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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 047 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 31 mai 2007

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Le Comité permanent de la sécurité publique et de la sécurité nationale tient sa réunion numéro 47. Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude du programme de protection des témoins.
    Nous voudrions saluer les personnes qui vont témoigner par téléconférence. Nous avons le plaisir d'accueillir le directeur adjoint principal, Office of Enforcement Operations, Criminal Division, United States Department of Justice, M. Gerald Shur. Bienvenue, monsieur.
    Nous souhaitons également accueillir, par vidéoconférence, M. Nick Fyfe, directeur du Scottish Institute for Policing and Research et professeur de géographie humaine, University of Dundee.
    Pouvez-vous nous entendre, monsieur?
    C'est également un plaisir de vous avoir avec nous.
    Monsieur Shur, vous pouvez faire une déclaration préliminaire, mais je crois que ce n'est peut-être pas votre intention.
    Je désire simplement vous remercier de m'avoir invité à partager avec vous mon expérience aux États-Unis et essayer de vous être le plus utile possible. J'apprécie votre invitation.
    Merci beaucoup d'avoir accepté de venir nous informer. Je suis sûr que ce sera très intéressant et très utile pour notre étude.
    Si nous pouvons maintenant passer à l'University of Dundee, monsieur Fyfe, êtes-vous prêt à faire une déclaration préliminaire?
    Oui, je suis prêt.
    Bienvenue. Commencez quand vous serez prêt.
    Merci beaucoup de m'avoir invité à prendre la parole devant votre comité.
    Dans ma déclaration, je voudrais aborder trois sujets généraux: premièrement, ma propre expérience des questions touchant la protection des témoins; deuxièmement, je voudrais parler un peu de l'expérience au Royaume-Uni et de ce qui la distingue de la protection des témoins dans d'autres pays d'Europe; et troisièmement, je voudrais aborder quelques questions générales concernant l'efficacité de la protection des témoins et la question de la légitimité.
    Tout d'abord, pour ce qui est de ma propre expérience, la première fois que je me suis intéressé à la protection des témoins, c'était dans le cadre d'une recherche réalisée pour le gouvernement écossais. Il s'agissait d'une évaluation approfondie du programme de protection des témoins de la police de Strathclyde, en Écosse, à laquelle ont participé des policiers, des témoins protégés et des membres de la magistrature.
    Ensuite, un deuxième projet que j'ai entrepris pour le ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni consistait à étudier des moyens de faciliter la coopération des témoins dans les affaires impliquant le crime organisé et cette enquête comprenait une comparaison de la protection des témoins au Royaume-Uni et dans d'autres pays d'Europe, aux États-Unis, au Canada et en Australie. Voilà mon expérience en la matière.
    Je voudrais parler un peu de l'expérience au Royaume-Uni. Au Royaume-Uni, la protection des témoins a commencé dans les années 70 au sein de la police métropolitaine de Londres et du Royal Ulster Constabulary. La plupart des témoins protégés étaient impliqués dans le crime organisé et le terrorisme.
    Pendant les années 80 et 90, un nombre de plus en plus important de forces policières du Royaume-Uni ont établi leurs propres programmes de protection des témoins, surtout dans le contexte du crime organisé et particulièrement des affaires de drogues pour lesquelles les témoins étaient victimes de meurtre ou de tentative de meurtre. Finalement, les forces policières de tout le Royaume-Uni se sont dotées de leurs propres programmes de protection des témoins.
    L'événement le plus important en ce qui concerne le Royaume-Uni a eu lieu en 2005, lorsque le gouvernement a adopté le Serious Organised Crime and Police Act, qui inclut un article sur la protection des témoins et d'autres personnes. Cette loi a défini l'admissibilité à la protection, les pouvoirs de la police de prendre des dispositions avec d'autres forces policières pour protéger les témoins et l'obligation des autres organismes d'aider la police à relocaliser les témoins.
    Les dispositions prévues au Royaume-Uni sont, dans une large mesure, calquées sur le modèle du Federal Witness Security Program, des États-Unis, que vous connaissez sans doute ou dont M. Shur vous parlera plus en détail.
    J'aurais quatre choses à dire en ce qui concerne la comparaison entre la protection des témoins au Royaume-Uni et ailleurs dans le monde.
    Il y a d'abord les critères d'admissibilité qui définissent qui peut participer à un programme de protection des témoins. Nous avons constaté, lorsque nous avons examiné la protection des témoins au niveau international, que tous les pays insistent sur le risque pour le témoin, la nature de la procédure au cours de laquelle le témoignage a lieu, l'importance du témoignage et la capacité d'adaptation du témoin à un programme de protection.
    Il y a des différences importantes, d'un pays à l'autre, en ce qui concerne le rôle que la police, la magistrature et le gouvernement jouent dans la décision d'inclure un témoin dans un programme de protection. Le Royaume-Uni permet que ces décisions soient prises par les chefs de police, comme le Canada et l'Australie, mais si vous prenez un pays comme la Belgique, la décision d'inclure un témoin est prise par un comité constitué de procureurs publics, de policiers et de membres des Départements de la Justice et de l'Intérieur. Si vous prenez l'Italie, il y a une commission centrale présidée par le sous-secrétaire d'État et qui comprend des juges et des experts dans le domaine du crime organisé.
    Il y a donc des différences importantes dans la façon dont ces décisions sont prises.
(1105)
    Il y a aussi d'importantes différences d'un pays à l'autre en ce qui concerne le type de protection et de soutien que la loi confère aux témoins. Si vous prenez le cas du Royaume-Uni, aucune loi ne spécifie quelle est la protection offerte. Par contre, comme c'est le cas au Canada, en Australie et ailleurs, la loi est très précise quant au genre de soutien et de protection qui sont disponibles.
    Enfin, il y a des différences très importantes d'un pays à l'autre en ce qui concerne l'architecture institutionnelle des programmes de protection des témoins. Au Royaume-Uni, la protection des témoins est largement une question locale du ressort des chefs de police, alors que les autres pays ont des programmes de protection nationaux ou fédéraux. Si vous prenez la France et l'Italie, vous constaterez que la protection des témoins y est organisée au niveau régional. Néanmoins, en Europe, on cherche, par l'entremise de l'organisation de la police européenne, Europol, à coordonner la mise en place de pratiques exemplaires dans les différents pays d'Europe.
    Mes dernières observations portent sur deux questions plus générales concernant la protection des témoins. La première est la façon dont nous évaluons son efficacité et la deuxième sa légitimité telle qu'elle est perçue. Pour ce qui est des mesures d'efficacité, le travail que j'ai réalisé démontre qu'au Royaume-Uni, la protection des témoins a été très efficace pour assurer la sécurité physique des témoins et améliorer l'efficacité des enquêtes en éloignant la responsabilité de protéger les témoins de l'équipe d'enquête pour la confier à une unité spécialisée.
    Les programmes de protection des témoins du Royaume-Uni ont peut-être été moins efficaces pour ce qui est de répondre aux besoins sociaux des témoins. L'un des principaux défis de ces programmes est d'assurer le bien-être social des témoins à long terme en leur apportant un soutien et en les aidant à faire face aux problèmes psychologiques qu'entraîne la vie dans un nouveau milieu.
    Un des autres problèmes touchant l'efficacité dont certaines personnes ont parlé est celle de savoir si la protection des témoins ne risque pas de déplacer l'attention de ceux qui voudraient s'en prendre aux témoins vers d'autres groupes et particulièrement vers les jurés. En investissant toutes nos ressources dans la protection des témoins, ne risquons-nous pas de déplacer le problème de l'intimidation des témoins vers d'autres groupes? Je pense que c'est une question dont il faut discuter.
    La dernière question que j'aborderais — et là encore les recherches formulent des hypothèses à ce sujet — est la légitimité des programmes de protection des témoins, telle qu'elle est perçue. Certains personnes ont soulevé des questions au sujet de la moralité et de l'équité envers le public des programmes qui relocalisent des gens ayant généralement un lourd passé criminel et que l'on place dans des collectivités dont les membres ignorent, la plupart du temps, le passé des personnes en question. Je pense qu'on s'inquiète de la façon dont les citoyens percevraient les programmes de protection des témoins, et pourraient craindre pour leur propre sécurité s'ils vivent dans des collectivités où des témoins ont été relocalisés.
    Voilà qui termine ma déclaration préliminaire.
    Merci beaucoup.
    Normalement, les membres du comité posent des questions. J'espère que vous pourrez le faire tous les deux. Je ne suis pas certain que l'opposition officielle soit prête à participer.
(1110)
    Monsieur le président, j'avais malheureusement une autre réunion avant celle-ci. Je vais passer ce tour, mais je participerai au suivant.
    Très bien.
    Monsieur Ménard.

[Français]

    D'abord, je voudrais m'assurer que la traduction fonctionne bien.

[Traduction]

    Oui, elle fonctionne bien, merci.

[Français]

    Ce que j'aime de la traduction instantanée, c'est que quand je fais une blague, les gens la rient deux fois.
    Des voix: Ah! ah!
    M. Serge Ménard:Je crois comprendre qu'elle fonctionne. Merci.
    Je suis membre du Bloc québécois, qui a certaines affinités avec le Scottish National Party. Nous parlons d'un sujet pour lequel, au-delà des considérations politiques, nous poursuivons le même objectif: obtenir la collaboration de témoins importants.
    Il y a deux sortes de types de témoins qu'on veut protéger. Il y a ceux qui sont innocents et qui, s'ils témoignaient, risqueraient d'être intimidés, voire tués par les membres du crime organisé. Il y a également des témoins qui ont participé à des activités criminelles et qui, un jour, décident de collaborer avec la police en échange de peines moins sévères. Les Italiens ont une façon particulière de les appeler. Ils les appellent les «  témoins repentis ». C'est d'ailleurs l'expression que nous avons cherché à utiliser au Québec, mais la presse ne la comprenait pas toujours.
    J'ai beaucoup apprécié le document que vous nous avez envoyé et les comparaisons qu'il contient. Ces dernières sont très éclairantes sur les diverses façons dont on utilise le système de protection des témoins. Je ne crois pas que celui de l'Autriche nous inspirerait beaucoup.
    Au-delà des expériences que vous avez partagées avec nous et qui nous seront sûrement très utiles, j'aimerais savoir si votre expérience est la même que la nôtre sur un aspect. Plusieurs témoins à qui nous avons offert cette protection et une nouvelle identité, et qui ont pu aller vivre dans d'autres parties du Canada sont revenus chez eux. Généralement, leur retour se fait dans un délai d'environ deux ans.
    Avez-vous remarqué la même tendance chez les « témoins repentis »?

[Traduction]

    Oui, le même problèmes s'est posé au Royaume-Uni. Les témoins trouvent très difficile de refaire leur vie ailleurs. En général, ils viennent d'un milieu où tout le monde se connaît où ils ont leurs amis, leurs parents, etc., où tout le monde vit côte-à-côte. Ils ne sont donc pas aussi mobiles que les autres et ils ont énormément de difficulté à commencer une nouvelle vie dans un nouveau milieu.
    L'expérience du Royaume-Uni est donc très similaire à celle que vous décrivez. Les gens retournent chez eux, comme vous le dites, 18 mois ou deux ans plus tard, même s'ils savent qu'ils augmentent leurs risques. Mais ils préfèrent courir ces risques que d'avoir à subir le désarroi et les problèmes psychologiques que leur cause leur transplantation dans un milieu entièrement nouveau.
    Monsieur Shur, voulez-vous également répondre?
    Oui, je dirais que notre expérience est quelque peu différente. Notre programme a commencé à la fin des années 60. Il a commencé vers 1966-1967 et a été adopté officiellement en 1970.
    Pour répondre à cette question, nous avons relocalisé environ 8 000 témoins depuis le début, et probablement 14 000 ou 15 000 membres de leur famille, si bien qu'en tout, environ 22 000 à 23 000 personnes ont été relocalisées. D'autre part, 95 p. 100 de ces témoins ont été impliqués dans des activités criminelles d'une façon ou d'une autre, certains de très près, d'autre de façon accessoire.
    Un très petit nombre de nos témoins relocalisés sont retournés chez eux. Je dirais qu'il y en a eu moins de 100, mais je penserais même que ce chiffre est inférieur à 50. Nous avons eu le cas d'un témoin qui est renté chez lui alors qu'on lui avait conseillé de ne pas le faire. De retour à son domicile, lorsqu'il a ouvert sa porte, sa maison a sauté. Mais c'est un cas rare.
(1115)
     Merci.
    Allez-y, monsieur Ménard.

