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Merci. Merci beaucoup de m'avoir invité. C'est un plaisir d'être ici.
Dans le domaine que vous étudiez, le sujet que je connais est l'impact des dispositions du régime d'assurance-emploi relatives au congé de maternité et au congé parental. Je vais donc parler surtout de cela. J'ai fait mes recherches à la lumière de ce que je considère comme les objectifs le plus souvent cités de la politique sur le congé de maternité, qui comprennent ce qui suit.
Le congé donne à la mère la possibilité de se remettre physiquement après avoir donné naissance. Il facilite la création de liens entre mère et enfant. Il favorise les soins de l'enfant avant et après la naissance. Il favorise la situation de la femme à long terme en lui permettant de conserver son emploi lorsqu'elle donne naissance. Enfin, il favorise le développement de l'enfant.
Mes recherches ont pris deux formes. J'ai d'abord étudié l'historique du régime au cours des 30 dernières années. Mes autres travaux ont porté expressément sur l'effet des réformes qui ont été apportées au régime en 2000 pour étendre le congé parental. Je commence brièvement par l'aperçu historique. Les recherches se divisent en trois parties.
Il y a d'abord la période antérieure à 1990. Les prestations de congé de maternité du régime remontent à 1971. Les droits en matière de protection d'emploi étaient assurés par les normes provinciales du travail. Pendant cette période, beaucoup de normes provinciales ne concordaient pas ou différaient des dispositions de l'assurance-emploi, mais elles ont été progressivement relevées au niveau de l'assurance-emploi.
Les modifications de la législation provinciale, pendant cette période, n'ont eu aucune incidence sur le temps que les femmes passaient à la maison avec leur enfant après la naissance. Les dispositions étaient alors fort modestes: une quinzaine de semaines au plus. Les femmes trouvaient sans doute d'autres moyens de rester au foyer après la naissance.
Par contre, ces dispositions ont permis d'améliorer la probabilité que les femmes puissent retrouver leur emploi d'avant la naissance. Il y a donc eu une diminution de la proportion des femmes qui quittaient leur emploi avant la naissance.
Les deux réformes majeures du régime à cet égard, celles de 1990 et de 2000, ont porté sur le congé parental. Celle de 1990 a créé le congé parental et celle de 2000 l'a étendu. En principe, la mère ou le père peuvent profiter de ce congé, mais, au moins au départ, il était pris surtout par la mère. La situation évolue, mais lentement.
Ces deux réformes ont eu deux effets. D'abord, elles ont allongé la période que les femmes passent au foyer avec l'enfant après la naissance. Mais elles ont aussi accru la probabilité qu'elles restent chez le même employeur, ce qui est considéré comme important, car les ruptures dans l'emploi sont l'une des causes du retard des femmes par rapport aux hommes sur le plan des revenus tirés du marché du travail, au fur et à mesure qu'elles avancent en âge. Elles n'acquièrent pas les compétences propres à un emploi s'il y a de constantes ruptures. Les progrès et les reculs se succèdent. La continuité dans l'emploi est donc considérée comme un important facteur de progrès économique soutenu pour les femmes.
Le deuxième point sur lequel les recherches ont porté est la réforme de 2000 qui, pour généraliser, prolonge le congé de six mois à un an. Si on réfléchit à ce prolongement et aux raisons de l'accorder, je dirais que c'est moins dans l'intérêt de la santé et du progrès économique de la mère que pour favoriser le développement de l'enfant. Pour la plupart des femmes qui veulent reprendre le travail, un congé de six mois permet de se remettre après la naissance et donne la possibilité de retourner chez le même employeur. Le prolongement de six mois à un an donne à la femme plus de temps au foyer, peut-être avec l'enfant.
Les faits que nous avons observés en étudiant la réforme comprennent un certain nombre d'éléments. Je dis « nous » parce que j'ai fait la majeure partie des recherches avec Kevin Milligan, professeur d'économie à l'Université de la Colombie-Britannique.
D'abord, nous estimons que, pour toutes les mères, la réforme de 2000 a eu pour effet de prolonger d'environ deux mois la période passée au foyer avec l'enfant. Ils s'ajoutent aux huit mois en moyenne qu'elles passaient au foyer avant la réforme.
Il faut préciser que cette estimation englobe des mères qui ne se sont pas prévalues de ces dispositions. On estime qu'environ le quart des femmes n'ont pas d'emploi assuré avant d'accoucher. Elles n'ont donc pas droit aux prestations de l'assurance-emploi pour congé de maternité ou parental.
Si nous nous en tenons aux mères admissibles, nous estimons que l'augmentation a été de trois mois, par rapport à une moyenne de six mois avant la réforme. Il s'agit donc d'une augmentation de 50 p. 100 du temps passé au foyer avec l'enfant après la naissance.
Autrement, qu'auraient fait ces femmes, si elles n'avaient pas été au foyer? Elles auraient travaillé à temps plein pour la plupart, et, dans la majorité des cas, leurs enfants auraient été en service de garde non agréé offert chez une personne sans lien de parenté.
Ces deux faits sont importants, car d'autres recherches donnent à penser que c'est le travail à temps plein des mères dans la première année qui risque de nuire au développement de l'enfant et que la garde non agréée en milieu familial n'est pas vue, le plus souvent, comme le service de la meilleure qualité pour cet âge.
Qu'est-il advenu des enfants par suite de ces réformes? Il y a deux avenues. L'une est celle des effets de la modification des dispositions de l'assurance-emploi et des normes provinciales du travail qui renforcent la protection de l'emploi pour qu'elle corresponde à la durée des prestations de l'assurance-emploi, pour tenir compte de l'allaitement maternel.
Quels sont les effets? L'allaitement maternel est largement reconnu comme très favorable aux enfants. Les recherches les plus récentes, comme celles de l'équipe de Michael Kramer à McGill, donnent à penser qu'il peut même avoir une influence positive sur le QI. Nous constatons que, par suite des modifications apportées à l'assurance-emploi et aux normes provinciales du travail en 2000, la durée de l'allaitement pendant la première année de vie a augmenté d'un mois. Pour ce qui est de l'allaitement maternel sans aucun autre aliment, l'augmentation a été d'un demi-mois.
Qu'est-ce que cela veut dire? Je peux vous donner des statistiques plus impressionnantes, mais des nuances s'imposent. La proportion des femmes dont l'enfant est nourri uniquement au sein pendant six mois, ce qui correspond à une recommandation de l'Organisation mondiale de la santé et de diverses associations médicales nationales du monde industrialisé, a augmenté de 39 p. 100. Cela semble considérable, mais il ne faut pas oublier que le nombre de femmes qui atteignent ces six mois est très faible. Il s'agit donc d'une hausse importante à partir d'un nombre peu élevé.
Nous avons aussi remarqué que l'effet sur le nombre de femmes qui allaitent a été nul ou que la proportion des femmes qui commencent à allaiter n'a pas changé.
Il y a eu des réductions correspondantes de l'ordre de 50 p. 100 de la proportion de femmes qui ont ajouté d'autres aliments parce qu'elles devaient retourner au travail ou qui, pour cette même raison, ont arrêté d'allaiter leur enfant. Voilà qui me semble important, car les diverses stratégies des gouvernements visant à promouvoir l'allaitement maternel mettent le plus souvent l'accent sur l'éducation — soit faire connaître aux mères les bienfaits de l'allaitement maternel, soit les aider à le pratiquer dans les premières semaines de vie de leur enfant.
Il est clair que c'est important, mais si on veut atteindre des objectifs comme l'allaitement pendant six mois sans aucun autre aliment ou deux ans d'allaitement avec apport d'autres aliments, il est évident que l'éducation ne va pas suffire, puisque la plupart des mères disent qu'elles arrêtent d'allaiter parce qu'elles doivent reprendre le travail. Il faut chercher une autre série de politiques.
