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Je déclare la séance ouverte. Nous sommes à la séance 49 du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
Pendant la première partie de la séance d'aujourd'hui, nous allons traiter de l'examen du programme de protection des témoins.
Je demanderais aux caméramans de bien vouloir sortir. La séance sera enregistrée, mais les caméras sont interdites dans la salle.
Aujourd'hui, nous accueillons, du ministère de la Justice, Erin McKey, avocate-conseil, Section de la politique en matière de droit pénal; de la GRC, Derek Ogden, surintendant principal et directeur général, Services juridiques de la GRC, David Bird, avocat; ainsi que Carl Busson, surintendant, officier responsable du programme de lutte contre les drogues et le crime organisé.
Bienvenue à notre comité. Nous sommes impatients d'entendre vos déclarations.
Je crois que seul le surintendant principal Ogden a une déclaration liminaire. C'est bien cela? Si vous êtes prêt, vous pouvez commencer. Vous disposez d'environ dix minutes. Si vous avez besoin d'un peu plus de temps, faites-moi signe.
Bonjour à tous. Je suis très heureux de comparaître à nouveau devant le comité. Comme vous le savez, je suis directeur général du programme Drogues et crime organisé à la Gendarmerie royale canadienne. À ce titre, je supervise le programme de protection des témoins géré par la GRC.
J'aimerais également vous présenter aujourd'hui le surintendant Carl Busson: il est l'officier responsable du programme de lutte contre les drogues et le crime organisé en Colombie-Britannique, pour la GRC.
Le programme de protection des témoins compte aujourd'hui 1 000 bénéficiaires, dont environ 700 relèvent de la GRC, et 300 d'autres services de force de l'ordre.
J'aimerais souligner qu'aucun de ces bénéficiaires ne jouit d'une immunité s'il commet d'autres infractions criminelles. D'ailleurs, l'alinéa 8b) de la Loi sur le programme de protection des témoins stipule clairement que pour jouir d'une entente de protection, le bénéficiaire doit s'abstenir de participer à une activité qui constitue une infraction à une loi fédérale. En outre, au cours du processus de sélection préliminaire, les candidats au programme sont avertis qu'ils ne doivent pas commettre d'infractions criminelles et signent une entente de protection dans laquelle ces conditions sont clairement expliquées et documentées.
Cela étant dit, il serait irréaliste de s'attendre à ce qu'aucun des bénéficiaires ne commette d'autres infractions criminelles. En réalité, entre le 1er avril 2004 et le 1er avril 2007, neuf des 1 000 bénéficiaires ont été exclus du programme pour avoir commis une infraction criminelle. Lorsqu'un bénéficiaire commet une infraction criminelle ou est soupçonné d'avoir commis une telle infraction, le service des forces de l'ordre compétent amorce une enquête criminelle.
En outre, il faut bien comprendre que tous les bénéficiaires conservent leur casier judiciaire. Tous les bénéficiaires peuvent être poursuivis pour avoir commis une infraction criminelle et les tribunaux criminels ont accès à leur casier judiciaire. En gros, les bénéficiaires, dans le système de justice criminelle, sont traités comme n'importe quel autre citoyen canadien.
En tant qu'administrateur du programme national actuel, je peux vous assurer que nous revoyons constamment notre programme pour nous assurer de l'améliorer. Ces efforts comprennent des examens sur le terrain des lieux de protection de chaque témoin et une étude des affaires des témoins, ainsi qu'une mise à jour des différents cours que nous donnons sur la source humaine et sur la protection des témoins. Je suis heureux d'avoir la possibilité de parler des façons dont le programme pourrait mieux servir les besoins des Canadiens et ceux des forces de l'ordre du Canada.
Merci beaucoup.
Je vous renvoie à l'article 11 sur la Loi sur le programme de protection des témoins. C'est la disposition qui érige en infraction le fait de divulguer l'identité d'un bénéficiaire ou d'un ancien bénéficiaire ou des renseignements au sujet du lieu où il se trouve. Des exceptions sont prévues permettant au commissaire de la GRC de communiquer les renseignements dont la divulgation est interdite par cet article qui porte sur l'administration du Programme de protection des témoins — en fait, les mesures qui seraient prises pour assurer la protection du bénéficiaire, ce qui devrait être fait pour assurer cette protection... Si le commissaire envisage de divulguer des informations qui ne sont pas assujetties à cet article ou qui pourraient mettre en danger le bénéficiaire, un autre témoin ou l'intégrité du programme, le commissaire doit tenir compte de différents facteurs et franchir diverses étapes.
Le commissaire doit disposer des renseignements prévus à l'article 12 avant de prendre personnellement la décision. Le premier facteur figurant à l'article 12 est celui des raisons qui motivent la communication des renseignements. Le commissaire doit pouvoir invoquer les exceptions prévues au paragraphe 11(3) de Loi sur le programme de protection des témoins, qui permet au commissaire de divulguer des informations avec le consentement du bénéficiaire ou de l'ancien bénéficiaire.
Si le bénéficiaire ou l'ancien bénéficiaire ne consent pas à la communication des informations, il peut s'agir d'un cas relevant de l'alinéa 11(3)b), à savoir que le bénéficiaire a déjà communiqué les renseignements ou provoqué leur communication par ses actes. Il s'agit ici du comportement du bénéficiaire. Il se peut aussi que le bénéficiaire ait commis une infraction criminelle et que des informations sur le bénéficiaire doivent donc être divulguées.
Il n'y a pas beaucoup de différence entre ces exceptions et celles de l'intérêt public, prévues à l'alinéa 11(3)c) permettant la communication de renseignements quand l'intérêt public l'exige. Cet alinéa donne des exemples de ce qu'est l'intérêt public, mais le commissaire n'est pas limité par ces exemples, car ils sont précédés du mot « notamment ».
Les alinéas 11(3)b) et 11(3)c) exigent du commissaire qu'il applique le paragraphe 11(5), c'est-à-dire qu'il prenne les mesures utiles pour informer le bénéficiaire et qu'il lui donne la possibilité de présenter des observations.
Il y a donc une procédure en plusieurs étapes qui doit être suivie — je le souligne — avant que le commissaire puisse se prévaloir de l'exception dans l'intérêt public ou détermine que le bénéficiaire a agi de façon à provoquer la communication de renseignements.
L'alinéa 12b) impose au commissaire l'obligation de tenir compte des dangers ou conséquences néfastes pour l'intéressé ou l'intégrité du programme de divulguer des renseignements sur le bénéficiaire. Ce facteur doit être pris en compte.
L'alinéa 12c) dispose que le commissaire tient compte de « la probabilité que les renseignements servent seulement à la fin prévue ». Avec cette disposition, manifestement, le Parlement a voulu s'assurer qu'on ne communiquerait de renseignements qu'aux personnes directement intéressées et qu'on ferait le nécessaire pour limiter autant que possible la divulgation d'information.
