:
Monsieur le président, mesdames et messieurs,
[Français]
bon après-midi. J'ai le grand plaisir d'être ici au nom du
[Traduction]
Conseil canadien des chefs d'entreprise.
Monsieur le président, je présenterai une brève allocution préliminaire, je me limiterai à sept minutes, puis mon collègue, John Dillon, et moi serons heureux de répondre à vos questions.
À titre de représentants du Conseil canadien des chefs d'entreprise, nous sommes très heureux d'aborder la question de la politique environnementale, une question à laquelle mon organisation et mes homologues PDG accordent la plus grande priorité.
J'ai examiné le projet de loi qui a été présenté par le chef du Nouveau Parti démocratique du Canada, M. Jack Layton, et bien que les sentiments exprimés dans le projet de loi soient nobles, je crains que l'approche de M. Layton nous éloigne de la tâche réelle à accomplir.
Le projet de loi mettrait en place un processus en vue de légiférer une série d'objectifs en ce qui concerne les gaz à effet de serre de 2015 à 2050, mais malheureusement, il ne nous donne aucune idée quant à la façon dont ces objectifs doivent être atteints. Il serait réconfortant de penser qu'une simple loi du gouvernement pourrait nous permettre d'atteindre les objectifs voulus, mais si les dernières années nous ont appris quelque chose, c'est que l'établissement d'objectifs ambitieux ne veut rien dire sans la volonté d'agir de la part de tous les segments de la société et d'un consensus entre les intervenants sur ce qu'il faut faire.
Or, il ne fait aucun doute qu'il faudra beaucoup de temps et d'efforts pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre et qu'il n'y a pas de solution miracle, qu'il n'y a pas non plus d'autres solutions que d'adopter des politiques pratiques, de faire une bonne analyse et d'avoir un engagement réel de la part des entreprises, des gouvernements, des collectivités et des Canadiens pour ce qui est des changements que nous sommes réellement prêts à effectuer. Nous devrions être réalistes face à ce qu'il faut faire, mais il faut par ailleurs être ambitieux et créatifs lorsque nous adoptons des politiques car elles doivent réellement peser dans la balance.
La dernière initiative de mon conseil pour s'attaquer au problème du changement climatique a été la création l'an dernier de notre groupe de travail sur le leadership environnemental. Je copréside ce groupe de travail avec Richard Evans, le président- directeur général de Rio Tinto Alcan, et Rick George, le directeur général de Suncor Energy. Le groupe de travail, qui réunit 33 chefs d'entreprise de partout au Canada et qui représente une large gamme d'industries de pointe, a réalisé un consensus sans précédent parmi les chefs d'entreprise du Canada.
En octobre de l'année dernière, nous avons publié ce que nous appelons un énoncé de politique dans lequel nous avons mis en évidence cinq éléments essentiels d'une stratégie nationale ambitieuse et complète, d'un plan à long terme durable, efficace, qui, à notre avis, non seulement réussira à réduire les émissions de gaz à effet de serre du Canada, mais qui permettra de contribuer de façon importante à un plan mondial. Ce document s'intitule Une croissance écologique : faire du Canada une superpuissance en environnement, et j'en ai apporté des exemplaires à l'intention de tous les membres du comité dans les deux langues officielles.
J'ai été heureux de constater qu'un certain nombre de nos principes se retrouvent dans le rapport que la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie a publié le mois dernier et qui contient ses recommandations en vue de l'élaboration d'un plan en matière de changements climatiques pour le Canada.
Tout d'abord, ce dont le Canada a besoin, c'est d'un plan global pancanadien plus homogène sur le changement climatique et la pollution atmosphérique, un plan qui permette de profiter au maximum de cette occasion unique que nous avons, en tant que Canadiens, d'encourager une croissance économique durable et un rendement environnemental supérieur.
Je voudrais féliciter le gouvernement du Canada du leadership dont il a fait preuve en établissant des objectifs de réduction de gaz à effet de serre assez ambitieux pour l'industrie canadienne, tout en reconnaissant la nécessité d'encourager la croissance économique et l'amélioration de la technologie.
En outre, un certain nombre de provinces ont proposé des idées novatrices quant à la façon de s'attaquer à ce problème complexe, mais nous manquons cependant de convergence et de cohésion suffisantes autour d'une approche pancanadienne faisant intervenir tous les partis au Parlement et tous les paliers de gouvernement — fédéral, provincial, territorial et municipal. Nous devons fixer à l'industrie une série d'objectifs et d'échéanciers et à notre avis, une plus grande clarté en matière de responsabilité et de responsabilisation, si nous voulons utiliser les fonds publics et les fonds privés de la façon la plus efficace possible.
Un tel plan doit s'appliquer à tous, et ici je tiens à souligner le mot « tous » : les grandes et petites entreprises, les consommateurs, les agriculteurs, les propriétaires d'immeubles et les institutions publiques qui doivent tous faire leur part si l'on veut que le Canada atteigne ses objectifs ambitieux en matière de réductions des gaz à effet de serre.
Un autre élément clé de notre proposition est de reconnaître le rôle absolument capital de la technologie. Il est absolument illusoire de songer à réduire de façon considérable les émissions de gaz à effet de serre sans des investissements massifs dans les nouvelles technologies. Les chefs d'entreprise au sein du conseil estiment que c'est là une occasion sans pareille, étant donné que le Canada a les ressources naturelles et les compétences techniques et financières pour être un chef de file dans le domaine des technologies futures comme le charbon écologique, le captage et le stockage du carbone, les biocarburants, le nucléaire, l'hydroélectricité, l'énergie éolienne ainsi que les autres sources d'énergie de rechange.
