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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 007 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 mars 2009

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bonjour à tous.
    Il semble que nous soyons condamnés à débuter nos réunions en retard, car quelqu'un est toujours en train de partir lorsque nous, nous arrivons. Quoi qu'il en soit, nous sommes installés.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins qui comparaissent devant nous aujourd'hui: Barbara Byers, vice-présidente exécutive du Congrès du travail du Canada; Ken Battle, du Caledon Institute of Social Policy; et Danie Harvey et Micheline Dépatie, du Conseil national des chômeurs et chômeuses. France Turcotte n'est pas ici, n'est-ce pas?

[Français]

[Traduction]

    Bienvenue.
    Chacun disposera de 10 minutes. Il y aura ensuite une période de questions et de réponses, les députés pouvant adresser leurs questions à une personne en particulier ou au groupe tout entier. Il y aura sept minutes pour les questions au premier tour, et cinq minutes pour les questions au deuxième tour.
    Je tiens à rappeler à tous que les sept minutes comprennent la réponse, alors je demanderais que, dès que vous obtenez votre réponse, vous passiez à votre question suivante, sans quoi nous ne parviendrons pas à abattre tout notre travail.
    Nous allons commencer avec le Congrès du travail du Canada, ici représenté par Mme Byers.
    Je tiens à vous remercier au nom des plus de trois millions de membres que compte le Congrès du travail du Canada et qui oeuvrent dans tous les secteurs de l'économie, d'un bout à l'autre du pays.
    Je tiens à dire également que la question que vous examinez est très importante. L'assurance-emploi est d'une importance critique, et elle l'est tout particulièrement pour les femmes.
    Elle l'est d'autant plus quand les temps sont durs, comme ils le sont à l'heure actuelle. Les travailleuses et les travailleurs mis à pied ont manifestement besoin de prestations suffisantes pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille pendant qu'ils se cherchent un nouvel emploi. Les prestations de chômage servent à acheter des produits de première nécessité. Elles sont une forme efficace de stimulation économique et elles aident au maintien de l'économie des collectivités durement frappées. Les personnes qui touchent des prestations d'assurance-emploi dépensent leur argent dans les commerces de leur localité. Elles n'accumulent pas cet argent dans des comptes d'épargne, ne s'en servent pas pour faire des voyages et ne détiennent pas de gros investissements. Elles investissent dans leur collectivité.
    Par rapport au temps des récessions antérieures, notre régime d'AE laisse en plan beaucoup trop de Canadiens, surtout des femmes, des jeunes travailleurs et des personnes à faible salaire sans sécurité.
    En novembre 2008, seulement quatre travailleurs sans emploi sur 10 avaient droit à des prestations. La prestation hebdomadaire maximale, qui est aujourd'hui de 447 $, est inférieure de 25 p. 100 à celle de 1996, et la prestation hebdomadaire moyenne n'est actuellement que de 335 $. Et le régime est encore moins favorable à l'endroit des femmes, et je vais vous donner des statistiques là-dessus dans un instant.
    Des compressions ont été pratiquées vers le milieu des années 1990, influant sur la détermination des personnes admissibles et le montant des prestations versées, et la situation a sérieusement décliné. Le rôle de soutien de l'AE pour les femmes a particulièrement diminué.
    Le soutien du revenu assuré par l'AE en période de chômage, de congé de maternité ou parental, ou de maladie est bien entendu un important facteur de stabilisation et de soutien des revenus familiaux. Il favorise également l'indépendance économique des femmes dans leur communauté, étant donné que les prestations sont fondées non pas sur le revenu familial, à l'exception du petit supplément pour les familles à faible revenu — qui, soit dit en passant, n'a pas été augmenté depuis de nombreuses années, ce qui veut dire que les gens sont de moins en moins nombreux à y être admissibles...
    Les règles clés du régime d'AE excluent ou punissent injustement les femmes parce qu'elles ne permettent pas de tenir dûment compte des différences entre leurs régimes de travail et ceux des hommes. Bien que la grande majorité des femmes adultes aient aujourd'hui un travail rémunéré, les heures de travail qu'effectuent les femmes rendent bon nombre d'entre elles inadmissibles aux prestations d'AE, comme c'est également le cas des périodes de temps passées à l'extérieur de la population active à prendre soin d'enfants ou d'autres personnes.
    Comme Monica Townson et Kevin Hayes l'indiquent dans une étude réalisée pour le compte de Condition féminine Canada, seules 32 p. 100 des femmes en chômage étaient ces dernières années admissibles à des prestations d'AE ordinaires, comparativement à 40 p. 100 des hommes sans emploi. Le chiffre de 40 p. 100 pour les hommes est épouvantable, mais les statistiques concernant les femmes sont pires encore. Plus de 70 p. 100 des femmes et 80 p. 100 des hommes avaient droit à ces prestations avant les compressions majeures pratiquées vers le début des années 1990. L'écart entre les sexes pour ce qui est de la proportion de chômeurs et de chômeuses recevant des prestations ordinaires a rétréci un peu, mais il demeurait de 2 p. 100 en novembre 2008.
    L'écart sur le plan des prestations moyennes est beaucoup plus grand. En 2006-2007, l'année la plus récente pour laquelle nous avons les chiffres — et de nouvelles statistiques vont apparemment être publiées le mois prochain —, la prestation moyenne des femmes était de 298 $ par semaine, alors que celle des hommes était de 360 $, soit une différence de 62 $ par semaine.
    De plus, les femmes ont droit à des prestations pour des périodes plus courtes, en moyenne. En 2005-2006, 30 p. 100 des femmes ont épuisé leurs prestations ordinaires, comparativement à 26 p. 100 des hommes.
    Seul environ le tiers de la valeur totale des prestations ordinaires de chômage d'AE est versé aux femmes même si les femmes participent à la population active à peu près au même taux que les hommes.
    Pour vous donner d'autres comparaisons encore, les prestations parentales pour les hommes sont en moyenne de 382 $ par semaine; elles sont de 331 $ pour les femmes, soit une différence de 51 $ la semaine.
    Dans le cas des prestations de maladie, le montant est de 343 $ pour les hommes et de 277 $ pour les femmes, pour une différence hebdomadaire de 66 $.
    Dans le cas des prestations de soignant, les montants respectifs sont de 364 $ et de 318 $, pour une différence de 44 $ par semaine.

  (1115)  

    L'une des principales raisons de l'écart est que pour avoir droit à des prestations, une personne doit avoir travaillé au cours de la dernière année et doit avoir effectué de 420 à 700 heures de travail, selon le taux de chômage local. Les travailleurs et les travailleuses de la plupart des grandes villes doivent accumulé 700 heures, soit l'équivalent de 20 semaines de travail à plein temps. Il y a moins de femmes que d'hommes qui ont droit à des prestations parce que de nombreuses femmes prennent des congés prolongés pour s'occuper d'enfants ou d'autres personnes.
    Or, après deux années d'absence du marché du travail, il faut avoir accumulé 910 heures de travail, soit plus de six mois de travail à plein temps. Quand elles travaillent, les femmes sont beaucoup plus susceptibles que les hommes d'occuper des emplois à temps partiel ou temporaires plutôt que des emplois à plein temps permanents assurant des heures stables. Puisqu'elles n'ont pas suffisamment d'heures de travail, seule environ la moitié des personnes travaillant à temps partiel qui perdent leur emploi ont droit à des prestations de chômage.
    L'actuel régime d'AE prévoit des prestations de maternité pour un maximum de 15 semaines et 35 semaines de prestations parentales, dont 90 p. 100 sont touchées par des femmes. L'accroissement des congés de maternité et des congés parentaux ces dernières années, et particulièrement le fait que les prestations parentales soient passées de 10 à 35 semaines en 2001, constituent un progrès important pour les travailleuses. Cependant, pour avoir droit aux prestations, une femme doit avoir accumulé 600 heures de travail au cours de l'année précédente. Environ les trois quarts des femmes qui accouchent sont admissibles, mais seulement 60 p. 100 d'entre elles demandent des prestations. Les femmes qui ont droit à des prestations raisonnables ou dont l'employeur verse un supplément de la prestation d'AE sont beaucoup plus susceptibles de prendre une année entière de congé.
    Le Québec a créé dernièrement son propre programme de prestations de maternité/parentales de l'AE, qui offre de bien meilleures prestations et qui s'applique aux travailleurs et travailleuses autonomes, ce qui est une première. Je vous renverrai ici à un article paru il y a environ un an dans l'édition anglaise de la revue Chatelaine et intitulé « Modern Times: The Myth of Mat Leave », car il explique très clairement la difficulté.
    Le gouvernement se plaît à affirmer que 80 p. 100 des personnes qui ont actuellement un emploi auront droit à des prestations ordinaires d'AE si elles perdent leur emploi. C'est cependant négliger le fait que la perte d'emploi affecte surtout les personnes qui ont des emplois présentant des caractéristiques instables, telles que les travailleurs et les travailleuses qui ont des heures réduites avant la mise à pied ainsi que ceux et celles qui ont des emplois à temps partiel, des emplois temporaires ou qui travaillent à contrat. C'est également négliger le fait qu'un grand nombre de personnes au chômage n'ont droit à des prestations d'AE que pour une courte période et qu'elles épuisent rapidement leurs prestations.
    Avant le dépôt du budget, de nombreuses voix, y compris celles d'éditorialistes, de chefs d'entreprise et de premiers ministres provinciaux, ainsi que du mouvement syndical, ont approuvé notre revendication d'améliorations majeures au régime d'AE. Mais le gouvernement n'a pas répondu à cet appel à bien des égards. Le budget n'a rien prévu du tout en ce qui concerne l'accès aux prestations. De nombreux travailleurs, principalement des femmes, sont encore obligés, en tant que nouveaux actifs, de franchir l'obstacle des 910 heures, ce qui correspond à environ six mois de travail à plein temps. Il faut encore avoir 700 heures de travail dans de nombreuses régions. En outre, le budget n'a pas amélioré le montant des prestations hebdomadaires.
    Le projet de loi d'exécution du budget a cependant ajouté cinq semaines d'admissibilité pour toutes les demandes de prestations, portant ainsi la période d'admissibilité minimale de 14 à 19 semaines. De plus, il porte le maximum à 50 semaines dans un petit nombre de régions à taux de chômage élevé, soit supérieur à 10 p. 100. Il ne s'agit cependant que d'une mesure temporaire, qui ne s'appliquera pas après septembre 2010. La prolongation viendra en aide à certains sans-emploi victimes de la récession, mais seulement pour une somme totale de 500 millions de dollars par an, ce qui représente moins d'un sixième de ce qui sera dépensé au titre des subventions à la rénovation résidentielle. Je souligne en passant que ces subventions ne seront pas à la portée des chômeurs, car avec 300 et quelque dollars par semaine, vous n'allez pas dépenser 10 000 $ pour obtenir une subvention en retour.
    La ministre dit qu'elle ne veut pas payer des prestations de chômage à des personnes qui se contentent de rester assis à ne rien faire. Bien franchement, cela est une insulte à de nombreux travailleurs — plus d'un quart de million au cours des trois derniers mois — qui ont perdu leur emploi sans avoir commis de faute et qui cherchent aujourd'hui désespérément du travail ou des possibilités de formation. Cela ne tient pas compte du fait que les personnes qui trouvent des places en formation continueront d'avoir besoin d'un revenu pour vivre. Ayant travaillé pendant 17 ans comme travailleuse sociale, je peux dire que les personnes touchant des prestations d'assurance-emploi, de bien-être ou autres veulent pouvoir contribuer. Elles ne veulent pas dépendre de ces prestations. Elles veulent un emploi avec un revenu décent.
    Le Congrès du travail du Canada réclame des conditions d'admissibilité moins élevées, soit de 360 heures de travail partout dans le pays, afin qu'un plus grand nombre de travailleurs soient admissibles advenant leur mise à pied.

