SECU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent de la sécurité publique et nationale
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 5 juin 2007
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
J’aimerais rappeler la séance à l’ordre. Il s’agit du Comité permanent de la sécurité publique et nationale et de la séance numéro 48. Aujourd’hui, nous étudions de nouveau le programme de protection des témoins.
J’aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous avons devant le comité à titre personnel M. Tom Bulmer, avocat-procureur, et également, par vidéoconférence de Toronto, Barry Swadron, principal associé de Swadron Associates.
Bienvenue, messieurs. Il nous fait plaisir de vous avoir devant le comité.
La pratique courante à ce comité est de vous accorder environ 10 minutes pour des observations préliminaires, puis nous amorçons une série de questions et d’observations à votre intention. Je suis certain que vous connaissez bien cette routine.
Nous commencerons par M. Bulmer, tout d’abord, qui est présent ici avec nous dans la salle.
Merci, monsieur le président. J’aimerais remercier ce comité de m’avoir invité. Je suis très heureux d’être ici.
Pour vous donner un bref aperçu de mes antécédents, j’ai été appelé en 1991. Mon expérience dans le domaine juridique remonte à bon nombre d’années. En fait, à l’âge de 17 ans, j’étais, je crois, le plus jeune enquêteur privé titulaire d’un permis au pays, sinon dans le monde entier. Puis les affaires se sont enchaînées pour m’amener à la Chambre des communes où j’ai travaillé pendant de nombreuses années à titre d’adjoint de recherche principalement dans le secteur du transport, tout en patrouillant dans des voitures de police le soir et le week-end. J’étais membre de la police auxiliaire de la Police provinciale de l'Ontario. Je suis maintenant avocat de la défense en matière pénale depuis environ 16 ans.
Aucune de mes observations, je tiens à le préciser dès le début, ne doit être interprétée d’aucune manière comme anti-police. En réalité, les avocats de la défense n’ont rien à faire si personne n’est arrêté, donc nous pouvons difficilement être anti-police. Mais je devrai faire certaines critiques sur la manière dont les choses se sont passées au cours des années 2000 à 2002, sur l’information qui vient tout juste d’être partiellement diffusée au public, grâce à la ténacité de deux jeunes membres du personnel des médias.
Je vais vous donner un aperçu d’un minicroquis de ce qui m’est arrivé — en fait, de ce qui vous est arrivé, de ce qui est arrivé aux citoyens de ce pays — par suite de l’intrusion et de la violation du secret professionnel que la GRC a imposé à mon bureau. Cela nous amènera à l’examen en cours.
J’ai aussi quelques idées sur la manière d’aborder l’actuelle Loi sur le programme de protection des témoins afin effectivement de l’améliorer. J’ai examiné d’autres lois dans d’autres domaines de compétence. J’ai examiné cette loi. Je la trouve déficiente. Je trouve qu’elle a vraiment besoin d’être révisée, parce qu’elle présente d’énormes lacunes. Et je crois qu’il existe pour vous des manières positives de rendre cette loi plus efficace, car il s’agit d’un outil important pour la police. Mais nous devons tous comprendre que lorsqu’on a une loi comme celle-ci, qui ne permet pas la liberté de parole et la liberté de presse, elle doit enfreindre le moins possible les droits et libertés des Canadiens et de la manière la plus efficace possible au nom du programme, et je ne crois pas que la loi actuelle fasse cela.
Je vais demander une mise à jour de la loi, un examen de la loi, et j’espère également qu’elle soit renvoyée à la Cour suprême pour voir si cette loi peut même être valable dans son libellé actuel. Mais à mon point de vue, il existe de nombreuses manières positives de réviser cette loi, de la modifier, de la renforcer tout en donnant un peu plus de liberté aux Canadiens, parce qu’elle criminalise les comportements naturels, les conversations, les confidences sur l’oreiller. Elle ne me permet pas, en principe, de vous dire certaines choses, ce qui est absolument ridicule, car j’aborde ces sujets dans d’autres administrations.
Une grosse lacune de la Loi sur le programme de protection des témoins est qu’elle n’a pas de lien avec les autres programmes d’autres administrations vous permettant de combiner les efforts des programmes, de faire émigrer et immigrer des personnes d’autres pays et de faire appliquer vos lois dans d’autres pays.
Je parlais devant une classe de droit d’une école secondaire privée pour filles en Australie il y a quelques heures à peine. J’en arrive tout juste. Et ma fierté envers cette institution et envers vous est offensée du fait que je pouvais parler plus librement à un groupe d’étudiantes de 12e année que la loi me permet de le faire avec vous.
La reddition de comptes est un problème très grave de cette loi. De qui relève-t-elle? D’une seule personne.
L’autre chose nécessaire est d’effectuer une mise à jour de la loi pour qu’elle reflète la réalité de notre société actuelle, de nos progrès technologiques actuels et des progrès technologiques à venir. J’ai été sensibilisé à cet aspect à cause d’Internet. Quelqu’un a vu un crime odieux qui a été commis dans ce pays et m’a envoyé l’article de journal. C’est ainsi que j’ai été mêlé à cela. Maintenant, pourquoi ne puis-je pas dire à ce comité parlementaire quels journaux j’ai lus? Je ne crois pas qu’il soit contraire à la loi de vous donner des renseignements quand une personne intelligente, en cherchant un peu, pourrait arriver à savoir de qui il s’agit. Je ne crois pas que cela enfreigne la loi et si nous étions à huis clos je vous en dirais beaucoup plus.
La principale raison pour laquelle je tiens ma langue aujourd’hui est qu’il y a des victimes vivantes qui ne connaissent pas l’histoire vraie. Il y a des victimes vivantes qui, si la presse donnait beaucoup plus de renseignements, seraient en mesure d’arriver à comprendre ce qui s’est produit. Deux et deux seraient mis ensemble et les personnes seraient gravement offensées.
Elles ont besoin et elles méritent qu’on leur dise la vérité. Elles ont besoin et elles méritent de tourner la page. Mais, et cela est tout aussi important, on doit leur dire qu’il y a fortement lieu à poursuites contre le gouvernement du Canada pour mort illicite.
Les crimes étaient évitables et prévisibles, mais non peut-être de la manière très odieuse dont ils se sont déroulés. Mais je vous dirai pourquoi quiconque aurait fait enquête sur ce policier ou cet agent de police voyou aurait su qu’il était un danger pour le public.
Je ne sais pas à quel point ils ont poussé l’enquête. Je ne sais pas ce qu’ils ont fait pour protéger le public, somme toute. Je ne sais pas quel genre de supervision il y a eu. Il s’agit là de questions importantes pour quelqu’un et, à mon avis, ces questions seraient importantes pour vous. Mais il vous faudrait connaître certains détails pour être en mesure de poser les questions appropriées.
Mais je peux vous dire que lorsque je me suis inscrit au programme de police auxiliaire de la Police provinciale de l'Ontario, à la suite de l’enquête de la police sur moi, ils connaissaient toutes les personnes que je connaissais. Ils connaissaient tous mes amis, ils ont parlé à des personnes que je n’avais pas vues depuis des années et ils ont remonté dans mon passé.
Des enquêtes de ce genre sont menées lorsque vous voulez un permis de débit de boisson, ma foi du bon Dieu.
Toute personne qui aurait gratté la surface après que le policier voyou a été traduit devant le tribunal, après que le tribunal a déclaré qu’il était un menteur et après qu’il a entravé la justice — toute personne qui aurait posé des questions dans notre petite ville de Victoria — aurait découvert ce que la presse a découvert. Elle aurait découvert quel genre de personne il était et quelles étaient ses phobies et ses passions. Il était impossible de découvrir toutes ces choses et de ne pas en arriver à la conclusion que cet homme était dangereux. On aurait dû le savoir, on aurait dû protéger le public.
Bon, c’est une tâche difficile, parce que souvent les personnes concernées par le programme de protection des témoins sont mêlées au milieu du crime. Je ne dis pas que vous devez n’admettre que des saints au programme, mais vous devriez connaître la personnalité des individus que vous admettez au programme. La loi dit que vous devriez. Mais ce que la loi ne dit pas, c’est dans quelle mesure les Canadiens devraient être protégés.
Vous prenez des personnes qui sont parfois dangereuses, vous les faites profiter du principe de la table rase, vous leur donnez une nouvelle identité et les installez près de vous. Votre famille mérite d’être en sécurité; car vous ne pouvez pas dire qui est véritablement cette personne. En ce qui vous concerne, c’est le vendeur de chaussures à la retraite. C’est le professeur d’école. C’est quelqu’un qui a une identité complètement nouvelle, un tout nouveau certificat de naissance et qui vit près de chez vous.
Je n’approuve pas cela, mais il arrive que la police, quand une personne sort du pénitencier, déclare publiquement, attention, cette personne est dangereuse, et alors les collectivités forcent cette personne à déménager d’un endroit à un autre. Je n’admets pas ce comportement, mais c’est le contraire. C’est de prendre des personnes qui ont été mêlées au crime organisé et de les placer directement dans le public.
Un cas a été signalé dans la presse, un nommé Trudeau. Je suppose que techniquement j’enfreins la loi, mais je vous dis seulement qu’il y avait un article de journal sur un type du nom de Trudeau dans le programme, qui avait été remis en prison pour un incident de pédophilie. Le juge dans cette affaire venait de l’est — je peux vous envoyer la cause, si vous ne l’avez pas déjà — et il a dit que cet homme avait tué plus de personnes dans sa vie que toutes les Forces canadiennes dans la guerre du Golfe. Il était dans la collectivité et il a fait du mal à un enfant.
Cette personne, que j’ai rencontrée par hasard, a fait du mal à bien des gens. Vous pouvez vous fermer les yeux, penser au pire crime imaginable, et si une larme vous vient à l’oeil, vous y êtes presque, alors multipliez cette larme, parce qu’il y a eu plus d’une victime.
À mon sens, cet homme a été prévenu par le tribunal; la GRC a été prévenue par moi, et si on avait simplement gratté la surface et fait une enquête sommaire, il n’y avait qu’une conclusion à laquelle on pouvait en venir : un malheur allait se produire. J’ai dit cela au tribunal; j’ai averti le tribunal.
Bien entendu, je me sens mal, parce que si vous êtes mêlé à quelque chose comme cela, vous pensez toujours, « Je sais qu’il n’y a rien que j’aurais pu faire que je n’ai pas fait », mais vous commencez à penser à cela.
