AGRI Réunion de comité
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STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD
COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 3 mai 2001
Le président (M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.)): Bonjour à tous. La séance est ouverte.
Nous examinons aujourd'hui le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la Société du crédit agricole et d'autres lois en conséquence.
Je voudrais souhaiter la bienvenue au secrétaire parlementaire qui, je le suppose, gagne son salaire ce matin en remplaçant le ministre. Je donne donc la parole à Larry et aux représentants de la Société du crédit agricole.
M. Larry McCormick (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Bonjour, monsieur le président et membres du comité.
Je veux lire aux fins du compte rendu certaines observations au nom du ministre concernant le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la Société du crédit agricole et d'autres lois en conséquence. Mais tout d'abord, si vous me le permettez, monsieur le président, avant de faire mon exposé au nom du ministre, j'aimerais donner la parole à M. Ryan qui est le président-directeur général et lui demander de présenter les deux personnes qui l'accompagnent.
M. John Ryan (président-directeur général, Société du crédit agricole): Monsieur le président, mesdames et messieurs, bonjour.
C'est un plaisir d'être ici ce matin pour vous parler du projet de loi C-25. Je suis accompagné de Louise Neveu, notre vice-présidente exécutive et chef de gestion du savoir, et de Moyez Somani, le vice-président exécutif et administrateur supérieur des affaires financières.
M. Larry McCormick: Merci, monsieur Ryan.
Chers collègues, c'est aujourd'hui que s'amorcent les audiences sur les modifications proposées à la Loi sur la Société du crédit agricole. Elles sont présentées en détail dans le projet de loi C-25. Nous discuterons du rôle de la SCA en tant que société d'État fédérale dont le mandat consiste à répondre, aujourd'hui et à l'avenir, aux besoins changeants de l'agriculture.
Comme vous le savez tous, les secteurs agricole et financier ont évolué de façon marquée depuis que la Loi sur la Société du crédit agricole a été modifiée la dernière fois, en 1993. Les modifications proposées visent donc à combler les lacunes qui se sont créées sur le marché des services financiers et commerciaux au cours des dernières années. L'an dernier, la SCA a rencontré les représentants de plus d'une centaine d'organisations agricoles et financières. Elle voulait connaître leur opinion sur les besoins de services financiers et sur la façon dont la loi pouvait être modifiée pour aider à les combler. La majorité des organisations agricoles se sont montrées en faveur des changements proposés. Compte tenu des commentaires formulés par les organisations consultées, les modifications s'articulent autour des principes directeurs suivants. Le projet de loi permettra d'élargir l'éventail de services financiers et commerciaux offerts aux exploitants agricoles. Il permettra d'accroître les sources de financement à la disposition des entreprises qui sont liées à l'agriculture et qui profitent aux producteurs primaires. Il permettra d'accroître la souplesse structurelle de la Société pour lui permettre de combler de façon plus efficace les besoins des producteurs et des entreprises liées à l'agriculture.
Permettez-moi maintenant de passer brièvement en revue les modifications qui ont été présentées à la Chambre des communes le 5 avril dernier.
Une importante modification propose le changement du nom de la société à Financement agricole Canada, afin de mieux refléter son identité fédérale. En anglais, le nom sera changé à Farm Credit Canada. Ce changement dénote clairement l'engagement du gouvernement fédéral envers l'agriculture et le secteur rural canadien.
Une autre modification permettra à la Société d'offrir des services commerciaux aux producteurs et aux entreprises liées à l'agriculture. Ces services seront complémentaires à ceux qui existent déjà, et la Société les offrira bien souvent en partenariat avec d'autres organismes. Le personnel de la SCA est reconnu pour son expertise agricole. La SCA pourra, grâce au partenariat, utiliser cette expertise pour offrir aux producteurs davantage d'outils de gestion d'entreprise et, en bout de ligne, les aider à réussir à long terme. Cette modification aura pour effet d'accroître l'accès à des services commerciaux dans les milieux ruraux à la grandeur du pays.
• 0910
Le projet de loi C-25 permettra à la SCA de servir les
entreprises liées à l'agriculture dont les activités profitent à
l'agriculture, qu'elles appartiennent ou non à des agriculteurs.
Depuis la dernière modification de la loi en 1993, la SCA a pu
prêter qu'aux entreprises liées à l'agriculture appartenant en
majorité à des agriculteurs. Cette restriction a limité la capacité
de la Société de financer bon nombre d'entreprises liées à
l'agriculture, dont les activités profitent aux producteurs
primaires et créent des emplois dans le secteur rural canadien. Les
secteurs de l'industrie agricole sont devenus, au cours des
dernières années, de plus en plus interdépendants. La réussite des
producteurs est en effet étroitement liée à la santé économique des
entreprises liées à l'agriculture, tant en aval qu'en amont de la
production. En favorisant la croissance du secteur de la valeur
ajoutée, la SCA contribuera à la création de nouveaux débouchés
pour les producteurs primaires, ce qui renforcera l'économie
rurale.
Parallèlement, la Société demeurera principalement axée sur les producteurs primaires. Le gouvernement a inclus une modification au projet de loi C-25 qui engage la Société à demeurer axée sur ce secteur de l'industrie.
Une autre modification vise à clarifier le pouvoir de la SCA en matière d'offre de services de crédit-bail aux exploitants agricoles, directement ou en partenariat. Dans le secteur agricole, le crédit-bail est une option de financement de plus en plus importante pour les producteurs qui désirent davantage de souplesse pour gérer leurs liquidités. La loi de 1993 n'interdit pas à la SCA d'offrir du crédit-bail, mais la modification permet de mieux définir l'étendue des services de la Société dans ce domaine.
La capacité d'offrir du capital-risque est une autre modification que la SCA a présentée dans le but de favoriser la croissance de l'ensemble du secteur. Une étude nationale portant sur le capital-risque révèle que sur les 2,7 milliards de dollars investis en 1999, seulement 2,6 p. 100 l'ont été en agriculture. De toute évidence, il existe un besoin réel de capital-risque dans le secteur. La SCA fournira du capital-risque aux producteurs et aux entreprises liées à l'agriculture, soit directement soit en partenariat avec d'autres intervenants. Cette modification permettra à la SCA d'agir comme catalyseur afin d'attirer le capital-risque dont le secteur agricole rural a besoin. La SCA ne pouvait auparavant satisfaire aux besoins de financement par actions des clients potentiels.
J'en arrive maintenant aux modifications législatives concernant la structure d'entreprise. Pour la SCA, le partenariat avec d'autres organismes ou d'autres institutions financières a toujours été un moyen privilégié de fournir des produits et des services. C'est pourquoi les modifications présentées dans le projet de loi clarifieront la capacité de la SCA de créer ou de faire partie de consortiums financiers. Les consortiums financiers permettent de répartir le risque entre les partenaires. En ayant la possibilité de créer des consortiums, la SCA permettra aux producteurs agricoles d'accéder à toute une gamme de nouveaux services et ce, sans mettre en péril son portefeuille de prêts actuel. La modification permettra à la SCA d'accroître son rôle de catalyseur au sein du secteur du fait qu'elle donnera accès au marché agricole à de nouvelles options de services financiers et commerciaux innovateurs.
Une des modifications vise à conférer à la SCA le pouvoir de créer des filiales. Elle donne essentiellement à la SCA un moyen de pénétrer de nouveaux secteurs d'affaires, seule ou en partenariat, tout en réduisant le risque actuel auquel son portefeuille de prêt est exposé. Par l'entremise de filiales, la SCA pourra isoler certaines initiatives d'affaires qui diffèrent nettement de ses activités de base. Les investissements de capital-actions et le crédit-bail sont des exemples de ce genre d'initiatives.
Une autre modification augmente la capacité de gestion du risque de la Société. Comme la diversité et la complexité des services de la SCA ne cessent de croître, la Société a besoin d'une plus grande marge de man«uvre pour gérer sa position de risque. Grâce à cette modification, la SCA aura accès à une gamme élargie d'outils de gestion du risque, ce qui lui permettra de combler le besoin croissant de services et de capital. Cette même modification permettra à la SCA d'affecter des valeurs et de l'encaisse en garantie. La Société pourra conclure des contrats de gestion et respecter ses obligations en vertu de ceux-ci. Elle disposera ainsi d'une plus grande marge de man«uvre pour gérer le risque.
Deux modifications ont trait à des besoins de régie interne. À l'heure actuelle, le président-directeur général de la SCA a le pouvoir d'agir à titre du président du Conseil d'administration, si ce dernier est absent ou si le poste est vacant. La modification fait en sorte que le Conseil nomme un président du Conseil par intérim qui n'est pas un employé de la Société. Dans la même veine, le Conseil pourra nommer un président-directeur général par intérim si le poste est vacant ou si le titulaire est empêché.
• 0915
L'autre modification liée à la régie d'entreprise précise que
le changement de nom de la Société n'a aucune incidence sur ses
obligations légales.
En conclusion, monsieur le président, le gouvernement fédéral croit que les modifications comprises dans le projet de loi C-25 sont pertinentes et nécessaires pour que la SCA puisse continuer de combler les besoins du secteur agricole. Grâce à ce projet de loi, la SCA pourra continuer d'être une force stabilisatrice au sein du secteur agricole, par la prestation de services peu importent les cycles de l'agriculture. La Société sera plus en mesure de satisfaire aux besoins des producteurs pendant tout le cycle de vie de leur exploitation, du démarrage à la retraite. Les entreprises liées à l'agriculture auront plus facilement accès à du capital et à des services. Elles pourront ainsi contribuer davantage à la solidité du secteur agricole et favoriser la création d'emplois et la croissance économique des collectivités rurales. Enfin, la SCA pourra miser sur son rôle de catalyseur au sein du secteur. Par l'entremise de partenariats, elle favorisera l'offre de services innovateurs à l'agriculture et attirera des investissements accrus dans le secteur rural canadien.
Je vous remercie de votre attention.
M. Ryan, président-directeur général de la Société du crédit agricole, M. Dale Canham et tous ceux qui se joindront à M. Ryan m'ont accompagné aujourd'hui. Ils sont certainement des plus qualifiés et j'espère qu'ils pourront répondre à toutes vos questions.
