Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bonjour, mesdames et messieurs. Bonjour à tous. Bienvenue à la 13e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
Chers collègues, comme je l'ai déjà mentionné alors que nous étions dans d'autres salles, les horloges ne sont pas toutes synchronisées, alors nous allons nous fier à nos BlackBerry.
Nous accueillons aujourd'hui cinq témoins. Deux d'entre eux sont de l'ACTRA - National: Marit Stiles, directrice, Politiques publiques et communications, et Simon Peacock. Deux autres sont de l'Alliance interactive canadienne: Serge Landry, président et chef de la direction, et Deirdre Ayre, membre du Other Ocean Group Canada. Enfin, par vidéoconférence, nous entendrons Jocelyn Benoit, professeur à l'École des arts numériques, de l'animation et du design.
Je vais me conformer au programme que nous avons sous les yeux et commencer par l'ACTRA. Marit Stiles, si j'ai bien compris, vous allez partager votre temps. Veuillez commencer.
Bonjour. Je suis Marit Stiles, directrice des politiques publiques et des communications à l'ACTRA, l'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists. Je suis accompagnée de Simon Peacock, directeur de plateau et interprète réputé dans l'industrie des jeux vidéo, de Montréal.
Je vous remercie de nous avoir invités. C'est un honneur d'être ici pour parler au nom des 22 000 interprètes professionnels membres de l'ACTRA dont le travail est de divertir, éduquer et informer les publics canadiens et étrangers.
Aujourd'hui, nous sommes venus vous parler du rôle de nos membres dans l'industrie des jeux vidéo, de son importance croissante et de la façon dont nous croyons que le gouvernement pourrait soutenir et favoriser ce secteur au Canada.
L'ACTRA est fière de s'acquitter de la responsabilité de ce travail. Nos membres sont les voix des personnages dans une vaste gamme de jeux, qu'il s'agisse des simples applications qui vous suivent partout dans votre téléphone ou des jeux de console primés qui se vendent le plus partout dans le monde, comme Assassins Creed et Prince of Persia, lesquels ont été produits à Montréal par Ubisoft, ou comme Deus Ex, produit par Eidos.
Le travail de nos membres ne se limite pas aux voix des personnages ou au travail en arrière-plan dans le cadre d'entreprises représentant des millions de dollars, mais il englobe maintenant de plus en plus les prestations complètes qu'il faut pour la capture du mouvement et la transposition de leur prestation dans un univers virtuel.
Vous n'êtes pas très loin de la réalité si votre idée de la technologie de capture du mouvement est celle d'acteurs qui portent des combinaisons munies de petits capteurs permettant à des ordinateurs sophistiqués de suivre leurs mouvements sur une scène. C'est la même technologie et les mêmes compétences qui servent à faire des films qui, comme Gravité, obtiennent des Oscars.
Nos membres constatent de plus en plus qu'ils peuvent vivre de ce genre de travail. Comme je l'ai dit, cela prend effectivement la forme d'autres types de prestations, comme à la télévision ou au grand écran.
Nous entretenons des liens solides avec plusieurs entreprises productrices de jeux, en particulier avec Ubisoft, le géant multinational de l'industrie qui est fermement engagé dans le développement des compétences en production de jeux au Canada et qui y investit beaucoup.
Nous avons avec Ubisoft un partenariat de longue date qui remonte à 1997. Nous avons travaillé fort à garantir des conditions de travail sûres et justes pour nos membres tout en veillant à la stabilité du secteur et en travaillant au développement de cette industrie importante et prospère.
En réalité, notre dernière entente avec Ubisoft porte sur un projet pilote novateur dont le but est d'aider Ubisoft à recourir aux services d'interprètes professionnels pour la création de jeux pour appareils portatifs, un secteur qui connaît une expansion très rapide.
C'est un bon exemple de la coopération au sein de l'industrie qui aidera le Canada à briller sur la scène internationale et à créer de bons emplois. Globalement, près de 400 membres de l'ACTRA ont gagné plus de 2 millions de dollars en 2013, en travaillant à des jeux vidéo. C'est une hausse de 10 % par rapport à 2012 — en une année seulement.
Je vais maintenant céder la parole à Simon Peacock, qui va parler concrètement du travail d'interprétation dans le domaine des jeux vidéo et des occasions d'emploi que cela représente.
Je vous remercie de cette occasion de m'adresser à vous.
Depuis quelques années, nous connaissons une croissance extraordinaire des occasions d'emploi qui s'offrent aux interprètes canadiens dans le domaine des jeux vidéo. Comme Marit l'a dit, nous prêtons nos voix à des personnages de jeux vidéo depuis l'installation d'Ubisoft à Montréal, en 1997. Plus récemment, nous faisons aussi des prestations pour la capture de mouvements et prêtons nos traits à des personnages grâce au balayage 3D du visage.
Des entreprises viennent de plus en plus s'établir au Canada, et les occasions d'emploi qui s'offrent aux acteurs ont explosé, de même que les types de prestations que nous sommes appelés à faire. Les nouvelles occasions comportent aussi de nouveaux enjeux, et nous nous attendons à ce que la croissance sans égale de cette industrie s'accompagne d'obstacles que le gouvernement pourrait d'après nous contribuer à abattre.
J'ai travaillé avec toutes les grandes entreprises productrices de jeux à Montréal. Elles veulent toutes travailler avec des interprètes professionnels, car elles constatent que nous leur épargnons de l'argent, que nos prestations sont de fort calibre et que nous comprenons comment le secteur fonctionne. Cependant, ces entreprises ont besoin que nous leur offrions davantage. Elles ont besoin d'un plus vaste bassin de professionnels talentueux capables de répondre aux exigences spécialisées de la production de jeux vidéo. Ce sont des compétences différentes, souvent à l'antipode de ce qu'on nous enseigne à l'école de théâtre.
Par exemple, quand nous travaillons dans un studio de capture de mouvement, il n'y a ni décor, ni maquillage, ni costumes. La capture de votre prestation se fait à 360 degrés au moyen de 200 capteurs, et ce, alors que vous portez une caméra montée sur un casque et une combinaison serrée qui comporte une dizaine d'autres capteurs. Vous avez des pages et des pages de texte à livrer et jouez de multiples personnages, le tout à une vitesse qui dépasse l'entendement de quiconque travaille dans un studio cinématographique. J'ai travaillé sur des plateaux de cinéma où on était très content d'avoir enregistré trois ou quatre scènes en une journée. J'ai travaillé dans des studios de capture de mouvement où nous avons enregistré plus de 100 scènes en une journée. La rapidité d'exécution est tout autre. Ajoutez à cela la complexité des technologies en constante évolution, et bien des acteurs se trouvent dépassés.
Ce genre de conditions de travail exige des compétences très spécialisées de la part des acteurs, et il leur faut pour cela une formation qui est tout aussi spécialisée. Pour répondre à ce besoin, l'ACTRA a entrepris d'offrir de la formation et des ateliers portant précisément sur les jeux vidéo à ses membres, afin qu'ils acquièrent les compétences que les entreprises recherchent.
À Montréal, dans le cadre d'une coentreprise incluant l'ACTRA, Eidos, Game On Audio et le gouvernement provincial, nous venons de terminer la formation de 32 acteurs à l'art de jouer pour des jeux vidéo, mais ce n'est pas assez.
Les programmes de théâtre de nos collèges et universités doivent se mettre à offrir de la formation pertinente à leurs étudiants. Il faut une formation qui leur donnera une base solide pouvant instantanément servir dans le vrai monde. Les établissements d'enseignement doivent prendre les choses en main. De même, les gouvernements devraient permettre aux interprètes qui en sont à mi-carrière d'accéder à la formation qui leur donnera les compétences qu'ils réclament. L'industrie du jeu aurait ainsi l'étendue et la variété de talents qu'elle recherche dans ses efforts pour se développer, prospérer et soutenir la concurrence mondiale.
Le comité veut savoir comment l'industrie demeure un modèle de croissance et d'innovation technologique, de succès commercial et de création d'emplois hautement spécialisés.
Selon le rapport produit par Nordicity pour l'Entertainment Software Association of Canada, il y avait 329 studios de toutes tailles en activité à l'échelle du Canada, en 2013. En 2012, l'industrie des jeux vidéo était directement responsable de 16 500 équivalents temps plein et, indirectement, de 27 000 équivalents temps plein. Au total, l'industrie des jeux vidéo a contribué à hauteur de 2,3 milliards de dollars au produit intérieur brut du Canada. En 2013, le secteur canadien des jeux vidéo s'est placé au troisième rang à l'échelle mondiale sur le plan de l'emploi.
Comment continuons-nous de garantir le succès et la croissance de l'industrie? Simon a souligné des façons dont le gouvernement peut aider, par la formation et l'éducation. Bien entendu, nous travaillons à l'échelle locale dans d'autres provinces aussi — notamment, à Toronto, de concert avec le Screen Industries Research and Training Centre, le SIRT, du collège Sheridan — à la création de programmes de formation à l'intention des étudiants et des interprètes qui sont déjà sur le marché.
Depuis le début de cette collaboration novatrice faisant intervenir le gouvernement, des établissements d'enseignement postsecondaire, des entreprises de production de jeux vidéo, des syndicats et des associations professionnelles, le SIRT a fait suivre à 120 interprètes un cours de formation en trois volets. Demain, 40 autres interprètes vont participer au plus récent cours offert au collège Sheridan.
Le gouvernement a contribué au développement de l'industrie canadienne du cinéma et de la télévision grâce à son appui au Fonds des médias du Canada, à Téléfilm et aux crédits d'impôt, et nous croyons que des mesures semblables pourraient aussi stimuler l'industrie des jeux vidéo du Canada. Le Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes appuie ce point de vue dans le rapport qu'il a publié en avril 2013 sur l'industrie canadienne du logiciel de divertissement après avoir entendu les témoignages de bon nombre des témoins présents aujourd'hui. Dans son rapport, il recommande entre autres que le gouvernement du Canada continue d'appuyer et de favoriser le succès de l'industrie au moyen de la formation de la main-d'oeuvre et de crédits d'impôt fédéraux.
Un crédit d'impôt axé sur la main-d'oeuvre a très efficacement contribué à bâtir l'industrie des jeux à l'échelle du Canada, y compris des centres d'excellence en Colombie-Britannique, en Ontario et au Québec. Le crédit d'impôt se fonde sur les coûts relatifs au personnel que les producteurs assument pour un produit interactif admissible. Cela encourage les entreprises à embaucher et à cultiver le talent localement, plutôt que de faire venir des travailleurs temporaires de l'étranger. Nous appuyons fermement des mesures qui ne feraient pas que permettre aux entreprises de jeux vidéo de prospérer au Canada, mais qui donneraient aussi lieu à la création d'un solide bassin de travailleurs talentueux et accomplis ici même.
Il faut absolument que le soutien du gouvernement à l'industrie canadienne des jeux vidéo, quel qu'il soit, accorde la priorité à l'embauche de talents canadiens. Il ne suffit pas d'appuyer les entreprises et la production de jeux vidéo. Il faut jumeler de telles initiatives à la formation d'interprètes qui seront capables de faire le travail spécialisé qu'il faut faire et, surtout, il faut garder ces emplois au Canada.
