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J’aimerais d’abord remercier le comité permanent d’être venu à St. John's, Terre-Neuve. C’est toujours agréable de vous voir ici. Ma dernière confession remonte à dix ans. J’avais eu l’occasion de m’adresser au comité permanent dans un autre hôtel, en 1997, et je crois qu’à ce moment, nous parlions de la CBC. J’aimerais commencer en disant que nous pouvons encore parler de la CBC.
Depuis 32 ans, la Newfoundland Independent Filmmakers Cooperative, la NIFCO, qui est une entreprise sans but lucratif de production cinématographique, vidéographique et télévisée, de perfectionnement professionnel et de montage, est un phare dans l’économie sociale de Terre-Neuve et du Labrador. Le mandat de la NIFCO est de fournir une formation, une infrastructure et un soutien aux professionnels du cinéma et de la télévision des niveaux débutants et avancés. Depuis plus de 30 ans, l’organisme profite d’un partenariat indispensable avec la CBC en appuyant des personnes de talent, en offrant une formation et en cultivant la sensibilisation et la fierté à l’égard de notre culture. Avec l’aide de la CBC, la NIFCO a vécu une impressionnante histoire marquée par l’adaptation et la croissance dans une discipline internationale fondée sur le savoir et en évolution constante. Voilà pourquoi la NIFCO est un centre d’excellence culturelle qui fait l’objet d’admiration à la grandeur du pays. L’organisme a été une porte d’entrée et un fournisseur de services de perfectionnement professionnel essentiel au milieu local de la production.
Les réalisations de la NIFCO sont nombreuses et incluent les suivantes: la création de cours d’introduction à la production cinématographique et d’introduction au montage cinématographique; la production de films et d’émissions de télévision grâce à ces programmes; et la création du premier programme de production cinématographique.
La NIFCO a été un fournisseur capital, car elle a permis d’améliorer les compétences dans l’industrie cinématographique grâce à des ateliers, des placements et des technologies qui permettent de produire des films à petit budget. Par ailleurs, la NIFCO a été essentielle à la croissance, au développement et à la réussite de notre communauté culturelle en apportant une aide au personnel technique lors de festivals du film, de visionnements et de diffusions; en permettant à des artistes d’autres disciplines d’avoir accès aux médias du film et de la vidéo, notamment la musique de danse, le théâtre, les arts visuels et la rédaction; et en offrant aux cinéastes des locaux et la technologie nécessaires pour tenir des réunions, donner des auditions, faire des recherches, utiliser des ordinateurs et ainsi de suite.
La vision et les pratiques de la NIFCO sont les principales raisons qui expliquent son succès et de sa longévité. Au fil des ans, trois piliers philosophiques de gestion ont dirigé l’organisation. Il s’agit, premièrement, de fournir, à Terre-Neuve-et-Labrador, l’accès au matériel technologique nécessaire pour produire des films et des émissions de télévision à gros budget qui sont axés sur le marché. Deuxièmement, la NIFCO est un point de mire de la création et de l’innovation. Elle favorise l’excellence artistique et en entrepreneuriat dans la création de films, de vidéos et d’émissions de télévision à Terre-Neuve-et-Labrador et offre un milieu propice à cette excellence. Troisièmement, la NIFCO s’efforce de développer le milieu de la cinématographie et de la télévision dans l’ensemble et, ce faisant, de développer l’industrie et la province.
La NIFCO est le cœur et l’âme du milieu de la cinématographie de Terre-Neuve et la CBC est un partenaire précieux depuis notre création, en 1975. Notre relation positive se poursuit aujourd’hui.
La gestion de toute organisation saine est la gestion du changement. Je crois que personne ne se lèvera pour dire que nous pouvons revenir à l’univers à deux canaux des années 1980. Lorsque je songe au brillant avenir de la NIFCO et de la CBC, je ne peux m’empêcher de penser aux incroyables réalisations qui nous ont menés là où nous sommes aujourd’hui. Même si je dis que nous ne pouvons revenir en arrière, à un univers à deux canaux, je pense que nous pouvons regarder en rétrospective ce qui fonctionnait à cette époque et peut-être l’appliquer à notre situation actuelle.
Je vais vous raconter une petite histoire. En 1975, la NIFCO a joué un rôle majeur dans la production de films vraiment très drôles qu’une jeune troupe de comédiens, appelée CODCO, utilisait dans ses représentations sur scène, un genre d’expérience multimédias primitive. La popularité des films avec les auditoires locaux a incité la section locale de la CBC à inclure des comédies dans son émission de télévision populaire appelée The Wonderful Grand Band, qui était produite par la CBC à Terre-Neuve au même moment. Cela a mené à la réalisation de la série télévisée CODCO, qui a remporté un succès à l’échelle nationale dans les années 1980, pour mener à This Hour Has 22 Minutes et, finalement, à l’émission à succès Rick Mercer Report.
J’avance que trois raisons fondamentales expliquent l’énorme auditoire de l’émission Rick Mercer Report. Premièrement, en 1975, ayant eu l’inspiration de filmer des personnes drôles, des cinéastes indépendants se sont rendus sur le terrain, avec une caméra à l’épaule et une caméra à pellicule. Deuxièmement, des producteurs éclairés à la CBC à Terre-Neuve ont compris que ce matériel pouvait parler aux auditoires canadiens. Troisièmement, Rick Mercer est vraiment très drôle.
Donc, à partir de cet exemple, nous avançons qu’il est important que le gouvernement fournisse à la CBC suffisamment de ressources pour qu’elle puisse renforcer son engagement envers la production et la diversité régionales. Terre-Neuve-et-Labrador est une région du Canada qui est géographiquement, et à bien d’autres égards, culturellement coupée du reste du pays. La CBC est le commun dénominateur, le lien culturel qui nous relie au Québec, à l’Ontario et ainsi de suite jusqu’à la Colombie-Britannique. Nous croyons que la CBC joue un rôle capital dans la promotion et la conservation de l’identité du Canada et qu’on devrait lui accorder l’argent et l’aide dont elle a besoin pour bien faire son travail.
Merci.
Nous croyons que, même si le mandat actuel est capital et que sa mise en œuvre est essentielle, nous entretenons des inquiétudes quant au manque de détails à la fois dans la priorisation des divers objectifs de programmation de la CBC et la mention directe de genres particuliers d’activités de programmation. Lorsqu’on ajoute la tendance croissante de la CBC à se servir de sa part d’auditoire de référence comme élément moteur, ce manque de détails laisse le mandat ouvert à une interprétation variable et souvent contradictoire, particulièrement pour ce qui est de la manière dont ils se traduisent dans les décisions qui sont effectivement prises au sujet de la programmation de la CBC. Nous appuyons donc la position de l’ACPFT selon laquelle des examens réguliers du mandat doivent être faits pour que le radiodiffuseur public du Canada puisse demeurer valable pour les Canadiens à mesure que le contexte de la radiodiffusion et des communications évolue.
