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En ce mercredi 13 mai 2009, je vous souhaite la bienvenue à la 29
e séance du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées. Cette réunion commence avec un peu de retard. On reprendra les 15 minutes qui vous sont dues, mesdames, et on finira à 12 h 15.
Nous accueillons aujourd'hui Mme Denise Boucher, vice-présidente de la Confédération des syndicats nationaux, Mme Gibeau, de l'Union des consommateurs, Mmes Chevrier et Mazerolle, du Regroupement des cuisines collectives du Québec, et Mme Janine L'Archevêque, du Jardin de la famille de Fabreville. Je vous souhaite la bienvenue.
Je vais simplement vous expliquer comment tout fonctionne. Les écouteurs sont bien importants. Le canal 8 vous donne la version anglaise, le canal 9 vous donne la version française, et le canal 7 vous donne la langue parlée. Il faut appuyer sur le petit bouton vert, comme je viens de l'apprendre, pour entendre quelque chose.
Cette séance fait partie d'une grande tournée du Canada que ce comité de la Chambre des communes effectue. Nous avons commencé à Moncton et à Halifax. Nous continuons aujourd'hui à Montréal. Dans quelques jours, nous serons à Toronto, et plus tard, nous irons dans l'Ouest et dans le Nord canadien. Cette tournée nous permet de continuer un travail déjà commencé sur la pauvreté au Canada. Même si celle-ci a toujours existé, malheureusement, nous savons que compte tenu de la situation économique actuelle, elle s'est certainement aggravée.
Vous êtes toutes des personnes de terrain et c'est intéressant. Vous avez une expérience concrète et réelle de ce qui se passe. J'espère que dans vos propos, vous aborderez une question qui nous intéresse beaucoup, c'est-à-dire les recommandations que vous souhaitez faire au gouvernement du Canada relativement à la situation que vous connaissez si bien.
Autour de la table, tous les partis qui siègent à la Chambre des communes sont représentés. Mme Minna et moi-même sommes du Parti libéral, Mme Beaudin et M. Lessard représentent le Bloc québécois et vont partager leur temps d'intervention, M. Mulcair est du Nouveau parti démocratique, et le parti du gouvernement, le Parti conservateur, est représenté par MM. Komarnicki et Lobb.
On accorde à chaque organisme cinq minutes pour faire une présentation, que vous partagerez avec votre collègue. Une fois qu'on aura fait le tour, chacun des partis disposera de sept minutes pour vous poser des questions et écouter vos réponses. Les sept minutes incluent les questions et les réponses. Je voudrais répéter à mes collègues que plus longue est votre question, plus courte sera la réponse, si vous me comprenez bien.
Je vais commencer par Mme Denise Boucher, de la Confédération des syndicats nationaux.
Madame Boucher, vous avez la parole.
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Merci, madame la vice-présidente.
La Confédération des syndicats nationaux tient à remercier le Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de l'avoir invitée à présenter des solutions dans le cadre de la lutte contre la pauvreté au Canada.
La CSN, deuxième confédération syndicale en importance au Canada, représente 2 800 syndicats au Québec et 300 000 membres, majoritairement francophones. Malgré le fait que le comité permanent ait amorcé, au printemps 2008, une étude sur la contribution du gouvernement fédéral à la lutte contre la pauvreté au Canada, nous pouvons, d'entrée de jeu, dire que cette étude tombe à point.
Quoi qu'on en dise, la crise politique des derniers mois fait ressortir l'importance de mettre en place des mécanismes qui cesseront d'être inacceptables et inéquitables pour les chômeurs, les travailleurs âgés, les femmes et le Québec et qui les placent en situation de grande vulnérabilité. Pourquoi parler du Québec? Parce que nous considérons que les changements annoncés à la formule de péréquation l'automne dernier, lesquels ont été confirmés dans le dernier budget, vont faire perdre au Québec un milliard de dollars, cette année, et jusqu'à deux milliards de dollars, l'an prochain. Cette situation aura pour effet de priver le Québec de moyens de faire face à la crise et, sans aucun doute, de priver une grande partie de la population des retombées nécessaires qui auraient pu aller soit dans le domaine de la santé, soit dans celui de l'éducation postsecondaire. Affaiblir le Québec, plus particulièrement dans ces deux domaines, c'est également contraindre sa population à ne pas rehausser son niveau de vie.
En ce qui a trait à l'assurance-emploi, alors que plus de 129 000 emplois ont été perdus depuis janvier — du jamais vu depuis 32 ans —, nous ne pouvons que constater que notre filet de sécurité est sérieusement effiloché. L'assurance-emploi est un levier économique et un soutien familial de première ligne. Les sommes déboursées sont dépensées immédiatement et localement pour nourrir la famille, payer les factures et vêtir les enfants. C'est aussi toute l'économie locale, voire même celle d'une région entière, qui pâtiront des effets d'un accès ou non à des prestations d'assurance-emploi pour les travailleuses et travailleurs mis à pied.
Le Québec est déjà durement touché par la crise forestière, nous le savons. L'investissement qu'a pu faire le gouvernement du Québec a été important. Cependant, on doit constater que celui du fédéral, en regard de cette crise, n'a pas été au rendez-vous.
Dans la région de la Mauricie, 2 500 personnes ont perdu leur emploi dans le secteur forestier en un an. À cet égard, nous demandons une amélioration importante de l'accessibilité au régime. Nous souhaitons qu'il y ait un critère unique de 360 heures, une augmentation du taux des prestations, soit un calcul de 60 p. 100 du salaire des 12 meilleures semaines, ainsi que l'abolition du délai de carence. Pourquoi faut-il que les travailleuses et travailleurs soient pénalisés pendant deux semaines? Depuis quand travaille-t-on gratuitement? Par ailleurs, la CSN revendique depuis longtemps un programme de soutien financier visant à permettre aux travailleuses et aux travailleurs âgés qui ont perdu leur emploi de faire le pont entre la fin de leurs prestations d'assurance-emploi et le début des prestations de retraite.
Depuis la disparition du PATA en mars 1997, rien n'a été élaboré afin d'aider une catégorie de travailleuses et de travailleurs qui sont plus affectés que les jeunes en période de chômage. Vous avez d'ailleurs reçu des témoins, un peu plus tôt, dont les représentants de la CSD, qui vous ont dit la même chose. En effet, depuis plusieurs années, les quatre grandes centrales forment une coalition relativement à cette question. Nous avons fait des démarches, qui ont été fort bien entendues, auprès du gouvernement du Québec. Malheureusement, c'est resté lettre morte pour ce qui est du fédéral.
