Je me présente. Je m'appelle Curtis Shaw, et je suis le directeur général de Northwestel Cable, à Yellowknife.
Northwestel Cable est une filiale en propriété exclusive de Northwestel, une entreprise de services locaux titulaire du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut et du nord de la Colombie-Britannique. Northwestel offre des services de téléphonie locaux et interurbains, de transfert de données à haute vitesse, de vidéoconférence et, par l'intermédiaire de filiales, de téléphonie sans fil et de câblodistribution.
Northwestel Cable, à Yellowknife, et nos quatre autres filiales offrent un certain nombre de services de la CBC/SRC. CBC North et CBFT Montréal font partie des services de base, et CBC Newsworld est aussi diffusé sur le câble. Nous offrons la programmation régionale de la CBC de Calgary, Toronto, Regina et Halifax sur le câble en mode numérique, ainsi que les programmes de différentes radios de la CBC/SRC du sud et du nord du Canada.
Je n'ai pas l'intention de répéter ici les commentaires que le comité entendra probablement des autres entreprises de câblodistribution et des télédiffuseurs concurrents du sud du Canada. J'aimerais plutôt profiter du temps dont je dispose pour parler un peu du Nord canadien et du rôle important que CBC North y joue aujourd'hui.
Parlons d'abord de la viabilité financière. Pour de nombreuses collectivités du Nord canadien, CBC/SRC joue un rôle capital en leur permettant de savoir ce qui se passe dans le reste du monde. De fait, dans bon nombre de ces collectivités, les émissions radio et télédiffusées par la CBC/SRC locale sont les seules sources de divertissement et d'information dont disposent les résidants. Un certain nombre de collectivités du Nord ne disposent pas d'un réseau de câblodistribution local, et le coût des services de diffusion par satellite, comme Star Choice et Bell ExpressVu demeure souvent prohibitif.
Je vais vous donner un exemple. Au milieu des années 90, Northwestel a installé plusieurs réseaux de distribution locaux dans le Nord: à Watson Lake, Haines Junction et Old Crow, au Yukon; à Tuktoyaktuk, Aklavik, Fort Good Hope, Fort Resolution et Tulita, dans les Territoires du Nord-Ouest; à Pangnirtung et Nanisivik, au Nunavut.
En 2000, soit cinq années plus tard, tous ces réseaux étaient déficitaires. Le nombre d'abonnés a chuté avec l'arrivée de la concurrence de la diffusion par satellite. Chose encore plus importante, les résidants de ces localités n'avaient tout simplement pas les moyens de payer leurs factures de câblodistribution. Dans les années qui ont suivi, la plupart de ces réseaux ont été fermés et quelques-uns ont été repris par des coopératives locales.
Dans le Nord, les résidants des localités qui sont privées de réseaux de câblodistribution peuvent bénéficier de services de diffusion par satellite, comme Bell ExpressVu et Star Choice. Toutefois, nous estimons que près de 40 p. 100 de la clientèle de ces collectivités éloignées ne bénéficie que des programmes de télévision et de radio diffusés par CBC North et par l'Aboriginal Peoples Television Network, l'APTN. Ce pourcentage est bien supérieur à ce qu'on pourrait trouver à Toronto, une ville du sud du Canada.
Concernant les langues et les cultures du Nord canadien, je dirai que CBC North offre une perspective nordique sur l'actualité locale et la culture. Aucune entreprise du secteur privé ne propose à l'heure actuelle un tel choix d'émissions de télévision et de radio, en particulier en langues autochtones. La société d'État offre un bulletin de nouvelles locales partout dans le Nord, du lundi au vendredi, ainsi qu'au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest, en inuktitut.
L'émergence de nouveaux médias permet au consommateur de disposer d'un plus grand choix de sources d'émissions d'information, de divertissement ou culturelles. L'Internet permet aux clients d'écouter chez eux des programmes audio et de radio diffusés en flux des quatre coins du monde. De fait, la majorité des collectivités du Nord canadien disposent désormais d'au moins un fournisseur d'accès à l'Internet à haute vitesse. La radio par satellite est disponible dans la plupart des régions du Nord canadien.
CBC North joue un rôle essentiel en diffusant des informations et des programmes régionaux à l'intention des résidants du Nord grâce à l'Internet. Sur le site de la CBC/SRC sont diffusées en flux et à destination des résidants du Nord canadien les émissions de radio des stations de CBC North à Inuvik, Iqaluit, Whitehorse et Yellowknife, de même que des émissions de télévision comme Northbeat et Igalaaq.
Concernant les coûts d'exploitation, CBC North dessert le même territoire que Northwestel. Le Nord s'étend sur plus de 4 millions de kilomètres carrés, répartis sur quatre fuseaux horaires. La majorité des collectivités ne bénéficie que d'un service par satellite. Cette zone géographique compte 100 000 habitants.
CBC North doit éponger les mêmes coûts d'exploitation que notre entreprise. La prestation des services, l'entretien de l'infrastructure, les coûts croissants de la main-d'oeuvre, des transports et des technologies, auxquels s'ajoute le caractère imprévisible du climat arctique, sont autant de défis que la société d'État doit gérer au quotidien afin d'assurer la bonne réception de ses programmes par la population du Nord canadien.
En tant que câblodistributeur, nous croyons que nos clients résidentiels seraient opposés à l'idée de devoir s'acquitter de frais supplémentaires pour bénéficier de la programmation de CBC/SRC sur le câble, alors que cette dernière est déjà disponible gratuitement sur le réseau hertzien ici, à Yellowknife. Ils s'acquittent déjà de frais pour la réception de CBC Newsworld, mais refuseraient de le faire pour CBC North.
La CBC/SRC entre-t-elle en concurrence avec le secteur privé dans le Nord canadien? La radio de la CBC/SRC étant dénuée de publicité, et la télévision d'État étant le principal diffuseur régional, à peu près le seul qui soit axé sur le Nord canadien, la réponse est assurément non. Des coupes au budget de la CBC/SRC dans le Nord se traduiraient par une réduction, tant à la radio qu'à la télévision, des émissions d'information et culturelles, et il est peu probable que le secteur privé chercherait à combler le vide ainsi créé.
Puisque la concurrence dans le milieu de la diffusion évolue dans le sud du Canada et que la part de financement traditionnellement assurée par la publicité tend à décliner, le mode de financement, le mandat et le mode de gouvernance de la CBC/SRC sont également appelés à évoluer. Je souhaiterais conclure mon exposé en demandant au comité de ne pas oublier l'importance des services que la CBC/SRC assure dans les trois territoires et de reconnaître l'importance du service essentiel assuré aujourd'hui par CBC North dans le Nord canadien. Nombreux sont les résidants du Nord qui souhaiteraient que le service dont ils bénéficient soit étendu à d'autres collectivités et que le nombre d'émissions régionales ou locales ainsi que celles en langues autochtones soit augmenté.
Pour terminer, le secteur privé n'offrira jamais aux résidants du Nord canadien des programmes de divertissement, culturels et d'information comparables à ceux que diffuse actuellement CBC North. Un diffuseur public a toujours un rôle important à jouer, tout particulièrement dans les trois territoires du Nord.
Je vous remercie, monsieur le président.
:
Monsieur le président, mon nom est Léo-Paul Provencher et je suis directeur général de la Fédération Franco-TéNOise. Je m'excuse, ma voix est enrouée par la grippe.
Monsieur le président, messieurs les membres du comité, madame, j'aimerais d'abord dire quelques mots pour mettre notre intervention en contexte. Nos commentaires tiennent compte de la Loi sur la radiodiffusion de 1991 et du mandat général de radiodiffuseur public national de CBC/Radio-Canada. En effet, l'alinéa 3(1)m) de ladite loi énonce de la façon suivante ce mandat général. Nous retenons en particulier les sous-alinéas (ii), (iii), (iv) et (vii).
Le sous-alinéa 3(1)m(ii) prévoit ceci, et je cite:
(ii) refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions,
Le sous-alinéa 3(1)m(iii) se lit comme suit:
(iii) contribuer activement à l'expression culturelle et à l'échange des diverses formes qu'elle peut prendre,
Le sous-alinéa 3(1)m(iv) se lit comme suit:
(iv) être offerte en français et en anglais, de manière à refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue,
Le sous-alinéa 3(1)m(vii) se lit comme suit:
(vii) être offerte partout au Canada de la manière la plus adéquate et efficace, au fur et à mesure de la disponibilité des moyens,
De surcroît, nous tenons pour acquis que la Société Radio-Canada est assujettie aux articles 41 et 42 de la Loi sur les langues officielles. Ainsi, en vertu de la partie VII de ladite loi, la Société Radio-Canada est tenue de mettre en oeuvre des mesures positives pour favoriser l'épanouissement des minorités francophones du Canada et pour appuyer leur développement.
Nous reconnaissons de ce fait à la société d'État l'obligation de résultats dans son projet de promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais, et de favoriser la progression vers l'égalité de statut et d'usage.
J'aimerais faire un commentaire relatif au mandat. Notre communauté appuie le texte de loi qui définit le mandat, mais souligne la nécessité que les moyens soient mis en oeuvre pour permettre à la Société Radio-Canada de s'acquitter pleinement de son rôle à la grandeur du pays.
J'aimerais aussi faire quelques commentaires préalables. La Fédération Franco-TéNOise et les composantes de son réseau associatif apprécient l'invitation à participer à l'enquête nationale sur le rôle de notre diffuseur public. La fédération tient à souligner au comité les défis importants que les très courts délais de préavis à cette audition nous ont forcé à relever. Cela a eu beaucoup d'impact sur notre possibilité de procéder à l'analyse de cet important dossier, analyse que nous aurions aimé faire en profondeur. Elle aura limité également nos possibilités d'illustrer par certains exemples pertinents et concrets l'impact des limites de services sur nos communautés.
Nos commentaires s'incarnent, bien sûr, dans le contexte socio-économico-démographique très particulier des Territoires du Nord-Ouest. Il s'agit d'un territoire jeune, dépendant du fédéral, qui connaît une croissance économique vigoureuse, dont la population est très mobile et dont le rapport entre une diversité de populations autochtones et non autochtones atteint le point d'équilibre.
Ces réalités imposent des défis très particuliers, notamment retenir nos francophones et francophiles chez nous et allonger de plus en plus la durée de leur séjour. Il en est de même pour le soutien du développement de notre jeunesse sur tous les plans, dont son accès aux services en général et à ceux de la radio et de la télévision en particulier.
