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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 035 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 7 mai 2021

[Enregistrement électronique]

(1300)

[Traduction]

     La séance est ouverte. Bienvenue à tous à la 35e séance du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes.
    Le Comité se réunit aujourd'hui pour examiner la situation d'urgence à laquelle les Canadiens font face avec la pandémie de COVID-19, en s'intéressant particulièrement à la teneur de la réponse d'urgence nationale du Canada.
    Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous recevons Mme Lorian Hardcastle, professeure agrégée à la faculté de droit et à la Cumming School of Medicine de l'Université de Calgary; M. Wesley Wark; ainsi que le Dr Brian Schwartz, coprésident de la table de consultation scientifique de l'Ontario sur la COVID-19, qui témoignent à titre personnel.
    Sur ce, j'inviterai les témoins à présenter leurs exposés.
    Soit dit en passant, je brandirai ces cartes. La carte jaune indique que votre temps est presque écoulé. Je la montre habituellement quand il vous reste une minute, bien que je perde le fil du temps à l'occasion. La carte rouge vous signale que votre temps est écoulé. Si vous voyez la carte rouge, vous n'avez pas à arrêter sur le champ, mais essayez de clore votre exposé.
    Je vous remercie.
    Nous entendrons d'abord Mme Hardcastle pour six minutes.
    Avant de commencer, je veux vous remercier tous de m'avoir offert l'occasion de parler devant le Comité aujourd'hui.
    Je commencerai en traitant d'abord des moyens juridiques qui s'offrent au gouvernement fédéral avant de formuler des observations plus générales sur le rôle du gouvernement fédéral pendant la pandémie.
    On a souvent l'impression que la santé, y compris la santé publique, relève des compétences provinciales à quelques exceptions près, comme la Loi sur la mise en quarantaine. Cette perception erronée et l'approche non interventionniste que le gouvernement fédéral adopte souvent dans le domaine de la santé résultent vraisemblablement du fait que ce sont les provinces qui fournissent la plus grande partie des services de santé, ainsi que de certaines questions politiques relatives au financement des services de soins de santé et à la Loi canadienne sur la santé.
    En fait, le gouvernement fédéral joue un rôle important dans le domaine de la santé publique. La Cour suprême du Canada a admis à maintes reprises que la santé est un domaine qui chevauche plusieurs sphères de compétences. En outre, à l'heure actuelle, la COVID-19 n'est pas seulement un problème de santé publique. Ce qui a peut-être commencé par un problème de santé publique est maintenant devenu le plus gros problème social et économique de notre vie. La COVID a une incidence sur toutes les facettes de la vie des Canadiens.
    En ce qui concerne les moyens juridiques précis qui s'offrent au gouvernement fédéral, le premier et celui qui reçoit le plus d'attention est la Loi sur les mesures d'urgence, laquelle autorise le gouvernement fédéral à intervenir pour réagir à un sinistre. Il peut s'agit d'une maladie qui comporte ou pourrait comporter le risque de pertes humaines et matérielles, de bouleversements sociaux ou d’une interruption de l’acheminement des denrées ou de services. Tout cela s'est produit dans une certaine mesure pendant la pandémie.
    Quand un sinistre est déclaré, le gouverneur en conseil peut prendre un décret et des règlements à propos d'un certain nombre de questions, notamment pour interdire les voyages, demander à quelqu'un de fournir de l'aide, réglementer les biens essentiels et établir des hôpitaux. Ces pouvoirs auraient pu être utilisés, par exemple, pour éviter la propagation de la COVID d'une province à l'autre quand les variants ont fait leur apparition ou pour établir des hôpitaux pour servir de lieu de dépistage quand de nombreuses provinces éprouvaient des difficultés à cet égard. Même si la loi prévoit des consultations, le gouvernement fédéral n'a pas besoin de l'aval des provinces pour agir.
    Le gouvernement fédéral pourrait aussi élaborer une loi propre à la COVID. Contrairement à la loi déjà élaborée à ce sujet, laquelle est de nature principalement financière, le gouvernement fédéral pourrait rédiger une loi qui mettrait l'accent sur les aspects de la COVID qui touchent la santé publique.
    Il pourrait le faire en exerçant son pouvoir de prendre des lois pour la paix, l'ordre et le bon gouvernement, conformément à l'article 91 de la Constitution. Ce pouvoir lui permet d'agir à des urgences ou à des problèmes d'envergure nationale. La Cour suprême a déclaré qu'une pestilence se qualifierait certainement au titre de la disposition sur la paix, l'ordre et le bon gouvernement. Même si ce terme est tombé en désuétude, la COVID constitue certainement une pestilence.
    Enfin, le gouvernement aurait pu envisager d'utiliser les pouvoirs, que lui confère l'article 11.1 de la Loi sur le ministère de la Santé, de prendre des arrêtés d'urgence pour des questions de santé publique. Bien que ce moyen n'ait pas fait autant l'objet de commentaires de spécialistes que la Loi sur les mesures d'urgence ou la disposition sur la paix, l'ordre et le bon gouvernement, je crois comprendre que le Comité a entendu parler de la Loi sur le ministère de la Santé lors de sa dernière séance.
    Passant maintenant aux observations plus générales sur le rôle du gouvernement fédéral pendant la pandémie, je ferais d'abord remarquer que je trouve étonnant qu'alors que le pays est confronté à ce qui pourrait être la plus importante urgence depuis la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement fédéral ne se soit pas prévalu des pouvoirs exceptionnels que lui accorde la Loi sur les mesures d'urgence ou n'ait pas adopté de loi propre à la COVID comme le lui permet la disposition sur la paix, l'ordre et le bon gouvernement. S'il n'invoque pas la Loi sur les mesures d'urgence dans la situation actuelle, je ne sais pas quand il le fera.
    Non seulement le gouvernement fédéral n'a pas utilisé ces pouvoirs, mais il semble leur avoir accordé bien peu d'attention. De façon générale, j'ai entendu le premier ministre et d'autres instances formuler des commentaires assez vagues sur le fait que le recours à la Loi sur les mesures d'urgence était une possibilité ou qu'ils envisageaient toutes les options, sans faire preuve de transparence envers la population pour expliquer pourquoi ils n'utilisaient pas ces pouvoirs. J'aimerais qu'ils soient plus transparents à cet égard.
(1305)
     Le gouvernement fédéral considère-t-il qu'il s'agit d'un problème juridique tel que la Loi sur les mesures d'urgence ne permet pas de résoudre ces questions? Si c'est le cas, alors je me demande pourquoi cette loi n'a pas été modifiée l'an dernier afin d'être prête pour l'arrivée des variants et de la troisième vague.
    Je crains que la véritable raison pour laquelle le gouvernement fédéral n'est pas intervenu davantage soit politique. Les premiers ministres provinciaux ont clamé qu'ils ne voulaient pas que le gouvernement fédéral invoque la Loi sur les mesures d'urgence, affirmant pouvoir gérer eux-mêmes la situation. Le premier ministre Moe a déclaré qu'il pouvait gérer efficacement la crise, ce qui n'est manifestement pas le cas. La Saskatchewan n'a pas géré efficacement la crise, pas plus que ne l'ont fait des provinces comme le Québec, avec le problème des soins de longue durée, ou l'Alberta, qui enregistre les pires chiffres en Amérique du Nord.
    Les provinces s'en sont remises au gouvernement fédéral pour le soutien financier et la préparation des fournitures, mais le rôle qu'il a joué pour limiter la propagation de la COVID a été fort restreint, puisqu'il a mis l'accent sur les répercussions financières. Je sais que l'imposition de restrictions de santé publique a un prix politique, mais je pense qu'en tentant de trouver un compromis politique pour faire plaisir aux provinces et à tout le monde, il a affaibli ces règles. Je voudrais que le gouvernement fédéral envisage de manière transparente l'utilisation du pouvoir d'urgence et prenne des décisions en fonction des intérêts des Canadiens plutôt que des aspects politiques des relations fédérales-provinciales.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, madame Hardcastle.
    Nous entendrons maintenant M. Wesley Wark.
    Vous avez la parole pour six minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de cette invitation à comparaître devant vous dans le cadre de votre étude sur l'urgence sanitaire actuelle.
    De nombreux éléments associés à notre préparation et à notre intervention relatives à la pandémie de COVID-19 ont fait défaut. Le premier a été notre système d'alerte précoce et d'évaluation des risques. Je crois qu'il faut comprendre pourquoi et qu'il faut régler le problème. L'alerte précoce et la juste évaluation des risques sont essentielles à la préparation et à l'intervention. Elles nous permettent de gagner du temps précieux pour la prise de décisions éclairées et les communications publiques. Elles sauvent des vies.
    Le Canada avait amplement la possibilité d'évaluer rapidement et de manière appropriée la menace que représentait la COVID-19. En raison de ce que je qualifie d'échec monumental des systèmes et de l'imagination, nous avons ignoré de nombreux signaux importants alors que la pandémie entreprenait son avancée implacable à travers la Chine et dans le monde entier.
    Le système d'alerte précoce du Canada n'a pas fonctionné ne manière efficace. Le premier rapport spécial du Réseau d'information sur la santé mondiale au sujet d'une éclosion de pneumonie virale à Wuhan, en Chine, a été publié le 1er janvier 2020, mais aucune alerte visant une clientèle mondiale plus vaste n'a été autorisée. Par la suite, le RISM a publié une série de rapports quotidiens — des sommaires destinés aux médias — de plus en plus volumineux, qui n'étaient pas utiles pour les décideurs canadiens.
    Au cours de la période entre le 7 janvier et le 16 mars 2020, l'ASPC a produit six évaluations des risques sur la COVID-19. J'ai analysé ces rapports en détail alors que j'étais expert-conseil pour le Bureau du vérificateur général. Jusqu'à l'évaluation finale des risques du 16 mars, l'ASPC a livré un message rassurant voulant que la COVID-19 représente un faible risque pour le Canada et les Canadiens. Comme l'a constaté la vérificatrice générale dans son rapport percutant, la méthodologie utilisée par l'ASPC pour préparer ces évaluations des risques était profondément déficiente et n’avait pas été testée. Les évaluations des risques n'ont pas tenu compte des risques de pandémie prospectifs; elles n'ont pas fait l'objet de discussions et n'ont pas été intégrées au processus décisionnel.
    L'ASPC a accepté le rapport de la vérificatrice générale, comme vous le savez, et a promis de procéder à un examen des leçons tirées, mais ne le fera pas avant décembre 2022, au plus tôt.
    Pour comprendre comment nous en sommes arrivés à un échec aussi cuisant, il faut remonter à la période qui a suivi la crise du SRAS. En avril 2004, alors que la crise du SRAS était encore fraîche dans sa mémoire, le gouvernement a publié sa toute première politique canadienne de sécurité nationale, intitulée Protéger une société ouverte, qui énonçait ce qui suit:
Le gouvernement entend prendre à l'avenir toutes les mesures nécessaires pour intégrer pleinement sa démarche relative aux urgences touchant la santé publique dans le programme de sécurité nationale [...] le volet de la santé publique occupera une place importante dans les évaluations intégrées de la menace réalisées par le gouvernement [...]
    Malheureusement, rien de tout cela ne s'est produit après 2004.
    Le Canada doit maintenant bâtir un système de renseignements sur la santé qui comprend et utilise le modèle classique du cycle des renseignements, afin de pouvoir atteindre les objectifs suivants: collecte rapide de renseignements de toutes sources; production d'évaluations rigoureuses et de grande qualité; intégration des évaluations aux processus décisionnels. Lorsque la COVID-19 a frappé, aucun élément de ce système n'était en place au sein du gouvernement fédéral. Nous devons aussi renforcer la dimension internationale, notamment par le partage complet et opportun des renseignements sur la santé avec l'OMS, conformément au Règlement sanitaire international.
    Un tel système ne saurait fonctionner en étant cloisonné à l'ASPC. Pour sortir de cette approche cloisonnée, nous devons prendre certaines mesures. Nous devons mettre sur pied une stratégie en matière de sécurité nationale. Nous devons aussi, à mon avis, créer une structure de conseil national de la sécurité au cœur du gouvernement, qui évaluera les menaces, notamment celles contre la sécurité sanitaire, de façon holistique. Nous devons mettre sur pied un centre de surveillance et de fusion des renseignements sur la santé, et nous devons permettre la contestabilité par la mobilisation des experts et des parties intéressées. Tous ces concepts sont pris en compte dans le cadre d'un projet de recherche inédit visant à réinventer la stratégie canadienne en matière de sécurité nationale pour le XXIe siècle, réalisé par le Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale de Waterloo.
(1310)
    Nos plus proches alliés comprennent le besoin de faire les choses autrement. En mai 2020, la Grande-Bretagne a mis sur pied un centre conjoint de biosécurité afin de mieux gérer et utiliser l'information et les évaluations pour éclairer la prise de décisions. En janvier 2021, le président Biden a publié un mémorandum sur la sécurité nationale, qui demande la mise en place d'un centre national de prévision et d'analyse des épidémies, dans le but de moderniser la détection précoce à l'échelle mondiale.
    Le Canada pourrait, en collaboration avec ses alliés, être un chef de file mondial en matière de renseignement sur les épidémies, mais pour ce faire, il faut une pensée novatrice, un engagement à faire des changements significatifs — notamment des changements organisationnels — et un sentiment d'urgence. J'espère que le Comité partagera mes préoccupations à propos de ces enjeux et demandera lui aussi un programme de réforme essentiel.
    Merci.
    Merci.
    La parole est maintenant au Dr Schwartz.
    Vous disposez de six minutes. Allez-y.
    Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant le Comité aujourd'hui. Je suis ici à titre de coprésident de l'Ontario COVID-19 Science Advisory Table, un groupe composé de 54 scientifiques — principalement bénévoles — des domaines de la médecine, de la science et des mathématiques.
    Nous ne faisons pas partie du gouvernement provincial. Nous sommes entièrement indépendants. Bien que certains de nos membres — dont moi — soient des professionnels de la santé qui peuvent aussi travailler pour des organismes gouvernementaux, nous ne faisons pas partie de l'appareil de la santé publique de l'Ontario. Nous ne publions pas d'ordonnances de santé publique ni de recommandations. Nous ne conseillons pas les collectivités au sujet des pratiques en matière de santé publique.
    Nous avons pour seul mandat de rechercher et d'analyser les données scientifiques qui aideront le gouvernement, la santé publique, les professionnels de la santé et les Ontariens à gagner la bataille contre la COVID-19. Nous informons régulièrement les divers organes du gouvernement de l'Ontario. Notre travail est rendu public.
    Aujourd'hui, je suis heureux de vous expliquer ce que les données scientifiques démontrent au sujet de la situation en Ontario, mais je demande aux membres du Comité de garder quelques éléments en tête dans le cadre de cette discussion.
    Premièrement, nous formons un groupe scientifique indépendant. Il n'est donc pas approprié pour nous de commenter les politiques du gouvernement. Nous pouvons vous parler des chiffres et vous expliquer ce qu'ils signifient. Nous pouvons vous parler de ce que les données probantes nous disent au sujet des mesures qui nous donnent les meilleures chances de vaincre la COVID. Nous pouvons vous dire si de telles choses risquent de se produire. Nous ne pouvons toutefois pas examiner, critiquer ou évaluer le rendement du gouvernement.
    Deuxièmement, nous nous centrons uniquement sur l'avenir. Je suis médecin et bien que bon nombre des scientifiques du groupe ne le soient pas, nous croyons que nous devons servir la population au même titre qu'un médecin doit servir son patient. Les arguments au sujet du passé n'ont pas leur place. Seule la perspective de l'avenir aidera le patient.
    Enfin, la science est un processus. Les données probantes évoluent alors que les faits sur le terrain changent. Nous en apprenons tous les jours. Nous en avons encore beaucoup à apprendre. En science, l'incertitude ne représente pas l'échec; elle fait partie du processus.
    Sur ce, je vais résumer un document que nous avons préparé le mois dernier, qui s'intitule Fighting COVID-19 in Ontario: The Way Forward. Il représente notre meilleure réflexion au sujet des données probantes et des mesures que doit prendre l'Ontario en fonction de celles-ci.