Comme on vous l'a probablement dit un peu plus tôt, la CSN, croit que pour être admissible au programme de soutien du revenu, il faudrait être âgé de 55 ans ou plus, être victime d'un licenciement collectif ou d'une fermeture d'entreprise, avoir participé au marché du travail pendant au moins 10 ans au cours des 30 dernières années, que l'écart compris entre les compétences acquises et celles requises par le marché du travail soit d'importance, qu'il y ait incapacité de trouver un autre emploi véritablement rémunérateur et qu'il y ait incapacité de trouver un emploi dans sa région.
En ce qui concerne les femmes — j'en parlais dans mon introduction —, nous considérons que le projet de loi est un affront aux droits fondamentaux des femmes et à la reconnaissance de la valeur de leur travail.
Cette loi attaque le droit des femmes en les empêchant d'avoir accès à une rémunération égale pour un travail de valeur équivalente, et ce, en ajoutant aux critères déjà reconnus pour l'évaluation des emplois des critères correspondant aux besoins des employeurs en matière de recrutement et de rétention de main-d'oeuvre. Ainsi, la discrimination salariale devient donc permise si elle se justifie par les conditions du marché, ce qui est inacceptable.
Nous recommandons donc une loi proactive pour ainsi sortir les femmes de la pauvreté et cesser d'en faire des travailleuses de seconde zone. Je ne voudrais pas passer sous silence l'importance d'investir dans les logements sociaux et de l'apport d'une contribution du fédéral.
Sur ce, j'ai terminé ma présentation.
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Je vous remercie de l'invitation qui nous a été faite de présenter notre point de vue sur la lutte du gouvernement fédéral contre la pauvreté au Canada. L'Union des consommateurs est un organisme à but non lucratif, une fédération d'associations coopératives d'économie familiale, qui sont des organismes présents dans toutes les régions du Québec depuis plus de 40 ans. Dix de ces ACEF se sont réunies pour créer l'Union des consommateurs, qui représente leurs intérêts au palier national. Les ACEF rencontrent tous les jours des gens aux prises avec des situations de pauvreté, des gens qui ont de la difficulté à joindre les deux bouts et qui viennent les rencontrer pour avoir des conseils pour équilibrer leur budget, savoir comment avoir accès à certaines prestations gouvernementales, faire des démarches auprès des bureaux d'aide sociale, s'il y a des problèmes à obtenir des prestations. Les ACEF travaillent sur le terrain tous les jours pour aider ces gens qui ont des problèmes à joindre les deux bouts et à boucler leur budget. Les ACEF nous rapportent les problèmes, et nous faisons des représentations auprès [
Note de la rédaction: inaudible]. Donc, c'est là-dessus que s'appuie ma présentation aujourd'hui, sur l'aspect terrain de ce que les ACEF nous rapportent tous les jours.
Nous avons essayé de répondre à une des questions que vous aviez inscrites dans le guide des témoins. Vous demandiez si les ressources fédérales actuellement consacrées à la lutte contre la pauvreté pouvaient être déployées plus efficacement, si des ressources supplémentaires étaient nécessaires et comment elles pourraient être financées.
Je vais tenter de répondre à cette question en trois volets.
En clair, il nous apparaît que la contribution actuelle du gouvernement fédéral n'est pas suffisante pour faire reculer les taux de pauvreté au pays. Le mémoire que nous vous avons soumis contient quelques chiffres à l'appui. Entre autres, la Chambre des communes adoptait, en 1989, une résolution qui visait à mettre fin à la pauvreté des enfants en 2000. Nous remarquons qu'en 2007, le taux de pauvreté infantile est exactement le même qu'en 1989, soit de 11,7 p. 100. Donc, la pauvreté infantile n'a pas reculé, malgré les bonnes intentions du gouvernement.
Aussi, en 2008, malgré toutes les augmentations du salaire minimum, aucun employé gagnant le salaire minimum au Canada n'atteint le seuil de pauvreté en travaillant 40 heures par semaine. On sait que la plupart des gens travaillant au salaire minimum ne travaillent pas 40 heures par semaine. Si on se fie à ce seuil, toutes ces personnes sont sous le seuil de la pauvreté.
Pour nous, ces chiffres parlent beaucoup et nous disent que l'apport très significatif des programmes sociaux gouvernementaux du fédéral et du provincial n'est pas suffisant pour faire reculer de façon significative et durable les taux de pauvreté au Canada. À notre avis, le gouvernement fédéral devrait faire plus.
Quant à la deuxième question, sur les ressources nécessaires pour réduire la pauvreté, on a ciblé quelques priorités. Je rappelle que ce sont des priorités. Pour nous, les programmes suivants représentent des priorités pour l'injection de ressources supplémentaires provenant du gouvernement fédéral: assurance-emploi, Transfert canadien en matière de programmes sociaux, notamment pour le soutien à l'enfance et l'éducation postsecondaire, le logement et le transport en commun.
Pour accompagner ces investissements supplémentaires, l'Union des consommateurs revendiquerait aussi une révision en profondeur de la fiscalité canadienne, afin d'y rétablir plus d'équité entre les contribuables.
Pour nous, le respect de la Loi canadienne sur la santé et le maintien strict de l'interdiction de la publicité sur les médicaments d'ordonnance sont des priorités qui auraient un impact sur la pauvreté au Canada.
Concernant l'assurance-emploi, moins de la moitié des travailleurs qui ont perdu leur emploi sont actuellement admissibles à recevoir des prestations d'assurance-emploi, alors que tous les travailleurs cotisent au régime. Cela nous apparaît complètement inadmissible et inéquitable. On revendique une amélioration majeure de la couverture des prestations en fixant le nombre d'heures de travail pour être admissible aux prestations à 360 heures, en prolongeant la période de prestations à un minimum de 35 semaines, en fixant le pourcentage du revenu assurable à 60 p. 100 du salaire, en abolissant le délai de carence de deux semaines, en prolongeant la période des prestations de maladie et en bonifiant les prestations de compassion.
En ce qui concerne le Transfert canadien en matière de programmes sociaux, il nous apparaît important de continuer à le bonifier. Les nombreuses compressions effectuées dans les versements aux provinces depuis les années 1990 ont mis à mal le financement de plusieurs programmes sociaux dans les provinces et a créé un sous-financement chronique, ce qui a beaucoup affecté la qualité des services.
Pour nous, il est grand temps que le gouvernement fédéral injecte davantage de fonds dans les transferts aux provinces, notamment pour permettre un réinvestissement massif dans l'éducation postsecondaire. À cet effet, je vous indiquerai qu'une association en Ontario a publié une recherche en 2004 selon laquelle l'investissement dans les collèges ontariens donnait un taux de rendement annuel de 12,7 p. 100 si on tient compte, par exemple, du revenu des diplômés, de l'amélioration de la santé, de la réduction des transferts gouvernementaux, du taux de chômage, etc. À des fins de comparaison, le remboursement de la dette fédérale donnerait, quant à lui, un rendement de 5,5 p. 100, ce qui est moins de la moitié.
