Le Conseil canadien des pêches est une association nationale comptant des membres de la Colombie-Britannique, du Manitoba, de l'Ontario, du Québec, des Maritimes, de Terre-Neuve-et-Labrador, ainsi que des régions du Nord où l'on pratique la pêche, soit le Nunavut, le Nunavik au Québec, et le Nunatsiavut au Labrador.
L'industrie de la pêche est une industrie de 5 milliards de dollars. Nous employons environ 80 000 personnes, ce qui, je suppose, est un petit nombre par rapport à ce que vous voyez dans l'industrie minière et l'industrie forestière. Notre industrie est particulièrement importante dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador. Elle est importante pour la culture et le PIB dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador, à l'Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick, et dans les régions nordiques que j'ai mentionnées. Elle est aussi importante pour les collectivités autochtones, qui participent de plus en plus aux pêches en Colombie-Britannique et dans les Maritimes.
Pour ce qui est des espèces en péril, nous souhaitons que les politiques soient modifiées ou mises à jour afin qu'elles rendent justice à l'unicité des espèces aquatiques. À la différence d'autres espèces sauvages, les espèces aquatiques font actuellement l'objet de trois lois — la Loi sur les pêches, la Loi sur les océans et la LEP —, qui visent leur protection et leur conservation. Nous souhaitons que ces trois lois présentent une plus grande convergence pour ce qui est des espèces aquatiques qui deviennent des espèces menacées ou des espèces en voie de disparition.
Au ministère des Pêches et des Océans, on déploie des efforts pour faire converger la loi concernant la pêche et la Loi sur les océans; le travail semble bien progresser et suivre un plan bien structuré. Nous souhaiterions que des travaux de ce genre soient aussi réalisés du côté de la LEP. Autrement dit, il reste encore du travail à accomplir pour arriver à harmoniser les exigences de ces trois lois qui portent sur les espèces en voie de disparition. Je dois dire qu'il semble que les rédacteurs de la LEP aient vu de leurs propres yeux ou aient reconnu que les choses se déroulaient ainsi, parce que, comme vous le remarquerez, le préambule dit bien que la LEP sera un complément de la législation existante.
Le Parlement a fourni au ministère des Pêches et des Océans une somme considérable, et lui a alloué une bonne quantité de ressources humaines, pour la gestion des pêches et la prise de mesures visant la conservation et la préservation des pêches. Grâce aux nombreuses ressources dont il dispose, le ministère est en position de prendre des décisions fondées sur la science et de protéger les espèces et leurs habitats. Le ministère possède les outils réglementaires nécessaires pour gérer les pêches, et les ressources pour vérifier la conformité avec les lois et les règlements et assurer une surveillance.
Ainsi, que voulons-nous exactement? En gros, nous voulons trois choses. Premièrement, de bonnes évaluations. Je ne sais pas si vous avez eu le loisir de lire le document que nous vous avons fourni, en français et en anglais, mais nous disons qu'il existe un écart entre les méthodes qu'utilisent le COSEPAC et le ministère des Pêches et des Océans pour déterminer l'état des stocks.
Le COSEPAC se fonde principalement sur le taux de régression sur une période donnée. C'est en gros comme cela que le comité s'y prend pour déterminer si l'état d'un stock est satisfaisant ou préoccupant, ou encore si le stock est en voie de disparition ou s'il est menacé.
À Pêches et Océans Canada, et dans le domaine des sciences halieutiques en général, on utilise une approche plus globale, soit une approche de précaution, qui s'inscrit dans une approche écosystémique. Ainsi, au lieu de simplement tenir compte du taux de régression, on examine les stocks et on se demande quelle est l'ampleur de la régression à un certain moment, en fonction, si vous le permettez, du point de référence de l'approche de précaution. Si, par exemple, la portée actuelle de la régression d'une certaine espèce se trouve à la droite de la ligne, si l'on veut, c'est habituellement parce que l'état des stocks est bon. Si elle se trouve à gauche de la ligne, c'est que l'espèce se trouve dans une zone « rouge » ou critique. Si elle est très loin de la ligne vers la gauche, c'est que le stock est en voie de disparition ou menacé.
Donc, en gros, voilà un élément. On se penche aussi sur la trajectoire récente et actuelle du stock. Si vous examinez un stock et constatez qu'il se trouve dans un état plutôt mauvais, mais que sa trajectoire récente et actuelle en est une de croissance, vous arrivez à une conclusion différente que celle que vous auriez tirée si vous aviez seulement examiné l'état actuel du stock et constaté que le stock régressait. Donc vous prenez, en quelque sorte, des décisions fondées sur le risque.
L'autre élément qu'on examine est ce qu'on appelle la productivité actuelle du stock. Par exemple, une grande quantité de poissons adultes dans un stock est un signe positif. Cela signifie que le stock se régénère et qu'il a la capacité de se régénérer. Par ailleurs, si la productivité naturelle d'un stock est basse, ce qui peut être causé par la salinité de l'eau ou la température des océans, c'est mauvais signe.
Tout ce que nous voulons dire, c'est qu'il existe une coupure: d'un côté, nous avons l'approche du COSEPAC, qui ressemble à une formule, et de l'autre côté, nous avons la seconde méthode, qui est fondée sur la réalité complexe des écosystèmes aquatiques. Pendant des années, les collectivités du domaine des pêches ont appliqué l'une de ces méthodes, soit celle de l'approche de précaution et de l'approche écosystémique. Essayer de convaincre la collectivité de plutôt utiliser une approche directe fondée sur le taux de régression est difficile, et, vraiment, à notre avis, c'est inapproprié.
C'est la première chose que nous voulons: des évaluations bien faites.
L'autre chose sur laquelle nous souhaitons que des progrès soient faits est la gouvernance. En gros, nous souhaitons que soit mise en place une sorte de procédure de transition immédiate lorsque des espèces se régénèrent et deviennent des espèces préoccupantes, et rendent inappropriés les outils de la LEP — qui prévoient une interdiction pour les espèces en voie de disparition et les espèces menacées. Ensuite, au lieu d'avoir un seul outil, cela pourrait être régi par la Loi sur les pêches, qui présente une série d'outils de gestion, comme la fermeture de la zone où se trouvent les poissons destinés à la reproduction. Tous ces types d'outils de gestion peuvent être utilisés pour gérer les pêches une fois que les espèces concernées sont considérées comme préoccupantes.
C'est tout ce que nous demandons. À mon avis, il s'agit de bonne gouvernance. Si nous avons des collectivités de pêcheurs et des collectivités autochtones qui dépendent des pêches, ces collectivités devraient pouvoir être informées lorsqu'un stock retrouve une certaine biomasse et entre dans la catégorie des espèces préoccupantes, car il peut alors être géré avec des outils autres que l'interdiction.