Un troisième élément figurant dans notre mémoire reconnaît l'importance de cibles pour donner de l'élan au progrès en matière environnementale. Nous appuyons l'objectif final qui est de réaliser une réduction substantielle et absolue des émissions de gaz à effet de serre, au Canada comme à l'échelle mondiale. Par ailleurs, il importe que toute cible fixée pour l'industrie canadienne reconnaisse les réalités de la concurrence et soit fixée dans le cadre d'une politique d'ensemble qui permette aux entreprises rentables d'accroître leurs investissements dans les nouvelles technologies.
Quatrièmement, il est impératif de veiller à ce qu'à l'échelle mondiale, il existe un plan efficace et à long terme pour mobiliser les principaux pays émetteurs à faire davantage pour juguler l'augmentation des émissions à l'échelle mondiale.
Je crois que le Canada peut être un modèle aux yeux des autres pays en démontrant la façon d'élaborer une politique publique pour consolider le rendement économique et environnemental. Cela m'amène à un des éléments les plus cruciaux de notre mémoire, notre déclaration d'orientation, et à cet égard, je constate que nous abondons dans le sens du récent rapport de la table ronde nationale.
Je pense qu'il est temps d'instaurer des mécanismes pour l'établissement d'un prix adéquat pour le carbone. Je rappelle aux membres du comité que mon organisation a dit publiquement qu'elle adhérait à la notion d'un prix fixé pour le carbone et ce dès 1990. Un prix fixé adéquatement encourage les entreprises et les consommateurs à modifier leur comportement et cela peut passer par des échanges d'émissions, une taxe environnementale ou une combinaison des deux.
Les entreprises acceptent qu'il y ait un prix à payer pour nos émissions de gaz à effet de serre et nous l'avons dit il y a fort longtemps. Mais il faut que le mécanisme qui fixe le prix soit pensé judicieusement afin que nous puissions atteindre nos objectifs écologiques et protéger l'avantage concurrentiel du Canada. L'échange d'émissions et la taxe environnementale ont dans les deux cas des avantages et des inconvénients.
Les systèmes de quotas et d'échange de crédits ont l'avantage d'imposer une limite définie aux émissions mais l'expérience nous apprend, notamment en Europe, qu'il peut en résulter une instabilité considérable du prix et susciter des questions épineuses quant à la répartition équitable et aux droits d'émission.
Une taxe environnementale offre l'avantage d'un prix fixe et peut être plus facile à concevoir et à appliquer. Cette taxe à elle seule, toutefois, ne garantit pas une quantité fixe de réductions des émissions. Une telle taxe doit se garder d'établir une discrimination entre secteur ou région et elle ne doit être perçue, à notre avis que dans le cadre d'une réforme fiscale plus vaste qui soit neutre sur le plan des recettes et qui vise à stimuler le rendement environnemental et économique de notre pays.
Le supplément de recettes tirées de cette taxe pourrait correspondre à des réductions de l'impôt des sociétés et des particuliers pour que le Canada puisse continuer à attirer des capitaux, de l'innovation et les cerveaux nécessaires à l'évolution technologique qui est cruciale pour s'attaquer au changement climatique.
Les gouvernements devront revoir également leurs priorités en matière de dépenses. Une stratégie pour le changement climatique exigera de nouvelles dépenses publiques considérables dans le secteur du transport en commun, de l'infrastructure énergétique verte et du développement de nouvelles technologies. Il faudra que les gouvernements changent fondamentalement leur façon de dépenser, non seulement leur façon d'imposer. Le changement climatique ne doit pas devenir un simple prétexte permettant aux gouvernements d'imposer et de dépenser davantage.
Monsieur le président, si on assortit le carbone d'un prix, cela imposera des obligations réelles et potentiellement très coûteuses à chacun. Il y a des moyens de concevoir nos politiques de telle sorte que les régions, les secteurs et les particuliers plus vulnérables ne soient pas affublés de fardeaux inéquitables mais nous ne devrions pas prétendre que le coût est négligeable ou que ces politiques doivent viser uniquement la réduction des émissions dans l'industrie canadienne.
Je vais maintenant conclure. Il faut reconnaître que nous parlons de cette question depuis 20 ans et qu'il est grand temps de s'atteler à la tâche. Les entreprises ont déjà fait énormément jusqu'à présent et sont prêtes à subir des changements fondamentaux; elles sont prêtes à engager les nouveaux investissements considérables qui déboucheront sur une économie solide et un environnement assaini. Il faut un consensus véritable à l'échelle du Canada sur les éléments clés de la politique et que chacun, y compris tous les citoyens canadiens, travaillent dans le même sens.
Mesdames et messieurs, membres du comité, les chefs d'entreprise du Canada ont d'énormes ambitions à cet égard. Permettez-moi de répéter aujourd'hui que le Canada dispose déjà des ressources naturelles, techniques, financières et professionnelles nécessaires pour aspirer de façon justifiée au statut de superpuissance environnementale. J'estime que les parlementaires ont un rôle essentiel à jouer pour ce qui est d'orienter de pied ferme le Canada dans cette direction.
Je vous remercie de votre temps et de votre intérêt. M. Dillon et moi-même sommes prêts à répondre à toutes vos questions.
[Français]
Merci infiniment.
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Mesdames et messieurs, bonjour.
Merci de me donner l'occasion de témoigner devant votre comité dans le cadre de votre examen du projet de loi .
L'Association canadienne du gaz représente les distributeurs de gaz naturel de tout le pays, qui fournissent du gaz naturel à près de 6 millions de clients — des particuliers, des entreprises et des institutions.
Mes remarques porteront sur trois sujets. Je vais vous donner un bref aperçu du rôle que nous jouons dans l'économie, je ferai des observations sur le projet de loi et je vais conclure en parlant des possibilités qui s'offrent de réaliser des progrès tout en apportant des réductions significatives, réelles et quantifiables de nos émissions de gaz à effet de serre.
Pour ce qui est de l'importance du gaz naturel dans l'économie, même si l'on ne parle à peu près jamais du gaz naturel dans les discours sur les politiques publiques, celui-ci est un élément important de l'économie. Comme vous pouvez le voir dans les chiffres que vous avez sous les yeux, le gaz naturel représente 26 p. 100 de l'énergie consommée au Canada et une part plus importante encore lorsqu'on tient compte du secteur résidentiel, pour le chauffage, et du secteur commercial.