J'aimerais faire quelques observations générales. Nos communautés de Fort Smith, Hay River et Inuvik sont privées du signal de Radio-Canada. La capitale, Yellowknife, reçoit le signal de Montréal, tant pour le volet radio que pour le volet télévision. Il est très rare qu'il soit question de nous, de nos réalités ou de nos préoccupations, sur les ondes. Il ne nous est pratiquement jamais possible d'exprimer nos valeurs, nos opinions, nos idées ou de mettre en valeur les talents créateurs présents dans chacune de nos communautés.
Nos citoyens francophones et nos communautés n'ont jamais l'occasion d'être reconnus par le biais des stations régionales de la Société Radio-Canada. De plus, ils n'ont aucun accès à des contenus radiophoniques et télévisuels locaux dans leur langue. Nos citoyens francophones ne bénéficient aucunement d'un outil d'échange avec leurs collègues de la minorité linguistique des autres provinces canadiennes. Nos citoyens francophones n'ont pas l'occasion de contribuer à la diffusion d'événements culturels qui donneraient une valeur ajoutée au dynamisme de la francophonie, autant québécoise que canadienne.
Les francophones minoritaires des autres provinces canadiennes sont peu mis à contribution en proportion de la place qu'occupent le Québec, et particulièrement Montréal, dans le contenu des émissions, presque toutes émissions confondues.
Nos citoyens francophones nous font part tantôt de la qualité douteuse de la réception, tantôt des coûts associés à cette réception. Ils notent également qu'on n'entend jamais l'expression « Deux heures plus tôt dans les T.N.-O. » sur les ondes, à l'instar de l'expression « Une heure plus tard dans les Maritimes ».
En ce qui a trait au mandat public de Radio-Canada, la prolifération de nouveaux médias avec une prédominance étatsunienne fait en sorte que nos médias canadiens occupent moins d'espace d'écoute. Si notre service d'État prenait les moyens positifs de refléter les diverses réalités des minorités linguistiques au pays, si nos gens se reconnaissaient et étaient reconnus dans des représentations des diversités régionales, cela favoriserait sans doute leur sentiment d'appartenance et, donc, leur attachement à notre coin de pays. En d'autres termes, cela permettrait à la société d'État de mieux contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales.
Nous avons souvent le sentiment que la programmation de la radio et de la télévision est concentrée à Montréal, réduisant l'espace de notre région et de nos régions canadiennes qui pourraient offrir une diversité enrichissante autant pour le secteur de l'information que celui des émissions de variétés.
Il est sans doute inévitable que si les autorités gouvernementales laissent libre cours aux impératifs commerciaux liés à la rentabilité des diffuseurs, la réalité des régions ne sera pas souvent au programme, puisque nos minorités ne feront jamais le poids en ce qui a trait aux cotes d'écoute. La représentativité régionale sera de plus en plus réduite, si notre service d'État doit concurrencer le libre marché.
Le commerce de la programmation condamne, en quelque sorte, les plus petits à l'oubli. Il faudrait sans doute évaluer l'évolution de RDI face aux autres réseaux de nouvelles en continu pour en apprécier l'impact dans le temps sur les émissions régionales. Les réalités ci-haut décrites influencent et accentuent les difficultés des Canadiennes et des Canadiens à appréhender les réalités des francophones en milieu minoritaire, et privent nos concitoyennes et concitoyens d'un potentiel de solidarité accrue au sein de la francophonie canadienne.
Le Canada français ne se limite pas au Québec. Le sous-alinéa 3(1)m)(vi) de la Loi sur la radiodiffusion stipule que le mandat général du radiodiffuseur public national doit, et je cite:
(vi) contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales,
Nos concitoyens témoignent de leur déception de ne pas disposer d'un réseau spécifique pour entendre plus souvent des nouvelles de leur région. Une petite communauté comme Hay River est contrainte d'assumer des frais pour recevoir le service. Force nous est de constater que cette mesure n'est pas égale à la réalité de la majorité linguistique et contrevient au sous-alinéa 3(1)m)(vii), qui stipule, et je cite:
(vii) être offerte partout au Canada de la manière la plus adéquate et efficace [...]
Parlons des services offerts par CBC/Radio-Canada à notre station régionale. Nous soulignons combien nous apparaît important le lien que nous aimerions voir avec l'information locale en français. Radio-Canada est le seul média apte à jouer un rôle clé et diffuser du contenu radiophonique local en français. Par ailleurs, nous appuyons la demande de l'Alliance des radios communautaires du Canada de créer un fonds canadien de la radio communautaire pour maintenir la viabilité de nos radios communautaires.
Ces institutions comptent sur un bénévolat intensif pour maintenir le seul service de radio francophone offrant une partie de sa programmation locale en français. Une analyse des contenus d'émissions comme Le Téléjournal, Le Point, Enjeux et autres, pourrait démontrer le peu d'espace alloué aux actualités des communautés francophones ainsi qu'aux personnalités francophones qui oeuvrent dans les domaines culturel, social, politique, en contexte rural ou minoritaire.
Les productions francophones réalisées hors Québec sont en nombre trop limité. Dans une perspective d'avenir, l'importance des nouvelles technologies de communication, qui sont particulièrement à portée de main de nos jeunes, nous amène à proposer à notre service d'État de mettre en place une offre de services adaptés aux lieux de rendez-vous de nos jeunes avec les communications.
La flexibilité des médias ainsi utilisée, une gamme de produits dynamiques pourra favoriser une participation accrue de notre jeunesse à une diversité de forums interactifs.
En résumé, nous sommes d'avis que Radio-Canada doit travailler sans cesse à refléter la réalité des Canadiens tant majoritaires que minoritaires, doit puiser dans la richesse de nos diversités et, comme le dit la loi, Radio-Canada doit être offerte partout au Canada de la manière la plus adéquate et la plus efficace. Radio-Canada a la responsabilité de rendre compte de notre diversité régionale et des diversités régionales des minorités linguistiques de langue officielle du Canada. Nos minorités ont la capacité et la volonté de contribuer à la vitalité culturelle au pays.
En raison des enjeux associés au libre commerce dans ce domaine de communication publique, en raison du trop petit nombre dans la plupart des communautés francophones hors Québec, en raison de l'obligation et du grand intérêt de rendre compte de la diversité régionale au pays, nous demandons au Parlement d'accorder des crédits suffisants pour rendre la réalisation du mandat public possible.
En raison des cotes d'écoute des régions qui sont toujours faibles, en raison de l'offre de services de nos radios communautaires, de leur dynamisme et de leur riche potentiel, nous demandons la création d'un fonds canadien de la radio communautaire pour soutenir et développer les services radiophoniques locaux en français.
Nous invitons notre société d'État à investir et à s'ingénier à favoriser la croissance de l'écoute chez les jeunes par des moyens modernes interactifs.
Finalement, nous sommes d'avis qu'il est urgent de remplacer la logique commerciale par la volonté politique de protéger notre souveraineté culturelle canadienne.
:
Je m'appelle Batiste Foisy. J'avais prévu de vous parler en français, mais je vois les difficultés que cela représente pour le comité, alors je vais m'adresser à vous en anglais. Toutefois, j'aimerais que vous notiez qu'il s'agit de ma deuxième langue; je pourrais faire quelques lapsus.
Je suis un résidant des Territoires du Nord-Ouest. Je comparais ici à titre personnel. Je travaille aussi comme journaliste dans cette ville, mais ce soir, j'aimerais simplement vous parler avec mon coeur.
Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de me donner l'occasion de m'exprimer sur un sujet qui me tient à coeur: l'accès à l'information et la diffusion publique. Plus précisément, j'aimerais vous parler du manque d'accès à ces services pour les résidants francophones des Territoires du Nord-Ouest. Un manque d'accès en ce sens que dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut en 2007, il n'y a aucun service offert par la Société Radio-Canada, le diffuseur de langue française.
Le mandat de la société d'État précise clairement que la diffusion en langue française doit être offerte partout au pays. Ce n'est pas le cas. J'invite les membres du comité à visiter le site Web du diffuseur public — www.radiocanada.ca/radio/frequences.html — où ils verront une image qui parle d'elle-même, une carte du Canada où le territoire du Yukon et les dix provinces sont représentés en gris, alors que les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut sont en blanc. Sous la carte, on indique, en français et en anglais, que le blanc signifie qu'aucune fréquence n'est disponible pour cette région.
Les localités de Fort Smith, de Hay River et d'Inuvik, où Patrimoine canadien et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest reconnaissent la présence d'importantes communautés francophones, ne captent pas le signal de la Première Chaîne — l'équivalent français de CBC Radio One — ni celui d'Espace Musique, la chaîne culturelle de langue française.
Les résidants des Territoires du Nord-Ouest de l'extérieur de la capitale, Yellowknife, n'ont pas accès à la radio de langue française. Ici dans la capitale, c'est un peu différent. Nous n'avons pas Espace Musique, mais nous captons le signal de CBF, la Première Chaîne de Montréal.
On pourrait croire que c'est parce que Radio-Canada reconnaît que nous, les francophones, existons dans les Territoires du Nord-Ouest, mais ce serait trop beau. En effet, l'Association franco-culturelle détient une licence de retransmission de CBF — à ses propres frais, évidemment. Les francophones de Yellowknife tiennent tellement au service public de Radio-Canada que nous sommes prêts à payer deux fois pour le recevoir. Nous le payons avec nos impôts et nous le payons aussi avec notre adhésion à l'association francophone, dont je fais partie, soit dit en passant.
J'aimerais faire remarquer que c'est vrai aussi pour le signal de télévision dans les localités et à Yellowknife. Toutefois, cela ne me fait pas grand-chose puisque je n'ai pas de téléviseur.
J'aimerais maintenant aborder une question qui m'intéresse davantage et qui est liée au manque d'accès à l'information. Il n'y a pas de journaliste de Radio-Canada dans les Territoires du Nord-Ouest. Il n'y en a pas non plus au Nunavut. Aucun citoyen francophone du Nord n'a entendu un bulletin de nouvelles locales dans sa langue. La radio communautaire francophone, CIVR, diffusait pareil bulletin, mais nous n'avons pas le financement nécessaire pour avoir des journalistes à la radio communautaire francophone.
Radio-Canada a des correspondants à Paris, à Londres, à Washington et à Tel Aviv, mais aucun à Yellowknife ou à Iqaluit. Je le mentionne parce que les très rares fois où nous avons des nouvelles des Territoires du Nord-Ouest au Téléjournal, elles sont présentées comme des nouvelles étrangères. C'est toujours un journaliste de Montréal qui, après avoir passé quelques jours ici à Yellowknife — ou plus souvent encore, en lisant seulement les communiqués de presse, explique aux Canadiens comment vont les choses dans le Grand Nord, où nous vivons. Or, sa vision est toujours erronée, totalement faussée.