Merci à tous mes collègues.
Le président: Merci, monsieur McCormick.
Nous allons donc commencer notre période de questions. Je dirai tout simplement qu'en ce qui concerne le succès de la Société au cours des 10 dernières années, nous voyons les choses certainement de façon plus positive qu'à l'époque étant donné ce qui s'est passé pendant les années 80.
Notre comité doit faire un examen détaillé des changements et grâce à ces changements, j'espère que la Société du crédit agricole—ou l'organisme qui porte maintenant un nouveau nom—sera un succès pour la génération à venir.
David, voulez-vous commencer la période de questions?
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, AC): Certainement.
Je reconnais que la Société du crédit agricole a joué un rôle important dans le secteur agricole canadien, particulièrement dans notre région, le sud-ouest de la Saskatchewan. Elle y a joué un rôle important.
Nous avons examiné le projet de loi. Nous avons eu un premier jour de débat sur ce dernier. Ma principale préoccupation—et notre principale préoccupation—c'est qu'à notre avis le projet de loi accroît la position de la SCA bien au-delà de la ferme. Jusqu'à présent, les producteurs primaires devaient être soit bénéficiaires du prêt, soit contrôler l'exploitation pour lesquels les prêts avaient été accordés.
J'appuie fermement la diversification du développement dans nos régions, mais j'ai une préoccupation. Nous avons besoin que l'on nous rassure sur des questions spécifiques. Qu'est-ce qui va protéger ces producteurs primaires, ce groupe traditionnel d'emprunteurs, qui ont souvent de la difficulté à obtenir du crédit des autres institutions? Je sais que votre projet de loi dit qu'on continuera de mettre l'accent sur les exploitations agricoles, mais nous avons besoin qu'on nous rassure davantage. J'aimerais simplement que vous répondiez à cette question.
M. John Ryan: Je pense, monsieur le président et honorable député, que c'est une très bonne question. C'est une question qui a été soulevée à maintes reprises au cours des consultations que nous avons tenues au cours des 12 derniers mois. Bon nombre de groupes d'agriculteurs ont posé la même question, et notre réponse à l'époque était—et continue d'être—qu'il est clair que ce que nous tentons de faire ici, c'est d'apporter des changements qui profiteront davantage aux producteurs primaires, et non pas de leur enlever quoi que ce soit. À mon avis, ce n'est pas du tout l'un ou l'autre, c'est-à-dire appuyer les entreprises agricoles ou appuyer le producteur primaire, mais une combinaison des deux.
En ce qui concerne plus spécifiquement votre question, lorsque nous avons parlé aux divers groupes agricoles, plus particulièrement à la Fédération canadienne de l'agriculture, ils ont exprimé cette préoccupation. Je leur ai dit: «Proposez-moi le libellé que vous aimeriez voir dans le nouveau projet de loi qui vous donnerait l'assurance nécessaire que la Société ne s'éloignera pas de son objectif principal, qui est le producteur primaire».
Le sommaire du projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui dit très clairement que l'accent sera mis sur les producteurs primaires. Cela deviendra loi lorsque le projet de loi sera adopté, et à ce moment-là, nous devrons adhérer à ce principe.
Pour ce qui est des freins et contrepoids, nous avons un Conseil d'administration qui s'en occupera de très près. Par-dessus tout, il y a le Bureau du vérificateur général qui sera notre vérificateur. Il fera une vérification annuelle de la Société ainsi qu'une vérification spéciale tous les cinq ans. Naturellement, le BVG devra déterminer si nous respectons l'intention et l'objectif du mandat et la loi comme telle.
• 0920
Par ailleurs, nous devons présenter un plan d'entreprise
annuel qui doit être approuvé par le ministère de l'Agriculture, le
Conseil du Trésor et le ministère des Finances. Dans ce plan
d'entreprise, nous devons préciser clairement quelles sont les
intentions et l'orientation de la Société, non seulement pour une
période d'un an, mais pour une période de cinq ans. Ce plan est
revu chaque année, et ces ministères auront la possibilité à ce
moment-là de donner ou non leur accord.
M. David Anderson: Ce qui me préoccupe, c'est que, dans ma région, les entreprises qui diversifient leur activité sont pour la plupart contrôlées par des producteurs ou appartiennent à des producteurs. Nous n'avons pas vraiment d'apport financier de l'extérieur. Dans la modification que vous proposez, il est question d'«entreprise liée à l'agriculture», qui est définie en ces termes:
-
entreprise dont l'activité principale est la production, le
transport, l'entreposage, la distribution, l'approvisionnement ou
la transformation soit de moyens de production destinés à des
exploitations agricoles, soit de produits de ces exploitations, ou
l'adjonction de valeur à ceux-ci.
La définition est tellement large qu'elle englobe presque tout.
Il me semble que la modification pourrait en fait, à certains égards, réduire le financement offert aux petits emprunteurs. J'aimerais savoir s'il y a des dispositions dans le projet de loi C-25 qui empêcheraient la SCA de pouvoir à un moment donné venir au secours de grandes entreprises qui n'appartiendraient pas à des producteurs. Je songe ici à cette rumeur voulant que le Wheat Pool se soit adressé au gouvernement de la Saskatchewan il y a un an environ pour demander de l'argent; il a été impossible de confirmer ou d'infirmer la rumeur. Y a-t-il quelque chose dans le projet de loi qui pourrait empêcher la SCA d'injecter des sommes importantes dans une entreprise comme celle-là?
M. John Ryan: Je crois que je vais me reporter au projet de loi, à l'article qui contient l'énoncé de mission, à savoir le paragraphe 4(1), où il est précisé que la mission est de servir en priorité les petites et moyennes entreprises agricoles. C'est donc bien précisé dans le projet de loi en tant que tel. Ainsi, Sask Wheat Pool n'entrerait pas dans la catégorie des petites et moyennes entreprises. En outre, notre conseil d'administration fixe des limites quant à l'importance des prêts que nous pouvons consentir, si bien qu'il existe des freins et contrepoids à deux niveaux. Premièrement, c'est dans notre loi habilitante et, deuxièmement, notre conseil d'administration fixe les montants maximums.
M. David Anderson: Le projet de loi vous limite-t-il aux entreprises de taille moyenne?
M. John Ryan: Il stipule qu'il s'agit de «petites et moyennes entreprises».
M. David Anderson: Et qu'est-ce que c'est pour vous qu'une entreprise de taille moyenne?
M. John Ryan: Nous n'avons pas d'exemple comme tel ni de chiffre pour déterminer ce qui constitue une entreprise de taille moyenne, mais nous nous demandons essentiellement si l'entreprise correspond à ce qu'on entend généralement par une petite ou moyenne entreprise. Sur une échelle plus large, à l'échelle nationale ou internationale, nous examinons les propositions pour déterminer si elles répondent... Vous avez évoqué l'exemple de Sask Wheat Pool, qui a un chiffre d'affaires annuel de plusieurs milliards de dollars. Nous ne considérons pas qu'il s'agit d'une petite ou moyenne entreprise.
M. David Anderson: Très bien.
Ma question s'adresse peut-être davantage à M. McCormick, mais le gouvernement s'opposerait-il à des amendements au projet de loi C-25 qui imposeraient des limites quant à l'importance des prêts pouvant être consentis à des entreprises dont le contrôle majoritaire n'appartiendrait pas à des producteurs? Je sais bien qu'il y a déjà une limite de 20 millions de dollars qui s'applique à ces prêts, mais il s'agirait de limites concernant l'importance du prêt ou le pourcentage qu'il représente dans le portefeuille.
M. Larry McCormick: Voici ce que j'ai à dire en réponse à cette question, monsieur le président. Nous encourageons certainement le dépôt d'amendements car nous pouvons en tirer des enseignements et nous pouvons aussi tirer des enseignements du débat qu'ils susciteront quand nous arriverons au bout du compte à l'étude article par article. Que les amendements soient présentés en comité ou à une étape ultérieure, je ne vais certainement pas répondre au nom de tous les membres du comité ni du ministre, mais je peux vous dire que votre participation est la bienvenue, David.
M. David Anderson: Quelle est la répartition actuelle des prêts entre les entreprises appartenant aux producteurs et celles des producteurs non primaires?
M. John Ryan: À l'heure actuelle, 94 p. 100 du portefeuille des prêts est consacré aux producteurs primaires tandis que 6 p. 100 sont consacrés à des entreprises agroalimentaires ou à valeur ajoutée.
M. David Anderson: Quelles sont vos prévisions? Avez-vous une idée de ce que la répartition pourrait être plus tard?
M. John Ryan: C'est un peu comme de chercher à voir l'avenir dans une boule de cristal, mais quand nous établissons notre plan d'entreprise, nous devons faire des prévisions quinquennales. D'après ces prévisions quinquennales, la répartition passerait à environ 80-20, soit 80 p. 100 pour la production primaire et 20 p. 100 pour la valeur ajoutée.
M. David Anderson: Et quel pourcentage des prêts irait à des entreprises n'appartenant pas à des agriculteurs ou appartenant à des producteurs non primaires?
M. John Ryan: Nous n'avons pas déterminé quelle est la répartition parce que, bien souvent, il y a diverses combinaisons possibles. Les principales combinaisons sont les suivantes: Le producteur primaire qui s'oriente du côté de la valeur ajoutée, le producteur primaire et le producteur non primaire qui participent à une même entreprise et, enfin, un troisième groupe qui n'est pas constitué par des producteurs. Ce dernier groupe, même s'il n'a pas de lien comme tel avec les producteurs, doit obtenir son produit de base d'un producteur primaire. Nous n'avons pas poussé la ventilation jusque-là. Je pense que, si nous le faisions, la proportion de 80 p. 100 augmenterait en fait au lieu de baisser...
M. David Anderson: Exactement.
M. John Ryan: ... parce que tout est inclus dans le groupe de 20 p. 100.
M. David Anderson: Très bien.
Le président: Merci, David.
Je vais maintenant donner la parole à Marcel.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Merci, monsieur le président.
