FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 22 octobre 2003
¹ | 1535 |
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)) |
M. David Dodge (gouverneur, Banque du Canada) |
¹ | 1540 |
La présidente |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne) |
M. David Dodge |
¹ | 1545 |
M. Monte Solberg |
M. David Dodge |
M. Monte Solberg |
M. David Dodge |
La présidente |
M. Monte Solberg |
¹ | 1550 |
La présidente |
M. Monte Solberg |
M. David Dodge |
La présidente |
M. Monte Solberg |
La présidente |
M. Monte Solberg |
La présidente |
M. Monte Solberg |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ) |
M. David Dodge |
¹ | 1555 |
M. Pierre Paquette |
M. Paul Jenkins (premier sous-gouverneur, Banque du Canada) |
º | 1600 |
M. Pierre Paquette |
M. Paul Jenkins |
M. Pierre Paquette |
M. Paul Jenkins |
M. Pierre Paquette |
La présidente |
M. Pierre Paquette |
La présidente |
La présidente |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
M. David Dodge |
º | 1635 |
M. Paul Jenkins |
La présidente |
M. Roy Cullen |
M. David Dodge |
º | 1640 |
La présidente |
M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.) |
M. David Dodge |
M. Tony Valeri |
M. David Dodge |
M. Tony Valeri |
M. David Dodge |
º | 1645 |
La présidente |
M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges) |
M. David Dodge |
M. Nick Discepola |
M. David Dodge |
M. Nick Discepola |
La présidente |
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC) |
º | 1650 |
M. David Dodge |
M. Scott Brison |
M. David Dodge |
M. Scott Brison |
M. David Dodge |
M. Scott Brison |
M. David Dodge |
º | 1655 |
M. Scott Brison |
M. David Dodge |
M. Scott Brison |
» | 1700 |
La présidente |
M. David Dodge |
La présidente |
M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.) |
M. David Dodge |
M. Paul Jenkins |
M. Shawn Murphy |
M. David Dodge |
» | 1705 |
M. Shawn Murphy |
M. David Dodge |
La présidente |
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.) |
M. David Dodge |
M. Paul Jenkins |
» | 1710 |
M. Walt Lastewka |
M. Paul Jenkins |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. David Dodge |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. David Dodge |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
La présidente |
» | 1715 |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. David Dodge |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. David Dodge |
M. Paul Jenkins |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Bryon Wilfert |
La présidente |
M. Bryon Wilfert |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
M. David Dodge |
» | 1720 |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
M. Bryon Wilfert |
M. David Dodge |
» | 1725 |
M. Bryon Wilfert |
M. David Dodge |
M. Bryon Wilfert |
La présidente |
L'hon. Gilbert Normand (Bellechasse—Etchemins—Montmagny—L'Islet, Lib.) |
M. David Dodge |
» | 1730 |
M. Paul Jenkins |
L'hon. Gilbert Normand |
M. Paul Jenkins |
La présidente |
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Alliance canadienne) |
M. David Dodge |
» | 1735 |
La présidente |
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ) |
M. David Dodge |
» | 1740 |
M. Yvan Loubier |
La présidente |
CANADA
Comité permanent des finances |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 22 octobre 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1535)
[Traduction]
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): C'est l'étude du Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada qui figure à l'ordre du jour. Nous accueillons MM. David Dodge et Paul Jenkins. Merci beaucoup d'être là. Comme toujours, nous avons hâte d'entendre vos observations. Ensuite, je suis persuadée que les membres du comité auront des questions à vous poser.
Nous serons peut-être interrompus à un moment donné. Si c'est le cas, nous reviendrons terminer ce que nous avons à terminer ici, car c'est important pour le Canada.
Je vous en prie, monsieur Dodge. Vous avez la parole.
M. David Dodge (gouverneur, Banque du Canada): Merci beaucoup, madame la présidente.
Paul et moi apprécions la possibilité que nous avons de vous rencontrer après la publication de notre Rapport sur la politique monétaire. Comme vous le savez, l'édition d'octobre de notre rapport a paru ce matin. Il porte sur les tendances économiques et financières dans l'optique de notre stratégie de maîtrise de l'inflation au Canada.
[Français]
La dernière fois que Paul et moi nous sommes adressés à votre comité, c'était après la publication du rapport d'avril. À ce moment-là, l'inflation était bien au-dessus de la cible de 2 p. 100 que vise la Banque du Canada et les attentes d'inflation à court terme s'étaient accentuées. Même si la hausse de l'inflation était due à des facteurs spéciaux, certains indices donnaient à penser que les pressions sur les prix se généralisaient sous l'effet de la forte demande intérieure.
Depuis avril, l'économie canadienne a subi plusieurs chocs inhabituels, dont l'épidémie de SRAS, la découverte d'un cas de maladie de la vache folle, la panne générale d'électricité en Ontario et les graves feux de forêt en Colombie-Britannique. À cause de ces facteurs et d'autres aussi, la croissance a été plus lente que prévu. La Banque du Canada estime maintenant que la marge de capacités excédentaires au sein de l'économie est plus élevée qu'elle ne s'y attendait en avril.
Le taux d'accroissement de l'IPC global et celui de l'indice de référence ont reculé plus vite et davantage que prévu. De plus, les indicateurs des attentes relatives à l'inflation ont presque tous fléchi depuis avril. La chute de l'inflation mesurée par l'indice de référence tient à plusieurs imprévus: premièrement, la faiblesse généralisée des prix de certains produits comme les automobiles et les vêtements; deuxièmement, la dépréciation marquée de la devise américaine; troisièmement, les rabais importants consentis par le secteur touristique à la suite de la crise du SRAS. De plus, les pressions provoquées par la majoration des primes d'assurance automobile se sont atténuées un peu plus rapidement qu'on ne l'anticipait.
La conjoncture économique mondiale à court terme s'est embellie depuis avril, et l'incertitude géopolitique a continué de diminuer. Aux États-Unis, les perspectives de croissance se sont beaucoup améliorées. Selon de récentes données, la reprise attendue dans ce pays s'est engagée plus tôt qu'on ne l'avait d'abord escompté. L'activité demeure atone en Europe, mais en Asie, l'évolution semble encourageante, grâce à la vive progression en Chine et en Inde. Enfin, le Japon connaît une croissance plus rapide que prévu.
[Traduction]
La Banque du Canada prévoit que l'expansion de l'économie canadienne se raffermira au quatrième trimestre de 2003 et en 2004. Dans l'ensemble, le rythme de progression de l'activité devrait dépasser au cours de cette période celui de la production potentielle, grâce surtout à la solidité de la dépense des ménages et à la hausse des investissements des entreprises. Le renforcement de la croissance à l'étranger devrait aussi insuffler un élan aux exportations de biens et services canadiens, mais ce dernier sera freiné par l'appréciation de notre monnaie. Le rythme d'expansion devrait se situer en moyenne légèrement au-dessus de 3 p. 100 au second semestre de 2003 et aux alentours de 3,25 p. 100 en 2004. Dans ces conditions, la marge de capacités excédentaires devrait s'être résorbée au début de 2005.
La Banque s'attend à ce que le taux d'accroissement de l'indice de référence se situe à un peu plus de 1,5 p. 100 en moyenne d'ici la fin de 2003, puis descende pour s'établir tout juste au-dessus de 1 p. 100 au début de 2004, à mesure que se dissiperont les effets des hausses passées des primes d'assurance automobile. Cette mesure de l'inflation devrait être revenue à 2 p. 100 d'ici le milieu de 2005 avec la disparition graduelle de la marge de capacités excédentaires. L'évolution de l'inflation mesurée par l'IPC global continuera de dépendre en grande partie de celle des cours du pétrole et du gaz naturel. Si les cours du pétrole brut devaient redescendre aux alentours de 27 $ US le baril en 2004, comme les prix des contrats à terme le laissent présager, il est probable que le taux d'augmentation de l'IPC global tomberait en deçà de celui de l'indice de référence l'année prochaine.
Madame la présidente, des risques importants pèsent sur ces perspectives économiques. Ils sont liés au moment et à l'ampleur des ajustements aux déséquilibres économiques mondiaux. Il y a notamment incertitude quant à l'évolution probable des taux de change des grandes monnaies du monde ainsi qu'à son incidence sur l'économie canadienne. On ne sait pas non plus si l'expansion de l'économie des États-Unis se poursuivra au-delà de la fin de 2004.
Nous continuerons d'évaluer les répercussions possibles, sur la production et l'inflation au Canada, de tous ces ajustements—passés et à venir—et d'examiner leur incidence sur la conduite de la politique monétaire.
Madame la présidente, Paul et moi serons maintenant heureux de répondre aux questions du comité.
¹ (1540)
La présidente: Merci.
On me dit qu'il y aura un appel de 30 minutes pour un vote qui aura lieu à 16 h 5. Nous suspendrons la séance une ou deux minutes après 16 heures. Il y a apparemment un seul vote. Nous reviendrons pour terminer les questions. Nous aurons donc un cycle complet de questions avant ou après ce vote.
Il y aura dix minutes par parti. Si les membres d'un parti veulent se partager la période par moitié, je n'ai aucune objection, mais j'appliquerai rigoureusement la limite de dix minutes.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Merci beaucoup, madame la présidente, et merci à vous, gouverneur Dodge. Nous sommes heureux que vous comparaissiez.