La loi ne me permet pas d’aller au Barreau et d’en parler. La loi ne me permet pas d’aller voir un psychologue et d’en parler. La loi ne me permet pas de me confier à un bon ami ou à une personne de confiance. Eh bien, je ne jouerai pas ce jeu. Mais ce que la loi devrait faire est de faire valoir l’élément moral de la non-information des autres personnes du lieu de résidence ou de l’identité d’un bénéficiaire du programme — d’établir un lien de préjudice. Essayer de faire ressortir la sécurité et la sûreté de l’individu qui est en difficulté, et non de criminaliser un discours innocent.
Merci.
Je le suis, en effet.
Je commencerai en disant que je suis honoré d’avoir été invité ici aujourd’hui. Je ferai remarquer que j’ai témoigné devant le Comité permanent de la justice et des questions juridiques sur la Loi sur le programme de protection des témoins la veille de son adoption et que je suis reconnaissant du fait que certaines de mes préoccupations ont été respectées.
Le fait que M. Bulmer vous ait donné quelques indications sur son expérience présente un grand intérêt pour moi. J’ai personnellement une expérience beaucoup plus longue, pas nécessairement meilleure ni pire. Je représente des personnes vulnérables depuis près de la moitié d’une décennie. Cela a commencé il y a de nombreuses années lorsque j’ai rédigé la législation sur la santé mentale pour l’Ontario et pour un certain nombre d’autres provinces, et joué le rôle de consultant pour toutes les autres provinces. Je suis donc très habitué de représenter les personnes vulnérables.
Au cours des deux ou trois dernières décennies, j’ai représenté des témoins qui ont été protégés; des témoins qui voulaient être protégés mais ne l’étaient pas; et des témoins qui ne voulaient pas être protégés, mais qui, à cause d’une négligence ou d’une erreur de la part de la police ou de l’administration, ont fini par être protégés.
J’aimerais préciser un détail. M. Bulmer a dit — ou j’ai eu l’impression qu’il a dit — que les témoins protégés étaient parfois mêlés au milieu du crime. J’ai de nombreux cas de témoins protégés qui sont innocents. Ils ont été pris par la GRC ou par les corps policiers provinciaux ou municipaux et ont été protégés, admis au programme, et ils n’avaient rien à voir avec le milieu du crime. J’ai eu des femmes violentées et des personnes victimes d’extorsion qui ont fait des déclarations à la police sur leurs agresseurs et qui se sont retrouvées admises au programme de protection des témoins. Et laissez-moi vous dire que dans certains cas, ce sont les personnes innocentes qui croient qu’on les traite comme des criminels.
Le premier point auquel je veux m’attarder est que, selon moi, la Loi sur le programme de protection des témoins devrait englober tous les programmes de protection des témoins. Actuellement, elle ne comprend que le programme de la GRC, et je sais qu’il existe des programmes provinciaux et des programmes municipaux.
J’admets avec M. Bulmer que la loi existante doit être remaniée. De nombreuses améliorations pourraient lui être apportées. Mais je crois que le point principal actuellement est que le Parlement se penche sur la question des autres programmes de protection des témoins. Mis à part la Loi sur le programme de protection des témoins du Parlement, il n’y a pas d’autre loi ailleurs au Canada. À mon sens, lorsqu’il n’y a pas de loi, il n’y a pas de norme minimale. Je suis certain qu’il y a des normes, mais ces normes pourraient être inférieures aux normes. De plus, on pourrait les modifier à volonté.
Il n’y a pas de raison que le Parlement ne puisse légiférer systématiquement. Il réglemente le Code criminel et le Code criminel est examiné par les corps policiers provinciaux et municipaux. J’allègue qu’il n’y aurait aucun problème à légiférer sur la protection des témoins pour l’ensemble du Canada.
Bon, je ne veux pas dire que les provinces ou les municipalités qui n’ont pas de programme seraient obligées d’en avoir. Ce que je dis c’est que partout où il y a un programme de protection des témoins, la province ou la municipalité devrait y souscrire et être à la hauteur des normes minimales.
Par exemple, le Code criminel inclut les personnes qui ne sont pas condamnées, qui sont reconnues non criminellement responsables, et chaque province a décidé d’avoir un comité d’examen qui s’occupe de ces personnes qui sont reconnues non criminellement responsables, mais le gouvernement fédéral réglemente les normes.
Maintenant dans un autre ordre d’idées, je veux parler des avis juridiques à la personne qui serait protégée. Il s’agit là, je pense, de l’un des plus importants domaines dont votre comité devrait discuter. Je me suis occupé ou mon cabinet s’est occupé de nombreuses causes — et plusieurs me viennent à l’esprit — où la personne admise au programme n’a pas d’avis juridique indépendant. Cet avis juridique indépendant devrait être donné le plus rapidement possible, dès que l’on sait que la personne est un bénéficiaire éventuel. Il arrive parfois que le policier ou la policière dise au bénéficiaire éventuel que les promesses verbales qu’il ou elle fait au bénéficiaire éventuel ne peuvent être mises par écrit. Il ou elle dit, fais-moi confiance, nous ne pouvons pas mettre cela par écrit, et il se peut que l’on dise au bénéficiaire éventuel que la raison pour laquelle on ne met pas cela par écrit, c’est qu’on ne veut pas compromettre son aptitude à témoigner, de sorte que l’avocat de la défense ne demande pas combien d’argent on lui a versé pour témoigner.
Il y a donc un problème intrinsèque. Parfois, le policier dit au bénéficiaire éventuel qu’il a peu ou pas de temps pour consulter un avocat, et les observations sont faites, et la personne qui devient protégée s’attend à beaucoup plus que ce qu’elle obtient. Cela est très, très malheureux, parce que si un avocat était là et examinait ce qui a été promis et ce qui a été mis par écrit, car il y a généralement un écrit, l’avocat aviserait le bénéficiaire éventuel qu’il n’obtient pas ce qui a été promis. Il y aurait moins de poursuites si l’avis juridique était donné dès le début. Et, dans sa sagesse, la loi dit qu’un mari qui hypothèque sa propriété doit faire en sorte que son épouse reçoive un avis juridique indépendant, afin de savoir ce qu’elle signe. Ces choses ne sont donc pas inconnues dans la loi anglo-américaine. Je crois que si l’avis juridique était obligatoire, il y aurait beaucoup moins de litiges et les gens sauraient ce pour quoi ils négocient et ce qu’ils pourraient obtenir.
Un autre problème est que le policier ou la policière qui fait les observations ou les promesses exagère. Il ou elle veut obtenir une déclaration de culpabilité et promettra le soleil, la lune et les étoiles à la personne; mais en particulier s’il y a réinstallation à l’autre bout du pays, l’officier traitant — la personne qui doit prendre en charge le bénéficiaire au nouveau lieu de résidence — n’a fait aucune promesse, ce qui peut engendrer beaucoup de friction.
Je pense donc que la loi devrait être modifiée de manière qu’il soit obligatoire pour la police de s’assurer que le bénéficiaire éventuel obtienne un avis juridique indépendant. Il se pourrait bien que la personne n’en ait pas les moyens. Plus d’une fois, des services policiers se sont adressés à moi pour me demander de conseiller un bénéficiaire éventuel et ils m’ont payé. Je crois que la loi pourrait certainement être améliorée dans ce sens.
Mon temps est-il écoulé?
Je conclurai donc.
Je n’aborderai qu’une des deux catégories. La première concerne le conflit d’intérêts. Selon le texte de la Loi sur le programme de protection des témoins, il y a un contrat ou un accord dans chaque cas, un entre le commissaire ou son représentant désigné et le bénéficiaire. Il y a là conflit d’intérêts, parce que le commissaire ou son représentant désigné peut décider qu’il y a eu infraction de la part du bénéficiaire et dire, écoutez, vous ne faites plus partie du programme, et cela devient très déloyal.
Nous avons eu une cause à notre bureau pour laquelle nous sommes allés à la Cour fédérale pour présenter une demande de révision judiciaire. Je lirai simplement ce que le juge a dit. Cela sera très rapide. Il s’agit du juge Phalen de la Cour fédérale :
Il faut prendre en considération les conséquences que peut avoir sur le bénéficiaire de la protection la décision de mettre fin à celle-ci. Le bénéficiaire se trouve dans la position la plus vulnérable qui soit: il n'est plus utile aux autorités et il est un fardeau pour ses protecteurs, mais il a besoin de leur protection pour sa sécurité. Il a respecté sa partie de l'accord et il compte maintenant totalement sur le fait que ses protecteurs respecteront la leur. On pourrait s'en prendre à lui physiquement s'il n'est plus protégé. Ainsi, sa vie et sa sécurité pourraient être menacées. En conséquence, les attentes et le degré d'équité procédurale requis sont élevés.
Un bénéficiaire ne devrait pas avoir à aller en cour pour établir cela. Cela devrait aller de soi.
Enfin — et je saute deux ou trois points — je veux dire que je ne sais pas comment votre comité peut évaluer équitablement le programme, parce que vous ne recevez pas suffisamment de renseignements. J’ai lu la transcription des policiers qui ont témoigné devant vous, et, dans de nombreux cas, ils ne répondaient pas à la question parce qu’ils ne le pouvaient pas ou parce qu’ils ne connaissaient pas la réponse, etc. À moins qu’il n’y ait une étude indépendante du programme avec la GRC, et les autres programmes, pour voir réellement où va l’argent et comment il est dépensé, comment votre comité peut-il équitablement saisir ce qui doit être fait?
Je crois que je m’arrêterai ici.
J’ai un dernier point. Je dirai qu’au sujet du cas du bénéficiaire qui a apparemment commis un meurtre et de l’incapacité de la GRC à donner l’information, mon interprétation de la loi est que la GRC a tout à fait tort, qu’il s’agit d’un cas d’exception et qu’ils devraient pouvoir discuter de l’identité de la personne.
Merci beaucoup, monsieur.
Si vous avez d’autres renseignements, vous pouvez peut-être les partager avec nous durant la période des questions et observations qui occupera le reste du temps. Si vous estimez à la fin de la séance ensemble que vous avez d’autres renseignements à partager, vous pouvez toujours les soumettre par écrit au comité.
Cela vaut pour nous tous.
Passons maintenant à l’opposition officielle. Madame Barnes, s’il vous plaît.
Merci beaucoup.
Et merci à vous deux.
Ce que vous avez dit tous deux est que des changements pourraient et devraient être apportés à la loi telle qu’elle se présente actuellement, et vous avez tous deux des idées différentes.
