:
La séance est ouverte. Je vous souhaite la bienvenue à la 11
e séance du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes. Le Comité se réunit aujourd'hui pour étudier les effets sur la santé mentale de la situation d’urgence à laquelle les Canadiens font face avec la deuxième vague de la pandémie de la COVID-19.
Pendant la première heure, nous accueillons M. Paul Kurdyak, clinicien-chercheur, du Centre de toxicomanie et de santé mentale; Mme Lisa Watts, fondatrice et directrice générale, de la Hub Town Brewing Company; M. Saleem Spindari, gestionnaire principal, Programmes pour les réfugiés et les travailleurs migrants, de MOSAIC; et Mme Christine Grou, présidente, et Mme Isabelle Marleau, directrice, Qualité et développement de la pratique, de l'Ordre des psychologues du Québec.
Je mentionnerai la liste des témoins de la deuxième heure un peu plus tard.
Je vais commencer par vous donner quelques renseignements.
À la suite de la motion qui a été adoptée par la Chambre le mercredi 23 septembre, le Comité se réunit maintenant en format hybride, ce qui veut dire que les députés peuvent participer en personne ou par vidéoconférence. Tous les députés, peu importe leur mode de participation, seront comptés pour le quorum.
Le pouvoir du Comité de siéger est toutefois limité par l'utilisation prioritaire des ressources parlementaires, qui est déterminée par les whips. Toutes les questions doivent être décidées par appel nominal, sauf celles agréées du consentement unanime ou avec dissidence.
Enfin, le Comité peut délibérer à huis clos, pourvu qu'il tienne compte des risques de bris de la confidentialité inhérents à ce type de délibérations avec des participants à distance.
Les délibérations seront accessibles depuis le site Web de la Chambre des communes, et je rappelle que c'est toujours la personne qui parle qui apparaît à l'écran, plutôt que l'ensemble du Comité.
Voici maintenant quelques règles à suivre pour assurer le bon déroulement de la séance.
Les personnes qui participent à distance, députés comme témoins, peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts, et vous avez le choix, au bas de votre écran, entre « Parquet », « Anglais » et « Français ». Avant de prendre la parole, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Quand vous avez terminé de parler, désactivez votre micro afin de réduire le plus possible les interférences.
Je vous rappelle que toutes les interventions des membres du Comité et des témoins doivent être faites par l'intermédiaire de la présidence. Si un député désire demander la parole en dehors de la période qui lui est réservée pour ses questions ou intervenir sur le rappel au Règlement d'un autre député, il doit activer son micro et indiquer qu'il invoque le Règlement.
Si un député veut participer au débat — il n'y a pas de débat sur les rappels au Règlement, en passant —, il doit utiliser la fonction « Lever la main ». La présidence saura ainsi que vous souhaitez prendre la parole et pourra créer une liste d'intervenants. Pour utiliser cette fonction, vous n'avez qu'à cliquer sur l'icône « Participants » au bas de votre écran. Lorsque vous voyez apparaître la liste, cliquez sur l'icône « Lever la main » qui se trouve à côté de votre nom.
Lorsque vous avez la parole, veuillez vous exprimer lentement et clairement. À moins de circonstances exceptionnelles, l'utilisation d'un casque d'écoute muni d'un microperche est obligatoire pour tous les participants à distance.
Si un problème technique survient, veuillez en aviser la présidence. Il est à noter qu'en pareil cas, nous pourrions devoir interrompre nos travaux pendant un moment, car nous devons nous assurer que tous les députés peuvent participer pleinement à la séance.
Pour ceux qui participent en personne, veuillez procéder de la manière habituelle lorsque l'ensemble du Comité se réunit en personne dans la salle de comité. Veuillez respecter les directives du Bureau de régie interne en ce qui concerne le port du masque et les protocoles en matière de santé.
Si vous souhaitez attirer mon attention, je vous prie de me faire un signe de la main ou de m'interpeller par mon nom au moment opportun. Si vous souhaitez invoquer le Règlement, veuillez attendre le bon moment pour me l'indiquer clairement.
Pour ce qui est de la liste des intervenants, le greffier du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour la tenir à jour, que vous participiez à la séance en personne ou virtuellement.
Je tiens à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui. Vous disposez de sept minutes pour présenter votre déclaration liminaire.
J'essaie quelque chose de nouveau au sein du Comité — du moins pour moi. Lorsqu'il vous restera une minute, je vais vous montrer le carton jaune. Il n'est sans doute pas jaune à l'écran. Lorsque votre temps sera écoulé, je vais vous montrer le carton rouge. Veuillez alors conclure rapidement.
Je vais faire de même pour les députés pendant leur période de questions.
J'invite tout d'abord M. Paul Kurdyak, clinicien-chercheur, du Centre de toxicomanie et de santé mentale, à prendre la parole.
Allez-y, monsieur. Vous avez sept minutes.
:
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner.
Pour commencer, il ne fait aucun doute que les conséquences de la pandémie sur la santé mentale sont préoccupantes. C'est pour toutes sortes de raisons, mais vous avez soumis cinq questions ou domaines d'intérêt.
Les deux premières questions — les répercussions de la pandémie sur la santé mentale de certaines populations et les répercussions sexospécifiques — témoignent d'un désir de comprendre les besoins de la population en matière de santé mentale, y compris chez des groupes particuliers. Les deux autres — la disponibilité des programmes de soutien et le rôle des soins virtuels — sont liées à la nécessité de comprendre l'accessibilité des services. Le dernier domaine porte sur le rôle du gouvernement fédéral dans la satisfaction de ces besoins.
Ce sont toutes des questions importantes à considérer. Cependant, le point principal que je voudrais faire valoir est que si nous avions des systèmes de santé mentale qui fonctionnent correctement, y compris des systèmes de gestion de l'information correctement intégrés dans chaque province et territoire, ces informations seraient facilement disponibles.
L'absence d'information sur les besoins de la population en matière de santé mentale ou de toxicomanie, ou les services requis pour répondre à ces besoins, ne se limite pas à la pandémie de la COVID-19. Nous ne savons toujours pas grand-chose de l'état de santé mentale de la population canadienne ni des services qui existent pour répondre à ces besoins. Il faut pouvoir disposer de ces informations pour surveiller le rendement du système de santé mentale, et l'absence de telles informations signifie que les décideurs politiques ne sauront pas comment répondre adéquatement aux besoins.
Comment avons-nous déterminé les besoins de la population au Canada? La principale source d'information a été générée par les enquêtes de Statistique Canada. Si les enquêtes ont été incroyablement utiles pour mesurer la prévalence des troubles mentaux les plus courants, elles ne permettent de mesurer l'état de santé mentale qu'à un moment précis. Or, une pandémie évolue de façon très dynamique.
En l'absence d'informations précises et à jour, les sociétés de sondage et les petites enquêtes de faible qualité ont généré des résultats sensationnalistes. Mes collègues, le Dr Scott Patten et le sénateur Stan Kutcher, ont expliqué pourquoi ces enquêtes ne remplacent pas une surveillance adéquate, et pourquoi le fait de s'appuyer sur elles pour répondre aux besoins des Canadiens en matière de santé mentale est une mauvaise politique.
Depuis 2015, en Ontario, le ministère de la Santé a financé le programme de recherche sur la santé mentale et la toxicomanie ICES. Nous sommes une équipe de scientifiques, d'épidémiologistes et d'analystes de recherche qui travaillent en étroite collaboration avec les décideurs politiques.
Nous utilisons les données administratives sur la santé de l'Ontario pour cartographier le rendement du système de santé mentale de la province. Nous avons obtenu beaucoup de renseignements détaillés sur l'accès aux soins et les résultats de certaines populations avant la pandémie. Je vous présente ici quelques faits saillants.
Entre 2009 et 2017, le taux de visites aux urgences liées à la santé mentale et à la toxicomanie a presque doublé chez les jeunes en âge de transition, c'est-à-dire les jeunes âgés de 16 à 24 ans. Près de la moitié des jeunes qui se sont rendus aux urgences pour des raisons de santé mentale et de toxicomanie n'avaient pas été hospitalisés auparavant, ce qui signifie qu'ils se présentaient aux urgences — la moitié d'entre eux — comme leur premier point de contact.
Seules deux personnes sur cinq qui se sont rendues aux urgences pour une tentative de suicide ont vu un psychiatre dans les six mois qui ont suivi cette tentative. Nous pouvons mesurer facilement tous ces indicateurs, et ils indiquent que le système n'était pas particulièrement réactif avant la pandémie.