Votre comparution arrive à point nommé, car la valeur du dollar augmente de façon phénoménale par les temps qui courent, et cela occasionne bien des problèmes aux exportateurs. Par ailleurs, vous avez dit dans votre déclaration que l'inflation était maîtrisée. La semaine dernière, vous auriez pu réduire les taux, mais vous ne l'avez pas fait. Je me demande pourquoi, étant donné les conséquences de la hausse du dollar pour nos exportations. Ne craignez-vous pas que, si le dollar poursuit son ascension, il ne commence à miner la croissance qui s'amorce dans l'économie?
M. David Dodge: Il y a là plus d'une question. Je vais les aborder à tour de rôle.
Pour commencer, qu'une chose soit bien claire : nous essayons d'appliquer une politique monétaire adaptée à la conjoncture canadienne. C'est notre préoccupation centrale. Cela dit, il est clair que bien des facteurs influent sur cette conjoncture. Le taux de change n'est qu'un de ceux-là.
Que s'est-il passé depuis avril? Nous avons assisté à une dépréciation générale du dollar américain, ce qui a fait progresser notre monnaie d'environ 10 p. 100 par rapport à la devise américaine depuis avril. La question, et ce qui compte vraiment pour nous, est de savoir comment cela va toucher l'économie canadienne et ce qu'il y a derrière tout cela.
Il y a clairement une perte de confiance envers les États-Unis. Nous voyons progresser la plupart des devises, sauf celles de l'Asie, face au dollar américain.
Deuxièmement, et c'est très important, ce que nous avons vu, à cause de l'amélioration de la conjoncture mondiale, c'est une nette remontée des prix en dollars américains des produits de base non énergétiques. Pour la plupart de ces exportations clés, que ce soit des produits miniers, de la pâte et du papier ou même des produits industriels, le prix des produits en dollars canadiens est resté stable ou a augmenté parce que le prix d'un certain nombre de ces produits en devises américaines a augmenté.
Par le passé, une vigoureuse demande mondiale de ces produits de base ou de produits semi-finis a normalement provoqué une appréciation du dollar canadien. Une partie de ce que nous observons est donc lié à une demande mondiale plutôt forte.
Cela dit, il n'est pas simple d'analyser les répercussions générales, sur une période de 18 à 24 mois. C'est pour cette raison que, pour commencer, nous ne disons pas et ne pensons pas être sûrs que les taux d'intérêt actuels conviennent nécessairement à l'état de la demande au Canada. Nous allons devoir continuer d'évaluer ce qui se passe, car les chiffres les plus récents sont très élevés, mais nous devons revenir en arrière et voir ce qui se passe depuis un an. L'évaluation n'est pas facile.
¹ (1545)
M. Monte Solberg: Pendant des années, le premier ministre a tenu un discours favorable à un dollar faible, disant que c'était excellent pour les exportations. Selon moi, cela est en train de se retourner contre nous, car la devise américaine décline pendant que notre dollar s'apprécie rapidement. Notre secteur primaire commence à vraiment en souffrir. Pourriez-vous commenter la hausse rapide du dollar et les conséquences pour les entreprises? Les entreprises font leurs plans en prévoyant un dollar qui se situe dans une certaine fourchette. Si le dollar bondit de 20 p. 100 en très peu de temps, il est sûr que certains secteurs de l'économie sont laminés.
M. David Dodge: Vous avez parfaitement raison de signaler les difficultés d'adaptation aux changements très rapides, en l'occurrence une très forte appréciation du dollars—il en irait de même pour une forte dépréciation. Lorsque nous avons comparu, il y a environ 18 mois, le dollar était tombé de 64,5c. à moins de 63c., et nous avons dit que cela ne faciliterait pas l'adaptation dans l'économie canadienne. Il est clair que la rapidité du changement survenu depuis avril complique beaucoup l'adaptation. Il ne fait aucun doute que les changements rapides sont difficiles à gérer pour n'importe quelle entreprise.
M. Monte Solberg: Je voudrais revenir un instant à l'inflation. Vous dites dans votre rapport que l'inflation de base sera inférieure au taux visé jusqu'en 2005. Cela me ramène à ma première question : pourquoi n'avez-vous pas réduit les taux d'intérêt, alors que vous auriez pu le faire?
Il me semble étrange, puisque vous prévoyez que l'inflation de base sera faible pendant longtemps, que vous ayez laissé passer l'occasion de réduire les taux, d'autant plus que vous craignez pour la croissance à venir et que vous parlez dans votre rapport de l'incertitude qui règne dans le monde.
M. David Dodge: D'après notre meilleure évaluation, d'ici le début de 2005, la demande et l'offre au Canada seront à peu près en équilibre. Il y a des facteurs particuliers qui contiennent l'inflation, et ce sera le cas particulièrement en 2004, et j'en ai signalé certains : l'absorption des augmentations du prix de l'assurance-automobile; une certaine réduction prévue dans les prix de l'énergie, qui devraient s'établir à environ 27 $ le baril; et puis, bien entendu, les effets ponctuels de l'appréciation rapide du dollar depuis avril. Si le mouvement se maintient, cet effet se prolongera pendant cette période.
Voilà donc quelques facteurs ponctuels, si on veut, qui modéreront l'inflation, même si nous prévoyons, à partir de notre analyse présente, que nous atteindrons une utilisation complète du plein potentiel de l'économie d'ici le milieu de 2005.
La présidente: Il vous reste environ une minute et 45 secondes.
M. Monte Solberg: J'hésite à poser cette question, mais je le fais, car on vous la posera de toute façon. Elle a été posée aux Communes aujourd'hui, et je vais l'aborder avec vous.
Certains s'inquiètent parce que vous avez été sous-ministre de la Santé à l'époque des problèmes au centre Virginia Fontaine. Certains remettent en cause vos compétences en raison de cela. Je vous donne l'occasion d'en parler avant qu'on ne vous pose la question, dans quelques minutes.
¹ (1550)
La présidente: Si nous appliquons le Règlement, le sujet à l'ordre du jour est l'étude du Rapport sur la politique monétaire. Je vous invite à vous y tenir autant que possible.
M. Monte Solberg: J'ai posé la question. Je laisse au gouverneur la décision d'y répondre maintenant ou d'en parler plus tard.
M. David Dodge: Comme la présidente vient de le dire, il y a probablement d'autres tribunes pour aborder cette question. Tous les députés comprendront que les tribunaux sont saisis de cette affaire. Il faut donc prendre d'extrêmes précautions pour éviter de compromettre les procédures judiciaires.
La présidente: Gouverneur Dodge, je pourrais rendre une décision à ce sujet.
Monsieur Solberg, je vous ai donné la possibilité de poser une autre question. La possibilité est toujours là. Si vous le voulez, je peux rendre une décision sur votre question.
M. Monte Solberg: Nous sommes au Parlement, madame la présidente.
La présidente: Eh bien, la question est irrecevable.
M. Monte Solberg: Si nous ne pouvons pas nous prévaloir de la liberté d'expression ici, où pourrons-nous le faire?
La présidente: Votre question est irrecevable.
M. Monte Solberg: Il répondait à la question, madame la présidente.
La présidente: Le sujet de notre séance est le Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada, et tout ce qui s'y rapporte est recevable.
À vous, madame Wasylycia-Leis.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): J'invoque le Règlement.
Madame la présidente, je crois qu'il faut discuter un peu de cette affaire, car mes collègues de l'Alliance...
La présidente: Je viens de rendre une décision, et une décision ne peut faire l'objet de discussions. Si vous le voulez, vous pouvez faire appel de ma décision.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Madame la présidente, je vais certainement le faire, car il s'agit de la confiance que nous pouvons accorder à cette politique monétaire.
La présidente: Excusez-moi, mais j'ai la parole.
Aux termes du Règlement de la Chambre, il ne peut y avoir de débat. Si vous voulez faire appel, vous le pouvez. C'est ce que la procédure prévoit.
Qui sont ceux qui appuient ma décision? Ceux qui s'y opposent? La décision est maintenue.
Poursuivons. Votre temps de parole est terminé.
Monsieur Paquette.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Merci, madame la présidente.
Évidemment, vous comprendrez, monsieur Dodge, que je vais revenir sur la décision du 15 octobre dernier du gouverneur de la Banque du Canada de ne pas baisser le taux d'intérêt directeur, de le maintenir à 2,75 p. 100. Il y a donc un écart assez considérable entre le taux canadien et le taux américain. Actuellement, aux États-Unis, le taux est de 1 p. 100. Il y donc une différence de 1,75 p. 100, ce qui est assez important.
Comme vous l'avez mentionné, depuis le début de l'année, le dollar canadien s'est apprécié d'à peu près 20 p. 100 par rapport à la devise américaine, et il semble que ne soit pas simplement dû à une baisse du dollar américain, parce que le dollar canadien a aussi augmenté par rapport à l'euro, à la livre sterling et à la plupart des monnaies sauf le dollar australien.
On a annoncé aujourd'hui même, je crois, une augmentation du taux d'inflation. On parlait d'une inflation, en septembre, de 2,2 p. 100. Étant donné que nous avez dit que la capacité de l'économie n'était pas entièrement utilisée et que le taux de chômage avait augmenté dans plusieurs provinces--au Québec, il n'est pas loin de 10 p. 100 et dans l'ensemble canadien, il est de 8 p. 100--, j'aimerais savoir si cette augmentation du taux d'inflation de 2,2 p. 100 en septembre pourrait, si vous constatez que le dollar continue à augmenter par rapport à la devise américaine et que la situation économique ne semble pas s'améliorer substantiellement, vous amener à ne pas envisager du tout--je ne veux pas préjuger de votre décision pour le mois prochain--de diminuer le taux directeur de un quart ou de un demi de un pour cent.
