce stade-ci, d'enchâsser dans la loi des cibles et des exigences de mise en oeuvre, parce que l'approche du gouvernement actuel n'est qu'un stratagème de relations publiques. Il faut l'intégrer dans un système de gestion.
Je parle d'un stratagème parce que cette approche est déconnectée sur le plan scientifique, le point de référence étant déplacé. Cette approche est inefficace parce que les émissions continueront leur hausse fulgurante -- et on parle plus qu'on agit -- et elle provoque des querelles entre les gouvernements fédéral et provinciaux, ce qui n'aide pas à progresser vers la solution.
Pour ce qui est des cibles dont nous avons besoin, j'aimerais mettre l'accent sur les sables bitumineux qui illustrent bien comment les règles proposées par le gouvernement à l'intention des grands émetteurs finaux pour la réduction des gaz à effet de serre constitueraient un permis de polluer et perpétueraient la plus grande source d'émissions au Canada.
Lorsqu'on fixe des objectifs, il importe de se demander qui sera touché. N'oubliez pas que les émissions des principales sources constituent 47 p. 100 du total national. Les cibles proposées exigent que les émissions de gaz à effet de serre soient réduites de 23 p. 100 par unité de production d'ici 2020, avec une exemption de 6 p. 100 pour les émissions liées à des procédés fixes. Voilà qui ressemble à une réduction, sans en être une.
Je ne vais pas donner un exposé en PowerPoint, mais vous pouvez peut-être suivre les graphiques. Ce graphique illustre les projections de l'ONE concernant la croissance des sables bitumineux, dont les émissions non atténuées affichent une hausse très prononcée. C'est la ligne bleue. L'industrie a déjà signalé son intention de continuer à réduire les émissions par baril et, de fait, a établi certaines cibles à cet égard. Cela diminue la croissance, mais ne la réduit pas dans son ensemble. C'est ce que représente la ligne verte. Les règles proposées pour les grands émetteurs finaux, représentées par la ligne rouge, correspondent plus ou moins aux engagements existants et à des options d'atténuation faisables sur le plan technique. Il s'agit d'un permis de polluer. De plus, certaines compagnies visent des améliorations plus radicales. C'est ce que représente la ligne mauve.
L'écart ici, c'est-à-dire la réduction supplémentaire, peut être transformé en crédits et vendu dans le cadre du système d'échange de droits des GEF. Lorsqu'on multiplie cela par 15 $ la tonne, on obtient des millions de dollars de bénéfices pour une industrie déjà rentable. Au bout du compte, les émissions doubleront ou tripleront d'ici 2020. On ne peut fermer les yeux devant ce problème criant qui doit être pris en compte dans l'établissement de nos cibles.
Il sera impossible d'agir conformément aux impératifs scientifiques et à l'objet proposé du ou d'en arriver aux réductions escomptées, énoncées dans le projet de loi, sans s'attaquer à la hausse fulgurante des émissions liées à l'exploitation des sables bitumineux. Si elles ne sont pas contrôlées, elles mineront les mesures prises par d'autres instances et d'autres secteurs et terniront la réputation du Canada sur la scène internationale. En quoi la cible de l'Alberta, soit une réduction de 14 p. 100 par rapport aux niveaux de 2005, est-elle conforme ou justifiée?
Le Parlement doit établir des règles très claires qui fonctionneront dans le contexte réel de la fédération canadienne. Les soi-disant accords d'équivalence, sans aucun plafond national ferme, qu'il faut établir dans ce projet de loi, nuiront davantage à l'objectif.
Pendant qu'un grand nombre de provinces ont pris des engagements et vont de l'avant, nous devons nous assurer que les efforts des principales provinces ne s'annuleront pas. Exiger du ministre qu'il fasse la preuve que les mesures prises permettront d'atteindre les cibles fixées, notamment grâce à des ententes ou à la collaboration avec certains gouvernements nationaux, risque de ne pas être un mandat assez clair ou suffisamment large pour répartir les réductions prévues entre les régions ou les secteurs.