L'économiste québécois Pierre Fortin publiait récemment une recherche selon laquelle un décrocheur coûte 500 000 $ à la société. À nos yeux, cela vient prouver qu'un investissement massif dans l'éducation postsecondaire est très important.
Bonjour, tout le monde. Merci de nous avoir invitées. On se sent privilégiées de venir présenter notre vision de la lutte contre la pauvreté au Comité des ressources humaines. Dans les cuisines collectives, on travaille toujours ensemble. Alors, on est venues au comité toutes les deux. Mme Mazerolle siège au conseil d'administration du Regroupement des cuisines collectives du Québec et est animatrice sur le terrain avec des groupes de cuisine collective dans la région des Laurentides. Pour ma part, je remplace au pied levé la personne qui est habituellement la porte-parole du Regroupement des cuisines collectives du Québec. J'essaierai de vous donner une vision générale.
Je vais commencer par vous présenter les cuisines collectives et vous parler de notre vision de la lutte contre la pauvreté. Ensuite, je vais vous proposer des collaborations de travail avec certaines associations.
Les cuisines collectives sont nées en 1982. Il faut bien comprendre que les cuisines collectives sont nées de la volonté de deux personnes voulant se prendre en charge et vivant des situations de pauvreté, et qui voulaient, entre autres, faire plus que simplement recevoir des dons alimentaires. On se base donc sur le principe de la prise en charge des personnes. Le regroupement est né en 1990 et regroupe maintenant 1 400 groupes à travers la province et touche plus de 37 000 personnes. Les cuisines collectives sont constituées de cinq ou six personnes qui se réunissent et mettent ensemble leur argent, leurs compétences et leur énergie pour préparer des repas qu'elles ramènent à la maison. Le développement des compétences et l'amélioration du pouvoir d'achat sont à la base des cuisines collectives.
Nous avons une base d'unité politique qui est fondée sur les principes de l'éducation populaire et de l'action communautaire autonome. Nous avons toujours lutté contre la pauvreté, d'abord pour briser les préjugés et éviter les ghettos. C'est pour cette raison que les cuisines collectives sont ouvertes à tout le monde, qu'on soit riche ou pauvre. On utilise les compétences des personnes.
Depuis quelques années, on a développé une vision qui est détachée de ce qu'on appelle la sécurité alimentaire, qui est souvent mal comprise par plusieurs personnes. On parle beaucoup de sécurité alimentaire dans une perspective d'iniquité alimentaire ou de réponse à l'insécurité alimentaire. Nous considérons que le droit à l'alimentation est beaucoup plus que cela, et nous nous sommes dit que nous parlerions d'autonomie alimentaire. Cette autonomie alimentaire s'articule autour de quatre grands axes: donner accès à des aliments sains à coût raisonnable; permettre aux personnes d'avoir un pouvoir d'achat et de choisir leurs aliments; respecter les principes de développement durable et l'environnement; et consommer de façon responsable, maintenant et pour les générations futures.
L'autonomie alimentaire n'est pas qu'individuelle; il ne s'agit pas simplement de développer des compétences individuelles. C'est également une action collective, et les collectivités doivent mettre en place des moyens pour répondre au droit à l'alimentation.
Comme je vous l'ai dit plus tôt, les cuisines collectives sont nées de deux femmes qui voulaient joindre les deux bouts. On part donc du principe que c'est vraiment pour lutter contre la pauvreté et éviter les ghettos. On veut redonner du pouvoir aux gens pour qu'ils reprennent contrôle sur leur vie et aient des outils pour s'en sortir.
Il y a déjà plusieurs témoignages et recherches dont on pourrait vous parler et qui portent sur l'impact des cuisines collectives au Québec et dans d'autres provinces. On est moins en contact avec ces associations, mais on sait que les cuisines collectives permettent d'économiser et de réduire les effets de la pauvreté, améliorent les habitudes de vie, ont un grand impact sur la santé physique et psychologique des gens, renforcent l'estime de soi, développent des compétences et créent des réseaux d'entraide. Ce sont là des moyens qui permettent de lutter contre la pauvreté. On a aussi toujours été très actifs et appuyé les revendications menées par le Collectif pour un Québec sans pauvreté.
Comment pensons-nous que le gouvernement pourrait contribuer à la réduction de la pauvreté? On veut vous parler d'un travail fait par le Regroupement des cuisines collectives du Québec et par d'autres associations du Québec, dont l'Association québécoise des banques alimentaires et des Moissons, Équiterre, Option consommateurs et la Table de concertation sur la faim. On s'est demandé comment on pouvait réellement éliminer la pauvreté tout en faisant appliquer le droit à l'alimentation. Pour nous, l'application du droit à l'alimentation est très importante.
Il existe au Québec la Coalition pour une souveraineté alimentaire. Au Canada, il y a une organisation semblable avec sensiblement les mêmes orientations, et ce dans chaque province. Elle s'appelle Sécurité alimentaire Canada. On travaille donc en collaboration. On part du principe que l'alimentation est un besoin essentiel et un droit reconnu, et que ça ne doit pas être simplement considéré au point de vue de la marchandise. Il y a différentes dispositions qui ont démontré le droit à l'alimentation, par exemple dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Je ne suis pas avocate, mais l'Organisation des Nations Unies a un rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation. Il y a aussi la Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire mondiale et la Chartre des droits et libertés de la personne.
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Madame Chevrier, je m'excuse de vous avoir interrompue et je m'excuse auprès des autres participantes aussi, mais il y aura une période de questions, et ce que vous n'avez pas pu présenter, vous pourrez l'insérer dans vos réponses.
Si vous avez des mémoires à présenter, remettez-les, s'il vous plaît, à notre greffier. Il les fera traduire dans l'autre langue, si nécessaire, et nous les fera parvenir. Alors, même si vous n'avez pas eu l'occasion de tout dire, ça nous parviendra quand même.
Je vous remercie, madame Chevrier.
Madame L'Archevêque, du Jardin de la Famille de Fabreville, la parole est à vous, s'il vous plaît.
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Bonjour. Je vous remercie de votre invitation. Contrairement à mes consoeurs, je parlerai surtout de mon organisme. Ce sera beaucoup plus concret.