C'est une journée spéciale aujourd'hui; nous avons eu des nouvelles des Territoires du Nord-Ouest en français, ce qui n'arrive pas souvent. Aujourd'hui, les responsables du projet de gazoduc de la vallée du Mackenzie ont annoncé les nouveaux coûts et toutes ces choses, ce qui a fait les manchettes nationales. J'ai lu la nouvelle, et on dit que la construction du pipeline ne commencera qu'en 2014.
Or, étant moi-même journaliste, je sais que les promoteurs du projet ont affirmé que le pipeline serait en production — et non pas en construction — d'ici 2014. Voilà ce qui arrive lorsque vous faites des nouvelles sans journaliste.
Il est évident que la Société Radio-Canada ne s'intéresse pas aux Territoires du Nord-Ouest, en partie à cause de l'accès au signal — ils ont reconnu que nous n'en avions pas — mais aussi parce qu'elle ne dit pas aux autres Canadiens ce qui se passe ici. Dans cette optique, je recommanderais au comité permanent que Radio-Canada crée un fonds pour l'information régionale en français. Cet argent pourrait nous aider à obtenir une information quotidienne de qualité ici dans notre communauté qui, à son tour, pourrait aider d'autres collectivités à obtenir une telle information là où le diffuseur public est incapable de remplir son mandat.
[Français]
Mesdames et messieurs les membres du Comité permanent du patrimoine canadien, monsieur le président, je vous souhaite un agréable séjour au sein de notre communauté.
:
Je n'ai pas eu la chance de préparer un document officiel, alors j'ai simplement griffonné quelques notes ici. J'ai appris il y a peu de temps que vous alliez tenir des séances.
Quoi qu'il en soit, je vous remercie tout d'abord d'être ici. Votre présence est très importante.
Pour commencer, j'aimerais dire que je ne peux imaginer le Canada ou le Nord sans Radio-Canada. M. Shaw a expliqué dans le détail pourquoi la société d'État est si importante dans le Nord, alors je ne vais pas le redire. Elle est importante à de nombreux égards, pour de nombreuses personnes dans le Nord.
À mon avis, Radio-Canada est le ciment qui lie le Canada. C'est pourquoi je ne peux pas imaginer le Canada ou le Nord sans Radio-Canada. C'est le visage que nous présentons au reste du monde, un peu comme la BBC est le visage du Royaume-Uni. À mon avis, CTV ne pourrait pas refléter notre visage. Je crois qu'il serait bien différent. Et si jamais j'attrape celui qui dit « C-T-V », j'aurais un mot à lui dire.
Si Radio-Canada n'existait pas, il faudrait, n'est-ce pas, l'inventer. Sans elle, nous serions en voie de devenir une autre partie des États-Unis. Ces forces sont partout autour de nous. Je crois que Radio-Canada nous aide à rester des Canadiens.
Comme je l'ai dit, mes notes sont pêle-mêle, alors il n'y a pas nécessairement une suite logique ici.
Certains prétendent — et ce sont évidemment des radicaux — qu'on devrait abandonner Radio-Canada et laisser le secteur privé prendre le relais. Eh bien, je vais toujours me battre bec et ongle contre cette idée. Bien sûr, Radio-Canada doit être aussi efficace que possible. Il faut faire preuve de vigilance à l'égard de toute organisation publique, qu'elle soit gouvernementale ou autre. Mais nous devons faire bien attention avant de réduire les ressources de Radio-Canada, parce que d'éventuelles compressions pourraient aussi mener vers une pente descendante.
Nous nous rappelons tous le sort jeté aux chemins de fer; je crois que c'étaient les conservateurs qui avaient enclenché le processus. Vous avez fait des compressions dans les chemins de fer, les services sont devenus moins bons, et les gens ne les utilisaient plus. Alors le gouvernement a dit « Vous voyez? Les gens n'utilisent plus le transport ferroviaire comme auparavant ». On a fait d'autres compressions et ce fut le déclin.
Nous devons éviter que pareille chose se produise à Radio-Canada. Vous pouvez très facilement saper le moral d'une organisation en faisant des compressions de façons sournoises.
À mon avis, la programmation à la radio et à la télévision de Radio-Canada est bien comme elle est. Certains ajustements seront faits inévitablement. Radio-Canada doit éviter de céder aux caprices de la mode. Nous connaissons tous certains exemples plutôt embarrassants, comme l'émission de télé-réalité qui est disparue après les deux premières minutes. Amener les idées nouvelles, y compris les nouveaux médias, mais faites-le prudemment, en gardant en tête l'avenir du pays.
Je ne crois pas que le secteur privé puisse faire ce genre de chose, parce que la recherche du profit entre alors en jeu. Nous voulons éviter à tout prix un nivellement vers le bas à Radio-Canada. Oui, la recherche du profit existe en diffusion. Nous savons ce qui arrive et nous connaissons l'influence des gens qui possèdent les organisations de diffusion.
Essentiellement, vous finissez par avoir une autocensure, en particulier dans le domaine des nouvelles, des documentaires, de l'information sur le monde que l'on transmet aux Canadiens. Vous devez être au-dessus de tout cela. Tenez-vous loin de l'influence politique. Défendez Radio-Canada contre l'influence politique. Et laissez tomber ces nominations partisanes. Je n'en sais pas grand-chose, mais il me semble qu'il y a eu récemment certains cas déplorables. Faites appel à des professionnels. Il doit y avoir des lignes directrices générales permettant aux politiciens de garder un oeil sur Radio-Canada, mais l'influence politique sur le diffuseur public est très douteuse sous une forme ou l'autre.
J'ai mentionné l'influence des grands annonceurs et des grands intérêts commerciaux. Nous savons tous à quel point la publicité est irritante. Nous n'en avons pas à la radio, et c'est là quelque chose. Je ne sais pas pourquoi on en trouve encore à la télévision. Bien sûr, c'est une affaire de coût. Encore une fois, les annonceurs ont certainement une influence. Radio-Canada s'en remet aux annonceurs pour une partie de son financement, alors il y a inévitablement une influence subtile qui s'exerce ici.
Regardez la BBC. Qu'elle soit ou non au-dessus de toute influence — je ne crois pas qu'elle soit toute pure — on sent tout de même une certaine intégrité. J'aimerais que ce soit le cas aussi pour Radio-Canada.
La société d'État doit recevoir un financement suffisant. On ne peut s'attendre à ce qu'elle soit autosuffisante. Cela nous ramène à la question des compressions budgétaires et des inquiétudes au sujet du revenu, ce qui peut mener à une descente aux enfers.
Je crois donc qu'il faut garder la société d'État comme elle est, tout en permettant des changements dans l'avenir. La SRC est trop importante pour le Canada pour qu'on commence à s'en prendre à elle, qu'on essaie de la noyer, de la transformer en quelque chose qu'elle ne doit pas et ne peut pas être, tout en lui demandant d'être ce qu'elle est. Gardez-la comme elle est, mais rendez-la même meilleure et donnez-lui plus de sécurité pour que les gens ne se demandent pas tous les jours si leur station sera fermée. Toutes ces choses sont arrivées par le passé et ont eu des effets désastreux.
Monsieur le président, beaucoup de choses ont déjà été dites et beaucoup d'autres le seront, alors je vais m'arrêter ici et céder la parole à d'autres.
Merci beaucoup de m'avoir écouté.
Je m'appelle Jennifer Morin. À titre de citoyenne du Canada, je représente l'intérêt public.
J'aimerais tout d'abord remercier le comité d'être venu à Yellowknife. Merci d'avoir nolisé l'avion. Je vous souhaite la bienvenue et j'espère que vous passerez quelques heures agréables ici avant de vous envoler pour une autre réunion.
Je tiens aussi à remercier le personnel pour son aide et pour avoir permis la tenue de la présente séance.
Je parle aussi au nom de mon fils, Archer, que j'ai amené avec moi. C'est son heure fatale, l'heure où il se met habituellement au lit, mais je voulais qu'il soit pris en considération dans votre étude.
Pour commencer, je dirais que nous sommes très chanceux d'avoir des journalistes et des gestionnaires très talentueux ici. Pour moi, Radio-Canada ici est le coeur, l'entité vivante -- Chris O'Brien a dit que c'était le ciment, mais je crois que c'est plus que cela -- qui relie toutes les communautés et tous les enjeux locaux. Comme Chris l'a dit, on ne peut imaginer Yellowknife, les Territoires du Nord-Ouest, le Nord sans un coeur qui fait battre la vie, un coeur qui élimine les déchets et qui donne la vie. C'est vital, en particulier pour une petite population qui se trouve dans un si vaste territoire.
J'écoute la radio de la société d'État et je regarde aussi les émissions de la télévision publique assez régulièrement. Je crois qu'elles sont très importantes. J'aime tout particulièrement la radio nationale la fin de semaine. Depuis peu, j'écoute Radio 3 grâce à la baladodiffusion. À mon avis, Radio 3 de CBC innove en faisant la promotion de la musique canadienne indépendante et locale qui n'est diffusée nulle part ailleurs. Elle ne s'adresse pas seulement aux générations plus âgées et au gratin. C'est une organisation vivante et dynamique qui rejoint bon nombre de Canadiens.
Un autre aspect que je trouve important et que j'aimerais faire valoir devant le comité, c'est le reportage en matière d'environnement. Le secteur privé ne peut pas présenter de reportages sur les enjeux environnementaux à l'heure actuelle. Il peut très bien faire des reportages sur les affaires et certains enjeux sociaux, mais l'environnement est toujours passé sous silence. Aucun journaliste ne se voue à l'environnement, et nous avons besoin d'un journalisme d'enquête pour aller au fond des enjeux environnementaux qui se posent aux Canadiens. Je crois que ce rôle revient à Radio-Canada et je me réjouis d'avoir cette couverture locale.
Encore une fois, bon nombre de questions dont j'allais parler -- pour dire à quel point le diffuseur public est important et vital -- ont déjà été abordées. J'aimerais que le comité retienne ce message: s'il vous plaît, gardez la SRC; elle est vitale pour le Canada.
Je vous remercie.
:
Bonjour. Je m'appelle Catherine Pellerin et je suis une résidante des Territoires du Nord-Ouest. Je n'avais pas prévu de prendre la parole, mais certaines choses au sujet de Radio-Canada me sont venues à l'esprit en écoutant tous les autres témoins.