Pour aider à résoudre ce dilemme — et je ne dis pas qu'il s'agit d'une tâche facile — il faut tirer des leçons de l'Europe en ce qui concerne l'équité dans un plan d'action national pour les changements climatiques. En tant que fédération, l'approche de l'UE consiste à établir des cibles claires qui lient les parties aux accords et à répartir la responsabilité de façon transparente — les Européens appellent cela le partage du fardeau. Ce n'est pas facile, mais ils y sont arrivés. Ils ont créé des outils fiscaux, de réglementation et de marché pour faciliter la mise en oeuvre. Ils exigent également une reddition de comptes —par exemple, la capacité d'approuver ou de refuser des plans, avec des répercussions en cas de non-conformité.
On se plaint beaucoup à propos des difficultés auxquelles fait face le Canada. Personne ne peut prétendre vraiment que la route sera facile. Mais comme l'ont souligné de nombreux analystes, l'inaction coûtera cher. Le Canada accuse de plus en plus de retard au chapitre de la productivité énergétique et souffrira à cause des coûts élevés des combustibles fossiles. Avec l'augmentation du coût du baril de pétrole à 100 $ et plus et le refus du gouvernement d'aller de l'avant dans le domaine de l'énergie durable, notre économie, nos entreprises et les consommateurs seront laissés pour compte, sans oublier les risques associés aux températures extrêmes et au réchauffement.
L'Europe, pour sa part, avance à grand pas avec une économie faible en carbone comme point central. La semaine dernière, l'UE a adopté un nouvel ensemble de mesures concernant le climat et l'énergie, notamment une cible de 20 p. 100. L'UE a indiqué qu'elle irait jusqu'à 30 p. 100 si d'autres pays se joignaient à elle. Quel avantage ce serait si nous établissions une cible correspondant aux 25 ou 30 p. 100. Je crois que cela inciterait l'Europe à aller encore plus loin.
Leur projet de loi comprend un engagement envers l'électricité renouvelable et les biocarburants ainsi qu'un nouveau système d'échange de droits d'émission et des exigences très rigoureuses en matière d'efficacité énergétique, comme l'a expliqué Ken.
Les gens aiment se plaindre de la Chine et de l'Inde, mais ces pays sont remarquables, car ils connaissent une croissance dans un contexte où l'énergie est limitée, ce qui les force à être super efficaces, une affirmation que le Canada ne peut faire, car nous affichons la plus forte consommation d'énergie par habitant et occupons le deuxième rang pour ce qui est de la consommation d'énergie par PIB.
En conclusion, le WWF exhorte le Parlement à passer à l'action pour relever le défi du changement climatique. Il est essentiel d'adopter une loi nationale qui englobe les impératifs scientifiques, qui confère au Canada une position d'acteur de bonne foi sur la scène internationale et qui reflète les attentes du public pour prévenir les changements climatiques dangereux. Le gouvernement a reconnu le point de vue des scientifiques et est désormais partie aux ententes de l'ONU relatives au climat; pourtant, les cibles et les mesures proposées sont inadéquates. Les émissions iront en augmentant, faute de cibles et d'exigences appropriées liant les parties pour la mise en oeuvre des réductions.
Nous voici à la première phase de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, et avant de passer à l'étape suivante de collaboration multilatérale, il faudra établir des directives et des attentes claires. Le fait l'affaire et c'est pourquoi nous l'appuyons. Nous exhortons toutes les parties à souscrire aux cibles et au calendrier de réduction des gaz à effet de serre et aux obligations du gouvernement, énoncées dans le projet de loi, dans l'optique de créer une société faible en carbone. Nous ne pouvons pas nous permettre des excuses et des retards. Passons à l'action.
Merci.