C'est intéressant. Dans le cas du gaz naturel comme dans le cas de tout autre carburant fossile, il faut voir d'où viennent nos émissions. La livraison en aval, le transport et la distribution ne représentent que le quart des émissions de notre secteur; les trois quarts qui restent se produisent aux points d'utilisation, c'est-à-dire les six millions de foyers et d'entreprises avec qui nous faisons affaire. Notre part d'émissions est en fait relativement insignifiante,s'élevant à moins de 1 p. 100.
Quelle est la position de notre industrie? Nous avons à coeur de faire partie de la solution et d'aider le Canada à s'orienter vers un avenir moins dépendant du carbone. Nous avons pris des mesures pour réduire nos propres émissions. Nos chiffres sont du domaine public. Nous avons réduit nos propres émissions et nous avons pris une part active aux discussions menées initialement avec Ressources naturelles Canada, puis avec Environnement Canada, pour élaborer un cadre de réglementation à l'intention des grands émetteurs industriels. Nous estimons que ce cadre est nécessaire. Cependant, nous croyons que si l'on ne tient pas compte de l'autre moitié de l'économie, nous ne serons pas en mesure de respecter nos obligations et de réaliser nos aspirations de réduire notre dépendance au carbone.
Quelles mesures avons-nous prises auprès de notre clientèle? En plus de celles que nous avons prises dans nos propres opérations, nous avons collaboré avec nos clients en vue d'accroître la conservation de l'énergie et de résoudre divers problèmes liés à la demande. Nous avons constaté des progrès, puisque l'intensité et l'utilisation moyenne du gaz naturel par client ont diminué depuis une dizaine d'années.
D'après ma propre estimation, le moment est venu d'intensifier nos efforts. Depuis 20 à 30 ans, depuis les années 1970, nous avons mis l'accent sur l'amélioration d'éléments discrets, c'est-à-dire des normes de haut rendement énergétique pour des appareils ménagers discrets, en plus de nous attaquer au problème des bâtiments. À notre avis, le seul moyen de vraiment réduire les émissions de gaz carbonique à long terme est d'avoir une stratégie intégrée de gestion de la demande énergétique dans nos collectivités.
J'ai des observations qui visent plus précisément le projet de loi , puis je reviendrai à la question des collectivités, à ce qui manque actuellement à notre perspective actuelle et aux mesures que vous pourriez examiner, mesdames et messieurs.
En ce qui concerne le projet de loi , nous convenons de la nécessité d'un leadership fédéral. C'est une intention louable.Il nous faut des signes par le gouvernement fédéral pour montrer que nous voulons vraiment réduire le bilan carbone de notre économie. Nous souhaitons que ce dossier transcende les discours partisans sur le sérieux avec lequel le gouvernement s'attaque au problème — il vaut mieux regrouper nos énergies plutôt que de travailler de façon isolée.
Cependant, je ne crois pas que le projet de loi permette de réaliser l'intention exprimée. Je fournirai à cela deux raisons et je ferai des observations générales.
À notre avis, la loi n'est pas l'endroit où l'on devrait trouver un tel degré de détails. Plus on trouve dans une loi des détails comme ceux que l'on trouve dans le projet de loi , moins stable est l'assise des mesures à long terme. En outre, nous nous demandons à la lecture du projet de loi si l'on fera usage du cadre et des pouvoirs qui existent déjà et, s'ils existent déjà, pourquoi est-il nécessaire d'adopter cette nouvelle mesure législative?
Même si le projet de loi ne l'énonce pas expressément, il semble mettre l'accent uniquement sur les grandes entreprises industrielles. Comme je l'ai déjà dit, nous croyons que ces entreprises ont besoin d'un cadre, mais il faut également que le signal soit lancé à toute l'économie et que l'on tienne compte de l'autre moitié.
En ce qui concerne les points particuliers du projet de loi, les cibles à court terme sont problématiques. Les diverses analyses faites récemment par les provinces et incluses dans le rapport de la Table ronde nationale laissent entendre que la cible d'une réduction de 25 p. 100 d'ici 2020 n'est pas réalisable, étant donné la situation d'aujourd'hui. Je pense que de réexaminer les conversations que nous avons depuis 10 ans et essayer de déterminer ce qui s'est passé il y a 17 ans ne nous permet pas de nous concentrer sur ce que nous pouvons faire à l'avenir.
Je n'aime pas me répéter, mais je vais le faire, nous croyons que les grands émetteurs finaux ont besoin d'un cadre réglementaire, mais nous croyons également qu'il faut se concentrer sur les autres 50 p. 100. L'attention portée à ces autres 50 p. 100 a de l'importance. Depuis 15 ans, les discours dans ce pays n'ont porté que sur les grands émetteurs finaux. Je ne suis pas encouragée par le niveau de sophistication concernant les autres 50 p. 100. On a tendance à alterner entre la pensée magique qui nous donnera les résultats voulus aux besoins et les mesures draconiennes et un mode de vie réglementé. Je ne pense pas que ces options soient possibles ou souhaitables. Nous disposons de suffisamment d'exemples et de preuves pour savoir que c'est une approche intégrée des systèmes au niveau des collectivités qu'il nous faut.
Nous devons considérer notre système d'énergie comme une partie intégrante de la situation environnementale, et non pas comme un problème. Le secteur de l'énergie en amont répond aux demandes en énergie des collectivités et des entreprises. Si nous ne nous concentrons pas sur la demande, nous n'irons pas loin parce que la demande, comme on a pu le voir au cours des 20 dernières années, continuera à augmenter. Envisageons l'énergie et l'environnement comme un tout intégré; considérons l'espace collectif.