Voilà ce que font l'industrie minière et l'industrie forestière, lorsqu'une collectivité entière est affectée. Dans l'industrie minière, par exemple, les responsables disent aux employés que la mine ferme parce qu'il n'y a plus de minerai dans la région, c'est tout. Par ailleurs, si une mine ferme à cause de raisons économiques ou mercantiles, ou parce qu'il existe un surplus sur le marché, les responsables disent aux employés qu'ils ferment mais qu'il est très probable que la mine rouvre à un moment donné. C'est tout ce que nous demandons. Nous le demandons pour les collectivités de pêcheurs et les collectivités autochtones qui gagnent leur vie grâce aux pêches ou à la pêche commerciale, parce que l'inscription d'espèces à titre d'espèces en voie de disparition ou d'espèces menacées a beaucoup d'effets sur leurs activités.
Notre dernier point porte sur le paragraphe 83(4) de la LEP, qui présentent les exemptions s'appliquant aux activités autorisées. Il semble que cette partie soit ambiguë. Le Conseil canadien des pêches a fait partie de chacun des groupes d'étude sur les espèces en voie de disparition qui devaient rendre des comptes à la ministre Sheila Copps. C'était un paragraphe très important pour nous.
Il indique que si vous avez un plan de gestion des pêches et des espèces aquatiques inscrites qui fait partie d'un programme de rétablissement autorisé, et que si vous pêchez par hasard un poisson d'une espèce inscrite et le sortez de l'eau, et que s'il est mort et est maintenant de la nourriture, plutôt que de remettre le poisson mort ou la nourriture à l'eau, vous pouvez le ramener sur la rive et le faire entrer, en quelque sorte, dans le système alimentaire. Nous avons toujours cru que c'est ce que ce paragraphe signifiait, mais récemment, j'ai compris que beaucoup le comprenaient différemment.
Bien entendu, cette disposition doit être assortie de toutes sortes de conditions. Par exemple, le loup de mer compte actuellement parmi les espèces de la liste. Heureusement, ce poisson ne nage pas en eau profonde et nous participons à des efforts de rétablissement. Si nous le prenons dans nos filets, nous pouvons le remettre vivant dans l'eau.
Enfin, je dirais que nous trouvons la LEP inutilement normative dans certains domaines. La plupart des lois qui sont adoptées de nos jours sont axées sur les résultats, c'est à dire qu'elles partent du principe « voilà le résultat visé et faisons ce que nous pouvons pour l'atteindre ». Par exemple, quand la LEP a été adoptée, elle a imposé une période arbitraire de neuf mois, ce qui, dans notre industrie, complique les choses en raison de la nature saisonnière des activités de pêche. La situation est d'autant plus complexe en raison de la participation accrue des collectivités autochtones à l'industrie des pêches en Colombie-Britannique et à celles de la pêche maritime et de la pêche dans le Nord et, si vous voulez, parce qu'il faut maintenant consulter ces collectivités pour en arriver à une décision.
Merci beaucoup. Veuillez m'excuser d'avoir dépassé le temps alloué.
Bonjour, chers membres du comité.
Je suis Andrew de Vries de l'Association des produits forestiers du Canada. Nous représentons des sociétés membres partout au Canada, qui oeuvrent dans toutes les provinces.
Nous sommes ravis d'être ici aujourd'hui pour parler de l'examen quinquennal de la LEP. Nous avons fermement appuyé la mise en place de la LEP et avons travaillé, de concert avec d'autres groupes, à son adoption. Les sociétés membres de l'APFC travaillent depuis six ans avec la loi sur le terrain de même qu'à l'occasion de réunions sur le rétablissement et de rencontres avec des fonctionnaires fédéraux et provinciaux en vue de discuter de sa mise en oeuvre et de son efficacité concrète. Ces travaux nous ont permis de constater qu'il serait possible d'améliorer quelques aspects de la LEP, tant législatifs que stratégiques, tout en garantissant le maintien d'un cadre réaliste de protection des espèces en péril.
Nous avons relevé sept domaines de préoccupation: tout d'abord, la mise en oeuvre; deuxièmement, la prise en compte des intérêts socioéconomiques; troisièmement, les définitions propres aux termes « résidence » et « habitat essentiel »; quatrièmement, l'autorisation des activités ne touchant l'espèce que de façon incidente; cinquièmement, les exemptions, comme l'ont dit mes collègues; et sixièmement, les accords de conservation. Par souci de concision, lorsque j'aborderai aujourd'hui les points quatre, cinq et six, je les cumulerai en un tout générique étant donné que nous voyons ces choses comme des outils que nous pouvons utiliser sur le terrain. Enfin, comme septième point, nous voyons la nécessité d'un autre examen parlementaire à l'issue du présent examen.
Tout d'abord, pour ce qui est de la mise en oeuvre, l'APFC constate comme plusieurs autres intervenants que la mise en oeuvre de la LEP est très lente. Pour nous, l'essentiel de la LEP tient en la planification du rétablissement et des mesures destinées à garantir la survie et le rétablissement des espèces, tout en permettant la planification et la réalisation d'autres activités comme l'exploitation forestière en vertu de permis ou d'accords de conservation appropriés.
Les ministères fédéraux, de concert avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, ont commencé à déployer de sérieux efforts en planification du rétablissement; des plans de rétablissement sont déjà disponibles, même si nous savons tous que bon nombre de ces plans arrivent en retard. En outre, à ce jour, un seul plan d'action a été publié, au sujet de la physe des fontaines de Banff dans le parc national de Banff.
Également, comme l'ont dit d'autres témoins, il n'existe pas de mécanismes officiels et efficaces pour la délivrance de permis, les exemptions et les accords de conservation pour les grandes industries comme la nôtre.
Nous croyons que la lenteur de la mise en oeuvre a engendré de la frustration chez certains groupes et nous commençons à voir la LEP appliquée par les tribunaux plutôt que par des mesures volontaires axées sur la collaboration. Nous encourageons le gouvernement fédéral à continuer de chercher des moyens d'accélérer la mise en oeuvre de la LEP et nous pensons que les mesures que nous recommandons peuvent y contribuer.
Pour ce qui est des intérêts socioéconomiques, lors de l'adoption de la LEP, le Parlement savait sans doute qu'il faudrait rechercher l'équilibre entre, d'une part, la nécessité d'assurer la survie et le rétablissement des espèces et, d'autre part, la nécessité de tenir compte des réalités socioéconomiques. Au moment où nous commençons à mettre en pratique la LEP, nous pensons qu'il faudrait préciser les enjeux socioéconomiques. Le ministre tient compte des aspects socioéconomiques lorsque vient le temps d'ajouter des espèces à la liste. Nous proposons que cette pratique soit inscrite dans la loi.