Pour les besoins de la Cour, j’aimerais que vous indiquiez dans quelles circonstances ou situations, selon vous, l’identité d’un bénéficiaire devrait être révélée? Est-ce simplement dans le cas d’un meurtre ou d’un homicide? Est-ce simplement dans un cas de sévices graves à la personne? Et serait-ce à votre avis un élément de modification éventuelle de la loi?
M. Bulmer, d’abord.
Merci.
Je ne crois pas que l’identité de la personne soit le problème. Par exemple, je ne me soucie nullement de l’identité de cet homme. De fait, il peut avoir changer de nom encore une fois. Il n’a assurément pas besoin du programme de protection des témoins maintenant et n’en aura jamais besoin, alors je me fiche de qui il est. Je me fiche de l’endroit où il se trouve. Je crois que ce qu’il a fait constitue une information que vous devriez connaître. Il s’agit d’une information que les victimes vivantes devraient connaître.
La GRC m’a au moins dit — ses représentants ont fait le voyage d’Ottawa à Victoria pour me parler — que cette personne faisait partie du programme de protection des témoins; elle a ainsi enfreint la loi en me disant cela, mais elle l’a fait pour m’avertir que je risquais une inculpation si je révélais trop de renseignements. Eh bien, je ne crois pas que cela soit le cas non plus, et je suis d’accord avec mon ami de Toronto. Cela n’est pas mon interprétation de la loi non plus. Mais qui veut flirter avec un service de police trop zélé qui porte des oeillères? Et qui veut porter à l’attention le tort et la douleur inutiles causés aux victimes?
Je crois que le programme, tel qu’il est dans certaines administrations, devrait être supervisé par un conseil. Même ce conseil n’a pas besoin de connaître les noms et les lieux de résidence des personnes, mais il doit savoir qui elles sont, ce qu’elles font, comment elles se comportent dans la collectivité, quelles mesures de protection sont en place dans la collectivité. Lorsque quelque chose va de travers, le public a le droit de le savoir. Je suis d’accord, le programme indique spécifiquement que si une personne agit dans la collectivité de manière à attirer l’attention, le commissaire peut divulguer qui est cette personne. Si elle enfreint une loi du Parlement — et le meurtre est certainement l’une de ces infractions —, alors le commissaire peut vous dire de qui il s’agit.
Ainsi, ils ne considèrent vraiment pas le pouvoir qu’ils ont déjà en ne répondant pas à vos questions, car il existe. Selon ma thèse et d’après ce qui s’est produit, la personne n’aurait pas dû en premier lieu être admise au programme, car les critères sont des points comme la valeur de sa preuve. Or, sa preuve était inventée de toutes pièces. Il avait fait entrave au bon fonctionnement de la justice de la manière la plus grave avant d’être admis au programme. Il a été déclaré non fiable par la Cour suprême, alors il n’aurait même pas dû être admis. Je crois qu’ils ne lisent pas leur propre loi. Elle devrait être révisée.
J’ai demandé aujourd’hui si les rapports de la presse étaient véridiques. Le ministre responsable a demandé qu’on lui fasse un exposé sur ma cause, et j’ai lu dans la presse que la GRC a dit qu’il ne pouvait pas connaître les détails de l’affaire. Eh bien, ce sont des absurdités. Cela est absolument idiot qu’il ne doive pas pouvoir être mis au courant des faits de la cause. Où se trouve cette personne? On s’en moque! Appelez-la Numéro Un, mais il doit savoir.
Je crois que le conseil devrait être composé du ministre ou de son représentant désigné, peut-être d’une personne du banc, peut-être d’une personne du Barreau, et de deux ou trois profanes. Encore une fois, ces personnes n’ont pas à connaître tous les détails, mais elles doivent savoir que les choses se font correctement.
En Australie, le programme doit relever du ministre. Le ministre doit déposer un rapport annuel. Au Canada, le commissaire produit un rapport annuel et le ministre le dépose. Eh bien, la queue agite le chien!
Merci.
Je suis d’accord avec M. Bulmer. Les corps policiers, particulièrement la GRC, ne gouvernent pas ce pays; ce pays est gouverné par le Parlement. La GRC est responsable devant le Parlement. Je trouve déplorable que la GRC puisse se cacher sous un voile.
La loi est correcte comme elle est, mais je crois que ce n’est pas au commissaire de décider ce qui sert le mieux l’intérêt public. Voici l’exception à la divulgation: si la divulgation est essentielle à l’intérêt public, alors elle doit se faire. Je ne crois pas que le commissaire doive décider ce qui sert le mieux l’intérêt public; je crois que c’est le rôle des membres élus du Parlement ou des ministres du cabinet. Le commissaire ne décidera pas nécessairement ce qui servira le mieux l’intérêt public; il décidera ce qui sert le mieux les corps policiers parce qu’il doit être conséquent avec lui-même.
Comme l’a mentionné M. Bulmer, si un conseil indépendant prenait quelques-unes de ces décisions, nous n’aurions pas la police contre le bénéficiaire; nous aurions la police et le bénéficiaire dans une relation équilibrée. Si une autre personne, un tribunal quelconque, prenait ces décisions, les bénéficiaires innocents ne se verraient pas comme des criminels et ne croiraient pas que les policiers sont contre eux. Il est bien que les policiers obtiennent l’aide d’informateurs et réussissent à faire condamner des criminels, mais ils ne peuvent se débarrasser des bénéficiaires par la suite.
Dans certains cas, le tribunal a déclaré après coup: « Vous n’auriez pas dû agir ainsi; vous auriez dû être équitables ». Avec un peu de chance, la GRC comprendra le message. Sinon, je crois que le Parlement doit retirer la responsabilité des mains de la GRC. Les corps policiers ne sont pas au-dessus des lois. Ils ne décident pas des lois, c’est le travail du Parlement.
[Français]
Il est évident que vous soulevez certaines de nos inquiétudes. Toutefois, j'ai peine à comprendre les solutions que vous nous offrez et leur portée.
Je sais que la loi est imparfaite. Je crois qu'un comité indépendant constituerait sûrement une amélioration. Par contre, monsieur Bulmer, il me semble que vous disiez au début que les voisins de ces témoins protégés devraient être avertis du caractère dangereux de la personne qui habite maintenant dans leur voisinage et donc de ce qu'elle a fait. Mais si on fait cela, il me semble qu'on dévoile l'identité, et le but du programme est justement de donner une nouvelle identité aux témoins, car si on ne le fait pas, dans les cas les plus graves, ils risquent d'être tués.
Pensez-vous véritablement qu'on doive trouver un domicile à un témoin protégé et avertir ensuite son voisinage qu'il est dangereux, parce qu'il a tué plusieurs personnes auparavant? D'abord, il n'y pas tellement de gens au Canada qui ont tué plusieurs personnes. Très souvent, le type de crime qu'ils ont commis — Dans une province comme le Québec, je crois que les gens reconnaîtraient facilement l'identité d'un individu à partir du moment où on leur dirait quel genre de crime il a commis.
Je ne comprends pas cette partie de vos suggestions. Cependant, je sais que vous avez étudié la question en profondeur, que vous avez regardé ce qui se fait ailleurs et que vous avez des suggestions précises à nous faire pour améliorer la loi. J'avoue, monsieur Bulmer, que je serais très heureux de les recevoir par écrit.
[Traduction]
Je crois que je ne me suis pas bien exprimé. J’ai dit que ces gens habitaient dans votre collectivité, près de chez vous, non pas pour que la GRC puisse cogner aux portes et mettre les gens au courant qu’une telle personne habite dans le quartier. J’ai soulevé le point seulement pour souligner la grande responsabilité que la GRC a de vous protéger et de protéger vos familles lorsqu’elle place quelqu’un à côté de chez vous et que cette personne est dangereuse. Ce n’est pas qu’on vous le dira jamais, mais quel est le niveau de supervision que la GRC exerce sur cette personne? Si cette personne possède des traits de caractère connus qui la rendent dangereuse, la GRC va-t-elle simplement l’installer près de chez vous, partir et lui dire « Profite de ta nouvelle vie »?
Si cette personne récidive, j’aimerais vraiment que les juges qui imposent les peines sachent que cette personne n’est pas un délinquant primaire, qu’ils sachent que cette personne a des antécédents criminels.
Pour mieux répondre à votre question, je ne peux vous aider avec l’analyse en français; elle est peut-être plus claire, mais tous devraient connaître la loi. Dire que l’ignorance de la loi n’est pas une excuse est un peu une formule consacrée, mais vous devriez être en mesure de trouver ce que dit la loi.
Le paragraphe 11(1) de la version anglaise stipule qu’il est interdit de communiquer sciemment, directement ou indirectement, des renseignements au sujet du lieu où se trouve un ancien ou actuel bénéficiaire ou de son changement d'identité. Ce n’est pas du bon anglais. Que signifie « lieu où il se trouve »? Si j’affirme qu’il vit en Ontario, est-ce que je dis où il habite? S’il se trouve à l’extérieur de cet immeuble, est-ce que j’ai divulgué le lieu où il se trouvait? S’il est déménagé à l’autre bout de la rue, ai-je divulgué le lieu où il se trouve? À quel moment est-ce que je divulgue le lieu où il se trouve?
Si je me promène dans les rues de Toronto, que je rentre à la maison et que je dis à un membre de ma famille : « Tu ne croiras jamais qui j’ai croisé dans la rue. Te souviens-tu de cette grosse affaire dans les journaux? », ai-je commis une infraction?
Je n’aime pas beaucoup plus ce libellé, mais au moins, dans la Loi sur la protection des témoins de l’État de Queensland — Je peux vous dire qu’il existe une loi fédérale et que chaque État possède sa propre loi d’État et que ces lois entrent presque toujours en conflit. Je ne peux donc pas vraiment vous expliquer comment fonctionne le régime là-bas. Mais ces lois permettent de faire beaucoup d’autres choses. Elles permettent la communication aux fins de l’administration de la loi. Votre loi ne le permet pas.
Lorsque le responsable à la GRC m’a dit que mon gars faisait partie du Programme de protection des témoins, je ne connais pas la loi habilitante qui lui permet de me donner cette information. Rien n’indique dans votre loi qu’un policier puisse le dire à un autre policier. Dans d’autres lois, la communication aux fins de l’administration de la loi est permise, mais elle ne semble pas être permise dans cette loi. En Australie, en vertu de la loi de l’État de Queensland, mais non en vertu d’autres lois, une personne commet une infraction si elle communique ou enregistre sciemment, directement ou indirectement de l’information sur une personne dans le cadre du Programme de protection des témoins si l’information peut menacer la sécurité de la personne ou l’intégrité du programme ou d’autres activités de protection des témoins de la commission.