Notre pays a rejeté la philosophie du creuset de l’intégration sociale et du renforcement de l’identité en faveur des vertus du multiculturalisme. Cette philosophie est une pierre angulaire de notre société, elle doit être nourrie par le radiodiffuseur public du pays et s’exprimer par lui. Le mandat opérationnel de la CBC doit tenir compte de toutes les voix, cultures, régions, histoires et de tous les peuples qui habitent et définissent le paysage canadien. Par conséquent, pour atteindre son objectif qui consiste à être le reflet des Canadiens pour les Canadiens et le reste du monde, la CBC devrait et doit fournir une programmation variée, dans tous les genres et produite dans toutes les régions du Canada.
Depuis toujours, la CBC joue un rôle capital dans le développement et la promotion du contenu de la production régionale à la grandeur du pays. La nature du développement du contenu régional et local à partir d’un concept exige que l’aide que la CBC apporte aux régions soit un engagement intangible et à long terme. Par exemple, le chemin qui va de CODCO à This Hour Has 22 Minutes trace non seulement la voie de l’engagement historique de la CBC envers la programmation régionale, mais encore démontre comment cet engagement peut se traduire par une programmation qui remplit le mandat d’être le reflet des régions, tout en l’autorisant à attirer un auditoire national de taille appréciable.
Même si nous reconnaissons qu’au cours des années intercalaires, la nature du contexte de la production à l’échelle nationale a changé et que la CBC a adapté son soutien régional et la manière dont elle l’offre dans ce contexte, des événements récents en programmation remettent sérieusement en question la présence régionale du radiodiffuseur à Terre-Neuve-et-Labrador. Au cours des 18 derniers mois, nous avons observé un changement important d’orientation de la programmation et de la philosophie de la CBC qui donne une programmation plus homogénéisée et populiste. Ce mouvement s’est particulièrement manifesté dans le fait que la CBC a remplacé ses formats de films de la semaine et de mini-séries par des séries qui, pense-t-elle, l’aideront à être en concurrence plus directe avec les radiodiffuseurs privés et les stations américaines.
Cette décision a eu un impact important sur les régions et a entraîné la réduction considérable du contenu régional à la CBC. Il n’y a eu aucun projet important de production dramatique de la CBC dans la région de l’Atlantique au cours des 18 derniers mois. À l’exception de l’émission régulière de la CBC This Hour Has 22 Minutes, il n’y a actuellement aucune série importante de la CBC qui soit axée sur la région de l’Atlantique ou qui en soit le reflet. Ce changement d’orientation de la programmation a donné un dur coup aux activités de production en général dans la région et, à bien des égards, a étouffé la voix de la région dans la grille horaire de la CBC.
À l’échelle nationale, l’ACPFT estime que ce changement d’orientation de la philosophie de la programmation à la CBC a ramené le contenu régional canadien global à 80 p. 100, par rapport à 90 p. 100 en 2000-2001.
Pour ce qui est des autres répercussions régionales négatives sur la programmation, le contexte actuel des producteurs de documentaires à Terre-Neuve-et-Labrador semble tout aussi sombre. Bien que la majorité de la valeur de la production annuelle à Terre-Neuve ait depuis toujours été dans le domaine des dramatiques télévisées à gros budget, la plupart de nos cinéastes locaux sont eux-mêmes des producteurs de documentaires, puisque la production de documentaires est un fondement permanent et solide de notre industrie.
À la grandeur du pays, le temps d’antenne consacré aux documentaires sur les ondes canadiennes a toujours été limité. Étant donné la tendance récente de la CBC à diffuser des émissions davantage axées sur le mode de vie et à réduire la diffusion de documentaires sur les ondes de la CBC et de Newsworld, la société n’a pas démontré qu’elle tenait fortement à la programmation de documentaires télévisés produits par des indépendants.
Le créneau et le financement des documentaires diminuent de façon dramatique à la CBC, ce qui a une incidence négative sur ce qui est depuis toujours la pièce maîtresse du contenu régional du radiodiffuseur national.
Comme je l’ai dit, depuis toujours, grâce à une multitude d’initiatives et de programmes, la CBC a joué un rôle clé dans le développement du contenu régional pour un auditoire tant local que national ces dernières années. Cet engagement est des plus évidents dans la relation de la CBC avec des producteurs indépendants de Terre-Neuve, qui ont produit une foule d’émissions d’importance pour le radiodiffuseur national, Random Passage, Above and Beyond, Hatching, Matching& Dispatching et ainsi de suite.
La Loi sur la radiodiffusion précise que le système canadien de radiodiffusion doit faire appel de façon notable aux producteurs canadiens indépendants. Parce que le rôle et le mandat de la CBC dans le domaine de la télévision est d’être le débouché le plus important des émissions de télévision canadiennes et que les producteurs indépendants créent des émissions dramatiques, comiques et documentaires, la relation entre les producteurs indépendants et CBC Television est, comme l’ACPFT l’a suggéré, symbiotique.
Les producteurs indépendants canadiens sont de grands partisans du réseau de télévision de CBC et, comme nous le soulignions, cela est encore plus vrai dans notre région. Pour nous, la CBC est le principal débouché de nos productions, de nos histoires et de notre contenu régionaux, car elle les présente à un auditoire national. En échange, c’est ce même contenu qui, depuis toujours, crée l’auditoire de la CBC et l’aide à remplir son mandat.
À la lumière de cette relation symbiotique et des tendances négatives récentes de la programmation régionale, il est impératif que la CBC révise son mandat régional et renouvelle sa relation avec les producteurs indépendants de Terre-Neuve-et-Labrador, l’une des parties véritables et vivantes du Canada dont la Loi sur la radiodiffusion fait état.
Tout spécialement, cela inclut des questions telles qu’un engagement envers une programmation locale et régionale dans tous les genres et la nécessité de cette programmation, de même qu’un examen du fonds de développement d’émissions de la CBC — auparavant le Fonds de développement TransCanada — pour le développement et la production d’émissions pilotes dans les régions. Au cours des 12 derniers mois, malgré des engagements dans le sens contraire, l’administration de ce fonds a été problématique et a donné des résultats qui sont loin d’être positifs dans le milieu de la production de Terre-Neuve et à l’égard des engagements démontrés envers les activités régionales. Nous sommes d’avis que ce fonds est insuffisant et qu’il ne fournit pas ce qui est vraiment nécessaire pour développer convenablement une programmation dans les régions.