[Français]

    Cela va sûrement décourager les autres de l'imiter.
    Une de nos grandes préoccupations concernant ces témoins repentis, c'est-à-dire ceux qui ont déjà participé à des organisations criminelles et qui y retournent, est qu'il s'agit de ces personnes présentant une tendance particulière à la délinquance. Prenez-vous des mesures pour vous assurer que ces personnes ne reprendront pas leurs activités criminelles?
    Vos programmes comme les nôtres font en sorte que s'ils commettent un acte criminel, ils seront poursuivis et avertis. C'est une chose que de les avertir qu'ils n'échapperont pas à des condamnations pour d'autres crimes, mais c'en est une autre que de les surveiller et de les rencontrer pour s'assurer qu'ils ne sont pas dans un processus les incitant à commettre d'autres infractions.

[Traduction]

    Monsieur Fyfe, voulez-vous répondre?

[Français]

    J'aimerais savoir si vous prenez des mesures pour surveiller ces gens afin qu'ils ne soient pas tentés de commettre d'autres actes criminels.

[Traduction]

    Monsieur Fyfe, voudriez-vous répondre le premier?
    En ce qui concerne le Royaume-Unis, à ma connaissance, nous n'avons pas de mesures précisément dans ce but. On n'aide pas les gens à exploiter une nouvelle entreprise et je crois qu'on ne les aide même pas à trouver un nouvel emploi, à présenter leur candidature ou pour ce genre de choses. Il y a un aspect particulier qui a causé quelques difficultés par le passé. Lorsque les gens ont été relocalisés dans une nouvelle ville, ils ont eu beaucoup de difficulté à obtenir des références de leur ancien employeur pour trouver un emploi et je pense que plusieurs forces policières du Royaume-Uni ont commencé à trouver des moyens de les aider sur ce plan-là. Elles obtiennent des références, mais sans compromettre la sécurité des témoins.
    C'est très difficile et nous avons certainement constaté au Royaume-Uni qu'une forte proportion des témoins relocalisés qui ont des antécédents criminels reprennent leurs activités criminelles relativement peu de temps après leur relocalisation. Ils n'arrivent pas à renoncer au monde qu'ils connaissent le mieux et un grand nombre d'entre eux replongent relativement rapidement dans la criminalité.
    C'est une observation intéressante.
    Monsieur Shur, avez-vous une réponse à cette question?
    Oui.
    Premièrement, sur les 8 000 témoins qui ont été relocalisés — et c'était au niveau fédéral plutôt que d'un État ou d'une ville — le taux de récidive a été de moins de 18 p. 100. Je ne peux pas être plus précis, parce que chaque personne que j'ai appelée pour vérifier le taux de récidive m'a fourni un chiffre différent. Le plus élevé était de 18 p. 100. Le chiffre le plus bas, qui m'a été fourni par la personne la plus positive à qui j'ai parlé — était de 11 p. 100. Par conséquent, le taux de récidive se situe entre 11 p. 100 et 18 p. 100 pour ces 8 000 personnes.
    C'est peut-être en partie en raison de la procédure que nous suivons pour faire participer les témoins au programme. Premièrement, aux États-Unis, nous avons au ministère de la Justice un bureau appelé Office of Enforcement Operations qui a une unité de la sécurité des témoins chargée de déterminer qui doit participer ou non au programme fédéral de protection des témoins.
    Cette décision se fonde sur un grand nombre de renseignements fournis par diverses personnes, dont un psychologue, qui examine chaque témoin potentiel recommandé par l'agence d'enquête fédérale, ainsi que chaque membre de sa famille âgé de plus de 18 ans, pour déterminer si le témoin risque ou non de commettre un acte violent, dans quelle mesure il réussira à s'intégrer dans le programme, s'il serait capable de suivre les règles, le genre d'emploi dont il aura besoin, quelles sont ses compétences, etc. Les témoins font donc l'objet d'un examen psychologique approfondi.
    Il est assez difficile de savoir si l'on peut vraiment prédire, au moyen d'un test psychologique, si une personne risque d'être violente. J'ai parfois eu l'impression que mon intuition était aussi fiable que le test.
    D'autre part, nous recevons le casier judiciaire de l'intéressé. Nous recevons également un rapport du procureur des États-Unis. Il y a 93 procureurs des États-Unis qui sont les principaux responsables fédéraux de l'application de la loi dans leurs districts. Ils nous envoient un rapport sur l'affaire, le témoin et ses antécédents.
    Ensuite, nous demandons au United States Marshals Service de procéder à la relocalisation du témoin. Étant donné son rôle, il a la possibilité de questionner le témoin et sa famille à l'avance au cours de ce que nous appelons une entrevue préliminaire et il nous donne son opinion quant à savoir si ce témoin s'adaptera bien à sa nouvelle vie. Nous avons donc ces renseignements complémentaires.
    Nous profitons également de l'expérience du personnel de l'Office of Enforcement Operations qui s'occupe si souvent de ce genre de dossiers qu'il peut se faire une opinion.
    De tous ces facteurs, je pense que la sélection est un facteur déterminant très important pour ce qui se passe ensuite.
    Enfin, nous avisons le Federal Bureau of Investigation de la relocalisation de chaque témoin. Il y a donc un dossier. Si un service de police local demande des renseignements au sujet d'un témoin sous un nouveau nom, le FBI l'informera immédiatement de la véritable identité de l'intéressé. Je pense que c'est là un facteur de dissuasion pour le témoin.
(1120)
    Merci beaucoup.
    Comme le comité peut le voir, nous ne procédons pas comme d'habitude et nous ne sommes pas soumis aux contraintes de temps habituelles.
    Monsieur Comartin, c'est à vous. Présentez vous brièvement et posez ensuite votre question.
    Je vous remercie tous les deux pour votre présence ici.
    Je suis Joe Comartin, le député de Windsor—Tecumseh. J'appartiens au Nouveau Parti démocratique et je suis le critique de la justice ainsi que le critique de la sécurité publique de mon parti.
    Monsieur Shur, je voudrais revenir sur ce que vous avez dit au sujet de la sélection. Pourriez-vous nous indiquer le nombre ou le pourcentage de gens qui n'ont pas été jugés admissibles au programme?
    Je peux vous dire qu'environ 150 à 165 témoins se joignent au programme chaque année. Bien entendu, dans la plupart des cas, c'est en allant en prison. Nous avons des unités de détention protégée, qui sont des prisons à l'intérieur des prisons, des bâtiments dans lesquels il n'y a que des témoins — environ 70 témoins coopératifs détenus dans chaque unité — si bien que ces personnes ne circulent pas librement dans la société.
    Pour ce qui est du taux de rejet, c'est difficile à chiffrer, car il y a deux façons de rejeter un candidat. La première est officieuse et c'est la plus courante. L'enquêteur ou le procureur des États-Unis vous téléphone pour dire: « J'ai un cas que je voudrais vous présenter officiellement, mais avant de le faire, seriez-vous prêt à l'accepter? » Et vous dites alors « Non ». Comme ce n'est comptabilisé nulle part, nous n'avons pas ce chiffre. Deuxièmement, il y a les demandes officielles. Je dirais que pour les demandes officielles, le taux de rejet est d'environ 10 p. 100.
    Comme je l'ai dit, chaque année, le nombre total de témoins admis au programme est de 150 à 165 et une bonne proportion d'entre eux vont en prison tandis que leurs familles sont relocalisées. Quand je dis que 150 ou 160 personnes vont en prison, cela ne veut pas dire que le travail s'arrête là. Il faut les relocaliser.
(1125)
    Désolé, c'est M. Fyfe?
    Oui.
    Avez-vous une idée du taux de rejet au Royaume-Uni?
    Malheureusement pas. Je n'ai certainement pas accès à ce genre de données. La difficulté vient en parti du fait qu'au Royaume-Uni la protection des témoins reste une responsabilité locale et que ces renseignements sont détenus par les forces policières qui administrent les programmes de protection des témoins. Il n'y a pas de source d'information centralisée au sujet des témoins qui ont été admis dans ces programmes.
    Par conséquent, je n'ai certainement pas accès à ce genre de données.
    Monsieur Shur, vous avez été cité dans certains articles ici.
    Je le regrette.
    Je vais quand même vous questionner à ce sujet.
    Comme vous le savez tous les deux, je pense, nous procédons à cet examen suite à deux cas dont le plus récent est celui d'un témoin qui a commis un meurtre pendant qu'il était sous la protection du programme. Dans un de ces cas, la famille tient à obtenir des renseignements sur l'individu qui a tué un de ses membres.
    Monsieur Shur, selon les articles qui vous citent, aux États-Unis, dans ce genre de situation, le gouvernement communiquerait davantage de renseignements à la famille ou peut-être même au public.
    Pourriez-vous nous expliquer comment ce processus fonctionne aux États-Unis?
    Tout d'abord, je dois faire une mise au point, car j'ai discuté hier avec mon remplaçant. Je suis maintenant à la retraite. Je ne voudrais pas qu'il s'imagine que j'usurpe ses fonctions.
    J'ai discuté de cette question avec lui pour voir si les procédures étaient toujours les mêmes et elles n'ont pas changé. Le programme que nous avons à l'Office of Enforcement Operations nous laisse une grande marge de manoeuvre pour déterminer si les renseignements doivent être divulgués ou non, lorsque c'est approprié, quelles sont les règles à suivre, etc.
    Aux États-Unis, lorsqu'une personne qui a participé au programme commet un crime sous une nouvelle identité, l'affaire devient généralement publique parce qu'il y a un procès. Nos procès sont très publics. L'individu en question est poursuivi sous sa nouvelle identité. Souvent, son ancienne identité peut être mentionnée au cours de la mise en accusation. Il peut être désigné par ses deux noms, l'ancien et le nouveau, afin que le procureur soit certain de ne pas se tromper.
    Me permettez-vous de vous interrompre?
    Certainement.
    Si l'ancien nom est divulgué dans la mise en accusation, n'est-ce pas une infraction à la loi?
    Ce n'est pas une infraction à la loi.
    Également, nous pourrions avertir la police locale de l'ancienne identité du témoin lorsque nous le relocalisons afin qu'elle sache qui réside dans son secteur.
    Je ne suis pas très au courant du cas dont vous parlez, mais lorsqu'on suppose que le témoin a commis un crime et que la famille de la victime veut savoir qui est le coupable, notre législation oblige à dédommager les victimes. Autrement dit, nous devons offrir à la famille de toute victime qui est tuée une somme maximum de 25 000 $, je crois, pour couvrir les frais médicaux ou les frais funéraires, etc. La famille a certainement le droit de savoir qui est vraiment l'individu qui a tué un de ses membres.
    Ce qui est plus compliqué c'est que si la divulgation de ce renseignement risque de compromettre une enquête en cours, il se peut que nous attendions un peu pour le faire. Mais c'est très rare. Je ne me souviens pas que ce soit arrivé. C'est seulement une possibilité.
    Lorsque vous divulguez le nom à la famille, vous lui donnez une certaine paix d'esprit. Tout ce que cela coûte au gouvernement des États-Unis est qu'il faut de nouveau relocaliser la famille du témoin qui a commis le meurtre. La famille de la victime a donc la paix d'esprit et on assure la sécurité de la famille du témoin en la relocalisant une nouvelle fois. C'est le gouvernement des États-Unis qui subit une perte financière.
    Monsieur Fyfe, pensez-vous que la législation du Royaume-Uni permet ce genre de divulgation en pareilles circonstances?
(1130)
    Je suis pratiquement certain qu'il n'y a pas de loi précise à cet égard.
    Monsieur Shur, vous avez dit qu'aux États-Unis le taux de récidive maximum était d'environ 18 p. 100. Y a-t-il des statistiques officielles à ce sujet? Cela fait-il l'objet d'une analyse constante?
    Oui, des analyses ont été faites, certaines par échantillonnage et d'autres par des organismes autres que le nôtre qui ont examiné les dossiers. Je pense que le chiffre de 18 p. 100 est un chiffre fiable qui provient de l'extérieur.
    Très bien.
    Savez-vous si ces 18 p. 100 englobent des meurtres?
    Oui, il y en a eu.
    Avez-vous une idée de la proportion des 150 ou 160 témoins qui sont incarcérés chaque année?
    Il s'agit plutôt de 18 p. 100 des 8 000 témoins.
    Très bien.
    C'est sur le nombre total. Je ne peux pas vous dire quelle est la proportion des 160 ou 165 personnes en question, mais c'est 18 p. 100 du nombre total.
    Pour ce qui est des meurtres, il y en a eu quelques-uns. Je suppose qu'il y a davantage d'infractions touchant les stupéfiants, par exemple. Nous sommes actuellement en transition, comme la plupart des pays, je pense, pour ce qui est du type de témoins qui participent au programme. Au départ, c'était des membres du crime organisé traditionnel, puis des membres de gangs de trafiquants de stupéfiants, des gangs commettant des crimes haineux, etc.
    Monsieur le président, si mes réponses sont trop longues, dites-le moi, car j'ai tendance à trop parler.
    Ces renseignements sont très importants, monsieur. Nous n'avons donc pas les mêmes contraintes de temps que d'habitude.
    Pourriez-vous poser votre dernière question, monsieur Comartin?
    Merci, monsieur le président.
    Je vais poser ma dernière question, du moins pour ce tour-ci, à nos deux témoins.
    Si un témoin a commis un grave crime violent, est-il automatiquement exclu du programme ou s'expose-t-il à d'autres conséquences en ce qui concerne le programme?
    Je crois qu'au Royaume-Uni, un témoin qui commet un crime grave est immédiatement exclu du programme de protection. Le protocole d'entente conclu entre les témoins et la police qui les protège précise bien que toute forme d'activité criminelle mettra fin à la protection assurée par la police. C'est ce qui se passerait au Royaume-Uni.