L'alinéa 12d) exige du commissaire qu'il tienne compte de « la possibilité de satisfaire par d'autres moyens le besoin qui motive la communication ».
Enfin, l'alinéa 12e) stipule que le commissaire doit tenir compte de « l'existence de moyens efficaces pour empêcher qu'elle » — la communication — « ne se reproduise ».
Le commissaire est donc tenu de tenir compte de tous ces facteurs et, si les raisons qui motivent la communication des renseignements lui semblent convaincantes, et s'il juge que c'est dans l'intérêt public, il l'autorise.
Une fois que l'intéressé — le bénéficiaire ou l'ancien bénéficiaire — est informé, il peut demander la tenue d'une audience. Avant de prendre sa décision définitive, le commissaire devra prendre en compte les représentations du bénéficiaire à cette audience. La décision du commissaire pourra faire l'objet d'un examen par la Cour fédérale. Les motifs pour lesquels la Cour fédérale peut revoir une décision rendue par un organisme fédéral figurent dans la Loi sur les cours fédérales.
En l'occurrence, les motifs d'examen judiciaire seraient semblables: le commissaire a outrepassé ses compétences; le commissaire n'a pas respecté un principe de justice naturelle — je crois que vous avez entendu des témoignages à ce sujet dans le cadre d'une autre étude; le commissaire a fait une erreur de droit dans sa décision; il a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire. On peut aussi demander un examen judiciaire pour le motif que le commissaire a agi ou omis d'agir en raison d'une fraude ou de faux témoignages ou qu'il a agi d'une façon contraire à la loi.
En ce qui concerne l'identité du bénéficiaire ou le lieu où il se trouve, à mon avis, un lourd fardeau incombe au commissaire qui doit déterminer s'il est dans l'intérêt public de divulguer ces informations. Le commissaire ne peut déléguer cette décision. C'est lui qui doit la prendre personnellement. Manifestement, le Parlement tenait à ce que cette décision soit prise par l'échelon supérieur de la GRC. Le commissaire doit tenir compte de tous les facteurs, respecter toutes les règles et franchir toutes les étapes procédurales avant de conclure que la communication de ces renseignements est dans l'intérêt public.
À mon sens, le Parlement a conçu la Loi sur le programme de protection des témoins de façon à protéger les bénéficiaires et anciens bénéficiaires de la communication d'information par la police, sauf dans les cas les plus graves. Avant qu'une telle mesure soit prise, on doit d'abord et avant tout penser aux bénéficiaires du programme de protection des témoins, et à leur sécurité et à celle de leurs proches.
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Merci, monsieur le président.
D'abord, messieurs, je suis toujours heureux de me dire que cela ne paraît pas, mais j'ai commencé à pratiquer le droit criminel en 1966 à Montréal, à la Couronne, et plus tard en défense la plupart du temps, jusqu'à ce que j'entre en politique, en 1993. À l'époque, il n'y avait pas de programmes de protection des témoins. Je les ai vus naître de façon informelle. Surtout, je les ai vus s'améliorer sur le plan de la fiabilité, de la transparence et de l'efficacité.
Je me souviens qu'au Québec, on a eu le rapport du juge Guy Guérin, à l'époque, déterminant quel genre d'arrangement écrit on devait avoir avec ces personnes qui ont eu une activité criminelle mais qui sont prêtes à témoigner contre d'autres personnes afin que l'on puisse obtenir leur condamnation. J'ai beaucoup apprécié que les ententes soient écrites, mais j'ai connu le système au moment où il avait été, pour ainsi dire, improvisé. Il était à l'entière discrétion des policiers. Il était caché aussi et fonctionnait avec des fonds de la police. La situation actuelle est certainement bien meilleure.
C'est un sujet extrêmement difficile. La clientèle avec laquelle vous devez composer est une clientèle ayant un passé criminel, des tendances criminelles aussi. Ce ne sont pas des gens qui sont toujours fiables, et ce presque par définition même, dirais-je. Je comprends qu'il soit difficile de développer un système parfait et qui soit aussi efficace en ce qui a trait au contrôle.
Je crois que vous avez une certaine expérience de son administration maintenant. Avez-vous des suggestions à nous faire pour l'améliorer? Je pense que si vous êtes assez succincts, je vous soumettrai quelques améliorations qui nous ont été suggérées et sur lesquelles j'aimerais connaître votre opinion.
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Merci de vos remarques.
En effet, vous avez raison de dire que c'est un programme comportant des risques élevés. Et nous savons que nous n'aurons jamais un système parfait.
Depuis 2003 particulièrement, nous avons consacré beaucoup de temps à la formation. Nous avons maintenant un programme complet de formation en matière de recrutement et de contrôle des sources humaines. Il y a d'abord un cours de huit heures, accessible sur Internet, que tous les membres de la GRC peuvent suivre; c'est d'ailleurs maintenant un cours obligatoire à Regina. Il y a ensuite un cours de cinq ou six jours traitant uniquement du recrutement de sources humaines. Nous avons aussi un cours de recrutement des sources humaines à l'intention des superviseurs.
Nous reconnaissons l'importance de cette fonction. Nous savons qu'il nous faut des policiers qui comprennent que, quand quelqu'un nous transmet des informations, nous devons prendre des mesures pour corroborer ces renseignements. Nous savons qu'il nous faut une méthode pour évaluer ces informations qui nous sont données.
Je crois que nous avons été proactifs et nous avons pu compter sur d'excellents partenariats avec d'autres services de police du pays. Nous avons dispensé nos cours au Québec et en Ontario. En Alberta, on a essentiellement adopté ce cours et on le dispense comme nous l'avons conçu. Au Québec, nous travaillons en étroite collaboration avec les gestionnaires du programme interne de cette province qui insistent beaucoup sur la corroboration et l'évaluation des sources et de leurs informations et sur l'entente de protection.
Voilà donc pour la formation. À un autre chapitre, cependant, il y a quelques lacunes...
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Il y a encore en effet des lacunes. Comme vous le savez, un nombre assez important de participants à notre programme de protection des témoins nous ont été confiés par d'autres organismes d'application de la loi. Or, nous ne pouvons assurer l'uniformité à l'échelle du pays quant au traitement des bénéficiaires accueillis par d'autres services.
De plus, quand on met fin à la protection, il nous arrive de ne pas être informés des raisons qui ont mené à la cessation de la protection ou même de savoir si la protection a pris fin d'une façon que nous jugerions équitable.
Il arrive donc qu'on nous demande d'accueillir un témoin pour aider un autre service et que nous ne puissions refuser de le faire puisque l'intéressé satisfait aux critères énoncés à l'article 7 de la loi. Nous donnons à ces témoins une nouvelle identité et les accueillons dans le programme de protection des témoins.