Une autre question: il faut accorder plus de temps d’antenne locale et régionale aux productions indépendantes régionales — aux heures de grande écoute et non seulement aux heures périphériques.
Il faut aussi réexaminer la philosophie actuelle de la programmation et les répercussions négatives que le retrait des films de la semaine et des mini-séries a eu sur la production dans toutes les régions situées à l’extérieur du centre du Canada.
Une autre question est le besoin réexaminer le rôle de la programmation de documentaires tant au réseau principal de la CBC qu’à CBC Newsworld; de même, il faut une philosophie opérationnelle clairement définie pour la programmation de The Documentary Channel de la CBC, étant donné les rôles considérables en matière de développement de contenu historique et régional dans les documentaires et la diminution actuelle de la présence des documentaires à la CBC.
Dans l’ensemble, il faut un engagement financier renouvelé et renforcé du gouvernement du Canada envers la CBC. Au cours des dernières années, la réduction du financement public, l’augmentation des coûts, la concurrence accrue et la fragmentation de l’auditoire ont obligé CBC Television à dépendre de plus en plus des revenus commerciaux pour continuer de remplir son vaste mandat. Cela l’oblige inévitablement à mettre en péril certains aspects de son important mandat de service au public; le contenu régional et la programmation régionale distinctive sont habituellement les premiers à passer à la moulinette.
La Film Producers Association of Newfoundland est d’avis que la CBC est un élément essentiel du système canadien de radiodiffusion. Le succès et la viabilité des productions et des producteurs indépendants canadiens, tout particulièrement dans les régions situées à l’extérieur du centre du Canada, dépendent directement et à plusieurs égards d’un radiodiffuseur national fort et vivant qui présente un contenu presque à 100 p. 100 canadien sur de nombreuses plates-formes.
Dans l’histoire, même si CBC Television a relativement bien réussi à remplir son mandat, tout spécialement la composante régionale, malgré les énormes défis financiers et la forte concurrence, les dernières années ont été marquées par un saignée presque continue de ses services, de son engagement et de sa présence réelle à Terre-Neuve-et-Labrador. Accentuée par les derniers changements apportés à la philosophie de la programmation, la relation entre la CBC et les producteurs indépendants de notre région est rendue au point où on ne peut la qualifier autrement que de critique.
À l’échelle nationale, cette tendance s’est reflétée dans d’autres régions situées à l’extérieur du centre du Canada, et l’effet général d’homogénéisation et de centralisation qu’elle a met en péril les buts, mandats, objectifs et fondements mêmes sur lesquels reposent l'image de marque et la riche histoire de la CBC.
Le milieu de la production indépendante de Terre-Neuve-et-Labrador apprécie grandement sa relation avec la CBC et demeure un partenaire engagé et précieux dans l’atteinte des buts et objectifs de notre radiodiffuseur national. Néanmoins, il faut tempérer ces propos dans le contexte actuel, qui nécessite un examen, le renouvellement et le renforcement immédiats du rôle que joue la CBC dans la présentation des Canadiens aux Canadiens et, par la suite, au reste du monde.
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Je dois reprendre les propos d’un producteur non identifié et commencer en disant « C’est un miracle qu’une émission de télévision soit produite ». Ainsi, en aucun cas et nulle part sur la planète, cela n’est simple.
Le processus a été relativement facile. Il a débuté par une présentation que nous avons faite à trois réseaux, deux ans avant la production, et la CBC a été la première à mettre la main dessus. Nous avons ensuite suivi le système et fini par la diffuser. Cela a été vraiment assez simple, sauf pour ce qui est de la torture naturelle que toute personne qui produit une émission de télévision supporte de toute façon, quel que soit le réseau pour lequel elle travaille.
Je pense que la CBC sait très exactement aujourd’hui ce qu’elle veut. Peut-être que certains producteurs entendent des choses qu’ils ne veulent pas entendre, et cela est évidemment un défi. Nous sommes en voie de conclure une entente avec la CBC afin de produire un film, tourné à Terre-Neuve, et les démarches se poursuivent, mais il est évident, d’après les propos qu’ils ont faits, que les séries télévisées les intéressent. C’est un choix à faire en programmation et il faut respecter le fait que ce sont eux qui font la programmation. Nous sommes les producteurs. Dans la réalité, une fois que deux ou trois séries d’une heure sont établies, le temps d’antenne qui reste pour des mini-séries et les films de la semaine est réduit. Les films de la semaine et les mini-séries se prêtent en soi à la production par de petites entreprises en raison du capital nécessaire pour les produire. Cela n’occupe que deux ou quatre heures de télévision. Lorsqu’on commence à y ajouter les fonds d’investissements provinciaux et la taille du bassin qu’ils représentent, elles conviennent parfaitement. Par ailleurs, il peut y avoir huit ou douze films et mini-séries par année.
Pour ma part, j’ai bon espoir que les films de la semaine et les mini-séries se poursuivront mais c’est un choix de programmation. De plus, j’essaie activement de créer une série d’une heure. Et, en passant, je leur ai fait une présentation de Above & Beyond comme une série d’une heure, au moment où nous arrivons en 1942 et où nous restons tout le temps, juste après l’arrivée des Américains.
Merci de vos propos flatteurs. C’est un plaisir de tourner dans votre district.
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L’objectif a toujours été de susciter l’intérêt au niveau local, ce que nous sommes toujours en mesure de faire, et, ensuite, de le transmettre au réseau aux fins de promotion.
Vous posez une question très intéressante au sujet des causes, parce que nous voyons ça de la même manière. J’imagine que nous nous posons les mêmes questions. Je suis un éternel optimiste et, selon moi, je l’espère profondément, si nous en parlons assez, ça rentrera dans l’ordre par soi-même. Je crois que la CBC tient à la production régionale et que celle-ci lui a été bénéfique en termes d'auditoire et de cotes d’écoute.
Alors, si nous procédons actuellement à cette réorganisation de la CBC — réorganisation dans le cadre de laquelle la CBC a opté pour une approche directe visant à augmenter ses parts de marché — je ne crois pas parler en néophyte lorsque j’affirme qu’il y a eu un certain tournant vers une programmation axée sur la réalité et le mode de vie découlant du fait que le service de Julie Bristow s'est accaparé une partie des plages horaires habituellement réservées aux documentaires. Il s’agit d’une décision de programmation. Qu’on soit pour ou contre, certaines de ces émissions se portent extraordinairement bien: Test the Nation, 1,5 million, The Next Great Prime Minister, 700 000, et même Dragons' Den, 400 000 ou 500 000 téléspectateurs. On ne peut tout simplement pas faire du surplace et dire que tout ça ne fonctionne pas.