Nous percevons une certaine confusion dans l'application des aspects socioéconomiques au stade de la planification du rétablissement. La LEP est très claire: les aspects socioéconomiques doivent être pris en compte au stade de la planification des mesures; toutefois, elle demeure floue quant aux actions à entreprendre au stade de la planification du rétablissement, et nous croyons que cette situation engendre une certaine confusion.
Pour de nombreuses espèces, la recherche de l'équilibre entre conservation de l'habitat et intérêts socioéconomiques débute à l'étape de la planification du rétablissement. Nous proposons que le paragraphe 41(1) de la loi soit révisé de manière à tenir compte des aspects socioéconomiques, surtout en raison du fait que l'élaboration des plans d'action peut prendre du temps, comme nous le constatons.
Rapidement, au sujet des définitions des termes « résidence » et « habitat essentiel », je dirais qu'au bout du compte, comme vous le savez, la loi dépend dans son application concrète des définitions qu'elle contient. La LEP présente la complexité additionnelle de nous obliger à faire correspondre nos mots à la nature, les espèces visées étant très variées, allant des tétards aux épaulards en passant par les renards.
Certaines de ces créatures n'ont pas de résidence, comme un nid ou une tanière. D'autres ont des espaces distincts qui peuvent être définis comme des habitats essentiels; d'autres encore, comme le caribou et le saumon, se déplacent continuellement sur de grandes distances au Canada, dans des habitats qui ne sont pas essentiels à leur survie mais où des industries comme la nôtre mènent des activités.
De plus, nous estimons que la LEP accorde une importance démesurée à l'habitat essentiel alors que, pour de nombreuses espèces, d'autres facteurs environnementaux limitatifs jouent également un rôle important, notamment la prédation, les maladies et les parasites, les conditions météorologiques et, pour les oiseaux, les aires d'hivernage dans d'autres pays.
Nous recommandons donc au comité d'examiner nos propositions afin que des changements soient apportés aux politiques et que des modifications soient apportées au paragraphe 41(4) de la LEP, pour mieux établir ces définitions.
Au sujet de la délivrance de permis, des exemptions et des accords de conservation, comme je l'ai souligné précédemment, la LEP dépend de la planification du rétablissement et des mesures, bien qu'elle autorise la planification et la réalisation d'autres activités, comme l'exploitation forestière, en vertu de permis, d'exemptions et d'accords de conservation. Il s'agit de volets distincts de la loi mais, pour des raisons d'économie de temps, permettez-moi de vous faire part de nos préoccupations générales au sujet de ces aspects car, essentiellement, il s'agit des outils que nous utilisons pour réaliser la gestion forestière tout en conservant les espèces.
À notre connaissance, il n'existe pas de mécanisme officiel et efficace qui garantisse que les permis, les exemptions et les accords de conservation peuvent être demandés, négociés, accordés et mis en place en peu de temps, dans le cas d'industries majeures comme la nôtre. L'industrie forestière est omniprésente au Canada. Il existe des cas où notre industrie aurait bien besoin de tels mécanismes pour assurer la conservation appropriée des espèces.
Par exemple, en vertu des articles de la LEP qui portent sur les permis, on n'autorise pas la délivrance de permis d'une durée supérieure à cinq ans, ce qui peut poser problème. Nous disposons d'installations industrielles et nous planifions la gestion forestière sur des décennies. Nous pourrions nous trouver dans la position où, ayant complété un important travail de planification en vue des processus provinciaux, nous devrions tout recommencer un an ou deux plus tard pour satisfaire au processus du permis fédéral.
Pour ce qui est des accords de conservation, nous appuyons fortement le rôle de ces accords dans la coopération et les mesures volontaires d'intendance pour atteindre les objectifs de la LEP. En fait, nos membres sont déjà engagés dans des activités de conservation, et plus de trois millions d'hectares d'habitat boréal du caribou ont été conservés au cours des 10 dernières années.
Nous croyons que les dispositions concernant les accords de conservation devraient être élargies de manière à permettre l'autorisation de certaines activités. De plus, comme l'a suggéré mon collègue, les dispositions relatives aux exemptions devraient être clarifiées de manière à garantir qu'elles s'appliquent dans le cas de conformité à un accord de conservation.
En ce qui concerne la délivrance de permis, nous avons des propositions pour les paragraphes 73(3), 73(9) et 73(10). Au sujet des exemptions, nous aimerions faire réviser les paragraphes 83(1) et 83(4). Enfin, nous aimerions présenter des propositions pour l'article 11.
J'aimerais ajouter, en terminant, que nous constatons qu'il reste beaucoup d'améliorations à apporter à la LEP, du point de vue législatif et en matière stratégique. Nous avons fait de grands progrès en six ans, mais je crois que nous ne saisissons pas encore toute la portée de la loi et toutes ses nuances. Nous suggérons respectueusement au Parlement de procéder à un deuxième examen sept ans après le premier, conformément à l'article 129. Nous pourrons présenter nos propositions détaillées à la greffière dès le début de la semaine prochaine, dans les deux langues officielles.
Merci.
:
Bonjour à tous les membres et merci de cette invitation à témoigner devant vous aujourd'hui.
[Traduction]
Je suis désolée de ne pas avoir pu vous envoyer mon exposé à l'avance. J'étais malade hier et je suis à peine remise aujourd'hui, donc je ferai de mon mieux.
[Français]
Je répondrai aux questions en français ou en anglais après mon allocution.
[Traduction]
À la fin de mon exposé, j'aurai également un mémoire à vous présenter au nom d'un groupe de partenaires de l'industrie et d'organisations environnementales.
L'Association minière du Canada est l'organisation nationale de l'industrie minière canadienne. Nous représentons des entreprises qui oeuvrent dans le domaine de l'exploration et de l'exploitation minière, de la fonte, de l'affinage et de la fabrication de produits semi-finis. Nous produisons la grande majorité des métaux et des principaux minéraux industriels du Canada. En 2005, l'AMC a été honorée par la fondation GLOBE, qui lui a remis le prix de performance environnementale décerné aux associations industrielles, pour sa stratégie « Vers le développement minier durable », dans le cadre de laquelle elle demandait aux entreprises de s'évaluer et de s'attribuer des points selon divers indicateurs liés au développement durable.
Étant l'un des plus importants producteurs de minéraux et de métaux au monde, le Canada a prospéré au cours des 20 dernières années grâce à des politiques minières qui profitent à tous les Canadiens. Reconnu comme chef de file de l'industrie minière, le Canada possède dans ce domaine des entreprises d'exploration, de production, d'approvisionnement et de services qui sont sans égales dans le monde et font l'envie de tous les pays producteurs de minéraux. Il suffit de se rendre à la conférence de 20 000 personnes de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, qui a lieu chaque année à Toronto, pour constater à quel point le monde entier fait confiance au Canada en matière de développement minier.
