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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 017 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 31 octobre 2006

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Traduction]

    Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale se réunit, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, pour étudier le rapport de la Commission d'enquête sur les événements concernant Maher Arar. Il s'agit de la 17e séance du comité.
    Nous accueillons aujourd'hui du Service canadien du renseignement de sécurité, Jim Judd, qui en est le directeur, et Ward Elcock, qui en est l'ancien directeur. Nous vous souhaitons la bienvenue tous deux à notre comité. Nous nous faisons un plaisir d'entendre l'information que vous allez nous transmettre.
    Selon l'usage au comité, vous avez habituellement une dizaine de minutes pour une déclaration. Si vous avez besoin d'un peu plus de temps, ce n'est pas pas un problème. Puis nous passerons aux questions tout d'abord de la part de l'opposition officielle et ensuite du gouvernement.
    Merci beaucoup, vous avez la parole.
    Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à vous présenter aujourd'hui le point de vue du Service canadien du renseignement de sécurité au sujet du rapport de la Commission O'Connor dans l'affaire Maher Arar.
    Comme vous le savez, M. le juge O'Connor n'a pas découvert de preuves que le SCRS, ou des représentants du Canada, avait participé ou acquiescé à la décision d'appréhender M. Arar ou de l'expulser vers la Syrie. De façon plus spécifique, M. O'Connor n'a pas découvert de preuves que le SCRS a communiqué aux États-Unis des informations sur M. Arar avant sa détention à New York, puis son expulsion vers la Syrie. Ses conclusions correspondent à celles de l'étude du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité sur le rôle du SCRS dans l'affaire Arar.
    Je tiens également à souligner que certaines recommandations de M. O'Connor visent le SCRS, ses politiques et ses pratiques, mais elles s'inscrivent dans le contexte général des ministères et organisations chargés de la sécurité nationale. En fait, son rapport comporte plusieurs remarques très positives au sujet des politiques et des pratiques du SCRS. Malgré les grandes conclusions du juge O'Connor au sujet du rôle du SCRS dans cette affaire, le Service a été la cible de critiques. Je souhaite en parler et soulever d'autres points ici ce matin.
    Même s'il y a très peu de choses à ajouter au sujet des conclusions du rapport, je crois qu'il importe que le comité comprenne comment nous donnons suite au rapport et que nous vous situions le contexte de nos activités dans cette affaire. Auparavant, je tiens à dire combien je regrette l'épreuve que M. Arar et sa famille ont subie en raison de son expulsion vers la Syrie.
    Tout d'abord, M. O'Connor a découvert que le SCRS n'avait pas évalué correctement les informations reçues de Syrie pour déterminer si elles avaient été obtenues sous la torture.
    M. O'Connor a clairement indiqué dans son rapport que l'échange de renseignements avec des partenaires étrangers est une façon essentielle pour le SCRS de recueillir des informations qui se rapportent à la menace qui pèse sur le Canada. Le Service sait parfaitement que cette façon d'agir représente un problème dans les cas des pays qui ont de mauvais antécédents en matière de respect des droits de la personne. Il est aujourd'hui malheureux de constater que beaucoup de menaces terroristes qui pèsent sur la sécurité du Canada ont leur origine dans des pays qui ont de mauvais antécédents en matière de respect des droits de la personne, ou y sont liées. C'est là une des raisons pour lesquelles la Loi sur le SCRS prévoit que deux ministres approuvent les ententes de liaison avec un service étranger que nous proposons.
    Ainsi, selon les instructions du ministre au SCRS et sa propre politique, le SCRS est tenu d'évaluer « les antécédents du pays en matière de droits de la personne, notamment tout cas d'abus par les organismes de sécurité ou les services de renseignement ». En outre, une entente de ce genre est envisagée seulement lorsque la sécurité du Canada est en jeu. Nous avons l'obligation de tout faire pour repérer la menace avant qu'elle ne se concrétise au pays et devons donc avoir recours à toutes les sources de renseignements à notre disposition, toujours dans le cadre de garanties raisonnables.
    Il s'agit certes d'un problème délicat. Le SCRS a conclu des ententes avec des organisations de pays soupçonnés d'avoir recours à la torture, et certaines restrictions sont parfois appliquées aux relations avec ces organisations. Comme l'a signalé le juge O'Connor dans son rapport,
Les décisions relatives aux relations que l'on entretient avec un pays qui a de mauvais antécédents en matière de respect des droits de la personne peuvent être très difficiles et ne pas se prêter à des règles simples et normatives.
    Il n'est jamais facile de déterminer si l'information reçue d'un gouvernement étranger qui a de mauvais antécédents en matière de respect des droits de la personne a été obtenue sous la torture. Et il ne s'ensuit pas nécessairement que l'information reçue d'un pays de ce genre a été forcément obtenue sous la torture. En outre, il est d'usage au Service de chercher à corroborer l'information reçue, quelle que soit sa nature, au moyen d'autres sources avant de se prononcer sur sa fiabilité.
    Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité examine annuellement notre échange d'informations avec des organisations étrangères pour s'assurer que nous respectons les instructions dans le cadre de nos propres politiques. Dans certains cas, le Comité a formulé des recommandations. Certaines d'entre elles ont été mises en oeuvre par le Service.
(0905)
    À titre d'exemple, dans son rapport sur M. Arar, le CSARS a formulé plusieurs recommandations, réitérées par le juge O'Connor, sur la nécessité de modifier la politique opérationnelle du SCRS relative à l'échange d'informations et à la collaboration afin de tenir compte des antécédents en matière de respect des droits de la personne des pays. Ces recommandations ont déjà été mises en oeuvre par le Service.
    Comme l'a signalé le ministre Day lors de sa comparution devant le comité, nous avons aussi préparé une mise en garde qui accompagne les informations que nous communiquons aux services étrangers. Ainsi, le Service cherche à obtenir la garantie que tout Canadien détenu par un gouvernement étranger
... soit jugé avec impartialité, dans le respect des normes énoncées dans les conventions internationales, qu'il bénéficie d'une procédure équitable et qu'il puisse rencontrer les membres du personnel diplomatique canadien s'il le souhaite.
    Le juge O'Connor a également recommandé que le ministère des Affaires étrangères communique son évaluation des antécédents d'autres pays en matière de respect des droits de la personne pour obtenir une évaluation uniforme de la situation dans ces pays. Nous approuvons cette recommandation et nous collaborerons avec le ministère des Affaires étrangères pour en assurer la mise en oeuvre.
    Deuxièmement, le juge O'Connor a signalé que le SCRS et la GRC n'étaient pas favorables à l'idée du ministère des Affaires étrangères d'écrire aux autorités syriennes pour leur souligner que le Canada réclame d'une seule voix la libération de M. Arar.
    Vous savez peut-être que des représentants de mon organisation ont été longuement interrogés sur cette question, à huis clos et en public. Le SCRS a été réticent à envoyer la lettre proposée — qui devait être approuvée par le solliciteur général de l'époque — et parmi les réserves soulevées à cet égard, un point important dominait: le Service n'a jamais eu pour politique de déclarer si une personne fait l'objet ou non d'une enquête. Comme vous le savez, le solliciteur général de l'époque avait formulé ses propres réserves au sujet de la signature de cette lettre.
    Le juge O'Connor a recommandé que le gouvernement adopte une démarche unique, cohérente et coordonnée pour s'occuper des Canadiens détenus à l'étranger. Nous acceptons cette recommandation et oeuvrera avec Affaires étrangères et d'autres ministères pour l'appliquer.
    Troisièmement, le juge O'Connor a critiqué à la fois le processus et l'incidence des déclarations faites par le gouvernement pour protéger les confidences liées à la sécurité nationale. Bien qu'il ait exprimé des critiques, le juge O'Connor a toutefois reconnu que le processus fonctionne bien dans l'ensemble et ne l'a pas empêché de tirer des conclusions à ce sujet.
    À titre de précision à l'intention des membres du comité, notre organisation a toujours cherché à garder le secret dans plusieurs domaines qui relèvent de la sécurité nationale. Citons entre autres qu'il refuse de mentionner si une personne fait l'objet ou non d'une enquête de la part du Service; de révéler les services étrangers avec lesquels nous entretenons des relations; de divulguer l'identité des sources humaines utilisées dans les enquêtes du SCRS; de divulguer l'identité des employés du SCRS qui mènent des opérations clandestines; et de mentionner des techniques d'enquête particulières utilisées par le Service dans ses enquêtes.
    Plusieurs raisons président à cette façon de procéder: les dispositions de notre propre loi, la Loi sur la protection des renseignements personnels, la sécurité et l'efficacité des opérations, la sécurité personnelle des employés, entre autres. Comme vous le savez, les tribunaux ont été saisis de la question du sceau du secret en ce qui a trait à la sécurité nationale.
    Quatrièmement, le juge O'Connor a condamné très sévèrement les fuites anonymes et préjudiciables qui ont eu lieu pendant les travaux de la Commission. Lorsque des informations gouvernementales classifiées ont été divulguées au public, le SCRS a mené sa propre enquête interne et a participé aux enquêtes lancées par le Bureau du Conseil privé à plusieurs occasions. Le juge O'Connor a été incapable de découvrir l'identité des coupables, et je crois comprendre que la GRC poursuit son enquête criminelle. Aucune des enquêtes menées jusqu'à présent n'a laissé entendre que des employés du SCRS sont à l'origine des fuites.
(0910)
    En terminant, je tiens à signaler que nous prenons les conclusions et recommandations du juge O'Connor très au sérieux. Nous sommes en train de modifier et nous modifierons nos politiques dans certains domaines pour tenir compte du rapport et nous travaillerons en collaboration avec d'autres organisations fédérales pour prendre des mesures efficaces en réponse aux autres recommandations du rapport.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions des membres du comité.
    Je vous remercie, monsieur Judd.
    Nous allons maintenant passer aux questions en commençant par l'opposition officielle. Monsieur Holland, vous avez sept minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens tout d'abord à vous remercier tous les deux, messieurs, de comparaître devant le comité.
    J'aimerais commencer par dire que dans son rapport, le juge O'Connor a indiqué un certain nombre d'erreurs commises à son avis par le SCRS qui ont pu nuire aux efforts visant à obtenir le retour de M. Maher Arar au Canada et contribuer à la décision prise par les États-Unis d'envoyer Maher Arar en Syrie.
    J'aimerais vous demander pour commencer, parce que vous ne l'avez pas fait dans votre déclaration, si vous avez l'intention de présenter des excuses aujourd'hui à Maher Arar pour le rôle que le SCRS aurait joué dans cette affaire.
    Comme vous le savez, dans ma présentation, j'ai bien sûr exprimé mes regrets pour l'épreuve que lui-même et sa famille ont subie. De façon plus générale, comme notre ministre l'a déclaré devant le comité et comme l'a réitéré un autre député ministériel hier, la présentation d'excuses est une question que le gouvernement est en train d'examiner dans le cadre des négociations avec M. Arar et son avocat en vue d'un règlement général.
(0915)
    Vous n'allez donc pas vous excuser.
    Comme je l'ai dit, monsieur, je regrette profondément ce qui est arrivé à M. Arar, mais la présentation d'excuses est une question dont est maintenant saisi le gouvernement dans le cadre des négociations générales qui se déroulent avec M. Arar sur les mesures d'indemnisation.
    Je tiens à vous signaler que le commissaire Zaccardelli a présenté des excuses, et si je comprends bien le ministre ne l'a pas fait. Le comité a adopté la position selon laquelle le ministre devrait présenter des excuses.
    J'aimerais passer maintenant à la question d'une seule voix. En mai et juin 2003, la GRC et le SCRS, comme vous l'avez mentionné dans votre déclaration, ont refusé de se joindre à ceux qui réclamaient la libération de Maher Arar. Le juge O'Connor a indiqué que cela a compromis les efforts déployés pour obtenir le retour de Maher Arar au Canada, et l'ancien solliciteur général nous a indiqué qu'il ne l'a pas fait, entre autres à cause des conseils qu'il a reçus du SCRS et de la GRC.
    Compte tenu du fait que M. Arar n'avait pas de casier criminel ni ne faisait l'objet d'une enquête criminelle, compte tenu du fait qu'une recherche sur Google aurait certainement permis de constater que ses droits seraient certainement violés en Syrie, pourquoi a-t-on rejeté cette initiative de la part du ministère des Affaires étrangères visant à montrer que le Canada parlait d'une seule voix? Je sais que vous avez dit que vous ne vouliez pas prendre position, mais il s'agissait d'une personne qui n'avait pas de casier judiciaire et qui allait certainement être victime de violation de droits de la personne à l'étranger.
    Ayant lu la transcription du témoignage de l'ancien solliciteur général devant le comité, je crois qu'il a dit que mis à part les conseils qu'il avait reçus du SCRS et de la GRC, il avait lui-même des réserves pour diverses raisons à l'idée d'adhérer à une telle démarche, en partie, je crois, parce qu'il doutait qu'il soit approprié pour le solliciteur général de signer un document dans lequel le ministre des Affaires étrangères parle au nom du Canada dans le cadre d'une représentation faite auprès d'un gouvernement étranger et également parce qu'on ne savait toujours pas si M. Arar était encore un sujet d'intérêt dans le cadre d'une enquête.
    Vous n'êtes donc pas d'accord avec le juge O'Connor lorsqu'il affirme que le fait pour le Canada de n'avoir pas réclamé d'une seule voix le retour de M. Maher Arar ait compromis les efforts pour obtenir son retour. À votre avis, le juge O'Connor a-t-il eu tort de faire une telle affirmation, et avez-vous l'impression d'avoir agi correctement en l'occurrence?
    Je ne conteste pas les conclusions du juge O'Connor. J'essaie simplement de vous expliquer les circonstances qui existaient à l'époque et qui ont motivé les conseils fournis au solliciteur général à ce moment-là.
    J'aimerais maintenant aborder la question de l'évaluation de la fiabilité. La personne qui a effectué l'évaluation de la fiabilité pour le SCRS, en ce qui concerne l'information reçue par le gouvernement de la Syrie, ne possédait aucune expérience dans la conduite d'enquêtes touchant des cas de torture. C'est pourquoi on a considéré cette information crédible et on a cru qu'elle n'avait pas été obtenue sous l'effet de la contrainte.
    La première question que je vous pose, c'est pourquoi? Le rapport du juge O'Connor indique très clairement que si une évaluation appropriée avait été faite par une personne possédant de l'expérience de cas de torture — en fait, il n'aurait pas fallu beaucoup de travail pour découvrir que l'on pratiquait la torture en Syrie — nous aurions été en mesure de contester cette information et peut-être d'obtenir plus tôt le retour de Maher Arar. Pourquoi cette évaluation n'a-t-elle pas été effectuée par une personne qui possédait de l'expérience des cas de torture?
    Cette évaluation a été faite à l'époque par la personne qui était responsable de ce dossier à l'époque. Quant à savoir si cette personne possédait de l'expérience ou non, c'est un aspect sur lequel le juge O'Connor a effectivement commenté. Je ne peux pas vous expliquer immédiatement pourquoi cette personne ne possédait pas ce niveau d'expérience.
(0920)
    Avec le recul, considérez-vous qu'il aurait été important que la personne qui effectuait cette évaluation de la fiabilité possède de l'expérience des cas de torture? Ou êtes-vous en désaccord avec le juge O'Connor à ce sujet?
    C'est une question qui demeure très difficile, comme j'ai essayé de l'indiquer dans ma déclaration. On ne peut pas nécessairement partir du principe que l'information que l'on reçoit d'un pays où on ne respecte pas les droits de la personne ait nécessairement été obtenue sous la torture.
    Cela dit, comme j'ai essayé de l'indiquer dans ma déclaration, nous avons modifié nos politiques et nos méthodes quant à la façon dont nous traitons l'information. Je dirais qu'il est peu probable que ce genre de situation se produise aujourd'hui.
    En ce qui concerne la communication entre le SCRS et la GRC, on a certainement discuté du fait que l'information provenant du SCRS ait été transmise à la GRC puis acheminée, de façon sélective, aux autorités américaines, et en grande partie, selon le juge O'Connor, que cette information a contribué à l'expulsion de Maher Arar en Syrie. Lorsque vous avez constaté ces fuites, lorsque vous avez constaté que l'information que détenait le SCRS avait été envoyée aux États-Unis — de l'information que vous dites ne pas leur avoir communiquée mais qui a été communiquée par la GRC — quelles sont les discussions que vous avez eues alors avec la GRC? Qu'avez-vous essayé de faire pour y mettre fin? Ou n'aviez-vous pas d'objection à ce que la GRC communique de l'information que vous lui aviez fournie?
    Ce sera votre dernière question, monsieur Holland.
    Je n'étais pas directeur du SCRS à l'époque. M. Elcock pourrait peut-être répondre à la question.
    Monsieur le président, en ce qui concerne cette question, nous avons rappelé à la GRC à quelques reprises au cours de leur enquête que des mises en garde s'appliquaient à l'information que nous fournissions. Nous ne savions pas l'information que la GRC communiquait ou non.
    Monsieur Ménard, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Judd.
    Je comprends parfaitement que si votre organisme veut faire face au monde terroriste qui nous menace aujourd'hui, il doit collaborer étroitement avec d'autres agences qui font le même travail que lui dans des pays démocratiques. N'est-ce pas?