    Depuis sa formation en juillet, l'Ontario Science Advisory Table fonctionne selon trois principes. Premièrement, nous misons sur les plus récentes données scientifiques. Deuxièmement, nous faisons preuve de transparence: tous nos dossiers scientifiques sont rendus publics. Troisièmement, nous sommes indépendants. Bien que nous conseillions habituellement le gouvernement provincial en fonction de ce que nous disons publiquement, aucun organisme ou bureau gouvernemental ne contrôle notre contenu scientifique ou nos communications de quelque façon que ce soit.
    Après plus d'un an de pandémie de COVID-19, nous savons que les six éléments suivants réduiront la transmission, protégeront notre système de soins de santé et nous permettront de reprendre nos activités en toute sécurité le plus rapidement possible.
    Le premier consiste à ouvrir uniquement les milieux de travail essentiels. Certains lieux de travail intérieurs doivent demeurer ouverts, mais seuls les milieux réellement essentiels doivent l'être, et doivent appliquer des mesures de sécurité strictes relatives à la COVID-19. Par exemple, les travailleurs essentiels doivent porter un masque en tout temps lorsqu'ils travaillent à l'intérieur ou lorsqu'ils sont à proximité les uns des autres à l'extérieur, et doivent être appuyés en ce sens.
    Le deuxième vise à payer les travailleurs essentiels afin qu'ils restent à la maison lorsqu'ils sont malades, qu'ils ont été exposés au virus ou qu'ils doivent être vaccinés. Le SRAS-CoV-2 se propage lorsque les gens se rendent au travail alors qu'ils sont malades ou qu'ils ont été exposés au virus. Les travailleurs le font souvent parce qu'ils n'ont pas le choix. Ils doivent nourrir leur famille et payer leur loyer. Une prestation d'urgence permettra de restreindre la propagation du virus si elle offre un revenu approprié, est facilement accessible et est versée immédiatement, et si elle est offerte aux travailleurs essentiels lorsqu'ils sont malades, qu'ils ont été exposés au virus ou qu'ils ont besoin de temps pour passer un test de dépistage ou se faire vacciner, et ce tout au long de la pandémie.
    Le troisième a trait à l'accélération de la vaccination des travailleurs essentiels et des personnes qui vivent dans les zones névralgiques. Les vaccins sont essentiels pour ralentir la pandémie. Nous devons offrir le plus grand nombre de doses possible aux habitants des quartiers chauds, aux populations vulnérables et aux travailleurs essentiels, accélérer la distribution des vaccins et faciliter l'accès des groupes à risque à la vaccination.
    Le quatrième élément vise à réduire la mobilité. Il faut réduire les déplacements entre les provinces et au sein de celles-ci. La COVID-19 n'est pas une pandémie uniforme: les diverses régions de l'Ontario et du Canada font face à des problèmes distincts. Les déplacements dans le pays peuvent créer de nouveaux points chauds parce que les variants se transmettent très rapidement. Les gens doivent rester dans leur collectivité dans la mesure du possible.
(1315)
    Le cinquième vise à miser sur les lignes directrices éprouvées en matière de santé publique: ne pas se réunir à l'intérieur avec des gens qui ne font pas partie de notre ménage; se rencontrer à l'extérieur; garder une distance de deux mètres; porter le masque; se laver les mains.
    Le dernier élément porte sur le maintien des liens de façon sécuritaire. L'entretien des liens sociaux et le maintien des activités extérieures sont importants pour notre santé physique et mentale générale. Ainsi, on peut permettre à de petits groupes de personnes provenant de divers ménages de se rencontrer si tout le monde porte un masque et garde une distance de deux mètres. On peut également garder les terrains de jeux ouverts et encourager les activités extérieures sécuritaires.
    Les politiques qui nuisent aux personnes racisées et marginalisées ou aux autres populations vulnérables ne fonctionnent pas. Elles ne permettent pas de lutter efficacement contre une maladie qui affecte déjà ces groupes de façon disproportionnée. Ainsi, les politiques visant à lutter contre la pandémie doivent tenir compte de l'équité.
    En conclusion, il n'y a pas de compromis à faire entre les priorités économiques, sociales et sanitaires lorsque la pandémie atteint un sommet, comme c'est le cas en Ontario et dans certaines autres provinces. Pour prendre le contrôle de cette maladie le plus rapidement possible, il faut travailler ensemble.
    Merci.
    Merci, docteur Schwartz.
    Nous allons commencer notre série de questions avec Mme Rempel Garner. Vous disposez de six minutes. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Wark. Je partage vos préoccupations. Vous savez, nous aurons beaucoup de temps pour les enquêtes, mais nous devons bien faire les choses maintenant. En décembre 2022, il sera trop tard pour songer aux façons de changer les choses. Je souligne qu'un des importants variants de l'Inde a été identifié en octobre passé, mais le Canada... Nous sommes réactionnaires aux menaces émergentes, même en plein cœur d'une pandémie.
    Je me suis un peu éloignée du sujet. Je voulais parler des recommandations pour combler certaines des lacunes immédiatement et pour l'avenir, que nous pouvons intégrer à notre rapport. Le rapport de la vérificatrice générale a fait valoir que le Canada n'avait pas tenu compte des risques à venir, et jugeait le risque faible au pays, ce qui a entraîné des conséquences accablantes, comme vous l'avez dit. Que pourrions-nous faire différemment maintenant?
    Je me demande s'il y a une sorte de... Premièrement, il n'y a pas de méthode centralisée de collecte de renseignements. Vous en avez parlé. Je crois que nous devons d'abord régler ce problème. Ensuite, nous devons consigner ces renseignements dans un système d'évaluation des risques clair qui peut servir à évaluer un large éventail de risques pathogènes — un peu comme le système de niveaux DECON — afin de les communiquer clairement à la population. Enfin, il faut associer à chacun de ces niveaux de risque des mesures que prendra le gouvernement, qu'il s'agisse d'interdictions de voyager, d'avis aux voyageurs ou de mesures de quarantaine.
    C'est ce qui m'est venu en tête lorsque j'ai lu le rapport de la vérificatrice générale, et je me demande si nous pouvons prendre des mesures immédiatement en vue de nous réorganiser pour ne pas être vulnérables, surtout face aux variants.
(1320)
    Je vous remercie pour votre question, madame Rempel Garner.
    Je suppose que je dois m'adresser à la présidence, mais j'ai toujours trouvé cette formalité étrange. Vous m'en excuserez.
    Je crois que vous soulevez un excellent point, mais je dirais deux choses en réponse à votre question, sur les mesures que nous pouvons prendre maintenant. La première, c'est qu'il y a de nombreuses mesures d'application spéciales qui peuvent être prises pour miser sur les capacités et le talent au sein du gouvernement fédéral.
    La communauté du renseignement de sécurité sait très bien comment recueillir des renseignements provenant de toutes les sources et réaliser une évaluation des risques professionnelle. Le problème, c'est que — comme je l'ai dit plus tôt — l'ASPC était cloisonnée en ce qui a trait à ces activités et à cette expertise. Il faut veiller à ce que l'expertise et les capacités des divers organismes du système canadien du renseignement de sécurité soient mises à la disposition de l'ASPC dans le cadre du processus d'évaluation continue des risques. C'est peut-être ce qui se passe derrière les murs de la communauté du renseignement sur la sécurité.
    Je ne sais même pas dans quelle mesure les évaluations des risques peuvent être maintenues. On a essentiellement cessé de faire ces évaluations en mars 2020 lorsqu'on a réalisé que la pandémie était arrivée. Elles ont peut-être repris. Je ne le sais pas; je n'ai rien vu de public à ce sujet.
    Il faudrait établir une capacité d'évaluation continue des risques. Si une telle capacité avait été en place, nous aurions peut-être pu nous préparer pour les deuxième et troisième vagues, et les variants.
    Enfin, je dirais qu'il faut veiller à ce que les mesures spéciales que nous prenons dans le but de gérer une crise ne deviennent pas des mesures permanentes. Nous devons garder en tête notre objectif.
    Voilà quelles sont les mesures structurelles et stratégiques importantes que nous devons prendre, à mon avis. Une stratégie nationale en matière de sécurité... Il faut que la structure du conseil national de la sécurité soit au coeur du gouvernement. Nous avons besoin d'une capacité pangouvernementale en matière de collecte et d'évaluation des renseignements non seulement pour face face aux urgences sanitaires, mais aussi pour lutter contre un large éventail de menaces non traditionnelles qui planent sur le Canada.
    Il faut donc prendre le peu de renseignements dont nous disposons à l'heure actuelle et les intégrer à une sorte de cadre d'action. Je ne crois pas que le caractère ponctuel de la situation se limite à la collecte de renseignements. Il vise aussi la prise de mesures uniformes et cohésives, et le contrôle de leur efficacité.
    Croyez-vous qu'il s'agit d'une évaluation juste de la situation actuelle?
    Cela semble être le cas, malheureusement, du moins pour la période pour laquelle nous avons des documents publics sur la façon dont l'ASPC a géré l'urgence. Les hauts dirigeants de l'Agence de la santé publique du Canada et du gouvernement doivent — et je suis sûr que c'est maintenant le cas — prendre la menace continue que représente la COVID très au sérieux, contrairement au début, mais...
(1325)
    Savez-vous si certaines de ces mesures sont en place en ce moment? Y a-t-il eu des changements depuis la publication du rapport de la vérificatrice générale?
    Je ne connais pas les détails, madame Rempel. Je sais qu'il y a eu de grands changements dans la haute direction de l'ASPC. Il est clair que certains de ces changements dans la direction de l'ASPC ont été apportés précisément pour apporter une expertise de la communauté du renseignement de sécurité à l'agence. Je pense que c'est une bonne chose.
    D'un point de vue organisationnel...
    Il ne me reste que 30 secondes.
    Y a-t-il un pays qui a bien fait en la matière, dont le Comité pourrait examiner les pratiques exemplaires? Si oui, lequel?
    Il existe des candidats évidents — et plusieurs membres du Comité doivent les connaître — parmi nos partenaires du Groupe des cinq. Je pense immédiatement à l'Australie et à la Nouvelle-Zélande. Ce n'est pas nécessairement parce qu'ils avaient de meilleures capacités de renseignement ou de meilleures structures en place, mais, pour une raison ou une autre, ils étaient plus attentifs aux pandémies passées et à des choses telles que le SRAS, et nous aurions dû l'être aussi. Voilà un exemple de quelques pays.
    Je pense aussi à d'autres pays dans la région, tels que Taïwan et la Corée du Sud qui ont certainement mieux fait et qui étaient bien plus préparés à faire face à la COVID lorsqu'elle a traversé les frontières chinoises. Nous pouvons tirer beaucoup de leçons de nos partenaires mondiaux.
    Très brièvement, je vous dirais que l'une des choses qui me trouble dans notre réponse face à la COVID, c'est que nous n'avons pas tenté de tirer ces leçons au début de la pandémie.
    Merci, madame Rempel Garner.
    Nous allons maintenant passer à Mme O'Connell.
    Alley-y, madame O'Connell. Vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Mes questions s'adresseront au Dr Schwartz.
    Tout d'abord, j'aimerais vous remercier, vous et vos collègues. Je suis certaine que parfois, vous sentez que vous faites ce travail sans reconnaissance, mais sachez que nous apprécions grandement votre expertise unie en ces temps difficiles.
    J'aime que vous ayez exposé très clairement les six éléments prioritaires qui nous permettront d'aller de l'avant. Je les ai notés.
    Dans la même veine, ma question porte sur les plus gros risques en Ontario à l'heure actuelle. Des données nous démontrent que plus de 60 % des éclosions surviennent dans les milieux de travail et les milieux scolaires — on parle de 43 % dans les milieux de travail et de 21 % dans les milieux scolaires. Dans la même veine et en fonction des six éléments prioritaires que vous avez mentionnés, quelle est, selon vous, la plus grande menace de propagation de cas qui met le plus à mal notre système de santé ontarien à l'heure actuelle?
    Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de vos bons mots, madame O'Connell.
    Je crois que la plus grande menace aura trait aux milieux de travail bondés et, entre autres, à ceux qui se trouvent dans les points chauds. Je pense, en particulier, moins au milieu scolaire, mais plutôt aux milieux de travail dans le domaine de la distribution et du transport, où des travailleurs vivent dans des points chauds, dans des logements surpeuplés ou alors avec d'autres travailleurs dans des logements multigénérationnels, surtout dans le Nord-Ouest de Toronto et dans la région de Peel.
    Voilà pourquoi nous avons recommandé de distribuer des vaccins de façon ciblée dans ces régions, ce qu'a fait la province. Nous nous réjouissons à l'idée que ces recommandations, qui sont basées sur certaines des modélisations que nous avons faites, vont — du moins nous l'espérons — commencer à réduire efficacement la transmission du virus dans ces milieux.
    Merci.
    Dans une autre vie, j'étais aussi dans le milieu politique, mais à l'échelle municipale et régionale en Ontario. Nous avions certaines responsabilités en matière de santé par l'entremise de nos agences de santé locales. Parmi ces responsabilités, on compte la communication et la sensibilisation des citoyens, afin qu'ils sachent, dans ce cas-ci, ce qu'ils peuvent faire pour aider à réduire la propagation du virus et qu'ils soient conscients des risques.
    Vous avez dit que les milieux de travail sont la principale préoccupation présentement. J'ai remarqué que les frontières ne faisaient pas partie de vos six éléments prioritaires. Ce genre de décision politique... J'ai bien compris ce que vous avez dit. Je ne vous demanderai pas de critiquer une décision politique, mais si l'on parle de préoccupations et si les milieux de travail sont bel et bien la plus grande menace, lorsqu'il s'agit de ressources et d'efforts de communication auprès des Ontariens, ne serait-ce pas bénéfique pour les mesures de santé publique globales d'investir des ressources dans les points chauds et dans les milieux préoccupants afin d'outiller et de sensibiliser les citoyens dans ces régions les plus affectées par le virus à l'heure actuelle? En priorisant des enjeux comme celui des frontières, qui représentent moins de 2 % des cas de transmission en Ontario, dans nos efforts de communication, ne ratons-nous pas l'occasion de sensibiliser et d'aider les Canadiens à stopper la propagation du virus? Ratons-nous l'occasion de sensibiliser nos communautés?
(1330)
    Si je comprends bien, — et corrigez-moi si je me trompe — votre question porte sur les efforts de communication sur les risques et les interventions qui pourraient réduire les risques de transmission dans les points chauds. Ce que je peux vous dire, c'est que, bien que cela ne fasse pas partie des six éléments prioritaires, cela y est tout de même relié, car... Il est clairement difficile d'avoir accès à de nombreuses communautés. La région du grand Toronto a une population très diversifiée aux besoins très divergents. Il y a aussi, entre autres, l'enjeu de l'acceptation du vaccin. Il est important de pouvoir parler des risques dans une langue que les gens comprennent — littéralement — et nous devons aussi veiller à faire preuve de sensibilité culturelle pour ce faire. Nous devons agir de façon appropriée avec ces communautés auxquelles nous avons accès. Si nous le faisons, elles accepteront de se faire vacciner.
    Merci.
    Je vais accélérer un peu, car il ne me reste plus beaucoup de temps. L'enjeu des soins de longue durée en Ontario est très préoccupant. Ma circonscription a été particulièrement affectée et dévastée. On s'était fait dire dès le départ que tout ce qui pouvait être fait serait fait pour protéger les centres de soins de longue durée lors de la deuxième vague et, maintenant, de la troisième vague.
    À titre de médecin, pensez-vous que tout a été fait pour protéger nos résidents dans les centres de soin de longue durée?
    Et bien, je vous dirai qu'une des choses qui a été faite, c'est d'avoir envoyé des vaccins de façon ciblée pour les aînés, et surtout dans les centres de soins de longue durée. Ce programme s'est avéré très efficace et positif. J'espère que d'autres mesures telles que la réduction de la surpopulation dans les centres de soins de longue durée, l'amélioration de l'équipement de protection individuelle des travailleurs de la santé et, encore une fois, le fait de considérer ce milieu de travail comme un milieu très important pour réduire la transmission du virus, seront jugées aussi importantes.
    Merci, madame O'Connell.