    Qui prend la décision de cesser la protection?
    C'est le chef de la force policière qui offre la protection.
    Quelle est la situation aux États-Unis?
    L'exclusion du programme sera immédiate, en tout cas dès la condamnation, mais probablement avant.
    Pour ce qui est de prendre la décision, je peux vous donner un exemple montrant avec quelle rapidité elle peut être prise. Un jour, un directeur de prison m'a téléphoné au sujet d'un détenu incarcéré dans une unité de protection des témoins qui avait fait des appels téléphoniques obscènes à des jeunes filles. Je lui ai demandé: « Êtes-vous certain que c'est lui? » Bien entendu, les autorités carcérales enregistrent les appels des détenus. Il m'a répondu: « Oui, je suis absolument certain que c'est lui ». Je lui ai alors répondu: « Dans ce cas, il est exclu du programme de protection des témoins ». On l'a fait sortir de l'unité de protection, il a été placé en isolement quelque part et ensuite il est parti dans une autre prison.
    Qui a pris la décision…?
    C'est moi.
    C'est toujours…?
    C'est toujours le cas.
    Merci, monsieur Shur.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Mme Barnes. Veuillez, s'il vous plaît, vous présenter brièvement.
    Merci beaucoup.
    Je m'appelle Sue Barnes. Je suis députée de London, en Ontario, plus précisément de London-Ouest et je suis la critique de la sécurité publique pour l'opposition officielle qui est actuellement le Parti libéral du Canada.
    Merci beaucoup. Encore une fois, veuillez m'excuser de mon retard. Merci de nous avoir fourni ces tableaux et ce document. Nous l'apprécions beaucoup.
    Je voudrais poser certaines questions concernant les appels. Est-ce qu'un de vos deux pays ou, à votre connaissance, d'autres pays ont une procédure d'appel lorsqu'un témoin est exclu du programme? Je ne parle pas nécessairement d'un nouvel acte criminel que le témoin commet pendant qu'il est sous la protection du programme, mais du non respect d'autres conditions qui peuvent faire partie du protocole d'entente. Savez-vous s'il est possible de faire appel de cette décision? Dans l'affirmative, quelle est la durée du processus? D'autre part, est-ce la même partie qui reçoit l'appel?
(1135)
    Monsieur Shur, voudriez-vous commencer?
    Nous avons une procédure d'appel.
    Tout d'abord, je tiens à vous remercier de nous avoir permis, ma femme, mes enfants et moi, de vivre une expérience tout à fait délicieuse. Était-ce bien le parc provincial Fanshawe? Nous l'avons visité il y a de nombreuses années, et s'il existe toujours, cela nous a beaucoup plu.
    Merci. Nous nous ferons un plaisir de vous accueillir de nouveau.
    Merci.
    Nous avons une procédure d'appel. Le programme est administré par le United States Marshals Service et non pas par mon groupe de la division pénale qui est entièrement constitué d'avocats, de procureurs et d'analystes du renseignement.
    Lorsqu'il y a appel, c'est suite à une mesure prise soit par un employé du U.S. Marshals Service ou un procureur qui travaille pour un procureur des États-Unis. En fait, nous jouons le rôle d'ombudsman et c'est nous qui décidons qui peut participer au programme. Nous tranchons les différends entre les témoins et les personnes à qui ils ont affaire. Les témoins peuvent faire appel à un tribunal de district fédéral.
    Monsieur Fyfe, avez-vous une réponse à cette question?
    Oui. Au Royaume-Uni, la situation est très différente et je pense que cela reflète en partie la façon dont la protection des témoins a évolué, c'est-à-dire de façon très improvisée, sans cadre législatif, jusqu'à relativement récemment. Chaque corps de police prend ses propres dispositions. J'ai certainement pu constater, dans le cadre du travail que j'ai fait en Écosse pour le programme de protection des témoins de la police de Strathclyde, qu'il n'y avait aucune procédure d'appel officielle et que les témoins se sentaient très vulnérables. Si les choses commençaient à aller mal, les seules personnes avec qui ils avaient un contact immédiat étaient les policiers chargés de leur protection. Ils n'avaient aucun contact direct avec les hauts gradés de la police ou qui que ce soit d'autre et ils se sentaient donc très vulnérables. Ils devaient veiller à entretenir de bonnes relations avec les policiers chargés de leur protection, car autrement ils se seraient sentis extrêmement isolés.
    Lorsque j'ai étudié le programme de protection en question, les témoins n'avaient aucune procédure d'appel officielle à leur disposition s'ils se sentaient menacés ou s'ils étaient exclus du programme.
    Dans le rapport annuel canadien pour 2005-2006, il est mentionné que la GRC a accepté des témoins d'autres pays dans son programme de protection. Nous n'avons pas d'autres renseignements pour des raisons de sécurité, j'en suis sûre. Je voudrais néanmoins savoir si, à votre avis, la coopération internationale est très développée ou au contraire peu développée ou si vous avez eu connaissance de problèmes concernant la relocalisation internationale.
    Monsieur Shur, voudriez-vous répondre le premier?
    Oui.
    Allez-y.
    J'espérais que ce serait M. Fyfe afin que j'aie le temps de réfléchir, mais j'ai une réponse à vous donner.
    Nous pouvons demander à M. Fyfe s'il est prêt.
    J'essayais de voir comment vous répondre tout en ne répondant pas vraiment.
    Un tiers de tous les témoins qui ont participé à notre programme au cours des cinq dernières années étaient des ressortissants étrangers. Je ne voudrais pas que vous pensiez qu'il s'agit d'étrangers que nous avons fait venir d'autres pays, mais je ne peux pas en dire beaucoup plus.
    Merci.
    Monsieur Fyfe, avez-vous une réponse à cette question?
    À ma connaissance, il y a beaucoup plus de mouvements de témoins entre les pays, surtout en Europe, que ce n'était le cas par le passé. Il y a un réseau d'agents de liaison de la protection des témoins qui se réunit régulièrement en Europe pour discuter des bonnes pratiques à suivre.
    Europol a servi de tribune pour promouvoir un mouvement plus efficace des témoins entre les États européens. J'ai l'impression que c'est une pratique plus courante. On élabore des procédures et des pratiques pour rendre ce processus le plus efficace possible.
(1140)
    Madame Barnes.
    Je ne pense pas que de nombreux pays en ont déjà fait l'expérience, mais je me demande si nous ne devrions pas faire quelque chose pour protéger les jeunes. Je pense particulièrement au cas d'un jeune d'un certain milieu qui est témoin d'un crime, surtout si cela implique des gangs et de la violence.
    Ici, nous avons toujours parlé de la protection des témoins comme si elle était réservée aux adultes, mais dans certaines communautés, les gens hésitent à parler et il semble important de protéger les jeunes. Ce n'est pas un domaine très développé.
    Je voudrais savoir ce que vous en pensez et si vous connaissez un pays qui s'est penché sur le problème. Cela s'adresse à l'un ou l'autre des témoins.
    Monsieur Fyfe, voulez-vous commencer?
    J'aurais également aimé avoir le temps d'y réfléchir. Cela semble être une question importante et, à ma connaissance, rien n'est fait à ce sujet au Royaume-Uni. De toute évidence, cela soulève des questions très importantes.
    Lorsque vous relocalisez des familles, il a toujours été problématique de changer les jeunes d'école en veillant à ce que cela cause le moins de perturbations possible. Tout ce que je peux dire, c'est qu'il s'agit d'un sérieux problème à explorer de plus près.
    Monsieur Shur, avez-vous quelque chose à dire?
    J'ai eu l'occasion de le faire. Une jeune fille de 17 ans avait vécu seule et de temps à autre avec son père. Elle possédait des renseignements sur un crime que nous avions besoin de présenter au tribunal. Elle avait peur de son père et ce dernier ne s'opposait pas à ce qu'elle quitte la maison. En fait, elle avait quitté la maison. J'ai donc pris des dispositions pour qu'elle comparaisse devant le tribunal compétent pour se faire déclarer majeure. Elle a ainsi obtenu le statut d'adulte. Nous avons alors pu la relocaliser et lui trouver un emploi. C'est ce qui s'est passé dans ce cas.
    Dans un autre cas, le témoin, le père, était en prison. Les enfants étaient victimes de violence. Ils n'avaient pas de mère. Nous avons placé les enfants en famille d'accueil pendant que le père était en prison.
    C'est tout le temps que j'ai?
    Vous pouvez seulement poser une brève question.
    C'est une question très brève que je pose surtout par curiosité. Dans le grand public, il y a des divorces. Que se passe-t-il en cas de divorce lorsque toute la famille a été relocalisée? Le conjoint se contente-t-il de partir ou que se passe-t-il?
    Il y a parfois des situations étranges. Nous avons eu un témoin qui nous a demandé de le relocaliser, lui et sa maîtresse, mais pas sa femme qui était en danger.
    Je n'aurais pas dû poser cette question.
    Malheureusement, quand vous avez 8 000 témoins, tous les scénarios imaginables se produisent.
    Dans le cas d'un témoin, nous avons relocalisé sa femme et sa maîtresse et cette dernière est allée vivre là où nous avions relocalisé la mère du témoin. Nous relocalisons toute personne qui risque d'être en danger suite au témoignage du témoin, et cela peut donc être aussi bien les grands-parents que qui que ce soit d'autre. Je pense que notre relocalisation la plus importante iincluait 20 à 25 personnes d'une même famille.
    Pour ce qui est du mariage, la principale source de conflits est le droit de visite auprès des enfants, ce qui pose un sérieux problème. Comment organiser ces visites ordonnées par le tribunal lorsque l'autre conjoint est un citoyen respectueux des lois et que le conjoint relocalisé s'est remarié et a obtenu une ordonnance du tribunal local qui lui accorde la garde des enfants?
    Nous organisons des visites. Les enfants sont accompagnés par les marshals des États-Unis et c'est ce que nous appelons des visites en terrain neutre. Les enfants sont emmenés à Disneyland et la mère qui veut les voir se rend à Disneyland. Elle ne sait pas où vit son ex-mari, mais elle peut voir ses enfants.
    Nous respectons l'ordonnance des tribunaux. Quelle que soit l'ordonnance du tribunal de la famille, nous la respectons.
(1145)
    Monsieur Fyfe, avez-vous quelque chose à dire avant que nous ne passions à quelqu'un d'autre?
    Je voudrais simplement insister sur ce que M. Shur vient de dire. Une des principales difficultés que nous avons au Royaume-Uni, c'est de préserver l'accès aux enfants lorsque les parents sont séparés. Comme M. Shur l'a expliqué, cela pose de nombreux problèmes logistiques pour que la visite ne compromette pas la sécurité des personnes en cause.
    Monsieur Shur, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Oui, s'il vous plaît. Pourrais-je ajouter un détail important, que j'ai oublié, et qui concerne la pension alimentaire pour les enfants?
    Si le parent qui a été délocalisé doit payer une pension alimentaire sur l'ordre du tribunal, le United States Marshals Service lui fournit une allocation de subsistance. Si l'ordonnance de pension alimentaire est également prononcée à l'endroit où vivent sa femme et ses enfants, le Marshals Service paie la pension alimentaire.
    Autrement dit, elle n'est pas déduite de l'allocation de subsistance. La pension alimentaire pour les enfants est versée en plus de celle que reçoit la famille afin que cette dernière ne subisse pas les conséquences de la relocalisation.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer de l'autre côté de la table.
    Du côté ministériel, monsieur MacKenzie, pourriez-vous, s'il vous plaît, vous présenter brièvement avant de poser votre question.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Fyfe et monsieur Shur, pour votre présence ici.
    Je m'appelle Dave MacKenzie. Je suis le député de la circonscription d'Oxford, en Ontario, qui est à côté de celle de Mme Barnes. Sa ville est l'une de nos banlieues.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Dave MacKenzie: Je suis le secrétaire parlementaire du ministre de la Sécurité publique.
    Monsieur Fyfe, je crois que vous avez dit, au début, que la Grande-Bretagne n'a pas de politique nationale à cet égard.
    C'est exact. La protection des témoins relève du corps de police local. Il prend ses propres dispositions. Nous n'avons pas de programme national pour la protection des témoins.
    Les services de police locaux qui ont des programmes de relocalisation, les financent-ils eux-mêmes? Est-ce financé par ces autorités locales?
    Oui, c'est financé sur le budget de la police locale qui doit donc trouver les ressources nécessaires pour ces programmes.
    Encore une fois, une difficulté bien réelle au Royaume-Uni vient du fait que cela entraîne beaucoup de dédoublements. Les témoins sont relocalisés dans une autre région du pays et au lieu d'être confiés aux autorités de cette région, les services de police qui déplacent les témoins se chargent eux mêmes de les réinstaller dans une autre ville.
    Il y a eu de nombreuses discussions quant à savoir s'il est possible d'améliorer le processus en créant un programme national ou des programmes régionaux au lieu de compter uniquement sur ces dispositions locales improvisées.
    Lorsque ces personnes sont réinstallées ailleurs, informe-t-on les autorités locales de la présence d'une personne relocalisée et de ses antécédents?
    La police de la région où la personne est transférée est informée qu'un témoin protégé et sa famille sont relocalisés dans son secteur, en effet.