[Français]
Je suis désolé de vous interrompre, monsieur Bulmer, mais vous avez parlé longtemps, et j'aimerais vous poser au moins une autre question.
Vous soulevez un point qui m'intrigue beaucoup. Si l'un de ces témoins commet un crime, on va prendre ses empreintes digitales au moment de son accusation. À ce que je sache, il n'y a aucun de ces témoins à qui on change les empreintes digitales, n'est-ce pas?
On saura donc qu'il a déjà commis d'autres crimes. Vous semblez dire que si cette personne commet un autre crime, le juge ne saura pas quels autres crimes elle a déjà commis. Il me semble qu'avec le système d'empreintes digitales que nous avons, le juge le saura. Il saura qu'il a commis d'autres crimes sous un autre nom.
N'est-il pas vrai que c'est de cette façon que les choses fonctionnent?
[Traduction]
[Français]
[Traduction]
[Français]
C'est un des problèmes qui me sont venus à l'esprit pendant que je vous écoutais, monsieur Bulmer. Vous voyez des dangers considérables dans l'application de cette loi. Il y a des choses sur lesquelles vous avez parfaitement raison. Cette loi pourrait et devrait être mieux écrite. Il devrait y avoir une disposition nous permettant de divulguer l'endroit où est la personne, ou son nom, pour les fins de l'administration de la justice. Je pense que c'est nettement une amélioration qui pourrait être apportée. Je cherche à comprendre vos solutions et vos craintes.
Les craintes dont vous nous faites part et les cas extrêmes que vous appréhendez sont-ils déjà arrivés?
Connaissez-vous des cas réels illustrant les dangers que vous nous signalez?
[Traduction]
Vous devrez poser la question à la GRC pour savoir si, dans mon cas, le juge qui a imposé la peine connaissait les antécédents de cette personne, car je ne le sais pas.
Je crois comprendre que le casier judiciaire d’un bénéficiaire est scellé et qu’il est impossible d’y avoir accès. Si un tribunal a le droit de le consulter, cela ne fait pas partie de mon expérience.
Merci, monsieur le président.
Je veux remercier M. Bulmer et M. Swadron d’être avec nous.
À la suite du témoignage que la GRC a rendu plus tôt pendant ces audiences, nous avons fait circuler une note de service aux cadres supérieurs de la GRC, j’imagine, pour discuter expressément du cas de Young. Sur la deuxième page, la dernière du document, un énoncé indique que les règles d’admission au Programme de protection des témoins sont clairement stipulées dans la Loi sur le programme de protection des témoins et aucune exception n’est faite. Les processus sont toujours suivis à la lettre du texte.
Je demande à chacun d’entre vous si ce fut votre expérience. Monsieur Swadron, vous pouvez commencer, puisque vous avez plus d’expérience dans un certain nombre de cas.
Je le répète: les processus sont toujours suivis à la lettre du texte.
Ah non, je ne crois pas que ce soit vrai. En ce qui concerne l’interprétation de la Loi, je ne suis pas d’accord avec la note de service. Je crois que la GRC est informée par le ministère de la Justice, mais que celui-ci n’a pas toujours raison. Ce n’est pas mon expérience. Je crois que la GRC a fait preuve de souplesse.
Vous n’êtes pas sans savoir que j’ai eu à traiter quelques cas très bizarres. J’ai eu des cas où le responsable de cas était accusé d’avoir agressé sexuellement la femme d’un bénéficiaire, où le bénéficiaire s’est retrouvé en traitement psychologique, où le responsable de cas a trouvé le psychologue et ou le responsable de cas a lu les notes du traitement psychologique du bénéficiaire — alors je ne crois pas du tout.
Mon ami parlait plus tôt d’innocentes personnes. Je ne veux pas perdre de temps, mais je veux porter votre attention sur une affaire qui appuie ce qu’il a dit. Il s’agit de l’affaire Franc c. Webb. C’est une affaire civile entendue à la Cour suprême de la Colombie-Britannique en 1998. La décision a été rendue par la juge Boyd.
M. Franc était un bénéficiaire totalement innocent qui a entamé des poursuites contre la GRC et qui a gagné pour violation de contrat pour des représentations qu’elle avait faites par écrit et verbalement. Il voulait aller en Australie, mais la GRC lui a dit qu’elle n’avait aucun moyen pour l’y envoyer. La loi semble permettre aux gens de venir ici, mais elle ne semble pas leur permettre de partir.
Mon affaire est un exemple parfait. J’étais vraiment préoccupé après l’appel d’un homme de la GRC qui m’a avisé de la loi, mais qui n’est pas vraiment venu pour enquêter, ni me poser des questions sur ce qui s’est passé. Cet homme s’est infiltré dans mon bureau. Cet homme a engagé des gens pour suivre les policiers de la GRC et a raconté une théorie de la conspiration sur le meurtre d’un juge, d’un procureur de la Couronne, d’un avocat de la défense et d’une autre personne. Les policiers croyaient cette théorie. Ils en ont fait un agent de police. Ils ont orchestré une opération d’infiltration pour arrêter mon client.
La théorie était fausse. L’homme avait engagé des gens pour suivre les policiers. Il a tout inventé.
Je défends régulièrement des gens pour obstruction lorsqu’ils donnent à un policier un faux nom alors qu’ils doivent s’identifier de manière appropriée —
Monsieur Bulmer, laissez-moi vous interrompre, car je voudrais vous poser une question précise dans le même ordre d’idées.
Il est écrit dans ce rapport qu’il est important de mentionner qu’au moment où le sujet — ils parlent de Young — est entré dans le Programme de protection des témoins, il n’avait pas de casier judiciaire. Je ne sais pas si c’est exact, mais ils poursuivent et disent qu’il n’y avait aucune indication de délit criminel.
Êtes-vous d’accord avec cette conclusion?
La Couronne a dû laisser tomber des accusations assez graves parce que la GRC n’avait pas dit au juge qu’elle possédait une note de service interne d’un expert en polygraphie indiquant que M. Young n’était pas crédible. Elle n’a pas donné cette information au juge qui a rédigé le premier mandat. Par conséquent, quelques graves accusations ont dû être retirées.
Le détachement de Vancouver semblait dire au détachement de Victoria de faire attention. Il semblait se dérouler une lutte politique entre les deux à un certain moment.
Mais personne ne m’a dit à quelle époque il faisait partie du Programme de protection des témoins. Je ne connais pas la date de son entrée. J’ai une idée de la date à laquelle il est devenu policier, qui pourrait remonter à la même époque. Mais à ce moment, à titre d’avocat de la défense, j’exprimais certes déjà mes préoccupations. Après avoir appris que c’était un agent et que toute l’information était arrivée et enfin que le juge —
Même s’il faisait partie du programme, pourquoi ne l’en ont-ils pas retiré? Peut-être l’ont-ils fait, mais, à l’évidence, ce n’est pas le cas. Ils doivent tenir compte du risque pour la sécurité du témoin — je ne connais pas le niveau de menace à laquelle ils croyaient faire face — le danger pour la collectivité si le témoin était admis dans le programme — ils auraient dû enquêter; ils auraient appris quelque chose — l’importance du témoin dans l’affaire — incertaine — et la valeur de l’information ou des preuves données — eh bien, elles n’avaient finalement aucune valeur.
Monsieur Swadron, je sais que vous vous êtes occupé d’un certain nombre d’affaires pour des personnes qui faisaient partie du programme et qui n’étaient pas satisfaites de la manière dont elles ont été traitées. Une de ces personnes s’est-elle déjà rendue en cour, et existe-t-il des décisions du tribunal concernant des personnes qui n’auraient pas été bien traitées en vertu de la loi?
Laissez-moi vous dire que, sur le nombre d’affaires que j’ai eues, j’ai toujours été déterminé à les faire entendre par un tribunal. J’ai dépassé l’étape de la découverte, mais il semble qu’à ce moment-là, la GRC ou les responsables du programme provincial se sont vraiment dégonflés.
J’ai présenté des requêtes pour obtenir, par exemple, le guide de la GRC sur la protection des témoins. Oui, elle possède un guide et il est très élaboré. Quand je l’ai demandé, la GRC m’a donné les sections A, B et F par exemple, et je sais qu’il y en a d’autres, alors j’ai présenté des requêtes.
À une occasion en particulier, je me souviens avoir présenté une requête contre la GRC. Le tribunal a décidé qu’elle devait fournir d’autres sections du guide et voilà qu’un règlement amiable a été rendu une semaine plus tard selon lequel la GRC n’avait pas à tout communiquer.
Quelques affaires en sont encore à l’étape de découverte, mais nous sommes déterminés à poursuivre. Mais, pour une raison quelconque, elles s’écroulent à la dernière minute et un règlement amiable est rendu parce que la GRC ne veut pas dévoiler ses secrets.
Merci, monsieur le président, et merci à chacun de nos témoins qui ont accepté de se présenter devant le comité aujourd’hui.
Monsieur Swadron, j’aimerais simplement donner suite au commentaire de M. Comartin. Ces cas mis à part, il n’est pas inhabituel d’avoir une clause de non-communication dans ce genre d’affaires. Est-ce une évaluation juste?
[Note de la rédaction—Inaudible]— habituel d’avoir une ordonnance imposant le silence. Lorsqu’il n’est pas question de protection de témoins, c’est souvent qu’il n’y a aucune admission de responsabilité de la part de l’accusé et il y a un moratoire qui empêche de parler de la valeur du règlement amiable. Mais je n’ai jamais signé de règlement amiable indiquant que je ne pouvais pas parler de l’affaire.
D’accord, merci.
Monsieur Bulmer, je crois que vous en avez parlé et je pense que M. Ménard a posé la question sur la situation concernant le casier judiciaire. Je crois comprendre, d’après les témoins que nous avons entendus et auxquels nous avons parlé, que le casier judiciaire suit une personne, mais pas nécessaire un nom. Êtes-vous au courant?
Je ne suis pas au courant. C’est assurément une de mes préoccupations. J’aimerais vraiment savoir si tel est le cas. Je pense que ce devrait être rassurant. Il devrait y avoir une disposition dans la loi.
Oui, dans tous les cas que je connais, le casier judiciaire a suivi la personne. Il serait terrible qu’une personne qui a un long casier judiciaire puisse l’effacer autrement qu’en demandant un pardon, ce qui est la chose habituelle à faire.
