:
Très bien. La séance est ouverte. Il s'agit de la 41
e réunion du Comité permanent de la condition féminine, qui poursuit son étude au sujet des femmes et de la protection des pensions.
Avant de continuer, je tiens à souhaiter la bienvenue aux membres de la délégation russe représentant l'administration présidentielle en Russie. Bienvenue au comité.
Je crois savoir que vous exécutez un programme de réforme de l'administration publique et que vous faites une tournée dans le cadre d'une étude sur la participation hommes-femmes. Bienvenue. Nous sommes ravis de vous accueillir, et nous sommes tout aussi ravis de constater que ces questions sont prises au sérieux, non seulement au Canada, mais chez vous également. Je vous souhaite un excellent séjour au Canada, et j'espère que nous pourrons apprendre les uns des autres.
Nous sommes également ravis d'accueillir les représentants de la Confédération des syndicats nationaux — ai-je bien prononcé le nom de votre organisme? Elles comparaissent par vidéoconférence, et il s'agit de Mme Claudette Carbonneau et de Mme Nathalie Joncas, qui est actuaire.
Nous accueillons également Mme Danielle Casara de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Bienvenue. Elle est accompagnée de Marie-Josée Naud, conseillère syndicale au service d'éducation.
Nous vous invitons donc à faire vos remarques liminaires et de vous en tenir à une dizaine de minutes pour votre exposé. Je vous demande donc de ne pas dépasser le temps qui vous est imparti, pour que nous puissions ouvrir tout de suite après le premier tour des questions. Qui voudrait commencer?
Nous allons demander aux personnes qui comparaissent par vidéoconférence de commencer.
Vous avez la parole.
:
Tout d'abord, je vous remercie de nous écouter. Nous voudrions partager notre réflexion sur la situation des femmes et des fonds de pension, et vous soumettre un certain nombre de pistes d'amélioration. Nous avons dressé notre dossier en examinant deux angles: d'une part, les régimes de pension privés, c'est-à-dire les régimes complémentaires de retraite, et, d'autre part, les régimes publics.
En ce qui concerne les régimes complémentaires de retraite, soit les régimes de pension privés, nous constatons que les meilleurs régimes de retraite sont ceux à prestations déterminées. Ces derniers se retrouvent généralement dans les grandes entreprises, particulièrement dans le secteur industriel et dans les secteurs public et parapublic.
Les femmes sont très présentes dans les secteurs public et parapublic. Par contre, dans le secteur privé, elles occupent souvent des emplois dans de bien petites entreprises du secteur des services, où tant la grosseur de l'entreprise que le nombre d'employés ne permettent pas la mise en place d'un régime de retraite à prestations déterminées qui est, à notre avis, le meilleur.
Le cadre législatif entourant les régimes de pension à prestations déterminées est très complexe. Une petite entreprise n'a ni les moyens ni les ressources pour mettre en place un tel régime. Les femmes du secteur privé se retrouvent donc majoritairement avec des régimes à cotisations déterminées ou, tout simplement, sans aucun régime complémentaire de retraite.
Les lois actuelles permettent difficilement de mettre en place des régimes sectoriels. D'ailleurs, à cet égard, le gouvernement fédéral a procédé à une consultation en mars dernier, et on nous a demandé quel était notre intérêt envers les régimes interentreprises. Je vous donne des extraits des représentations que nous avons alors données.
Nous avons souligné que lors de notre dernier congrès, nous avions entrepris une réflexion sur les systèmes de retraite, l'objectif étant de réfléchir aux moyens permettant à nos membres d'atteindre un niveau adéquat de revenu à la retraite. Les régimes interentreprises avaient été identifiés comme étant une piste de solution très prometteuse. Ils permettent de regrouper un nombre important de petites entreprises et d'atteindre une masse critique suffisante pour permettre des économies d'échelle sur les frais de gestion et d'administration. Plus encore, ils permettent d'instaurer des régimes à prestations déterminées là où cela s'avère extrêmement difficile.
Les services de garde et les centres de la petite enfance constituent un exemple extrêmement intéressant au Québec. On a réussi à y mettre en place un régime qui vise 1 400 petites entreprises d'environ une trentaine d'employés. Cela permet d'offrir un fonds de pension très intéressant à 50 000 travailleuses, puisque ce sont majoritairement des femmes.
Avant la mise sur pied de ce régime, il y avait seulement quelques régimes d'accumulation de capital dans ces entreprises. En regroupant l'ensemble des entreprises du secteur dans un même régime, il a été possible de mettre sur pied un régime de retraite à prestations déterminées de type « salaire final ». Bien que les travailleuses aient à changer d'employeur durant leur carrière, elles demeurent très souvent dans le même secteur. Au bout du compte, elles conservent les bénéfices accumulés. Cela a été possible notamment parce que le gouvernement du Québec a allégé une partie de sa Loi sur les régimes complémentaires de retraite pour rendre fonctionnelle l'administration d'un tel régime. À mon avis, il y a là quelque chose qui devrait inspirer vos réflexions.
D'autre part, notre grande proposition est d'en arriver à des régimes de retraite obligatoires, avec l'obligation pour les employeurs de verser une cotisation. Je rappelle qu'actuellement, au Canada, il n'y a pas de loi qui oblige les employeurs à mettre sur pied un régime de retraite. Malgré beaucoup d'efforts de la part des syndicats sur le plan des négociations, le pourcentage de travailleurs couverts par des régimes de retraite n'a jamais excédé 40 p. 100.