Dans les explications données sur l'amélioration qu'on apporte à la Loi sur la Société du crédit agricole, on emploie encore le terme «ferme familiale». Moi, ça me plaît beaucoup, mais il me semble que dans les faits, en tout cas au Québec, les fermes qu'on appelait autrefois des fermes familiales sont de moins en moins nombreuses parce que les fermes agricoles sont devenues extrêmement grosses et qu'il s'agit souvent de compagnies familiales.
• 0925
Selon la définition que vous donnez dans le projet de
loi, que veut dire «ferme familiale»? Est-ce que ça va
par unité homme/travail ou est-ce que c'est une ferme
où, par exemple, un homme ayant une famille peut en
tirer des revenus? Quelle est la la définition d'une
ferme familiale?
Mme Louise Neveu (vice-présidente exécutive et chef, Gestion du savoir, Société du crédit agricole): Disons qu'il est extrêmement difficile d'avoir une définition précise. Dans notre cas, on utilise cette définition là où les propriétaires sont d'une famille. Ça peut représenter, disons, la mère et le père avec quelques enfants. Ils peuvent naturellement être constitués en société. Ça peut être une association, mais ce sont eux, les propriétaires et ils font la plus grande part du travail.
M. Marcel Gagnon: La famille?
Mme Louise Neveu: Oui.
M. Marcel Gagnon: Ça peut être une famille élargie aussi.
Mme Louise Neveu: Exactement.
M. Marcel Gagnon: C'est assez large, effectivement, comme définition.
Mme Louise Neveu: On ne trouve pas de définition plus facile en termes de limites. Habituellement, c'est tout simplement basé sur le fait que ce sont des membres de la famille qui opèrent la ferme.
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le président, vous savez aussi bien que moi qu'il y avait un congrès de l'agriculture en fin de semaine à Sainte-Croix, dans Lotbinière, où on a présenté un film réalisé par l'Office national du film, L'Effet boeuf, dans lequel le plus gros propriétaire est une seule famille. C'est une espèce de multinationale mondiale, mais c'est une seule famille qui en est propriétaire. Donc, est-ce que c'est une ferme familiale?
Mme Louise Neveu: Pas nécessairement. Selon notre définition, ce ne serait pas ça, parce qu'on dit tout de même que ce sont les membres de la famille qui font la plus grande part du travail. Alors, ce serait limité en termes d'employés qui sont embauchés, qui ne sont pas membres de la famille.
Mme Suzanne Tremblay: Si jamais on vous trouvait une définition, est-ce qu'on pourrait vous la soumettre?
Mme Louise Neveu: Certainement.
M. Marcel Gagnon: C'est déjà là, mais vous élargissez, vous améliorez le financement aux industries primaires. Les industries de transformation qui prennent le produit agricole et le transforment ou, par exemple, un vendeur ou un commerçant d'engrais chimique pourraient-ils être considérés comme appartenant à l'industrie primaire?
Mme Louise Neveu: Dans les deux sens: intrant ou extrant.
M. Marcel Gagnon: Intrant ou extrant.
Mme Suzanne Tremblay: Lors des consultations que vous avez faites, l'UPA au Québec trouvait que c'était peut-être une bonne idée d'ouvrir, mais que c'était trop ouvert. Elle disait que la nouvelle Société du crédit agricole devait consacrer ses fonds principalement aux fermes, au secteur primaire. Mais vous ouvrez la porte à tout le secondaire et au tertiaire. L'UPA trouvait que c'était trop ouvert. Est-ce qu'il y aurait moyen de restreindre cela en établissant, par exemple, que la Société du crédit agricole doit consacrer au moins 60, 70 ou 80 p. 100 de ses fonds aux agriculteurs et aux gens directement impliqués dans l'agriculture et peut-être 20 p. 100 au reste? Autrement, «principalement» veut dire 50,1 p. 100.
Mme Louise Neveu: Selon notre plan d'entreprise existant, qui est naturellement approuvé par le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, le Conseil du Trésor et le ministère des Finances, nous anticipons, à ce moment-ci, qu'après cinq ans, le pourcentage maximum de notre portefeuille qui sera consacré à l'agri-entreprise sera d'environ 20 p. 100. Alors, 80 p. 100 seraient encore consacrés à l'agriculture primaire. Il n'y a aucune limite quant à la division de nos fonds. Même si le secteur primaire était en croissance, il n'y aurait pas de limite sur le portefeuille. On pourrait encore en consacrer 80 p. 100 à l'agriculture primaire.
Mme Suzanne Tremblay: Mais rien ne nous le garantit. Il y a juste votre plan d'affaires, qu'on ne connaît pas.
Mme Louise Neveu: Le Résumé du plan d'entreprise a été déposé en Chambre.
Mme Suzanne Tremblay: Il est public.
Mme Louise Neveu: Oui.
M. Marcel Gagnon: Le plan d'affaires, c'est l'étude du marché que vous avez faite.
Mme Louise Neveu: Exactement.
M. Marcel Gagnon: Ce ne serait pas possible de cerner ces 80 p. 100 à l'intérieur de la loi.
Mme Louise Neveu: C'est certainement possible d'apporter des modifications à la loi, mais à ce moment-ci, ce n'est pas proposé dans le projet qui est là.
M. Marcel Gagnon: Merci.
Le président: Paul.
[Traduction]
M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier les représentants d'être venus devant le comité encore une fois ce matin pour que nous puissions poursuivre l'examen des questions que nous avons commencé il y a quelques jours.
Vous avez parlé de crédit-bail. Quel était votre lien avec CULEASE et pourquoi avaient-ils besoin de vous? Ou pourquoi aviez-vous besoin d'eux? C'est là ma question.
M. John Ryan: Je crois que l'honorable député soulève une question importante d'un point de vue qui illustre peut-être ce que la Société essaie de faire, car ce qui compte en dernière analyse pour nous, c'est d'assurer davantage de services à la communauté agricole, notamment aux producteurs primaires, mais aussi aux entreprises à valeur ajoutée. Nous savions que l'activité de CULEASE, c'était le crédit-bail. Nous avons donc rencontré ses représentants et nous leur avons dit: «Nous recevons des demandes de la part de nos clients qui cherchent à obtenir du crédit-bail»—et la Société n'a pas toujours à assurer elle-même ce type de services. «C'est là votre spécialité. Nous avons un réseau de 100 bureaux d'un bout à l'autre du pays. Y aurait-il des avantages à ce que nos deux organisations se rencontrent pour voir si nous ne pourrions pas travailler ensemble?»
Nous nous sommes entendus avec les représentants de CULEASE sur une formule en vertu de laquelle nous servirions en quelque sorte de point d'accueil, nous recevrions les demandes ou les demandes de renseignements et nous les ferions parvenir à CULEASE, qui assumerait alors la responsabilité d'assurer le service.
M. Paul Steckle: Nous jouerions ainsi le rôle de service d'aiguillage.
M. John Ryan: Oui, exactement.
M. Paul Steckle: J'ai eu l'impression en lisant les commentaires que vous envisagez peut-être de vous engager dans le domaine du crédit-bail. Je me demande si vous envisagez notamment de vous lancer dans la location de terres. C'est un domaine auquel j'ai touché un peu dans ma vie professionnelle antérieure. Je me demande si vous envisagez la formule location-achat, si c'est là quelque chose auquel vous songez ou auquel vous devriez songer. C'est déjà le cas pour les machines, bien entendu, mais je me demande ce qu'il en est des terres.
On en trouvait déjà un exemple il y a environ 25 ans. Dans le cadre d'un programme appelé ARDA—je ne sais pas si vous le connaissez—, les agriculteurs pouvaient inscrire leur nom pour un certain nombre d'années et obtenir une reconduction pour cinq années supplémentaires. Je crois que la période maximale était de dix ans. Je me demande si vous envisagez une formule semblable pour les agriculteurs débutants.
M. John Ryan: Je crois qu'il y a deux réponses à votre question.
Quand nous parlons de crédit-bail dans le projet de loi, il s'agit bien entendu de biens personnels, c'est-à-dire de biens d'équipement ou de biens mobiliers. L'intention n'est pas du tout d'offrir du crédit-bail pour les biens fonciers. Ce n'est pas là l'objet du projet de loi.
Dans les consultations que nous avons menées à la grandeur du pays, le seul groupe pour qui cette possibilité semblait intéressante était le groupe des agriculteurs débutants. Ils nous ont dit, puisque nous leur avions demandé quelles seraient les options sur lesquelles nous devrions nous pencher, qu'il serait peut-être bien que la Société ait des terres qu'elle puisse leur louer et qu'ils pourraient acheter à une date ultérieure. Ce n'est toutefois pas de cela qu'il est question dans le projet de loi. Il est question ici de biens personnels, c'est-à-dire de biens d'équipement, ou de biens mobiliers.
M. Paul Steckle: Qu'en est-il des prêts hypothécaires résidentiels? Le projet de loi nous entraîne dans de nouvelles directions. Je songe ici au producteur qui a son entreprise et qui souhaiterait peut-être se construire une maison sur un lac quelque part; accordez-vous des prêts hypothécaires pour des résidences qui ne font pas partie de l'exploitation agricole comme telle quand le demandeur est un agriculteur ou qu'il exploite une entreprise liée à l'agriculture?
M. John Ryan: Non.
M. Paul Steckle: Autrement dit, le producteur ne pourrait pas obtenir de prêt hypothécaire pour son chalet ou sa résidence principale à moins que l'habitation fasse partie de l'exploitation agricole?
M. John Ryan: La loi actuelle nous autorise à consentir des prêts—et nous avons de ces prêts dans notre portefeuille—pour les habitations agricoles familiales, mais la personne qui veut se construire un chalet ne répondrait pas à nos critères. La question fondamentale que nous nous posons est de savoir quel serait l'avantage sur le plan agricole? Quel serait l'avantage pour le producteur primaire?
Certains diraient qu'il y a un avantage pour le producteur en ce sens qu'il peut se construire un chalet, mais ce n'est pas ainsi que nous concevons le rôle de la Société du crédit agricole.