    Monsieur Shur, si j'ai bien compris, aux États-Unis il y a le programme national dans lequel vous avez joué un rôle, il y a également quelques programmes au niveau de l'État ainsi que certains programmes au niveau local…
    C'est vrai.
    … qui pourraient fonctionner de la même façon, mais qui sont entièrement différents.
    Ils sont généralement plus limités, mais similaires.
    D'après ce que vous avez dit, je suppose que le programme national dont vous avez parlé et dont vous vous êtes occupé est financé par le gouvernement fédéral.
    C'est exact.
    Par conséquent, lorsque vous parlez de certaines de ces dépenses… Si j'ai bien compris ce que vous avez dit, un bon nombre des personnes qui participent aux programmes de protection des témoins sont en prison.
    Oui, c'est exact.
    Je suppose que c'est ce que nous appelons ici la détention protégée, mais nous ne considérons pas que ces personnes font partie d'un programme de protection des témoins. C'est toutefois ce que vous faites.
    Oui.
    En tant qu'agence du gouvernement fédéral, lorsque vous relocalisez les familles, quel genre de dépenses assumez-vous?
    La relocalisation d'un témoin nous coûte environ 40 000 $ et celle d'une famille, 80 000 $ à 100 000 $, peut-être 110 000 $. Le coût annuel du programme — je vais vous donner un chiffre approximatif, car cela varie d'une année à l'autre — se situe entre 25 et 50 millions de dollars pour le programme fédéral. Nous examinons les coûts; nous examinons le cas en tenant compte des coûts. Pour ce qui est des États et des services de police locaux, nous offrons également de les aider à relocaliser leurs témoins s'ils souhaitent faire appel au système fédéral. Nous pouvons le faire en leur demandant de rembourser une partie des coûts.
(1150)
    Lorsque vous relocalisez un témoin ou une famille, continuez-vous à soutenir financièrement la famille pendant un certain temps ou lui accordez-vous un certain délai pour retomber sur ses pieds?
    Il y a une période maximum. En fait, il y a de nombreuses années… à la fin des années 60 environ, j'ai rencontré un représentant de la Chambre de commerce des États-Unis qui s'intéressait beaucoup à notre programme et qui a accepté de me présenter aux dirigeants des plus grandes entreprises du pays. Je les ai rencontrés en groupes de quatre ou cinq et je leur ai demandé de nous aider à trouver des emplois pour nos témoins. Je leur ai dit que je ne leur révélerais pas le véritable nom de ces derniers, que je ne leur dirais pas d'où ils viennent vraiment, mais que je leur dirais quels sont leurs véritables antécédents judiciaires et quelles compétences ils prétendent avoir, mais sans me porter garant pour eux. Je les ai ensuite exhortés à apporter leur aide. Près de 200 entreprises ont accepté de le faire.
    C'était donc une façon de leur trouver des emplois. Notre but est de cesser de leur verser une allocation de subsistance le plus rapidement possible. Nous leur disons que nous leur accordons six mois. Ce n'est pas vraiment possible, car ils doivent toujours témoigner, quitter la ville, etc. Néanmoins, en général, je dirais qu'ils continuent à toucher l'allocation pendant un an à 16 mois.
    Lorsque les témoins sont relocalisés, continuent-ils à payer les dettes qu'ils avaient avant, à assumer leurs obligations financières?
    Notre loi contient une disposition à l'égard des dettes. Nous nous attendons à ce que ces témoins paient leurs dettes. S'ils ont de l'argent, avant de les relocaliser, nous leur suggérons de rembourser leurs dettes immédiatement. Si un créancier désire les poursuivre après leur relocalisation, notre loi prévoit la nomination d'un intermédiaire. C'est un avocat non fédéral qui représente le créancier et après avoir vérifié ses antécédents, nous lui disons où l'intéressé habite et quelle est sa nouvelle identité afin qu'il puisse chercher les biens qu'il possède, intenter une action et faire ce que l'on ferait normalement. Le témoin est gardé en sécurité, personne ne sait qui il est, mais une action en recouvrement est intentée contre lui.
    Comme dernière question, dans vos deux pays, en Grande-Bretagne, monsieur Fyfe, et aux États-Unis, monsieur Shur, l'immunité pénale n'est pas accordée aux personnes qui sont relocalisées dans le cadre du programme de protection des témoins, n'est-ce pas?
    Après la relocalisation, il n'y a pas d'immunité du simple fait qu'on participe à un programme de protection des témoins. En fait, ces témoins ne peuvent même pas travailler comme informateurs sans l'autorisation de l'Office of Enforcement Operations.
    Et c'est la même chose au Royaume-Uni?
    La situation est la même au Royaume-Uni. Il n'y a pas d'immunité.
    Pour revenir rapidement sur la question précédente, en ce qui concerne le système en vigueur au Royaume-Uni, que je vous ai décrit comme un système ou un programme de protection des témoins plutôt improvisé, au cours des entrevues que j'ai eues avec les policiers qui gèrent le programme à Strathclyde, ce dont ils se souciaient sans doute le plus c'est que les témoins ne profitent pas matériellement de leur relocalisation. En effet, si c'était le cas, ils craignaient fort qu'on puisse dire que la police et la poursuite avaient influencé ou acheté leur témoignage.
    Pour ce qui est d'établir les gens dans une autre ville et de leur accorder un soutien financier, il y a une règle absolue interdisant de leur donner de l'argent pour les aider, interdisant de leur accorder des paiements en espèces, car la police craignait que la défense puisse en profiter, lors d'un procès criminel, pour dire que leur témoignage a été acheté.
(1155)
    Monsieur Shur.
    Nous nous sommes heurtés à ce problème et nous croyons avoir trouvé une solution. Elle fonctionne maintenant depuis une trentaine d'années. Quand un témoin est sur le point de témoigner, nous avisons le tribunal, le juge et l'avocat de la défense du montant d'argent exact que nous avons payé au témoin et de ce à quoi l'argent a servi. L'avocat de la défense doit alors essayer d'exploiter le fait que nous avons accordé 8 000 $ l'année dernière pour la nourriture, 11 000 $ pour les soins médicaux, etc. Les tribunaux et les avocats de la défense sont avisés de tous les montants d'argent qui ont été donnés au témoin.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer de l'autre côté. Monsieur Cullen, présentez-vous brièvement après quoi vous pourrez poser vos questions.
    Certainement. Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur Fyfe et monsieur Shur. Je m'appelle Roy Cullen. Je suis un député de la région de Toronto et le vice-président de ce comité. Cela paraîtra étrange à M. Fyfe, mais Oxford, London et Windsor sont les villes dortoirs de Toronto. Vous pouvez donc constater nos racines britanniques.
    Nous avons parlé des programmes traditionnels de protection des témoins. En général, on relocalise un criminel en lui donnant une nouvelle identité, etc. Mais permettez-moi de vous parler un peu de mon secteur de Toronto où nous avons eu de nombreux problèmes en ce qui concerne les crimes reliés aux armes à feu, les gangs et la drogue. En fait, dans ma circonscription, la police a arrêté environ 120 personnes lors d'un gros coup de filet il y a un an environ si bien que la criminalité a un peu diminué, mais elle continue à nous préoccuper grandement.
    Dans mon secteur, nous avons eu des fusillades à partir d'une voiture, des fusillades en plein jour sans qu'aucun témoin ne se présente. La police est constamment confrontée à ce genre de problèmes. Il peut y avoir des citoyens honnêtes qui ont été témoins de ces événements. Ce ne sont pas des criminels. Ils ne veulent sans doute pas avoir à déménager en Floride même si le climat y est très agréable. Toutefois, étant donné la façon dont le système de justice fonctionne au Canada, bien que je ne sois pas avocat moi-même, vous ne pouvez pas vraiment compter sur les témoignages anonymes, car lors de l'interrogatoire préalable, cela devient public.
    Je me demande donc s'il y a d'autres modèles qui ont été envisagés ou si vous avez travaillé à des programmes de protection des témoins s'appliquant à des citoyens honnêtes qui ont été témoins d'un crime, mais qui ont terriblement peur de se faire connaître à cause du risque de représailles.
    Y a-t-il des façons de résoudre ce problème ou devons-nous nous en tenir au genre de modèle que vous avez décrit et qui correspond aux programmes traditionnels de protection des témoins?
    Qui voudrait répondre en premier? Monsieur Shur.
    Malheureusement, nous avons eu, nous aussi, ce genre de problèmes et d'ailleurs, cela continue. Il y a une augmentation des fusillades.
    Nous avons deux autres types de programmes. L'un d'eux est ce que nous appelons le programme de relocalisation à court terme qui a démarré à Washington où nous avions des fusillades à partir d'une voiture et des fusillades où des résidents d'un quartier tiraient sur des gens habitant le quartier voisin. Ils vivaient dans le même voisinage. Nous les envoyons ailleurs pendant une brève période afin que les témoins qui se présentent sachent qu'ils peuvent rester en sécurité pendant quelque temps, jusqu'à ce que nous estimions qu'ils peuvent être renvoyés chez eux en toute sécurité.
    Avec ce programme, les témoins s'absentaient généralement de chez eux pendant 90 jours, 120 jours ou peut-être jusqu'à la fin du procès, et une fois l'accusé en prison, la menace disparaissait.
    Il y a aussi un troisième programme qui permet au procureur des États-Unis d'établir que son témoin a simplement besoin d'une somme allant jusqu'à 4 000 $ pour aller s'installer dans un hôtel plus ou moins loin. Je fournissais alors un peu d'argent pour que cette personne puisse quitter la ville pendant une brève période. Autrement dit, cette personne n'a pas besoin d'une nouvelle identité, elle n'a pas besoin d'aide pour trouver un emploi, pour trouver un médecin ou ce genre de choses. C'est la troisième solution.
    Le programme de protection des témoins dont nous parlons intervient lorsqu'il y a des organisations qui ont les moyens de pourchasser les témoins et de les trouver alors que dans le cas des fusillades à partir d'une voiture, ce genre de criminels n'a généralement pas cette capacité.
(1200)
    Monsieur Fyfe, vouliez-vous dire quelque chose?
    Oui. Ce que M. Shur vient de dire est très important et signifie qu'il faut beaucoup insister sur l'évaluation des risques que représentent les témoins. Les criminels ont-ils réellement la capacité de pourchasser ces personnes et une relocalisation à court terme va-t-elle suffire pour assurer leur sécurité?
    Une autre chose sur laquelle nous avons travaillé au Royaume-Uni — et c'est enchâssé dans la loi — ce sont toutes sortes de mesures spéciales que l'on prend dans les tribunaux pour protéger l'identité des témoins. Cela comprend la télédiffusion en direct, l'enregistrement vidéo du contre-interrogatoire et du nouvel interrogatoire avant le procès, le témoignage en dehors de la salle du tribunal par télédiffusion en direct, l'utilisation d'écrans dans les salles d'audience, etc. Ces dernières années, on a surtout cherché à rendre la salle d'audience plus sécuritaire afin que les témoins puissent témoigner sans que leur identité ne soit révélée à l'accusé et à ses complices.
    Avez-vous une autre question?
    Oui, j'aimerais avoir plus de renseignements à ce sujet.
    Au Canada, nous avons des programmes comme Échec au crime, des lignes de dénonciation anonyme, mais les témoins les utilisent rarement, ce que je trouve parfois sidérant. Les gens ont si peur ou manquent tellement de confiance qu'ils ne veulent même pas appeler une ligne de dénonciation anonyme. Qu'en pensez-vous? Vous êtes-vous jamais penché sur les facteurs psychologiques ou autres qui interviennent?
    Deuxièmement, monsieur Shur, ce que vous avez dit à propos de ces programmes… comme l'a déclaré M. Fyfe, il faut qu'ils soient très ciblés parce que les gens qui quittent leur milieu, dans les petites villes… Il y a certains secteurs de ma circonscription où il y a beaucoup d'activité criminelle et je pense que les gens de ces quartiers savent parfaitement lorsque quelqu'un disparaît pendant quatre mois, il y a quelque chose de louche. Pourriez-vous en parler car le temps qui m'est imparti est presque terminé?
    Si une personne quitte la ville pendant quatre mois, revient et se trouve en danger, cela veut dire que ce programme n'est pas celui qui lui convient. Cette personne a alors besoin du programme à long terme. C'est un des principaux facteurs.
    C'est un programme difficile. Il est difficile de convaincre les témoins de se présenter dans ces petites communautés. Les gens ne peuvent pas surmonter leur peur. Ce sont des cas très différents de ceux du crime organisé. Ces gens-là viennent d'un milieu ordinaire.
    Échec au crime est un merveilleux programme à la condition de préserver l'anonymat des gens. L'anonymat ne vous fournit pas un témoin, mais une indication, l'endroit où aller procéder à une arrestation.
    Nous n'avons pas encore trouvé de solutions meilleures que les trois dont j'ai parlé, mais nous avons également ce problème.
    Monsieur Fyfe, voulez-vous dire quelque chose?
    Je dirais la même chose que M. Shur. Cette année, Échec au crime et les autres initiatives… Vous avez sans doute des programmes semblables, mais au Royaume-Uni, nous avons Crimewatch où les gens peuvent téléphoner après avoir vu la reconstitution des événements, etc.
    Je ne suis au courant d'aucune recherche qui aurait été faite quant au nombre de gens qui répondent à ce genre d'initiatives, mais ce serait une question intéressante à étudier.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant revenir à M. Ménard, qui a été le premier à poser des questions.
    Allez-y, monsieur.

