FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 29 janvier 2003
¹ | 1540 |
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)) |
M. Robert L. Brown (À titre individuel) |
¹ | 1545 |
La présidente |
M. Brian Gibson (vice-président principal, Actions, Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario) |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
La présidente |
M. Richard Harris (Prince George—Bulkley Valley, Alliance canadienne) |
M. Brian Gibson |
M. Richard Harris |
M. Brian Gibson |
º | 1600 |
M. Richard Harris |
M. Robert Brown |
La présidente |
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ) |
M. Robert Brown |
M. Mario Laframboise |
M. Robert Brown |
M. Brian Gibson |
M. Mario Laframboise |
º | 1605 |
M. Brian Gibson |
M. Mario Laframboise |
M. Brian Gibson |
M. Mario Laframboise |
M. Brian Gibson |
La présidente |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
La présidente |
M. Roy Cullen |
º | 1610 |
M. Robert Brown |
M. Roy Cullen |
M. Robert Brown |
M. Roy Cullen |
M. Robert Brown |
M. Roy Cullen |
M. Robert Brown |
M. Roy Cullen |
M. Robert Brown |
º | 1615 |
M. Roy Cullen |
M. Brian Gibson |
M. Roy Cullen |
M. Brian Gibson |
M. Roy Cullen |
La présidente |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
La présidente |
M. Robert Brown |
M. Bryon Wilfert |
º | 1620 |
M. Robert Brown |
M. Bryon Wilfert |
M. Robert Brown |
M. Bryon Wilfert |
La présidente |
M. Brian Gibson |
M. Bryon Wilfert |
La présidente |
M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.) |
º | 1625 |
M. Brian Gibson |
º | 1630 |
M. Nick Discepola |
M. Brian Gibson |
M. Robert Brown |
M. Nick Discepola |
La présidente |
M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.) |
º | 1635 |
M. Robert Brown |
M. Tony Valeri |
M. Robert Brown |
M. Brian Gibson |
La présidente |
La présidente |
M. James Knight (directeur général, Fédération canadienne des municipalités) |
º | 1645 |
º | 1650 |
La présidente |
M. Richard Harris |
La présidente |
M. James Knight |
º | 1655 |
M. Richard Harris |
M. James Knight |
La présidente |
M. Mario Laframboise |
» | 1700 |
M. James Knight |
M. Mario Laframboise |
M. James Knight |
» | 1705 |
La présidente |
M. Bryon Wilfert |
M. James Knight |
» | 1710 |
M. Bryon Wilfert |
M. James Knight |
M. Bryon Wilfert |
M. James Knight |
» | 1715 |
La présidente |
M. Bryon Wilfert |
La présidente |
M. Roy Cullen |
M. James Knight |
M. Roy Cullen |
M. James Knight |
M. Roy Cullen |
La présidente |
M. Nick Discepola |
» | 1720 |
M. James Knight |
M. Nick Discepola |
M. James Knight |
M. Nick Discepola |
M. James Knight |
» | 1725 |
M. Nick Discepola |
M. James Knight |
M. Nick Discepola |
M. James Knight |
La présidente |
M. James Knight |
La présidente |
CANADA
Comité permanent des finances |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 29 janvier 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1540)
[Traduction]
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Bienvenue à tous. Nous allons commencer avec nos deux témoins: M. Robert Brown, un spécialiste des régimes de retraite, et M. Brian Gibson, le vice-président principal responsable des actions, au Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario.
Bienvenue à vous deux et merci d'être des nôtres. Pendant la prochaine heure, nous vous écouterons et nous vous poserons des questions. L'ordre du jour, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, prévoit la suite de notre étude sur les répercussions en matière d'intérêt public de la fusion des grandes banques. Nous espérons que votre témoignage portera précisément sur cette question et non sur d'autres, qui n'y touchent pas directement.
Je vais vous laisser du temps pour présenter vos exposés. Nous suivrons l'ordre prévu à l'ordre du jour.
Monsieur Brown, veuillez commencer.
M. Robert L. Brown (À titre individuel): Merci beaucoup. Je suis ravi d'être ici aujourd'hui. Vous constaterez en lisant les renseignements à mon sujet que je suis le directeur de l'Institut de recherche en assurances et en pensions, à l'Université de Waterloo. Je suis ici pour vous présenter mon point de vue personnel sur les éventuelles fusions bancaires. Je crois que c'est une question très importante. Ce n'est pas une chose futile que l'on peut balayer sous le tapis.
Les banques ont des objectifs légitimes en cherchant à se fusionner et j'en ai défini quatre pour ma part. En particulier, beaucoup de processus et de transactions bancaires identiques sont offerts par les banques et pourraient être offerts d'une manière plus efficace et plus efficiente, grâce aux fusions bancaires. La tendance observée dans nombre d'industries en faveur de l'impartition de services généraux confirme cette idée des gens d'affaires. Deuxièmement, la poursuite de la croissance des banques canadiennes viendra des opérations bancaires à l'extérieur du Canada mais elles ont perdu du terrain, à cause de leur taille, en tant qu'institutions financières internationales. Il serait avantageux d'avoir des banques moins nombreuses et de plus grande taille. Troisièmement, les banques canadiennes voudraient pouvoir répondre aux besoins de leurs clients canadiens souhaitant exercer leurs activités à l'extérieur du Canada. Et quatrièmement, la croissance est bonne pour le Canada comme pour les banques canadiennes. Les banques préfèrent sans doute croître en élargissant leurs activités bancaires, plutôt que leurs activités non financières. Je vous dirais que ces voeux sont réels et raisonnables et qu'il faut y répondre de manière raisonnable et logique.
Par ailleurs, le gouvernement et le public canadien s'inquiètent légitimement des fusions bancaires. Premièrement, moins il y a de banques, plus sont grands les risques de hausse de prix ou de baisse de la qualité du service, dans des monopoles ou des oligopoles. Deuxièmement, une industrie bancaire consolidée se traduira vraisemblablement par la réduction du nombre des succursales bancaires, et par une diminution de l'accès aux services bancaires traditionnels. Troisièmement, une industrie bancaire consolidée comptera probablement moins d'employés, ce qui causera du chômage. Quatrièmement, l'insolvabilité d'une banque de très grande taille serait préoccupante pour les Canadiens, comme contribuables ou comme clients. Et cinquièmement, le gouvernement croit peut-être qu'il est plus facile de réglementer un plus grand nombre de petites banques qu'un plus petit nombre de grandes banques. Là encore, il s'agit de préoccupations valables.
Il faut alors se demander si on pourrait permettre aux banques d'obtenir les avantages que semblent entraîner les fusions et la consolidation, sans susciter les problèmes que craignent à juste titre le gouvernement et les Canadiens. Je crois que oui, et je vais vous dire pourquoi.
Tout d'abord, pour répondre aux craintes relatives à l'oligopole ou au monopole, on pourrait permettre à d'autres entreprises de concurrencer les banques canadiennes. Ce pourrait être des banques étrangères mais aussi d'autres institutions financières canadiennes, comme les compagnies d'assurance-vie et les caisses populaires. La concurrence ferait baisser les prix et améliorerait le service. J'en ai un exemple concret: il faudrait permettre aux compagnies canadiennes d'assurance-vie de compenser des chèques.
Il y a ensuite les craintes relatives à la perte de succursales bancaires. Je crois qu'il est temps d'encourager d'autres modes de prestation de services, comme les services par téléphone, par télécopieur et par Internet et de comprendre que les succursales bancaires sont très coûteuses. Je crois que dans ces domaines, l'innovation est la solution à privilégier. D'ailleurs, je crois que le Canada, avec sa population éparpillée sur un immense territoire, pourrait être un leader mondial dans les nouveaux modes de prestation de services financiers.
Parlons maintenant des craintes d'insolvabilité d'une banque fusionnée. Qu'il y ait ou non consolidation, je crois que les Canadiens ont droit à un niveau d'examen du secteur bancaire supérieur à celui qui existe maintenant en matière d'insolvabilité. À mon avis, toute banque devrait faire l'objet d'un rapport annuel réglementaire, préparé par un évaluateur de risque en chef agréé qui serait un professionnel clairement défini. Ce rapport serait semblable à celui qui doit être fait par l'actuaire officiel d'une compagnie d'assurance canadienne. Le rapport devrait comprendre des scénarios de risque et un examen dynamique de solvabilité—et permettez-moi d'expliquer ce que j'entends par là.
L'évaluateur de risque en chef créerait un modèle financier de la banque, auquel il ferait subir des chocs financiers: par exemple, l'éventualité que l'économie entre en déflation, la faillite d'un débiteur étranger comme l'Argentine, les répercussions d'un événement de l'importance des attentats du 11 septembre. Il analyserait ainsi la capacité de la banque de survivre aux répercussions économiques en demeurant solvable, ce qui accroîtrait de beaucoup la protection contre l'insolvabilité.
Il y a aussi d'autres questions à résoudre. Il faut une série de principes logiques pour régir les décisions liées aux fusions et aux consolidations, non seulement pour les banques, mais aussi pour les compagnies d'assurance, dans un même secteur, mais aussi, entre ces deux secteurs.
Vous permettez les fusions des compagnies d'assurance, mais vous hésitez devant les fusions bancaires. On a aussi dit publiquement que les banques et compagnies d'assurance ne pouvaient pas envisager d'acquisition ou de fusion entre elles. Où est la logique dans tout cela? Sur quels principes ces décisions sont-elles fondées? Quels en sont les fondements? Les décisions sont prises selon les besoins du moment et il en résulte de la confusion et la stagnation.
Les banques canadiennes consacrent toutes leurs énergies à la question des fusions, au lieu de songer à la prestation de meilleurs services aux Canadiens, à moindre coût.
Je vais conclure en disant que le temps est venu de passer à l'action.
Merci.
¹ (1545)
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Gibson, vous avez maintenant la parole.
M. Brian Gibson (vice-président principal, Actions, Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario): Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs. Merci d'avoir invité le Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario à comparaître aujourd'hui.
Mes collègues et moi avons longuement discuté de la question des fusions des banques. À titre d'investisseurs, nous nous intéressons de près à cette question puisque les banques canadiennes constituent un élément très important du marché financier au Canada et que notre caisse de retraite est composée en grande partie d'investissements dans ces banques. Toutefois, dans notre exposé, nous tentons d'aborder la question sous l'angle de la politique publique et pas seulement du point de vue des investisseurs. Nous savons que c'est ce qui compte le plus pour vous.
Hier, nous vous avons envoyé une courte lettre. J'aimerais prendre quelques minutes pour vous donner un aperçu des principales idées qu'elle contient en laissant autant de temps que possible pour la discussion.
D'entrée de jeu, je tiens à dire que nous croyons fermement que le secteur bancaire au Canada doit être fort et que nous appuyons les fusions bancaires à condition que nos objectifs en matière de politique publique soient respectés et uniquement si on peut prouver que c'est le meilleur moyen d'assurer un rendement à long terme pour les investisseurs.
Comme nous l'indiquons dans notre lettre, nous croyons que le débat au sujet des fusions bancaires s'est déroulé d'une façon trop étroite. Il y a de nombreuses choses, à part les fusions, que les banques peuvent faire, et devraient peut-être faire, pour créer de la valeur et atteindre certains de leurs objectifs de croissance. Nous avons voulu élargir le débat afin que le public et les banques examinent toutes les options possibles. À notre avis, il ne s'agit pas simplement d'autoriser ou d'interdire les fusions.
Nous pensons que le principal objectif de la politique publique doit être d'assurer la prestation universelle de services bancaires concurrentiels au Canada, c'est-à-dire les dépôts, les comptes de chèques et les prêts commerciaux, surtout les prêts aux petites entreprises qui n'ont pas beaucoup d'autres options.
Un deuxième objectif, à notre avis, est de faire en sorte que les banques canadiennes soient en mesure d'appuyer les entreprises canadiennes qui essaient de se tailler une place sur les marchés étrangers.