Comme je l'ai dit précédemment au sujet de la façon de faire croître ce bassin de talents et d'obtenir les compétences très particulières qu'il faut, nous serions ravis de travailler avec le gouvernement à créer les programmes de formation nécessaires à l'intention des interprètes canadiens. Si nous ne le faisons pas, les emplois et le travail s'en iront ailleurs. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser cela nous glisser entre les doigts.
Nos membres, les interprètes professionnels canadiens, peuvent faire ce travail, et nous sommes impatients d'en faire plus. Nous acquérons des compétences et devenons un effectif sur lequel les entreprises de jeux comptent, mais nous devons rester à la hauteur de la demande sans cesse croissante.
Je vais terminer en disant que nous sommes très enthousiastes devant les possibilités qui s'offrent à nos membres dans le domaine de la production de jeux vidéo. Le travail est dur, mais aussi gratifiant. Si nous pouvons garder les emplois, ce secteur pourrait profiter du soutien du fédéral dans le domaine de l'éducation et de la formation des réalisateurs, des écrivains et des interprètes, ici-même au Canada.
Monsieur le président, je remercie le comité de nous avoir invités à exprimer notre opinion sur l'industrie des logiciels de divertissement et des jeux vidéo.
Je suis le président et chef de la direction de l'Alliance interactive canadienne, une association transcanadienne englobant toutes les associations de médias interactifs de neuf provinces. Je suis aussi cofondateur de mon studio de jeux vidéo.
Dans le mémoire que nous vous avons distribué, nous vous présentons des données sur le profil de l'industrie interactive au Canada qui a été publié au début de décembre. Je ne vais pas parcourir toutes les données avec vous, mais je trouve très important de vous en faire part. Vous pouvez aussi voir tous les détails de notre étude sur notre site Web — ciaic.ca. Les 12 premières diapositives présentent la définition de notre industrie et des données générales à son sujet, mais je n'entrerai pas dans ces détails.
Une grosse partie de nos membres de partout au Canada évolue dans l'industrie des jeux vidéo. Deirdre Ayre en est une et elle représente Terre-Neuve. Elle va se présenter et traiter de certaines des questions présentées à partir de la diapositive 13.
Bonjour. Je suis ravie d'être venue appuyer Serge en tant que membre du conseil d'administration de l'Alliance interactive canadienne représentant Terre-Neuve-et-Labrador. Je suis chef de studio et copropriétaire de Other Ocean Group Canada Limited. C'est un studio de conception de jeux vidéo à Terre-Neuve-et-Labrador, ainsi qu'une entreprise d'assurance de la qualité des jeux vidéo à l'Île-du-Prince-Édouard.
Notre effectif est composé de 100 personnes talentueuses. L'année dernière, nous avons vendu à Electronic Arts les actifs de notre autre studio de l'Atlantique, lequel comptait quelque 45 employés. Notre entreprise a aussi un bureau d'expansion des affaires en Californie, à proximité de la plaque tournante de l'industrie.
La conception de jeux vidéo est une industrie mondiale qui génère des milliards de dollars et qui est de plus en plus concurrentielle. La concurrence est terrible parmi les fabricants de matériel informatique, les éditeurs et les studios de conception indépendants qui cherchent à se tailler une part du marché. Cela se traduit par une concurrence féroce pour l'obtention de capitaux d'investissement devant servir à engendrer des entreprises et à créer des droits de propriété intellectuelle, en plus de la concurrence qu'elles se livrent à l'échelle nationale et mondiale pour attirer les talents.
Chez nous, le volet expérimental du Fonds des médias du Canada est l'un des seuls programmes de financement viables pour les petites et moyennes entreprises de création innovatrices de propriété intellectuelle. Des quelque 365 millions de dollars distribués chaque année par le FMC, ce ne sont que 38 millions de dollars qui sont consacrés à ce volet particulier. Je souligne que, même si tous les volets sont importants pour diverses raisons, on nous dit que les projets relevant du volet expérimental donnent lieu à un taux de récupération supérieur à celui de tous les autres genres qui sont financés au moyen du FMC.
En gros, de nombreux projets financés en application du volet expérimental donnent un rendement qui permettrait le financement d'un plus grand nombre de projets encore. Cependant, étant donné que les revenus sont principalement générés par les exploitants de télédiffusion par câble et par satellite, on craint que le fonds diminue. Ce serait très dommageable, en plus d'entraver la croissance de nombreuses petites et moyennes entreprises de réalisation, souvent les contributeurs les plus novateurs et créatifs de notre industrie.
La pénurie de main-d'oeuvre qualifiée représente un autre enjeu de taille. Les entreprises s'affrontent entre elles, tout comme les provinces et les régions. La pénurie peut être paralysante pour certaines régions comme l'Atlantique, où nous nous trouvons, mais aussi pour le Manitoba, où l'industrie est relativement jeune. Ces régions ont souvent de la difficulté à attirer les talents parce que les entreprises sont généralement plus petites ou qu'elles en sont à l'étape du démarrage. On trouve plus risqué d'y déménager.
De plus, quand on fait appel à des travailleurs étrangers pour résoudre le problème, ces régions servent souvent de point d'entrée aux immigrants, lesquels, une fois devenus résidents permanents, déménagent dans les grands centres parce qu'ils sont plus multiculturels et que les grandes entreprises de production de jeux vidéo s'y trouvent. Il peut donc être très difficile pour les petites entreprises et pour certaines régions de garder les travailleurs étrangers.
Même s'il leur est difficile de garder la main-d'oeuvre, ces entreprises doivent absolument recruter des travailleurs étrangers pour se doter des ressources humaines nécessaires à la réalisation des projets, à la qualité du travail et au maintien de notre compétitivité.
De plus — et c'est sans doute l'un des principaux avantages du recrutement de travailleurs étrangers —, cela resserre le développement des capacités de la main-d'oeuvre locale. Les employés étrangers de rang intermédiaire ou supérieur qui sont embauchés viennent servir de mentors aux employés embauchés localement. Les retombées de l'embauche d'un travailleur de rang supérieur sur le transfert des compétences et la croissance des projets peuvent se traduire par l'embauche à l'échelle locale de trois ou quatre débutants qui n'auraient pas été embauchés autrement. Certaines entreprises chiffrent même les retombées à cinq ou six emplois locaux.
En ce qui nous concerne — et c'est sans doute le cas d'autres entreprises —, bon nombre des personnes que nous avons recrutées à l'étranger sont passées à l'enseignement collégial ou universitaire et transfèrent ainsi leurs compétences et leur précieuse expérience de l'industrie aux futurs réalisateurs canadiens. C'est un avantage qui est trop difficile à mesurer.
J'aimerais consacrer les quelques dernières minutes de notre exposé à trois autres questions pertinentes pour notre industrie.
Sur la diapositive 13, on voit que le problème numéro un est l'accès au financement de démarrage. En ce moment, il y a un nouveau fonds d'innovation qui est censé servir au financement des entreprises au moyen de capital de risque. Cependant, il ne convient pas aux entreprises qui ont besoin d'une aide financière au démarrage de 100 000 $ à 2 millions de dollars pour passer au niveau suivant.
Nous devrions aussi envisager la mise en oeuvre d'une politique de financement collectif comme ce qui existe déjà au Royaume-Uni et en Australie, de manière à démocratiser l'accès aux fonds propres, ici au Canada.
L'industrie des jeux vidéo de certains pays réussit très bien, notamment celle de la Finlande, avec son fonds Tekes, qui donne lieu à la création de droits de propriété intellectuelle énormes et à des marques connues dans le monde entier.
Je vais brièvement parler de la question mentionnée à la page 16. Pour nous, il est important de créer des droits de PI originaux canadiens, de créer des marques que les gens reconnaîtront et sur lesquelles les entreprises se fonderont pendant des années à venir. C'est une importante source de créativité et de croissance potentielle pour l'industrie canadienne, et nous croyons qu'il y a place à un crédit d'impôt, un peu comme ce qui se fait dans certaines provinces pour favoriser la création de droits de PI.
Enfin, nous pressons aussi le gouvernement de chercher de nouvelles façons de mieux commercialiser les produits. Le contenu est une chose, mais le marketing du produit est tout aussi important que le contenu. Nous croyons que des mesures pourraient être prises pour aider le Service des délégués commerciaux du Canada à commercialiser ces produits à l'étranger. Nous croyons aussi que la BDC et EDC pourraient faire en sorte de mieux comprendre ce marché en évolution rapide et se montrer plus disposées à prendre davantage de risques.
Il faut du financement plus direct pour la publication des titres réalisés ici. Malheureusement, nous concevons au Canada d'excellents produits, mais nous n'avons presque pas d'éditeurs pour l'étranger. Nous pensons aussi que le gouvernement du Canada pourrait contribuer au soutien des événements locaux de notre industrie, notamment le Sommet international du jeu de Montréal et la conférence GameOn: Finance de Toronto, ainsi que les associations qui les appuient et les présentent.
Bonjour. J'aimerais d'abord remercier le comité de me permettre de participer à l'étude sur l'industrie canadienne du logiciel de divertissement au Canada. Je crois que cette étude est nécessaire pour la viabilité à long terme de notre industrie.
Depuis trois ans, je suis professeur à l'École des arts numériques, de l'animation et du design de l'Université du Québec à Chicoutimi. J'y enseigne l'étude des moteurs de jeu ainsi que les méthodes de conception du jeu vidéo.
Préalablement nommée Centre NAD, notre institution de formation, basée à Montréal, oeuvre dans le domaine de l'animation 3D depuis plus de 20 ans, qu'il s'agisse d'effets visuels, de cinéma ou de jeux vidéo.
Je vais commencer par vous donner les raisons du succès de l'industrie canadienne, selon moi. Par la suite, je parlerai des défis futurs et ferai des recommandations au comité.
Premièrement, à mon avis, plusieurs facteurs expliquent le succès de l'industrie canadienne du logiciel de divertissement. Comme l'ont démontré les intervenants précédents, l'industrie du logiciel de divertissement est multidisciplinaire. Plusieurs personnes différentes doivent intervenir pour mener un projet à terme. Un des éléments de notre succès est la qualité et la diversité de la main-d'oeuvre. Celle-ci est hautement qualifiée, ce qui a certainement contribué à la réussite des projets.
Prenons l'exemple de Montréal. On y trouve autant des artistes dotés de beaucoup de créativité et d'imagination que des programmeurs et des techniciens très compétents. Par ailleurs, le fait que les entreprises aient profité d'un régime fiscal avantageux a encouragé ces dernières à s'installer à Montréal ou ailleurs au Canada. Le nombre d'emplois liés à ce secteur a connu une croissance phénoménale depuis le début des années 2000. On parle maintenant d'environ 10 000 emplois à Montréal seulement.
Au cours des prochaines années, l'industrie devra relever plusieurs défis. Un de ceux-ci est l'accessibilité à la main-d'oeuvre, qu'il s'agisse d'employés moins avancés ou d'experts. Il y aura une forte demande au cours des prochaines années. Afin de favoriser l'embauche de personnes hautement qualifiées, il serait souhaitable d'encourager les entreprises à libérer des employés pour leur permettre d'enseigner dans un cadre universitaire. Il peut être souvent difficile pour les entreprises, qui voient le profit et les recettes à court terme, de libérer les meilleurs employés pour l'enseignement, mais il faut penser à long terme.
