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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 046 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 29 mars 2007

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je suis ravi de vous souhaiter ce matin la bienvenue à cette 46e séance du Comité permanent du patrimoine canadien.
    Ce matin, conformément au paragraphe 108(2), nous effectuons une enquête approfondie du rôle d'un diffuseur public au XXIe siècle.
    Lors de la première heure de la séance, nous entendrons ce matin Anthony Manera, à titre personnel, et Bill Neville, du Forum des politiques publiques. Bienvenue, messieurs.
    À vous de décider qui veut parler en premier. Puis après le deuxième exposé, nous passerons aux questions.

[Français]

     Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés.
    Nous souhaitons remercier le comité de nous donner l'occasion de présenter nos idées sur la tâche importante qu'il a entreprise, à savoir l'examen du mandat de la Société Radio-Canada et de la Canadian Broadcasting Corporation. C'est pour votre comité une occasion de promouvoir des changements. À notre avis, ce sont des changements importants et urgents.
    Les Canadiens ont besoin d'un radiodiffuseur public. Cette conclusion a été appuyée par plusieurs intervenants déjà entendus par votre comité, par tous les examens de la radiodiffusion publique canadienne effectués depuis sa création en 1936 et par le Comité permanent du patrimoine canadien dans son rapport de juin 2003.
    Donc, la question fondamentale ne porte pas sur la nécessité du radiodiffuseur public, mais sur quelle sorte de services CBC et Radio-Canada devraient offrir à leur public. À quelques exceptions près, limitées mais importantes, nous nous concentrerons sur la télévision anglaise. Ce n'est pas que les autres services soient sans intérêt ou sans problèmes, mais la télévision anglaise est le service dont les défis sont les plus difficiles à relever. Pour cette raison, nous allons concentrer nos propos sur la télévision anglaise.
    Cependant, tout en reconnaissant les problèmes auxquels fait face la télévision anglaise, nous devrions souligner que la Société Radio-Canada dans son ensemble reste un mode de communication très puissant de notre culture canadienne et de notre souveraineté culturelle. Le service radiophonique reste sans pareil et, sondage après sondage, les Canadiens déclarent qu'il contribue beaucoup à leur sentiment d'identité nationale.
    Aujourd'hui, nous vous proposerons 10 recommandations précises et audacieuses, peut-être sujettes à controverse, mais nécessaires, responsables et faisables. Il est temps d'agir et vous, mesdames et messieurs les députés, avez le pouvoir et la responsabilité de mener à bien le renouvellement de la Société Radio-Canada et de la CBC.
    Monsieur le président, je vais maintenant céder la parole à mon collaborateur M. Bill Neville.
(0910)

[Traduction]

    Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de me donner la chance de m'exprimer aujourd'hui.
    Je voudrais évoquer brièvement deux enjeux spécifiques: premièrement, le financement de la Société Radio-Canada; deuxièmement, son mandat législatif de répondre aux besoins particuliers des régions, qui, je le sais, intéresse de nombreux députés
    Je vais commencer par le financement. Comme les membres du comité le savent, CBC Television et Radio-Canada dépendent de recettes commerciales à hauteur de 40 à 50 p. 100 de leurs budgets de fonctionnement. La réalité est incontournable: recueillir ces recettes devient en fait la priorité numéro un de la Société. Sans ces recettes de publicité, tout son budget s'écroule.
    Cela a forcément un impact sur la programmation. C'est pourquoi la Société se fie si totalement aux sports professionnels. C'est pourquoi tous les programmes ou presque sont entrecoupés de publicités, même le téléjournal — pratique inhabituelle pour un télédiffuseur public, que je sache. C'est pourquoi aussi, quoi qu'on en dise, la SRC court en grande partie après les cotes d'écoute; c'est ce que recherchent les publicitaires et ce que la SRC se tient tenue d'assurer.
    Résultat? « Un réseau commercial subventionné » comme quelqu'un l'a appelé. En fait, comme l'a dit M. Rabinovitch lui-même dans un discours à Toronto, « Comment peut-on se qualifier de diffuseur public quand plus de 50 p. 100 de votre budget vient d'une concurrence avec le secteur privé? »
    J'estime que les députés et les Canadiens et les Canadiennes ne devraient pas se bercer d'illusions. Tant que CBC Television et Radio-Canada dépendront ainsi de recettes commerciales, nous aurons ce que nous avons à l'heure actuelle: un diffuseur commercial subventionné.
    Pour avoir un diffuseur public plus authentique, un diffuseur qui réponde à la définition que la SRC elle-même a proposée dans son mémoire au comité la semaine dernière, la seule solution est de diminuer la dépendance par rapport aux recettes commerciales. Et, là encore, ne nous leurrons pas. Dans notre mémoire, nous suggérons bien quelques façons dont la SRC pourrait ajouter des recettes non commerciales; n'empêche ce qu'il faut, au bout du compte, c'est un financement public accru. C'est incontournable.
    Sur la question, je vous renvoie à l'étude de Nordicity, qui montre que le Canada est loin d'être hypergénéreux dans son soutien envers le diffuseur public, quand on le compare à presque tous les autres pays.
    Parlons maintenant de programmation régionale. Le mandat de la Société, tel que défini dans la Loi sur la radiodiffusion, indique que la programmation devrait « refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions. » Si vous interrogez la SRC sur ses responsabilités régionales, vous obtenez systématiquement une réponse portant sur les bulletins de nouvelles locaux.
    Au fil des années, la SRC a essayé divers formats pour ces bulletins. Tony et moi en avons connu un bon nombre. Tous, à vrai dire, se sont avérés des échecs, dans presque tous les marchés au pays et ce, pour une bonne raison. Sans vouloir faire preuve de cynisme, je crois pouvoir prédire que la dernière mouture, dont on vous a parlé la semaine dernière, rencontrera autant de succès. Pourquoi? Parce que, à mon sens, la politique à la base de ces bulletins est erronée.
    Tout d'abord, les stations locales privées dominent l'heure des nouvelles au souper, pour une bonne raison. Dans la plupart des cas, c'est à peu près la seule programmation originale dans laquelle elles investissent. Elles investissent beaucoup; elles le font bien; et elles dominent les marchés à quelques exceptions près. Regardez donc la position de CJOH à Ottawa, pour ne prendre qu'un exemple. Je sais qu'il existe des exceptions à la règle, mais il y en a.
    Deuxièmement, j'estime important de souligner que la SRC est déjà le télédiffuseur local dans la plupart de ces marchés. Il se trouve juste que c'est à la radio. Vers quoi se tournent la plupart des citoyens de ces collectivités pour apprendre ce qui se passe dans leur ville et ce qu'on en pense? Vers les émissions du petit matin de la SRC et vers ses émissions de retour chez soi. Si vous prenez la SRC dans son ensemble, il me semble que son mandat local est rempli, en fait, par la radio qui, comme l'a mentionné la SRC, peut et devrait être élargi.
(0915)
    Troisièmement, même si les émissions télévisées de nouvelles locales de Radio-Canada rencontraient plus de succès, elles ne rempliraient pas le mandat défini par la loi, soit refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays. Ce n'est pas ce dont il s'agit. Soit dit en passant, diffuser une émission de nouvelles depuis Halifax ou Calgary, avec un contenu qui ne reflète pas ces endroits, mais aurait tout aussi bien pu être à Toronto, ne répond pas non plus au mandat.
    Il me semble que la Société doit repenser entièrement son approche de la programmation régionale, afin de revenir au mandat défini par la loi: refléter la diversité régionale tant au plan national qu'au niveau régional. Je ne suis pas un programmateur et je ne me targue pas d'en être un, mais je crois qu'il existe là des possibilités de faire preuve d'imagination. Prenez, par exemple, les nouvelles et les affaires publiques. Pourquoi ne pas créer une série d'émissions régionales d'affaires publiques hebdomadaires d'intérêt pour une région, qui renseigne plus qu'un segment de nouvelles de 90 secondes? De plus, avec une série de cinq émissions régionales, la SRC pourrait prendre le meilleur produit d'une région et le montrer aux Canadiens des autres régions. C'est une façon de rendre compte de la diversité régionale. Avoir eu, par exemple, une bonne mise en perspective de l'évolution de la situation de l'ADQ au Québec nous aurait peut-être aidés à comprendre les événements de lundi soir.
    De même, j'aimerais en savoir plus long sur l'infestation de dendoctrones du pin en Colombie-Britannique. D'autre part, j'ai lu deux ou trois choses sur la recherche éolienne à l'Île-du-Prince-Édouard. Les occasions ne manquent pas. Mais, avec le système actuel, personne ne les saisit. La SRC pourrait le faire; elle donnerait à une région un reflet d'elle-même et à d'autres régions un reflet de leurs consoeurs.
    En matière de programmation culturelle, à présent, je crois que la plupart des gens estiment que le Canada a connu une véritable explosion culturelle, ces dernières années, pour ce qui est du développement de groupes régionaux d'arts de la scène. Lorsque je rédigeais mon article pour le Forum des politiques publiques, j'ai eu un entretien avec un haut dirigeant du domaine des arts qui m'a dit entendre un écho de cette explosion à CBC Radio, sans véritablement en voir un reflet à CBC Television.
    À mon sens, la SRC pourrait et devrait fournir une vitrine télévisée à ces grands groupes régionaux, aussi bien au sein d'une région qu'au plan national--ce qui, à vrai dire, est rarement le cas à l'heure actuelle. D'autres personnes auraient peut-être de meilleures idées de programmes que moi. Mais ce que j'avance n'en reste pas moins vrai: il est temps, selon moi, de cesser de borner la programmation régionale aux bulletins de nouvelles locaux. Il est temps de revenir à ce que dit la Loi et d'élaborer une approche et une philosophie plus à même de la refléter.
    Merci.
    Oui, monsieur Manera.
    Monsieur le président, j'ai promis au début de la séance que je ferais des recommandations très spécifiques. Je ne veux pas tourner autour du pot et débiter des platitudes. Nous voulons de l'action.
    Voici donc la première de mes recommandations. Elle a trait à la gouvernance, sujet peu emballant, mais important.
    Au cours de ma vie, j'ai siégé à 25 conseils d'administration, dans le secteur privé, dans le secteur public, au Canada et aux États-Unis. Aucun de ces conseils d'administration n'était privé du pouvoir d'embaucher et de mettre à la porte le président et directeur général. Comment pouvez-vous tenir un conseil d'administration responsable de l'efficacité de sa société, la SRC, alors qu'il n'a pas son mot à dire pour l'embauche, l'évaluation, la rémunération et le renvoi du PDG? Du point de vue de la gouvernance, c'est aberrant. Et pourtant, c'est bien la situation. Non seulement cela, mais si le poste de président du conseil est vacant, devinez qui est censé l'occuper? Le PDG. C'est ce que j'ai fait pendant neuf mois, quand Patrick Watson a donné sa démission, pas parce que je voulais le faire — ce n'était pas mon travail et cela me dérangeait —, mais parce que j'y étais tenu par la loi.
    S'il y a une mesure et une seule que peut faire adopter votre comité, ce devrait être de recommander au gouvernement de changer la loi, afin de donner au conseil d'administration le pouvoir d'embaucher, de rémunérer, d'évaluer et de renvoyer, au besoin, le PDG. Ce faisant, vous donnerez au conseil d'administration les outils dont il a besoin pour véritablement administrer une société. À l'heure actuelle, cet outil essentiel fait défaut au conseil d'administration.
    Je ne voudrais pas que l'on voie dans mes remarques une critique de la gestion actuelle du conseil d'administration. Le conseil est prisonnier du modèle, qu'il le veuille ou pas. Je ne veux pas critiquer, mais simplement souligner une lacune systémique.
    C'était mon premier point.
    Deuxièmement, je vais vous exhorter à faire quelque chose à quoi j'aurais été radicalement opposé il y a dix ans. Pourquoi ai-je changé d'avis? Parce que l'expérience a porté ses fruits. Je vous exhorte donc à veiller à ce que deux employés, élus par leurs homologues, siègent au conseil d'administration. Il ne s'agit pas de représenter les intérêts des employés, ce qui est le travail du syndicat. Il serait d'ailleurs illégal pour ces deux employés de représenter les intérêts de leurs homologues. Ils seraient là pour apporter le point de vue bien spécifique qu'ils ont. Dans toute grosse organisation, si l'on veut véritablement savoir ce qui se passe, il est important de ne pas parler uniquement à la direction, mais de s'adresser également aux gens qui sont sur le terrain et qui effectuent le travail jour après jour. Eux comprennent ce qui se passe. Eux ont une connaissance réaliste de ce qu'il convient de faire. Je pense que le rôle du conseil d'administration serait fortement enrichi par l'apport de cette perspective.
    Je sais que cela exige un changement à la loi, mais si le comité est en faveur de cette mesure, ainsi que le gouvernement, il est tout à fait possible de mettre en oeuvre certaines de ces idées graduellement, sans changer la loi. Le gouvernement pourrait ainsi s'engager, lors de la prochaine nomination d'un PDG, à choisir un nom dans une liste soumise par le conseil d'administration. J'y vois une étape transitoire avant de modifier la loi et une mesure qui pourrait être adoptée immédiatement.
    En ce qui concerne les représentants des employés, là aussi, il faudrait en principe un changement à la loi, mais cela risque de prendre du temps. En attendant, s'il existe un consensus là aussi, le conseil d'administration lui-même pourrait créer le processus d'élection de deux employés, qui siégeraient ensuite en tant qu'observateurs et pourraient participer sans disposer du droit de vote. Même s'ils ne jouissaient pas tout de suite du droit de vote, je pense que la participation de ces employés serait d'une grande valeur.
    C'est quelque chose que j'ai appris il y a longtemps, en siégeant à deux conseils d'administration: celui du Collège Algonquin, ici à Ottawa, que je présidais; et, maintenant, l'Hôpital d'Ottawa. Ces deux conseils d'administration comptent parmi leurs membres des représentants des employés. Et c'est ce qui a changé mon avis sur la question. Si vous m'aviez demandé, il y a dix ans, ce que j'en pensais, je vous aurais répondu que c'était une mauvaise idée. Si j'ai changé d'avis, c'est parce que j'ai pu mesurer à sa juste valeur l'énorme contribution de ces gens.
    C'est donc une recommandation très précise et j'estime vraiment que le comité devrait y donner suite.
(0920)
    La deuxième recommandation porte sur les sports professionnels, le hockey; et il semblerait que nous ayons été dépassés par les événements dans ce domaine. J'ai toujours été un ardent défenseur du hockey professionnel à la SRC et je continue à ne rien y voir de mal. Le problème tient à la part des ressources de la Société qu'il mobilise. Plus de 40 p. 100 des parts d'auditoire de la télévision anglaise provient des sports, une totale distorsion de ce que devrait être un diffuseur public.
    Avant la conclusion de l'entente sur le hockey, nous disions que la SRC devait se retirer du secteur ou, peut-être, réutiliser son exposition en collaboration avec le secteur privé, afin que sa dépendance envers les sports professionnels... et ce n'était pas seulement pour la part d'auditoire. Si 40 p. 100 de l'auditoire est due aux sports, c'est une distorsion du mandat. De plus, cela rend la SRC vulnérable. Prenez le lock-out de la LNH, il y a un ou deux ans, et ses conséquences: d'un coup, la SRC a été contrainte de remplir plusieurs heures de programmation et de se passer d'une bonne part des recettes. Qu'a-t-elle fait? Elle a diffusé toute une série d'émissions américaines, comme si on n'en avait pas déjà assez. Là est donc le problème.
    Maintenant, une entente a été conclue. Nous n'en connaissons pas les détails et ne pouvons nous prononcer sur la question. Nous continuons toutefois de penser que, comme stratégie à long terme, la SRC devrait envisager sérieusement de réutiliser sa forte dépendance envers les sports professionnels. Cela va d'ailleurs de pair avec la remarque de Bill sur la dépendance de la Société envers les recettes publicitaires et l'orientation qui en découle.