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    Avez-vous effectivement des relations étroites avec les autorités américaines?

[Traduction]

    Nous entretenons des relations avec un certain nombre d'organismes étrangers. Comme je l'ai dit dans ma déclaration, nous ne précisons pas les organismes avec lesquels nous avons des contacts pour diverses raisons, entre autres selon le principe généralement accepté dans le cadre de relations internationales de ce type selon lequel cette information est protégée.

[Français]

    Je comprends parfaitement cela, mais ce serait assez invraisemblable que vous n'ayez pas de relations avec les autorités américaines.

[Traduction]

    Ce serait peu probable.

[Français]

    Dans le cadre de ces échanges d'informations, est-ce que vous donnez beaucoup plus d'informations aux Américains qu'ils ne vous en donnent, ou est-ce une route à deux voies?

[Traduction]

    Je dirais que c'est une route à deux voies, mais je pense que nous recevons plus d'information que nous n'en donnons. Mon expérience jusqu'à présent au SCRS c'est que nous sommes de façon importante un importateur net d'information provenant de gouvernements étrangers. Cela est attribuable en partie au fait que nous sommes responsables, entre autres choses, de l'évaluation des vérifications de sécurité.

[Français]

    Supposons que les autorités américaines aient eu des informations au sujet des relations d'un citoyen canadien avec des organismes terroristes, serait-il exact de dire qu'elles vous donneraient ces informations de façon à ce que vous puissiez mieux le surveiller?
(0925)

[Traduction]

    C'est à espérer.

[Français]

    Si les autorités américaines avaient des informations que vous n'aviez pas et que vous n'avez pu fournir au juge O'Connor, au sujet des relations de M. Arar avec des mouvements terroristes, il est assez impensable qu'elles ne vous les aient pas transmises au cas où, évidemment, il serait revenu au Canada après son séjour en Syrie.

[Traduction]

    Hypothétiquement, ce serait une conclusion raisonnable, mais ce n'est pas forcément vrai dans tous les cas. Je ne crois pas être en mesure de vous l'affirmer de façon absolue.

[Français]

    Je comprends que vous êtes incapable de nous l'assurer de façon absolue, mais c'est vraiment très vraisemblable. En fait, si les autorités américaines avaient des informations sur les relations terroristes d'un citoyen canadien comme M. Arar, vous vous attendriez à ce qu'elles vous donnent ces informations afin de mieux connaître le risque que représente ce citoyen canadien. N'est-ce pas?

[Traduction]

    Dans des circonstances idéales, ce serait certainement ce à quoi on s'attendrait.

[Français]

    Évidemment, au cours de l'examen de la Commission O'Connor, vous auriez informé le juge des motifs pour lesquels les Américains avaient des raisons de croire que M. Arar avait des relations terroristes, des motifs autres que les fausses informations qui avaient été fournies par la GRC aux autorités américaines. N'est-ce pas?

[Traduction]

    C'est une réponse en deux parties, monsieur.
    Au cours de son enquête, je crois que le juge O'Connor a eu pleinement accès à tous les renseignements ayant trait à cette affaire.
    Deuxièmement, comme vous le savez, certains aspects de cette affaire sont considérés comme des renseignements confidentiels pour des raisons de sécurité nationale. Le rapport public n'en traite pas de façon explicite, et ces renseignements font maintenant l'objet d'un examen par les tribunaux. Quant à savoir si des informations concernant M. Arar ont émané des autorités américaines à cet égard, je l'ignore.

[Français]

    Selon moi, il n'est pas déraisonnable de croire que les autorités américaines se sont basées uniquement sur les informations que la GRC leur avaient fournies pour envoyer M. Arar dans un pays où on savait qu'il y avait des méthodes d'interrogatoire musclées et où les prisons ont à peu près la plus mauvaise réputation sur la planète.

[Traduction]

    Je pense que le juge O'Connor a indiqué clairement dans son rapport qu'en raison de l'absence de témoignages de représentants de trois gouvernements étrangers, il lui était difficile de vérifier ce qu'ils savaient, le cas échéant, ou ne savaient pas à propos de M. Arar. Si je me souviens bien, lorsque l'ancien solliciteur général a témoigné devant le comité, il a indiqué avoir été informé par un interlocuteur américain que c'était en fait de l'information détenue par les États-Unis qui avait motivé en partie les mesures prises par les États-Unis dans ce cas, mais j'ignore si cette information nous avait été communiquée.
    Votre dernière question.

[Français]

    Vous ne connaissez pas ces informations?