Les gouvernements municipaux ont fait des expériences très intéressantes à divers endroits au Canada. La Ville de London a préparé un modèle d'un plan intégré et l'a comparé aux activités classiques. Selon les estimations, les autorités estiment pouvoir obtenir des réductions de 55 p. 100 de la consommation d'énergie dans la collectivité. De plus, elles utilisent des produits renouvelables sur place à un prix concurrentiel, profitent des infrastructures existantes en énergie, le gaz naturel et l'électricité et utilisent aussi les produits renouvelables sur place.On tient compte des déchets dans l'eau et en utilisent l'énergie. Ces sont des gens innovateurs, et ils proposent des solutions intéressantes. Pourquoi ne sont-elles pas appliquées?
Il n'y a pas de prix rattaché au carbone dans l'économie, et nous avons besoin d'un prix constant dans toute l'économie, qui se rapproche du point de consommation pour que les décideurs voient les conséquences de leurs choix et de leurs décisions.
Nous sommes très encouragés par le rapport de la Table ronde nationale qui se concentre récemment sur les autres 50 p. 100 de l'économie et nous appuierions qu'il y a encore plus d'attention portée à ce secteur. C'est un secteur intéressant. Il n'est pas clairement délimité. Il comprend un vaste nombre d'acteurs, et il faudra que les trois paliers de gouvernement travaillent en étroite collaboration, mais c'est faisable. Nous en voyons des exemples un peu partout au Canada, et nous aimerions qu'il y ait un coût rattaché qui nous permettrait de reproduire ces exemples et d'aller de l'avant.
Pour conclure, je réitérerai que nous appuyons la nécessité d'une vision et de cible articulées pour réduire l'empreinte écologique de la croissance économique, sinon les deux se détérioreront. D'après nous, il faut plus qu'un cadre réglementaire pour les grandes industries afin d'obtenir des actions concrètes. Nous avons besoin d'un prix rattaché au carbone dans toute l'économie. Les initiatives politiques devraient refléter le besoin d'une approche intégrée pour tous nos systèmes : l'eau, les déchets, l'énergie, l'utilisation des terres. Le projet de loi , bien que louable, est loin d'atteindre cet objectif.
Merci.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, mesdames et messieurs les invités, merci de me donner l'occasion de vous parler des conséquences économiques du projet de loi .
Je m'appelle Dave Sawyer. Je suis économiste, basé à Ottawa, et je m'occupe de questions de politique climatique.
Je ne suis pas ici pour appuyer ou pour contester le projet de loi , mais plutôt pour discuter de ses conséquences économiques.
Quelles sont les conséquences économiques du projet de loi? Cela ne vous étonnera pas de m'entendre dire que tout dépend. Plus particulièrement, cela dépend de la façon dont il est conçu et appliqué, mais étant donné que le projet de loi ne donne pas de précisions là-dessus, et étant donné que vous m'avez demandé de venir vous entretenir des éventuelles conséquences, je dois essentiellement définir un train de mesures me permettant de porter des jugements et de vous fournir des renseignements. C'est ce que je m'apprête à faire.
Les éléments clés du train de mesures que j'ai utilisés et qui, à mon avis, sont nécessaires pour évaluer toute forme de réduction radicale des GES comme celui-ci en l'occurrence — à savoir, de bons principes pour essentiellement élaborer une politique efficace d'atténuation des GES — sont les suivants, notamment.
Tout d'abord, et ce n'est pas étonnant, pour réaliser des réductions substantielles en 2020 tout en réduisant au minimum les coûts, il nous faut fixer un prix pour le carbone dans tous les secteurs de l'économie. Cela signifie, comme d'autres l'ont dit, des quotas et l'échange de crédits, une taxe sur le carbone ou une combinaison des deux. Toutefois, étant donné que les quotas et l'échange de crédits constituent la ligne de pensée dominante des émetteurs finaux et que cette solution est difficile à mettre en oeuvre pour les petits émetteurs comme vous et moi — nos maisons et nos voitures — l'approche de choix et peut-être la plus pratique/ est de recourir à une taxe sur le carbone sans incidence sur les recettes pour les émissions restantes. Je vous le concède, une taxe sur le carbone n'est pas très judicieuse sur le plan politique mais les autres solutions sont plus coûteuses, et à la vérité, les Canadiens détestent sans doute davantage l'impôt sur le revenu que d'éventuelles taxes sur le carbone.
Deuxièmement, une série de mesures efficaces offrirait des subventions aux technologies favorisant les faibles émissions comme le captage et le stockage du carbone et les sources renouvelables, l'électricité renouvelable ou le carburant renouvelable. Il faudrait également adopter des règlements ciblés pour les édifices, le transport et les autres émissions plus difficiles à cerner.
Troisièmement, il y aurait d'importants mouvements financiers avec l'établissement du prix du carbone, et nous devons décider comment cela sera fait ou du moins je dois en tenir compte dans mon évaluation afin de mieux vous renseigner. Une partie des recettes tirées des quotas et de l'échange des crédits est transférée au secteur industriel grâce aux marchés commerciaux mais une autre partie pourrait bénéficier à la population en général grâce à des mises aux enchères, car il y a une valeur attribuable aux permis... une valeur appréciable, en fait, comme le système européen en fait la preuve. Une répercussion de la taxe sur le carbone pourrait dès lors entraîner une réduction de l'impôt sur le revenu pour les résidences ou être ciblée pour compenser les effets pervers sur la concurrence dans les secteurs industriels touchés de façon disproportionnée, si bien qu'il y aurait des retombées des recettes sur le carbone capables d'atténuer d'éventuelles pertes de revenus.
Pour le moment, voyons les mesures à prendre à l'échelle nationale uniquement, mais plus tard, j'y reviendrai.