Deuxièmement, il faut penser à la création de programmes de formation afin de favoriser le transfert de ressources hautement qualifiées d'autres domaines vers l'industrie du logiciel de divertissement. En effet, plusieurs développeurs ou programmeurs professionnels qui appartiennent à d'autres sphères ont des compétences très précises. Cela dit, le domaine du jeu vidéo est unique. S'il y avait des programmes de formation qui permettaient de faire un transfert des compétences vers le domaine du jeu vidéo, cela permettrait d'engager des experts en plus grand nombre.
Troisièmement, il faudrait soutenir le développement des compétences de la main-d'oeuvre dans un processus continu. Le Centre NAD, en plus d'offrir des programmes de baccalauréat et de maîtrise, offre aussi des formations privées destinées aux différentes entreprises.
Finalement, il faut également favoriser les stages en entreprise. Jusqu'à maintenant, il demeure difficile pour des étudiants de niveau moins avancé de trouver un poste de stagiaire en entreprise, et ce, pour différentes raisons.
Un autre défi de taille sera de favoriser la création de propriétés intellectuelles canadiennes. Jusqu'à maintenant, la plupart des entreprises qui se sont établies au Québec ou au Canada étaient étrangères. Cela dit, on voit de plus en plus de compagnies locales, mais peu de propriétés intellectuelles canadiennes ont été créées. Afin d'augmenter la quantité de propriétés intellectuelles canadiennes, il faudrait favoriser des partenariats en recherche-développement entre l'industrie et le réseau universitaire canadien, tant sur le plan technologique que sur le plan artistique.
Beaucoup de fonds sont disponibles pour la recherche dite appliquée en génie et en programmation, mais peu de fonds soutiennent l'évolution du domaine artistique, du design de jeux vidéo et du design de niveaux. Il faudrait rendre plus accessibles les fonds de recherche liés aux aspects visuel et narratif du domaine du jeu vidéo.
Nous allons entamer nos questions. Chers collègues, je vous rappelle que nous allons tout simplement donner huit minutes à chacun des membres du comité.
C'est très intéressant. Cette industrie est très importante.
(1555)
[Traduction]
Je suis fascinée par la divergence d'opinions au sujet du financement requis pour la formation. MM. Peacock et Landry ont exprimé des points de vue différents. Naturellement, vos collègues peuvent aussi répondre.
Si j'ai bien compris, l'un dit qu'il faut embaucher des Canadiens, et je pense que c'est Mme Ayre qui a dit qu'il faut veiller à recruter des personnes qui possèdent les compétences voulues pour cette industrie en croissance, peu importe d'où elles viennent. C'est une chose dont nous sommes bien conscients: nous avons de nombreux emplois sans personne pour les occuper, faute de trouver des gens qui possèdent les compétences voulues, mais nous avons aussi de nombreuses personnes sans emploi.
Vous pourriez commencer, madame Ayre, et nous en dire plus sur vos propos de tout à l'heure.
Je pense que, dans une certaine mesure, cela dépend de votre région. Cela dépend de la taille de l'entreprise pour laquelle vous travaillez. J'ai l'impression qu'une grosse partie du travail que ces gens font se déroule au sein de très grandes entreprises situées à Montréal, ce qui ne correspond pas à ma perspective, puisque je me trouve dans une autre région.
Nous exécutons du travail de développement pour des tiers, comme Ubisoft, et nous entretenons d'excellents liens avec eux, mais nos besoins à Terre-Neuve et à l'Île-du-Prince-Édouard sont différents de ceux des grandes entreprises de ces régions. De plus, nous parlons à un groupe très précis de... Je ne veux pas parler en leur nom, mais je parle des emplois typiques qu'on trouve au sein d'un studio de développement — des programmeurs, des artistes et des concepteurs — alors qu'ils parlent d'emplois très précis liés au travail de doublage, et d'acteurs. Mes entreprises ne font pas ce genre de travail. C'est très différent. Je ne pense pas que nos opinions seraient si divergentes. C'est tout simplement que...
Merci pour l'explication. Je vous en suis reconnaissante.
Revenons à l'aspect de la propriété intellectuelle dont vous avez parlé, monsieur Landry. Vous avez parlé de l'importance extrême d'un crédit d'impôt pour la créativité et la croissance. Je vous serais reconnaissante que vous nous en disiez rapidement plus.
Oui. Nous avons parlé du Fonds des médias du Canada, qui a financé environ 80 projets, l'année dernière, mais à qui on en avait présenté plus de 500. Les besoins chez les jeunes entreprises en démarrage qui proposent un contenu innovant et créatif sont donc énormes. Pour créer cette propriété intellectuelle, elles ont besoin d'un financement en début de croissance.
Prenez, par exemple, la société finnoise Supercell, qui a créé deux jeux depuis 2009. En novembre dernier, elle a vendu 51 % d'elle-même à la société japonaise SoftBank, pour 1,5 milliard de dollars. Vous pouvez donc imaginer le genre de prospérité que peuvent engendrer une marque, de la propriété intellectuelle originale.
[Français]
Je ne veux pas dénigrer les produits des compagnies étrangères qui sont faits au Canada, mais il y a une possibilité de tirer profit davantage, à plus long terme, des propriétés intellectuelles faites au Canada que des propriétés intellectuelles provenant de sociétés étrangères.
Il s'agit de créer de la richesse au sein des entreprises qui sont de propriété canadienne et qui resteront au Canada du fait que les actionnaires sont attachés à leur terre natale, si vous me permettez l'expression. Je pense qu'on a ainsi la possibilité de créer une industrie beaucoup plus solide, capable de produire ici et de mettre en marché une quantité beaucoup plus grande de produits.
Je pourrai revenir à une troisième remarque que vous avez faite, mais, d'abord, je tiens à mettre à contribution vos compétences à tous. C'est une industrie en croissance. Il y a une occasion à saisir. Récemment, la croissance a été phénoménale.
Qu'est-ce qu'il serait indiqué pour nous de faire pour maintenir cette croissance? Quelles mesures finiraient par stopper la croissance? Il importe, pour nous, de le savoir. Nous sommes tous pour la création d'emplois, pour la croissance et pour la prospérité à long terme pour tous les Canadiens. Nous ne voulons pas que l'intervention du gouvernement fausse tout. Qu'est-ce qui favoriserait ou qui entraverait la création d'emplois?
Comme j'ai dit, au sujet de la pénurie de compétences, il faut comprendre qu'un nouveau directeur artistique principal s'entourera d'adjoints, vers qui se fera le transfert de connaissances, et les adjoints peuvent finir par détenir un rang principal, où le cycle recommencera... C'est ainsi, d'après nous, que nous pouvons créer une industrie durable à long terme. Il faut veiller à ne pas être trop inter...
Laissez le champ libre aux créateurs, pour qu'ils prennent leur envol et, comme je dis, pour qu'ils commercialisent de l'excellent contenu et des marques excellentes.
Du point de vue des acteurs, il est très important que le travail reste ici. Beaucoup d'autres formes des médias ont connu une baisse notable, et le taux d'emploi des acteurs canadiens, au cinéma et à la télévision, a gravement fléchi au fil des ans. Les jeux vidéo ont, dans une grande mesure pris le relais pour les acteurs.
À de nombreux titres, c'est presque comme un filet de sécurité pour la culture canadienne. Si vous prisez les arts comme le théâtre, les jeux vidéo les subventionnent maintenant en grande partie. Je puis vous dire que la plupart des acteurs avec qui je travaille font aussi du théâtre, mais cela ne permet plus très bien de payer le loyer, malheureusement. Les jeux vidéo, eux, oui, et très bien, tout en continuant de croître. Mais, actuellement, des sociétés de jeux vidéo délocalisent très facilement nos emplois.
Pour nous, il s'agit de sensibiliser nos membres, de relever l'ensemble des compétences pour que ces compagnies puissent puiser dans un bassin de talents beaucoup plus gros. C'est plus facile pour elles de puiser dans un bassin local, de ne pas s'adresser à l'étranger. Beaucoup plus facile. Elles sont déjà sur place. Elles peuvent venir aux studios, assister à toutes les sessions, tout le temps. Elles sont directement là, en présence des acteurs. C'est toujours préférable pour elles. De plus, nos cachets sont très concurrentiels. Par exemple, à Londres et à Los Angeles, où je travaille aussi, le talent commande des cachets sensiblement plus élevés qu'ici.
Je pense qu'il s'agit simplement de sensibiliser l'industrie au fait que nous faisons ces programmes dans l'industrie, que nous créons ici plus de talents, capables, grâce à leur expérience des plateaux pour jeux vidéo, de s'acquitter directement de la tâche et de rivaliser dans ce domaine avec les acteurs de tout autre pays.
Cette industrie, comme le cinéma et la télévision, est internationale. Nous devons être mondialement concurrentiels. C'est la raison pour laquelle nous parlons tous de crédits d'impôt, d'incitations fiscales.
Parce que les autres pays en offrent de semblables. Comme l'industrie du cinéma et de la télévision, que nous connaissons très bien parce qu'elle emploie aussi beaucoup de nos membres, ces incitations nous permettent de rivaliser avec succès avec tous les autres pays qui nous font concurrence dans le même...
La dernière remarque, en fait, amène de l'eau à mon moulin. Des membres de l'industrie américaine, pas seulement des jeux vidéo mais aussi de l'animation, faisaient du piquetage, aux Oscars, hier soir, en raison des crédits d'impôt et de l'aide que nous accordons à notre industrie pour lui faire tenir le haut du pavé, ici.
Pour favoriser sa croissance, pas question de lever le pied. Dès qu'on le ferait, on se ferait dépasser. Le reste du monde prend le Canada pour modèle et veut l'imiter pour créer une industrie prospère des jeux vidéo. L'un de nos grands avantages sur la concurrence provenait du bassin des talents locaux. Il sera important, dans les années à venir, de continuer à encourager ce bassin pour faire croître l'industrie.
Je pense que les deux points de vue que nous avons entendus exprimaient deux facettes du même problème. La semaine dernière, Jason Della Rocca, qui collabore avec les petites entreprises y compris celles qui sont en démarrage, et Ubisoft nous ont expliqué les besoins très différents des grandes et petites entreprises, relativement à ce qui les aidera à réussir. Les grandes affrontent une pénurie de talents supérieurs locaux, ce qui les amène à en faire venir de l'étranger. Vous, vous dites qu'il faut faire venir ces talents pour enseigner à la relève locale, puis la former.
Bien sûr, l'arrivée de toutes ces grandes sociétés étrangères au Canada, comme EA et Ubisoft, aide à développer ce bassin, ce qui permet de maintenir la croissance. Nous aurons ensuite plus d'entrepreneurs et plus d'entreprises en démarrage et plus de petites sociétés. Si nous les aidons bien, ils croîtront et emploieront plus de Canadiens et plus de talents locaux. Ensuite, nous disposerons du bassin de talents locaux qui pourra alimenter les grandes sociétés aussi, parce que nous les avons entendues dire au comité qu'elles préféraient beaucoup plus embaucher les talents locaux, parce qu'il coûte très cher de faire venir quelqu'un de l'étranger. Il y a des frais de déplacement, une prime de déracinement. C'est en fait beaucoup moins cher d'embaucher du talent canadien local.