Des faits montrent que le congé de maternité et le congé parental, tant comme protection de l'emploi que comme mode de remplacement du revenu, ce qui est la fonction première de l'assurance-emploi, favorise la pratique de l'allaitement chez les mères au Canada.
Pour ce qui est du développement ou de la santé de l'enfant, nous ne trouvons pas grand-chose. Nous nous appuyons ici sur les données de l'Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes. Nous n'observons pas d'effets très marqués sur la santé des enfants ni des mères. Cela vaut pour l'information sur la dépression chez les mères ou les problèmes post-partum, l'état de santé général des enfants ou l'incidence d'affections particulières comme l'asthme, la bronchite — avant tout les maladies de l'appareil respiratoire.
Nous ne trouvons pas non plus d'effets sur le développement des enfants. Il s'agit ici du développement précoce: mesures du tempérament, du développement socio-moteur ou de l'atteinte de certaines étapes jusqu'à 24 mois.
Il s'agit de mesures très hâtives du développement. Comme la réforme était très récente et qu'il faut du temps pour produire les données, nous pouvons pour l'instant observer seulement les enfants qui ont pu être influencés par les congés de maternité et parental plus longs jusqu'à 24 mois. De nouvelles données viennent de sortir. J'en parle parce que j'y travaillais mardi dernier. Nous pourrons maintenant observer les enfants influencés par le nouveau régime jusqu'à quatre et cinq ans. Nous commencerons maintenant à recevoir des données sur des indicateurs du développement cognitif, comme la capacité de reconnaître des chiffres et la lecture. Cela pourrait être important, car, comme je l'ai dit, d'autres faits donnent à penser que l'allaitement maternel peut avoir une influence importante sur le QI.
Globalement, je le répète, mes connaissances particulières dans ce domaine portent sur l'effet des congés de maternité et parental du régime d'assurance-emploi.
Je remercie les membres du comité de m'avoir invité à comparaître ce matin pour parler d'une des questions de politique les plus importantes aujourd'hui pour le Canada et plus particulièrement pour les femmes.
Je suis économiste de formation, mais, depuis 35 ans, je suis professeur à la faculté de travail social de l'Université de Toronto. J'ai quitté l'économie proprement dite parce que j'étais profondément exaspéré par son incapacité d'aller au-delà des chiffres. Enseigner à la faculté du travail social me donne l'occasion d'interagir avec ce qui se passe sur le terrain, avec ce qui se passe dans le monde.
J'ai régulièrement des contacts avec des étudiants qui font des stages dans des organismes sociaux et de nouveaux diplômés qui travaillent dans ces organismes. Je peux donc voir et entendre presque sans intermédiaire les conséquences des coupes dans l'État-providence en général et plus spécialement de l'importante exclusion des femmes dans le régime de l'assurance-emploi.
Je fais aussi depuis sept ans des recherches financées par le CRSH sur les effets du travail précaire, plus précisément en Ontario. J'entends par travail précaire les emplois peu sûrs, instables, de durée limitée, à temps partiel, à contrat seulement, sans avantages sociaux.
Dans cet ordre d'idées, je commence par deux faits qui se sont produits hier. Hier soir, je suis descendu à l'hôtel Lord Elgin. À mon arrivée, un groupe de syndiqués manifestait à l'extérieur de l'hôtel. J'ai dû franchir le piquet de grève pour entrer, ce qui m'a beaucoup déplu. Il s'agissait surtout de femmes, des employées du Holiday Inn de Longueuil qui, semble-t-il, appartient au même propriétaire que le Lord Elgin. Ces syndiqués sont en lock-out depuis huit mois. Ils ont donc dû passer l'hiver dans cette situation.
Je leur ai parlé un peu avant de franchir le piquet, ce qui m'a semblé la meilleure chose à faire dans les circonstances. Ces employés, surtout des femmes, demandent une hausse salariale de 3 p. 100 pendant quatre ans, ce qui ne m'apparaît pas déraisonnable. On leur offre 2 p. 100 pendant six ans, ce qui les confinera un peu plus dans la pauvreté.
Deuxième fait: je suis entré dans ma chambre, j'ai allumé le téléviseur et j'ai appris que le premier ministre McGuinty venait d'annoncer des dépenses de 9 milliards de dollars en infrastructure, essentiellement dans le domaine de la construction. Cela aidera la TTC à construire des tramways, par exemple. Ce sont des hommes qui vont profiter de ces dépenses. Dans le secteur de la construction, je crois que les femmes représentent environ 7 p. 100 de la main-d'oeuvre.
Il importe de comprendre que les effets des coupes dans l'assurance-emploi ne touchent pas les deux sexes de façon égale. Les femmes sont plus durement frappées que les hommes. L'assurance-emploi a toujours été un intermédiaire... C'est une sorte de trampoline: si des travailleurs perdent leur emploi, ils y rebondissent et, avec de la chance, ils peuvent utiliser la période d'assurance-emploi pour retourner sur le marché du travail. Mais si le régime n'est pas là, ils se retrouvent directement à l'aide sociale. J'étudie l'aide sociale depuis sept ans. Ce n'est pas une question largement étudiée, mais les assistés sociaux sont soumis à une foule de règles, de contraintes et d'ingérences que les prestataires de l'assurance-emploi n'ont pas à subir.
Il n'y a pas très longtemps, les assistées sociales devaient se plier à la « règle du conjoint ». Après son élection, en 1995, un ancien premier ministre ontarien que nous ne nommerons pas a dit qu'une relation d'un soir suffisait pour constituer une relation de soutien suivie. Voilà à quoi ressemble la vie de l'assisté social.
En Ontario, aujourd'hui, l'assisté social ne peut posséder des biens de plus de 500 $. Ceux qui perdent leur emploi et n'ont pas droit à l'assurance-emploi, ce qui est le cas de beaucoup de femmes, se retrouvent directement à l'aide sociale. Et avant de demander l'aide sociale, ils doivent se départir de tous leurs biens, sauf 500 $. Dans bien des cas, ils ne peuvent même pas garder une voiture, dont ils ont pourtant besoin pour chercher un emploi. Hélas, l'aide sociale est toujours prisonnière du rigorisme victorien qui consiste à blâmer la victime. Au lieu de lui tendre une main secourable, on la roue de coups de pied.
Sans la protection de l'assurance-emploi, les travailleurs se retrouvent à l'aide sociale. Et il est difficile d'y échapper ensuite. Et de plus en plus difficile lorsque l'économie se dégrade.
J'ai des données sur les cas d'aide sociale à Toronto. En décembre 2008, 71 p. 100 des demandeurs du programme Ontario au travail n'en étaient pas à une première demande. Pourquoi? Qu'est-ce que cela veut dire? Que 71 p. 100 de ceux qui se retrouvent à l'aide sociale n'arrivent pas à s'en affranchir. Ils sont prisonniers, piégés. Ils ont un emploi précaire. Par exemple, ils sont engagés chez Sears en novembre, mis à pied en janvier. Ils n'ont que du travail à temps partiel.
J'ai réussi à tirer des données de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu de 2006. Vous les connaissez sûrement, et on vous les aura présentées. Le tiers des femmes travaillent moins de 250 heures. Chez les hommes, la proportion est de 21 p. 100. Les femmes n'ont donc pas droit à l'assurance-emploi. Parmi ceux qui ont un emploi permanent, ce sont les hommes qui ont un emploi à temps plein et les femmes un emploi à temps partiel. J'ai les chiffres, mais ils ne vous diront pas grand-chose si je me contente de les lire. Un emploi à temps partiel ne permet pas d'obtenir l'assurance-emploi.
Si on pense à l'avenir et aux recommandations, car je veux les aborder, l'idée d'élargir l'admissibilité pour ceux qui touchent des prestations ne va pas aider les femmes, puisque, au départ, elles n'y ont pas droit. C'est une politique favorable aux hommes de la part d'un gouvernement qui semble singulièrement insensible aux besoins des femmes.