M. David Dodge: Ce n'est pas le chiffre d'un mois qui compte. C'est notre analyse de l'impact de tous les développements dans l'économie, soit du côté de l'inflation, soit du côté réel dans l'économie, qui compte quand nous prenons nos décisions. Nous devons toujours estimer ou viser la situation dans à peu près 18 mois, parce qu'il y a des délais dans l'effet de la politique monétaire. Donc, on tient compte, non seulement du taux d'inflation à un moment donné, mais de tous les facteurs qui opèrent dans l'économie. C'est le taux futur qui compte.
Deuxièmement, on ne sait jamais si le taux de change qui existe à un moment donné continuera d'être le même. Donc, il y a toujours une incertitude.
Troisièmement, il faut tenir compte du fait que les effets d'appréciation dans le passé mettent du temps à affecter l'économie.
Quatrièmement, il faut tenir compte de ce qui se passe dans les marchés extérieurs pour nos produits.
Cinquièmement--ceci est extrêmement important et je vais passer la parole à mon collègue--, il faut tenir compte du fait qu'à l'avenir, c'est la demande intérieure qui devra s'accroître pour donner de la force à la croissance économique.
Pendant les années 1990, il y a eu une période au cours de laquelle les gouvernements ont exercé une force de ralentissement sur l'économie. À l'heure actuelle, avec les budgets plus ou moins équilibrés, cette force est disparue. Donc, il est important de maintenir la demande intérieure, soit du côté des sociétés et des affaires, soit du côté des ménages.
Donc, il y a beaucoup de facteurs.
¹ (1555)
M. Pierre Paquette: Je le sais et je vous demande de ne pas être obnubilé par cette faible hausse du taux d'inflation. Je vous encourage à regarder l'ensemble de la situation parce qu'il me semble qu'on a besoin d'une baisse du taux d'intérêt au Canada.
M. Paul Jenkins (premier sous-gouverneur, Banque du Canada): J'aimerais simplement dire que, comme le gouverneur l'a mentionné, il y a beaucoup de facteurs qui influencent les mouvements du taux de change. Il y a maintenant une dépréciation du dollar américain par rapport à toutes les devises majeures, cela pour plusieurs raisons. Il y a aussi d'autres éléments fondamentaux. Les prix de nos produits de base sont maintenant de presque 15 p. 100 plus élevés d'une année à l'autre. Donc, cela indique que les marchés pour nos produits sont robustes à l'extérieur dans certains secteurs.
Il y a donc plusieurs autres facteurs qui influencent les mouvements des taux de change, mais il est aussi important d'avoir une perspective d'avenir. Le but de la politique monétaire est d'avoir un taux d'inflation bas et prévisible. Ce n'est pas exclusivement l'écart entre les taux d'intérêt américain et canadien qui détermine la politique monétaire. C'est le taux d'inflation pour appuyer l'économie globalement.
º (1600)
M. Pierre Paquette: Justement, les taux d'intérêt élevés au Canada favorisent l'augmentation du dollar canadien. Je pense que tout le monde s'entend là-dessus. Même si ce n'est pas le seul facteur qui fait augmenter le dollar canadien, un tel écart entre les taux d'intérêt attire des capitaux au Canada. C'est une pression à la hausse sur le dollar canadien. Je ne dis pas que c'est le seul facteur, mais cela crée une pression à la hausse. L'augmentation du dollar canadien fait nécessairement diminuer l'indice des prix, parce que les produits importés coûtent moins cher. On importe beaucoup, surtout des États-Unis. Ensuite, cela ralentit l'activité économique. Je pense que mon collègue en a déjà parlé. On assiste tous les jours, et c'est nouveau, à des fermetures d'entreprises. Le manufacturier Bas Iris, par exemple, a annoncé récemment qu'il se mettait sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, en partie parce que le dollar canadien est très élevé et que cela le rend moins concurrentiel par rapport aux entreprises étrangères. Cela aussi crée une pression à la baisse sur les prix. Certains économistes avancent même que si on ne regardait que la composante des biens dans l'indice des prix à la consommation, le taux d'inflation serait probablement plutôt négatif que positif.
Selon votre analyse, si la valeur du dollar demeurait très élevée, à court terme, l'effet de cela pourrait-il être une déflation au plan de la partie des biens--je ne parle pas des services--de l'indice des prix à la consommation?
M. Paul Jenkins: Un facteur ayant une influence sur les mouvements des prix des biens est la productivité, qui a augmenté rapidement dans plusieurs secteurs. C'est un facteur très important. Comme le gouverneur l'a mentionné, il est vrai que les mouvements des devises ont un effet sur l'économie réelle, mais il y a d'autres facteurs qui existent maintenant. Une économie américaine qui est plus forte que nous ne l'avions anticipé et le mouvement des économies en Asie sont aussi des facteurs positifs. Donc, il y a beaucoup de facteurs que nous devons analyser pour déterminer les effets globaux sur le taux d'inflation et sur l'économie.
M. Pierre Paquette: Selon vous, faut-il écarter complètement une déflation pour les biens au Canada?
M. Paul Jenkins: L'influence des mouvements des taux de change est très basse d'après notre analyse; ce n'est pas un facteur énorme dans le mouvement des biens. C'est certainement un facteur, mais s'agissant des biens, c'est la productivité qui détermine les mouvements des prix.
M. Pierre Paquette: Puis-je poser une dernière question?
[Traduction]
La présidente: Votre temps de parole est terminé.
[Français]
M. Pierre Paquette: Déjà?
[Traduction]
La présidente: Oui, bien sûr.
Je crois que le moment est bien choisi pour suspendre la séance, car il ne resterait qu'une minute. Nous allons suspendre la séance et revenir après le vote. Il faudra moins de 10 à 12 minutes, et nous serons de retour.
La séance est suspendue.
º (1603)
º (1630)
La présidente: Nous reprenons l'étude du Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada, avec des interventions de dix minutes.
Monsieur Cullen, c'est à vous. Ce sera ensuite M. Valeri
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, madame la présidente et merci à vous monsieur Dodge et monsieur Jenkins.
Vous avez déjà abordé ce point, monsieur Dodge, mais je voudrais y revenir, avec votre permission.
Il est certain que les entreprises de ma circonscription et du reste du Canada qui exportent des biens et services sont durement frappées par la hausse rapide du dollar canadien. Vous avez dit que la baisse de la confiance dans le billet vert était un facteur expliquant la hausse. Dans quelle mesure l'écart entre les taux d'intérêt influe-t-il sur le taux de change entre les devises canadienne et américaine? Quelles seront les conséquences de ce taux de change sur les entreprises canadiennes?
Je crois que vous avez fait allusion au fait qu'il pourrait freiner la croissance économique. Je m'interroge sur ces relations et je me demande si cela vous incite à conclure qu'une réduction des taux d'intérêt est probablement souhaitable.
M. David Dodge: Commençons par l'écart entre les taux d'intérêts.
D'abord, il importe de signaler que, en ce moment, l'écart entre les taux canadien et américain est à peu près normal. Il est probablement un peu plus faible que la normale à la longue extrémité de la courbe et un peu plus fort que ce qui semble la normale au début de la courbe, mais il reste que l'écart n'a rien d'anormal, ni d'un côté ni de l'autre.
Les taux d'intérêt en général sont très faibles. Je dis que l'écart est normal, mais nous ne sommes pas sûrs que cet écart, avec des taux de l'ordre de 1 ou 2 p. 100, veuille dire tout à fait la même chose que lorsqu'ils sont à 8 ou 9 p. 100. Néanmoins, l'écart est à peu près normal. Premier point.
Deuxièmement, il y a des mouvements de capitaux dans les deux sens. Il y a eu à l'étranger beaucoup d'intérêt pour les obligations du Canada en début d'année. Par contre, en juillet et août, il y a eu une vente nette de ces obligations, ce qui ne montre pas que nous avons beaucoup de capital qui entre au Canada à cause de l'écart entre les taux.
Enfin, si nous comparons nos taux à ceux d'autres pays, où on peut aussi placer son argent autrement qu'en dollars américains ou en titres du Trésor américains, ils se situent à peu près au milieu. Ils sont plus faibles que bien d'autres, un peu plus hauts que les taux allemands et, bien évidemment que les taux japonais. Le Japon a un écart négatif avec les États-Unis, mais le yen est à la hausse.
Ces mouvements des devises ne s'expliquent pas, en grande partie, par les écarts de taux. Il tiennent plutôt au fait qu'on a l'impression que le dollar américain doit baisser par rapport à d'autres devises, comme nous l'avons vu. Nous en avons discuté à chacune de nos comparutions au comité. Cela ne se fait jamais en douceur, mais de façon très brusque. Voilà ce qu'il en est pour ce qui est des écarts.
Je vais commencer, pour laisser ensuite la parole à Paul.
Quant aux entreprises, si absolument rien d'autre ne change—ce qui est toute une hypothèse, mais supposons-le—, sur une période de deux ou trois ans, une appréciation de 10 p. 100 se traduirait par une baisse de 1 à 2 p. 100 de la production au Canada. C'est ce qu'on a observé par le passé. Évidemment, d'autres facteurs changent. Ce qui se passe maintenant et est déjà arrivé par le passé, c'est que le prix en dollars en américains d'un certain nombre de produits dont nous sommes des exportateurs nets est à la hausse. Avec une plus forte croissance en Asie, notamment, et le renforcement de la croissance aux États-Unis, la demande est relativement vigoureuse.
Il y a dans le monde un certain optimisme au sujet de la demande. Il n'est donc pas très étonnant que, même si le dollar américain n'était pas à la baisse, il y ait une pression à la hausse sur le dollar canadien, le dollar australien, etc.