Cette industrie offre énormément de possibilités de croissance, et nous savons que sa contribution au PIB du Canada se chiffre à 3,2 milliards de dollars. D'après les petites compagnies, un plateau insonorisé ressemble à celui sur lequel j'ai déjà travaillé: un microphone entouré de sacs de couchage ouverts et, pour lire nos répliques, nous devions utiliser une lampe de poche. Il y a ensuite le studio de capture tridimensionnelle du mouvement, chez Ubisoft, qui est dirigé par un ex-membre d'Industrial Light & Magic, où les acteurs, portant tout un attirail de capteurs, sont dans une pièce où ils ne voient rien. Ils doivent imaginer la scène devant eux. Le réalisateur dirige la caméra vers eux et il peut voir la scène et tout l'arrière-plan. C'est un talent très particulier, et il faudra de l'aide pour en développer le bassin. Je suis heureux d'assister à la collaboration de l'ACTRA et de l'industrie pour le développer.
L'année dernière, on a versé 2 millions de dollars en salaires. C'est un bon montant. La plupart de ces emplois sont excellents et permettent d'élever une famille, mais il y a encore un nombre assez important de travail contractuel, temporaire et précaire.
Quelle solution aiderait le plus, à elle seule, aux acteurs à poursuivre une carrière active, formatrice et enrichissante, intellectuellement et matériellement, et leur permettrait d'améliorer leur niveau de vie?
L'idéal serait que plus de compagnies de jeux s'installent au Canada. Plus on produira de jeux ici, plus les acteurs travailleront. Plus de petites sociétés indépendantes en démarrage réussiront et utiliseront des acteurs syndiqués, le mieux ce sera pour nous.
Actuellement, pour la plupart des acteurs, les jeux vidéo fournissent un salaire d'appoint. Au Canada, très peu d'acteurs, malheureusement, sont capables de vivre d'une seule forme particulière de prestations. En général, nous avons beaucoup de casquettes: cinéma, télévision, radio, publicité, jeux vidéo, théâtre. Nous faisons tout ce qu'il faut pour payer nos factures, mais, comme je dis, les jeux vidéo gagnent en importance, de ce point de vue, pour beaucoup de nos membres.
Pour les interprètes, parce que c'est ce qu'ils sont, est-ce que la capacité d'étaler l'impôt sur le revenu sur de nombreuses années les aiderait à persévérer dans leur métier?
Oui. Absolument. La plupart de nos membres, comme Simon le disait, ont des revenus fluctuants. Il y a de bonnes années et de très mauvaises années. Je suis sûre que beaucoup d'entre vous ont rencontré de très grosses vedettes qui vous ont étonnés en affirmant que c'était leur lot, qu'après des années de vaches maigres, elles ont eu une année décente, où elles ont peut-être gagné 40 000 $ ou quelque chose comme ça, puis une autre mauvaise année. La fiscalité ne suit pas. Elles sont imposées comme si chaque année était excellente.
Pour les artistes indépendants, nous préconisons particulièrement l'étalement du revenu sur les années suivantes. Encore une fois, comme vous disiez, le travail sur un jeu vidéo n'est pas un emploi salarié. C'est un travail contractuel indépendant.
Monsieur Landry, je suis désolé de ne pas vous poser la question, parce que je dois aborder d'autres sujets. Il est à espérer que quelqu'un vous permettra de vous étendre sur le sujet.
Vous avez parlé de la société finnoise Supercell. Nous en avons entendu beaucoup parler de cette réussite par Jason Della Rocca, la semaine dernière.
Vous avez aussi mentionné l'apport de capitaux par externalisation à grande échelle, qui est de plus en plus utilisée par les sociétés en démarrage, au moyen, par exemple, de campagnes de relance qui, dans certains cas, ont pris énormément d'ampleur.
Chris Roberts, qui a aidé à développer les jeux Wing Commander, a fondé sa propre compagnie au moyen d'une campagne de relance qui a pris de l'ampleur, et, maintenant, Roberts Space Industries développe un nouveau jeu. Cette compagnie tout à fait nouvelle n'a rien développé avant. Grâce à l'externalisation à grande échelle, 401 594 investisseurs ont amené 39 652 743 $ dans ses coffres.
J'espère que, peut-être, quelqu'un pourra vous demander votre opinion à ce sujet ou, encore, que vous fournirez de plus amples renseignements, plus tard, au comité, sur l'aide à la croissance des sociétés en démarrage, dont c'est une des sources importantes de revenus, à part les crédits d'impôt, les subventions directes et le financement de l'État, parce que, malheureusement, notre bassin est limité.
Monsieur Peacock, vous avez parlé de l'éventualité d'une érosion de l'avantage concurrentiel du Canada, parce que d'autres pays sont à l'affût pour lui soutirer les entreprises et les talents. Pourriez-vous nous en dire davantage sur la façon, pour nous, de parer à ce genre d'accident?
C'est avant tout, comme nous avons dit, par la sensibilisation de nos propres membres, qui consiste à les amener tous au niveau où ils peuvent, dès le lendemain, arriver au studio et livrer leurs prestations directement, d'une manière très rapide et très efficace. D'autres pays disposent de programmes de formation de leurs propres acteurs. Nous devons aussi nous battre contre le vedettariat auquel des acteurs de l'étranger sont parvenus, mais les nôtres pas encore, mais c'est en train de changer, grâce aux jeux vidéo.
Je pourrai vous citer, par exemple Elias Toufexis, qui était dans Deus Ex, ou Michael Mando, dans Far Cry 3, deux acteurs connus de tous sur la planète jeux. En fin de compte, il s'agit donc, pour le Canada, de faire accéder ces acteurs au vedettariat sans les obliger à quitter le pays, contrairement aux Jim Carrey et aux Mike Myers, qui doivent s'exiler aux États-Unis pour se faire un nom.
Chers collègues, je tiens à vous rappeler la présence de M. Benoit. Je sais que les personnes physiquement présentes sont toujours plus faciles à voir, mais nous avons un témoin, ici, par téléconférence, donc...
Je tiens à remercier nos invités, présents grâce à la visioconférence ou en personne, et qui représentent différentes branches de leur industrie.
À mon avis, c'est vraiment fascinant. J'ai entendu Mme Stiles et M. Peacock dire que les acteurs canadiens ont gagné quelque 2 millions de dollars pour leurs prestations dans le domaine de la vidéo. Madame Stiles, vous avez mentionné Gravity. Je pense que Sandra Bullock a fait 20 millions grâce à ce film. Pour moi, le rapport est quelque peu bizarre.
Monsieur Benoit, je vais peut-être commencer par vous. Vous semblez seul, là-bas, alors, si vous n'y voyez pas d'objection, j'aimerais vous poser quelques questions.
À propos, je pense que vous êtes le seul de tous nos invités à avoir loué sérieusement le gouvernement canadien. Je le dis seulement parce que je pense que c'est toujours facile, dans ce genre d'exposé, de préciser ses besoins, ses volontés. Ceux qui nous écoutent sont toujours mieux disposés quand nous les félicitons. C'est une opinion comme ça. Si je félicitais un acteur, il serait peut-être mieux disposé envers moi, si je lui demandais un café ou quelque chose comme ça. C'est une opinion comme ça.
Monsieur Benoit, dans l'une de vos premières observations, vous avez parlé d'animation 3D. J'ai été particulièrement intéressé par les propos de l'ACTRA, au sujet du rôle joué par ses membres.
Où se situe l'animation 3D dans tout cela? J'essaie de savoir ce que vous en pensez. Est-ce le filon dans les jeux numériques? Pouvez-vous m'aider à comprendre son rôle dans l'industrie?
Oui. Comme on l'a déjà dit, le jeu vidéo est très multidisciplinaire. Il comporte quatre grandes facettes: la conception, la programmation, le design, qui comprend le design de jeux et le design de niveaux, ainsi que l'aspect visuel. Il ne faut pas non plus oublier le son et la musique.
L'animation 3D fournit un environnement de jeu particulier qui vient susciter des émotions. Pour certains, cet aspect est secondaire. On conçoit donc des jeux vidéo ayant une jouabilité intéressante. Cependant, de plus en plus, les joueurs ou les utilisateurs veulent avoir une expérience visuelle intéressante, ce qui fait en sorte que l'animation occupe une place de plus en plus grande dans les différents jeux vidéo.
Vous avez également mentionné l'importance des programmes de formation pour transférer ces compétences dans d'autres domaines. Vous avez souligné l'importance des programmes de deuxième et troisième cycles, et je dois admettre bien honnêtement que je n'y avais pas pensé beaucoup avant de me rendre compte que...
Vous devez comprendre que je viens de London, en Ontario, qui est la 10e ville en importance au Canada, si vous ne le saviez pas. Je vous le précise parce que nous mettons beaucoup l'accent sur le jeu vidéo à London. Juste à côté, il y a Waterloo et Stratford, où le jeu vidéo est un domaine florissant, ce qui nous ramène à ce qui se fait à l'Université Western.
Est-ce que vous faites allusion à la R-D, aux programmes universitaires et peut-être même aux programmes collégiaux?
Comment pourrions-nous nous améliorer, si ce n'est pas le bon exemple?
J'ai parlé de deux sortes de formation. D'abord, il y a la formation universitaire classique. Il s'agit pour la plupart de jeunes étudiants qui veulent apprendre un nouveau métier, et on devrait les encourager en ce sens. Presque la moitié des cours sont offerts par des professeurs, et l'autre moitié, par des chargés de cours. À notre école, nous nous considérons comme chanceux d'avoir accès au bassin de ressources de Montréal, qui regorge de talents et de personnes prêtes à enseigner. Ensuite, il y a l'apport de l'industrie, qui est très important, car cela vient compléter la formation des étudiants, tant sur le plan des compétences et des connaissances que sur le plan du réseau de contacts.
Il faudrait encourager les entreprises à prêter leurs ressources humaines. Je sais que ça peut sembler compliqué de libérer un très bon animateur ou concepteur de jeu pour qu'il puisse venir enseigner un après-midi par semaine pendant 15 semaines, mais au final, l'industrie y gagne, quand nos jeunes sont mieux formés. Il a été question de faire venir des experts d'autres pays pour enseigner à nos apprentis. De la même façon, on pourrait demander aux experts locaux de venir leur enseigner. C'est le premier aspect.
Il y a autre chose qu'il faudrait faire. Il y a plusieurs très bons ingénieurs logiciels qui travaillent dans différents domaines, que ce soit dans l'aéronautique, dans l'aérospatiale ou dans le domaine médical. Dans certains cas, il y a une baisse de l'emploi et les ressources demeurent locales. Cependant, les compétences de ces ingénieurs ne correspondent pas tout à fait à celles que nécessite l'industrie du jeu vidéo. Il faudrait donc donner de la formation professionnelle pour réorienter les compétences, par exemple transférer les connaissances acquises dans le domaine de l'aéronautique vers celui du jeu vidéo.
Madame Ayre, je vous ai entendue dire qu'il était difficile, au Canada, de retenir les travailleurs étrangers, je crois que c'est ce que vous avez dit, parce que nous les perdons au profit des grands centres. J'ai ensuite entendu nos sympathiques témoins de l'ACTRA nous dire que nous avions besoin d'un plus vaste bassin de talents et que nous devions cibler les Canadiens d'abord et avant tout.
Comment pouvons-nous concilier tout cela? Madame Stiles, avez-vous des réflexions à ce sujet? Est-ce que j'ai mal compris?
Si vous me le permettez, comme vous l'avez déjà mentionné, ils parlent en particulier de l'aspect développement et conception, alors que nous parlons plutôt du travail des artistes-interprètes.
Nous savons que dans le monde de l'interprétation, il y a beaucoup d'artistes qui ont...