Je vais également mettre l'accent sur l'année 2020 car, si nous ne pouvons pas atteindre les cibles pour 2020 fixées dans le projet de loi — ou encore dans le document Prendre le virage — nous ne pourrons pas atteindre les cibles à long terme fixées pour le milieu du siècle, du moins nous ne le pourrons pas sans subir des perturbations économiques considérables. Là encore, la table ronde a fait grand état de cela, mais la technologie du captage est au coeur de la solution lorsqu'on fait face aux gros émetteurs qui continueront à polluer si nous n'agissons pas dans les plus brefs délais.
Donc, avec cette série de mesures en place — et je vous en ai donné un aperçu — il me faut maintenant préciser ce que l'économie et les émissions de GES auront comme aspect en 2020. Avec une économie qui croîtra d'environ 2 p. 100 annuellement d'ici là, le PIB canadien augmentera pour passer de 1,3 billion de dollars à 1,7 ou 1,8 billion de dollars. Il est vrai que c'est un chiffre peu fiable mais l'économie croît à un rythme d'environ 2 p. 100 à 2,5 p. 100. Cette croissance va faire augmenter les émissions d'environ 15 p. 100 par rapport aux niveaux actuels c'est-à-dire qu'elles passeront de 750 mégatonnes actuellement à 850 à 900 mégatonnes. Ressources naturelles Canada publie des estimations à cet égard. Cela signifie que pour atteindre les cibles fixées par le projet de loi , c'est-à-dire un recul de 25 p. 100 par rapport à 1990, les émissions prévues vont devoir chuter d'environ 50 p. 100 en 2020.
Cela se compare aux 34 p. 100 de baisse dont il est question dans le document Prendre le virage. Nous pouvons donc essentiellement estimer le genre de réductions que le Canada envisage en 2020 : de 34 p. 100 à 50 p. 100 inférieures à la situation actuelle.
Maintenant, j'en viens aux détails intéressants. Pour évaluer les conséquences économiques de cette série de mesures, je me suis servi de deux modèles utilisés couramment pour évaluer les cibles d'atténuation. Le SCMI est un système de modélisation intégrée en matière d'énergie et d'émissions dans l'économie canadienne. Les gouvernements, le secteur industriel et les ONG l'utilisent. À ce modèle SCMI est assorti un modèle appelé C-GEEM, qui est un modèle macroéconomique adapté à des questions de conséquence macroéconomique en matière de finances publiques.
Qui nous révèlent ces modèles sur le coût que représentent les diverses cibles? Essentiellement, si un prix du carbone était établi dans l'ensemble de l'économie, avec des subventions pour les énergies renouvelables, avec une réglementation à l'avenant et une répercussion fiscale judicieuse, l'application des modèles aboutit à un prix du carbone de l'ordre de 100 $ la tonne en 2020 pour atteindre les cibles de Prendre le virage et de 200 $ la tonne pour atteindre celles du projet de loi . Ce sont des chiffres un peu flous mais ils donnent une idée, un ordre de grandeur.
Maintenant, il faut se demander ce que ces chiffres représentent. L'incidence économique de ces prix du carbone sur le PIB, sur la croissance, pourrait correspondre à environ 0,6 p. 100 du PIB de 2020 dans le cas de Prendre le virage et de 1,2 p. 100 dans le cas du projet de loi . Autrement dit, la réduction du PIB serait inférieure au taux de croissance prévu. Il ne s'agit donc pas d'un bouleversement de l'économie, même si les hypothèses de base en l'occurence concernent des mesures précoces, faire démarrer les choses et une politique musclée. Il faut également savoir qu'il y a un niveau considérable d'incertitude dans ces chiffres, comme dans l'application de tout modèle, mais cela vous donne une idée de ce qui nous attend.
Ces conclusions présument l'adoption de politiques efficaces et, de fait, les modèles montrent que des cibles plus basses assorties d'une piètre politique pourraient coûter plus cher que des cibles plus hautes accompagnées d'un prix efficace du carbone. On pourrait parler longuement de ces chiffres mais en deux mots, la chose la plus importante est de savoir que l'élaboration de la politique est beaucoup plus importante que l'établissement des cibles elles-mêmes.
Ainsi, la série de mesures que je viens de décrire va faire grimper les prix, avec des augmentations d'environ 25 p. 100 pour l'électricité, 15 p. 100 pour les produits pétroliers et environ 10 p. 100 pour le gaz naturel. Encore une fois, il s'agit d'un ordre de grandeur et de chiffres qu'il faut garder à l'esprit, quant aux conséquences qu'ils représentent.
L'incidence sur la production pétrolière n'est pas très claire étant donné la variable du captage et stockage du carbone. Si le captage et le stockage du carbone sont faciles d'accès, les conséquences coûteuses pour ce secteur seront bien moindres. Si au contraire, ce n'est pas le cas, il y aura des conséquences plus fâcheuses. Et si encore, une piètre conception de la politique modifierait entièrement les conséquences coûteuses.
Ce tableau national dissimule les variations sectorielles et régionales. Je ne peux pas me prononcer sur les variations régionales mais je peux dire quelques mots des conséquences sectorielles. L'incidence sur le PIB national peut sembler relativement faible mais la production sectorielle des secteurs énergivores chutera, plus particulièrement les secteurs comme le raffinage du pétrole et celui du charbon. L'ampleur de cette chute est tributaire de la conjoncture dans le reste du monde. Si le Canada agit plus ou moins de concert avec l'OCDE, les conséquences commerciales ne seront pas aussi catastrophiques, car la baisse des exportations s'accompagnera d'une baisse des importations étant donné que le prix des produits étrangers augmentera.
Quoi qu'il en soit, pour certains secteurs de l'économie, les incidences sur la concurrence seront réelles et importantes. Par conséquent, au niveau sectoriel, la situation macroéconomique ne sera pas aussi bonne qu'elle l'est au niveau national. Ce qui ne veut toutefois pas dire que nous ne devons ni ne devrions chercher à obtenir des réductions de la part de ces secteurs — vous avez demandé des cibles précises, il faudra obtenir des réductions de tous les secteurs — mais il serait peut-être préférable de concevoir des politiques complémentaires pour donner suite aux conséquences disproportionnées au niveau du revenu; c'est-à-dire faire la distinction entre un signal prix du carbone et un effet revenu.