Il y a un troisième objectif qui arrive loin derrière les autres mais qui est en fait un objectif important à long terme pour le Canada, à savoir la possibilité que nos banques deviennent des leaders mondiaux. Le Canada ne compte pas beaucoup d'entreprises qui sont compétitives à l'échelle mondiale. Nous en avons eu dans le passé mais elles connaissent des difficultés à l'heure actuelle. Le troisième objectif de politique publique pourrait donc être de faire en sorte que ce secteur soit dynamique et compétitif à l'échelle mondiale.
Parlons maintenant des pressions qui s'exercent en faveur des fusions bancaires. Les banques souhaitent prendre de l'expansion, surtout aux États-Unis. D'où leur volonté de fusionner. Les activités canadiennes des banques canadiennes sont déjà très rentables. Le rendement du capital est d'environ 30 p. 100 pour les activités canadiennes qui génèrent un énorme cash flow disponible. Ces rendements et ces disponibilités expliquent leur volonté de fusionner et de prendre de l'expansion.
L'activité des banques consiste à gérer le risque, mais à titre d'actionnaires et de Canadiens, nous souhaitons que les banques fassent preuve d'une grande prudence dans leur expansion internationale. Au bout du compte, ce sont les clients et les actionnaires des banques qui devront payer le prix de tout recul ou problème.
Les banques font valoir deux principaux arguments en faveur des fusions: les économies d'échelle et l'importance du capital. Permettez-moi de dire un mot au sujet des économies d'échelle.
Le Conseil ne croit pas que la question des économies d'échelle se pose pour les activités canadiennes. Étant donné le rendement des banques, il est difficile d'imaginer qu'elles sont désavantagées.
La question des économies d'échelle se poserait au Canada si les concurrents étrangers avaient librement accès au marché canadien. Cependant, c'est un objectif beaucoup plus difficile à réaliser que nous ne l'imaginons. Étant donné l'importance des dépôts que reçoivent les banques par leurs réseaux de succursales, il serait très difficile pour des banques étrangères d'être concurrentielles au Canada. Si elles obtenaient accès à notre marché, l'échelle deviendrait importante, mais nous ne croyons pas que ce soit le cas à l'heure actuelle pour les activités canadiennes.
Nous croyons cependant que ces économies d'échelle dont on nous parle sont très importantes pour les banques qui veulent se lancer à l'assaut des marchés internationaux où elles ne sont pas de taille. Il y a des moyens pour elles de réaliser ces économies d'échelle.
¹ (1550)
L'un de ces moyens, dont nous entendons parler, consiste à fusionner tout simplement. Eh bien, c'est une façon d'atteindre l'objectif. C'est aussi l'option qui créera le plus de perturbation sur le marché du travail et qui entraînera le plus grand nombre de mises à pied dans le secteur, du moins à court terme.
Mais il y a d'autres options qui s'offrent aux banques. Par exemple, elles pourraient prendre part à des coentreprises avec des banques américaines ou d'autres banques étrangères dans certains secteurs d'activité, comme les cartes de crédit, les prêts hypothécaires, etc. Elles pourraient ainsi réaliser des économies considérables et offrir des produits beaucoup plus compétitifs. L'inconvénient d'avoir un partenaire étranger pour un secteur d'activité, c'est que le marché canadien est tellement différent, même du marché américain, qu'au bout du compte il pourrait être difficile de réaliser toutes les économies qui sont possibles en théorie.
Un autre moyen serait que les banques canadiennes créent des partenariats entre elles en faisant preuve de plus de créativité et d'audace. Certaines banques se sont regroupées pour créer des centres de compensation de chèques. La compensation de chèques n'est pas une activité qui permet de différencier une banque d'une autre. C'est tout simplement un moyen plus efficace et moins coûteux de fonctionner. Nous pensons que les banques devraient envisager des solutions semblables dans d'autres secteurs comme le soutien informatique pour les cartes de crédit et les prêts hypothécaires et bien d'autres activités pour lesquelles elles pourraient mettre en commun leurs ressources et réaliser des économies d'échelle sans être obligées de fusionner pour autant.
Voilà quelques solutions de rechange que nous avons imaginées.
Pour ce qui est de la question de l'importance du capital, la question est de savoir quelle est la taille optimale? Les banques étrangères, surtout américaines, se sont beaucoup consolidées au cours des dix dernières années. Nos banques ne comptent plus parmi les 25 plus grandes comme c'était le cas auparavant et ce, non pas parce qu'elles n'ont pas de succès mais parce qu'elles ne se sont pas consolidées comme l'ont fait les banques américaines.
Du point de vue des principes, la question qui se pose est de savoir si nous voulons que nos banques se situent parmi les plus grandes au monde. Souhaitons-nous que ce secteur soit concurrentiel à l'échelle mondiale? Dans l'affirmative, sommes-nous prêts à accepter les compromis nécessaires pour qu'elles atteignent cet objectif?
Il y a d'autres moyens que les fusions pour augmenter l'importance du capital. Nous avons quelques idées à proposer à cet égard. La première possibilité, que les banques elles-mêmes examinent de plus près et dont nous ne pouvons nous attribuer le mérite, consiste à mieux cibler le capital dont elles disposent. Elles pourraient se spécialiser dans certains produits sur les marchés mondiaux et cibler plus précisément certaines régions géographiques. L'ennui, c'est que le capital des banques canadiennes n'est pas suffisant pour leur permettre d'offrir toute la gamme des produits dans tous les marchés. C'est pourquoi nous pensons que la spécialisation constitue un moyen d'optimiser le capital sans fusionner.
Une autre solution serait que les banques fusionnent uniquement leurs activités étrangères. Rien ne les empêche de le faire. Si elles ne se sentent pas en mesure de participer à des syndications de prêts ou à d'autres marchés, elles pourraient, si elles le souhaitaient, fusionner leurs activités étrangères sans que cela touche à leurs activités canadiennes.
Je suis convaincu que les banques ont examiné toutes ces options. Nous ne prétendons pas savoir mieux qu'elles quelle est la meilleure voie. Nous disons simplement que pour déterminer l'impact de fusions bancaires sur la politique publique et avant de prendre une décision, il faut examiner l'ensemble des possibilités. Il ne s'agit pas simplement de déterminer s'il faut autoriser ou interdire les fusions. Nous croyons que les banques et le public peuvent réaliser bon nombre des objectifs énoncés sans fusion.
¹ (1555)
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Harris, nous aurons maintenant une période de questions de six minutes.
J'espère que les questions et les réponses seront brèves afin que nous puissions avoir un bon échange.
M. Richard Harris (Prince George—Bulkley Valley, Alliance canadienne): Merci.
J'ai trouvé vos deux exposés vraiment intéressants. Je suis heureux que vous soyez venu présenter le point de vue du Conseil du régime de retraite des enseignants et des enseignantes de l'Ontario parce que je pense qu'un grand nombre de Canadiens ne comprennent pas le rôle essentiel que jouent les actions du secteur bancaire dans les caisses de retraite de millions de gens. M. Brown a parlé de la solvabilité des banques. Des millions de Canadiens achètent leurs actions et je pense qu'un grand nombre de citoyens ne comprennent pas à quel point il est important que nos banques restent fortes et stables. En surveillant les investissements de votre caisse de retraite, vous avez pu constater que les actions des banques sont restées très stables et qu'en fait leur valeur a augmenté à de nombreuses occasions alors que s'effondrait le cours des actions du secteur de la technologie. La plupart des gens qui cotisent à une caisse de retraite au Canada sont probablement heureux que nos banques soient fortes et qu'elles réalisent d'importants bénéfices.
Si nous examinons les fusions bancaires du point de vue de l'intérêt public, je crois qu'il est tout à fait dans l'intérêt public que nos banques restent fortes, qu'elles soient capables de croître et de protéger les investissements des caisses de retraite qui achètent leurs actions. Il ne serait pas dans l'intérêt du public qui investit dans le secteur bancaire par l'entremise de ces caisses de retraite d'empêcher les banques de se développer et de devenir plus fortes. Qu'en pensez-vous?
M. Brian Gibson: Nous sommes entièrement d'accord avec ce que vous dites. Mais j'aimerais souligner une subtilité. Lorsque nous examinons notre investissement dans les actions du secteur bancaire, ce qui nous intéresse, c'est l'intérêt à long terme des banques. Honnêtement, si nous nous intéressions au court terme, nous dirions qu'il faut autoriser les fusions, quelles qu'en soient les conséquences, puisque à court terme la valeur des actions bancaires augmenterait. Mais ce n'est pas notre objectif. Nous voulons que les banques s'engagent sur une voie qui fera augmenter leur valeur à long terme. Je ne dis pas que les banques doivent freiner leurs projets de croissance mais plutôt que nous devons tous, investisseurs et grand public, nous assurer que les banques examinent toutes leurs options de façon audacieuse et créatrice. Puis, tout bien pesé, s'il apparaît que les fusions procurent le plus de valeur à long terme, nous appuierons les fusions.
M. Richard Harris: Toutes nos banques semblent songer aux fusions, qu'elles l'avouent ou non, et je pense que le simple fait que cette question soit encore en suspens nuit à leur planification à long terme. Les banques doivent pouvoir, plus que toute autre entreprise au pays, je pense, être en mesure de faire une bonne planification à long terme afin de satisfaire les investisseurs comme vous. Du point de vue de l'intérêt public, c'est-à-dire le rendement que la croissance et la rentabilité des banques canadiennes assurent aux actionnaires, il est bon pour les investisseurs que les banques puissent planifier à long terme. Cela vous rassurerait beaucoup, n'est-ce pas?
M. Brian Gibson: Oui. Ce sont de bons arguments. Il est important, autant que tout le reste, que le secteur sache à quoi s'en tenir, quelle que soit votre décision au sujet des fusions bancaires. Je suivrai la recommandation de Robert: agissons maintenant, décidons maintenant. Pour en avoir discuté avec les banques, nous savons très bien qu'elles gardent en veilleuse d'autres options et c'est l'incertitude qui fait perdre du terrain à certaines d'entre elles, à tout le moins, et qui leur fait rater des occasions. Alors, quelle que soit la meilleure décision dans l'intérêt public, il est temps de trancher. Si vous autorisez les fusions, les banques iront de l'avant; si vous les interdisez, elles suivront d'autres voies.
º (1600)
M. Richard Harris: Monsieur Brown, j'ai été content de vous entendre dire que les banques vont continuer à rationaliser leurs réseaux de succursales en raison de l'immense prolifération de transactions bancaires électroniques par divers moyens, qu'elles fusionnent ou non. Je regrette de ne pas avoir les données—peut-être que vous les connaissez—mais il semble qu'il y ait eu, au cours des dernières années, une autre très forte augmentation du nombre de transactions bancaires électroniques. Connaissez-vous le montant de cette forte augmentation qui s'est produite récemment?
M. Robert Brown: Je n'ai pas cette information. Mais ce n'est pas quelque chose que nous craignons. Je pense que le pourcentage de Canadiens qui ne sont pas en mesure d'effectuer leurs transactions bancaires par d'autres moyens diminue rapidement.
Je crois que c'est un défi qui peut devenir une possibilité à exploiter. Le Canada a dominé le monde des télécommunications pendant de nombreuses années parce que nous étions obligés de communiquer malgré de vastes distances et une population clairsemée. Nous devons maintenant assurer des services bancaires à une population clairsemée malgré de vastes distances.
C'est une occasion en or. Nous pouvons inventer des méthodologies qui se vendront dans le monde entier.
[Français]
La présidente: Monsieur Laframboise, vous pouvez commencer. Vous avez six minutes, s'il vous plaît.
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Merci, madame la présidente.
Ma première question s'adresse à vous deux. S'il y avait une fusion bancaire, sans aucune protection, si on laissait les banques satisfaire leur insatiable volonté de fusionner pour des raisons purement économiques, d'après vous, combien resterait-il de banques au Canada, à court terme et à long terme?