Nous avons un vaste bassin de talents, des personnes de mieux en mieux formées, qui connaissent bien le domaine, qui ont un savoir-faire, mais il faut mettre davantage l'accent sur les programmes de formation visant à leur enseigner ce type de travail particulier. Il faut les financer davantage. C'est assez différent de ce que mes amis ici viennent de décrire.
Oui, bien sûr, mais avant de vous donner la parole...
Monsieur Peacock, vous avez mentionné que Mike Myers et Jim Carrey étaient partis aux États-Unis. Nous entendons toujours parler d'artistes canadiens qui partent, comme cela.
Il y a ensuite le grand Victor Garber et la grande Sandra Oh, qui gagnent très bien leur vie de la même façon ici, au Canada. Nous pourrions nommer des dizaines d'artistes qui connaissent le même succès.
Je ne suis pas certain de vouloir revenir à l'exemple de Sandra Bullock et à la comparaison entre 20 millions de dollars et 2 millions de dollars pour toute l'industrie, du moins pour cet aspect du domaine, mais je suis époustouflé de tout le talent canadien qui brille ici.
Madame Ayre, vous vouliez répondre à la question précédente.
Notre entreprise, par exemple, a produit probablement une cinquantaine de jeux depuis cinq ou six ans. Nous n'avons jamais eu besoin d'embaucher un acteur, jamais...
...parce que nous travaillons dans des espaces différents. Vous parlez des titres AAA. Ce n'est qu'un aspect de l'industrie du jeu vidéo. Il y a des dizaines, des centaines d'entreprises qui n'utiliseront jamais ce type de talent. Bien que ce soit une facette très importante pour des sociétés comme Ubisoft et Electronic Arts, ce n'est tout simplement pas une chose dont nous avons besoin.
Bienvenue parmi nous. Je vous remercie de nous aider à comprendre l'importance de cette industrie et les possibilités qu'elle présente.
Monsieur Landry, vous avez évoqué dans votre exposé la création d'un organisme indépendant de l'édition canadienne non exclusif. Pouvez-vous nous expliquer un peu pourquoi vous croyez que ce serait l'option à privilégier en ce moment?
C'est une avenue potentielle. Ce serait une possibilité, parce que le problème, en ce moment, c'est que les entreprises doivent investir autant d'argent dans le marketing et la distribution des produits que dans leur conception elle-même.
Même si les obstacles à l'entrée sont moins élevés avec les nouvelles plateformes mobiles, il y a beaucoup de concurrence sur le marché pour faire connaître le produit par les utilisateurs les plus riches, qui sont prêts à payer pour du contenu. C'est là où la véritable guerre se joue. C'est une guerre sur le contenu, mais il faut aussi faire en sorte que le produit se trouve dans le plus grand nombre de mains possible.
En ce moment, comme je l'ai dit, les développeurs canadiens n'ont d'autre choix que de s'adresser aux éditeurs européens, américains ou asiatiques pour commercialiser leurs produits et en tirer des revenus. S'il existait une agence canadienne structurée pour pousser les petites entreprises en démarrage, les aider à faire connaître leurs produits dans les différents marchés du monde, ce pourrait être très avantageux à long terme.
Avez-vous eu l'occasion de faire valoir votre idée au gouvernement, de lui recommander cette solution parmi toutes les mesures à prendre pour accompagner cette industrie, qui a une grande capacité de croissance?
Je pense que cela vient du fait que c'est là où les premiers AAA de l'industrie ont été financés. Notre industrie est encore toute jeune. Nous ne nous y investissons vraiment que depuis 1997.
Il y a une culture du développement qui existe ici depuis longtemps, mais il en va tout autre de l'édition. Je pense que c'est ce sur quoi il faut miser. Il faut changer cette culture. Surtout compte tenu de toutes les nouvelles plateformes qui existent, nous pourrions éditer les titres canadiens produits par des sociétés canadiennes.
Vous nous avez également parlé du collège Sheridan et des programmes de niveau collégial qui offrent toutes sortes de possibilités à nos jeunes pour bâtir leur avenir.
Avez-vous approché les directeurs d'autres collèges à ce sujet? Vous avez mentionné Sheridan en particulier, mais y a-t-il d'autres collèges qui offrent des programmes ciblés dans le domaine dont vous nous parlez?
En ce moment, d'après mon expérience à Montréal, il n'y a aucun collège qui en offre. Le syndicat local de l'ACTRA vient de lancer un programme de sensibilisation. Nous avons approché les directeurs d'établissements comme l'École nationale de théâtre et le Collège Dawson, qui offre un programme en théâtre.
Nous essayons d'être plus actifs de ce côté et de commencer à proposer des changements aux programmes, en gros, pour que ces jeunes aient les compétences requises pour se tailler une place sur le marché du travail quand ils vont obtenir leur diplôme. En ce moment, lorsqu'ils sortent de l'école de théâtre, ils arrivent dans une industrie qui semble essentiellement en dormance pour eux.
Je peux peut-être vous parler un peu des autres disciplines.
En design artistique et en programmation, à l'Île-du-Prince-Édouard, le Collège Holland et l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard se sont tous deux dotés d'un programme de conception de jeux vidéo. La plupart des modules sont enseignés par des gens du milieu, qui travaillent pour notre entreprise ou d'autres entreprises de Charlottetown.
À Terre-Neuve, le Collège de l'Atlantique Nord a également embauché un spécialiste du secteur privé pour diriger le programme de conception de jeux vidéo. Notre entreprise participe fréquemment à des programmes coop avec Memorial, en engageant des étudiants en génie et en science informatique.
Il y a donc déjà beaucoup de choses qui se font. Je pense qu'il faut surtout...
On dirait que vous auriez besoin de ce genre de collaboration dans votre domaine. Dans la région atlantique, les collèges et les universités travaillent déjà beaucoup avec nous.
Il faut multiplier les occasions de collaboration. C'est très exigeant pour une petite entreprise comme la nôtre, qui doit se débrouiller pratiquement toute seule. Nous aurions besoin de soutien pour pouvoir travailler directement avec les établissements d'enseignement.
Il ne faut pas oublier non plus que les recrues ne peuvent pas nous fournir la qualité de produit dont nous avons besoin pour rester concurrentiels. Au bout du compte, il y a une limite au nombre de jeunes que nous pouvons embaucher. Notre entreprise aura toujours besoin d'employés chevronnés, et en ce moment, nous devons encore les recruter dans d'autres régions, souvent même à l'extérieur du pays.
Je suis toujours surprise que nous n'ayons pas plus d'employés chevronnés ici. Est-ce qu'ils quittent le Canada, qu'ils vont à l'étranger puis reviennent, est-ce qu'ils voyagent? Je serais portée à croire qu'il y a pas mal de Canadiens ayant ce genre de compétence.
Nous avons beaucoup de difficulté à recruter des gens de l'ouest de notre région. Évidemment, selon les politiques en vigueur, nous devons essayer de le faire avant d'embaucher quelqu'un de l'extérieur, et nous le faisons. Nous préférons embaucher des Canadiens. Comme on l'a dit, c'est évidemment moins coûteux et c'est la bonne chose à faire, mais il n'y a tout simplement pas d'intérêt. Il y a un biais négatif à l'égard du Canada atlantique dans le reste du pays, à mon avis et d'après mon expérience, c'est pourquoi nous avons beaucoup plus de succès lorsque nous cherchons à l'étranger.
En fin de semaine, je parlais de cette industrie avec une personne qui a travaillé dans le domaine pendant une courte période, qui a envisagé d'y faire carrière, mais qui s'est rapidement rendu compte qu'il fallait travailler de 80 à 100 heures par semaine pendant très longtemps pour concevoir un produit. Habituellement, la personne est ensuite mise à pied lorsque le produit est terminé. Il y a énormément de jeunes qui entrent dans l'industrie, mais qui la quittent parce que la paie est trop basse et qu'ils ne touchent absolument aucun avantage.
De même, nos acteurs se battent continuellement pour produire et essayer de gagner un revenu décent et d'obtenir une certaine reconnaissance, puisque c'est habituellement ce qui leur permet de gagner un revenu moyen, mais c'est propre à cette industrie.
Il est vrai qu'il fut un temps, avant que j'arrive dans l'industrie, où l'on entendait dire que les gens travaillaient de longues heures. Ce n'est toutefois vraiment pas le cas dans notre entreprise. Nous ne voudrions pas épuiser nos employés. Nous respectons les lois sur les normes du travail de la province concernée, donc il est évident que nous ne voudrions pas et que nous ne pourrions pas leur imposer cela.
Nous offrons aussi à nos employés une couverture complète d'avantages sociaux. Nous faisons tout cela. De toute évidence, votre ami a vécu une expérience différente, mais je pense qu'aucun de nos employés ne se sent comme ça.
Monsieur le président, je vais partager mon temps avec M. Holder.
Monsieur Benoit, vous avez mentionné à quel point il était important d'avoir des programmes de formation à différents niveaux. C'est une compétence qui relève des provinces. Vous avez aussi parlé de stages. Il y a divers stages fédéraux possibles, des partenariats avec des entreprises, des collèges et des universités.
Avez-vous examiné ces programmes et le cas échéant, qu'est-ce qui empêche les gens de postuler pour ces stages dans l'industrie?
Comme mentionné, les étudiants qui sortent des institutions ne sont pas des employés chevronnés, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas toutes les compétences nécessaires. Une entreprise comme Ubisoft, par exemple, qui compte 3 000 employés, peut recruter quelques stagiaires et s'en occuper. Cela dit, les entreprises un peu plus petites n'ont pas le loisir ou le temps de s'occuper des différents stagiaires. C'est un des facteurs qui rendent difficile le placement des diplômés en stage, contrairement à d'autres domaines comme l'ingénierie. Ce que je dis ici s'applique uniquement à l'animation 3D.
Il y a une proposition de programme de subventions à l'emploi au Canada, auquel nous sommes en train de mettre la touche finale, je présume. Croyez-vous qu'avec ce programme, les petites entreprises seraient prêtes à verser une contribution financière, en argent ou en dons de services en nature, pour permettre à l'un de ces étudiants de terminer sa spécialisation technique?
Je dois avouer qu'il m'est difficile de savoir quelles mesures incitatives les entreprises aimeraient avoir pour accueillir plus de stagiaires. Pour ma part, je sais qu'il y a une certaine difficulté à trouver des places en entreprise même pour des stages non rémunérés. Je ne suis pas certain que ce soit uniquement une question de salaire. C'est plutôt une question de temps alloué à la formation des ressources.
En fait, dans les dernières années, Ubisoft a lancé une initiative pertinente. Elle a lancé un concours interuniversitaire auquel plusieurs universités du Québec et de partout au Canada peuvent participer. Chaque université envoie un prototype de jeu ou un concept original. Un concept est sélectionné, puis on forme une équipe d'une quarantaine à une cinquantaine de personnes. Par la suite, le jeu est produit dans les locaux de l'université. Il y a d'abord un mentorat de la part de professeurs, puis de la part de professionnels d'Ubisoft.
Je crois qu'Ubisoft a créé une belle formule qui génère de 40 à 50 offres de stage par année. À mon avis, c'est une nouvelle forme de stages qui peut bien fonctionner.