La hausse du taux de remplacement du revenu n'est pas une solution non plus, car elle sera utile uniquement à ceux qui peuvent profiter du régime. La mesure utile aux femmes serait de réduire le nombre d'heures de travail nécessaire pour devenir admissible. C'est la solution, le seul moyen de faire en sorte que le régime commence à répondre aux besoins des femmes.
L'autre problème, c'est que, souvent, les femmes ne peuvent faire le travail qui est attendu d'elles ou qu'elles voudraient faire à cause de problèmes de garde. Cent dollars par mois, ce n'est pas assez pour payer une place en garderie. Au Québec, la solution est différente. Les Québécois ont beaucoup de chance, et je les envie. Je voudrais un programme semblable dans le reste du Canada. Dans le reste du Canada, parce que les femmes n'ont pas de services de garde, parce que le gouvernement a éliminé le programme de garderies qui existait pour le remplacer par rien du tout, les femmes sont de plus en plus dans l'impossibilité de travailler, et elles ne peuvent faire assez d'heures pour avoir droit à l'assurance-emploi.
Je dois avoir utilisé mes dix minutes. Je vais m'en tenir là. Merci beaucoup.
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Merci beaucoup de m'avoir invitée. Je suis très heureuse de pouvoir comparaître.
Je suis également économiste et j'ai beaucoup écrit sur les effets différents de la politique de sécurité du revenu sur les hommes et les femmes, dont les modalités de participation au marché du travail et les responsabilités en matière de soins diffèrent. Il faut prendre grand soin d'éviter dans les paramètres du programme de privilégier implicitement un sexe ou l'autre.
J'ai commencé à étudier le régime d'assurance-emploi dès son implantation et j'ai écrit très tôt un article sur les effets prévus de la réforme, et notamment sur la différence des effets pour les deux sexes. En général, les paramètres du nouveau régime reflétaient une norme masculine de travail à temps plein continu, ce qui rendait la situation plus difficile pour les femmes et ceux dont les modalités de travail étaient différentes.
Comme d'autres témoins que vous aurez entendus, j'estimais que les conditions d'admissibilité et la durée des prestations étaient calculées de façon telle que l'utilisation des heures nuirait à quiconque travaillait moins de 35 heures par semaine. Or, nous l'avons entendu, les femmes sont surreprésentées parmi ceux qui font moins de 35 heures par semaine.
En outre, les nouvelles règles adoptées pour ceux qui reviennent sur le marché du travail et la forte hausse du nombre d'heures nécessaires pour eux rendaient la situation particulièrement difficile pour les femmes, dont la participation au marché du travail peut-être plus souvent interrompue à cause de leurs responsabilités en matière de soins.
Troisièmement, le mode de calcul des prestations et surtout l'utilisation d'un dénominateur minimum, dont nous pourrons parler plus en détail tout à l'heure, pénalisait quiconque avait une rémunération irrégulière ou variable. Là encore, un problème pour les femmes et d'autres travailleurs qui ont un emploi précaire, comme Ernie l'a dit.
L'application des nouveaux paramètres de l'assurance-emploi aux congés de maternité et parental faisait aussi problème.
Enfin, l'accès à la formation était davantage lié à l'admissibilité à l'assurance-emploi, de sorte que les femmes et les autres travailleurs ayant un emploi précaire avaient plus de mal à se prévaloir de programmes susceptibles de les aider à trouver un meilleur travail.
Depuis cet article, j'ai fait trois rapports d'évaluation pour RHDCC sur l'assurance-emploi dont chacun soulignait les effets sur les femmes. J'omets le premier, à moins que vous ne vouliez en parler plus tard. Il traitait du supplément familial qui s'ajoute aux prestations des familles à faible revenu ayant des enfants à charge.
La deuxième étude à laquelle j'ai travaillé portait sur les effets de l'assurance-emploi sur la conciliation entre travail et vie personnelle. Lorsque l'étude a été commandée, on prévoyait qu'elle porterait sur les prestations de maternité et parentales, qui ont un lien direct avec la conciliation entre travail et vie personnelle, mais nous avons préféré nous concentrer sur les prestations régulières. Le grand problème de ces prestations, c'est la structure d'incitations au travail intégrée au régime. Nous avons signalé dans l'étude que les règles du régime récompensaient les modes de participation au marché du travail qu'on peut associer à un stress accru et à des difficultés de conciliation entre travail et vie personnelle, comme de longues heures et le cumul d'emplois. Selon les règles, plus on travaille, mieux c'est, et il faut choisir des emplois qui permettent d'obtenir le nombre d'heures nécessaire, etc. Que ce soit l'homme ou la femme qui fait de longues heures, il y a des problèmes pour la famille.
Les modalités de travail propices à la conciliation entre travail et vie personnelle, comme le travail à temps partiel, ne sont pas bien protégées par l'assurance-emploi, et il n'y a aucun soutien pour les difficultés de conciliation après la première année de l'enfant. Nous avons constaté que ces difficultés sont considérables lorsque les enfants sont un peu plus âgés. Elles ne sont pas limitées à la première année.
La troisième étude à laquelle j'ai travaillé pour RHDCC avait pour sujet l'assurance-emploi et les travailleurs saisonniers. J'ai fait beaucoup de recherches sur les travailleurs des localités rurales qui dépendent des ressources, surtout dans le Canada atlantique. Dans le groupe des travailleurs ayant un emploi précaire dont Ernie a parlé, je me suis intéressée surtout aux travailleurs saisonniers. Beaucoup d'entre eux ont profité du critère d'admissibilité selon les heures, car ils font souvent de longues heures pendant de brèves périodes, mais les femmes s'en tirent moins bien. Dans les secteurs saisonniers, il arrive plus souvent que les femmes fassent moins d'heures et aient une rémunération fluctuante, ce qui compromet leur admissibilité et leur taux de prestation, si on compare leur situation à celle des hommes.
Le calcul des prestations d'après le dénominateur minimum entraîne des difficultés particulières dans les industries saisonnières. La situation est difficile pour les employeurs, qui ne peuvent combler des postes à moins de pouvoir offrir 14 semaines de travail constant, et les prestations s'en trouvent diminuées.
On s'est attaqué à certains de ces problèmes, notamment au moyen du projet pilote dans lequel les prestations sont calculées d'après les 14 meilleures semaines de rémunération, mais seulement certaines régions à taux élevé de chômage sont visées.
À cause des règles visant les travailleurs qui reviennent sur le marché du travail, il est presque impossible pour un travailleur saisonnier de recouvrer le droit aux prestations s'il a une mauvaise année ou rate une année, que ce soit à cause de responsabilités de garde ou de difficultés de l'industrie. Il est donc très encouragé à maintenir l'alternance entre assurance-emploi et travail.
Dans ma dernière étude, récente, j'ai examiné les modifications apportées à l'assurance-emploi depuis 1996: dans quelle mesure étaient-elles utiles aux femmes, et avait-on donné suite aux préoccupations de sexospécificité cernées depuis le début? Dans ces recherches, j'ai étudié aussi bien les prestations régulières que les prestations spéciales pour ceux qui dispensent des soins: prestations de maternité et parentales et prestations de compassion.
En général, l'assurance-emploi renforce la responsabilité des femmes à l'égard des soins à dispenser. Leurs droits sont toujours fondés surtout sur ce rôle. Dans l'ensemble du régime, les femmes reçoivent toujours autant ou même plus que les hommes, mais c'est presque entièrement à cause des prestations spéciales, alors que leur part des prestations régulières et le pourcentage des chômeuses qui les touchent ont diminué.
Les modifications apportées pendant ces dix ans n'ont pas répondu aux plaintes formulées au cours de la période au sujet de l'incidence différente sur les deux sexes.