Nous assumons tous les risques au sein du programme fédéral sans pouvoir compter sur des freins et des contrepoids aux étapes initiales. Par conséquent, s'il y a un problème et que le service de police local décide de cesser la protection du bénéficiaire, nous continuons d'en assumer la responsabilité. Quand des poursuites civiles sont intentées, par exemple, on poursuit d'abord le gouvernement fédéral. Il y aurait lieu de corriger ce problème.
Selon moi, l'idéal serait un programme de protection des témoins et des sources humaines national et véritablement intégré mettant à contribution divers services de police sur un pied d'égalité, mais un seul programme et non plusieurs programmes un peu partout au pays. Nous serions mieux en mesure de garantir l'uniformité; le recrutement se ferait par des policiers ayant tous reçu la même formation, les policiers évaluant les sources humaines et les informations et les agents contrôleurs agiraient tous de la même façon et auraient de meilleurs contacts avec les agents contrôleurs et les bénéficiaires présentant un risque élevé.
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Merci, monsieur le président.
Merci également à nos témoins.
Je comprends que vous devez respecter le cadre législatif existant, mais pour les représentants élus, cela représente une sorte de cercle vicieux. Nous ne pourrions nous fonder que sur des renseignements incomplets si nous voulions recommander des modifications à la loi, car nous ne savons pas vraiment ce qui s'est produit et ce qui doit être modifié pour régler un problème, s'il existe effectivement un problème systémique dans la loi.
Ma question va sembler stupide; peut-être devrions-nous en connaître déjà la réponse. Tous les témoins que nous avons entendus au sujet des programmes de protection des témoins, de quelque pays qu'ils viennent, nous ont dit bien clairement que si un bénéficiaire commet un acte criminel, il est retiré du programme de protection des témoins. Il perd sa protection.
Vous nous avez dit que d'anciens bénéficiaires sont également protégés. Je sais que vous n'êtes pas législateurs, mais pourquoi peut-il être dans l'intérêt public de protéger un ancien bénéficiaire, quelqu'un qui a commis...? M. Young a été condamné pour meurtre, n'est-ce pas, si je ne m'abuse? Pourquoi dans ce cas serait-il dans l'intérêt national du Canada de protéger une telle personne?
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Dans l'ensemble, je suis sûr que l'une des principales raisons qui est prise en compte est probablement que nous voulons encourager les gens à participer au programme. Par conséquent, on essaie de limiter autant que possible la communication de renseignements.
Deuxièmement, on a reconnu qu'il y a certaines exceptions à la communication de renseignements, mais d'après la loi, ces exceptions s'appliquent lorsque nous devons être proactifs. Si un bénéficiaire a commis un acte criminel — l'enquête est en cours —, ce bénéficiaire peut avoir utilisé son ancienne identité ou une nouvelle identité, et s'il essaie de traverser la frontière, nous sommes en mesure alors de communiquer l'information. S'il s'agit d'une affaire de sécurité nationale, nous sommes en mesure de le faire. S'il est possible que le bénéficiaire soit victime d'une erreur judiciaire, là encore, nous pouvons intervenir et communiquer l'information.
Je ne peux pas vous expliquer exactement l'esprit de la loi, mais je ne crois pas qu'il soit très clair à l'heure actuelle qu'on ait créé des catégories qui nous permettent de divulguer l'identité d'un bénéficiaire s'il commet un crime quelconque. C'est un autre élément qui devrait être examiné avec beaucoup de prudence. Et il est bien possible que la personne dont le nom est révélé soit reconnue coupable, mais il y a eu plusieurs cas au Canada dans lesquels, après examen, le bénéficiaire a été innocenté. Une fois que le nom est publié, le bénéficiaire se trouve exposé au danger. Est-ce un risque que le gouvernement serait prêt à prendre aussi?
C'est une question extrêmement complexe. Je ne saurais vous dire exactement pourquoi on ne voudrait pas révéler ces renseignements, mais je sais qu'à l'heure actuelle, je ne crois pas que nous ayons le pouvoir de le faire.
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Il y a une chose qui nous préoccupe particulièrement, soit le fait que, dans un cas en particulier, quelqu'un qui avait déjà tué et qui était sous la protection du régime a tué encore. Je comprends qu'il est difficile d'essayer de prévenir qu'un délinquant commette une autre infraction ou d'évaluer s'il en commettra une autre ou non.
Je comprends que votre programme fournit des services psychologiques, que des examens psychologiques peuvent être passés au moment d'entrer dans le programme et qu'une aide psychologique est apportée au témoin, s'il en a besoin, ainsi qu'à sa famille. Mais on ne peut pas s'empêcher de penser, bien que la loi n'en parle pas, que lorsque la police prend la responsabilité de protéger un criminel qui a déjà tué, même si c'est dans l'intérêt public que d'offrir cette protection pour obtenir la condamnation d'autres criminels encore plus dangereux que lui, elle n'encourt pas au fond le devoir moral de s'assurer qu'il ne récidivera pas et que, par conséquent, elle n'entretiendra pas avec lui une relation assez étroite pour essayer de prévenir, même si c'est difficile, qu'il ne recommence.
Selon les témoignages que nous avons entendus, il semble que si on offre un soutien psychologique, c'est au début. Toutefois, à partir du moment où pendant quelque temps la personne semble avoir s'être réinstallée dans un nouveau type de vie, on la laisse seule.
J'aimerais entendre vos réflexions sur ce sujet, car j'imagine que cet incident a dû soulever chez vous des réflexions autant qu'il en soulève chez nous.
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Dans l'affaire de la Colombie-Britannique, dont vous voudrez probablement discuter une fois que vous en aurez reçu le rapport, la personne n'avait jamais été condamnée pour un crime, et elle n'était ni en probation, ni en liberté conditionnelle. Il n'existait donc aucun indice de ce que cette personne commettrait un acte criminel aussi grave.
Mais pour ce qui est de la possibilité de ce que nous pourrions un jour nous retrouver avec quelqu'un qui a commis un meurtre, que nous en soyons informés à l'avance et que nous soyons néanmoins obligés peut-être de l'accepter au sein du programme, il est certain que cela se produira, et, je le répète, nous aurons à évaluer les risques et à atténuer ces risques pour la communauté. C'est ce que vise la loi, à mon avis. Je ne sais pas quelle serait la solution magique à ce problème.
Pour ce qui concerne les évaluations psychologiques, permettez-moi de préciser — je ne voudrais pas induire le comité en erreur — que ces évaluations ne visent pas à déterminer si la personne commettra d'autres actes criminels. Nous utilisons de telles évaluations, mais elles ne sont pas obligatoires. Nous les offrons à tous les bénéficiaires. Nous les utilisons en vue de les aider dans leur réinsertion sociale.
Disposons-nous d'une méthode établie pour continuer de surveiller ou de retracer ces personnes de façon continue dans la société? Non, nous n'en avons pas. Pour cela, il faudrait que nous ayons constamment de nouvelles ressources à cet endroit. C'est l'une des lacunes de cette loi, à l'heure actuelle. Même si tous les services policiers du pays peuvent amener des gens au programme, lorsqu'il s'agit de services autres que la GRC, nous fonctionnons en recouvrement des coûts.