  (1120)  

    Nous demandons une plus longue période de prestations, pouvant atteindre 50 semaines, pour que moins de sans-emploi n'épuisent leurs prestations; des prestations hebdomadaires plus élevées fondées sur les 12 meilleures semaines de gains — pas les 12 dernières semaines, mais les 12 meilleures semaines — avant la mise à pied; et un taux de remplacement de 60 p. 100 des gains assurables, ce qui, en passant, ne nous ramènerait même pas aux niveaux des années 1970.
    Toutes ces améliorations aideraient les femmes. La réduction des conditions d'admissibilité serait un facteur particulièrement important en vue de l'élimination de l'écart entre les sexes en matière d'AE, car, bien franchement, vous pouvez faire tout ce que vous voulez au régime et lui donner un visage positif pour certaines catégories de prestations, mais si les gens ne peuvent pas y accéder, et ce à un niveau raisonnable, alors ils ne vont pas pouvoir utiliser le régime d'AE.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Battle.
    M. Battle a apporté des graphiques avec lui, mais nous ne pouvons pas les distribuer du fait qu'ils n'aient pas été fournis dans les deux langues. Nous les ferons traduire et vous les enverrons plus tard. Mais s'il en est parmi vous qui aimeriez en ramasser une copie et l'examiner, sentez-vous bien libres de le faire, car, d'après ce que je comprends, c'est ce qu'il nous faudra suivre dans le cadre de l'exposé que va nous faire M. Battle.
    Oui, merci, madame la présidente.
    Je vous présente mes excuses. Nous travaillions à ces graphiques tard hier soir et je n'ai pas eu la possibilité de les faire tous traduire. Je pourrai cependant vous les expliquer et en traiter, si cela vous convient, car ils renferment beaucoup de nouvelles données.
    Très bien.
    Merci de l'invitation à comparaître devant vous. Je suis heureux de vous revoir.
    Je vais vous lire une brève déclaration, après quoi je ferai un petit travail d'analyse.
    Je constate déjà, après avoir entendu l'exposé de Barbara, qu'il y a entre nous un certain chevauchement. Je vais donc essayer d'élaguer un peu.
    L'assurance-emploi a rompu le contrat d'assurance sociale qu'avaient chéri les pionniers canadiens de la politique sociale en tant qu'élément crucial d'un régime moderne de sécurité sociale. La quasi-totalité des employés versent des primes d'AE, mais seuls certains d'entre eux peuvent bénéficier des prestations de revenu et autres services d'emploi offerts dans le cadre du programme s'ils perdent leur emploi. Le contrat d'assurance sociale défectueux est en définitive discriminatoire envers les travailleurs à faible revenu, dont la plupart occupent des emplois non-conventionnels. Les femmes connaissent un bien pire sort que les hommes.
    L'assurance-emploi devrait intervenir en tant que stabilisateur économique automatique dans une économie moderne comme celle du Canada. Elle doit jouer un double rôle en cas de fléchissement économique comme celui que nous vivons à l'heure actuelle. Elle devrait assurer un soutien de revenu en remplaçant les salaires perdus par les rangs croissants des chômeurs, et elle devrait, en injectant de l'argent dans l'économie, venir appuyer les entreprises qui comptent sur les dépenses des consommateurs. Malheureusement, les mesures annoncées dans le budget de 2009 vont en vérité accuser le déséquilibre de l'actuel régime d'assurance-emploi en améliorant quelque peu la situation pour une minorité de personnes ayant le bonheur d'être admissibles aux prestations tout en continuant de ne rien faire pour la majorité des femmes et des hommes chômeurs qui demeureront exclus du régime.
    Nous ne pouvons pas remonter dans le temps et rétablir l'ancien régime d'assurance-chômage. Il nous faut envisager des réformes plus radicales qui aillent au-delà de l'AE pour inclure bien-être et soutien pour les travailleurs à faible salaire. En bref, il nous faut une nouvelle architecture de prestations pour les adultes en âge de travailler.
    Vous avez peut-être maintenant, à force, une bonne connaissance de l'histoire de l'AE. Il s'agit d'un programme qui a été créé en 1940. À l'époque, il couvrait environ 40 p. 100 de la population active. Il s'agissait d'un programme plutôt restreint. Il s'est élargi au fil des ans jusqu'en 1971, lorsque Bryce Mackasey, alors ministre, a introduit le programme d'assurance-emploi moderne, qui englobait presque toute la population active, à l'exception des travailleurs autonomes.
    Ce qui est arrivé dans les années 1980 et 1990 est que l'on a de plus en plus critiqué le programme d'assurance-emploi, ce qui a amené, dans les années 1990, une série de restrictions et de réductions de l'AE. Je ne peux pas les étayer ici, mais le dernier changement, bien sûr, a été le remplacement en 1996 du titre « assurance-chômage » par « assurance-emploi », un virage véritablement orwellien. Nous constatons aujourd'hui les résultats des compressions intervenues dans les années 1990.
    Si vous regardez la protection des chômeurs et le pourcentage de sans-emploi touchant des prestations ordinaires d'AE — et je vais me concentrer ici sur les prestations ordinaires de chômage —, il y a eu un déclin phénoménal des prestations au fil des ans. En 2008, le pourcentage n'était plus que de 43 p. 100, ce qui veut dire que 43 p. 100 de l'ensemble des Canadiens en chômage sont admissibles à des prestations ordinaires d'AE.
    Si l'on compare les hommes aux femmes, un plus faible pourcentage de femmes, bien sûr, sont admissibles aux prestations, et l'écart entre les sexes augmente depuis six ou sept ans: il existe aujourd'hui un écart plus grand, sur le plan de la couverture, entre les hommes et les femmes. En 2008, seules 39,1 p. 100 des chômeuses touchaient des prestations, comparativement à 44,5 p. 100 des chômeurs.
    Nous nous sommes penchés sur une mesure qui établit un ratio de la couverture des hommes comparativement aux femmes et en vertu de laquelle « 1 » serait l'égalité et tout ce qui serait inférieur... Nous pouvons voir qu'au fil du temps l'écart entre les hommes et les femmes augmente. Plus d'hommes que de femmes touchent par ailleurs des prestations d'assurance-chômage, même si lorsque nous suivons la tendance au fil du temps, en tenant compte de l'effet du cycle conjoncturel, les formes des courbes sont à peu près les mêmes pour les hommes et les femmes.
    Ce que nous voyons, si nous comparons les prestataires d'AE au nombre de chômeurs, est un écart toujours grandissant entre ceux qui touchent des prestations et ceux qui n'en touchent pas, et ce sont les femmes qui s'en tirent le moins bien.

  (1125)  

    Nous avons examiné la couverture de l'assurance-emploi dans les plus grandes villes du Canada, et le tableau est plutôt choquant. Environ 30 p. 100 des chômeurs sont admissibles à des prestations dans les villes les plus importantes du pays. Pour vous donner un exemple, à Calgary, 20,8 p. 100 des hommes sont admissibles, contre 17,1 p. 100 des femmes. Pour Toronto, le taux d'admissibilité est de 24,8 p. 100 pour les hommes et de 23,7 p. 100 pour les femmes. Dans les grandes villes, donc, dans lesquelles vivent huit sur 10 Canadiens, la majorité des chômeurs n'obtiennent aucune aide de l'assurance-emploi. Et, encore une fois, la situation est pire pour les femmes que pour les hommes.
    Lorsque nous regardons les différences entre les provinces, les variations sont absolument stupéfiantes. En Alberta, 23,4 p. 100 des chômeurs touchent des prestations; le chiffre est de presque 100 p. 100 à Terre-Neuve. En Ontario, et dans les provinces de l'Ouest, un pourcentage toujours plus faible de chômeurs touchent des prestations.
    Pourquoi en est-il ainsi? Barbara a fait allusion à la réponse à cette question: les conditions d'admissibilité variables. C'est là l'élément de l'assurance-emploi qui en fait un jeu d'échecs tridimensionnel. Non seulement les exigences de travail varient en fonction des 58 zones de chômage régionales du pays, mais c'est également le cas de la durée des prestations.
    Prenons un exemple — un exemple extrême —: celui de deux Canadiens en chômage qui gagnaient le même revenu. Celui vivant dans une région à taux de chômage élevé touchera davantage de prestations que la personne en situation semblable, ayant gagné le même revenu, mais vivant dans une région à faible taux de chômage. Vous pourriez en définitive avoir une situation dans laquelle une personne ne touche absolument rien au titre de l'assurance-emploi tandis que l'autre est admissible aux prestations.
    L'autre problème avec cet accès inégal aux prestations de revenu, bien sûr, est que les services connexes de formation et d'emploi sont également rattachés à l'AE, de telle sorte que le problème de l'accès ne se limite pas aux seules prestations de revenu, mais s'étend également à certaines des prestations d'emploi corollaires.
    Pourquoi y a-t-il cet écart entre les hommes et les femmes? La principale raison a à voir avec l'expérience différente des femmes sur le marché du travail, et il s'agit, je pense, là d'un facteur qui est aujourd'hui très bien connu: la croissance des emplois non conventionnels — travail autonome, emplois à temps partiel, emplois multiples. L'on parle ici de personnes qui sont rarement admissibles à l'assurance-emploi étant donné qu'elles ne satisfont pas aux règles et que leurs antécédents professionnels ont tendance à être fragmentés et instables.
    Nous constatons là encore une différence selon le sexe. Environ 34 p. 100 des Canadiens occupent des emplois non conventionnels, mais le pourcentage chez les femmes est de 40 p. 100 contre 29 p. 100 pour les hommes. Les femmes sont beaucoup plus vulnérables pour ce qui est du chômage et ont tendance à entrer dans la population active pour ensuite en ressortir, notamment pour élever leurs enfants et s'occuper d'autres membres de leur famille.
    Ces différences sexospécifiques se trouvent exprimées dans les prestations, et Barbara en a fait état. La prestation maximale d'AE est de 447 $ en 2009; en 1995, elle était de 595 $, en dollars constants, pour tenir compte de l'inflation: 447 $ aujourd'hui, et 595 $ il y a de cela 10 ans. Il y a donc eu un recul réel du montant maximal de prestations payables.
    Lorsque nous regardons les prestations moyennes, en 2007, la prestation hebdomadaire moyenne pour les femmes admissibles à l'AE était de 298 $; pour les hommes, elle était de 360 $. Les femmes dans cette catégorie se trouvaient ainsi à 4 544 $ en dessous du seuil de la pauvreté, alors que les hommes étaient à 1 754 $ sous le seuil de la pauvreté. L'on ne peut donc aucunement prétendre qu'il s'agit de prestations généreuses.
    Pour ce qui est de la durée des prestations, les femmes qui touchent des prestations d'AE risquent davantage de n'en bénéficier qu'à court ou à moyen terme; chez les hommes, la durée des prestations a tendance à être davantage à long terme.
    Si l'on examine le pourcentage de bénéficiaires d'AE épuisant leurs prestations, là encore nous constatons une différence selon le sexe: 30,4 p. 100 des femmes épuisent leurs prestations d'AE, contre seulement 26 p. 100 des hommes.
    J'aimerais maintenant changer de cap et parler un petit peu de l'aide sociale et de l'AE, après quoi, je le promets, je m'arrêterai.

  (1130)  

    Ce qui se passe au Canada est que l'assurance-emploi, qui est censée être le programme social de premier recours, est en train d'être éclipsée par l'aide sociale dans plusieurs provinces. Il y a un bien plus grand nombre de personnes qui bénéficient d'aide sociale, et qui sont en chômage, que de personnes qui touchent des prestations d'AE. L'aide sociale est bien sûr censée être le programme de dernier ressort, et non pas de premier recours.
    Les dépenses au titre de l'aide sociale et de l'AE se rejoignent presque, même si l'aide sociale est censée être un petit programme destiné aux personnes qui ne sont pas admissibles à l'AE ou qui se trouvent dans l'impossibilité d'obtenir un emploi.
    La question est la suivante: que faire et quelles réformes apporter?
    Je vais vous accorder une minute encore.
    Très bien.
    Barbara a mentionné les recommandations du CTC, et j'allais justement en parler. La différence entre le Caledon Institute et le CTC et d'autres est que, bien que nous soyons d'accord quant aux améliorations que le CTC et d'autres groupes ont recommandées, nous estimons qu'à long terme cela ne suffira pas. Il nous faut créer un nouveau programme d'assurance-emploi.
    Nous devrions conserver l'actuelle assurance-emploi, y intégrer une capacité supérieure de remplacement de salaire, et nous y ajouterions un nouveau programme, une prestation en fonction du revenu — nous appelons cela un programme de revenu temporaire —, qui viendrait en aide aux personnes qui ne sont pas admissibles à l'AE.
    En d'autres termes, il y aurait un régime à deux volets. Un volet serait l'assurance-emploi, financée par les cotisations, comme c'est le cas à l'heure actuelle, mais il s'agirait d'un programme plus solide. Il n'y aurait pas d'exigences d'admissibilité variables. Il ne s'y trouverait pas cet aspect régional pervers. Et il y aurait un nouveau programme soumis à un examen du revenu, financé à même les recettes générales — il s'agirait ici encore d'un programme fédéral —, qui aiderait les chômeurs inadmissibles au programme d'assurance-emploi.
    Il s'agirait d'un changement plutôt radical. Nous y travaillons. Cela s'inscrirait dans une architecture plus vaste dans le cadre de laquelle nous remplacerions également l'aide sociale par de nouveaux programmes et ferions en sorte que ces programmes aillent de pair au niveau tant fédéral que provincial.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Mesdames Harvey et Dépatie, laquelle de vous deux aimerait commencer?