[Traduction]
M. Robert Brown: Je vais commencer. Je pense qu'il y aura autant de banques au Canada que vous le permettrez. Je pense que vous imaginez peut-être que le nombre de banques diminuera mais, en fait, pourquoi n'y aurait-il pas de nouvelles banques? Pourquoi les caisses populaires et les compagnies d'assurances n'auraient-elles pas le droit d'offrir des services bancaires?
[Français]
M. Mario Laframboise: Je peux comprendre que vous vouliez ça, mais ce n'est pas le désir des banques. Les banques ne voudront pas que les compagnies d'assurances entrent dans leur marché. Leur désir, c'est une fusion pure et simple. S'il y avait des fusions pures et simples, telles que le veulent les banques, combien resterait-il, d'après vous, de banques au Canada, à court terme, parce qu'elles feraient des fusions rapidement, et à long terme?
[Traduction]
M. Robert Brown: Eh bien, j'ai déjà essayé de répondre à cette question. Je laisserai donc la parole à Brian, car je n'ai rien à ajouter.
M. Brian Gibson: Je vais essayer d'y répondre à mon tour.
Je pense qu'à court terme, il y aura trois banques et qu'à long terme, il y aura trois banques et peut-être quelques entreprises qui offriraient des services très spécialisés. La véritable difficulté pour les nouveaux venus tient au fait que nos banques ont les réseaux de succursales, les clients, les dépôts, les comptes de chèques. Il est très difficile pour un nouveau venu de leur faire concurrence sauf dans des secteurs très spécialisés.
[Français]
M. Mario Laframboise: Le problème, ce sont les services et la compétitivité des services pour le bien-être des Québécois et des Québécoises, des Canadiens et des Canadiennes. On a l'impression, en voyant les monopoles et les oligopoles qu'on est en train de créer ou les revenus faramineux des pétrolières, que les banques sont insatiables. Tout ce qu'elles veulent, c'est contenter le conseil d'administration et les actionnaires. Elle ne sont pas là pour contenter le Canadien ou le Québécois moyen, et c'est ça qui est inquiétant. C'est pour cela que le Canada a pris des mesures pour empêcher ces fusions.
Je trouve ça bien que vous nous suggériez qu'il y a d'autres façons d'envisager de grossir le capital des banques, entre autres en formant des associations qui pourraient très bien se faire, qui pourraient se réunir et créer un consortium pour s'orienter vers l'international. C'est ce que j'ai cru comprendre de votre rapport, monsieur Gibson. Est-ce que c'est quelque chose qui serait envisageable? Il semble y avoir un problème de développement international des banques. Quelques-unes d'entre elles pourraient très bien se réunir, créer un consortium et une nouvelle image corporative qui pourrait les lancer au point de vue international.
º (1605)
[Traduction]
M. Brian Gibson: Je vais essayer de répondre. Vous posez une bonne question, car plus les banques grossissent, plus le siège social est loin des collectivités canadiennes qu'elles servent. Je pense que le risque auquel vous songez, c'est que les collectivités aient le sentiment de ne pas avoir leur mot à dire ou qu'elles ne reçoivent pas les services qu'elles souhaitent.
Aux États-Unis, les lois régissant les banques communautaires stipulent qu'une banque qui a des activités dans une ville, un État ou une région, doit être en mesure de prouver qu'elle accorde des prêts, qu'elle appuie les petites et les moyennes entreprises dans ces régions, sans quoi elle peut faire l'objet de poursuites. Il y a même eu des poursuites mettant en cause la Banque Royale, qui n'était pourtant pas responsable. Elle avait acheté une banque à Atlanta qui n'avait pas rempli certaines de ses obligations communautaires. Il y a eu une poursuite qui a été réglée aux frais de la banque.
Je pense qu'une bonne façon de régler le problème que vous soulevez est d'adopter des lois régissant les services bancaires communautaires afin de donner aux petites entreprises et aux particuliers la possibilité d'intenter des poursuites contre les banques qui ne leur fournissent pas les services qu'ils souhaitent.
[Français]
M. Mario Laframboise: Et en ce qui concerne le consortium qu'elles pourraient créer pour faire face à leur développement international, vous semblez dire que ça pourrait se faire. Pourquoi ne le suggèrent-elles pas elles-mêmes? Pourquoi ne le font-elles pas présentement, selon vous?
[Traduction]
M. Brian Gibson: Je ne comprends pas la question, monsieur.
[Français]
M. Mario Laframboise: Dans votre rapport, monsieur Gibson, vous mentionnez qu'une nouvelle façon d'agir serait que les banques se joignent dans un consortium, se réunissent pour faire du développement international. Pourquoi ne le font-elles pas présentement, d'après vous?
[Traduction]
M. Brian Gibson: Si elles ne le font pas actuellement, c'est précisément pour la même raison pour laquelle elles ne se lancent pas dans des entreprises en coparticipation au Canada. Chacune de ces banques aime être maître de son destin. Elles aiment avoir la haute main sur tous les éléments de leur activité, même les secteurs qui ne nous apparaissent pas comme étant leur mission première, celles qui ne sont pas déterminantes pour le client.
Comme consortium international, on imagine par exemple deux banques canadiennes qui combinent leurs secteurs étrangers pour en faire un grand service vigoureux; ou encore, une de nos banques unit son secteur étranger à celui d'une banque étrangère pour parvenir au même résultat. Le hic, c'est de trouver la réglementation à appliquer du point de vue de la solvabilité et de la suffisance du capital. Si le partenaire est américain, la difficulté n'est sans doute pas insurmontable parce que nos organismes de réglementation bancaire collaborent depuis longtemps avec leurs homologues américains et que l'on peut sans doute trouver un mode de supervision adéquat. Là où cela se complique, et la difficulté est réelle, je l'admets, c'est lorsque ces consortiums se trouvent dans d'autres pays: cela soulève la question de savoir comment on réglemente cet aspect de la banque canadienne puisque le Canada, lui, garantit les dépôts au pays.
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Cullen, vous avez la parole.
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, madame la présidente et merci à vous, messieurs Brown et Gibson.
Y aura-t-il un deuxième tour, madame la présidente?
La présidente: Non, il y a un autre groupe de témoins.
M. Roy Cullen: Je vois. Très bien.
Je vais d'abord m'adresser à M. Brown. Dans votre mémoire, vous dites qu'il faut des principes logiques qui régissent les décisions concernant les questions comme les fusions bancaires. De fait, le projet de loi C-8, la loi de l'an dernier sur la restructuration du secteur des services financiers, énonçait un certain nombre de principes, dont celui qui obligeait le BSIF à examiner les questions de prudence, le Bureau de la concurrence à examiner la concurrence et notre comité ainsi que le Comité des banques du Sénat à examiner les questions relatives à l'intérêt public. Nous sommes précisément là pour définir mieux le critère de l'intérêt public. Le Sénat a lui aussi fait du travail dans ce domaine.
Si notre comité termine ses travaux, faut-il encore autre chose?
º (1610)
M. Robert Brown: Je parle en termes plus généraux. Je suis au courant de ces principes, mais il me semble y avoir une contradiction. En effet, dans le secteur des services financiers, il ne se passe rien au niveau fédéral pour faire échec aux fusions des compagnies d'assurance tandis qu'il y a des obstacles aux fusions d'autres établissements financiers, qu'il s'agisse de banques et de compagnies d'assurance ou de banques entre elles. Et cette logique m'échappe.
Mon idée est donc plus globale et ne concerne pas uniquement les fusions bancaires.
M. Roy Cullen: D'accord, mais en ce qui concerne les fusions bancaires, une fois que nous aurons achevé nos travaux, ce devrait être tout.
M. Robert Brown: Quelle que soit l'issue de vos travaux, j'espère que l'idée d'un évaluateur de risques en chef se réalisera. Cela devrait voir le jour qu'il y ait ou non consolidation. C'est un principe que je défends de tout coeur.
M. Roy Cullen: Dans votre mémoire, vous dites souhaiter que les compagnies d'assurance aient le pouvoir de compenser des chèques. Que je sache, la loi donne actuellement aux compagnies d'assurance et aux courtiers en valeurs accès au système de paiement du Canada. Ce n'est pas le cas?
M. Robert Brown: Oui, ils ont accès au système bancaire, mais ils n'ont pas de pouvoir indépendant de compensation de chèques.
M. Roy Cullen: Cela pourrait nous occuper longtemps, mais je suis certain qu'il en est ainsi pour des raisons de prudence et d'uniformité.
À propos des banques et des compagnies d'assurance, voyez-vous une distinction entre, mettons, une grande banque qui fusionne avec une grande compagnie d'assurance—au Canada on parle de Sun Life ou de Manuvie— et une grande banque qui fusionne avec Clarica ou la compagnie d'assurance du Canada sur la vie? Voyez-vous une distinction ou est-ce que tout devrait être permis?
M. Robert Brown: Il faut que tout soit permis, ou bien qu'il y ait des principes pour expliquer pourquoi ça ne l'est pas. Si l'on énonce les principes, les résultats suivront.
M. Roy Cullen: D'accord.
Dans votre mémoire, vous dites:«Une industrie bancaire consolidée se traduira vraisemblablement par la diminution des succursales bancaires». Qu'arriverait-il si deux grandes banques canadiennes proposaient de fusionner en annonçant qu'elles ont conclu une entente de principe pour qu'une autre banque de deuxième niveau absorbe toutes les autres succursales devenues redondantes dont le Bureau de la concurrence ordonnerait de se défaire? À votre avis, cela permettrait-il de répondre à cette préoccupation?
M. Robert Brown: Oui. Nous accordons d'ailleurs peut-être trop d'importance à cette préoccupation. Je pense que les Canadiens seront en mesure d'obtenir des services financiers, qu'il y a des solutions de rechange. Je signale par ailleurs qu'il y avait bien des craintes dans un autre secteur, nommément le transport aérien, quand il semblait qu'une compagnie avait établi un monopole. Or nous revenons très rapidement au niveau de concurrence qui existait il y a dix ans. Dès qu'il y a un vide, une entité vient le remplir.
º (1615)
M. Roy Cullen: Je vous remercie pour vos réponses succinctes.
Je m'adresse maintenant à M. Gibson. Vous avez dit que les fusions devraient être autorisées pourvu qu'elles respectent certains objectifs en matière de politique publique et qu'elles ajoutent à la valeur des actionnaires. Sur le plan de la politique publique, je pense que vous avez mentionné la concurrence, l'accès aux services et aux produits, l'aide aux multinationales canadiennes qui veulent atteindre une masse critique, et aussi la compétitivité du secteur bancaire. Toute proposition de fusion permet d'atteindre certains de ces objectifs, mais pas tous.
Je vais vous donner un exemple hypothétique. Si je respectais trois de ces critères, nommément ajouter à la valeur des actionnaires, renforcer les multinationales canadiennes et créer un secteur bancaire plus compétitif, mais que je ne respectais pas le critère d'offrir un bon service à la clientèle ou un choix au consommateur, comment établiriez-vous la pondération entre ces critères? Diriez-vous que je respecte trois critères et que le quatrième n'est pas respecté, mais que trois contre un, c'est une bonne moyenne?
M. Brian Gibson: J'adore les questions hypothétiques, parce qu'il est difficile d'y répondre.
Il faut vraiment s'attarder aux détails de chaque fusion. L'un des paradoxes au Canada, c'est que même si nos banques font beaucoup d'argent dans leurs affaires canadiennes, elles sont aussi extrêmement efficientes. En comparaison d'autres pays industrialisés, nos banques offrent des services de bonne qualité à un coût relativement bas. Quiconque a voyagé à l'étranger s'est rendu compte de la différence. Dans l'exemple que vous donnez, un impact marginal sur des services qui sont déjà de grande qualité ne constituerait pas à nos yeux une raison suffisante pour annuler les autres avantages.
M. Roy Cullen: Merci.
Envisagez-vous des exceptions sur le plan des économies d'échelle? Par exemple, les banques invoquent l'argument—et certains, dont moi-même, accueillent favorablement cet argument—qu'il y a une question d'échelle dans le secteur des cartes de crédit. Vous n'acceptez pas cet argument, n'est-ce pas?