[Français]

     Merci. Je vois que je ne m'étais pas présenté autrement qu'en vous signalant que j'étais membre d'un parti frère du Scottish National Party. Je suis un député du Bloc québécois à la Chambre des communes. Avant de faire de la politique, j'ai passé toute ma carrière à faire du droit criminel. Quand j'ai commencé en politique, j'ai été ministre pendant neuf ans au gouvernement du Québec, principalement à la sécurité publique et comme procureur général. J'ai vu naître ces programmes. En 1966, quand j'ai commencé à pratiquer le droit, ils n'existaient pas. Ces programmes ont été créés pour répondre à des besoins, et il y a maintenant une loi qui encadre ces programmes.
     La protection physique des témoins est-elle efficace? Est-il arrivé que des témoins soient attaqués ou tués alors qu'ils étaient sous protection? Je voudrais aussi demander au professeur Fyfe s'il a pu comparer les systèmes assez différents qui existent en Europe. Quel est, d'après lui, le meilleur système, celui dont on devrait s'inspirer?
    J'ai dit que la vie des témoins innocents, c'est-à-dire des gens qui ont assisté à un crime grave ou à un meurtre commis par une organisation criminelle, pourraient être en danger s'ils témoignaient. Le fait de bénéficier d'une pareille protection est certainement un poids considérable pour les témoins qui n'ont pas mené d'activités criminelles. Quelle est la proportion de témoins innocents?
    Finalement, je voudrais savoir si, dans vos juridictions, les jurés connaissent tous les avantages qu'on a donnés aux gens qui viennent témoigner devant eux.
(1205)

[Traduction]

    Vous pouvez répondre à ces questions les unes après les autres ou à toutes les quatre en même temps, selon ce que vous préférez.
    Monsieur Shur, voudriez-vous commencer?
    Certainement.
    Pourquoi ne pas répondre aux quatre en même temps?
    Certainement. Allez-y.
    Les jurés savent-ils tout à propos des témoins? Oui.
    Ce qu'ils ne savent pas c'est la nouvelle identité de la personne en question, ni l'endroit où elle vit. Mais ils savent tout de son casier judiciaire et de ses antécédents.

[Français]

    Qu'en est-il des avantages?

[Traduction]

    Monsieur Ménard.

[Français]

    Qu'en est-il des avantages qu'il a reçus?

[Traduction]