Oui. Le fait d'avoir eu sous la main ces stagiaires et d'avoir pu les regarder travailler pendant de trois à quatre mois, soit la durée de l'école d'été, a permis à l'employeur de mieux examiner plusieurs aspects. Il a pu observer non seulement les compétences techniques et le côté artistique des stagiaires, mais également le côté collaboratif, le savoir-être, c'est-à-dire la façon dont la personne travaille en équipe et communique avec les autres. Ce sont là des facettes importantes de l'employé.
On peut regarder rapidement les statistiques. Sur la quarantaine de personnes qui ont fréquenté la dernière école d'été, je crois qu'Ubisoft a gardé entre 20 et 30 personnes. Je ne peux pas m'avancer, mais je crois que cela a été un bon modèle pour la rétention de nouveaux employés au sein d'Ubisoft.
Monsieur Benoit, j'aimerais parler encore un peu avec vous des stages et du modèle que vous avez en tête. Voici ce que je pense. Vous avez cité les ingénieurs en exemple, mais je peux vous dire qu'au Canada, si vous croyez qu'il s'agit d'un modèle, ce n'est pas du tout le cas.
Bien sûr, il y a des entreprises, des petites comme des grandes, qui acceptent des stagiaires dans différentes professions, soit dit en passant, pas seulement en génie. Ce qui arrive ensuite, surtout pour les petites entreprises, c'est que les grandes entreprises viennent leur couper l'herbe sous le pied. Elles viennent les chercher. Mme Ayre nous a parlé un peu plus tôt des travailleurs étrangers temporaires qui venaient pour obtenir leurs documents de travail, puis qui partaient soudainement au profit de la grande ville.
Soit dit en passant, il n'y a rien de mal à vivre à St. John's, Terre-Neuve, je dois vous le dire, si vous n'en étiez pas certain.
Voici mon argument. Mme Gallant vous a demandé s'il existait vraiment un modèle dont vous pouviez vous inspirer, pour le genre de programme de stages qui vous conviendrait. Je suppose qu'on peut prendre l'exemple du modèle européen pour les métiers. Tout le monde doit payer une cotisation ou accueillir obligatoirement un stagiaire, tout dépendant de la taille de l'entreprise, mais ce n'est pas le modèle en vigueur au Canada.
Je ne sais pas trop s'il y en a un qui pourrait fonctionner dans le contexte. Si vous pensez à un régime qui vous semblerait raisonnable, je sais que les membres du comité seraient ravis de l'entendre.
Je me permets de citer les universités québécoises, entre autres l'École de technologie supérieure et l'Université de Sherbrooke, qui offrent depuis une dizaine d'années un programme coop. Ce programme exige que l'étudiant fasse trois stages rémunérés en entreprise. L'École de technologie supérieure et l'Université de Sherbrooke ont toutes deux prouvé que ça pouvait être un bon modèle à la fois pour les entreprises et pour les étudiants, qui ont un très bon taux de placement.
Compte tenu de l'importance de l'industrie, je crois que les témoignages d'aujourd'hui et les témoignages précédents nous rappellent clairement l'importance des acteurs dans l'industrie, et je ne veux pas nécessairement dire d'acteurs membres de l'ACTRA, bien qu'ils ne soient évidemment pas exclus. J'essaie de comprendre leur importance dans la belle province et pourquoi ce n'est pas la même chose dans tout le pays. Je crois que c'est une industrie promise à une grande croissance. Je m'imaginerais que UBC et Western, dans ma belle ville, ou d'autres universités du pays, comme à Charlottetown, voudraient toutes reproduire ce programme. Pourquoi ne le font-elles pas, selon vous?
Je n'ai malheureusement pas la réponse à cette question. Le domaine du jeu vidéo est encore un peu jeune. C'est un nouveau secteur qui n'a pas le réflexe d'aller voir les universités, par exemple, pour la recherche-développement ou pour les stagiaires, comme c'est le cas dans les télécommunications. Par exemple, Motorola a une philosophie et une culture d'entreprise qui la poussent à recruter beaucoup plus de stagiaires.
C'est intéressant. J'adore les témoins d'aujourd'hui parce qu'ils remettent à peu près tout en question, ce qui rend les choses intéressantes. Madame Stiles, je vais vous confronter un peu, gentiment. Nous avons déjà un système qui prévoit qu'on s'occupe des acteurs, des programmeurs ou des technologues les années où ils gagnent moins, comme les années où ils gagnent plus. C'est ce qu'on appelle le régime de la Loi de l'impôt sur le revenu.
Ma première question s'adresse à M. Jocelyn Benoit.
J'aimerais revenir sur la mise en perspective très intéressante que vous avez faite. Vous avez dit que la dynamique dans votre milieu était axée sur le court terme, et que cela pouvait être un problème inquiétant pour l'avenir.
Croyez-vous que le fédéral a un rôle à jouer et qu'il pourrait offrir une perspective à plus long terme pour assurer ce développement et permettre aux entreprises de rester concurrentielles?
Je crois que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle par l'entremise de fonds de recherche. Une bonne partie de la croissance provient de la recherche-développement qui se fait dans les universités canadiennes. Dans d'autres cultures ou d'autres domaines, c'est très imprégné. Par exemple, il existe un partenariat entre Autodesk et différentes universités montréalaises et canadiennes. Dans le domaine du jeu vidéo, on a un peu moins ce réflexe. Une des raisons de cet état de fait est que le jeu vidéo n'est pas un domaine unique. On y trouve de tout. Bien sûr, des fonds sont attribués à la programmation et au génie logiciel, qui sont des composantes connues et balisées. Cependant, on aurait avantage à consacrer plus d'argent à la recherche-développement dans les domaines du design, de l'aspect visuel et de l'animation 3D, entre autres.
Nos compagnies veulent grandir, mais pour l'instant, elles assument la plus grande partie du risque. Lorsqu'il y a une interaction entre une université et une entreprise, l'université assume une bonne partie du risque, et, par la suite, l'entreprise fait du développement en fonction des recherches de l'université. En mettant sur pied plus de fonds ou en établissant des fonds de recherche propres aux jeux vidéo, pas seulement en programmation ou en intelligence artificielle, mais aussi dans d'autres domaines comme le design et l'aspect visuel, les entreprises pourraient bénéficier à long terme de la recherche faite au sein de nos universités. Il y aurait, d'une part, les résultats de nos recherches et, d'autre part, la formation de personnel hautement qualifié aux niveaux de la maîtrise et du doctorat.
Je n'ai peut-être pas bien suivi votre témoignage ou vos réponses, mais la semaine passée, des témoins ont déclaré avoir de grands besoins en personnel de gestion et de direction. Souvent, on doit se tourner vers l'étranger pour trouver des gens ayant la compétence de diriger des projets.
Développez-vous ce genre de compétences? Envisagez-vous de le faire?
Je vais faire un bref historique du Centre NAD. Il y a cinq ans, le Centre NAD n'offrait qu'une formation privée d'un an en animation 3D. On y apprenait comment modéliser un personnage, comment l'animer, comment faire le rigging et ainsi de suite. Depuis, nous avons fait le virage universitaire en offrant un baccalauréat de trois ans qui comporte des cours de communication et de gestion. Nous voulons former des personnes multidisciplinaires, et non pas seulement des artistes spécialisés en design visuel.
Monsieur Landry, parmi les problèmes dont vous saisissez notre comité, j'aimerais parler du cinquième, soit la commercialisation des produits.
Je suis député depuis presque trois ans. J'ai eu le plaisir et l'honneur de siéger au Comité permanent du commerce international. Cela a été une expérience très intéressante, cependant j'ai été désolé d'y constater que le Canada semblait de moins en moins concurrentiel sur la scène internationale, entre autres dans ses tentatives de percer des marchés. Je suis conscient que le monde change passablement et que, contrairement à ce qu'on pourrait croire, le libre-échange ne semble plus constituer une priorité dans beaucoup de pays. Nos entreprises canadiennes se heurtent à des mesures protectionnistes de plus en plus importantes dans plusieurs marchés, entre autres dans les marchés émergents.
Quoi qu'il en soit, concentrons-nous sur ce que nous faisons. Vous signalez le Service des délégués commerciaux du Canada comme une avenue qui peut être utilisée pour soutenir la croissance et aider la mise en marché. Par contre, ce service doit aujourd'hui relever le défi d'en faire plus avec moins. Est-ce pour vous une préoccupation par rapport à l'offre de services?
Tout à fait. Même si les produits sont aujourd'hui dématérialisés, en ce sens qu'on ne vend plus les produits dans des boîtes, mais que tout est distribué en mode numérique, il n'en demeure pas moins qu'il faut trouver des partenaires pour nous aider à faire voir ces produits dans les marchés émergents. J'ai travaillé dans la vente toute ma vie. Peu importe le produit que l'on vend, on le vend à des gens; on vend quelque chose à quelqu'un. Il vous faut donc un intermédiaire pour vous présenter ce quelqu'un, qu'il soit à Beijing, à Accra, au Ghana, ou à Stockholm. Ça prend des gens qui connaissent les acteurs locaux, qui peuvent vous ouvrir les portes de ces marchés.
Ce n'est pas à distance qu'on peut être en mesure de comprendre, par exemple, le marché culturel chinois. J'étais à Beijing en octobre dernier avec le ministre Lisée dans le cadre de sa mission économique. Il est important de constater par nous-mêmes l'état de la situation commerciale dans ces pays, de découvrir qui sont les intervenants, les opérateurs et les distributeurs des produits, qui sont les plus performants, avec qui nous devrions nous associer pour nous assurer que notre produit ou notre jeu connaisse du succès dans ce marché.
Il y a aussi tout l'aspect de la localisation de son produit. Certains jeux ne peuvent être vendus tels quels dans des marchés extérieurs, mais doivent être adaptés à la culture du pays.
Les délégués commerciaux peuvent nous présenter les bonnes personnes et nous expliquer les différences importantes qui nous permettront de percer ces marchés.
Y a-t-il des marchés qui vous semblent actuellement négligés, qui ne sont pas suffisamment couverts? Je pense spontanément au continent africain, qui constitue un marché très dynamique. Bien sûr, le développement s'y fait d'une façon inégale, mais avec des taux de croissance quand même importants, l'Afrique offre de belles perspectives d'affaires.
Dans notre secteur d'activité, l'Afrique offre un certain potentiel de croissance. Il faut dire qu'il y a peu d'utilisateurs de consoles, et les téléphones mobiles commencent à s'implanter dans quelques pays.
En ce moment, les entreprises canadiennes devraient porter une attention particulière aux marchés d'Asie, que ce soit le Japon, la Corée ou la Chine. Ces pays ont d'énormes masses critiques d'utilisateurs, et un jeu peut y connaître un succès étonnant s'il réussit à percer le marché. La plupart des entreprises sont actuellement tournées vers les marchés traditionnels que sont l'Angleterre, les États-Unis et l'Europe. Selon moi, il y aurait lieu de revoir notre façon de produire et de commercialiser nos produits sur les marchés asiatiques.
Merci infiniment, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue à tout le monde ici présent, ainsi qu'à M. Benoit, qui nous suit par vidéoconférence.
Je ne suis pas un membre régulier du comité. Je remplace l'un de mes collègues. J'aimerais vous poser une question, toujours sur les pénuries de main-d'oeuvre que vous connaissez.
Vous ne connaissez pas de pénurie de main-d'oeuvre vous-même, mais c'est un problème pour beaucoup d'entreprises, particulièrement pour les emplois spécialisés. C'est un énorme problème dans notre économie, pour nos entreprises, notamment dans le secteur du bâtiment, où il manque constamment de soudeurs, de machinistes ou de je ne sais quoi d'autre.