[Français]

    Je vais commencer.
    Bonjour à tous. Mon nom est Danie Harvey et je suis du Conseil national des chômeurs et chômeuses. Au nom de notre organisation, je vous remercie de nous avoir invités.
    Notre organisation réunit plusieurs groupes de chômeurs, dont certains ont une trentaine d'années d'expérience dans la défense des droits des chômeurs. Depuis quelques années, nous avons été aux premières lignes de nombreuses campagnes de sensibilisation de l'opinion publique pour non seulement dénoncer le détournement de la caisse de l'assurance-emploi, mais aussi, et surtout, pour réclamer un meilleur régime d'assurance-emploi. Nous voulons donc, à la lumière de nos revendications, vous faire part des modifications à apporter au régime d'assurance-emploi pour que, selon nous, les femmes puissent bénéficier d'un régime efficace.
    Le monde du travail vit actuellement des changements économiques majeurs qui ont des répercussions négatives sur la réalité des femmes. Les emplois atypiques sont plus nombreux, et différents secteurs d'activité sont touchés. Que l'on pense au travail à temps partiel, temporaire, sur appel, occasionnel, autonome ou à domicile, 40,2 p. 100 des femmes en emploi occupent ce type d'emploi. Lors d'une perte d'emploi, 59 p. 100 des femmes n'ont pas accès à l'assurance-emploi puisqu'elles n'ont pas accumulé suffisamment d'heures pour y avoir accès. Elles devront donc cumuler plusieurs emplois simultanément pour y arriver, gérer des horaires difficiles, et dans certains cas — pour les emplois saisonniers par exemple —, dans un laps de temps très court, environ 14 semaines de travail, ces femmes devront travailler sept jours sur sept.
    Je suis de la région de Charlevoix, et cette région possède une économie saisonnière. Je vois fréquemment des femmes qui cumulent trois ou quatre emplois, travaillent sept jours sur sept, pendant 14 semaines au minimum et même au maximum, dans certains cas. Si on abaissait le critère d'admissibilité, cela faciliterait l'accès à l'assurance-emploi car, je le répète, 59 p. 100 des femmes ne peuvent y avoir accès. Il faut abaisser ce nombre d'heures et en faire un critère unique de 350 heures, et ce, peu importe le lieu de résidence, puisqu'il existe actuellement, à notre avis, des illogismes percutants. Deux employés d'un même lieu de travail, par exemple, pourraient ne pas avoir droit à l'assurance-emploi dépendamment de leur lieu de résidence. C'est une chose qu'on voit aussi fréquemment dans notre pratique. On se demande pourquoi une telle différence, tout à fait arbitraire, entre une région et une autre. Une perte d'emploi n'a-t-elle pas la même conséquence pour toute personne, peu importe son adresse civique?
    Nous savons tous et toutes que les femmes représentent plus de 60 p. 100 des travailleurs au salaire minimum. Nous savons aussi qu'elles représentent 46 p. 100 de l'ensemble des salariés. Devant cette réalité, n'y a-t-il pas lieu de s'interroger sur la pertinence de maintenir le délai de carence? Pourquoi existe-t-il, si ce n'est pour appauvrir davantage? Certaines femmes doivent combiner plusieurs emplois, et lorsqu'elles réussissent à mettre un peu d'argent de côté, le délai de carence gruge toutes les économies durement gagnées durant la période d'emploi, parce qu'il faut bien continuer à payer le loyer et l'épicerie. L'abolition du délai de carence devient maintenant une évidence, un délai administratif inutile et aberrant qui prive de revenu des gens déjà lourdement appauvris par la perte d'un emploi.
    De plus, le taux des prestations d'assurance-emploi fixé à 55 p. 100 a aussi des conséquences économiques désastreuses. Lorsqu'une personne travaille au salaire minimum, ses prestations d'assurance-emploi équivalent à 4,68 $ l'heure, ce qui n'est même pas assez pour payer une livre de beurre. Nous savons tous et toutes que c'est le lot de beaucoup de femmes, monoparentales de surcroît.
    Selon Statistique Canada, une femme seule doit travailler près de 51 heures par semaine pour atteindre le seuil de faible revenu. Pour une femme monoparentale avec deux enfants, ce sont 78 heures de travail par semaine qu'elle doit accomplir pour à peine se sortir de la pauvreté. Comment joindre les deux bouts quand, avant de recevoir une première prestation, il peut s'écouler plus d'un mois?
    Dans le travail saisonnier estival, il faut noter que la perte d'emploi coïncide souvent avec la rentrée scolaire. Mesdames, nous croyons sincèrement que le régime d'assurance-emploi doit être modifié et amélioré pour mieux répondre aux besoins des travailleurs et travailleuses. Il faut en faciliter l'accès, décadenasser l'accès, comme disait un éditorialiste de La Presse, en fixant un critère unique d'admissibilité. Il faut augmenter le taux des prestations en le calculant sur les 12 meilleures semaines. Il faut aussi abolir le délai de carence. Ces mesures sont responsables et visent à aider les travailleurs et les travailleuses qui perdent leur emploi.

  (1135)  

    J'aimerais aussi, avant de conclure, vous faire part d'une situation qu'on doit aussi mettre en lumière, celle des aidantes naturelles. Ce sont des femmes qui, souvent, doivent quitter leur emploi pour prendre soin d'un enfant, d'un parent âgé ou d'un parent malade. La loi stipule que ces femmes peuvent recevoir des prestations d'assurance-emploi, mais elles s'y voient refuser l'accès parce qu'elles ne sont pas disponibles pour travailler. Je travaille avec plusieurs groupes communautaires de femmes atteintes de cancer ou de maladies graves, et un cas m'est rapporté fréquemment. Pour vous donner un exemple qui est typique qu'on retrouve dans ma région de Charlevoix, je vous dirai que les gens doivent travailler 600 heures pour avoir accès aux prestations de maladie de l'assurance-emploi. C'est la même chose partout, mais chez nous, le travail saisonnier peut représenter de 450 à 525 heures, tout au plus.
    Comment avoir droit à des prestations de maladie de l'assurance-emploi, quand on n'a pas les 600 heures requises? On doit se battre pour sa vie, dans le cas d'un cancer, et il faut compter plus de 15 semaines pour s'en remettre. Je parle d'un cas de cancer, mais ce pourrait être un cas de dépression majeure, qui prend autant de temps à guérir. Il y a des choses à faire au chapitre des prestations de maladie pour aider les femmes davantage.
    Il existe un large consensus au sein de la société pour réclamer du gouvernement de telles améliorations, particulièrement dans le présent contexte de crise et de difficultés économiques.
    Je vous remercie.

  (1140)  

[Traduction]

    Il reste encore près de quatre minutes. Aimeriez-vous intervenir là-dessus, madame Dépatie?

[Français]

    Je suis Micheline Dépatie, de Saint-Hyacinthe au Québec. Je suis célibataire.
    Je suis sur le marché du travail depuis l'âge de 15 ans. J'ai travaillé, entre autres, 25 ans dans une épicerie à raison de 39 heures par semaine. On a vécu un conflit collectif à la suite d'une demande patronale voulant qu'on soit disponible sept jours et sept soirs, sans un nombre d'heures garanti. C'est ce que vivent présentement les travailleuses des magasins et des épiceries à grande surface. Cela les empêche de cumuler deux emplois.
    Après ce conflit, il y a eu fermeture. Or, à 50 ans, il n'était pas évident pour moi de trouver un autre emploi. En raison de tout ce stress, j'ai reçu un diagnostic de fibromyalgie et de diabète, ce qui m'a contrainte à ne travailler que 25 heures par semaine, au maximum. Je tiens cependant à travailler pour garder mon moral et ma fierté. Je ne tiens pas à être à la charge de l'État.
    Je suis présentement à l'emploi d'une cafétéria à l'Institut de technologie agroalimentaire de Saint-Hyacinthe. Ce travail me permettait de ne travailler qu'environ cinq heures par jour. Il s'agit d'un travail saisonnier; mon horaire suit celui des étudiants et je suis en congé l'été. Au début de cet emploi, je travaillais 25 heures par semaine, mais à cause du contexte économique actuel, on a réduit mes heures de 15 à 9 heures par semaine, au tarif horaire de 8,64 $.
    J'ai rempli ma demande d'assurance-emploi au mois de décembre. Pour cette année, j'ai droit à 21 semaines à 144 $. Présentement, en 9 heures ou 15 heures, je ne pourrai pas accumuler les 600 ou 700 heures nécessaires pour être admissible à l'assurance-emploi. C'est dur pour le moral et stressant. J'ai donc dû abandonner mon logement, devenir aidante naturelle et aller demeurer avec ma mère pour en prendre soin et économiser de l'argent.
     J'aimerais que le nombre d'heures et de semaines d'attente soit réduit. Il n'est pas facile, quand on se retrouve sans emploi, d'attendre cinq semaines pour recevoir un petit chèque de 144 $. On fait son possible pour accumuler le nombre d'heures requis et on ne peut pas se permettre d'être malade ni aucun écart. À chaque paie, on compte ses heures pour vérifier si on sera admissible. J'aimerais que vous puissiez diminuer les heures requises pour être admissible à l'assurance-emploi, de même que les semaines d'attente.
    Merci.

[Traduction]

    Très bien. Merci beaucoup à tous nos invités.
    Nous allons maintenant passer au premier tour de questions, avec sept minutes pour chacun.
    Allez-y, je vous prie, madame Zarac.

[Français]

    Bonjour à tous nos témoins. Merci beaucoup d'être ici.
    Ça fait l'unanimité: l'assurance-emploi actuelle ne répond pas aux besoins. Le fait que 43 p. 100 des personnes ne puissent pas en bénéficier en est la preuve. Ça doit être frustrant pour les personnes qui ont payé des primes. C'est comme si on payait une assurance habitation, qu'il y avait un incendie et qu'on ne pouvait collecter absolument rien. En plus, comme vous l'avez dit, cet argent retourne dans l'économie; c'est un incitatif économique. Je trouve ça vraiment dommage.
    Ma première question s'adresse à M. Battle. Vous avez présenté une nouvelle façon de voir les choses. Un témoin précédent nous a dit qu'il serait intéressant de séparer l'assurance-emploi et le congé de maternité. Vous dites que 90 p. 100 des prestations parentales sont utilisées par les femmes. Je vois une corrélation.
    Les femmes utilisent-elles justement ces prestations parce que ce sont elles qui prennent soin de la famille? Croyez-vous que ce devrait être séparé?