Quant à l'idée selon laquelle les industries manufacturières déménageront en Chine, je dirais que d'autres facteurs influent également sur cette décision commerciale et devrait probablement faire l'objet d'un examen plus approfondi.
J'aimerais maintenant aborder l'importance d'obtenir des réductions à faible coût à l'échelle internationale. Comme les réductions intérieures se situent à plus de 20 p. 100 en deçà du maintien du statu quo de 2020 — les deux cibles que j'ai mentionnées sont plus importantes que cela — les coûts d'atténuation à l'échelle nationale augmenteront de façon exponentielle. Cela signifie que compte tenu des cibles envisagées, les coûts augmentent beaucoup plus rapidement que les réductions, donc pour minimiser les conséquences économiques, il serait probablement bon d'envisager une stratégie permettant d'avoir accès à des possibilités de réductions à faible coût à l'échelle internationale, en partant du principe qu'elles sont réelles et vérifiables.
J'aimerais conclure en discutant brièvement du coût de l'inaction, passant essentiellement de la question des coûts à celle des avantages. En réfléchissant à la conception d'une politique climatique efficace, du moins selon la perspective étroite de l'économiste axée sur l'efficacité, l'économiste préférerait des réductions rentables à un niveau où les coûts et les avantages s'équilibreraient, mais l'information dont on dispose sur la portée et l'ampleur des avantages possibles des mesures envisagées est trop incertaine pour que l'on puisse recommander des cibles qui permettent d'équilibrer les coûts et les avantages. Donc nous nous trouvons dans une situation qui est loin d'être idéale.
Par conséquent, notre débat national sur le climat continue de se fonder uniquement sur une compréhension conceptuelle des avantages des réductions ou de l'adaptation, bien que nous ayons par ailleurs tout à fait conscience des coûts qui s'y rattachent. En raison de cette information asymétrique, il est probable que nous continuerons de nous interroger sur l'opportunité des mesures à prendre pour atteindre les cibles, quelle que soit leur rigueur. En fait, sans un point de vue équilibré sur ce que nous obtenons pour ce que nous dépensons, nous continuerons de débattre des cibles, de discuter des options stratégiques, de révéler les coûts qui s'y rattachent et au bout du compte de mettre en doute leur caractère abordable sur le plan économique. C'est ce que j'appelle une conception de l'économie à la Globe and Mail. On fait preuve de partialité en mettant ainsi l'accent sur les coûts et le caractère abordable, ce qui au bout du compte entraînera de piètres résultats au niveau national.
Oh, oui — en conclusion, il serait préférable de mettre davantage l'accent sur des mesures concrètes et un peu moins sur les cibles.
Je vous remercie.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
D'abord, je vous félicite pour vos mémoires. J'ai pris la peine de lire deux fois plutôt qu'une les mémoires qui nous ont été présentés, notamment celui du Conseil canadien des chefs d'entreprise, le CCCE. Depuis que je suis un parlementaire, soit depuis sept ans, je sens une certaine évolution au CCCE. Il reconnaît qu'il faut mettre un prix sur le carbone et il propose des outils, c'est-à-dire une taxation ou un marché.
Finalement, le conseil nous dit exactement — le gouvernement devrait écouter — ce que le vice-président et économiste en chef du Conference Board a dit le 31 janvier dernier : « On agit actuellement comme si les GES pouvaient être produits et émis sans qu'il en coûte quoi que ce soit »
Le milieu des affaires reconnaît donc maintenant qu'il y a un coût à l'émission de gaz à effet de serre. Il n'est pas encore capable de le chiffrer, mais il reconnaît qu'il y a un coût.
Vous nous dites, monsieur d'Aquino, à la page 8 de votre mémoire : « Lorsqu’ils changent les règles, les gouvernements doivent également veiller à récompenser et non à pénaliser les entreprises qui ont pris des mesures précoces. »
Je comprends le sens de votre mémoire, mais qu'est-ce que cela veut dire dans les faits? Lorsqu'un plan de lutte contre les changements climatiques a pour conséquence de reporter la date de référence de 1990 à 2005, croyez-vous vraiment que ce soit une récompense pour des entreprises? Je pense à l'industrie manufacturière du Québec qui a réduit de 7 p. 100, de façon absolue, ses émissions de gaz à effet de serre depuis 1990.
Ne croyez-vous pas qu'afin de ne pas pénaliser des entreprises qui ont pris des mesures précoces, il faudrait revenir à cette date de 1990? Au fond, c'est pénaliser des entreprises que de prendre en considération le niveau d'émission de 2005.
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Monsieur Bigras, ces questions sont très importantes, à notre avis. On reconnaît que le secteur manufacturier a été très touché sur le plan économique, particulièrement au Québec et en Ontario.
Si vous me le permettez, je préférerais m'exprimer dans la langue de Shakespeare plutôt que dans celle de Molière.
[Traduction]
Je voulais simplement dire qu'à notre avis, pour bâtir une superpuissance environnementale, il faut relever le défi de l'environnement et cela signifie qu'on pense non seulement à des politiques globales pancanadiennes axées sur des objectifs à long terme qui donnent aux entreprises des objectifs clairs, mais aussi que nous devons revoir de manière approfondie la fiscalité, parce que l'ampleur du changement nécessaire et qui à votre avis est déjà en marche nous empêchera de régler le problème s'il faut le faire dans le cadre fiscal actuel au Canada.
Un exemple: nous avons dit que si les gouvernements, ou le gouvernement du Canada, ou le Canada voulait adopter une taxe sur le carbone, il fallait qu'elle soit neutre. Qu'est-ce que cela signifie? Nous voulons dire par là que certains secteurs seront plus touchés que d'autres. Cela veut dire aussi que le prix du carbone s'ajoutera au coût d'exploitation des entreprises et qu'il faut refondre intelligemment la fiscalité pour en garantir au moins la neutralité.