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Peut-être puis-je parler des solutions. Nous avons pris connaissance de l'analyse faite par M. Stern et nous nous sommes rendu compte que la table ronde nationale a fait passablement les mêmes constatations que M. Stern. En effet, nous devons nous pencher sur le coût de l'inaction. Il serait intéressant d'obtenir une perspective canadienne, mais je ne crois pas que cela changerait quoi que ce soit. Par contre, les diverses études qui ont été effectuées dans le monde poussent à l'action, et c'est ce dont les Canadiens ont besoin.
Il est possible d'atteindre les cibles, et il existe quatre ou cinq mesures que nous pouvons prendre pour y arriver.
Limitons le carbone, et les mégatonnes chuteront. Voilà ce que nous devons faire en premier lieu.
Nous devons fixer des objectifs à court, à moyen et à long terme, ce qui exercera une pression sur les prix et favorisera l'innovation. Ainsi, tous les secteurs seront touchés.
Déclenchons une révolution de l'efficacité énergétique. C'est grâce à l'amélioration de l'efficacité énergétique que nous parviendrons le mieux à réduire les coûts pour les consommateurs et le gouvernement. C'est la seule façon de nous protéger d'une récession. C'est là-dessus que nous devons mener des études. Pourquoi nous ne le faisons pas?
Il en est de même pour les sources d'énergie renouvelable. Il faut ouvrir les vannes. Les entreprises de technologies propres n'attendent que cela. Si vous voulez mener une étude, faites-en une sur ce domaine afin de montrer où se trouvent les possibilités.
Il ne devrait y avoir dans l'avenir aucune source majeure de gaz à effet de serre non atténuée.
Voilà le genre de mesures que nous devrions prendre. Si vous voulez mener une autre étude, faites-le, mais je pense que nous avons déjà toute l'information en main. Ce qu'il nous faut, ce sont des objectifs et des mesures qui nous permettront de les atteindre.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aurai deux questions à poser, une pour M. Marshall et une autre pour Julia Langer.
Je pense qu'aujourd'hui, le meilleur argument et la démonstration la plus forte viennent de Dale Marshall de la Fondation David Suzuki. Je cite un des paragraphes de son court mémoire:
[...] nos études démontrent que le Canada pourrait atteindre 80 % des réductions ciblées dans le projet de loi pour l'année 2020 simplement en instaurant une taxe sur le carbone ou en mettant sur pied un système de plafond et d'échange de droit d'émission.
Je pense qu'on a là l'argument le plus fort en faveur du projet de loi qui nous est présenté, particulièrement en ce qui a trait aux objectifs de 2020. Cela s'ajoute à l'opinion assez consensuelle chez tous les témoins qu'il faut fixer un prix sur le carbone et utiliser les instruments de marché qui sont à notre disposition. La Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie l'a dit et, si je ne me trompe pas, il y a quelques jours, le Conference Board du Canada l'a aussi confirmé.
Compte tenu du fait qu'on aura probablement le rapport officiel dans trois semaines, comme l'indique le mémoire, et qu'on aura probablement à procéder à l'étude du projet de loi article par article avant le dépôt du rapport, M. Marshall pourrait-il nous dire quel type de modélisation il a appliqué pour parvenir à ces conclusions? Je suppose qu'il a établi un système de quota. Quel genre de répartition a été établi? Par exemple, les entreprises qui ont réduit leurs émissions de gaz à effet de serre ont-elles obtenu des crédits supplémentaires leur permettant de vendre des crédits d'émission sur le marché? Quel type de modélisation, sans nécessairement entrer dans les détails, avez-vous appliqué pour en venir à cette conclusion?
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Prenons un exemple. Dans l'avion, en me rendant ici aujourd'hui, j'ai répondu à des cartes de mes électeurs, qui m'interrogeaient sur le changement climatique. Il y a de la frustration depuis quelques années parce que les gens se demandent pourquoi nous n'agissons pas tout simplement. Je pense à une carte en particulier, que j'ai reçue d'un électeur conservateur, rien de moins.