  (1145)  

[Traduction]

    Oui, je suis heureux que vous posiez cette question. Je n'ai pas eu beaucoup de temps pour m'épancher là-dessus.
    Nous oeuvrons depuis un ou deux ans à un énorme projet dans le cadre duquel nous nous penchons sur ce que nous avons appelé l'architecture, comme vous l'avez dit. L'un des problèmes, lorsqu'on parle d'assurance-emploi, un vaste programme de soutien, est qu'il y a ensuite l'aide sociale, et il n'y a pas du tout de lien entre les deux choses. Or, ce sont deux programmes énormes et coûteux qui sont censés aider les Canadiens en chômage.
    Comme vous l'avez dit, notre proposition serait qu'au lieu qu'il y ait un programme d'assurance-chômage unique comme ce que nous avons à l'heure actuelle, il y ait deux programmes. L'actuel programme d'assurance-emploi serait davantage un programme d'assurance sociale car, comme vous l'avez dit, le contrat d'assurance sociale entre les Canadiens qui ont cotisé et le gouvernement est rompu.
    Il est parfaitement choquant que l'on ait un programme d'importance qui ne couvre aujourd'hui que 43 p. 100 des chômeurs. Cela est incroyable. Les gens sont en train de se faire avoir; ils n'en ont pas pour leur argent. Nous aurions une assurance-chômage — un programme d'assurance-chômage plus solide. L'actuel taux de remplacement du revenu est de 55 p. 100, ce qui est très faible; nous aimerions qu'il passe à 70 ou 75 p. 100. Il était de 66 p. 100 dans les années 1970. Un tel programme d'AE n'aurait pas de composante régionale, ce qui est à mon sens un aspect pervers de l'actuel régime et qui plus est est très injuste envers les Canadiens.
    Le problème est que vous allez toujours avoir des personnes qui entrent sur le marché du travail et qui en sortent ou qui ne parviennent qu'à se trouver un emploi à court terme ou à temps partiel, ou encore qui ne recherchent que ce genre de travail et qui ne vont en réalité jamais véritablement s'insérer dans le cadre d'un programme d'assurance sociale comme l'assurance-chômage. Ce que nous pensons c'est qu'il y aurait lieu de créer un genre de programme différent pour aider ces personnes, afin que l'on puisse, grâce aux deux programmes, couvrir tous les Canadiens en chômage.
    Une option pour les prestations parentales et de maternité serait qu'on les retire du programme d'assurance-emploi pour les verser dans ce nouveau programme dont nous parlons, un programme de revenu temporaire, et que ce soit par ce mécanisme que les gens touchent leurs prestations. Comme vous le savez, le Québec est déjà engagé dans ce genre de réforme, ce qui est, je pense, une bonne chose.
    Il est également possible que l'on rattache d'autres prestations dites « spéciales » à ce nouveau programme. Le nouveau programme ne serait pas fondé sur les primes, comme c'est le cas du régime d'assurance-emploi. Il serait financé à même les recettes générales, comme c'est le cas d'autres programmes, dont les pensions de vieillesse.
    Il me faudrait m'arrêter là, mais nous avons également envisagé des changements à l'assistance sociale, ce nouveau programme fédéral de revenu temporaire que nous envisageons venant soulager les provinces d'une part importante de leur volume de cas sociaux, leur permettant ainsi de se concentrer davantage sur la préparation à l'emploi. Nous avons un genre d'architecture qui comporte plusieurs blocs. Mais vous avez tout à fait raison.
    Mon souci est que même si l'on établissait un critère d'admissibilité uniforme — et je suis à ce sujet d'accord avec le CTC — et améliorait la durée et le calcul des prestations, il demeurerait un important volant de Canadiens en chômage qui ne cadreraient tout simplement pas avec ce genre de programme. Voilà comment nous voyons les choses.
    Madame la président, ai-je encore du temps?
    Oui, il vous reste une minute et demie.

[Français]

    Je pose ma deuxième question. Environ la moitié de l'argent perçu sert à la formation. Or, la plupart des femmes ne suivent pas le programme de formation. À mon avis, c'est bien qu'il y ait de la formation puisque cela permet aux femmes d'obtenir de meilleurs emplois et de connaître de nouvelles technologies.
    Croyez-vous que 50 p. 100 est un peu élevé? Pourrait-on utiliser cet argent pour avoir de meilleurs critères?

  (1150)  

[Traduction]

    L'une des difficultés est que si vous regardez certains des programmes de formation traditionnelle — les programmes d'apprentissage, par exemple —, 96 p. 100 des fonds réservés aux stages d'apprentissage bénéficient aux hommes. Encore une fois, il y a toute cette autre discussion au sujet des femmes dans les métiers. L'on butte sans cesse sur la question de l'accès, qu'il s'agisse de 350 ou de 360 heures, car vous ne pouvez pas obtenir la formation si vous n'obtenez pas l'accès. Vous vous retrouvez exactement dans la même situation, peu importe ce que vous faites. Vous pouvez dire que nous allons améliorer la formation et que nous allons améliorer les possibilités pour les femmes, mais si elles n'y ont pas accès, alors vous revenez sans cesse à la case départ.
    J'aimerais ajouter que lorsque le gouvernement est passé d'un calcul fondé sur les semaines à un calcul fondé sur les heures, le mouvement syndical y a donné son appui, car nous pensions que les travailleurs à temps partiel devraient pouvoir y contribuer et en bénéficier.
    Il me faut vous demander de conclure, s'il vous plaît.
    Très bien. Toujours sur cette question, nous n'avions pas prévu que les gouvernements allaient fixer un nombre d'heures si élevé que des personnes qui, pourtant, y contribuent n'y soient pas admissibles.
    Mon dernier exemple est le cas d'une femme qui travaillait il y a quelques années chez Canada Safeway, à Regina, en Saskatchewan. Elle disait avoir eu deux enfants, l'un dans le cadre du régime hebdomadaire et l'autre dans le cas du régime horaire. Elle ne s'était pas rendue compte du changement. Elle a dit que nous avions eu un premier ministre qui avait déclaré que le gouvernement n'avait rien à faire dans les chambres à coucher du pays. Eh bien, devinez quoi? Le gouvernement est de retour dans les chambres à coucher du pays, car il vient changer les circonstances dans lesquelles elle peut avoir ses enfants.
    Nous passons maintenant à Mme Demers, pour sept minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Battle, mesdames, je vous remercie d'avoir accepté de nous rencontrer pour nous aider à mieux comprendre la problématique de l'assurance-emploi.
    La semaine dernière, nous avons reçu des gens de Statistique Canada. Il y a un important écart entre les données qu'ils nous ont fournies et ces chiffres. J'ai de la difficulté à comprendre pourquoi. Par exemple, le pourcentage de personnes susceptibles d'être admissibles à l'assurance-emploi était de 48 p. 100 pour les femmes, alors que de votre côté, vous avez parlé de 32 p. 100. Pour ce qui est des hommes, le taux était de 53 p. 100. Le total des personnes au chômage susceptibles d'être admissibles à l'assurance-emploi était d'environ 57 p. 100. Ces statistiques qu'on nous a fournies indiquaient également que la plupart des femmes travaillant à temps partiel, soit 78,4 p. 100, le faisaient volontairement, pour des raisons autres qu'économiques. Ce pourcentage était de 75,4 p. 100 chez les hommes.
    Je pense que Statistique Canada est reconnu à l'échelle du monde comme une des entités les plus compétentes en matière de statistiques. Je vous écoute et j'écoute Mme Dépatie, et je me dis que ce que vous nous dépeignez ici est très différent. Comment se fait-il qu'il y ait autant de disparités? Pouvez-vous m'expliquer ça?

[Traduction]

    Ayant travaillé pendant longtemps dans différents domaines, je dirais que tout réside dans la question de savoir ce qui est volontaire. Je travaillerai peut-être volontairement à temps partiel si je ne parviens pas à trouver des services de garde d'enfants. Ce sera mon choix: je choisirai de travailler à temps partiel du fait que je n'aie pas d'autres options.
    En fait, les études que nous avons effectuées, et celles d'autres agences indépendantes, montrent très clairement que si les appuis sont en place pour que les femmes de toutes les catégories d'âge puissent travailler à temps plein, c'est cette option qu'elles choisiront; je pense que ce sont environ 66 p. 100 des femmes qui feraient cela.
    Si vous ne parvenez pas à vous trouver le poste ou les horaires qui vous permettent de vous organiser, ou... Comme l'a dit ma consoeur, il y a des femmes qui occupent deux ou trois emplois à temps partiel en même temps. Ces femmes occupent-elles volontairement ces deux ou trois emplois à temps partiel? Non, elles essaient de tirer l'équivalent d'un emploi à plein temps d'une variété d'emplois à temps partiel. Le travail à temps partiel est synonyme de pauvreté à temps plein.

[Français]

    Je présume que les statistiques sont faites à partir de questionnaires, de sondages. Est-il possible que les questionnaires ne soient pas suffisamment explicites pour rendre une image conforme à ce qui se passe?
    Madame Dépatie, vous dites avoir perdu votre emploi à l'âge de 50 ans. Croyez-vous qu'un programme destiné davantage aux femmes plus âgées ayant perdu leur emploi vous aurait aidée? Je peux très bien comprendre ce que signifie perdre son emploi et ne pas vouloir vivre aux dépens de l'État. D'ailleurs, je vous félicite de vouloir continuer à travailler malgré les difficultés que vous traversez.
    Croyez-vous que le Programme d'adaptation des travailleurs âgés, le PATA, vous aurait aidée à faire la transition entre ce que vous connaissiez et quelque chose d'autre?

  (1155)  

    Probablement. Quand j'ai reçu les papiers médicaux, je me suis inscrite à un programme qui, je pense, était relié à l'assurance-emploi. L'objectif de ce programme était d'aider les gens malades à trouver un nouvel emploi. Ça a traîné en longueur parce que ces gens devaient attendre leurs octrois, puis ceci ou cela. Finalement, je n'ai pas pu me permettre d'attendre plus longtemps: je n'avais plus un sou pour vivre. J'ai dû trouver un emploi. J'en ai trouvé un qui me convenait compte tenu de mon état de santé. En 1999, je gagnais 16 $ l'heure. Je ne pense pas qu'on choisisse de se retrouver à temps partiel avec un salaire de 8 $ l'heure. Je n'ai pas de mari qui me fait vivre. J'ai dû faire le deuil de bien des choses pour obtenir une meilleure qualité de vie et continuer à travailler.
    Je vous félicite, madame Dépatie.
    Monsieur Battle, madame Byers, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Merci.

[Traduction]

    Puis-je intervenir, pour en quelque sorte exhorter le comité à faire quelque chose?
    En prévision de la rencontre d'aujourd'hui j'avais cherché à obtenir certaines données statistiques. La principale source d'information sur l'assurance-emploi est le bilan annuel que publie l'AE ou plutôt la commission. Si vous le parcourez, vous verrez qu'il est presque incroyable qu'il contienne si peu d'informations avec une ventilation selon le sexe. Il ne s'y trouve presque rien au sujet des différences entre les hommes et les femmes, les genres de statistiques dont nous discutons ici aujourd'hui.
    J'ai consulté le Système canadien d'information socio-économique, CANSIM, qui est la base de données de Statistique Canada sur laquelle vous pouvez acheter des données. Soit dit en passant, il nous faut payer pour obtenir ces données. Je représente une petite organisation sans but lucratif. Il m'en a en fait coûté environ 400 $ pour me préparer pour ma comparution devant vous aujourd'hui, car il faut acheter ces informations auprès de Statistique Canada, même si vous êtes contribuable et tout le reste. Il s'agit là encore d'une chose dont je voulais vous parler.
    L'un des aspects que je voulais examiner était la valeur des prestations moyennes dans le temps, tout simplement pour voir si elles augmentent, diminuent, ou autre, pour ensuite les convertir en dollars constants. Il n'y a aucune ventilation selon le sexe. Il y a juste un chiffre d'ensemble. Nous sommes en 2009 et le gouvernement continue de produire des renseignements qui sont tout à fait insatisfaisants. Cela est incroyable. Je ne sais pas comment il se fait qu'il puisse s'en tirer ainsi.
    Puis-je ajouter quelque chose là-dessus? Je pense que toutes les personnes ici sont en train de dire qu'avec les statistiques, on ne creuse pas suffisamment loin pour obtenir le détail qu'il faut. Et il y a également une autre couche. Il nous faut être très clairs en ce qui concerne les femmes de couleur, les femmes autochtones et les femmes handicapées. Il importe de creuser plus loin en la matière.
    Mais c'est un petit peu comme lorsqu'ils parlent de ce qu'est le taux de chômage. Si vous êtes employé pour huit heures ou quatre heures ou autre, on considère que vous êtes employé, non pas que cela vous suffise pour vivre. L'on regarde les statistiques au sujet de ce qu'est le taux de chômage, mais nous savons qu'en réalité le taux de chômage est beaucoup plus élevé. C'est la même chose qui se passe avec la différence entre les sexes: l'on ne creuse pas la question et l'on ne tient pas compte de certains des autres éléments, comme je le disais — par exemple le fait d'avoir ou non des services de garde d'enfants.
    Soit dit en passant, cela fait une différence si les femmes ont droit à l'équité salariale, car en l'absence d'équité salariale — devinez quoi? — nos prestations vont être inférieures même si nous occupons des postes mieux rémunérés.