L'étude a permis de constater aussi que les paramètres du régime pour ce qui est des prestations de soins renforcent la tendance à ce que les femmes plutôt que les hommes prennent les congés. Les paramètres des prestations de maternité et parentales existantes n'assurent donc pas un bon partage de cette charge de travail. Quant aux prestations régulières, le régime ne favorise pas une participation égale des femmes au marché du travail.
Comme je crois avoir encore quelques minutes, je vais...
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Voilà qui vous donne une idée des domaines que j'ai étudiés.
J'ai songé à des recommandations, et nous pourrons peut-être discuter de certaines d'entre elles. En voici quelques-unes qui sont fondées sur mes recherches.
Pour toutes les prestations, régulières et spéciales, je recommande de laisser tomber le dénominateur minimum dans le calcul de la rémunération moyenne, et donc des prestations. Il s'agit d'une pénalité supplémentaire qui encourage encore les longues heures de travail. C'est particulièrement difficile pour ceux qui ont un emploi précaire, et ce qu'ils reçoivent... Mes étudiants me disent sans cesse que les travailleurs obtiennent 55 p. 100 de leur salaire. Ce n'est pas le cas, en fin de compte, et c'est en partie à cause du dénominateur minimum.
Quant au montant des prestations, je suis d'accord pour qu'on utilise les meilleures semaines de rémunération dans le calcul, ce que prévoit le projet pilote existant, avec ses 14 meilleures semaines. Il faudrait étendre cette formule. Au fond, la formule de calcul de la rémunération moyenne ne devrait pas être influencée par la répartition du temps de travail. Elle ne devrait pas récompenser un certain mode de travail ni en pénaliser un autre.
Pour ce qui est des prestations régulières, il est évident que l'essentiel est de rajuster les formules d'admissibilité, comme Ernie l'a dit. Les résultats que donne la formule des heures pour les travailleurs à temps partiel font problème. La formule fait également problème pour la durée des prestations. Les travailleurs à temps partiel ont du mal à devenir admissibles et ils sont aussi pénalisés pour ce qui est de la durée des prestations. Comme leurs prestations sont proportionnelles à leurs gains, la différence est déjà là. La double pénalité sur le plan de la durée des prestations instaurée par l'assurance-emploi est donc un problème.
Le nombre d'heures exigé de ceux qui reviennent sur le marché du travail est un gros problème pour quiconque a dû arrêter de travailler pour dispenser des soins ou pour les travailleurs saisonniers, à moins de revenir d'un congé parental, auquel cas il y a une exemption. Mais il existe d'autres raisons de quitter le marché du travail pendant un temps, après la première année de l'enfant. Il faudrait donc réduire...
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Merci de me donner l'occasion d'exposer mon opinion sur le régime d'assurance-emploi.
Je vais aborder deux questions. D'abord et très brièvement, étant donné l'accès aux prestations, quels sont les effets sur les femmes des diverses dispositions de l'assurance-emploi pour ce qui est du comportement sur le marché du travail? Deuxièmement, devrions-nous nous préoccuper de l'équité d'accès aux prestations pour les hommes et les femmes?
Il faut considérer ces questions à la lumière des objectifs du régime d'assurance-emploi. La loi ne semble pas décrire ces objectifs clairement, mais je dirais qu'il y en a trois. D'abord, protéger les travailleurs si, de façon imprévue, ils perdent leurs revenus à cause du chômage. Les prestations régulières assurent ce type de soutien du revenu. Deuxièmement, aider les chômeurs à être des membres productifs de la population active. C'est pourquoi des dispositions donnent un soutien à certains d'entre eux pour la formation et l'éducation. Troisièmement, favoriser la continuité de l'emploi et de la participation à la population active. C'est pourquoi il y a des congés de maternité et parental, des prestations pour les emplois saisonniers et les mises à pied temporaires. Ces dispositions peuvent faciliter la continuité de l'emploi chez un même employeur.
Le plus souvent, les économistes se demandent dans quelle mesure la politique fausse les décisions du particulier. La littérature fournit plusieurs exemples d'influence de certaines dispositions du régime sur les décisions relatives au marché du travail et l'issue pour chacun des particuliers. Ainsi, une étude de David Green et de Craig Riddell, à l'Université de la Colombie-Britannique, a montré qu'un allongement de la période de référence incite les travailleurs à garder leur emploi plus longtemps. Les travaux de David Gray, à l'Université d'Ottawa, indiquent que les prestataires habituels sont sensibles aux modifications de la formule de calcul des prestations. Un élargissement du programme à des modalités d'emploi non courantes risque donc d'avoir des répercussions non souhaitées.
À ma connaissance, il n'y a pas beaucoup de preuves d'une différence entre les sexes en ce qui concerne la modification des modalités de travail visant à favoriser l'admissibilité aux prestations régulières. Évidemment, il y a des différences entre les sexes pour ce qui est du congé de maternité. Michael Baker en a déjà parlé abondamment. Ses recherches, avec Kevin Milligan, ont montré que la bonification des congés de maternité et parental, à la fin des années 1990, avait entraîné une augmentation appréciable de la période que les mères passent au foyer. Plus important encore, le congé de maternité, peu importe sa durée, améliore la continuité du travail chez le même employeur.
Toute politique qui renforce la participation des femmes à la population active et la continuité de leur travail chez le même employeur a des répercussions à long terme. Dans mes recherches récentes, j'ai montré que les groupes arrivés le plus récemment à la retraite ont davantage accès que les groupes antérieurs aux prestations d'un régime de l'employeur et du Régime de pensions du Canada. C'est le résultat d'une plus grande participation à la population active, elle-même attribuable en partie à la légalisation de la pilule contraceptive. La politique sur les congés de maternité et parental devrait améliorer encore l'accès aux prestations des régimes privés et publics chez les femmes.
Voyons la deuxième question: les hommes et les femmes ont-ils un accès équitable aux prestations de l'assurance-emploi? Pour étudier l'accès aux prestations régulières, j'ai prélevé un échantillon de l'Enquête sur la couverture de l'assurance-emploi et mesuré le nombre de personnes qui avaient reçu des prestations depuis leur dernier emploi, comme proportion des personnes de 25 à 44 ans qui sont involontairement au chômage. Il faut signaler que j'ai exclu de l'échantillon les mères de bébés et les travailleurs autonomes.
Il existe un écart indéniable entre les sexes quant à la probabilité de toucher des prestations en cas de chômage. Dans mon échantillon, 68 p. 100 des chômeuses et 75 p. 100 des chômeurs en avaient touché depuis leur dernier emploi.
J'ai fait une décomposition simple de l'écart et constaté sans surprise que près de 40 p. 100 de l'écart était attribuable aux modalités de travail différentes des deux sexes. Environ 80 p. 100 des travailleuses ont un emploi à temps plein. Près de 10 p. 100 des chômeuses et seulement 2 p. 100 des chômeurs, dans l'échantillon, avaient un emploi permanent à temps partiel. Si on fait abstraction des emplois saisonniers, 32 p. 100 des femmes occupent des emplois non permanents, contre 23 p. 100 chez les hommes.
On s'attend bien sûr à ce que tout travailleur qui occupe un poste permanent à temps plein ait plus de chances d'avoir droit à des prestations que celui qui a un emploi occasionnel à temps partiel. L'offre d'un soutien du revenu pour les pertes de rémunération dues à des périodes de chômage imprévues cadre évidemment avec les objectifs du régime. La décomposition a aussi montré que plus du cinquième de l'écart entre les sexes s'explique par les différences de cheminement de carrière, caractérisées par le secteur d'activité et la profession exercée à l'emploi antérieur. Alors que les hommes ont tendance à travailler dans la construction et la fabrication, notamment dans le transport et l'utilisation d'équipement, les femmes travaillent plutôt dans le commerce de détail, l'hébergement et la restauration, dans la vente et les services.