C'est la tradition de raconter des histoires dans les Territoires du Nord-Ouest, alors je vais commencer par vous raconter une très courte histoire. Radio-Canada a amené les Territoires du Nord-Ouest au reste du Canada. Ils ont cessé d'être une simple couleur sur la carte durant la commission Berger. Ce fut une époque déterminante. C'est à ce moment-là qu'un grand nombre d'entre nous ont pris conscience des Territoires du Nord-Ouest.
Bon nombre d'années plus tard -- il y a 21 ans -- je vivais à Edmonton. Puis ma vie a changé et je me suis retrouvée à Frobisher Bay. À cette époque, j'ai mis ma carrière de côté et je restais à la maison avec un jeune enfant, et un autre en route. Pour moi, la question la plus importante qui se posait avait trait à Radio-Canada; la société d'État existait-elle dans l'Arctique de l'Est?
À cette époque, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest avait une représentante à Edmonton, et peut-être aussi à Ottawa, qui donnait des renseignements et essayait de convaincre des gens à déménager là-bas. L'appel téléphonique le plus important que j'ai fait visait à savoir si Radio-Canada existait à Frobisher Bay et, chose encore plus importante, si Morningside était diffusé. L'agente a fait des recherches et quand elle m'a répondu par l'affirmative, j'ai dit d'accord, je peux déménager à Frobisher Bay.
CBC était le seul canal à Frobisher Bay lorsque j'ai déménagé là-bas et, dans l'ensemble, il était excellent. On avait le Hockey Night in Canada, parfois une journée en retard. On avait aussi la lutte midget le vendredi soir...
Des voix: Oh, oh!
Mme Catherine Pellerin: ... et ce n'était pas un des faits saillants.
La radio et la télévision de Radio-Canada nous donnaient le sentiment, à nous qui vivions en région éloignée, que nous vivions au Canada. Au printemps, lorsque Gzowski s'entretenait avec une personne à Victoria au sujet de l'apparition des bourgeons -- en février ou en mars, je crois -- et que nous savions que nous allions célébrer la fête du Canada dans la neige, nous avions le sentiment d'être un peu plus éloignés. En même temps, Radio-Canada nous aidait à sentir que nous faisions partie du Canada.
Quelques années plus tard, lorsque j'étais encore à Iqaluit, j'ai eu la chance d'accueillir Peter Gzowski pendant quelques jours. Il était venu durant notre festival Toonik Tyme. Il était impressionné par le nombre d'Inuits âgés qui venaient lui serrer la main et qui l'avaient reconnu à cause de sa brève incursion à la télévision. Son émission s'appelait « Gzowski Presents » ou peu importe; je ne m'en souviens pas. Quoi qu'il en soit, les gens étaient très heureux qu'il vienne dans le Nord.
Nous sommes ici, dans les Territoires du Nord-Ouest, et nous écoutons nos politiciens parler de transfert de responsabilités, mais le reste du Canada semble les ignorer jusqu'à ce que Radio-Canada capte nos émissions et les diffuse dans le sud du pays. Nous nous retrouvons tout à coup sur la scène nationale, nous recevons une certaine validation à cause de cela et les enjeux qui sont importants pour nous sont écoutés par le reste du pays.
Dimanche dernier, j'écoutais l'émission du matin de CBC et on a repris l'histoire de Dave Miller, d'abord diffusée sur CBC North, au sujet du carcajou, la légende et son importance pour les membres des premières nations ici dans les Territoires du Nord-Ouest. CBC North et le réseau national de Radio-Canada donnent aux gens des régions éloignées une voix qu'ils n'auraient pas autrement.
Lorsque la plupart d'entre nous vont dans le sud, les gens nous demandent d'où nous venons et nous disent qu'ils aimeraient tant visiter « le Yukon ». Le Yukon a une visibilité que les Territoires du Nord-Ouest n'ont pas. C'est peut-être parce que Pierre Berton, un de vos plus célèbres communicateurs, était originaire du Yukon. Ses contes du Yukon et la magie de la ruée vers l'or ont vraiment frappé l'imaginaire des gens du sud.
Les Territoires du Nord-Ouest n'ont pas établi ce genre de lien. Les gens ici ont besoin de CBC North pour transmettre leurs messages, et vous devriez avoir besoin de nous; nous sommes uniques de par notre territoire et notre population. Nous avons au moins 11 groupes linguistiques différents, sans compter les nouveaux Canadiens. Nous avons un gouvernement consensuel. Voilà qui est très particulier.
Le Canada ne serait pas le même sans le Nord ou sans Radio-Canada. Et Radio-Canada n'est pas seulement notre réseau, mais bien le réseau de radio et de télévision.
Je vous remercie.
Nous pouvons peut-être poser quelques questions aux premiers témoins. Nous pourrons ensuite entendre les autres témoins et terminer par une discussion ouverte.
J'aimerais dire une chose. Certains d'entre vous ont remercié le comité d'être ici et ont mentionné le court préavis qu'ils ont reçu. J'ai toujours été honnête et je vais vous dire que lorsque nous avons décidé de mener une étude sur Radio-Canada, notre diffuseur public, nous avions prévu de commencer en janvier. Puis nous avons eu un petit problème avec le Fonds canadien de télévision, auquel nous avons consacré quelques réunions, ce qui a retardé nos travaux sur le diffuseur public.
Je dois aussi vous dire que nous avions Vancouver, Winnipeg, Toronto, Montréal et St. John's, mais nous n'avions personne dans le Nord. Nous avons choisi Yellowknife, parce que nous avons jugé que c'était très important de venir ici. La question a été soulevée au cours de nos réunions, et nous en avons discuté; c'est de cette façon que nous travaillons.
Vous avez reçu un court préavis, mais c'était la même chose pour nous. Cela peut expliquer notre retard d'aujourd'hui; nous avons eu quelques problèmes.
Lorsque nous nous réunissions à Ottawa pour discuter de Radio-Canada, nous n'oublions jamais le Nord. Nous n'oublions jamais les francophones hors Québec. Pratiquement à chaque réunion que nous tenons sur CBC/Radio-Canada, on précise que ce sont tous les francophones du Canada qui sont concernés.
Monsieur Bagnell.
:
Merci, monsieur le président.
Je suis ravi que vous ayez choisi de venir dans les Territoires du Nord-Ouest, et à Yellowknife. Nous sommes très attachés à Radio-Canada dans le Nord, ce qui est évident ici. Je crois que c'est excellent.
À titre de député de Western Arctic, je peux comprendre la confusion entourant les noms géographiques. Nous ne sommes pas vraiment situés dans l'ouest, et d'une certaine façon, nous ne sommes pas dans l'Arctique, puisque la plupart d'entre nous vivons bien en-deçà de la limite forestière. Alors le nom de la circonscription n'est pas tout à fait juste. Cette circonscription représente une province en devenir. C'est une région très intéressante et importante du pays et qui fait partie de son avenir.
La présence de Radio-Canada est essentielle ici, évidemment, comme elle l'est dans les deux autres territoires; ils font partie de l'avenir du Canada. Le diffuseur public a un rôle très spécial à jouer dans cette entité politique unique et en développement que nous retrouvons dans les Territoires du Nord-Ouest, au Yukon et au Nunavut.
Ce sont de véritables enjeux qui sont liés à la présence de Radio-Canada ici. Les gens en ont fait allusion. Au début, bien sûr, Radio-Canada dans le Nord était toujours perçue comme un service très axé sur la communauté qui reliait non seulement les communautés, mais les personnes et les familles d'une façon très spéciale. Cette saveur s'est peut-être estompée.
J'ai quelques questions à vous poser, monsieur Shaw, au sujet du service de câblodistribution. Avec les différentes formes de communication que nous aurons peut-être dans l'avenir, existe-t-il, selon vous, des moyens de créer ces liens dont nous avons besoin dans le Nord — les liens personnels, les choses qui contribuent à notre unicité? Nous avons des liens fantastiques, des familles et des amis partout dans le Nord. Comment le service que vous fournissez peut-il les renforcer? Voyez-vous, dans l'avenir, des possibilités d'offrir de meilleurs services de vidéoconférence, ce que nous revendiquons dans le Nord depuis des années? Vous avez parlé de la vidéo en continu et de présentations sur Internet. Comment voyez-vous cette technologie évoluer avec les services que vous fournissez?
:
Je n'ai pas encore fini de préparer mes notes...
Très bien. Merci.
Je m'appelle Barbara Saunders. J'habite Yellowknife. Je suis une adepte de longue date de Radio-Canada. Mon fils a grandi en écoutant Radio-Canada. Je connais bien Don Herron, Peter Gzowski, Shelagh Rogers, ainsi de suite.
J'ai été témoin, situation que j'ai souvent dénoncée, de l'érosion de notre réputation de gardien de la paix, de notre régime universel de soins de santé, de notre réseau de transport et surtout, de notre système ferroviaire. J'ai été témoin de l'affaiblissement de la volonté politique en faveur d'une société qui valorise l'égalité entre les hommes et les femmes.
Je constate que Radio-Canada réussit à préserver, de manière générale, les principes qui nous définissent en tant que pays. Toutefois, je note que la Société sollicite davantage le point de vue d'experts américains sur divers dossiers. Je m'interroge à ce sujet, car je trouve la tendance inquiétante. Nous adoptons de plus en plus les idéologies et les politiques américaines, et cela me fait peur.
Radio-Canada est une entité très importante dans le Nord. Je suis déçue de voir que les caméras de Radio-Canada ne sont pas présentes ici ce soir. Je me demande pourquoi.
Pour ce qui est de l'absence de services offerts par la Société, Radio-Canada est considérée comme un outil de communication vital, surtout dans le Nord, et ce, pour toutes les cultures présentes. Quand nous écoutons Radio-Canada le matin, nous savons que les Gwich'in à Inuvik ou à Tuktoyaktuk, ou que les membres de la bande de Deline, dans le Sahtu, écoutent, parce qu'ils participent aux concours. Certains s'expriment dans leur langue.
Nous avons la chance d'entendre toutes ces langues Je ne les parle pas et ne les comprends pas non plus, mais j'aime bien les entendre — surtout quand mon nom est mentionné.
Quoi qu'il en soit, j'ai beaucoup de respect pour Radio-Canada. Je respecte le fait qu'elle constitue la principale entité qui garde vivantes la société et la culture canadienne. Que ferions-nous sans l'émission Canada Reads? Que ferions-nous sans les histoires que nous raconte Radio-Canada, les histoires canadiennes qui nous unissent, qui nous rassemblent, que les gens à l'échelle du pays écoutent, partagent?