On constate que dans d'autres pays de l'OCDE, il y a de meilleurs systèmes de protection, des systèmes de protection qui sont beaucoup plus généralisés. Bien que des efforts supplémentaires puissent être faits pour augmenter le nombre de régimes d'entreprises ou pour mettre en place des régimes sectoriels, il nous apparaît évident qu'il faut un changement majeur dans la structure des régimes de retraite, comme ce fut le cas en Australie et comme ce le sera bientôt en Angleterre.
Il faut obliger les entreprises à cotiser pour les travailleuses et les travailleurs en vue de la retraite. Cette obligation pourrait prendre la forme de régimes sectoriels obligatoires, ou encore de régimes provinciaux avec droit de retrait pour les employeurs qui ont des régimes équivalents ou supérieurs.
À cet égard, la CSN croit que le gouvernement du Canada devrait adopter une loi qui reconnaîtrait le droit pour tous les salariés d'être couverts par un régime de retraite, et qui obligerait tous les employeurs à verser une cotisation minimale. Les paramètres d'une telle approche pourraient être déterminés conjointement par les organisations syndicales, les employeurs et les gouvernements. Voilà pour nos pistes de réflexion sur les régimes à caractère privé.
Au sujet des régimes publics, je voudrais d'abord faire les constats suivants. Globalement, les femmes sont moins couvertes par les régimes privés. De plus, elles retirent, en moyenne, des revenus inférieurs à ceux des hommes; les revenus des femmes proviennent davantage des régimes publics. Chez les personnes de 65 ans et plus, les régimes publics fournissent 47 p. 100 des revenus totaux de retraite. Toutefois, ces revenus représentent 56 p. 100 des revenus des femmes à la retraite, contre 39 p. 100 pour les hommes.
Lorsqu'il est question de femmes à la retraite, il faut donc parler des régimes publics, soit la Pension de la sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti, ou encore le RPC du gouvernement fédéral. À cet égard, nous voudrions appuyer la suggestion de hausser le Supplément de revenu garanti. Cela pourrait être une avenue pour améliorer le sort des femmes à la retraite. Cela aiderait particulièrement les femmes les plus pauvres qui n'ont peut-être pas intérêt à faire partie d'un régime sectoriel.
Au sujet des régimes publics, il faut aussi se rappeler que les femmes ont des périodes de travail entrecoupées de différents évènements. Les régimes de retraite privés, tout comme les régimes publics, ne sont pas adaptés à cette réalité. En moyenne, les femmes prennent leur retraite à un âge plus avancé, car elle n'ont pas accumulé un revenu de retraite suffisant.
À cet égard, il faut envisager un certain nombre de correctifs, notamment pour s'adapter aux changements dans la structure des familles. Il ne s'agit plus de familles traditionnelles. On s'aperçoit que les pères s'intéressent davantage aux soins des enfants. Pour ce qui est des régimes publics, nous pensons qu'il faudrait tenir compte de la façon dont les nouvelles générations choisissent de vivre leur vie familiale et personnelle. Dans le calcul de la rente, il faudrait tenir compte des périodes où les parents s'occupent des enfants. De plus, il ne faut pas le faire uniquement pour les naissances, mais aussi pour différentes périodes: lorsqu'un enfant est malade, lorsque des parents âgés ont besoin d'assistance, etc.
Je rappelle que même si les femmes sont davantage présentes sur le marché du travail, ce sont aussi elles qui continuent d'assumer la grande part des responsabilités pour les enfants malades et les parents vieillissants. De ce côté, des ajustements doivent vraiment être apportés.
La dernière suggestion concernant les régimes publics est de s'assurer que la rente accordée à des conjoints survivants est réellement versée à la bonne personne. Pour nous, la bonne personne n'est pas tant le dernier conjoint légal que celle qui a la responsabilité des enfants. De ce côté, il faut moderniser notre dispositif. La famille d'aujourd'hui n'est plus du tout la même que celle d'il y a 20 ou 30 ans. Il y a lieu de faire une réflexion à cet égard.
Nous pourrons y revenir lors de la période de questions, notamment avec Mme Joncas qui est actuaire.
Cela termine ma présentation.
:
La FTQ voudrait d'abord vous remercier de lui donner l'occasion d'être parmi vous aujourd'hui pour exprimer sa position sur les femmes et la protection des pensions.
La FTQ est la plus importante centrale syndicale au Québec avec plus d'un demi-million de membres, dont plus du tiers sont des femmes. Par conséquent, la FTQ regroupe le plus grand nombre de travailleuses syndiquées au Québec. Elle est également la plus représentative puisque nos membres se retrouvent dans tous les secteurs d'activité économique, y compris dans la sphère fédérale. Ensemble, nous avons développé une expertise dans le domaine des régimes de retraite, tant dans le secteur public que privé. Nous avons été de toutes les luttes ayant mené à des améliorations des régimes de retraite au Québec.
Au fil des ans, la FTQ a multiplié ses interventions: tenue d'activités avec nos syndicats affiliés et sessions de formation afin de mobiliser nos membres sur cette importante question. Présente également sur la scène politique, la FTQ intervient régulièrement au moyen de dépôt de mémoires en commission parlementaire et de pressions politiques sur ce sujet.
La FTQ se présente ici aujourd'hui pour vous parler de l'importance de maintenir et d'améliorer les régimes publics et non de les réduire, compte tenu de leur caractère déjà trop modeste. La FTQ constate avec désarroi que le projet de loi a été adopté à la vitesse grand V. Nous ne pouvons que déplorer l'absence d'une large consultation publique sur les changements proposés et la façon insidieuse dont on a introduit en douce des coupes au Régime de pensions du Canada, le RPC, dans un projet de loi à caractère budgétaire.