Pouvez-vous imaginer avoir travaillé toute votre vie, atteindre 60 ans et avoir accumulé des droits à pension, changer de nom et, soudainement, perdre votre pension? Votre numéro d’assurance social (NAS) est changé. Tous vos crédits du RPC vous suivent, vos crédits d’impôt pour enfants à charge. Ce qui devrait vous suivre vous suit. C’est ce que la GRC est censée faire. Elle le devrait, elle le fait. Elle transfère le casier judiciaire. C’est essentiel.
C’est exact. En fait, une personne qui obtient un pardon a un plus long casier judiciaire parce que celui-ci contient tout ce que la personne a fait avant, de même qu’un autre enregistrement qui indique qu’elle a obtenu un pardon.
Je vous remercie.
Monsieur Bulmer, je crois que vous avez dit que cette personne — dont M. Comartin a parlé — a infiltré votre bureau, mais, si je comprends bien l’article, il était déjà un de vos clients avant de travailler avec la GRC. Est-ce exact?
Non, il était informateur pour la GRC en tout temps, mais il est devenu un employé de la GRC après m’avoir présenté à mon client. Cette personne m’a engagé pour faire un petit travail pour une entreprise. Elle m’a ensuite dit qu’un de ses amis avait des problèmes. Ils sont venus me voir. J’ai décidé de les représenter. Mon client m’a dit que je pouvais utiliser cette personne comme si c’était lui-même.
Il est parti chez lui avec quelques parties du dossier, a pu lire les noms de certaines personnes, dont un juge et un procureur de la Couronne. Il a ensuite imaginé un plan selon lequel mon client voulait tous les faire tuer et a convaincu la GRC en engageant de jeunes gens pour effectuer une contre-surveillance. Ils ont témoigné.
Ne seriez-vous pas d’accord pour dire qu’il vous avait également convaincu qu’il était légitime d’apporter ces dossiers à la maison?
Puis, il est devenu une sorte de dispositif d’écoute vivant. Il est devenu un dispositif d’écoute vivant pour la GRC.
Je ne crois pas avoir terminé de répondre à votre question sur l’affaire. Franc c. Webb est l’affaire C965011 de la Cour suprême de la Colombie-Britannique en 1998. C’est une affaire à propos de la GRC qui a violé des contrats.
Monsieur Swadron, un peu plus tôt, je crois que vous nous avez dit que la loi, à l’alinéa 11(3)c), stipule que « si la divulgation est essentielle dans l’intérêt public », mais elle se poursuit en indiquant « pour des buts tels que… ». Est-ce que vous suggérez que les points à l’alinéa 11(3)c) et aux sous-alinéas i), ii) et iii) ne sont pas assez larges, qu’ils sont trop larges ou qu’ils devraient être mieux définis?
Ils pourraient toujours être mieux définis. Je ne m’y suis pas encore attardé, parce que cette affaire en particulier, l’affaire Young dont vous parliez, est clairement couverte par le sous-alinéa i) :
l'intérêt public l'exige notamment
i) pour prévenir la perpétration d'une infraction grave où — [le bénéficiaire]—a été mêlé à la perpétration d'une infraction grave ou qu'il peut fournir des renseignements ou des éléments de preuve importants à cet égard.
Que voulez-vous de plus?
La personne aurait commis un meurtre. Les policiers font enquête et la GRC, si elle l’utilise comme informateur, enquêterait avec d’autres forces policières et, dans cette affaire en particulier, c’est clairement couvert.
Je n’arrive pas à concevoir que la GRC ait pu dire que tout le monde a tort, alors que la police dit que la GRC devrait être en mesure de communiquer ces renseignements. Je pense que c’est un cours de communication 101.
Si vous me permettez un commentaire, je vous dirai que je suis d’accord, mais que tout reste à la discrétion du commissaire. La Loi stipule également que le bénéficiaire ou l’ancien bénéficiaire « a déjà communiqué les renseignements ou a provoqué leur communication par ses actes ». On a parlé de lui dans les journaux, on l’a accusé de meurtre, il a alors agi dans la collectivité d’une manière qui a provoqué la communication des renseignements, selon moi.
Je crois que je suis un peu comme M. Ménard; je suis un peu déconcerté. Si Young est le nom actuel et qu’il est accusé de meurtre —
D’accord, mais si c’est le cas et qu’il est accusé de meurtre, êtes-vous en train de dire que son nom ne serait pas dévoilé?
Non, je dis seulement que la loi stipule dans ses exceptions — et vous avez déjà parlé de quelques-unes d’entre elles — qu’en vertu de l’alinéa 11(3)b), l’exception est que le commissaire peut communiquer les renseignements si le bénéficiaire ou l’ancien bénéficiaire « les a déjà communiqués ou a provoqué leur communication par ses actes ».
Ce que je dis, c’est que, si vous agissez en public de manière à attirer l’attention sur vous et que je peux reconnaître le visage de l’homme sur la première page d’un journal, je crois cette façon d’agir, sinon l’intérêt public dont nous avons déjà discuté, serait encore une bonne méthode grâce à laquelle le commissaire devrait au moins communiquer ce que la personne a fait, pas nécessairement qui elle est maintenant.
Oui, mais je me demande si c’est au commissaire de décider. Il est évident qu’il a décidé, mais il a aussi le droit de prendre de mauvaises décisions, et peut-être qu’elles devraient être renversées.
Merci, monsieur MacKenzie.
Nous redonnons la parole au Parti libéral. Monsieur Cullen, vous avez cinq minutes s’il vous plaît.
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Bulmer et monsieur Swadron.
Je crois que votre point sur le fait que le commissaire n’est peut-être pas toujours la personne appropriée pour décider de l’intérêt public permet de faire une observation très intéressante; l’idée que les élus pourraient peut-être également participer à la prise de décisions est un bon point.
J’aimerais revenir aux témoins des États-Unis et du Royaume-Uni qui ont témoigné la semaine passée lors de notre dernière réunion. Je me souviens qu’ils ont indiqué que la plupart des personnes participant au Programme de protection des témoins étaient des gens qui avaient choisi le chemin de la criminalité. En fait, je crois que le témoin américain a dit qu’aux États-Unis, quelque 95 p. 100 ou plus des gens dans le Programme de protection des témoins avaient un casier judiciaire ou avait pris le chemin de la criminalité.
Monsieur Swadron, vous semblez dire que de nombreuses personnes au Canada dans le Programme de protection des témoins étaient des gens honnêtes, des citoyens respectueux des lois. S’agit-il de votre expérience particulière ou avez-vous des statistiques à ce sujet?
C’est mon expérience et je possède des statistiques individuelles. Je peux vous dire dès le départ que des personnes faisant partie du Programme de protection des témoins sont des membres de la famille, des personnes qui n’ont jamais commis de crime, même si le principal joueur en a commis. Beaucoup de femmes sont entrées dans le programme, beaucoup d’enfants également et ils n’ont jamais commis de crime et ne sont pas non plus des informateurs.
Dans certains cas, des femmes victimes de violence sont entrées dans le programme. Tant la GRC que les forces policières provinciales ou municipales sont — Certaines personnes commettent des crimes. Je dirais que la majorité des personnes avec lesquelles j’ai eu affaire n’ont commis aucun crime — si ce n’est des crimes mineurs, insignifiants.
Merci. J’aimerais passer à un autre point maintenant.
Monsieur Bulmer, monsieur Swadron, je crois que l’un de vous a indiqué, ou peut-être l’avez-vous fait tous les deux, que la GRC cache à tort des renseignements sur cette affaire en particulier que nous avons tous suivie, et que la GRC peut en fait, en vertu de la loi, communiquer plus de renseignements. La loi contient-elle une disposition expresse qui le permet, ou s’agit-il d’une disposition implicite qui le permettrait selon vous si — en d’autres mots, si nous voulions plus de renseignements à propos de cette situation en particulier?
Monsieur, nous nous répétons, mais c’est à l’article 11, dans les exceptions, aux alinéas (3)a), b) et c). Les exceptions permettent au commissaire de communiquer des renseignements, en obtenant d’abord le consentement du bénéficiaire, que vous n’obtiendrez probablement pas, bien qu’il puisse le donner; si le bénéficiaire a déjà communiqué les renseignements ou a provoqué leur communication par ses actes — J’ai déjà discuté de ce point — et ensuite M. Swadron a discuté de l’alinéa c), qui stipule que la communication est essentielle à l’intérêt public pour enquêter sur une infraction grave, pour prévenir la perpétration d'une infraction grave ou pour assurer la sécurité ou la défense nationale.
Maintenant, en tant que comité préoccupé par la sécurité nationale, et je crois qu’il s’agit d’une question de sécurité nationale, vous pourriez demander au commissaire de vous dévoiler plus de renseignements à propos de n’importe lequel de ces points. J’ai parlé de la méthode australienne ou, au moins, d’une des méthodes australiennes, parce que je crois que la non-communication ne devrait pas concerner le lieu ou la communication de l’identité d’une personne; elle devrait être afférente au fait de chercher à faire du tort à cette personne ou à nuire au programme, parce que la personne elle-même n’est pas tellement importante. Dans ce cas, il s’agit davantage de connaître assez bien les faits pour être en mesure de poser les bonnes questions. Quant à lui, à titre de personne, il est caché, et il s’en porte bien.
Si je m’avançais un peu plus, j’affirmerais que je serais heureux de présenter une requête contre le commissaire en vertu de l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, car j’estime que le droit de savoir se rapporte à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne. Je pense que l’action posée par le commissaire, soit de refuser la divulgation, pourrait être invalidée dans le cadre d’une requête présentée en vertu de la Charte.
[Français]
Il est évident que dans un tel programme, sauf pour les cas que M. Swadron a défendus souvent, c'est-à-dire concernant des témoins parfaitement innocents — Je comprends que vous parlez de gens qui, au cours de leur vie, auraient été témoins de crimes importants et dont les témoignages étaient importants, mais s'ils sont connus, ils risquent de faire l'objet de menaces et même d'être éliminés. C'est de cela que vous parlez, quand vous parlez de témoins totalement innocents?
Dans la plupart des cas — et aux États-Unis, je crois, c'est dans 95 p. 100 des cas —, il s'agit de gens qui ont fait des activités criminelles, dont on a besoin du témoignage pour faire condamner d'autres personnes ayant participé à ces activités criminelles. Ces gens risquent leur vie en collaborant avec la police. C'est pourquoi on a créé un programme de protection des témoins.
Soit dit en passant, j'ai commencé à pratiquer le droit criminel en 1966. À l'époque, de tels programmes n'existaient pas. Je m'aperçois que dans tous les pays civilisés qui ont des systèmes de droit comparables au nôtre, et aussi fiables que le nôtre, on a créé de ces programmes. J'ai assisté à leur création. On l'a fait de façon un peu artisanale au début, avant d'avoir une loi.