[Traduction]

    Non.

[Français]

    Il est assez invraisemblable que l'on ne vous ait pas donné ces informations, si elles portent sur un citoyen canadien susceptible de revenir au pays.

[Traduction]

    Par principe, il est à espérer que nous disposions d'information concernant une menace pour la sécurité du Canada.
    Je vous remercie, monsieur Judd.
    Nous allons maintenant passer à notre troisième intervenant, Mme McDonough.
(0930)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Joe Comartin, mon collègue qui siège régulièrement au comité, est désolé de ne pas pouvoir être ici aujourd'hui. Il a dû retourner dans sa circonscription à cause d'une urgence familiale.
    Je n'ai pas pu assister à une grande partie de votre témoignage, mais je dois dire qu'il y a deux choses qui m'ont grandement inquiétée ce matin, monsieur Judd. D'une part, il y a le fait que vous refusez de présenter des excuses appropriées et humaines à M. Arar pour votre rôle... Je reconnais que les conclusions du juge O'Connor au sujet du SCRS montrent que son implication n'était pas aussi importante que celle d'autres acteurs, mais je suis très déçue que vous refusiez de présenter des excuses. Vous devez comprendre que la vie de M. Arar doit continuer et je pense qu'aucun d'entre nous ne pourrait reprendre une vie normale sans que soient présentées des excuses de la part de tous ceux qui ont contribué à cette terrible épreuve.
    L'autre chose qui me dérange, c'est que je crois comprendre que le juge O'Connor a indiqué qu'à son avis, le SCRS n'avait pas fait une évaluation adéquate de la fiabilité pour déterminer si les renseignements au sujet de M. Arar, qui l'ont certainement condamné aux yeux du public et l'ont mis dans cette terrible situation, avaient pu être obtenus par la torture. Le juge O'Connor a ajouté que selon cette évaluation du SCRS, tout semblait indiquer que ce n'était probablement pas le cas.
    J'ai deux questions: pouvez-vous expliquer au comité ce qui vous a permis de déterminer que ces renseignements n'avaient pas été obtenus par la torture, bien qu'à mon avis, tout le monde sait et reconnaît que c'est sans doute ce qui s'est passé?
    Deuxièmement, vous avez dit ce matin que le SCRS ne considère pas aujourd'hui qu'il s'agisse d'un problème très grave et vous avez fourni—sans vouloir être injuste—des justifications plutôt légères plusieurs fois ce matin en disant qu'on ne peut pas sauter aux conclusions et que peut-être que ce cas n'aurait pas été... Je ne suis pas du tout rassurée par votre témoignage.
    En fait, je me demande si vous procéderiez différemment aujourd'hui dans la même situation. En plus d'attendre des excuses appropriées auprès de M. Arar, les Canadiens veulent aussi être assurés que ce genre de situation ne se reproduira pas. Or, vous ne semblez pas vouloir reconnaître que ces preuves, obtenues de M. Arar par la torture, exigent de la part du SCRS énormément de prudence.
    J'aimerais que vous répondiez à mes deux questions.
    Je pense que le juge O'Connor a couvert la question de l'évaluation de la fiabilité et a rendu ses conclusions. Il a déterminé qu'à son avis, la personne responsable de cette question à l'époque n'avait pas reçu la formation appropriée ou n'avait pas l'expérience nécessaire pour reconnaître qu'il s'agissait d'aveux obtenus par la torture.
    Dans mes remarques liminaires, j'ai essayé de montrer que depuis, notre organisme a pris de nombreuses mesures pour s'assurer que ce genre de cas ne se reproduirait pas. Nos pratiques et politiques ont été modifiées, en partie suite à des examens antérieurs de l'affaire Arar par le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité.
    Je pense que l'on peut dire que cet organisme est extrêmement prudent avec les renseignements qui viennent de pays qui ont de mauvais bilans en matière de droits de la personne. En outre, c'est une pratique et un principe de toujours chercher à corroborer l'information, quelle que soit son origine, avant de tirer des conclusions ou de prendre des décisions.
    Je pense que le juge O'Connor a expliqué la situation pour l'affaire Arar. C'est très regrettable, mais depuis, nous avons pris les mesures nécessaires pour nous assurer que cela ne se reproduirait pas.
(0935)
    J'ai une question supplémentaire.
    J'ai posé des questions sans relâche à la Chambre des communes et à l'extérieur sur cette affaire et ce qui m'a beaucoup choquée, et ce qui me choque encore, c'est qu'un ministre du Cabinet m'a dit: « Tout ce que j'entends, c'est que cet homme est vraiment un sale type alors faites attention à ne pas vous associer à cette affaire ». Cela indique bien qu'il n'y a pas de justice. En outre, à cause des fuites délibérées et de ce genre de traitement peu professionnel de l'affaire Arar, même les journalistes disaient « Je n'en sais rien, d'après ce que j'entends, il a l'air d'un sale type, alors pourquoi vous entêtez-vous? » Il y a même deux membres du personnel de l'ambassade — en tout cas des gens qui se sont présentés comme travaillant à l'ambassade de Syrie — qui sont venus me voir après une réunion au cours de laquelle je demandais une enquête complète sur l'affaire Arar pour me dire, « Vous devriez faire attention, c'est vraiment un sale type ».
    Avec ce genre de discussions, j'aimerais comprendre — parce que je suis sûre que c'est arrivé aux oreilles du SCRS, puisqu'il s'agit d'un service de renseignement — pourquoi, compte tenu de tout cela, les responsables concernés n'ont pas dit d'une seule voix qu'ils n'avaient aucune chance que justice soit faite dans cette affaire à moins, comme Monia Mazigh, la femme de Maher Arar, l'a dit publiquement sans relâche qu'on le ramène au Canada et qu'il y ait un procès.
    Qu'est-ce qui explique la position du SCRS qui, plutôt que de permettre à cette personne d'avoir son procès au Canada, n'a rien fait, sachant bien qu'il était fort possible que cette information ait été obtenue par la torture?
    Madame McDonough, ce sera votre dernière question.
    Merci, monsieur le président.
    D'abord, ni moi ni personne au gouvernement canadien ne pouvons assumer la responsabilité, à mon avis, de ce que les représentants de l'ambassade de Syrie vous ont dit au sujet de M. Arar.
    En ce qui concerne les fuites sur M. Arar ou sa situation, j'ai dit dans mes remarques liminaires qu'elles ont toutes fait l'objet d'une enquête, à la fois au SCRS et au Bureau du conseil privé, et que rien n'indique qu'elles aient pu venir du SCRS ou de son personnel.
    Je pense que c'est le mieux que je puisse faire pour répondre à votre question.
    Merci, monsieur Judd.
    Passons à présent au gouvernement. Monsieur MacKenzie, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Elcock, je crois que vous étiez directeur au moment des faits. J'aimerais vous poser la question suivante: Avons-nous demandé aux Américains de détenir M. Arar et leur avons-nous demandé de l'envoyer en Syrie? Est-ce qu'on peut dire qu'on ignore quels sont les renseignements que possèdent les Américains?
    Il est clair, au bout du compte, comme l'a dit M. Judd, que l'idéal est de partager nos renseignements avec nos alliés pour mettre les menaces en évidence. Cependant, dans certains cas, nous ne disposons pas de toute l'information dont disposent nos alliés ou d'autres pays. Nous ne pouvons jamais être sûrs des renseignements dont disposent nos alliés.
    En ce qui concerne nos discussions avec les Américains à cette époque, nous n'avons eu aucun échange avec les Américains à cette période sur cette affaire.
(0940)
    Ce que je veux dire, c'est qu'on ne sait pas pourquoi les Américains ont agi de cette façon, on ne leur a pas demandé ou ordonné.
    En tout cas, le service ne l'a pas fait.
    D'accord.
    L'autre question que notre comité a étudiée concerne l'information fournie à l'ancien gouvernement au cours de cette période. Certains ont dit que les anciens ministres du Cabinet n'étaient pas au courant. Au cours de cette période, surtout lorsque l'affaire a été connue, quelle sorte d'information aurait-on fournie aux ministres concernés? Auraient-ils été breffés sur la situation?
    J'ai informé régulièrement les ministres de ces questions, y compris sur l'affaire Arar et sur son contexte. Mais nous ne sommes pas les intervenants de première ligne pour cela.
    Certains ont dit que l'information fournie aux ministres n'était pas exacte.
    La première fois que je me suis rendu compte que l'on avait fourni de l'information inexacte, c'était au sujet de la déclaration du commissaire.
    D'accord, je comprends.
    En ce qui concerne les renseignements dont disposent les autres gouvernements sur les citoyens canadiens, peut-on également dire que nous disposons également de renseignements sur les ressortissants d'autres pays que nous n'avons pas partagés avec les pays en question?
    C'est exact.
    Dans ce cas, il n'est pas inhabituel que quelqu'un ait de l'information sur un concitoyen dont nous ne disposons pas? Cela fonctionne dans les deux sens. Je crois que c'est très clair. Cependant, parfois, un pays disposera d'information sur ses propres citoyens qui ne sera pas révélée à d'autres?
    C'est exact.
    Au sujet de l'affaire Arar, est-ce qu'on peut dire que le rôle du Canada a été très restreint, puisque nous ne savions même pas ce que les Américains savaient? Je crois que c'est le commissaire qui a dit que l'on ne savait pas pourquoi les Américains ont pris la décision d'agir comme ils l'ont fait -- et tout compte fait c'était bien peu car nous ne savons tout simplement pas ce qu'ils savaient.
    Nous n'avions pas toute l'information dont disposaient les Américains.
    Avons-nous ou pas joué un rôle important dans ce qui est arrivé à M. Arar?
    Je ne sais pas bien de qui vous voulez parler quand vous dites « nous ». Dans cette affaire, l'information venait des Américains. Pas de chez nous.
    Non, mais puisque les Américains n'ont pas comparu devant le juge O'Connor, nous ne savons pas de quelle information ils disposaient ni sur quoi elle portait.
    C'est exact.
    Très bien.
    L'autre chose qui a souvent fait l'objet de discussions au comité, c'est la question des fuites. J'ai moi-même un peu d'expérience dans ce domaine et je reconnais que c'est une tâche presque impossible. À mon avis, parfois, il faut se tourner vers d'autres sources. Il y a un livre qui a été écrit aux États-Unis et on a mis en évidence les sources des fuites 35 ans plus tard. C'était l'auteur du livre.
    À votre avis, les sources de ces fuites sont-elles extrêmement difficiles à trouver?
    En effet, c'est très difficile de déterminer quelles sont les sources des fuites. Dans ce cas-ci, comme l'a dit M. Judd, nous avons mené une enquête interne, mais rien ne semble indiquer que les fuites venaient du SCRS.
    D'accord.
    C'est tout, monsieur le président.
    Merci, monsieur MacKenzie.
    Passons maintenant à notre deuxième tour de questions. Vous avez cinq minutes chacun. C'est le tour de l'opposition officielle.
    Monsieur Alghabra, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, messieurs, et merci de vous joindre à nous aujourd'hui.
    On peut sans doute à juste titre qualifier l'affaire Maher Arar de l'un des échecs les plus retentissants, sinon le plus retentissant, des services de renseignement de notre pays: on a ciblé un innocent dans une enquête, on a communiqué des renseignements en franchissant des limites des protocoles normaux, il y a eu des fuites, on a trompé des fonctionnaires fédéraux. Tout cela est très sérieux et suscite la nervosité de la majorité des Canadiens. Ils ont perdu une bonne partie de leur confiance envers le milieu canadien du renseignement.
    Je crois que ce qui aggrave encore leur inquiétude, c'est qu'après les conclusions du rapport du juge O'Connor, au-delà des assurances et des engagements verbaux, les services de renseignement n'ont toujours pris aucune mesure concrète et tangible pour nous garantir que ces erreurs ne se reproduiront jamais plus.
    Pouvez-vous nous parler, monsieur Judd, au-delà des bonnes paroles, des mesures opérationnelles tangibles prises par le SCRS, que tout le monde attend et qui sont indispensables?
(0945)
    Si vous me le permettez, j'aimerais préciser certaines choses concernant votre question. Le SCRS n'a partagé aucun renseignement avec quelque gouvernement étranger que ce soit sur M. Arar.
    Je faisais référence à l'ensemble du milieu du renseignement au Canada. Je ne visais pas spécifiquement le SCRS; je parlais de l'ensemble de la situation.
    Je tiens à être plus précis, parce que je ne m'exprime ici qu'au nom du SCRS.
    Mais pour en venir à votre question proprement dite, j'ai dit dans ma déclaration liminaire, à propos des analyses qui ont été faites de l'affaire Arar, notamment par le SCRS, que le SCRS a déjà modifié ses politiques concernant l'analyse de l'information et son partage avec des gouvernements étrangers. À la lumière du rapport de M. le juge O'Connor, nous envisageons actuellement d'autres mesures qui pourraient être prises pour renforcer la sécurité en matière d'échange d'information avec des gouvernements étrangers. Je pense pouvoir dire que depuis déjà plusieurs années, nous avons modifié nos politiques et nos pratiques à cet égard en fonction des études qui ont été réalisées.
    Pourriez-vous, s'il vous plaît, être plus précis quant aux politiques modifiées? Modifiées par rapport à quoi, et qu'est-ce qui en a résulté?
    Les renseignements individuels que nous fournissons désormais à un gouvernement étranger s'accompagnent de conditions très strictes quant à l'utilisation qu'on peut en faire. Comme je l'ai dit dans mon exposé, nous analysons de façon beaucoup plus rigoureuse les antécédents et les usages du pays étranger en question, et c'est en fonction de cela que nous déterminons au départ si nous allons échanger de l'information avec lui.
    Je pense que nous avons progressé dans la formation et la préparation de notre personnel sur ces questions. De façon plus générale, le SCRS est indiscutablement le service de renseignement le plus contrôlé au monde. Nous avons deux organismes externes de surveillance qui étudient et analysent en permanence nos activités, nos pratiques et nos politiques, que nous modifions constamment en conséquence.
    Excusez-moi, je manque de temps.
    J'ai une autre question: Pourriez-vous nous donner votre opinion sur la participation actuelle de la GRC aux activités de renseignement et à la collecte d'information, en particulier depuis le 11 septembre? Avant cette date, on avait l'impression que le SCRS s'occupait du renseignement et la GRC d'application de la loi, mais il semble désormais y avoir une certaine dualité ou une confusion des rôles.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez, s'il vous plaît?
    Une brève réponse, s'il vous plaît.
    Je suis d'accord avec M. le juge O'Connor sur ce point, à savoir que les deux organismes ont un rôle à jouer en matière de sécurité nationale. Nous nous occupons davantage du renseignement, et la GRC s'occupe davantage du traitement des poursuites pénales.
    Il est juste de dire qu'elle a redoublé d'efforts en matière de renseignement, mais au cours dernières années, nous avons pris conjointement un certain nombre de mesures avec la GRC pour définir avec plus de cohérence ce que chacun d'entre nous va faire en matière de sécurité nationale.
    Lorsque le ministre a comparu devant ce comité, il a parlé d'un certain nombre de choses, notamment du protocole d'entente renouvelé et des diverses mesures que nous avons prises, particulièrement pour la coopération dans des enquêtes ciblées, les prises de décisions, la formation, etc. En définitive, je pense que les deux organismes ont leur rôle à jouer pour garantir la sécurité nationale, mais le nôtre concerne toujours et uniquement le renseignement; celui de la GRC est davantage axé sur les poursuites pénales.
(0950)
    Merci, monsieur Judd.
    Monsieur Ménard, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Monsieur Elcock, si j'ai bien compris la réponse que vous avez donnée à M. MacKenzie, vous n'avez su que de fausses informations avaient été communiquées aux autorités américaines par la GRC qu'au moment où cela a été soulevé, durant l'enquête menée par le juge O'Connor. Est-ce exact?