Cela peut rendre le choix difficile pour le chef d'un petit service policier lorsqu'un témoin doit être protégé. Il faut décider si le service prendra des mesures par lui-même, si la personne sera réinstallée sans obtenir une identité sûre et sans avoir recours au Programme de protection des témoins.
C'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai dit que si nous avions un programme national financé et intégré, tous les services policiers du pays seraient traités sur un même pied, parce que nous ne savons pas d'où peuvent venir les bénéficiaires.
Mais vous faites valoir un excellent argument.
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Surintendant principal, j'aimerais revenir à une question antérieure. C'est M. Ménard, je crois, qui a parlé de M. Shur et du transfert de l'administration du programme à des civils.
Pour votre gouverne, et je ne crois pas me tromper, aux États-Unis, c'est un organisme civil qui détermine qui est autorisé à participer au programme, mais ce sont les policiers qui s'occupent de la réinstallation des bénéficiaires et de leur famille. C'est ce que j'ai compris du moins.
M. Shur, des États-Unis, semblait dire que le programme canadien est excellent, mais parce que ce programme est surveillé par des civils, il échappe au contrôle des policiers et il semble qu'en ce pays, durant l'actuelle législature, à ce moment précis de l'histoire de notre Parlement, dans notre relation avec notre service national de police, il faut que tout ce qu'une organisation fait soit regardé à la loupe en raison d'autres choses qui se produisent. Cela touche maintenant également ce dossier.
Si vous êtes ici aujourd'hui, c'est plus particulièrement en raison d'un seul cas qui s'est produit depuis la création du programme, du fait que certaines personnes se livrent ou essaient de se livrer à des manipulations et disent que toutes sortes de choses clochent dans ce programme. Puisque des êtres humains sont en cause, aucun programme n'est peut-être parfait, les médecins exercent la médecine, les avocats exercent le droit, mais les policiers ne sont pas autorisés à faire leur métier... Nous n'avons pas dit que les policiers exécutent les lois, nous disons que les policiers font la loi. Si vous ne pouvez pas exercer votre métier, c'est que les législateurs du pays s'exercent à faire des lois. Je suppose que nous nous exerçons maintenant à examiner la loi, à examiner ce que vous faites et la façon dont vous le faites pour déterminer si vraiment nous avons l'un des meilleurs programmes au monde.
Permettez-moi de faire une proposition très polie, comme je l'ai fait dans le cas du commissaire précédent: nous devons périodiquement — et je crois que c'est ce que nous faisons ici aujourd'hui en tant que parlementaires — examiner quelles sont nos pratiques exemplaires et ce que font d'autres organisations. Je suis persuadé que la GRC est tout à fait capable de dire au ministre de la Sécurité publique que ce programme n'est peut-être pas... Elle pourrait proposer les modifications qui s'imposent.
S'il y avait de tels échanges et que la population en était consciente... Notre travail consiste à veiller à ce que la population ait confiance non seulement en notre capacité de faire notre travail de législateur, mais aussi dans le fait que ceux qui sont chargés d'appliquer les lois et de veiller au bon fonctionnement de tels programmes le font de façon transparente.
Ma question est la suivante: ne serait-il pas souhaitable que la GRC envisage d'adopter le modèle américain, qui est peut-être meilleur que le nôtre, mais peut-être pas, pourrait-elle à tout le moins l'examiner, quant à ce qui pourrait... Et cette organisation civile, qui travaille au sein de la GRC, pourrait avoir recours à vous pour tout ce qui est des mesures matérielles, mais prendre les décisions. Croyez-vous que ce serait faisable?
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Vous avez soulevé un certain nombre de questions.
Ce qu'il faut préciser, entre autres, c'est que lorsque nous nous retrouvons avec une personne qui est devenue agent source et que nous nous rendons compte plus tard que cet agent n'a pas fourni les meilleurs renseignements, une fois que nous avons exposé cet agent à l'élément criminel, il est évident que nous avons l'obligation absolue de protéger ce témoin. La plupart des gens seraient d'accord avec cela.
Deuxièmement, certains ont dit que si le bénéficiaire ne fournit pas devant le tribunal les preuves attendues, nous devrions cesser de l'aider et le retirer du programme. Je ne suis pas du tout d'accord avec cela. Foncièrement, nous nous rendrions coupables d'extorsion à l'égard de ce témoin. Nous les enverrions devant le tribunal en sachant ce qu'ils ont à dire et elles devraient s'assurer que le tribunal connaît exactement notre point de vue; si elles ne font pas tout ce à quoi nous nous attendons — et cela correspondrait à de l'extorsion, foncièrement —, nous les retirerions du programme. Lorsque nous décidons de protéger une personne et que nous n'obtenons pas les résultats escomptés, cela n'enlève rien à nos obligations.
Pour ce qui est de la comparaison avec les système américain, l'un des avantages que nous avons au Canada, l'une de nos pratiques exemplaires, est que nous intervenons très tôt. J'entends par là que lorsqu'un service veut avoir recours à un agent source et exposé celui-ci à une menace, nous intervenons par l'entremise de coordonnateurs de la protection des témoins sources. Nous faisons des entrevues et des évaluations, et dès cette étape, nous indiquons à l'équipe d'enquête si, à notre avis, cette opération devrait être poursuivie ou non. Si nous ne procédions pas de cette façon, nous laisserions cet agent source mener toute cette opération, nous l'exposerions au risque, puis nous déciderions ensuite si nous l'acceptons dans le programme. C'est exactement ce à quoi correspond le modèle américain.
Dans ce modèle américain, on demande aux gens de fournir de l'information et on les expose à la menace. On les loge dans des hôtels et on les fait attendre temporairement, mais on les expose à cette menace. Ensuite, elles doivent se présenter devant des agents du Programme de protection des témoins qui décideront si elles sont acceptées ou non dans le programme. Jusque-là, le témoin doit se débrouiller. Il est à la merci d'un service qui a décidé de l'exposer aux criminels et à la merci de tout accord qui peut être négocié — peut-être un versement quelconque pour aller quelque part.
En ce qui concerne ce que vous avez dit au sujet de la surveillance par des civils, quel que soit le système dont le gouvernement décidera, nous devons nous assurer d'intervenir très tôt. Il faudrait éviter un système qui ajouterait à la paperasserie et qui rendrait encore plus compliquée l'application de la loi par les organisations. Si nous rendons tout cela trop compliqué, bon nombre de services policiers au Canada éviteront le programme, disant qu'ils géreront les risques et prendront leurs propres mesures. Il faut donc trouver un juste milieu.