    Y a-t-il des avantages?
    J'aurais dû m'intéresser davantage à mes cours de français au secondaire. Oui, tous les avantages lui sont expliqués.
    Quant à la protection physique et son efficacité, nous croyons que l'anonymat est la meilleure protection. Autrement dit, les témoins sont relocalisés dans une nouvelle région. Personne ne sait où ils vont, où ils vont vivre et ils n'ont pas besoin d'une protection physique autour d'eux. Les seules circonstances dans lesquelles ils auraient besoin d'une protection physique c'est lorsqu'ils sont ramenés dans la zone de danger pour témoigner. Cette protection a été entièrement efficace.
    Je dois mentionner que depuis que ce programme a commencé, à la fin des années 60, pas un seul témoin qui a suivi nos règles n'a été tué. Nous avons eu beaucoup de chance à cet égard.
    Voyons… la protection des témoins innocents. Le nombre de témoins qui ont participé à ce programme et qui sont, dirais-je, entièrement innocents, par exemple s'ils ont assisté au crime alors qu'ils attendaient à un coin de rue, est de moins de 5 p. 100. Cela ne pose donc pas un gros problème si l'on considère l'ensemble du programme, mais c'est un sérieux problème pour ces 3 p. 100 ou 4 p. 100 de personnes qui doivent renoncer à toute leur carrière et à la vie qu'elles menaient.
    Merci.
    Monsieur Fyfe.
    Oui, permettez-moi de répondre également à ces questions.
    Comme l'a dit M. Shur, les jurés seraient certainement informés des dispositions dont les témoins ont fait l'objet.
    En ce qui concerne les témoins innocents, je dirais, pour avoir étudié les programmes du Royaume-Uni, qu'ils représentent une proportion relativement faible du nombre total de témoins qui participent aux programmes. Néanmoins, ils posent un défi particulier pour les programmes de protection des témoins, surtout s'ils exercent divers métiers dans lesquels ils devront trouver un nouvel emploi s'ils sont relocalisés.
    Pour ce qui est de la protection physique, mon expérience est très semblable à celle dont M. Shur a parlé: les témoins qui ont suivi les instructions et les règles des programmes de protection auxquels ils participaient sont restés en sécurité.
    D'après ce que j'ai constaté en interviewant des témoins participaient à des programmes de protection, c'est que ce n'est pas seulement leur sécurité physique qui est importante, mais aussi leur sentiment de bien-être, leur sens d'identité, leur état mental, des choses qui sont presque aussi importante dans certains cas.
    L'ironie de la situation est que dans les cas où des témoins sont morts, c'est parce qu'ils se sont suicidés. J'ai certainement constaté que le taux de suicide est plus élevé chez les témoins protégés que dans la population en général. Cela témoigne des difficultés mentales et psychologiques auxquelles ces personnes sont confrontées lorsqu'elles essaient de refaire leur vie dans un nouveau milieu.
    Cela nous ramène sans doute à la dernière question que vous avez soulevée, à savoir quel pourrait être le meilleur système. Je ne pense pas qu'on puisse désigner un pays en disant qu'il a le système idéal, mais si vous examiniez les différents programmes de protection, vous pourriez vous demander quelles sont les pratiques exemplaires dont on peut s'inspirer pour constituer un bon programme.
    C'est relié en partie à la question du bien-être des témoins et du soutien qui leur est apporté à court terme et à long terme. Cela nous ramène à ce que M. Shur a dit tout à l'heure quant à la nécessité de bien sélectionner les témoins au départ pour s'assurer qu'ils pourront faire face aux pressions auxquelles ils seront soumis.
    Il s'agit aussi d'avoir un cadre juridique très solide pour la protection des témoins. L'une des difficultés au Royaume-Uni c'est que nous avons très peu de renseignements au sujet de la protection des témoins étant donné qu'elle n'a pas lieu dans un cadre législatif clairement défini. Et cela devrait également couvrir des choses comme la procédure d'appel dont nous avons parlé tout à l'heure.
    Je suppose que la décision d'inclure ou non un témoin dans le'programme n'est pas prise non plus de la même façon. Au Canada comme au Royaume-Uni, la tradition veut que ce soit un chef de police qui prenne cette décision. Mais il y a certainement des pratiques très différentes dans d'autres pays d'Europe où ces décisions sont prises non pas par la police, mais par un autre organisme qui pourrait comporter des représentants de la magistrature, des experts du crime organisé et d'autres personnes.
    Lorsque c'est ce genre de groupe qui prend ces décisions, légèrement à l'écart de la police, il a peut-être un point de vue plus indépendant et plus objectif pour décider qui doit être protégé et qui doit être exclu de ce genre de programmes.
(1210)
    Merci.
    Monsieur Shur, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je peux le faire?
    Pour ce qui est du taux de suicide, je pense que c'est une question très intéressante.
    Nous avons fait une étude dans les années 70. Je m'inquiétais de l'incidence des suicides. Cette étude a donné des résultats différents de ceux que M. Fyfe a obtenus. Nous allons sans doute devoir en faire une autre. Selon nos résultats, il n'y avait pas d'augmentation de l'incidence du suicide chez les témoins par rapport à l'ensemble de la population. Mais je pense que maintenant que nous possédons une base de données beaucoup plus vaste, nous devrions en faire une nouvelle analyse.
    Lorsque les témoins sont relocalisés, pour les aider à surmonter le stress, qu'il s'agisse de témoins innocents ou non ou encore de membres de la famille de détenus qui sont eux-mêmes des témoins, s'ils le désirent, nous les adressons à des psychologues et à des psychiatres. Cela se fait couramment.
    Très bien. Merci à tous les deux.
    Nous allons maintenant revenir du côté ministériel.
    Monsieur Norlock, veuillez simplement vous présenter brièvement avant de poser vos questions.
    Je m'appelle Rick Norlock. Je suis le député de Northumberland—Quinte West. Avant la politique, j'ai été policier pendant 30 ans, dans un corps équivalent à la police d'État.
    Je voudrais seulement revenir un peu sur Échec au crime, un programme dont les forces policières se servent très souvent, surtout en Ontario. Cette initiative a beaucoup de succès. Au cas où vous ne le sauriez pas, elle a été créée ou conçu par un Canadien qui résidait à Alburquerque, au Nouveau-Mexique.
    Je voudrais que nous parlions un peu plus des pratiques exemplaires pour savoir si les décisions devraient être prises par la police ou par quelqu'un d'autre. Je vais d'abord dire ce que j'en pense, après quoi je vous laisserai poursuivre, tous les deux, messieurs.
    Ce que nous cherchons ici ce sont des pratiques exemplaires. La GRC en particulier et d'autres professionnels de la police et membres de la bureaucratie qui s'occupent du programme nous ont dit qu'il fonctionnait relativement bien au Canada. En fait, d'après les commentaires négatifs qui ont été faits, je dirais qu'il a beaucoup de succès. Mais nous ne devons pas nous reposer sur nos lauriers car il y a peut-être quelque chose de mieux. Ma question est donc la suivante: se dirige-t-on vers des pratiques exemplaires?
    Le professeur nous a dit que, dans certains pays, le processus décisionnel est confié à des gens associés à la magistrature, ou à des avocats, etc. Nous avons discuté de certaines des questions de bien-être social que cela soulève. Je vous demanderais donc à tous les deux, messieurs, d'explorer davantage les différences que vous percevez, qu'elles soient négatives ou positives, lorsque ce processus se déroule en dehors de la police.
    Je dois dire — non pas en raison du métier que j'exerçais avant, mais suite aux observations que j'ai faites, à votre témoignage et aux témoignages des experts canadiens et de ceux qui gèrent le programme, surtout la Gendarmerie royale canadienne — que plus il y a de liens et de séparations, plus le processus devient compliqué. Mais c'est seulement mon interprétation et je laisse à ces deux messieurs le soin de répondre.
(1215)
    Monsieur Fyfe, voudriez-vous répondre le premier, cette fois?
    D'accord. Je vais faire une observation générale à savoir que l'on a fait si peu de recherche dans ce domaine en ce qui concerne l'efficacité que nos connaissances sont très limitées. Bien entendu, il y a des praticiens qui possèdent une vaste expérience directe — et M. Shur l'a très clairement démontré — mais ce qui manque généralement, je suppose, ce sont des évaluations et des recherches indépendantes sur les programmes de protection des témoins. C'est pourquoi, je pense, nous travaillons avec très peu de données probantes vraiment fiables et indépendantes. Je voulais commencer par le préciser.
    À mon avis, la question de savoir qui est le mieux placé pour décider d'inclure ou d'exclure des témoins est très complexe. Il faut tenir compte de la rapidité avec laquelle ces décisions doivent être prises et du fait que, souvent, il faut surveiller l'évolution de la menace. Le risque pour les témoins est généralement un phénomène dynamique et non pas statique. Le risque est parfois plus grand à certains moments qu'à d'autres.
    Lorsque nous avons étudié la situation un peu partout en Europe, nous avons été étonnés de voir que dans certains pays, c'est la police qui était autorisée à prendre cette décision. Nous avons estimé qu'elle était peut-être trop près de la procédure d'enquête et qu'il fallait peut-être pouvoir s'en distancer davantage, pouvoir juger, dans une perspective plus large, si le témoin était essentiel pour la poursuite et l'enquête. Dans certains cas, la police semblait trop empressée à faire participer les témoins à des programmes de protection parce que cela lui permettait d'accélérer l'enquête. Néanmoins, il était évident que cela perturbe énormément la vie de ces personnes.
    D'après les opinions que nous avons entendues, il serait peut-être préférable que cette décision ne soit pas confiée à la police et fasse l'objet d'une évaluation plus indépendante en fonction de la preuve que le témoin peut fournir, dans un contexte plus large.
    Merci.
    Monsieur Shur.
    M. Fyfe a raison, je pense, de dire qu'un groupe indépendant devrait décider qui doit participer au programme de protection, au lieu que ce soit le policier ou le service de police qui a procédé à l'arrestation.
    Bien entendu, mon expérience se situe dans le cadre des agences d'enquête fédérales et j'ai donc été confronté au problème dans le contexte du FBI, du DEA, du Service secret et des 26 agences d'enquête fédérales qui pourraient avoir des témoins. Je n'étais pas d'accord pour que des agents remettent de l'argent à des témoins potentiels. Je pensais que cela pouvait faire mauvais effet au tribunal et que si nous faisions appel à un groupe indépendant comme le U.S. Marshals Service qui n'était pas concurrentiel, le système fonctionnerait beaucoup mieux.
    Je ne pouvais pas non plus envisager que le DEA confie ses témoins au FBI pour qu'il assure leur protection ou que le FBI confie ses témoins au DEA, au Service secret ou une autre agence, encore à cause de la concurrence. Je me suis donc mis à la recherche d'une agence neutre. Personne n'a de reproches à faire au Marshal Service, car il ne concurrence absolument pas les autres agences, ce qui est donc une bonne chose.
    Dans notre pays, je crois qu'il y a dans le système fédéral quatre personnes qui peuvent décider qu'un témoin doit être protégé. C'est le procureur général, le sous-procureur général, le procureur général adjoint, Division pénale et une autre personne désignée par le procureur général. J'étais cette autre personne.
    Cela permet d'établir les critères d'admissibilité au programme. L'efficacité est meilleure en ce qui concerne l'argent, les enquêtes et les poursuites lorsque la décision est prise par un groupe dont les décisions reflètent les opinions de la plus haute autorité policière du pays — soit le procureur général, dans notre cas.
    Par conséquent, si un agent du Fish and Wildlife Service nous appelait pour dire qu'un braconnier avait tué trois lapins et qu'il voulait faire protéger le témoin, ce serait peut-être un cas très important aux yeux de l'agent en question, mais qui ne justifierait pas, selon moi, une dépense de 100 000 $ et la relocalisation de 24 personnes. Lorsque la décision est prise indépendamment des enquêteurs, cela permet d'appliquer des critères.
    Il n'est pas nécessaire d'avoir un bureau distinct, comme c'était le cas avec le U.S. Marshal Service. Sans vraiment connaître votre situation, si vous aviez au sein de la GRC un groupe dont le seul rôle serait de superviser la protection des témoins et de prendre ce genre de décisions et si une ou plusieurs personnes étaient désignés pour s'en charger, vous pourriez, je crois, obtenir les mêmes résultats que nous.
    L'autre chose sur laquelle je suis d'accord avec M. Fyfe c'est que tous les programmes de protection des témoins requièrent des améliorations. Aussi bons soient-ils, nous avons grandement besoin de les améliorer.
(1220)
    Merci.
    Avez-vous encore quelque chose à dire? J'ai trouvé intéressant votre exemple des trois lapins. De toute évidence, les défenseurs des droits des animaux n'ont pas la même influence aux États-Unis qu'au Canada.
    Nous allons passer de l'autre côté de la table.
    Madame Barnes, avez-vous d'autres questions?
    Merci. Oui j'en ai.
    J'ai remarqué la différence dans votre analyse interne concernant le suicide. Même si je ne connais pas bien le sujet, les gens se sentent souvent isolés. Avant votre témoignage, je croyais que c'était l'éloignement des membres de leur famille qui incitait les témoins à retourner chez eux et à abandonner le programme.
    J'ai été vraiment surprise de vous entendre dire que vous avez relocalisé jusqu'à 25 personnes, car je pensais qu'au Canada cela se limitait à un très petit nombre de gens. Je suppose que c'est surtout la famille immédiate soit le conjoint et les enfants, mais certainement pas les grands-parents.
    J'ai cru comprendre, monsieur Shur, que vous acceptez toutes les personnes qui sont à risque. Je voudrais des précisions pour qu'il n'y ait pas de malentendu. S'il y avait autant de membres d'une même famille, ce n'est pas parce que vous prenez généralement tous les membres de la famille étendue, mais parce que la famille en question était très menacée, n'est-ce pas?
    Oui, c'est exact, mais il y a une exception. Comme pour tout le reste, il y a toujours des exceptions. Si les grands-parents sont proches de la famille et si cette dernière risque de subir un énorme traumatisme, ou si les grands-parents risquent de subir un énorme traumatisme, nous allons les relocaliser. Néanmoins, en général, ils préfèrent rester là où ils sont.
    M. Fyfe, selon la plupart des analyses que vous avez faites des programmes internationaux qui existent actuellement, est-ce comme au Canada où seuls quelques membres de la famille sont relocalisés ailleurs?
(1225)
    Oui, en effet. Ce sont seulement quelques personnes de la famille immédiate du témoin.
    L'autre chose que j'ai constatée et dont nous devrions parler, c'est la difficulté de faire des recherches en sciences sociales et humaines dans ce domaine, simplement parce que cela doit rester secret. Par conséquent, les recherches sont faites par ceux qui participent à ces programmes, ce sont des recherches internes…
    Je veux en venir à la recherche jugée par les pairs. Est-ce difficile à faire dans ce domaine?
    Je voudrais que chacun de vous me réponde, et j'aimerais également savoir si toute la recherche qui a été effectuée jusqu'ici est une recherche interne?