    Bill a également évoqué la question des émissions de nouvelles locales à la télévision. Rien dans la loi ne donne à la SRC le mandat de fournir des services locaux. La loi parle de services régionaux. Dans la plupart des cas, pas tous, le secteur privé fournit des nouvelles télévisées locales satisfaisantes. Pourquoi alors la SRC essaierait-t-elle d'en faire autant? Elle peut le faire à la radio. Un dollar dépensé à la radio va cinq fois plus loin qu'un dollar consacré à la télévision, parce que la radio est un médium moins coûteux. C'est aussi un meilleur médium pour une couverture locale.
    La SRC pourrait réaliser des économies en s'abstenant de réaliser des émissions de nouvelles télévisées locales, à certaines exceptions près. Il y a des marchés où la SRC devrait se maintenir, vu l'absence ou l'insuffisance de la couverture assurée par le secteur privé. Nous en avons conscience et reconnaissons que ce serait un arrangement asymétrique. Mais l'asymétrie, ma foi, fait partie intégrante du Canada; nous ne sommes pas une nation symétrique, d'où la nécessité de se faire à l'idée de l'asymétrie. Avec la radio, on peut aller beaucoup plus loin et faire du meilleur travail. La loyauté de l'auditoire est forte, à la radio. Il y a une réaffectation des fonds au sein de la Société, et nous estimons qu'elle est tout à fait logique.
(0925)
    Monsieur Manera, pourriez-vous conclure? Je crois que nous avons beaucoup de questions et il ne nous restera qu'une demi-heure après votre exposé.
    Bien sûr.
    Je pense qu'il convient de modifier la loi afin de reconnaître l'importance des nouveaux médias. Il faut que la SRC soit un des intervenants; elle l'est et fait preuve d'un remarquable leadership. Il conviendrait que la loi le reconnaisse, afin de permettre à la SRC d'aller activement de l'avant. Le numérique offre de très belles perspectives d'avenir. Le futur est dans Internet et la SRC se doit de continuer dans cette voie.
    Certaines de ces initiatives requièrent de l'argent, qui doit provenir d'une augmentation des crédits votés par le Parlement. Nous pensons qu'il existe aussi ici une occasion de rediriger des fonds du Fonds canadien de télévision vers la SRC. À l'heure actuelle, elle obtient seulement 37 p. 100 des subventions du Fonds, indirectement, par le biais des producteurs indépendants. Or, un dollar du Fonds canadien de télévision va beaucoup plus loin quand c'est la SRC qui le reçoit, parce que, contrairement aux diffuseurs privés, la SRC diffuse ces programmes à des heures de grande écoute. Nous recommandons donc une augmentation substantielle du 37 p. 100.
    Les câblodistributeurs aiment faire croire que c'est leur argent qu'ils contribuent au Fonds. Ce n'est pas leur argent; c'est de l'argent recueilli auprès des abonnés, dans le cadre des conditions de licences — c'est l'argent des contribuables, quel que soit le point de vue adopté.
    Cela est très précis, très spécifique. Je vous prie de m'excuser, monsieur le président, si j'ai dépassé le temps prévu. Mais je pense avoir couvert à peu près tout ce que nous souhaitions dire et nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Merci à vous. C'était très intéressant. Nous avons seulement une heure, c'est pourquoi je dois vous presser, afin que nous ayons le temps de poser des questions.
    C'est M. Scott qui va commencer.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci à vous. Vous êtes toujours instructifs et enthousiastes, ce que nous apprécions beaucoup.
    Je vais être bref. Laissez-moi d'abord apporter une précision quant au financement, pas pour votre gouverne mais pour que ce soit noté officiellement: en faisant des comparaisons avec d'autres pays, il ne faut pas perdre de vue que, en plus, la diffusion dans un pays aussi étendu et aussi peu peuplé que le nôtre est très coûteuse. La position du Canada dans ces comparaisons est donc avantageusement faussée. Il me semblait important de le souligner.
    Hormis votre mention de Hockey Night in Canada et de la nécessité d'avoir d'autres programmations que les sports professionnels, aviez-vous autre chose à l'esprit, outre peut-être le retrait de certains bulletins de nouvelles locaux dans certains marchés? Vous avez dit « par exemple » et je serais curieux de savoir quoi d'autre vous aviez à l'esprit, en disant « par exemple ».
    C'était les deux seuls domaines que nous avions identifiés. Il y en aurait peut-être d'autres, mais ce sont les deux qui nous sont venus à l'esprit.
    Je réfléchis un peu à haute voix. Mais pourquoi ne pas utiliser certains des programmes très populaires Hockey Night in Canada par exemple, pour faire de l'auto-promotion? Dans la multiplicité de stations disponibles de nos jours, le problème est parfois simplement de faire savoir ce qui est offert à la SRC. Prenez une émission aussi populaire que Hockey Night in Canada. C'est une occasion en or, pas nécessairement pour une publicité commerciale, si c'est ce que vous souhaitez éviter, mais pour promouvoir la SRC elle-même auprès d'un auditoire qui est sans doute plus difficile à joindre. Les gens qui regardent des dramatiques de la SRC savent probablement où les trouver, mais ne constituent pas une grosse part de l'auditoire, si bien que l'accès devient un problème. Je vous le dis là parce que j'ai toujours pensé que la SRC manquait le coche, en n'utilisant pas des émissions aussi populaires que celle-ci.
    Je suis curieux quant à la gouvernance. C'est une question essentielle, parce que je crois que nous devons augmenter de façon appréciable le soutien public et, parallèlement, la confiance dans le modèle de gouvernance. Comment devrions-nous choisir le conseil d'administration de la SRC? Vous dites, je le sais, que notre comité jouirait d'une certaine autorité. Mais les membres du comité savent bien que tous les comités ont trop de responsabilités pour assumer chacune pleinement. Des gens du dehors diraient sans doute que le comité du patrimoine devrait se pencher sur ces nominations, en imaginant un exercice de supervision théoriquement mené avec rigueur. Mais les membres du comité savent que le comité a souvent quatre ans de retard sur les choses qu'il s'efforce de faire.
    Comment caractériseriez-vous un processus où nous pourrions avoir un groupe d'experts? Quand nous procédons à des nominations judiciaires, nous avons recours au Barreau canadien. Il existe des experts du dehors qui pourraient s'attaquer à cela. Pourriez-vous proposer quelque chose de ce type, en sus de la supervision que nous assurerions? J'estime que notre supervision est essentielle, mais qu'elle ne suffit pas à mener à terme la réflexion au bout de laquelle on aurait le conseil d'administration du type que vous semblez envisager avec votre proposition.
(0930)
    M'étant moi-même mêlé de politique au fil des ans, je doute que les gouvernements du jour abandonnent leur juste droit de procéder à des nominations par décret.
    Effectivement.
    Le tout est de savoir si l'on peut amener le système à fournir des nominations de meilleure qualité qu'à l'heure actuelle. À mon sens, c'est possible. Tout d'abord, il faut établir un processus permettant au conseil d'administration de faire part au gouvernement de ses besoins et de décrire la personne qu'il lui faut, qu'il s'agisse de besoins régionaux, linguistiques, d'appartenance à un sexe ou de spécialisation, pour que le gouvernement dispose d'un meilleur profil. Il faudrait ensuite un processus d'examen détaillé de ces nominations, soit par le biais de comités comme le vôtre, soit autrement. Je sais que le gouvernement actuel a envisagé divers modèles permettant d'y parvenir.
    Après avoir siégé au conseil d'administration de la SRC pendant plus de huit ans, je dirais quant à moi que la qualité d'ensemble des membres du conseil d'administration était plutôt bonne. De temps en temps comme nous le savons tous, le directeur de campagne d'un politicien parvient à s'immiscer. Je ne veux pas dire que les directeurs de campagne ne sont pas qualifiés pour devenir administrateurs de la SRC, mais...
    Y compris les personnes présentes.
    Oui, précisément, si c'est la seule raison pour laquelle ils sont nommés au conseil. Là est le problème. Mais j'estime que les conseils d'administration devraient jouer un plus grand rôle dans la définition de leurs besoins. Et on y arrive, graduellement, selon moi. Le gouvernement peut alors être guidé jusqu'à un certain point, et les nominations du gouvernement pourraient au moins être évaluées au regard de ces critères.
    Pour ce qui est des bulletins de nouvelles locales, vous apprendrez sans surprise qu'à Fredericton, et dans tout le Canada atlantique, il n'existe pas en fait de secteur des nouvelles florissant.
    Comme je l'ai dit l'autre jour devant d'autres témoins, je serais d'accord pour dire qu'il faut réévaluer les ressources qui y sont attribuées et c'est d'ailleurs ce dont nous parlons. Mais si la SRC ne fournissait pas de nouvelles locales, je dois dire qu'il n'y aurait vraiment pas beaucoup de nouvelles locales à Fredericton. Nous recevons Global et ATV, de Halifax. J'ai beau aimer mes voisins de Nouvelle-Écosse, cela ne m'intéresse pas outre mesure. Mes amis et moi avons besoin de savoir ce qui se passe au Nouveau-Brunswick et, sans la SRC, nous n'y parviendrions pas.
    Les prochains témoins que nous entendrons auront d'ailleurs, je crois, quelque chose à dire à ce sujet.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Kotto.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, pour vos témoignages. J'ai plusieurs questions à vous poser; je vais donc le faire rapidement.
     De votre perspective, considérez-vous que Radio-Canada remplit son mandat?
(0935)
    Oui, mais en partie seulement. Comme mon collègue Bill Neville l'a souligné, l'aspect régional doit être amélioré. Nous avons une culture très intéressante dans toutes les régions du Canada. Une certaine créativité existe hors des grandes villes. Plusieurs étoiles canadiennes ont commencé leur carrière dans des petites villes de tout le Canada.
    Le Québec, par exemple, a un dynamisme culturel, et pas seulement à Montréal, mais également à l'extérieur de cette ville. Terre-Neuve-et-Labrador a une culture très particulière. Du côté anglophone, cette province fait preuve d'une grande créativité, avec des comédie très intéressantes. La créativité existe partout au Canada.
    Les occasions qui sont disponibles à l'antenne de Radio-Canada, dans les régions, ne sont pas suffisantes. Ce que nous préconisons aujourd'hui, quand nous parlons de réduire la couverture locale, c'est de prendre un virage de façon à mettre davantage l'accent sur la contribution culturelle de toutes les régions du Canada.
    En ce sens, la réponse à votre question est non. Je ne veux pas critiquer la direction de Radio-Canada, mais la réalité est que pour toutes sortes de raisons, actuellement, elle ne relève pas son défi régional de façon satisfaisante.
    Ne faut-il pas ramener Radio-Canada, comme le réclament certains, à un statut de télédiffuseur de base, c'est-à-dire l'amener à jouer un rôle complémentaire au lieu de concurrencer le secteur privé, afin de respecter l'enveloppe budgétaire actuelle qui lui est allouée?
    Idéalement, une ligne très précise devrait séparer le privé du public. Mais en pratique, il y a une zone grise. Il y aura toujours un peu de dédoublement, parce que la créativité ne peut être séparée de façon aussi claire.
    Dans les grandes lignes, un radiodiffuseur public doit certainement jouer un rôle distinctif. Nous préconisons un renouvellement qui ferait en sorte que CBC/Radio-Canada se distinguerait à ce point du secteur privé que les gens pourraient reconnaître cette distinction.
    C'est pour prendre le virage dont nous parlons que nous préconisons la prise de certaines mesures très particulières.
    On nous a demandé à plusieurs reprises de travailler à l'augmentation du budget de Radio-Canada. Selon nous, il est question de transparence et de détails dans la reddition de comptes.
    Avez-vous des commentaires à formuler à ce sujet, puisque vous y avez travaillé?
    Oui, et je pense que Bill Neville ajoutera quelque chose.
    Radio-Canada est assujettie à une vérification annuelle du vérificateur général du Canada. Les comptes sont donc vérifiés, mais il serait possible d'augmenter la transparence. En effet, la vérificatrice générale a récemment signalé dans son rapport qu'on pouvait apporter certaines améliorations au chapitre de la transparence de Radio-Canada. Je suis d'accord avec ses recommandations.
    Il faut également accepter, lorsqu'il s'agit de certains aspects où CBC/Radio-Canada est en concurrence avec le secteur privé, qu'il y a des limites à rendre l'information publique. Dans un contexte de concurrence, on doit faire attention. Je pense toutefois qu'on peut augmenter la transparence et la reddition de comptes de la société, tel que la vérificatrice générale l'a recommandé.
(0940)
    La transparence peut ne pas traverser la zone restreinte actuelle, mais l'information ne peut-elle pas être accessible aux parlementaires, par exemple?
    Oui, le Parlement peut poser toutes sortes de questions. Il a toujours reconnu que — et je pense que vous pouvez le prouver...
    Je parle du détail de la reddition de comptes.
    Il y a certains détails que même le Parlement n'a pas jugé bon de régler parce que la philosophie qui sous-tend la création de CBC/Radio-Canada est son indépendance par rapport au gouvernement. On doit donc trouver un équilibre, au risque d'avoir un genre d'ingérence politique. Il ne faut pas aller trop loin. Je pense qu'on a actuellement une plus grande marge de manoeuvre. On peut le faire.