L'AMC, tout comme l'APFC, le Conseil canadien des pêches et plusieurs de nos partenaires industriels, collabore avec des intervenants non gouvernementaux et des représentants gouvernementaux depuis le début du débat entourant la Loi sur les espèces en péril. Nous faisions partie du groupe de travail sur les espèces en péril, dont étaient également membres l'APFC, le Club Sierra du Canada, Nature Canada et la Fédération canadienne de la faune, groupe qui a formulé des recommandations conjointes au gouvernement au cours des neuf années de développement de cette loi. Depuis l'adoption de la LEP, l'AMC est un membre actif du comité consultatif sur les espèces en péril, qui conseille les ministres de l'Environnement et du MPO.
Tout récemment, nous avons approuvé un cadre stratégique sur la conservation de la biodiversité pour les membres de l'AMC. Je l'ai ici et je peux vous en remettre une copie. On y déclare: « Les membres de l'AMC reconnaissent que l'accès aux terres et le permis social de toute entreprise sont intimement liés aux pratiques responsables qu'elle adopte sur les plans social, environnemental et économique, et que l'analyse justifie en tout point que l'industrie appuie la conservation de la biodiversité. »
L'énoncé du cadre stratégique se poursuit ainsi: « Les membres de l'AMC collaboreront avec les principales communautés d'intérêts afin d'élaborer et de mettre en oeuvre des politiques et des pratiques responsables afin d'intégrer l'importance de la conservation de la biodiversité, dont le respect des habitats critiques, aux activités minières, à la planification de l'utilisation des terres et aux stratégies de gestion, de même que d'envisager l'option de ne pas aller de l'avant avec certains projets miniers. » Ce n'est là qu'une partie du cadre. En novembre dernier, les membres de l'AMC ont approuvé un nouvel indicateur, et ils s'autoévalueront désormais en fonction de la conservation de la biodiversité et rendront les résultats publics.
Les membres de l'AMC possèdent une assez bonne expérience du travail avec les espèces en péril. J'aimerais en citer quelques exemples.
La mine Raglan de Xstrata Nickel, située à Rouyn-Noranda, au Québec, a annoncé en mai dernier des investissements de 350 000 $ dans un vaste programme de recherche visant à mieux comprendre les mouvements et les déplacements des populations de caribous migratoires du Québec et du Labrador dans le contexte actuel des changements climatiques.
Depuis les années 1990, l'entreprise Vale Inco de Terre-Neuve appuie la recherche sur l'érioderme boréal, une espèce menacée partout dans le monde, ainsi que sa transplantation. Le Canada et Terre-Neuve possèdent l'une des dernières populations importantes de ce lichen qui subsistent toujours. Les investissements dans ces recherches, qui durent depuis plus de sept ans, s'élèvent encore une fois à plus de 350 000 $.
Les concessions minières de Vale Inco au Manitoba couvrent 140 kilomètres carrés. Le territoire est habité par deux troupeaux de caribous des bois. Vale Inco a noué un partenariat avec le comité consultatif sur le caribou des bois de la région du Nord-Est afin de travailler à la planification du rétablissement de l'espèce.
Un autre projet de Vale Inco, celui-là à Sudbury, porte sur le cas d'un faucon pèlerin dans une mine à ciel ouvert. En effet, un faucon pèlerin a fait son nid dans la paroi de la mine, et un autre niche dans un édifice qui contient des produits chimiques toxiques et qu'on a prévu démolir et reconstruire. Dans les deux cas, Vale Inco travaille avec des spécialistes en biologie des oiseaux afin d'installer des nichoirs artificiels, et avec le ministère des Ressources naturelles pour essayer de déterminer comment exploiter la mine de façon à ne pas déranger le faucon pèlerin et à assurer son retour à son habitat.
En se fondant sur toutes ces expériences, les membres de l'AMC ont formulé des recommandations pour le comité. Elles ressemblent beaucoup à celles que vous avez entendues de la part des associations de produits forestiers et d'autres industries.
Dans notre première recommandation, nous encourageons les ministères fédéraux à accélérer l'élaboration de définitions, de politiques, de programmes et de règlements dans le cadre de la LEP. Cette loi est entrée en vigueur il y a cinq ans, et de nombreuses questions subsistent sur une foule d'aspects de son application. Nous ne connaissons toujours pas les définitions de « protection efficace » et de « habitat essentiel ». Les plans de rétablissement ont pris du retard. Le COSEPAC n'a pas assez de fonds pour produire des évaluations d'espèces. Aucune politique n'a été élaborée sur des questions telles que les accords d'intendance, les programmes d'indemnisation, les systèmes de délivrance de permis, etc., ce qui occasionne des incertitudes.
Nous recommandons le financement intégral des directions vouées aux espèces en péril du ministère de l'Environnement, de Parcs Canada et du ministère des Pêches et des Océans, afin de permettre l'élaboration de politiques, de procédures et de programmes dans des délais rapprochés. Nous croyons également que le COSEPAC devrait être financé intégralement.
Notre deuxième recommandation vise à faire amender la LEP afin de prolonger la durée des permis et de gérer les installations existantes, ce qui revient au problème soulevé par Andrew. Les mines durent au moins 10 ans et jusqu'à 80 ans dans certains cas. Certaines collectivités sont construites sur une mine; Sudbury en est un exemple. Il nous faut donc instaurer un mécanisme qui permette d'obtenir un permis avant d'entreprendre des investissements d'une telle envergure. Dans notre cas, il faudra également une solution relativement aux droits acquis des sites miniers existants.
Notre troisième recommandation porte elle aussi sur la nécessité d'encourager les accords de conservation. À notre connaissance, aucun accord de conservation n'a été signé depuis les premiers stades de l'entrée en vigueur de la LEP, et nous croyons qu'il faudrait élargir la portée des accords de conservation et les promouvoir auprès des entreprises minières et d'autres acteurs de l'industrie.
Enfin, nous croyons que le COSEPAC et le RESCAPE devraient être chargés de consulter le secteur privé afin de se renseigner sur la condition des espèces. Bon nombre de nos entreprises recueillent des données sur les espèces qui s'approchent de leurs installations ou circulent aux alentours. En fait, elles le font toutes. Ces données devraient servir à l'élaboration de plans de rétablissement et de plans d'action.
J'aimerais maintenant vous lire un texte en particulier.
Certaines organisations parmi les plus importantes de l'industrie primaire canadienne ont préparé des mémoires pour ce comité relativement à l'examen de la LEP prévu par la loi. Bon nombre de ces organisations, de même que plusieurs qui n'ont pas présenté de mémoire en tant que tel, et les nombreux groupes qu'elles représentent sont unanimement préoccupés par la difficulté d'obtenir l'autorisation d'exercer leurs activités en vertu de la LEP, malgré leur très grande participation dans les projets de rétablissement locaux et leur coopération avec les organismes gouvernementaux.