Qui plus est, l'adoption du projet de loi augmente la probabilité que le gouvernement québécois procède lui aussi à des coupes au Régime des rentes du Québec, notamment pour les retraites anticipées entre 60 et 65 ans. Nous aimerions attirer votre attention sur le fait qu'au Québec, la situation financière du régime semble encore plus précaire, et ce, en raison d'une démographie et d'un marché du travail moins favorables que dans le reste du Canada, et que le gouvernement québécois est confronté à l'éventualité d'une hausse des cotisations pour y faire face.
Comme le déclaraient les ministres des Finances en mai dernier dans le cadre de l'examen triennal du régime, le RPC « [...] repose toujours sur une solide assise financière ». C'est pourquoi ces derniers « [...] ont convenu que le taux de cotisation restera fixé à son niveau actuel, qui est de 9,9 % des gains ouvrant droit à pension ».
C'est dans ce contexte que nous sommes très inquiets de l'absence de transparence qui caractérise les travaux du groupe dirigé par M. Jack Mintz et dont le rapport doit être livré à la prochaine réunion annuelle des ministres des Finances en décembre prochain à Whitehorse. Ce groupe a le mandat, et vous le savez mieux que nous, de proposer aux ministres des Finances une vision de ce que devrait être le système canadien des retraites dans le contexte actuel. Voilà pourquoi nous profiterons du temps qu'il nous reste pour partager avec vous notre réflexion sur ce que le système de retraite canadien devrait être, particulièrement du point de vue des femmes.
En termes d'objectifs, le système canadien de revenu à la retraite devrait assurer à toutes les femmes un revenu minimum décent, le maintien de leur niveau de vie à la retraite et la protection de ce revenu face à l'inflation, et ce, en tenant compte du fait que les femmes, en raison de leurs responsabilités familiales, sont plus fréquemment amenées à se retirer du marché du travail ou à ralentir leurs activités. De toute façon, elles gagnent nettement moins au départ que les hommes.
Pour la FTQ, la clé d'une bonne couverture des femmes passe par une amélioration des régimes publics, qui seuls sont en mesure de réaliser les objectifs cités ci-dessus, surtout lorsqu'on reconnaît la plus grande dépendance des femmes à l'égard des régimes publics. En effet, les femmes tirent en moyenne 54,4 p. 100 de leur revenu de retraite de sources publiques, comparativement à 38 p. 100 pour leurs contemporains masculins. Je vous invite à consulter à cet égard le tableau annexé à notre document.
Bref, les femmes ont besoin des régimes publics. L'expérience des 40 dernières années nous a démontré les limites d'un système reposant sur la participation volontaire des employeurs à des régimes complémentaires de retraite ou sur la capacité pour tous les contribuables, quel que soit leur niveau de revenu, d'épargner suffisamment en vue de leur retraite. Dans les faits, selon les statistiques publiées par la RRQ, le taux de couverture des régimes complémentaires de retraite au Québec stagne autour de 40 p. 100 des travailleurs dans leur ensemble. On sait qu'une infime minorité des contribuables, les plus fortunés, accaparent à eux seuls la part du lion de la déduction fiscale pour les REER.
La réforme la plus significative qui pourrait être adoptée consisterait à augmenter le taux de remplacement du RPC/RRQ, qui est présentement de 25 p. 100, à un taux plus élevé, idéalement 50 p. 100, comme l'a proposé le Congrès du travail du Canada. Ce changement serait capitalisé et entrerait en vigueur progressivement sur une période de 30 à 40 ans.
Compte tenu du fait que le taux de couverture du RPC/RRQ est presque universel, cette réforme aurait pour effet, à terme, de relever le niveau de revenu des femmes à la retraite. Il va de soi que les dispositions actuelles relatives aux soins des enfants de moins de 7 ans et le retrait pour fins de calcul des années à plus faible revenu, 15 p. 100 qui seront bientôt 17 p. 100, devraient être maintenus et s'appliqueraient à ce nouveau volet. La FTQ verrait aussi d'un bon oeil le relèvement du maximum des gains admissibles de 100 p. 100 à 125 p. 100, ou même à 150 p. 100 du salaire industriel moyen, afin que le RPC ainsi amélioré couvre une grande partie de la population travailleuse.
Incidemment, une telle approche aurait aussi pour effet positif d'améliorer significativement les perspectives de sécurité de revenu à la retraite de la main-d'oeuvre atypique qui, comme vous le savez, est majoritairement composée de femmes.
Pour la FTQ, toute expansion du RPC/RRQ doit prendre la forme d'une prestation déterminée, certainement pas celle d'un régime à cotisations déterminées, et encore moins celle d'un régime à cotisation volontaire. Nous croyons que seule une option publique à prestations déterminées permet de garantir aux femmes une sécurité du revenu sur une base viagère et dont le risque serait assumé par les cohortes successives de cotisants au régime.
Sur cette question, la FTQ partage l'opinion de M. David Denison, président et chef de la direction de l'Office d'investissement du RPC, qui a reconnu les grandes faiblesses d'un régime à cotisations déterminées, soit, dans ses propres mots:
L'exposition des cotisants individuels au risque lié au marché durant les années de participation au régime et en particulier à la possibilité que l'épargne soit insuffisante pour produire un niveau de revenu de retraite adéquat si le départ à la retraite survient après une période de rendements médiocres des placements comme celle que nous avons vue récemment;
En outre, les cotisants individuels assument le risque de survivre à leur épargne;
L'explication des options et des rendements des placements à des millions de titulaires de comptes individuels constituerait une tâche très exigeante. De plus, rien ne garantit que les choix de placement seraient avisés et les résultats satisfaisants.
Cela étant dit, si l'option d'une augmentation du taux de remplacement du RPC/RRQ était retenue, la FTQ aurait alors moins d'objections de principe à l'introduction d'un volet de cotisation volontaire au RPC/RRQ comme mécanisme complémentaire au taux de remplacement de 50 p. 100 désormais déjà assuré par le RPC.