Le défi pour les producteurs et pour nous est donc de rester à l'avant-plan et de s'assurer que nos idées sont communiquées et bien reçues, ce qui, selon moi, est le cas. Je crois que le rôle du comité et de Patrimoine canadien est de s’assurer que la direction de la CBC, quelle qu'elle soit à un moment quelconque, connaît les responsabilités associées au fait de tenir le gouvernail.
J’aimerais formuler un commentaire sur la dichotomie « automobile sur la route » et « automobile dans le fossé ». Cela me rappelle une expérience personnelle. J’ai fait une marche il y a quelques années. J’ai perdu du poids, je me suis entraîné et j’ai marché de Tobermory à la petite ville de Sebringville où j’habite. J’avais une entente avec le journal local et je devais les appeler tous les jours à 9 heures.
Au moment du premier appel, je marchais déjà depuis quelques jours et, le jour avant, j’avais marché 27 miles. Ils m’ont demandé où j’étais, et je leur ai dit. Ils m’ont demandé comment je me sentais, et j’ai répondu que je me sentais bien. Ils m’ont demandé si quelque chose n’allait pas; j’ai dit non, mais j’ai mentionné que j’avais une ampoule. On a donc pu lire dans le journal que Shellenberger s’était fait une ampoule en marchant. Le lendemain quand je les ai appelés, la première chose qu’ils m’ont demandé était: « Comment va l’ampoule? » J’ai répondu: « J’en ai deux de plus ».
C’est la même chose qui se passe à une supposée émission sur « un véhicule dans le fossé, un véhicule dans le fossé! » Les gens de chez nous croyaient que je me traînais à quatre pattes sur le bas côté de la rue, victime de ces énormes ampoules. Elles étaient douloureuses, mais elles ne m’ont pas empêché de me rendre à destination. Cependant, cela a permis de vendre beaucoup de journaux. En fait, à la fin de la semaine, quand je suis finalement arrivé, les gens étaient vraiment soulagés de me voir. L’intérêt n’était toutefois pas vraiment le fait que j’avais parcouru cette distance. Dès que j’ai éprouvé un peu de difficulté, que j’étais « dans le fossé », les journaux se sont vendus.
Alors je comprends ce que vous voulez dire dans cette situation. C’était juste un petit récit personnel, désolé.
Monsieur Scott.
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Eh bien, je me sens comme Castro: j’en suis à mon troisième vice-président de la CBC et je vais probablement encore produire des émissions quand je rencontrerai mon quatrième. Selon moi, la vision de la CBC est encore la même.
D'après moi, ce que fait M. Stursberg est très intéressant. Ce que je veux dire, et je sais que je vais offusquer bien des gens en raison des types d’émissions axées sur la réalité et le mode de vie qui font froncer les sourcils, c’est que si on avait les ressources nécessaires pour assurer le maintien de certaines plages horaires que certains qualifient de « non nuisibles », comme des plages horaires régionales durant lesquelles on peut présenter des émissions pour évaluer les réactions du public avant de les présenter à l’échelle nationale, je suis sûr qu’il le ferait immédiatement.
Si vous n’êtes pas en mesure de vendre un produit chez vous, il n’est pas raisonnable de croire que vous le vendrez à l’étranger. Si vous produisez une émission sur les Prairies et que vous n’êtes pas en mesure de la vendre dans les Prairies, eh bien, vous ne pouvez pas raisonnablement vous attendre à ce que l’émission s’en tire bien sur le réseau ou à l’échelle internationale. Bien sûr, il y a des exceptions. Si on avait les ressources nécessaires pour produire des émissions pour des auditoires restreints, je suis sûr qu’on le ferait immédiatement. De plus, je crois aussi qu’on sauterait sur l’occasion de produire des émissions pilotes dont l’objectif n'est pas nécessairement d’être diffusées aux heures de grande écoute.
Au Canada, c'est à peu près impossible pour une station de télévision de produire une émission pilote dans le cadre du système traditionnel et avec la collaboration d’intervenants indépendants et de ne pas la diffuser. Si elle ne la diffuse pas, elle ne respecte pas les critères ouvrant droit à des crédits d’impôt et les critères du Fonds canadien de télévision, et le diffuseur doit donc assumer tous les coûts. Si on avait la capacité de produire des émissions pilotes et de les diffuser à Terre-Neuve ou dans les Prairies, je suis sûr qu’il y aurait preneur. Mais c'est une entreprise coûteuse.
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Il y a un public pour les productions régionales.
Above & Beyond a été diffusée en octobre et en novembre et a obtenu un auditoire record pour une émission dramatique, supplantant
Intelligence et un certain nombre d’autres émissions, jusqu’à ce que le film de Margaret Atwood nous dépasse en février. Il est apparent que la demande est là.
En ce qui concerne l'auditoire, il s’agit d’une idéologie. Revenons à Slawko Klymkiw, je vais le citer et je crois que je peux citer quelque chose qu’il a dit devant vous: « Les résultats en termes d’auditoire, c'est un attrape-nigaud. » Il avait un montant en dollars qui lui coûterait un point. Il disait qu’il pouvait dépenser 600 000 $ ou 700 000 $ en publicité à l'extérieur du réseau et augmenter sa part de marché d’un point. La question est alors la suivante: ce point est-il assez important pour diminuer les fonds consacrés à la programmation?
M. Stursberg a clairement établi que le million d’auditeurs était un bon point de repère pour déterminer si on produisait ou non une émission dramatique, et je me dois de rester humble, car j’étais une des personnes qui avaient dit: « Vous êtes fou, cette époque est révolue! », jusqu’à ce que Little Mosque on the Prairie attire plus d’un million de téléspectateurs par émission et que plus de deux millions de personnes regardent le premier épisode. C’est donc dans l’art du possible.
C’est leur décision, et je crois que, selon eux, c'est important de respecter les exigences en matière de responsabilité du gouvernement de l’époque, qui forment, ne l’oublions pas, un des piliers de la plate-forme électorale du gouvernement actuellement à Ottawa. En ce qui concerne la télédiffusion, la responsabilisation est liée à la manière de dépenser les fonds et ce qu’on obtient en retour. Ce qu’on obtient en retour, ce sont les cotes d’écoute. Il est donc évident qu’il y a des pressions sur la CBC pour qu’elle obtienne de bonnes cotes d’écoute, et il y a une équipe de gestion en place dont c'est l’objectif. Ce n’est pas à moi de dire si c’est bien ou non. Je dois plutôt tenter de produire des émissions qu’ils veulent acheter et qui permettront d’atteindre ces objectifs.
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Merci, monsieur le président.