En ce qui concerne la loi, je crois que nous faisons de l'assez bon travail, mais je comprends exactement pourquoi, en tant que parlementaires, vous souhaiteriez voir ce qu'il y a derrière le voile. Je ne sais pas quel mécanisme pourrait être mis en place pour cela. La loi pourrait être modifiée de façon à ce que quelqu'un soit autorisé périodiquement à examiner des dossiers et à en faire le suivi.
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Permettez-moi de vous interrompre, car vous venez de répondre à ma deuxième question. C'est l'une des recommandations qu'a faites M. Shur, je crois.
Je ne veux pas parler du modèle britannique, car à vrai dire, le nôtre est bien supérieur au leur, et nous ne devons pas gaspiller de temps à en parler ou à y réfléchir. En raison de notre proximité des États-Unis et des relations que nous entretenons avec la société américaine, notre fardeau est en partie le même, du point de vue de l'application des lois.
Je suppose qu'il est dangereux de poser cette question à des policiers, mais nous envisageons sérieusement la possibilité d'examen périodique du programme afin de rassurer les parlementaires et de rassurer nos commettants au sujet de ce programme, afin de vérifier qu'il fonctionne comme prévu, puisque c'est nous qui avons adopté la loi qui en régit le fonctionnement.
J'aimerais savoir ce que vous pensez, tout d'abord, d'un examen périodique — tous les trois ou cinq ans, à mon avis — et de la question de la surveillance par un organisme civil. Vous en avez déjà parlé, mais pourriez-vous nous expliquer brièvement ce que vous pensez de la possibilité de laisser un organisme civil de surveillance qui devrait participer ou non au programme — et peut-être que cet examen périodique pourrait être fait par un organisme civil.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur le surintendant et messieurs, je me rappelle que le projet de loi a été proposé la première fois par l'un de mes collègues au tout début des années 90, M. Ton Wappel. Malheureusement, il n'est pas ici pour nous faire part de ses réflexions sur l'efficacité du système, dans la mesure où cela se rapporte à certaines des préoccupations de l'heure.
À la lecture des notes, monsieur le surintendant, il me semble que si nous avons des questions ou des opinions à exprimer à propos de l'efficacité du programme aujourd'hui, nous devrions prendre en considération au moins certains des éléments suivants: tout d'abord, avons-nous protégé et continuons-nous de protéger la nouvelle identité de l'individu et de toutes les personnes qui sont à sa charge, c'est-à-dire sa famille? Excusez-moi d'utiliser le masculin ici. J'ai utilisé le singulier, mais je pense que la plupart des contrevenants, d'après ce que je crois comprendre, qui participent au programme sont des hommes. C'est le premier élément.
Deuxièmement, nous ne devons pas porter préjudice à la sécurité publique, au maintien de l'ordre et à l'intégrité de la loi ou de n'importe quelle loi du droit criminel.
On pourrait évaluer les décisions que le commissaire pourrait prendre en ce qui concerne la communication de l'information, en fonction de ces principes. Je suppose que quelqu'un doit prendre une décision au départ. Si le commissaire prend une décision qui, aux yeux de certains, va à l'encontre de l'un de ces deux principes, alors nous avons un grave problème. Une telle décision dénaturerait les intentions des parlementaires et le travail qu'ils ont accompli pour mettre sur pied ce programme.
Je sais qu'à l'époque — et corrigez-moi si je me trompe — une partie du débat portait sur l'opportunité de tenir peut-être une séance à huis clos avec les députés, tenus au secret, afin d'examiner certains de ces cas possibles de non-respect du programme de part et d'autre, mais je suppose qu'étant donné que nous devons toujours avoir une conduite irréprochable, comme la femme de César, l'aspect le plus préoccupant concernait surtout la façon dont les instances gouvernementales, dans le présent cas la GRC ou peut-être une instance locale, gérerait la situation.
Avez-vous des observations à faire à cet égard à propos de la possibilité que des personnes tenues au secret sous la foi du serment se réunissent à huis clos pour examiner certaines des questions qui ont été soulevées aujourd'hui de même que des cas possibles de non-respect du programme?
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Personnellement, voulez-vous dire? Je ne parle pas au nom de la GRC, et non, je n'en ai pas.
C'est vraiment une question difficile parce que souvent lorsque nous comparaissons devant vous, nous aimerions pouvoir vous dire que c'est ce qui s'est passé, et faire en sorte que ce ne soit pas aussi difficile.
Je pense que lorsque les législateurs se sont réunis pour rédiger cette loi, ils savaient que la tâche ne serait pas facile. Ils savaient ce à quoi nous allions faire face à un moment donné, et il n'existe pas de solution simple.
Même s'il s'agit d'un groupe de parlementaires qui siègent à huis clos, où se situe alors l'intérêt public? Je pense que les gens continuent de considérer que pour qu'il y ait une véritable transparence, tout le monde doit être au courant des faits.
Le fait est, je suppose, que plus il y a de gens qui sont exposés, plus nous risquons de réduire l'efficacité du programme.
Mais pour revenir à votre question initiale, si je vous ai bien compris, s'il y a un aspect en particulier que vous voulez examiner, s'il s'agit d'une réunion à huis clos du comité et si la loi le permet, alors je serais certainement d'accord.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais d'abord faire une petite remarque à l'intention de M. Bird, je suppose, et du surintendant principal.
D'après le témoignage de M. Shur, environ 18 p. 100 des participants au programme sont récidivistes. Selon la politique, à quelques exceptions près, tous ceux qui récidivent sont immédiatement exclus du programme. En réponse à une de mes questions, M. Shur a affirmé qu'aucun des bénéficiaires qu'on avait cessé de protéger n'en avait subi de préjudice physique, absolument aucun.
J'ai une question qui découle de celle de M. Ménard. Nous avons lu dans les journaux qu'Yves Trudeau a fait partie du Programme de protection des témoins et qu'il a été par la suite accusé d'avoir commis dix crimes. J'avais l'impression qu'il était participant au programme fédéral, mais ce n'est peut-être pas le cas. Êtes-vous en mesure de nous dire s'il était bénéficiaire du programme fédéral?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup, messieurs. Vous nous avez fourni beaucoup d'information et nous vous en savons gré. Vous voyez ces dossiers sous un angle différent.
Au cours de nos dernières réunions sur cette question, j'ai découvert, comme tous mes collègues, qu'il s'agit d'une question très complexe et nous avons l'impression de n'avoir exploré qu'une toute petite partie de tout ce dossier. Mais nous avons des lois dans ce domaine depuis plus de dix ans, et j'estime qu'il est temps de faire un examen complet.
À l'une de nos réunions, nous avons entendu un témoin depuis l'Écosse, en vidéoconférence. Il s'agissait d'un professeur. Ce témoin faisait un examen de tout le système appliqué en Écosse. À mon avis, si nous voulons pouvoir faire un bon examen de ce programme, nous devrions nommer une personne qui serait chargée d'examiner en toute confidentialité ce qui s'est fait au cours des dix dernières années dans l'application de cette politique pour voir s'il existe des problèmes dans le système. D'après votre expérience, serait-il possible d'autoriser un criminologue indépendant, des avocats ou d'autres personnes à examiner ce système?