M. Paul Steckle: Je sais. Le terme était mal choisi, mais vous avez tiré les choses au clair et je vous en remercie.
Poussons l'analyse un peu plus loin. Supposons que l'homme, l'exploitant, la personne qui est propriétaire de l'exploitation n'ait pas de maison et qu'il lui en faille une. Il se construit une maison sur un terrain riverain d'une localité qui serait présumée être sa résidence principale. Pourrait-il demander un prêt hypothécaire à la Société du crédit agricole puisqu'il s'agit de sa résidence principale, de l'habitation à partir de laquelle il exploite son entreprise agricole?
M. John Ryan: Je dirais que la réponse serait non. Nous cherchons à voir quel est l'avantage pour l'agriculture, pour le producteur primaire.
M. Paul Steckle: Il a besoin d'une maison.
M. John Ryan: Je pense qu'il y a toutefois d'autres institutions à qui il pourrait s'adresser pour obtenir un prêt hypothécaire.
M. Paul Steckle: Je vous remercie pour ces observations. J'essaie simplement d'explorer cette piste...
M. John Ryan: Je veux bien.
M. Paul Steckle: ... parce que c'est une situation à laquelle vous devrez certainement faire face à un moment donné.
M. John Ryan: C'est déjà le cas, monsieur.
M. Paul Steckle: Je vois d'un bon oeil qu'on veuille stimuler la concurrence entre les établissements de prêt au Canada. J'y vois quelque chose de positif.
Je ne suis pas prêt à délaisser cette idée des prêts hypothécaires à long terme, tout en sachant que nous ne pouvons pas consentir des prêts garantis de 25 ans comme nous le faisions autrefois. Du moins, je ne connais pas d'établissements ou d'organisations qui le font. L'idée n'en reste pas moins intéressante, et je veux y revenir. Vous avez dit l'autre jour que cela ne cadre pas avec vos orientations et qu'il ne semble pas y avoir de demande de ce côté-là.
M. John Ryan: Les attributions et pouvoirs que nous confèrent nos documents habilitants nous permettent de faire cela à l'heure actuelle. Quand nous cherchons toutefois à déterminer quels nouveaux produits ou services nous pourrions offrir, nous commençons par nous demander si la demande est vraiment là. Si elle l'était, nous pourrions y répondre.
Il existe dans certains pays, notamment en Europe, ce qu'on appelle des prêts hypothécaires perpétuels, qui durent toute la vie. C'est là une possibilité que nous explorons pour voir si elle serait avantageuse pour nos producteurs canadiens. Nous n'en sommes toutefois qu'à l'étape du travail exploratoire.
Le rôle de la Société est, à notre avis en tout cas, de chercher sans cesse ce qui pourrait être intéressant pour nos producteurs canadiens, ce qui nous amène naturellement à voir ce qui se fait dans d'autres pays et que nous pourrions appliquer ici.
M. Paul Steckle: L'exploitation agricole familiale a beaucoup changé. Les producteurs, notamment ceux qui élèvent du bétail, sont maintenant soumis à des contrôles et des règlements. Ils doivent produire des plans environnementaux en agriculture et sont soumis à bien d'autres conditions que leur imposent leur administration municipale et peut-être leur gouvernement provincial.
Dans quelle mesure tenons-nous compte des questions environnementales lorsque nous accordons des prêts hypothécaires pour ce genre de propriétés? Insistons-nous pour qu'on respecte nos conditions, qui sont peut-être plus exigeantes que celles des provinces ou des municipalités? Ou est-ce que nous nous conformons tout simplement aux normes en vigueur là où se trouve le client éventuel?
M. John Ryan: À notre avis, ce n'est pas à nous qu'il revient d'adopter les politiques ou de fixer les normes à cet égard, mais nous nous penchons certainement sur ces questions et essayons de voir quelles sont les normes fédérales, provinciales et municipales. Lorsque nous négocions cette forme d'aide financière, nous devons avoir la certitude que l'on respecte les normes en vigueur.
M. Paul Steckle: Si j'ai posé cette question, c'est parce qu'en Ontario à tout le moins, malgré les conditions en vigueur, on ne semble pas avoir les moyens de les faire appliquer. Il me semble que c'est là la plus grande difficulté.
Nous exigeons que les agriculteurs, les gens qui ont de grosses fermes d'élevage se conforment à ce genre de normes. Toutefois, lorsqu'ils ne s'y conforment pas, en Ontario tout au moins, on ne semble pas avoir la volonté nécessaire pour le faire respecter. Je crois que les autorités municipales et peut-être même provinciales sont mécontentes de cela car on ne semble pas y avoir de mécanisme d'exécution.
Le président: Merci, Paul. Je dois maintenant donner la parole à quelqu'un d'autre.
Dick.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci, monsieur le président. Bienvenue à tous.
Parmi les pouvoirs supplémentaires prévus dans le projet de loi, figure la création de filiales à des fins de diversification. Monsieur Ryan, pourriez-vous nous en dire plus et nous donner certains exemples concrets de ce qu'on entend par là?
M. John Ryan: Pour l'essentiel, nous cherchons à disposer des pouvoirs nécessaires pour créer une filiale dans le cas où nous voudrions participer à une entreprise.
Permettez-moi de vous donner un exemple pour le capital- risque. Nous croyons fermement qu'il existe un besoin de capital- risque dans le marché des produits agricoles. Il n'y en a pas pour le moment. Nous espérons bien agir en tant que catalyseur de manière à attirer d'autres intervenants en agriculture et à leur montrer que nos propositions sont intéressantes, qu'ils peuvent faire de bons investissements et obtenir un bon rendement compte tenu du risque.
Nous n'avons pu conclure d'ententes avec personne jusqu'ici puisque nous n'avons pas les pouvoirs pour le faire, mais il pourrait certes arriver qu'un groupe nous propose une entreprise en coparticipation que nous pourrions réaliser par l'entreprise en coparticipation et par l'entremise d'une filiale. Cela nous donnerait alors l'occasion de préciser que la filiale en question n'a que cette seule raison d'être. On peut donc la dissocier des activités et des opérations principales pour en assurer le suivi.
Au sujet des discussions préliminaires que nous avons tenues avec d'autres intervenants, on nous a parfois demandé si nous serions en mesure de le faire. Pour le moment, nous n'en avons pas la possibilité mais à l'avenir, nous le pourrons.
Merci.
M. Dick Proctor: J'aimerais poursuivre sur la même lancée que M. Steckle mais sous un autre aspect. Il y a à peu près un an, à Flesherton, en Ontario, on a approuvé un prêt destiné à une usine d'embouteillage de l'eau située sur une exploitation agricole. Je crois que la Société du crédit agricole a reconnu après coup que cela n'était pas approprié. J'en arrive à ma question: compte tenu des pouvoirs accrus dont disposera la Société, n'y aura-t-il pas plus de chance que des gens approuvent des prêts discutables pour ce qui est de leur lien avec l'agriculture? Le prêt que j'ai évoqué était clairement déplacé. On l'a justifié en disant que l'entreprise se trouvait sur des terres précédemment utilisées à des fins agricoles, et que cela était donc acceptable.
M. John Ryan: Nous avions étudié toute l'affaire.
Mme Louise Neveu: Comme vous le savez, c'est toujours une question de jugement. J'ai entendu des arguments pour et contre ce projet. Ceux qui l'appuyaient estimaient qu'il créerait des emplois dans un secteur rural. Il y aurait aussi la question du respect des normes environnementales que la collectivité pourrait imposer. Aucune de ces questions n'a été soulevée avec autant de vigueur avant l'approbation du prêt.
Je conviens avec vous que dans bien des cas, on se demanderait si le projet respecte les règlements. En l'occurrence cependant, à strictement parler, l'admissibilité était assez claire. L'actionnaire majoritaire était par définition un agriculteur.
Le projet n'a jamais été réalisé; ceux qui l'avaient proposé ont peut-être choisi de faire autre chose.
Dans ces cas, nos décisions en matière d'admissibilité interviennent à de nombreux niveaux, si bien que diverses personnes les étudient. Nous tenons soigneusement compte des effets d'un projet sur la collectivité.
M. Dick Proctor: Donc, si quelqu'un proposait un projet immobilier sur des terres utilisées auparavant comme terres agricoles, il se heurterait immédiatement à une fin de non- recevoir.
Mme Louise Neveu: Oui. Cela ne fait aucun doute.
M. John Ryan: Monsieur Proctor, au sujet de l'aspect environnemental et afin de montrer que nous y sommes très sensibles au sein de la société, au cours des derniers mois, nous avons été la première institution financière au Canada à accorder un prêt lié à l'environnement. Il s'agissait d'une installation de traitement du fumier au Québec. Il existait un programme de subventions provincial, mais l'entreprise avait besoin de financement en attendant de recevoir l'argent de la province. Nous lui avons donc accordé notre première série de prêts, nous les en offrons maintenant partout au pays. Cela nous paraît très important car quelqu'un doit jouer un rôle de chef de file à cet égard.
M. Dick Proctor: J'ai une dernière question, pour ce tour-ci du moins. Certains se sont étonnés du fait que l'acronyme français du nouveau nom proposé pour désigner l'organisme est différent de l'anglais. Il a également été noté que ce nouvel acronyme français correspond à l'acronyme provincial du Québec. Est-ce qu'on n'a pas étudié soigneusement la question? Y a-t-on pensé après coup? Pouvez-vous nous expliquer cela?
Mme Louise Neveu: Le dossier est encore ouvert. Lorsque nous avons commencé nos recherches en vue du changement de nom, l'organisme provincial ne nous avait pas laissé savoir quel serait son nom à lui. Les deux questions ont donc évolué à peu près en même temps.
Nous songions à ajouter le terme «Canada» à notre nom, et nous avons donc commencé à tenir des consultations auprès de groupes de réflexion partout au Canada. Nous avons découvert que l'acronyme et même le nom de la Société du crédit agricole étaient très connus dans la plupart des régions du Canada. Toutefois, notre nom français n'était pas autant reconnu parce qu'il était facilement confondu avec celui de l'organisme provincial du Québec.