Nous utilisons également ces mêmes données en ce moment pour comprendre les répercussions de la pandémie. Par exemple, nous pourrions déterminer si les personnes qui avaient accès aux services avant la pandémie continuent ou non de recevoir des services depuis le virage important vers la prestation virtuelle. Nous voulons également comprendre si la demande de services augmente à mesure que la pandémie progresse, notamment pour ce qui est des indicateurs liés à la toxicomanie et au suicide.
Avant la mise en place du programme de santé mentale et de toxicomanie ICES, les Ontariens en savaient très peu sur le rendement de leur système de santé mentale. Le même type de données que nous utilisons en Ontario existe dans chaque province et territoire. En procédant à un investissement modeste et coordonné, il serait possible de mesurer le rendement du système de santé mentale dans chacun d'eux.
Des organismes tels que l'Institut canadien d'information sur la santé, ou ICIS, pourraient jouer un rôle de coordination au niveau fédéral. Certaines initiatives émergentes, comme le Réseau de recherche sur les données de santé, pourraient également être mises à contribution pour ce type d'activité.
De plus, ces mêmes données peuvent servir à mesurer l'incidence des investissements dans le temps. Le travail que nous faisons au sein d'ICES est utile pour montrer ce qui se passe avec les données dont nous disposons. Il n'est pas utile pour mesurer les besoins de la population. Pour cela, nous avons besoin de nouvelles infrastructures. Actuellement, les services destinés aux personnes souffrant de maladie mentale et de toxicomanie sont loin d'être coordonnés.
En Ontario, nous prévoyons développer un accès régional centralisé. La mise en place d'un accès centralisé remplira plusieurs fonctions.
Premièrement, il s'agira d'un lieu central auquel les personnes pourront avoir accès pour répondre à leurs besoins de santé mentale au lieu d'avoir à comprendre les différents services offerts dans leur créneau de population. Deuxièmement, au fil du temps, il caractérisera les populations qui demandent des soins afin que les besoins puissent être mesurés de manière dynamique. Troisièmement, une fois ces besoins compris, il sera possible de déterminer si les services d'une région donnée sont capables de répondre à ces besoins, et il sera possible de réorganiser les services en conséquence. C'est exactement ce qui s'est passé pour soutenir les services de lutte contre le cancer, les maladies cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux et autres dans les provinces et territoires.
Lorsque je pense aux questions posées par les membres du Comité permanent, ma principale question est la suivante: pourquoi n'avons-nous pas construit l'infrastructure nécessaire pour répondre à ces questions à l'aide de données réelles? Si nous croyons que la santé mentale est une priorité, nous devons nous engager à élaborer les infrastructures qui ont permis de développer des systèmes de santé de niveau mondial dans d'autres secteurs des soins de santé et à appliquer ces connaissances et ces compétences au système de santé mentale.
Dans le passé, nous avons abordé les problèmes du secteur de la santé mentale en finançant des interventions, en créant des programmes et en espérant simplement que, tels qu'ils avaient été conçus, ces interventions et ces programmes répondraient aux besoins. Ce que nous n'avons pas fait, c'est mesurer systématiquement les besoins de la population par rapport à ces interventions et ces programmes. Nous n'avons pas non plus systématiquement mesuré si les interventions financées avaient eu les résultats escomptés.
Si nous continuons de répondre aux besoins en matière de santé mentale et de toxicomanie découlant de la pandémie de COVID-19 en nous basant sur des besoins hypothétiques et en négligeant de mettre en place un cadre de mesure, nous risquons de perpétuer une réponse déjà fragmentée aux besoins des Canadiens en matière de santé mentale. Les Canadiens atteints de maladies mentales et de toxicomanie méritent un système de santé qui répond à leurs besoins mesurés et qui est responsable de la réalisation de certains résultats.
La seule façon d'y parvenir est d'élaborer une infrastructure de développement de systèmes, ce qui a été fait dans d'autres secteurs des soins de santé. Si nous évitons cette étape cruciale, nous répondrons aux besoins en fonction de conjectures et d'efforts de sensibilisation, sans pouvoir mesurer l'incidence de ces investissements.
Merci.
Je m'appelle Lisa Watts. Je suis la présidente, directrice générale et cofondatrice de la Hub Town Brewing Company, une petite microbrasserie située dans le centre-ville d'Okotoks. Nous avons ouvert nos portes en septembre 2019 après quatre longues années de planification, de rédaction et de révision de plans d'affaires, de stratégies, de collecte de fonds et de développement de notre marque et de notre collectivité.
J'aimerais commencer par vous remercier de m'avoir invitée aujourd'hui à parler brièvement de la façon dont la pandémie a touché la Hub Town Brewing Company, nous, les propriétaires, et tous ceux avec qui nous avons travaillé au cours des neuf derniers mois, pendant lesquels nous avons traversé à la fois notre première année d'activité et une pandémie mondiale qui nous a essentiellement obligés à nous engager dans des voies que nous n'avions jamais envisagées, afin de survivre.
Je pense que la meilleure façon de décrire les sentiments qui nous ont parfois complètement submergés et qui, à d'autres moments, sont restés presque en veilleuse, depuis les premiers jours de mars jusqu'à aujourd'hui, c'est de dire que ces mois ont été de véritables montagnes russes. À mesure que nous nous heurtions à chaque obstacle terrifiant, comme la fermeture de notre bar, qui générait 99 % de nos recettes, ou la réduction de notre capacité à un niveau non viable lorsque nous avons été en mesure de rouvrir nos portes, nous avons semblé franchir la plupart des étapes du deuil, en nous accrochant un peu plus longtemps à certaines de ces étapes et en vivant des moments d'exaltation et de fierté entre ces étapes.
Les obstacles auxquels nous nous heurtons et que nous continuons de surmonter, chacun d'entre eux étant plus haut que le précédent, ont eu quelques répercussions sur nous. Ils nous ont obligés à trouver de nombreuses solutions, en mettant à l'épreuve notre capacité de repousser nos limites et de trouver de nouvelles voies qui n'avaient jamais été prévues ni envisagées. Ils ont en fait réussi à renforcer notre confiance en nos capacités, en nous apprenant que nous et notre entreprise pouvions survivre à beaucoup plus de difficultés que nous ne l'aurions jamais cru possible.
L'effet secondaire de cette situation, c'est cependant les montagnes russes dont j'ai parlé. Nous passions d'un mode panique — pendant la période où nous tentions de trouver de nouveaux moyens de générer des revenus lorsque ceux qui nous les fournissaient étaient incités à rester chez eux et à nous éviter — à une pure exaltation, lorsque nous trouvions une source inattendue de revenus qui nous propulsait presque au rang de vedette rock auprès de notre marché cible.
Ce qui n'a jamais changé, cependant, c'est l'anxiété mentale et physique qui accompagnait chacun de ces hauts et de ces bas, ainsi que les nouvelles habitudes bizarres que j'ai acquises, comme celle de mâcher de la glace toute la journée. Je ne peux même pas expliquer d'où cette habitude est venue. L'anxiété a juste produit le désir de croquer constamment quelque chose. Il n'y avait aucun autre moyen d'échapper à ce qui se passait. Et le matin, on se réveillait le cœur battant, en se demandant quelles circonstances, bonnes ou mauvaises, nous attendaient.
Pendant que je commençais à affronter ce que je pense avoir identifié, pour la première fois de ma vie, comme étant de l'anxiété, j'ai eu des conversations avec mon mari et mon partenaire commercial, Mark, en analysant chaque mise à jour quotidienne de notre gouvernement fédéral ou de nos gouvernements provinciaux et en craignant que ces mises à jour menacent à nouveau la voie que nous suivions.
Ces conversations se sont transformées en discussions avec d'autres propriétaires d'entreprises, notre personnel, nos clients, nos familles, nos amis, des enseignants, des infirmières, et j'en passe. Nous avons tous parlé de la situation. Si le sujet n'était pas abordé à la télé, c'était à la radio, et il n'a jamais quitté notre cerveau.
Il y a quelques jours encore, lorsque nous avons essayé de cesser d'écouter la télévision et la radio et de parler de la pandémie, nous sommes allés faire des courses chez Costco, et nous avons remarqué une foule de clients — un mardi à 16 heures. Dans notre ville, cette affluence est anormale, alors nous avons immédiatement su qu'un élément de la mise à jour quotidienne avait provoqué une certaine panique et qu'il valait mieux que nous écoutions cette mise à jour, afin de déterminer comment nos univers allaient de nouveau changer.