M. Brian Gibson: Il y a en effet une question d'échelle. Ce n'est pas le cas sur le marché canadien tel qu'il est établi actuellement, parce que les banques n'ont pas d'avantages par rapport aux autres banques canadiennes de ce point de vue. Elles seraient par contre défavorisées si elles se retrouvaient soudainement en concurrence avec de grands émetteurs de cartes de crédit américains. Ces derniers ont essayé de pénétrer le marché canadien, mais ils ont constaté qu'il leur était difficile de le faire, principalement parce que notre marché est tellement différent et aussi parce que ces émetteurs n'avaient pas d'autres services à offrir.
M. Roy Cullen: Merci.
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Wilfert.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, madame la présidente, et je remercie les témoins d'être venus.
Quand il s'agit d'établir si une fusion est dans l'intérêt public, c'est surtout la concurrence qui est en cause. Vous avez tous les deux parlé de nouveaux venus. De fait, de nouveaux venus ont essayé de s'implanter sur notre marché de différentes manières et n'ont pas réussi. Certains ont eu plus de succès que d'autres, certains ont dû quitter le pays. Nos banques sont établies dans des immeubles, mais beaucoup de ces banques étrangères sont virtuelles, ce qui place peut-être nos banques dans une situation défavorable, mais peut-être pas. Nous encourageons déjà, en application du projet de loi C-8, l'arrivée de nouvelles banques dans notre pays. On pourrait en donner comme exemple la Pacific Western, qui est passée d'une simple compagnie de fiducie à une banque. Peut-être que certains des nouveaux venus ont pris du temps à s'implanter mais la loi le leur permet.
Comment, à votre avis, l'intérêt public est-il servi par les fusions, alors qu'en fait, nous craignons qu'il y ait moins de concurrence et moins de services aux petites entreprises? C'est une question dont nous avons discuté hier. Comment le public sera-t-il servi? Il y a un certain nombre d'années, les Postes ont rationalisé et modifié leur fonctionnement et beaucoup de petits bureaux de poste locaux, qui étaient beaucoup plus que de simples comptoirs postaux dans beaucoup de petites localités, ont disparu.
Pensez-vous que les banques qui proposent une fusion devraient faire au préalable une analyse des risques? Et quels éléments de cette analyse du risque devraient être présentés pour que les diverses autorités responsables puissent décider s'il y a lieu de donner le feu vert, puisque les fusions sont manifestement permises, en théorie?
La présidente: Monsieur Brown.
M. Robert Brown: Bon, je vais commencer.
Je pense qu'il vaudrait mieux s'attarder au service et au prix, plutôt qu'au concept de concurrence; en effet, le but ultime est d'offrir des services à bon prix, et non pas la question de savoir s'il faut une concurrence entre les institutions existantes pour y parvenir. Fixez-vous donc comme objectif l'offre de services à bon prix, et forcez-vous d'atteindre cet objectif. Si vous décidez que l'existence de petites succursales dans de petites localités est une préoccupation incontournable, vous aboutirez à des résultats différents. Vous avez fait allusion aux bureaux de poste. Si vous pensez que les banques doivent jouer ce rôle, je pense que vous devrez vous prononcer contre les fusions. Mais je n'ai pas les mêmes craintes. Je pense que le marché a horreur du vide et que s'il y a un vide, il sera comblé très rapidement, les clients seront servis et les prix baisseront. C'est ma conviction.
M. Bryon Wilfert: Dans le cas des compagnies pétrolières, où il y a absence de concurrence dans certains marchés, notamment dans le Canada atlantique ou dans certains coins de pays où le vide n'a pas encore été comblé, la situation est très différente sur le plan des prix. Il n'y a pas de concurrence, il n'y a pas de service amélioré, et les prix ne sont assurément pas meilleurs. Est-ce que la même situation ne pourrait pas surgir dans ce secteur?
º (1620)
M. Robert Brown: C'est une possibilité, mais je pense que vous avez la capacité d'enrayer cette tendance et d'atténuer les conséquences des résultats que vous souhaitez obtenir. Je crois vraiment que vous pouvez obtenir une gamme complète de services à bas prix si vous énoncez des principes en ayant cet objectif à l'esprit.
M. Bryon Wilfert: Auriez-vous des principes précis à proposer au comité, pas nécessairement tout de suite, qui seraient à votre avis très utiles pour l'établissement de ces critères?
M. Robert Brown: Je travaillerais volontiers à ce dossier avec vous.
M. Bryon Wilfert: Merci.
La présidente: Monsieur Gibson, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Brian Gibson: Je voudrais ajouter quelques observations à ce que Robert a dit. Je pense que vous avez mis le doigt sur la question clé quand vous avez parlé d'installations en dur. Dans les études que nous avons examinées, même s'il peut exister des banques virtuelles qui fournissent des services électroniques, il semble quand même que les clients ont besoin de savoir qu'il existe une succursale matérielle où ils peuvent aller pour parler à quelqu'un en tête à tête, par exemple, en cas de problème ou pour obtenir un prêt.
En cas de fusion, le défi pour le Bureau de la concurrence serait d'avoir la certitude qu'un grand nombre des succursales touchées se retrouveraient entre les mains d'une autre entité, et quelqu'un a d'ailleurs donné cet exemple tout à l'heure. À l'heure actuelle, rien n'empêche les banques de fermer des succursales et de rationaliser leurs activités; c'est d'ailleurs ce qu'elles font. Le processus d'approbation des fusions est une bonne occasion de s'assurer que l'on ne ferme pas de succursales devenues redondantes sans donner à une tierce partie la possibilité de combler le vide et peut-être que cela pourrait se faire plus rapidement que si nous attendons simplement l'aboutissement du processus naturel.
Par ailleurs, vous avez parlé dans votre question d'établir si une fusion est dans l'intérêt public. Il faut faire très attention, parce que la moitié des fusions d'entreprises aboutissent à un échec. Elles ont au départ les meilleures intentions du monde, et se sont fixé des objectifs de réduction des coûts, mais l'affaire échoue à cause d'un conflit culturel, de différences systémiques et tout le reste. Je vous fais donc une mise en garde: n'exagérez pas au départ les avantages d'une fusion si vous devez renoncer à des avantages dans un autre domaine de politique publique, parce que les fusions en elles-mêmes ne sont pas nécessairement couronnées de succès, du moins pas tout de suite.
M. Bryon Wilfert: Je suis certainement d'accord avec votre dernière observation. Nous devons notamment examiner comment nous pourrions favoriser l'émergence de cette tierce partie ou de ce second niveau. On ne peut pas réglementer cela; on ne peut pas forcer les choses. Mais il est clair que, faute d'un deuxième niveau sur lequel on peut compter, je pense qu'il y aura des inquiétudes, sur le plan de l'intérêt public. Il y avait d'ailleurs des inquiétudes en 1998 et il est certain que je voudrais avoir une discussion plus approfondie là-dessus.
De plus, madame la présidente, au sujet des installations en dur, nous sommes en présence de deux cultures différentes. La Banque Toronto Dominion et Canada Trust sont de bons exemples de cultures différentes. Canada Trust met l'accent sur le service, en particulier le service au guichet, les heures d'ouverture, etc. D'après ce que je peux comprendre, les deux entités semblent avoir surmonté certains de ces problèmes, mais je vais me faire un plaisir de poser des questions là-dessus quand leurs représentants comparaîtront devant nous.
En tant qu'élu, ce que j'entends de la part des gens, c'est que c'est bien beau le téléphone, l'Internet et toutes ces merveilleuses nouvelles manières de mener ses affaires bancaires, mais les gens persistent à vouloir traiter leurs affaires en tête à tête, avec des personnes, comme c'était le cas pour le bureau de postes. Personnellement, j'aime bien traiter avec des gens, peut-être parce que je suis en politique et que l'entregent est un ingrédient essentiel dans ce domaine.
On ne peut donc pas mettre de l'avant une pratique au détriment de l'autre. Si nous voulons un secteur équilibré, ce qui me préoccupe, c'est de savoir comment nous allons mettre en place le deuxième niveau. Cela me semble important.
Soit dit en passant, monsieur Gibson, en tant qu'ancien professeur en Ontario, je trouve que vous faites du très bon travail pour ce qui est d'administrer mon argent. J'espère que vous allez continuer.
La présidente: Là-dessus, nous allons passer à quelqu'un d'autre.
Monsieur Discepola, allez-y, vous avez six minutes.
M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.): Merci, madame la présidente.
Je voudrais revenir à vos recommandations. Il me semble que vous êtes ambivalents tous les deux. Vous avez dit tous les deux être en faveur des fusions bancaires, mais à certaines conditions. Je pense que c'est M. Gibson qui a donné des exemples, disant en substance que les banques devraient épuiser toutes les possibilités de collaboration—si je peux paraphraser ce que vous avez dit—avant que l'on autorise les fusions. Mais dans certains des exemples que vous avez donnés, je ne vois pas comment cela pourrait se faire.
Vous avez dit par exemple qu'il faut mettre en commun les activités à l'étranger. Ce serait très difficile. Si vous faites une offre pour accorder un prêt, par exemple, et que vous avez besoin de la sécurité que vous procurerait une offre commune, alors je peux imaginer que cela puisse se faire, parce que chacun de vous avance une partie du montant et que vous assumez le risque également, ce qui est probablement facile à quantifier. Mais quand vous parlez d'amalgamer des activités, alors même que vous êtes concurrents, je ne sais pas si cela peut se faire, sinon peut-être dans le cadre traditionnel du système de compensation bancaire. Donc, si vous avez des idées quelconques dans ce domaine, je vous invite à nous en faire part pour nous faire bénéficier de votre expérience.
Je ne sais pas; je m'inquiète de la concurrence. En réponse à la question de M. Laframboise, vous avez dit que, hypothétiquement—et l'on m'a dit qu'en tant que politicien, je ne devrais jamais répondre aux questions hypothétiques, mais j'adore y répondre, moi aussi, ce qui m'attire beaucoup d'ennuis—vous pourriez envisager probablement trois banques. La concurrence diminue-t-elle beaucoup si le nombre des banques passe de cinq à trois? Je pense que si la Ligue nationale de hockey revenait à six équipes seulement, il y aurait probablement moins de concurrence, mais une meilleure qualité du jeu.
Je me demande si le comité pourrait apporter une réserve, à savoir que l'on ne pourrait approuver plus que deux fusions. J'aimerais votre avis là-dessus. Je me demande aussi quelle est votre position, si vous en avez une, sur une éventuelle révision des règles de propriété étrangère en vue d'encourager la concurrence. Devrions-nous permettre une propriété étrangère plus poussée des banques de deuxième niveau, ou même de premier niveau?
º (1625)
M. Brian Gibson: Je pense que vous avez posé au moins trois questions et je vais essayer d'y répondre très rapidement.
Pour ce qui est de la concurrence internationale, ce ne sont pas tellement les banques canadiennes elles-mêmes qui se font concurrence, elles rivalisent plutôt contre les banques américaines et d'autres grandes banques étrangères. Or, si vous examinez ce qui se passe aux États-Unis, vous constaterez que nos banques participent généralement à des groupements de prêts, comme cela se fait là-bas. Nos banques sont perçues aux États-Unis comme des banques canadiennes, et les Américains ne font pas tellement la distinction entre elles.
Le véritable défi, pour que nos banques réussissent, ce n'est pas de se faire concurrence entre elles, ce qu'elles ne font d'ailleurs pas tellement aux États-Unis, mais plutôt de faire concurrence aux grandes institutions de ces marchés étrangers. C'est pourquoi nous pensons qu'il vaut la peine tout au moins d'examiner sérieusement la possibilité de combiner leurs activités non canadiennes, tout au moins dans certains marchés. Aux États-Unis, par exemple, au lieu d'avoir deux comptoirs de négociations, elles pourraient avoir un seul bureau pour négocier les prêts, etc. Cela permettrait aux deux banques en question de rivaliser beaucoup mieux avec les banques américaines pour l'obtention de contrats pouvant ajouter de la valeur à l'entreprise.