De toute évidence, les effets ne sont pas répartis également dans le pays. Paul, vous voudriez poursuivre?
º (1635)
M. Paul Jenkins: Je vais dire un mot des autres relations dont le gouverneur a parlé.
Les éléments hypothétiques sont difficiles, mais il est important d'en tenir compte pour comprendre les divers facteurs en jeu. Il est vrai qu'un dollar canadien plus cher a des conséquences, toutes choses égales par ailleurs. C'est un prix important, et il influe sur la demande de produits canadiens à l'étranger et la demande de produits étrangers au Canada. Mais ce n'est qu'un élément parmi beaucoup d'autres facteurs que nous essayons de comprendre et d'analyser.
Quant au volume, si les marchés étrangers prennent de l'expansion, il y aura des effets importants sur les exportateurs canadiens. Pour vous donner un ordre de grandeur, je signale qu'une augmentation de 1 p. 100 de la croissance de l'économie américaine se traduit par une augmentation de 0,7 p. 100 de la production au Canada. C'est une relation immédiate, très rapide, tandis que les effets du taux de change dont le gouverneur a parlé prennent deux ou trois ans à se manifester. Il faut également en tenir compte.
Nous n'avons pas beaucoup d'échanges directs avec l'Asie, mais les contacts sont importants par d'autres circuits, dont le prix des produits de base. Comme je l'ai dit dans une autre réponse, le prix de ces produits, énergie mise à part, pour l'ensemble de ceux que nous produisons et vendons, a subi une hausse annuelle de l'ordre de 15 p. 100. En soi, cette hausse se traduira par une production plus élevée chez les producteurs canadiens.
Il faut tenir compte d'un certain nombre de relations clés, y réfléchir, voir leur ordre de grandeur et le moment où elles interviennent. Je présume que le quatrième élément serait l'effet sur le prix. Pour en revenir à la question de M. Paquette, je dirais qu'un taux de change plus élevé influerait sur les prix, mais bien moins que par le passé. Les économistes parlent de répercussions, lorsque le taux de change modifie les prix. Il y a effectivement un certain effet, mais il semble bien moindre depuis quelques années qu'il ne l'était par le passé, et plusieurs raisons expliquent ce changement.
Je vais m'arrêter là. Je crois que cela donne une idée du genre de questions dont nous devons tenir compte.
La présidente: Monsieur Cullen.
M. Roy Cullen: Merci. C'était une bonne transition pour en arriver à ma prochaine question.
À propos des marchés d'exportation des produits et services canadiens, il est sûr que le plus grand est le marché américain. Je crois que vous avez fait allusion au fait que, à court terme, cette question se pose, mais que, à moyen terme, nous aurons des difficultés ou problèmes d'ordre financier avec les États-Unis. Nous avons des problèmes de compte courant. Je m'inquiète. À moyen terme, nous avons été à l'abri des changements survenus dans l'économie américaine. Cela va-t-il revenir nous hanter? À quel point la situation va-t-elle se dégrader dans l'économie américaine? Je ne veux pas que ma question semble exagérément pessimiste.
M. David Dodge: D'abord, la réponse brève, c'est que nous ne savons pas, mais un ou deux facteurs seront importants. Si la demande mondiale est ferme, il pourra y avoir une correction, dans le problème actuel de compte courant des États-Unis sans que la demande américaine fléchisse. Voilà le premier élément.
Deuxièmement, il est évident que les États-Unis devront avant trop longtemps prendre des mesures pour corriger le déséquilibre budgétaire. Cela provoquera un ralentissement aux États-Unis. Par contre, si la croissance mondiale est vigoureuse à ce moment-là, les choses pourraient se passer plutôt en douceur. Sinon, il pourrait y avoir des difficultés.
º (1640)
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Valeri, vous avez un maximum de dix minutes.
M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Merci, madame la présidente. Je ne prendrai peut-être pas dix minutes. Je laisserai le reste à un de mes collègues.
Je voudrais m'attarder aux cibles en matière d'inflation. Personne n'en a parlé, je crois, et je sais que les députés auront d'autres questions sur des sujets différents. Je voudrais aborder les cibles en matière d'inflation sous l'angle de l'utilisation des taux d'intérêt pour maîtriser l'inflation, ce qui a évidemment un effet sur le dollar aussi. Que répondez-vous à ceux qui disent que la fourchette visée par la Banque du Canada est trop basse? Que gagne-t-on à avoir un objectif central de 2 p. 100 plutôt que de 3 p. 100?
M. David Dodge: Commençons par l'avantage que donne un objectif bas, peu importe le chiffre. L'avantage tient au fait qu'il y a un point de repère pour les attentes dans le pays. Une fois les attentes bien ancrées, les prix évoluent relativement aux autres prix, ce qui est souhaitable dans un système de prix, pour encourager les déplacements de capitaux qui conviennent. On évite ainsi l'alternance de fortes expansions et de récessions que nous avons vue par le passé, ce qui fait monter en flèche l'inflation et les attentes. Alors, la Banque du Canada, comme toute banque centrale, doit intervenir brutalement pour contrer cette tendance et l'empêcher de devenir incontrôlable.
Il y a donc un énorme avantage à avoir ce genre d'ancrage. Faut-il que ce soit 2 p. 100? C'est un chiffre très courant dans les pays qui se fixent des objectifs en matière d'inflation. Faut-il que ce soit 1,5 ou 2,5 p. 100? Nous avons beaucoup étudié la question la dernière fois que nous avons renouvelé notre accord sur les cibles en matière d'inflation avec le gouvernement. Nous n'avons pu trouver aucune raison, dans nos analyses, pour choisir 2 p. 100 plutôt que 1,5 ou 2,5 plutôt que 2. Il est clair, par contre, que, lorsqu'on arrive à un taux de 3,5 ou 4 p. 100, l'avantage n'est pas aussi intéressant que si la valeur centrale est de 2 p. 100, mais je ne peux pas vous dire si 2 p. 100 est préférable à 1,5 ou à 2,5 p. 100. Le grand avantage des 2 p. 100, c'est qu'il existe, qu'on y est habitué et qu'il a servi de repère.
M. Tony Valeri: À propos des taux d'intérêt, y a-t-il un maximum acceptable à l'écart entre les taux canadien et américain?
M. David Dodge: Non. Cela dépend beaucoup de la conjoncture. Il ne faut toutefois pas perdre de vue ce que nous faisons, et j'en reviens à ce que j'ai dit en réponse à d'autres questions. Nous essayons d'établir nos taux d'intérêt sur un horizon de 18 à 24 mois, pour parvenir à un taux acceptable de croissance de la demande intérieure, car les taux d'intérêt influent sur la demande intérieure.
M. Tony Valeri: Une dernière question sur les cibles en matière d'inflation, et je céderai la parole à mon collègue, M. Discepola. Maintenant que nous sommes installés dans ce mode de lutte contre l'inflation au moyen de cibles, quels seraient les coûts et les avantages de l'abandon de cette approche? Est-il possible de l'abandonner? Faites-vous des études pour savoir ce qui se passerait si nous devions renoncer à cette approche?
M. David Dodge: Voyons d'abord l'hypothèse. Vous dites que ces cibles servent à combattre l'inflation. Le but n'est pas en soit l'inflation, dans un régime de politique monétaire, mais la maximisation de la croissance dans l'économie en longue période en atténuant les hauts et les bas de l'expansion et de la récession. Il s'agit d'un véritable objectif économique, et ce que vous avons constaté avec le temps et dans tous les pays, c'est que la meilleure contribution que la politique monétaire puisse faire à cette croissance durable et assez constante, c'est d'arriver à un taux d'inflation faible et stable. Voilà comment nous en sommes arrivés là, non parce que nous étions obnubilés par l'inflation, mais parce que nous visions la croissance et ce que la politique monétaire pouvait faire pour établir la meilleure trajectoire.
Y a-t-il d'autres façons de s'y prendre? Oui, bien sûr, et on en discute dans les milieux spécialisés. Vous pouvez voir le débat qui se déroule actuellement aux États-Unis. Les Américains n'ont pas de cible explicite en matière d'inflation, mais seulement un énoncé général disant que la politique monétaire visant un taux d'emploi élevé et à la hausse et un taux d'inflation faible et stable. C'est tout. Ils s'en remettent à la Federal Reserve pour faire ce qui convient. C'est une solution, et on ne peut pas soutenir qu'elle n'a pas été efficace ces derniers temps aux États-Unis.
Toutefois, les cibles en matière d'inflation présentent un énorme avantage. Aucun régime n'est parfait, mais celui-ci a l'énorme avantage de nous permettre d'expliquer à tous les Canadiens ce que nous essayons de faire. Nous pouvons l'expliquer à tous les agents sur le marché et dans le milieu des affaires. Selon moi, cette clarté des intentions et la reddition des comptes, à l'égard du Parlement et de la population canadienne, revêtent une importance extraordinaire.
º (1645)
La présidente: Monsieur Discepola, il vous reste environ trois minutes.
M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges): Merci.
Monsieur le gouverneur, en six mois, le dollar est passé de 60 ou 61c. à environ 75c., et l'opposition nous faisait des reproches, lorsque le dollar valait 60c., disant que nous, c'est-à-dire le gouvernement, ne faisions rien. Maintenant que le dollar vaut 75c., l'opposition se plaint et dit que nous devrions intervenir.
Vous avez fixé des cibles pour l'inflation et les taux d'intérêts, mais avez-vous une politique visant à établir la plage optimale du taux de change de notre dollar par rapport au dollar américain?