L'écart qui en découle pour l'accès à l'assurance-emploi peut tenir aux différences intersectorielles pour ce qui est du nombre d'heures moyen dans les catégories à temps plein ou à temps partiel. Je soupçonne qu'il y a également des secteurs et des métiers où les heures des travailleurs occasionnels sont moins susceptibles d'être assurées.
Faudrait-il donc modifier l'assurance-emploi pour combler cette différence dans l'accès aux prestations?
Globalement, si on compare l'accès aux prestations chez les hommes et les femmes dont la situation est comparable, c'est-à-dire avec les mêmes modalités de travail, le même cheminement de carrière, etc., on constatera que l'accès est égal. Les différences d'accès s'expliquent facilement par les choix que les hommes et les femmes font sur le marché du travail.
Supposons que la femme moyenne est rationnelle et a une compréhension élémentaire des probabilités. Nous pouvons dire que, si une femme choisit un emploi à temps partiel ou occasionnel au lieu d'un emploi permanent à temps plein, elle sait qu'elle aura moins de chance de toucher des prestations d'emploi. Il est peu probable qu'elle ait un régime de retraite ou des prestations de maladie. Elle cotisera moins au Régime de pensions du Canada et il est moins probable qu'elle aura droit aux prestations d'assurance-emploi si elle perd son travail. Ce sont des coûts liés à son choix.
Les avantages de ces modalités de travail sont une plus grande latitude dans l'utilisation de son temps, ce qui permet souvent d'avoir des activités productives à la maison comme un service de garde et d'autres responsabilités familiales. Le choix est optimal en ce sens qu'il est le meilleur pour la personne en question.
Il faut signaler que seule une faible proportion des femmes qui occupent un emploi à temps partiel le font involontairement. Dans mon échantillon tiré de l'Enquête sur la couverture de l'assurance-emploi, seulement 9 p. 100 de ces femmes occupaient un emploi à temps partiel contre leur gré.
Dire qu'il faut modifier le régime d'assurance-emploi pour que les femmes qui ont un travail occasionnel ou à temps partiel aient plus de chance d'être admissibles, c'est laisser entendre l'une de deux choses. D'abord, peut-être ne croyons-nous pas que les femmes puissent agir rationnellement ou comprendre les conséquences de leurs choix. Je ne crois pas que nous ayons quelque raison de le croire et, quant à moi, cette idée m'indigne. Deuxièmement, cela veut peut-être dire que les Canadiens veulent encourager les activités productives au foyer en subventionnant le choix d'un travail occasionnel ou à temps partiel. Ce n'est certainement pas un objectif du régime d'assurance-emploi, et il vaut mieux laisser ce genre d'objectif à d'autres leviers de la politique.
Une politique qui conviendrait mieux consiste à faire en sorte que les femmes aient un accès égal aux emplois permanents à temps plein dans des secteurs où on peut obtenir l'accès aux prestations d'assurance-emploi. Cela a été généralement l'objectif des programmes de promotion sociale et même des lois sur l'équité salariale. Cela n'exige pas de modifications du régime d'assurance-emploi.
Au fil des ans, nous avons vu s'affirmer la tendance, chez les femmes, à prendre un emploi à temps plein, et la ségrégation sexuelle dans les professions s'est atténuée. Si ces tendances se maintiennent, l'écart entre les sexes devrait s'atténuer avec le temps. Mais tant que les femmes seront les principales responsables du travail productif au foyer, il subsistera un écart, puisque des femmes opteront pour un emploi à temps partiel. Il serait aussi possible de réduire l'écart en mettant en place des programmes nationaux de garderie.
Il importe de signaler que, si on modifie le régime pour l'adapter à des modalités de travail qui sortent de la norme, il y aura des effets importants sur les choix des hommes et des femmes. Toute modification en ce sens incitera les travailleurs des deux sexes à prendre des emplois moins sûrs et à dépendre du régime à long terme. Le régime en deviendra beaucoup plus coûteux et son rôle d'assurance sera remis en question. Chose certaine, ses objectifs de promotion de la participation à la population active et de continuité de l'emploi ne seront pas respectés. De plus, comme toutes les modifications doivent s'appliquer également aux hommes et aux femmes, l'écart entre les sexes risque de subsister.
Globalement, je m'oppose vigoureusement à toute modification du régime d'assurance-emploi pour l'adapter aux modalités de travail différentes de la norme. Il n'est pas clair que ces modifications appuieront les objectifs du régime et d'autres politiques semblent préférables pour défendre les intérêts des femmes.
Dernier point. Bien des gens, hommes et femmes, n'auront jamais droit aux prestations d'assurance-emploi et qui auront pourtant cotisé. Il semble déraisonnable de faire payer des cotisations à des gens qui ne profiteront jamais du régime.
Ainsi, pour avoir droit aux prestations régulières dans une région à fort taux de chômage, le travailleur type doit avoir accumulé 420 heures assurables dans les 52 semaines précédentes. Il doit avoir travaillé en moyenne plus de huit heures par semaine à tous les emplois confondus. Un congé de cotisation d'un an fondé sur les gains annuels de la personne chez tous les employeurs, et non chez un seul, semble une solution raisonnable à envisager. Autrement, le versement de cotisations à ces personnes exigerait que l'admissibilité dépende des semaines travaillées plutôt que des heures, et on ne voit pas très bien comment il faudrait définir le nombre de semaines.
C'est tout ce que j'ai à dire pour l'instant.
Merci.
Madame la vice-présidente et membres du comité, merci de m'avoir invitée à prendre la parole aujourd'hui et de me donner l'occasion de présenter certains des enseignements tirés des recherches de la SRSA, la Société de recherche sociale appliquée, sur les réalités complexes des modalités de travail et de la dépendance à l'égard des prestations d'assurance-emploi.
Je suis également économiste et, depuis huit ans, je participe à un certain nombre de projets de recherche de la SRSA visant à vérifier si le régime d'assurance-emploi répond bien aux besoins. Ils ont donné lieu à un certain nombre de propositions d'amélioration du régime.
J'espère que mon exposé aidera à mieux comprendre dans quelle mesure le régime reflète les réalités actuelles du marché du travail et assure un soutien suffisant au nombre croissant de Canadiennes qui sont sur le marché du travail et doivent souvent concilier travail et responsabilités familiales.
L'examen d'un régime comme l'assurance-emploi est l'une des tâches les plus difficiles du gouvernement en matière de sécurité du revenu, car des facteurs divers et souvent concurrents interviennent. Il importe maintenant de réexaminer le rôle du régime à l'égard de la sécurité économique de tous les Canadiens, et notamment des femmes.
L'objet des audiences du comité est l'étude des répercussions du régime de l'assurance-emploi. Chose curieuse, la version anglaise de l'énoncé emploie le pluriel alors que, d'habitude, on utilise le singulier. Je reconnais qu'il existe effectivement plus d'un programme d'assurance-emploi en ce sens que des prestations sont versées à différentes personnes dans des circonstances diverses et de bien des façons.
Le régime verse chaque année plus de 10 milliards de dollars en prestations de revenu, assurant une aide financière tous les mois à des milliers de travailleurs au chômage. Grâce à ses prestations de maladie, à ses congés de maternité et parental et à ses prestations de compassion, il aide également des travailleurs dont le travail est interrompu pour des raisons d'ordre personnel, ce qui associe davantage le régime aux décisions personnelles de tous les Canadiens.
La réforme de 1996 a instauré une formule fondée sur les heures de travail. Mais le régime ne traite pas de la même façon toutes les heures de travail. Ses règles, fort complexes, font apparaître des disparités majeures, que d'aucuns qualifieront d'injustices, dans la mesure où les cotisants ne peuvent pas tous profiter du régime. Ceux dont les modalités ou programmes de travail cadrent le mieux avec les règles d'admissibilité et de calcul des prestations en profitent davantage.