[Traduction]

    Monsieur Neville.
    Si vous le permettez, j'aimerais ajouter un bref commentaire. À mon avis, une question importante se pose, soit celle de la responsabilité. Et tout cela est un peu différent de ce sur quoi Tony vient d'insister.
    À mon avis, il existe une lacune très claire en ce qui a trait au système de responsabilité pour la SRC. Le mandat est énoncé clairement dans la loi, et il est clair qu'il doit être énoncé de façon plutôt générale. Il faut cependant se demander comment ce vocabulaire général est concrétisé et mis en oeuvre dans le système de programmation.
    L'expérience m'a appris qu'il n'y a pas de suivi après la loi. On a simplement une série de plans d'entreprise qui, pour être honnête, sont une des grandes farces d'Ottawa. Chaque année la Société présente un plan. Elle le présente au ministre, puis on n'en entend plus jamais parler. Lorsque je faisais partie du conseil d'administration, personne n'a jamais entendu de commentaires de la part du gouvernement sur ce plan. On n'a jamais essayé de communiquer avec la direction de la Société à la fin de l'année pour dire: « Très bien, voici ce que vous avez dit avoir l'intention de faire. L'avez-vous fait, et dans la négative, pourquoi pas »?
    Selon moi, quelqu'un doit jouer un double rôle. Tout d'abord, prendre le vocabulaire général de la loi et l'appliquer, et je ne sais pas si c'est votre comité... Compte tenu de la nature du monde médiatique d'aujourd'hui, peut-être appartiendrait-il au conseil d'administration de s'en occuper, d'ailleurs à mon avis son rôle est beaucoup trop limité en ce moment. Il doit certainement exister une façon de comparer le rendement aux engagements. À mon avis, ce n'est pas possible dans le système actuel.
    Avant de céder la parole à M. Angus, j'aimerais signaler que notre comité a publié quelques rapports qui ont été remis au ministère. Puis il y a eu des élections et le ministère n'avait plus à répondre au comité. Nous avons déposé à nouveau ces rapports afin de s'assurer de recevoir la réponse du gouvernement. Je crois que si vous avez pour mandat de formuler un rapport, tout au moins quelqu'un devrait y répondre.
    C'est simplement un commentaire que je voulais faire. Je m'en excuse. Le président ne devrait pas faire ce genre de chose, mais trop tard.
    Monsieur Angus.
    Merci. Cette discussion ce matin est fort intéressante.
    Je vais présenter d'abord quelques commentaires généraux puisque je ne dispose que de cinq minutes.
    Pour ce qui est de la responsabilité au sein de la structure de gouvernance, je crois que vous avez misé juste et très bien identifié le problème. J'espère sincèrement que notre comité songera sérieusement à formuler une recommandation à cet égard. Si nous voulons améliorer les normes de rendement, nous devons avoir une norme de responsabilité clairement établie dans la structure de gouvernance.
    Vous avez dit qu'il fallait s'éloigner de la prestation de services de nouvelles locales et avez parlé d'améliorer les services de télévision. Je peux prendre pour exemple ma région où CTV fait du très bon travail au niveau des nouvelles régionales. C'est ce que cette société fait, sauf du côté francophone, où Radio-Canada est la seule voix régionale.
    Pour ce qui est de l'utilisation du financement accordé au secteur de la télévision, nous essayons de livrer concurrence directement aux États-Unis dans le domaine des émissions dramatiques, des émissions sportives et il s'agit de questions fort importantes. Je trouve vos commentaires sur la façon de présenter des récits régionaux au reste du pays fort intéressants, parce que je suis convaincu que les gens seront intéressés. À mon avis, le problème — et vous êtes probablement plus conscient que moi de la situation — est le suivant. Lorsque j'oeuvrais dans le secteur de la télévision, je travaillais auprès d'un producteur pour faire justement ce genre de chose — des documentaires régionaux, la présentation de notre vécu. Nous voulions raconter les grandes histoires qui ne l'avaient pas encore été et nous voulions le faire de façon intéressante. Nous avions de très bonnes idées. Mais cela coûte très cher, et lorsque vous livrez concurrence à CBC ou aux radiodiffuseurs privés, il est beaucoup plus facile d'offrir plutôt une émission de cuisine ou une émission-causerie, parce que dans ces circonstances il faut simplement la caméra, l'éclairage et le tour est joué. Pour réaliser de bonnes émissions régionales, pour raconter le genre d'histoires que la radio fait si bien, tout cela coûte très cher.
    Voici donc ma question: Si nous voulions prendre cette mesure dans le secteur de la télévision, comment devrions-nous procéder, si nous ne voulons pas dépendre de recettes publicitaires?
(0945)
    Comme je l'ai signalé dans mes commentaires, il n'y a qu'une solution, pour être honnête, soit une forme quelconque de financement public.
    Je crois que si vous pensez sincèrement qu'il nous faut un radiodiffuseur public, vous devez donc prendre les mesures pour qu'il ne devienne pas simplement un radiodiffuseur commercial qui dépend autant des revenus publicitaires que c'est le cas actuellement. Si vous croyez que la SRC devrait dépendre autant des revenus publicitaires que c'est le cas actuellement, peut-être n'est-il pas nécessaire de lui offrir des subventions. Peut-être ne faut-il pas de radiodiffuseur public. C'est une opinion qu'on pourrait défendre, mais vous ne pouvez quand même pas manger à tous les râteliers. Vous devez décider.
    Trente dollars par personne, compte tenu du commentaire qu'a fait Andy sur la zone immense desservie... Comme vous le savez, la SRC représente un des services de radiodiffusion les plus vastes au monde en termes de services linguistiques: quatre réseaux, deux langues, des services dans le Nord dans plusieurs... etc... tout ça pour 30 $ par personne alors qu'il en coûte près de 120 $ dans le système britannique qui dessert une zone beaucoup plus petite et n'offre des services que dans une langue... Il faudra décider si vous croyez sincèrement que les services offerts devraient l'être et décider si vous voulez les appuyer financièrement. Je ne pense pas que vous pouvez continuer à tourner autour du pot.
    J'aimerais que vous nous parliez de votre expérience à CBC, parce que je constate que la radio à CBC réussit très bien; elle offre de très bonnes émissions locales, et la comédie... la comédie produite par CBC à mon avis n'a pas d'égal. Il faut maintenant comparer cela avec la télévision. La musique, la nouvelle musique est souvent présentée à CBC bien avant qu'elle ne soit diffusée par les radiodiffuseurs privés. Les gens écoutent CBC parce qu'ils écoutent de nouvelles choses. Je n'entends pas le même genre de nouvelle musique à la télévision. Parlons d'émissions dramatiques. À la télévision on se demande si on fait vraiment preuve d'innovation. Au niveau des documentaires, nous n'avons pas d'égal. Vous pouvez comparer les documentaires radio réalisés par CBC avec quelques documentaires préparés par n'importe quel autre radiodiffuseur public au monde, et il y a de quoi être fier.
    D'après vous, d'après ce que votre expérience vous a appris, pourquoi CBC n'a-t-elle pas étudié le succès de la radio, les éléments forts de la radio pour les transférer à la télévision?
    Tout d'abord, je dois signaler qu'à mon avis, vous avez--et je crois que vous comprendrez--deux médias qui sont très différents. Les gens qui écoutent la radio choisissent une station et y restent. Vous avez votre station préférée et vous y êtes fidèle. À la télévision, cependant, votre fidélité change d'une heure à l'autre. Vous êtes là avec votre télécommande et vous passez d'un poste à l'autre. C'est un phénomène bien différent qui existe entre les deux types de médias et l'auditoire est bien différent également.
    Cependant, et je crois que c'est très important, je crois que CBC Radio reconnaît qu'elle n'est pas là pour livrer concurrence au secteur privé, qu'elle a un créneau qu'elle s'est créé qui lui convient parfaitement. Il est intéressant de noter que l'auditoire de CBC augmente dans les deux langues officielles pour Radio One et Radio Two ainsi que la première chaîne. Ils ne sont pas là pour essayer d'attirer les tops 50.
    Du côté télévision, si vous pensez au niveau de travail de CBC à Toronto, je peux vous dire que leur principale préoccupation est la concurrence avec CTV. C'est ce pour quoi ils pensent exister. C'est en partie une illustration de la réalité commerciale et également, à mon avis, une question de rôle historique qui remonte aux années 1960 et 1970 lorsque CBC menait le bal. Ils voudraient bien retrouver cette situation.
    Je crois que c'est ce qui se passe. Les choses sont bien différentes évidemment. CBC Radio a une perception de radiodiffusion publique. Je ne suis pas convaincu que la même chose s'applique au système de télévision. En fait j'ai souvent pensé qu'il serait très utile d'inviter quelqu'un du Royaume-Uni ou d'ailleurs où il existe un radiodiffuseur public, puis lui remettre une radio et un appareil de télévision et lui dire: Voici trouvez-moi qui est le radiodiffuseur public. Je crois qu'il trouverait CBC à la radio en à peu près dix secondes et je pense que s'il trouvait CBC à la télé dans la première heure, ce serait simplement un coup de chance.
(0950)
    Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose. Je crois que Bill a identifié très clairement le problème.
    Il n'y a pas de publicité à la radio de CBC, sauf dans des circonstances extraordinaires, alors qu'à la télévision, il incombe de rappeler que la moitié du budget provient de recettes publicitaires. Cela a donc un impact très important.
    Cependant, cela dit, je crois qu'il nous faut reconnaître que CBC a fait des progrès extraordinaires au cours des dernières années et a su faire disparaître certaines des limites qui existaient auparavant. Il y a donc beaucoup plus de collaboration au sein de la Société entre la radio et la télévision. Il y a des gens comme « Sir » Rex Murphy. Il est à la télévision, à la radio, il rédige une chronique dans The Globe and Mail. Donc nombre des barrières et obstacles disparaissent, et ça c'est une amélioration que nous devons reconnaître. Il reste encore beaucoup à faire — je ne le nie pas — mais nous nous devons de reconnaître les améliorations qui ont été apportées.
    Il ne faut pas oublier de plus qu'avec Internet, qui est tout compte fait l'avenir, les lignes de démarcation ne sont plus aussi claires. Vous avez aujourd'hui un médium qui n'est pas tout à fait vidéo, ni audio, et qui n'est pas non plus la presse écrite. En fait, il regroupe tous ces éléments. Ainsi, au fil du temps, cette convergence des divers médias s'accélérera. Vous aurez donc toutes ces plateformes. Elles existent déjà. Il y aura des occasions extraordinaires, et j'en suis ravi. Je crois que la SRC devrait être félicitée du leadership qu'elle exerce dans ce secteur.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Fast.
    Monsieur le président, cela m'amène parfaitement à ma question: la question des nouveaux médias.
    D'après ce que vous avez dit, tout compte fait, vous dites qu'il existe des lignes de démarcation entre le rôle du radiodiffuseur public et celui des radiodiffuseurs privés.
    Vous venez de parler des nouveaux médias. Dans vos recommandations, vous avez abordé les défis que ces nouveaux médias posent et vous avez dit qu'ils vous amenaient à repenser certains des modèles de gestion traditionnels. Permettez-moi de vous citer votre recommandation: vous dites: « [Il serait bon] à la lumière de cette réalité — vous parlez ici des nouveaux médias — de revoir la pertinence des diverses subventions à caractère fiscal et autres crédits d'impôt ainsi que les exigences en matière de contenu canadien auxquelles doivent se plier les radiodiffuseurs du secteur privé ».
    Monsieur Manera, il y a quelques mois vous avez également rédigé un article publié dans le Ottawa Citizen. Vous avez été beaucoup plus direct, et j'aimerais vous rappeler ce que vous avez dit. « Le gouvernement fédéral devrait annuler tous les crédits d'impôt et subventions à caractère fiscal accordés aux radiodiffuseurs privés... Il est absolument illogique que les contribuables subventionnent les radiodiffuseurs à but lucratif ». Vous poursuivez en ajoutant qu'il faudrait modifier les règlements régissant le contenu canadien auxquels sont assujettis les radiodiffuseurs privés « qui devraient être libres d'offrir la programmation qui correspond le mieux à leurs objectifs commerciaux ».
    Vous avez quand même été assez direct. Vous dites qu'il faut se défaire des subventions, des règlements régissant le contenu canadien auxquels sont assujettis les radiodiffuseurs privés, et se concentrer plus sur le mandat de la SRC, afin de s'assurer qu'elle reçoit le financement approprié.
    Est-ce bien interpréter vos commentaires?
    Oui, je dois reconnaître que j'ai été assez direct. De plus, Bill qui a travaillé avec moi pendant dix ans à la SRC sait très bien que je peux être particulièrement direct, et même à l'occasion plutôt têtu.
    Vous avez cité fidèlement ce que j'ai dit. Je ne me suis pas vraiment écarté de la position que vous venez de citer, de l'article qui a été publié dans le Ottawa Citizen; cependant j'ai rajusté un peu mon tir après m'être penché plus sérieusement sur la question.
    Le message que je veux vous communiquer est le suivant. Au Canada, les radiodiffuseurs privés à but lucratif reçoivent une aide financière importante sous la forme d'allégements fiscaux, de subventions provenant du Fonds canadien de télévision et d'avantages financiers qui valent des millions de dollars qui sont assurés par la Loi de l'impôt sur le revenu. Ce n'est pas simplement la SRC qui reçoit une aide financière du gouvernement; les radiodiffuseurs privés également. Et ça c'est un résultat direct des caractéristiques économiques de la production d'émissions de télévision au Canada, parce que nous représentons un marché tout de même assez petit.
    Les radiodiffuseurs privés doivent respecter certains engagements à l'égard de la teneur canadienne. Évidemment ces engagements ne représentent pas un fardeau aussi important pour eux que pour la SRC, et c'est parfaitement normal. Je dis simplement que je crois sincèrement que le système de la libre entreprise est un bon système. Je suis convaincu que le système qui produit le plus de richesse et de prospérité est également le système qui permet la plus grande liberté. C'est une chose dans laquelle je crois fermement.
    Laissons donc les radiodiffuseurs privés faire ce qu'ils font le mieux, c'est-à-dire des sous. Et je ne suis pas convaincu que nous devrions éliminer tous les règlements touchant la teneur canadienne, mais je crois qu'il faudrait être un peu plus réalistes à cet égard. À mon avis, si le CRTC le faisait, les radiodiffuseurs privés offriraient toujours une teneur canadienne, peut-être moins qu'aujourd'hui, mais offriraient quand même une certaine teneur canadienne lorsque cela correspond à leurs objectifs commerciaux. Ils pourraient le faire en toute liberté.
    Cependant, en retour, il faudrait assurer un financement approprié à la SRC, puisque son mandat est d'assurer une teneur canadienne. Il ne faut donc pas demander aux radiodiffuseurs privés de faire des choses qui vont à l'encontre de leurs objectifs commerciaux, mais il ne faut pas non plus placer la SRC dans une situation où elle se trouve à faire des choses que les radiodiffuseurs privés savent mieux faire, soit réaliser des profits. Il s'agit de deux choses différentes.
    Voilà ce que je voulais faire valoir.
(0955)
    Cela m'amène à poser ma prochaine question, et je vous avais déjà dit que j'allais en parler.
    Comme vous le savez, le FCT a été mis sur pied pour offrir une solution de rechange à un problème qui se posait. Les EDR voulaient pouvoir demander plus en frais à leurs abonnés. Le gouvernement fédéral a accepté en disant, en retour, vous devrez cotiser au FCT.
    Croyez-vous que les radiodiffuseurs privés peuvent jouer un rôle pour aider à financer le système de radiodiffusion public?
    À mon avis, le financement du radiodiffuseur public devrait provenir principalement des crédits parlementaires. Après tout c'est le Parlement qui a créé la SRC, et il lui appartient donc de s'assurer que cette société dispose du financement approprié. Le reste n'est qu'un détail. Nous avons proposé certaines idées dans notre texte quant à la façon de réacheminer le financement. Comme Bill l'a signalé, si vous n'aimez pas nos idées, proposez-en d'autres. Peu nous importe.
    Lorsque le Parlement adopte des lois annonçant qu'il va créer un radiodiffuseur public, cette décision doit s'accompagner d'une responsabilité à l'égard d'un financement approprié. Il ne sert vraiment à rien d'avoir une mesure législative qui dit: Faites ces magnifiques choses, et puis laisser simplement la SRC essayer de se tirer d'affaire toute seule. C'est là que se trouve la responsabilité
    Si le Parlement décide pour une raison ou pour une autre, que les radiodiffuseurs privés devraient aider financièrement la SRC, très bien. Nous n'avons pas pris de position là-dessus. Nous disons simplement que le modèle actuel ne fonctionne pas. Il y quelque chose qui cloche. Il faut le réparer, parce que si vous n'intervenez pas, la SRC deviendra de plus en plus un radiodiffuseur commercial.
    Si c'est ce que désire le Parlement, tout ce qu'il a à faire c'est de dire que la SRC sera privatisée et je peux vous assurer que si c'était le cas, elle ferait de l'argent, beaucoup d'argent. Elle se tournerait vers le marché et commencerait à livrer concurrence de façon assez agressive pour acheter les émissions américaines comme le font CTV et Global. Cela entraînerait une augmentation des prix et assurerait la diffusion d'un plus grand nombre d'émissions américaines à la télévision et la SRC ferait une fortune. Si c'est ce qu'il faut au Canada, allez-y, privatisez la SRC.
    Personnellement, je ne pense pas qu'on ait besoin d'un autre radiodiffuseur commercial privé au Canada pour diffuser encore plus d'émissions américaines qu'on peut facilement visionner en syntonisant les postes américains de toute façon. De plus, les radiodiffuseurs privés sont actuellement subventionnés grâce au système de radiodiffusion simultanée. Ils reçoivent ainsi des centaines de millions de dollars. Conformément aux dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu, cela représente en effet des centaines de millions de dollars. Grâce au FCT, des centaines de millions de dollars sont distribués et il s'agit là de deniers publics.
    Je dis simplement que si nous voulons investir les deniers publics dans le contenu canadien, assurons-nous que cet argent soit offert à la seule organisation qui a été conçue précisément par le Parlement il y a plus de 70 ans pour le faire. C'est un choix que doit faire le Parlement.
    Merci.
    Je vois qu'il ne reste plus de temps.
    Nous avons encore beaucoup de temps.
    Je sais, mais je vous réserverai un peu plus de temps une autre fois. La SRC représente un dossier de taille. Vos commentaires et votre attitude directe ce matin nous ont été très utiles.
    Nous espérons pouvoir réinviter divers témoins. Je ne sais pas si nous pourrons préparer un rapport complet en peu de temps. Je ne crois pas. Lorsque nous préparerons un rapport provisoire, ou un rapport plus tard, nous espérons pouvoir vous convoquer à nouveau, ainsi que d'autres témoins. La forme sera peut-être quelque peu différente, peut-être une table ronde, où divers intervenants pourront se rencontrer.
    Nous allons faire une brève pause.
    Je vous remercie d'être venus nous rencontrer ce matin.
(1000)
    Merci, monsieur le président. Je vous remercie de nous avoir offert cette occasion.
    Merci.
(1000)