L'organisme Au Jardin de la Famille a été fondé il y a 20 ans. On s'est donné comme mission d'offrir aux personnes fragilisées et démunies un milieu de vie favorisant l'apprentissage de l'autonomie, la discipline, l'estime de soi et le respect. Notre clientèle est composée de personnes à faible revenu, de personnes vivant avec une déficience intellectuelle ou physique, d'analphabètes ou de personnes peu scolarisées, en difficulté d'apprentissage et de personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale. En tout, il y a 45 personnes au sein de l'organisme.
Je répondrai à la question visant à savoir quelles stratégies et solutions notre organisme met en oeuvre pour réduire la pauvreté et quels éléments de notre programme donnent les meilleurs résultats. Notre stratégie et nos solutions sont de leur offrir un travail concret. On est un service d'entraide. On a ouvert une friperie, où ils apprennent à travailler en magasin, dans le secteur de la vente ou en tant qu'étalagiste ou caissier. Ils apprennent tous les gestes à poser. On a aussi le travail en entrepôt, où ils accueillent la marchandise. Il faut préciser que l'on reçoit beaucoup de dons. Ils apprennent donc à classer et à préparer les vêtements pour la vente. On a aussi d'autres services qui se sont greffés à notre organisme. En 1996, le ministère de l'Éducation du Québec nous a reconnu comme un groupe populaire d'alphabétisation. On fournit aussi de l'aide aux devoirs pour les enfants. On a des ateliers d'informatique, des ateliers de couture et de cuisine collective. Ils apprennent aussi la conciergerie et le budget. Notre objectif est de développer la personne dans sa globalité.
Tous les apprentissages se font dans un environnement structuré, c'est-à-dire qu'ils doivent pointer tout comme en milieu de travail. Ils doivent pointer à l'arrivée et au départ. Ils ont une heure de dîner et des pauses. La friperie est une activité commerciale réelle qui leur procure du travail et qui rend service à la communauté. De notre côté, cela permet l'autofinancement.
Notre projet dernier-né, qui remonte à l'an dernier, est la mise sur pied d'un jardin collectif. Tout le travail qu'on effectue vise à apprendre à nos clients à travailler en groupe, à socialiser, à briser l'isolement et à favoriser leur intégration sociale par des gestes du quotidien. Cela fait en sorte que la personne qui vient chez nous apprend à se débrouiller par elle-même, en vue d'être en mesure de vivre seule en résidence par la suite. On travaille beaucoup à l'acquisition de cette autonomie. Comme vous pouvez le constater, notre bassin de clientèle est composé des plus démunis. Ils ne peuvent même pas travailler dans un centre adapté, parce qu'ils ne sont pas assez rapides.
On fait ce qu'on appelle de la « pré-préemployabilité ». Donc, c'est à long terme. L'élément du programme qui donne les meilleurs résultats est l'ensemble des activités, parce qu'ils apprennent à vivre en groupe, ils socialisent, ils développent plus de confiance en eux-mêmes, ils ont une meilleure estime d'eux-mêmes. Aussi, on les voit s'épanouir et ils sont mieux intégrés à la société. En fait, ce que nous faisons, c'est ce que j'appelle de l'éducation populaire. À l'organisme, ils se retrouvent comme dans une vraie famille.
J'ai voulu répondre aussi à la question visant à savoir quel rôle devrait jouer le gouvernement fédéral dans la lutte contre la pauvreté au Canada et comment il peut s'unir aux provinces et aux organisations communautaires dans cette lutte. Lorsqu'on demande du financement, on aimerait que ce soit beaucoup plus stable et récurrent. En fait, en ce qui concerne les programmes d'IFPCA, lorsqu'on fait une demande de subvention, le montant accordé est de 25 000 $. Si on nous accorde 18 000 $, on doit refaire la demande pour expliquer le changement qu'on va apporter dans notre travail. Donc, le travail est très ardu. Il faut toujours justifier ce qu'on fait.
On aimerait que ce financement soit plus stable. Lorsqu'il s'agit de financement par projet, au bout d'un an, le projet est terminé, et cela a un impact sur la vie de l'organisme parce que ça change tout le temps. C'est épuisant pour nous. On embauche des gens et on doit les remercier parce qu'au bout d'un an, on n'a pas le financement nécessaire pour continuer le projet. Très souvent, nos projets auraient intérêt à être poursuivis, mais c'est impossible.
On est conscients que les besoins du milieu sont là. Malheureusement, devant l'accroissement des besoins, on n'a pas les ressources nécessaires pour les financer et y répondre. Je remarque aussi qu'en ce qui concerne la mesure Contrat d'intégration au travail, qui donne un emploi à sept personnes, d'année en année, le montant accordé diminue.
Or, la maladie de la personne ne progresse pas; son problème demeure le même. Alors, en réduisant le financement, il y a un risque que le travail ne se continue pas. De plus, nous avons besoin de plus de travailleurs, de psychoéducateurs, que nous n'avons pas.
Donc, dans l'ensemble, nous demandons que le financement soit plus stable et récurrent.
Madame Gibeau, vous avez parlé du régime fiscal et de la nécessité de le rendre plus équitable. Hier, nous avons reçu le Rapport de la vérificatrice générale, qui y indique que le gouvernement ne fait toujours pas de budgétisation sexospécifique et qu'il y a des problèmes à l'heure actuelle. Vous avez parlé de la plus faible tranche de revenu, en disant d'abaisser le seuil. Je comprends cette idée-là, je pense. Mais, avez-vous des suggestions à faire au sujet des dépenses fiscales, par opposition aux investissements directs? Je parle, par exemple, du choix entre un réseau de garderies par opposition à un crédit d'impôt pour la garde d'enfants. Voyez-vous ce que je veux dire? Certains programmes passent par le régime fiscal, comme les programmes sociaux qui prévoient un versement direct pour la garde d'enfants, par exemple, ou une aide directe pour l'éducation. Il y a aussi le crédit d'impôt pour la garde d'enfants.
Pourriez-vous me dire quels programmes sont les plus efficaces pour ce qui est de réduire la pauvreté — les investissements directs ou les dépenses fiscales? Je crois connaître la réponse, mais j'aimerais solliciter vos vues sur la question.
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Très bien. Je vais essayer de faire vite, même si c'est difficile.
Selon les statistiques canadiennes pour l'année 2006, les personnes seules qui ne vivent pas avec un membre de la famille, un conjoint, une soeur, etc., sont plus pauvres et ont un niveau de revenu inférieur. À votre avis, que devrait faire le gouvernement du Canada pour aider tout particulièrement les personnes seules au Canada, sans nécessairement avoir recours à une approche axée sur la famille?
Cette question s'adresse à Mme Gibeau ou à l'une ou l'autre des autres invités qui a fait une recommandation précise au sujet de ce groupe de personnes.