Ces dernières années, il y a eu un débat considérable: à qui le régime d'assurance-emploi est-il destiné? dans quelle mesure protège-t-il la clientèle visée? Comme tous les travailleurs rémunérés et leurs employeurs sont tenus de cotiser au régime, mais que les prestations sont réservées à ceux qui satisfont aux critères d'admissibilité, un résultat d'un intérêt particulier est l'accès aux prestations pour les chômeurs.
Il y a différentes façons d'aborder la question. Tammy, vous en avez exposé une. Nous considérons souvent le rapport entre prestations et chômage. La proportion des chômeurs admissibles aux prestations aux termes des règles du régime est à la baisse depuis le début des années 1990 et se situe maintenant à environ 45 p. 100 selon l'Enquête de Statistique Canada sur la couverture de l'assurance-emploi. La proportion est encore plus faible dans des régions au taux de chômage faible, où le nombre minimum d'heures à accumuler pour avoir droit aux prestations est plus élevé.
La non-admissibilité tient à différentes raisons. Certains n'ont pas accumulé assez d'heures, même s'ils sont couverts par le régime et versent des cotisations. D'autres ne sont pas assurés parce qu'ils n'ont jamais travaillé, sont au chômage depuis plus d'un an ou sont des travailleurs autonomes qui ne cotisent donc pas. D'autres ont quitté leur emploi pour des motifs jugés non valables aux termes des règles du régime, notamment pour retourner aux études.
Qui sont les travailleurs qui ont cotisé, mais n'ont pas accumulé assez d'heures pour toucher des prestations? Comme vous le savez, les femmes sont surreprésentées parmi les travailleurs rémunérés qui n'ont pas droit à l'assurance-emploi. En 2006, 15 p. 100 des travailleuses rémunérées ont cotisé au régime, mais n'ont pas accumulé assez d'heures pour avoir droit aux prestations, alors que la proportion était de seulement 8 p. 100 chez les hommes. Les jeunes forment un autre groupe important.
Beaucoup de prestataires sont des travailleurs dont l'emploi est interrompu de façon prévisible, souvent de façon saisonnière ou récurrente. Ces dernières années, la proportion des demandeurs de prestations régulières qui sont des utilisateurs fréquents a augmenté, atteignant près de 40 p. 100 de cette catégorie de demandeurs.
Le recours fréquent à l'assurance-emploi peut tenir au fait que les travailleurs se familiarisent avec le programme et apprennent à exploiter ses règles et dispositions. Le régime lui-même peut contribuer au problème parce que des règles et dispositions particulières récompensent les travailleurs et les employeurs qui adoptent des comportements qui entraînent une dépendance.
D'après nos recherches, il arrive dans bien des cas que la dépendance des travailleurs à l'égard du régime soit le symptôme de la difficulté de trouver un emploi stable ou plus intéressant, faute de compétences suffisantes ou de reconnaissance de ces compétences, d'études insuffisantes ou de débouchés limités dans la région. Les politiques axées étroitement sur la dépendance des utilisateurs fréquents sont donc mal inspirées. Elles devraient porter plus largement sur les obstacles à l'emploi de travailleurs mal équipés pour exploiter leur plein potentiel sur le marché du travail, qu'ils se fient ou non au régime.
Nos recherches révèlent que, si certains travailleurs qui se heurtent à des obstacles dans la recherche d'un emploi plus sûr peuvent trouver du travail qui leur permet de satisfaire aux critères d'admissibilité, beaucoup d'autres qui butent sur les mêmes obstacles sont incapables de satisfaire aux critères d'admissibilité. Là encore, il s'agit de femmes dans une proportion démesurée. Ce sont elles qui risquent le plus d'occuper des emplois multiples mal rémunérés, souvent à temps partiel. Elles habitent dans toutes les régions, même celles où de meilleurs débouchés ne leur ont pas permis de trouver un emploi plus stable.
Par le passé, le régime a été perçu comme un programme d'assurance, mais il a évolué d'une façon qui l'a éloigné des principes de l'assurance. La réforme de 1996 a ajouté les prestations de la partie II, qui assure une aide directe aux chômeurs par diverses prestations d'emploi et mesures de soutien, mettant l'accent sur l'aide aux groupes défavorisés pour qu'ils atteignent leur plein potentiel en appuyant leur participation à des activités susceptibles d'améliorer leur employabilité.
Au début des années 2000, la couverture du régime a été considérablement étendue pour offrir un congé parental plus généreux. Par la bonification des prestations aux parents et l'ajout plus récent de six semaines de prestations de compassion, le régime offre de plus en plus de l'aide à des travailleurs dont l'emploi s'interrompt pour des motifs qui sont dans une certaine mesure prévisibles, planifiés et volontaires. Certes, ces prestations visent à aider des travailleurs qui doivent concilier travail et responsabilités familiales, mais elles sont perçues par beaucoup comme un écart par rapport à un régime d'assurance.
Cette distance qui est prise par rapport aux principes de l'assurance reflète une évolution majeure des valeurs qui pourraient motiver une réforme plus poussée du régime. Une importante question se pose pourtant: y a-t-il de meilleurs moyens d'améliorer la sécurité du revenu des Canadiens qui doivent concilier travail et responsabilités familiales?
Au Québec, un programme distinct a été implanté en 2006. Il offre des congés de maternité, de paternité et parentaux à tous les travailleurs en marge du régime d'assurance-emploi. La couverture s'étend aux travailleurs autonomes, et à ceux qui travaillent moins de 600 heures, seuil d'admissibilité aux prestations de maternité de l'assurance-emploi, pourvu qu'ils aient gagné au moins 2 000 $ au cours de l'année.
Ce programme est plus généreux et offre aussi plus de latitude aux parents assurés: les taux de remplacement peut atteindre 75 p. 100 de la rémunération assurable, et le seuil de cette rémunération est de 62 000 $, contre seulement 41 000 $ dans le régime d'assurance-emploi. Le programme prévoit également un maximum de cinq semaines de prestations exclusivement pour le père. En 2006, 56 p. 100 des pères admissibles aux prestations de paternité se sont prévalus du programme au Québec, contre seulement 10 p. 100 des pères admissibles dans le reste du Canada.
Le gouvernement québécois a annoncé cette semaine que les prestations versées aux parents aux termes du programme sont plus élevées que prévu et que l'État va devoir injecter 300 millions de dollars dans le fonds, à partir des revenus fiscaux généraux, pour couvrir les coûts du programme. Le recours à ces revenus pour payer les prestations fait actuellement l'objet d'un débat.
Je conclus. Quels sont les divers moyens possibles d'améliorer le régime et de le rendre plus attentif aux réalités actuelles du marché du travail pour les Canadiens? J'estime qu'il faut revoir les règles d'admissibilité aux prestations. Plus précisément, nous devrions étudier les moyens de tenir compte dans les règles du problème du nombre disproportionné de femmes qui ont un horaire de travail qui ne leur permet pas de satisfaire aux critères d'admissibilité, même si elles sont tenues de verser des cotisations.
De plus, compte tenu de la proportion croissante des femmes qui doivent concilier travail et responsabilités familiales, nous devrions nous demander si des prestations spéciales comme les prestations de maternité et parentales et les prestations de compassion doivent se rattacher au régime d'assurance-emploi. Nous devrions songer à d'autres solutions concernant l'admissibilité à ces prestations et la générosité de celles-ci afin d'assurer un soutien de revenu plus convenable aux Canadiennes pendant les interruptions prévues et prévisibles de leur emploi à cause de responsabilités familiales. Le programme québécois est un exemple, et divers pays de l'OCDE ont d'autres modèles à offrir.
Merci.
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Merci, madame la présidente.
Merci beaucoup de votre présence ici aujourd'hui. Nous travaillons à cette étude sur l'assurance-emploi depuis quelques semaines déjà, et chaque fois on découvre quelque chose de nouveau. Alors, c'est très agréable de vous accueillir.