Pour ce qui est des technologies, je me considère, à bien des égards, comme une technophobe. Je n'ai pas la capacité technique voulue pour les comprendre. Toutefois, je fais partie d'un segment important de la population, soit la génération du baby-boom. Vous savez que de nombreux enfants du baby-boom écoutent la radio et la télévision de Radio-Canada et qu'ils ont beaucoup de respect pour la Société. Si vous supprimez, changez ou modifiez tout aspect de la radio ou de la télévision de Radio-Canada, nous allons protester massivement — et nous sommes nombreux.
Je respecte le savoir technique de nos jeunes, qui utilisent des iPod et autre produits du genre. M. Shaw a parlé de la SRC et de Sirius, du fait que nous allons souvent sur l'Internet pour nous informer. Je ne suis pas d'accord. Je pense que la majorité des Canadiens se fient à la radio ou à la télévision pour leurs informations, pas à l'Internet. Je pense qu'une majorité d'entre nous continue de le faire.
Je ne suis pas en mesure de vous fournir des données scientifiques, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'il est important de se familiariser avec les différents modes d'écoute, d'apprentissage qui sont utilisés à l'échelle du pays. Nous n'avons pas tous la capacité de comprendre les nouvelles technologies. De plus, nous devons nous rendre à l'évidence que la parole est un outil beaucoup plus puissant que les autres technologies utilisées pour diffuser des histoires, de l'information — pour assurer le « transfert de connaissances », pour reprendre l'expression utilisée par le gouvernement.
Radio-Canada doit demeurer un diffuseur public entièrement financé à même les deniers publics. Nous ne pouvons nous permettre de perdre ces acquis. Le fait de vendre même une part du réseau aura pour effet de miner ce que je considère être comme la dernière entité qui unit les Canadiens.
Merci de votre attention.
:
Bonjour. Je m'appelle Lois Little. Je vis à Yellowknife et je comparais à titre personnel.
Je suis heureuse de vous rencontrer, de voir que vous êtes prêts à écouter ce que les habitants du Nord ont à dire. Je suis certaine que vous avez l'impression que nous sommes tous des ardents défenseurs de la radiodiffusion publique.
Je fais partie de ce groupe. J'écoute la radio de Radio-Canada toute la journée, y compris les émissions diffusées en langues autochtones. Cela me permet de garder à l'esprit l'endroit où je vis, les cultures qui m'entourent, et aussi de comprendre les gens que je côtoie.
Pour moi, la radiodiffusion publique est l'expression ultime de la démocratie. Elle représente la voix des citoyens. Elle reflète nos idées, nos valeurs, notre point de vue. C'est un mélange de toutes ces choses. Elle se veut le porte-parole des hommes, des femmes. Elle illustre la diversité de nos cultures, de notre vision. Voilà ce qu'est la démocratie.
Pour moi, Radio-Canada est, dans une large mesure, l'essence même de la démocratie. En ce XXIe siècle, alors que la démocratie est menacée de par le monde, il est important que Radio-Canada garde vivant l'esprit de la démocratie au Canada. Cet esprit est très fort dans le Nord. Les multinationales commencent à s'installer dans la région, à façonner l'opinion publique, à influencer nos très petits gouvernements, petits de par leur taille. Il est donc important que Radio-Canada serve de porte-parole aux citoyens qui veulent s'exprimer, se faire entendre.
J'aime beaucoup le réseau de radiodiffusion publique. J'adore le fait qu'il n'y a aucun intérêt commercial ou politique qui influence Radio-Canada. J'encourage le comité à faire de cet élément un volet du mandat du réseau au XXIe siècle: aucun intérêt commercial et politique ne doit influencer le radiodiffuseur public.
C'est parce que je suis un ardent défenseur de la radiodiffusion publique que j'ai des attentes très élevées à l'égard du radiodiffuseur public. Les responsables de Radio-Canada ici présents grincent probablement des dents quand ils entendent la voix de Lois Little, qui a toujours un commentaire à faire sur un sujet quelconque. Cela fait partie de mon rôle de citoyenne. Nous avons le devoir, dans une démocratie, de nous exprimer et de nous faire entendre.
Je n'ai pas l'intention de réduire mes attentes à l'égard du gouvernement ou du radiodiffuseur public, car ces entités me représentent. Je m'attends à ce que le radiodiffuseur public exprime les diverses vues, valeurs et perspectives de ce territoire. Je m'attends à ce qu'il diffuse des émissions en anglais et en français, et aussi dans toutes les langues autochtones. Je m'attends aussi à ce qu'il fasse preuve de créativité lorsqu'il utilise les ressources mises à sa disposition et met en équilibre toutes les vues et cultures qui existent. Je m'attends à ce que le radiodiffuseur public remplisse de manière professionnelle le mandat qui lui est conféré.
C'est avec toutes ces attentes élevées à l'esprit que j'ai dressé la liste, en janvier, des résolutions du Nouvel An du radiodiffuseur public. Ces résolutions mettent l'accent sur la programmation régionale, qui me tient à coeur. J'attache en effet beaucoup d'importance au mandat à la fois régional et national de Radio-Canada. Toutefois, c'est sur le volet régional que je peux exercer le plus d'influence. J'ai donc dressé une liste de neuf résolutions pour le radiodiffuseur public régional. Je l'encourage à faire preuve d'une plus grande créativité, d'un plus grand professionnalisme à l'égard du mandat de Radio-Canada.
À l'encontre de certains autres intervenants, je ne crois pas que Radio-Canada soit totalement efficace. Je ne crois pas qu'il faut tout simplement laisser les choses suivre leur cours. Radio-Canada doit redoubler d'efforts, refléter davantage toutes les voix du Nord.
Sur le plan régional, il est important de faire en sorte que l'on entende toutes les voix, que la programmation régionale ne devienne pas un fouillis d'idioties commerciales. Cela ne sert ni l'intérêt public, ni la démocratie.
J'aimerais que le comité impose des normes plus sévères à Radio-Canada, tant au plan national qu'au niveau régional, parce que j'ai des attentes très élevées à l'égard de mon radiodiffuseur public.
Merci beaucoup.
Je n'ai pas réussi à faire fonctionner mon imprimante, ce qui fait que je dois lire mon texte sur écran. Je vous pris de m'excuser.
Je m'appelle Ben McDonald. Le comité m'a demandé, plus tôt, alors que je m'enregistrais, si je représentais un groupe. Si j'avais eu plus de temps pour me préparer, j'aurais sans doute pris la parole au nom d'un groupe. Je fais partie de coalitions pour la justice sociale et aussi d'organismes qui prônent une plus grande utilisation des technologies de l'information et des communications dans les Territoires-du-Nord-Ouest. Je n'ai pas été en mesure de produire un document que tous auraient pu appuyer, de sorte que je comparais ici à titre personnel.
Cela dit, ces organismes se sont dotés d'un cadre qui fait état de leur engagement envers l'égalité, la démocratie, la liberté d'expression.
Je dois d'emblée vous dire que pour préparer mon exposé, je suis allé sur le site Web des Amis de la radiodiffusion canadienne. Je suis certain que vous connaissez cette association. J'appuie de manière générale les positions qu'elle défend dans les divers mémoires qu'elle présente aux comités et aux organismes gouvernementaux — par exemple, sur la nomination et la composition du conseil d'administration de Radio-Canada.
Les Amis de la radiodiffusion canadienne affirment que nous avons raison de nous inquiéter, car le conseil n'est pas une entité entièrement indépendante. Il ne travaille pas de façon tout à fait autonome et il n'est pas à l'abri de toute ingérence politique. À mon avis, le mode de nomination du président — il est nommé par le gouverneur en conseil ou le premier ministre, de manière directe ou semi-indirecte — comporte bien des dangers et doit être revu. Il serait préférable que le président de la société soit nommé par le conseil, à qui il doit rendre des comptes.
On trouve d'autres éléments sur le site des Amis de la radiodiffusion canadienne — au sujet des différentes formes de technologies d'information, au sujet des moyens par lesquels CBC/Radio-Canada pourrait recueillir de l'argent —, mais je vais simplement vous adresser à ce site, plutôt que d'utiliser du temps ici pour le faire. Ceci dit, il y a une chose sur le site qui m'étonne passablement et il s'agit de données statistiques qui, je pense, ont été produites par un organisme de recherche au nom du gouvernement et qui montrent que le niveau de financement de CBC/Radio-Canada arrive au 20e rang parmi 25 pays de l'OCDE, en termes de proportion du produit intérieur brut.
J'ai été assez étonné de cette donnée statistique. Compte tenu des 10 années et plus de compressions budgétaires que nous avons connues, d'autres télédiffuseurs publics sont financés à des niveaux plus élevés en termes de proportion du PIB que CBC/Radio-Canada. La position des Amis, c'est qu'il serait préférable de suivre la moyenne de l'OCDE. Compte tenu des compressions budgétaires des dernières années et l'importance de CBC/Radio-Canada pour la structure du pays, je ne suis même pas certain que ce soit acceptable. Des pays comme la Finlande, l'Allemagne et l'Angleterre ont une contribution à l'égard de leur télédiffuseur public qui est presque le double de celle du Canada.
Une grande partie de ce que je vais dire sera une répétition de ce que d'autres personnes ont déjà dit. Un télédiffuseur public est nécessaire, surtout dans le Nord, parce qu'il s'agit vraiment du seul fournisseur en ville lorsqu'il s'agit d'une perspective nordique ou panterritoriale. Aucun organisme dans le Nord n'a les ressources du télédiffuseur public pour faire la recherche, et l'analyse, et raconter les histoires.
Je suis d'accord avec les deux parties: je suis un ardent défenseur de CBC/Radio-Canada, mais pas au point de croire qu'il n'y a pas de place pour l'amélioration. Quant à savoir comment cela doit se faire, je ne suis pas un expert. Je crois qu'il y a des problèmes dans le Nord qui ne sont pas traités de manière appropriée. Parfois j'entends — sauf tout le respect que je dois à ceux qui ont pris la parole avant moi — qu'il n'y a pas de penchants idéologiques à CBC/Radio-Canada. Eh bien, assez souvent, je dirais 99,9 p. 100 du temps, je ne peux voir de différence idéologique entre les bulletins de nouvelles, l'analyse, et les histoires en provenance de CBC/Radio-Canada et ce que je vois dans le secteur privé. La différence n'est pas aussi marquée que cela.