Au-delà des avantages qu'en retirerait l'ensemble des femmes sur le marché du travail, nous nous attendons à ce que l'entrée en vigueur progressive de cette mesure atténue la pression sur les employeurs promoteurs de régimes complémentaires de retraite, car ces régimes verraient alors leur rôle réduit, pour ce qui est du service futur à tout le moins, compte tenu du taux de remplacement plus élevé désormais assuré par les régimes publics.
Si l'option privilégiée par la FTQ était retenue, nous pensons qu'il faudrait améliorer les prestations des régimes de base sur une base transitoire. Par exemple, le Congrès du travail du Canada recommande d'accroître le Supplément de revenu garanti de 15 p. 100 afin qu'aucune personne âgée ne vive dans la pauvreté. Au passage, la FTQ salue l'initiative du gouvernement fédéral de hausser de 500 $ à 3 500 $ l'exemption des gains pour les fins du Supplément de revenu garanti. Par contre, nous sommes d'avis que cette exemption ne devrait pas se limiter aux seuls revenus de charge ou d'emploi, mais s'appliquer à l'ensemble des revenus.
Nous tenons à préciser que pour une contribuable québécoise de plus de 65 ans qui dispose d'un revenu entre 17 000 $ et 21 000 $, un retrait de son REER de 1 000 $ se traduit actuellement par une diminution du Supplément de revenu garanti et une hausse des impôts et cotisations totalisant 800 $, ne lui laissant qu'un maigre montant de 200 $ net, ce qui n'incite guère à épargner en vue de la retraite.
En conclusion, la FTQ partage vos préoccupations sur l'importance que le système canadien de retraite assure une sécurité de revenu et une dignité aux travailleuses canadiennes qui partent à la retraite. Nous réitérons notre forte préférence pour qu'une large consultation publique se fasse au Canada sur les pistes de solutions envisagées, et nous nous engageons auprès de vous à participer activement et de façon constructive à ce processus de consultation.
Merci beaucoup de votre écoute.
:
J'allais dire que j'ai pris connaissance d'une partie des témoignages des témoins précédents et j'estime qu'elles vous ont brossé un tableau très complet de la situation en ce qui concerne l'actuel régime de pensions, y compris un grand nombre de statistiques sur la situation des femmes en particulier. Donc, au lieu de répéter ce qu'elles ont dit ou de vous en présenter une autre version, je voudrais me concentrer sur ce que je considère comme les questions clés touchant les femmes et la protection des pensions.
Je devrais également préciser que je suis experte-conseil indépendante et chercheure spécialisée en politique sociale. Même si je suis attachée de recherche au Centre canadien de politiques alternatives, le CCPA n'a pas de position officielle sur les femmes et la protection des pensions. Par conséquent, je vous présente aujourd'hui mes propres vues sur la question, et non celles de cet organisme.
Il y a trois grandes raisons pour lesquelles les préoccupations des femmes relatives à la protection qu'offrent les pensions de retraite sont différentes de celles des hommes.
Les gains moyens des femmes sont généralement inférieurs à ceux des hommes. Cela veut donc dire qu'une pension de retraite qui ne remplace qu'un infime pourcentage des gains ne sera sans doute pas suffisante comme source de revenu pendant la retraite. Par exemple, comme vous le savez certainement, le Régime de pensions du Canada verse une pension de retraite équivalente à 25 p. 100 des gains annuels moyens cumulatifs du cotisant, jusqu'à concurrence de 908,75 $ par mois. Or la pension de retraite mensuelle moyenne versée aux hommes qui ont pris leur retraite en mai 2009 était de $564, et de seulement 391 $ pour les femmes. En d'autres termes, les femmes touchent moins de 40 p. 100 de la prestation maximale. Bien entendu, cet écart traduit le fait que bon nombre de femmes ont passé moins de temps dans la population active pendant leur vie que les hommes, mais il révèle surtout que les femmes ont des gains inférieurs à ceux des hommes.
Même si ce serait certainement utile pour les femmes, améliorer le taux de remplacement du RPC — et c'est ce que la représentante de la FTQ, et sans doute d'autres aussi, vous ont suggéré — reviendrait néanmoins à créer un plan de remplacement des gains. Cela veut dire que ceux qui ont des gains inférieurs toucheraient une plus petite pension en vertu du régime.
Deuxièmement, les tendances ne sont pas les mêmes pour les femmes et pour les hommes en ce qui concerne le travail rémunéré et non rémunéré, et cette réalité doit absolument être prise en compte dans la conception de régimes de revenu de retraite. Le premier volet du régime de revenu de retraite — c'est-à-dire, la SV et le SRG — est censé tenir compte de cette réalité mais, malheureusement, la prestation maximale qu'une personne peut toucher, pour la SV et le SRG ensemble, est nettement inférieure au seuil de la pauvreté.
L'objet de ce volet du régime consiste à fournir une pension de retraite aux personnes qui ont eu un travail salarié pendant une période limitée, et à compléter les prestations proportionnelles aux gains de ceux dont la pension de retraite liée à l'emploi est insuffisante. La SV est versée aux particuliers. L'admissibilité à la SV ne dépend pas de l'activité sur le marché du travail ni des gains d'un conjoint. Il s'agit d'une pension de retraite versée aux femmes en leur propre nom et c'est un régime qui respecte l'autonomie économique des femmes.
Permettez-moi de préciser que j'ai été frappée par la solution que proposent certains témoins qui ont comparu devant vous, solution qui consisterait à améliorer les prestations versées aux femmes en raison de leurs rôles de femmes mariées et de mères d'enfants. Autrement dit, on suppose que les femmes ne pourraient bénéficier de la protection qu'offre une pension de retraite que si elles entretiennent une relation avec un homme. En ce qui me concerne, cette approche pose problème.