(1005)
    Je tiens à souhaiter la bienvenue à nos nouveaux témoins ce matin qui représentent la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada.
    Madame Beaulieu, serez-vous la porte-parole? Je tiens à vous souhaiter à tous deux la bienvenue. Je vous laisserai présenter votre exposé puis nous passerons aux questions.
    Merci.

[Français]

    Merci et bonjour, monsieur le président. Bonjour aussi aux députés. C'est un plaisir de me retrouver ici encore une fois et de parler d'un sujet extrêmement important: Radio-Canada et son avenir. M'accompagne aujourd'hui M. Serge Quinty, qui est le directeur des communications de la FCFA du Canada et qui m'aidera ce matin à répondre à certaines de vos questions.
    J'aimerais tout d'abord vous remercier de nous avoir invités ce matin à partager nos réflexions sur le mandat de radiodiffuseur public du Canada au XXIe siècle. Comme vous l'avez vu dans le mémoire que nous vous avons soumis et comme vous l'avez sûrement entendu dans les interventions d'autres groupes, Radio-Canada revêt une importance particulière pour toutes les communautés francophones et acadiennes au Canada. Comme vous pouvez vous en douter, ces dernières ont souvent un accès très limité à des contenus radiophoniques et télévisuels locaux dans leur langue. La SRC joue donc un rôle essentiel pour nous, dans la cohésion des communautés, ça va de soi, et la SRC appuie aussi, dans une large mesure, leur capacité de vivre en français.
    C'est pourquoi, dans cette comparution, nous nous sommes attardés à trois volets particuliers du mandat de Radio-Canada. Tout d'abord, il y a l'obligation de rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au niveau national que régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions. Ensuite, le service doit être offert en français et en anglais de manière à refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue. Enfin, il doit être offert partout au Canada de la manière la plus adéquate et, évidemment, la plus efficace.
    Laissez-moi vous dire d'emblée que pour la FCFA, ces trois éléments du mandat de Radio-Canada sont toujours pertinents. En fait, ils le sont de plus en plus. Nous voulons absolument un diffuseur public dans lequel les francophones, peu importe d'où ils vivent au pays, peuvent se reconnaître; un diffuseur public qui crée des liens, qui encourage le dialogue et, ce faisant, contribue à bâtir un pays plus fort. Nous voulons un diffuseur public qui est l'ambassadeur et la vitrine à l'international de la diversité et de la dualité linguistique comme valeurs fondamentales reflétant la réalité du Canada.
    Cette vision de Radio-Canada, reflétée par son mandat, est donc toujours pertinente. Là où un bémol s'impose, c'est au chapitre de la capacité de la société d'État de s'acquitter de son mandat. Premier constat: les compressions budgétaires des années 1990 ont hypothéqué cette capacité. Même si, depuis ce temps, la situation s'est rétablie à plusieurs points de vue, des ressources financières plus restreintes ont amené Radio-Canada à opérer dans une logique de marché, dans un marché concurrentiel et, pour nous comme pour bien d'autres — c'est ce que nous avons entendu un peu plus tôt —, ce ne sont pas là de bonnes nouvelles.
    Dans une logique de commercialisation et de rentabilité des productions, les communautés francophones et acadiennes sont toujours perdantes, puisqu'elles ne peuvent fournir des chiffres impressionnants en termes de cotes d'écoute. Pour nous, il est donc clair que des mesures doivent être prises pour assurer que Radio-Canada ne soit plus obligée d'opérer dans une logique de marché. C'est d'ailleurs cet impératif d'opérer indépendamment d'une logique commerciale qui justifie le financement public de grandes chaînes comme la BBC ou encore Radio France.
    Ne plus opérer dans une logique de marché n'équivaut pas, cependant, à ne plus rechercher un enracinement auprès de l'auditoire. Sur ce point, je me dois de mentionner l'excellent travail fait par plusieurs stations régionales de Radio-Canada. Dans plusieurs provinces, en particulier dans l'Ouest, les francophones perçoivent très positivement les services de la radio régionale et le souci de bien refléter la réalité et les préoccupations de la communauté. Toutefois, il y a encore quelques bémols, deux en particulier.
    D'abord, on nous parle beaucoup de manque de moyens. À notre avis, c'est assurément ce qui hypothèque la capacité de notre télédiffuseur public. À l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple, on nous a indiqué que malgré les efforts des animateurs pour offrir un contenu pertinent francophone à la communauté, l'équipe semble sous-outillée, au point où la population doit écouter la radio anglaise pour connaître les éléments de nouvelles qui affectent leur quotidien. Je pense que vous l'avez mentionné plus tôt.
(1010)
    Dans un deuxième temps, il existe toujours, dans bon nombre de régions, une problématique reliée à une faible cote d'écoute de la radio de Radio-Canada. À certains endroits en Atlantique et en Ontario, ce sont les radios communautaires de langue française qui semblent le mieux desservir la population, si l'on se fie aux données des sondages BBM.
    De cette réalité découlent deux constats. D'abord, dans une optique d'équilibre du système canadien de radiodiffusion, il est essentiel de mieux appuyer les radios communautaires qui jouent, on le voit, un rôle central dans la vitalité des communautés francophones et acadiennes.
    Ensuite, il est très important de renforcer la capacité des stations régionales de Radio-Canada de faire un travail de maillage et d'arrimage avec leurs communautés, dans un souci d'assurer la pertinence de Radio-Canada dans toutes les régions du pays, puisqu'il s'agit, encore une fois, de notre télédiffuseur.
    Il nous paraît notamment essentiel d'aller chercher les jeunes, qui représentent notre force de renouvellement pour les communautés, comme pour d'autres communautés, d'ailleurs, et la cote future de la Société Radio-Canada. C'est pourquoi il sera de plus en plus important pour les stations régionales de développer à court et à moyen terme des stratégies visant à offrir un produit de plus en plus dynamique, interactif et arrimé non seulement aux préoccupations, mais aussi à la rétroaction de la communauté desservie. À cet égard, les nouvelles technologies représentent un potentiel prometteur pour faire de Radio-Canada un médium flexible et branché sur la francophonie de chaque région du Canada.
    J'aimerais apporter quelques considérations sur la télévision de Radio-Canada et, surtout, sur l'antenne nationale de la société d'État. De façon générale, les communautés francophones et acadiennes estiment que le contenu présenté à l'antenne nationale de Radio-Canada demeure trop centré sur Montréal. D'ailleurs, plusieurs d'entre nous l'appelons Radio-Canada-Montréal, tant pour ce qui est des informations que des émissions de variétés. À cet égard, la société d'État doit relever des défis dans l'optique de véritablement rendre compte de la diversité et des réalités régionales du Canada, et de stimuler un dialogue entre la société québécoise et les communautés francophones et acadiennes. Ceci nous apparaît un élément extrêmement important. Si on veut que les francophones de tout le pays se parlent, se connaissent, on a besoin de faire un tel travail.
    Ces défis sont notamment d'assurer un plus grand traitement de l'actualité des communautés aux émissions d'information nationale, d'assurer une meilleure présence de personnalités des communautés dans des émissions de variétés et de favoriser une plus grande présence à l'écran de dramatiques de langue française produites à l'extérieur du Québec.
    Un certain nombre de gestes concrets ont été posés à ce chapitre par la société d'État. Je pense notamment à la diffusion nationale de le télésérie Belle Baie produite en Acadie. Je pense également à la nouvelle formule de couverture de l'actualité à RDI, que nous suivons avec beaucoup d'attention.
    Je pense enfin aux liens de communication et de collaboration que nous avons établis entre la SRC, les communautés et la FCFA.
    Mais la société d'État peut aller plus loin dans l'adoption de mesures positives pour favoriser l'épanouissement des minorités francophones du Canada et appuyer leur développement.
    Nous avons recommandé dans notre mémoire le développement d'un cadre d'imputabilité, et en ce sens, encore une fois, nous sommes d'accord sur les propos qui ont été tenus dans le cadre de la dernière comparution de ce matin. Cette question a un lien direct avec un élément identifié par la société d'État elle-même dans son Plan d'action axé sur les résultats de 2006-2007 pour la mise en oeuvre de l'article 41 de la Loi sur les langues officielles.
    On y parle, entre autres, d'une meilleure coordination et harmonisation des indicateurs de performance pour l'ensemble des services de Radio-Canada. C'est en ce sens que nous parlons aussi d'un cadre d'imputabilité, d'une responsabilisation, en quelque sorte, qui définira des objectifs clairs accompagnés, évidemment, de mesures de rendement pour un meilleur reflet des régions et, surtout, des minorités de langue officielle à l'antenne nationale.
    Ce mécanisme permettrait également à la société d'État de mieux rendre compte des résultats de ses stratégies et, évidemment, de celles de ses stations régionales francophones, visant ainsi un meilleur arrimage entre la communauté et la SRC et un accroissement de l'écoute. Surtout, un tel cadre d'imputabilité tiendrait compte de la nouvelle partie VII de la Loi sur les langues officielles et de l'impératif d'adopter des mesures positives.
(1015)
    Comme je l'ai dit plus tôt, Radio-Canada a déjà posé un certain nombre de gestes à cet égard. Cependant, nous pouvons et nous devons aller beaucoup plus loin parce que les communautés francophones et acadiennes ont besoin de Radio-Canada pour assurer leur vitalité future et parce qu'un Canada fort passe par un diffuseur public reflétant la diversité des réalités de notre pays.
    C'est dans ce sens que la FCFA et les communautés qu'elle représente sont déterminées à multiplier les liens de collaboration constructifs avec Radio-Canada pour bâtir un diffuseur public dont nous pouvons tous être fiers et dont le mandat demeure plus pertinent que jamais au XXIe siècle.
    Merci, messieurs les députés. Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    La première question sera posée par Mme Keeper.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais revenir aux réductions qui ont été apportées au milieu des années 90 et vous en avez parlé et vous avez également mentionné l'impact qu'elles ont eu sur les communautés francophones du Canada, tout particulièrement celles de l'Ouest et du Nord.
    Nous avons récemment tenu des audiences à Yellowknife et je représente une région du Manitoba qui inclut tout le nord de la province. On a dit très clairement dans le Nord — et en particulier j'en suis convaincue dans l'Ouest également — qu'il n'y a pas de participation au niveau des services en français, que la programmation est établie à Montréal, et les gens, comme vous l'avez mentionné, ont l'impression que les questions d'intérêt local ne sont pas représentées. Pouvez-vous nous en dire un peu plus long sur la façon dont ces réductions ont eu un impact sur la représentation des intérêts locaux et peut-être nous en dire un peu plus long sur les recommandations que vous avez formulées à cet égard?
(1020)
    Lorsque nous avons préparé notre énoncé de position, nous nous sommes penchés sur ce qui s'était passé au cours des 10 à 15 dernières années et les commentaires qu'avait faits la FCFA sur les réductions qui avaient été apportées; en 1995-1996, certaines stations de télévision ont été regroupées en un seul service pour toute la région de l'Ouest. Quelques années plus tard, on a réinvesti certains montants dans les stations régionales de l'Ouest, tout particulièrement dans la radio régionale, ce qui a permis de renforcer la couverture médiatique locale. Cependant, nos membres nous ont signalé qu'il n'existe toujours pas beaucoup de moyens ou de ressources, comme vous l'avez signalé, dans certaines régions du Nord où les communautés n'ont même pas accès à un service local de Radio-Canada.
    Prenons l'exemple de l'Alberta. Ce que la communauté en Alberta déplore, c'est que cette province fait souvent les manchettes nationales de nos jours, pour des raisons bien évidentes, et qu'une bonne partie des ressources de la station locale sont consacrées à couvrir les nouvelles nationales plutôt que celles de la communauté francophone. Ce n'est qu'un exemple qui fait ressortir le besoin de renforcer les ressources affectées à la couverture locale.
    Je vous écoute parler, et je suis absolument renversée puisque nous procédons à un examen du mandat de la Société Radio-Canada, et vous êtes conscients des défis... Une des choses que j'ai signalées, comme l'ont d'ailleurs mentionné les témoins qui vous ont précédés, c'est que l'apport financier à Radio-Canada a diminué de façon marquée au cours des dix dernières années alors que les coûts associés à la programmation ont augmenté. Vous voyez donc les défis que doit relever la SRC.
    Cependant, il faut se demander quelles devraient être les priorités, comment la Société peut mieux s'acquitter du mandat qui lui a été confié. C'est ce que vous demandez également. Comment s'assurer que les Canadiens auront une programmation distincte et différente de la part du radiodiffuseur public? Comment pensez-vous que Radio-Canada peut desservir les communautés linguistiques par la radio, les nouveaux médias, et la télévision? Avez-vous des recommandations particulières à formuler?