[Français]

    Je cède maintenant la parole à Mme Gaudreau pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis très heureuse d'être parmi vous aujourd'hui, en remplacement de mon honorable collègue M. Thériault.
    Les deux messages que nous avons entendus m'ont amenée à réfléchir. Maintenant que nous avons eu cette pandémie-ci, il y en aura d'autres. C'est ce que je comprends.
    Par ailleurs, je m'interrogeais sur le rôle des provinces et du Québec. Pendant que vous parliez, je suis allée voir le sens du mot « confédération », lequel signifie alliance d'États indépendants. De fait, durant une pandémie, les États indépendants qui forment une confédération doivent être consultés. L'article 25 de la Loi sur les mesures d'urgence mentionne effectivement que les lieutenants-gouverneurs doivent être consultés avant que l'état d'urgence soit déclaré.
    J'aimerais que les témoins nous expliquent quelles consultations ont été faites et quels en ont été le résultat. En toute logique, un transfert en santé aurait dû résulter de ces consultations, pour pallier les besoins criants durant la pandémie.
    Une telle situation ne doit plus se reproduire. Évidemment, il faut respecter les pouvoirs de chacun, mais chaque État doit avoir les outils et les moyens nécessaires, en fonction de facteurs comme la culture, la langue ou le territoire. Comme je l'ai si bien entendu dire, c'est à géométrie variable.
    En premier lieu, j'invite la professeure Hardcastle à commenter sur ce qu'il est possible d'imposer à l'ensemble des provinces.
(1335)

[Traduction]

    Cela dépend de ce que l'on veut imposer. Les provinces accepteraient davantage l'intervention du gouvernement fédéral pour certaines choses plus que d'autres.
    Cela dit, je pense que le rôle le plus évident du gouvernement dans ce milieu serait...

[Français]

    Donnez-moi un ou deux exemples, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Bien sûr. L'enjeu des voyages en est un exemple évident. La Colombie-Britannique a dit qu'elle ne savait pas qu'elle pouvait interdire les voyages par la frontière albertaine. La province a eu besoin d'avis juridiques, car elle n'était pas certaine de pouvoir le faire. Pendant ce temps, de l'autre côté de la frontière, Banff est l'un des points chauds au Canada. Du côté britanno-colombien, les taux de cas sont beaucoup moins élevés.
    Selon moi, l'un des rôles évidents que pourrait encore jouer le gouvernement fédéral plutôt que de regarder en arrière et de dire ce qu'il aurait fallu faire il y a un an, serait d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence pour régler l'enjeu des voyages, puisque les taux de cas de COVID et la propagation des variants varient grandement d'une province à l'autre.

[Français]

    Cette pandémie était une première. Si nous devions en vivre une autre, il faudrait procéder d'une façon complètement différente, notamment sur le plan des consultations. Ce que nous avons vécu, à mon avis, était beaucoup trop axé sur la joute parlementaire.
    Avant de terminer, j'aimerais poser une question à M. Wark.
    Vous avez mentionné la Nouvelle-Zélande, l'Australie, la Corée, Taïwan. Pour quelles raisons estimez-vous tant ces pays? Avez-vous des exemples à donner de ce qu'ils ont fait qui justifient votre estime?

[Traduction]

    Très rapidement, je dirai que je crois que la clé de la réponse des pays qui ont le mieux fait face à la COVID-19 dès le départ — des pays comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande, Taiwan et la Corée du Sud — a été, tout d'abord, qu'ils avaient la capacité de prendre la menace au sérieux et de comprendre la gravité du risque. Cette capacité a permis de relier les experts en santé publique au gouvernement pour la prise de décision. Aussi, pour être franc, je pense que cette capacité était culturellement enracinée dans ces pays en raison du SRAS, qui est demeuré un souvenir marquant.
    Il y avait une panoplie d'enjeux, mais l'une des principales mesures qu'ils ont prises, et probablement une mesure clé dès le départ, a été de fermer les frontières très rapidement et de façon très stricte.

[Français]

    C'est excellent.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Il vous reste 30 secondes.
    C'est excellent.
    Ma question s'adresse à M. Schwartz.
    Monsieur Schwartz, vous avez bien précisé que les enjeux lors d'une crise sanitaire étaient à géométrie variable. D'après ce que je comprends, il faut effectivement prendre des mesures, mais doivent-elles être uniformes d'un bout à l'autre du pays? Nous verrons quelle analyse nous ferons de la crise actuelle. Si jamais une autre crise devait arriver, pour s'en sortir, il faudrait avoir des solutions.
    Il faut absolument respecter les enjeux à géométrie variable dans les différentes provinces. Êtes-vous d'accord avec moi à cet égard?

[Traduction]

    La réponse courte est que le niveau pandémique n'est pas le même d'une communauté ou d'une province à l'autre. Je crois qu'il y a deux enjeux principaux, monsieur le président, si vous me donnez 20 secondes de plus. Tout d'abord, on doit réduire la mobilité ainsi que le nombre de contacts en général. Ensuite, on doit réduire la mobilité dans les points chauds afin de réduire la transmission, car ce qui nous préoccupe particulièrement avec les variants, c'est qu'ils peuvent engendrer de la transmission communautaire très rapidement.

[Français]

    Merci, madame Gaudreau.
    Je vous remercie de votre indulgence, monsieur le président.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à M. Davies.
    Allez-y, monsieur Davies. Vous disposez de six minutes.
(1340)
    Madame Hardcastle, pour poursuivre dans la même veine que la dernière réponse de Dr Schwartz, je crois qu'il est désormais communément admis, comme l'a dit M. Wark, que les pays qui ont le plus réussi à réduire la transmission du virus sont ceux qui ont stoppé rigoureusement les déplacements. On l'a constaté au Canada avec les fermetures des frontières rapides dans la région de l'Atlantique.
    J'ai l'article 8 de la Loi sur les mesures d'urgence sous les yeux. Si le gouvernement invoquait la Loi sur les mesures d'urgence, son premier pouvoir serait « la réglementation ou l’interdiction des déplacements à destination, en provenance ou à l’intérieur d’une zone désignée si cela est nécessaire pour la protection de la santé et la sécurité de personnes physiques ».
    Ma question est la suivante: Le gouvernement fédéral est-il le seul à avoir le pouvoir constitutionnel de réglementer les déplacements interprovinciaux et entre les provinces et les territoires? Si le gouvernement y renonçait, les provinces pourraient-elles utiliser un tel pouvoir?
    Les provinces peuvent réglementer les déplacements au sein de leur territoire. De nombreuses provinces ont ce pouvoir comme pouvoir d'urgence dans leur loi de santé publique qui peut être exercé en cas d'urgence de santé publique. De nombreuses provinces ont ce pouvoir dans leur loi de santé publique, mais certaines semblent hésiter à l'utiliser.
    Par exemple, la Colombie-Britannique hésitait réellement à l'utiliser pour empêcher les Albertains de traverser la frontière, alors il semble y avoir... Une fois qu'un Albertain se trouve en sol britanno-colombien, la province a potentiellement le pouvoir de l'expulser, mais on semble s'y préoccuper de la légalité de la chose. Je ne crois pas qu'il y aurait ce genre de préoccupations si le gouvernement fédéral utilisait ce pouvoir, car il peut le faire à l'échelle fédérale sans l'ombre d'un doute.
    Je crois que la propagation des variants d'une province à l'autre pose problème. Il y a eu le cas d'un voyageur qui est venu en Alberta de la Colombie-Britannique. Son séjour a engendré 35 cas, au moins un mort et deux admissions en soins intensifs, alors les frontières provinciales posent un risque réel.
    J'imagine, pour être plus précis, que je me questionne sur la compétence constitutionnelle de la réglementation des déplacements intraprovinciaux, à l'intérieur d'une province et interprovinciaux. L'alinéa 8(1)a) donne le pouvoir au gouvernement fédéral de mettre en place des restrictions sur les déplacements interprovinciaux. Est-ce une lecture juste de la loi? Est-ce que je l'interprète correctement?
    C'est bel et bien le cas. Je crois que ce qui a posé problème aux provinces, c'est qu'elles savent qu'elles peuvent utiliser ce pouvoir intrapovincial, mais ce n'est pas clair ce que cela signifie directement à la frontière, lorsque quelqu'un traverse la frontière.
    Nous savons que l'interdiction de déplacements dans la région de l'Atlantique a fait l'objet de litiges, mais seulement à propos de la Charte. On n'a jamais invoqué l'enjeu de la division des pouvoirs.
    L'une des préoccupations qui a été soulevée par les médias — et parfois par les citoyens et le gouvernement — concernant la Loi sur les mesures d'urgence, entre autres, c'est, je crois, le spectre de l'ancienne Loi sur les mesures de guerre et ses répercussions sur les libertés civiles. Existe-t-il des protections ou des dispositions dans la Loi sur les mesures d'urgence qui visent à protéger les libertés civiles et qui pourraient rassurer les Canadiens?
    Nombre des mesures de santé publique actuelles soulèvent des enjeux de libertés civiles. On ne peut pas dire clairement si les mesures fédérales mettraient davantage en péril les libertés civiles que les mesures provinciales. Bien sûr, tout cela est assujetti à la Charte. Les actions gouvernementales sont assujetties à la Charte. C'est pour protéger les libertés civiles.
    De plus, avec la Loi sur les mesures d'urgence, les mesures entreprises en vertu de cette loi sont assujetties au débat parlementaire. Il y a donc de la reddition de comptes. On compte davantage de mécanismes de reddition de comptes au sein de la Loi sur les mesures d'urgence que dans les lois provinciales de santé publique, qui prévoient une grande délégation aux médecins hygiénistes en chef. Il y a très peu de reddition de comptes à ce niveau-là.
    D'après mon interprétation de la Loi sur les mesures d'urgence, elle a été, bien sûr, adoptée au milieu des années 1980, d'après la Charte canadienne sur les droits et libertés. Lorsque j'ai lu les débats qui ont entouré la création de la Loi sur les mesures d'urgence, j'ai remarqué deux points qui semblaient trotter dans la tête des parlementaires. Le premier point, c'est que la Loi sur les mesures de guerre, qui avait été invoquée en 1970, n'était pas assujettie explicitement à la Charte canadienne sur les droits et libertés ou à quelconque autre charte. Le deuxième point, c'est que cette loi n'exigeait aucune surveillance parlementaire. Le conseil des ministres disposait de pouvoirs illimités pour faire ce qu'il voulait, et ce, pour une période de temps indéterminée.
    Existe-t-il des dispositions dans la Loi sur les mesures d'urgence qui veillent à ce qu'il y ait de la surveillance parlementaire, une période déterminée pour l'octroi des pouvoirs et à assujettir cette loi à la primauté de la Charte?
(1345)
    Oui, tout à fait. La déclaration de la situation d'urgence est limitée dans le temps et doit être renouvelée. Cela facilite les choses. De plus, dans la Loi sur les mesures d'urgence, on assure une surveillance parlementaire, chose qui n'existe pas dans certaines règles provinciales de santé publique et qui n'était pas prévue dans l'ancienne Loi sur les mesures de guerre. Puis, il y a la Charte, bien sûr, alors il existe des mesures de reddition de comptes qui ne sont pas aussi présentes dans certaines provinces et qui n'existaient pas dans la Loi sur les mesures de guerre.
    Merci. Cela met fin au premier tour. Nous commençons le deuxième tour.
    Il nous reste peu de temps, mais nous tenterons de faire un deuxième tour plus court, avec des interventions de trois minutes pour les conservateurs et les libéraux et d'une minute et demie pour le Bloc et le NPD.
    Monsieur Barlow, la parole est à vous pour trois minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Wark, notre attention porte essentiellement aujourd'hui sur le partage des responsabilités entre les gouvernements provinciaux et territoriaux et le gouvernement fédéral. Dans le rapport de la vérificatrice générale, on indique que l'ASPC était censée mener une simulation nationale d'une pandémie en 2019, donc avant la pandémie de COVID-19.
    En quoi la situation aurait-elle été différente si l'ASPC avait mené cette simulation afin d'évaluer la capacité des provinces et des territoires de gérer une pandémie et, peut-être, de surmonter certains des problèmes que nous avons manifestement vus ces 18 derniers mois?
    C'est une excellente question, monsieur Barlow. Je suppose qu'il s'agit d'une question rhétorique, en un sens. J'ajouterais juste un point. L'ASPC a planifié la tenue d'une simulation nationale d'une urgence de santé publique pendant neuf ans, entre 2010 et 2019, et n'en a pas réalisé une seule. Je pense que cela répond à la question clé de l'importance que les responsables de l'ASPC auraient accordée à une telle simulation, même s'ils en avaient fait une.
    Je ne peux pas vraiment me prononcer sur une simulation qu'ils n'ont pas faite. Pour l'avenir, il sera très important — et je pense que c'est bien compris — de planifier en fonction du risque d'une future pandémie. Une des façons d'assurer l'état de préparation et de comprendre les lacunes est de mener très fréquemment divers types de simulations systémiques.
    Merci.
    Vous avez aussi mentionné le Réseau mondial d’information en santé publique et son incapacité de s’acquitter pleinement de son mandat. Là encore, le gouvernement fédéral aurait dû jouer un rôle pour cerner la menace de pandémie et avertir les provinces et territoires. Pouvez-vous donner plus de détails à ce sujet? Je sais que vous n'avez qu'une minute, environ, mais qu'est-ce qui a empêché le RMISP de jouer pleinement son rôle? En quoi cela aurait-il pu changer la donne?
    C'est une excellente question. Je n'ai pas vraiment de réponse à vous donner. J'espère vraiment que le groupe indépendant créé par la ministre de la Santé pour examiner la question ira au fond des choses. Dans son rapport provisoire, le groupe a laissé entendre — au moment de la préparation du rapport provisoire — qu'il n'avait pu déterminer exactement pourquoi le système d'alerte du RMISP a été mis en suspens, comme ce fut le cas. Le groupe l'a confirmé, comme nous l'avons appris dans le reportage d'enquête du Globe and Mail.
    Franchement, je pense que cela témoigne d'un problème de culture plus vaste à l'Agence de la santé publique du Canada: elle a négligé le système mondial d'alerte précoce en matière de santé et ne le considérait pas comme prioritaire. Voilà pourquoi le RMISP a été mis en veilleuse, en quelque sorte. Le processus d'évaluation des risques n'a pas été mis en œuvre correctement, n'a pas été doté du personnel et des ressources nécessaires et n'a pas été pleinement compris.
    Cela démontre l'importance du véritable changement culturel qui s'impose à l'Agence de la santé publique du Canada, et qui doit être accompagné d'une intégration beaucoup plus grande des pratiques de sécurité sanitaire et de la communauté de la sécurité nationale. C'est précisément ce qui était demandé en 2004, et cela n'a pas été mis en œuvre.
    Je vous remercie beaucoup de la réponse.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Barlow.
    Nous passons maintenant à Mme Sidhu. Allez-y, s'il vous plaît. Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Ma question s'adresse au Dr Schwartz.
    Je viens de Brampton, la collectivité la plus durement touchée de la province. Nous avons vu les ravages terribles du virus sur nos communautés, nos travailleurs, nos familles, nos voisins et nos résidants. Avez-vous offert au gouvernement ontarien des conseils qui auraient permis d'éviter la troisième vague?
(1350)
    Merci, madame Sidhu.
    J'ai beaucoup de compassion pour la collectivité de Brampton. Elle a été très durement touchée.
    L'Ontario Science Advisory Table a suivi avec inquiétude l'évolution de la situation en Grande-Bretagne en décembre et en janvier. Nous suivions le variant B.1.1.7 et ses répercussions en Grande-Bretagne et en Europe occidentale.
    Pour ce qui est de l'avenir et de la prévention d'une quatrième vague, le maintien de restrictions les plus rigoureuses possible le plus longtemps possible est un principe très important. Comme nous l'avons indiqué, limiter le nombre de lieux de travail considérés comme essentiels et restreindre les déplacements... Il est très difficile de revenir en arrière. Bien entendu, je compatis avec les décideurs qui doivent composer avec divers facteurs autres que les données scientifiques de santé publique, comme l'économie, etc. Je ne voudrais pas remettre en question les décisions qui ont été prises.
    Pour l'avenir, il est très important de maintenir le confinement le plus longtemps possible pour tirer parti de la vaccination.
    Docteur Schwartz, leur avez-vous donné des conseils? Ont-ils suivi vos conseils?
    Nous verrons bien. Les six recommandations dont j'ai parlé sont publiques. Encore une fois, plusieurs facteurs entrent en ligne de compte lors de la prise de décisions très importantes. Il y a une multitude de données évolutives, et des zones grises, lors de la prise de décisions déterminantes pour la suite des choses.
    Ce que je peux dire, c'est que la vaccination ciblée réduira la transmission plus rapidement, je l'espère, que si on avait procédé en fonction du nombre d'habitants. Le prolongement des mesures de santé publique existantes permettra de tirer parti de l'effet de la vaccination dans la population.
    Merci, madame Sidhu.
    Nous passons maintenant à M. Maguire. Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Mon collègue, M. Généreux, a une question à poser. Je lui laisse la parole.
    Allez-y.