Pour enchaîner sur l'argument de M. Chan, je pense qu'il serait très utile, étant donné que nous avons une plus longue expérience du programme, de nous inspirer de la recherche en science sociale et en sciences humaines pour prendre nos décisions. Le problème pour nous, c'est que vous nous soumettez votre argumentation concernant l'intérêt du programme en vous plaçant du point de vue de l'application de la loi ou de l'utilité d'un tribunal, mais nous ne voyons qu'un côté de la médaille. Les seules choses que nous ayons apprises à propos d'un participant au programme provenaient de quelques rares anecdotes signalées par les avocats. Cela ne nous facilite pas la tâche.
Je voudrais déclarer d'emblée qu'à mon avis, c'est un programme utile et je suis heureuse qu'il existe, mais comme n'importe quel autre programme, il pourrait être amélioré.
Je pense que nous sommes ici pour deux raisons. La première est celle qui a justifié le convocation de la présente séance, et j'espérais qu'on pourrait l'approfondir davantage aujourd'hui. Lorsque nous aborderons la révision, nous essaierons d'y revenir, car cela va non seulement favoriser notre compréhension de ce qui s'est passé, mais également celle du public.
Mais la deuxième raison est celle-ci: lorsque nous allons rédiger notre rapport, quelles recommandations allons-nous formuler pour l'ensemble du programme? Un certain nombre d'éléments différents sont apparus. Je vois qu'aux termes de la loi, le commissaire et le solliciteur général peuvent conclure des ententes pour accueillir au sein du programme des personnes relevant d'une province ou d'un territoire ou proposées par un autre corps de police canadien.
Ce que je ne vois pas dans la loi, c'est la possibilité d'exporter le programme dans une autre compétence. Si l'opération est possible, comment se déroule-t-elle? Pourquoi cela ne figure-t-il pas dans la loi? Est-ce là une question qu'il convient de soulever dès maintenant, si nous souhaitons non seulement accueillir des bénéficiaires, mais également en envoyer certains à l'extérieur du domaine régi par la GRC? S'agit-il d'une omission, est-ce qu'on a procédé d'une autre façon ou est-ce que vous voulez éviter d'intervenir dans ce domaine?
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Vous nous avez invités à vous entretenir du Bureau de réexamen. Cette invitation fait suite au témoignage de mon collègue Marc Grégoire, sous-ministre adjoint de la sécurité et sûreté, devant ce même comité le 1
er mars 2007. À ce moment, il vous a présenté les grandes lignes du Programme de protection des passagers, la procédure entourant l'émission d'une interdiction de vol, ainsi que le processus de réexamen.
Aujourd'hui, je suis ici pour décrire plus amplement ce processus, vous faire part du fonctionnement de mon bureau et, bien sûr, répondre à vos questions.
J'aimerais d'abord vous donner quelques renseignements généraux sur le bureau avant de m'attaquer au processus de réexamen lui-même. Je dirai quelques mots au sujet de notre mandat. Notre rôle est d'offrir un recours simple et gratuit aux personnes qui ont reçu une décision négative dans le cadre de deux différents programmes de Transports Canada. Le premier est le Programme d’habilitation de sécurité en matière de transport maritime, et le deuxième, qui vous intéresse, est le Programme de protection des passagers.
Nos clients ne sont pas uniquement des passagers à qui on a interdit l'accès à bord d'un aéronef, mais ils sont aussi des travailleurs maritimes qui ont vu leur habilitation de sécurité refusée ou annulée. Dans les deux cas, toutefois, notre bureau permet d'offrir au demandeur de soumettre son cas à un examen par des personnes autres que celles qui ont fait la recommandation initiale au ministre.
Dans le cadre du Programme de protection des passagers, nous prévoyons jouer un rôle important, non seulement auprès des passagers qui veulent contester la décision du ministre de placer leur nom sur la liste, mais aussi — je dirais même surtout — auprès de ceux qui pourraient faire l'objet d'une erreur d'identité.
Je donnerai maintenant quelques renseignements plus concrets au sujet de mon bureau. Nous sommes situés ici, à Ottawa. Nous nous rapportons au sous-ministre adjoint des services généraux de Transports Canada. Nous sommes ouverts du lundi au vendredi, de 8 h 30 à 16 h 30. Nous avons des agents qui s'occupent des demandes formelles, qui répondent aux questions et aux préoccupations des demandeurs, ainsi que du public en général, et qui effectuent aussi les vérifications portant sur l'identité. En plus de ces agents, les révisions mêmes seront effectuées par des conseillers en sécurité indépendants dont les services sont retenus à contrat. Chaque année, mon bureau fera un rapport au ministre de nos activités, du nombre de demandes et des résultats des révisions.
J'aimerais maintenant parler plus spécifiquement du processus de révision, notamment de celui pour les passagers qui se sont vus refuser l'embarquement. Pour les gens qui aiment les descriptions visuelles, dans ce qu'on vous a distribué plus tôt, il y a un tableau qui décrit ce processus.
[Traduction]
Je vais décrire le processus et vous remarquerez qu'il est assez linéaire et assez simple. Il ne s'agit pas de créer des obstacles bureaucratiques, mais plutôt de s'en tenir à la plus grande simplicité possible.
[Français]
Est-ce que tout le monde l'a? D'accord.
[Traduction]
Une fois que le passager s'est vu refuser l'embarquement, il doit amorcer le processus en présentant une demande écrite au bureau dans les plus brefs délais. On ne lui impose aucune limite de temps pour le faire. La demande doit indiquer les raisons pour lesquelles la décision doit être reconsidérée et nous exigeons, à des fins de protection des renseignements personnels et d'exactitude, qu'elle soit accompagnée de documents confirmant l'identité du requérant. Un agent est disponible pendant les heures de bureau pour aider le requérant à présenter sa demande à notre service.
À cette étape — et cela n'apparaît pas sur le tableau, car il s'agit d'une fonction administrative, mais elle est importante — les demandes sont classées en deux catégories, selon que le requérant demande un réexamen parce qu'il y a eu une erreur concernant son identité, ou qu'il conteste le motif pour lequel on l'a inscrit sur une liste de personnes interdites de vol.
Dans le premier cas, quand il est question d'une erreur d'identité, notre service obtient du requérant les nouveaux éléments d'information essentiellement personnels qui sont nécessaires pour distinguer le requérant de la personne inscrite sur la liste. Une fois que l'erreur est confirmée, nous prenons des mesures pour que les corrections et les ajouts soient apportés partout où ils doivent l'être pour éliminer l'erreur.