Je pense que votre deuxième question était de savoir si l'on devrait s'en tenir à deux fusions seulement. Pour revenir à ce que disait M. Brown, la clé, c'est la situation en termes de disponibilité des services après une, deux ou trois fusions. C'est difficile de dire que deux, ça va, mais trois, c'est trop. Cela dépend vraiment de la nature des fusions et de ce qu'il y a lieu de faire, d'après le Bureau de la concurrence, du côté des installations en dur.
Si les fusions ont lieu sans qu'il y ait la moindre cession de succursales, la fourniture de services dans les petites localités peut en prendre un coup très rapidement. Les banques vont essayer de trouver d'autres moyens d'offrir ces services, peut-être en suivant l'exemple des Postes, c'est-à-dire en offrant le service à un comptoir à la pharmacie Shopper's Drug Mart, ou quelque chose du genre. Mais il n'y aura plus de service bancaire complet.
En répondant à M. Laframboise, j'ai évoqué l'existence de trois banques parce que si l'on examine la situation actuelle de nos cinq principales banques, il est assez évident que si les fusions sont autorisées, deux d'entre elles devraient fusionner, et c'est ainsi que j'en suis arrivé au chiffre trois. Quant à savoir si c'est le nombre optimal, cela dépend vraiment de la manière dont le Bureau de la concurrence abordera le problème de la concurrence.
Votre dernière observation portait sur la propriété étrangère. C'est vraiment une question épineuse. D'une part, l'intérêt public dicte de contrôler le secteur bancaire parce qu'il est tellement vital pour notre économie. C'est pourquoi nous nous sommes toujours assurés au Canada d'avoir un secteur bancaire très solide.
Il y a place pour du capital étranger, mais le problème qui se pose au Canada, ce n'est pas que nos banques n'ont pas assez de capitaux pour faire concurrence au Canada; c'est plutôt qu'elles n'ont pas assez de capitaux pour être concurrentielles à l'étranger. Donc, au lieu de permettre à un étranger de posséder carrément une banque canadienne, par exemple, peut-être la solution serait-elle qu'une banque canadienne joigne ses forces avec une banque étrangère pour ses activités à l'étranger, sans changer quoi que ce soit au niveau de propriété étrangère au Canada.
º (1630)
M. Nick Discepola: Pour ce qui est de la disponibilité des services, vous avez admis, je crois, qu'à l'heure actuelle, dans les villes, on peut fort bien trouver une banque à un coin de rue, une autre juste en face et une autre agence pas très loin de là. Par conséquent, en cas de fusion, les services offerts resteraient suffisants. Par contre, c'est le sort des communautés rurales qui m'inquiète.
Dans le cas du Québec, j'imagine que le Mouvement des caisses Desjardins se frotterait les mains en cas de fusion parce que c'est lui qui viendrait boucher les trous et pourrait desservir ce créneau du marché beaucoup mieux que ne le font les banques actuellement.
Pensez-vous que cela vaudrait pour toutes les régions rurales au Canada ou est-ce que nous nous faisons de grosses illusions en pensant que la fermeture de certaines agences n'entraînerait pas ipso facto une diminution des niveaux de services dans les localités rurales?
M. Brian Gibson: Si vous voulez bien, je vais plutôt demander à M. Brown de répondre à cette question parce qu'il s'y connaît mieux que moi.
M. Robert Brown: Je ne pense pas que quiconque puisse se targuer d'être un spécialiste en prévisions, mais je dirais que nous commençons à mettre le doigt sur ce qui est à mon avis la clé de la solution.
Nous nous en tenons trop au concept traditionnel de la banque, c'est-à-dire une institution à caractère commercial et international qui a également des particuliers comme clients. Mais que penseriez-vous de l'émergence d'un nouveau modèle composé de trois institutions différentes—des institutions qui fonctionnent sur le plan international, des institutions financières à vocation commerciale et des institutions qui se concentrent sur une clientèle de particuliers?
Je dirais ici que l'exemple que vous donnez du Québec est parfaitement pertinent. Si vous facilitez le processus, si les grosses banques classiques quittent le terrain, il y aura d'autres institutions financières qui viendront les remplacer dans les petites localités. Dans l'Ouest, ce seront peut-être des coopératives de crédit ou des caisses populaires. Les coopératives pourraient fort bien le faire si vous les y aidez.
Je pense donc qu'on parle beaucoup trop des institutions financières telles que nous les connaissons actuellement. Il ne doit pas nécessairement s'agir de cela.
M. Nick Discepola: Je pourrais peut-être donc vous donner un autre devoir. En réponse à M. Wilfert, vous pourriez peut-être nous suggérer comment, d'après votre expérience, nous pourrions venir aider les coopératives.
La présidente: Merci beaucoup. Si vous vouliez bien avoir l'obligeance d'envoyer cette réponse au greffier, nous pourrions la faire parvenir à tous les membres du comité.
M. Valeri sera notre dernier intervenant. Allez-y, je vous prie.
M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Merci, madame la présidente. Je serai très bref.
Tout cela c'est un peu du déjà vu qui nous fait revenir à 1998, quand nous parlions déjà de fusions bancaires. Pourtant, je me sens obligé de faire valoir encore une fois, pour mémoire, qu'à mon avis le gouvernement avait bien dit que les fusions bancaires représentaient une stratégie commerciale valable. Je ne pense donc pas qu'il faille revenir sur cette question et remettre en doute la validité de ce genre de stratégie. Je pense que tout le monde est réceptif à ce genre de stratégie. Il s'agit simplement de respecter certains des critères. Le comité a ainsi pour mandat d'examiner le troisième volet du processus d'examen.
Certes, le BSIF et le Bureau de la concurrence ont leurs mérites—ils sont là pour exhorter à la prudence et favoriser la concurrence. Ces deux critères étant réunis, je pense pouvoir affirmer en toute justice que pour la plupart des gens, c'est à partir de là que les choses deviennent beaucoup moins claires. Quels sont les autres critères? En matière de concurrence, c'est la concentration du marché. En matière de prudence, c'est une question de chiffres.
Comment pouvez-vous nous aider à rendre ce troisième volet plus clair? Que devrions-nous chercher au juste? Comment définir l'intérêt public? Avons-nous besoin d'un troisième volet? Nous en faut-il un ou serait-il préférable de l'oublier? Est-ce que le BSIF et le Bureau de la concurrence ne protègent pas déjà l'intérêt public? Qu'est-ce que le gouvernement aurait absolument dû faire qu'il n'a pas fait? C'est cela qui devrait également interpeller les banques et quiconque a la conviction que les fusions bancaires représentent une stratégie commerciale valable. C'est ce que nous faisons, tout comme eux.
Pour moi, je ne vois vraiment pas quel intérêt nous avons à obliger un secteur somme toute extrêmement important de notre économie à devoir sans cesse penser à des balises mouvantes, à un terrain glissant. Parlons plutôt du rendement de l'investissement car c'est à cela que ces gens devraient penser.
Nous devons donc nous faire une idée plus claire de cela et nous vous demandons votre aide. Peut-être aimeriez-vous parler plus précisément de ce troisième volet du processus d'examen des fusions. Qu'est-ce qui devrait retenir notre attention et ce troisième volet est-il vraiment nécessaire?
º (1635)
M. Robert Brown: J'aurais un tout petit commentaire et si vous voulez un suivi par écrit, cela ne posera pas de problème.
Vous avez raison. Vous étiez ici en 1998 et nous sommes maintenant en 2003. Si vous persistez à n'être pas précis, à ne pas donner de réponse précise, vous serez encore là en 2008, et peut-être Brian et moi aussi pour répondre toujours aux mêmes questions.
Je préconiserais de ne pas s'obnubiler sur le mot «concurrence», ni sur le nombre d'institutions en présence. Voyez plutôt comment arriver à un service satisfaisant à un prix relativement bas et à la solvabilité. Il y a de très nombreuses façons d'arriver à ce résultat sans passer par les six ou sept institutions classiques avec trois composantes.
C'est cela ma position.
M. Tony Valeri: Devons-nous vraiment conserver le volet intérêt public du processus d'examen des fusions ou simplement permettre au BSIF de vérifier si la transaction est prudente et au Bureau de la concurrence de vérifier s'il n'y a pas surconcentration sur certains marchés, et ainsi permettre aux institutions d'arriver à un meilleur prix et à un meilleur service? Que pensez-vous du volet intérêt public? Est-il nécessaire?
M. Robert Brown: Oui, je pense effectivement qu'il y a un volet pour lequel la population vous demande d'être ses représentants. Je pense que nous avons tous tendance à nous concentrer sur les modèles existants au détriment d'une plus grande ouverture qui nous permettrait de songer à des modèles qui n'existent pas mais qui pourraient en fait fort bien devenir la solution.
M. Brian Gibson: Je pense que la politique publique a un rôle extrêmement important à jouer, pour la simple raison que, comme nous le savons tous, les banques ne sont pas un secteur comme les autres. Certes, les banques ont leurs problèmes commerciaux, mais le bon fonctionnement du système bancaire est essentiel au bon fonctionnement de l'économie. C'est pour cette raison qu'à mon avis, ce que vous appelez le troisième volet de l'examen, devrait en fait en être le premier. L'intérêt public doit être l'élément prédominant parce que si une décision venait à mettre notre secteur bancaire dans une mauvaise passe, c'est toute l'économie qui en souffrirait. Et il serait extrêmement périlleux de renverser la vapeur.
Je suis donc intimement convaincu que le travail de politique publique que vous effectuez est l'élément le plus essentiel de la chose. Les autres volets intéressent davantage les décisions à caractère commercial qui peuvent être prises et qui peuvent aussi être critiquées. J'avancerais donc dans ce sens.
Pour gagner du temps, je vais simplement vous donner un exemple d'élément essentiel et vous voudrez peut-être l'examiner sous l'angle de ce qui pourrait vous inquiéter dans le cas d'une fusion. Il s'agit en l'occurrence de la disponibilité du crédit commercial à la PME au Canada.
Si vous songez à la fin des années 90, à l'époque nos banques étaient extrêmement actives sur le marché américain du crédit dans les secteurs de l'énergie et des télécommunications. Nous avons bien entendu tous entendu parler des pertes qu'elles ont subies sur ces prêts. Cela dit, ce n'est pas la fin du monde en soi parce que les banques sont là pour faire de la gestion de risque et pour donner du crédit. Mais au Canada, le problème est qu'en réaction à toutes ces pertes que nos banques ont subies à l'étranger, celles-ci ont commencé à appliquer des critères beaucoup plus rigoureux mais dans toute la gamme des services de crédit. Si vous connaissez des propriétaires de PME, vous savez qu'au cours des deux dernières années, il leur a été quasiment impossible de discuter crédit de façon tant soit peu rationnelle avec un banquier canadien. Et pourtant, ce ne sont pas les PME canadiennes qui ont occasionné les pertes subies par les banques sur leurs prêts.
Voilà donc un exemple de ce qui pourrait vous mobiliser. Si maintenant vous me demandez quels sont les éléments qui devraient faire partie intégrante d'une fusion, je vous répondrai que vous devriez être extrêmement attentifs à ce que la disponibilité du crédit au Canada ne soit pas compromise par des pertes subies à l'étranger.
La présidente: Merci beaucoup.
Au nom des membres du comité, j'aimerais vous remercier de nous avoir donné une autre perspective sur la question. C'est ce que nous cherchons à obtenir au cours de nos audiences.
Je vais lever la séance pendant une minute afin de vous remercier correctement et de donner aux prochains témoins le temps de prendre place.
º (1639)
º (1643)
La présidente: Mesdames et messieurs, nous reprenons nos travaux cet après-midi. Nous examinons l'impact qu'auraient les fusions bancaires sur l'intérêt public en vertu du paragraphe 108(2) du Règlement.
Nous accueillons aujourd'hui M. James Knight, directeur général de la Fédération canadienne des municipalités. Il est accompagné par Susan Welke, analyste en matière de politique de la FCM.