[Français]

    Est-ce qu'il me reste du temps, madame la présidente?

[Traduction]

    Non, ce sera tout.

[Français]

    Merci, madame la présidente.

[Traduction]

    Madame O'Neill-Gordon.
    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à remercier les témoins de s'être joints à nous ce matin.
    Ma question s'adresse à Ken Battle. Comme nous le savons, la situation sur le plan du chômage varie grandement d'un bout à l'autre du pays. Je sais, comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, qu'il y a ce qu'on appelle une norme variable d'admissibilité, ou NVA, qui sert à assurer la souplesse requise pour réagir automatiquement aux changements survenant dans les marchés du travail locaux, les exigences en matière d'admissibilité diminuant et la durée des prestations augmentant au fur et à mesure de la hausse du taux d'emploi.
    Pourriez-vous s'il vous plaît m'expliquer comment fonctionne ce système? Je crois comprendre qu'à Oshawa et à Windsor le régime a eu une incidence positive sur l'accès à l'AE, alors comment cela fonctionne-t-il dans ce genre de situation?

  (1200)  

    Eh bien, d'après ce que j'en sais, cela correspond plus ou moins à ce que vous avez dit. Il y a, je pense, quelques problèmes avec cette norme variable d'admissibilité. Il y en a un que j'ai mentionné, et que je répéterai, mais il y en a un autre dont je n'ai pas fait état. L'assurance-chômage — ce doit être clair pour les membres du comité — est un programme très complexe. J'oeuvre dans ce domaine depuis 30 et quelques années, et l'assurance-emploi et l'aide sociale sont en fait les deux programmes qui sont les plus difficiles à comprendre, car ils sont semblables, en ce sens qu'ils sont incroyablement compliqués et qu'ils ne sont pas transparents. Il est très difficile de comprendre véritablement ce qui se passe.
    La norme variable d'admissibilité rend d'après moi incompréhensible pour les Canadiens le programme d'assurance-emploi. Premièrement, je ne pense pas que les Canadiens comprennent vraiment que le montant d'argent qu'ils vont toucher, voire même leur admissibilité à des prestations, dépendent de l'endroit où ils vivent. Ce que je veux dire par là est qu'une personne en chômage est une personne en chômage, qu'elle vive dans une zone à faible taux de chômage ou dans une zone à fort taux de chômage. Je ne vois pas comment on peut le savoir. Vous savez, les primes ne sont pas établies en fonction des zones de chômage. Les primes que nous versons à l'appui du régime ne sont pas variables; nous payons tous les mêmes cotisations, bien sûr. Mais ce que vous touchez en bout de ligne dépend de l'endroit où vous vivez.
    Il est à mon sens inique que nous ayons un programme qui soit à cet égard si discriminatoire.
    Si vous avez une personne qui est en chômage et qui habite une région à faible taux de chômage, cela ne signifie pas forcément qu'il lui sera plus facile de se trouver un emploi qu'une personne en chômage vivant dans une région à fort taux de chômage. Cela ne tient tout simplement pas debout pour moi. Voilà le problème que j'ai.
    Et cela a une incidence non seulement sur votre accès à l'AE, mais également sur la durée de vos prestations, car cela aussi varie selon la région. Encore une fois, donc, vous avez deux personnes, et disons qu'elles réussissent toutes les deux à obtenir l'assurance-emploi; selon le taux de chômage existant dans la région où elles vivent, elles vont y avoir droit pendant plus ou moins longtemps. Ce que je veux dire par là c'est que je ne sais pas comment vous pouvez dire à quelqu'un: dommage, vous n'y avez droit que pendant 20 semaines, mais vous y avez droit pendant 30 semaines, parce que vous habitez une zone de chômage différente.
    Non seulement cela brouille notre compréhension du programme, mais je trouve cela parfaitement injuste. Je ne vois pas comment la chose est possible. Je veux dire par là qu'il y a deux grandes injustices: primo, la plupart des personnes en chômage ne sont pas admissibles au régime et, deuxio, si vous y êtes admissible, ce que vous touchez dépend du taux de chômage dans votre région. Je ne peux accepter ni l'une ni l'autre des ces contraintes.
    Dans votre publication intitulée Towards a New Architecture forCanada's Adult Benefits vous proposez de réformer le régime d'AE en partie grâce à l'intégration de préférences régionales dans le revenu temporaire. Pourriez-vous expliquer comment cela fonctionnerait, compte tenu du fait que la situation sur le plan du chômage varie d'une région à une autre?
    Idéalement, je dirais qu'aucun régime d'assurance-chômage, qu'il s'agisse du régime d'AE que nous avons ou du deuxième, que nous proposons, ne devrait tenir compte des taux de chômage. Je ne pense pas que ce soit juste et je n'y vois aucune justification. Cependant, nous vivons dans un monde de politique — ceux d'entre nous qui oeuvrons dans le domaine de la politique publique — et l'assurance-chômage est l'un des programmes les plus controversés et les plus politiquement dangereux à tenter de réformer.
    La réalité, donc, est que si vous dites que vous allez créer un nouveau régime sans distinction régionale aucune en fonction du taux de chômage, il va y avoir des perdants et des gagnants. Il va y avoir des personnes qui vont toucher des prestations inférieures à ce qu'elles obtenaient en vertu de l'ancien régime. C'est toujours le problème lorsque vous avez un vieux système irrationnel et une proposition rationnelle. Si vous adoptez la proposition rationnelle, il y aura des personnes qui toucheront moins dans le cadre du nouveau régime que dans le cadre du régime antérieur.
    La raison pour laquelle nous avons proposé cela est la suivante. Si, pour des raisons politiques, le gouvernement insistait pour conserver un certain aspect du chômage régional — ce pourrait également être plus simple, car il n'est pas nécessaire qu'il y ait autant de régions —, alors cela pourrait être intégré dans ce régime de revenu temporaire. Vous pourriez l'y intégrer, si vous le vouliez. Ou bien, cela pourrait varier selon la province. L'un de aspects intéressants de la prestation fiscale pour le revenu de travail — qui est en vérité l'une des formidables nouvelles choses qu'ait offertes l'actuel gouvernement — est que le modèle du programme, bien qu'il s'agisse d'un programme fédéral, puisse être modifié par les provinces. Cette flexibilité est réellement un très bon élément, et c'est le genre de fédéralisme qu'il nous faut — vous savez, les différents paliers de gouvernement.
    Avec, donc, le genre de proposition que nous faisons, vous pourriez avoir une situation dans laquelle le fédéral et les provinces travailleraient ensemble pour varier les règles d'une province à l'autre, même s'il s'agit d'un programme fédéral, et cela pourrait tenir compte, si vous voulez, des taux de chômage.
    Je n'en aime pas l'idée, mais le côté politique est tel que lorsque vous apportez un changement, vous allez toujours avoir des problèmes avec... Je n'aime pas employer le terme « perdants », mais nous parlons de cela en travail d'analyse politique. Il y a des personnes qui ne vont pas toucher autant qu'auparavant.

  (1205)  

    Puis-je ajouter quelque chose? La réalité est que, si vous êtes au chômage, vous devez prouver que vous vous cherchez du travail. L'on présume que si vous habitez une région à faible taux de chômage vous aurez de meilleures chances de vous trouver d'autres options, selon vos circonstances.
    Vous revenez sans cesse là-dessus. Il n'est aucunement nécessaire qu'il y ait ces divisions, car il y a encore d'autres pressions qui s'exercent sur les gens.
    Merci beaucoup.
    Madame Mathyssen.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous tous d'être ici et de nous livrer vos connaissances.
    Madame Byers, je sais que nous parlons d'assurance-emploi, mais vous avez fait mention de l'équité salariale et de son incidence sur la capacité d'une femme d'être admissible à des prestations d'assurance-emploi.
    Nous avons le nouveau projet de loi sur la rémunération équitable. Pourriez-vous, premièrement, étayer un peu ce que vous disiez. J'ai eu l'impression qu'il y avait plus à dire au sujet de l'équité salariale et de son incidence sur l'AE. Pourriez-vous nous livrer votre réaction au projet de loi sur la rémunération équitable?
    J'aimerais traiter de manière générale de l'équité salariale dans son application en l'espèce. Les femmes dans le secteur public fédéral ont, bien sûr, lutté pendant longtemps pour obtenir l'équité salariale. Cela a, en passant, bénéficié à d'autres femmes également. Cela a amené une augmentation des salaires payés ailleurs. La réalité est que nombre d'entre nous autour de cette table luttons depuis très très longtemps pour obtenir une rémunération équitable pour les femmes.
    Pendant les années 1980, nous avons fait quelques pas en avant, mais voici que nous reculons maintenant. En moyenne, nous en sommes à environ 70,5 cents au dollar pour les femmes. Pour ce qui est des femmes à l'échelle du pays, c'est 64 cents au dollar si vous êtes une femme de couleur, 46 cents au dollar si vous êtes une femme autochtone, et les femmes handicapées en sont à peu près à la moyenne nationale, mais elles affichent un taux de chômage de 75 p. 100. Tout cela intervient.
    Si vous êtes syndiqué, ce qui est le cas de nombreux fonctionnaires, c'est environ 93 cents au dollar. Très clairement, cela empêche les femmes de faire progresser leur salaire dans le secteur syndiqué, ce qui a un effet en cascade sur les autres.
    Cela a une incidence sur l'assurance-emploi. Même lorsque vous prenez les femmes qui travaillent à plein temps tout au long de l'année, si nous gagnons moins en moyenne que les travailleurs du sexe masculin, lorsque nous nous retrouverons en chômage, nos prestations d'AE vont elles aussi être inférieures.
    C'est toute la boucle qui intervient dans cette lutte des femmes pour obtenir l'équité salariale. Lorsqu'elles sont au chômage, du fait de n'avoir pas bénéficié de l'équité salariale, elles n'ont même pas l'équité dans le cadre du régime d'AE, qui est fondé sur ce que vous avez contribué. Nous avons en la matière bouclé la boucle.
    Ce qui s'est passé sur le plan de l'équité salariale est absolument inique. Il n'y a pas équité salariale, mais iniquité salariale dans la fonction publique. Cela frappe les femmes à tous les âges et dans tous les stades de leur vie. Peu importe que vous soyez une femme en chômage, une jeune femme, une femme au milieu de sa carrière ou une femme âgée. Si vous avez gagné moins pendant votre vie, vous toucherez une plus petite pension. La seule chose que vous avez plus de chances de connaître c'est la pauvreté. Voilà ce que vous avez de meilleures chances de vivre.