Pour en revenir à mon tableau, on a ici l'autre scénario, où le requérant conteste les raisons pour lesquelles il a été inscrit sur la liste. À cette étape, le service confie le dossier à l'un des conseillers indépendants en sécurité. Le processus de réexamen peut varier selon que le requérant nous a fourni ou non de nouveaux renseignements. En l'absence de nouveaux renseignements — ce sont les flèches vertes à droite du tableau — le conseiller va réexaminer le dossier pour vérifier si l'information qu'il contient peut légitimement avoir abouti à la décision d'inscrire l'individu sur une liste.
Le conseiller fournit ensuite un rapport présentant tous les sujets de préoccupation qui apparaissent au dossier et donne un avis quant à la nécessité, pour le ministre, de reconsidérer la question. Le requérant est informé de la recommandation du service quant à la reconsidération, ainsi que de la décision finale du ministre.
Dans les cas où le bureau de réexamen reçoit de nouveaux éléments d'information pertinents — nous en sommes maintenant du côté gauche du tableau — il va agir pour faire en sorte que les organismes d'enquête compétents, à savoir le SCRS et la GRC, valident ou invalident cette information nouvelle. Le reste du processus se déroule de la même façon une fois reçue la réponse du SCRS ou de la GRC.
Notre objectif est d'effectuer ce réexamen dans un délai de 30 jours. Cela étant dit, je suis bien consciente du fait que certains dossiers sont trop complexes pour être réglés en 30 jours, mais nous mettons tout en oeuvre pour nous conformer à la norme que nous nous sommes fixée.
Nous allons tenir un registre des réexamens effectués et comme je l'ai indiqué en français, nous remettrons un rapport annuel au ministre pour faire en sorte que l'expérience nous permette d'apporter les rajustements nécessaires tout au long de l'application de ce programme.
Pour conclure, s'il est impossible de prévoir tous les scénarios éventuels, nous pensons que ce processus devrait apporter une aide précieuse à tous les passagers qui demandent un réexamen. Ils devraient être particulièrement appréciés par ceux qui sont aux prises avec un processus plus ou moins bien connu pour faire reconnaître leur identité comme étant distincte de celle d'un individu portant le même nom et qui représente une menace pour la sûreté des transports aériens.
[Français]
Il me fera maintenant plaisir de répondre à vos questions.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je tiens à remercier nos témoins.
Je tiens à dire que je comprends ce que M. Comartin a dit, parce que lorsque je vais aux États-Unis, mon nom figure sur une liste quelconque. Il y a un mauvais acteur quelque part aux États-Unis qui a le même nom, et j'ai droit à un traitement particulier. J'ai un passeport qui indique très clairement que je suis député de la Chambre des communes, mais quand même...
J'aimerais parler de la façon dont nous pouvons concentrer nos efforts sur ceux qui figurent sur cette liste et protéger notre système de transport aérien sans importuner les voyageurs innocents qui veulent simplement vaquer à leurs occupations.
D'après la documentation que j'ai lue, je crois comprendre que la liste proposée des personnes interdites de vol ne renfermera que les noms des personnes en question. Est-ce exact? Seuls les noms y figureront. Vous n'utiliserez aucun autre moyen pour déterminer l'identité de ces personnes.
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Je m'excuse de vous avoir interrompue mais ce que je voulais dire, c'est qu'il existe un processus très clair selon lequel, si le transporteur aérien croit qu'une personne inscrite sur la liste des personnes désignées se présentera à la porte d'embarquement, il peut communiquer avec la sécurité et la police.
Le transporteur aérien, lorsqu'il communique avec Transports Canada — et c'est un autre aspect important du programme, pour vérifier que la personne figure effectivement sur la liste, Transports Canada aura des personnes 24 heures sur 24 sept jours sur sept qui communiqueront avec la GRC pour l'informer qu'une personne figurant sur une liste de personnes désignées se présentera à un aéroport, afin que la GRC puisse utiliser cette information pour prendre les mesures qu'elle estime nécessaires.
Ce programme vise à empêcher les personnes qui représentent une menace pour la sûreté aérienne de monter à bord d'un avion. C'est là l'élément essentiel — les empêcher de monter à bord de l'avion. Et si la GRC ou toute autre force policière d'une administration locale a raison de croire qu'il y a autre chose, par exemple, un mandat émis contre cette personne, ou quelque chose du genre, c'est à elles d'exécuter le mandat.
Notre rôle, en fait, consiste à nous assurer que la personne qui représente une menace ne monte pas à bord de l'avion.
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Nous avons vu des incidents où des personnes ont utilisé leur propre identité.
M. Jean-Yves Roy: Ils sont un peu stupides.
M. Brion Brandt: Oui, c'est vrai. Ce n'est pas une réponse à tous les problèmes du monde. C'est vraiment une question de s'attaquer à un problème réel. Nous avons déjà vu des circonstances comme celles-là. Si on veut falsifier une identité, c'est possible, je l'accepte, mais cela demande un certain effort, et les autorités peuvent être mises au courant de tels agissements.
À mon avis, il est vraiment nécessaire de reconnaître que c'est vraiment une autre couche de sécurité, de sûreté. Ce n'est pas vraiment la solution à tous les événements.
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D'abord, je ferai tout simplement la remarque, pour compléter ce que je voulais dire tout à l'heure, que comme passager, je serais plus en sécurité si je savais que toutes les mesures sont prises pour que, s'il y a un terroriste à bord, il ne puisse rien utiliser pour tenter quelque chose.
Je voudrais maintenant parler à Mme Savoie. J'aimerais savoir ce que je peux dire ou ce que je dois dire, puisque je ne connais pas les raisons pour lesquelles je suis sur la liste, pour convaincre les autorités que je ne devrais pas être sur la liste? Par exemple, je connais au moins cinq raisons pour lesquelles on me mettrait sur la liste.
D'abord, il y a probablement autant de Serge Ménard que de Linda Savoie, et ils ne sont pas tous...
Ensuite, j'ai été en contact pendant plusieurs mois avec des gens qui étaient accusés d'avoir exporté du matériel nucléaire au Pakistan. Bien qu'ils aient été acquittés, je suis convaincu que la GRC pense encore qu'ils sont coupables, mais qu'ils avaient un bon avocat.
Des voix: Ah, ah!
M. Serge Ménard: Troisièmement, je suis allé à Cuba, mais c'était au Club Med.
Quatrièmement, avant l'aide juridique, j'ai défendu plusieurs terroristes quand j'étais jeune avocat, au nom de l'assistance judiciaire. La différence entre l'assistance judiciaire et l'aide juridique, c'est qu'en vertu de l'aide juridique, on est payé faiblement, tandis qu'à l'époque de l'assistance judiciaire, on ne recevait rien. Comme jeune avocat, on croyait que c'était notre devoir envers la société de le faire gratuitement.
Cinquièmement, j'ai questionné plusieurs agents de la GRC au cours de ma carrière, et la plupart n'ont pas aimé l'expérience: ils pourraient m'en vouloir encore.