[Traduction]

    Non, j'ai dit que je n'en avais pas été informé avant la déclaration du commissaire devant le comité.

[Français]

    C'est ce que je voulais dire. Peut-être qu'on s'est perdus dans l'interprétation.

[Traduction]

    Non, vous avez dit avant la commission O'Connor.

[Français]

    Vous ne saviez pas, avant le début des travaux de la Commission O'Connor, qu'on avait communiqué de fausses informations?

[Traduction]

    Non, avant que le commissaire ait fait sa déclaration devant le comité parlementaire, je ne savais pas qu'une information erronée avait pu être transmise.

[Français]

    C'était donc nécessairement après février 2004?

[Traduction]

    Non. Quand le commissaire a-t-il comparu? C'était il y a moins d'un mois, environ.

[Français]

    C'était donc encore plus tard que le début des travaux de la commission.
    Étiez-vous au courant des prétentions de M. Arar? Vous étiez aussi au courant de son retour de la Syrie, qui a fait l'objet de beaucoup de publicité.

[Traduction]

    J'étais bien sûr au courant de la publication de cette information.

[Français]

    D'accord.
    Vous saviez donc que ce citoyen canadien avait été détenu dans des prisons syriennes et torturé à cause de ses relations. À son retour au Canada, n'est-il pas devenu une personne d'intérêt pour vos services?

[Traduction]

    Je ne peux pas faire de commentaires à ce sujet. Le service a toujours eu pour principe de ne jamais faire état du statut d'un particulier.

[Français]

    Évidemment, je suis obligé de me baser sur ce qu'il serait raisonnable de faire. J'estime qu'il serait raisonnable, pour vous, de le surveiller plus attentivement et de vous renseigner auprès des autorités américaines.
    Pourquoi ont-elles pris cette mesure extraordinaire de l'envoyer dans un pays où on questionne les gens de façon plus musclée qu'au Canada ou aux États-Unis?

[Traduction]

    C'est peut-être une hypothèse de votre part, monsieur. Je ne peux pas me prononcer à ce sujet.

[Français]

    Je comprends que vous ne pouvez le faire en public. Seriez-vous plus à l'aise de le faire à huis clos?

[Traduction]

    Non.

[Français]

    En supposant que vous saviez avant son retour au pays que c'était à cause d'erreurs commises par la GRC qu'on l'avait envoyé là-bas, n'aurait-il pas été naturel de communiquer avec les autorités syriennes pour leur dire que cet individu semblait avoir été envoyé chez eux par erreur et que, à moins qu'elles n'aient eu d'autres informations à son sujet, il était plus sage de le libérer car on le croyait innocent?

[Traduction]

    On peut effectivement le supposer, à condition que l'information ait été connue.

[Français]

    J'imagine qu'il aurait été logique, de la part du directeur de la GRC, de le faire, puisque telle était sa conviction, à savoir que M. Arar était innocent par rapport à des relations qu'il aurait eues avec des organisations terroristes.
(0955)

[Traduction]

    Je ne peux pas me prononcer. Je ne connais pas l'information dont disposait la GRC.

[Français]

    Oui, mais vous êtes quand même au courant que M. Zaccardelli nous a dit qu'il avait acquis la conviction que M. Arar était innocent, par rapport à des relations qu'il aurait eues avec des organisations terroristes, à partir du moment où il examiné le dossier, soit juste après que M. Arar fut envoyé en Syrie.

[Traduction]

    Comme je l'ai dit au départ, je n'en ai été informé que très récemment.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Une brève question, monsieur Ménard.

[Français]

    Vous ne pouvez donc pas nous dire si vous avez surveillé M. Arar après le 4 novembre 2003, c'est-à-dire après son retour au pays.
    Je voudrais vous poser une autre question. Maintenant que vous savez que l'information a été communiquée par la GRC, êtes-vous convaincu qu'il ne devrait y avoir qu'un seul organisme canadien pour communiquer avec les services de renseignement d'autres pays?

[Traduction]