Personnellement, je ne pense pas que le problème soit uniquement un problème de ressources. Madame Wilson, dans votre présentation, vous avez parlé d'une situation actuelle grave pour les producteurs indépendants. C'est difficile pour nous de bien comprendre le problème auquel vous faites face, parce que les producteurs indépendants sont des facteurs de changement et d'évolution dans notre société. Il faut le dire: vous avez, tous les deux, un rôle social à jouer dans la société en présentant au peuple, aux jeunes, des idées, de l'évolution, des éléments qui changent.
J'aimerais beaucoup connaître la teneur exacte du problème que vous éprouvez face à la Société Radio-Canada. Ce peut être un problème de négociation ou de toute autre nature. J'apprécierais beaucoup que vous nous donniez une copie honnête, précise, de sorte qu'on comprenne bien si les problèmes que vous vivez ici sont les mêmes que ceux dont on nous a parlé dans le reste du Canada.
Madame Wilson, vous avez parlé aussi de la question de la philosophie. Ne croyez-vous pas, tous les deux, que le comité, comme le gouvernement du Canada, devra à un moment donné faire un choix entre la promotion de la culture locale, régionale et la culture américaine?
Il y a sept ans dans le milieu de la musique, il y avait un modèle qui fonctionnait bien. Simplement, un artiste signait un contrat et il ne faisait pas d’argent, parce que tout le monde se prenait une part des recettes avant l’artiste. Alors, nous avons mis en place un système de distribution et un système de promotion, et tout cela fonctionnait bien. Nous vendions des CD à 25 $ au Wal-Mart.
Puis, les nouvelles technologies s’en sont mêlées, et les représentants du milieu du disque ont dit: « Vous savez, les jeunes devront acheter leur CD 25 $, et nous les poursuivrons s’ils ne le font pas. » Ils ont perdu le marché et ils ne le recouvreront jamais parce que les jeunes voulaient les chansons et allaient les avoir peu importe la manière. Ils se les procureraient légalement si le marché le leur permettait et, sinon, ils se les procureront illégalement. Par conséquent, on a maintenant une dynamique totalement différente dans l’industrie musicale.
Je me demande si on n’en est pas devant une situation semblable en raison des nouveaux médias. Nous parlons encore d’un modèle de programmation datant des années 70 alors que tous les jeunes d’aujourd'hui regardent YouTube et leurs téléphones cellulaires. Je n’ai entendu aucun argument cohérent m’expliquant pourquoi on ne diffuse pas le contenu canadien sur les nouvelles plates-formes d’une manière dynamique de manière à ce qu’une nouvelle génération ait accès aux émissions qu’ils veulent, quand ils le veulent et selon le médium de leur choix. Je vous demande d’expliquer quels sont, selon vous, les obstacles qui nous empêchent de diffuser nos émissions sur les nouveaux médias.
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On a indemnisé les gens pour cela.
Je parle du fait que la majorité du matériel sur Internet s’y trouve illégalement. Si nous voulons y présenter légalement nos produits, les diffuseurs, les producteurs et les créateurs doivent s’entendre sur un régime de redevances fonctionnel, si redevances il y a. Nous ne devons pas souscrire à l’idée que les diffuseurs sont passés de détenteurs de droits d'auteur à des agrégateurs qui peuvent revendre leurs droits.
Selon moi, le marché des longs métrages est un excellent exemple de la manière dont on en est arrivé à ces pourcentages. Le marché change, la valeur monétaire change, mais le modèle d’entreprise reste le même. Peu importe ce que vous payez au guichet pour avoir le droit de regarder le film, l’exploitant conserve environ 55 p. 100 parce qu’il possède la machinerie et qu’il est responsable du chauffage et de l’éclairage, etc., et les 45 p. 100 restants retournent aux distributeurs qui conservent un gros 35 p. 100 à titre de commission. Le producteur reçoit donc ce qui reste, moins ses dépenses.
Le producteur doit ensuite payer des redevances aux directeurs, aux scénaristes et aux acteurs qui ont créé le matériel. Les investisseurs se partagent ensuite ce qui reste et espérons fortement qu’il y ait un quelconque profit de manière à ce que les producteurs puissent à nouveau prendre des risques en appuyant d’autres projets.
Si on commençait à évaluer ce que valent les nouveaux médias, en se demandant de quelle manière nous allons partager les redevances et récompenser les artistes et les producteurs qui sont les créateurs et s’assurer que tout le monde reçoit sa petite part, on irait au devant de la situation. Mais si l’on est aux prises avec une situation où les producteurs et les artistes doivent tout simplement remettre le fruit de leur labeur pour permettre à d’autres personnes d’empocher l'argent qu’ils sont en mesure d’obtenir, ça ne fonctionnera tout simplement pas. Et c'est la situation dans laquelle nous nous trouvons.
L’ACTRA appuie la CBC et le mandat actuel. La section de Terre-Neuve de l’ACTRA exprime son appui au mémoire national de l’ACTRA présenté le 15 mars 2007.
Nous estimons de plus qu’il faut insister sur l’importance régionale de la CBC. Il faut en effet qu’elle reprenne le rôle qui lui incombe de refléter la culture des régions auprès des Canadiens. La CBC demeure un moyen essentiel d’offrir une programmation canadienne variée et de qualité. L’élément le plus important de son mandat est la production et l’acquisition d’émissions ainsi que l’aménagement des horaires de radio et de télévision. Il faut absolument que la CBC s’occupe des intérêts régionaux en augmentant les émissions qui reflètent les intérêts et la culture des régions.
Au cours des 17 dernières années, on a assisté à la disparition d’émissions traditionnelles très intéressantes qui remportaient du succès depuis longtemps et qui reflétaient toutes les régions du Canada, à tel point qu’une partie de l’auditoire régional a commencé à délaisser la CBC. Reconquérir cet auditoire s’est révélé extrêmement difficile, même en renversant des décisions majeures. Prenons par exemple Here and Now, une émission de nouvelles diffusée à l’heure du souper, qui affichait la cote d’écoute la plus élevée du pays parmi toutes les émissions de nouvelles régionales — CBC et radiodiffuseurs privés. L’émission est passée d’une heure à une demi-heure, puis les cotes d’écoute ont chuté, et quand la CBC a rétabli la durée à une heure, l’auditoire n’est pas revenu.
La CBC doit être à la fine pointe de la technologie. Pour s’acquitter de son mandat, elle a besoin d’être suffisamment financée pour pouvoir suivre l’évolution technologique et s’adapter aux nouvelles plates-formes médiatiques. Ce financement ne doit pas empiéter sur les budgets de programmation. La CBC a besoin d’engagements de financement suffisants et à long terme.