À présent, nous estimons qu'il est assez facile de distinguer entre les deux parce que l'organisation provinciale va désormais être connue sous le nom de La Financière. Auparavant, elle était connue surtout par son acronyme, la SFA, mais désormais elle s'appellera La Financière. Elle est en fait plus aisément reconnue sous ce nom. Nous estimons donc qu'on aura aucun mal à distinguer entre les deux organismes, surtout du fait que nous ajouterons «Canada» à notre nom à nous.
M. Dick Proctor: Merci.
Le président: Merci, Dick.
Murray.
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour.
Pour revenir à la ferme familiale, j'aimerais en proposer une définition. À mes yeux, il s'agit d'une exploitation intergérationnelle qui repose surtout sur la main-d'oeuvre familiale. Cela dit, compte tenu du nouveau projet de loi et des pouvoirs accrus accordés à la SCA, quels nouveaux mécanismes prévoyez-vous créer afin de permettre le transfert de l'actif d'une génération à la suivante?
Mme Louise Neveu: Monsieur Calder, vous savez sans doute que notre programme Coups d'pousse permet le transfert entre générations.
Ce nouveau projet a été lancé avec sept partenaires canadiens regroupés dans AgriSuccès. Une bonne part de son travail consiste à examiner les éléments de la planification de la relève. Nous espérons pouvoir nous inspirer de certaines des conclusions auxquelles le groupe arrivera et, partant, concevoir de nouveaux produits, qu'il s'agisse de primes spéciales de démarrage destinées aux jeunes ou aux agriculteurs débutants afin de les aider à se lancer en affaires ou de critères qui leur permettraient de s'initier à l'agriculture. À l'heure actuelle, nous n'avons pas de nouveaux produits à annoncer mais l'élaboration de produits est notre priorité.
M. Murray Calder: Pour ce qui est de la planification de la relève, la SCA y participe-t-elle?
Mme Louise Neveu: La SCA a conçu un site Web qui oriente ses clients vers diverses sources de renseignements ou programmes provinciaux, car il en existe d'excellents, et aussi vers nos partenaires, dont le Conseil canadien de la gestion d'entreprise. Nous avons des partenaires partout au Canada. Il y a l'UPA, la Société Meyers Norris Penny et diverses firmes d'experts-conseils en gestion et en comptabilité de tout le Canada. Ils organisent des colloques. Moyennant certains frais, les producteurs peuvent assister à un colloque qui les aidera à planifier leur relève à un âge plutôt jeune, car il est un peu tard pour le faire lorsqu'on a atteint 50 ans.
M. Murray Calder: Nous avons discuté avec les grandes banques qui voulaient se lancer dans les services d'assurance et de location de voitures. À l'heure actuelle, CULEASE est indépendant, mais de la façon dont je comprends le projet de loi, je pense que le crédit-bail relèverait directement de la SCA. À cet égard, avez- vous remarqué une réticence de la part des fabricants de machines agricoles du fait qu'ils ont eux-mêmes leurs propres programmes de crédit-bail? Est-ce qu'on s'inquiète du fait que vous détiendriez un peu trop de pouvoir si vous avez le crédit-bail, puisque vous offrez déjà des prêts hypothécaires et tous ces autres services?
M. John Ryan: Nous n'avons pas observé la moindre critique de la part des fabricants de machines agricoles, en tous les cas, pas à ma connaissance.
Toutefois, lorsque nous avons consulté les banques à charte, ces dernières nous ont dit que nous cherchions à obtenir des pouvoirs en matière de crédit-bail. Nous avons alors répondu que nous cherchions à obtenir des éclaircissements parce que nous estimions être déjà autorisés à offrir ce genre de service.
En second lieu, je crois comprendre qu'aujourd'hui, les institutions financières ou les banques à charte peuvent offrir des services de crédit-bail de matériel agricole aux agriculteurs. Ce qu'elles veulent vraiment cependant, ainsi que vous le disiez plus tôt, c'est en offrir pour les véhicules, les camions légers et les voitures. Nous n'avons pas l'intention de nous lancer là-dedans. Ce n'est pas ce que nous voulons obtenir. Ce qui nous intéresse, c'est le matériel, surtout le matériel de fabrication à série restreinte, plutôt que les voitures ou autres véhicules. L'industrie de l'automobile a clairement exercé des pressions dans un sens tout à fait opposé. Quoi qu'il en soit, ça n'est pas ce que nous cherchons.
M. Murray Calder: Monsieur le président, je sais que M. Borotsik a des questions à poser. Je vais donc m'arrêter ici.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Me permettez-vous de prendre le reste de son temps de parole?
Monsieur le président, d'abord, je dirai que M. Ryan aurait pu mettre fin aux craintes de M. Proctor. Nous savons tous que l'aide financière accordée à des projets comme les terrains de golf, les hôtels et les projets immobiliers vient de la BDC et non de la SCA. Nous savons que la SCA se concentre sur l'agriculture.
J'ai quelques questions. À quelques reprises, j'ai entendu parler du plafond de 20 millions de dollars en matière de prêts. Il ne s'agit pas d'une limite imposée par voie législative. Elle relève plutôt des orientations générales prises par votre conseil d'administration. Ce conseil pourrait hausser le plafond dans le cas où il l'estimerait justifié compte tenu de ses nouveaux pouvoirs et des nouvelles possibilités de la SCA... En avez-vous discuté au niveau du conseil? Je sais bien que pour le moment, vous parlez d'une limite de 20 millions de dollars, mais les membres du conseil ont-ils discuté de la possibilité d'accorder des prêts plus élevés que cela?
M. John Ryan: Nous en avons discuté mais pas tellement sous l'aspect d'une augmentation. Sur les 12 personnes qui siègent au conseil d'administration, neuf sont des producteurs primaires, une est un avocat spécialisé dans les questions agricoles et une autre oeuvre dans l'agro-industrie. Je suis le seul autre.
M. Rick Borotsik: Depuis combien de temps la limite de 20 millions de dollars est-elle en vigueur? À quand remonte la dernière augmentation?
M. John Ryan: C'était en 1996 ou 1997.
M. Rick Borotsik: Manifestement, étant donné les nouveaux pouvoirs qu'on s'apprête à vous accorder, vous prévoyez intensifier vos activités. L'année dernière, vous avez atteint un record de transactions, soit de 1,7 milliards $. Si vous recevez ces nouveaux pouvoirs, on peut prévoir une autre année exceptionnelle. D'où vous viennent vos capitaux?
M. John Ryan: Je vais demander à Moyez Somani de bien vouloir répondre. De toute façon, il doit faire sa part lui aussi car c'est notre principal dirigeant financier.
M. Moyez Somani (vice-président exécutif et principal dirigeant financier, Société du crédit agricole): Je croyais pouvoir m'en sortir sans parler.
• 0950
Merci de la question. La plupart de nos fonds nous viennent
des marchés financiers, nos avoirs sont donc garantis par le
gouvernement du Canada. Pour ce qui est de notre passif, encore une
fois, on nous accorde la même cote de crédit que le gouvernement du
Canada, ce qui nous permet de réunir des fonds.
La loi nous impose une limite de 12 fois nos capitaux propres, ce qui veut dire que nous pouvons emprunter des capitaux qui correspondent à 12 fois nos fonds propres, et c'est ce que nous faisons pour...
M. Rick Borotsik: En êtes-vous à cette limite à l'heure actuelle?
M. Moyez Somani: Nous en sommes à 9,3 fois nos avoirs.
M. Rick Borotsik: Vous avez donc trois fois les capitaux propres que vous pouvez emprunter.
M. Moyez Somani: Nous disposons de plus de 2 milliards de dollars de...
M. Rick Borotsik: De capacité.
M. Moyez Somani: ... capacité, oui.
M. Rick Borotsik: Et manifestement, c'est ce que vous cherchez.
Je sais que nous avons parlé de vos arriérés et du bon fonctionnement de la Société. Vous êtes prospères. À combien se sont élevées les radiations au cours de la dernière année financière?
M. John Ryan: Vous souvenez-vous du montant précis, Moyez? Nous finissons justement notre étude des livres de fin d'année en ce moment que nous ne devrions terminer dans les derniers jours de mai.
M. Rick Borotsik: Avez-vous un chiffre approximatif? Est-ce que vos radiations ont augmenté? Avez-vous un chiffre approximatif à nous donner?
M. John Ryan: Ça se situe entre 17 millions et 20 millions de dollars.
M. Moyez Somani: Ça tournera en fait autour de 15 millions de dollars.
M. Rick Borotsik: Bien. À mon avis, grâce aux nouveaux pouvoirs qu'on vous accordera, vous serez en mesure d'assumer des risques supplémentaires...
M. John Ryan: Oui.
M. Rick Borotsik: ... des risques plus élevés que ceux que vous prenez à l'heure actuelle simplement pour le financement d'un producteur agricole primaire.
Votre plan d'entreprise prévoit-il des sommes supplémentaires figurant au poste des radiations comme réserve de prévoyance?
M. John Ryan: Notre plan d'entreprise a comptabilisé des risques plus élevés du fait que nous allons offrir de nouveaux services. Toutefois, parallèlement à cela, nous allons percevoir des taux d'intérêt plus élevés en contrepartie. Par conséquent, si nous connaissons des pertes plus lourdes, il faudra que nous soyons en mesure de les éponger grâce à ces taux d'intérêt plus élevés. Nous étudions d'ailleurs cet aspect au cas par cas.
M. Rick Borotsik: Dans la région que je représente, l'élevage des porcs est extrêmement important. À l'heure actuelle, pouvez- vous financer les entreprises des producteurs non primaires dans le secteur du porc?
Mme Louise Neveu: Pas si les producteurs primaires n'en détiennent pas une participation majoritaire.
M. Rick Borotsik: Bien, et merci de la réponse. Bon nombre de ces entreprises n'appartiennent pas à des producteurs primaires. Il y a beaucoup de fonds provenant d'investisseurs urbains.