Je vous souhaite la bienvenue. Monsieur Knight, vous pouvez nous exposer vos remarques liminaires. Si j'ai bien compris, vous avez donné des documents aux interprètes; ces documents seront distribués. Vous pouvez donc y aller, comme vous l'avez demandé.
M. James Knight (directeur général, Fédération canadienne des municipalités): Merci beaucoup, madame la présidente.
Je suis toujours heureux de comparaître devant votre comité, car j'y retrouve des amis et collègues de la Fédération canadienne des municipalités, à commencer par M. Bryon Wilfert, député de Oak Ridges, qui était jadis le président de notre organisation. Il y a aussi Mario Laframboise, qui était il n'y a pas si longtemps président de l'Union des municipalités du Québec, et M. Discepola qui était le maire d'une ville près de Montréal. Je me sens toujours comme chez moi et entouré d'amis lorsque je suis ici. Je crois que le fait que nous nous connaissions vous aidera à mieux comprendre la situation à laquelle nous sommes confrontés et à trouver un terrain d'entente qui conviendra à nos membres.
La FCM, qui représente depuis 1901 les intérêts des municipalités à Ottawa, regroupe 1 050 administrations et associations municipales, allant des plus grandes villes canadiennes jusqu'aux petites villes et villages en passant par les collectivités éloignées et du Nord. Chaque municipalité du Yukon, par exemple, est membre de la FCM, ainsi que chaque grande ville du Canada. C'est tout un éventail et l'opinion de ces différentes communautés sur les fusions bancaires va évidemment varier.
Nos grandes villes veulent avoir l'occasion d'offrir des services sur le marché international. Elles estiment que le Canada peut offrir de tels services et se réjouissent à l'idée des fusions, car elles estiment que cela nous rendra plus concurrentiels. Je crois que certaines grandes villes vont ou veulent présenter des mémoires à votre comité et vont soulever cet argument. Mais les petites collectivités ont un point de vue assez différent... Je vais parler en leur nom si elles ne viennent pas. Nous leur avons parlé; je les ai peut-être mal comprises.
Nos petites collectivités se préoccupent de trois questions. D'abord, la saine concurrence dans un secteur. Si deux entreprises dans une communauté fusionnent, celle-ci ne sera desservie que par une seule. Une fusion éliminerait la concurrence et les gens seraient à la merci du directeur de la banque locale. Il ou elle pourrait être quelqu'un de bien, mais pas nécessairement. Les gens craignent une telle situation.
Les gens se préoccupent aussi du fait qu'une banque, dont les transactions internationales sont très rentables, puisse se retirer du marché des petites collectivités. Aujourd'hui, il ne fait aucun doute que les services bancaires sont essentiels pour les particuliers et les entreprises.
La dernière préoccupation des gens vivant en milieu rural est évidemment liée à l'emploi. Lorsqu'une entreprise quitte une petite communauté, il y a un effet d'entraînement, une érosion de la confiance et finalement la survie de l'endroit est mise en cause.
Nous devons combler cet écart efficacement. Nous devons trouver des solutions qui satisfassent les deux côtés. Nous devons appuyer les entreprises canadiennes et saisir les occasions qui s'offrent à nous sur le marché international. Notre niveau et notre qualité de vie, notre produit intérieur brut, en bénéficieront. Mais nous ne devons pas oublier que le Canada, c'est plus que les grandes villes. Il y a d'innombrables petites collectivités qui contribuent à la viabilité de l'économie canadienne.
Les arguments présentés par la FCEI, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, nous ont impressionnés. Ils ont fortement plaidé en faveur d'une saine concurrence. Ils ont argué de façon convaincante qu'il n'y avait déjà pas assez de concurrence au pays.
À notre avis, la FCEI et la FCM appuieraient les fusions bancaires à condition de protéger ces intérêts. Nous avons des suggestions précises à cet effet.
D'abord, nous croyons que le Bureau de la concurrence a un rôle important à jouer. Le Bureau devrait se pencher sur cette question et s'assurer qu'il y aura encore une saine concurrence advenant les fusions bancaires.
º (1645)
Nous devrions également encourager et susciter la création d'institutions financières qui pourraient bien desservir les petites municipalités. Les caisses populaires et des institutions semblables pourraient offrir leurs services à la place des grandes banques dans les petites collectivités.
Les membres de notre conseil d'administration ont formulé des suggestions très précises. Ces suggestions reposent sur la perception, exacte selon moi, que les grandes banques du Canada jouissent d'un traitement fiscal préférentiel et de l'aide des institutions à tous les niveaux, ce qui les rend très profitables et compétitives. Cela étant, il serait raisonnable de leur imposer des conditions pour faire en sorte qu'elles offrent leurs services partout au pays. Cela relève d'un contrat social. Ces banques figurant parmi nos institutions les plus lucratives, nous sommes en droit de nous attendre à ce qu'elles offrent leurs services partout au pays.
Nous devons absolument veiller à ce que les populations rurales et nordiques continuent à avoir accès à des services bancaires concurrentiels lorsque des succursales sont fermées. Nous pourrions définir une norme minimale de services pour les marchés traditionnels desservis à l'heure actuelle et exiger le maintien de ces services. Nous pourrions concevoir des programmes qui aideraient les municipalités à mettre sur pied leurs propres services bancaires s'il n'en existe pas, sous la forme, par exemple, de caisses populaires. Nous pourrions prendre les devants pour encourager la création de telles institutions. Nous pourrions former les consommateurs vivant dans des villages ou les localités éloignées pour les renseigner sur d'autres types de services bancaires. Nous pourrions également offrir des activités de sensibilisation et de formation aux clients au sujet des autres formes de services bancaires et de la façon d'y avoir accès à distance. Nous souhaitons qu'on encourage les banques à se doter de gestionnaires itinérants qui pourraient promouvoir les intérêts des milieux d'affaires des petites localités. Je pense également qu'il sera important de suivre l'évolution de la prestation des services bancaires dans les collectivités rurales et éloignées pour veiller à ce que leur érosion ne compromette pas la survie de ces collectivités.
Madame la présidente, je pense que nous pouvons atteindre ces deux buts. Nous pouvons, sans porter atteinte aux intérêts de ces institutions qui estiment que les fusions les rendront plus compétitives sur la scène internationale, protéger la viabilité des petites collectivités et leur accès à des services financiers essentiels.
Voilà les grandes lignes de notre position. Nous répondrons avec plaisir à vos questions.
º (1650)
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Knight
Avant d'entamer le premier tour de questions, j'aimerais commenter ce que vous avez dit. Vous avez parlé des pertes d'emplois dans les petites localités, alors que personnellement, quand on parle de fusions de grandes banques, je pense davantage au centre-ville de Toronto et aux répercussions de telles fusions sur des populations urbaines. Les petites municipalités ne seraient pas les seules à en ressentir les effets.
Monsieur Harris, vous avez la parole.
M. Richard Harris: Merci, madame la présidente.
Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Knight et madame Welke. Je vous remercie de votre exposé. Ma circonscription de Prince George—Bulkley Valley se compose à toutes fins utiles d'un centre urbain, celui de Prince George, puis, à l'est, de Valemount et de McBride et, à l'ouest, de Burns Lake et Houston. Je crois qu'il y a quelque 11 petites localités dans ma circonscription, qui jalonnent toutes la même route.
J'ai visité les quatre coins de ma circonscription en janvier en prévision de ces audiences. Même si l'enquête que j'ai faite n'était pas une enquête scientifique, je me suis promenée sur la rue principale de toutes ces localités et j'ai demandé aux gens: Qu'est-ce qui importe le plus pour vous, dans votre localité, la concurrence entre les banques ou la concurrence entre les épiceries? La très grande majorité des gens ont répondu: Nous voulons plus d'épiceries et plus de concurrence dans le secteur alimentaire.
Prenons, par exemple, la localité de Houston, en Colombie-Britannique, qui a une coopérative de crédit et un supermarché. J'ai demandé à 20 ou 30 résidents—il n'y a que 1 500 habitants en tout, alors cet échantillon est assez représentatif—si vous aviez le choix, préféreriez-vous avoir une autre banque ou un autre supermarché? Les gens ont répondu, sans hésiter, qu'ils voudraient un autre supermarché.
Même si je comprends qu'on s'inquiète de ce que les banques rationalisent leurs succursales dans les collectivités rurales, c'est là une préoccupation légitime, j'ai trouvé intéressant d'entendre les réactions des résidents des collectivités rurales de ma circonscription quand je leur ai demandé si ce qui était le plus important pour eux c'était d'avoir une autre banque ou un autre supermarché qui aurait peut-être de meilleurs prix. Les craintes sont réelles, mais elles ne sont peut-être pas si importantes que cela quand on a à faire ce choix-là.
Je n'ai pas vraiment de questions. Je voulais simplement vous faire part de cela et voir si vous aviez quelque chose à dire en réponse.
La présidente: Monsieur Knight.
M. James Knight: Je répondrai par un commentaire très simple: La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, avec laquelle nous collaborons et échangeons beaucoup d'information, est très bien placée pour savoir ce qu'en pensent les propriétaires de petites entreprises. Elle a un très grand nombre de membres qu'elle est constamment en train de sonder.
C'est là une question qui préoccupe depuis longtemps les propriétaires de petites entreprises à tout le moins, et ils ont répondu majoritairement. Cette réponse majoritaire a été certainement confirmée par certains maires avec qui nous nous sommes entretenus.
La situation varie sans doute d'une collectivité à l'autre, et il se peut bien que telle petite localité de votre circonscription qui a une coopérative de crédit soit très bien servie et que cela explique en fait la réaction des résidents. Nous avons entendu un autre son de cloche dans bien d'autres collectivités.
º (1655)
M. Richard Harris: Finalement, j'ai une question après tout. Vous avez parlé de la FCEI, et je reconnais effectivement que c'est là une préoccupation des petites entreprises. J'y ai réfléchi hier après que nous ayons entendu la FCEI. Le contexte est tel de nos jours que les banques appliquent une formule de gestion du risque qui est assez rigoureuse, si vous voulez, et qui, semble-t-il, est née aux États-Unis et a été adoptée par nos banques canadiennes.
Étant donné que, par exemple, il pourrait y avoir dans la même localité une succursale de chacune de nos cinq grandes banques, qui utilisent toutes la même formule, et à supposer que trois, quatre ou cinq autres banques viennent s'installer dans la localité et trouvent avantageux, elles aussi, d'adopter la même formule, je ne suis pas sûr que le fait d'ajouter cinq ou six banques qui appliqueraient la même formule apporterait quoi que ce soit à ces petites et moyennes entreprises pour ce qui est de leur offrir de nouvelles sources de financement. Car elles utiliseraient toutes la même formule d'évaluation, n'est-ce pas? Tout dépendrait de la cote de solvabilité et de la viabilité de l'entreprise ainsi que de sa capacité à rembourser le prêt.
Est-ce que ce serait nécessairement mieux d'avoir plus de banques ou plus de concurrence, ou la situation serait-elle nécessairement pire s'il y avait des fusions et que la formule demeurait la même?
M. James Knight: Même si je suis d'accord avec vous pour dire qu'il y a beaucoup de similitudes à l'échelle du secteur, il existe tout de même des différences et des possibilités différentes à différents moments. Les différentes banques offrent en fait des produits différents à des moments différents selon la nature de leurs obligations. Il peut arriver qu'une banque décide de ne pas faire de prêts immobiliers. J'ai moi-même eu connaissance de cela, en tant que prêteur, dans le secteur commercial.
Les institutions bancaires offrent effectivement des services différents et des possibilités différentes à des moments différents. Je crois qu'il est important d'avoir ainsi le choix. Même si une banque décide que son portefeuille immobilier commercial est trop plein et qu'elle ne veut plus consentir de prêts hypothécaires commerciaux, peut-être qu'une autre banque ne se trouve pas tout à fait dans la même situation et qu'il lui reste encore de la place dans son portefeuille.