Si l'anxiété et l'exaltation, comme deux balanciers géants, avaient été les deux seuls sentiments que nous avions dû gérer tout au long de la pandémie, je pense que nous nous en serions sortis un peu mieux. Mais ajoutez-y un peu de colère et de ressentiment, et vous obtiendrez les troisième et quatrième vallées de notre parcours de montagnes russes.
En tant que propriétaires d'une entreprise, nous faisons l'objet de critiques, et nous sommes victimes de la jalousie d'autrui, comme tout le monde. Lorsque notre entreprise a connu une croissance positive pendant la pandémie, alors que bon nombre d'autres personnes éprouvaient des difficultés et que nous tentions d'éviter les obstacles, des plaintes anonymes sont arrivées aussi. Cela signifiait que les inspecteurs de l'Alberta Health Services (AHS) venaient nous visiter, s'assuraient que toutes nos tables étaient espacées de six pieds, dos à dos, confirmaient pour la énième fois que nous avions du désinfectant pour les mains à la disposition de tous et, bien sûr, que les membres de notre personnel portaient tous des masques sans arrêt.
Il importait peu que le reste du monde ne porte pas de masque pour nous protéger, nous et notre personnel, n'apporte pas son propre désinfectant, ne demande pas à s'asseoir plus loin des gens, mais qu'il préfère plutôt s'asseoir plus près, si possible. En tant que propriétaires d'une entreprise, nous avions la responsabilité de veiller à ce que nos clients ne s'infectent pas mutuellement, et nous devions, d'une manière ou d'une autre, le faire sans les mettre en colère et les décourager à tout jamais de fréquenter notre commerce.
C'est la position la plus difficile dans laquelle nous et notre personnel avons jamais été placés. Nous avons été jugés durement pour ne pas avoir forcé les gens à porter des masques, alors qu'aucun règlement ne l'exigeait, et nous avons été jugés durement pour avoir affiché une pancarte rappelant aux gens de porter des masques, lorsque le règlement est devenu une partie intégrante de notre réalité.
C'était une situation où tout le monde était perdant, et nous avons dû apprendre à notre équipe comment gérer le comportement de chaque client qui se présentait, alors qu'honnêtement, nous ne savions pas ce que nous faisions nous-mêmes, ni quelle était la bonne chose à faire.
L'incohérence des règles auxquelles les entreprises étaient assujetties, comparativement aux écoles, a contribué à accroître encore notre colère et notre ressentiment, et même si nous continuions d'affronter les hauts et les bas de nos montagnes russes, la colère a noyé tout le reste jusqu'à ce que nous touchions le fond, il y a un peu plus d'un mois.
Permettez-moi de dire que je n'avais jamais vécu une dépression auparavant. En fait, j'étais la personne qui soutenait que la dépression était une émotion que nous pouvions probablement tous contrôler — il suffisait de le vouloir et d'essayer.
Lorsque ma colère a atteint un niveau record et que j'ai eu l'impression que je pouvais à peine réfléchir — et je n'avais pas envie d'essayer — à ce qui allait arriver dans plus de 20 minutes, j'ai réalisé que j'étais peut-être en train de vivre le phénomène de la dépression.
Je n'étais plus motivée à trouver la façon de gérer le prochain obstacle. À la lumière de tous les événements qui se produisaient et auxquels nous devions faire face, je ne désirais plus trouver une nouvelle source de revenus. J'étais fatiguée, et je ne voulais rien d'autre que de m'arrêter.
:
Honorable Ron McKinnon, président du Comité permanent de la santé, chers membres du Comité, c’est un honneur de comparaître devant vous.
Avant de commencer, j’aimerais souligner que je prends la parole aujourd’hui depuis les territoires ancestraux non cédés des Salish de la côte, c’est-à-dire les Premières Nations Musqueam, Tsleil-Waututh et Squamish. Je suis honoré et privilégié d’avoir la possibilité de jouer, de vivre et de résider sur leurs terres.
Je m’appelle Saleem Spindari, et je suis le gestionnaire principal des Programmes pour les réfugiés et les travailleurs migrants de l’organisme MOSAIC.
MOSAIC est l’une des plus grandes organisations d’établissement à but non lucratif du Canada. Nous servons les communautés d’immigrants, de réfugiés, de migrants et de gens ordinaires de la région métropolitaine de Vancouver et de la vallée du Fraser, ainsi que de l’ensemble de la province de la Colombie-Britannique et de l’étranger par l’intermédiaire de programmes en ligne.
Le travail de MOSAIC découle de sa vision qui est la suivante: « Ensemble, nous faisons progresser un Canada inclusif et prospère ». À MOSAIC, je supervise les programmes qui soutiennent les travailleurs migrants, les demandeurs d’asile, les réfugiés parrainés par le secteur privé, les étudiants internationaux et d’autres groupes marginalisés. Je formulerai de brèves observations sur l’incidence de la COVID-19 sur ces groupes.
Au début du mois de mars, j’ai reçu d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada un préavis d’arrivée indiquant qu’une des familles que MOSAIC parraine de façon privée arriverait au début d’avril. Un visa a été délivré et des dispositions ont été prises pour le voyage.
Ici, à Vancouver, nous avons pris toutes les dispositions nécessaires pour l’arrivée de la famille africaine, avec l’aide d’une famille d’accueil qui s’est portée volontaire pour apporter un soutien à la famille à son arrivée. Des restrictions relatives aux déplacements ont ensuite été imposées, et le vol a été annulé. Cela a eu une énorme incidence sur le bien-être mental de la famille, car elle a continué de vivre dans des conditions déplorables dans le camp de réfugiés.
Le gouvernement a récemment autorisé les réfugiés parrainés par le secteur privé qui avaient obtenu leur visa avant mars 2020 à se rendre au Canada, mais de nombreuses autres personnes attendent toujours. La plupart des bureaux des visas à l’étranger sont toujours fermés, ce qui a d’énormes répercussions sur la vie des réfugiés qui attendent et qui ont des parrains prêts à les accueillir.
En Colombie-Britannique, nous avons la chance de bénéficier du premier projet pilote entrepris pour soutenir les travailleurs migrants, autrement dit les travailleurs étrangers temporaires. Je suis fier de diriger un projet de renforcement des capacités communautaires visant à soutenir les travailleurs migrants et les groupes qui travaillent avec eux. Ce projet, qui est financé par Emploi et Développement social Canada, a fourni les fonds nécessaires pour soutenir un groupe qui apporte une immense contribution à notre économie.
Malheureusement, le caractère temporaire du programme des travailleurs migrants rend ces travailleurs vulnérables et continue de briser des familles. La COVID-19 a eu d’importantes répercussions sur les travailleurs migrants qui s’inquiètent des membres de leur famille restés au pays. De plus, leurs déplacements sont soumis à davantage de restrictions. Dans de nombreux cas, ils ne peuvent même pas quitter leur lieu de travail, et ils ont du mal à satisfaire à leurs besoins immédiats.
Je suis heureux que le gouvernement étudie actuellement la possibilité de créer des lignes directrices pour l’hébergement des travailleurs migrants. C’est un premier pas important, mais il faut aller beaucoup plus loin.
Je demande au gouvernement du Canada d’étendre le financement à d’autres provinces et de rendre permanent le projet pilote de la Colombie-Britannique, car ce projet a très bien réussi à soutenir la santé mentale, le bien-être et d’autres besoins des travailleurs migrants. Le personnel de mon programme a pu rencontrer les travailleurs migrants pendant leur isolement de 14 jours tout en suivant les lignes directrices en matière de santé, afin de les aider à satisfaire à leurs besoins sur place.
Les demandeurs d’asile qui sont arrivés avant ou pendant la fermeture des bureaux ont eu des difficultés à trouver un logement, à obtenir les documents nécessaires pour présenter des demandes de prestations et des demandes d’emploi ou à obtenir une date d’audience. Tout cela a eu une énorme incidence sur leur santé mentale à un moment où ils sont loin de la famille qu’ils ont laissée derrière eux en demandant l’asile au Canada.
Grâce au financement du gouvernement de la Colombie-Britannique, MOSAIC travaille en étroite collaboration avec d’autres organisations partenaires afin de soutenir le bien-être mental des demandeurs d’asile en ces temps incertains. Bien entendu, ces programmes sont maintenant offerts à l’aide de Zoom et de MS Teams.