Certains témoins ont proposé que les femmes touchent des prestations de retraite plus élevées lors du décès de leur mari; et que les femmes qui ne font pas partie de la population active puissent participer au volet du régime de pensions public, soit le RPC, qui vise à remplacer les gain, même si elles n'ont pas de gains à faire remplacer.
L'idée de créer une « pension de personnes au foyer » remonte à une trentaine d'années. En effet, lors de la dernière grande conférence nationale sur les pensions en 1981, une des questions clés à l'étude était l'amélioration des pensions versées aux femmes, et ce à l'instigation de Monique Bégin, qui était alors ministre de la Santé et responsable des pensions car, à l'époque, on parlait beaucoup de pensions pour les personnes au foyer. Mais, comme nous le savons tous, le monde a changé et il convient à présent de fonder les politiques sur la réalité actuelle et non sur celle qu'il y a 30 ans.
Or, à l'heure actuelle, 82 p. 100 des femmes en âge de procréation — c'est-à-dire les femmes âgées essentiellement de 25 à 44 ans — travaillent en dehors de la maison. Le RPC est conçu de façon à garantir que les femmes ne soient pas pénalisées si elles quittent la population active pour avoir des enfants ou pour rester à la maison avec eux, même si elles désirent travailler à temps partiel pendant que leurs enfants sont jeunes, puisque les règles leur permettent d'exclure les années pendant lesquelles elles avaient un enfant âgé de moins de sept ans du calcul des gains moyens qui détermineront le montant de leur pension de retraite. Mais il faudrait accorder ce même droit aux femmes qui se voient dans l'obligation de prendre une retraite anticipée pour s'occuper de parents âgés et fragiles ou de membres de la famille qui ont une incapacité. À mon avis, il faut envisager dans ce contexte une disposition d'exclusion qui permettrait de tenir compte du travail non rémunéré accompli par les femmes, car elles, aussi, ont besoin d'une meilleure protection relativement à leurs pensions de retraite.
Troisièmement, les femmes ont tendance à vivre plus longtemps que les hommes. Cela veut donc dire que la somme d'argent qu'elles doivent accumuler pour être sûres d'avoir des revenus toute leur vie sera nécessairement plus importante que celle qu'il faut à un homme et, dans ce contexte, l'indexation des pensions en fonction du coût de la vie est particulièrement importante afin d'éviter l'érosion de leurs prestations. Certaines des propositions avancées par le passé envisageaient l'élimination de l'indexation. Mais il ne fait aucun doute que cela risquerait de créer de graves difficultés pour les femmes.
Comme vous l'avez déjà entendu, me semble-t-il, seulement 38 p. 100 des Canadiens — c'est-à-dire 38 p. 100 des hommes et 39 p. 100 des femmes — cotisent à un régime de retraite au travail. De plus, seulement 31 p. 100 des personnes qui pourraient cotiser à un REER le font en réalité. À l'heure actuelle — ces chiffres sont de 2007, si bien qu'ils sont un peu différents de ceux qui viennent de vous être fournis par les représentantes de la FTQ — les femmes âgées obtiennent 28 p. 100 de leur revenu du premier volet du régime de retraite, soit la SV et le SRG. Les hommes âgés obtiennent 18 p. 100 de leur revenu de cette source. En réalité, plus de 48 p. 100 du revenu des femmes âgées de 65 ans et plus proviennent des transferts gouvernementaux. Il est donc plus clair que le régime de pensions public revêt une importance critique pour la sécurité financière des femmes pendant la vieillesse, et je ne m'attends pas à ce que cela change.
Comme nous le savons tous, plus de femmes que jamais auparavant ont des emplois rémunérés, mais ce que nous ne réalisons pas toujours, c'est que 40 p. 100 des emplois des femmes sont ce qu'on appelle des emplois « atypiques » — c'est-à-dire qu'il s'agit d'emplois à temps partiel, contractuels et saisonniers, d'emplois obtenus par l'entremise d'une agence de placements temporaires, de travail autonome ou de multiples emplois chez toute une série d'employeurs différents afin de joindre les deux bouts. Bon nombre de ces emplois sont mal rémunérés et n'offrent pas d'avantages sociaux, tels qu'une pension de retraite; la sécurité d'emploi est minime ou inexistante. Comme les revenus des femmes sont inférieurs, il leur est difficile d'économiser de l'argent pour la retraite en cotisant à leurs propres REER. Tout cela influencera, bien entendu, les montants que les femmes peuvent s'attendre à toucher à leur départ de la population active.
Donc, il me semble que, si nous souhaitons améliorer la protection offerte aux femmes par le régime de pensions de retraite, il faut apporter des améliorations aux deux premiers volets du régime actuel de revenus de retraite — c'est-à-dire à la SV, au SRG et au RPC en général.
Je vous remercie.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Français]
Bienvenue à tous nos témoins aujourd'hui. Merci beaucoup d'être parmi nous cet après-midi.
Je peux peut-être commencer par aborder le sujet dont parlait Mme Carbonneau, c'est-à-dire la grande tendance pour les femmes à travailler dans les petites entreprises et dans le secteur des services où il y a moins d'occasions d'avoir une pension et où il n'y a pas beaucoup d'économies possibles en termes de pensions. Beaucoup de Canadiens ont exploré l'idée d'une augmentation des suppléments du Régime de pensions du Canada et de la Régie des rentes du Québec.