Ce qui est très déterminant, cependant, c'est qu'au moins CBC/Radio-Canada a le mandat, la souplesse et l'indépendance nécessaires pour pouvoir prendre une position différente, si c'était nécessaire. Les télédiffuseurs privés, qui sont redevables à leur conseil de direction, resteront fidèles à ce dernier. Si nous avons un conseil bien constitué dont les membres sont bien nommés, alors, CBC/Radio-Canada, s'il y a une bonne raison pour qu'un point de vue différent soit rendu public, aura au moins la souplesse nécessaire et, je l'espère, l'intégrité nécessaire, pour permettre que cela se fasse.
CBC/Radio-Canada est nécessaire pour fournir une voix différente — je ne fais probablement qu'ajouter à ce qui a déjà été dit auparavant — dans la dichotomie public et privé, mais également, dans le monde des affaires de plus en plus déréglementés et concentrés. Je pense que l'expérience des médias américains, surtout dans le domaine de la presse, c'est qu'au fur et à mesure que les grandes entreprises mettent la main sur les entreprises familiales, leurs attentes pour ce qui est du taux de rendement augmentent de manière spectaculaire. La façon de réaliser ces hauts taux de rendement, c'est de cibler les parties les plus molles de l'organisation, et les parties les plus molles sont habituellement la couverture des bulletins de nouvelles et l'analyse, les choses mêmes pour lesquelles nous regardons CBC/Radio-Canada.
Je pense que nous devons garder à l'esprit que le fait de nous orienter vers une activité du secteur privé ne signifie pas que nous aurons quelque chose de comparable à CBC/Radio-Canada, parce qu'il faut des fonds publics pour que nous ayons le genre de CBC/Radio-Canada que nous voulons tous avoir.
Et comme point final, je ne suis pas absolument certain de la façon dont le conseil est constitué à l'heure actuelle, mais je crois qu'il doit y avoir des voix régionales au sein du conseil de CBC/Radio-Canada. Je comprends que ce sera un défi politique très difficile de déterminer quelles régions méritent une représentation et combien il y en aura. Je ne crois pas que les voix régionales doivent venir au détriment de la bonne orientation des affaires, de la connaissance journalistique, de l'engagement culturel et de toutes ces autres choses, mais il me semble que pour sortir CBC/Radio-Canada de Toronto, et de Montréal — je suppose que c'est la SRC, que je ne regarde pas —, une partie de la solution, c'est de faire entrer d'autres voix. Une des façons de le faire serait de préciser des voix régionales, et, peut-être, des voix culturelles, si l'on tient compte de la taille de la population autochtone au Canada. Surtout dans le Nord, il se pourrait très bien que nous ayons besoin de voix autochtones au sein du conseil de direction également.
J'ai un dernier point. Il s'agit d'une rumeur non fondée, mais si elle est vraie, je pense qu'elle est symptomatique des problèmes qu'a éprouvés CBC/Radio-Canada au cours des dernières années. J'ai entendu dire que dans la décision récente de passer d'un bulletin de nouvelles régionales d'un demi-heure à un bulletin de nouvelles régionales d'une heure complète, on n'a pas modifié les ressources attribuées au programme. Le fait de doubler la durée du programme sera absorbé d'une façon quelconque par CBC/Radio-Canada et, dans ces circonstances, pas CBC Nord plus particulièrement — tout cela après une dizaine d'années de compressions budgétaires.
Encore une fois, il s'agit d'une rumeur non fondée, mais je vous demanderais d'aller voir si c'est le cas ou si cela a été le cas. Si oui, alors, il sera très difficile à CBC/Radio-Canada de remplir son mandat dans le Nord — à savoir, de refléter les voix du Nord pour les gens du Nord eux-mêmes et pour le reste du Canada.
C'est là-dessus que je m'arrête; je vous remercie.
Comme tout le monde, je me réjouis de votre présence. Ce n'est pas une figure de style, on vous attend depuis très longtemps et on est content de vous voir et de pouvoir vous parler.
Je vais compléter la présentation qu'a faite mon collègue le directeur général de la Fédération Franco-TéNOise. Je ne vais pas revenir sur beaucoup de points dont il a parlé puisque, comme il l'a dit, sa présentation reflétait les préoccupations du réseau associatif francophone. Par contre, je vais m'attarder un peu plus sur la situation spécifique de Yellowknife, puisque c'est celle que je connais. Je dirige l'association franco-culturelle locale.
En premier lieu, monsieur le président, vous avez un peu expliqué pourquoi, mais je veux quand même souligner une chose. Étant donné les besoins qui existent dans le Nord, on est un peu surpris de vous entendre dire que vous ne vous déplaciez qu'à Yellowknife. Je peux comprendre pourquoi, mais je le souligne quand même.
En effet, les réalités du Nunavut et de Whitehorse sont bien différentes. On voit même ici, dans les Territoires du Nord-Ouest, que les réalités de Yellowknife, Hay River, Fort Smith et Inuvik sont très différentes les unes des autres. On peut donc imaginer ce qui se produit lorsqu'on s'en va à l'extérieur.
Étant donné qu'il y a eu des présentations avant la mienne, j'ai inséré des petites remarques dans mon texte. Je vais donc faire souffrir un petit peu notre interprète.
La question a été posée par Mme Bourgeois. En ce qui a trait au mandat de la Société Radio-Canada, tel qu'il nous a été présenté dans l'avis de convocation, M. Provencher a souligné qu'on était d'accord sur ce mandat, mais qu'on avait l'impression qu'il n'était pas nécessairement rempli.
J'aimerais qu'on examine ce mandat, et on verra qu'il n'y a pas d'énoncé expliquant comment la société va s'outiller pour s'acquitter de ses obligations. Quand on lit l'énoncé du mandat, on voit qu'il manque la portion liée à l'outillage pour remplir son mandat.
La venue du Comité permanent du patrimoine canadien a été l'occasion pour notre association de chercher un peu dans la mémoire corporative ce qui se passait relativement à notre fameuse antenne de Radio-Canada. M. Provencher l'a dit, on souffre d'un roulement de personnel qui est la conséquence du roulement de citoyens. Par conséquent, les mémoires se perdent, les archives se déplacent. Je vous remercie encore une fois, parce que c'était un exercice très salutaire.
Il est important de savoir que c'est autour du besoin de transmission en français que la communauté francophone à Yellowknife, et par la suite dans les Territoires du Nord-Ouest, s'est formée. C'est le besoin de recevoir le signal qui a été à l'origine de la formation de ce qui était à l'époque l'Association culturelle franco-ténoise.
À l'époque, on s'était fait dire qu'acheminer le signal dans les Territoires du Nord-Ouest ne faisait pas partie des plans de la société d'État. C'est en 1991 que le dossier a abouti. La lutte a été longue, mais en 1991, on a finalement pu capter la radio et la télévision françaises de Radio-Canada en provenance de Montréal.
La lutte a été longue, mais peut-on dire qu'elle a été gagnée? Ce qui ressort de nos recherches aujourd'hui, c'est ce qui a disparu des mémoires. Étant donné que tout le monde capte Radio-Canada en français, on a oublié que Radio-Canada ne diffuse pas ses émissions dans les Territoires du Nord-Ouest. Qui distribue le signal de Radio-Canada à Yellowknife? C'est l'Association franco-culturelle de Yellowknife.
Au moment de préparer cette présentation, je n'ai pas été en mesure d'établir exactement les coûts que ça représente. Il faut dire aussi que ça s'est un peu perdu dans les archives, dans la mémoire de l'association. Nous avons une facture annuelle de 6 400 $ pour la location de l'espace qui nous permet de procéder à la diffusion. Mettez-y un bémol, cependant, étant donné qu'il nous reste à déterminer exactement ce qui correspond à notre radio communautaire, d'une part, et à la diffusion de Radio-Canada, d'autre part.
Quel que soit le montant facturé, il n'en demeure pas moins que notre communauté paie, à même les fonds qui lui sont alloués par le ministère du Patrimoine canadien pour le développement communautaire, un service que d'autres communautés obtiennent par l'entremise des impôts payés par l'ensemble des citoyens. Comme le disait plus tôt Batiste Foisy, on paye deux fois ce service.
Pour répondre à M. Bevington, je préciserai qu'en cas de bris, c'est nous qui devons assumer le coût des réparations, étant donné que nous sommes propriétaires des équipements. Bien sûr, on se demande comment réagiraient les citoyens de l'Ontario ou du Québec si Radio-Canada leur annonçait tout à coup qu'ils doivent former une association pour être en mesure de recevoir Le Téléjournal en français et de payer la réparation de l'antenne, qui s'est brisée. On aimerait que le comité se penche sur la question et nous dise combien de communautés minoritaires de langue officielle au pays se trouvent dans cette situation.
En entendant les présentations qui ont précédé la mienne, je vous avoue avoir éprouvé un peu de jalousie ou d'envie. Je sais ce que ressentent les gens quand ils parlent de leur attachement à la CBC. J'ai vécu la même chose au Québec à l'égard de la programmation française de Radio-Canada. Je sais ce que signifie avoir une radio de bonne qualité, qui nous ressemble. Il est vrai qu'au Québec, Télé-Québec fait fortement concurrence à Radio-Canada. Par contre, dans le domaine de la radio, aucun concurrent n'égale Radio-Canada.
Je comprends et je m'accroche à ce que disent les gens d'ici, mais en fin de compte, quand j'écoute ici la radio de Radio-Canada, je constate qu'elle ne suscite pas de sentiment d'appartenance chez les gens du Nord. Elle me donne l'impression d'être une exilée et me rappelle constamment que je ne fais pas partie de la classe.
À l'égard du sentiment d'appartenance que le Canada veut créer partout au pays, la société Radio-Canada a un grand rôle à jouer, mais elle faillit à sa tâche.
Pour conclure, nous espérons que les audiences d'aujourd'hui donneront des résultats tangibles. J'aimerais rappeler qu'on a maintenu le service pendant 16 ans et qu'on a financé la SRC à même des budgets déjà restreints. Je crois que l'AFCY a prouvé l'intérêt constant de la communauté francophone pour ce qui est de recevoir les émissions françaises de la SRC.
J'aimerais souligner que personne ne savait que c'était l'AFCY qui offrait ces émissions à la population. Même nous ne le savions pas, jusqu'à récemment. Il y a un an environ, quand on m'a dit que c'était ce qui justifiait le montant de la facture, j'ai dit que c'était impossible et que ça devait être des coûts de la radio communautaire. Mais non. Grâce à votre venue, nous nous sommes rendu compte des faits. Or, quand on regarde la télé, il n'y a pas de petit logo au bas de l'écran indiquant que la transmission est possible grâce à l'Association franco-culturelle de Yellowknife. Les gens qui syntonisent Radio-Canada pensent que cette transmission est offerte par cette dernière.