En terminant, je souhaite rappeler à cet auguste comité que les réfugiés, travailleurs migrants, demandeurs d’asile et étudiants étrangers continuent de faire des contributions énormes à l’économie canadienne. Je demande au Canada d’offrir une voie vers la résidence permanente à tous les travailleurs migrants, ce qui n’est actuellement pas le cas. S’ils sont aptes à travailler ici, ils sont manifestement aptes à rester ici.
Les résidents temporaires et permanents qui sont des professionnels formés à l’étranger devraient avoir l’occasion d’exercer au Canada. Ils continuent de prouver qu’ils ont les aptitudes, la volonté et les compétences nécessaires pour exercer leur profession. Nous constatons leur contribution durant cette pandémie de COVID-19. J’exhorte le gouvernement du Canada à assouplir les restrictions et à éliminer les obstacles qui les empêchent actuellement d’obtenir leur licence.
Je vous remercie une fois de plus de m’avoir donné l’occasion de prendre la parole aujourd’hui. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
Alors, nous avons considéré deux aspects. Le premier, c'est la revue des recherches qui ont été faites sur la santé mentale en période de COVID-19. Le deuxième, ce sont les observations des psychologues membres de notre ordre quant à la détérioration de la santé de la clientèle, autant dans le réseau public de la santé que dans la pratique privée.
Les observations convergent assez bien, tant celles rapportées dans la littérature et dans les travaux de recherche sur la santé mentale que celles de nos membres.
Au premier chef, on observe une augmentation assez phénoménale de l'anxiété. On sait qu'au fil des mois, les gens ont eu à s'adapter à énormément de choses. Pour certaines personnes, les deuils se sont accumulés. Pour d'autres, et je dirais même pour la majorité des gens, la fatigue et l'usure psychologique se sont installées.
On observe aussi une augmentation de la dépression ou des éléments propres à la dépression. Cela se manifeste beaucoup par une perte d'énergie, une perte de plaisir, un sentiment d'autodépréciation, le sentiment de ne pas être adéquat, un état de découragement ou de désespoir, ou encore des difficultés liées au sommeil et à l'appétit.
On observe également une augmentation d'autres troubles mentaux plus sérieux, notamment chez les personnes qui sont en perte cognitive en raison du vieillissement. La dégradation de leur état s'accentue, en particulier à la suite de l'augmentation des stresseurs. On porte moins le regard sur ces personnes et, pour certains, la pandémie cause une interruption des services en santé mentale.
On observe aussi une augmentation de la consommation d'alcool et de la dépendance à d'autres substances.
Par ailleurs, on remarque une fragilisation particulière des travailleurs de la santé. Beaucoup d'études démontrent une augmentation de l'anxiété et de la dépression chez les travailleurs de la santé.
Le confinement entraîne une augmentation de la détresse psychologique et du sentiment de découragement.
Pour ce qui est des gens qui ont été atteints par la COVID-19, dans 96 % des cas, on a observé certains symptômes de stress post-traumatique à leur sortie de la quarantaine.
Les jeunes et les aînés ont été particulièrement affectés par le confinement. Les aînés ont été affectés par la solitude, l'isolement, l'absence de travail ou d'activités, et parfois même par l'impossibilité de sortir de la maison. Dans le cas des jeunes, c'est leur développement social et affectif qui a été entravé.
Nous avons sondé les membres de l'Ordre des psychologues du Québec. Premièrement, 86 % d'entre eux ont répondu avoir observé une augmentation de l'anxiété. Par ailleurs, 67 % de nos membres ont observé que d'anciens clients étaient revenus pour recevoir des traitements. Aussi, 65 % des membres nous ont dit avoir géré des situations de crise ou des urgences. De plus, 70 % nous ont dit avoir vu une augmentation des éléments de dépression. À un degré moindre, 44 % d'entre eux ont observé des difficultés relationnelles ou parentales ainsi qu'une augmentation de la consommation d'alcool, des ruptures amoureuses ou des enjeux suicidaires.
Je vais dire un mot sur la télépratique ou les adaptations en pratique virtuelle. Il y avait déjà des études qui démontraient que la télépratique était efficace. Beaucoup de psychologues qui utilisaient très peu la télépratique auparavant se sont mis à l'utiliser. Selon la littérature, 86 % d'entre eux y ont eu recours. En ce qui concerne nos membres, la moitié dit que cela a répondu aux besoins de la population pendant la pandémie. Cependant, plus de la moitié a dit que cela n'était pas sans effets sur la communication et sur l'interaction lors du traitement.
Je vais dire un mot sur les actions que nous avons entreprises pour le soutien à la population.
En début de pandémie, nous avons rendu publics des conseils généraux pour garder une bonne santé psychologique. Nous avons formulé des conseils s'adressant aux parents, aux enfants, aux adolescents ainsi qu'aux parents d'enfants ayant un trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité. Nous avons aussi formulé des conseils pour les personnes endeuillées, c'est-à-dire celles dont des proches qui étaient hébergés dans des centres de soins de longue durée sont décédés de la COVID-19.
Nous avons également accordé plus de 200 entrevues dans les médias pour tenter de faire comprendre les effets psychologiques de la pandémie. Nous avons aussi produit des capsules vidéo pour aider la population.
À l'intention des psychologues du Québec, nous avons préparé des formations particulières, par exemple de la formation portant sur la télépratique et sur l'intervention en situation de crise. Nous avons beaucoup communiqué avec nos membres pour leur donner des conseils liés à la pratique et à la déontologie qui pouvaient soutenir leur pratique pendant cette période exceptionnelle.
Nous avons aussi travaillé, avec le soutien du ministère de la Santé et des Services sociaux et du ministère de l'Éducation, bien sûr, pour trouver des pistes de solution en vue d'adapter les services et de protéger la population des difficultés et de la détresse psychologique qui peuvent s'installer.
En conclusion, il est impératif d'accroître l'offre dans les soins et services en santé mentale pour la population. Une forme de pandémie sur le plan de la santé mentale est en train de s'installer en parallèle, et celle-ci va probablement durer plus longtemps que la pandémie elle-même. Il est donc important d'accroître l'offre de service en santé mentale, mais également de la diversifier, de manière à répondre à l'ensemble des besoins de la population du Québec. Il faut également que l'accès à la psychothérapie, qui est un traitement jugé efficace, devienne universel et gratuit.
Merci.
:
D’abord, je dirais que l’ACSM est une vaste structure. Je ne connais pas les détails précis de cette enquête, donc vous pourriez peut-être communiquer ces renseignements aux membres.
Ce que je peux vous dire, c’est que, avant la pandémie, nous suivions les jeunes de près. Selon moi, ce qui se passe chez les jeunes est complexe. Je soupçonne qu’il y avait déjà d’étranges circonstances avant la pandémie pour cette génération qui baigne jusqu’au cou dans les médias sociaux, ce qui n’est pas notre cas. Les sociologues et les anthropologues ont davantage à dire là-dessus, mais nous avons absolument remarqué, vers 2019, une hausse spectaculaire du comportement de recherche d’aide chez les 16 à 24 ans, et il ne fait que croître.
Je travaille aux urgences d’un département de psychiatrie. Dans mon travail clinique, nous constatons aussi une augmentation fulgurante des visites chez les jeunes. Comme je l’ai dit, ce qui pose problème, c’est que le système de santé mentale n’a jamais vraiment répondu aux besoins. Tout le travail effectué par mon équipe en Ontario montre qu’il n’y a pas vraiment de système.
Vous pourriez vous intéresser à bien des groupes. Je crois que celui des jeunes adultes en transition en est un aussi valable que les autres en raison des travaux étayés par des enquêtes et par le phénomène que nous observons dans nos données provinciales.
J’estime tout aussi important, si nous décidons d’intervenir dans un secteur en particulier, de le faire de sorte à le quantifier de manière itérative, en d’autres mots, de sorte à apprendre constamment, comme nous le faisons pour le cancer.
Chaque cancéreux en Ontario bénéficie non seulement de données probantes, mais contribue à les enrichir, précisément parce que les renseignements sont couramment recueillis et utilisés pour assurer une amélioration constante. C’est en quelque sorte ce que nous souhaitons et ce vers quoi nous tendons en Ontario.