J'ai une question sur le degré de certitude dans le milieu des affaires. J'ai reçu dans mon bureau beaucoup de directeurs et de présidents des grands pollueurs du pays. Ils affirment que dès qu'ils ont entendu le signal du gouvernement, ils ont commencé à agir et ont fait les investissements nécessaires. Ensuite, tout est tombé à l'eau et il y a eu un autre plan, un autre appel à l'action. Les gens d'affaires commencent à s'énerver un peu, ils retiennent des leçons de leur expérience.
En ce moment, les gens d'affaires sont tellement frustrés qu'ils ne sont plus prêts à agir tant qu'il n'y aura pas de règles claires, écrites noir sur blanc, sans remise en question, sur les objectifs dont vous venez de parler, pour qu'ils soient prescrits par la loi. Je sais bien que vous consultez tous, à divers degrés, ces acteurs de l'économie canadienne.
Récemment, un rapport a montré que bon nombre des grands pollueurs du Canada investissent moins dans ces coûts d'infrastructure pour cette raison. Sentez-vous cette frustration chez les gens d'affaires et leur récalcitrance à ce qu'on appuie encore une fois sur le bouton d'alarme? La réponse n'est tout simplement plus la même.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie nos témoins d'aujourd'hui. Je vais concentrer mes questions sur le et les solutions. Votre perspective est environnementale, et j'aimerais entendre vos bons conseils sur l'avenir que vous entrevoyez au Canada si nous acceptons ces objectifs.
Vous proposez que nous établissions ces objectifs, que nous les inscrivions dans la loi et que nous les atteignions. De quoi le Canada pourrait-il avoir l'air en 2050 et en 2020, d'après vous? Comment cette transition se répercuterait-elle sur chaque Canadien? Je me demande donc comment nous allons y arriver, mais aussi quel sera le résultat.
J'aimerais d'abord vous parler, comme j'en ai parlé avec les autres témoins, de l'importance d'évaluer les coûts de ce projet de loi. J'ai demandé à s'il l'avait fait, parce que pour assurer un développement durable, il faut certes protéger l'environnement, mais on ne peut pas détruire l'économie. Chaque témoin en a parlé brièvement. Mercredi, nous allons entendre des économistes.
M. Layton a donc dit qu'en effet, il n'avait pas évalué les coûts et qu'il aimerait que le gouvernement le fasse. J'ai demandé à M. Bramley s'il avait évalué les coûts. Il m'a répondu que non, qu'il s'attendait lui aussi à ce qu'on le fasse. J'ai posé la question à M. Stone il y a une semaine et il a dit qu'en effet, il pensait qu'il fallait les évaluer.
Madame Langer, vous avez dit avoir fait vos calculs, comme on peut le lire dans le mémoire que vous nous avez distribué. L'un de vous trois a-t-il évalué les coûts du ?
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Le établit des objectifs très ambitieux. Ils viennent du rapport du GIEC. L'institut Pembina et la Fondation David Suzuki militent eux aussi pour de grandes réductions.
On a mentionné le projet de loi du gouvernement, Prendre le virage, qui s'assortissait d'une évaluation de coûts. Il y a eu des débats sur le réalisme des objectifs et les coûts de ce plan pour le PIB, pour les Canadiens, et peut-être quelques questions sur l'atteinte des objectifs.
Je pense qu'on a dit que ces objectifs n'étaient pas assez rigoureux d'un point de vue environnemental, mais que pour l'industrie, ils l'étaient trop. C'est aussi ce que nous entendons de certaines provinces. Nous sommes donc un peu au milieu.
En termes de coûts, qu'en coûtera-t-il à l'économie canadienne? Cela semble être un paramètre repère pour comparer les perspectives et les plans. Le gouvernement a un plan clair, de réduction absolue d'ici 2020 et de réduction importante de 60 à 70 p. 100 d'ici 2050. Il a évalué les coûts.