    Monsieur Elcock.
    Monsieur le président, je suis ici pour parler d'activités menées il y a un certain temps. Actuellement, je suis sous-ministre de la Défense nationale. Je ne suis pas le porte-parole du SCRS et il ne m'appartient pas de me prononcer sur ce sujet.
    Monsieur Brown.
    Je sais que de nombreux Canadiens s'intéressent de très près à ce qui s'est passé dans l'affaire Arar. Leur intérêt porte sur quatre points: Que s'est-il passé avant que l'affaire Arar n'arrive à New York, que s'est-il passé à New York, que s'est-il passé lorsqu'il a été envoyé en Syrie et que s'est-il passé lorsqu'il est revenu au Canada?
    J'ai posé à plusieurs reprises des questions concernant ce que savaient les Américains. C'est un sujet qui intéresse désormais d'autres membres du comité. Le commissaire Zaccardelli a été plus que discret sur ce que savaient les Américains et sur ce qui en a résulté quant à l'envoi de M. Arar en Syrie. Aujourd'hui, nous en avons appris un peu plus. Notre ancien ministre a été un peu plus formel. Il pense que les Américains ont fait enquête. On nous dit maintenant qu'il y a peut-être eu autre chose.
    J'aimerais parler spécifiquement de l'information transmise par le SCRS à la GRC, qui l'a elle-même donnée aux autorités américaines. Ensuite, nous parlerons un peu du retour de Maher Arar au Canada.
    Est-ce que l'expression « un groupe d'extrémistes islamiques soupçonnés de liens avec le mouvement terroriste al-Qaeda » figurait dans l'information initialement remise par le SCRS à la GRC? Sur quoi vous êtes-vous fondé pour en venir à cette conclusion? Le SCRS savait-il que Maher Arar faisait partie du groupe ainsi décrit?
    Brièvement et en toute franchise, je ne connais pas la réponse à cette question.
    Bien.
    J'aimerais aller un peu plus loin. Je ne pense pas que mon collègue ou moi-même puissions parler de l'information transmise à la GRC. Il n'est pas d'usage, dans notre service, de faire état de ce genre d'information.
    Le SCRS était-il informé d'une quelconque inexactitude contenue dans l'information transmise à la GRC?
    Comme je l'ai dit, je ne suis pas au courant de cette question. La première fois que j'ai entendu parler de la possibilité de renseignements inexacts, c'est lors de la déclaration faite publiquement par M. Zaccardelli il y a quelques semaines.
    Après le retour de M. Arar au Canada, la GRC a continué à donner de l'information. Je suppose qu'elle se fondait ni plus ni moins sur celle que vous lui fournissiez. À l'époque, une partie de l'information était également communiquée au Bureau du conseil privé. Est-ce que quelqu'un du SRCS s'est jamais interrogé sur l'information inexacte qui passait de la GRC au BCP?
    Du temps où je faisais partie du service, je n'ai jamais eu connaissance de la communication de renseignements inexacts à qui que ce soit, y compris à la GRC. La première fois que j'ai entendu parler d'éventuelles inexactitudes dans l'information, c'était lors de la récente déclaration du commissaire.
(1000)
    Que cette information ait continué à circuler après le retour de M. Arar au Canada, et que personne n'en assume la responsabilité me semble tout à fait incroyable.
    Venons-en maintenant à ce qui s'est passé au retour de M. Arar au Canada. Le SCRS était-il informé de ce que la GRC remettait au BCP? Est-ce que vous considérez que cette information relève de la sécurité nationale, de sorte que vous ne voulez pas en parler au comité?
    Nous nous concentrions sur l'information que nous allions communiquer au BCP. Je ne me préoccupais pas de celle que la GRC lui fournissait ou pas.
    Très bien. Nous n'irons pas très loin. Je vais en rester là. Merci.
    Monsieur Zed.
    Je ne connais pas très bien les règles d'attribution du temps de parole, mais le NPD n'a-t-il pas droit à une autre question?
    Non. Dans ce comité, l'usage veut que chacun des députés puisse intervenir avant que l'un d'entre eux n'obtienne une deuxième fois la parole, à moins que quelqu'un de votre parti ne vous cède sa place.
    Donc, au troisième tour, j'aurais une autre...
    Vous n'aurez pas la parole avant que nous n'ayons fait un tour complet et que nous revenions au NPD.
    Allez-y, monsieur Zed.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, j'aimerais vous dire, monsieur Elcock et monsieur Judd, que je remplace aujourd'hui Irwin Cotler, qui a malheureusement dû s'absenter. Il tenait beaucoup à rappeler la difficulté du travail que vous faites — et je suis sûr que vous avez eu des défis à relever — mais il voulait aussi souligner l'importance de la confiance des Canadiens envers le SCRS.
    En tant qu'ancien président du comité, je comprends les difficultés et les défis auxquels vous êtes confrontés. Ma question est assez simple. Pensez-vous que les activités et les interventions du SCRS aient pu contribuer d'une façon quelconque au sort malencontreux de M. Arar, qui été envoyé illégalement à l'étranger pour y subir la torture? J'aimerais que vous répondiez tous les deux à cette question.
    Non.
    Non.
    Si vous pensez que votre service n'y a pas contribué le moindrement, pourquoi tout ce remue-ménage? Pourquoi les parlementaires s'inquiètent tant de ce que le SCRS a pu savoir ou ignorer? Pourquoi le juge O'Connor s'en est-il inquiété? Et qu'en est-il de tout ce que le juge O'Connor a dit de certaines activités du SCRS? Est-ce que tout cela n'est qu'un mauvais rêve?
    Monsieur le président, d'après ce que je sais des propos du juge O'Connor — et je dois dire que je ne l'ai appris que dans les journaux, puisque je n'ai pas lu le rapport — je crois savoir qu'il n'aborde pas vraiment la question de l'expulsion de M. Arar par les États-Unis. M. Arar n'a pas été expulsé du Canada; il a été expulsé des États-Unis.
    Laissons de côté les querelles d'avocats et parlons de la confiance des Canadiens. Je pense que c'est l'essentiel, messieurs. Vous devez sentir que les députés de tous les partis sont exaspérés de voir le SCRS se cacher la tête dans le sable et refuser de reconnaître l'importance de la confiance de la population envers une institution qui exige le respect de la règle du droit dans notre pays.
    Vous avez eu l'occasion de rectifier les faits. Vous ne l'avez pas saisie. Ma collègue Mme McDonough a fait référence à la voix unique par laquelle la GRC s'était exprimée. Vous ne vous en êtes pas occupé. Vous avez évité de vous excuser auprès d'un Canadien après qu'un organisme proche du vôtre, la GRC, ait exprimé ses regrets. Messieurs, vous avez besoin d'un minimum de confiance de la part de la population.
    Voilà ma question.
    Je vais essayer de vous répondre.
    Comme l'a dit le juge O'Connor dans les conclusions de son rapport, personne au SCRS n'a fourni d'informations à un gouvernement étranger sur M. Arar. L'information transmise aux autorités des États-Unis a été fournie par la GRC. Pour en revenir à la question de M. Brown, je pense que le juge O'Connor en est également venu à la conclusion que l'information rassemblée par la GRC résultait de sa propre enquête, et non pas de ce que nous avons pu faire ou ne pas faire.
    Je reconnais tout à fait le bien-fondé de ce que vous dites, c'est-à-dire de la confiance que la population doit porter à une institution comme la nôtre. Mais je suis convaincu que le rapport du juge O'Connor va tout à fait dans le sens de ce que je viens de dire. Je reconnais également, comme je l'ai fait dans mon exposé, qu'il critique le SCRS sur plusieurs points, auxquels j'ai répondu, notamment sur l'évaluation des renseignements susceptibles d'avoir été obtenus sous la torture, sur la lettre où il était question du Canada qui doit s'exprimer d'une seule voix et sur la question des fuites. En définitive, nous sommes malheureusement tenus — et nous le déplorons dans bien des cas — par des questions confidentielles de sécurité nationale qui imposent des limites à ce que nous pouvons dire publiquement.
(1005)
    Malheureusement, votre temps est écoulé.
    J'aimerais faire une dernière brève intervention.
    Vous avez eu cinq minutes.
    J'aimerais faire figurer ma question au compte rendu, quitte à ce que le témoin fournisse plus tard sa réponse au comité.
    Il nous reste 50 minutes; il ne devrait pas y avoir de problème.
    Monsieur Hawn, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence, messieurs. Comme c'est l'halloween, certains pourraient être tentés de se livrer à la chasse aux sorcières, mais ce n'est pas mon cas.
    Je dois cependant dire, monsieur Elcock, que je m'étonne de voir que le chef du SCRS ne manifeste pas davantage de curiosité sur la période d'octobre 2003 à septembre 2006. M. Zaccardelli nous a parlé ici de différentes choses qui commençaient à se dire en public, ainsi que dans le monde du SCRS, de la GRC et du renseignement.
    Monsieur Judd, vous avez dit que le SCRS était le service du renseignement le plus contrôlé au monde et que les Canadiens avaient tendance à se regarder le nombril, etc. J'en conviens, mais à votre avis, est-ce une bonne ou une mauvaise chose?
    Je dirais que de façon générale, c'est une bonne chose à bien des égards, notamment parce que les agents de notre service savent ainsi que tout ce qu'ils font sera soumis en cours d'année au contrôle d'une tierce partie. Il en résulte un niveau élevé de diligence et de prudence dans le fonctionnement du service.
    Cela ne veut pas dire pour autant que l'organisation soit à l'abri de l'erreur. Il est composé d'êtres humains qui peuvent parfois se tromper, mais au cours de ses 22 années d'existence, l'expérience a montré que grâce aux mécanismes de contrôle — qu'il s'agisse du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, du Bureau de l'inspecteur général ou des autres mécanismes de contrôle auxquels le SCRS est assujettis au même titre que tout autre organisme fédéral — notre service a pu s'adapter avec le temps, identifier ses lacunes et prendre des mesures pour y remédier.
    Dans l'ensemble, je pense que ce contrôle a été positif pour l'organisme; et pour en revenir à une question précédente, on peut espérer qu'il renforce la confiance des Canadiens et les persuade que le service fonctionne comme il est censé le faire, conformément aux exigences de la loi.
(1010)
    Si la confiance de la population envers le SCRS a été ébranlée, est-ce à cause du contrôle qui s'est exercé ou à cause de la façon dont les organismes de contrôle traitent l'information qu'ils recueillent?
    En toute franchise, l'un des problèmes que pose la gestion d'un organisme comme le nôtre, c'est qu'il est très limité dans ce qu'il peut dire ou ne pas dire en public. En réalité, c'est un véritable handicap, car dans bien des cas, notre souci de protéger les renseignements confidentiels concernant la sécurité nationale nous est préjudiciable et nous empêche de parler de ce que l'organisme a fait ou n'a pas fait.
    Dans la plupart des sociétés démocratiques, il est humainement normal de soupçonner les organismes détenteurs de secrets, car le secret suscite toujours un certain malaise. En outre, les questions de sécurité nationale peuvent à l'occasion causer de la nervosité, de l'inconfort et des dilemmes de toutes sortes.
    On a proposé qu'un comité formé de parlementaires surveille les questions de sécurité nationale. Est-ce qu'on parviendrait à renforcer la confiance de la population grâce à un tel comité regroupant tous les partis, qui surveilleraient le SRCS, la GRC, la Défense nationale et toutes les organisations de ce genre, comme cela se fait aux États-Unis? À votre avis, est-ce que ce serait une bonne chose? Que pensez-vous de la constitution éventuelle d'un tel comité?
    On peut espérer que cela aurait un effet positif sur la confiance de la population. Comme vous le savez, la plupart des services du renseignement occidentaux sont soumis à une forme quelconque de contrôle parlementaire. Personnellement, la formule me semble intéressante; elle aurait au moins l'avantage de permettre aux parlementaires de mieux comprendre ce qu'un organisme comme le nôtre fait ou ne fait pas, comment il procède, etc., afin d'élever le niveau des connaissances sur notre secteur d'activités. Le fait que les représentants élus soient ainsi mieux informés devrait également avoir un effet positif sur la confiance de la population.