M. David Dodge: La réponse brève est non, pour ce qui est de la plage optimale, mais je reviens à la question que M. Solberg a posée tout à l'heure sur la rapidité des changements. Malheureusement, les marchés des changes ne s'adaptent pas toujours en souplesse. Leur évolution peut être marquée par des mouvements très rapides et brusques et, comme nous l'avons vu en 2002, ils peuvent nous laisser avec un dollar dont la valeur ne facilite pas les adaptations dont nous avons vraiment besoin dans l'économie.
C'est pourquoi nous disons que nous n'avons aucune cible, mais il est certain que nous tenons compte de l'évolution du taux de change pour établir la politique monétaire.
M. Nick Discepola: La valeur élevée du dollar vous inquiète-t-elle?
M. David Dodge: Non. Je dis non parce que vous parlez d'inquiétude, mais nous en tenons compte, cela est certain.
M. Nick Discepola: Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci. Il nous reste du temps, mais moins d'une minute. Nous allons donc passer à M. Brison, qui aura dix minutes.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, madame la présidente, et merci, monsieur Dodge et monsieur Jenkins, pour être venus aujourd'hui.
Vous avez reconnu que l'écart entre les taux d'intérêts canadiens et américains n'est ni anormal ni particulièrement élevé, d'un point de vue historique. Les taux de productivité n'ont pas sensiblement changé. Exprimée en pourcentage de celle des États-Unis, notre productivité continue... Je crois qu'elle est maintenant à environ 82 p. 100, par rapport à 92 p. 100 dans les années 70. Nous avons donc une baisse à long terme, mais il n'y a pas eu d'évolution particulière l'année dernière.
Il reste, je suppose, les facteurs psychologiques. Je veux dire que dans toute évaluation fondée sur le marché, il y a des facteurs psychologiques, qui comprennent d'ailleurs des facteurs politiques. Dans quelle mesure la hausse du dollar dans les derniers mois reflète-t-elle l'enthousiasme suscité sur le marché international par le prochain départ à la retraite de notre premier ministre?
º (1650)
M. David Dodge: Je sais que vous ne vous attendez pas à ce que je réponde à cette question.
M. Scott Brison: Non, bien sûr, mais il y a des facteurs politiques.
M. David Dodge: Oui, cela s'est manifesté en particulier au cours de la dernière décennie. Nous avons connu une période marquée par une confiance extraordinaire, une confiance démesurée, pourrait-on dire, dans la direction politique des États-Unis. C'était une confiance quasi illimitée, qu'aucun gouvernement, je pense, n'aurait pu justifier. Il s'agit non pas d'une question de parti, mais d'une question de politique générale. Nous savions qu'il y aurait un moment où cette confiance commencerait à être ébranlée, en partie parce que les réalités économiques la rendraient difficile à maintenir.
C'est ce qui s'est produit au début de 2002. Cette confiance extraordinaire dans le système politique américain a commencé à faiblir, entraînant une baisse de ce que j'appellerai la demande excédentaire pour la devise américaine.
M. Scott Brison: Pourtant, le dollar canadien se porte assez bien par rapport à d'autres devises aussi. Ce n'est pas seulement par rapport au dollar américain.
M. David Dodge: En fait, non. On peut facilement trouver une période de quelques mois dans laquelle ce serait vrai. Toutefois, si on remonte au moment où la dévaluation générale du dollar américain a commencé, on constate que c'était dans le premier semestre ou peut-être le début du deuxième trimestre de 2002. Avant cette période, on peut se rendre compte que le mouvement du dollar australien a en fait été un peu plus important que celui du dollar canadien, de même que le mouvement de l'euro. Le mouvement du yen a été légèrement inférieur à celui de notre dollar. Toutefois, au cours de la période d'à peu près deux ans dans laquelle le dollar américain a commencé à baisser, nous avons commencé à monter plus tard que les autres. Ensuite, nous nous sommes rattrapés au cours des huit derniers mois, tandis que le mouvement des autres devises s'est échelonné sur une période d'environ 18 mois.
M. Scott Brison: Il y a une relation assez directe entre les taux de chômage et le niveau de notre taux de change flottant. Quand le taux de change monte, on s'attend à ce que la hausse se traduise par une augmentation du chômage. Avez-vous prédit l'impact de cette pointe de notre taux de change sur les taux de chômage?
M. David Dodge: C'est la réponse que Paul essayait de donner tout à l'heure. Il y a un certain nombre de facteurs qui jouent simultanément et qu'il est difficile de distinguer les uns des autres. Si rien d'autre ne changeait, la hausse du taux de change, comme Paul l'a dit, aurait un effet : par exemple, une augmentation de 10 p. 100 pourrait entraîner une diminution de 1 à 1,5 p. 100 de la production canadienne sur une période de deux à trois ans. En même temps, une hausse de 1 p. 100 de la demande étrangère se traduit, sur un ou deux trimestres, par une variation de 0,7 p. 100. Par conséquent, une augmentation de la demande de produits de base a également des incidences.
Malheureusement, il est impossible de séparer ces facteurs. En ce moment, plusieurs choses se produisent en même temps. C'est pour cette raison qu'il nous est difficile de prédire ce qui se passera dans les 18 à 24 prochains mois.
º (1655)
M. Scott Brison: L'effondrement des prix des produits de base a eu des répercussions sensibles sur l'économie canadienne. Vous dites que les fluctuations de ces prix ont maintenant des effets sur le dollar canadien. Pourtant, le ministre Manley et le premier ministre ont dit qu'à l'étranger, le Canada est perçu comme une simple source de matières premières et que cela ne reflète pas vraiment la réalité du dollar canadien. Nous continuons quand même à ressentir les effets directs des prix des produits de base sur le dollar canadien, ce qui semble indiquer qu'on prend toujours pour des bûcherons et des mineurs. Que se passe-t-il vraiment?
M. David Dodge: Tout d'abord, en gros, 200 p. 100 de notre excédent commercial d'ensemble est constitué de biens basés sur les ressources naturelles, comme l'acier et d'autres produits qui comportent une part de fabrication. C'est la source de la force de notre balance des paiements courants. Du côté de la fabrication et des services, nous sommes en fait des importateurs nets, même si ces deux secteurs représentent plus de la moitié de nos exportations brutes.
Il n'est donc pas surprenant que les fluctuations des prix des produits de base semblent avoir un effet disproportionné sur notre devise. Après la crise asiatique, vous vous en souviendrez, nous avons eu une chute d'environ 20 p. 100 des prix des produits de base, qui a été amortie par une dévaluation approximative de 7 à 8 p. 100 du dollar canadien. Le taux de change peut vraiment aider à absorber les fluctuations marquées des prix des produits de base.
M. Scott Brison: Dans les six ou sept dernières années, notre dollar bas reflétait et favorisait la faiblesse de la productivité parce qu'il décourageait les investissements dans l'amélioration de la productivité, sous forme d'équipement, de logiciels ou autres. Aujourd'hui, l'industrie canadienne a un important incitatif qui devrait l'encourager à investir dans l'amélioration de la productivité. J'aimerais savoir ce que vous pensez des incidences de la hausse du dollar sur l'amélioration de la productivité canadienne dans cette perspective. Je vous demande en fait de reprendre pour quelques instants votre ancien rôle de sous-ministre des Finances pour nous donner votre point de vue. Quel genre de politique fiscale et réglementaire le gouvernement du Canada devrait-il adopter à court terme pour encourager l'industrie à investir dans l'amélioration de la productivité?
Je vais vous donner un exemple. Roger Martin, doyen de l'École de gestion Rotman, croit que le gouvernement devrait envisager, dans le cadre d'une réforme fiscale, une approche très radicale de l'amortissement des immobilisations, qui permettrait même un taux annuel de 100 p. 100, par opposition à un amortissement beaucoup plus étalé. Je trouve l'idée très sensée dans l'environnement actuel où il importe d'augmenter assez rapidement la productivité au Canada.
» (1700)
La présidente: Je vais permettre une réponse à cette question, mais le temps est déjà écoulé. Je vous prie donc d'être bref.
M. David Dodge: Très bien, je ferai très vite, madame la présidente.
D'abord, les chiffres de productivité comptent parmi les plus difficiles à interpréter. Il serait utile de revenir sur cette question plus tard pour que je puisse donner des explications. Nous devons être très prudents.
Ensuite, il est tout à fait vrai que lorsque le prix du matériel baisse par rapport à celui de la main-d'oeuvre – c'est ce qui se produit quand le dollar canadien monte par rapport à la devise américaine ou à l'euro, parce que notre matériel vient ordinairement des États-Unis ou de l'Europe –, les sociétés sont encouragées à investir davantage dans l'équipement.
De même, bien sûr, il a été très utile, à un moment où la demande canadienne était plutôt faible, que le dollar canadien baisse car cela nous a permis d'employer une partie de la main-d'oeuvre qui aurait autrement été au chômage. Nous sommes maintenant revenus à des taux record d'activité. À ce chapitre, nous avons en fait parcouru un cycle complet.
Pour ce qui est de la politique fiscale, je crois qu'il vaut mieux laisser cela aux représentants du ministère des Finances.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à M. Murphy. Je crois que vous voulez partager votre temps avec M. Lastewka. La parole est à vous.
M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Monsieur Dodge, pour poursuivre dans la même veine, je voudrais vous demander si votre modèle vous permet de prévoir les effets de la hausse du dollar canadien sur le niveau de notre productivité par rapport à celle des États-Unis.
M. David Dodge: Je crois que non, mais, Paul, vous voudrez peut-être expliquer ce que nous pouvons faire dans ce domaine.