[Traduction]
S'agissant de l'optique canadienne et, surtout, de l'optique des femmes, ai-je raison de penser que vous êtes toutes favorables à l'élargissement du Régime de pensions du Canada ou du Régime de rentes du Québec? Dans l'affirmative, les nouvelles mesures devraient-elles être facultatives ou obligatoires? Et quelle serait l'ampleur des mesures d'élargissement que vous avez à l'esprit?
Enfin, s'il n'y a pas de subventionnement intergénérationnel, toute augmentation des prestations du RPC ne bénéficiera aux retraités que dans de nombreuses années. À ce moment-là, ce genre de changement n'aiderait pas beaucoup les personnes âgées de 50 ans ou de 55 ans et plus. Est-ce le genre de réforme que vous avez à l'esprit?
J'invite les représentantes des trois groupes à répondre à ces quelques questions.
Madame Townson.
:
Je peux effectivement répondre à cette question.
Autant que je sache, il existe actuellement deux propositions visant à élargir l'application du RPC, dont une vient de vous être exposée par la FTQ. Bernard Dussault, ex-actuaire en chef du RPC a été le fer de lance de cette initiative. Il qualifie ce type de régime de régime universel de pensions. Il s'agirait d'augmenter le taux de remplacement du RPC sur 40 ans et, comme vous l'avez mentionné à juste titre, un tel changement n'aiderait pas les personnes qui sont près de l'âge de la retraite à l'heure actuelle. Sa proposition s'appuie sur une des conditions inscrites dans la Loi sur le RPC, à savoir que tout changement apporté au Régime soit entièrement capitalisé. Ainsi l'augmentation progressive des taux de cotisation se ferait sur une très longue période, si bien que, par la suite, la prestation versée aux cotisants correspondrait à environ 70 p. 100 des gains de l'intéressé avant la retraite.
Pour ma part, je préfère l'option proposée par le CTC, qui consiste à doubler le taux de remplacement du RPC en le faisant passer de 25 p. 100 à 50 p. 100 des gains annuels moyens. Ce dernier propose que ce changement se fasse progressivement sur sept ans. En conséquence, les personnes qui sont actuellement à la retraite n'en profiteraient pas, bien entendu, mais le montant de la pension de retraite augmenterait beaucoup plus rapidement que si l'on optait pour une série d'augmentations sur une plus longue période.
Le CTC est d'avis que les gens seraient disposés à cotiser davantage. Les taux de cotisation devraient nécessairement augmenter, évidemment, mais l'augmentation se ferait progressivement. À mon avis, ce serait une augmentation obligatoire, par définition, étant donné que le RPC est un régime obligatoire. C'est donc cette option-là que je préfère.
:
Je suis d'accord sur ce qui est dit au sujet de plusieurs objectifs. On pense qu'il faut une intervention, il faut des obligations pour avoir des régimes de pension.
À la CSN, on a bien sûr exploré l'idée de le faire par le truchement du régime public, et ce qui nous a arrêtés, ce sont précisément des considérations d'équité intergénérationnelle. Les cotisations ont été augmentées très tardivement, de sorte qu'un jeune qui accède aujourd'hui au marché du travail paie beaucoup plus qu'il peut escompter recevoir en termes de bénéfices. Cela nous apparaît complètement inéquitable.
Par ailleurs, la situation des travailleurs, et des femmes en particulier, mérite d'être bonifiée. Voilà la raison pour laquelle on en appelle à une intervention de l'État pour forcer la mise en place de régimes complémentaires de retraite à prestations déterminées, sur une base sectorielle, auxquels tous les employeurs seraient forcés de souscrire. Bien sûr, pour les travailleurs et les travailleuses les moins nantis, on verrait des améliorations au régime public, par exemple l'augmentation du Supplément de revenu garanti —, des ajustements de cet ordre.
Cependant, doubler la protection apportée par le régime public, en pensant qu'on va améliorer le sort de toutes les femmes et de toute la population, nous apparaît malheureusement inéquitable sur une base intergénérationnelle.
:
Parfait. Merci, monsieur Desnoyers.
On peut revenir aux statistiques qui parlent d'elles-mêmes concernant les régimes publics et la dépendance des femmes aux régimes publics. La CSN en a parlé aussi. On a à peu près les mêmes chiffres. Quand on parle de la dépendance aux sources publiques, on voit qu'en 2006, les femmes en dépendaient dans une proportion de près de 55 p. 100. Les autres revenus étaient nettement inférieurs à ceux des hommes, alors que les hommes dépendaient des régimes publics dans une proportion de 38 p. 100. Selon nous, cela démontre ce qui est important pour les femmes en ce qui concerne le remplacement du revenu.
En ce qui concerne la RRQ, la FTQ s'oppose à toute coupe. Évidemment, on souhaiterait voir bonifié le régime de la RRQ. On parle aussi de ce qui se passe au chapitre du RPC, parce que cela viendra nous toucher indirectement. On sait que des mesures ont été adoptées avant-hier et qu'elles risquent d'avoir une influence certaine sur les décisions qui seront prises au Québec. On est très préoccupés par cela. De plus, le régime au Québec est en plus mauvaise posture que celui du Canada à cause de raisons démographiques, à cause de la santé de l'emploi, etc.
Ce qu'on souhaite, c'est de doubler la couverture de nos régimes, donc de passer de 25 p. 100 à 50 p. 100, un peu comme l'a proposé le Congrès du travail du Canada.
Effectivement, cela pose un problème en matière d'équité intergénérationnelle, comme le soulignait la représentante de la CSN, mais c'est quand même une mesure qui nous semble nécessaire à moyen terme. Il est évidemment important de l'envisager, mais pas en partant de rentes amputées. On sait qu'au Québec — c'est sûr que cela touche moins le fédéral —, on propose actuellement de resserrer les règles de calcul de la rente, donc de couper 15 p. 100, ce qui était déjà prévu dans ce calcul. Ce n'est pas une mesure prévue au fédéral, mais c'est prévu au Québec.