    Nous vous redonnerons la parole au prochain tour.
    Nous passons maintenant à notre dernier tour de questions, en commençant par M. Chan; vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous, messieurs Elcock et Judd, de votre comparution. J'aimerais vous faire part de mes sentiments sur cette question et peut-être que nous pouvons travailler ensemble pour régler certains problèmes.
    Le Canada est un pays d'immigrants. Un grand nombre d'entre nous venons d'États durs où nous avons été témoins d'atteintes aux droits fondamentaux de nos parents ou d'autres membres de notre famille. C'est pourquoi c'est si important pour nous qui sommes venus au Canada de comprendre ce qui se passe, parce qu'ici, les droits de la personne sont protégés.
    Premièrement, depuis que je suis au Canada, j'apprécie vraiment le travail que fait le SCRS. Lorsque j'étais un défenseur des droits de la personne, le SCRS était tout à fait au courant des choses auxquelles nous faisions face. Le SCRS a contribué à nous donner, à mes collègues et à moi, confiance dans ce pays.
    Je reviens maintenant aux questions.
    Nous nous attendons à ce que le SCRS protège les citoyens canadiens. Nous parlons de partager l'information avec les États, cette question s'adresse donc surtout à M. Elcock. Après la déportation de M. Arar vers la Syrie par le gouvernement des États-Unis, j'aurais cru que les Américains auraient volontairement fourni au SCRS les renseignements supplémentaires qu'ils avaient au sujet de M. Arar et qui les ont incités à le déporter. S'ils ne l'ont pas fait volontairement, j'aurais cru que le SCRS aurait demandé cette information afin de protéger nos citoyens. Avez-vous, ou avons-nous, demandé cette information?
(1015)
    À ce moment-là, nous avons indiqué que nous serions intéressés à recevoir d'autres renseignements mais on ne nous en a pas fournis.
    Cela me rassure un peu que vous ayez demandé cette information.
    J'ai une question pour vous, monsieur Judd: vous dites qu'à l'avenir, le SCRS sera beaucoup plus prudent à l'égard de l'information provenant de pays qui ont l'habitude de bafouer les droits de la personne. D'après ce que j'ai lu dans les journaux au cours des dernières années, depuis le 11 septembre, les Américains ont pratiqué la torture, ont détenu des citoyens — jusqu'à environ 20 000 dont la plupart étaient innocents — en faisant fi des règles juridiques, qu'ils ont des prisons secrètes dans d'autres pays et qu'ils continuent à avoir recours à certaines formes de torture à l'égard de certaines personnes. Est-ce que vous classeriez les États-Unis parmi les pays où les droits de la personne ne sont pas toujours respectés?
    Si vous me le permettez, monsieur, permettez-moi de dire qu'en général nos pratiques et politiques en matière de partage de l'information et des conditions que nous posons à ce partage s'appliquent à tous nos partenaires étrangers.
    Une question rapide, monsieur Chan.
    Depuis l'affaire Maher Arar, les Américains ne nous ont pas fourni les informations qu'ils détenaient au sujet de M. Arar. Je dirais que c'est très étrange. Essaient-ils de cacher leurs responsabilités? Est-ce que cet incident a nui à la relation de coopération entre le Canada et les États-Unis?
    Ma question s'adresse aux deux témoins.
    Merci.
    Je ne trouve pas cela bizarre. Il y a de nombreux cas où les pays ne partagent pas l'information avec nous et vice-versa. Ce n'est pas particulièrement surprenant.
    Est-ce que cela a nui à la relation entre nos deux pays?
    Non.
    Monsieur Judd, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Non. Je dirai simplement, comme j'ai essayé de le faire auparavant, que notre organisme est beaucoup plus prudent en matière de partage de l'information avec nos partenaires étrangers. Ça reste pour nous une considération primordiale dans nos opérations. Dans de nombreux cas, nous refusons d'accepter l'information provenant de partenaires étrangers ou de leur en fournir. Ces décisions sont prises au cas par cas.
    Merci.
    Le dernier à poser des questions dans ce quatrième tour sera M. Norlock. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, messieurs, de votre présence ici aujourd'hui, et merci de répondre à des questions très difficiles et lourdes de sens.
    J'aimerais que l'on continue à parler du partage de l'information avec les États-Unis. Vous avez mentionné au début que vous partagez de l'information avec les pays étrangers et que vous en recevez également. Or, dans l'affaire Arar, il n'y a pas eu de partage d'information avec les États-Unis. Je soupçonne que certains penseront que c'est parce que la GRC était l'organisme canadien responsable et que c'est elle qui se chargerait de cette fonction.
    Tout d'abord, vous paraît-il étrange que certains types de renseignements reçus ou fournis par le Canada ne vous aient pas été communiqués? Ensuite, dans l'affaire qui nous intéresse, est-ce que la GRC vous a demandé de ne pas vous en mêler puisqu'elle s'en occupait?
(1020)
    Monsieur le président, il n'aurait pas été inhabituel que certains renseignements ne soient pas partagés, comme M. Judd l'a indiqué. Cela arrive souvent. Cependant, ce n'est pas du tout le cas, la GRC ne nous a pas demandé de nous abstenir puisqu'elle voulait faire ces échanges. Cela ne faisait certainement pas partie du plan.
    Au sujet de la prudence et des modifications que le SCRS a apportées à ces politiques, M. Judd a mentionné que l'une des forces de l'unité de collecte de l'information du SCRS était notre grande supériorité par rapport aux autres pays en ce qui concerne nos normes et nos politiques. En d'autres mots, nous sommes plus ouverts, nous sommes très prudents, etc.
    Pensez-vous avoir trouvé un juste équilibre pour l'exécution de vos fonctions? Il faut que les Canadiens se sentent rassurés que leurs droits et leurs privilèges sont protégés mais il ne faut pas qu'ils croient que nous sommes prudents au point de compromettre leur sécurité en étant réticent à nous mêler des aspects concrets, aux aspects moins reluisants du partage de l'information et que nous hésitons à utiliser diverses technologies de l'information qui nous permettent de protéger les citoyens.
    Il est facile de dire oui, mais lorsqu'on se compare aux organismes d'autres pays, est-ce que le Canada souhaite avoir les meilleurs outils non seulement pour protéger nos libertés mais pour faire en sorte aussi que d'autres n'utilisent pas ces outils contre nous?
    Je pense que tous les jours nous sommes conscients de la nécessité de trouver un équilibre entre les avantages du partage de l'information et les risques éventuels que cette information soit utilisée à mauvais escient. Je ne pense pas pouvoir dire que nous avons une formule magique qui s'applique dans tous les cas; nous traitons ces questions au cas par cas. Il s'agit toujours d'essayer de trouver le juste équilibre. Nous voulons certainement croire que nous faisons preuve de diligence en ce qui concerne les risques pour le Canada ou les Canadiens ici ou à l'étranger. Mais nous sommes également conscients des risques qu'il peut y avoir à d'autres niveaux en collaborant trop avec certains partenaires étrangers.
    Je suis désolé, c'est une réponse très gauche, mais je ne pense pas pouvoir faire mieux.
    Pensez-vous qu'au Canada, comparativement à d'autres pays, il y a peut-être trop d'ingérence politique dans vos activités quotidiennes? En d'autres mots, pensez-vous que dans notre zèle pour protéger le Canada — et je ne dis pas que c'est une bonne ou une mauvaise chose, mais je pense que tous les Canadiens ont besoin d'entendre votre réponse à cette question — les politiciens ont trop tendance à vous critiquer après coup?
    Vous avez juste le temps de répondre rapidement.
    Si vous le permettez, j'aurais deux choses à dire à ce sujet, monsieur.
    Je ne crois pas que nos activités soient entravées de quelque manière que ce soit par une ingérence politique. Pour ce qui est des critiques après coup, je pense que vous restreignez trop le cercle de nos critiques. Je pense qu'il dépasse largement la sphère politique.
    Merci.
    Très bien, Rick, merci.
    Nous allons maintenant entreprendre un nouveau tour de cinq minutes en commençant par le Parti libéral, suivi du Bloc et du Nouveau parti démocratique.
    Monsieur Holland, s'il vous plaît.
    Monsieur le président, normalement je résiste à la tentation d'ajouter des observations à mes questions, mais cette fois je vais succomber, car je suis sidéré.
    Premièrement, vous commencez par vous cacher derrière la position du gouvernement pour refuser de présenter des excuses puis vous allez même plus loin en disant, en contradiction directe au rapport du juge O'Connor, que le SCRS n'a joué aucun rôle dans ce qui est arrivé à Maher Arar et dans les événements qui ont abouti à sa déportation en Syrie, où il a été torturé. C'est incroyable.
    Et ensuite, monsieur Elcock, que vous nous disiez que vous n'avez pas lu le rapport du juge O'Connor... Que vous, un ancien directeur, quelqu'un qui a comparu devant ce comité, vous n'ayez pas eu la moindre curiosité de lire ce rapport avant de comparaître aujourd'hui est très troublant.
    Je passe maintenant aux questions que je veux vous poser, la première concernant les fonctionnaires syriens. Les fonctionnaires syriens ont déclaré qu'à trois reprises, le SCRS leur a dit qu'il ne souhaitait pas le retour de M. Arar. Je pense que cela s'est produit à la rencontre qui a eu lieu en novembre 2002. Pouvez-vous me dire ce que le SCRS a pu faire pour que le gouvernement syrien ait cette impression et, en outre, qu'avez-vous fait pour éviter cette interprétation?
(1025)
    Je pense que M. le juge O'Connor a répondu à cette question dans son rapport et qu'il en est arrivé à la conclusion qu'il ne pouvait pas déterminer pourquoi les autorités syriennes airaient tiré cette conclusion à partir de l'information fournie par le SCRS ou quelqu'un au gouvernement canadien.
    En ce qui concerne la rencontre qui a eu lieu en Syrie, M. le juge O'Connor a également examiné assez attentivement cette question et a conclu que, dans les circonstances, cette rencontre avec les autorités syriennes était appropriée et avait reçu un large appui de la part d'autres organismes fédéraux; il a conclu également que le SCRS n'a fourni absolument aucun renseignement que ce soit aux Syriens au sujet de M. Arar ni, d'ailleurs, sur autre chose, si j'ai bonne mémoire.
    Pour revenir aux questions que je vous ai posées tout à l'heure au sujet de l'échange d'information, on a dit que le SCRS ne savait pas que la GRC utilisait cette information et la fournissait aux Américains. Je suppose que vous l'avez appris pendant ce processus. Y a-t-il eu des fuites? Il est évident que l'information qui a transpiré de la GRC lui avait été fournie, dans bien des cas, par le SCRS. Quelles mesures le SCRS a-t-il pris à ce moment-là pour discuter de ces fuites et de l'utilisation des renseignements du SCRS par la GRC?
    Puis-je apporter une nouvelle précision? Si vous lisez le rapport du juge O'Connor, vous verrez que l'information dont disposait la GRC au sujet de cette affaire avait, dans une large mesure, été obtenue grâce à sa propre enquête. Cela n'avait rien à voir avec nous. En fait, vous vous rappellerez que M. le juge O'Connor indique dans son rapport qu'à ce moment-là, l'enquête avait été transférée du SCRS à la GRC puisqu'il semblait s'agir d'une enquête criminelle. La GRC a alors mené sa propre enquête qui lui a permis d'obtenir l'information qu'elle a fournie aux autorités américaines.
    En ce qui concerne les fuites, M. le juge O'Connor en mentionne huit qui se sont produites pendant son enquête. Comme je l'ai dit dans mon exposé préliminaire, notre organisme a participé à l'enquête sur ces fuites. Nous avons fait des enquêtes internes et nous avons participé à une enquête menée par le Bureau du Conseil privé. La conclusion, sauf pour une fuite qui fait encore l'objet d'une enquête criminelle, semble être qu'il n'y a aucune preuve que les renseignements qui ont transpiré provenaient du SCRS ou de ses employés.
(1030)
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Bonsant, du Bloc.