[Français]

    Je vais vous répondre en français.
    Dans notre mémoire, nous avons évidemment parlé du problème des ressources. Je pense qu'il s'agit d'un problème fondamental. Je crois que les membres du comité ont très bien compris que si l'on veut un télédiffuseur public en mesure d'accomplir son mandat, il faudra naturellement se pencher sur la question des ressources dans son ensemble. Il y a là un élément important.
    On a également mentionné dans notre mémoire — et on en a brièvement parlé un peu plus tôt — la nécessité de rattacher aux ressources octroyées à la SRC un cadre d'imputabilité. D'une certaine façon, il faut que la société Radio-Canada soit comme n'importe quelle autre agence de ce gouvernement, c'est-à-dire qu'elle doit être en mesure de faire une reddition de comptes. À cet effet, je pense qu'il y a un travail de fond à faire.
    La question locale et nationale nous préoccupe puisque, finalement, il y a très peu de traitement sur le plan national, à l'exception des très grandes nouvelles, cela va de soi. Il ne s'agit donc pas d'une ou deux petites mesures. Je pense qu'il y a plusieurs correctifs à apporter si on veut un télédiffuseur qui représente correctement ce que nous sommes et qui mette en évidence les grands enjeux de la société canadienne.
    En ce qui nous concerne, au cours de la dernière année, nous nous sommes imposés, autant sur la base nationale que locale et régionale, en devenant des partenaires actifs. Nous avons renforcé le dialogue avec les gens de Radio-Canada. D'une part, peut-être le savez-vous, RDI a modifié sa programmation qui nous concerne, et nous suivons attentivement ces modifications.
     Nous avons maintenant un dialogue que je qualifierais d'actif, en tant qu'un des groupes d'importance au Canada. Je pense que c'est souvent grâce à ce genre de dialogue que l'on peut se faire entendre. Cela nous permet également de mettre en place des mesures nous permettant de faciliter, dans une certaine mesure, un contenu adapté, et de nous assurer que Radio-Canada nous représente adéquatement.
    À mon avis, encore une fois, il ne s'agit pas d'apporter une ou deux mesures. Il s'agit vraiment de traiter la question dans son ensemble et de déterminer ce que l'on attend de Radio-Canada, comme pays. Je pense que c'est à la base des discussions de ce matin.
(1025)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Madame Bourgeois.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Mesdames, messieurs, bonjour.
    Je vais simplement faire un bref commentaire avant de poser mes questions.
    Tout d'abord, vous avez dit un peu plus tôt dans votre présentation que les communautés francophones avaient besoin de Radio-Canada. Je pense que cela dépend de la façon dont on interprète ces mots. En effet, les gens des communautés francophones et anglophones paient leurs taxes au Canada et ils ont le droit d'avoir accès aux services de Radio-Canada. Ce n'est pas seulement un besoin, c'est un droit indéniable et historique qui a été donné en vertu de la Constitution canadienne.
    Cela étant dit, nous sommes allés à Vancouver et à Yellowknife, où des francophones hors Québec sont venus nous parler des relations qu'ils entretenaient avec la Société Radio-Canada.
    Premièrement, pensez-vous que Radio-Canada remplit bien son mandat vis-à-vis des communautés francophones?
    C'est une très bonne question.
    Je crois que d'énormes améliorations doivent être apportées. Il y a de la place pour beaucoup d'améliorations.
    Comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire, il est évident que les coupes qui ont été faites ont touché définitivement la capacité de la radio d'État, de ce télédiffuseur public. En ce sens, il est évident qu'à ce point-ci, nous aspirons à un télédiffuseur public beaucoup plus solide et plus en mesure de répondre adéquatement à son mandat.
    Les jeunes des régions sont venus nous dire qu'il manquait de jeunes journalistes francophones. Votre fédération essaie-t-elle de promouvoir les jeunes journalistes francophones pouvant couvrir l'actualité locale des communautés francophones?
(1030)
    Ce n'est pas nous qui les embauchons.
    Non, mais est-ce que vous parlez de cela?
    La question des jeunes est importante. Je vais sans doute demander à mon collègue d'ajouter quelque chose à ce sujet. Je peux quand même vous dire que dans bien des cas, les journalistes de Radio-Canada qui arrivent dans les communautés francophones et doivent contribuer au mandat de la SRC, si je peux m'exprimer ainsi, viennent du Québec. Bien souvent, il s'agit pour eux d'une porte d'entrée. Ils restent pendant un, deux ou trois ans, puis...
    Ça change très vite.
    En effet. Ils acquièrent bien sûr une base de connaissances, mais il reste que pour eux, c'est souvent une porte d'entrée. Ça ne veut pas dire, cependant, que ces gens ne sont pas en mesure de faire du bon travail. Dans bien des cas, ils commencent à zéro, ont très peu de connaissances et se réjouissent de voir qu'il y a des francophones ailleurs, que ce soit à Regina, à Edmonton ou ailleurs. C'est souvent une nouvelle réalité que découvrent ces gens.
    Cela étant dit, de plus en plus de programmes sont offerts. Il en y a d'excellents à la Cité collégiale, entre autres, et au Collège Boréal. Avec ceux-ci, on peut former des jeunes des communautés de façon à ce qu'ils puissent remplir des mandats, que ce soit auprès de la Société Radio-Canada, de stations de radio communautaire ou ailleurs. Il est évident qu'il faut miser sur la formation des jeunes des communautés. Ils pourront par la suite prendre le relais, obtenir des postes et devenir, à mon avis, de très bons intermédiaires. Il est vraiment important que la jeunesse soit présente.
    Ma dernière question est en deux volets.
     On nous a dit qu'il y avait un retard immense pour ce qui est de l'expression française sur le Web. Étant donné que les jeunes utilisent beaucoup le Web, celui-ci pourrait contribuer à promouvoir le fait français à l'extérieur du Québec. Je ne sais pas si vous êtes consciente de ça.
    Par ailleurs, il y a un endroit, et je pense que c'est à Yellowknife, où la Société Radio-Canada utilise l'antenne des francophones locaux pour acheminer ses émissions à d'autres francophones, notamment dans les Territoires du Nord-Ouest. De plus, Radio-Canada ne fournit pas un sou pour les réparations et l'entretien de cette antenne.
     Approuvez-vous cette façon de faire? Que peut-on faire à ce sujet?
    Je vais commencer par répondre à votre première question.
    En ce qui a trait à la jeunesse et au maillage communautaire, je pense qu'il va falloir de plus en plus faire usage des nouvelles technologies du Web. Il faut aller chercher les jeunes dans les endroits qu'ils fréquentent. C'est absolument clair. Il s'agit de la future cote d'écoute de Radio-Canada et de la relève des communautés.
    C'est seulement en anglais, pour le moment. Il n'y a rien en français sur le Web, à Radio-Canada.
    À l'heure actuelle, Radio-Canada fait de la webdiffusion dans le cas des bulletins de nouvelles. De plus, certaines émissions sont disponibles en direct. Par contre, je suis d'accord avec vous pour dire que dans le cas des stations régionales, il reste beaucoup de travail à faire.
    Pour ce qui est de votre deuxième question, vous parlez probablement de la station CIVR, située dans les Territoires du Nord-Ouest. Je ne suis pas au courant de la situation, mais je vais poser la question à un de nos membres, l'Alliance des radios communautaires, pour savoir ce qu'il en est.
    C'est parfait.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Monsieur Angus.
    Merci.