[Français]

    Monsieur Généreux, vous avez la parole.
    Merci à mon collègue de me donner l'occasion de poser une question. En fait, c'est une question qui s'adresse à l'ensemble des témoins.
    Comme vous le savez, le Québec a été plus largement touché au début de la pandémie, l'année dernière. Cela est attribuable au fait que nous avons eu la semaine de relâche plus tôt que les autres provinces, mais aussi au fait que nous étions à proximité de l'épicentre nord-américain de la pandémie, soit l'État de New York.
    À la lumière de ces faits, pensez-vous qu'il aurait été bon que le gouvernement cesse immédiatement les liaisons aériennes et terrestres, notamment celles assurées par les autobus de voyageurs qui se déplacent fréquemment entre les deux pays? Est-ce une mesure que le gouvernement aurait dû prendre rapidement?
    Je fais allusion à l'un des témoins qui a dit tantôt que le gouvernement n'était pas préparé à la pandémie, contrairement à d'autres pays comme l'Australie ou la Nouvelle-Zélande. Après tout, on aurait dû apprendre de l'épidémie de SRAS vécue précédemment.
    Donc, est-ce qu'on aurait dû agir plus rapidement?

[Traduction]

    Je suis heureux de commencer.
    Très rapidement, la réponse à la question est oui, absolument. Je pense que diverses mesures auraient été utiles, notamment la fermeture plus précoce de la frontière.
    Au Québec, la semaine de relâche et le retour des snowbirds, entre autres, tombaient à un bien mauvais moment. L'Ontario a eu une expérience similaire.
    Si nous avions pris plus au sérieux toutes les preuves que nous avions sous les yeux au sujet de la propagation de la COVID-19 à l'échelle mondiale et si nous avions été prêts à agir en conséquence, le Canada aurait pu être bien mieux placé pour se protéger à l'échelle nationale et provinciale à la fin de février au plus tard, voire plus tôt, et on n'aurait certainement pas attendu à la mi-mars pour que des mesures concrètes soient prises.
(1355)

[Français]

    Pour quelles raisons le gouvernement n'a-t-il pas pris ces mesures? Avez-vous une réponse à cette question? Pour quelles raisons le gouvernement n'a-t-il pas agi plus rapidement?

[Traduction]

    C'est un grand mystère qu'il faut élucider. J'espère, comme Mme Rempel l'a suggéré, qu'un examen sérieux et exhaustif sera vraiment fait pour tirer des leçons. Pour l'instant, rien ne m'indique que cela se fera. Il y a eu certains efforts ponctuels pour tirer des enseignements.
    Je pense que cet échec est de nature systémique. Nous n'avions pas les structures nécessaires pour traiter les informations que nous recevions.
    Deuxièmement, il y a eu un manque d'imagination. Ceux d'entre vous qui connaissent le rapport de la commission d’enquête américaine sur les événements du 11 septembre reconnaîtront l'expression. Nous savions — et nous aurions dû savoir — que nous risquions d'être frappés, durement, par des pandémies. Nous le savions, mais nous ne l'avons pas cru.
    Pourquoi? Cette lacune, ce manque d'imagination, est un problème profond qu'il faudra examiner tôt ou tard.

[Français]

    Merci, monsieur Généreux.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Powlowski.
    Monsieur Powlowski, la parole est à vous pour trois minutes.
    L'ordre me laisse un peu perplexe.
    Nous accueillons un extraordinaire groupe de témoins. J'aimerais poser des questions à tant de gens.
    Je suis désolé, docteure Hardcastle, je n'aurai pas l'occasion de vous poser des questions.
    M. Wark a aussi fait un excellent témoignage.
    Docteur Schwartz, je vais vous mettre quelque peu sur la sellette, car j'ai quelques désaccords avec le conseil scientifique au sujet de l'utilisation des anticorps monoclonaux par les spécialistes des maladies infectieuses en Ontario, qui veulent certainement les utiliser.
    Deux ou trois essais contrôlés randomisés sur l'utilisation du bamlanivimab — que notre gouvernement a acheté pour une valeur 40 millions de dollars —, publiés dans des revues prestigieuses comme le JAMA et le New England Journal of Medicine, montrent que le produit a un effet bénéfique lorsqu'il est utilisé tôt chez les personnes à risque élevé.
    Une autre étude cas-témoins réalisée récemment et publiée dans Clinical Infectious Diseases a montré qu'il faut traiter huit personnes pour éviter une seule hospitalisation.
    Concernant le bamlanivimab, je sais que la FDA a modifié son approbation. Toutefois, pour les variants que nous avons en Ontario, il est toujours efficace chez 90 à 92 % des gens.
     L'approbation de Santé Canada se fait toujours attendre pour diverses nouvelles combinaisons d'anticorps monoclonaux. Il y a cependant eu un certain nombre d'études, pas encore publiées, dans lesquelles les fabricants font état de données assez probantes indiquant une réduction de 70 à 80 % des hospitalisations, lorsqu'utilisées tôt, encore une fois chez les personnes à risque élevé.
    En fait, un essai récent de GlaxoSmithKline sur son traitement à base d’anticorps monoclonaux a été interrompu parce qu'on a jugé que poursuivre l'essai était contraire à l'éthique en raison de la diminution du nombre d'hospitalisations.
    Malgré cela, les spécialistes des maladies infectieuses en Ontario, dont 12 avec lesquels j'ai récemment écrit une lettre d'opinion, qui veulent utiliser les anticorps monoclonaux, ne peuvent s'en procurer. Pourquoi?
    Il semble que des gens influents, qui ne sont pas élus, dont certains membres de la table de consultation scientifique, estiment qu'il manque de preuves pour en autoriser l'utilisation. Ce qui me pose problème, c'est pourquoi des gens qui ne sont pas élus — il s'agit de quelques spécialistes des maladies infectieuses —, puissent décider des produits thérapeutiques que d'autres spécialistes peuvent utiliser. Par conséquent, je me demande si la table de consultation scientifique sert vraiment le public avec ses conseils.
    Merci.
    Merci, monsieur Powlowski.
    Monsieur le président, j'aimerais répondre à cette question plus tard, si vous le permettez, étant donné le peu de temps dont nous disposons et mon relatif manque d'expertise sur les maladies infectieuses et les produits thérapeutiques.
    Nous avons un groupe de travail sur les médicaments et les produits biologiques qui se penche sur cette question. Je vous remercie de votre question. Je pourrai vous transmettre la réponse par l'intermédiaire du greffier, si cela vous convient.
    C'est parfait.
(1400)
    Merci, monsieur Powlowski.
    À tous les témoins, si vous avez d'autres renseignements à transmettre au Comité, veuillez les faire parvenir au greffier. Il veillera à les faire traduire puis à les distribuer adéquatement au Comité.

[Français]

    Madame Gaudreau, vous avez maintenant la parole pour une minute et demie.
    Merci, monsieur le président.
    On cherche à savoir ce qui s'est passé entre le 7 janvier et le 7 mars. Moi, je vais vous répondre: on était déboussolé à cause de la joute parlementaire. Puisque mon parti est le seul à ne pas souhaiter prendre le pouvoir, je peux me permettre de dire ces choses-là. Quand la joute parlementaire prédomine, on met du temps à agir lorsque surviennent des crises comme celle qu'on a vécue.
    Tantôt, j'entendais ma collègue dire que, en ce qui concerne la transmission de la COVID-19, la frontière était en cause dans seulement 2 % des cas.
    Monsieur Wark, je ne comprends pas comment on peut dire à la fois que le gouvernement n'a pas agi assez vite, qu'un variant est arrivé d'un autre pays et que la gestion de la frontière n'est pas si importante que cela.
    J'aimerais entendre votre opinion à ce sujet.

[Traduction]

    Désolé, je pense que j'étais en sourdine.

[Français]

    Il y a un décalage en raison de l'interprétation. J'espère que ces quelques secondes ne compteront pas dans mon temps de parole.

[Traduction]

    Je serai très bref.
    C'est une question complexe. Je ne pense pas qu'elle soit bien comprise. Je ne suis pas certain que l'ASFC et le gouvernement rendent un grand service en traitant la question de cette façon.
    La question n'est pas seulement de savoir combien de personnes traversent la frontière avec un variant qui pourrait poser problème. Ce n'est pas une question de statistiques. Il faut comprendre comment les personnes qui traversent la frontière par différents nœuds de transport peuvent être des agents de propagation. Nous n'avons pas la réponse à cette question et je pense que nous devons faire preuve de beaucoup de prudence. Nous n'avons pas la réponse parce que nous ne faisons pas assez de recherche de contacts ni assez de tests.
    Je pense, pour être prudent, qu'il faut considérer que le problème est plus important que ce que semblent démontrer les statistiques. Nous devons faire preuve de prudence à cet égard.