Ma prochaine question s'adresse à chacune d'entre vous. Nous étions à Moncton hier et à Halifax précédemment. De façon générale, les gens des autres provinces ne cessent de parler du Québec et le citent en exemple en raison de sa loi-cadre de lutte contre la pauvreté qui date de 2002. D'ailleurs, ils semblent s'en inspirer souvent, enfin le plus souvent possible.
En sachant très bien qu'il faut souvent faire les choses de façon parallèle et concurrente, y a-t-il un segment de la population dont il faudrait d'abord s'occuper? Si oui, quel serait ce segment de la population à qui il faudrait consacrer rapidement notre énergie, notre temps et nos ressources financières, selon vous? Ce pourrait être, par exemple, la petite enfance, les personnes âgées.
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Cela me fait plaisir d'accueillir l'ensemble des femmes qui ont comparu durant cette deuxième partie de notre journée.
Je vais commencer par vous, madame Boucher, car nous avons déjà eu l'occasion de parler de la loi C-10 et du fait que le gouvernement conservateur a, d'une manière éhontée, enlevé aux femmes le droit — parce qu'il s'agit d'un droit — d'avoir un salaire égal pour un travail d'une valeur égale. Il y en a qui croient qu'il s'agit de salaire égal pour un travail égal, c'est-à-dire le fait qu'une femme qui conduit un autobus gagnera le même salaire qu'un homme, mais cela est réglé depuis 50 ans, au Canada. Cependant, la question d'évaluer la valeur du travail et de s'assurer qu'il n'y ait pas de poches de pauvreté du fait que ce sont des secteurs d'emploi occupés principalement par des femmes est une chose à laquelle nous travaillons depuis une trentaine d'années et qui est établie depuis une vingtaine d'années. Et voilà que cela nous a été enlevé! Ce qui est d'autant plus choquant — et ça vaut toujours la peine de le rappeler —, c'est qu'un parti dont le nom contient le mot « liberté », le Parti libéral, a permis aux Conservateurs de faire cela en donnant son appui au gouvernement d'extrême droite de Stephen Harper. Toutes les femmes du Parti libéral ont voté pour enlever aux femmes ce droit fondamental. Cela m'apparaît scandaleux, et nous ne le dirons jamais assez parce que, effectivement, il en va aussi d'une question de pauvreté.
Pour ce qui est de votre intervention, madame Gibeau, je vous remercie d'avoir rappelé une vérité: seulement 43 p. 100 des personnes qui perdent leur emploi sont admissibles à l'assurance-emploi. La ministre Finley ment systématiquement lorsqu'elle dit que 80 p. 100 des gens qui cotisent à la caisse de l'assurance-emploi seraient — elle s'assure de mettre le verbe au conditionnel — admissibles, alors que les gens qui perdent leur emploi, par définition, occupent des emplois plus précaires, sont dans des régions où la précarité du travail et le chômage est plus élevée. Souvent, ils travaillent à temps partiel et n'arrivent jamais à accumuler les heures nécessaires. Ce sont ces gens, qui ont réellement perdu leur emploi, qui n'accèdent pas à l'assurance-emploi. Le 80 p. 100 comprend beaucoup de gens tels que les fonctionnaires, à qui nous n'enlevons pas le droit d'avoir un emploi stable, on s'entend bien, mais on inclut dans ce pourcentage les gens qui ne perdent pas leur emploi. C'est une fiction! On dit qu'il y a des mensonges, des maudits mensonges et des statistiques, et cela fait partie de la catégorie des maudits mensonges statistiques parce que c'est répété par les conservateurs à satiété, mais c'est totalement faux. Je vous remercie d'avoir soulevé ce sujet aujourd'hui.
Madame l'Archevêque, bienvenue. On voit qu'il y a une petite thématique « Ouest de Laval » qui se développe entre vous et Betty McLeod, ce matin. Je me demande pourquoi. Alors, bienvenue. Je ne connaissais pas l'existence de votre organisme. Votre présentation était fort intéressante.
Madame Chevrier, pour ce qui est des cuisines collectives, c'est merveilleux de vous entendre expliquer cela. C'est d'une telle limpidité et le fruit de votre travail est tellement positif que c'est un plaisir de vous entendre.
Je veux revenir à Mme Boucher et lui demander concrètement quelles démarches et quelles actions la CSN préconise pour renverser cette tragédie que constitue la loi C-10. Il y a des libéraux de Terre-Neuve, par exemple, dont la conscience ne leur permettait pas d'appuyer le budget et qui ont obtenu de Michael Ignatieff l'autorisation de voter contre le budget. Les femmes libérales, elles, n'ont pas eu la même autorisation de voter contre le fait d'enlever aux femmes leur droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale, et aucune d'entre elles ne s'est manifestée.
Quelles actions concrètes peuvent être entreprises pour renverser cette situation pour le moins troublante dans une société libre et démocratique?
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Merci, madame la présidente.
[Français]
Je pense que j'ai une question très importante et très difficile.
[Traduction]
Je voudrais dire que M. Mulcair, me semble-t-il, joue dangereusement avec la vérité lorsqu'il présente des statistiques, et je me dois donc de prendre quelques minutes pour corriger ce qui me semble être des inexactitudes.
Les statistiques démontrent clairement que, parmi ceux qui cotisent à l'assurance-emploi et perdent leur emploi pour des raisons indépendantes de leur volonté, entre 80 et 82 p. 100 sont en droit de recevoir des prestations. Évidemment, il faut faire encore mieux, mais ce sont les faits d'après les statistiques qui nous ont été données par l'autorité responsable.
Il y a peut-être une divergence d'opinions à ce sujet, et c'est tout à fait normal, mais, à mon avis, il ne convient pas de jouer au petit jeu qui semble plaire à M. Mulcair.
Deuxièmement, j'aimerais parler un peu du crédit d'impôt universel pour enfants. Je sais que, lorsque j'étais au café dans une petite localité que je visitais, les mères de famille à qui j'ai parlé m'ont dit, en réponse à ma question, qu'elles recevaient 9 600 $ pour leurs enfants âgés de moins de six ans qu'elles trouvaient extrêmement utiles.
Contrairement aux affirmations de M. Mulcair, qui parle du fait qu'on leur a enlevé des droits, beaucoup de jeunes mères de famille m'ont fait savoir qu'elles sont très contentes de bénéficier de cet avantage. Il faudrait peut-être faire davantage — je suis prêt à accepter cette idée-là, mais je préfère ne pas enlever des choses aux gens.