Effectivement, les femmes dépendent beaucoup plus des régimes publics; vous avez entendu les statistiques. Une des raisons qui expliquent ce phénomène est qu'elles n'ont pas accès à des régimes à prestations déterminées ou à de bons régimes dans leurs entreprises. Particulièrement à cause de la structure industrielle, les gros régimes sont présents surtout dans les grandes entreprises. Même s'il est vrai que les femmes ont accès aux programmes publics, des problèmes subsistent.
Le système canadien, ainsi qu'il existe, est constitué de trois piliers: le Supplément de revenu garanti pour les plus pauvres, le Régime de pensions du Canada qui est un régime de retraite plus universel, et les régimes complémentaires. Ce n'est pas un mauvais système. C'est un système qui a quand même bien fait les choses. Toutefois, on se rend compte que — et on le verra bientôt dans quelques années pour les hommes — le pilier des régimes privés est en péril parce qu'on n'a pas su l'adapter. Les femmes n'ont pas eu accès à ce type de régimes.
Présentement, on voit beaucoup de ces régimes qui ne sont plus adaptés et qui tombent. Bien qu'on puisse accéder au Régime de pensions du Canada et au régime de la RRQ, il faut de toutes façons revoir le troisième pilier, le moderniser et s'assurer qu'il tient la route. En effet, à moins d'envisager un régime comme celui de la France, un régime universel qui prévoit des couvertures universelles à gros montants, il faudra s'occuper du troisième pilier pour compléter la protection de la retraite. Cette fois-ci, il faut que les femmes aient accès à ce système.
:
J'ai mentionné le nombre de personnes qui ont des emplois dits atypiques — genre d'emplois que vous venez d'évoquer — travail contractuel, travail temporaire, etc. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, 40 p. 100 des femmes ont actuellement un emploi de ce genre, comparativement à seulement 30 p. 100 des hommes. La plupart de ces emplois sont fondamentalement instables. Les personnes qui ont ce type d'emplois n'ont ni avantages sociaux, ni pension de retraite. Et il est peu probable que leurs employeurs créent un régime de retraite, étant donné qu'ils n'ont pas d'employés à plein temps qui soient permanents et nommés à long terme. Cela veut donc dire que, dans ce contexte, les régimes de retraite publics sont d'autant plus importants.
Le RPC englobe les personnes qui ont ce genre d'emplois. Les travailleurs à temps partiel cotisent au RPC. Il en va de même pour les travailleurs autonomes. Malgré ce qu'ont pu vous affirmer certains témoins, ces employés sont couverts. Le problème est qu'ils sont obligés de payer des cotisations doubles, c'est-à-dire qu'ils paient à la fois la part de l'employeur et la part de l'employé. Cela leur coûte donc très cher.
Supposons que vous travailliez sur une base contractuelle; en principe, vous êtes néanmoins un travailleur autonome. Si vous voulez cotiser au RPC, vous devez verser 9,9 p 100 de vos gains au Régime, alors que si vous travailliez pour une grande entreprise, l'employeur paierait la moitié, et vous paieriez l'autre moitié. Donc, les jeunes travailleurs qui veulent cotiser, même au RPC, ont beaucoup de mal à le faire.
Il y a une chose qu'on pourrait faire pour rectifier ce problème, je crois que cela vaudrait la peine d'explorer ces possibilités. Un crédit d'impôt est accordé pour les cotisations au RPC. À la fin des années 1990, lorsqu'il était question d'apporter des changements à la formule de financement du Régime, il avait été proposé que le crédit d'impôt soit modifié — plus précisément, qu'il soit amélioré au profit des travailleurs à faible revenu, voire même adapté en fonction du revenu du cotisant, pour que, plus le revenu serait faible, meilleur serait le crédit d'impôt. Il serait donc possible de prendre des mesures de ce genre pour que les jeunes et les personnes ayant un emploi stable puissent plus facilement cotiser au Régime.
Une autre possibilité consisterait à réglementer les agences de placements temporaires pour que ces dernières aient le statut d'employeur. Cette question relève des lois sur les normes du travail, qui représentent à la fois une responsabilité provinciale et fédérale, du moins en ce qui concerne les entreprises sous réglementation fédérale. Si les agences de placements temporaires avaient le statut officiel d'employeur, elles seraient obligées de cotiser au Régime au nom des personnes qu'elles engagent.
Donc, ce sont autant de possibilités qu'il conviendrait d'explorer, afin que de jeunes travailleurs, comme ceux que vous décrivez, puissent plus facilement cotiser au Régime et toucher une pension de retraite du RPC au moment de prendre leur retraite.
:
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup d'être ici, cet après-midi. Je suis une femme de cœur, et j'écoute vos propos avec beaucoup d'attention. Certaines choses me dérangent un peu.
Madame Townson, un peu plus tôt, vous avez parlé des femmes qui peuvent rester à la maison avec leur enfant pendant sept ans et ne pas être pénalisées en ce qui a trait à leur plan de retraite. Vous avez dit que les personnes aidantes doivent se retirer parfois plus tôt pour s'occuper d'une personne, mais que, malheureusement, on ne considère pas le fait qu'elles doivent cesser de travailler pour prendre soin de quelqu'un. Elles sont donc pénalisées.
Croyez-vous qu'on devrait leur accorder la même durée de temps pour s'occuper d'une personne malade, soit sept ans, sans qu'elles soient pénalisées en ce qui a trait à leur fonds de pension?