Professeur Lightman, j'ai été particulièrement touchée par l'étude que vous faites par rapport au bien-être social. On sait que c'est un fléau présentement. Au Québec, on en est même rendu à la troisième génération de personnes bénéficiant de prestations de bien-être social. Je trouve très dommage que les femmes n'aient pas accès à de la formation pour pouvoir s'en sortir.
Cependant, au Québec, on a mis sur pied, en 1995, le Chantier de l'économie sociale, qui a permis l'éclosion de petites entreprises qui se font un devoir de donner une chance à certains bénéficiaires du bien-être social. Ça fonctionne assez bien parce qu'on leur donne au moins un an ou un an et demi pour qu'elles puissent s'adapter à un travail régulier.
La semaine dernière, nous avons entendu un témoin de la communauté rurale qui nous a informés que le programme d'économie mis en place par le gouvernement était excellent pour les femmes parce que cela leur permettait de travailler dans des métiers non traditionnels comme la construction. Cela leur permettait aussi de pouvoir obtenir de la formation, etc.
Vous ne semblez pas être d'accord sur cette prémisse. Pourriez-vous nous indiquer quelles sont, selon vous, les failles ou les lacunes de ce programme? Dites-nous comment on pourrait mieux servir les femmes des communautés rurales et urbaines?
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La question ne découle pas directement des observations.
L'un des problèmes, dans l'étude de l'aide sociale, c'est qu'elle varie beaucoup d'une province à l'autre. Je ne suis pas un spécialiste du Québec, mais je sais que l'attitude y est généralement plus progressiste que dans le reste du pays au sujet de la plupart des problèmes sociaux.
J'ai une étudiante au doctorat qui étudie les problèmes du travail précaire dans les zones septentrionales, rurales et isolées. Elle s'intéresse surtout au nord de l'Ontario et de la Colombie-Britannique. Elle constate que la plupart des politiques sociales sont inspirées d'une mentalité urbaine. L'idée d'obliger les assistés sociaux à chercher un emploi s'applique bien à la ville, lorsqu'on un laissez-passer d'autobus et qu'on peut faire la tournée des employeurs, mais si on habite dans une petite localité ou une zone rurale ou isolée où il n'y a peut-être qu'un employeur, et si cet employeur ferme son entreprise, l'idée même d'une recherche d'emploi n'a aucun sens.
L'étudiante n'a pas encore tiré ses conclusions, mais il est clair que beaucoup de politiques, en général, sont conçues plutôt pour les villes. Transplantées à la campagne ou dans des endroits isolés, elles sont mal adaptées et ne donnent rien.
Il semble, d'après les rencontres avec beaucoup d'administrateurs de l'aide sociale qui travaillent dans le nord de l'Ontario, qu'ils gèrent ces problèmes en ne tenant pas compte des règles qui émanent de Toronto. Ils comprennent que la recherche d'emploi n'a aucun sens. Rien n'est écrit et je ne peux rien prouver, mais ils disent à mon étudiante que tout le monde fait abstraction de cette recherche parce que c'est une perte de temps et que c'est humiliant.
Même les possibilités de formation prévues par l'assurance-emploi font beaucoup plus problème dans les zones isolées parce qu'on peut devoir faire quatre ou cinq heures de route pour se rendre à la formation. Je ne suis donc pas convaincu qu'une formation tous azimuts sera une solution applicable dans les zones vraiment isolées.
Je ne sais pas trop quelle est la solution.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie ce groupe de spécialistes. Les choses commencent à prendre forme, car les éléments d'information que vous apportez aident à brosser le tableau de la situation à l'étude.
Je m'adresse d'abord à Mme Schirle, mais j'espère que les autres témoins interviendront et répondront aussi.
À dire vrai, je trouve contradictoire ce que vous avez dit aujourd'hui et dans votre document de travail, soit que les femmes sont les principales responsables du travail non rémunéré et que c'est par choix qu'elles prennent des postes occasionnels ou à temps partiel. Je m'interroge.
J'en reviens à ce qu'on dit Mmes Zarac et Demers au sujet de l'emploi du terme « choix » qu'on brandit sans cesse: les femmes ont le choix. Vous dites avoir étudié les données brutes, mais est-ce qu'elles disent tout?
Je songe à ce qui se passe dans ma circonscription. Des gens perdent leur travail et voudraient compter sur l'assurance-emploi, mais le régime les laisse tomber. Ils sont démolis. Je pense aussi à la situation d'une mère seule qui ne peut compter sur des services de garde. Elle ne peut pas se chercher un emploi parce qu'il n'y a pas de services de garde. Vous avez dit qu'il nous fallait un système national de garde d'enfants. Nous n'en avons pas et le nombre de places en garderie a diminué au cours des dernières semaines, alors qu'il n'y en avait déjà pas assez. Qu'advient-il de la femme qui doit garder un enfant, s'occuper d'une personne handicapée ou d'un membre âgé de la famille? Ses choix sont extrêmement limités, et l'emploi de ce terme, « choix », me dérange vraiment.
À propos de cette contradiction, nous prétendons avoir l'équité salariale, mais ce n'est pas vrai. Elle existe au Manitoba, en Ontario, au Québec, mais nous n'avons pas un régime universel d'équité salariale. Il n'y a même pas de loi fédérale sur l'équité salariale. Les Canadiennes ont été victimes d'une imposture à cause de cette loi d'il y a trois ou quatre semaines qui n'en est pas une.
Quelqu'un pourrait-il m'aider à voir clair dans ces contradictions? Elles me troublent profondément. Pis encore, le gouvernement exploite ces contradictions pour raconter des fables que je ne peux pas gober.
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Merci, madame la présidente.
Nous abordons tous la question avec tant de passion que nous nous écartons souvent du sujet. Je sens le besoin de m'en éloigner brièvement pour répondre à quelques affirmations, mais nous finirons par en revenir aux objectifs.
Nous avons tous le même objectif, soit que tous puissent faire le travail qu'ils veulent, peu importe leur sexe, et qu'ils puissent choisir entre le temps partiel et le temps plein. Je suis très fier d'avoir un fils infirmier et une fille en affaires. Et ici, il y a beaucoup de femmes en politique. C'est là une valeur importante. Il n'y a sans doute personne ici qui s'élève contre cette conception des choses et cette valeur de notre pays.
Les désaccords surgissent au sujet des moyens à prendre et du rôle de l'assurance-emploi à cet égard. Je crois vraiment qu'il y a là un petit problème.
Je dois signaler rapidement que, dans nos échanges, nous avons souvent bifurqué vers les services de garde, qui ont évidemment un lien avec le congé de maternité. Mais je vous en prie, je représente une circonscription rurale, et quand on dit que la solution est un service universel de garderie, je me dis qu'il faut se souvenir qu'il y a bien des catégories de gens. D'abord, il s'agit d'une responsabilité provinciale. Les provinces ont maintenant plus d'argent pour prendre leurs décisions. Je ne peux pas vous dire combien de gens... On a peut-être l'impression que ce n'est pas beaucoup d'argent, mais l'impression de mes électeurs des zones rurales et éloignées, qui ont une exploitation agricole familiale, des enfants en milieu agricole... Il ne faut pas oublier que nous ne pouvons pas nous en tenir à un seul modèle urbain pour atteindre nos objectifs de développement de la petite enfance et de garde des enfants
Nous avons un certain régime. Monsieur Lightman, je m'insurge un peu contre les reproches d'insensibilité que vous adressez au gouvernement. Le régime a été conçu avant lui. Lui imputer la responsabilité d'un régime très injuste, c'est faire fausse route. Je tenais à le signaler.