Pour ce qui est du nombre de places dans les garderies, vos observations me semblent justes. Il faut faire davantage dans ce domaine. À l'heure actuelle, nous accordons 250 millions de dollars par année aux provinces pour la création de nouvelles places dans les garderies. Dans ma province de la Saskatchewan, par exemple, le budget a récemment indiqué la création de 1 000 nouvelles places, et nous avons su qu'à Halifax, en Nouvelle-Écosse, la province compte créer 1 050 places additionnelles. Pour moi, ce sont des progrès intéressants et il faut continuer sur notre lancée et en créer d'autres éventuellement; mais, je serais très réticent à enlever des prestations à qui que ce soit.
S'agissant du Transfert canadien en matière de programmes sociaux et de l'éducation, vous avez raison. Il est juste de dire qu'à l'époque de M. Martin, les transferts aux provinces et notamment le Transfert canadien en matière de programmes sociaux ont été réduits de 25 milliards de dollars. Il ne fait aucun doute que cette réduction a dû nuire à la situation des personnes les plus vulnérables. Mais, je peux vous affirmer que, depuis que nous sommes au pouvoir, nous augmentons les paiements de transfert aux provinces d'année en année. Nous leur avons réservé 350 millions de dollars par an d'argent frais en 2009-2010 pour l'éducation, et l'affectation passera à 430 millions de dollars en 2012-2013. En fait, le financement des études postsecondaires en vertu du Transfert canadien en matière de programmes sociaux a augmenté de 40 p. 100. Ce n'est pas une somme insignifiante. Je suis prêt à reconnaître que nous pourrions faire plus, mais il reste que c'est cela la réalité sur le terrain.
Bien sûr, il y a aussi les allocations de 250 $ et de 150 $ pour les Canadiens à faible revenu et à revenu moyen, respectivement, allocations qui ne sont pas remboursables, et toutes sortes d'autres groupes ont également été ciblés. À mon avis, l'éducation est importante, et des mesures de ce genre sont donc nécessaires.
On peut se demander s'il y a lieu de rattacher davantage de conditions aux transferts aux provinces. Je sais que nous en avons beaucoup entendu parler, puisque les gens se demandent, lorsque nous accordons des augmentations année après année, si les crédits sont utilisés pour ce pourquoi ils ont été affectés au départ. Je suppose que c'est une question légitime. Je sais qu'il existe des accords entre les provinces et le gouvernement fédéral, et c'est un autre élément qu'il faudrait peut-être examiner.
Je désire également répliquer à l'affirmation selon laquelle rien n'est fait pour les travailleurs plus âgés, car le fait est que des mesures ont été prises pour les aider. Je voudrais les passer un peu en revue, et en ce qui concerne l'assurance-emploi…
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Merci. Je n'accepte pas la prémisse émise par la présidente.
Donc, la somme annuelle de 60 millions de dollars est prévue pour aider spécifiquement les travailleurs plus âgés; il y a également 500 millions de dollars pour aider les travailleurs de longue date à bénéficier de programmes de formation additionnelle, et ce pour une plus longue période; 5 millions de dollars pour aider les personnes qui ne sont pas jugées admissibles à l'assurance-emploi; et aussi, plusieurs milliards de dollars ont été investis dans les programmes de formation et de perfectionnement. La somme globale consacrée à l'assurance-emploi, y compris les prestations accrues et la prolongation des prestations, est de l'ordre de 4,5 milliards de dollars.
Cela dit, il est possible que d'autres améliorations s'imposent, et je suis prêt à accepter que ce soit le cas; mais, je ne pense pas qu'il soit juste de prétendre que rien n'a été fait. Peut-être faut-il faire davantage, et c'est évidemment pour cette raison que nous sommes là pour vous écouter et pour entendre vos recommandations. En même temps, il me semble important de reconnaître que certaines mesures ont déjà été prises.
Merci, madame la présidente.
En ce qui concerne l'équité salariale, je tiens à préciser, très rapidement, que toutes les femmes qui font partie de notre caucus et tous nos membres sont en faveur d'une loi proactive sur l'équité salariale. Nous avons donc exprimé notre opposition à la mesure proposée par le gouvernement. D'ailleurs, si on avait tenu d'autres élections trois mois après les dernières, cela n'aurait pas réglé le problème; de toute façon, nous comptons déposer un projet de loi proactif sur l'équité salariale si nous prenons le pouvoir la prochaine fois. Notre chef s'est engagé à le faire, et je prends le même engagement aujourd'hui. Je vais en rester là, car je ne veux pas poursuivre cette discussion.
Je voudrais plutôt en revenir à la discussion de tout à l'heure. J'aimerais développer un peu la réponse de Mme Gibeau tout à l'heure, de même que celle de Mme Boucher, concernant l'opportunité d'investir dans les services, par opposition aux mesures fiscales. C'est une question qui me semble très importante, car certains gouvernements ont tendance à recourir fréquemment aux mesures fiscales pour exécuter divers programmes sociaux, ce qui veut dire que les femmes, notamment, et les Canadiens à faible revenu, sont systématiquement exclus.
Donc, je comprends ce que vous dites au sujet de la prestation de 1 200 $ que vous avez mentionnée, ainsi que la prestation fiscale pour enfants. Nous avons reçu de nombreux témoignages au sujet de la prestation fiscale pour enfants, qui pourrait passer à 5 000 $. Il conviendrait également de renforcer la PFRT. Il y aurait également le programme d'apprentissage et de garde des jeunes enfants — afin d'en assurer la qualité, l'accessibilité, etc. — de même qu'une stratégie nationale sur l'habitation, stratégie qu'on pourrait élaborer. En vous fondant sur votre expérience, pourriez-vous nous faire d'autres suggestions sur des mesures qui nous permettraient de nous éloigner de la structure fiscale pour investir directement dans les citoyens et leurs familles?
Ma question s'adresse à Mme Boucher, à Mme Gibeau et aux autres qui voudraient répondre, étant donné que ce sont elles qui en ont parlé au départ.
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Je crois que Mme Gibeau a répondu à la question. En même temps, je pense que le gouvernement fédéral doit tenir compte des dynamiques des régions, et particulièrement du Québec, en ce qui a trait, entre autres, à toute la question des CPE, les centres de la petite enfance. Ce qui a été développé est extraordinaire et fait en sorte que le service est offert à un coût moindre. Cet argent aurait dû être redonné au Québec pour qu'il puisse créer de plus en plus de places. Cela permet aussi à des femmes de pouvoir réintégrer le marché du travail et de se sortir de la pauvreté, parce qu'elles sont capables de confier les petits enfants aux CPE. De plus, cela nous permet de rehausser notre niveau de vie. Il faut que cela soit compris.
On dirait que les gouvernements ont l'impression qu'ils sortent l'argent de leur poche et qu'ils sont un peu gênés d'aider. Ce ne sont pas des dépenses, ce sont des investissements et c'est ainsi qu'on doit considérer la chose.