Je suppose que si elles utilisaient toutes exactement la même formule de gestion du risque et qu'elles l'appliquaient toutes de la même façon, elles auraient toutes le même niveau de rentabilité. Ce n'est bien sûr pas le cas. Certaines réussissent mieux que d'autres.
[Français]
La présidente: Monsieur Laframboise, commencez, s'il vous plaît.
M. Mario Laframboise: Merci beaucoup, madame la présidente.
D'abord, je vous remercie beaucoup de votre présence devant ce comité. C'est important que le monde municipal, par le biais de la Fédération canadienne des municipalités, se fasse représenter dans un dossier aussi important que celui de la fusion des banques. Vous avez ciblé deux points: la compétitivité et l'emploi. Les villes sont des citoyens corporatifs très importants dans ce pays, autant dans la création d'emplois que dans les services rendus. Vous savez de quoi vous parlez quand vous dites qu'il faut être compétitif et qu'il faut rendre des services.
Le problème des banques est simple. On veut créer des banques virtuelles. L'objectif, finalement, est de grossir et de grossir, et si jamais un jour il ne reste pratiquement plus de banques, elles n'offriront plus que le service virtuel. Donc, évidemment, il n'y aura plus d'employés, plus de services rendus à la clientèle sur les lieux, plus de taxes municipales à payer--c'est déjà commencé--, plus de succursales, plus de dépenses. C'est ça, l'objectif. L'objectif est de contenter les actionnaires. Voilà le simple problème des fusions des banques. On veut grossir, on veut grossir, on veut s'ouvrir à l'international, faire des prêts à des multinationales, et finalement on ne prête plus sur le terrain aux petites et moyennes entreprises.
Je pense que les villes se doivent de dire au gouvernement: «Arrêtez». Est-ce qu'on va faire disparaître les services de chacune des villes? Et un jour, est-ce qu'on va carrément faire disparaître des municipalités? Voilà le problème qu'on a. À ce que je sache, on fait encore de l'argent dans le milieu bancaire au Canada et il y a encore des possibilités. Des témoins nous ont dit, tout à l'heure, que si les banques veulent véritablement faire face au marché international, elles peuvent former des consortiums et créer des entités pour être capables de faire des prêts sur les marchés étrangers et grossir leurs capitaux.
Je pense que vous avez raison de venir nous dire de faire attention quand vient le temps de discuter de cela, parce que si la compétitivité cesse, cela veut dire qu'il n'y aura plus de services--c'est ce qui va arriver--ni d'emplois dans les municipalités. C'est un peu le message que vous nous laissez, et j'aimerais juste que vous commentiez ce que je dis, monsieur Knight. Merci.
» (1700)
[Traduction]
M. James Knight: Merci beaucoup pour cette intervention.
Je ne suis pas sûr que l'analyse que nous avons faite nous permette de nous prononcer sur les banques électroniques et virtuelles. Je ne pense pas que nous puissions vous dire si cette tendance s'accentuerait ou non à la suite des fusions bancaires. Il me semble que, dans une certaine mesure, c'est là un autre sujet.
Pour ce qui est des municipalités que nous avons consultées, je dois vous dire qu'elles sont pour, surtout celles où les banques ont leur siège. Elles nous ont fait savoir qu'elles sont pour les fusions parce que cela les aidera à se positionner comme des centres financiers internationaux. Certaines de nos villes ont de ces aspirations.
Le problème de la concurrence est particulièrement aigu dans les petites localités qui pourraient se retrouver avec une seule succursale. Je crois que c'est là-dessus qu'il faut se concentrer. Nous devons encourager la mise en place de mécanismes permettant de diversifier les modes de prestation des services. Nous devons encourager les coopératives de crédit, par exemple, ou d'autres banques à s'installer dans les marchés qui seront privés des services d'une des banques fusionnées.
Nous le constatons d'après nos sondages et d'après ce que nous disent nos membres. Nous ne sommes pas très inquiets pour les grands centres. Ils y voient un avantage. C'est plutôt sur la préservation de la concurrence dans les petites localités qu'il faut mettre l'accent. Je crois qu'il faudra pour cela des mesures spéciales dans la loi, ou dans le mécanisme qui sera adopté, pour autoriser les fusions, si tant est qu'il y a des fusions.
[Français]
M. Mario Laframboise: À cause des concentrations massives de population, par comparaison, on qualifie maintenant de plus en plus de petites des localités passablement importantes. Ces petites localités dont on parle sont quelquefois des villes situées dans des régions relativement éloignées, mais qui ont bien souvent un potentiel très important au point de vue humain ou en termes de population. Il peut aussi s'agir de régions administratives assez importantes. Selon moi, il n'est pas juste de ne prendre en considération que les trois grandes villes du Canada, sinon les six, sept ou dix grandes villes du pays. Les localités que vous qualifiez de plus petites sont quand même d'une importance certaine.
[Traduction]
M. James Knight: Les villes canadiennes de taille moyenne peuvent généralement compter sur un certain nombre d'institutions financières. Dans les petites villes et les localités isolées, qui ont, mettons, une population de 10 000 à 20 000 habitants—qui ont, comme vous dites, une certaine taille—, les banques auront généralement plus qu'un type de service à offrir aux consommateurs. Étant moi-même d'une petite localité, je sais que cette localité est très bien servie par plusieurs institutions, des institutions nationales et, dans un cas, une institution internationale.
D'après ce que nous ont dit nos membres, les fusions ne semblent pas être un sujet de préoccupation dans ces villes de taille moyenne. Nous n'avons rien entendu à ce sujet. Nous avons entendu parler de préoccupations dans les petites villes et les localités isolées dont la population va peut-être de quelques centaines d'habitants à 2 000 ou 3 000. Voilà ce qui nous inquiète. Il est absolument essentiel à notre avis de préserver la concurrence, voire de préserver le service dans les localités de cette taille.
» (1705)
La présidente: Merci.
La parole est maintenant à M. Wilfert, suivi de M. Cullen et de M. Discepola.
M. Bryon Wilfert: Merci, madame la présidente. Je suis ravi de revoir M. Knight.
Si vous me le permettez, Jim, j'ai dit aux derniers témoins qui ont comparu que cette question me rappelle énormément le débat que nous avons eu avec la FCM au début des années 90 au sujet de la fermeture des bureaux de poste ruraux.
Je suis tout à fait d'accord avec vos commentaires concernant les collectivités rurales et éloignées. J'ose dire que pour les villes et les villages, il s'agit d'une question de concurrence. Dans les grandes villes, ce ne sera pas un problème. Dans le Grand Toronto, il s'agit du deuxième employeur. L'idée de la consolidation est très importante pour des villes comme Toronto qui pensent qu'elle leur permettrait d'accéder à la scène internationale.
Comment assurer la concurrence dans les collectivités rurales après l'élimination des succursales? N'oubliez pas que les bureaux de poste qui ont fermé n'étaient pas que de simples bureaux de poste, c'étaient des centres d'activité sociale. C'est le bureau de poste qui faisait de la communauté une véritable communauté. Sa présence était importante. Lorsque les bureaux de poste du gouvernement du Canada ont disparu, cela a eu un impact.
Nous avons parlé de nouveaux venus de deuxième niveau ou de tierces parties, ce qui a été un problème. Il pourrait y avoir un vide. Je ne sais pas ce que la FCM a fait à cet égard ni quelles mesures vous prenez pour en faire la promotion. Il est clair que pour les petites collectivités où les entreprises dépendent du contact personnel, le fait de perdre cet accès pose problème. Nous entendons parler de personnes dont les chèques sont déposés et qui avaient l'habitude de faire affaire avec le bureau de poste et qui doivent maintenant aller plus loin. Il y a la question des opérations bancaires électroniques, etc.
Le comité doit déterminer de quelle manière protéger l'intérêt du public dans le cas où les banques fusionneraient et mesurer l'incidence sur les petites collectivités. La question que je voudrais vous poser concerne les dispositions spéciales que le gouvernement pourrait prendre soit en modifiant la loi ou ses politiques dans l'intérêt des collectivités rurales ou éloignées. Je constate le problème que pose l'absence de concurrence dans l'industrie pétrolière au Canada atlantique. Je crains que nous nous retrouvions dans une situation semblable, surtout dans les collectivités du Nord et des régions rurales du Nord et des régions rurales du Canada où j'ai vécu et que je connais bien. À mon avis, et d'après ce que vous avez dit, il y a une véritable dichotomie entre les régions urbaines et rurales.
Avez-vous des commentaires à faire sur les recommandations, même législatives, que le comité pourrait formuler pour répondre aux préoccupations tout à fait légitimes de ces collectivités?
M. James Knight: Merci beaucoup pour cette excellente question.
Je suis heureux d'avoir l'occasion de répéter notre idée et je réussirai peut-être à la rendre plus précise. Je crois avoir dit que les banques jouissent d'une situation tout à fait privilégiée parmi les entreprises canadiennes. Elles bénéficient d'un régime fiscal et réglementaire favorable qui leur permet d'être extrêmement rentables et c'est une bonne chose.
Nous acceptons leur désir de fusionner, mais nous devons reconnaître qu'il y aura des conséquences pour le marché intérieur et nous devrions exiger que ces institutions respectent leur contrat social et leurs obligations sociales en continuant à répondre aux besoins.
Une banque qui était présente sur les marchés traditionnels devrait être obligée de continuer à servir ce marché. Je songe au cas où deux institutions fusionneraient. J'ai dit que ces banques pourraient ne plus être intéressées à servir ces collectivités parce que le marché international est plus concurrentiel. Nous estimons qu'elles ont une obligation sociale et qu'elles devraient être obligées de servir leur marché traditionnel.
Je ne sais pas au juste comment cela se traduirait dans une loi; il faudrait que vous demandiez au ministère de la Justice de se charger de cette tâche.
Nous pensons également qu'il est tout à fait possible de stimuler d'autres genres d'institutions bancaires. Les coopératives de crédit locales, que le député de la région de Prince George a mentionnées, sont des institutions viables, très sensibles aux besoins communautaires et qui sont là pour rester. Il nous en faudrait davantage au Canada.
Il n'y a pas si longtemps, chaque petite ville avait trois ou quatre succursales bancaires. Ça ne sera plus vrai à l'avenir, quoi qu'il arrive. C'est pourquoi il faudrait examiner la possibilité de stimuler la création de coopératives de crédit par tous les moyens possibles, que ce soit par le biais d'un cadre fiscal, d'un cadre d'éducation ou par un échange de pratiques exemplaires parmi les différentes régions du pays.
» (1710)
M. Bryon Wilfert: J'aurais deux petites questions à poser, madame la présidente.
Est-ce que la FCM a envisagé la possibilité de créer un groupe de travail composé de membres de son caucus des régions éloignées rurales, pour formuler des recommandations précises à l'égard des répercussions sur les collectivités, comme elle l'a fait au début des années 90 lors de la fermeture des bureaux de poste?
M. James Knight: Pas pour le moment.
M. Bryon Wilfert: Très bien.
Deuxièmement, en ce qui concerne l'impact sur les collectivités rurales et éloignées, l'ennui c'est que ces collectivités ont déjà un problème qui existe même dans les centres urbains. Il s'agit du vide créé par l'arrivée de banques de second niveau ou de tierces parties. Nous avons déjà parlé de nouveaux arrivés au Canada. Certaines banques sont restées, d'autres se sont retirées. Mais certaines d'entre elles étaient très spécialisées et n'offraient pas tous les services dont ces collectivités auraient évidemment besoin.
Il me semble que c'est une question que le caucus des régions éloignées rurales de la FCM pourrait examiner afin de trouver les moyens d'encourager cela. Y a-t-il des incitatifs qui pourraient aider ces collectivités? Que pouvons-nous faire? On a évidemment l'impression—le pays étant urbanisé à 80 p. 100—qu'il y a une perte.
Lorsque vous avez parlé d'un contrat social, j'ai pensé à Jean-Jacques Rousseau et à son contrat social de 1756 où, je crois, il est question de ceux qui gouvernent et de ceux qui sont gouvernés. Je voudrais que les banques canadiennes soient très fortes mais, en même temps, en quoi devrait consister, d'après vous, ce contrat social, semblable à celui dont parlait Rousseau? À quoi ressemblerait ce saut dans l'inconnu?