A-t-on évalué les coûts du ? Comme je l'ai dit, M. Layton a répondu par la négative, tout comme M. Bramley et M. Stone, mais chacun d'eux a dit qu'il fallait non pas établir des chiffres arbitraires, mais estimer les coûts de manière à dresser un portrait complet de ce qu'ils signifient pour le Canada.
C'est mon entrée en matière: de quoi le Canada aura-t-il l'air? De quoi aura l'air le développement urbain? Quel genre de voitures conduirons-nous? D'où l'énergie vient-elle? Quels sont les coûts? Il y a un équilibre, mais quels sont les coûts du ?
Je crois également que nous devrions établir les coûts de tout cela pour que le Canada sache où nous allons. Je pense que les cibles sont ambitieuses, mais il faut vraiment que nous examinions les impacts.
Lorsqu'on a interrogé sur les coûts et qu'on lui a demandé d'où les cibles étaient tirées, il a reconnu qu'elles venaient de la Fondation David Suzuki et de l'Institut Pembina, puis il a fait une analogie très intéressante avec un chemin de fer. Je le cite:
Je pense aux gens qui ont voulu construire un chemin de fer pour relier une extrémité du pays à l'autre. Croyez-vous qu'ils savaient exactement comment ils allaient faire? Croyez-vous qu'ils savaient comment ils allaient pouvoir défrayer tous les coûts? Ont-ils agi parfaitement? La réponse à toutes ces questions est non, mais ils avaient un rêve pour le pays, et ils ont décidé de réaliser l'impossible et y ont mis tous leurs efforts.
Il a un rêve. Il a fixé ces cibles selon les recommandations de la Fondation David Suzuki, un organisme très respecté, et de l'Institut Pembina. Nous vous remercions de les encourager.
Pourriez-vous me dire à quoi devrait ressembler le Canada, selon vous? J'aimerais préciser tout d'abord que je conduis un véhicule hybride. Il s'agit d'une technologie de transition. J'attends avec impatience le jour où il y aura des voitures électriques qu'on pourra brancher à l'aéroport, puis rebrancher une fois rendu chez soi. Je crois que l'arrivée de cette technologie n'est pas si lointaine.
Où en sera le Canada en 2020 et en 2050, selon vous? Croyez-vous qu'il y aura des centrales au charbon comme celles que nous avons en Ontario, pour la fermeture desquelles le fédéral a fourni 583 millions de dollars, mais qui n'ont pas encore été mises hors service? En 2020, croyez-vous que ce type de technologies sera mis au rencart et que nous passerons à un Canada plus vert et des technologies plus écologiques, comme les voitures électriques, l'énergie solaire, l'énergie marémotrice et des maisons plus performantes, construites sur de plus petits terrains?
Pensez-vous qu'il y aura aussi une taxe sur le carbone? J'espère que non. J'estime que les Canadiens sont surimposés, et notre gouvernement n'appuie pas une telle taxe. Mais pensez-vous qu'il y aura une taxe sur le carbone en 2020?
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Du point de vue de l'efficacité, il n'existe aucune étude portant sur la réduction des gaz à effet de serre qui ne place pas l'efficacité énergétique en tête de liste.
Premièrement, l'efficacité énergétique est un moyen rapide. Les échéanciers assortis à ces cibles semblent équivoques. Pour protéger le climat, on doit avant tout s'attaquer aux réductions des émissions. C'est ce que les scientifiques montrent avec toutes leurs courbes — votre groupe de témoins a dû vous en présenter beaucoup la semaine dernière. Nous devons commencer par consacrer beaucoup d'efforts aux réductions, et les réductions les plus rapides, économiques et durables viendront d'une diminution de la demande globale en énergie.