J’aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins de ce groupe. Nous accueillons aujourd’hui Mme Charlotte Waddell, qui est professeure d'université et qui est attachée au Children’s Health Policy Centre de la Faculté des sciences de la santé de l'Université Simon Fraser. Mme Waddell comparaît à titre personnel. De Natural High Fitness, nous accueillons Andrew Gustafson, propriétaire et directeur; de Recherche en santé mentale Canada, nous recevons John Trainor, professeur associé, Département de psychiatrie, Université de Toronto. Enfin, de Statistique Canada, nous recevons Jeff Latimer, directeur général pour la santé, la justice, la diversité et les populations, et Ron Gravel, directeur, Centre de données sur la santé des populations.
Madame et messieurs, vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d’interprétation sont disponibles pour cette réunion, et vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, le français et l’anglais. J’encourage les personnes qui souhaitent s’exprimer dans l’une ou l’autre des deux langues officielles de s’assurer d'être dans le canal d’interprétation correspondant à la langue dans laquelle elles s'expriment.
Avant de parler, cliquez sur l’icône du microphone pour activer votre propre micro, et lorsque vous avez fini, prenez soin de mettre votre micro en sourdine afin de réduire les risques d'interférence. Je vous rappelle que toutes les interventions des membres du Comité et des témoins doivent s'adresser à la présidence.
Sur ce, nous allons commencer. Les témoins disposeront de sept minutes pour leurs déclarations. Nous commencerons par la professeure Waddell.
Madame Waddell, vous avez la parole pour sept minutes.
:
Merci beaucoup de me donner l’occasion de vous parler cet après-midi de la COVID-19 et de la santé mentale des enfants au Canada.
Un message fondamental — et c'est peut-être le plus important —, c'est qu'avant la pandémie, les besoins des enfants en matière de santé mentale étaient extrêmement grands. En nous basant sur les données épidémiologiques, nous estimons qu'à tout moment avant la COVID, 13 % des enfants de 4 à 18 ans — c'est-à-dire 800 000 jeunes au Canada — souffraient de troubles mentaux nécessitant un traitement. Ces troubles comprennent 12 affections courantes, tels que l’anxiété, le déficit d’attention, les problèmes de comportement, la toxicomanie, la dépression, l’autisme et, parfois, la schizophrénie. Nous savons comment traiter tous ces troubles, mais avant la pandémie, moins de la moitié des enfants touchés recevaient effectivement les soins dont ils avaient besoin, une lacune que nous n’accepterions jamais pour des problèmes de santé physique comme le cancer ou le diabète chez les enfants. Cela signifie qu'avant la pandémie, nous aurions dû déjà avoir doublé l'offre de services de santé mentale pour les enfants.
Le deuxième point important, c'est que les besoins devraient augmenter de manière significative pendant et après la COVID. Si nous nous fions aux données relatives aux crises précédentes, comme le SRAS, ou aux catastrophes naturelles, comme les tremblements de terre ou les inondations, nous pouvons nous attendre à ce que des problèmes tels que l’anxiété, la dépression et les troubles de comportement chez les enfants soient multipliés par deux ou décuplés. Pour aggraver les choses, certains enfants seront plus touchés que d’autres. Par exemple, les familles qui ont déjà des difficultés financières devraient souffrir davantage pendant la pandémie, et c’est déjà le cas. Les enfants qui avaient des problèmes de santé mentale et de développement, mais qui bénéficiaient de services adéquats, voient maintenant des interruptions dans les soins qu'ils peuvent recevoir.
Le racisme est un autre problème qui a une incidence sur la santé mentale des enfants. C’est une question urgente pour tous les Canadiens, mais depuis le début de la COVID, il y a eu des flambées, notamment en ce qui concerne le racisme à l'endroit des Asiatiques, par exemple. Les communautés autochtones sont un autre groupe qui sera gravement touché. Les Autochtones devaient déjà composer avec l’héritage du colonialisme — et ils le faisaient avec force et résilience —, mais ils doivent maintenant faire face à la COVID avec moins de ressources que les autres Canadiens. Les besoins étaient déjà élevés et ils vont augmenter considérablement.
Même s’il s’agit d’un problème de santé publique sans précédent au Canada et dans le monde, il existe des possibilités sans précédent sur le plan des politiques. J’aimerais en souligner trois où le leadership politique fédéral pourrait être crucial et faire une énorme différence quant à la résolution de ces problèmes.
La première ouverture du côté des politiques serait d'élaborer un plan. Nous ne l’avons pas encore fait. Il s'agirait d'élaborer, de mettre en œuvre et de soutenir des plans pancanadiens exhaustifs pour la santé mentale des enfants. L’exhaustivité signifie qu’il faudra couvrir tous les enfants de 0 à 18 ans et les 12 troubles mentaux courants en s’attachant au minimum à promouvoir un développement sain, à faire de la prévention, à traiter tous les enfants atteints ainsi qu’à suivre les résultats des mesures qui seront prises. Le leadership fédéral est crucial, car c’est à mon avis la seule façon de coordonner les efforts déployés à l’échelle nationale pour veiller à ce que les enfants restent à l’ordre du jour des politiques publiques nationales.
Le gouvernement fédéral peut également offrir aux provinces et aux territoires des incitations économiques pour les programmes de santé mentale des enfants et ainsi instaurer un accès équitable dans tout le pays. Nous l’avons déjà fait avec beaucoup de succès. En 2000, l’Entente sur le développement des jeunes enfants a conduit à l’octroi de fonds aux provinces et aux territoires, assortis de certaines conditions. Les avantages ont été durables, et nous devons répéter l'exercice maintenant pour la santé mentale des enfants.
La deuxième ouverture en matière de politiques serait de garantir des budgets adéquats et des services efficaces. Si nous voulons combler ces lacunes avant l’entente, nous devons à tout le moins doubler le financement des services idoines. Nous devons doubler les budgets consacrés à la santé mentale des enfants. Cela permettra de traiter tous les enfants atteints de troubles. Nous savons comment y parvenir. Nous connaissons les moyens de prévention qui ont fait leurs preuves. La question est évidente: comment allons-nous payer pour cela?
C’est là qu’intervient aussi la promesse de financer de nouveaux programmes de prévention. La prévention d’un seul cas de problème de santé mentale grave chez un enfant, comme des troubles du comportement, peut permettre d’économiser jusqu’à 8 millions de dollars sur toute une vie. De même, un programme de prévention tel que Nurse-Family Partnership — un partenariat entre le personnel infirmier et les familles —, qui commence dès la petite enfance, a montré qu’on pouvait améliorer la santé mentale des enfants et réaliser des économies de plus de 6 000 $ par enfant. Ce chiffre correspond aux ressources épargnées par l’ensemble du gouvernement pour les services qui deviendraient superflus en raison du programme. Il nous serait donc possible de commencer à financer une partie de l’augmentation des coûts que nous devons soutenir. La lutte contre les disparités sociales ne fera qu’aider dans ce domaine, et le gouvernement fédéral a déjà fait preuve de leadership à cet égard.
La troisième ouverture est de suivre nos progrès collectifs. Pour citer Clyde Hertzman, ce qui est compté compte, et nous n’avons pas très bien compté nos enfants. Sinon, comment pouvons-nous savoir comment nous nous en sortons? Il est essentiel de suivre les résultats des enfants.
C’est aussi un moyen de mesurer le succès des nouveaux investissements que nous ferons, en présumant que nous en sommes capables, et des occasions sans précédent que nous devons saisir. L’Enquête canadienne sur la santé des enfants et des jeunes de 2019 de Statistique Canada — une enquête de très grande qualité — a permis de produire l'un des rares jeux de données au monde qui rend compte d'un travail exhaustif réalisé dans ce domaine avant la pandémie. Nous pouvons et devons répéter cette enquête de façon continue. Cela nous permettrait de nous positionner en tant que leader mondial pour le suivi de ces résultats. Le gouvernement fédéral est on ne peut mieux placé pour assurer la poursuite de cette enquête.
En conclusion, je reconnais que les budgets publics sont actuellement la cible de nombreuses demandes concurrentes, mais je dirais que si nous ne nous occupons pas de la santé des enfants maintenant, nous allons avoir des coûts sociétaux bien plus importants en amont. Si nous ne faisons rien pour freiner ces problèmes, ils se répercuteront jusque dans l’âge adulte.
Au Canada, les coûts annuels associés aux problèmes de santé mentale sont estimés à 68 milliards de dollars. Or, au-delà de ces aspects économiques, si nous ne nous attaquons pas à ces problèmes, nous risquons de nous retrouver avec une génération de jeunes qui seront marqués par cette pandémie, et ce sera à notre grand détriment à tous.