Nous avons apporté de bonnes modifications, mais il faut garder le juste milieu. Vaut-il mieux que le gouvernement consacre l'argent des impôts à la création d'emplois et à la stimulation de l'économie? L'assurance-emploi est censée être sans effet sur les revenus. Les modifications que nous avons apportées... Les prestations de maternité de cinq semaines pour les travailleuses autonomes représentent des coûts qui seront assumés par les travailleurs et les employeurs. Mettons que nous prenions toutes vos propositions et acceptions de prendre ces mesures dans l'intérêt des gens. Si, du jour au lendemain, nous faisons payer davantage aux employeurs et aux employés alors que le régime est censé n'avoir aucune incidence sur les revenus, l'impact sera considérable. Allons-nous faire disparaître des entreprises? Allons-nous perdre encore des débouchés?
Voilà des idées que je lance.
Merci.
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Bonjour à tous. J'ai un secret à vous confier: j'ai 50 ans aujourd'hui, 50 ans de vie de femme. C'est très difficile d'être objective, puisque je suis ébranlée émotivement à l'idée de faire un bilan de ma vie de femme et un bilan de tout ce que les femmes ont fait avant moi. Je suis vraiment inquiète de la situation à laquelle on fait face.
Au Canada, les programmes, les politiques et les mesures sont encore très archaïques et sont, à mon avis, très discriminatoires à l'endroit des femmes. On dit vivre dans un pays évolué. Je me demande jusqu'à quel point les gouvernements sont soucieux du bien-être des femmes, sont à l'écoute du travail que l'on fait ici, des rapports que l'on dépose et de tous les témoins que l'on rencontre. Des études d'experts démontrent qu'en raison de la fiscalité du gouvernement, les femmes sont encore victimes de discrimination.
Au plan sociologique, il faut revoir les façons de faire afin de rétablir ces iniquités envers les femmes. Oh! combien suis-je fière d'être Québécoise! Le Québec a fait des choix et a mis en place des avancées sociales qui ont permis à de jeunes familles de se prévaloir des CPE — les centres de la petite enfance — et de congés parentaux plus avantageux que dans le reste du Canada. J'ai hâte qu'il y ait suffisamment de données pour indiquer que ces choix ont eu des conséquences positives.
Je suis d'une région complètement dévitalisée, une région qui perd ses jeunes. Ces programmes ramèneront-ils les jeunes en région et favoriseront-ils l'implantation des familles en région? Ce programme de congé parental, par exemple, fait-il augmenter le taux de natalité? Au Québec, il y a une augmentation de la natalité. Est-ce que ces choix de société améliorent la qualité de vie de nos familles?
Mais je m'excuse, on parle présentement du régime d'assurance-emploi. Si on examine son état actuel, on constate qu'on a dénaturé ce régime. On n'a pas tenu compte du portrait, du profil du travail, qui a vraiment changé. On ne vit plus à l'ère de la sécurité d'emploi. Je regrette de devoir le dire, mais beaucoup de gens dépendent d'un travail précaire, d'un travail saisonnier. Beaucoup de ces gens habitent les régions, mais il y en a aussi dans les grands centres. Je suis d'une région forestière, agroalimentaire et touristique où la majorité des gens dépendent d'un travail saisonnier et sont des femmes. Dans les centres mono-industriels — qui ne dépendent que d'une industrie —, c'est encore plus catastrophique. Dans l'industrie forestière, c'était en majorité des hommes qui effectuaient le travail. Le seul travail que pouvait occuper une femme — et non pas par choix —, c'était un travail dans le domaine des services ou à temps partiel. Il y a une très grande pauvreté, et ce qui est encore plus aberrant, c'est que ce sont des gens qualifiés qui doivent maintenant se tourner vers l'aide sociale. Ils disparaissent des statistiques de l'assurance-emploi et on en remet la responsabilité aux provinces en leur disant qu'elles doivent maintenant s'occuper d'eux. Le seul et dernier recours, c'est l'aide sociale. Il y a toujours des cas d'espèce, des gens qui vont exagérer, que ce soit au chapitre de l'assurance-emploi ou de l'aide sociale, mais le fait d'être prestataires de l'aide sociale est un dur coup porté à la dignité de ces personnes. Comment peut-on s'en sortir si on n'a pas de moyens?
On parle du régime d'assurance-emploi. C'est un régime d'assurance auquel seuls les employés et les employeurs cotisent. Le gouvernement n'investit pas un — j'ai le goût de sacrer, mais je ne le ferai pas — cent, pas un sou, dans ce programme.
Pourquoi s'entêter à ne pas vouloir l'actualiser, à ne pas le rendre favorable et à ne pas prendre conscience que des changements sont survenus dans les profils d'emploi? Il faut actualiser le programme et l'ajuster à la réalité que vivent les gens aujourd'hui, relativement à leurs choix et leurs options d'emploi.
Je m'excuse si j'ai pris du temps.
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Merci beaucoup, monsieur Baker.
Nous sommes parvenus à la fin de ces échanges, et nous devons passer à autre chose.
Je remercie les témoins d'avoir comparu, d'avoir pris le temps de venir, parfois avec un préavis très bref, et d'avoir toléré que nous devions annuler la première intervention à cause d'un vote.
J'ai aussi une observation à faire à tout le monde. Par respect pour les comités et les témoins, il est important que les députés reconnaissent que les témoins comparaissent parce que nous les avons invités. S'ils disent des choses qui ne nous plaisent pas particulièrement, il faut les respecter sans leur reprocher leurs propos ni s'offusquer. Nous sommes ici pour écouter. Nous ne sommes pas forcément d'accord, mais il faut tenir compte des divers points de vue.
Je tenais simplement à établir le ton qui doit régner dans nos séances. Nous devons toujours respecter les témoins.
Merci beaucoup d'avoir comparu. Excusez-moi si j'ai raté le début de la séance, mais je remercie Mme Davidson d'avoir présidé la séance avec compétence. Merci à vous d'être venus.
Un détail, toutefois, Mme MacDonald a parlé d'un rapport, M. Lightman a parlé de certaines données et certains d'entre vous ont parlé de différentes informations. Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir transmettre cette information au greffier pour qu'il puisse la distribuer aux membres afin que chacun puisse en prendre connaissance. S'il y a des documents que vous voulez nous faire parvenir, même si vous n'en avez pas parlé ici, nous vous serons reconnaissants de tout renseignement que vous pourrez communiquer. Il suffit d'adresser les documents au greffier.
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Beaucoup d'entre nous qui ont présidé des réunions par le passé ont dû consulter les
Robert's Rules of Order. La motion de dépôt est une motion des
Robert's Rules of Order. À la Chambre des communes, nous utilisons l'ouvrage de Marleau et Montpetit.
Si des députés veulent faire retirer une motion de dépôt, ils peuvent s'y prendre de deux façons. Ils peuvent demander l'ajournement du débat. Mettons que nous débattions une motion de dépôt et que les participants n'en veulent pas. Elle ne peut faire l'objet d'un débat. Si un député demande la fin du débat ou présente une motion en ce sens, cette motion ne peut faire l'objet d'un débat. La présidence doit mettre la motion aux voix immédiatement.
Un député pourrait toutefois, comme dans le cas de Mme McLeod, présenter une motion proposant l'ajournement à une certaine date et demandant une certaine information pour une raison quelconque. Cette motion peut faire l'objet d'un débat. Nous pouvons donc en débattre ou parler de la possibilité de lui donner suite. Nous votons et, si la motion est adoptée, nous nous procurons l'information. Sinon, nous devons débattre la motion.
Ce ne sont que des règles. Je les signale pour que vous les connaissiez. Je suis habituée à l'idée des dépôts; et dès qu'il y a dépôt, il n'y a plus de discussion et on va de l'avant. C'est ce qui se trouve dans les Robert's Rules of Order, alors que, dans l'ouvrage de Marleau et Montpetit, ce sont les règles qui s'appliquent.
Tout le monde saisit bien, pour que nous puissions comprendre comment arriver à faire ce que nous voulons faire?
Sylvie, ce n'est pas clair?