Une des choses qui nous préoccupent, c'est que ces gens ont été des délinquants et risquent de l'être de nouveau. Quand on conclut un accord avec eux pour les protéger, on pense que dans l'immédiat, il n'y a pas de danger qu'ils commettent d'autres actes criminels. Ils sont bien avertis que, s'ils commettent un acte criminel, ils perdront la protection dont ils bénéficient.
On est même prêt à leur donner du soutien psychologique. Cependant, après un certain temps, s'ils n'ont pas commis d'actes criminels, on les abandonne complètement.
Vous avez une pratique dans ce domaine. Croyez-vous que, dans la pratique, il serait bon d'exercer une surveillance régulière ou d'effectuer des évaluations psychologiques régulières?
Évidemment, c'est très difficile de faire une évaluation psychologique sur la tendance à commettre des crimes, et je le reconnais. Par contre, on suit tout de même les gens en libération conditionnelle, où l'agent évalue si la libération est un succès ou pas.
Avez-vous des opinions sur le genre de mesures qu'on devrait prendre pour essayer d'empêcher ces personnes de commettre des crimes graves? Ce qui nous a amenés à étudier la question, ce sont des cas où certains de ces témoins avaient commis des meurtres par la suite.
Avez-vous une opinion sur le soutien psychologique ou la surveillance qu'il devrait y avoir pendant qu'ils sont sous protection?
[Traduction]
Permettez-moi de vous dire que vous êtes, à mon avis, exactement sur la bonne voie, et permettez-moi également de vous dire que plus le temps passe après leur témoignage ou leur information, plus l’intérêt de la police à leur égard diminue. Nous avons certains cas maintenant où nous avons intenté des poursuites contre la police ou contre l’organisme concerné, et ils nous présentent des affidavits indiquant que les témoins n’ont plus besoin de protection, mais, pour les mêmes cas, ces policiers nous appellent et nous disent qu’ils ne savent pas où se trouvent la personne protégée, et qu’ils estiment qu’il existe une menace réelle contre elle de la part des motards. Ce sont les mêmes personnes qui nous affirment qu’il existe une menace réelle contre des témoins, et qui, si on intente contre elles des poursuites, affirment qu’il n’y a pas de menace.
On devrait donc assurer une surveillance. Éventuellement, les personnes disparaîtraient dans la nature et commenceraient une nouvelle vie, mais il y a une période où elles ont besoin du soutien de la police, qui constitue leur seul lien réel, étant donné que la police connaît leur passé et sait où elles se trouvent — ou devrait savoir où elles se trouvent. Elle devrait les suivre et leur donner le soutien dont elles ont besoin.
Le problème, c’est que cela coûte de l’argent, et s’il y a de l’argent disponible, la police veut l’utiliser pour les affaires en cours, pour lesquelles elle a besoin d’informations afin d’obtenir des condamnations pour les affaires présentes, plutôt que d’assurer le suivi à long terme de ces personnes.
Je suis d’accord avec vous, monsieur, que la police devrait assumer une certaine responsabilité pour assurer le suivi auprès de ces personnes et assurer que celles-ci peuvent atterrir en douceur, et ne retombent pas une nouvelle fois dans des activités criminelles.
[Français]
[Traduction]
Je désire seulement souligner que le commissaire doit examiner les lois de l’Australie que j’ai passées en revue. Ces lois prévoient un examen psychologique de la personne avant que celle-ci ne soit admise dans le programme, un soutien psychologique après son entrée dans le programme, ainsi qu’un soutien permanent. Ces dispositions figurent directement dans leurs lois.
Merci beaucoup.
Nous allons maintenant revenir à la partie gouvernementale et à M. Hawn, s’il vous plaît.
Merci, monsieur le président, et merci à vous deux pour votre présence ici parmi nous.
J’ai manqué le début de votre témoignage, monsieur Bulmer, mais j’ai lu le rapport. Vous n’accusez pas l’ensemble du programme pour un seul cas.
Absolument pas. J’essaie de présenter des suggestions afin d’améliorer le programme. Mais j’ai de réelles préoccupations à propos des personnes qui affirment que cela représente une démarche extrême, je suis au courant de quelques problèmes. Si vous voyez deux coquerelles dans votre cuisine, combien de coquerelles avez-vous réellement?
Donc vous avez été personnellement mis au courant d’autres cas similaires.
Monsieur Swadron, j’imagine que c’est votre cas également.
Oui, car étant donné qu’il s’agit d’une situation tellement marquée par le secret, il s’agit souvent presque de rumeurs. Je pense que la presse était très désireuse de communiquer cette information au public — et elle a consacré beaucoup de temps et d’argent à organiser une contestation judiciaire afin de pouvoir être au moins en mesure de dire ce qu’elle avait fait — étant donné que le public a le droit de savoir et d’être protégé. Dans ma situation, j’affirme qu’un préjudice était très prévisible. Je désire seulement que quelqu’un surveille un programme qui est important et qui comporte également un facteur de risque élevé.
Je vais demander quelques suggestions dans une seconde, mais de toute évidence, la marge est étroite entre le droit de savoir, la responsabilité de protéger, et le droit d’une personne à l’anonymat. On a mentionné fréquemment devant ce comité l’exigence d’assurer une surveillance parlementaire des questions liées à la sécurité, des questions liées au renseignement, ainsi que de savoir s’il devrait s’agir d’un comité sur la sécurité nationale ou d’un groupe de cette nature.
Monsieur Swadron, feriez-vous une suggestion de cette nature, ou auriez-vous d’autres suggestions précises relativement aux organismes de surveillance, qu’il s’agisse du Parlement ou de quelque autre organisme chapeautant la GRC dans le cas qui nous occupe?
D’abord, j’aimerais savoir où l’argent est dépensé et si on devrait réaffecter ou augmenter les sommes. Quant à la meilleure manière de le faire, vous disposez d’une vérificatrice générale. Elle n’a pas à connaître l’identité des personnes, mais apparemment 2,5 millions de dollars ont été dépensés en une année, et cette somme a été diminuée à 1,9 million de dollars. Sur quoi a-t-on dépensé cette somme? Est-ce que cela incluait le personnel, les responsables de cas? Cela incluait-il le litige? Je sais que le ministère de la Justice dépense des milliers de dollars pour retenir les causes que nous avons portées devant les tribunaux. Est-ce que cela couvrait la réinstallation? Comme je l’ai affirmé auparavant, il est très difficile pour un comité comme le vôtre de savoir où dépenser les ressources afin de modifier la loi alors qu’on constate un manque de renseignements.
Vous me dites que vous avez eu des témoins ici l’autre jour des États-Unis, et qu’ils ont affirmé que 95 p. 100 des témoins avaient été engagés dans des activités criminelles. Eh bien, ce n’est pas mon expérience du tout. Je ne connais aucun autre avocat au Canada qui a eu à traiter autant de causes reliées à la protection des témoins que j’en ai eues. J’en ai eues au fil des ans de toutes les sortes, de toutes les couleurs, de toutes les grandeurs, de toutes les formes. Mon expérience, c’est que la majorité des témoins protégés que j’ai eus comme clients n’avaient pas été personnellement engagés dans des activités criminelles.
Pourquoi diable quelqu’un de la GRC ne peut-il se présenter et témoigner devant vous en rapport avec les 700 témoins qu’ils ont eus depuis un certain nombre d’années, et dire, par exemple, que 350 d’entre eux ont été engagés dans des activités criminelles, ou que 500 ont été engagés dans des activités criminelles, et que les autres ne l’ont pas été? Pourquoi ce comité parlementaire canadien doit-il se fier à des données statistiques américaines? La GRC ne dispose-t-elle pas de données de cette nature? C’est sûrement très simple. J’imagine qu’il y a des manières d’obtenir d’un organisme indépendant… il est très difficile pour des parlementaires tels que vous de recueillir de telles statistiques. Ce ne devrait pas être votre tâche.
Je comprends.
Serait-il juste de dire qu’il y a beaucoup de personnes innocentes dans ce programme? Si le chef de famille participe à des activités criminelles et que toute sa famille peut par conséquent être protégée, il y a un type qui est engagé dans la criminalité, mais il peut y avoir cinq ou six personnes qui sont innocentes.
Oui, et il y a également la possibilité que le type en question, parmi les cinq ou six personnes, n’ait pas été engagé dans des activités criminelles. J’ai eu un cas très notoire qui a été réglé il y a quelques années. Il avait fait les manchettes. Il s’agissait du frère du président national du groupe international de motards des Outlaws. Il ne pouvait pas supporter ce que son frère faisait, et il a infiltré le groupe de motards — tout ce que je dis a été rapporté — et, en fin de compte, beaucoup d’entre eux ont été condamnés, y compris son frère.
Évidemment, il s’agissait là d’une implication spectaculaire, mais il n’avait aucun antécédent criminel, et tous les membres de sa famille y ont pris part. Ce n’est pas toujours vrai que le chef de famille ou la personne principale a été mêlé à des activités criminelles.
Le fait est que certaines de ces personnes sont traitées de manière si mesquine que ce serait un miracle si elles ne se tournaient pas vers la criminalité à cause de la manière dont on les a traitées. Je connais une personne maintenant, qui n’est même pas au Canada, qui ne peut obtenir de l’aide sociale parce que son nom serait alors découvert. Comment une personne comme elle peut espérer survivre?
Je me demande si M. Bulmer a d’autres commentaires sur cette question, sur la question précise des suggestions relatives à un comité de surveillance, et sur les personnes qui pourraient y participer, et sur le niveau de méfiance que vous entretenez à l’égard de la GRC.
J’ai déjà dit le ministre ou l’agent du ministre, peut-être quelqu’un de ce comité, ou quelqu’un de la magistrature, ou du barreau, ou encore des profanes — en fait à peu près n’importe quel regroupement de personnes, sauf des personnes qui devraient surveiller leur propre poste.
Merci beaucoup.
Nous allons maintenant commencer notre troisième tour de table. Madame Barnes, s’il vous plaît.
Merci beaucoup. Vous avez bien raison, disposer d’un rapport de deux pages ne vous donne pas assez de renseignements pour analyser un sujet quelconque. La seule bonne chose, c’est que la GRC a témoigné et que dans son dernier rapport, elle a affirmé que nous allons obtenir des rapports cette année qui comporteront une meilleure évaluation des coûts du programme, et davantage de renseignements à notre intention. Nous verrons ce qui en est une fois que ces rapports seront déposés.