La question du financement du postsecondaire, c'est de l'investissement, ce n'est pas une dépense. Le fait de donner de l'argent pour créer des garderies, des CPE, ce n'est pas une dépense, c'est un investissement. Quand on aura compris ça... On contribue largement, par nos impôts et nos taxes, à faire en sorte que cet argent puisse être redistribué équitablement et non lancé dans des aventures telles que l'armement. Quant à moi, ce sont des choix politiques et ce ne sont pas les choix dans lesquels on veut s'investir. On ne veut pas opter pour ces choix, mais pour une société plus juste, plus équitable. Mme Chevrier a dit qu'il n'y avait pas de catégories de pauvres, et je suis d'accord avec elle. Il y a des pauvres et il faut qu'on puisse les soutenir.
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Merci, madame la présidente.
Je tiens à dire à nos témoins, au nom de M. Mulcair, que je présente les excuses du comité pour sa tirade partisane. Si je me fonde sur mon expérience aux réunions du passé — nous en avons eu 29 en tout jusqu'ici — je peux vous affirmer que M. Lessard, Mme Beaudin, Mme Minna, M. Savage, qui est absent aujourd'hui, Mme Folco, M. Komarnicki et d'autres collègues se gardent toujours de faire des observations partisanes, car nous savons tous que les remarques partisanes ne permettent pas de faire avancer le dossier. Je précise également que certains des collègues de M. Mulcair, qui l'ont remplacé par moments lorsqu'il n'était pas disponible, ont également évité d'en faire.
Je trouve donc ce genre de comportement tout à fait regrettable, car nous voulons sincèrement écouter ce que vous avez à dire pour être en mesure de soumettre un bon rapport à l'examen du gouvernement.
Cela dit, je voulais vous dire, Janine, que j'apprécie beaucoup vos observations au sujet de l'aide que fournit votre groupe aux personnes qui ont besoin d'apprendre à gérer leurs finances. Pour moi, c'est une lacune dans notre système d'éducation. À l'école secondaire, à l'université et au collège, nous apprenons toutes sortes de choses aux jeunes, mais nous ne leur apprenons pas à gérer leurs finances. Donc, j'apprécie beaucoup le fait que votre groupe le fasse.
L'un des thèmes qui sont ressortis de nos rencontres avec divers témoins est le fait que, s'agissant des transferts aux provinces, les sommes transférées ne sont malheureusement pas toujours investies dans les secteurs où les besoins sont les plus impérieux. Vous avez entendu la même chose en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick. Je voulais donc solliciter les vues de nos témoins sur les paiements de transferts, car nous savons tous qu'ils ont été augmentés. Mais, si ces crédits sont investis dans des domaines particuliers, comme le logement abordable, les mesures de soutien du revenu, etc.…
Madame Gibeau, je pense que vous avez fait un commentaire à ce sujet, et je vous invite donc à réagir.
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Effectivement, des emplois sont créés, mais je pense qu'on est toujours en période de crise et je ne voudrais pas qu'on crie que c'est terminé. Il faut être bien conscient de la situation. Tout le secteur de la foresterie au Québec est encore extrêmement touché, il y a eu très peu d'investissements du fédéral dans ce secteur, contrairement à ce qui a pu être fait en Ontario dans celui de l'automobile.
Si vous permettez, madame Folco, j'ai senti que le premier député conservateur à s'exprimer avait posé une question. Il a dit que le gouvernement avait mis beaucoup d'argent dans la formation pour la qualification de la main-d'oeuvre, dans le cadre de l'assurance-emploi. Mais ce dont il est question par rapport aux personnes âgées, ce n'est pas ce qui est placé dans la formation. Ce n'est pas cela qui est remis en question, mais ce qu'on fait pour les personnes de 55 ans et plus que nous appelons, dans un langage très québécois, des noyaux durs. Ce sont des personnes incapables de retourner sur les bancs d'école, qui ont 55 ou 56 ans et qui sont incapables de prendre leur retraite, pour toutes sortes de raisons. Ils sont analphabètes dits fonctionnels ou à peu près, et on leur demande, parce qu'ils ont toujours été machinistes ou qu'ils ont toujours fait le même travail depuis l'âge de 15 ans, de suivre une formation. Ça représente très peu de personnes. Dans une entreprise où 100 personnes sont mises à pied collectivement, on peut en trouver une ou deux. C'est d'eux que l'on parle. Depuis que le gouvernement fédéral a annulé le PATA, plus rien n'a été fait pour ces personnes. C'est de cela que je parle et c'est de cela que parlent les organisations syndicales au Québec.
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Je voudrais toutes — je ne dirai pas tous et toutes — vous remercier d'être venues. J'ai peut-être un ou deux commentaires à faire.
Au sujet de la création d'emploi, je suis bien d'accord sur ce qui vient d'être dit. La création d'emploi qui est survenue dernièrement, nous le savons, touche surtout les emplois de personnes autonomes et de personnes travaillant dans les PME. Ce qui veut dire, en réalité, que de vrais emplois n'ont pas été créés. Les personnes qui ont été remerciées ont créé leur propre emploi, et on ne sait pas pour combien de temps. Il est clair que lorsqu'on est au chômage, on va tout faire pour se créer quelque chose avec le petit peu d'argent qu'on a en banque. J'en parle d'expérience. Alors, on essaiera de créer une petite entreprise, et c'est ça qui a été créé. Donc, le fait que les chiffres ont baissé — et là, je suis bien d'accord sur ce que vient de dire Mme Boucher — n'est pas du tout, à mon avis, une indication du fait que l'économie canadienne ou québécoise a peut-être repris de la vigueur. Ce n'est pas cela du tout, selon moi.
Deuxièmement, je voudrais appuyer le commentaire — et je serai partisane à ce sujet, puisque d'autres ont ouvert la porte — de Mme Minna. Les lois C-6 et C-10, je vous le rappelle à tous, étaient contenues dans un budget, et on a eu un sentiment très fort — c'était plus qu'un sentiment — que la population canadienne ne voulait pas d'une autre élection. Trente millions de dollars allaient être dépensés en période de crise économique. Et on a voté comme on a voté. Mme Minna a très bien indiqué que notre leader et nous-mêmes, Mme Minna et moi, avons dit on the record, comme on dit en anglais, que lorsque les libéraux reviendront au pouvoir, cette question sera réglée à la façon libérale.
Alors, je vous remercie toutes d'être venues.
Monsieur Lessard vous voulez ajouter un mot?