M. Paul Jenkins: Les modèles que nous utilisons ne sont sûrement pas conçus pour nous permettre de répondre à ce genre de questions. Toutefois, si nous progressons vers une économie fonctionnant près de sa pleine capacité dans les deux prochaines années et atteignons cette pleine capacité début 2005, nous aurons des facteurs et des incitatifs qui augmenteront la productivité. À moyen terme, nous envisageons un taux de croissance de la productivité d'environ 2 p. 100 au Canada, ce qui est sensiblement supérieur à ce que nous avons eu dans les années 70 et 80. À notre avis, ce serait comparable à ce qui devrait se produire aux États-Unis.
Par conséquent, compte tenu du cadre macro-économique que nous avons en place aujourd'hui, de la prudence financière, de l'importance accordée à la lutte contre l'inflation et des ajustements structurels qui ont eu lieu, nous sommes témoins depuis le milieu des années 90 d'un processus qui commence vraiment à produire des gains de productivité. Nous croyons que ce processus se maintiendra.
M. Shawn Murphy: Monsieur Dodge, la hausse rapide du dollar canadien constitue à mon avis un facteur négatif pour les entreprises canadiennes, et surtout celles qui exportent aux États-Unis. En supposant qu'il ne s'agit que d'une fluctuation et que le taux de change baissera puis remontera encore, quelle serait la réaction de la Banque du Canada si de telles fluctuations se produisent d'une façon régulière?
Je crois qu'une baisse aussi rapide que la hausse des derniers mois serait tout aussi destructive.
M. David Dodge: Il est certainement vrai que le marché des changes comme le marché des instruments à taux fixe a été assez instable dans les deux dernières années.
Les entreprises exposées à ce genre de fluctuations peuvent bien sûr procéder à des opérations de couverture pour se prémunir contre les variations imprévues. Surtout pour les grandes entreprises, les marchés à terme peuvent donner d'assez bons résultats.
Nous avons actuellement des travaux en cours sur l'utilisation de ces marchés par l'entremise des banques à charte, notamment par les petites et moyennes entreprises. Quoi qu'il en soit, les sociétés ont des moyens d'affronter cette situation.
» (1705)
M. Shawn Murphy: Monsieur Dodge, voici ma dernière question.
M. Brison vous a posé quelques questions sur les répercussions politiques générales et particulières. Est-il possible que la hausse du dollar canadien dans les six à huit derniers mois découle en tout ou en partie des politiques économiques saines et prudentes appliquées par le gouvernement depuis cinq ou six ans?
M. David Dodge: Il est tout à fait vrai que lorsque les gens veulent se débarrasser de leurs avoirs en dollars américains, ils cherchent dans le monde d'autres devises, des endroits et des pays qui font une bonne gestion de l'économie. Il est certain qu'un pays comme le Canada, qui est le seul du G7 à avoir en gros un budget équilibré et dont la dette exprimée en pourcentage du PIB se situe vers le bas de l'échelle, peut constituer un endroit attrayant pour les investisseurs qui veulent déplacer leurs avoirs aux États-Unis.
La présidente: Monsieur Lastewka, il vous reste environ cinq minutes et demie.
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci beaucoup.
Monsieur Dodge, je voudrais revenir aux questions posées plus tôt au sujet des effets du taux de change. Je sais que certaines industries deviennent paresseuses et ne font pas ce qu'elles devraient faire. Quelques témoins nous ont dit que beaucoup de secteurs se sont améliorés, mais pas celui de la fabrication. En août, les exportations à destination des États-Unis étaient, je crois, à leur plus bas depuis 2001. Sur un grand nombre de mois, août était le plus faible. L'Ontario est très industrialisé et a une forte production dans le secteur automobile. Pourtant, la panne d'électricité a presque eu des effets positifs sur ce secteur parce qu'elle lui a donné la possibilité de réduire ses stocks. Je ne dis pas qu'il l'a nécessairement fait, mais c'est l'impression que j'ai, d'après mon expérience du secteur.
Je ne m'inquiète pas seulement parce que le dollar a grimpé rapidement. En effet, la hausse du dollar et ses effets sur les échanges Canada-États-Unis inciteront les sociétés automobiles nord-américaines à déplacer les centres de production. Avez-vous des préoccupations à ce sujet?
Je crois que quelqu'un a parlé des seuils à partir desquels des changements se produisent et du rôle que joue à cet égard le taux de change. Par exemple, l'industrie automobile canadienne produit un million de véhicules de plus que nous n'en utilisons. Ce nombre risque de baisser avec la hausse du dollar. Qu'en pensez-vous?
M. David Dodge: Oui, c'est une question épineuse. Je vais donc laisser Paul donner la plus grande partie de la réponse.
Avant de lui céder la parole, cependant, permettez-moi de dire qu'il est très important de ne pas accorder trop de poids aux chiffres d'un seul mois ou d'un seul trimestre. Ces chiffres sont des estimations et ils fluctuent beaucoup. Il est donc préférable d'examiner la tendance sur une certaine période.
Mais Paul voudra peut-être répondre à votre question précise.
M. Paul Jenkins: Cette question nous ramène, je crois, à l'un de nos messages de base : en considérant les fluctuations du taux de change, on ne peut pas les isoler des autres éléments de la situation. Il faut considérer aussi les autres facteurs en jeu et étudier leurs incidences.
Si vous le permettez, madame la présidente, je vais revenir à la période qui a suivi la crise asiatique. Nous avions alors des circonstances très différentes de celles d'aujourd'hui. L'économie américaine connaissait une expansion très rapide, tandis que l'économie canadienne était très faible. À ce moment, la baisse de notre devise nous a beaucoup aidés. Comme le gouverneur de la Banque l'a dit, elle a assuré un petit soutien supplémentaire aux producteurs de biens de base, mais a considérablement favorisé les exportations du secteur manufacturier à destination d'une économie américaine en forte expansion. Aujourd'hui, l'économie canadienne est beaucoup plus forte, tandis que celle des États-Unis l'est nettement moins.
À notre avis, l'économie américaine se portera beaucoup mieux dans un certain temps. Nous pouvons donc nous attendre à ce que les exportations continuent à croître parce que le marché mondial est en expansion. Nous croyons que l'économie américaine se raffermira encore, que l'économie asiatique continuera à croître. Par conséquent, nos marchés se développent et nos exportations devraient augmenter en conséquence, mais peut-être à un rythme un peu moindre à cause de la hausse du dollar.
Ce sont d'excellentes questions, mais il importe d'inclure dans l'analyse tous les facteurs en jeu, puis de voir comment ils se répercuteront globalement sur notre économie.
» (1710)
M. Walt Lastewka: Vous avez dit vous-même que la croissance aux États-Unis pourrait ne pas durer au-delà du premier semestre de 2004. En d'autres termes, vous êtes très prudent quand il s'agit de faire des projections de plus de six mois. Or, comme notre industrie manufacturière a un horizon de planification plus long, nous risquons fort de voir les sociétés supprimer des postes de travail et faire d'autres coupures au Canada à cause d'un fléchissement possible de l'économie américaine.
Les stimulants à la vente sont un bon exemple. Ils ont atteint un sommet très élevé, qui annonce l'étape suivante. Si on ne peut plus stimuler les ventes, on est obligé de supprimer des postes de travail et tout le secteur manufacturier s'en ressent.
M. Paul Jenkins: Il y a toujours des risques et de l'incertitude. Toutefois, notre hypothèse de base est que l'économie américaine connaîtra une croissance de 4 p. 100 l'année prochaine.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à Mme Judy Wasylycia-Leis. La parole est à vous, madame.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, madame la présidente.
Je tiens à vous assurer que je poserai des questions concernant la politique monétaire. Je veux juste dire au secrétaire parlementaire de ne pas se hâter d'intervenir. Restez calme, gardez votre sang-froid...
La présidente: Madame Wasylycia-Leis, voulez-vous poser vos questions?
Mme Judy Wasylycia-Leis: Monsieur Dodge et monsieur Jenkins, mes collègues ont dit qu'ils se réjouissaient de vous voir comparaître devant le comité. J'a sûrement apprécié votre exposé de ce matin et j'ai essayé de comprendre les répercussions d'ensemble du taux de change actuel sur notre économie. Je sais que le premier élément dans tout ceci doit être la confiance des marchés et la confiance des Canadiens dans vos compétences, monsieur Dodge, en qualité de gouverneur de la Banque du Canada. N'est-il pas vrai que vous avez besoin de la confiance des marchés et des Canadiens pour vous acquitter de vos fonctions de responsable de la politique monétaire du Canada?
M. David Dodge: Il est absolument vrai que chacun doit avoir confiance. De toute évidence, nous sommes responsables de ce que nous avons dit que nous allions faire, c'est-à-dire gérer la politique monétaire de façon à atteindre nos objectifs en matière d'inflation sur une période de 18 à 24 mois. C'est tout à fait vrai.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Ne voudriez-vous pas avoir l'occasion d'apaiser les craintes exprimées au sujet de vos capacités de gestion, afin de maintenir cette confiance des marchés et de défendre votre position de responsable de la politique monétaire du Canada?
M. David Dodge: J'espère bien sûr que les gens ont confiance dans mon intégrité et ma capacité de remplir mes fonctions.
Mme Judy Wasylycia-Leis: J'apprécie votre réponse.
Comme je sais que vous avez tenté de répondre à une question tout à l'heure, mais que la question a été jugée irrecevable, je ne m'engagerai pas directement dans cette voie. Vous avez parlé à plusieurs reprises ce matin des risques que vous devez évaluer quand vous prenez des décisions. Je voudrais donc vous demander ceci : comment comptez-vous rétablir la confiance du public dans votre capacité d'évaluer ces risques alors que vous semblez répugner à expliquer ce qui s'est passé quand vous étiez sous-ministre de la Santé et que des millions de dollars ont été escroqués pendant que vous aviez la responsabilité du ministère? Je crois que vous...