Je veux parler un peu à propos du coût. Monsieur Swadron, vous avez mentionné que vous vouliez une loi qui, par sa nature, engloberait ou chapeauterait les programmes municipaux ou provinciaux existants. Pensez-vous que les frais devraient être imputés au gouvernement fédéral, quel que soit le pouvoir dont le programme relève?
Non, il s’agit seulement de la promulgation de la loi. Si on a affaire à des organismes provinciaux ou municipaux, ceux-ci devront payer pour leurs propres programmes.
Merci. Je voulais seulement que ce point soit éclairci.
Lorsque vous avez pris la parole, vous avez par contre exprimé le désir d’un organisme cadre en tant que niveau standard pour la compétence du Canada, quel que soit le niveau qui dans les faits était chargé de la mise en œuvre d’un programme —
Existe-t-il des normes qui, à votre avis, ne sont pas incluses mais que vous désireriez voir incluses? Y a-t-il des choses qui ne sont pas couvertes et que vous définiriez comme une norme qui manque dans la loi actuelle?
Eh bien, j’ai été en mesure d’en mentionner une: que la personne puisse disposer d’un avocat au moment approprié, afin qu’elle sache ce dans quoi elle s’engage. Je crois que ça devrait être obligatoire, et une telle mesure n’est pas inconnue dans la loi. Ici vous avez la GRC, ou n’importe quelle autre organisation, qui s’est occupée de ce travail durant des années, et vous avez une personne vulnérable qui n’a jamais été touchée par cette question, et vous vous attendez à ce que celle-ci soit à leur hauteur. Elle peut s’enfoncer jusqu’au cou. Au moins si cette personne pouvait disposer d’un avocat qui lui dirait de surveiller ce dans quoi elle s’engage —
Je comprends.
Je suis désolée, mais nous sommes dans des tours de table de cinq minutes et je dois limiter mes questions. Merci.
La semaine dernière, nous avons entendu un témoignage qui laissait entendre que ce serait une bonne idée de procéder à un examen parlementaire périodique de la loi. À l’heure actuelle, nous avons la loi, et c’est réellement la première fois depuis sa mise en œuvre que nous pouvons l’examiner.
L’une des périodes suggérées a été un examen parlementaire tous les cinq ans. J’aimerais obtenir vos commentaires à vous deux sur l’utilité d’un tel examen, en considérant également qu’il y a beaucoup de choses que nous ne pouvons pas entendre à cause du caractère secret de ce programme.
Je pense que tous les cinq ans vaut mieux que tous les 12 ans, c’est certain, mais il doit y avoir des renseignements importants à votre intention. Vous devez être en mesure de bien comprendre ce qui arrive. Dans beaucoup de témoignages que j’ai lus jusqu’à maintenant, je ne les ai pas tous lus, on ne vous donne pas ce genre d’information, mais celle-ci est sûrement disponible ailleurs. Je pense que le principal coupable est la GRC, car ce sont eux qui appliquent la loi que vous examinez. Ce sont eux qui constituent la force opérationnelle.
Un professeur a comparu devant nous la semaine dernière à qui on a accordé des garanties spéciales pour lui permettre d’effectuer une étude du programme en Grande-Bretagne. Mais une partie de ce que vous avez abordé, à propos de la tenue d’une étude indépendante, n’est pas possible, car la loi essentiellement empêche le partage de renseignements et les contacts entre les gens. Estimez-vous qu’à l’intérieur soit du comité de la justice, soit du comité de la sécurité publique, si le gouvernement commandait une telle étude, celle-ci pourrait être utile à cette étape-ci?
Absolument. Si vous affirmez que vous allez passer la loi en revue tous les cinq ans, il devrait y avoir une disposition — et je ne vais pas ici mentionner la première chose qui me passe par la tête car ce ne serait pas intéressant — pour que l’information dont vous avez besoin — et il ne s’agit pas de faire n’importe quoi, que la GRC va dire qu’ils vont essayer de faire mieux l’année prochaine ou vous donner davantage de renseignements. Je pense que peut-être ce comité, s’il décide qu’il devrait recommander au Parlement un examen tous les cinq ans, pourrait en même temps préciser quel type de données statistiques devrait être disponible à votre intention afin que vous puissiez procéder à un examen significatif.
Je vais peut-être seulement faire un bref commentaire.
En comparaison avec d’autres pays... nous avons vu la semaine dernière que nous étions en avance sur beaucoup de pays. Je pense que nous sommes très reconnaissants du fait de disposer d’un programme de protection des témoins. Mais réellement, on pourrait l’améliorer et, bien franchement, j’estime que nous devons obtenir certains documents indépendants sur lesquels nous pourrions baser notre étude.
Merci, monsieur le président.
Je vais seulement préciser certaines choses. Je pense que notre témoin de la semaine dernière n’a en fait effectué qu’une étude restreinte, et que celle-ci portait uniquement sur l’Écosse. Je ne pense pas que la Grande-Bretagne dispose dans les faits d’un plan, et il est donc intéressant pour nous au Canada de savoir que nous sommes si en avance, alors qu’eux n’ont pas de plan.
J’examinais les renseignements qui nous ont été fournis par le professeur de la semaine dernière, qui avait effectué une comparaison avec un certain nombre de pays, notamment l’Australie, monsieur Bulmer, et il est particulièrement intéressant qu’en Australie, c’est la police fédérale australienne qui administre le programme, comme nous le faisons ici au Canada. La majorité des pays semblent disposer d’un service de police, et il y en a très peu qui disposent d’un organisme indépendant. Je ne cherche pas à savoir si une solution est meilleure que l’autre, mais la majorité des pays sont engagés dans le même scénario que le Canada, et l’admissibilité à la protection ressemble en bonne partie à celle offerte au Canada. Je pense que nos rédacteurs originaux méritent beaucoup de reconnaissance pour ce qu’ils ont accompli il y a quelques années, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a rien qui puisse être amélioré.
Mais n’est-ce pas ce que vous avez découvert vous aussi, que dans la majorité des cas c’est un service de police qui administre le plan?
Et je peux entendre les excellents arguments selon lesquels c’est la façon dont les choses devraient demeurer.
Je ne discute pas de cela. J’affirme juste que c’est la façon dont les choses fonctionnent à travers le monde, dans la majorité des pays.
Oui, il semble que c’est le cas.
Je peux vous dire que la police fédérale australienne administre le programme principal, mais que chaque État a adopté sa propre loi sur la protection des témoins, et qu’ayant lu ces lois, je suis confondu par la manière dont on ajoute et on retranche. Je peux vous dire que leurs lois sont beaucoup plus volumineuses. Elles permettent aux ministres tant de l’État que du gouvernement fédéral d’exercer un contrôle beaucoup plus grand afin de désigner les personnes autorisées à savoir, si bien que l’ombudsman doit posséder une cote de sécurité de niveau secret, mais que ce dernier peut passer en revue que certains cas.
Dans chaque État, il existe une procédure beaucoup plus élaborée permettant aux tribunaux de savoir s’ils ont affaire à une personne protégée, de protéger tant la poursuite que les droits de la défense. Il vaut la peine d’examiner ces procédures. Elles permettent notamment aux policiers de disposer de leurs propres identités distinctes dans l’éventualité où ils auraient besoin de protection. Il existe des dispositions pour instaurer des mesures de protection temporaires, par opposition à la mise en œuvre du programme pour une période de temps prolongée. Il existe des procédures d’appel pour les personnes qui sont expulsées du programme. Ces procédures semblent assez élaborées.
Pour répondre à votre question, il s’agit d’un site Web australien. En faisant le suivi de ce cas, je suis tombé sur un site Web australien portant sur la confidentialité et la protection de la vie privée, et on y affirmait essentiellement — c’est peut-être la vérité — que les pays visés sont les Philippines, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni, l’Afrique du Sud et l’Amérique du Sud. Il s’agit là de pays qui disposent tous de programmes de protection des témoins.
L’argument que j’essayais d’avancer plus tôt était que si vous deviez vous rassembler afin que quelqu’un n’ait pas à voyager de Windsor à Détroit, pour ensuite vendre la mèche gratuitement — Mais si le programme était fondé sur davantage de collaboration, vous pourriez trouver utile qu’un Canadien soit envoyé en Australie, qu’un Australien soit envoyé au Canada, et qu’un Canadien soit envoyé en Amérique. Mais s’il existait un traité international — comme c’est le cas — ou si vous étendiez la portée de la loi, comme vous l’avez fait pour assurer la protection des enfants dans le cas du tourisme sexuel, si bien que lorsqu’un Canadien commet un crime à l’étranger —
Cela va devenir de plus en plus important avec Internet. Bientôt, on sera en mesure de googler des images, et si vous googlez une image, vous serez en mesure de trouver cette information. C’est pourquoi je pense que la loi devrait avoir des dents, comme je l’ai rapporté, si vous mettez en danger la sécurité de la personne ou la sécurité de l’institution. Cela devrait constituer l’intention coupable de l’article 11, plutôt que la divulgation d’un lieu que vous ne pouvez pas définir, ou de l’identité de la personne. Cela peut être sans portée ou être fait d’une manière innocente. Et il doit exister une capacité d’exécution à l’échelle internationale, étant donné que beaucoup de problèmes que nous connaissons avec la protection des témoins et le programme de réinstallation ont trait aux institutions internationales. Nous traitons avec des gens qui ne commettent pas seulement des crimes au Canada, mais également dans d’autres pays.
Il s’agit donc d’une solution de portée internationale qui nécessite une collaboration internationale.
J’ai encore seulement une autre très brève question pour chacun. Même s’il existe des problèmes, estimez-vous que le programme est efficace, même si nous sommes conscients qu’il soulève chez vous des préoccupations?
Je vais répondre à cela.
D’abord, j’estime qu’il vaut mieux disposer d’un programme, et qu’il vaut mieux avoir une loi que de ne pas avoir de loi. J’ai été particulièrement intéressé à lire la transcription portant sur les trois policiers qui ont comparu devant vous, lorsque vous leur avez demandé si le programme était efficace, et deux d’entre eux ont affirmé que sur une échelle de 1 à 10, ils lui donneraient un 8 ou un 9. Eh bien, cela exprime leur perspective. Je pense que si nous examinons la question dans la perspective de mes clients, ces derniers auraient beaucoup de mal à donner un 1 ou un 2.
Mais exprimons les choses de cette manière. Je vois beaucoup de possibilités d’amélioration. Je suis heureux que nous ayons la loi. J’appuie celle-ci, mais je veux également que beaucoup de modifications y soient apportées, et j’estime que c’est à vous qu’il reviendrait d’apporter les modifications à partir des témoignages que vous avez entendus. Le problème, je pense, c’est que vous n’avez pas entendu suffisamment de témoignages, ou assez de témoignages sérieux.