Également, vous nous avez dit que 82 p. 100 des femmes de 24 à 35 ans travaillent à l'extérieur du foyer. Je réponds à la préoccupation de Mme Carbonneau qui parlait d'équité intergénérationnelle, et du fait d'avoir un plan de pension qui donnerait 50 p. 100 des revenus plutôt que 25 p. 100.
Puisque plus de personnes travaillent, croyez-vous que les iniquités intergénérationnelles pourraient s'aplanir rapidement? Cela me dérange un peu parce quand ma mère est allée travailler à l'extérieur, le Régime des rentes du Québec n'existait pas. Ma mère est maintenant âgée de 81 ans et elle est pauvre, mais elle a élevé six enfants. Je pense qu'elle mérite d'avoir un revenu décent.
Combien représente un revenu décent, selon vous?
:
Il m'est impossible de vous donner un chiffre précis, mais il me semble que ce revenu doit au moins atteindre le seuil de la pauvreté. À l'heure actuelle, votre mère — pour reprendre votre exemple — qui n'a pas travaillé à l'extérieur de la maison et n'a donc jamais gagné une pension de retraite du RPC, aurait tout de même droit, d'une part, à la sécurité de la vieillesse en son propre nom, sans tenir compte de sa participation ou non au marché du travail, et au SRG, d'autre part. Mais comme je l'expliquais dans mon exposé liminaire, la somme globale qu'elle pourrait toucher, au titre de la SV et du SRG, en tant que personne seule, est inférieure au seuil de la pauvreté. Il s'agit de 14 000 $ seulement. À mon avis, il y a lieu de faire quelque chose de ce côté-là.
Deuxièmement, pour répondre à vos propos au sujet des personnes qui s'occupent d'un parent — et cette situation est de plus en plus fréquente en raison du vieillissement de notre population — supposons qu'une femme âgée de 55 ans soit obligée de se retirer de la population active pour s'occuper de son mari âgé ou d'un parent ayant une incapacité. Lorsqu'elle présente sa demande de pension de retraite — elle ne peut pas la demander avant d'avoir 60 ans, de toute façon, mais supposons qu'elle fasse sa demande à 60 ans — les cinq années où elle n'avait pas de gains entre l'âge de 55 et de 60 ans doivent être incluses pour les fins du calcul de ses gains moyens, ce qui va nécessairement faire baisser sa moyenne, si bien qu'elle touchera une pension de retraite réduite.
À ce sujet, j'ai fait valoir dans mon rapport — et ce n'est peut-être pas tout à fait clair — que ce genre de personne devrait pouvoir profiter de la même disposition d'exclusion que les femmes qui ont des enfants âgés de moins de sept ans. En d'autres termes, elle aurait le droit d'exclure ces années du calcul de ses gains moyens, gains à partir desquels on détermine le montant de sa pension de retraite. Voilà le concept qui sous-tend la disposition d'exclusion. À mon avis, nous devons examiner cette possibilité. C'est une recommandation qui est sur le tapis depuis plusieurs années.
Quant aux personnes qui font partie de la population active — et, comme je vous l'ai fait remarquer tout à l'heure, 82 p. 100 des femmes en âge de procréation en font partie — il faut reconnaître que, en moyenne, elles ont un ou peut-être deux enfants, mais généralement pas davantage, en raison de l'évolution qui s'est opérée au cours des 30 ou 40 dernières années. Par ailleurs, elles prennent en règle générale un congé de maternité intégral, financé par les prestations de maternité, et elles retournent au travail en moins de deux ans. Donc, elles ne s'absentent pas de la population active pendant de longues années, de telle sorte qu'elles n'aient pas droit à une pension de retraite. Elles peuvent exclure les années pendant lesquelles elles avaient un enfant âgé de moins de 7 ans, même si elles ont réintégré le marché du travail et ont dû travailler à temps partiel. En leur permettant d'exclure ces années, leurs gains moyens ne sont pas réduits pour les fins du calcul de leur pension de retraite. C'est un avantage qui est accordé aux femmes qui s'absentent du marché du travail pour élever de jeunes enfants. Pour ma part, j'ai fait valoir que ce même avantage devrait être accordé aux femmes qui…
:
Je vous remercie, et je désire également remercier nos invitées.
Je voudrais commencer par rendre hommage à un certain nombre de personnes qui sont parmi nous aujourd'hui. Nous avons déjà fait remarquer la présence de certaines personnes tout à l'heure, mais nous avons également dans l'assistance des étudiants de l'Université McGill, qui sont des femmes. Si je ne m'abuse, il y en a 35.
D'abord, je suis ravie de les voir, et leur présence me rappelle un exemple. Aujourd'hui nous accueillons parmi nous 35 jeunes filles. Nous savons que la proportion de femmes par rapport à celle des hommes dans les établissements universitaires est en train de changer de façon radicale. Je suis vraiment convaincue que le monde va leur appartenir dans les prochaines années, au fur et à mesure que les enfants du baby-boom vont quitter leurs emplois. Nous sommes en récession à l'heure actuelle, mais en fin de compte, ces jeunes étudiantes auront certainement de nombreux débouchés.
Il n'en reste pas moins que nous sommes inquiets. Nous avons parlé des différentes tendances liées au travail des femmes, et peut-être devrions-nous nous intéresser aux femmes qui se trouvent dans une situation particulièrement difficile, comme la mère de Mme Demers; mais je voudrais savoir si beaucoup d'études ont été menées sur la situation future. Je sais que les femmes commencent à cotiser davantage à des REER, si bien que le problème qui se manifeste actuellement sera de nature très différente dans 20 ans — et peut-être n'y aura-t-il pas de problème du tout à ce moment-là.
Je voudrais savoir ce que vous en pensez.