À mon avis, il serait temps que la société Radio-Canada mette en oeuvre des moyens efficaces pour alléger le fardeau de l'association culturelle locale, qui a d'autres dossiers à gérer.
Je vous remercie de votre attention.
:
Je m'appelle Aggie Brockman et je parle à titre de simple citoyenne du Canada.
D'autres personnes ont parlé de l'importance de CBC/Radio-Canada et certainement, elle est importante pour moi. Probablement qu'un certain nombre de personnes ici sont allées dans les petites collectivités du Nord et ont été interviewées par une station de radio locale. La façon dont cela fonctionne, c'est que la station de radio locale à Fort McPherson, ou à Behchoko, ou à Paulatuk, se détache de CBC/Radio-Canada pendant une heure ou deux par jour pour offrir une programmation locale. Ensuite, elle se rattache à CBC/Radio-Canada. Malheur à celui ou celle qui oublie d'actionner ce commutateur pour ramener CBC/Radio-Canada; le téléphone se met à rougir immédiatement. Les gens veulent la programmation locale et c'est une occasion de le faire, mais ils veulent également retourner à CBC/Radio-Canada.
Comme l'on dit d'autres personnes, c'est un service crucial ici. Si le directeur de l'école de Fort Good Hope veut faire savoir aux gens que l'école est fermée aujourd'hui, c'est de cette façon qu'il peut le faire.
J'attache beaucoup d'importance à la programmation en langues autochtones sur la chaîne de CBC/Radio-Canada. Nous obtenons trois heures et 15 minutes du lundi au vendredi et une heure le samedi. Je pense que c'est très important. Je regardais le mandat de CBC/Radio-Canada et j'ai constaté que la programmation en langues autochtones n'y figurait pas de manière explicite. Mais peut-être que ce devrait être le cas et cela pourrait être quelque chose que le présent comité pourrait envisager pour des régions du pays qui comptent une population autochtone importante. Il est indispensable, comme l'a dit Lois, de savoir où nous vivons. Il s'agit également d'un élément déterminant pour la conservation de la langue, question très importante ici, je pense.
Ce que j'aimerais dire, c'est qu'il y a certaines choses qui ne devraient pas être privatisées. Vraiment, CBC/Radio-Canada est le seul fournisseur en ville qui peut fournir un certain type et un certain niveau de service dans le Nord.
Est-ce que CBC/Radio-Canada nous dessert bien et est-ce que CBC/Radio-Canada reçoit suffisamment d'argent pour remplir son mandat? De toute évidence, ce n'est pas le cas pour la communauté francophone, malheureusement, et j'espère que votre comité fera certaines recommandations à cet égard. Je suppose que la société ne répond pas aux attentes du public à certains autres égards. Je parle un peu par expérience parce que j'ai travaillé à CBC/Radio-Canada, bien que ce soit il y a déjà assez longtemps. À l'heure actuelle, il arrive souvent que le service des nouvelles de CBC/Radio-Canada ne puisse couvrir des événements si les événements ont lieu la fin de semaine ou après 17 heures à cause des frais de surtemps ou d'un autre obstacle quelconque. Je ne pense pas que cela nous dessert bien. Bien des choses surviennent en dehors des heures de travail normales — les présentes audiences, par exemple.
Je ne pense pas que les gens du service des nouvelles ont la possibilité de se déplacer comme ils pouvaient le faire à l'époque où j'y étais. Il est important qu'ils aient la capacité de se déplacer et non pas uniquement lorsqu'il y a un événement majeur comme les jeux d'hiver à Whitehorse. Il est nécessaire de pouvoir vous rendre dans les petites collectivités pour établir des relations, pour raconter les histoires qui, sans être fracassantes, sont tout de même importantes pour les gens. On ne parlera jamais de ces histoires si les journalistes ne vont jamais dans ces petites collectivités. Les gens se fient plutôt aux histoires de Yellowknife, comme les décisions des tribunaux qui, en fait, sont rapportées dans nos journaux. Alors, beaucoup d'histoires intéressantes passent sous silence à cause des limites imposées aux déplacements.
Je pense qu'il y a un accent sur les programmes sportifs, certainement à une échelle nationale. Je ne suis pas certaine si c'est parce que cela génère des recettes alors que d'autres choses, comme les arts et la culture, n'en génèrent pas. Nous voyons des comédies de situation américaines et britanniques plutôt que des émissions originales. À la radio et à la télévision, on nous offre des reprises, et non pas toujours de nouvelles émissions.
Nous voyons des gens faire des entrevues faciles. Même les programmateurs régionaux font des entrevues portant sur les histoires nationales, sans une perspective nordique, parce que ces entrevues sont faciles. Ce sont des entrevues qui sont conçues par des producteurs du Sud, alors il n'y a pas d'accent sur les histoires nordiques.
Nous ne voyons pas d'augmentation de la production télévisuelle basée dans le Nord sur la chaîne de CBC/Radio-Canada, même si la télévision est présente dans la Nord depuis plus de 25 ans.
Il y a des choses pour lesquelles je pense que nous avons besoin de plus d'argent, et non pas de moins d'argent, pour nous assurer que nous avons un meilleur service.
Merci beaucoup de l'occasion de me faire entendre.
:
Il m'est très difficile d'être brève, monsieur le président.
[Français]
Mesdames, vous avez toutes les quatre parlé de l'importance de conserver la CBC; M. McDonald l'a soulignée également. Je ne pense pas que le comité ait le mandat de rayer définitivement CBC de la carte. On sait que dans certaines communautés, elle offre de très bons voire d'excellents services, compte tenu du peu d'argent dont elle dispose et des nombreuses réductions qu'elle a subies au fil des ans.
Certaines d'entre vous ont parlé de leur attachement envers Radio-Canada. Dites-vous bien qu'au Québec aussi, bien des Québécois y sont attachés. D'ailleurs, les cotes d'écoute démontrent clairement qu'à certains moments, la radio de la CBC dessert très bien la communauté.
Par contre, la culture canadienne pourrait être menacée de disparition, comparativement à la culture québécoise. Je m'explique. Avec la venue des câblodistributeurs, qui font entrer par brassées les émissions américaines, attendez-vous à avoir énormément de difficulté à conserver vos émissions canadiennes anglaises.
En tant que Québécoise, je me sens un peu mal à l'aise ce soir de défendre votre culture alors que certains de nos députés vont devoir défendre la culture francophone sur leur territoire.
Bien entendu, madame Moral-Suarez, un des premiers sujets dont on parlera au comité sera la situation entourant votre antenne. Je ne sais pas exactement comment formuler la chose, mais je sais par contre qu'il est inacceptable que votre association doive assumer ces obligations pour maintenir une antenne dans la région.
Je sais que des gens de Radio-Canada sont présents ce soir. J'imagine qu'ils vont vérifier dès demain ce qui se passe. Il est inacceptable qu'on ne vous accorde aucun crédit du fait que vous maintenez une antenne dans votre région. Par ailleurs, si Radio-Canada est en mesure d'assumer la chose, peut-être pourrait-elle le faire.
:
Merci. Je pense que nous allons devoir conclure cette période de questions ici.
Pendant ce voyage, nous avons mentionné que nous allions nous arrêter dans le Nord, mais seulement à Yellowknife. Nous tenons aussi des séances à Ottawa. Nous invitons des personnes de tout le pays. Nous voulions venir à Yellowknife pour voir ce qui se passe ici. Demain, nous avons l'intention de visiter les installations de la SRC, à Yellowknife.
Nous voulions donc voir un peu ce qui se passait ici. Nous allons également recevoir d'autres personnes, du Yukon ou d'Inuvik, qui vont venir nous partager leur point de vue elles aussi. Nous prenons notre semaine de relâche pour voyager. Quand un gouvernement est minoritaire, on ne peut pas s'éloigner beaucoup d'Ottawa pendant que la Chambre siège. C'est donc habituellement le moment où les comités voyagent.
Cette semaine, nous prenons en partie le temps que nous devions passer dans nos circonscriptions à nous occuper de nos affaires chez nous pour venir ici et nous assurer d'entendre les gens de Yellowknife. Nous avons tenu des audiences à Vancouver mercredi. Nous essayons de faire tout cela, en plus de rentrer chez nous pour nous occuper de nos électeurs.
J'espère que vous comprendrez un peu pourquoi notre voyage n'est pas plus complet. J'aimerais beaucoup faire un voyage complet, à condition que nous n'ayons pas à noliser un avion chaque fois que nous partons.
Je vous remercie beaucoup de vos exposés et de vos réponses. Ils sont très appréciés.
Nous allons prendre une courte pause, puis inviter Terry Wolfe, David Prichard et Gérald Lavigne à s'avancer.
:
Bonsoir, mesdames et messieurs.
On m'a dit que c'était une petite visite à l'improviste, donc je n'ai pas préparé d'exposé officiel; je m'en excuse. La jeune femme qui m'a invité m'a également informé que je devais être bref.
J'ai lu aujourd'hui qu'Intel allait mettre une nouvelle puce en marché. Elle devrait sortir dans environ deux ans. Elle sera plus puissante que dix milliers de 486 d'environ 1994.
J'ai commencé ma carrière dans les médias comme caméraman pour Budge Crawley, et j'utilisais alors sa vieille caméra Mitchell de 35 mm et une pellicule couleur. Cela montre à quelle vitesse les médias ont changé, et c'est la raison pour laquelle la discussion que vous avez ici est déjà dépassée en grande partie.
Pour vous donner un exemple, on m'a demandé de donner un cours de photographie dans un village. Je vais y aller en personne, mais les membres de la collectivité ne peuvent pas se permettre de me faire venir chaque fin de semaine, comme je le voudrais. En raison des coûts et de la distance, tout se fera donc par Internet.
Je ne lis plus de journaux. Contrairement à ce que d'autres personnes vous ont dit, la plupart des gens lisent dorénavant les nouvelles sur Internet plutôt que dans le journal.
Je pense que la Société Radio-Canada ne s'est pas installée à Yellowknife avant 1964, si je ne me trompe pas. Auparavant, les signaux relevaient du Royal Canadian Regiment. On trouve quelque part sur le Web une photo d'un préposé aux signaux de radiodiffusion à Yellowknife, qui pose, une bière à la main, devant une affiche présentant une pin-up de Vargas. Ce ne serait plus permis dans les médias de nos jours, pas pendant les heures de travail du moins.