Je ne sais pas comment quelqu’un peut aller étudier le système en Écosse et affirmer que celui-ci n’est pas aussi bon que le nôtre, ou qu’il n’est pas aussi avancé. Comment pouvons-nous savoir où nous nous situons lorsque nous ne pouvons pas comprendre exactement ou essentiellement ce qui arrive ici au Canada? Peut-être que nous devrions étudier le Canada et son programme plutôt que de regarder à l’étranger. Il n’y a rien de mal à regarder à l’étranger, mais vous devez au moins disposer d’un repère sur ce qui se passe ici.
Je serai très bref.
Je pense que nous espérons qu’il s’agit d’un bon système, mais comment pouvons-nous le savoir? Si vous aviez effectivement la capacité de le passer en revue, il se peut fort bien que vous entendiez des témoignages d’appréciation à l’égard du système et que les personnes affirment qu’il s’agit d’un système merveilleux, que c’est le meilleur système. Mais nous ne le savons pas.
Les gens me disent : « Eh bien, votre cas est tellement inhabituel qu’il ne pourrait pas se reproduire. » D’accord, prouvez-le-moi. En fait, le Parlement a la responsabilité de s’assurer que mon cas ou un cas comme le mien ne pourrait jamais se reproduire.
Merci.
J’ai seulement une question de suivi, et une fois encore, celle-ci a à voir avec le témoignage que nous avons entendu du directeur à la retraite du département de la Justice des États-Unis. C’est seulement qu’il était ici la semaine dernière.
En ce qui a trait à la proportion des personnes qui ont des antécédents criminels, je ne peux me souvenir, en vérité, si la GRC a fourni cette information — peut-être qu’elle l’a fait, peut-être qu’elle ne l’a pas fait — mais je crois me souvenir que ce monsieur à la retraite du département américain de la Justice a mentionné une proportion de 95 p. 100. Je pense que M. Hawn, lors des discussions, a aidé à clarifier ce point.
Mais j’aimerais revenir encore une fois au témoignage du monsieur du département de la Justice des États-Unis, lorsqu'il a indiqué, il me semble que je m’en souviens, que le programme de protection des témoins avait été un franc succès en ce qui a trait aux poursuites. Je pense qu’il a indiqué un taux de succès assez élevé. Je ne peux me souvenir si nous avons entendu la GRC s’exprimer sur ce point, mais je suis sûr que les chercheurs le feront.
Une voix: Oui, ils ont dit huit ou neuf fois sur dix.
M. Roy Cullen: La raison de ma question et de ma préoccupation est que si ces personnes en règle générale ont des antécédents criminels — je reconnais que certains n’en ont pas, mais qu’un grand nombre d’entre eux en ont — je suis sûr que les avocats de la défense prétendront qu’ils manquent de crédibilité ou qu’on ne peut leur faire confiance. Mais de toute évidence, certains juges aux États-Unis n’ont pas été influencés par cet argument si leurs témoignages servent à obtenir des condamnations, et il semble que le pourcentage des condamnations soit assez élevé.
Pouvez-vous me donner un certain contexte à ce sujet? Qu’est-ce qui arrive lorsque des personnes viennent de milieux caractérisés par des niveaux élevés de criminalité dans un grand nombre de cas, et que leur témoignage est toujours considéré comme crédible par les tribunaux?
Je pense que quelquefois leur témoignage n’est qu’une partie de la réalité. Certains n’ont même pas besoin de témoigner. Ils pourraient avoir posé des actes criminels, avoir acheté certaines drogues, etc., et puis les autorités ou les forces policières obtiennent leurs éléments de preuve par d’autres façons, si bien que les gens plaident coupables, et dans un tel cas le témoignage et la crédibilité du criminel protégé ne constituent même pas un problème. Quelquefois, le témoignage n’est qu’un élément de la cause et la poursuite obtient les autres éléments de preuve d’une autre manière.
Et peut-être qu’il est sensé quelquefois de recruter des personnes qui ont été engagées dans des activités criminelles étant donné qu’elles sont les plus faciles à recruter. Vous vous présentez à quelqu’un qui est accusé d’un crime grave, et qui pourrait être condamné à une peine de 10 ans de prison, et vous lui dites: « Concluons une entente. Nous nous organiserons pour que vous n’obteniez qu’une année de prison, et pendant ce temps, vous vous infiltrez dans ces autres milieux. » Et les autres criminels qui ont connu cette personne, qui est un criminel, traitent avec elle, et elle est probablement la personne la plus aimable.
Il y a souvent des gens en prison qui sont des informateurs, parce que leurs compagnons de cellule leur racontent ce qu’ils ont fait et ils deviennent eux aussi des informateurs.
Et souvent la police n’a pas à se baser sur le témoignage de la personne, mais l’information est prête à être utilisée afin d’obtenir une condamnation.
Je pense que je me fierais à ce que la police affirme, que dans la perspective de mettre la main sur leur homme ou sur leur femme, ils obtiennent possiblement des succès. Le problème, c’est qu’ils laissent souvent des carnages survenir autour de leurs témoins protégés.
Ceci dit, si un avocat de la défense pose la question: « Qu’avez-vous obtenu en échange de ce témoignage? », il s’attaque directement à la crédibilité du témoin. Mais les lois que j’ai étudiées en Australie prévoient en fait un autre mécanisme de divulgation aux autres tribunaux si une personne protégée, une fois qu’elle a terminé son témoignage dans un cas, devient par la suite témoin dans une affaire au civil ou au criminel qui n’est pas reliée à la protection qui lui a été accordée. Le juge, à tout le moins, est informé, si bien qu’il peut faire savoir au conseil que cet homme est une personne protégée et qu’il peut y avoir des problèmes en rapport avec sa crédibilité.
Merci.
Je dispose d’un élément d’information, ou d’éclaircissement, dont je désire faire part au comité.
Notre personnel de recherche veut s’assurer que le comité comprend que les statistiques américaines, les 90 p. 100, s’appliquent aux personnes qui sont des témoins principaux et non pas à tous les membres de leur famille. Il s’agit des témoins principaux et 90 p. 100 d’entre eux ont des antécédents criminels. Si vous incluez toutes ces personnes dans le programme de protection des témoins, il ne serait pas exact d’affirmer que 90 p. 100 d’entre elles ont des antécédents criminels.
Non, et mon argument tient toujours. De mon point de vue, j’affirmerais que même 90 p. 100 des témoins principaux me paraît un chiffre très élevé.
Très bien. Est-ce qu’il y a quelqu’un d’autre du gouvernement qui désire poser une question? Non.
Je n’ai personne d’autre sur ma liste, sauf M. Comartin. Vous aviez une autre question.
Monsieur Swadron, j’ai pratiqué le droit durant longtemps, si bien que je sais ce que je demande à ce moment-ci, et je ne sais pas si vous êtes prêt à divulguer cette information au comité.
À la lumière de ce que nous avons entendu de M. Kennedy, qui dirige l’organisme chargé d’étudier les plaintes à la GRC, il serait très utile si nous connaissions le nombre exact de personnes qui sont venues vous voir pour se plaindre du programme, combien de poursuites vous avez effectivement entreprises contre la GRC, et combien de ces poursuites vous avez remportées.
Une fois encore, je ne sais pas si vous êtes prêt à me divulguer ces chiffres. Je comprendrais si vous ne le souhaitiez pas, mais ce serait très utile pour ce comité.
D’accord, lorsque vous dites « que vous avez remportées », je ne suis pas certain de ce que vous entendez par là. Est-ce que cela signifie qu’il y avait un prix? Quelques fois, nous pouvons régler la question en leur faisant obtenir de nouvelles identités. Mettons que la GRC refusait d’accorder une nouvelle identité, ou refusait de réinstaller la personne; je pouvais négocier une entente selon laquelle la GRC paierait pour des cours de rattrapage durant un an, assurerait le logement durant six mois, etc. S’agit-il d’une victoire? Je pourrais me poser la question —
En tant qu’avocat, je veux pouvoir dire que j’ai remporté toutes mes causes.
Évidemment, elles n’ont pas toutes été plaidées contre la GRC. Il y en a eu certaines contre la province de l’Ontario, et laissez-moi vous dire que les personnes qui sont engagées avec la GRC doivent également être engagées avec la province de l’Ontario, et vice versa. Si la GRC désire obtenir un nouveau certificat de naissance, un permis de conduire ou une carte d’assurance-maladie, elle doit entrer en rapport avec la province, et si la province désire obtenir un certificat d’acquittement de l’impôt sur le revenu, ou modifier un numéro d’assurance sociale, elle doit le faire avec le concours de la GRC. On constate donc ici une participation entremêlée.
Je dirais que nous obtenons beaucoup de succès dans le sens que si nous touchons de trop près la GRC ou la province et que ceux-ci ont peur de se brûler les doigts, ils vont régler. Ils règlent les cas, parce qu’ils ne veulent pas laver leur linge en public, que celui-ci soit sale ou non.
Vous avez très bien réussi jusqu’à maintenant, monsieur Swadron, à ne pas nous dire si vous êtes prêt à nous donner une déclaration.
C’est une question à laquelle il est très difficile de répondre, étant donné qu’il y a beaucoup de gens qui m’ont consulté et dont je n’ai pas accepté la cause. Je peux obtenir des appels de la Colombie-Britannique ou de la Nouvelle-Écosse et ce n’est alors pas pratique pour moi de m’engager. Mais ces gens-là se plaignent du traitement qu’ils ont reçu de la GRC, par exemple.
Combien de causes avons-nous acceptées? Combien de dossiers avons-nous ouverts? Vous pourriez certainement les compter sur vos doigts, si vous aviez quatre mains. Voilà un chiffre.
Laissez-moi seulement ajouter que si vous désirez apporter une réponse plus détaillée à cette question, vous pouvez le faire par écrit à l’intention des membres du comité.
Et à vous deux, je voudrais demander si vous êtes au courant de cas au Canada où une personne qui était protégée par le programme a fait l’objet de poursuites, avec une force policière, pour un homicide délictueux?
Merci.
Personne d’autre ne figure sur ma liste.
S’il n’y a pas d’autres questions, nous allons vous exprimer, messieurs les témoins, tous nos remerciements pour vous être présentés ici et nous avoir fait part des renseignements dont vous disposiez ainsi que de votre perspective concernant la Loi sur le programme de protection des témoins. Nous vous remercions énormément.
La séance est levée.