  (1210)  

    Merci.
    Il y a eu d'importantes pertes d'emplois dans le secteur manufacturier. Je vis avec cela tous les jours dans ma circonscription. Les demandes d'assurance-emploi à London ont en fait augmenté de 75 p. 100.
    Disposez-vous de quelque information quant à l'incidence qui a été relevée pour les hommes et pour les femmes? Les emplois dans le secteur manufacturier paient sensiblement mieux que les emplois à salaire minimum. Les femmes sont-elles touchées de façon disproportionnée par la disparition de ces emplois dans le secteur manufacturier? Auriez-vous des renseignements là-dessus?
    Oui, nous en avons, et nous mettons sans cesse à jour nos dossiers avec les statistiques tragiques que l'on relève malheureusement.
    Souvent, lorsqu'on parle de la crise dans le secteur manufacturier, les gens continuent d'y voir un visage masculin. Il y a très clairement des centaines de milliers d'hommes qui ont perdu leur emploi dans le secteur manufacturier. Mais la réalité est que même si les femmes comptent, je pense, pour environ 30 p. 100 des emplois dans le secteur manufacturier, en ce qui concerne le pourcentage d'emplois perdus... Encore une fois, les chiffres sont compliqués. Il y a plus d'hommes que de femmes qui travaillent dans le secteur manufacturier, mais si l'on regarde le pourcentage de personnes qui y ont perdu leur emploi, c'est le cas de 9 p. 100 des femmes comparativement à 7 p. 100 des hommes.
    Ce que l'on constate, donc, c'est que les femmes perdent leur emploi de manière disproportionnée, et, encore une fois, c'est la vieille histoire du «  dernier embauché, dernier mis à pied ». Nous perdons donc nos emplois de manière disproportionnée, et il nous faut mettre le visage des femmes sur la crise du secteur manufacturier, car il y a en effet beaucoup de femmes qui travaillent dans le secteur automobile. Je connais le cas de deux jeunes femmes, l'une dans la vingtaine et l'autre dans la trentaine, et elles ont toutes les deux perdu leur emploi. Il y en a beaucoup d'autres encore comme elles, mais il y a également beaucoup d'autres femmes dans quantité d'autres volets du secteur manufacturier et qui ont connu le même sort.
    Lorsque vous songez aux pertes d'emploi, vous ne pensez pas forcément à l'usine Hershey, mais elle appartient elle aussi au secteur manufacturier et ce sont là encore de bons emplois que des femmes ont perdus.
    Encore une fois, ce que nous constatons est que des femmes sont en train de perdre leur emploi et ce qu'il y a pour les remplacer ce sont des emplois à temps partiel ou occasionnels, sans avantages sociaux et à bas salaire. Et — devinez quoi? —, lorsque ces emplois-là disparaîtront, ces femmes ne pourront pas accéder à l'AE, n'y étant pas admissibles du fait de ne pas avoir accumulé suffisamment d'heures.
    Merci, madame Mathyssen. Votre temps est écoulé. Oh, il vous reste en fait une minute. Vous pourrez peut-être poser votre question et quelqu'un pourra comprimer sa réponse.
    Il semble que ce que décrivait Mme Dépatie soit une spirale dégressive.
    La ministre des Ressources humaines a déclaré ne pas vouloir verser de prestations d'AE à des travailleurs qui vont tout simplement rester assis sans rien faire. Il me semble qu'en dépit de vos meilleurs efforts vous vous soyez retrouvée dans une spirale dégressive. Vous voulez travailler. Quel sentiment vous inspire le fait d'être qualifiée de personne qui souhaite simplement traîner sans rien faire? Comment réagissez-vous à cela?

[Français]

    Certains choisissent peut-être de ne rien faire, mais ce n'est pas mon cas. La plupart des femmes ne le choisissent pas. Je n'ai pas choisi de rester chez moi; je n'ai pas eu le choix. Je suis devenue aidante naturelle à cause de l'aspect monétaire, mais je ne pense pas qu'on choisisse de s'asseoir chez soi. J'aurais pu, avec mes papiers médicaux, m'asseoir chez moi et recevoir de l'argent de l'État. Je crois que je reçois présentement moins que si j'avais reçu de l'aide sociale, mais j'ai choisi, pour ma fierté et ma santé morale, de travailler, mais de travailler le nombre d'heures que je peux et de donner mon maximum. J'aime mieux travailler 25 heures et le faire à 150 p. 100 que d'être chez un employeur 40 heures et de ne travailler que 20 heures, dans le fond, et de n'être pas capable de les faire. J'ai ma fierté, j'y tiens, et je tiens à travailler aussi longtemps que je le pourrai, mais tout en respectant ma santé et mon bien-être aussi. Je ne peux pas faire autrement.

  (1215)  

[Traduction]

    Merci, madame Dépatie.
    Avant d'entamer le deuxième tour, j'ai pensé que les gens aimeraient peut-être faire une petite pause, auquel cas nous pourrions suspendre la séance pendant environ une minute. Chacun pourra aller se chercher quelque chose à manger et revenir s'asseoir.
    Si les témoins ont faim, ils pourraient eux aussi se servir.

    


    

  (1220)  

    Nous allons reprendre.
    Nous allons entamer le deuxième tour. Ce sera cinq minutes, madame Sgro.
    Merci beaucoup.
    Je remercie tous les témoins d'être venus. Je tiens à remercier tout particulièrement Mme Dépatie, qui a choisi de venir ici aujourd'hui nous livrer son histoire. Je ne pense pas que son histoire soit rare. J'entends sans cesse dans ma circonscription des histoires comme la sienne, des histoires de personnes confrontées à ces mêmes défis.
    Comment entrevoyez-vous votre situation au cours des 10 prochaines années sur le plan perspectives d'emploi? Je vous sais désireuse de conserver votre indépendance et de travailler. Je pense que tout le monde souhaite travailler, car c'est cela qui nous procure de la satisfaction dans nos vies. Compte tenu des régimes de soutien qui sont en place à l'heure actuelle, à quoi vous attendez-vous dans les années qui viennent?

[Français]

    J'espère que l'aide aux femmes sera plus grande, justement parce que je tiens à travailler le plus longtemps possible. À cause de mon état, je dois faire des choix, mais je tiens à continuer à travailler. On a besoin d'avenues plus normales que la diminution des heures ou des délais de carence pour arriver à vivre. On a beau faire des deuils et couper sans cesse, mais à un moment donné, on ne peut plus couper.
    C'est faux de dire qu'on choisit de travailler à temps partiel. Si j'avais le choix, je retournerais sûrement travailler à temps plein, et aujourd'hui je gagnerais un gros salaire et je pourrais faire la belle vie, ce que je ne peux plus me permettre. C'est une faible proportion des gens qui choisissent de travailler à temps partiel. Je ne crois pas que les femmes monoparentales qui ont de la difficulté à joindre les deux bouts et qui cumulent deux ou trois emplois quand elles le peuvent fassent ce choix.

  (1225)  

    Ce n'est pas un choix facile.
    Exactement.

[Traduction]

    Pour ce qui est de la perspective féminine, les femmes sont nombreuses à travailler à temps partiel étant donné qu'il leur faut tout caser autour de la famille. C'est une simple réalité. Il vous faut travailler autour de l'emploi du temps de vos enfants, de l'emploi du temps de votre époux, de l'emploi du temps de tout le monde. Pour que cela puisse fonctionner, il vous faut travailler à temps partiel. En conséquence, le travail à temps partiel et la pauvreté à temps plein décrivent parfaitement la situation des femmes. Cela compte pour une grosse partie de la raison pour laquelle les femmes se trouvent dans la situation qu'elles connaissent.
    M'adressant maintenant à Mme Byers et à M. Battle, nous apprécions beaucoup vos commentaires et votre désir de voir des changements. Je ne peux qu'imaginer que lorsqu'ils ont apporté plus tôt les changements au régime d'AE, les prestations région par région... Si vous habitez Toronto, vous avez de bien meilleures chances de trouver beaucoup plus rapidement un emploi que si vous habitez Thunder Bay. Il s'agit d'un aspect très dangereux à changer. Vous le savez. Les gens sont nombreux à avoir payé le prix, politiquement, de bien des façons, pour les changements adoptés dans le dossier de l'AE.
    En essayant de trouver un régime qui soit juste, surtout pour les femmes... À vous entendre aujourd'hui, je me suis mise à penser que nous avons pour les femmes en congé de maternité des prestations de maternité qui relèvent de l'AE, mais il nous faudrait peut-être avoir un régime distinct pour les femmes, en reconnaissance de toutes les questions auxquelles celles-ci sont confrontées.
    Nous pouvons dire que nous sommes égales. Nous pouvons prononcer toutes les belles paroles que nous voulons. La réalité est que les femmes sont confrontées à quantité d'autres obstacles qui entravent leur accession à l'emploi à plein temps. Si nous voulons parler de changement et de refonte du système d'AE, devrions-nous isoler les femmes? Je dis les femmes car nous parlons des femmes en particulier, mais devrions-nous essayer de réformer le système de manière à reconnaître plus particulièrement les défis auxquels les femmes se trouvent confrontées?
    Je ne pense pas qu'il nous faille séparer le système et avoir un régime d'AE pour les femmes et un régime d'AE pour les hommes. Ce qu'il nous faut faire c'est moderniser le régime d'AE afin qu'il reconnaisse les types d'emplois que différentes personnes peuvent occuper — pour veiller à ce que les gens y aient accès —, qu'il s'agisse de travail à temps partiel, de travail occasionnel, de travail temporaire ou autre.
    Si nous apportions de tels changements... Au Congrès du travail du Canada, nous prônons depuis longtemps la nécessité de moderniser le régime d'assurance-chômage. Il nous faut reconnaître les genres de travail que font les gens.
    Encore une fois, il nous faut revenir à toute la question des trois choses qui doivent être faites. Il y a l'accès, thème sur lequel nous sommes tous revenus. Il y a les niveaux de prestations: il vous faut avoir un niveau de prestations qui soit adéquat pour la personne qui se cherche un autre emploi. Et il y a la durée des prestations. Puis il y a plusieurs autres choses.
    Madame Byers, excusez-moi. Je ne vais pas vous couper la parole, mais si les réponses pouvaient être plus concises... Je pense que Mme Sgro souhaitait que M. Battle réponde à sa question, et vous avez déjà très largement dépassé les sept minutes.
    Je vous en prie, terminez votre explication.
    Tout ce que je dis est que je ne pense pas qu'il faille scinder le régime. Ce qu'il faut c'est reconnaître qu'il y a dans le régime des partis pris sexospécifiques. Éliminez les partis pris sexospécifiques et l'équité deviendra alors, bien franchement, beaucoup plus évidente.
    Monsieur Battle.
    Très rapidement, je pense qu'il nous faut avoir deux régimes, mais non pas un pour les femmes et un autre pour les hommes. Je ne pense pas que nous puissions modifier suffisamment l'AE pour tenir compte des changements sur le marché du travail, de la croissance des emplois non conventionnels. C'est pourquoi nous proposons un autre type de programme, qui aiderait les personnes qui sont de nouveaux entrants sur le marché du travail, ou qui sont travailleurs autonomes ou qui travaillent à temps partiel ou autre, personnes qui ne trouveront jamais très bien leur place dans le cadre d'un véritable régime d'assurance sociale. En même temps, nous voulons un programme d'assurance sociale plus solide que celui que nous avons à l'heure actuelle.
    Voilà une partie de la logique qui sous-tend notre proposition, ce afin d'avoir un programme qui corresponde aux nouvelles réalités du marché du travail.
    Merci beaucoup.
    Madame Davidson.

  (1230)  