    Dois-je répondre le premier?
    Allez-y, monsieur Fyfe.
    Pour revenir sur ce qui a été dit tout à l'heure, il y a très peu de recherche indépendante dans ce domaine. Nous avons fait nos recherches en Écosse pour le compte du gouvernement écossais. C'est lui qui les a financées et qui nous a permis d'avoir accès aux policiers chargés du programme de protection. Ces derniers nous ont ensuite facilité l'accès aux témoins qui étaient protégés afin que nous puissions les interroger en toute sécurité sur leur expérience dans le cadre de ce programme.
    Je pense que c'était la première étude indépendante et encore la seule qui ait examiné les deux côtés de la médaille. Nous nous sommes penchés sur les difficultés et le stress auxquels sont confrontés les policiers qui essaient de protéger ces témoins — je crois important de ne pas sous-estimer le fait que les policiers qui travaillent à ces programmes sont soumis à un stress énorme, ce qui soulève toutes sortes de questions concernant leur formation et le soutien à leur apporter — tout en questionnant les témoins relocalisés et les membres de leur famille pour voir à quel point il est difficile pour ces gens de se refaire une vie et pourquoi certains d'entre eux ne peuvent tout simplement pas faire face aux pressions du programme et finissent pas entrer chez eux.
    Si je dis cela, c'est sans doute parce que je fais de la recherche, mais je crois que c'est un domaine dans lequel il faudrait absolument faire davantage de recherche indépendante sur tout le processus et les différents organismes qui interviennent.
    Une autre chose que nous avons examinée, c'est le rôle des associations de logement qui essaient de reloger ces témoins. Nous avons parlé à des représentants des services sociaux et des services de santé, car il y a tout un éventail d'autres organismes qui doivent fournir des renseignements et faciliter la relocalisation. Cela confère également de lourdes obligations à ces autres organismes en dehors de la police et les gens s'inquiétaient, au sein des services de logement et des services de santé, des risques qu'ils pouvaient courir eux-mêmes en participant à ce processus.
    Par conséquent, je crois vraiment qu'il faudrait faire des recherches portant, de façon plus générale, sur toutes les personnes et tous les organismes qui participent au programme de protection des témoins.
    Merci.
    Monsieur Shur.
    Je crois que les recherches se poursuivent sur ce genre de programme. Nous faisons des recherches indépendantes. Je pense que cela pourrait être mieux. Ces recherches sont faites par le General Accounting Office, qui représente le Congrès. Il a fait des recherches sur le programme et s'est penché sur les plaintes des témoins et l'efficacité du programme.
    Le Bureau de l'inspecteur général est un organisme indépendant au sein du Département de la Justice qui a également enquêté sur le programme de protection des témoins à plusieurs reprises.
    Je sais qu'un autre groupe a également fait des recherches indépendantes sur le programme.
    Quand je dis qu'il y a eu des recherches, je ne veux pas dire une seule en 30 ans, mais à diverses reprises.
    Mais tout cela a été fait à l'intérieur du gouvernement?
    Ce sont toutes des études internes, mais il y a…
    Je parle des recherches faites à l'extérieur du gouvernement.
     Non, toutes ont été faites à l'intérieur du gouvernement. Je ne vois pas comment un chercheur de l'extérieur pourrait aller questionner un grand nombre de témoins relocalisés.
(1230)
    Monsieur Fyfe vient de nous dire qu'il l'a fait lui-même.
    Mais c'est difficile. Je pense que, dans notre cas, ce serait sans doute difficile à faire.
    Certains organismes que j'ai mentionnés et qui font partie du gouvernement sont allés poser des questions à des témoins. On a ensuite procédé à un échantillonnage, envoyé des lettres à des témoins relocalisés pour leur demander de parler des problèmes qu'ils ont eus, etc. Nous avons ensuite transmis les renseignements ou les plaintes que nous avons reçus des autres agents d'enquête, des procureurs des États-Unis ou des témoins — toujours à l'interne — à des organismes gouvernementaux différents de ceux qui administrent le programme de protection des témoins.
    Pourriez-vous conclure en posant une dernière question?
    D'accord.
    Je m'étonne que vous coupiez les vivres au bout de six mois. Ce délai me semble relativement court.
    Si des gens qui ont reçu une formation dans un domaine essaient de trouver le même genre d'emplois ailleurs, je suppose qu'ils seront plus faciles à retrouver que s'ils sont recyclés dans un autre domaine.
    J'aimerais que vous me disiez, tous les deux, si le programme de protection des témoins s'occupe de recycler les gens, et si cela arrive fréquemment ou non selon la situation.
    Permettez-moi de revenir sur ce délai de six mois. Les témoins signent un protocole d'entente qui précise simplement ce qui se passera s'ils sont relocalisés. Il mentionne qu'on s'attend à ce qu'ils trouvent un emploi dans un délai de six mois.
    Ce n'est pas réaliste. Ils n'arrivent pas à trouver un emploi dans un délai de six mois. Je pensais l'avoir clairement indiqué tout à l'heure, mais il semble bien que non. Selon l'entente, c'est six mois, mais cela leur prend plus d'un an. Je crois avoir dit qu'en réalité, cela prend 16 mois. Je n'ai peut-être pas été assez clair, mais ces témoins reçoivent une aide financière jusqu'à ce qu'ils trouvent un emploi. On ne les laisse pas tout simplement tomber.
    S'ils refusent de travailler, nous pouvons essayer de leur obtenir des prestations d'aide sociale. Nous avons eu un témoin qui a refusé de travailler en disant qu'il était trop fier pour toucher l'aide sociale. C'est une des difficultés auxquelles nous sommes confrontés.
    Monsieur Fyfe, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Oui, brièvement.
    À ma connaissance, les témoins n'ont pas la possibilité de se recycler — en tout cas pas d'après les recherches que nous avons réalisées au Royaume-Uni.
    Une autre chose que nous avons constatée en faisant nos recherches en Écosse est que la majorité des témoins relocalisés ne travaillaient pas avant de participer au programme. Ils vivaient de l'aide sociale et ils ont donc continué à toucher des prestations d'aide sociale après leur relocalisation. Par conséquent, la question de l'emploi ne s'est pas posée pour eux, en tout cas à court terme.
    Merci beaucoup.
    Désolé, mais vouliez-vous ajouter quelque chose?
    Je vous fais encore le même coup. Je suis sûr que vous ne m'inviterez plus.
    Le recyclage est très important. Nous nous en occupons. Lorsque les gens n'ont pas de compétences, nous les envoyons dans une école pour apprendre à conduire un camion ou faire autre chose. Par contre, si nous avons affaire à un pirate de route, nous essayons de ne pas lui trouver un emploi de chauffeur de camion ou de ne pas l'envoyer dans une école de camionnage. Vous n'allez pas faire travailler quelqu'un qui a imprimé de la fausse monnaie dans une imprimerie. Nous évitons ce genre de choses.
    Mais nous nous occupons du recyclage et nous avons même envoyé des gens au collège.
    Merci.
    Nous allons maintenant retourner du côté ministériel. Monsieur MacKenzie.
    Je désire avertir le comité que je vais confier la présidence à M. Cullen, car je dois partir.
    Je tiens à remercier infiniment nos témoins. Je suis désolé de ne pas pouvoir rester jusqu'à la fin, mais je lirai la transcription. Votre témoignage a été extrêmement utile Merci beaucoup.
    Monsieur MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais simplement mentionner aux témoins que j'ai également des antécédents dans la police, surtout dans les enquêtes criminelles, et ensuite comme chef de police.
    Dans certains de vos commentaires — et c'est surtout M. Shur — vous avez parlé de vos intuitions et je pense que c'est ce que les policiers appellent parfois l'intuition policière.
    Néanmoins, ce dont il est question ici, c'est de familles qu'on ne pourrait pas toujours considérer comme des familles ordinaires. Les gens qui sont relocalisés — et je pense que quelqu'un a parlé de moins de 5 p. 100 — ne sont pas des témoins que l'on qualifierait d'innocents. Nous parlons de gens du milieu criminel, au sens large.
    Monsieur Fyfe, vous avez dit, je crois, que très peu de ces personnes travaillent.
    Nous devons tenir compte de la totalité des gens, mais la majorité de ces témoins n'ont pas d'antécédents professionnels, ce ne sont pas des gens qui exercent un emploi stable ou qui viennent d'un contexte familial que la plupart d'entre nous considèrent comme normal.
    Ai-je raison de le supposer?
(1235)
    C'est exact.
    Par conséquent, pour relocaliser ces personnes… lorsque nous parlons de les éloigner de leur famille, un grand nombre d'entre elles ont déjà rompu leurs liens avec leur famille depuis un certain temps.
    Aux États-Unis, je dirais que la plupart des gens que nous relocalisons sont mariés et que leur famille immédiate est donc relocalisée avec eux.
    Mais qu'en est-il de la famille élargie avec qui ils n'ont plus de liens?
    S'ils n'ont plus de liens avec leur famille élargie, cette dernière ne voudra certainement pas être relocalisée avec eux ou vivre à leurs côtés, à moins qu'elle ne soit en danger. Nous avons relocalisé dans des villes différentes des familles élargies qui étaient en danger.
    Lorsque nous craignons que la relocalisation de certaines de ces personnes, loin de leur famille élargie, leur cause des difficultés personnelles, en réalité, cela fait déjà longtemps qu'elles ont coupé les liens avec leur famille.
    C'est exact.
    Ce n'est donc pas aussi difficile.
    D'autre part — et vous pourrez me dire ce que vous en pensez — j'ai l'impression, pour avoir travaillé dans ce domaine pendant un certain temps, que le taux de suicide est assez élevé chez ces personnes, par rapport à la population normale.
    Oui. Comme nous en avons parlé tout à l'heure, cela n'a pas été confirmé par les études que j'ai réalisées dans les années 70. M. Fyfe a obtenu un résultat différent.
    Avez-vous, monsieur Fyfe, fait une comparaison avec le milieu criminel?
    Non, et c'est une excellente question, car il serait intéressant de savoir si le taux de suicide est beaucoup plus élevé chez les témoins relocalisés que chez les criminels en général. C'est une excellente question.
    Je suis d'accord avec vous. Je pense que ce seraient là des éléments très intéressants d'une étude qui pourrait être difficile à faire, mais qu'il vaut la peine d'envisager, je pense.
    Voilà qui termine mes questions, monsieur le président, et je voudrais moi aussi vous remercier infiniment d'être ici.
    Merci beaucoup, monsieur MacKenzie.
    Madame Barnes, avez-vous une autre question?
    Je veux bien supposer que la majorité des témoins pourraient être des personnes comme celles que l'on vient de décrire, mais je sais aussi que nous n'avons qu'un seul programme de protection des témoins, qu'il peut y avoir des civils innocents qui ont été témoins d'un crime ou d'une situation et que nous ne pouvons pas dire que leur sort ne nous préoccupe pas.
    Désolée, mais je tenais à exprimer le point de vue de l'opposition officielle.
    Quelqu'un veut-il faire un commentaire?
    Nous passons maintenant aux conservateurs.
    Monsieur Comartin, voulez-vous dire quelque chose?
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à vous deux. Est-il arrivé qu'une personne qui a été exclue du programme pour s'être livrée à des activités criminelles soit tuée ou gravement blessée par ceux dont on cherchait à la protéger au départ? Êtes-vous au courant de cas de ce genre?
    Je ne suis au courant d'aucun cas de ce genre, non.
    Très bien.
    C'est une question à laquelle il sera assez difficile de répondre, car j'ai moi-même essayé de le faire et je sais que c'est assez nébuleux. Je pense au cas particulier qui a déclenché cette enquête, ici au Canada, mais lorsqu'un individu qui a un lourd passé criminel, est connu des forces policières locales qui le surveillent directement ou indirectement, se peut-il qu'en le relocalisant on lui permette de commettre ses crimes plus facilement que s'il était resté dans son milieu?
    Monsieur Fyfe, nous pourrions peut-être commencer par vous, étant donné les recherches que vous avez effectuées, mais j'aimerais également savoir ce qu'en pense M. Shur.
(1240)
    Nous n'avons pas étudié cette question, mais on peut sans doute espérer que non, en ce sens que la police de la ville où ces personnes sont relocalisées est informée de leur présence et continue de surveiller leurs activités. Par conséquent, nous pouvons espérer que non.
    Pourrais-je ajouter une chose? C'est une question légèrement différente, mais lorsque nous nous sommes penchés sur la relocalisation des témoins, nous avons pu voir ce que leur milieu en pensait. Les gens qui acceptent de témoigner sont considérés comme des « balances », des gens qui ont trahi le code du silence en entrant en contact avec la police et en témoignant. Certaines personnes nous ont dit que lorsque ces témoins sont relocalisés, c'est une victoire pour les intimidateurs. Ces derniers ont réussi à les chasser de leur milieu.
    De façon plus concrète, ils ont, dans un certain sens, purifié leur milieu de ces personnes qu'ils considèrent comme des balances, des gens prêts à témoigner contre d'autres membres de la communauté. C'est une dimension que nous avons trouvée intéressante. Certains groupes considèrent que la relocalisation des témoins est, en fait ,une sorte de victoire pour la communauté.
    En ce qui concerne la victoire des intimidateurs, chez nous, les intimidateurs se retrouvent en prison. Nous avons un taux de condamnation de 89 p. 100 dans les cas où les témoins relocalisés témoignent.
    Une étude qui a été réalisée il y a quelques années, dans les années 90, je pense, a révélé que dans les causes fédérales où des témoins relocalisés avaient témoigné, les peines infligées étaient plus lourdes que dans des causes similaires. C'est un effet secondaire que nous n'avions certainement pas planifié. Ce nétait pas prévu.
    Pour ce qui est de relocaliser des gens ailleurs où ils ont la possibilité de commettre d'autres crimes, nous prenons plusieurs précautions. Dans un certain sens, nous leur fournissons ce que les travailleurs sociaux recommanderaient. Nous les enlevons d'un milieu où ils ont pris part à des crimes avec d'autres gens et ils se trouvent maintenant avec des personnes qui ne commettent pas de crimes. Nous leur offrons de nouvelles possibilités. Nous leur offrons les services d'un psychologue. Nous avons un inspecteur du WITSEC qui les aide à trouver un emploi, qui les emmène à l'épicerie, qui les conduit chez le médecin et qui inscrit leurs enfants à l'école. Ils vont pouvoir entamer une nouvelle vie sans criminalité.
    Certains d'entre eux doivent faire un gros effort d'adaptation, car ils n'ont pas l'habitude d'aller travailler à 8 h 30 le matin et de rentrer chez eux à 5 heures. Ils avaient l'habitude de travailler de 8 h 30 du soir jusqu'à 5 heures du matin. C'est très différent. Ils avaient l'habitude de ne pas dire à leur femme où ils étaient allés, mais ils sont maintenant dans un milieu différent.
    Le fait qu'ils soient à l'abri des mauvaises influences est un facteur positif, je pense, auquel s'ajoute le soutien psychologique. Comme je l'ai dit, le taux de récidive peut atteindre 18 p. 100, si bien que nous ne sommes certainement pas parfaits.
    Merci, monsieur Comartin.
    Monsieur Ménard, avez-vous une question?