[Français]

    Ce sera tout pour moi, monsieur le président.
    Merci, madame Gaudreau.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Davies.
    Monsieur Davies, allez-y. Vous avez une minute et demie.
    Merci.
    Madame Hardcastle, j'ai quelques petites questions et j'espère que vous pourrez me donner de brèves réponses.
    À votre avis, la pandémie actuelle de COVID-19 au Canada satisfait-elle à la définition d'une situation de crise nationale aux termes de la Loi sur les mesures d’urgence?
    Oui, absolument. C'est une maladie. Elle menace la santé humaine. Elle menace les chaînes d'approvisionnement. Il n'y a aucun doute.
    J'ai une question connexe. Cela satisfait-il à la définition d'un sinistre aux termes de la Loi sur les mesures d’urgence?
    Absolument. Je pense que cela répond à la définition d'un sinistre.
    Je sais que vous êtes de l'Alberta. Vous pourriez donc penser à l'Alberta, mais aussi à d'autres provinces. À votre avis, la troisième vague de COVID-19 dépasse-t-elle la capacité des gouvernements provinciaux d'intervenir efficacement?
    Je pense que c'est exactement ce que nous démontre actuellement la grande disparité des taux d'une province à l'autre, la propagation du variant et l'incapacité apparente des provinces — à l'exception des Maritimes — d'empêcher les gens d'entrer sur leur territoire. Tous ces facteurs sont caractéristiques d'une incapacité à gérer ce problème à l'échelle provinciale.
    Pour terminer, je vais changer un peu de sujet.
    Vous avez écrit sur la question des médecins hygiénistes. Essentiellement, vous avez dit qu'au Canada, la loi donne aux responsables de la santé et de la sécurité publiques le pouvoir — et même le devoir — d'agir. Vous soulignez que cela ne nécessite pas l'approbation des politiciens, mais que c'est plutôt l'inverse. En fait, vous avez dit ce qui suit: « Les médecins hygiénistes du Canada doivent avoir le sens moral et le courage de tenir tête aux politiciens qui commettent des erreurs dangereuses. Voilà pourquoi notre société leur confie de vastes pouvoirs juridiques. »
    Pouvez-vous décrire brièvement ces pouvoirs et nous dire si, selon vous, ils sont exercés à bon escient?
    Dans les provinces, les médecins hygiénistes en chef, pour la plupart — je vais parler en termes généraux, mais il y a des variations interprovinciales —, ont le pouvoir absolu de faire presque tout ce qui est nécessaire pour contenir une maladie transmissible. En droit, ils sont très puissants.
    C'est au niveau politique que les choses se compliquent. Par exemple, même si de nombreux médecins-conseils en chef de la santé ont de vastes pouvoirs juridiques et que les ordonnances de santé publique sont à leur nom, parallèlement, au niveau politique, ils ont été placés là pour assumer un rôle plus consultatif. Je pense que les provinces doivent aller dans un sens ou dans l'autre. Soit il s'agit de personnes indépendantes dotées d'un pouvoir légal qui peuvent s'exprimer ou agir de manière indépendante, soit elles sont subordonnées au gouvernement et leurs ordonnances sont soumises à l'approbation du ministre.
    Nous ne pouvons pas avoir le beurre et l'argent du beurre. Nous ne pouvons pas faire en sorte que ces personnes soient en charge lorsque cela convient aux provinces, qu'elles soient responsables ou subordonnées lorsque cela convient aux provinces. C'est un...
(1405)
    Est-ce le cas pour l'administratrice en chef de la santé publique du Canada également?

[Français]

    Merci, monsieur Davies.

[Traduction]

    Puis-je obtenir une réponse rapide à cette question?
    Répondez très rapidement, je vous prie.
    Non. C'est un rôle différent de celui dans les provinces. Les provinces ont plus de pouvoir car cela fait partie de leurs activités quotidiennes en matière de santé publique.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Davies.
    Voilà qui met fin à notre série de questions pour ce groupe de témoins. J'aimerais remercier les témoins du temps qu'ils nous consacrent aujourd'hui, de leur grande expertise et de leurs excellents conseils. Merci de nous aider dans le cadre de nos études.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance et accueillir le prochain groupe de témoins.
(1405)