Cela montre à quel point les choses ont changé. Je ne suis pas un ennemi de la SRC, mais elle a perdu sa pertinence à mes yeux. J'ai entendu les préoccupations des francophones un peu plus tôt aujourd'hui. Ce sont eux qui ont parlé pendant l'essentiel des deux heures. Je ne m'en plaint pas, mais la population francophone représente 5 p. 100 de la population des Territoires du Nord-Ouest. Les Autochtones, quant à eux, représentent 60 p. 100 de la population. Avez-vous entendu des Autochtones? Je n'en ai pas vus.
Ne serait-ce que pour cette raison, elle n'a presque aucune pertinence. On ne peut pas planifier un service dans le Nord sans demander à la population autochtone ce qu'elle veut.
Pour ce qui est de la signification que va prendre la nouvelle technologie, ce n'est pas par pure coïncidence que Bill Gates, à la fin de 1996, a dit que l'Internet n'était qu'une mode. Bill Gates investit aujourd'hui beaucoup plus dans les sociétés de communications et de transmission des communications que dans celles qui fabriquent des logiciels et des ordinateurs, parce que c'est l'avenir.
Je syntonise une station de radio de Toronto, parce que je connais quelqu'un qui y produit une émission. Ma femme écoute la radio d'une autre station de Toronto parce qu'elle a un ami qui y diffuse une émission. Je suis tout ce qui se passe, d'Al Jazeera à la BBC, en passant par le New York Times, et je vois que le monde change.
Je ne dirais pas que je déteste la SRC, mais vous avez trahi votre mandat. À une certaine époque, nous étions des leaders dans le monde avec l'Office national du film, particulièrement pour la production de documentaires. Je pense qu'il ne serait pas exagéré de dire que si toutes les personnes qui ont été formées au Canada ou par un Canadien désertaient Hollywood, Hollywood s'effondrerait du jour au lendemain. Ce n'est pas compliqué.
Vous savez, je ne vois rien de ma vie à la SRC. Je ne vois rien de ma vie à Global TV et je ne vois rien de ma vie à CTV. Je n'y vois pas la vie de mes amis, ni celle de mes connaissances personnelles ou professionnelles non plus. Pourquoi est-ce que j'écouterais leurs émissions?
Je ne lis plus le Toronto Star sur Internet, même si je l'ai déjà fait. Ce journal ne parle que des meurtres commis à Toronto. Il y en a; pourquoi est-ce que je voudrais m'informer là-dessus?
Les blogues sont-ils l'avenir? Certains d'entre vous connaissez peut-être Donald Crowdis. Je pense qu'il a été le premier présentateur de l'émission The Nature of Things. Aujourd'hui, il a un blogue sur Internet qui lui attire probablement un public encore plus vaste que celui qu'il avait quand il était diffuseur professionnel.
Vous voudrez peut-être vous demander, monsieur Bevington, si vous le voulez, pourquoi la qualité de la large bande est si mauvaise dans le Nord. Chaque fois que j'appelle mon fournisseur de services d'ici, il me répond que le problème est en aval, et donc que c'est Telus qu'il faut blâmer. J'aimerais bien que le monsieur de Northwestel soit encore ici. C'est peut-être ce qui se passe, personne ne se soucie de nous, dans le Nord. Par contre, Bell Communications a lancé un satellite Internet pouvant offrir de la large bande par satellite dans tout le pays et dans le Nord. C'est l'avenir. La puissance de l'ordinateur s'en vient.
Je n'ai pas besoin de journaliste. J'ai été un peu choqué quand ce jeune homme a parlé des journalistes un peu plus tôt. Sur Internet, j'ai lu le rapport de pathologie sur le couple Bernardo-Homolka, mais nous n'en parlerons pas maintenant. Cela montre seulement à quel point l'Internet gagne en puissance.
Quand les médias ont eu la chance de contester notre système judiciaire, ils ont refusé de le faire, et notre appareil judiciaire s'en trouve appauvri aujourd'hui. Il y a une meurtrière en liberté qui ne devrait pas être libre, à mon avis. Je laisse ce genre de chose... Pour moi, les médias sont devenus une idéologie; je me fous de savoir de qui il s'agit. Je ronchonne chaque fois que ma femme apporte le National Post à la maison, mais au moins, il est bien utile pour partir un feu.
Si la SRC veut retrouver sa raison d'être, elle doit faire ce qu'elle faisait il y a 50 ans avec une nouvelle technologie: prenez vos jeunes petits génies, qui sont trop stupides pour savoir qu'ils n'en savent pas assez, et donnez-leur la pleine liberté d'action. Permettez-leur d'établir des sites Web. L'un des meilleurs sites Web que j'ai jamais vus et qui est apparu très tôt sur Internet était un site des Ojibway, dont la conception était brillante.
Il n'y a aucune raison pour que la SRC ne puisse pas offrir les outils nécessaires et s'acquitter de son mandat original pour former des gens dans le Nord et partout au pays. Nous avons déjà observé un énorme changement dans notre vie. La SRC peut s'adapter au changement ou perdre toute pertinence.
Dans le Nord aujourd'hui, Global Television vient de retirer des ondes son représentant local. Nous sommes venus ici en raison du travail de ma femme, et j'ai décidé de revenir à ma discipline d'origine, la photographie. Les gens du CP et de la série de journaux Sun, ainsi que de divers journaux m'ont dit qu'ils manquaient cruellement de personnes pour couvrir les nouvelles dans le Nord. Ils n'avaient personne. Mais personne ne prend ce que j'envoie au Sud. Personne ne prend jamais ce que les gens que je connais envoient au Sud.
Ce n'est pas pour rien que les gens ne savent rien du Nord. Je dois admettre que quand ma femme et moi sommes déménagés ici, ce n'était vraiment pas ce à quoi nous nous attendions. Je ne pense pas que les médias du Nord...
Vous vous rappelez peut-être d'avoir vu un spectacle à la SRC il y a quelques années dans le cadre du festival Folk on the Rocks. Nos amis du Sud nous écrivaient tous des courriels pour nous demander: « Est-ce ce qui se passe à Yellowknife? Ce doit être un excellent endroit où vivre. »
C'est une question de technologie, et la SRC a été une pionnière dans le domaine de la technologie pendant longtemps. Si elle veut rester pertinente pour la nouvelle génération, elle doit rester une pionnière de nos jours.
Merci.
C'est fascinant, vous avez commencé par dire exactement ce que je voulais dire: bien que 50 p. 100 de la population d'ici soit autochtone, nous n'avons pas plus entendu parler des Autochtones. Je suis déçu, mais je ne blâme personne. C'est seulement malheureux; ils s'expriment très bien.
Je dirai à la défense du gouvernement du Canada que nous investissons énormément... Premièrement, comme vous l'avez déjà dit, la SRC produit beaucoup d'émissions en langue autochtone, qui sont écoutées par les Autochtones. Mais nous investissons aussi énormément dans l'APTN tant à la radio qu'à la télévision. En fait, peut-être que ce devrait être plus clair dans la Loi sur la radiodiffusion, que nous devrions en entendre plus parler. Il est honteux que ce réseau n'ait pas obtenu de financement avant le mois d'août, et je me demande bien comment on peut gérer quelque chose quand les gens ne reçoivent pas de chèques de paie.
Quoi qu'il en soit, laissons cette question de côté. J'ai beaucoup aimé votre exposé. Notre étude porte en trois volets: les services, le mandat et la technologie. Vous êtes l'un des rares témoins à nous parler vraiment de technologie.
Personnellement, même ici, je lis les journaux. Ils ont leur place. Quand j'écoute la radio, j'écoute surtout Radio-Canada. Je ne lis pas les nouvelles sur Internet. Ce n'est pas parce qu'une nouvelle vient de l'Internet que les journalistes n'ont plus leur place, parce que ce sont des journalistes qui rédigent les nouvelles publiées sur Internet.
Essayez de me convaincre que la nouvelle technologie a fait perdre toute pertinence à la SRC. Quel devrait être le rôle de la nouvelle technologie? Comment la SRC devrait-elle changer?
:
Vous allez rouvrir une vieille plaie. Un trop grand nombre de technologues, simplement parce qu'ils détiennent un diplôme en génie informatique ou en génie logiciel, croient qu'ils sont aussi des concepteurs. Ils sont en fait des programmeurs. Ils ne connaissent rien à la conception. Mais n'entrons pas dans ce sujet.
Le problème, c'est que... La meilleure analogie à laquelle je peux penser est la suivante. J'ai un ami qui travaille pour la SRC à Toronto — puisqu'il s'agit d'une séance publique, je vais taire son nom — qui a été étonné de voir que chaque salle à café de l'immeuble de la rue Front ressemblait à un Timothy's en ce sens qu'on pouvait choisir parmi 16 sortes de café.
On ne peut rien changer à cela. La structure est ainsi. Dans tous les autres bureaux de la SRC, c'est pareil. Les changements ne proviendront pas des bureaux de Toronto, ni de ceux d'Ottawa. Ils auront lieu grâce à ces jeunes qui ont accès à la technologie.
Je pense à ces personnes que je connais et qui sont revenues ici après la guerre, comme Budge Crawley. Il s'est rendu dans l'Arctique, dont il a pris d'extraordinaires photos en survolant ce territoire. Tout le monde pensait qu'il était fou, mais il était plutôt à l'avant-garde. L'Office national du film a d'ailleurs fait comme lui.
Vous rappelez-vous du nom de cet homme qui a présenté une exposition sur les mines d'or? S'agissait-il de Hunter...?
Bref, il s'agissait d'un photographe qui, pour le compte de l'Office national du film, est venu ici prendre d'incroyables photos des Territoires du Nord-Ouest. Il a été assez fou pour venir saisir sur pellicule cet endroit inconnu au climat rigoureux.
C'est comme ça que les choses changent au sein de n'importe quel organisme, y compris la SRC. Contrairement à la Grande-Bretagne, qui est un pays beaucoup plus petit que le nôtre, ou aux États-Unis, ou tout est beaucoup plus réglementé, le Canada offre des possibilités aux jeunes. Ce sont eux qui vont faire évoluer les choses et mettre en oeuvre la nouvelle technologie. Il reste simplement à leur fournir les outils nécessaires.
Et ces outils seront très bientôt disponibles. Si je vous avais dit en 1994 que 12 ans plus tard on fabriquerait des processeurs dix mille fois plus puissants que les 486, vous auriez été prêts à m'emmener à l'hôpital psychiatrique de la rue Queen à Toronto.
Nous ne savons tout simplement pas ce que l'avenir nous réserve. Ce que doit faire la SRC, c'est mettre les outils à la disposition des jeunes des régions qui ont du talent, mais qui ne savent pas que ces outils existent. Donnons-leur une chance, car ce sont eux qui apporteront les changements.