On peut affirmer sans risquer de se tromper que dans notre économie canadienne, nous pourrions consommer 40 p. 100 moins d'énergie pour faire exactement ce que nous faisons maintenant. Mais dans les faits, nous devrions agir autrement, et consommer moins. Il faudrait recourir davantage aux transports en commun qu'aux automobiles. On atteindrait alors cette réduction additionnelle de 40 p. 100 de la demande d'énergie. Ainsi, au chapitre du logement, des transports, de l'agriculture et des opérations forestières — la scierie, pas les fertilisants — nous pourrions réaliser sans regrets des gains considérables. Nous en sommes là. Nous gaspillons de l'énergie, et si nous n'agissons pas, nous serons désavantagés à mesure que les prix de l'énergie augmenteront. Donc, il existe un fort potentiel.
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Dans certains domaines, nous savons que nous pourrions appliquer une taxe ou un prix rapidement, comme dans le cas des carburants. L'infrastructure pour la collecte des taxes sur le carburant est facile à utiliser. On aurait à peine à recruter davantage de personnel pour percevoir et gérer cet argent.
La table ronde nationale passe à la partie suivante de son analyse — l'examen de l'établissement des coûts. Je crois que cela nécessite une bonne part de création.
Il est clair que si l'on applique une norme d'efficacité énergétique, le public utilisera simplement la technologie concernée. Mais il faut concevoir une manière d'aller dans le sens inverse. Si on laisse les gens décider s'ils utiliseront plus ou moins de mazout de chauffage que ce dont ils ont besoin, le prix aura une influence.
Donc, le mot « taxe » est inapproprié, dans un sens, mais au bout du compte, c'est ce que c'est. Il ne s'agit pas tant d'établir s'il faut taxer que de déterminer comment. On doit s'assurer de réserver un traitement équitable aux gens qui n'ont pas les moyens d'assumer des coûts supplémentaires. Mais c'est évident: ils consommeront moins s'ils paient davantage, et consommeront plus s'ils n'ont rien à payer. Si nous ne transmettons pas ce message important dans l'économie, nous aurons de réels problèmes. Je suis donc en faveur d'une certaine forme de prix, qu'il s'agisse d'une taxe, d'une note de gaz ou d'autre chose.
On a fait de bonnes analyses de la question aux États-Unis et dans certaines parties du Canada, en examinant quel montant supplémentaire on se retrouve réellement à payer si ce prix additionnel est exigé. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais sachez que la Commission de l'énergie de l'Ontario et le mécanisme de partage des économies sont des moyens qui passent par les services publics, et les consommateurs peuvent payer plus cher tout en économisant sur le plan du carburant grâce à une utilisation moindre. Il y a donc des façons de le faire, mais cela nécessite une bonne dose de création.
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Bonjour. Je vous remercie d'être ici. Compte tenu du fait que je n'ai que cinq minutes, je vais vous demander, si possible, de me répondre par oui ou par non.
Dans mon comté se trouve l'Association minière du Canada. Comme on le sait, l'aluminium sera sans doute un des métaux les plus utilisés, en raison de sa légèreté. On sait qu'au Canada, lorsque l'on produit une tonne d'aluminium, on produit 4 tonnes de CO2. En Chine, la même tonne d'aluminium produit 7 tonnes de CO2.
Vous nous parlez d'une taxe sur le carbone. Par conséquent, si nous appliquons un prix de 30 $ la tonne, cela veut dire quatre fois 30 $. Vous n'avez pas eu le temps de parler d'un peu plus, mais ce sera peut-être un plus. Nous ajoutons un coût de 120 $ à la tonne d'aluminium canadien. Or, on sait que le marché fera en sorte que les acheteurs se procureront l'aluminium en Chine plutôt qu'au Canada.
Jugez-vous que c'est meilleur pour l'environnement d'acheter une tonne d'aluminium en Chine, qui génère sept tonnes de CO2, plutôt que de l'acheter au Canada, où elle en génère quatre tonnes?
Monsieur Marshall.