Ces groupes ont formé une alliance afin d'élaborer des suggestions précises de modifications à la LEP qui prennent en compte ces préoccupations. À cet effet, ils ont ébauché un bref mémoire à l'intention de ce comité au sujet des problèmes communs auxquels ils font face, et ils ont proposé des améliorations à la LEP afin d'y remédier.
Certaines organisations environnementales non gouvernementales ont également préparé des mémoires pour ce comité sur la nécessité d'apporter certaines modifications à la LEP. Vous entendrez plusieurs de leurs recommandations lorsqu'ils viendront témoigner devant ce comité, le 27 avril prochain.
Au cours des dernières semaines, les partenaires de l'industrie et les ONGE ont conjointement mis en place un mécanisme leur permettant de discuter de leurs propositions respectives et de déterminer s'il est possible de s'entendre sur les modifications nécessaires afin de remédier aux lacunes que les deux groupes ont décelées dans la LEP. Les questions spécifiques qui font l'objet de discussions au sein du groupe sont les suivantes: la délivrance de permis, les accords de conservation, la décision de ne pas inscrire certaines espèces, les plans d'action et les stratégies de rétablissement et la définition des termes survie et rétablissement.
Les deux groupes constatent que, pour certaines de ces questions, il y a consensus sur la nécessité d'apporter des améliorations et sur la direction que doivent prendre les changements. Cependant, en venir à un commun accord sur la formulation détaillée des solutions s'avère une tâche difficile dans certains cas, ce qui n'est pas étonnant, je présume.
Néanmoins, les parties sont confiantes que les discussions se dérouleront assez rapidement — nous avons des conférences téléphoniques chaque semaine — et qu'elles seront en mesure de soumettre au comité des propositions concertées de modifications avant que le comité ait terminé son examen. Les deux groupes demandent au comité de confier à Environnement Canada et au ministère des Pêches et des Océans le mandat de préparer des recommandations relatives à la LEP afin de mettre en place un cadre stratégique approprié.
Merci beaucoup.
:
Oui. Merci, monsieur le président.
Madame Gelfand, messieurs, je vous remercie de votre présence.
J’aimerais revenir sur votre dernier commentaire. Vous dites qu'il y a maintenant un processus au sein duquel l’industrie et les groupes environnementaux collaborent et travaillent ensemble en vue d'arriver à un consensus sur les modifications qui seront nécessaires.
Lors de votre dernière présence, le 2 juin 2009, je vous avais demandé si vous pouviez faire la synthèse, en une page, de vos recommandations. À l’époque, le débat portait sur la Loi sur les espèces en péril et vous vous étiez engagés à nous envoyer un texte d'une page ou deux contenant vos recommandations.
Nous n’avons rien reçu, monsieur le président. Je crois que le suivi n’a pas été fait.
Quoi que vous nous présentiez, ça nous sera utile, et plus vos recommandations seront diversifiées, mieux ça sera pour nous. Si vos recommandations avaient suivi un processus avant d’arriver ici et qu'elles résultaient d’un accord entre les groupes environnementaux et l’industrie sur les changements possibles, notre travail concernant les recommandations qui se trouveront dans le rapport en serait grandement facilité.
Si la chose s'avère possible, j’aimerais parler à chacun d'entre vous trois, afin que vous nous aidiez à comprendre quelque chose.
Monsieur McGuinness, vous avez mentionné des différences entre les approches du MPO et du COSEPAC visant à déterminer les stocks — j’ai d'ailleurs bien aimé cet éclairage —, et vous avez parlé de la difficulté de concilier deux approches scientifiques fondamentalement différentes. Vous avez dit que la communauté aquatique au sens large aurait du mal à accepter l’approche fondée sur le taux de déclin du COSEPAC plutôt qu’une approche de gestion prudente des écosystèmes qui a évolué avec le temps. Pourquoi?
:
Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.
Comme mon collègue M. McGuinty, je suis surpris de voir ce que le Conseil canadien des pêches nous propose aujourd'hui.
D'abord, vous nous dites qu'avant de mettre une espèce en péril sur une liste, il faudrait que l'espèce soit l'objet de préoccupations, qu'elle soit menacée, en voie de disparition. De plus, quelque chose me frappe: ça nous prendrait un nouveau modèle de gouvernance — j'utilise vos mots. Or il me semble que ce nouveau modèle de gouvernance doit avoir à sa base une plus grande indépendance des scientifiques. Et il faut faire confiance à la science dans les prises de décision.
Vous nous dites en même temps qu'il doit y avoir une forme d'harmonisation entre les propos et les indications du COSEPAC et les recommandations du ministère des Pêches et des Océans. J'ai de la difficulté à comprendre comment , au bout du compte, on peut véritablement protéger l'espèce.
Je vais vous donner un exemple. La morue franche a vu son espèce diminuer dans une proportion de 99 p. 100 par rapport à des niveaux historiques. Outre la surpêche, on sait qu'il y a eu des changements océanographiques. Tout cela c'est fait sous l'égide du ministère des Pêches et des Océans. Cela dit — on ne parlait pas, à l'époque du COSEPAC —, comment pouvons-nous faire en sorte de mieux protéger les espèces?
J'aimerais vous entendre là-dessus, madame Gelfand, et vous aussi, monsieur McGuinness.
:
Vous soulevez une situation intéressante. Comme vous le dites, il y a quelques années, le COSEPAC a déclaré que les stocks de morue devaient être inscrits sur la liste des espèces menacées ou en voie de disparition. Mais à l’époque, ces stocks étaient visés par un moratoire en vertu de la Loi sur les pêches.
Vous avez donc raison. Je crois que ce qui s’est produit, c’est que les stocks étaient visés par un moratoire, il n’y a pas eu de pêche dirigée, et il y a eu très peu de prises accessoires. De plus, si on croisait de la morue, il fallait faire de la surveillance et suivre un protocole qui exigeait de s'éloigner à trois, quatre ou cinq milles de la zone, je crois.
À la lumière de cette situation, je crois que le gouvernement a décidé qu'une simple interdiction — c'est tout ce qu'on trouve dans la LEP — aurait des conséquences sociales et économiques appréciables à Terre-Neuve et au Labrador, sur la côte Nord du Québec et dans les Maritimes. Ce qu’ils ont fait, alors…
Je veux dire, il faut se rappeler que nous avons la Loi sur les pêches, et que la Loi sur les pêches donne beaucoup de pouvoirs permettant d'introduire toutes sortes de mesures. Le régime actuel pour la morue est donc extrêmement strict, et je peux vous annoncer qu’il y a des signes avant-coureurs — pas dans le golfe Saint-Laurent, mais au large de Terre-Neuve et du Labrador — du retour de la morue.