[Français]

    Je vous remercie.
    En tant que député représentant une région rurale franco-ontarienne isolée, je crois que Radio-Canada joue un rôle essentiel dans la vie culturelle de la communauté franco-ontarienne. Dans la région de Timmins—Baie James, par exemple, Radio-Canada est la seule voix à représenter les communautés.
    Hearst communique avec Sudbury et Timmins communique avec Larder Lake. Je connais bien le rôle et l'importance de la radio dans les régions francophones, mais je me pose la question suivante: d'après-vous, y a-t-il suffisamment de ressources pour que les francophones des régions aient leur place dans le domaine de la télévision?
    Nous en avons parlé dans notre mémoire. Nous avons recueilli les commentaires des membres de notre fédération. On nous a dit qu'il n'y avait pas assez de contenu local à la télévision de Radio-Canada, en l'occurrence une ou deux émissions. Par exemple, au cours des années 1990, les émissions Ce Soir dans l'Ouest ont été fusionnées en une seule, et ça s'est avéré très insatisfaisant. Alors, la réponse à votre question est très simple: à notre avis, c'est non.
(1035)

[Traduction]

    Merci.
    Avez-vous des recommandations particulières à formuler? À mon avis, si Radio-Canada veut s'acquitter de son mandat et du rôle qu'on lui a confié, les régions francophones du Canada doivent pouvoir communiquer les unes avec les autres. Nous constatons l'importance extrême de ces services à l'échelle locale et nationale, mais nous parlons ici de petits îlots isolés partout au pays. Comment dans le secteur de la télévision et de la radio rapprocher ces îlots pour qu'ils participent à un dialogue?

[Français]

    C'est une très bonne question, monsieur Angus. En effet, une dynamique reliée à la liberté éditoriale prévaut à l'heure actuelle en ce qui concerne les bulletins nationaux. Bien sûr, les gens de Radio-Canada veulent préserver leurs droits et leur indépendance éditoriale quand vient le temps de sélectionner les nouvelles, mais ils devraient peut-être avoir la responsabilité de garantir, quand on parle de nouvelles nationales au Téléjournal, qu'il ne s'agit pas du Québec. Je regardais Radio-Canada il y a quelques semaines lorsque les données du recensement sont parues. À un moment donné, la personne qui présentait ces données a parlé de l'accroissement de la population urbaine au Québec, mais elle s'est reprise ensuite pour préciser qu'il s'agissait du Canada. Je ne sais pas si c'était un lapsus. Ça donne quand même une idée de la dynamique.
    À mon avis, il y aurait peut-être des mesures à définir. RDI a fait du travail en ce sens en se dotant de mécanismes et d'un logiciel, entre autres, pour garantir qu'un certain pourcentage des nouvelles provienne des régions. Celles-ci avaient autrefois leurs propres émissions, entre autres L'Ontario en direct, L'Atlantique en direct et L'Ouest en direct. Il y a peut-être quelque chose à explorer dans cette direction, de façon à garantir qu'au Téléjournal, on entende parler de ce qui se passe au Nouveau-Brunswick, en Ontario, dans l'Ouest, et ainsi de suite.

[Traduction]

    Dans ma région, nous avons connu une renaissance magnifique de l'identité franco-ontarienne. Plusieurs raisons l'expliquent, comme les systèmes scolaires francophone public et catholique qui ont créé une génération de leaders. Radio-Canada était au centre même de toutes ces activités, communiquant aux communautés rurales très isolées un message très clair qu'elles faisaient partie de quelque chose d'extraordinaire et que tout le monde partageait la même opinion et avait une voix commune. Dans notre région, tout cela s'est concentré sur l'identité franco-ontarienne.
    Croyez-vous que dans les régions où les communautés francophones ont des défis plus importants à relever en raison de caractéristiques démographiques et de l'absence de services linguistiques, une augmentation de la présence locale et régionale de Radio-Canada permettrait de maintenir, voire de construire une identité culturelle?

[Français]

    Monsieur Angus, pour nous, c'est évident. Vous me parlez de votre région, que je connais d'ailleurs très bien puisque je suis Franco-Ontarienne, mais je vous dirais que si vous alliez dans l'Ouest du pays, vous constateriez exactement le même phénomène. Il est évident qu'un appui important d'un télédiffuseur public comme Radio-Canada aurait un effet absolument extraordinaire sur la communauté sur le plan du renforcement mais aussi sur le plan de l'identité culturelle.
    C'est un élément vital. Pour les gens vivant à l'extérieur du Québec, l'accès est un problème. Le fait d'être appuyés et de s'entendre parler aurait, ça va de soi, un impact très fort sur leur identité. C'est la raison pour laquelle nous vous disons dans notre mémoire avoir besoin de Radio-Canada. Il reste que je suis d'accord avec vous, madame Bourgeois, pour dire que ça dépasse la question des besoins: ça fait partie de ce que Radio-Canada doit faire.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Warkentin.
    Je vous remercie d'être venus nous rencontrer ce matin. Nous vous sommes reconnaissants des commentaires que vous avez faits.
    Tout comme M. Angus, je représente une collectivité qui comprend des communautés francophones isolées et rurales. Nous avons également des communautés anglophones qui sont elles aussi isolées. Souvent les deux communautés se plaignent de la même chose soit que CBC ou la Société Radio-Canada ne semblent pas représenter qui ils sont.
    Nous avons entendu des commentaires intéressants ce matin. Vous étiez ici un peu plus tôt lorsque les témoins qui vous ont précédés sont intervenus. Dans les régions où la Société Radio-Canada ou CBC ne présente pas de nouvelles en soirée ou ne reflète pas les communautés desservies, existe-t-il un autre moyen qui nous permettrait de mieux refléter ce que sont les communautés anglophones et francophones de la région, pour le reste du pays et pour l'une et l'autre?
    Certains ont mentionné un certain renouveau qui pourrait réorienter la Société vers une production d'émissions documentaires, des choses du genre. Vous avez probablement entendu cette idée. Qu'en pensez-vous?
(1040)

[Français]

    Comme nous l'avons mentionné dans notre mémoire, un des dilemmes de Radio-Canada — et à mon avis, la dernière comparution l'a très bien démontré — est toute la dimension de la concurrence. On parle de ramener Radio-Canada sur le même plan que n'importe quel autre télédiffuseur soumis aux lois du marché.
    Vous proposez de l'orienter vers une sphère plus documentaire. Je vous dirais que ça comporte de grands risques. La société canadienne est ce qu'elle est. Elle s'intéresse à ce qui se passe dans son pays et ailleurs dans le monde. Elle aime les comédies, les documentaires et toute une variété d'émissions. Quoi qu'il en soit, je pense qu'il est vraiment important que notre télédiffuseur public s'emploie à parler de ce qui se passe dans son pays, autant à l'échelle locale, régionale, provinciale que nationale.
    Je pense que si on réduisait la portée de Radio-Canada pour lui donner un style plus documentaire, on risquerait de perdre une bonne partie de la cote d'écoute actuelle. À mon avis, il faut au contraire renforcer Radio-Canada et le contenu canadien, de façon à mieux parler de ce qu'est le Canada d'aujourd'hui et à rejoindre les communautés isolées, que ce soit des communautés anglophones au Québec — reconnaissons-le — ou des communautés francophones comme celles dont parlait le député Angus.
    J'aurais envie de dire qu'à mon avis, les solutions ne sont pas nécessairement uniques ou faciles. Je pense qu'on a besoin d'évaluer l'ensemble du problème — et c'est un peu le rôle que vous vous êtes donné — et de se demander ce qu'on attend de ce télédiffuseur public.

[Traduction]

    Oui, ce qui nous amène à la question de ce que nous souhaitons accomplir. Il y a évidemment plusieurs choses au chapitre de la programmation. Je n'ai aucun moyen de juger ce que les Canadiens et les Canadiennes souhaitent en ce moment, et nous aurons des mécanismes pour avoir leur réaction. En général, je crois que les Canadiens voudraient avoir un radiodiffuseur public qui est rassembleur. Nous voulons mieux comprendre qui sont nos voisins. Nous voulons mieux comprendre les autres provinces. Nous voulons mieux comprendre ce que les gens font ailleurs, en anglais et en français.
    Avez-vous des idées sur la façon dont on pourrait commencer à combler l'écart entre ce que la CBC et Radio-Canada n'ont peut-être pas pu accomplir dans leur mandat ces dernières années? On parle de silo — la CBC d'un côté, Radio-Canada de l'autre — et du fait qu'il n'y ait pas nécessairement de maillage. Avez-vous des idées sur la façon dont elles pourraient mieux travailler ensemble et mieux communiquer entre elles, du moins avec les Canadiens et Canadiennes dans les diverses communautés, afin qu'elles puissent peut-être mieux se comprendre les unes et les autres?
(1045)
    Je suis d'accord avec vous à ce sujet.

[Français]

    Je pense que Radio-Canada et CBC ont fait du travail, notamment ici, à Ottawa. Je pense à la fusion des salles de nouvelles. Ils ont vraiment cherché à décloisonner pour faire en sorte que, d'une part, la radio et la télévision fonctionnent ensemble, que ce soit en français ou en anglais, et d'autre part, pour essayer de faire en sorte que la CBC et Radio-Canada travaillent ensemble, que les salles de nouvelles travaillent ensemble.
    Si je pose un regard extérieur, à mon avis, ça va prendre du temps avant qu'on en arrive à décloisonner entièrement, à penser autrement et à penser davantage à l'aspect national. Mais effectivement, je pense que ce décloisonnement, qui consiste déjà à réunir ces gens et à les faire travailler ensemble, est un début. Mais au delà de ça, que nous réserve l'avenir? C'est une bonne question.