D'après vous, que devrait faire le secteur bancaire pour atténuer certaines des préoccupations exprimées par vos membres, surtout en ce qui concerne les services?
M. James Knight: Je pense vous avoir déjà donné un aperçu des commentaires formulés par notre groupe rural, mais je vais vous présenter les recommandations précises.
Les banques devraient être obligées de continuer à fournir un accès raisonnable à des services bancaires concurrentiels là où elles fournissent à l'heure actuelle de tels services. Ce n'est pas rétroactif. Il ne s'agit pas de récupérer le terrain perdu mais de déterminer ce qui se passerait après une fusion bancaire; quelles seraient les exigences? Nous n'avons pas essayé de récupérer ce qui a déjà été perdu. Il s'agit de recommandations pour l'avenir.
Il faudrait adopter une norme minimale en matière de services pour les régions rurales et nordiques. Il faudrait mettre sur pied un programme—et je mentionne des options—pour aider les collectivités à établir de nouveaux services bancaires comme des coopératives de crédit. Il y a là une occasion en or.
Il faudrait sensibiliser les clients au télépaiement et à la banque à domicile. Nous encourageons les banques à fournir cette formation.
Encouragez les banques à faire preuve de créativité dans la prestation de leurs services. Certaines ont tenté avec succès l'expérience de gestionnaires itinérants qui se déplacent d'une collectivité à l'autre pour répondre aux besoins des petites entreprises. C'est un exemple à suivre.
Il faudrait suivre l'évolution de la situation, car l'activité bancaire est devenue à toutes fins utiles un service essentiel dans ce pays. Il n'y a pas d'affaires sans service bancaire. Vous ne pouvez pas fonctionner en tant qu'individu sans service bancaire. C'est un service essentiel et nous devons surveiller la prestation de ce service afin d'apporter les mesures correctives nécessaires à l'avenir.
» (1715)
La présidente: Merci.
Votre temps est écoulé, monsieur Wilfert.
C'est maintenant le tour de M. Cullen.
M. Bryon Wilfert: Madame la présidente, je pense que ce serait utile d'obtenir ces commentaires par écrit.
M. James Knight: Nous vous les laisserons.
La présidente: Il y aura une transcription de la séance d'aujourd'hui.
M. Bryon Wilfert: Mais peut-être que votre comité voudra ajouter quelque chose.
M. James Knight: Oui, merci, Bryon.
La présidente: À vous, monsieur Cullen.
M. Roy Cullen: Merci, madame la présidente, monsieur Knight et madame Welke.
Je pense que le défi pour le comité consiste à ne pas perdre de vue son ordre de renvoi—à savoir, formuler une liste de critères qui nous permettront de déterminer si les fusions bancaires servent l'intérêt public. Ainsi, lorsque des témoins viennent nous dire que les fusions sont une bonne chose ou une mauvaise chose, je sais que pour ma part—je ne peux pas parler au nom de mes collègues—j'essaie de traduire cela en critère pour déterminer l'intérêt public. Alors, lorsque les témoins eux-mêmes le font, cela me facilite un peu les choses. Ce n'est pas que je souffre de paresse intellectuelle, mais je pense que c'est utile.
J'aimerais poser une question hypothétique afin de mieux comprendre l'intérêt public. Nous en avons parlé lorsqu'il a été question des régions rurales et urbaines. On dit souvent qu'il n'est pas aussi important d'avoir de nombreuses succursales dans les grandes villes puisque les gens ont recours aux banques virtuelles. J'habite dans une grande ville et je ne me rends jamais dans ma succursale. J'utilise les guichets automatiques et l'Internet. Vous y avez fait allusion en quelque sorte en disant que c'est plus important pour les régions éloignées et rurales.
Supposons que deux grandes banques canadiennes proposent de fusionner et qu'elles disent que pour ce qui est des succursales urbaines...supposons que leur projet est présenté d'une manière raisonnable; je ne veux pas m'engager dans ce débat. Supposons donc qu'elles proposent quelque chose de différent et de raisonnable pour les centres urbains et les régions rurales en disant: «Pour ce qui est des succursales urbaines dont nous serons obligés de nous départir, nous les abandonnerons tout simplement; mais pour ce qui est des régions rurales et éloignées, nous avons conclu une entente de principe avec une banque de deuxième niveau qui va les acheter».
Pensez-vous que cette solution répondrait au critère de l'intérêt public?
M. James Knight: Il faudrait examiner attentivement l'entente, mais si c'était réellement le cas, je ne vois pas pourquoi nous nous inquiéterions. Ce que nous voulons, c'est que ce service essentiel soit maintenu et s'il peut être fourni autrement par une autre institution, je pense que cela répond au critère.
M. Roy Cullen: Pour ce qui est des grands centres urbains, je pense que vous laissez entendre que ce ne serait pas grave que certaines succursales ferment. Vous ai-je bien compris?
M. James Knight: Je pense que M. Laframboise a identifié un groupe moyen. Il y aura des zones floues, mais de façon générale, nous ne nous inquiétons pas des changements du secteur bancaire dans les grandes villes. Personne ne nous en a parlé, personne n'a exprimé de préoccupation. Tout ce que nous disent les grandes villes, c'est qu'elles y voient une possibilité économique pour le Canada. Elles veulent s'assurer que nous en profiterons tout en protégeant les intérêts des collectivités canadiennes, essentiellement les plus petites et les collectivités rurales.
M. Roy Cullen: Merci.
La présidente: Très bien. C'est maintenant le tour de M. Discepola.
M. Nick Discepola: J'aimerais aborder la question sous deux angles. Le premier est la nécessité d'assurer la concurrence. Je pense que si nous pouvions trouver le moyen d'encourager la concurrence, nous aurions réglé un très grand problème.
Dans votre exposé, vous avez fait allusion au fait que vous faites confiance au Bureau de la concurrence pour s'occuper de cette question. Je ne voudrais pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit. Vous ai-je bien compris ou avez-vous encore des réserves?
» (1720)
M. James Knight: J'ai seulement dit que c'est une question que cet organisme devrait examiner. Je ne me suis pas prononcé sur la qualité de son travail. Je n'y connais rien. Mais, puisqu'un tel organisme existe au sein de l'appareil fédéral, il me semble qu'il y a là une belle occasion d'exercer ces talents.
M. Nick Discepola: Après avoir entendu le témoignage du Bureau de la concurrence au début de ces audiences, ce que je crains, c'est qu'il soit obligé d'examiner les projets de fusion dans l'ordre qu'il les recevra. Ainsi, si la banque A et la banque B sont les premières à proposer une fusion, le Bureau devra examiner ce projet à fond avant d'envisager une deuxième fusion.
Pensez-vous qu'il faudrait permettre aux banques de présenter tous leurs projets de fusion pour que le Bureau de la concurrence puisse ensuite déterminer ce qui sert mieux l'intérêt public?
Devrions-nous recommander de restreindre le nombre de fusions qui pourraient être autorisées? Il y a cinq grandes banques. Devrait-il y en avoir trois au maximum?
Je vais vous donner l'occasion de répondre et ensuite je vous poserai une autre question.
M. James Knight: Le Bureau de la concurrence pourrait peut-être faire des recherches et analyser les politiques avant même d'examiner des projets précis. Il me semble que l'examen de divers scénarios doit permettre de déterminer assez clairement les conséquences, et cela pourrait peut-être se faire d'avance.
J'aurais dû mentionner plus tôt que nous ne serions pas en faveur de fusions à répétition qui auraient pour résultat qu'il ne resterait plus qu'une seule banque. Il y a de nombreuses options. Deux grandes banques pourraient fusionner. Elles pourraient toutes fusionner. Il pourrait ensuite y avoir une fusion de deux autres banques. Mais le nombre de banques qui resteraient est une question importante.
Nous supposons qu'il y aurait probablement deux fusions successives, c'est-à-dire le scénario précédent. Je pense qu'il faudrait être très prudent et déterminer combien de fusions seraient acceptables. Je pense que le Bureau de la concurrence pourrait fournir à cet égard des conseils tout à fait stratégiques.
M. Nick Discepola: Mais la question de la concurrence dans les communautés rurales est une autre paire de manches. Vous nous avez donné de très bonnes idées sur la façon d'accroître la concurrence par l'entremise des coopératives de crédit, par exemple, en les aidant, etc.
Je ne m'inquiéterais pas trop des fermetures de succursales, même dans les régions rurales. Je ne crois pas qu'il existe beaucoup de régions rurales qui soient desservies par plus d'une ou de deux grandes banques. Si c'était le cas, du moment qu'on garantirait la présence d'une d'entre elles, je crois que ce serait acceptable.
Cela ne répond pas à votre inquiétude concernant la concurrence au niveau local, comme l'a mentionné M. Harris. Je ne crois pas qu'il soit possible d'encourager cette concurrence-là.
L'une de vos propositions m'intéresse plus particulièrement. Je voudrais que vous nous l'expliquiez plus en détail. Vous pourriez ainsi répondre à la question plus urgente, celle de garantir un certain niveau de services même dans les communautés les plus éloignées. Votre idée d'un centre offrant un minimum de services m'intéresse.
De quels services s'agirait-il? Seraient-ils limités à l'encaissement de chèques, aux dépôts et au paiement de factures? Avez-vous des suggestions à faire concernant ce minimum de services pour un compte minimal accessible à tous les Canadiens, peu importe leur situation financière?
En réponse à la question de M. Cullen, vous avez dit que vous ne vous inquiétiez pas du fournisseur du service, du moment que le service est offert. Je me demande si les bureaux de poste ruraux, par exemple, pourraient agir en tant que concessionnaires des grandes banques en recevant les dépôts et en encaissant des chèques. Ils ont déjà de l'argent et pourraient s'en charger, par exemple. Avez-vous des idées là-dessus?
Je m'intéresse plutôt à la question du minimum de services et du genre de services qui devraient absolument être offerts dans les communautés rurales.
M. James Knight: Je crois que cela dépendra de l'emplacement de la communauté. Pour une communauté dans le Grand Nord, où il n'existe aucune autre option dans les environs, il faudrait offrir un niveau de services adéquat, tandis que dans une petite communauté située à 20 ou 30 milles du prochain village, on pourrait se contenter de services pour répondre aux besoins des particuliers.
» (1725)
M. Nick Discepola: Qu'en est-il de votre autre suggestion, celle d'avoir des gestionnaires itinérants? Disons que j'ai un prêt pour petite entreprise de 10 000 $ ou 15 000 $ pour améliorer une communauté dans le Nord, pourquoi le gestionnaire ne pourrait-il pas s'y rendre un jour, examiner toutes les demandes, et prendre sa décision une fois de retour dans un plus grand centre?
M. James Knight: C'est une très bonne idée, à notre avis, mais il y a une différence entre les services aux petites entreprises et les services aux particuliers, qui sont essentiels et doivent être fournis quotidiennement. Les contacts d'affaires entre les entreprises et les banques sont moins fréquents, et on pourrait s'attendre à ce que les gens se déplacent pour ce genre de service ou même que la banque se rende dans la communauté de temps à autre.
M. Nick Discepola: D'ailleurs, c'est ce qui est arrivé dans ma communauté. Il y a un hôpital pour anciens combattants et la banque s'y rendait tous les jeudis pour encaisser les chèques des anciens combattants. Alors elles peuvent faire ce genre de choses.
Alors je vous remercie de votre contribution.
M. James Knight: Merci.
La présidente: Je voudrais vous remercier tous les deux d'être venus aujourd'hui. C'était une façon d'entendre les points de vue des communautés urbaines, rurales et du Nord, de la part d'une source qui les côtoie tout le temps. Alors je vous remercie énormément d'être venus aujourd'hui nous faire part de votre point de vue.
M. James Knight: Nous vous remercions de nous avoir invités.
La présidente: Merci, mesdames et messieurs. La séance est levée.