J'ai une dernière chose à dire sur la fiscalité. L'une des raisons de notre optimisme au sujet de l'avenir du Canada comme superpuissance environnementale, c'est qu'outre les ressources, les compétences, le talent et la capacité financière d'y arriver, notre pays peut trouver de nouvelles manières d'aborder les politiques gouvernementales — et la fiscalité est au coeur de ces politiques — qui permettront aux entreprises existantes d'investir dans les nouvelles technologies. Nous ne dirons pas aux entreprises: « Je regrette, vous êtes dépassées, vous êtes finies » en éliminant des emplois et en fermant des villes, mais nous donnerons aux entreprises qui ont un bon et long dossier le temps de se retourner et les mesures incitatives qui les porteront à se réoutiller.
Cela m'amène à vous parler de l'aspect essentiel des stratégies à long terme. Beaucoup d'investissements doivent être faits en fonction d'un objectif sur 15, 20 ou 30 ans, et dans le cas des sables bitumineux, avec un horizon d'un siècle. Voilà pourquoi nous réclamons des garanties politiques. C'est la raison pour laquelle nous en avons besoin.
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C'est une question plutôt rudimentaire, mais à l'heure actuelle, le réceptacle de déchets, l'atmosphère, n'est pas traité de façon équitable. M. Stern a dit que le plus gros échec du marché de toute notre histoire était notre incapacité, étant donné la façon dont le libre-marché fonctionne à l'heure actuelle, de faire payer le coût de la pollution que nous créons pour faire croître notre économie.
Personne ne l'a réellement dit, mais j'ai l'impression qu'on aime pas les objectifs établis dans le projet de loi C-377, pourtant l'évaluation et la gestion — des mesures que nous devons utiliser — est ce que toute entreprise doit faire. Chaque fois qu'on calcule les profits trimestriels, on n'utilise pas le nombre d'agrafeuses qu'on possède; on utilise la rentabilité. Si on n'atteint pas ces objectifs, alors il faut dédommager les intéressés sinon on a un gros problème au conseil d'administration. Le gouvernement du Canada, en tant que conseil d'administration qui établit la politique, doit établir des objectifs fondés sur la quantité d'émissions que nous voulons avoir en tant que nation. Il serait stupide à notre avis de fonder un plan sur tout autre élément.
Laisser entendre que les idées que vous avez proposées sont trop ambitieuses... J'ai jeté un coup d'oeil rapide et j'ai regardé certains graphiques et ce qui se passe au Congrès américain. Là-bas, ce qu'ils font correspond tout à fait au projet de loi Lieberman-McCain, de sorte que si M. McCain doit être accusé de détruire l'économie canadienne avec son plan et ses objectifs, on pourrait peut-être alors appliquer chez-nous la même mesure, et maintenant les Républicains et les Néo-démocrates se tiennent ensemble et font les mêmes modélisations économiques, ce qui, à mon avis, n'est pas vrai.
Si le coût de la pollution n'est pas pris en compte à l'heure actuelle, il doit l'être, et le gouvernement a la responsabilité de s'assurer que ces coûts externalisés dont nous jouissons depuis un si grand nombre d'années — et je dirais que c'est le cas tout particulièrement dans le secteur énergétique — doivent être pris en compte.
J'ai une question au sujet de l'année de référence. Madame Rahbar, vous ne voulez pas que l'année 1990 soit l'année de référence. Vous avez dit que c'était revenir en arrière. Je vous dirais que le marché utilise un indice pour mesurer si le marché est à la hausse ou à la baisse. Il faut choisir un objectif dans le temps, cela est essentiel si on veut avoir une ambition et un objectif, n'est-ce pas?
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Mais certainement. Je voulais simplement répondre à une intervention de .
En ce qui concerne la crise politique évoquée par M. d'Aquino, peut-être s'agit-il pour l'essentiel d'une simple rhétorique politique — et peut-être moi-même suis-je coupable à l'occasion de faire la même chose, notamment lors de ma dernière intervention — mais je me plais à penser que si nous mettions tous l'épaule à la roue, comme vous le suggérez, nous pourrions peut-être commencer à faire des progrès dans ce dossier. À mon avis, la volonté est là dès lors qu'on traite au niveau bilatéral, par contre sitôt qu'on se trouve dans cet environnement politique, il arrive qu'il y ait d'autres objectifs qui viennent s'immiscer.
Le gouvernement a proposé un agenda très clair, parfaitement ciblé, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 p. 100 d'ici 2020.
Monsieur Sawyer, je voudrais vous interroger sur ces chiffres. Qu'est-ce que cela produira en 2020? Qu'est-ce que cela signifiera au niveau du prix de l'essence ou que sais-je encore?
C'est donc un agenda ambitieux. En matière de réglementation, les avis d'intention sont déjà sortis. Le créneau de négociation et de consultation est pratiquement complété. La partie viandeuse de ce cadre de réglementation sera rendu public très bientôt. Je suis impatient d'entendre votre analyse et votre opinion à ce sujet au fur et à mesure que la politique et la réglementation associées seront élaborées.
S'agissant maintenant du , j'ai posé à tous les groupes de témoins que nous avons entendus la même question : faudrait-il établir une estimation du coût? J'ai posé la question à lors de sa comparution, et il m'a répondu que cette estimation n'avait pas été faite et qu'il espérait que le gouvernement la fasse. Mais il a également suggéré que je pose la question à M. Matthew Bramley de Pembina, qui comparaissait en même temps que lui. M. Bramley a également affirmé avoir été consulté. En fait, le rapport de ce groupe— le rapport de la Fondation David Suzuki et de Pembina — est précisément l'assise même du projet de loi C-377.