Je suis un peu confus. J'ai un peu l'impression que nous sommes pris dans un cercle vicieux ou une impasse. Vous n'avez pas le personnel dont vous auriez besoin parce qu'il n'y a pas de formation offerte. Je ne comprends pas vraiment la vraie raison à cela, parce que ce n'est pas comme pour les pénuries de main-d'oeuvre dans les métiers spécialisés, où la mentalité selon laquelle un jeune doit aller à l'université pour réussir nous nuit. Il faudra bien changer cette mentalité un jour.
Dans votre domaine, il faut des compétences techniques poussées. Où sont vraiment les lacunes? Il y a un bassin excédentaire d'artistes au Canada. Il y a un bassin excédentaire d'artistes en général. Je suppose qu'ils auraient besoin d'une quelconque formation pour pouvoir répondre à vos besoins particuliers, mais il y a beaucoup d'artistes de la scène et d'artistes visuels pour qui il est presque impossible de trouver un emploi. Où est donc le problème?
On parle de maraudage. Je suis très étonné, en fait. Je suis toutefois optimiste pour l'avenir, parce que lors d'une consultation prébudgétaire, j'ai entendu un représentant de Target nous dire que Target ne faisait pas de maraudage. L'entreprise procède de manière très civilisée. Elle parle d'acquisition de talents, ce qui change sûrement tout pour tout le monde. Cela veut dire la même chose, je suppose.
Où sont les lacunes? Où est le problème? On parle de stratégie nationale, mais où sont les universités? Où sont les collègues? Pourquoi ne réagissent-ils pas aux besoins du marché?
Je pense qu'ils y réagissent, mais il faut comprendre que le domaine du jeu vidéo évolue très vite. Les outils que nous utilisons aujourd'hui pour créer des jeux n'existaient pas il y a quatre ans. Le temps que les universités et les collèges se rattrapent pour suivre ce qui se passe dans les entreprises, il y aura de nouvelles plateformes... Même pour les acteurs, la technologie de la capture de mouvement n'existait pas il y a quatre ans.
Il faut former les personnes qui vont devoir travailler avec ces nouveaux outils et ces nouvelles technologies. C'est pourquoi on trouve du savoir-faire à l'étranger, parfois là où ces technologies ont été créées. C'est la raison pour laquelle nous avons besoin d'aller chercher des spécialistes à l'étranger, des gens qui connaissent ces nouvelles technologies, pour les enseigner aux jeunes d'ici, pour les aider à acquérir les compétences voulues.
À la diapositive 14, au point 2, qui concerne la pénurie de travailleurs qualifiés, vous indiquez ce qui suit:
Les barrières à l'immigration doivent tomber. Les travailleurs étrangers qualifiés sont essentiels à la viabilité et à la croissance de notre industrie. Ils fournissent non seulement la main-d'oeuvre nécessaire, mais sont la clé du transfert de compétences et de mentorat de notre talent local.
Vous avez parlé de la dynamique et du fait que l'industrie est nouvelle. Qu'est-ce que les autres pays font mieux que nous pour disposer des compétences nécessaires qui nous font défaut? L'industrie est relativement nouvelle, et c'est un nouveau domaine dans ces pays. Je ne sais pas exactement ce qu'il en est.
C'est plus nouveau pour nous. Les jeux vidéo sont issus de deux grands centres créatifs qui sont en avance sur le Canada, soit la Californie et le Japon, d'où viennent également un grand nombre de travailleurs qualifiés. Notre industrie est plus jeune que la leur, c'est certain. C'est à peine si elle existait avant 1997.
Que devrions-nous absolument faire, selon vous, pour que l'armée de jeunes qui ne peuvent trouver d'emploi et qui ne sont pas loin des domaines qui vous intéressent puissent acquérir les compétences nécessaires pour trouver du travail et faire croître votre industrie?
Si je peux me permettre, je pense une fois de plus qu'il faut que les gens d'expérience agissent comme mentors auprès des jeunes pour qu'ils puissent travailler à des projets créatifs et à des innovations conçues en ce moment même au sein des entreprises. C'est ce qui permettra à ces jeunes d'enseigner à d'autres jeunes et d'être leurs mentors dans l'avenir.
Je comprends, mais qui est censé s'en occuper? Est-ce que ce sont les entreprises, les collèges, un peu des deux ou dans le cadre d'une collaboration entre les deux? Comment pensez-vous qu'on pourrait s'y prendre?
En ce qui concerne ce que vous avez dit plus tôt, il n'y a tout simplement pas assez de gens d'expérience. Nous ne manquons pas de gens qui satisfont aux normes qui sont peut-être appliquées aux États-Unis, au Royaume-Uni ou ailleurs. Nous en avons. Mais nous n'en avons pas suffisamment pour suivre le rythme accéléré avec lequel l'industrie prend de l'expansion au Canada. Il nous en faut davantage.
De plus, comme je l'ai indiqué, la situation diffère d'une région et d'une province à l'autre en raison de la taille des entreprises. Certaines d'entre elles comptent trois ou quatre employés, alors que d'autres en ont 3 000. Elles n'auront pas toutes les mêmes besoins, même s'il semble que nous convenons tous qu'une pénurie de compétences sévit. Il faut donc faire plus de transfert d'information sur le plan des compétences.
Je crois que M. Benoit a soulevé d'excellents points, et comme Serge l'a fait remarquer, l'industrie évolue à vitesse grand V. Nous devons offrir des programmes de formation continue même aux travailleurs hautement qualifiés parce que le domaine évolue très rapidement. Ce n'est vraiment pas une situation que nous avons déjà vue. Comme bon nombre des problèmes sont nouveaux, nous n'avons pas pu planifier en conséquence. Les choses changent si rapidement.
Monsieur Benoit, je vois que vous prenez des notes. S'il nous reste du temps à la fin, nous essaierons d'accorder quelques instants à tout le monde pour récapituler.
J'aimerais remercier tous les témoins de participer à notre réunion d'aujourd'hui et de nous faire part de leurs commentaires sur cette industrie, qui est très importante pour notre économie.
Ma première question s'adresse à tout le monde. Est-ce qu'il est important de mettre en oeuvre une stratégie numérique afin d'assurer la croissance de votre industrie? Si oui, qu'est-ce que cette stratégie devrait contenir afin de permettre à l'industrie du jeu et du divertissement de se développer?
On parle depuis longtemps de cette stratégie numérique pour le Canada. Il est important de bien déterminer ce qu'on veut comme type d'entreprises, comme type d'industrie. À cette fin, on peut jumeler les besoins exprimés par des formateurs comme M. Benoit avec ceux exprimés par de grandes entreprises, comme les Ubisoft de ce monde, et par de plus petites, comme celle de ma collègue Deirdre.
Dans l'élaboration d'une telle stratégie, on doit tenir compte de tous ces besoins. Oui, il faut prendre le temps d'analyser, mais il faut également agir. À ce moment-ci, il est plus que temps d'agir.
Il est primordial que la future stratégie numérique favorise la création d'une propriété intellectuelle canadienne, mais il ne faut pas mettre de côté le reste de l'industrie. Les sociétés étrangères qui viennent au Canada sont importantes, mais je crois que l'avenir passe également par le soutien aux petites entreprises qui démarrent et qui veulent créer quelque chose de nouveau et appartenant au Canada. Cela passe entre autres par la R-D et l'investissement.
Je reviens sur ce que j'ai dit tout à l'heure. Il faut répartir le risque entre l'industrie et les entreprises de formation, dont les différentes universités canadiennes. C'est ce qui est fait dans d'autres domaines mieux établis, notamment ceux de la construction.
Selon nous, il faudrait élaborer une politique qui permettra d'établir la stabilité au sein de l'industrie afin que les compagnies de jeux en place continuent de prospérer, que les petites compagnies puissent prendre de l'expansion et que nous puissions attirer plus d'acteurs de l'industrie au Canada. À titre de membre de l'industrie, je considère que ce serait une bénédiction. Toutes ces formidables entreprises créeraient des jeux du tonnerre, ce qui nous permettrait d'accomplir un travail extraordinaire et de faire briller le Canada, comme certaines compagnies le font déjà. Je pense que c'est la continuation de ce que nous voudrions voir.
Nous constatons également que d'autres pays deviennent de plus en plus entreprenants, au point où ils nous font perdre des travailleurs qualifiés. Un grand nombre de travailleurs qualifiés des deux côtés de l'industrie quittent le pays. Je sais que Londres, en Angleterre, se montre de plus en plus hardie et s'intéresse aux employés les plus talentueux dans l'industrie des jeux vidéo. Je travaille tout le temps avec les entreprises. Je suis toujours dans des studios où je côtoie des gens qui travaillent avec ces entreprises. J'ai donc pu observer par moi-même le roulement de personnel au sein de l'industrie. Ceux qui sont là aujourd'hui sont partis le lendemain.
Ma prochaine question s'adresse davantage à M. Landry, mais si d'autres témoins veulent intervenir également, je les invite à le faire.
Il y a convergence vers les tablettes et les jeux plus mobiles. Quels défis cela représente-t-il pour les entreprises de ce secteur? Qu'est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour vous aider à relever ces défis?
Les défis sont énormes. Comme je l'ai dit, l'industrie évolue très rapidement. Les méthodes de monétisation des produits mis en marché aujourd'hui sont encore en élaboration. On est encore en train d'expérimenter ces méthodes. De plus, on doit conserver ici les connaissances acquises dans ce domaine.
On a parlé plus tôt des talents dans le domaine de la gestion et de la direction. On a dit que l'aspect commercial de l'industrie devait être mieux encadré. Malheureusement, on ne vend plus des boîtes aujourd'hui, mais des produits dématérialisés. Comment pouvons-nous mieux faire connaître nos produits? J'ai justement déjà suggéré qu'on crée une agence canadienne d'édition pour aider les entreprises à faire connaître leurs produits.
En novembre 2011, nous avons lancé nous-mêmes notre jeu, et cette journée-là, 1 172 autres nouvelles applications ont été mises en marché dans l'App Store. Vous vous imaginez le défi que cela représente de nous démarquer de la masse.
Si nous discutons de façon plus générale pendant un moment, nous voudrions que le CRTC s'intéresse aux services contourneurs et intervienne à cet égard. À l'heure actuelle, nous ne disposons d'aucun moyen de nous assurer qu'un pourcentage des revenus découlant de la diffusion de contenu par les fournisseurs de services contourneurs est réinvesti dans la production de contenu canadien, comme c'est le cas pour les transmissions télévisées régies par le CRTC. Nous comptons lui en parler dans le cadre de son examen Parlons télé.
Ma prochaine question porte sur les fonds de recherche-développement.
Dernièrement, il y a eu des changements dans les programmes de recherche-développement. Quelles répercussions ces changements ont-ils eues sur vos entreprises?
À vrai dire, je connais moins bien cet aspect de l'industrie. Bien entendu, la recherche-développement est un élément clé de la croissance de notre industrie, étant donné toutes les technologies émergentes, par exemple l'impression 3D. À mon studio, nous faisons de la réalité augmentée et nous investissons beaucoup d'argent dans ce volet.
Effectivement, on a alloué beaucoup d'argent à la recherche appliquée et un peu moins à la recherche fondamentale, de sorte que les domaines de l'animation 3D, des arts et du design sont un peu laissés de côté. Pourtant, c'est une partie très importante du domaine du jeu vidéo. C'est la même chose en ce qui concerne la recherche dans les arts dramatiques, pour le théâtre et les acteurs.