    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup à tous nos invités d'aujourd'hui. Nous avons, je pense, entendu de très intéressantes idées.
    J'aimerais faire quelques commentaires, après quoi j'aurai une ou deux questions. Je vais dire ce que j'ai à dire, pour ensuite entendre vos réponses.
    L'une des choses qui a été dite plusieurs fois ici aujourd'hui est que la plupart des gens ne choisissent pas d'être en chômage et de rester assis à ne rien faire. Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus. Nous représentons tous des résidents de nos circonscriptions dont nous savons qu'ils se démènent pour se trouver des emplois et rester actifs.
    Madame Dépatie, je tiens réellement à vous féliciter d'être ici et de nous avoir raconté votre histoire. Comme cela a été dit, malheureusement, votre cas n'est pas unique. Il existe de nombreuses histoires semblables. Je vous félicite pour votre force de caractère ainsi que pour la façon dont vous vous êtes attaquée aux problèmes.
    Il a également été dit que le régime d'AE est fondé sur ce que l'on a contribué. Je pense, madame Byers, que c'est vous qui avez dit cela. Si ce n'est pas la bonne méthode, alors sur quoi le régime devrait-il être fondé, et comment le financeriez-vous? Voilà une question.
    Deuxièmement, j'ai constaté, pendant mon travail de recherche, que le Congrès du travail du Canada avait proposé plusieurs recommandations en vue de réformes, dont l'augmentation de la période de prestations pour la porter à 50 semaines, ce qui est quelque chose que nous avons recommandé. L'investissement d'une partie du surplus dans de meilleurs programmes de formation et d'adaptation de la main-d'oeuvre est encore une autre chose que nous avons recommandée. Pourriez-vous nous expliquer pour quelle raison vous appuieriez ces mesures et de quelle manière les deux que je viens de mentionner aideraient les Canadiens?
    L'autre chose que j'aimerais souligner est la divergence dans les statistiques dont nous disposons. Nous avons discuté des femmes qui travaillent à temps partiel. Les chiffres que nous avons obtenus à notre dernière réunion disaient que les femmes travaillant volontairement à temps partiel comptaient pour 78,4 p. 100, tandis que le pourcentage était de 75,4 p. 100 pour les hommes. Je trouve très difficile de tirer véritablement au clair la situation lorsque nous sommes sans cesse confrontés à des chiffres différents. Ce sont les chiffres de Statistique Canada que je viens de vous donner.
    Voilà les commentaires que j'avais à faire, et je vous invite maintenant à répondre.
    Très bien. Et je sais que la présidente souhaiterait que je fasse vite.
    Premièrement, j'aimerais revenir sur la divergence dans les statistiques. C'est précisément ce dont nous avons parlé plus tôt, soit que l'on ne creuse pas suffisamment pour déterminer pourquoi c'est volontaire.
    Je peux très bien choisir volontairement de travailler à temps partiel parce que je n'ai pas de service de garde d'enfants me permettant de faire autrement. Si j'ai un conjoint, je vais peut-être travailler à temps partiel parce que je sais que je pourrai ainsi m'organiser autour de l'horaire de mon conjoint. Et bien des fois c'est la femme qui fait ce choix du fait qu'elle ne gagne pas autant.
    En ce qui concerne le fait que ce soit fondé sur les cotisations, ce que nous disons est qu'il y a d'autres éléments sociétaux qui interviennent ici. La question de l'équité salariale ou de l'iniquité salariale cadre très clairement dans ce débat, mais cela cadre également dans la discussion de la question de savoir comment les femmes peuvent cotiser si elles ne travaillent pas à plein temps tout au long de l'année.
    Alors, oui, il va y avoir des écarts quant au niveau de revenu, mais ceux-ci sont exacerbés par les types d'emplois que nous ne choisissons pas toujours volontairement d'accepter, car nous occupons des emplois à temps partiel et nous aimerions bien avoir un emploi à plein temps.
    Pour ce qui est de porter la durée de prestations à 50 semaines, nous pensons que cela est important, absolument. Nous dirions que cela devrait être augmenté de manière générale, afin que les gens de partout au pays aient ce même droit, car, comme l'a souligné M. Battle, lorsque vous êtes en chômage, vous êtes en chômage. Il y a d'autres choses qui interviennent ici, comme je le disais. Mais la réalité est que si vous n'y avez pas accès, vous ne pouvez pas avoir les 50 semaines.
    Il en est de même en ce qui concerne la formation. Nous croyons, certes, dans la formation. Mais j'ajouterais que ce dont les gens dans cette pièce n'ont pas parlé est le fait qu'il y a un surplus de 55 milliards de dollars que les gens ont versé dans le régime d'assurance-emploi et qu'il y a des gens qui, bien qu'y ayant contribué, ne peuvent toujours rien en retirer.
    Monsieur Battle...?
    En ce qui concerne cette question de chiffres différents, il s'agit ici encore de quelque chose de compliqué. Mais les chiffres dont nous parlons, pour ce qui est de la couverture, sont très simples. Il s'agit du nombre de personnes qui touchent des prestations d'assurance-emploi ordinaires divisées par le nombre de chômeurs.
    Ce que fait le gouvernement c'est ceci. Son argument contradictoire est que le dénominateur, soit le nombre des chômeurs, est trop large. Par exemple, on a inclus les travailleurs autonomes. Eh bien, les travailleurs autonomes ne font pas partie du programme. Ou alors, on a inclus quelqu'un qui est un nouvel entrant sur le marché du travail et n'est donc pas inclus.
    Ce qui se passe donc, en gros, est que Statistique Canada et la Commission de l'assurance-emploi s'entendent sur une définition avec un dénominateur plus restreint. Ils disent, eh bien, ce ne sont pas toutes les personnes sans emploi qui méritent les prestations, alors nous allons élaguer. Cela fait une différence.
    Ce que nous nous disons est que nous croyons que les personnes qui sont sans emploi devraient toucher l'assurance-chômage. Nous ne voulons pas limiter cela à certaines personnes qui sont en chômage, mais englober tous les chômeurs.
    Et il y a du pour et du contre dans toutes ces définitions. Comme le disait Barb, il existe neuf définitions de ce que c'est que d'être en chômage. Mais je pense qu'il est important d'avoir une vision plus large des choses.
    J'aimerais dire encore quelque chose, rapidement, sur ce que vous touchez comparativement à ce que vous avez contribué, sous forme de primes. Ce n'est pas comme cela que les choses fonctionnent. Dans le cas des régimes de pensions du Canada et du Québec, vos prestations sont liées à vos cotisations. Dans le cas de l'AE, le montant des prestations est fondé sur vos gains assurables, et le pourcentage est de 55 p. 100, ce qui est extrêmement faible comparativement à ce qui se fait ailleurs dans le monde. Ce n'est donc pas réellement fonction des cotisations que vous avez versées. Nous versons en fait tous la même cotisation. C'est tout simplement que les prestations que vous touchez sont fonction de vos gains assurables.
    Une chose qui est arrivée — je n'ai pas eu l'occasion d'en faire mention — est que le gouvernement a gelé pendant environ 10 ans le niveau maximal de gains assurables, de telle sorte que les prestations maximales que vous pouviez toucher déclinaient chaque année en fonction de l'inflation. Et c'est pourquoi les prestations, toutes les prestations, sont inférieures à ce qu'elles étaient autrefois, car le maximum a été réduit. C'est ce que j'appelle une « politique furtive ». Les gens ne comprennent pas, mais lorsque vous n'indexez pas une prestation, alors sa valeur recule au fil du temps.
    Un autre problème avec un programme aussi complexe...

  (1235)  

    Je m'excuse, mais nous avons, avec cet échange, dépassé de beaucoup le temps normalement accordé.
    Monsieur Guimond.

[Français]

    Il me fait plaisir de remplacer ma collègue de Laurentides—Labelle à ce comité. Je profite de l'occasion pour vous présenter mes meilleurs voeux pour dimanche, la Journée internationale de la femme. Quand les femmes auront atteint la pleine égalité, nous n'aurons plus besoin de fêter cette journée, parce que ce sera la Journée internationale de la femme tous les jours de l'année.
    Ma question s'adresse à Mme Harvey. Je sais qu'elle est une spécialiste, comme vous tous et vous toutes. Dans Charlevoix, elle est à l'origine du Mouvement Action-Chômage de Charlevoix et des manifestations du Comité des Sans-Chemise. C'est une activiste de la cause des chômeurs et chômeuses depuis plusieurs années.
    Madame Harvey, vous savez que dans des régions comme celle que je représente, contrairement au milieu urbain, nous vivons la réalité du travail saisonnier. La plupart des emplois saisonniers sont majoritairement occupés par des femmes, que ce soit dans le secteur de la restauration, celui de l'hôtellerie ou celui du tourisme. Comme le régime d'assurance-emploi est inéquitable, selon nous — vous le confirmez également —, cela fait en sorte que ce sont davantage les femmes qui vivent le problème. J'aimerais que vous me répondiez en fonction de la réalité. Comment les femmes sont-elles plus touchées dans des régions à forte teneur en travail saisonnier?
    J'aimerais souligner une subtilité de la langue française: il ne faut pas parler de travailleurs saisonniers. Ce sont des personnes qui occupent des postes dans des industries saisonnières. Ce n'est pas le chômeur ou la chômeuse qui a l'étiquette de travailleur saisonnier, ce sont les industries qui sont saisonnières.

  (1240)  

    En effet, il est bon de le mentionner, monsieur Guimond. Dans Charlevoix, l'industrie est saisonnière. Le travail est saisonnier à cause de notre industrie. Le travailleur saisonnier type dans Charlevoix est une femme travaillant dans l'hôtellerie et la restauration. Je vois passer ces femmes au bureau dès le mois de septembre. Dès qu'il y a une baisse d'achalandage du tourisme, ces femmes demandent si elles ont droit aux prestations d'assurance-emploi. Ce sont souvent ces femmes qui n'ont pas le droit de recevoir des prestations parce qu'elles n'ont pas accumulé assez d'heures. Elles ne figurent pas dans les statistiques.
    On parlait de statistiques, un peu plus tôt. Les gens qui n'ont pas suffisamment d'heures pour recevoir des prestations ne déposent même pas de demande. Figurent-ils dans les statistiques? On ne voit plus ces gens; il faut donc faire attention. Tout à l'heure, on parlait beaucoup de statistiques. C'est également une donnée importante à préciser. Dans Charlevoix, à l'heure actuelle, nous bénéficions de projets-pilotes qui aident grandement les nouveaux arrivants ou les réitérants, les gens qui reviennent, qui déposent des demandes de prestations tous les ans. À mon avis, ces projets-pilotes doivent faire l'objet de mesures permanentes. Ceux-ci démontrent l'importance d'améliorer le régime d'assurance-emploi. S'il n'y avait pas place à l'amélioration, pourquoi le gouvernement aurait-il mis en place des projets-pilotes? Je pense qu'il y a un signe de malaise. Ces projets-pilotes en sont un bel exemple.
    Dans Charlevoix, les femmes qui travaillent oeuvrent majoritairement dans l'industrie saisonnière. Quand j'en vois dans mon bureau, je leur dis bravo et je leur dis qu'elles font des miracles avec pas grand-chose. C'est le lot de plusieurs personnes monoparentales. Je parlais tout à l'heure des femmes malades, auxquelles on a diagnostiqué un cancer du sein et qui ont des enfants à leur charge. Que fait-on? Je suis une mère monoparentale avec un cancer et je dois me battre pour ma vie, pour faire vivre mon enfant. Ce sont des réalités que l'on voit à chacune de nos journées de travail.
    Aujourd'hui, c'est beau, on essaie de faire changer les choses. Cependant, il faut penser qu'il existe des gens à la base qui se battent pour leur dignité, pour gagner leur vie. Dans Charlevoix, c'est une réalité criante, c'est le lot quotidien de plusieurs personnes.
    Tout le monde reconnaît...

[Traduction]

    Monsieur Guimond, je regrette, mais le temps dont vous disposiez est écoulé.
    Madame Mathyssen.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Byers, j'ai une petite question rapide.
    Il y a beaucoup d'information. Les gens meurent d'envie de poser des questions. Si nous pouvions faire plus court avec les questions et les réponses, il y aurait moyen d'en caser davantage dans le temps dont nous disposons.
    Merci.
    Le Budget fédéral 2009 propose que des consultations soient tenues en vue de l'élaboration d'un plan afin que les travailleurs autonomes canadiens puissent accéder à l'AE et aux prestations parentales. Faudrait-il que cela s'inspire du programme d'assurance parentale du Québec? En quoi le régime québécois diffère-t-il de ce que propose le gouvernement fédéral? Et, troisièmement, comment assurer l'accès aux prestations de maternité non seulement pour les travailleuses autonomes, mais également pour les femmes travaillant à temps partiel ou à contrat?
    Nombre d'entre nous nous penchons sur ce qui a été annoncé lors des dernières élections. Nous dirions donc qu'il nous faudra utiliser comme modèle les travailleurs autonomes... Et, soit dit en passant, cela fait de nombreuses années que nous appuyons le versement de prestations aux travailleurs autonomes. Mais nous nous inspirerions plutôt du modèle québécois, car ce que nous avons également entendu lors des élections est que les gens allaient, en gros, pouvoir y contribuer pendant six mois avant le versement de prestations de maternité. Et puis après? Ils ne seraient plus tenus de payer?
    Vous ne pouvez pas avoir un régime dans le cadre duquel les gens peuvent entrer et sortir et de ce fait utiliser l'argent qui a été versé par un grand nombre d'autres femmes qui, d'ailleurs, ne pourront rien toucher parce que les nombres sont trop élevés. Il n'y a aucune raison pour qu'une femme enceinte commence à payer avant que les six mois ne commencent. Pourquoi contribuerait-elle au régime? Et il faut par ailleurs que cela couvre tout le monde. Tout comme c'est le cas au Québec, il nous faudrait dire que tout le monde doit être couvert. Et si le gouvernement se mettait à parler de créer un fonds distinct pour les travailleurs autonomes, eh bien, la chose ne serait pas durable. Il n'y a pas suffisamment d'argent pour que cela fonctionne ainsi, avec des gens qui entrent et qui sortent. Il faudrait suivre le modèle du régime québécois.
    Pour ce qui est de l'accès aux congés de maternité et parentaux, je reviens sans cesse aux 360 heures. Si l'on ramenait cela à 360 heures, un bien plus grand nombre de femmes accéderaient aux congés de maternité et parentaux.