Nous avons besoin de cette génération. Ce sont eux qui, demain, assureront la relève de nos travailleurs de première ligne, de nos infirmières, de nos enseignants, de nos médecins et de nos parlementaires. Les enfants et la santé mentale des enfants doivent donc être une cible prioritaire de notre réponse à la pandémie.
Je terminerai sur ce passage tiré et traduit de la revue médicale The Lancet: « Bien que la pandémie de COVID-19 ait menacé la santé des enfants, elle pourrait aussi servir de catalyseur pour un nouveau départ. Les droits de l’enfant doivent être au centre de la phase de rétablissement. »
Je vous remercie.
:
Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Permettez-moi de commencer par dire que je ne prétends aucunement parler au nom de toutes les entreprises. Je ne suis qu'un simple propriétaire d'entreprise, et je vous remercie sincèrement de me donner l'occasion de parler aujourd'hui de mon expérience à titre de propriétaire d'entreprise et, plus particulièrement, de mon état de bien-être mental. J'espère que mon vécu et mon histoire pourront apporter un peu de lumière sur ce que d'autres pourraient également ressentir. Ce n'est pas vraiment un sujet dont j'ai parlé jusqu'ici, et encore moins en public, mais je crois que la santé mentale des propriétaires d'entreprises en 2020 est fragile, d'où la nécessité d'en tenir compte. C'est donc une excellente occasion, et je tiens à vous en remercier.
Je commencerai par dire que je ne vais pas bien. Ce n'est pas un appel à l'aide. Je veux simplement vous parler en toute vulnérabilité et en toute franchise. Non, je ne vais pas bien. Il y a des moments où je vais bien, mais à vrai dire, je passe par toute la gamme des émotions, allant jusqu'au désespoir total. Ce n'est pas là une description de mon état mental de mars jusqu'à aujourd'hui. Cela me décrit plutôt de minute en minute, d'heure en heure et de jour en jour.
Les propriétaires d'entreprises sont aux prises avec une myriade d'émotions dictées par la réalité quotidienne en constante évolution. Les gens sont à deux doigts de pousser sur les boutons de panique de leur subconscient, prêts à exploser au moindre élément déclencheur. Partout au pays, nous sommes dans un état d'alerte accru pour gérer des conflits interpersonnels; je marche donc, chaque jour, sur un champ de mines émotionnelles. Un mot de travers, un faux pas ou une mauvaise interprétation risquent de provoquer une explosion d'émotions. Voilà pourquoi nous souffrons tous d'usure de compassion.
Lorsqu'on parle de santé mentale, les termes les plus importants qui me viennent à l'esprit, en ma qualité de profane, sont « anxiété » et « dépression ». Bien que ces mots soient parfois un peu trop abstraits ou trop austères, ils décrivent, je crois, avec précision l'état mental actuel de nombreuses personnes dans le secteur des petites entreprises.
Voici quelques autres mots: épuisement émotionnel, inquiétude, doute, solitude, colère, frustration, insécurité et fatigue. Ce sont des mots qui décrivent les montagnes russes émotionnelles que je traverse chaque jour et, pourtant, je suis quelqu'un de bien équilibré, bien soutenu, stoïque et fort. Selon moi, l'un des plus grands défis pour une personne aussi fière qu'un chef d'entreprise, c'est d'admettre que les temps sont difficiles et d'entretenir un dialogue sur ce genre de sentiments. Je crois donc qu'on sous-estime probablement la gravité de la situation.
La gestion de mes émotions est si peu prioritaire en ce moment que je risque de m'engager dans une spirale, parce que les questions les plus urgentes pour moi sont les suivantes: soutenir mes enfants et leur réalité scolaire en ligne; partager mon espace de travail avec eux, ce qui vient perturber le temps que je dois consacrer à la créativité liée à mon entreprise; soutenir mon ménage à la fois émotionnellement et financièrement, par exemple en payant un prêt hypothécaire sans revenu assuré; enfin, faire en sorte que les 30 employés et entrepreneurs qui dépendent de ma bonne gestion d'entreprise ne subissent pas eux-mêmes le poids de cette crise.
C'est moi, en tant que propriétaire, qui porte le poids principal de tout cela, et je tiens à le dire bien franchement: je ne survis pour l'instant que grâce à la générosité de mes propriétaires, une générosité qui ne peut pas durer longtemps, ce qui m'angoisse encore plus, à tel point que j'ai parfois l'impression de suffoquer.
Je ne vois pas comment le Comité pourrait obtenir un portrait clair et précis de la santé mentale, car tous les coins du pays et tous les groupes démographiques se heurtent à des défis qui leur sont propres, et ils ont chacun différents moyens d'y faire face. J'ai entendu à maintes reprises le message selon lequel nous sommes tous dans le même bateau. Ce n'est pas vrai. Nous sommes dans la même tempête, mais certains sont dans un yacht de luxe et d'autres, dans un canot chancelant sur le point de couler.
Le point important à retenir, à mon avis, avec tout le respect que je dois aux autres témoins, c'est qu'il ne s'agit pas d'un exercice théorique. Cette crise touche de vraies personnes, de vrais propriétaires d'entreprises comme moi, des gens qui pensent et qui ressentent véritablement la même chose que moi.
Je crois que le meilleur remède à l'anxiété dont je parle, c'est l'information — chose qui fait cruellement défaut. Je n'en comprends pas la raison, mais il se peut que la partialité des médias actuels empêche la diffusion de renseignements exacts. Le fardeau de la vérification des faits repose actuellement entre les mains de la population, si bien que l'absence d'information à jour, voire d'information exacte est devenue la norme.
Avant que les restrictions puissent être levées, nous a-t-on dit, il faut procéder à des vaccinations de masse, mais on ne nous a donné aucun échéancier à cet égard. Par conséquent, nous nous préparons à la prolongation des restrictions et à la menace d'autres mesures de confinement. Il n'y a eu aucun cas au sein de notre entreprise ni aucune transmission confirmée et, pourtant, on nous impose une nouvelle période de confinement. D'autres subventions et mesures d'aide sont peut-être prévues, mais quand ces fonds seront-ils distribués, et quel en sera le montant? Les renseignements dont nous disposons ne suffisent pas pour dissiper cette anxiété sous-jacente.
Tout cela me plonge dans une grande incertitude quant à mon avenir, et je ne parle pas de mon avenir à long terme, mais plutôt de la viabilité de mon entreprise au cours des prochains mois. Dois-je suivre mon plan de remplacement des immobilisations sur 10 ans et investir dans la modernisation des infrastructures nécessaires ou encore, investir dans des réparations jusqu'à ce que je reprenne confiance dans mes liquidités? Je n'ai pas assez d'information ou de confiance dans les renseignements dont je dispose pour répondre à cette question. Dans l'état actuel des choses, voici notre meilleure prévision: si tout revient à la normale aujourd'hui et que mes revenus et mes dépenses redeviennent immédiatement ce qu'elles étaient avant la COVID, il nous faudra sept ans pour rembourser les emprunts associés à la perte de revenus de 2020.
Au fil des ans, j'ai appuyé généreusement diverses initiatives locales, ce qui m'a valu des éloges au sein de ma collectivité. J'ai toujours cru que la participation des entreprises faisait partie intégrante du tissu communautaire. Hélas, ce n'est plus le cas. Je ne sais pas quand la situation sera rétablie à cet égard, ni même si elle le sera. À force de me concentrer presque uniquement sur le solde de mon compte bancaire, je perds de vue les besoins de ma collectivité. Quelles seront les ramifications communautaires à long terme si davantage d'entreprises ressentent la même pression? Ce sont des choses qui rapprochent les gens. C'est ce qui donne un but et un sentiment de satisfaction, sans oublier la fierté d'être propriétaire d'une entreprise qui apporte une contribution positive. Perdre tout cela est une autre source d'anxiété, voire de dépression.
Je vis un véritable stress permanent. Je réinvente sans cesse mon entreprise, ce qui demande de l'énergie et des ressources, en plus de créer des conditions stressantes pour mes membres et mes employés, qui aspirent tout simplement à la stabilité et à la sécurité d'emploi. Mes employés et leur famille comptent sur moi pour trouver une solution. À ce stade-ci, je ne suis guère convaincu de pouvoir y arriver.