La CBC a l’obligation de produire et d’acquérir des émissions dramatiques canadiennes qui plaisent aux spectateurs. Sa grille horaire comprend en ce moment trop d’émissions américaines que l’on peut regarder à un poste américain. Ces créneaux doivent être occupés par des émissions canadiennes que l’on ne peut pas regarder à d’autres réseaux.
Le gouvernement doit donner à la CBC les ressources voulues pour produire des émissions distinctes de qualité et notamment des dramatiques canadiennes. La situation est rendue au point où il est fort peu probable que la CBC puisse remplir tous les aspects de son mandat avec les ressources dont elle dispose.
En ce moment, on ne produit à Terre-Neuve aucune émission comique ou dramatique, et les émissions de variétés sont rares. À l’époque bénie, la CBC créait des émissions dans cette région et a produit des vedettes nationales comme Mary Walsh, Cathy Jones, Rex Murphy, Andy Jones, Greg Malone et Gordon Pinsent. Des émissions régionales comme Up at Ours, Skipper and Company et Wonderful Grand Band, ont ouvert la voie à toute une génération d’émissions vedettes nationales. Si nous ne créons pas d’émissions dramatiques canadiennes, nous ne pouvons pas produire d’artistes canadiens.
Trois miniséries créées et produites ici pour la CBC ont connu un succès national et international: Boys of St. Vincent, Random Passage et dernièrement Above and Beyond. Nous sommes capables de produire des émissions dramatiques de grande qualité. Hatching, Matching and Dispatching, notre dernière création régionale, a attiré un vaste auditoire à l’échelle nationale mais la CBC l’a laissée tomber, ne laissant du coup aucune émission dramatique régionale.
La radio régionale de la CBC se compose actuellement de prestations spéciales dans le cadre de spectacles, de remises de prix et d’événements spéciaux. Le contenu dramatique régional est presque nul. Et cela malgré une brochette de séries dramatiques pour la radio qui ont remporté beaucoup de succès, comme The Great Eastern et Terra Nova Theatre.
Il faut que la CBC ait les ressources nécessaires pour mener la lutte contre la crise des dramatiques canadiennes.
En conclusion, l’ACTRA demande respectueusement au comité de recommander ce qui suit au Parlement: le mandat actuel suffit pour permettre à la CBC de répondre aux besoins des Canadiens, le mandat actuel de la CBC a besoin d’être bien soutenu par des fonds publics suffisants, elle doit disposer de fonds spéciaux pour effectuer la transition au signal numérique et à la télévision haute définition, et la CBC doit être la première à défendre la présentation d’émissions dramatiques canadiennes en langue anglaise aux Canadiens, à l’échelle régionale et nationale.
Je vous remercie.
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Je vous remercie, monsieur le président, mesdames et messieurs, de l’occasion que vous m’offrez de prendre la parole devant le comité.
Mon nom est Bart Simpson, croyez-le ou non — ça pourrait être pire — et je représente la section de Terre-Neuve-et-Labrador de Documentaristes du Canada. Je suis aussi l’ancien président national de l’organisation.
J’ai aussi eu la chance de produire, avec mon ancienne entreprise, le long métrage The Corporation, qui a obtenu plus de 5 millions de dollars dans les salles de cinéma du Canada, ce qui en fait le documentaire ayant engendré les recettes les plus élevées de tous les temps.
Documentaristes du Canada est une organisation sans but lucratif nationale et bilingue d’art professionnel qui représente environ 700 documentaristes indépendants à l’échelle du pays. Ces documentaristes vivent dans toutes les provinces et tous les territoires, et la taille de leur entreprise et leur portée varient: de producteurs indépendants à des gens de métier chevronnés en passant par des producteurs qui possèdent leur propre entreprise et emploient plus de 50 personnes de façon régulière.
Avant d’aller plus loin, je crois qu’il est important d’affirmer d’entrée de jeu qu’il y a un lien historique entre la CBC et la production de documentaires et, en fait, l’émergence du secteur du documentaire au Canada. Comme on peut le lire dans le mandat de la CBC, une bonne partie de ses buts sont les mêmes que ceux des documentaires produits au pays, c'est-à-dire être canadiens et distincts, offrir un moyen d’expression culturelle, contribuer à notre conscience nationale et refléter le caractère multiculturel et multiethnique du Canada dans les deux langues officielles.
Notre organisme national et les différentes sections canadiennes ont présenté des mémoires au comité. Je n’en parlerai pas en détail. Je vous renverrai plutôt à l’exposé présenté par notre directrice exécutive, Samantha Hodder. Notre section appuie cet exposé et ceux de toutes les autres sections, dont je présenterai ici les principaux points. J’aborderai ensuite rapidement les enjeux touchant les régions et, plus spécialement, ceux touchant Terre-Neuve-et-Labrador.
Comme Mme Hodder et Danijel Margetic, membre du conseil national, l’ont mentionné dans leur mémoire, malgré le lien naturel entre les documentaires et la CBC, il y a eu un déclin alarmant du nombre de documentaires présentés sur le réseau principal. Le nombre d’heures de programmation a régressé pour passer d’un sommet de 263 heures en 2003-2004 à seulement 122 heures en 2005-2006. On a vu beaucoup de séries annulées ou réduites durant cette période, y compris Life and Times, Opening Night et The Nature of Things.
Le plus surprenant c’est que, durant cette période, les documentaires ont pris une place plus importante dans l’esprit du public. Cela semble presque contradictoire, par exemple, de réduire The Nature of Things, une série très respectée de documentaires se concentrant sur l’environnement, de son sommet de 17 heures à 9 heures en saison estivale, au même moment où les enjeux environnementaux sont au premier plan des discussions canadiennes et que des films comme An Inconvenient Truth connaissent un énorme succès populaire.
Le récent documentaire canadien Manufactured Landscapes produit par Jennifer Baichwal, membre de DOC, abordait aussi des enjeux environnementaux et a longtemps été présenté dans les cinémas des grands centres du pays. Il s'agit aussi de l’une des productions anglophones ayant généré le plus de recettes cette année.
À la lumière de tout ce que je viens de mentionner, nous sommes préoccupés par la manière dont la CBC gérera éventuellement la chaîne documentaire — en assumant qu’elle verra le jour — spécialement en ce qui a trait aux longs métrages documentaires, aux droits de licence et aux définitions utilisées pour décrire les documentaires.
J’aimerais terminer avec quelques commentaires sur Terre-Neuve-et-Labrador. Tout d’abord, nous appuyons les déclarations de la Producers' Association of Newfoundland. La collectivité est tissée serrée ici. Je ne suis pas né dans la province, mais j’y ai déménagé il y a deux ans et j’ai été surpris de la quantité et de la qualité de la production de la région. Je ne suis pas venu ici pour cela, mais c'est pour cela que je suis resté.