  (1245)  

    Merci.
    Monsieur Battle, Richard Shillington était ici la semaine dernière, je pense, et il a formulé la même plainte que vous relativement aux données. Il lui a fallu payer de sa poche. Et nous avons interrogé Statistique Canada là-dessus. Les porte-parole de Statistique Canada ont été très candides en disant que leur budget avait été réduit au milieu des années 1990 et qu'ils avaient été contraints de récupérer leurs coûts en facturant leurs services.
    En ce qui concerne ces statistiques que vous n'avez pas trouvées ou que vous avez eu de la difficulté à trouver, si des données sur les femmes étaient compilées pendant l'actuelle récession — car ce sera probablement plus difficile pour les femmes travaillant à temps partiel et ne touchant qu'un faible revenu —, s'agirait-il de statistiques utiles? Deuxièmement, des données sur les femmes autochtones, handicapées et immigrantes seraient-elles quelque chose d'utile pour vous dans le cadre de votre action revendicatrice?
    Je vais répondre très rapidement. Oui, absolument, je suis d'accord avec vous sur tout ce que vous avez dit.
    Il nous faut donc...
    Je ne suis pas un chercheur obsessif — données, données, données —, mais lorsque vous ne connaissez pas les prestations moyennes d'AE dans le temps pour les hommes comparativement aux femmes... Nous parlons ici de choses absolument essentielles et, comme le disait Barbara, de la nécessité de creuser plus loin. Il y a des limites, mais ce serait bien d'avoir ces données. Et cela ne se limite pas à une comparaison entre les hommes et les femmes, mais il y a également la situation des personnes de couleur comparativement aux Blancs, etc. Ce genre de choses seraient certainement utile.
    Dieu sait qu'il y a suffisamment de bureaucrates, munis d'ordinateurs et ainsi de suite, qui pourraient améliorer... Je ne veux pas être machiavélique, mais je ne pense pas que l'absence de données soit une simple question de coût ni qu'il en soit ainsi par pur hasard.
    Vous pensez que cela sert une autre fin.
    Oui.
    Une fin plutôt utile.
    Madame Mathyssen, il vous reste 30 secondes.
    Vous avez parlé d'une « politique furtive » relativement à la diminution des prestations d'AE, et Mme Byers l'a fait aussi. Était-ce purement par souci d'économie? Cela coûte plus cher d'élever des enfants et de posséder une maison aujourd'hui qu'en 1996. S'agit-il purement d'une question d'économie de la part du gouvernement?
    Oui, c'était le cas.
    Il y a un argument. Les gains hebdomadaires assurables maximaux devraient correspondre plus ou moins aux gains moyens, à la manière du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec. Le niveau avait en fait dépassé les gains moyens — il était devenu supérieur —, et le gouvernement a alors dit qu'il allait le geler jusqu'à ce qu'il retombe au niveau des gains moyens, pour ensuite l'indexer à l'augmentation des salaires, ce qu'il a fait il y a de cela quelques années. Mais on parle de 10 ans. Même avec un faible taux d'inflation, c'est 2, 3 ou 4 p. 100 par an. Voilà l'explication du recul.
    Mais, oui, il avait un coût. Nous avons mentionné au début que nombre des réformes apportées à l'AE au fil des ans, dans les années 1990 et ainsi de suite, ont été amenées par des questions de coût. Absolument.
    Je m'excuse, madame Mathyssen, mais votre temps est écoulé.
    Madame McLeod.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais moi aussi remercier nos invités d'être venus comparaître devant nous. Nous avons entendu des renseignements fort intéressants.
    Dans le cas présent, en tout cas, Mme Mathyssen et moi-même sommes tout à fait d'accord pour ce qui est des données. Les données informent les décisions. En cette ère informatique, ce devrait être relativement simple. Si rien d'autre ne ressort de cet exercice, le fait de disposer d'indicateurs justes et raisonnables sur lesquels appuyer des décisions ne serait pas un mauvais résultat pour ce qui est de l'avenir.
    J'aimerais dire une ou deux choses. J'ai été une mère à temps partiel volontaire. Je ne voudrais pas du tout dire que j'ai voulu un emploi à temps plein, car ce ne serait pas vrai. Mais il nous faut des données qui nous livrent des informations claires et fidèles à la réalité.
    Il y a un autre commentaire que je ne peux pas m'empêcher de faire, compte tenu de toute la rétroaction positive que j'ai eue. En ce qui concerne les personnes à revenu stable qui profitent du crédit d'impôt pour rénovation résidentielle — parce que ce commentaire a été fait et, encore une fois, je ne peux pas laisser passer cela —, les constructeurs viennent dans mon bureau pour me dire que c'est cela qui les a maintenus en activité pendant leur mois le plus lent. Ils ne veulent pas faire de mises à pied et ils font toutes sortes de choses. J'agirais donc avec beaucoup de prudence en ce qui concerne cette initiative et j'éviterais de l'écarter immédiatement car il s'agit d'une chose qui est très positive pour de nombreuses personnes.
    J'imagine que je devrais en arriver à ma question, sans quoi la présidente va s'en prendre à moi.

  (1250)  

    Vous vous débrouillez très bien.
    Je peux comprendre les questions concernant les personnes qui cotisent, mais je ne sais vraiment trop comment il conviendrait de faire pour ce qui est des travailleurs autonomes. Ce n'est pas une question de prestations de maternité; la question est celle du dénominateur pour le chômage. Je sais que la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante ne veut pas contribuer à un tel régime. Elle a clairement dit — était-ce Corinne Pohlmann qui s'exprimait? — qu'elle préférerait utiliser cet argent autrement.
    En ce qui concerne les travailleurs autonomes qui disent clairement ne pas vouloir participer au régime, j'hésite à les inclure dans nos statistiques et à inclure tout ce morceau correspondant aux travailleurs autonomes.
    J'aimerais entendre vos commentaires là-dessus.
    Je ne dis pas que le crédit d'impôt pour rénovation résidentielle ne va pas être utile dans certains secteurs. Ce que je dis c'est que le fait de porter la durée des prestations à 50 semaines coûterait moins que le sixième de ce qui sera dépensé au titre des subventions pour rénovation résidentielle. Les chômeurs vont donc payer pour d'autres genres de programmes.
    J'allais dire plus tôt que les chômeurs ont payé pour la réduction du déficit. Nous avons de la documentation de Paul Martin, lorsqu'il était ministre des Finances, dans laquelle il dit à la ville de Prince Albert avoir utilisé l'argent de l'assurance-chômage pour réduire le déficit. Eh bien, comme quelqu'un l'a dit tout à l'heure, ce n'est pas pour cela que les gens y ont cotisé.
    En ce qui concerne la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, j'imagine qu'il vous faudrait savoir si ses porte-parole parlent au nom des membres. La réalité est qu'il vous faut avoir un régime auquel les gens contribuent en tant que groupe. Si vous demandez pourquoi vous devriez cotiser à l'AE si vous n'allez pas avoir d'enfants ou autre chose du genre — faisant intervenir le choix individuel —, vous supprimez l'égalité. Si la FCEI ne veut pas y contribuer, alors il lui faudrait tirer au clair avec ses membres si ceux-ci jugent le régime utile ou non. C'est tout ou rien.
    Monsieur Battle.
    Je suis d'accord avec vous là-dessus. L'on ne peut pas avoir un régime d'assurance sociale volontaire. Nous avons des assurances pour cela: des assurances ordinaires, pas des assurances sociales. Cela en fait un problème très difficile, sur le plan politique, pour tout gouvernement désireux d'intégrer les travailleurs autonomes. Comme vous le dites, les travailleurs autonomes qui n'en veulent pas seraient fâchés. La chose est difficile sur le plan politique.
    Je devine qu'un plus grand nombre de travailleurs autonomes seraient intéressés par ce genre de chose. Les rangs des travailleurs autonomes ont de beaucoup augmenté. Mais je ne miserais pas là-dessus.
    Vous conviendrez peut-être que le changement que nous avons apporté à l'AE — pour protéger le régime et le mettre à l'abri de la caisse générale — est une bonne décision, et que l'offre de formation à tous, que l'on touche ou non des prestations d'AE, est une bonne décision.
    La deuxième est extrêmement importante. Nous voyons également cela dans le cadre d'autres types de programmes sociaux. Nous voulons éliminer le lien entre les services et le revenu. Cela est très important, pour que les programmes soient livrés séparément et pour éviter ces genres d'iniquités telles que vous n'obtenez un service que si vous êtes admissible à un certain programme de revenu comme l'AE. Cela est source de réelles injustices pour les travailleurs pauvres, par exemple.
    Nous dirions cependant que l'argent qui est là n'est pas suffisant. Il y a 55 milliards de dollars, ce qui veut dire que 53 milliards de dollars sont toujours dus à l'Office de financement de l'assurance-emploi du Canada.
    Il nous reste cinq minutes, et je ne pense pas que cela suffise pour un autre tour. La présidence pourrait peut-être poser une question.
    Quelqu'un pourrait-il me dire s'il y a déjà eu une contestation fondée sur la Charte en ce qui concerne les disparités régionales ou la discrimination régionale, pour reprendre le terme employé par M. Battle, du régime d'AE? Quelqu'un a-t-il jamais intenté une telle action?
    Si vous ne pouvez pas répondre, l'autre question concerne les chômeurs, et je pense que Mme McLeod et les autres l'ont évoquée. Il y a des entreprises qui ont des revenus plutôt conséquents et qui s'inscrivent dans la catégorie des travailleurs autonomes, des petites et moyennes entreprises. Mais il y a également des femmes qui, faute de service de garde d'enfants, n'ont d'autre choix que de travailler à leur compte à la maison. Nous savons que ces femmes gagnent 19 000 $ ou 20 000 $ par an. Si, pour quelque raison, elles ne peuvent plus travailler, elles se retrouvent alors sans source de revenu aucune et se voient obligées de recourir à l'aide sociale. Comme l'a dit Mme Dépatie, l'aide sociale n'est pas quelque chose que souhaitent avoir la plupart des gens. La plupart préféreraient travailler.
    Pour ce qui est d'intégrer les travailleurs autonomes, ce qui est, je pense, une bonne idée, l'argument a toujours été que les gens toucheraient simplement les prestations en tant que travailleurs autonomes, et du fait qu'ils ne puissent pas se mettre à pied, ils ne peuvent pas dire, eh bien, il y a eu mise à pied et j'ai perdu mon emploi. Il pourrait y avoir des abus. Pourriez-vous répondre à cette question?

  (1255)  

    Vous ne pouvez pas financer le régime s'il va exister ce genre de situations. Et M. Battle a déjà dit que l'on ne peut pas avoir un régime d'assurance sociale volontaire.
    Comment feriez-vous pour prévenir cela? Tout ce que je dis est que c'est là un argument que les gens mettent de l'avant. Comment feriez-vous pour prévenir les abus?
    La situation est la même que celle dont nous avons parlé relativement aux travailleurs dans leur ensemble. Les personnes qui travaillent à leur compte ne sont pas plus portées à commettre des abus que les personnes assises dans cette salle. M. Battle connaît peut-être les chiffres les plus récents, mais lorsque je faisais du travail social les cas pouvant être considérés comme constituant de l'abus représentaient environ 3 p. 100, pour tous les types de régime social confondus, que l'on parle d'AE, de soins de santé, ou tout simplement de personnes arrivant en retard au travail, ou autre. La même chose vaut pour les travailleurs autonomes.
    Cela soulève certaines questions qui ne s'appliquent pas aux employés, et il faudrait donc, je pense, que le gouvernement use de toute la diligence requise dans l'élaboration et la mise en oeuvre d'un tel programme. Ces choses pourraient être faites. Je ne pense pas que ce soit impossible.
    Je tiens à remercier tout le monde d'être venu.

[Français]

    Merci beaucoup, mesdames Harvey et Dépatie.

[Traduction]

    Je vous remercie très sincèrement. Je sais que certains d'entre vous avez consacré beaucoup de temps et d'efforts et...
    D'argent.
    ... comme l'a dit M. Battle, beaucoup d'argent, pour recueillir vos données. Je tiens donc à vous remercier d'être venus et d'avoir passé autant de temps avec nous.
    Il me faudrait maintenant une motion d'ajournement.
    Mme Davidson propose l'ajournement.
    Merci à tous. La séance est levée.
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