(1405)
    Bienvenue, tout le monde.
    Nous reprenons la 35e réunion du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes. Le Comité se réunit aujourd'hui pour étudier la situation d'urgence à laquelle les Canadiens font face avec la pandémie de la COVID-19. Nous examinerons plus précisément aujourd'hui le système national d'intervention d'urgence du Canada.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins. Nous accueillons aujourd'hui, à titre personnel, Lisa Barrett, professeure adjointe. Également à titre personnel, nous recevons le révérend Michael Garner, prêtre anglican.
    J'inviterais les témoins à faire leurs déclarations. Je vais commencer avec Mme Barrett.
    Je dois également informer les témoins que j'utiliserai ces cartes pour vous laisser savoir quand votre temps de parole est presque écoulé. Je brandirai ce carton lorsqu'il restera environ une minute — mais c'est approximatif — et celui-là lorsque votre temps sera officiellement écoulé. Si vous voyez le carton rouge, vous n'avez pas à vous arrêter immédiatement, mais essayez de conclure vos remarques.
    Merci.
    Sur ce, nous allons entendre Mme Barrett.
    La parole est à vous pour six minutes, s'il vous plaît.
    Je vous suis très reconnaissante de l'invitation à témoigner ici cet après-midi. Merci au Comité de m'avoir invitée.
    Je suis médecin et clinicienne en maladies infectieuses, scientifique et chercheuse à l'Université Dalhousie, et c'est dans cette optique que je m'exprime aujourd'hui. Bien que je travaille en collaboration avec l'autorité sanitaire de la Nouvelle-Écosse et le ministère de la Santé publique du gouvernement de la Nouvelle-Écosse, je m'exprime aujourd'hui à titre personnel.
    Je veux fournir un peu de contexte, peut-être un peu comme un microcosme de la réponse de la pandémie du Canada atlantique, plus précisément de la Nouvelle-Écosse et de notre réponse. En tant que spécialiste des maladies infectieuses, je pense que les éléments qui ont fait de notre réponse une réussite sont les suivants... Nous avons, même avec la vague actuelle, 346 personnes sur 100 000 qui ont été infectées par la COVID-19. Pour mettre cela en contexte, les autres provinces comprennent l'Ontario avec 3 200 pour 100 000 et la Saskatchewan avec 3 800 pour 100 000. Encore une fois, comme je l'ai dit, il y a eu 346 personnes infectées pour 100 000 ici en Nouvelle-Écosse.
    Nous pouvons dire que nous avons eu une réponse réussie et, en tant que spécialiste des maladies infectieuses, je dirais qu'il y a plusieurs éléments de la réponse qui sont assez importants.
    Premièrement, nous avons compris assez vite la rapidité de la réponse, car dans le domaine des maladies infectieuses, la rapidité est toujours importante. Deuxièmement, cette rapidité a permis d'accroître la distanciation entre les êtres humains, ce qui, dans le cas d'une infection respiratoire, est une chose incroyablement importante à faire. Troisièmement, en outre, il y a eu une prise de conscience de l'infection et de sa localisation grâce à l'utilisation, principalement, d'un nombre exceptionnel de tests, à la fois chez les personnes symptomatiques et asymptomatiques, tout au long de la pandémie. Le quatrième élément, moins quantitatif, et je pense, exceptionnellement important, que nous avons réussi à faire dans le cadre de notre réponse à la pandémie, c'est de faire participer les communautés, pas seulement en tant que membres passifs de la réponse à la pandémie, mais en tant que membres actifs, en se faisant tester, en étant les testeurs et en s'engageant activement tout au long du processus. Je vais vous parler brièvement de chacun de ces éléments.
    En ce qui concerne la première partie, la rapidité, je vais utiliser notre vague la plus récente comme exemple. Nous sommes passés entre zéro et six cas par jour à partir de juin dernier environ jusqu'en novembre, où nous avons enregistré un petit nombre de cas supplémentaires, dans le bas de la fourchette à deux chiffres. Jusque-là, nous étions redescendus entre zéro et six cas, toujours par jour, avec presque aucun cas épidémiologique non lié. Pour ceux qui ne passent pas leur vie à étudier les microbes et les maladies infectieuses, cela signifie que la propagation communautaire était limitée, ce qui est très important. On savait d'où venaient les cas et comment la propagation avait eu lieu. La situation a changé en avril. Entre le 15 et le 21 avril, nous avons commencé à enregistrer un nombre de nouveaux cas à deux chiffres par jour, et le 27 avril, nous avons commencé à recevoir le signal d'une propagation communautaire lorsque nous avons atteint 97 cas par jour. À ce moment-là, nos restrictions sont passées de relativement souples à très resserrées.
    Dans la période de cas intercurrents entre nos vagues, la bulle atlantique existait encore, et je dirais qu'en ce qui concerne la distanciation, lorsque les gens venaient dans la région, ils devaient se mettre en quarantaine. En fait, notre bulle a éclaté il y a quelques mois, lorsque nos cas ont commencé à augmenter un peu, et même les personnes venant des provinces de l'Atlantique devaient se mettre en quarantaine pendant 14 jours.
    La raison pour laquelle c'est important, c'est que nous avons pu suivre l'évolution des cas et savoir où ils étaient. Lorsque nous avons enregistré 97 cas, notre gouvernement a fermé les lieux publics où l'on pouvait être à l'intérieur sans masque, qu'il s'agisse de magasins, de restaurants, etc. Les salles d'entraînement ont été fermées très rapidement, et on a demandé aux gens de rester chez eux. Puis le nombre de cas a encore augmenté, jusqu'à atteindre la centaine, et toute la province a été fermée. C'est ce qui s'est fait rapidement.
    L'augmentation du nombre de cas et de la propagation dans la communauté répondait aux critères quantitatifs que nous avons mis en place ici: un nombre élevé de cas non liés, un taux élevé de reproduction du virus et une augmentation du nombre de cas dans la communauté par 100 000 habitants. Cela a été fait très rapidement, et la distanciation a été ajoutée. À l'intérieur, et dans les endroits où les gens ne peuvent pas porter le masque, on leur a demandé de le porter très souvent.
(1410)
    Ensuite, on a fait de la sensibilisation. Nous avons toujours maintenu les tests chez les personnes asymptomatiques entre les vagues, afin de savoir quand il y avait un virus asymptomatique dans la communauté. Nous avons également augmenté ce dépistage à 1,5 % de la population par jour lorsque nous sommes entrés dans cette vague il y a une semaine et demie et à 5 % de la population par jour dans nos régions névralgiques. En outre, la sensibilisation par l'entremise de nos tests chez les personnes symptomatiques a été maintenue.
    En ce qui concerne l'engagement, dont je me ferai un plaisir de vous parler plus tard, nous avons réalisé une grande partie de ces tests en dehors de nos laboratoires. Des bénévoles de la communauté faisaient ce travail. On leur apprenait à faire des tests, à prendre des échantillons et à fournir une ressource exceptionnelle aux gens à ce moment-là, de manière à ce que nous ayons un système d'alerte pour le virus dans la communauté.
    Je pense qu'ensemble, cela a été un exemple de la façon dont nous pourrions nous améliorer au Canada et dans différentes régions du monde à mesure que nous progressons dans cette pandémie. Il ne faut pas sous-estimer les effets de la rapidité d'intervention, de la distanciation entre les personnes, de la sensibilisation par le diagnostic et de l'engagement de la communauté. Je serai ravi de répondre aux questions à ce sujet par la suite.
    Merci de m'avoir permis de comparaître.
    Merci, madame.
    Nous allons maintenant entendre le révérend Garner.
    On vous écoute, monsieur. Vous disposez de six minutes.
    Bonjour, monsieur le président et honorables membres du Comité. Je vous remercie de m'avoir invité à m'entretenir avec vous aujourd'hui.
    Je suis Michael Garner. Je suis un prêtre anglican et un épidémiologiste spécialisé dans les maladies infectieuses. J'ai travaillé à l'Agence de la santé publique du Canada de 2006 à 2019. J'ai été invité aujourd'hui pour fournir des précisions sur les observations que j'ai faites dans l'édition du 25 juillet du Globe and Mail.
    Lorsque l'Agence de la santé publique du Canada a été créée après le SRAS en 2004, le gouvernement de l'époque a décidé que l'administrateur en chef de la santé publique devait être l'administrateur général de l'Agence, car ainsi le pouvoir et la responsabilité de la santé publique au Canada relevaient d'une seule personne qui serait un expert responsable des ressources de santé publique du gouvernement fédéral. Cette structure de leadership faisait écho à la plupart des autres instituts nationaux de santé publique dans le monde.
    J'espère que vous avez tous lu le récent rapport de la vérificatrice générale sur le rendement de l'ASPC pendant la pandémie. La conclusion de la vérificatrice générale a confirmé la réalité qu'ont vécue tous les Canadiens. Elle a fait la déclaration suivante: « L'Agence n'était pas suffisamment préparée à intervenir face à la pandémie et elle a sous-estimé l'incidence possible du virus au début de la pandémie. »
    Même si elle a relevé une foule de problèmes à l'ASPC, la vérificatrice générale n'a pas réussi à trouver la source du problème. Elle n'a jamais demandé pourquoi les systèmes ont été autorisés à ne pas être testés. Pourquoi les évaluations des risques effectuées de janvier à mars 2020 n'ont-elles pas examiné adéquatement la possibilité que la COVID-19 devienne une pandémie mondiale?
    En clair, nous avons un institut national de santé publique qui est dirigé par des non-experts.
    Il y a six ans et demi, le gouvernement Harper a transféré la direction de l'ACSP, dont le responsable est un médecin de la santé publique, à l'ASPC, dont le responsable est un président bureaucrate de carrière. Cette décision a mis l'ASPC sur une voie qui a gravement influencé sa capacité de mettre en place les assises nécessaires pour se préparer de manière proactive à la pandémie de coronavirus et y répondre efficacement. Elle a également créé un effet de boule de neige où les experts en santé publique ne sont plus présents aux échelons supérieurs de l'Agence. Ils ont largement été forcés de quitter leur poste et ont été remplacés au fil du temps par des bureaucrates n'ayant aucune expérience ou compréhension des principes de base de la science de la santé publique.
    Ce qui est peut-être encore plus inquiétant, c'est qu'au beau milieu de la pandémie, alors qu'il fallait mettre en poste un nouvel administrateur de l'ASPC en septembre 2020 et que les échecs de la réponse à la crise étaient évidents pour tous les Canadiens, le premier ministre, plutôt que de mettre en poste un médecin ayant une expertise et une expérience en matière de santé publique et de réponse aux pandémies, a choisi un autre bureaucrate de carrière sans diplôme en santé publique, qui devrait apprendre sur le tas au milieu de la plus grande crise sanitaire du dernier siècle.
    Il est intéressant de noter que les CDC des États-Unis ont été confrontés à une situation semblable, où ils devaient trouver un nouveau directeur. Ils ont remplacé le directeur sortant — un médecin et un virologue — par un médecin et un expert en santé publique.
    Au milieu de la catastrophe de la réponse fédérale à la pandémie, le gouvernement a poursuivi sa longue pratique de dévalorisation de l'expertise et des compétences en la matière en faveur des bureaucrates. Cependant, je vous dirais que les échecs de la réponse de l'ASPC à la pandémie ne devraient pas être imputés uniquement à la direction de l'ASPC par des bureaucrates. Si on me plaçait dans le cockpit d'un avion et que les lumières se mettaient à clignoter, je ne saurais pas ce qu'il faut faire car je n'ai pas été formé pour être pilote. Il est injuste d'attendre de M. Stewart ou de tout autre non-expert à la tête de l'ASPC qu'il gère adéquatement la réponse canadienne à la pandémie. Ils n'ont ni la formation ni l'expérience requises.
    Lorsque nous émergerons de la pandémie — comme ce sera sûrement le cas —, j'espère que ce comité et d'autres entreprendront de réexaminer les besoins en experts de la santé publique au sein du gouvernement fédéral. J'espère que la Loi sur l'Agence de la santé publique du Canada sera rétablie dans sa forme originale, que le poste de président de l'Agence de la santé publique sera supprimé et que ce pouvoir sera redonné à l'ACSP.
    Idéalement, cela créera un nouvel effet boule de neige, où la formation et l'expertise en santé publique seront valorisées davantage que la capacité des bureaucrates qui font le travail dans leur intérêt personnel. Ce sont les décisions prises par les gouvernements Harper et Trudeau pendant près d'une décennie qui nous ont menés au plus profond de cette crise. Les décisions de M. Harper et de M. Trudeau ont eu un coût — un coût qui a été payé par la vie de Canadiens qui sont morts inutilement de la COVID-19.
    Merci. J'ai hâte à notre discussion.
(1415)
    Merci, révérend.
    Nous allons commencer notre période de questions maintenant.
    Nous allons revenir à Mme Rempel Garner, pour six minutes, s'il vous plaît.
    C'est au tour de Garner et Garner, je pense.
    Je vous suis très reconnaissante de vos observations, révérend Garner. Il s'agit de déterminer comment nous irons de l'avant.
    Je me demande presque si l'ASPC est le bon modèle organisationnel, de façon générale, pour faire face à un défi de santé publique ou à une pandémie. Dans le groupe de témoins précédent, on a parlé de quatre silos de travail. Il faut être en mesure de recueillir des renseignements sur les menaces pathogènes émergentes, de les intégrer dans une sorte de système d'alerte cohérent associé à une action claire, puis d'avoir une sorte de cadre de surveillance de l'efficacité.
    Pensez-vous que ce soit possible avec le modèle actuel de l'ASPC?
(1420)
    L'Agence de la santé publique, telle qu'elle a été mise sur pied à l'origine, a été créée pour gérer la pandémie. Il faut se rappeler que l'Agence de la santé publique du Canada a été créée à la suite d'une épidémie de coronavirus. Ce sont les changements qui se sont produits, avec la diminution de la science et de l'expertise en matière de santé publique au sein de l'Agence aux échelons les plus élevés, qui font que nous sommes incapables d'agir et de comprendre les preuves et les signaux.
    J'ai écouté la remarque de M. Wark, qui était très intéressante. Il a raison de dire que nous avons besoin d'un processus d'évaluation des risques, mais au final, si l'évaluation des risques est confiée à une personne qui n'a pas la formation nécessaire pour l'interpréter et agir en fonction de cette évaluation, nous pourrions avoir la meilleure évaluation des risques au monde et nous ne serions pas en mesure d'aller de l'avant.
    En une minute environ, pourriez-vous nous donner un exemple qui illustre les répercussions de ce manque d'expertise sur cette pandémie particulière?
    En tant que personne qui n'oeuvre pas à l'intérieur du système, il est difficile de donner un exemple précis, mais je peux dire que le Réseau mondial d'information en santé publique fournit un bon exemple. Vous avez un groupe de personnes qui sont responsables du Réseau, mais qui ne comprennent pas qu'il faut continuer à chercher la pandémie, et que ce n'est pas parce qu'on ne l'a pas encore trouvée qu'on peut arrêter de chercher.
    Si nous examinons les lettres de mandat des récents ministres de la Santé, vous remarquerez qu'à un moment donné, la « pandémie » n'y figure plus. Je pense que le mot « pandémie » devrait toujours figurer dans la lettre de mandat du ministre de la Santé.
    C'est en partie qu'il faut continuer d'investir, même quand il n'y a pas de pandémie.
    Une autre chose m'est venue à l'esprit.
    C'est absolument vrai que nous avons besoin d'avis médicaux et que la réponse doit être fondée sur de tels avis. J'ai peine à imaginer la frustration que vous devez ressentir.
    Cette semaine, par exemple, nous avons été témoins d'un manque de clarté dans la communication sur les vaccins. Comment pouvons-nous résoudre ce problème? Je suis d'avis qu'il doit être réglé au plus vite. Il ne faut pas croire que la population n'est pas consciente de toutes les pièces mobiles du gouvernement liées, disons, aux conseils sur les vaccins.
    Comment pouvons-nous régler ce problème à court terme?
    Il faut des bureaucrates. Il faut aussi des experts en communications pour aider les professionnels de la santé publique. Le CCNI aurait dû présenter son message à des responsables des communications pour qu'il fasse l'objet d'un contrôle et d'une réflexion. Je comprends la position du groupe, mais il ne réfléchit pas à toute la gamme de répercussions. Je pense que le fond du problème est là.
    Dans ma déclaration préliminaire, je ne voulais pas dire que nous n'avons pas besoin de la bureaucratie. Certes, elle est nécessaire, mais les décisions doivent être prises par les spécialistes de la santé publique, avec le soutien d'experts en communications, de bureaucrates et de tous les autres.
    C'est la direction dans laquelle j'espérais que vous y iriez par rapport à une recommandation.
    Corrigez-moi si j'ai mal compris, mais la première chose, c'est que les conseils doivent provenir de spécialistes de la santé publique. Ensuite, il faut un groupe de soutien formé non seulement d'experts en communications, mais aussi de spécialistes des finances pouvant examiner les effets corollaires ou le coût de renonciation des mesures de santé publique. De plus, ce groupe doit avoir le moyen de communiquer avec la population et de surveiller l'efficacité des conseils donnés.
    Est-ce bien ce que vous voulez dire? Le cas échéant, y a-t-il des mesures que le gouvernement pourrait adopter facilement et immédiatement pour en arriver à ce point?
    Le problème découle de la modification qui a été apportée à la Loi sur l'Agence de la santé publique du Canada lors de son examen en 2014. Cette modification a placé un bureaucrate à la tête de l'organisme. L'administrateur en chef de la santé publique doit avoir le soutien de bureaucrates, mais au bout du compte, la responsabilité des ressources doit appartenir à un professionnel de la santé — un médecin ou une infirmière de la santé publique.
    J'ai une dernière question.
    J'ai remarqué la faible présence de cliniciens de première ligne, et ce, dans tous les secteurs. Il n'y a tout simplement pas beaucoup de praticiens. D'après vous, cette situation doit-elle aussi être redressée?
    Voulez-vous dire au sein du gouvernement fédéral ou sur le terrain?
    Je me demande simplement où sont les médecins de première ligne qui offrent des conseils au gouvernement en ce moment.
    Oui, il faut plus de spécialistes de la santé publique, notamment des médecins, des infirmières et des épidémiologistes. Par ailleurs, ils ne doivent pas être des subalternes; ce doit être eux qui prennent les décisions, avec le soutien de la bureaucratie. Le problème est là.
(1425)
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie, madame Rempel Garner.
    Nous passons maintenant à M. Kelloway.
    Monsieur Kelloway, vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Mes questions s'adressent à la Dre Barrett.
    Docteure Barrett, je tiens à vous remercier chaleureusement de prendre le temps d'être avec nous aujourd'hui. Vous êtes une spécialiste et vous avez joué un rôle clé dans la réponse de la Nouvelle-Écosse à la COVID-19. Je peux vous dire, au nom des gens de ma circonscription, que je suis extrêmement fier que des gens comme vous représentent notre province.
    Nous avons démontré — clairement, à mon avis — que les provinces peuvent limiter la propagation du virus en adoptant une position ferme et en suivant les conseils des autorités provinciales de la santé publique. J'ai quelques questions pour vous à ce sujet.
    Dès le premier jour de la pandémie, Dr Strang et son équipe de la santé publique, et bien sûr l'ancien premier ministre McNeil et le nouveau premier ministre Rankin ont pris la COVID-19 au sérieux et ont imposé des mesures de santé publique très strictes.
    Docteure Barrett, vous avez parlé des mesures dans votre déclaration préliminaire. Je vais vous donner la possibilité de nous fournir plus de détails à ce sujet. Pouvez-vous nous en dire plus par rapport à la première vague? J'aimerais aussi savoir si, d'après vous, nous devrions en faire davantage maintenant étant donné la gravité de la troisième vague.
    Je vais ajouter une dernière question parce que je veux profiter de notre temps avec vous pour obtenir des réponses. Compte tenu des nombres records de cas — je pense qu'il y en a 227 aujourd'hui, pour un total d'un peu plus de 1 400 cas —, pouvez-vous nous dire à quoi les Néo-Écossais peuvent s'attendre au cours des deux ou trois prochaines semaines? Quels conseils donneriez-vous aux gens qui nous écoutent à la maison?
    Je vous remercie et je vous cède la parole.
     Je vais répondre d'abord à la dernière partie de votre question.
    À mon avis, nous ne sommes pas au bout de nos peines. Le nombre de cas non liés est encore élevé, et nous sommes en confinement depuis 10 ou 11 jours. Il s'agit d'un vrai confinement, pas comme ceux qu'on voit à certains endroits. À mon avis, il faut quelques restrictions supplémentaires, et j'espère qu'elles seront imposées sur-le-champ. C'est difficile parce que la mobilisation compte pour beaucoup, et je crois sincèrement que la population de la Nouvelle-Écosse, de la région atlantique et du Canada en général... Le meilleur bureaucrate ou le meilleur médecin au monde peut diriger une intervention et faire des suggestions, mais sans la mobilisation réelle de la population à l'échelon le plus bas — à l'échelon individuel, dans chaque région et chaque province —, l'effet sera nul parce que les gens ne suivront pas les recommandations. Je pense que les prochaines semaines seront difficiles, mais nous finirons par nous en sortir parce que la mobilisation est incroyablement large.
    Devons-nous en faire davantage? Probablement un peu. Les gens doivent changer leur façon de penser; ils doivent se remettre dans l'état d'esprit d'urgence d'avril dernier. Ce facteur entre probablement en ligne de compte dans le contexte global, et on l'a fait ailleurs.
    Personne en Nouvelle-Écosse, étant donné les chiffres... J'ai mentionné que nous tenions compte de critères quantitatifs. Pour revenir à l'approche fédérale, je suis choquée et consternée que pour sa part, l'organisme fédéral n'a pas fixé de critères quantitatifs ni établi de lignes directrices concernant la levée progressive des restrictions. De tels critères seraient utiles pour la population et les régions. Nous avons suivi de près nos critères quantitatifs liés à la propagation communautaire, au taux de reproduction du virus et à la moyenne mobile de cas sur sept jours. Ce n'est pas de la physique quantique; ce sont des principes de base de gestion d'épidémies et de pandémies.
    Je suis étonnée que l'organisme fédéral n'ait pas obligé huit régions à faire de même à l'échelle provinciale avant qu'elles n'assouplissent les restrictions. Je vois dans les manchettes des régions qui songent à alléger les restrictions alors que le nombre de cas et le nombre de cas non liés sont encore extrêmement élevés. Je sais que ce n'est pas ce que nous ferons ici, et d'après moi, c'est au cœur des mesures qui nous ont gardés en sécurité. Cela nous ramène aux quatre éléments, soit la distance, la rapidité, la prise de conscience au moyen du dépistage et la mobilisation. C'est en grande partie grâce au dépistage que nous arriverons à nous en sortir, mais c'est aussi parce que la population est engagée. On a beau faire des recommandations, si les gens ne les suivent pas, c'est peine perdue.
    En somme, premièrement, oui, il faut en faire un peu plus; deuxièmement, il faut amplifier légèrement la mobilisation; et troisièmement, je suis déçue qu'on n'ait pas imposé de directives strictes aux provinces. À mes yeux, il est inadmissible que les conseils de la santé publique varient d'une région à l'autre du Canada, alors qu'il serait possible et utile de définir des critères quantitatifs.
    Je vous remercie vivement, docteure.
    J'aime particulièrement... Je pense qu'il y a quatre piliers: la prise de conscience, la rapidité, la distance et... Quel était le quatrième?
    C'est le plus important: la mobilisation.
    La mobilisation, oui, bien sûr. Je ne faisais pas semblant; j'ai eu un trou de mémoire.
    À l'évidence, la situation se poursuit. La pandémie évolue, et notre réponse aussi. Selon vous, les quatre piliers pourraient-ils changer? De nouvelles mesures ou de nouveaux piliers pourraient-ils s'y ajouter? Par exemple, nous connaissons actuellement une troisième vague. Est-ce possible que nous nous écartions de ces piliers ou que nous y ajoutions dans le but de mieux mobiliser les gens et de mieux réagir à la COVID?
(1430)
    D'après moi, ces piliers sont au cœur de la gestion de toute infection qui se propage par voie respiratoire. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y aura des différences dans la manière dont les mesures seront mises en œuvre et dans les outils utilisés, après la vaccination et autres.
    Pour faire la surveillance, pour comprendre où se trouve le virus et comment il se propage, ainsi que pour localiser les différents variants et en comprendre les caractéristiques, il faut avoir la possibilité de procéder à des dépistages fréquents et à surveiller les frontières, sans devoir nécessairement les garder fermées. Les outils que nous utiliserons changeront, mais je pense que les piliers et les objectifs resteront les mêmes.
    Je vous remercie, docteure.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Votre temps de parole est écoulé. Vous tombez pile.
    Je vous remercie, monsieur Kelloway.