Pour moi — et pour les gens de l'industrie, je crois —, il n’y avait aucun doute que les stocks étaient dans un état pitoyable. Nous le savions tous. Quand le COSEPAC utilise son taux de déclin, comme vous dites, et qu’il dit que la situation est très mauvaise, bravo! Mais si on se souvient bien, ce sont les gens de l’industrie des pêches de Terre-Neuve-et-Labrador qui ont soulevé en premier les problèmes.
J’aimerais simplement dire que la Loi sur les pêches peut permettre l’introduction de mesures très contraignantes, comme elle l’a déjà fait. Tout ce que nous voulons, c’est une sorte de convergence des lois et, plus particulièrement, voir les excellents scientifiques du COSEPAC et du MPO utiliser un modèle qui cadre globalement avec notre compréhension de l’univers des poissons.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier les témoins de s'être joints à nous pour l'examen de la Loi sur les espèces en péril.
Je trouve intéressant que nous parlions de développement durable en ce moment. L'industrie ne peut pas prospérer à long terme à moins qu'elle applique le modèle de la durabilité, qui inclut l'environnement, l'économie et les impacts sociaux. Ce sont trois aspects reliés et fondamentaux. Et les recommandations des scientifiques dépendront du modèle utilisé.
Monsieur McGuinness, vous avez recommandé d'adopter un modèle international, si je peux dire. Ce commentaire est important.
J'aimerais m'arrêter sur deux points. Dans le contexte de la Loi sur les espèces en péril, quand croyez-vous que les facteurs socioéconomiques devraient être pris en considération? D'après ce que j'ai compris, pour le COSEPAC, ces facteurs ne sont pas pris en considération pour recommander l'inscription d'une espèce. On en tient compte aux niveaux du ministre et du gouverneur en conseil; mais quand on identifie un habitat essentiel, on n'en tient pas compte non plus. Est-ce qu'il faudrait le faire? À quels niveaux de la gestion d'une espèce faudrait-il inclure des considérations socioéconomiques?
Ma deuxième question concerne les échéanciers. Les consultations sont très importantes dans ce dossier. Même de votre point de vue; vous travaillez avec l'industrie et les ONG du secteur de l'environnement pour préparer des recommandations conjointes, et ça prend du temps. Les critères d'inscription peuvent varier pour les espèces. Quel modèle d'échéancier faudrait-il appliquer aux niveaux du COSEPAC, du ministre et du gouverneur en conseil, et en ce qui concerne l'habitat essentiel?
Est-ce que nos échéanciers actuels sont réalistes? D'après ce que nous avons entendu, les poursuites semblent être la seule façon de faire, ou une façon de faire qui est souvent utilisée. Est-ce parce qu'il n'y a pas assez de temps pour faire les consultations nécessaires?
En résumé, j'ai des interrogations sur l'importance des considérations socioéconomiques, sur le moment où elles devraient entrer en jeu dans la gestion d'une espèce, et sur les échéanciers. J'aimerais bien avoir une réponse de chacun de vous s'il vous plaît.
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Je dirais d'abord que dans ce domaine, la Loi sur les espèces en péril elle-même est quelque peu trompeuse, parce qu'au gouvernement du Canada, dès qu'on a un projet de règlement, il faut tenir compte des facteurs socioéconomiques.
Par exemple, dans le cas de la Loi sur les espèces en péril, si vous voulez inscrire une espèce en voie de disparition, on doit s'arrêter aux considérations socioéconomiques. C'est la loi au Canada. Donc, vous avez bien raison: au moment de se présenter devant le conseil des ministres, il faut inclure les considérations socioéconomiques.
Et je dirais aussi que si vous pouvez aller de l'avant pour créer un programme de rétablissement ou un plan d'action qui implique une forme de réglementation, alors il n'y a pas de doute, c'est obligatoire. En fait, c'est l'une des règles de base du gouvernement du Canada. Ces choix ont été faits il y a une quinzaine d'années. Voilà ce que je peux vous dire là-dessus.
En ce qui concerne les échéanciers, je crois que vous avez raison. Si vous regardez la liste des espèces en voie de disparition, vous verrez une flore et une faune très variées. Les consultations sont essentiellement une responsabilité du gouvernement; il doit s'assurer qu'il y a des consultations. Alors je crois que ce n'était pas l'idéal qu'il y ait prescription. Il existe différents groupes: des groupes de l'industrie, des fonctionnaires pleins de bonne volonté, et des groupes environnementaux très coopératifs. Il s'agit de les réunir pour faire avancer les choses. Si la loi fixe un délai qui est court, on se trouve à précipiter les réactions.
Je me souviens que dans un des groupes de travail qui ont contribué à l'établissement de cette loi, nous avions invité des représentants du service de la faune des États-Unis. En gros, ils nous ont dit de ne pas procéder de la même façon qu'eux, parce qu'ils s'étaient aperçus tout à coup que ce genre de prescription attirait les poursuites. Ils dépensaient tout leur argent à payer des avocats pour gagner leur cause, et il ne leur en restait plus pour le rétablissement et les autres activités. Alors vous devriez suivre leur conseil, sauf pour les restrictions comme celle des neuf mois.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur McGuinness, je sais que vous n'avez pas abordé ce sujet en particulier, mais il y a une question que j'aimerais vous poser. Selon la définition de la loi, on entend par « espèces sauvages » toute « espèce, sous-espèce, variété ou population géographiquement ou génétiquement distincte d'animaux, de végétaux ou d'autres organismes d'origine sauvage, sauf une bactérie ou un virus, qui, selon le cas: a) est indigène au Canada; b) s'est propagée au Canada [...] ».
À mes yeux, le problème, avec cette loi, ce n'est pas que sa visée est mauvaise. C'est simplement qu'elle ne permet pas d'atteindre les résultats escomptés. Quand les Canadiens pensent à la Loi sur les espèces en péril, je crois qu'ils pensent à une loi qui s'applique à des espèces dont il ne reste qu'une cinquantaine de spécimens dans l'ensemble du pays, ou, par exemple, à des ours polaires qui pourraient éventuellement être les tous derniers à vivre à l'état sauvage. Je crois que c'est une préoccupation capitale. C'est un problème important.
La loi s'appelle Loi sur les espèces en péril, et non Loi sur les sous-espèces en péril. Il existe trois sous-espèces de faucon pèlerin: anatum, tundricus et une autre. Certains sont en péril, et d'autres ne le sont pas. Quand nous nous occupons de problèmes de ce genre, ce n'est aucunement d'espèces qu'il s'agit. Nous nous occupons de populations d'animaux qui sont peut-être distinctes du point de vue de la génétique.