Non, je parlais d'investisseurs urbains dans nos propres régions. Cela vous permettrait alors d'investir dans cette industrie qui, soit dit en passant, a été bien servie par les institutions financières jusqu'à présent. Vous allez donc faire concurrence à bon nombre de ces institutions. Quel effet cela aura-t-il sur l'industrie? Comment envisagez-vous la croissance de cette partie du secteur agricole si vous y participez?
M. John Ryan: En fait, cela me paraît être un avantage, parce que le manque d'accès aux capitaux était clairement un problème. Je pense que les gens veulent avoir le choix. Ils veulent des options. Lorsque le nouveau projet de loi a été déposé, les médias de la Saskatchewan en ont profité pour sonder les gens à son sujet. Ils ont téléphoné à un éleveur de porcs propriétaire d'une très grande entreprise en Saskatchewan, et ce dernier a dit que le projet de loi était tout à fait le bienvenu parce que la SCA connaît bien l'agriculture: «L'accès aux capitaux est un problème, et nous nous réjouissons donc de savoir que la société sera là».
M. Rick Borotsik: Est-ce qu'il nous reste encore du temps?
Le président: Quelle heure est-il?
Mme Louise Neveu: Monsieur Borotsik, si vous permettez que j'ajoute quelque chose, je pense que vous venez aussi d'une région très chanceuse. Il y a eu énormément d'appui de la part des petites communautés urbaines de votre région. Si nous pouvions obtenir cela partout, ce serait merveilleux.
M. Rick Borotsik: Cela concerne l'investissement, et pas nécessairement les exploitations elles-mêmes, mais oui, on appuie les investissements, certainement.
Mme Louise Neveu: Non, l'investissement.
M. Rick Borotsik: Dernière question, si on me le permet.
Nous allons nous entretenir avec bon nombre d'intervenants lorsqu'ils vont témoigner devant nous. Vous avez vous-même tenu 1 600 séances de consultation. À votre avis, qui s'oppose au projet de loi? Qui a de sérieuses réserves?
M. John Ryan: Le Syndicat national des cultivateurs s'y opposera. Grosso modo, il a dit que la Société devrait rester dans ses plates-bandes, c'est-à-dire la production primaire. Ce serait du seul point de vue d'un groupe agricole.
Maintenant, pour ce qui est des institutions financières, si j'en juge d'après ce que nous avons entendu, elles vous diront qu'elles ne voient pas beaucoup d'objection au nouveau projet de loi parce qu'il couvre des secteurs où elles ne sont pas présentes. Ainsi par exemple, au sujet des fonds propres, elles ont dit qu'il est bien que vous effectuiez ce genre d'investissement.
Là où elles ont peut-être une réticence est le fait que le projet de loi fait de votre société une concurrente peut-être un peu trop menaçante.
A cela nous avons répondu que nous travaillons au niveau de la collectivité. Nos taux d'intérêt sont entre un quart et un demi- point plus élevé, si bien que nous n'estimons pas jouir d'un avantage de façon déloyale. De toute façon, nous avons pour objectif de travailler si possible avec les autres institutions financières. Cela dépend aussi de l'institution à qui vous vous adressez. Pour certaines d'entre elles, nos nouvelles activités sont quelque chose de positif et nous pouvons établir un partenariat efficace. Pour d'autres, avec qui nous n'avons pu établir ce partenariat local, c'est tout à fait le contraire.
M. Rick Borotsik: Consentiriez-vous un bail pour une demi- tonne?
Le président: Seulement pour Rick?
M. Rick Borotsik: Certainement vous le feriez.
Le président: David.
M. David Price (Compton—Stanstead, Lib.): Merci, monsieur le président.
• 0955
J'aimerais vous parler de ma région, puisque je fais partie du
comité depuis relativement peu de temps. Dans ma région, les
exploitations familiales représentent près de 95 p. 100 de toutes
les entreprises agricoles. On observe cependant une évolution. Ces
exploitations prennent de plus en plus l'allure de petites
compagnies et les familles se réunissent afin de créer de plus
grandes entreprises ou une seule entreprise encore plus grande.
Je viens justement de me pencher sur un cas où trois frères d'une famille et un autre agriculteur d'une autre famille se sont réunis et ont lancé un projet d'immobilisation plutôt grand. Vous y avez participé. La chose a été très difficile, et les producteurs ont éprouvé beaucoup de problèmes. Je crois que cela tenait au fait qu'on ne considérerait plus l'exploitation comme une véritable exploitation familiale, en dépit du fait qu'elle l'est bel et bien. C'était manifeste dans la façon dont elle avait été créée. Cependant, les producteurs songeaient à l'avenir. Leurs enfants participent aussi au projet, et c'est ainsi qu'on essaie de les garder dans l'exploitation.
Je me demande donc si le projet de loi s'oriente dans cette voie, pour fournir une aide dans ce genre de situation?
M. John Ryan: Nous cherchons certainement à faciliter l'accès au crédit, à la Société du crédit agricole, aux exploitations agricoles familiales et aux autres. Je ne connais toutefois pas la proposition dont vous venez de parler...
M. David Price: Mais considérez-vous encore comme une exploitation familiale une entreprise qui résulte de la réunion de deux familles?
M. John Ryan: Je pense qu'on peut dire oui. Il s'agira tout simplement d'une définition plus vaste d'une ferme familiale. Je suppose qu'aujourd'hui, la définition d'une exploitation familiale dépend de qui vous consultez. Il existe toutes sortes de définitions.
Nous ne tenons pas nécessairement à demander s'il s'agit d'une entreprise familiale avant de voir si nous pouvons accorder de l'aide. Nous nous demandons d'abord s'il s'agit de producteurs primaires ou d'une entreprise à valeur ajoutée directement liée à l'agriculture. C'est ce qui détermine notre décision beaucoup plus qu'une définition.
M. David Price: Bien. Cela répond à ma question. Dans le cas auquel je songeais, il s'agit d'une ferme laitière et c'est une entreprise de grande envergure.
Par ailleurs, l'autre partie du problème consiste à garder les enfants à la ferme, ou tout au moins dans le milieu rural.
M. John Ryan: La collectivité.
M. David Price: Bon nombre d'exploitations agricoles se lancent dans d'autres activités, tout simplement pour que les enfants ne s'en aillent pas. Ça peut être la fabrication de meubles ou des services de garde d'enfants. On observe aussi la création de nouvelles entreprises en électricité. Dans une certaine mesure, le travail peut s'effectuer dans la région même, mais vont aussi travailler dans la région avoisinante.
Avec le nouveau texte de loi, ce genre d'industrie...? Car il s'agit bien d'une industrie.
M. John Ryan: Oui.
M. David Price: Ces gens-là construisent leurs propres ateliers de soudure ou autres choses encore. Une part très minime de cette activité pourrait être reliée à l'agriculture, mais elle oblige surtout à obtenir son gagne-pain de l'extérieur. C'est situé près d'un centre urbain, et ils se lancent dans...
M. John Ryan: Il est peu probable que nous voulions financer ce genre d'activités. Encore une fois, nous poserions la même question, à savoir quel est l'avantage de cela pour l'agriculture? Si quelqu'un travaille comme électricien... je ne pense pas que ce soit à nous de nous occuper de cela.
M. David Price: Bien. Qu'en est-il maintenant de choses comme une garderie, où l'on retrouve le groupe en entier?
Mme Louise Neveu: Nous avons observé certains cas où les entreprises secondaires étaient situées dans l'exploitation agricole et allaient apporter un supplément du revenu et permettre à quelqu'un d'améliorer le revenu familial. Nous avons accordé notre aide à ce genre de propositions, parce qu'il s'agit de projets situés dans l'exploitation agricole et qui normalement offrent un service aux autres qui participent à l'entreprise agricole.
Il y a eu des cas comme cela d'industries artisanales, où l'on fabriquait de la confiture ou des produits spéciaux, et qui ont parfois prospéré. Pour l'essentiel cependant, elles ont constitué un revenu supplémentaire.
De la même façon, nous avons également soutenu les entreprises d'agrotourisme installées dans des bâtiments de ferme construits pour ajouter de la valeur à l'exploitation, c'est-à-dire apporter un supplément de revenu, et ces entreprises nous ont paru très positives.
M. David Price: Tant mieux.
Est-ce qu'il me reste du temps?
M. Murray Calder: Empruntez des minutes au temps de parole de Rick.
M. David Price: Bien. Merci, Rick.
L'une des plaintes que j'ai entendues dans ma région... Nos entreprises agricoles sont très riches. Notre situation est plutôt bonne. C'est pour cela que nous n'avons pas beaucoup de difficultés à obtenir des prêts de la Société du crédit agricole. Cependant, certaines exploitations ont un peu plus de difficulté, et elles estiment que la Société du crédit agricole veut venir en aide à celles qui n'ont pas de problèmes. Si elles en ont, la Société leur dit alors de s'adresser aux banques car elle ne prend pas ce genre de risques. Vous prenez en effet des risques très, très faibles.
M. John Ryan: Ça ne me paraît pas être le cas, mais je ne connais pas la situation précise dont vous venez de parler. Si je me reporte toutefois à ce qui se passe au sein de notre société, il ne fait aucun doute que nous assumons des risques plus lourds. Ça ne signifie pas que chacune des propositions que nous examinons soit très risquée. Si vous preniez un échantillon représentatif de notre portefeuille, vous en trouveriez à très faible risque, et d'autres à risque très élevé avec tous les degrés intermédiaires entre ces deux extrêmes. Je pense franchement qu'il faut que le portefeuille soit équilibré de cette manière afin de pouvoir rester à flot.
La Société ne fixe ni n'a de paramètres ou de politiques disant que nous devrions nous limiter simplement au financement à faible risque. Tout au contraire, vous constaterez plutôt qu'il y a un mélange des deux. Certes, vous pourrez toujours trouver l'une ou l'autre proposition que nous avons examinées mais que nous avons dû rejeter parce que nous n'y avions vu aucune viabilité économique. En définitive, nous examinons le dossier en nous demandant si nous rendrions vraiment service au demandeur en finançant un projet qui, à notre avis, ne serait pas économiquement viable.
Le président: Je vous remercie, David.
Kevin.