[Français]

    Madame Gaudreau, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président. Votre français est excellent. C'est très agréable de vous entendre.
    Merci beaucoup à vous, les témoins. J'avoue que cela fait du bien d'entendre parler des bonnes pratiques. Je salue le travail qui a été fait à toutes les étapes, particulièrement de votre côté, madame Barrett. Comme vous l'avez si bien expliqué, au Québec, l'engouement pour le bénévolat était marqué. Les gens se sont unis pour encourager la communauté. On a même créé un site Web qui s'appelle jebenevole.ca. Les gens ont fait preuve d'une si grande solidarité qu'on avait de la difficulté à gérer la quantité de bénévoles prêts à aider la collectivité.
    Pour ce qui est de la rapidité d'action, j'avoue que je suis tout aussi outrée du battement de deux mois dont nous avons dû subir les répercussions. Je pense aux vies humaines qu'on aurait pu sauver.
    Maintenant, nous sommes dans la troisième vague. J'entends beaucoup de gens dire que les mesures prises par les gouvernements sont nettement insuffisantes. Les propos de M. Garner sont très précis, et je l'en remercie.
    Cela dit, j'aimerais entendre vos commentaires, madame Barrett, au sujet de la rapidité d'action du gouvernement. J'aimerais également vous entendre parler des règles et des communications, c'est-à-dire de toute la question des relations publiques gouvernementales dans l'ensemble des provinces et au Québec.

[Traduction]

    Je ne suis certainement pas une experte en communications. Je vais vous répondre de la perspective de la science et de l'infectiologie.
    La mobilisation est un élément important. Je trouve intéressant... Nous n'avons pas tenté de gérer les bénévoles. Dès le début de la vague de mobilisation, il y avait des possibilités. Nous avons donné aux gens l'occasion de participer, surtout aux activités liées au dépistage, non seulement en se soumettant à des tests, mais aussi en prélevant les échantillons dans les cliniques et en faisant le dépistage au point de service. Toutefois, nous n'avons pas tenté de faire de gestion.
    Il importe de souligner que la surveillance — sous la forme de paternalisme, de maternalisme ou autre — occupe souvent une grande place dans la réponse de la santé publique; on essaie d'exercer un certain contrôle. Il s'agit d'une maladie à déclaration obligatoire. Or nous avons quelque peu laissé cela de côté. Nous avons aussi laissé de côté le professionnalisme médical et le protectionnisme des champs pour permettre aux gens de jouer un rôle bien réel parce qu'ils voulaient participer.
    À mon avis, pour que notre réponse soit réussie, nous devons accorder aux gens un peu d'autonomie en même temps que nous leur imposons des restrictions, et ce, peu importe la province. Je ne suis pas spécialiste du comportement humain, mais je pense que c'est un élément important des mesures combinées adoptées en Nouvelle-Écosse. J'espère que nous continuerons ainsi.
    Vous avez aussi parlé de la rapidité. Les gouvernements doivent absolument agir catégoriquement et rapidement. De plus, la lenteur de la levée des restrictions devrait être équivalente à la rapidité de leur mise en place, et elle devrait également être fondée sur des critères quantitatifs. En assouplissant les restrictions hâtivement, avant que les nombres ne baissent, on risque la catastrophe.
    En ce qui concerne la rapidité et les communications, nous avons tout simplement fourni beaucoup de renseignements aux gens, d'une manière concrète et précise.
(1435)

[Français]

    Je vous félicite, madame Barrett. Vous êtes un beau modèle à suivre. Cela m'a fait réaliser qu'au Québec, nous avons aussi été très privilégiés en matière de santé publique.
    Monsieur Garner, vous avez parlé d'inertie en ce qui a trait à la prise de décision et la relation entre les autorités de santé publique et le gouvernement. À mon avis, au Québec, mais certainement ailleurs aussi, c'étaient les autorités de santé publique qui formulaient toutes les recommandations et qui codifiaient tout ce qui devait se passer, par exemple les restrictions ou la distanciation physique, et c'était le gouvernement qui prenait des décisions. Tout cela devait se faire extrêmement rapidement.
    J'aimerais avoir plus de précisions sur le processus: il faut écouter la science, prendre ses responsabilités et mettre de côté la partisanerie, parce qu'on parle de vies humaines. Il nous reste quelques secondes, alors j'aimerais vous entendre à ce sujet, monsieur Garner.

[Traduction]

    Le défi de la santé publique, c'est qu'il est plus avantageux, sur le plan politique, de réagir que de prévenir; c'est là que la question de l'inertie entre en jeu. Si nous avions prévenu tous les cas de COVID, les gens se demanderaient pourquoi en avoir fait tout un plat. Il faut que des personnes capables de comprendre l'importance des effets et des situations possibles participent au processus décisionnel, et ce, avant que la situation ne se détériore. Cela fait partie de ce que je propose: réorganiser la structure de sorte que les spécialistes de la santé publique participent à la prise de décision.

[Français]

    Merci, madame Gaudreau.
    Je vous remercie, monsieur le président.

[Traduction]

    Je redonne maintenant la parole à M. Davies pour six minutes.
    Je vous remercie.
    Révérend Garner, le Vatican a appuyé récemment la demande que l'Inde, l'Afrique du Sud et une centaine d'autres pays, je crois, ont présentée à l'OMC pour lever les restrictions relatives à la propriété intellectuelle qui empêchent certains pays d'accéder aux technologies nécessaires pour produire leurs propres vaccins. L'Église anglicane du Canada a-t-elle une position officielle sur cette proposition?
    Je suis ici à titre personnel et non comme représentant de l'Église anglicane du Canada.
    À titre personnel, je pense qu'il est conforme aux enseignements moraux de l'Église de tout faire pour que les vaccins soient distribués de manière équitable et rapide; je crois donc que nous voulons... C'est aussi vrai pour le Canada. Nous devons faire en sorte d'éliminer les obstacles auxquels font face les personnes qui ont l'accès le plus limité. D'après moi, nous devons poursuivre les efforts en ce sens, du gouvernement fédéral jusqu'à l'échelon municipal: nous devons veiller à ce que les Canadiens les plus défavorisés aient un accès équitable, voire préférentiel, aux vaccins.
    Je vous remercie.
    Docteure Barrett, vous avez cosigné récemment, avec un groupe d'éminents médecins et chercheurs canadiens, une lettre publiée dans la revue Maclean's dans laquelle vous recommandez l'imposition de mesures strictes de portée nationale en vue de limiter la propagation de la COVID-19. Je vous lis un extrait de votre lettre:
Les choses auraient pu se passer autrement. La mise en place, au début de la pandémie, d'une stratégie de suppression maximale des infections visant à réduire au plus haut point le nombre de cas de COVID et à étouffer les éclosions aurait sauvé des dizaines de milliers de vies canadiennes. Cette approche demeure la meilleure stratégie aujourd'hui, avec certaines modifications.
    Docteure Barrett, vous avez employé le terme « portée nationale ». Le gouvernement fédéral devrait-il utiliser les pouvoirs qui lui sont conférés par diverses mesures législatives fédérales pour imposer des restrictions de portée nationale?
    La lettre a été cosignée par un groupe assez nombreux.
    La portée nationale fait référence à une chose à laquelle j'ai fait allusion à quelques reprises, à savoir que lorsqu'on parle d'une maladie infectieuse comme celle-ci, il existe une science autour de certains des chiffres qui peuvent mener à la suppression et au contrôle. Certaines de ces mesures que j'ai déjà mentionnées concernent la vitesse à laquelle le virus se déplace, le nombre de contacts, le nombre de cas dans une région donnée et la capacité de propagation de personne à personne.
    Par conséquent, si vous avez un certain nombre de cas et un certain type d'interaction — la distance était l'un de mes piliers —, il serait absolument sensé à mes yeux de donner des conseils à l'échelle nationale pour les régions où certains éléments d'une pandémie sont hors de contrôle et de proposer les mesures à prendre, à ce moment-là, pour limiter la distance, accroître la sensibilisation ou la surveillance, et augmenter la vitesse de réponse et d'engagement.
    En résumé, ce que je veux dire, c'est que oui, il y a des aspects quantitatifs sur lesquels les gens peuvent se disputer jusqu'à la fin des temps en ce qui concerne le nombre exact, mais il existe une très bonne science sur la façon de contenir une épidémie comme celle-ci. Vous prenez ces chiffres, vous allez dans les endroits qui ont besoin de ces conseils et vous leur fournissez le soutien et les directives nécessaires pour y parvenir. Je pense que nous avons besoin de consignes officielles et nationales sur ces points. Il n'est pas nécessaire de les mettre en œuvre de la même manière dans toutes les régions, mais dans les régions qui répondent aux critères, ces lignes directrices doivent être suivies, sinon l'infection va se propager.
    Ce n'est pas une hypothèse, c'est un fait avéré, et nous savons comment y remédier.
(1440)
    Oui. Je reviendrai à cela dans un instant pour un peu remettre en question les conseils et les suggestions par rapport aux mesures.
    Dans un article paru sur le site Web d'Al Jazeera, vous avez également noté que le succès du Canada atlantique concernant la COVID-19 est attribuable en partie au principe directeur selon lequel il vaut mieux faire preuve de prudence quand il est question de restrictions. Selon l'article, cela contraste avec les approches adoptées dans d'autres provinces, où les gens « ont procédé à la réouverture avant d'avoir de bonnes raisons de nature quantitative, fondées sur des chiffres, de le faire... et lorsqu'on a imposé le " confinement ", c'était partiel ». Vous avez également été citée comme ayant dit que « les biens essentiels comprenaient des choses qui ne l'étaient pas, comme des housses de couette ».
    Le Canada devrait-il adopter un système de confinement national, de type coupe-circuit, pour contrôler cette situation et assurer une application uniforme de ce modèle fondé sur la prudence? Faudrait-il plutôt continuer à laisser la situation au bon vouloir des provinces qui pourraient ou non suivre ce principe directeur?
    Je vous sais gré d'avoir pris le temps de lire l'article. Je n'ai pas écrit cela; je l'ai dit. Je tiens à préciser qu'il s'agissait d'une entrevue, et que ceci est une interprétation et un extrait de l'entrevue.
    Cela étant dit, ce que je veux dire, c'est que les orientations doivent être mises en œuvre dans les secteurs et les régions. Il n'est pas nécessaire d'imposer toutes les restrictions de la même manière et en tout lieu. Cela peut être différent pour les voyages et les frontières. Cependant, la mise en œuvre des orientations doit se faire à l'échelle régionale, dans les secteurs où il y a des liens avec les gens.
    Ce que je veux dire par là, c'est que toutes les provinces n'ont pas à tout faire en même temps sur l'ensemble de leur territoire, mais les conseils devraient être donnés à l'échelle nationale quand il est question de chiffres, lorsque vous avez un certain nombre de cas, un certain degré de transmission, notamment de transmission inconnue. La mise en œuvre peut être de portée provinciale, régionale, avec le même soutien et les mêmes réponses en dehors des frontières.
    D'accord. C'est juste.
    Plus directement, à votre avis, est-ce que le modèle de la quarantaine de 14 jours imposée par l'Atlantique aux voyageurs interprovinciaux devrait être reproduit dans tout le Canada?
    La quarantaine de 14 jours a beaucoup contribué à notre succès. Je ne pense pas que les gens et leurs voies respiratoires soient différents d'une province à l'autre.
    Merci.
    Merci, monsieur Davies.
    C'est la fin du premier tour. Je pense que nous aurons le temps de faire un deuxième tour abrégé. Nous ferons comme nous l'avons fait pour le dernier groupe de témoins. Nous aurons des créneaux de trois minutes et d'une minute et demie.
    Je crois que M. Maguire est le prochain intervenant pour les conservateurs.
    Monsieur Maguire, c'est à vous pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président. Je voudrais revenir à la Dre Barrett.
    Docteure Barrett, j'aime beaucoup vos quatre points. La rapidité, la distance, la sensibilisation et l'engagement des gens sont essentiels.
    J'aimerais savoir comment les tests rapides s'insèrent dans le modèle de la bulle maritime. Ont-ils été utilisés à grande échelle?
    Nous sommes en retard en matière de vaccins par rapport à plusieurs pays du G7, et les vaccins n'ont pas été aussi largement utilisés qu'ils auraient pu l'être.
    Je me demande si les tests rapides ont été davantage utilisés dans les Maritimes. Les questions de distance et de sensibilisation sont importantes, mais je pense que la rapidité de la réponse est un élément clé. Pourriez-vous nous expliquer comment les tests rapides s'inscrivent dans ce contexte?
    Je sais que le gouvernement a fait une annonce aujourd'hui même, mais mon collègue réclame cela depuis plus de 10 mois. Les nombres continuent d'augmenter, et je me demande donc si les tests rapides pourraient aussi servir dans les régions où les variants sont présents.
(1445)
    Nous avons employé toutes les formes de tests rapides utilisables aux points de service que le gouvernement fédéral a distribués dans le cadre de la réponse à la pandémie. Cela inclut deux tests qui comportent un appareil et qui ne sont pas aussi faciles à mettre à l'échelle ou à transporter, ainsi qu'un grand nombre de tests utilisables aux points de service — plus de 100 000 — qui sont presque comme des tests de grossesse. Nous les avons utilisés à grande échelle et dans toute la province, aussi bien pendant les vagues qu'entre les vagues, pour le diagnostic des cas asymptomatiques.
     Le but du dépistage entre les vagues est de nous donner une idée. C'est un système de détection précoce des cas asymptomatiques dans la collectivité, car il s'agit d'un virus asymptomatique qui se propage facilement. Cela a été utile pour nous aider à savoir rapidement où le virus était et n'était pas.
    Pendant les vagues, la pression exercée sur nos systèmes médicaux est allégée, car les tests ne sont pas effectués dans des laboratoires, bien sûr, et ils sont également réalisés par des bénévoles. Au cours de cette vague, nous avons réussi à réaliser jusqu'à 5 000 tests de dépistage par jour afin de favoriser la détection et le diagnostic précoces.
    Merci.
    J'ai encore une petite question également sur le caractère direct et résolu des décisions que vous avez prises dans les Maritimes pour limiter les nombres de cas comme vous l'avez fait. Je l'ai mentionné dans ma question précédente: je vois que les réactions rapides sont vraiment d'une grande aide.
    Avez-vous misé sur de l'information claire au sujet de l'état d'urgence que vous aviez déjà dans la bulle de l'Atlantique pour être en mesure de prendre ces décisions aussi rapidement et de manière aussi résolue que vous l'avez fait, ou est-ce qu'il s'agit simplement de bonnes décisions prises en fonction des pratiques courantes que vous aviez déjà?
     Je n'ai pas pris les décisions; c'est notre gouvernement qui l'a fait. Je dirais que le gouvernement a suivi les excellents conseils fournis; ils venaient presque exclusivement de la santé publique, et le gouvernement a suivi les conseils fondés sur la science et les chiffres. Il y avait très peu d'autres raisons justifiant de ne pas fermer les choses ou de ne pas mettre en place des restrictions très rapidement. Je dirais qu'on a utilisé l'information scientifique déterminante et opportune en ne laissant pas intervenir d'autres facteurs de distraction. Cela semble expliquer en partie, du moins pour un observateur extérieur, la fermeté qui a caractérisé les décisions au cours des première, deuxième et troisième vagues.
    Merci.
    Merci, monsieur Maguire.
    Nous allons maintenant passer à Mme O'Connell.
    Vous disposez de trois minutes; c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Docteure Barrett, tout d'abord, je vous remercie d'être ici. Je suis sûre que vous êtes incroyablement occupée, et votre témoignage est très utile.
    Rapidement, comme je n'ai que trois minutes, je voudrais parler de votre point concernant les restrictions fermes — et je pense que vous avez parlé de vraies mesures, pas de demi-mesures.
    De toute évidence, le confinement et les mesures restrictives en tout genre sont difficiles pour tout le monde. Je crois que personne ne refuserait de le reconnaître; cependant, je dirais que la mort et les maladies graves sont bien pires.
    La semaine dernière, nous avons eu un débat d'urgence sur la situation en Alberta, et la porte-parole conservatrice en matière de santé, notre collègue ici présente, a notamment fait référence au confinement. Elle a dit que « [l]e confinement est un concept très bourgeois pour de nombreux législateurs » et que « [c]'est un luxe. » Elle a qualifié cela de « discrimination fondée sur la classe sociale ».
    La suggestion avancée était d'utiliser simplement les vaccins, ce qui nous éviterait de nous retrouver dans la solution luxueuse du confinement. Ma collectivité ne trouve pas que les confinements sont faciles, mais nous le faisons pour assurer la sécurité de nos collectivités et de nos proches. Dans ce contexte, y a-t-il un endroit où l'on a pu traverser la pandémie uniquement grâce aux vaccins, étant donné que nous savons qu'il faut du temps pour que les effets se fassent sentir après l'administration d'un vaccin? Quelle est l'importance des fermetures strictes en conjonction avec les vaccins, et pourquoi est-ce une mesure de santé publique et non un concept bourgeois, comme cela a été évoqué?
    Je ne sais pas trop comment répondre à ce concept. Un confinement est une question de distance, n'est-ce pas? La distance est un élément clé de la prévention et du maintien du contrôle d'une maladie respiratoire transmise par voie aérienne. La distance en est un élément important; le confinement génère de la distance, c'est un fait, pas une opinion.
    C'est un luxe si nous ne soutenons pas les sans-abri, les mal-logés et les personnes qui ne peuvent pas rester chez elles, et c'est un élément clé et essentiel. Un confinement exige qu'on offre un soutien considérable; cela ne devrait pas être un luxe. Sinon, les vaccins sont une mesure complémentaire. La vaccination ne vous permet pas d'échapper complètement à une situation de confinement ou de forte propagation. Tout le monde vante les mérites du Royaume-Uni, qui a recouru au confinement conjugué au déploiement massif de vaccins.
    Alors, soyons clairs: c'est une combinaison de mesures. Les vaccins sont votre plan à long terme, pas un plan de crise. Je serais ravie de donner une leçon sur la gestion des maladies infectieuses à cet égard, mais il s'agit là d'un élément. Ce n'est pas l'un ou l'autre.
(1450)
    Merci.
    Merci, madame O'Connell.
     Nous passons maintenant à M. Barlow.
    Allez-y, monsieur Barlow. Vous disposez de trois minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Garner.
    Je vous remercie beaucoup de votre témoignage très franc et ouvert. C'est certainement très apprécié compte tenu de la situation dans laquelle nous nous trouvons.
    Nous avons parlé avec les témoins précédents de certains faux pas en cours de route, et je sais que vous ne pouvez pas donner cette information privilégiée, mais j'ai appris avec intérêt que l'ASPC avait reporté la simulation nationale de pandémie qu'elle devait réaliser en 2019. Cela aurait été en partenariat avec les provinces et les territoires et en conjonction avec le gouvernement fédéral, qui est le point central de notre étude ici.
    Selon votre expertise, qu'est-ce que cela aurait changé au moment de déterminer la capacité des provinces et des territoires de faire face à une pandémie et peut-être aussi d'identifier certains des obstacles ou des lacunes que nous aurions pu avoir dans la relation entre les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral?
     Je pense que la meilleure pratique pour la préparation aux situations d'urgence est, universellement, de s'exercer. Vous vous exercez et vous vous exercez, et ensuite, lorsque le tremblement de terre se produit, vous vous appuyez essentiellement sur la mémoire musculaire. En général, nous pouvons dire que la mise à l'épreuve et l'exercice de ces plans de lutte contre la pandémie auraient permis de déceler des problèmes dans notre réponse à ce moment-là, pendant l'exercice.
    Le défi consiste à savoir comment réagir à cela. Avez-vous la volonté et le budget nécessaires pour apporter les modifications aux plans que vous mettez ensuite en œuvre en réponse aux déficiences que vous avez constatées, pour finalement devoir vous exercer à nouveau? Il s'agit d'un processus itératif qui, en l'absence de pandémie, peut sembler être un gaspillage d'argent, car vous dépensez tout cet argent sans rien prévenir, en vous contentant de vous préparer.
    Encore une fois, c'est le problème des décideurs qui ne sont pas des experts en matière d'urgence ou de santé publique. Ils ne gardent pas l'œil sur la cible, laquelle, à ce stade, est d'être prêt à répondre à une pandémie de coronavirus.
    Merci beaucoup.
    Il ne me reste que quelques secondes. Vous soulevez un très bon point, sur lequel je ne sais pas si certains d'entre nous se sont vraiment interrogés. Il est ressorti un peu pendant le débat de l'autre soir. Nous avons vu le démantèlement du système d'alerte précoce et la simulation que l'ASPC n'a pas faite. Lorsque vous étiez à l'Agence de la santé publique du Canada, je suppose que vous étiez convaincu, après le H1N1 et le SRAS, que la question n'était pas de savoir « si » une pandémie mondiale se produirait, mais « quand ».
    Êtes-vous d'accord pour dire que nous savions que cela allait arriver et que nous aurions dû nous y préparer?
     Oui. Nous savions que cela allait arriver.
    Le défi de la santé publique est qu'elle a une portée énorme, des opioïdes aux pandémies. Il est vraiment difficile de se concentrer sur des choses qui n'ont pas de retombées immédiates, et nous en voyons les conséquences maintenant.
    Merci beaucoup. Je vous sais gré de votre temps.
    Merci, monsieur Barlow.
    Nous revenons à M. Powlowski. C'est à vous pour trois minutes, monsieur.
    C'est un commentaire intéressant et je dirais, révérend Garner, que oui, la santé publique a changé d'orientation ces dernières années, délaissant les maladies infectieuses au profit des maladies non transmissibles. C'est peut-être une partie du problème.
    J'ai également trouvé très intéressantes vos allégations concernant la bureaucratisation de l'ASPC, à savoir que des bureaucrates ont remplacé les médecins et les scientifiques. Je voudrais peut-être vous engager dans une conversation un peu plus académique. N'est-ce pas une chose qui s'est produite de manière générale dans d'autres ministères, et ce, pas seulement ici au Canada, mais dans le monde entier?
    Je parlais à un ami, un scientifique qui a travaillé à un haut niveau au sein du gouvernement britannique, et il parlait de la même tendance à remplacer les experts en contenu par des bureaucrates. Je sais que dans les hôpitaux, c'est à peu près la même chose. Beaucoup d'administrateurs sont des gens qui ne pratiquent pas vraiment la médecine. Je pense que cela fait partie d'un mouvement plus large. Pourquoi cela? Pourquoi n'avons-nous pas des gens qui sont plutôt des experts en contenu dans les postes d'autorité?
(1455)
     Je ne peux pas parler de la situation mondiale. Je peux dire que la plupart des instituts de santé publique dans le monde ont à leur tête des médecins ou des professionnels de la santé publique.
    Je suis d'accord pour dire qu'il y a une tendance à la hausse de la bureaucratie... ou des non-experts. Je pense que c'est en partie parce que l'avis d'un médecin sera, je l'espère, motivé par la santé, alors que l'avis d'un bureaucrate peut être équilibré par la politique. Nous en avons l'exemple au Canada. Un changement a été apporté en 2014: l'administrateur en chef de la santé publique a été rétrogradé et on a placé un bureaucrate à la tête de cette organisation. Nous en avons vu les effets sur toute l'Agence de la santé publique du Canada, où la science est dévaluée et où il est impossible de fournir de l'information complexe parce que les personnes que vous essayez d'informer n'ont aucune formation en santé publique.
    Il existe de nombreux exemples dans le monde entier. Nous pourrions avoir une discussion de nature académique, mais nous pourrions aussi discuter particulièrement des conséquences des décisions prises par les gouvernements Harper et Trudeau concernant la Loi sur l'Agence de la santé publique du Canada, et dire: « Voilà pourquoi nous sommes dans cette situation. »
    Est-ce la raison pour laquelle vous avez quitté l'ASPC?
     Ce n'est pas la raison pour laquelle j'ai quitté l'ASPC. J'ai adoré travailler à l'Agence de la santé publique du Canada. Il y a tellement d'excellents professionnels de la santé publique là-bas, mais je me sentais appelé et je voulais exercer certaines de mes compétences en santé publique à un niveau très local, dans une paroisse.
    Merci, monsieur Powlowski.