[Français]

    Je vais vous poser une question, puis je laisserai la parole à M. Ménard.
    Je suis venue ici pour essayer de comprendre le rôle de la GRC par rapport à vous, dans le dossier de Maher Arar. Je ne connais pas vos systèmes, et plus vous parlez, plus je suis mêlée.
    Vous dites que vous travaillez avec la GRC, mais que vous ne partagez pas de dossiers; vous avez des informations que vous ne partagez pas avec la GRC; vous n'êtes pas responsable de la déportation de M. Arar, c'est la GRC qui l'est.
    Travaillez-vous ensemble, ou non? Travaillez-vous en parallèle? Êtes-vous des compétiteurs qui essaient d'être dans les bonnes grâces du gouvernement du Canada?

[Traduction]

    Monsieur Judd.
    Il y a un certain chevauchement. Le SCRS a un mandat en matière de sécurité nationale. Notre rôle, entre autres, est de fournir des renseignements et de l'information au gouvernement en matière de sécurité nationale. La GRC a, évidemment, un mandat en tant que service de police chargé d'enquêtes et de poursuites criminelles. Il y a 22 ou 23 ans, nous ne formions qu'un seul organisme. En fait, il y a une autre enquête publique qui vient d'être lancée sous la direction d'un ancien juge en chef de la Cour suprême dont la tâche sera, entre autres, de déterminer pourquoi le SCRS et la GRC n'ont pas coopéré au moment de l'enquête sur Air India et ce qu'il convient de faire à l'avenir pour améliorer cette coopération.
    Bien des gens ont du mal à saisir les différences dans ce que nous faisons et ce que fait la GRC. De manière générale, nous recueillons des renseignements et nous conseillons le gouvernement. S'il y a des cas où nous croyons qu'une activité constitue ou pourrait constituer un acte criminel, nous demandons normalement à un service de police de s'occuper de la poursuite pénale. Dans l'affaire Arar, le SCRS menait une enquête sur certaines personnes. Cette enquête a été confiée à la GRC suite aux événements du 11 septembre et des demandes croissantes auxquelles le SCRS devait faire face. Mais l'enquête sur certains groupes d'individus, avec lesquels M. Arar a par la suite été associé, était alors une enquête criminelle de la GRC.

[Français]

    D'accord. Merci.

[Traduction]

    Il vous reste encore un peu de temps.

[Français]

    Donnez-moi au moins deux minutes, car j'ai quelques commentaires à formuler.
    Monsieur Judd, je comprends parfaitement la position que vous avez expliquée à M. Laurie Hawn et je saisis à quel point il est délicat de travailler pour une organisation secrète, mais je sais aussi à quel point c'est nécessaire. D'ailleurs, je partage entièrement l'opinion exprimée par le juge Dennis O'Connor à ce sujet.
    Je remarque cependant qu'à défaut d'information, en général, la rumeur court et elle est toujours pire que la vérité.
    Je pense aussi que notre sécurité dépend beaucoup plus du travail de vos organisations que des lois que nous amendons ici.
    Je comprends donc la position ingrate dans laquelle vous vous trouvez, d'autant plus que nous cherchons à sauver la vie de nombreux innocents qui pourraient être victimes des terroristes. Je ne perds pas mes vieux réflexes de juriste et je pense qu'en agissant ainsi, il faut aussi éviter que des innocents aient un sort inacceptable.
    Pouvez-vous me dire précisément pourquoi les États-Unis ont envoyé M. Arar en Syrie? Avez-vous posé cette question? Dans l'affirmative, avez-vous eu une réponse, ou pas? Si vous avez eu une réponse, a-t-elle influencé votre façon de traiter le dossier?
    Je vous pose toutes ces questions parce que j'ai peu de temps à ma disposition. Cela m'apparaît naturel qu'un individu qui a été envoyé en Syrie par les États-Unis et qui y revient soit nécessairement un sujet d'intérêt pour vous. Or, il me semble que vous n'avez pas traité la question comme si c'était le cas.
(1035)

[Traduction]