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, AC): Merci d'être venus.
Je ne suis pas un habitué du comité, mais j'ai bien étudié le projet de loi. Je suis moi-même exploitant agricole et je m'y connais un peu en ce qui concerne la Société du crédit agricole.
Je me souviens qu'il y a plusieurs années de cela, j'étais à la recherche de terres à acquérir. Je suis de l'Alberta, mais j'en cherchais même en Saskatchewan. Je me souviens d'avoir été en voir dans la région de Riverhurst et, sur la carte, tout ce que je voyais, c'était la mention SCA qui, si je me souviens bien, figurait sur 96 quarts de section dans ce seul petit secteur. Et je m'étais demandé à ce moment-là combien de temps la SCA allait conserver ces terres.
En 1986, la terre coûtait 1 000 $ l'acre dans ma région. Je suis allé en ville, j'ai travaillé pendant six ans, puis je suis revenu et j'ai pu acheter des parcelles à 500 $ l'acre. Ce terrain vaut maintenant 1 000 $. Si la SCA, comme créancier, détenait 96 quarts de section dont les propriétaires étaient incapables de payer, et si elle persistait à les conserver, il est évident que cela a une incidence sur la valeur des terres agricoles dans les régions rurales de la Saskatchewan et dans tout l'ouest du pays.
Pensez-vous qu'il faudrait une loi, si tant est qu'il n'en existe pas pour l'instant, qui limiterait la période pour laquelle la SCA pourrait détenir des terres avant de les remettre sur le marché, avec pour effet de conserver à un niveau artificiellement élevé le prix des terres agricoles, empêchant par là les jeunes d'acheter leur propre terre?
J'ai environ quatre autres questions, mais si vous le voulez bien, j'aimerais que vous répondiez d'abord à celle-ci.
M. John Ryan: Je pense qu'à l'époque dont vous parlez, ou du moins à un moment donné, nous sommes effectivement arrivés en Saskatchewan à détenir un record de 1,4 million d'acres que nous avions cédées à bail aux producteurs agricoles un peu partout dans la province. Mais je vous dirais aussi que, toujours à la même époque, la loi nous imposait une limite de six ans et nous avons donc dû reconduire les baux. Ceux-ci sont venus à échéance en 1999 et nous n'avons pas arrêté depuis lors d'essayer de diminuer notre inventaire foncier. À l'heure actuelle, il n'est plus que de 120 000 acres environ. Notre objectif est de ne plus nous occuper du tout de gestion foncière. Notre but n'est pas d'essayer de faire quoi que ce soit en ajustant les prix.
M. Kevin Sorenson: Mais les gens qui possédaient ces terres les ont-ils rachetées à 10 p. 100 de leur valeur?
M. John Ryan: Non, je ne crois pas.
M. Kevin Sorenson: Y a-t-il une loi qui les en empêche?
M. John Ryan: Non, mais nous avons un groupe d'évaluateurs professionnels qui évaluent le prix de ces terres et qui fixent donc ce prix en fonction de la valeur marchande, et non pas en fonction d'un maximum ou d'un minimum, ce qui fait qu'au bout du compte, nous ne nous retrouvons pas à influencer les prix.
Mme Louise Neveu: Ils ont le droit de premier refus, de sorte que ce serait plutôt l'inverse.
M. Kevin Sorenson: Par conséquent, ils ont donc la possibilité de les racheter, très bien.
M. Steckle a signalé qu'il préférait plus de concurrence sur le marché. Cela me pose problème lorsque cette concurrence est une société d'État. Il y a déjà la Banque de développement qui peut avancer de l'argent aux vendeurs de matériel agricole. Dans le nom, j'ai le sentiment que ce n'est pas le bon mot que vous avez enlevé. Il se peut qu'un jour, vous deveniez Crédit agricole Canada, étant donné que nous délaissons les entreprises agricoles au profit des vendeurs de matériel agricole, qui se font financer par l'entremise du crédit agricole, alors qu'ils ont toutes sortes d'autres possibilités, les coopératives, les banques, voir la Banque de développement du Canada, qui est en concurrence avec une autre entité. C'est cela que je crains, que nous finissions par délaisser l'entreprise agricole familiale. J'aime beaucoup la définition que Murray a donnée de l'entreprise agricole familiale, mais je pense qu'avec la SCA, nous nous en éloignons.
M. John Ryan: Dans notre optique, ce n'est pas le sentiment que nous avons. Nous escomptons au contraire conserver l'accent, que ce soit maintenant ou dans cinq ans, sur la production au niveau primaire au niveau de l'entreprise agricole familiale. Mais pour parler plus précisément de la Banque de développement du Canada, effectivement nous avons signé un protocole d'entente avec elle. Ce que nous voulions faire, c'était travailler en coopération avec elle de sorte que nous puissions ensemble mettre notre argent et nos compétences sur la table et faciliter ainsi l'accès plutôt que le contraire. Nous ne voulons ni chevauchement, ni dédoublement, et c'est pour cette raison que nous avons signé ce protocole d'entente.
M. Kevin Sorenson: Si je lis la disposition en question, je vous demanderais de bien vouloir m'expliquer... Vous nous dites en fait que vous allez limiter vos activités aux petites et moyennes entreprises mais, au paragraphe 4(1) du projet de loi, on lit quelque chose d'assez différent:
-
4.(1) La Société a pour mission de mettre en valeur le secteur
rural canadien en fournissant des services et produits financiers
et commerciaux, spécialisés et personnalisés, aux exploitations
agricoles—notamment les fermes familiales—et aux
entreprises—notamment les petites et moyennes entreprises—de ce
secteur [...]
Cela n'est-il pas différent de l'expression «limité à»? Lorsque le texte dit «notamment les petites et moyennes entreprises», où celles-ci se retrouvent-elles? Elles se retrouvent dans la masse de la grosse entreprise.
M. John Ryan: Peut-être s'agit-il d'une question de rédaction, de définition. Notre interprétation est que c'est précisément cela notre axe d'intervention, plutôt que l'intégration de ce secteur à un autre. Nous avons donc essayé d'être précis et peut-être n'y sommes-nous pas parvenus. Mais nous avons essayé d'être précis en disant que ce sont là nos deux axes d'intervention, le producteur primaire et la petite et moyenne entreprise.
M. Kevin Sorenson: Mais cela ne veut pas dire limiter votre action aux petites et moyennes entreprises, le texte dit «notamment», ce qui veut bien dire que ce secteur en fait partie.
À mon sens, en politique, il est toujours possible d'intégrer la grosse entreprise dans un projet de loi comme celui-ci. Si la Saskatchewan Wheat Pool se trouvait en difficulté et si des petites fermes familiales risquaient d'être affectées par la fermeture des silos-élévateurs par exemple, à ce moment-là tout d'un coup, sur le plan politique, la SCA pourrait en venir à comprendre que pour pouvoir venir en aide à certaines de ces petites et moyennes fermes familiales, il vaudrait peut-être mieux commencer par venir en aide à la grosse entreprise. Et à ce moment-là, très vite, ce serait...
M. John Ryan: Je ne pense pas...
Le président: Nous allons devoir y revenir plus tard parce que vos six minutes sont écoulées.
Suzanne.
Mme Suzanne Tremblay: Je pense que tout cela est très intéressant et peut-être pourrais-je lui céder une minute afin de lui permettre de terminer.
Le président: Vous êtes très généreuse.
M. Kevin Sorenson: Eh bien, je n'en reviens pas, mais merci.
Je pense que nous constatons que la Saskatchewan Wheat Pool fait partie intégrante du contexte des fermes familiales en Saskatchewan. Et, j'en conviens, la Commission du blé est... Il serait préférable de pouvoir changer cela afin que l'impact sur les fermes familiales soit plus grand, mais je répugnerais à mettre dans la loi quelque chose qui, sur le plan politique, pourrait s'interpréter de cette façon, avec pour résultat que pour protéger l'investissement ou la ferme familiale, on finirait très vite par financer la grosse entreprise, et donc par dissiper l'effort.
M. John Ryan: Je voudrais faire valoir une ou deux choses. Ce que nous voyons ici dans le projet de loi, pour ce qui est des petites et moyennes entreprises, est ce qui existe déjà dans la loi actuelle. Nous fonctionnons sur cette base depuis 1993, ou à tout le moins nous avions le pouvoir de le faire, mais ce n'est pas dans cette voie que nous sommes allés. Si nous prenons l'exemple de la Saskatchewan Wheat Pool, il faut se souvenir que cette société totalise un actif de 600 millions de dollars environ. Ce n'est pas une grosse société qui pourrait soutenir une institution de cette envergure. Par conséquent, nous tenons compte de cela, c'est évident, et notre conseil d'administration a reçu pour mandat de préserver notre autonomie financière. Il n'est jamais bon d'investir une partie trop importante de son capital dans une seule entreprise.
M. Kevin Sorenson: Je vais vous lancer quelques fleurs. Dans ma circonscription, il y a un certain nombre de gens de la SCA—mais malheureusement, je n'ai pas encore fait appel à eux—qui m'ont dit être tout à fait prêts à venir me parler de la Société et des nouveaux développements qui s'annoncent. Le type en question s'appelle Allan Toove, je crois, et il est à Camrose. Il semble tout à fait prêt à le faire, et j'en suis très heureux.
M. John Ryan: Merci pour ces félicitations.
Le président: Merci, Kevin.
Mme Tremblay pourrait peut-être maintenant nous parler de certains problèmes qui se présentent au Québec dans l'industrie de la transformation. Je ne suis pas certain de mon fait, mais le cas n'est pas tout à fait étranger à ce qui nous occupe.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Je vous remercie, monsieur le président. Je veux poser une question tout à fait différente.
• 1010
J'ai essayé de comparer le projet de loi actuel avec
ce que vous nous proposez ici, mais je ne comprends pas
vraiment les changements que vous faites à l'article 7
de votre loi actuelle concernant le président du
conseil et le président de la société.