Terre-Neuve a une forte tradition en matière de contes. Nous pouvons aider la CBC à atteindre son objectif de présenter le Canada à ses régions et aux téléspectateurs nationaux et locaux. Nous soutenons l’examen régulier du mandat de la CBC. Nous affirmons aussi qu’il est nécessaire de consacrer des plages horaires à l’échelle locale et régionale aux documentaires locaux et de leur octroyer un financement adéquat. De plus, le fait d’offrir une bonne aide à la création dans les régions servira de tremplin vers une exposition nationale.
Au nom de nos membres, de notre conseil d’administration régional et de notre président régional, Nigel Markham, je vous remercie de l’occasion que vous m’avez offerte de vous faire ces quelques remarques. Je suis prêt à répondre à vos questions.
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Cela fait déjà longtemps qu’il ne se fait plus d’émissions régionales à Terre-Neuve. Il y a une vingtaine d’années, la CBC a abandonné presque totalement les productions internes, sauf les bulletins de nouvelles et les émissions d’affaires publiques. Ce que la CBC a commencé à faire, c’est d’émettre des droits de licence aux producteurs indépendants et de leur donner accès à d’autres formes de financement. Ainsi, nous avons pu continuer à présenter des productions faites à Terre-Neuve.
Les premières années, nous avons les avons vues dans toutes les régions. La CBC avait encore, jusqu’à un certain point, une programmation régionale. Cela a pratiquement disparu, sauf encore pour les bulletins de nouvelles et les émissions d’affaires publiques. Comme le disait Paul tout à l’heure, chacune de nos productions locales est diffusée à la télévision nationale.
J’aimerais bien voir de nouveau une programmation régionale, des émissions produites ici pour les gens d’ici. Si elles marchent bien ici, elles pourraient être diffusées à la télévision nationale.
En fait, j’aimerais qu’on retourne 20 ans en arrière. Ça peut avoir l’air terrible, dit comme cela, mais du point de vue du développement et de la protection de la culture des Terre-Neuviens et des Canadiens, une approche axée d’abord sur les régions, et ensuite sur l’ensemble du pays, cela nous éviterait…
Je comprends pourquoi nous avons tellement de productions américaines, c’est une question de dollars.
Comme l’a dit M. Pope un peu plus tôt, peu importe à qui vous parlez à la CBC, on va vous dire qu’on préférerait de loin programmer et diffuser des productions canadiennes. Mais les revenus et les ressources ne le permettent pas.
Nous avons souvent entendu dire: « Nous voulons que la CBC soit comme la BBC. La BBC a une excellente programmation et on n’y voit pas de publicité ».
Je dirais que ce modèle pose deux problèmes. Premièrement, ma circonscription est aussi grande que la Grande-Bretagne dans son entier. Elle compte 85 000 habitants; 13 p. 100 d’entre eux écoutent la radio crie, 35 p. 100 la radio en français, et le reste la radio en anglais. Nos marchés sont donc totalement différents. Deuxièmement, je n’ai encore vu personne de l’un ou l’autre de nos partis se lever pour offrir les 500 millions de dollars que nous perdrions en annonces publicitaires.
Nous avons donc ici un petit problème, parce que les gens veulent des émissions de qualité à la CBC, mais ils veulent aussi des émissions pertinentes. Si nous voulons une programmation de qualité, nous ne devons pas nous soucier des cotes d’écoute. Mais si nous faisons cela, les gens se demandent à quoi sert de dépenser 1 ou 1,5 milliard de dollars pour produire des émissions que personne ne regarde. C’est l’histoire du serpent qui se mord la queue.
J’aborde ce sujet, parce qu’il me semble que nous n’avons rien entendu sur ce projet de chaîne de documentaires. Je veux simplement obtenir vos commentaires. Je me demande s’il serait possible, en fait, d’établir un service distinct sans publicité qui serait basé sur le contenu, où on présenterait les meilleures productions canadiennes sans essayer de rien changer à ce que nous faisons à la CBC avec les revenus commerciaux de Hockey Night in Canada et sans essayer de concurrencer les dramatiques et la télé-réalité, un réseau où nous pourrions présenter nos meilleures productions.
Que pensez-vous de cela, en particulier dans le secteur du documentaire?
Nous avons parlé de divers apports à l’industrie du film commercial et du rôle du film de fiction et du documentaire — et Charlie a parlé des divers programmes actuels et a évoqué l’idée d’un regroupement. Cela est-il nécessaire? Comme de nombreux intervenants l’ont suggéré, ce qu’il faudra, au cours du siècle prochain, c’est que la CBC joue un rôle de premier plan plutôt que d’être un acteur parmi d’autres, comme on l’envisageait autrefois. Une partie du problème actuel, réside peut-être dans le fait que nous n’avons pas encore trouvé comment jouer ce rôle de premier plan.
J’aimerais obtenir des commentaires à ce sujet. Mais je veux aussi revenir à la question du soutien local de l’ACTRA à propos du mandat national et de savoir si ce mandat est suffisant.
Serait-il possible d’éclaircir ce mandat, car on l’interprète de diverses manières? Quand j’ai demandé hier soir, et encore aujourd’hui, ce qu’était la région, on m’a répondu Terre-Neuve-et-Labrador. Je ne pense pas que c’est ainsi que les gens de Toronto conçoivent les régions. On m’a déjà dit que c’était Halifax. En tant que Canadien de la région atlantique, vous pouvez juger combien c’est insultant pour un résidant du Nouveau-Brunswick, par exemple.
Chacun de nous, dans les régions — et quand je dis « régions », j’entends vraiment les régions —, est conscient du caractère unique de chaque province et territoire. Dans notre cas, nous représentons la seule province bilingue, le Nouveau-Brunswick. Chez nous, les deux cultures, anglaise et française, coexistent et nous pouvons en témoigner de diverses façons.
Il est peut-être suffisant de clarifier le mandat. Je ne pense pas que ça réglerait tout, mais je pense que c’est peut-être nécessaire. Ma crainte est la suivante: je pense qu’il existe un problème de ressources. Je pense que la CBC a changé. Ce n’est pas de sa faute, elle a été forcée à changer. Malheureusement, il se pourrait bien que si nous ramenions le financement de la CBC aux niveaux qu’on estime nécessaires pour offrir ce qu’on offrait il y a 20 ans, le problème ne s’en trouverait pas forcément réglé pour autant.
Nous ne pouvons pas revenir en arrière. Mais même si des montants considérables étaient disponibles, je ne suis pas convaincu que ça changerait ce que je vois dans ma circonscription, à Fredericton, ou par rapport aux attentes de la CBC. Je ne suis pas certain que cela fonctionnerait et j’essaie de trouver des moyens d’y arriver.