[Traduction]

    Merci pour cette précision.
    Monsieur Scott.
    Essayons de limiter la question et la réponse à cinq minutes.
    Est-ce que ce commentaire me vise personnellement?
    J'espère que tous les députés autour de la table y réfléchiront.
    Bienvenue.
    J'ai été très heureux d'entendre ce que M. Angus disait du nord de l'Ontario. Venant du Nouveau-Brunswick, je suis tout à fait conscient des avantages de Radio-Canada. Mais je voudrais prendre en considération une possibilité, et il s'agit de ce que je vois comme la complémentarité entre la radio communautaire et Radio-Canada.
    Les deux remplissent une fonction très sérieuse et importante dans une ville anglophone, Fredericton, qui a une population francophone d'environ 10 p. 100. L'idée m'est déjà venue dans le passé qu'il pourrait y avoir une certaine complémentarité qui pourrait être utile.
    J'en ai déjà parlé dans le passé, parce que le deuxième problème, qui représente le vrai défi, c'est avec les jeunes. La technologie joue contre une bonne part de ce qu'on a accompli au Nouveau-Brunswick depuis les années 60 pour contrer l'assimilation en cours, et je pense que le Nouveau-Brunswick est un bon exemple de la dualité. Charlie a parlé du système scolaire. Je pense que la dualité a été une réussite au Nouveau-Brunswick, en passant. Mais je me fais du souci maintenant parce que les nouveaux systèmes de divertissement, les nouveaux médias pour toutes sortes de choses, sont fortement anglophones.
    Existe-t-il un moyen, en passant par le système scolaire, par lequel on pourrait engager les jeunes d'une façon précise, objective et ciblée, pour au moins offrir une possibilité de choix? Je m'intéresse particulièrement à la complémentarité, parce que je sais à quel point vous travaillez avec les communautés plus précisément, et je crois que vous pourriez beaucoup nous aider à relever ces défis.
    Je ne veux pas que cela devienne une excuse d'une façon ou d'une autre. Je ne veux pas que la radio communautaire constitue une excuse pour ne pas financer Radio-Canada, et je ne veux pas que Radio-Canada constitue une excuse pour ne pas financer la radio communautaire. Les deux sont essentielles, mais je crois qu'il peut y avoir une complémentarité.
    Avez-vous des commentaires?

[Français]

    Certainement. Je suis tout à fait d'accord avec vous sur la question de la complémentarité des deux outils, puisque ce sont quand même des outils différents. Mon collègue voudra sans doute commenter cet aspect.
    Je vous dirai que les radios communautaires sont extrêmement importantes pour nous parce qu'elles doivent se situer justement au coeur de l'action. Par exemple, si on parle d'action au sein des écoles de langue française, ou même de langue anglaise dans les communautés où les anglophones sont minoritaires, je pense que les radios communautaires jouent un rôle extrêmement important auprès des jeunes, des enfants et des adolescents, mais de façon plus globale, sur le plan de l'identité culturelle aussi, cela va de soi.
    Cela dit, Radio-Canada possède absolument, elle aussi, un mandat communautaire, mais d'une autre façon. La radio communautaire, naturellement, devrait être très proche du vécu des gens, doit offrir aux gens, dans le cadre de la diffusion de leurs émissions, ce qui est au coeur même de leur communauté, par différents moyens.
    Radio-Canada, pour sa part, a une image différente et est beaucoup plus là pour travailler, entre entres, évidemment, sur le plan de la nouvelle.
    Cela étant dit, je vais laisser la parole à mon collègue.
(1050)
    Monsieur Scott, je suis bien placé pour répondre à votre question, car je connais bien le milieu des radios communautaires, puisque j'en suis issu. C'est intéressant, mais ça agace parfois un tout petit peu les gens de l'Alliance des radios communautaires, quand on parle de complémentarité. En effet, dans un monde idéal, c'est ce qui doit se passer. Cependant, dans certaines régions, la radio communautaire joue carrément le rôle que devrait jouer Radio-Canada.
    Par exemple, je vous ramène à l'exemple de Radio Beauséjour à Shédiac, chez vous, au Nouveau-Brunswick. En effet, c'est grâce à CJSE qu'il y a eu une refrancisation et un nouvel engouement pour l'« acadianité » dans cette région, la production de nouveaux disques, la naissance de nouveaux groupes. Selon les cotes d'écoute, un sondage BBM disait que la station rassemblait 32 p. 100 de l'auditoire, anglais et français confondus, dans la région du grand Moncton. Dans ce cas, ce n'est pas une relation de complémentarité, c'est carrément une situation où CJSE joue le rôle de Radio-Canada. Par rapport au rôle que Radio-Canada peut jouer auprès des gens, j'aimerais vous amener un peu sur le terrain de la télévision et vous parler un peu de TFO.
    Selon nous, TFO représente un modèle de télévision qui suscite vraiment l'intérêt des jeunes, qui va réellement chercher les jeunes où ils se trouvent, que ce soit à l'école, que ce soit par des podcasts, que ce soit par Internet, que ce soit par des forums de discussions. Il y a là des pistes à explorer.

[Traduction]

    J'ai une observation portant sur ce qu'on a dit de la collaboration entre Radio-Canada et la CBC. Il y a des questions de langue de travail qu'il est d'une importance cruciale que nous protégions au sein de cet exercice. Personne n'a soulevé ce point dans la réponse, et je trouve que c'est important de le faire.
    Merci.
    Madame Bourgeois.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Beaulieu, lors d' un échange avec M. Warkentin, vous avez parlé de communautés anglophones très isolées. Vous avez dit qu'il y a des communautés francophones très isolées, mais qu'il y a aussi des communautés anglophones très isolées. En tout cas, ça laissait supposer qu'il y en avait au Québec aussi. Je n'étais pas au courant, parce qu'on sait que la situation des anglophones ici, au Québec, est différente: on alloue des budgets dans le cadre de nos programmes provinciaux pour aider les anglophones ici, au Québec.
    Croyez-vous qu'ils vivent réellement la même situation?
    Personnellement, je ferais une différence. Il y a la communauté anglophone de Montréal, dont je ne parlerai pas. Par contre, si on s'en va dans le nord du Québec, dans la région de Sept-Îles, etc., il y a effectivement des anglophones, même dans certains coins de la Gaspésie, qui vivent en situation très isolée. Une des constatations qu'on a fait en travaillant ou en parlant avec les communautés anglophones au Québec, c'est qu'en région, la situation des anglophones est similaire à celle de certaines communautés isolées.
    D'accord, il faut faire très attention.
    Il faut faire attention, tout à fait.
    Il y a très peu de similarités parce que, à ma connaissance, elles sont tout de même desservies, alors que certaines communautés francophones hors Québec ne sont pas desservies.
    Je ne serais pas en mesure de commenter ce sujet. Je crois que les anglophones au Québec pourraient certainement vous en parler mieux que moi.
    D'accord, mais je veux tout de même remettre les pendules à l'heure. La situation des anglophones ici, au Québec, est vraiment différente de la situation des francophones hors Québec, parce qu'on leur consacre des budgets et qu'on leur accorde de l'attention.
    Cela étant dit, ma deuxième question s'adresse à M. Quinty. Vous avez dit plus tôt que CBC et Radio-Canada ont essayé de travailler ensemble. Compte tenu du fait que le Québec joue le rôle d'un phare auprès des communautés francophones au Canada, croyez-vous que ce soit une bonne chose que la SRC et la CBC travaillent ensemble pour harmoniser tout le travail qu'elles font? Ne serait-il pas mieux de garder la Société Radio-Canada au Québec telle qu'elle est dans le moment et de modifier plutôt le mandat de la CBC?
(1055)
    À mon avis, il faut une Société Radio-Canada qui représente la globalité de la francophonie canadienne; il faut une CBC forte qui représente également la spécificité du Canada en langue anglaise. Je vous dirais que sur le plan du partage des ressources, ça peut avoir des avantages, surtout dans un contexte de convergence des technologies. Je parle du décloisonnement tel que je le connais ici, à la salle des nouvelles d'Ottawa, car je ne sais pas ce qui se passe dans d'autres régions ou au Québec. Par contre, je crois qu'il faut tout de même avoir une Société Radio-Canada de langue française qui rende compte de la globalité de la francophonie canadienne.
    C'est bien, merci.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Warkentin. Il ne nous reste que quelques minutes, donc une question s'il vous plaît.
    Je serai bref.
    Je n'avais certainement pas l'intention de provoquer de controverse. Ce que je voulais faire ressortir, c'est le fait que les communautés anglophones, même dans ma circonscription, ne se voient pas forcément reflétées dans les actualités en provenance de Toronto ou de Vancouver. Donc je pense que c'est une grande question et que vous l'avez cernée, et je ne voulais surtout pas créer de tension entre les membres du comité. C'est tout simplement le fait que mes électeurs, qu'ils soient francophones ou anglophones, ne se voient pas forcément reflétés par la CBC ou par Radio-Canada, et qu'ils n'en apprennent pas forcément beaucoup plus sur les autres communautés isolées ou bien sûr les communautés moins représentées en termes de population.
    Ce que j'aimerais c'est avoir votre réaction — et je crois que vous nous l'avez fournie — à savoir si la CBC et Radio-Canada pourraient travailler plus ensemble. Ce n'était pas mon intention qu'on fasse sauter tous les murs entre Radio-Canada et la CBC pour fusionner les deux; ce n'était pas du tout ce que je voulais suggérer.
    Je pense qu'il y a des histoires communes que Radio-Canada et la CBC pourraient raconter dans leurs langues respectives, certainement, au sujet des différentes cultures qui sont représentées ici au Canada. On pourrait raconter des histoires sur le Québec rural au reste du Canada. S'il fallait que ce soit traduit en anglais, ce serait tant mieux, parce qu'à ce moment-là, tout le monde comprendrait. C'est le point que je voulais soulever, et je pense que nous sommes peut-être tous d'accord avec cela.
    Je le pense aussi.
    Merci beaucoup. Je vous suis reconnaissant de votre témoignage ce matin.

[Français]

    Nous rêvons du jour où l'émission The National, à CBC, pourra effectivement parler d'un enjeu qui va rassembler la francophonie canadienne.

[Traduction]

    Je vous remercie de votre témoignage ici ce matin, et je remercie les députés de leurs questions.
    J'ai une petite déclaration à faire. Encore une fois, quand nous étions à Yellowknife, le défi que la CBC/Radio-Canada a à relever était très évident, parce que SRC Nord n'a pas qu'à travailler en anglais et en français, mais doit aussi traiter avec 11 langues innues et autochtones. Nous sommes un pays assez diversifié, et SRC Nord couvre la moitié du Canada dans une région très faiblement peuplée. Donc c'est un défi, et je sais que nous le comprenons de plusieurs façons. Je voulais juste dire cela.
    Merci beaucoup de votre présentation ce matin, et je remercie tous les députés de leurs questions formidables.
    La séance est levée.