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Je me dois d'affirmer que, en réalité, nous avions convenu d'avoir un premier tour de sept minutes, et un deuxième tour de cinq minutes et de cinq minutes. Vous avez dit vouloir lever la séance à midi, ce qui ne semblait pas possible tout à l'heure, mais l'est maintenant.
Permettre à M. Lessard de faire une tirade et de faire des accusations qui, selon moi, sont parfaitement fausses n'est pas approprié et je ne suis pas prêt à tolérer cela. Il faut au contraire remettre les pendules à l'heure.
Madame la présidente, vous avez parlé de remarques partisanes tout à l'heure, et je pense que vous feriez bien de suivre vos propres conseils. Cet après-midi, il faudrait que tous évitent de le faire. C'est une simple manoeuvre politique qui n'aide aucunement les personnes les plus vulnérables. À mon avis, tous doivent cesser de le faire. Cela ne sert à rien. Nous ne sommes pas d'accord, et nous devons simplement reconnaître qu'il existe un désaccord.
Pour moi, la réunion est terminée. Vous avez empêché les membres de continuer à poser des questions, et maintenant vous vous permettez un discours politique de la pire espèce.
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Il s'agissait d'un rappel au Règlement, madame la présidente. Je vais quand même tenter de poser ma question dans les limites des quatre minutes.
Le ministère lui-même reconnaît, de par ses chiffres, que parmi les personnes cotisant à l'assurance-emploi, 67 p. 100 reçoivent des prestations. Or, compte tenu de tous ceux qui perdent l'assurance-emploi et qui, de facto, sont exclus à cause des restrictions du régime, 46 p. 100 seulement en reçoivent. Ce sont les chiffres du ministère. Les nôtres sont moins élevés.
Madame, vous avez tout à fait raison. On s'attaque à ce qu'a affirmé M. Mulcair, et du même coup, on s'attaque à vous, étant donné que vous avez affirmé exactement la même chose. Je trouve ça dommage.
Ma question s'adresse à Mme Chevrier. Elle pourrait très bien nous éclairer. Je pars d'un constat qui reflète bien l'état de notre société. Lorsque survient une crise économique, ce sont les femmes qui la subissent le plus lourdement. Lorsqu'on leur enlève des moyens pour sortir de la crise, comme on l'a vu récemment, les choses s'aggravent.
Vous nous avez dit réclamer le droit pour tous à une alimentation répondant à certains critères. À votre avis, de quelle façon le gouvernement fédéral peut-il assurer ce droit à l'alimentation?
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Je voulais vous exprimer mon malaise par rapport à ça. Je n'étais pas venue pour ça, ce matin.
On a abordé le sujet des programmes de logement. Je pense que nos collègues du Québec qui luttent pour un logement abordable font un très bon travail. Le logement répond à un besoin essentiel.
Cependant, il est clair qu'on oublie que l'alimentation est aussi un besoin essentiel. Quand les coûts liés au logement ou au transport augmentent, dans quoi les gens peuvent-ils couper? Dans la nourriture.
C'est la raison pour laquelle on dit qu'il faut mettre en place des mesures pour permettre aux gens de manger mieux. En effet, bien manger a un impact sur la santé physique, intellectuelle, etc. Il faut qu'il y ait des programmes qui permettent de faciliter la bonne alimentation des gens. C'est ainsi qu'ils pourront avoir plus d'énergie pour retourner au travail ou aux études, selon leur situation.
La bataille concernant le logement a avancé beaucoup depuis 20 ans. Toutefois, la bataille concernant l'alimentation n'a pas avancé du tout. Je pense que c'est une priorité que vous devriez considérer. Je vous ai nommé, tout à l'heure, des organisations qui ont des choses à vous proposer à cet égard, soit le collectif pour une politique nationale de l'alimentation, au Québec, et Sécurité alimentaire Canada. Je vous invite à les contacter pour qu'ils vous donnent des solutions précises à ce sujet.
On a parlé aussi de la crise économique. J'ai hâte, par contre, qu'on parle d'une crise économique et sociale, puisque la crise économique touche des personnes. On parle aussi des industries, mais ça touche particulièrement des personnes, des gens qui se retrouvent sans nourriture et sans argent pour payer leur logement. Quand ces personnes sont en difficulté, elles vont voir d'abord les organisations communautaires, soit les organismes de leur milieu, comme celui de Mme L'Archevêque, ainsi que les 1 400 cuisines collectives qui offrent des services partout dans la province.
Je vais terminer en parlant des besoins des cuisines collectives. On a évalué que les groupes de cuisines collectives avaient besoin de 6,5 millions de dollars, seulement pour pouvoir accomplir leur mission. On compte, dans certaines organisations, 300 personnes qui attendent de faire partie d'un groupe de cuisines collectives. Toutefois, on n'a pas les moyens de leur offrir une place dans ces groupes.
Je reviens donc à nos revendications pour faire respecter le droit à l'alimentation.
Je dirais en réponse que, si vous augmentez les prestations, les cotisations devront également augmenter, à moins de bloquer le taux de cotisations. Si on décidait à l'avenir d'augmenter les prestations… Nous les avons bloquées pendant deux ans et, en ce qui me concerne, c'est un progrès. Par le passé, les sommes qui s'accumulaient dans la Caisse d'assurance-emploi étaient versées au Trésor, et ce à une époque où nous n'étions pas nécessairement au pouvoir. Qu'il soit bon ou mauvais, c'est ainsi que fonctionne le système, si bien qu'il n'existe pas de fonds à partir duquel on pourrait financer diverses initiatives. Il faudrait prévoir les sommes nécessaires au budget.
Une autre mesure que nous avons prise à l'égard du Programme d'assurance-emploi a consisté à prolonger le Programme de partage du travail, à assouplir les règles qui le sous-tendent et à faire passer le nombre de semaines à 52 pour le partage du travail. Voici ce qu'en a dit le représentant de l'Association des produits forestiers du Canada:
La prolongation du Programme de partage du travail permettra à des milliers d'employés du secteur forestier de conserver leur emploi en attendant que les conditions du marché s'améliorent, aidera les travailleurs à maintenir leurs précieuses compétences, positionnera les compagnies pour que ces dernières puissent profiter pleinement de la future reprise économique et atténuera l'incidence sur les collectivités des mises à pied et de la fermeture des usines.
Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que c'est un progrès et qu'il faudrait en faire davantage? Pensez-vous que cela ait pu aider ce secteur-là, jusqu'à un certain point? Je comprends ce qu'a dit Mme Boucher, me semble-t-il, à savoir que la somme de 1 milliard de dollars pour le Fonds d'adaptation des collectivités n'a pas encore commencé à être répartie, mais elle le sera éventuellement.
Allez-y, madame Boucher ou madame Gibeau.