Je crains que si nous rétablissions le financement, nous serions surpris des résultats. Il se peut bien que l’institution ait changé — ce n’est pas de sa faute — à cause des compressions.
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Je vais essayer d'être brève, monsieur le président.
En vous écoutant, M. Scott et vous, il m'est venu une réflexion. Je vais commencer par vous faire part de ma réflexion et, ensuite, je poserai ma question à M. Simpson ou peut-être même à vous deux.
Vous avez parlé de culture typiquement terre-neuvienne, de culture acadienne, de culture du Nouveau-Brunswick. Nous, au Québec, nous parlons de notre culture francophone. Je me dis qu'on a tellement voulu faire de ce pays, le Canada, un grand pays uniforme qu'on a occulté toutes les cultures pour n'en faire qu'une, la culture canadienne, en oubliant qu'il y avait des particularités dans chacune des régions. Cela étant dit, je pense que la culture canadienne fait maintenant face à un sérieux problème. Elle sera bientôt noyée dans la culture américaine, si les Canadiens n'y voient pas et ne prennent pas franchement un sérieux détour, comme le Québec l'a fait à un moment donné. Cela ne veut pas dire que l'on doit devenir séparatiste, cela veut dire qu'on doit vouloir définir qui on est dans nos régions respectives. Je lance la pavé dans votre mare, mesdames, monsieur.
Ma question s'adresse à M. Simpson. Vous avez préconisé l'étude régulière du mandat de la Société Radio-Canada. Je connais déjà les réponses, mais je veux les entendre. Actuellement, la Société Radio-Canada vous consulte-t-elle concernant les fonds qu'elle reçoit du public, les fonds provenant des taxes des citoyens, et concernant sa programmation et l'utilisation qu'elle fait des fonds provenant des taxes du public? Est-ce que vous êtes consultés? Si oui, de quelle façon? Si non, comment aimeriez-vous que soit faite cette consultation?
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C’est une bonne question. Légèrement différente. Encore une fois, je vous parlerai de mon expérience personnelle.
Certainement, dans le passé, notre organisation a eu d’excellentes relations avec la CBC. Nous parlions de... C’était l’époque où la tradition du documentaire avait une plus grande place sur le réseau.
Maintenant, avec cette récente ronde, je peux vous dire, en tant que personne qui était là quand la nouvelle direction est entrée en fonction, que ce n’était pas une discussion bien poussée. C’était plutôt un discours qu’un échange. Certainement, on nous a posé des questions, mais je ne suis pas sûr qu’on ait vraiment tenu compte des réponses. Je n’en ai pas eu l’impression.
De toute évidence, les choses progressent. Plutôt que de revenir en arrière, il vaudrait mieux trouver de nouvelles façons de travailler avec la direction et de créer un dialogue créatif. Évidemment, le nombre d’interlocuteurs est très grand. Le documentaire n’est pas la seule préoccupation de la CBC. Il y a aussi les émissions de variété, les sports, etc.
Nous voulons seulement établir un dialogue régulier dans le cadre d’une discussion à l’échelle de l’industrie. Nous sommes ouverts aux diverses formes qu’il pourrait prendre. Par le passé, nous avions une bonne relation avec l’unité de production de documentaires. Elle n’est plus aussi plus aussi puissante qu’elle était parce que le documentaire ne figure plus au nombre des priorités du réseau principal.
Cela répond-il à votre question?
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Je sympathise avec la direction de la CBC, pas toujours, mais de temps en temps.
Les enjeux actuels sont très importants. Le coût d’une émission pilote est énorme. Nous avons établi des points de repère. Nous essayons de concurrencer House et CSI. Si une émission est un échec, les producteurs doivent expliquer à un comité ce qui n’a pas fonctionné. Si on annule une émission de curling, on va en entendre parler à la Chambre des communes. Altar Boys, oh mon Dieu, les éditorialistes vont commenter l’affaire. Je ne pense pas que cette émission a été vue par qui que ce soit. Si la CBC voulait m’en donner une copie pirate, moi, au moins, j’apprécierais.
Nous sommes dans une situation étrange où il faut être absolument sûr de son affaire, être à l’épreuve de tout. Cela ne nous permet pas de faire beaucoup de bonne télévision.
Pourtant, la question que je vous soumets est la suivante. Si nous pensons à la meilleure production télévisuelle canadienne, nous constatons que l’argent n’est pas un facteur essentiel. Si vous regardez The Second City, vous assistez à la naissance d’une génération de vedettes, de grandes vedettes, grâce à une émission faite avec des moyens très réduits, mais qui a permis à des gens de développer leurs compétences. John Candy ne serait pas devenu une vedette s’il n’avait pas eu d’innombrables heures de télévision pour développer son talent et acquérir un auditoire.
À long terme, ne vaudrait-il pas mieux consacrer de l’argent à des émissions produites dans les régions, qui nous ont donné CODCO et le Rick Mercer Report, plutôt que de mettre tous nos œufs dans le même panier à Toronto, où un échec coûte une fortune et donne lieu à un débat au Parlement? Ne vaudrait-il pas mieux favoriser l’émergence de nouvelles idées inattendues qui, si elles échouent, que diable, n’auront au moins pas coûté grand-chose?
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Merci de votre commentaire.
Avant de conclure, je veux parler d’une chose. Nous sommes allés à Yellowknife, à Vancouver, à Winnipeg, à Toronto et ici, à Terre-Neuve. Demain, nous allons à Montréal, mais j’ai constaté qu’il y a pratiquement quatre CBC/Radio-Canada. Il y a le réseau de télévision CBC/Radio-Canada (volets anglais et français) et le réseau de radio anglais et français, aussi. Tout ce dont nous entendons parler, comme aujourd’hui, par rapport à Terre-Neuve, c’est de Toronto. Toronto pour le réseau anglais. Or, nous ne voulons pas forcément être comme Toronto. Pourtant, tout ce qui sort vient de Toronto.
À Yellowknife et à Vancouver, et dans les communautés francophones hors Québec, on nous a dit qu’on souhaitait voir autre chose que du contenu en provenance de Montréal. La télévision francophone est fortement axée sur Montréal.
Concilier tout cela est un défi de taille. Hier et aujourd’hui, j’ai entendu beaucoup de commentaires qui trouvent des échos dans diverses régions du pays. Ailleurs aussi, la définition du terme « région » pose un problème.
Je vous remercie encore des présentations que vous avez faites aujourd’hui et des réponses que vous avez apportées à nos questions. Merci.
Nous allons faire une pause en attendant les autres intervenants.