Monsieur le président, dans la mesure où les réponses ne sont pas trop longues ou, pire encore, où les commentaires de l'intervenant restent assez brefs, je partagerai mon temps avec Mme Bateman.
En guise de prologue, sachez que mon bon ami, M. Côté, a formulé une observation. Nous sommes tous deux membres du Comité du commerce international. Il a fait une observation sur l'importance du commerce et les défis que posent les marchés émergents.
Il serait intéressant que vous comparaissiez à un moment donné devant le Comité du commerce international pour lui permettre de comprendre quels sont les aspects de l'AECG qui pourraient avoir une incidence sur votre industrie.
J'ai peut-être mal compris, mais j'aimerais m'assurer que tout est clair dans le compte rendu. Je dirais que le gouvernement s'efforce vraiment de favoriser la conclusion d'accords commerciaux plus nombreux et plus solides. Maintenant que nous avons conclu notre accord économique et commercial global avec l'Europe, nous aurons maintenant, grâce à l'ALENA et à l'AECG, deux des plus forts marchés du monde, lesquels comptent quelque 950 millions de personnes.
Et ce n'est pas terminé. Nous mettons l'accent sur l'Alliance du Pacifique et le Partenariat transpacifique, et portons attention au Japon, à l'Inde et à la Corée du Sud. Vous n'aviez probablement pas besoin de le savoir, mais j'ai entendu mon collègue et ami le faire remarquer. Je voulais simplement clarifier les faits.
J'ai appris une leçon dans tout cela: le prototype du parfait concepteur de jeux numérique n'a pas 23 ans, ne porte pas nécessairement un jeans, bien que je sois curieux, et n'arbore pas de lunettes épaisses. Ces employés ressemblent beaucoup à Dan Harris, à ce qu'on m'a dit. Que Dieu vous vienne en aide si c'est le cas, mais c'est ainsi.
Voici la question que j'ai pour nos amis ici présents.
Monsieur Peacock, vous avez fait une observation plus tôt au cours de votre témoignage. Vous avez indiqué que la télévision perd des plumes. J'ai réfléchi longuement et sérieusement à la question. Vous avez indiqué que les jeux vidéo ont, dans une certaine mesure, pris le haut du pavé parce que les acteurs se sont investis de façon très positive dans le domaine. J'espère que la gratification financière est au rendez-vous.
Mais n'est-ce pas logique? Je pensais à Postes Canada. Quels défis la société doit-elle relever? Il y a un million d'envois postaux de moins chaque année. À quels défis la télévision est-elle confrontée? Je pense que les gens se tournent de plus en plus vers les ordinateurs, et que les petits enfants délaissent la télévision au profit des jeux vidéo.
N'est-ce pas logique? N'est-ce là qu'une sorte d'évolution? Imagineriez-vous qu'on puisse revenir à la télévision, ou est-ce un vestige du bon vieux temps maintenant? Vous êtes jeunes, mais est-ce le bon vieux temps?
À mon avis, c'est probablement le bon vieux temps. Avec l'évolution des médias, je pense que nous constaterons que la télévision éprouve de plus en plus de difficultés à se faire une place. On peut déjà voir le modèle avec Netflix et House of Cards, par exemple. C'est ainsi que les gens veulent regarder la télévision maintenant. Le produit lui-même, le résultat final, est très semblable, mais le mécanisme de diffusion change.
J'ai entendu Mme Stiles indiquer que le gouvernement fédéral pourrait offrir un crédit d'impôt axé sur la main-d'oeuvre, si j'ai bien compris. Vous avez indiqué qu'un tel crédit est offert dans quatre provinces, mais j'en ai manqué une. Il y avait la Colombie-Britannique, je crois...
Ais-je dit quatre? Je pensais avoir dit trois, mais je revérifierai. Je sais qu'il y a la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Québec. J'ignore si une autre province offre un crédit d'impôt.
Le savez-vous, Simon?
Je peux le revérifier pour vous et vous dire ce qu'il en est ultérieurement.
Comme je suis tout le contraire de M. Harris, c'est-à-dire assez âgé, mon ouïe m'a peut-être joué un tour. Mais je poursuivrai avec ce qui suit.
M. Peacock, lorsqu'il a parlé des programmes de formation, a indiqué que l'éducation et la formation devraient relever du gouvernement fédéral. Dans les deux cas, Mme Stiles et M. Peacock ont fait référence à l'éducation et à la formation provinciales. Nous accordons effectivement des sommes d'argent aux diverses provinces, mais la question est de compétence provinciale.
Même si certaines difficultés se posent, comme les obstacles au commerce interprovincial et à la mobilité de la main-d'oeuvre, je ne suis pas certain que votre industrie y soit confrontée; mais je devrais peut-être vous le demander. Est-ce que la mobilité de la main-d'oeuvre constitue un problème pour vous?
Oui. Si vous voulez emmener quelqu'un de l'Île-du-Prince-Édouard ou de Terre-Neuve à Toronto ou à Montréal, par exemple, est-ce problématique? Est-ce facile à faire?
C'est généralement facile. Il est vrai que quand le crédit d'impôt axé sur la main-d'oeuvre dépend entièrement sur le lieu de résidence, il pourrait y avoir un problème, mais de façon générale, ce n'est pas pour 100 % de la main-d'oeuvre. Je ne pense donc pas que cela signifie...
... qu'il faille encourager les autres provinces à offrir davantage de crédits d'impôt axés sur la main-d'oeuvre, si vous considérez que c'est une partie de la solution?
Oui. J'entends par là que nous continuons certainement de travailler avec les provinces, mais en ce qui concerne l'industrie du film et de la télévision, le gouvernement peut mettre en oeuvre des programmes d'incitatifs fiscaux également. Nous avons évidemment constaté que les provinces se font concurrence. Or, nous voudrions être tous ensemble concurrentiels à l'échelle internationale et aussi bénéficier de crédits d'impôt accordés, comme je l'ai souligné plus tôt, en fonction de la résidence au Canada, comme c'est certainement le cas pour nos membres.
Monsieur Landry et madame Ayre, c'est intéressant. Il semble que l'industrie soit relativement jeune à tous les égards. Je crois que nous convenons tous qu'au regard de l'âge du Canada, l'industrie est relativement jeune, mais tous les groupes que j'ai entendus ont probablement indiqué qu'elle ne vit que grâce aux crédits d'impôt.
Mon épouse est propriétaire du plus ancien magasin de fleurs au Canada, qui existe depuis 1869, si vous êtes curieux. Si je vous dit cela, c'est qu'elle ne bénéficie pas de crédits d'impôt. Ma fille exploite une magnifique boutique de chocolats belges, auxquels vous voudriez goûter. J'aurais dû en apporter et je m'excuse de ne pas l'avoir fait. J'y penserai la prochaine fois. Elle ne reçoit pas de crédits d'impôt. Elle bénéficie toutefois des mesures que toutes les entreprises reçoivent, c'est-à-dire des avantages fiscaux fédéraux. Les impôts fédéraux ont diminué, Dieu merci.
Qu'est-ce qui vous différencie du magasin de fleurs de mon épouse ou de n'importe quel commerce sur la rue, même les compagnies relativement nouvelles? Sincèrement, ces entreprises ne devraient-elles pas recevoir des crédits d'impôt elles aussi? J'essaie de comprendre.
Monsieur Landry, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
Je dois faire attention. Il y a deux manières d'examiner la question. On veut attirer les plus grosses entreprises, et il importe que ces dernières puissent maintenir à long terme les investissements qu'elles effectuent dans un pays. Or, les industries des jeux vidéo ou du pétrole ont besoin de crédits d'impôt pour effectuer ces investissements à long terme.
Les crédits d'impôt aident également les petites entreprises à continuer d'avancer et à optimiser le peu d'argent dont elles disposent. Quand on a très peu de capitaux, il faut le faire durer longtemps. Voilà pourquoi les crédits fiscaux sont importants.
Peut-être pourriez-vous vous joindre à la conversation quand je dis à mon épouse qu'elle s'engage dans une nouvelle industrie maintenant, peut-être avec vous.
Vous avez parlé d'une entreprise qui a été vendue à une compagnie japonaise pour 1,5 milliard de dollars. Était-ce une entreprise canadienne? C'était une entreprise finnoise.
C'est intéressant. Est-ce qu'on augmente la valeur d'une entreprise canadienne? Nous voulons tous que les entreprises canadiennes se développent et qu'elles embauchent plus de Canadiens. Je suis d'accord avec les gens de l'industrie. J'aime l'idée d'embaucher davantage de Canadiens et de les faire passer en premier.
Toutefois, quand vous en arrivez là, est-ce que vous déménagez subitement vos activités en Californie parce que vous obtenez un meilleur crédit d'impôt? Ou est-ce que vous vendez votre entreprise pour une plus grosse somme d'argent et que, du jour au lendemain, tous ces Canadiens perdent leur emploi? Est-ce le risque? Est-ce qu'il s'agit là d'une procédure normale en affaires?
Je vais allouer trois minutes à chacune des organisations pour que vous puissiez conclure vos observations. Par conséquent, les personnes qui le souhaitent peuvent inclure la réponse dans leur conclusion. Nous devons toutefois nous limiter à trois minutes, car nous devrons ensuite discuter des travaux du comité.
Je vais répondre à votre question plutôt que faire une conclusion.
Mon frère a étudié dans une université aux États-Unis. Il s'avère qu'il est né là-bas, car mon père y étudiait à l'époque. Il s'y est donc établi et a lancé une compagnie de jeux vidéo en 1990 en Californie. Il a toujours rêvé de démarrer une entreprise au Canada. Quand j'ai examiné la situation, il n'était pas avantageux pour lui de le faire dans le Canada atlantique, mais il a malgré tout investi à l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve. Il a depuis vendu une grande partie de ses intérêts en Californie et il se concentre sur ses entreprises canadiennes. Il a fait l'inverse.
Je tiens à préciser qu'il n'y a pas de crédits d'impôt provinciaux à Terre-Neuve ni à l'Île-du-Prince-Édouard. Vous pouvez le dire à votre femme.
Je suis heureux que nous ayons terminé avec une belle histoire canadienne. Madame Stiles, auriez-vous quelque chose à ajouter avant la fin de la séance?
Non. J'aimerais simplement remercier le comité pour toutes ses excellentes questions et l'intérêt qu'il porte à cette étude. Cette industrie très prometteuse revêt une grande importance pour nos membres et pour beaucoup de Canadiens. Je suis ravie que cette étude ait lieu.
J'aimerais conclure tout simplement en remerciant encore une fois le comité de réaliser cette étude pertinente.
J'aimerais revenir sur un point très important, selon moi, c'est-à-dire la création de propriétés intellectuelles pour les entreprises canadiennes. Je pense que, à moyen ou à long terme, cela va nous permettre ou, à tout le moins, maximiser nos chances de garder les emplois au Canada, au lieu de les envoyer dans d'autres pays.
Merci beaucoup à tous nos témoins. Je sais que tous mes collègues ont beaucoup appris grâce à vos témoignages éloquents.
Nous allons faire une pause d'une minute, après quoi nous reprendrons nos travaux à huis clos. Durant la pause, je suis certain que les membres du comité voudront tous vous remercier et vous saluer chaleureusement.