J'ai besoin de savoir avec certitude qu'il n'y aura pas de confinement. Il faut que les décideurs locaux, provinciaux et fédéraux sachent que, de façon générale, les propriétaires d'entreprises prennent des mesures vertueuses et qu'ils cherchent le juste équilibre entre leurs besoins et ceux de la population. J'ai besoin de renseignements, de délais précis et d'une approche qui tient toujours compte de mon insécurité financière afin de pouvoir reprendre en main ma planification et, je l'espère, atténuer une partie de l'épuisement émotionnel dont je souffre depuis plusieurs mois. Les autorités qui transmettent les messages concernant la COVID-19 doivent reconnaître les dommages qu'elles ont causés à l'ensemble de mon secteur après l'avoir dépeint comme un milieu dangereux, ce qui a eu un effet destructeur. Songeons notamment aux récentes mesures malavisées ciblant les restaurants et les centres d'entraînement de groupe, dont le mien.
Ces défis, qui sont immenses, exigent la prise de décisions difficiles. Je comprends cela. Toutefois, il est impossible d'arriver à des conclusions, aussi difficiles soient-elles, sans que nous — les personnes touchées — y participions. Voilà qui ne semble pas avoir été une pratique courante en 2020. L'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de prendre la parole est, à mon sens, un pas dans la bonne direction. Je vous remercie donc de votre attention.
:
Merci beaucoup. Je vous suis reconnaissant de m’avoir invité à vous parler aujourd’hui.
Je suis président de Recherche en santé mentale Canada, un organisme de bienfaisance d’envergure nationale qui se consacre à l’avancement des connaissances sur la santé mentale, et je vous ferai aujourd’hui quelques observations sur la santé mentale en période de pandémie. Je voudrais également vous présenter le projet de sondages sur la santé mentale dans le contexte de la COVID-19, projet auquel notre organisation a participé.
En guise de supplément à mon bref exposé, j’ai remis un rapport au Comité, et notre organisation serait heureuse de fournir des documents d’information à tout membre du Comité qui souhaite obtenir de plus amples détails.
Tout d’abord, permettez-moi de féliciter votre comité de tenir des séances sur la santé mentale et d’écouter un large éventail d’opinions. Notre organisation est, elle aussi, fondamentalement résolue à écouter les intervenants afin de déterminer quels types de connaissances doivent être renforcées pour soutenir la santé mentale.
Pour nous, les intervenants représentent non seulement des professionnels et des chercheurs, mais aussi une gamme beaucoup plus vaste de personnes, notamment des membres de la famille, des personnes qui souffrent directement d’une maladie mentale, des Autochtones et des personnes qui présentent un risque élevé pour des raisons comme le racisme et la discrimination, ainsi que de nombreux autres exemples.
Je suis sûr qu’en tant que députés, vous entendez beaucoup parler de problèmes de santé mentale de la part de vos concitoyens, et ces renseignements sont extrêmement précieux. Pour faire face à cette crise, il est vraiment essentiel de disposer de renseignements de qualité sur la manière dont les Canadiens s’en sortent.
Dès le début de la pandémie, notre organisation s’est engagée à offrir de l’aide pour surmonter cette crise. Nous avons lancé l’initiative de sondages à l’échelle nationale pour fournir aux gouvernements et aux intervenants des données de qualité et à jour sur les effets de la COVID-19 sur la santé mentale. Jusqu’ici, nous avons réalisé trois sondages, et un quatrième vient d’être lancé aujourd’hui même. Lorsqu’il sera terminé, nous aurons fait participer plus de 10 000 Canadiens et mis au point un ensemble de données vastes et complexes. Nous comptons poursuivre ce travail toutes les huit semaines jusqu’en 2022 afin de surveiller la reprise au Canada.
Si notre travail donne des résultats, c’est grâce à son ampleur, car ce n’est qu’avec de grands échantillons que nous pouvons être sûrs d’obtenir suffisamment de données dans les nombreux domaines à l’étude. Nous examinons un certain nombre d’aspects: les types de détresse que les gens ressentent, les craintes qu’ils éprouvent, la façon dont ils y font face, les données démographiques sur des éléments tels que la situation familiale, le revenu, l’emploi, le sexe et l’accès aux mesures de soutien en santé mentale, pour ne nommer que ceux-là.
Voici quelques conclusions générales que nous avons tirées. Les niveaux élevés d’anxiété et de dépression ont respectivement quadruplé et doublé depuis le début de la pandémie. Chose surprenante, ces niveaux n’ont pas beaucoup évolué depuis avril, durant la première vague, malgré les changements survenus entre les deux vagues, puis au début de la deuxième vague. Les niveaux de détresse sont demeurés assez constants dans tout le pays.
Les niveaux élevés d’anxiété et de dépression sont plus fréquents chez les jeunes et les femmes, mais on constate une augmentation des niveaux chez les hommes dans les catégories de grande détresse lorsqu’on tient compte des symptômes. Nous savons, à la lumière d’autres travaux, que les hommes ont souvent tendance à signaler leurs problèmes de santé mentale uniquement lorsque ceux-ci s’aggravent.
L’accès aux traitements est désormais plus difficile. Le nombre de séances de counseling individuel a diminué, et les visites chez les médecins de famille ont été considérablement réduites. Je dois souligner que nous communiquons tous ces renseignements aux gouvernements et aux associations professionnelles partout au Canada.
De façon plus générale, on peut constater que les niveaux de détresse ne sont pas répartis de manière égale parmi la population. Les personnes qui travaillent dans certains secteurs comme la vente au détail, les soins de santé de première ligne, l’enseignement — et j’ajouterais les petites entreprises, ayant entendu le témoignage de M. Gustafson — se sentent plus anxieuses. La situation familiale constitue également un facteur important. Nous constatons que les personnes vivant seules et celles ayant des enfants en bas âge sont aux prises avec plus d’anxiété. Enfin, les niveaux de revenus plus faibles laissent présager une plus grande détresse. Nous recueillons ces renseignements et nous les communiquons aux gouvernements, aux associations professionnelles, aux commissions scolaires et à d’autres.
Les personnes qui adhèrent moins aux directives de distanciation sociale souffrent davantage de dépression et de santé mentale négative, notamment en raison des conséquences économiques de la pandémie. Pour ce qui est des moyens de faire face à la situation, nous observons que les médias sociaux et le fait de regarder les nouvelles n’aident pas la plupart des gens. Des activités telles que la lecture, l’activité physique ou l’interaction, même virtuelle, avec des amis ont été jugées utiles durant les premiers stades de la pandémie, mais elles perdent aujourd’hui leur effet positif, car les gens les trouvent répétitives, à force d’y avoir trop recours.
Les Canadiens considèrent maintenant que le fait de sortir dehors ou de passer du temps dans la nature constitue l’activité la plus utile. Voilà un constat dont nous faisons part aux organisations des parcs et loisirs, aux gouvernements provinciaux et municipaux et à d’autres intervenants dans l’ensemble du pays.
Il est également important de savoir qui est le messager. Les Canadiens veulent entendre des renseignements sur la santé mentale de la part des professionnels. Il s’agit notamment des médecins comme ceux de l’Agence de la santé publique du Canada ou de leurs homologues provinciaux ou territoriaux, mais aussi des fournisseurs de soins de santé familiale et des médecins à l’échelle locale. Les messages eux-mêmes doivent être précis, mais ils doivent mettre l’accent sur l’espoir, le tout assorti de conseils sur la façon de faire face à la situation.
Que proposons-nous à long terme ou, je suppose, à moyen terme?
Tout d'abord, il est important de maintenir un degré élevé de confiance. Dans l'ensemble, le Canada a adopté une approche très cohérente, surtout par rapport aux États-Unis, et ce, de façon spectaculaire.
Par ailleurs, il faut continuer à renforcer les connaissances. Nos données font partie d'une mosaïque d'information à laquelle contribuent de nombreuses organisations. Nous disposons ainsi d'un ensemble de données uniques et reproductibles qui révèlent comment des groupes précis, y compris des groupes à risque, réagissent aux sources de stress psychologique pendant la pandémie. Nous devons communiquer ces données et poursuivre le dialogue. Les personnes vivant seules, les jeunes Canadiens et les Canadiens à faible revenu, ainsi que les personnes ayant déjà des problèmes de santé mentale, sont tous des groupes sur lesquels nous devons nous concentrer.
À cet égard, mentionnons le travail d'Espace mieux-être Canada, qui sert de centre d'information et de ressources pour les gens qui ont besoin d'aide et ceux qui prennent soin d'eux. Il s'agit d'une ressource importante qui, je le sais, est appuyée par le gouvernement fédéral.