[Français]

    Madame Gaudreau, vous avez la parole pour une minute et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Pour ma part, j'en suis à mon premier mandat en tant que députée. Cela m'étonne toujours d'entendre que les gens de la santé publique sont devenus des administrateurs. Le message qu'on envoyait à tous les Québécois et à tous les Canadiens, c'était de se fier à la science. Or force est de constater que les scientifiques ne sont pas à la grande table. Je prends conscience de plusieurs choses aujourd'hui, et je vous remercie de votre présence.
    Ma question s'adresse à Mme Barrett.
    Madame Barrett, vous avez parlé de l'importante contribution des volontaires. Je crois qu'il a été question de tests rapides. Vous avez parlé de la traçabilité et de la rapidité. J'aimerais que vous me parliez plus en détail des mesures que vous avez prises pour aider votre collectivité, car cela pourrait nous inspirer.

[Traduction]

    C'est intéressant, parce que j'ai parlé à de nombreuses personnes dans de très diverses régions du pays, et la première chose que les gens disent toujours, c'est: « Vous êtes petits. Vous pouvez le faire. Vous pouvez mobiliser les gens parce que vous êtes petits. » Je dirais aux gens que je fais cela à l'échelle nationale avec le VIH et l'hépatite C depuis 15 ans. C'est une économie d'échelle, en fait: nous sommes plus petits, mais nous avons aussi moins de ressources.
    Tout le monde peut le faire. Il faut trouver l'échelon précis de mobilisation, qu'il s'agisse d'un quartier, d'une ville ou d'une municipalité, afin de faire participer les gens. Ici, nous sommes plus petits, mais nous avons lancé un appel aux bénévoles de manière très organique, à la base, et au lieu de...

[Français]

    Je suis désolée de vous interrompre, mais mon temps de parole sera bientôt écoulé.
    Avez-vous quelque chose à dire au sujet des tests rapides?

[Traduction]

    Nos tests rapides sont presque exclusivement effectués par des bénévoles. Nous disons: « Salut tout le monde. Voulez-vous donner un coup de main? » Ils font le prélèvement par écouvillon. Ils ont été formés. C'est parfois un secrétaire, une bibliothécaire, un agent de bord. Ils font le prélèvement. Ils effectuent les tests physiques. Ils produisent les rapports. Ils inscrivent les gens, et c'est un outil de mobilisation communautaire. Plus de 1 400 personnes se sont portées volontaires jusqu'à maintenant, et ils continuent de le faire depuis sept mois.
(1500)

[Français]

    Je vous remercie, madame Barrett.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, madame Gaudreau.

[Traduction]

    Monsieur Davies, c'est maintenant à votre tour.
    Je dois avouer que je me suis laissé distraire par le témoignage, et j'ai donc accordé un peu plus de temps. Je vous propose de prendre deux minutes cette fois-ci.
    Merci.
    Madame Barrett, dans la lettre au magazine Maclean's que vous avez cosignée, vous dites que:
Peu importe à quel point nous souhaitons le contraire, la COVID-19 n'en a pas encore fini avec nous. Notre incapacité à apprendre de l'expérience d'autres administrations et, pire encore, à apprendre de nos propres erreurs, en dit malheureusement long sur les dirigeants politiques du Canada.
    J'ai deux questions. À votre avis, qu'est-ce que les dirigeants politiques du Canada n'ont pas appris de l'expérience d'autres pays? Pouvez-vous nous faire un survol des pratiques exemplaires d'autres pays qui pourraient être appliquées au Canada selon vous?
    Il sera difficile de répondre en l'espace de deux minutes, mais je vais essayer.
    Je pense que nous pouvons apprendre de ce qui s'est fait dans le Canada atlantique, de la quatorzaine. Je ne sais pas pourquoi nous ne l'avons pas fait ailleurs au Canada. Ce n'est pas un autre pays, mais c'est là.
    Il faut agir tôt. Lorsque le taux de reproduction du virus est de 1,5, ou qu'on enregistre une moyenne de 400 nouveaux cas par jour dans une région, il ne faut pas laisser les gymnases et les restaurants ouverts pendant une semaine et demie ou deux semaines. Ce sont des mesures très concrètes.
    Il ne faut pas hésiter à mobiliser des gens. Si des personnes se portent volontaires pour faire certaines choses, comme un test, ne dites pas à un spécialiste de la médecine de le faire alors qu'un jeune de 16 ans qui a été formé peut s'en occuper, comme l'un de mes meilleurs préposés à l'écouvillonnage. Il ne faut pas chercher à protéger son territoire.
    Pour ce qui est des autres pays, la Nouvelle-Zélande a toujours été une chef de file, tout comme l'Australie. Ces pays se mobilisent et financent beaucoup la santé publique. Ce sont leurs responsables de la santé publique — pas d'autres personnes sur scène au moment de donner des directives et des conseils — et des scientifiques qui dirigent. Je ne suis pas scientifique, et je suis donc partiale, mais je pense que c'est utile, et lorsque quelqu'un donne ce genre de directive, je l'applique rapidement.
    Je reviens sur certaines choses que j'ai mentionnées plus tôt, mais en donnant aussi des exemples précis. Il ne faut pas aller loin. La quatorzaine joue un rôle important. Le recours à une politique définitive est également important, tout comme le dépistage rapide et continu, qui joue un rôle prépondérant.
    Merci, monsieur Davies.
    C'est la fin de nos questions. Je remercie encore tous les témoins de nous avoir accordé du temps et d'avoir mis à profit leur grande expertise.
    C'est très utile et très important pour nous de vous entendre. Je vous suis reconnaissant du temps que vous avez passé avec nous aujourd'hui.
    Je remercie tous mes collègues. La séance est levée.
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