Or donc, Matthew Bramley a répondu non, et il a également dit espérer que le gouvernement ferait une estimation de ce que coûterait l'application du projet de loi C-377. J'ai ensuite posé la question au professeur Stone qui m'a dit oui, il faudrait faire ce genre d'estimation. Chaque fois que nous avons entendu des témoins — et j'ai oublié leurs noms — tous ont dit oui, une estimation du coût doit être effectuée.
Monsieur Sawyer, vous êtes le premier que j'ai entendu évoquer un genre d'estimation du coût. Faudrait-il maintenant procéder à une estimation supplémentaire de ce que coûterait le — de manière, pourrait-on dire, à mettre un peu de chair sur les os?
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Merci, monsieur le président.
Merci à vous tous. Ce groupe de témoins est intéressant et les points de vue sont bien équilibrés.
J'ai une observation sur le plan du gouvernement intitulée Prendre le virage.
Maintenant, la question vous a été posée: « A-t-on calculé le coût du projet de loi ? » À mon tour, je poserais la question au gouvernement : « Le plan Prendre le virage a-t-il été chiffré? » D'après les observations de M. Sawyer, il est clair que la réponse est non. Le seul moyen de réaliser le plan Prendre le virage serait d'assigner aux émissions un coût de 100 $ la tonne. Or le gouvernement prévoit un coût de 15 $ la tonne.
Il est clair qu'un tel écart, un facteur de six, ne tient pas au calcul des coûts; c'est une grossière erreur. Je voulais faire cette observation.
Je pense que, pour résumer l'essentiel de votre propos, vous dites que nous avons été un peu trop lents dans notre approche. Nous n'avons pas agi de manière décidée et il y a bien des choses que nous pourrions faire. Le projet de loi n'a pas pour objet d'établir un plan complet qui va répondre à vos demandes. Il vise simplement à établir une cible ambitieuse qui nous met simplement à jour, compte tenu de la réalité scientifique, de la situation actuelle et de ce que nous devons faire au Canada et sur toute la planète.
Je vais vous poser une question. Si nous acceptons tout ce que réclame en particulier le Conseil canadien des chefs d'entreprises, ainsi que l'Association du gaz, c'est-à-dire un plan total s'appliquant à la totalité de l'économie canadienne, non pas à la moitié industrielle, mais à tout ce qui touche à l'environnement bâti, au secteur des transports et au bio-secteur, c'est-à-dire l'agriculture, les forêts, les déchets urbains —, alors sûrement ce qu'il nous faudrait, c'est un programme qui aurait l'ampleur de la mobilisation de l'économie pendant la Deuxième Guerre mondiale, et non pas un programme qui serait appliqué à loisir sur une période de 100 ans avant que l'on mette en place toutes les cibles. Nous ne savions pas cela en 1940; nous savions seulement qu'il fallait gagner la guerre. On ne savait pas quand on pourrait mettre la dernière main à l'usine de caoutchouc de Sarnia; on savait seulement qu'il fallait la construire.
Ce que je dis, en fait, c'est que nous n'avons pas une feuille de route complète. Nous connaissons la direction générale. Nous voulons gagner la guerre contre le changement climatique tout autant que nous voulions gagner la guerre la dernière fois.
N'avons-nous pas besoin d'un plan qui s'appliquerait à l'ensemble de l'économie et à tous les éléments du spectre des émissions, mais qui serait aussi beaucoup plus ambitieux, beaucoup plus urgent que tout ce que l'on nous a présenté à ce jour?
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S'agissait de l'urgence, je peux simplement vous dire en réponse à votre question que dans le pire des scénarios, il faudrait pouvoir dire qu'on sera en mesure de le faire au plus tard pour 2020, mais qu'il serait préférable d'y arriver plus tôt. Mais la réalité, c'est que cela ne sera pas le cas. Il suffit de voir la Chine qui, depuis 12 ans, affiche un taux de croissance de son PIB réel de plus de 10 p. 100, et l'Inde, qui depuis cinq ans a des taux de croissance de 7, 8 et 9 p. 100, ou encore le Brésil, le Mexique, l'Indonésie et ainsi de suite.
C'est l'une des raisons pour laquelle, je le sais, nous nous sommes tous trouvés interpellés parce que j'appellerais l'argument moral, selon lequel les pays riches se sont faits leur niche et que maintenant, pourquoi devrions-nous partir du principe que les pays en développement devraient assumer leur responsabilité?
J'ai une réponse toute différente à cette question. Tout en étant parfaitement ouvert à l'argument moral voulant que l'Occident devrait consommer moins et qu'il n'y ait plus de marge de manoeuvre au monde en développement pour qu'il puisse accélérer sa croissance, je pense qu'en réalité il y a une réponse très différente à cette question.
Je me rends très souvent en Chine. Les Chinois vont prendre des mesures draconiennes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et mettre en pratique des technologies énergétiques efficaces. Pourquoi? Pas simplement pour vous faire plaisir ou me faire plaisir ou pour pouvoir dire qu'ils ont un bon sens civique, mais simplement parce qu'ils n'ont pas le choix.
Si vous êtes déjà allé en Chine — ce qui est le cas j'imagine — vous devez savoir que 16 des 20 villes les plus polluées au monde se trouvent dans ce pays. En Chine aussi, la plus grande partie des terres sont contaminées et toxiques. La même chose pour les cours d'eau. Or, les Chinois aiment leurs enfants et leurs petits-enfants autant que nous, et c'est l'une des raisons pour lesquelles, à plusieurs égards, nous commençons déjà à constater chez eux des progrès fabuleux en matière technologique.
Par conséquent, la question de savoir si nous devrions ou non leur laisser de la place et s'ils devraient simplement faire un grand bond en avant sans autre préoccupation est une fausse question parce que tout comme nous, les Chinois veulent continuer à vivre.
Mais pour répondre à votre question, il n'y aura pas de stabilisation avant 2015 et qu'est-ce que cela signifiera? Je n'en sais rien, mais pour en revenir à quelque chose qui...