La raison pour laquelle il n'y a pas assez de biologistes est qu'il faudrait une vie entière pour que des biologistes puissent étudier tous les lacs afin d'identifier génétiquement toutes les différentes espèces de doré jaune, pour réaliser des études in vitro qui permettraient de déterminer si elles sont toutes indépendantes les unes des autres d'un point de vue génétique. Après un certain temps, grâce à un processus de spéciation — on peut examiner des données morphométriques et ce genre de choses —, on pourrait vraiment affirmer que, oui, telle population de dorés jaunes du lac Gull, en Alberta, est différente d'une population de dorés jaunes du lac Pigeon, dans la même province. Si l'on se met à pêcher dans le lac Pigeon, le COSEPAC va tout à coup examiner la situation et affirmer que le doré jaune est en péril. En fait, il y a peut-être 15 millions de dorés jaunes dans le lac Gull, 15 millions de plus dans le lac Sylvan, et les dorés jaunes ne seraient pas en péril du tout.
Quand on procède au rétablissement d'une population, on prend des ressources génétiques dans un endroit et on les réintroduit ailleurs dans la nature. Considérons, par exemple, les bisons du parc national de Wood Buffalo. À cet endroit, la population de bisons des bois est entièrement fondue avec des bisons des plaines.
Voici donc la question: Comment une loi, aussi louable son intention soit-elle, peut-elle traiter cette notion adéquatement, de manière à tenir compte des préoccupations de chacun? L'autre jour, nous avions avec nous un homme du Nord de l'Alberta, qui nous a parlé d'un troupeau de bisons ou d'un troupeau de caribous en particulier. Nous parlons de populations qui sont peut-être génétiquement distinctes; ce n'est pas de l'extinction de l'espèce entière que nous parlons.
Monsieur McGuinness, j'implore votre aide. En tant que membre du corps législatif — je suis également biologiste diplômé —, comment pourrais-je faire ce qu'il y a de mieux avec une loi de ce genre, et en arriver aux meilleurs résultats qui soient pour les Canadiens? Les pêches sont très importantes pour moi. Je suis le seul membre de ce comité qui siège également au Comité des pêches. Bien entendu, nous nous penchons sur des problèmes graves relatifs au saumon, en particulier dans le fleuve Fraser. Et vous avez parlé de la morue dans la région de l'Atlantique, ce qui est un excellent exemple.
Monsieur de Vries, quand j'étais à l'université, il y a 20 ans, nous parlions de l'extinction imminente du caribou des bois. Nous parlons encore, 20 ans plus tard, de l'extinction imminente du caribou des bois. Je ne crois pas que la loi soit à la hauteur. Aidez-moi, s'il vous plaît, à résoudre ce problème.
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Je ne parlerai pas de la question des bisons, parce que nos membres n'exercent aucune activité dans ce domaine.
En ce qui concerne le caribou boréal et votre première question, que vous avez adressée à M. McGuinness, si je ne me trompe pas, le gouvernement doit prendre garde, lorsqu'il y a une décroissance, de ne pas aller trop loin en se préoccupant du niveau des populations, dans la mesure du possible... Je crois que de manière générale, le problème auquel il faut s'attaquer est celui des espèces à risque, et non celui des populations à risque. Il reste que dans certains cas, on pourrait être appelé à prendre des décisions concernant des populations.
Il y a des populations de caribous boréaux qui déclinent, d'autres qui sont stables, et d'autres qui s'accroissent. Mais, de manière générale, la tendance est au déclin pour le caribou boréal dans l'ensemble du Canada. En Alberta, cela se vérifie pour la majorité des troupeaux. La question qui se pose est celle de savoir de quelle manière les gouvernements souhaitent traiter la question du caribou boréal à l'échelle nationale.
C'est là que les étapes de la planification du rétablissement, de la détermination des aspects socioéconomiques connexes et de l'élaboration du plan d'action deviennent importantes. C'est sur ce fondement que des décisions pourront être prises, en Alberta, au Manitoba ou en Ontario, sur les mesures qu'il faudra prendre en ce qui concerne des populations qui sont stables ou qui déclinent. Pour une espèce comme le caribou, qui est une espèce provinciale, c'est dans les provinces que les décisions doivent être prises. Il est certain que dans certains cas, la compétence devra être transférée d'un ordre de gouvernement à l'autre, et je suggère que ces transferts soient faits en vertu de la LEP.
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Donc, le principe de la réserve marine fonctionne.
M. Patrick McGuinness: Oui.
M. Blaine Calkins: Prenons par exemple la zone de pêche au homard 34, qui est une zone protégée pour la pêche au homard: on voit clairement ses répercussions positives dans la partie sud du cap Breton et en Nouvelle-Écosse.
Tandis que vous êtes ici et que vous formulez ces recommandations, madame Gelfand, je tiens à vous dire que même si vous alliez à l'université pour recruter tous les étudiants qu'ils sortent ou non de la faculté des sciences biologiques, vous constateriez que le nombre d'employés à Environnement Canada serait toujours insuffisant pour effectuer un inventaire biophysique dans l'ensemble du Canada qui nous permettrait de savoir combien d'espèces, de sous-espèces ou de variétés peuplent nos fonds marins.
J'ai mené une recherche pour le compte du service des loisirs et des parcs d'Edmonton il y a de cela 20 ans, et nous avions réussi à identifier 80 nouvelles espèces qui n'avaient jamais été recensées dans les parcs d'Edmonton; pour arriver à ce résultat, j'avais seulement prélevé 10 petits échantillons provenant d'une seule et unique zone de la ville d'Edmonton, dans le parc de Whitemud. Nous ne savons donc même pas où se trouve la moitié de nos espèces, et encore moins s'il s'agit d'espèces distinctes.
Je vous laisse réfléchir à ce sujet. Mais je tiens tout de même à souligner qu'au lieu de se demander si cette loi, dans son libellé actuel, est d'une quelconque utilité, il me semble qu'on devrait se pencher sur la gestion de la faune, compétence qui a été confiée aux provinces, à l'exception des pêches et des oiseaux migrateurs, visés par une convention internationale, outre la convention internationale régissant le commerce illicite des espèces en péril... Pourquoi n'y a-t-il personne qui suggère que la gestion de la faune relève des provinces?
La création d'habitats est importante, et nous avons d'ailleurs accru de 30 p. 100 la superficie de nos parcs nationaux. Les parcs nationaux visent justement à protéger les habitats. Si nous arrivons à cibler les habitats essentiels, il ne sera même plus nécessaire d'évoquer les espèces dont nous parlons actuellement.
M. Patrick McGuinness: J'ai pris des notes.
Des voix: Oh, oh!