[Français]

    D'abord, j'aimerais vous dire combien j'ai apprécié votre collaboration et les documents que vous nous avez envoyés. Ils nous seront très utiles.
    Professeur Fyfe, je vais citer une des critiques contenues dans le mémoire que vous nous avez envoyé:
En créant un environnement dans lequel le principal moyen pour les informateurs d’obtenir une réduction de peine est de fournir une « aide substantielle », on risque également de provoquer ce qu’on appelle le paradoxe de la collaboration, c’est-à-dire que des gros bonnets sont condamnés à des peines inférieures à celles de leurs hommes de main parce qu’ils ont plus d’information à échanger.
    Si vous avez écrit cela, c'est que vous avez réfléchi à la question. Qu'en pensez-vous maintenant?
(1245)

[Traduction]

    Je suppose que ce que nous avons dit quant au fait que les gros bonnets reçoivent parfois des peines plus légères vient du fait que ces personnes ont des renseignements plus utiles à donner à la police et à la poursuite, ce qui leur permet de négocier un plaidoyer. Par conséquent, ils profitent de leur statut et du fait qu'ils possèdent ces renseignements pour obtenir des peines plus légères alors que ceux qui se trouvent plus bas dans la hiérarchie sont plus vulnérables. C'est dans ce contexte que nous avons dit cela.

[Français]

    Il est évident que le professeur Fyfe n'est pas satisfait du cadre juridique dans lequel il doit évoluer, tandis que M. Shur, pour sa part, en semble satisfait, bien qu'il y ait toujours place à l'amélioration.
    Un autre cadre juridique me préoccupe: celui des obligations de la procédure criminelle. Voyez-vous des obstacles juridiques à l'utilité du système? Un des obstacles est l'obligation absolue, en common law, que ce soit aux États-Unis, en Angleterre ou au Canada, que le jury connaisse tous les avantages qu'on a donnés aux témoins, alors que ce n'est pas le cas dans d'autres juridictions européennes.
    Personnellement, êtes-vous satisfait de ce deuxième cadre juridique, pas celui qui encadre le système de protection, mais plutôt celui dont vous êtes tributaire pour obtenir des condamnations?

[Traduction]

    Je suis désolé. Pourriez-vous reformuler votre question? J'en ai manqué une partie pendant l'interprétation.

[Français]

    Je vais vous redonner un exemple que vous comprenez. Dans les systèmes de droit canadien et américain, les jurés doivent absolument connaître tous les avantages qui sont donnés aux témoins protégés. Certains autres systèmes ne prévoient pas une telle obligation. Pensez-vous que ces obligations juridiques devraient être changées, ou si vous êtes satisfait du lourd fardeau que doit supporter la Couronne lorsqu'elle a recours à ces témoins?

[Traduction]

    C'est une question intéressante. Je dirais sans doute qu'il est important que le processus soit le plus transparent possible. Il faudait donc fournir le maximum de renseignements au tribunal sur la protection qui est accordée aux témoins, sans compromettre leur sécurité, bien entendu.
    Il m'est difficile de répondre à cela. Je ne suis pas vraiment compétent pour y répondre.

[Français]

    J'ai vu le système partir de rien et évoluer jusqu'aux règles actuelles. J'ai déjà vu la Couronne accepter que certains témoins protégés mentent sur les avantages qu'ils avaient reçus. Je crois qu'en vertu du système italien que vous décrivez, on n'est pas obligé de dévoiler les avantages qu'on a reçus. D'après ce que je comprends, on peut donner ces avantages après le témoignage, alors que selon les systèmes canadien et américain, on doit donner tous les avantages aux témoins avant leur comparution.
(1250)

[Traduction]

    Avez-vous une brève réponse?
    Cela semble être une bonne solution.
    La réunion touche à sa fin. C'est au tour de Mme Barnes, et ensuite à M. Comartin, et nous allons probablement nous arrêter-là.
    Je vais peut-être me contenter d'une seule question pour laisser du temps à mon collègue.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Fyfe. Lorsque vous avez rencontré des témoins sous protection, quels sont les principaux commentaires positifs ou négatifs qu'ils ont fait au sujet du programme? Y avait-il certaines constantes ou était-ce différent dans chaque cas?
    Il y avait certaines constantes. La plupart des gens ont dit qu'ils ne seraient plus là, qu'ils ne seraient plus en vie s'ils n'avaient pas été protégés et qu'ils n'auraient pas pu témoigner s'ils n'avaient pas bénéficié d'une protection. Ils reconnaissaient l'importance du programme de protection.
    L'autre constante était qu'ils continuaient à ressentir de l'inquiétude et qu'ils avaient de la difficulté à reconstruire leur vie. Une particularité vraiment frappante de ces personnes est que, dans leur vie quotidienne, si le téléphone sonnait, si une voiture s'arrêtait devant leur maison ou si une lettre était déposée dans leur boîte à lettres, ils ressentaient une anxiété chronique. S'ils marchaient dans la rue, ils avaient toujours l'impression que quelqu'un pouvait les surveiller. Ils avaient beaucoup de mal à vivre ce que nous considérerions comme une vie normale.
    Un autre problème bien réel dont ils ont souvent parlé est qu'il est extrêmement difficile d'établir de nouvelles relations sociales lorsque vous ne pouvez pas parler de votre passé. Pour créer un climat de confiance ou nouer des relations intimes vous devez partager certains aspects de votre passé et lorsque vous devez vous inventer un passé fictif pour pouvoir vivre dans un nouveau milieu, cela vous pose des difficultés psychologiques énormes.
    Par conséquent, d'un côté les gens disent apprécier tout ce que le programme a fait pour assurer leur sécurité physique, mais pour ce qui est de leur état mental et de leur bien-être social, ils souffrent d'angoisse chronique. Ils pensaient que cette angoisse finirait par s'estomper, mais elle n'a pas diminué; elle a persisté.
    Merci beaucoup à tous les deux. Cette réponse nous éclaire sans doute autant que si le comité l'entendait de la bouche d'un témoin, ce qui est difficile lorsqu'on fait ce genre d'étude.
    Je cède mon tour, monsieur le président.
    Merci, madame Barnes.
    Allez-y, monsieur Comartin.
    Merci.
    Monsieur Fyfe, à la fin de votre mémoire écrit, vous parlez de la nécessité d'avoir des lignes directrices législatives transparentes. Pourriez-vous nous indiquer un pays qui, selon vous, a réussi à atteindre ce résultat et s'est doté de lignes directrices législatives transparentes?
    Ce que nous voulions surtout faire valoir c'est qu'au Royaume-Uni nous n'avons pas ce genre de transparence. Nous avons examiné la situation en Australie, par exemple, où le programme fédéral de protection des témoins publie des rapports annuels. Nous avons jugé qu'il était essentiel d'avoir accès à ce genre d'information pour assurer la légitimité et la crédibilité de ces programmes, que l'on sache comment ces programmes fonctionnent, combien ils coûtent, combien de témoins y participent et dans quel genre de circonstances le programme s'applique.
    Dans notre étude, nous n'avons pas pu examiner en détail ce qui s'est passé dans d'autres pays européens et il faudrait donc examiner la législation en vigueur pour voir quels sont les rapports qui doivent être faits sur les programmes de protection des témoins. Nous avons certainement eu l'impression que le Royaume-Uni était très loin derrière le Canada et l'Australie, car très peu de renseignements sont publiés au sujet de la protection des témoins.
    L'un de vous a-t-il étudié le manuel opérationnel de la GRC pour savoir comment notre programme devrait fonctionner et si c'est adéquat?
(1255)
    Je n'en ai pas eu l'occasion.
    Je n'ai pas vu non plus ce manuel opérationnel.
    Puis-je vous poser une question, à tous les deux, au sujet du processus de sélection? Monsieur Shur, de toute évidence votre processus de sélection est beaucoup plus important que celui du Canada. Avez-vous examiné comment nous choisissons les participants au programme?
    J'ai lu certaines choses à ce sujet. Je ne m'en souviens pas exactement, mais j'ai eu l'impression que nous étions beaucoup plus rigides et que nous exigions davantage de documents. En même temps, n'allez pas croire que cela prend des jours, des semaines ou des mois. Tout peut être réglé en quelques heures et le témoin est protégé pendant que l'on examine son cas.
    Monsieur Fyfe, j'ai l'impression que vous n'êtes pas du tout satisfait du processus de sélection en vigueur en Angleterre.
    En effet. C'est un processus beaucoup plus improvisé dont se chargent principalement les policiers responsables du programme de protection. Dans la plupart des cas, on n'a pas recours à des psychologues ou à d'autres personnes en dehors de la police.
    Dans le cas qui nous a causé un problème en Colombie-Britannique, même si un psychologue était intervenu, la police n'a pas suivi ses recommandations.
    Monsieur Comartin, il vous reste un peu de temps. M. Norlock voulait poser une brève question et nous devrons ensuite conclure. Si vous voulez continuer pendant une ou deux minutes, vous pouvez…
    J'en ai seulement une de plus, monsieur le président.
    Monsieur Shur, dois-je comprendre qu'il n'y a pas de commission, de comité ou de conseil qui supervise votre rôle ou qui réexamine vos décisions?
    Ce serait quelqu'un en contact avec le procureur général. Le procureur général ou le procureur général adjoint ne prendrait aucune mesure et ne saurait même pas qu'un témoin a été relocalisé à moins que quelqu'un se plaigne à mon sujet.
    Je pensais plutôt à quelqu'un qui ne serait pas satisfait de votre décision.
    Ces personnes pourraient faire appel au procureur général.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Norlock, avez-vous une dernière question?
    En fait, j'en ai deux, mais elles sont reliées l'une à l'autre.
    Avez-vous une procédure de plainte officielle, monsieur Shur?
    Oui.
    Il y en a une. Il est bon d'avoir une procédure de plainte pour tout programme.
    Je pense que c'est essentiel pour celui-ci.
    Ma deuxième question se rapporte à la première. C'est à propos d'un processus d'examen régulier. Disons que le programme devrait être réexaminé tous les cinq ans et que cela devrait être prévu par règlement. Est-ce une recommandation que vous seriez prêt à appuyer? Aviez-vous ou avez-vous ce genre de processus?
    Nous n'en avons pas. Je crois très souhaitable d'avoir des examens à des intervalles réguliers pourvu qu'entre-temps, on puisse se livrer à un examen en cas de crise permettant de croire que les mauvaises personnes ont été placées aux mauvais endroits. Je veux parler des employés et non pas des témoins relocalisés.
    Merci.
    Monsieur Fyfe, voulez-vous répondre?
    Oui, j'appuierais cette recommandation. Je crois important de procéder à des examens réguliers, mais je pense aussi que l'examen doit être le plus indépendant possible. La mesure dans laquelle les praticiens ou les personnes qui travaillent dans le système et qui procèdent eux-mêmes à cet examen soulève des questions. Il est important d'avoir un examen indépendant.
    Merci infiniment. Je tiens à vous remercier tous les deux, au nom du comité, pour avoir participé à distance à cette réunion. Je pense que nous avons tous trouvé cet entretien très intéressant et très utile.
    Je m'intéresse particulièrement à la procédure des tribunaux et aux dimensions politiques dont nous avons parlé très brièvement, monsieur Fyfe. Si vous pouviez nous diriger vers certains de ces travaux par l'entremise de notre greffière ou de nos attachés de recherche, cela nous serait utile.
    Encore une fois, je vous remercie infiniment, en notre nom à tous, pour vos témoignages très éclairés et très intéressants. Merci.
    Merci beaucoup de nous avoir invités.
    La séance est levée.