Enfin, permettez-moi de vous remercier de nous avoir invités à comparaître. Nous collaborerons avec vous par tous les moyens possibles pour aider à lutter contre la COVID et pour soutenir la santé mentale des Canadiens.
Je vous remercie.
Sachez d'abord que la pandémie a eu un effet négatif sur la santé mentale de la plupart des Canadiens. Quand on examine la satisfaction à titre de mesure de la bonne santé mentale globale, on constate que cette satisfaction est à son plus bas depuis 2003. Alors qu'avant la pandémie, près des trois quarts des Canadiens se disaient hautement satisfaits de leur vie, ce chiffre n'était que de 43 % pendant la pandémie.
Enfin, moins de Canadiens ont déclaré être en très bonne ou en excellente santé mentale, la diminution la plus marquée ayant été observée chez les jeunes. Le graphique situé en haut de la troisième diapositive montre que c'est chez les jeunes qu'on observe la diminution la plus importante du taux de satisfaction à l'égard de la vie depuis le début de la pandémie. Le graphique du bas donne à penser que des inégalités émergentes touchent les immigrants. Alors que les taux de satisfaction étaient globalement semblables entre les immigrants et les personnes nées au Canada avant la pandémie, ce taux était moins élevé chez les immigrants en juin 2020.
La quatrième diapositive porte sur la santé mentale autoévaluée, un puissant indicateur de l'état de santé mentale en général. Comme je l'ai déjà fait remarquer, les études montrent généralement que les répercussions sur la santé mentale touchent davantage les jeunes.
Le graphique sur la cinquième diapositive montre que les Canadiens ont signalé une augmentation de leur consommation de cannabis, d'alcool ou de tabac pendant la pandémie par rapport à leur consommation antérieure à la pandémie. C'est un fait intéressant, car cela montre que comparativement aux autres groupes d'âge, ce sont les jeunes qui disent le plus avoir augmenté leur consommation de cannabis. Environ 12 % d'entre eux ont déclaré avoir augmenté leur consommation de cannabis pendant la pandémie. Sachez en outre que la plus forte augmentation de la consommation de substances a été observée chez les personnes de 35 à 54 ans et avait trait à la consommation d'alcool.
Passons à la sixième diapositive. Depuis le début de la pandémie, les résultats d'une enquête reposant sur l'approche participative montrent que les personnes de diverses identités de genre étaient beaucoup plus susceptibles que les hommes ou les femmes de faire état d'une santé mentale passable ou mauvaise. Ces personnes étaient aussi deux fois plus susceptibles que les femmes et trois fois plus susceptibles que les hommes de déclarer des symptômes correspondant à un trouble d'anxiété modéré ou sévère.
À la septième diapositive, on peut lire que des études antérieures laissent penser que, de façon générale, les immigrants arrivent au Canada avec une santé mentale autoévaluée meilleure que celle des Canadiens, mais cette évaluation est revue à la baisse après une certaine période au Canada. Les résultats de notre enquête reposant sur l'approche participative indiquent que la tendance s'est inversée au cours de la pandémie. En effet, 28 % des immigrants récents qui ont participé à l'enquête ont évalué que leur santé mentale était passable ou mauvaise, comparativement à 20 % pour les immigrants établis et à 24 % pour les personnes nées au Canada. De plus, les immigrants récents étaient plus susceptibles que les autres Canadiens de déclarer des symptômes d'anxiété.
[Difficultés techniques] fait suite à la diapositive précédente et indique essentiellement [Difficultés techniques]. Dans l'ensemble...
:
Dans l'ensemble, les immigrants se sont dits plus préoccupés des conséquences sanitaires et sociales de la pandémie que les personnes nées au Canada. Ils s'inquiètent notamment de leur santé, de celle des membres de leur foyer, du risque de troubles civils, de la violence familiale, du stress qu'éprouve la famille en raison du confinement et du maintien des liens sociaux.
À la neuvième diapositive, où il est question des Canadiens appartenant à une minorité visible, on observe chez eux des signes de moins bonne santé mentale en comparaison avec les Canadiens blancs. Près de 28 % des personnes appartenant aux minorités visibles ont fait état d'une santé mentale autoévaluée passable ou mauvaise par rapport à 23 % pour les Canadiens blancs. Les déclarations de symptômes d'anxiété modérés ou sévères étaient également plus élevées chez les Canadiens appartenant aux minorités visibles que chez les Canadiens blancs.
À la 10e diapositive, les données recueillies dans le cadre d'une étude reposant sur l'approche participative indiquent que la pandémie a plus de répercussions sur les Autochtones, les Métis et les Inuits. La diapositive illustre les disparités entre les Autochtones et les non-Autochtones au chapitre de la santé mentale, les pourcentages d'Autochtones faisant état d'une détérioration de la santé mentale, d'un stress élevé et de symptômes d'anxiété étant plus élevés. Quand on leur a demandé comment leur santé mentale avait changé depuis l'imposition de la distanciation physique, 60 % des participants autochtones ont indiqué qu'elle était moins bonne ou beaucoup moins bonne. Un pourcentage plus élevé de femmes autochtones ont aussi déclaré une détérioration de leur santé mentale.
La 11e diapositive porte sur certains des facteurs qui influencent les disparités en matière de santé mentale observées à la diapositive précédente entre les Canadiens autochtones et non autochtones.
Je passerai à la 12e diapositive, qui porte sur le dernier groupe que nous décrirons aujourd'hui: celui des Canadiens ayant un problème de santé de longue durée ou une incapacité. Grâce aux données recueillies dans le cadre d'une enquête reposant sur l'approche participative, on voit que plus de la moitié des participants ayant un problème de santé de longue durée ou une incapacité ont déclaré que leur état de santé mentale était moins bon qu'avant le début de la pandémie. Au cours de la collecte de données, qui s'est déroulée en juin et en juillet, plus de la moitié d'entre eux ont indiqué que leur santé mentale était passable ou mauvaise.
À la dernière diapositive, soit la 13e, les données offrent un portait relativement cohérent de la manière dont la pandémie a eu une incidence négative sur la santé des Canadiens en général et a eu des répercussions plus graves sur les groupes déjà vulnérables au Canada.
Statistique Canada entend collaborer avec des partenaires pour recueillir plus de renseignements sur l'incidence de la pandémie sur la santé mentale. Pour vous montrer comment nous procéderons, j'ai dressé ici une liste de certaines initiatives, comme l'Enquête sur la COVID-19 et la santé mentale, qui porte sur les deux vagues, l'Enquête sur la santé mentale et les événements stressants, et notre participation active à la Table ronde d'experts sur les besoins en données sur la santé mentale et les défis connexes de Santé Canada.
[Français]
Merci beaucoup.
:
Voilà qui met fin à notre série de questions.
Je tiens à remercier tous les témoins de nous avoir aidés avec notre étude aujourd'hui, de nous avoir accordé leur temps et d'avoir partagé leur expertise avec nous. Nous avons quelques travaux à faire maintenant. N'hésitez pas à vous déconnecter, si vous le souhaitez. Vous n'avez pas à rester pour cette partie de la réunion.
Le greffier a remis à tous les membres du Comité quelques documents PDF qui présentent les budgets des études que nous réalisons présentement. Selon ce que je comprends, ces budgets visent principalement l'achat de casques d'écoute et d'autres fournitures du genre pour les témoins. L'argent qui ne sera pas dépensé sera remis au Parlement.
J'aimerais attirer votre attention sur le premier, le montant de 3 000 $ pour l'étude du CEPMB.
Est-ce que les membres du Comité approuvent ce budget? Avez-vous des questions ou des préoccupations? Je vais vous demander s'il y a consentement unanime pour approuver le premier budget. Est-ce que quelqu'un s'y oppose?
(La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
Le deuxième budget vise l'étude sur la COVID que nous réalisons en ce moment également. Il s'agit d'un budget de 8 500 $.
Avez-vous des préoccupations ou des commentaires à faire à ce sujet? Nous devons obtenir le consentement unanime. Est-ce que quelqu'un s'y oppose?
(La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
Je remercie tous les membres du Comité pour leur attention et pour leurs excellentes questions.
Je tiens aussi à remercier les interprètes. Je sais que nous travaillons dans un environnement difficile. Vous réussissez à surmonter tous les défis et à faire votre travail malgré tout. Je vous en remercie.