La semaine dernière, nous avons reçu des chercheurs du GIEC, dont M. Stone. Lui et moi avons eu une conversation intéressante.
Je l'ai interrogé sur l'objectif de 25 à 40 p. 100 d'ici 2020 et celui de 80 à 95 p. 100. Je lui ai justement demandé si c'était les décideurs politiques qui avaient pris cette décision, les bureaucrates ou les scientifiques. Il a répondu que c'était les scientifiques.
Dans son exposé, il n'a présenté aucun objectif pour les pays en développement. Je lui ai demandé si c'était parce que ce n'était pas scientifiquement quantifiable, et il m'a répondu que non. Je lui ai demandé si c'était les scientifiques du GIEC qui avaient décidé de ne pas les quantifier, et il m'a répondu que oui.
Je lui ai ensuite demandé si cela laissait supposer un biais qui ne serait pas nécessairement scientifique de la part des chercheurs à l'égard des objectifs. Il a commencé par éviter la question, puis il a fini par acquiescer.
Cela m'inquiète. Est-ce que les scientifiques s'aventurent au-delà de l'arène scientifique, dans la sphère des décideurs politiques? Si nous envisageons des objectifs inspirés de ceux établis par les scientifiques du GIEC, c'est une question à prendre en considération, de même que celle de savoir si la Chine, l'Inde, la Corée du Sud et les autres ont eux aussi des objectifs absolus. C'est la grande question politique. La décision de ne pas faire de modélisation en ce sens... Je suppose qu'à elles seules, les données scientifiques justifieraient une certaine modélisation, compte tenu du fait que les émissions s'accumulent toutes dans l'atmosphère.
Seriez-vous d'accord pour dire que les scientifiques de même que les décideurs politiques doivent se poser la question?
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Merci, monsieur Harvey.
Je tiens à remercier tous nos invités d’être venus aujourd’hui. Je sais que tout comme moi, vous suivez ce dossier depuis plusieurs années, et je peux vous dire que nos discussions ont fait beaucoup de chemin. Quand je parlais de capture et de séquestration de carbone en 2001, la plupart des gens n’y croyaient pas vraiment, mais aujourd’hui, tout le monde ici envisage cette solution. Dans ma circonscription, Nova et Dow capturent toutes leurs émissions de CO2 et les séquestrent depuis 10 ans. Il est donc faux de dire que cela ne se fait pas. Bien sûr, Dubaï, par exemple, le fait, mais aussi le Canada, et évidemment Norway.
Ce qui me dérange, c’est lorsqu’on dit que l’Union européenne fait toujours bien les choses. L’Allemagne a mandaté quatre centrales au charbon qui ne procèdent ni à la capture ni à la séquestration du carbone, et je trouve très préoccupant de les entendre dire une chose et de les voir faire le contraire. Il faudrait cesser de les placer sur un piédestal, parce qu’ils ont leurs problèmes eux aussi. Comment amener la Chine, avec son grand nombre de centrales au charbon, à s’y mettre elle aussi, plutôt que de tout réaménager et occasionner des coûts importants? Je pense que ce sont les mesures que nous devons prendre vis-à-vis de ces pays.
Enfin, comme je suis le seul Albertain ici, je dois en quelque sorte défendre cette idée. En Alberta, 13 p. 100 de l’électricité est produite par des énergies renouvelables, ce qui représente le plus haut pourcentage par habitant au Canada. Tout juste aujourd’hui, on a fait une annonce concernant les petits producteurs. On encourage les gens à produire leur propre électricité à partir de leur toit et de leurs éoliennes en leur accordant des subventions.
Je m’en réjouis, car à l’instant même où je vous parle, je fais installer 28 panneaux solaires sur mon toit. C’est un avenir extrêmement prometteur.
Je vous remercie de votre présence. Je pense que vous nous avez tous éclairés.
Merci aussi à tous les députés. À mon avis, c'était une excellente séance.
La séance est levée.