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): J'invoque le Règlement, madame la présidente.
La présidente: Je peux dire tout de suite qu'une décision a déjà été rendue. Je vais donc vous donner l'occasion de reformuler votre question, madame Wasylycia-Leis. Merci.
» (1715)
Mme Judy Wasylycia-Leis: Très bien.
Permettez-moi de vous demander ceci. Ne croyez-vous pas que le refus apparent ou l'incapacité de répondre à une question du Comité des finances au sujet de vos compétences en gestion peut miner la confiance que vous accordent les Canadiens, à titre de gouverneur de la Banque du Canada?
M. David Dodge: Je suis bien sûr tout à fait disposé à répondre à n'importe quelle question que vous auriez au sujet de la gestion de la Banque du Canada.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Ne craignez-vous pas de donner l'impression que vous vous êtes laissé museler par le comité quand nous avons posé des questions concernant d'autres responsabilités de gestion?
M. David Dodge: Non. Je suis très heureux de répondre à toutes les questions. De plus, c'est bien à votre comité qu'il appartient de poser des questions sur la façon dont nous gérons la Banque du Canada. Absolument.
M. Paul Jenkins: C'est exactement pour cela que nous sommes ici.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Très bien.
Comme vous êtes généralement disposé à répondre aux questions concernant la gestion de la Banque du Canada, je dois dire que ce que vous avez fait dans des fonctions antérieures est important. C'est pour cette raison qu'on insiste tant sur le scandale de Santé Canada. Vous étiez le sous-ministre. Vous avez une réputation à...
M. Bryon Wilfert: Madame la présidente, la dernière question est irrecevable. Mme Wasylycia-Leis sait parfaitement que le gouverneur est venu pour nous parler de la politique monétaire. Un point, c'est tout.
La présidente: À l'ordre! Je dirige cette réunion et je me suis déjà prononcée sur les questions.
Une voix: Madame la présidente, le secrétaire parlementaire a interrompu...
M. Bryon Wilfert: Je peux invoquer le Règlement. Si ça ne vous plaît pas, demandez à la présidente. Autrement, vous feriez mieux de rester tranquille.
La présidente: Silence, s'il vous plaît.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Très bien, je vais reformuler ma question.
La présidente: Nous allons prendre un instant pour nous calmer.
Je me suis déjà prononcée sur ce qui est admissible aux termes du Règlement de la Chambre. Collègues, je n'invente pas les règles. Nous devons suivre la procédure de la Chambre. Notre ordre du jour prévoit l'examen du Rapport sur la politique monétaire qui a été déposé. Le gouverneur est ici pour répondre à nos questions concernant le rapport inscrit à l'ordre du jour. Je ne fais qu'appliquer les règle de procédure de la Chambre d'une façon cohérente. J'ai déjà rendu une décision.
Madame Wasylycia-Leis, je sais que vous pouvez poser des questions sur le rapport. J'ai hâte de les entendre.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Oui, merci, madame la présidente.
Je voudrais vous interroger d'une façon générale—Bryon, je vous en prie, calmez-vous—sur des questions directement liées à l'exposé que vous nous avez présenté aujourd'hui et sur la nécessité pour vous de rassurer les marchés pour que les Canadiens aient confiance dans votre compétence. Il est évident que tout ce que les médias disent de vous en ce moment se répercute sur cette confiance, sur les cotes de crédit et sur tout le reste. Vous devez donc répondre, sans quoi nous risquons de nous trouver dans une situation précaire et imprévisible.
Je vous demande donc de nous renseigner sur une question directement liée à vos compétences professionnelles, à votre capacité de conseiller les membres du Comité des finances, le Parlement du Canada et les Canadiens sur notre économie et notre politique financière et monétaire. Je crois que vous voudrez répondre, sans quoi les médias continueront à poser des questions, des doutes continueront à planer sur votre compétence et vous vous trouverez dans une situation très difficile. Je ne pense pas que vous voudrez permettre au comité de vous empêcher de répondre à des questions aussi fondamentales.
La présidente: Monsieur Dodge, vous êtes libre de répondre ou non. Vous connaissez ma décision, mais c'est vous qui avez la parole. Vous êtes ici pour parler de la politique monétaire, mais je n'ai pas du tout l'intention d'imposer des limites à un témoin.
M. David Dodge: Madame la présidente, je dirai alors, en réponse à l'honorable députée, que j'ai été—plus que n'importe qui d'autre—perturbé par les allégations de fraude et d'abus de confiance faites contre les employés d'un ministère que j'avais la responsabilité de gérer. Dès que ces allégations ont été faites, les responsables du ministère ont, conformément à mes instructions, pris toutes les mesures qu'il nous était possible de prendre à ce moment. Ces mesures consistaient a) à informer la police des allégations et à lui demander d'ouvrir une enquête; b) à demander une vérification judiciaire des parties extérieures au ministère; et c) à veiller à ce que le ministère fasse ce qu'il fallait pour enquêter sur les allégations.
Malheureusement, un ou plusieurs actes commis par un très petit nombre de personnes, je crois, suffit pour saper la confiance du public dans la compétence de la fonction publique, ou de la compétence de la Banque du Canada s'il s'agit d'événements touchant la Banque. Ayant passé près de 25 ans dans la fonction publique, je crois vraiment que 99,99 p. 100 des fonctionnaires sont des gens honnêtes et travailleurs qui essaient d'agir au mieux des intérêts des Canadiens. Toutefois, nous avons à affronter à l'occasion des allégations d'activités criminelles. L'affaire est maintenant devant les tribunaux.
» (1720)
Mme Judy Wasylycia-Leis: J'apprécie votre réponse. Nous parlons cependant de la confiance que le public a mise en vous, à titre de gouverneur de la Banque du Canada. Le public se demande comment vous, alors sous-ministre de la Santé, avez pu vous trouver aussi près du cratère d'un volcan sans vous en rendre compte, sans savoir que votre sous-ministre adjoint s'appropriait des fonds publics, se laissait corrompre et se livrait à toutes sortes d'activités frauduleuses.
La présidente: Madame Wasylycia-Leis, cette question, posée au gouverneur de la Banque du Canada venu nous parler de la politique monétaire, est tout à fait inadmissible. Je crois que vous le savez.
De toute façon, votre temps de parole est écoulé. Je passe donc au suivant, qui est M. Wilfert. Je crois qu'il partagera son temps de parole avec M. Normand.
M. Bryon Wilfert: Merci, madame la présidente.
Je sais que la politique monétaire n'est pas l'un des points forts du NPD. Je ne suis donc pas trop surpris. Je crois cependant, madame la présidente, que la hausse du dollar canadien est probablement attribuable aussi au travail du ministre des Finances et à l'arrivée du prochain premier ministre. C'est sans doute la raison pour laquelle les marchés font confiance au Canada.
J'aimerais maintenant aborder quelques questions concrètes, comme la dette à la consommation qui est actuellement très élevée et a peut-être atteint un niveau record, de même que la dette hypothécaire et le crédit à la consommation.
Monsieur Dodge, je voudrais tout d'abord vous demander ce que pense la Banque du Canada en ce moment de la hausse de la dette à la consommation et de l'insolvabilité des consommateurs. C'est une source de préoccupation ici et partout au Canada.
M. David Dodge: Disons d'abord très clairement que le facteur important à cet égard, c'est la capacité d'assurer le service de la dette. En fait, le pourcentage du revenu que les ménages consacrent aujourd'hui au service de prêts hypothécaires ou à la consommation est assez bas. Il est vraiment très inférieur à la moyenne des dernières années.
Il y a en fait deux aspects dont on peut s'inquiéter face une hausse de la dette. Tout d'abord, une bonne part de celle-ci, près de 80 p. 100, se situe dans le secteur du logement.
» (1725)
M. Bryon Wilfert: Oui, c'est là que je voulais en venir.
M. David Dodge: Il y aurait lieu de s'inquiéter si le prix des maisons était susceptible de s'effondrer, si nous avions en quelque sorte une bulle dans le secteur du logement.
Nous avons fait beaucoup d'analyses dans ce domaine et n'avons découvert au Canada aucun indice appuyant cette thèse. Le rapport entre le prix des maisons et le revenu n'est pas du tout anormalement élevé. Deuxièmement, dans plusieurs villes, le marché du logement commence à peine à revenir à ce qu'il était dans les années 80. La situation du logement au Canada est assez différente de celle d'une grande partie des États-Unis et certainement très différente de la situation au Royaume-Uni et en Australie. Le prix des maisons ne continuera probablement pas à monter au même rythme que ces deux dernières années. Nous ne croyons pas d'ailleurs que ce serait une bonne chose, mais nous avons de bonnes raisons de croire que les prix n'ont pas monté au point de nous faire craindre la formation d'une bulle.
Sur le plan de la consommation, et dans le secteur hypothécaire aussi, on pourrait en outre craindre une hausse très importante des taux d'intérêt qui ferait monter très sensiblement le service de la dette. Il faudrait cependant que cette hausse soit extraordinairement élevée pour qu'il y ait lieu de s'inquiéter.
Par conséquent, dans les limites envisageables, nous ne craignons pas vraiment que les consommateurs soient incapables d'assurer le service de la dette. Bref, après des analyses assez approfondies, nous ne croyons pas utile de lancer un avertissement.