    Une réponse très brève.
    Je vais répondre rapidement à vos deux questions, monsieur. Premièrement, un certain nombre de représentants canadiens, élus et non élus, ont demandé aux États-Unis sur quoi ils avaient fondé leur décision. Pour autant que je sache, aucun représentant canadien, élu ou non élu, n'a obtenu une réponse des autorités américaines.
    Pour ce qui est de la question de savoir si M. Arar était ou non un sujet d'intérêt, je plaide le secret pour des raisons de sécurité nationale; nous avons pour principe de ne jamais confirmer ni nier qu'une personne nous intéresse aux fins d'une enquête.
    Je regrette de répondre ainsi, car je comprends votre frustration, mais c'est un principe fondamental pour notre organisme et les autres organismes de renseignements de sécurité qui existent dans le monde.
    Madame McDonough, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Il est difficile de savoir, du moins ce matin, si notre frustration découle de ce que vous nous avez dit au sujet du partage de l'information ou si c'est parce que certains problèmes causés par le SCRS l'ont été par ses omissions ou son inaction plutôt que par ses actions.
    J'aimerais enchaîner brièvement sur la question de mon collègue M. Ménard. Il vous a demandé si vous seriez plus à l'aise pour répondre à certaines de ses questions à huis clos. J'aimerais simplement vous demander si nous aurions raison de croire que nous pourrions obtenir plus d'information sur laquelle fonder une conclusion si nous étions réunis à huis clos. Je vous pose cette question sachant que c'est un problème pour vous qu'il y ait des soupçons au sujet d'un organisme qui traite des secrets, mais c'est également un problème pour les parlementaires. J'aimerais vraiment savoir si vous seriez davantage prêt à nous fournir l'information que nous cherchons désespérément à obtenir si nous étions à huis clos et si c'est quelque chose qu'il faudrait envisager comme prochaine étape.
    Je suis d'un naturel plus ouvert, mais malheureusement, nous avons un ensemble de politiques et de principes concernant la sécurité nationale que nous respectons depuis longtemps, tout comme les autres organismes comme le nôtre, et tout cela détermine ce que nous pouvons ou ne pouvons pas dévoiler publiquement.
    Pour ce qui est de savoir si nous pourrions vous en dire davantage à huis clos, j'aimerais dire deux choses rapidement. Parmi mes nombreux défauts, j'ai celui de ne pas être avocat. Étant donné que toute cette question du secret en matière de sécurité nationale est devant les tribunaux, il faudrait que je consulte un avocat pour savoir si ce serait possible ou non.
    Nous avons la responsabilité d'essayer d'aller au fond de ces questions. Aujourd'hui, nous ne semblons pas avoir beaucoup de succès. Il faudrait peut-être que nous cherchions à déterminer s'il serait possible d'obtenir davantage d'informations dans une séance à huis clos.
    J'aimerais brièvement passer à une autre question. Le juge O'Connor a conclu que pour des raisons qui n'appartiennent qu'à lui, le SCRS préférait que M. Arar ne revienne pas au Canada. Il a fourni des preuves qui semblent appuyer cette conclusion. L'une de ces raisons était que le SCRS craignait que si des détenus comme M. Arar revenaient au Canada,  le SCRS aurait besoin de ressources supplémentaires pour les surveiller. La deuxième raison était que le SCRS disait craindre que le gouvernement américain s'interroge sur les motifs et la détermination du Canada dans le cas où M. Arar serait libéré. Je me demande si vous pourriez me dire ce que vous pensez de ces deux conclusions du juge O'Connor.
    En d'autres mots, si la question des ressources se posait à l'époque, se pose-t-elle encore aujourd'hui? Deuxièmement, il y a la question de savoir si le SCRS aurait été davantage prêt à fournir de l'information et s'il aurait été plus proactif s'il n'avait pas craint de nuire à la relation entre le Canada et les États-Unis.
(1040)
    Il reste une minute pour la réponse.
    Très rapidement, je crois savoir que M. O'Connor en est arrivé à ces conclusions sur la foi des témoignages de représentants de notre organisme qui ont été donnés à huis clos et en audiences publiques. Pour ma part, je n'ai pas témoigné devant monsieur le juge O'Connor.
    En ce qui concerne les ressources, nous sommes toujours obligés de chercher un équilibre dans notre façon de mener les enquêtes et, faute d'une meilleure expression, nous disons souvent que nous appliquons une méthode de gestion du risque pour trouver l'équilibre entre nos ressources et nos priorités opérationnelles.
    En réponse à votre deuxième question, je ne suis pas sûr de partager ce point de vue.
    Merci.
    Monsieur MacKenzie, cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Elcock, je sais que mon ami vous a critiqué parce que n'avez pas lu le rapport. Quel est votre rôle à l'heure actuelle? Vous ne travaillez plus pour le SCRS.
    Non. J'occupe un autre poste. Je suis sous-ministre de la Défense nationale. Nous sommes pas mal occupés à l'heure actuelle et je n'ai tout simplement pas eu le temps de le lire.
    Je ne vous blâme pas, je vous comprends.
    Je me demande si certains de mes amis de l'autre côté de la table ont eux-mêmes lu le rapport. S'ils ont lu les pages 174 et 175 de l'analyse et des recommandations, ils auraient vu que le juge O'Connor n'est pas si sévère à l'égard du SCRS et du rôle qu'il a joué dans cette affaire. Je me demande pourquoi un si grand nombre d'entre eux exigent des excuses du SCRS pour le rôle qu'il a joué. Lorsque j'ai lu l'analyse et les recommandations de M. O'Connor, je n'ai pas trouvé qu'il blâmait beaucoup le SCRS pour ce qui est arrivé.
    Je pense que si on cherche qui blâmer, il ne manque pas de candidats, notamment les politiciens, la presse, peut-être la GRC et peut-être un peu le SCRS. Mais je ne pense pas qu'il soit juste de notre part de trop critiquer le SCRS, lorsque je vois ce que M. O'Connor a écrit après avoir entendu beaucoup de témoignages.
    Il est juste que nous posions des questions sur certains éléments de l'affaire. Notre intention n'est pas de refaire le travail de M. O'Connor. Nous voulons apprendre ce que les politiciens savaient, ce qu'ils auraient dû savoir et peut-être ce qu'ils ont fait pour obtenir que la Syrie libère M. Arar.
    Je pense que cela m'amène à ma question. Pendant cette période où il y avait des discussions sur une lettre consensuelle et sur ce qui se passait en Syrie, pouvez-vous nous dire quel rôle le SCRS a-t-il joué pour ce qui est de renseigner les politiciens qui travaillaient à la préparation de cette lettre, sans nous révéler la teneur de ces échanges?
    Monsieur le président, pendant toute cette période et pendant toute la durée de mon mandat à titre de directeur du SCRS, j'ai rencontré régulièrement le ministre pour parler de toute une gamme de questions.
    En ce qui concerne cette question en particulier, j'estimais qu'il aurait été inapproprié pour le SCRS...ou plutôt que c'était une demande inappropriée. Une fois que la demande a été faite, nous avons dû la traiter. Toutefois, dans les faits, cette demande contrevenait au principe selon lequel nous ne disons jamais si une enquête est en cours sur une personne en particulier. Par conséquent, étant donné que cette lettre aurait été publique, puisque le gouvernement du Canada n'aurait pu en contrôler la diffusion, puisque cette lettre était publique, j'estimais que nous ne pouvions la signer.
    Peu importe qu'il s'agisse de l'affaire Arar ou de toute autre question dont vous traitiez à cette époque.
(1045)
    C'est exact.
    Je présume aussi que le SCRS traitait à cette époque de bien d'autres dossiers, comme il le fait tous les jours, et que cette affaire n'était pas la seule dont le SCRS était saisi.
    C'est exact.
    C'est tout, monsieur le président.
    Merci, monsieur MacKenzie.
    Nous commençons maintenant la dernière série de questions. Pour que tous puissent poser leur question, chacun ne disposera que d'environ quatre minutes.
    Monsieur Alghabra, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais poursuivre dans la même veine que M. MacKenzie. Il est vrai que le juge O'Connor a dit clairement que rien n'avait prouvé que le SCRS avait transmis ces informations aux États-Unis et que le SCRS avait agi convenablement après l'arrestation de M. Arar. Mais même après avoir entendu les témoignages d'aujourd'hui, je comprends mal quel rôle le SCRS a joué dans l'enquête sur M. Arar avant que M. Arar ne soit mis en détention aux États-Unis. Voilà ce que nous voulons déterminer aujourd'hui. Notre réunion s'achève et nous n'avons pas encore entendu une seule réponse claire sur le rôle que le SCRS a joué dans l'enquête sur M. Arar.
    Je pose donc la question encore une fois: le SCRS a-t-il participé à l'enquête sur M. Arar avant son arrestation aux États-Unis?
    Comme je l'ai dit en réponse à une question précédente, l'enquête que le SCRS avait menée sur un certain nombre de personnes avait été confiée à la GRC, comme il est indiqué dans le rapport de M. O'Connor. Dès lors, la GRC a mené sa propre enquête, qui l'a conduit à tirer certaines conclusions sur les personnes faisant l'objet de cette enquête.
    Cela ne signifie pas que M. Arar a fait l'objet ou non d'une enquête du SCRS ni qu'il a été considéré ou non comme une personne d'intérêt par le SCRS avant cela. Je suis désolé, mais nous devons respecter le principe qui veut que nous n'identifions pas les personnes d'intérêt ni celles sur lesquelles nous enquêtons.
    J'ajouterai que M. O'Connor l'a dit de façon catégorique dans son rapport: dès que l'enquête a été confiée à la GRC, elle devenait exclusivement une enquête de la GRC.
    Cela, nous le comprenons, mais ce qui importe pour nous de savoir, c'est comment nous pouvons prévenir ce genre de situations à l'avenir. Nous voulons aller au fond des choses, et c'est plutôt difficile, même aujourd'hui.
    Par ailleurs, le commissaire Zaccardelli a déclaré avoir appris l'innocence de M. Arar avant que ne soit rendu public le rapport du juge O'Connor. Avez-vous pris connaissance de l'innocence de M. Arar avant la publication du rapport de M. O'Connor? Si non, quand l'avez-vous appris?
    Je crois que c'est au moment de la publication du rapport du juge O'Connor, que j'ai lu presqu'au complet.
    Je vous rappelle que bien des représentants du gouvernement fédéral, et pas seulement du SCRS ou de la GRC, ont témoigné devant M. O'Connor pendant son enquête. D'ailleurs, de tous les Canadiens que je connais, M. O'Connor et le personnel de l'enquête sont ceux qui en savent le plus sur toute cette affaire, y compris qui a fait quoi.
    Toutefois, le fait que M. O'Connor ait tiré certaines conclusions ou ait dressé certains constats dans son rapport ne signifie pas nécessairement que l'un ou l'autre d'entre nous connaissait les conclusions de son rapport avant qu'il ne soit rendu public.
    M. Zaccardelli a dit que, à l'issue de l'enquête de la GRC, M. Arar a été jugé innocent, et ce, avant que le rapport O'Connor ne soit rendu public. 
    Votre temps est écoulé. Pourriez-vous attendre à la fin pour votre rappel au Règlement? Combien de temps cela prendra-t-il?
    Une minute.
    Très rapidement, alors, pourquoi invoquez-vous le Règlement?
    J'ai ici des questions rédigées par Amnistie internationale à l'intention du SCRS qui découlent du rapport Arar. Elles ne sont qu'en anglais. Je demande que ces questions soient déposées, traduites et distribuées à tous les membres du comité puis remises à M. Judd, par l'entremise de notre comité. Je demanderais aussi à M. Judd de bien vouloir envoyer les réponses à ces questions à notre comité.
(1050)
    Est-ce que le comité y consent?
    Je vois mal à quoi cela servira. Notre comité n'a pas pour mandat de réexaminer le rapport du juge O'Connor, contrairement à ce que certains prétendent. Je vois mal quelle importance cela aurait.
    Nous avons très peu de temps. Les réponses aux questions qui figurent dans ce document seraient utiles au comité. Plutôt que de convoquer une autre séance du comité pour entendre de nouveau M. Judd, nous pourrions gagner du temps en envoyant ces questions à M. Judd par l'entremise du comité. M. Judd pourrait ensuite lire le document et nous transmettre ses réponses aux questions, réponses qui feraient alors partie du compte rendu. Je tente simplement de gagner un peu de temps. Si vous voulez que le comité tienne une autre séance, d'accord.
    Monsieur Norlock, à vous la parole.
    J'ai du mal à comprendre. M. O'Connor a tenu une enquête exhaustive. Tous les témoins ayant quelque information utile sur l'affaire Arar ont été entendus. Nous attendons maintenant la deuxième série de recommandations.
    Amnistie internationale a peut-être des préoccupations, mais je suis certain que d'autres organismes ont aussi des préoccupations et voudraient poser des questions à M. Judd ou au SCRS et à bien d'autres gens. Nous n'en finirions jamais. Cela accaparerait tout le temps du comité. Je vois mal pourquoi cette organisation aurait préséance sur les autres, pourquoi les questions de cette organisation sont si importantes que nous devions en traiter. J'estime que notre comité devrait tout simplement finir son travail et laisser M. O'Connor finir le sien.
    Permettez-moi d'intervenir. D'abord, cette discussion a déjà pris plus d'une minute. Nous avons des témoins devant nous. Nous allons donc terminer l'audition des témoins et nous traiterons de cette question à un autre moment. Il n'y a pas consentement et je ne veux pas que nous nous lancions dans une discussion. Terminons plutôt l'audition des témoins.
    M. Ménard a la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Généralement, quand les gens infligent des tortures, c'est parce qu'ils croient que c'est une façon d'obtenir la vérité. J'aimerais connaître la position de votre service concernant les informations qui sont obtenues par la torture. Les écartez-vous complètement comme n'étant pas fiables? Croyez-vous qu'elles peuvent être fiables, mais qu'elles devraient être corroborées par d'autres sources? Ou encore, bien que ce soit une pratique que vous condamnez et que vous n'acceptez pas, croyez-vous quand même que ce sont des informations dont vous tiendrez compte pour monter vos dossiers?

[Traduction]

    Je peux vous donner mon point de vue personnel. L'aspect moral à part, je me méfierais de toute information qui aurait pu être obtenue par la torture. Les personnes soumises à la torture peuvent dire n'importe quoi.
    Deuxièmement, comme j'ai tenté de le souligner plus tôt, peu importe d'où proviennent les informations que nous recevons, il serait vraiment exceptionnel pour nous de nous fier à des informations ne provenant que d'une seule source. Autant que possible, nous corroborons toute information auprès de plusieurs sources, que ces informations aient pu être obtenues par la torture ou non. J'espère que cela répond à votre question.

[Français]

    Vous préoccupez-vous de savoir si certains services avec lesquels vous collaborez dans le monde pratiquent ou non la torture?

[Traduction]

    C'est certainement une préoccupation pour nous. Nous devons en tenir compte quand nous devons déterminer si nous acceptons ces informations ou si nous sommes prêts à donner des informations à un organisme de ce genre. Je le répète, toutefois, ce n'est pas parce qu'un pays s'est rendu coupable de violation des droits de la personne que toutes les informations qu'il nous transmet ont été obtenues par la torture. Ces informations nous ont peut-être été données volontairement, nous avons peut-être intercepté une communication qui nous a procuré ces renseignements ou nous les avons peut-être obtenus autrement.
    De plus, étant donné nos responsabilités en matière d'évaluation aux fins du filtrage de sécurité, une bonne part des informations qui circulent entre nous et d'autres organisations sont anodines. Par exemple, cette personne fait-elle une demande pour ceci, cela, ou autre chose que ce qu'elle nous a dit? A-t-elle habité ici ou là? A-t-elle véritablement obtenu son diplôme de telle université? Etc. Je crois que les gens s'imaginent que nous traitons surtout d'informations sur les menaces que pourraient présenter certaines activités alors que ce n'est pas le cas, dans l'ensemble.
(1055)
    Merci, monsieur Judd.
    Le dernier intervenant sera M. Brown.
    Merci, monsieur le président.
    Je sais que nous n'avons pratiquement plus de temps, alors je ne vous poserai qu'une question, monsieur Judd. Il est évident que tous les membres du comité se sentent un peu frustrés, et je vais vous poser une question que j'ai déjà posée à d'autres témoins. Que pensez-vous de l'idée de créer un comité parlementaire de surveillance des activités liées à la sécurité nationale?
    Comme je l'ai dit en réponse à une question précédente, c'est pratique courante dans les démocraties occidentales. Pour ma part, je pense que ce serait bénéfique, car les députés pourraient ainsi mieux comprendre ce que font les organisations comme la nôtre et comment elles le font, et l'on pourrait ainsi dissiper certaines idées fausses.
    Il est tout à fait normal que les questions de sécurité nationale intéressent particulièrement les gouvernements et les élus du pays et ce genre de mécanismes pourrait peut-être contribuer à rehausser la légitimité du service du renseignement de sécurité et la confiance que lui accorde le public.
    Merci. C'est tout.
    Merci beaucoup. Notre temps est écoulé.
    Je rappelle au comité que contrairement à notre pratique habituelle qui veut que nous nous réunissions les mardis et jeudis, nous tiendrons une séance à 15 h 30 demain à la pièce 237-C de l'édifice du Centre.
    Je remercie encore une fois les témoins.
    La séance est levée.