Jusqu'où dois-je vous donner des raisons si je ne sais pas pourquoi je suis sur la liste? Ne serait-il pas plus simple d'abord de vérifier rapidement si c'est bien le Serge Ménard que je suis qui est sur la liste, ou si c'est un autre que moi, et ainsi de suite. Était-ce une relation professionnelle que j'avais avec ses gens?
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Eh bien, vous n'avez pas apaisé mes doutes; je continue de croire que les Américains nous dictent beaucoup de choses.
J'ai également un passeport canadien qui indique que je suis député de la Chambre des communes. Je m'en suis toujours servi comme document d'identité lorsque je voyage. Je prends l'avion d'Edmonton à Ottawa, sans survoler habituellement l'espace aérien américain, mais lorsqu'ils passent mon passeport au scanneur, cela n'est toujours pas suffisant et ils doivent téléphoner à un ministère quelconque qui est ouvert 24 heures sur 24 sept jours sur sept, je suppose — heureusement que ce service fonctionne en tout temps — pour que je puisse prendre un avion pour me déplacer au Canada.
Je pensais que c'étaient les Américains qui dictaient ce genre de choses, parce que lorsque j'ai communiqué avec votre ministère, vous avez dit que vous ne pouviez rien faire pour retirer mon nom de la liste et que je devais m'adresser aux Américains. J'ai communiqué avec l'ambassade des États-Unis et on m'a dit qu'ils pourraient peut-être régler la situation dans six mois à un an.
Je considère que cela est inacceptable pour des Canadiens qui voyagent en avion dans l'espace aérien canadien. Je tiens à savoir ce que vous faites pour protéger notre souveraineté canadienne, dans le cas de Canadiens qui voyagent en avion à l'intérieur de l'espace aérien canadien. Je n'ai pas d'objections à ce que vous preniez les mesures nécessaires pour tâcher d'assurer la sécurité, mais que ces mesures ne nous soient pas dictées par un pays étranger parce que les Canadiens survolent le territoire canadien.
Que répondez-vous à cela?
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Je vous remercie, monsieur le président.
Contrairement à certains de mes collègues, je suis tout à fait en faveur de ce programme. Je ne suis pas sûr qu'il sera aussi utile que le programme d'enregistrement des armes à feu, mais je pense qu'il contribuera probablement à protéger les Canadiens.
Le fait est que les transporteurs aériens utilisent toutes sortes de listes. Comme le Canada n'a pas sa propre liste, ils utilisent la liste américaine de personnes interdites de vol. Le 18 juin, nous aurons notre propre liste. Il faut avouer que la liste américaine était truffée d'erreurs. Nous le savons tous. Dans ma vie précédente de l'autre côté, nous avons aidé les gens à retirer leur nom des listes. Cela n'a pas pris six mois. Nous avons dû le faire par l'intermédiaire des départements américains des Transports et de la Sécurité intérieure, et nous avons réussi à retirer beaucoup de gens de la liste. Il y aura certaines erreurs de ce genre sur la liste canadienne.
J'ai d'autres questions. Tout d'abord, les transporteurs qui arrivent au Canada ou qui partent du Canada sont-ils obligés d'utiliser les listes canadiennes de protection des passagers? Autrement dit, il ne s'agit pas d'une option, ni d'un outil, il s'agit d'une obligation.
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Je serais davantage enclin à me rallier à l'opinion de M. Comartin en ce qui concerne l'efficacité et l'utilité de ce programme. Au mieux, il présente seulement une efficacité marginale, et il ne permettrait d'attraper que les terroristes les plus idiots. Or, ce même programme porte gravement atteinte aux libertés civiles du simple citoyen, et c'est cela qui m'inquiète.
Je vais aller dans la même veine que M. Cullen en parlant des passagers auxquels on interdirait de monter à bord d'un avion au départ de l'étranger. Admettons que quelqu'un vienne de Hong Kong, de Chine ou d'Inde pour revenir au Canada, qu'il s'agisse d'un citoyen canadien dont le casier judiciaire est vierge mais que peut-être il pourrait à la limite être considéré comme un suspect ou comme le comparse d'un suspect, cette personne se verra refuser la possibilité de rentrer dans son propre pays. Cela est inacceptable et je ne pense pas que ce soit juste non plus.
Par ailleurs, je connais un peu Transports Canada et je sais comment m'y prendre pour obtenir une cote de sécurité auprès d'un ministère. Un de mes électeurs a déjà travaillé à l'aéroport de Hong Kong, côté piste, c'est un Canadien qui travaillait à la maintenance et qui a accepté un poste là-bas parce qu'il ne pouvait pas trouver de travail au Canada. Il est donc reparti pour Hong Kong où il a travaillé pendant cinq ans. Ensuite, il est revenu au Canada et a essayé d'obtenir un poste chez Air Canada, là aussi pour travailler du côté piste. On lui a refusé une cote de sécurité. Il m'a fallu six mois et j'ai dû faire intervenir le ministre avant de parvenir à lui faire obtenir une cote de sécurité. Cela vous montre à quel point il est compliqué et difficile pour un simple citoyen de vivre comme un simple Canadien.
Cette liste d'interdiction de vol va avoir beaucoup d'impact sur les gens, et cela pour des raisons qu'on ne leur expliquera pas. Ils ne comprendront pas pourquoi, et ils ne sauront pas non plus pourquoi leur nom figure sur la liste. Ils ne pourront par conséquent pas se défendre s'ils ne savent même pas pour quelle raison leur nom figure sur la liste. À mon sens, c'est une atteinte grave à la liberté civile des Canadiens, et cela va également poser beaucoup de problèmes au ministre, alors que le programme, dans le meilleur des cas, ne servira qu'à attraper les terroristes les plus idiots.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie également les deux experts.
Je suis à moitié d'accord avec M. Cullen, mais je pense personnellement que ce programme-ci, mais pas nécessairement l'autre dont il a parlé, est efficace.
Lorsque nous parlons des libertés civiles des gens à qui on refuse la possibilité de prendre l'avion, je comprends fort bien. Mais j'estime aussi, comme la majorité des Canadiens à mon avis, que les libertés civiles des gens qui voyagent par avion sont tout aussi importantes. Ces gens innocents qui montent à bord d'un avion ont parfaitement le droit de croire, comme l'a dit M. Cullen, qu'il y a l'un ou l'autre système permettant de vérifier si les autres passagers ne représentent pas une menace pour le vol en question. Dans ce sens donc, j'accepte ce plan. Par ailleurs, comme il l'a dit, j'admets que ce système ne sera pas parfait, mais à défaut de plan, j'ignore comment on pourrait s'y prendre pour protéger les passagers.
Je sais qu'une bonne partie des critiques concernent le programme américain, mais ce n'est pas de ce programme qu'il s'agit ici. Pouvez-vous nous confirmer qu'il s'agit bel et bien d'un programme canadien, élaboré au Canada pour les Canadiens, pour les protéger...