M. Blaine Calkins: Quelqu'un veut-il intervenir à ce sujet?
M. Patrick McGuinness: Non, je vous remercie.
Il y a quelques instants, je me demandais quelle question précise j'allais vous poser, puis M. Calkins a fait certaines affirmations auxquelles j'aimerais répondre pendant les cinq minutes qui me sont allouées. Bien sûr, à la fin, je vous demanderai votre avis.
La première question soulevée par M. Calkins portait sur le nombre de biologistes qu'il faudrait pour évaluer de façon précise le nombre d'espèces, de sous-espèces et de variétés. Évidemment, nous ne pourrons jamais connaître avec précision le nombre d'escargots petits-gris qui existent dans une région particulière du globe, ni savoir si ce nombre a augmenté ou diminué. L'une des principales fonctions de la LEP est de tenter de fournir une vue d'ensemble, ou un aperçu de l'état de nos écosystèmes. C'est d'ailleurs un point qu'a soulevé Mme Gelfand un peu plus tôt.
Si une espèce en particulier ou si une population donnée est menacée dans une région précise, il est important que nous examinions la question et que nous sachions quelles en sont les causes. La LEP produit des résultats admirables dans une situation très difficile, c'est-à-dire malgré les nombreuses contraintes sur le plan scientifique qu'il faut surmonter pour réussir à surveiller ces populations afin de déterminer le type de répercussions qu'elles subissent. Les représentants de l'industrie étaient crédibles... Ils nous ont parlé d'initiatives d'atténuation. Par exemple, des centrales hydro-électriques qui remettaient des poissons à l'eau, ce qui n'est pas sans risque. Les différentes industries déploient des efforts pour tenter de protéger les écosystèmes qui les entourent. Mais il est vrai que la LEP n'a pas établi de façon parfaitement claire comment procéder à cet égard, notamment à cause de ressources limitées, du processus bureaucratique et également du fait qu'elle n'existe que depuis cinq ans.
C'est normal. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle nous discutons de ces questions aujourd'hui. Il est très important que vous nous fassiez part des témoignages que vous avez recueillis. En fait, s'il est aussi fondamental que nous sachions comment se porte notre environnement, c'est que les êtres humains en font partie. L'air que nous respirons, l'eau que nous buvons et les aliments que nous consommons dépendent du même écosystème qui forme l'habitat de l'escargot petit-gris, mais à plus petite échelle. C'est pourquoi il est extrêmement important que nous connaissions l'état de nos écosystèmes. Et le fait que nous ne puissions pas surveiller chaque petite sous-espèce n'est pas une raison pour dire que la LEP est inutile.
Mon deuxième point concerne la démonstration que les Conservateurs tentent de faire lorsqu'ils évoquent le réseau des parcs. Il est vrai que les parcs nationaux sont très importants. J'en suis d'ailleurs un ardent défenseur, et je suis heureux de voir l'agrandissement du Nahanni, car c'est un projet auquel je travaille depuis au moins 10 ans. Toutefois, si l'on protège 2 ou 3 p. 100 du territoire du pays, voire 4 ou 5 p. 100, quel message envoie-t-on au sujet du 95, 96 ou 97 p. 100 du territoire qui demeure sans protection? Il faut comprendre que les parcs provinciaux ne sont pas la panacée. Ils font partie intégrante d'un programme de protection, mais ils ne sont pas suffisants à eux seuls, et il est impossible de construire un programme environnemental en fonction de ce seul élément.
Enfin, la dernière réflexion concerne la loi naturelle de l'extinction. M. Calkins, je ne prétends évidemment pas formuler quelque hypothèse que ce soit au sujet de vos convictions religieuses, mais pour ma part, je suis croyant. Je crois que les lois de la nature sont l'oeuvre du Créateur et que, au cours des derniers siècles, les êtres humains ont été largement responsables, par leurs gestes délibérés, des extinctions. J'estime qu'il est important de le reconnaître.
Le fait de rester les bras croisés et de dire que l'extinction des espèces est un processus naturel sur la Terre et, par conséquent, que nous ne devrions pas nous en préoccuper, est exactement le type de raisonnement dont on se préoccupe le plus de la part d'un gouvernement censé être le gardien d'un pays qui abrite aussi des populations naturelles non humaines.
À la suite de ce que M. Trudeau a dit, je pense que lui et moi — si nous étions tout à fait honnêtes — partageons une passion sans borne pour les espaces sauvages du Canada et pour notre faune. Je dis simplement ce que je connais en tant qu'ancien étudiant en biologie. Je ne suis même pas un biologiste professionnel. Je dois l'admettre dès le départ. J'ai eu le privilège de travailler dans nos parcs nationaux et pour le ministère de l'Environnement de l'Alberta sur le terrain.
Je veux revenir à l'essence même du projet de loi. Je crois que le Canada a besoin d'une loi sur les espèces en péril, ça me semble évident. Je ne laisse pas entendre que nous devrions jeter le bébé avec l'eau du bain, mais je crois que le projet de loi a besoin d'être modifié en profondeur. Je ressens un peu de frustration, mais je ne suis pas en colère contre quelque chose en particulier... Mais je n'ai pas vu de demandes vraiment grandes ou ardues de qui que ce soit, qu'il s'agisse de groupes environnementaux ou de groupes industriels, qui permettraient de donner l'élan que mérite la situation selon moi.
Lorsqu'on examine le processus de consultation — et je sais que nous parlions de consultation —, nous sommes atterrés par les longs délais. Nous sommes atterrés par le manque d'information. Le COSEPAC a un travail très difficile à effectuer. En se fondant sur les définitions que nous avons données, il doit identifier, par exemple, les espèces fauniques et déterminer si celles-ci, une population ou une sous-espèce de cette population, sont en péril. Il s'agit d'une tâche difficile et exigeante en temps.
Nous examinons ce projet de loi du point de vue du Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril, qui est l'organisation qui déterminera en dernier lieu si des progrès sont réalisés dans les calendriers. Les recommandations proviennent du CANEP, qui est un groupe consultatif strictement autochtone. L'autre recommandation vient du COSEPAC, et il s'agit uniquement d'une combinaison de connaissances scientifiques et traditionnelles autochtones. Il n'y a aucun autre mécanisme dans ce projet de loi qui permet de transmettre de l'information ou d'obtenir les points de vue d'autres types de groupes d'intérêts ou de groupes socioéconomiques à l'intention du comité pour la conservation des espèces en péril.
Pouvez-vous donner des détails à cet égard? Êtes-vous satisfaits de ce qui se trouve dans ce projet de loi pour tenir compte de ces réalités particulières? Car compte tenu de la formulation du projet de loi, seuls certains groupes peuvent faire des recommandations.