M. Bryon Wilfert: Je suis bien content de l'apprendre parce que je sais que malgré l'augmentation de la dette, les intérêts payés sont en baisse, mais on peut craindre... Notre économie a bien résisté, compte tenu de tous les problèmes que vous avez mentionnés dans votre exposé. Toutefois, si nous avions d'autres difficultés qui feraient monter le chômage ou si les taux d'intérêt se mettaient soudain à grimper, nous serions dans une situation difficile, sinon précaire.
Je voulais avoir votre avis sur la hausse de la dette à la consommation. Vous avez sûrement répondu à plusieurs de mes questions, ce dont je vous suis reconnaissant.
Madame la présidente, comme je partage mon temps avec M. Normand, je crois que je vais lui céder la parole, avec votre permission.
La présidente: Allez-y, monsieur. Vous avez un peu moins de quatre minutes et demie.
[Français]
L'hon. Gilbert Normand (Bellechasse—Etchemins—Montmagny—L'Islet, Lib.): J'ai deux petites questions à vous poser.
Premièrement, vous semblez baser votre confiance sur la reprise de l'économie américaine. Or, cette année, les États-Unis auront un déficit de 380 milliards de dollars. C'est comme si le Canada avait un déficit de 40 milliards de dollars cette année. Leur déficit commercial avec plusieurs pays a considérablement augmenté. Entre autres, les États-Unis ont un déficit commercial de 100 milliards de dollars avec la Chine. La Chine est en train de leur voler une partie du marché international, principalement en Asie.
Les États-Unis pensaient financer la guerre en Irak avec le pétrole qu'ils allaient trouver dans ce pays, mais ils ne réussissent pas à le faire. De plus, leur dette est beaucoup plus importante qu'ils ne le prévoyaient. Ne pensez-vous pas que la reprise américaine peut n'être qu'un feu de paille? C'est ma première question.
Deuxièmement, le dollar canadien est passé, depuis avril, de 63 ¢ ou 64 ¢ à 76 ¢. Il y a sûrement des cambistes qui ont fait beaucoup d'argent. Pouvez-vous identifier ceux qui ont fait de l'argent avec le dollar canadien?
M. David Dodge: Je vais répondre à la première question et je céderai ensuite la parole à mon collègue pour la deuxième question.
Il est certain qu'il y a un déficit structurel aux États-Unis et que le gouvernement fédéral devra se pencher sur ce problème, non pas cette année, mais dans l'avenir. Quand le gouvernement prendra des mesures pour diminuer ce déficit structurel, il sera important qu'il y ait à ce moment-là des sources de demande pour maintenir l'économie américaine. Cette demande pourra provenir d'autres pays si le taux de croissance à l'extérieur de l'Amérique du Nord est très fort. Cette demande pourra aussi venir du domaine des affaires, de compagnies qui feront plus d'investissements, ou des ménages, mais il n'y a pas beaucoup de marge de manoeuvre du côté des ménages. On peut vraiment envisager une résolution pas trop pénible de cette situation. Comme nous, au Canada, les Américains devront à l'avenir se pencher sur la situation fiscale.
Paul, voulez-vous répondre à la deuxième question?
» (1730)
M. Paul Jenkins: Il est très difficile d'analyser les répercussions sectorielles de l'appréciation du dollar canadien. Cela aura certainement un effet chez les producteurs dont les produits comportent un grand pourcentage d'importations. Donc, il est important d'analyser la composition des éléments de chaque produit pour répondre directement à votre question.
Mais globalement, les bénéfices dans toute l'économie sont grands. Par exemple, le pourcentage du PIB est presque à un niveau record. Récemment, le niveau des bénéfices pour les entreprises canadiennes a été en général très fort.
L'hon. Gilbert Normand: Êtes-vous en mesure de voir si les entreprises canadiennes ont profité de la baisse du marché américain pour ouvrir d'autres marchés dans d'autres pays? Je sais que dans mon comté, depuis quelques mois, on voit défiler les Italiens, les Allemands et les Français, ce qu'ils ne faisaient pas auparavant, parce que les industries ne sentaient pas le besoin d'ouvrir d'autres marchés. Actuellement, plusieurs d'entre elles ont commencé à ouvrir d'autres marchés en Europe et même en Asie.
Êtes-vous en mesure de voir si la balance commerciale a changé? Est-ce que la balance commerciale avec les États-Unis a diminué pendant que la balance commerciale avec d'autres pays augmentait?
M. Paul Jenkins: Il est difficile d'analyser les données sur le mouvement des taux de change parce que cette situation est très récente. Il est cependant clair que les mouvements des prix relatifs aux taux de change représentent un montant très important. J'imagine qu'à l'avenir, les entreprises canadiennes, avec leurs initiatives, vont trouver d'autres marchés. En ce moment, comme je le mentionnais, la région asiatique représente un marché très fort, particulièrement la Chine, où les possibilités futures sont énormes.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup.
Voilà qui termine notre tour de table. Nous sommes à environ huit minutes de l'appel au vote. Si vous êtes d'accord, il y a deux membres qui veulent poser une question chacun. Nous avons assez de temps pour cela.
Je vais donc donner la parole à M. Jaffer puis à M. Loubier pour des questions et des réponses très courtes. Nous lèverons ensuite la séance.
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Alliance canadienne): Je vous remercie. Ma question sera très rapide.
Vous avez mentionné que le différentiel des taux d'intérêt n'est pas le principal motif de la baisse du dollar américain et de la hausse de notre devise et qu'il y a parfois des motifs plus fondamentaux, comme la surévaluation du dollar. Pour moi, cela signifie que la hausse de notre dollar pourrait se maintenir même si le différentiel diminuait.
Pensez-vous que le dollar canadien se maintiendra aux alentours de 75c. américains pendant quelque temps encore?
M. David Dodge: Nous ne le savons pas. Nous ne savons tout simplement pas comment tous les facteurs qui agissent sur les taux de change se combineront.
Le plus important, c'est que l'ensemble du système commercial international doit s'ajuster. Comme vous le savez, l'Amérique du Nord—surtout les États-Unis, mais le Canada aussi dans une certaine mesure—a un gros déficit courant vis-à-vis de l'Asie moins le Japon. Il sera très important pour cette région de faire des ajustements ou, du moins, de permettre que des ajustements se fassent pour remédier à cette situation.
Ces ajustements peuvent prendre diverses formes. Il peut s'agir de mouvements des taux de change. Le région pourrait aussi avoir des taux d'inflation nettement supérieurs aux taux nord-américains. Elle pourrait également libéraliser considérablement ses marchés de capitaux.
Les ajustements peuvent donc se faire de bien des façons. Le monde entier aurait cependant des difficultés en l'absence de tels ajustements. Il faut vraiment qu'ils se produisent pour rééquilibrer l'ensemble du système.
Évidemment, l'ajustement le plus dangereux de tous consisterait pour le reste du monde à recourir à des restrictions commerciales pour rétablir l'équilibre. Ce n'est certainement pas une chose que nous aimerions voir.
» (1735)
La présidente: Je vous remercie.
[Français]
Monsieur Loubier.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Merci infiniment, madame la présidente, de me donner l'occasion de poser une question.
Bonjour, monsieur Dodge. Je suis content de vous revoir. J'ai deux questions à vous poser.
Dans le passé, on ne parlait pas nécessairement du niveau du dollar canadien, mais plutôt de sa volatilité. C'est ce qui fait le plus mal aux industriels en particulier. Y a-t-il moyen de s'assurer qu'à l'avenir le dollar canadien soit moins volatile? Travaillez-vous à une éventuelle politique qui pourrait vous permettre de faire cela et de faire moins mal au secteur industriel?
Deuxièmement, je vais vous poser une question que tout le monde voudrait vous poser, mais que tout le monde n'a peut-être pas l'occasion de vous poser. Vous avez été sous-ministre des Finances pendant des années. D'ailleurs, on s'est connus à ce moment-là. Vous avez été très près du ministre des Finances de l'époque, qui était M. Martin. On m'a posé la question dans le milieu des affaires particulièrement. Pouvez-vous nous garantir qu'à l'avenir, lorsque M. Martin sera à la tête du gouvernement, la politique monétaire de la Banque du Canada demeurera tout à fait indépendante du pouvoir politique, ce qui est nécessaire pour qu'elle soit efficace?
M. David Dodge: Je vais commencer par répondre à la première question.
Il est vrai que les marchés financiers, que ce soit le marché des obligations, celui des changes ou même celui des actions, ont été très volatiles au cours des deux ou trois dernières années. Je crois bien que c'est un aspect des marchés avec lequel nous devrons vivre dorénavant, parce qu'on a enlevé les choses qui empêchaient les transactions à bon prix dans le marché. Donc, il faut vivre avec cela. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a des hedge mechanisms pour les compagnies afin de minimiser l'impact de cette volatilité.
Votre deuxième question portait sur notre indépendance. J'ai pris ce poste à la Banque du Canada pour sept ans et je veux y rester pendant sept ans. La loi dit que c'est à nous, de la Banque du Canada, qu'est donnée la responsabilité de la politique monétaire. Ce sont les six membres du conseil de direction qui prennent les décisions sur la politique monétaire. Nous allons défendre fièrement et avec beaucoup de force notre indépendance.
» (1740)
M. Yvan Loubier: Je vous remercie.
[Traduction]
La présidente: Au nom de tous les membres du comité, je voudrais vous remercier d'être venu nous parler du Rapport sur la politique monétaire. Nous vous sommes reconnaissants de votre témoignage et de vos réponses à nos questions.
La séance est levée. Nous reprendrons demain matin.