Si le gouverneur en conseil nomme une personne à un poste, je ne comprends pas pourquoi un conseil pourrait ensuite s'arroger le droit de remplacer cette personne, même dans le cas d'un intérim. Selon moi, si la nomination initiale vient du gouverneur en conseil, la personne nommée pour assurer l'intérim devrait l'être aussi. Ça ne devrait pas être un pouvoir... Je trouve étrange que le gouverneur en conseil délègue son pouvoir de nommer quelqu'un par intérim à un conseil d'administration. Quels sont les motifs qui sous-tendent cette modification? Est-ce que les présidents changent souvent chez vous? Est-ce que la société vous fait sauter en peu de temps? Est-ce qu'il y a beaucoup de personnes nommées par intérim?
[Traduction]
M. John Ryan: J'espère bien que non. Essentiellement, nous essayons d'intervenir strictement sous l'angle de la gouvernance. Si, pour une raison ou une autre, le poste devenait vacant, il y aurait quelqu'un pour assurer la continuité des activités de la Société. Le projet de loi parle bien d'une nomination dans un créneau de 90 jours maximum, de sorte que ce serait une situation transitoire. Nous n'escomptons pas vraiment que le gouverneur en conseil fasse une nomination à titre permanent, peu importe ce dont il pourrait s'agir. Il s'agit simplement d'assurer la continuité nécessaire dans le service en question.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Ce qui m'apparaît étrange, c'est ceci. Le gouverneur en conseil nomme deux personnes: le président du conseil et le président de la société. Il nomme ces deux personnes. C'est bien ça?
M. John Ryan: Oui, c'est ça.
Mme Suzanne Tremblay: Dans la loi qui est toujours en vigueur, il est clairement écrit au paragraphe 7(4):
-
7. (4) En cas d'absence ou d'empêchement du président du
conseil ou de vacance de son poste, le président de la
Société assure l'intérim.
Il m'apparaît normal que la loi prévoie que ce soit quelqu'un nommé par le gouverneur en conseil, soit le président de la société, qui remplace le président du conseil qui, lui aussi, a été nommé.
Dans la nouvelle loi, si le président du conseil est incapable d'assumer ses fonctions, «en cas d'absence ou d'empêchement du président du conseil», le conseil peut autoriser quelqu'un à le remplacer. Le conseil pourrait donc accorder à n'importe qui le droit de remplacer le président du conseil alors qu'il s'agit d'une personne qui a été nommée. Il me semble que la loi s'affaiblit ici. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement fait une chose pareille. Ça n'a pas de bon sens.
C'est une bonne chose qu'une personne qui a été nommée par le gouverneur en conseil, au nom des contribuables canadiens, remplace quelqu'un qui a été nommé par le gouverneur en conseil. Pourquoi quelqu'un qui a été nommé par n'importe qui, et qui ne représente personne sauf lui-même, aurait-il le droit d'administrer la société au nom des contribuables canadiens? Je ne comprends pas ça. Ça m'apparaît une énorme faiblesse dans la nouvelle loi. Ça ne se justifie pas à mes yeux. Je ne vois pas la justification à ça. Je ne comprends pas ça.
[Traduction]
M. John Ryan: En fait, cela revient essentiellement à une question de gouvernance. En 1993, après l'adoption de la dernière version de la loi, la charge de président de la Société était une charge à temps plein. En plus, il y avait un directeur général. Mais cela a changé en 1995. En 1995, le président a commencé à être nommé et il devait désormais rendre compte uniquement à un conseil d'administration. La loi actuelle dit qu'en cas d'incapacité du président du conseil, c'est le président qui agit.
Si vous regardez les pratiques actuelles en matière de gouvernance, elles prescrivent que le rôle du président du conseil doit être différent de celui qui dirige la Société afin d'assurer l'indépendance voulue. Dans ce projet de loi, ce que nous essayons de dire, c'est que si le président du conseil n'est pas là, ce n'est pas moi qui, en tant que président de la Société, doit diriger le conseil en plus de présider aux destinées de la Société. Je dois m'occuper plutôt de l'administration de la Société et c'est quelqu'un d'autre qui doit présider aux affaires du conseil d'administration. Il faudrait donc que quelqu'un qui soit issu du conseil en assure la direction jusqu'à ce que le gouverneur en conseil nomme un président permanent.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Avez-vous un vice-président au conseil?
[Traduction]
M. John Ryan: Pas du tout. Je suis le seul administrateur de la Société qui siège au conseil d'administration. Tous les autres administrateurs sont des gens de l'extérieur, c'est-à-dire des gens qui n'appartiennent pas à la Société du crédit agricole.
Et non, nous n'avons pas de vice-président.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Qui nomme les membres du conseil?
Mme Louise Neveu: C'est le gouverneur en conseil.
Mme Suzanne Tremblay: Sur la recommandation de qui les nomme-t-il?
Mme Louise Neveu: Je ne le sais pas. Je présume que les membres du gouvernement recommanderaient ces personnes.
Mme Suzanne Tremblay: C'est quelque chose qui n'est pas prévu. Je n'ai pas vu comment cela se faisait.
[Traduction]
M. David Anderson: Des nominations politiques.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Ça m'apparaît étrange quand même.
[Traduction]
Une voix: Très juste.
J'aimerais poursuivre dans la même veine que Kevin.
Il y a plusieurs mois, l'une des plus grosses coopératives laitières de l'Ouest a été vendue. Lorsque je me suis entretenu avec son ancien président, il m'a dit que son plus gros problème était le manque de liquidités. Il n'avait tout simplement pas suffisamment d'argent dans le système pour que la coopérative puisse tourner. Je veux bien entendu parler ici de la Dairyworld Foods et de sa vente.
Avec une mesure législative comme celle-là, jadis comme à l'heure actuelle, la Société du crédit agricole aurait-elle pu se porter au secours d'un groupe de producteurs agricoles dont l'usine de transformation aurait eu besoin d'une grosse infusion de capitaux? Je n'ai pas vu leurs livres. Je sais que c'était une très grosse entreprise. C'est un groupe puissant qui, d'ailleurs, s'est implanté au Nouveau-Bruswick après avoir racheté la Baxter Foods Limited.
Ce que nous voyons actuellement, c'est que ce sont des multinationales comme celle-là qui viennent acheter les entreprises de transformation. Avons-nous la possibilité, nous, Canadiens, de garder le contrôle de notre secteur de la transformation grâce à l'assistance financière de la Société du crédit agricole?
M. John Ryan: Je pense que cela appelle une assez longue réponse. En premier lieu, pour ce qui est de l'admissibilité, il n'y aurait pas de problème étant donné que ce sont des producteurs de chez nous. Ils font partie du milieu agricole, de sorte qu'il y a un intérêt pour l'agriculture. En fait, tout revient à une question d'envergure. S'agit-il là de quelque chose que la SCA pourrait vraiment faire et pourrait-elle intervenir de façon réaliste?
Comme nous l'avons dit un peu plus tôt, il y a ce plafond d'environ 20 millions de dollars. Je ne connais pas l'envergure du projet dont vous venez de parler. Je ne suis pas au courant.
Il faudrait bien comprendre l'intégralité de la proposition pour pouvoir dire si, effectivement, c'est quelque chose que la SCA aurait pu financer.
Le président: Je suis sûr que Marcel va sans doute vouloir revenir à ce point plus tard.
Je dois maintenant donner la parole à Dick.
Le secteur de la transformation représente un gros problème. Ce problème est encore exacerbé par l'acquisition des filiales et, ainsi, par la présence d'une entité qui grossit sans cesse. Comme je l'ai dit en répondant à Suzanne, le même phénomène se produit au Québec. Avec une entité de cette taille, vous n'avez plus rien à dire. À ce moment-là, une bonne partie de la transformation va être entre les mains d'un tout petit nombre de compagnies, et l'avenir des coopératives agricoles va donc se trouver compromis.
Cela dit, Dick, vous avez la parole et vous voudrez sans doute poser des questions dans un domaine différent.
Mais comme j'ai moi-même été le président d'une coopérative, c'est quelque chose qui m'inquiète beaucoup.
M. Dick Proctor: Merci, Charles.
Je voudrais simplement vous lire un paragraphe et vous demandez si vous êtes d'accord ou non:
-
Si le projet de loi était adopté, la SCA deviendrait une véritable
banque d'investissement pour les activités dans l'agroalimentaire,
un genre de banque de développement pour les activités à caractère
agricole. Sa mission se trouverait modernisée et ses différents
instruments financiers seraient mieux alignés sur les besoins d'une
clientèle élargie.
Est-ce là pour l'essentiel ce que vous pensez?
M. John Ryan: De prime abord, il n'y a rien là qui pousserait à dire: «Aïe, nous sommes sur la mauvaise voie». De toute évidence, il s'agit de mettre les outils dont nous disposons à la disposition de l'agriculture.
M. Dick Proctor: Fort bien.
Ce texte a été écrit au sujet du projet de loi qui avait été étudié par la Chambre en 1993. Pourquoi avez-vous maintenant besoin de nouveaux pouvoirs en plus de ceux qui avaient été suggérés à l'époque?
M. John Ryan: En 1993, lorsque nous avions commencé, nous voulions manifestement pouvoir offrir un concours dans le domaine de la valeur ajoutée. Je dois dire cela avec un bémol parce que je n'étais pas là à l'époque. On avait prévu une restriction en ce sens qu'il fallait que cela soit sous le contrôle des producteurs agricoles.
Comme cela fait plusieurs années déjà que nous travaillons dans le domaine de la valeur ajoutée, nous avons vu passer un certain nombre de propositions tout à fait valables sur le plan commercial, mais que nous n'avions pas pu financer parce que ces projets n'étaient pas sous le contrôle des producteurs agricoles. Il y a tout un tas d'exemples que je pourrais vous citer où nous avons dû dire, et je parle ici du critère crédit, effectivement, ce projet respecte nos critères. Pourtant, nous avons dû dire non. Par conséquent, le producteur n'en a pas profité, et la collectivité non plus.
M. Dick Proctor: Pourriez-vous nous donner un ou deux exemples mais de façon un peu plus précise?
M. John Ryan: Certainement. Au Manitoba, une entreprise agricole avait commencé à travailler dans le classement des oeufs et nous avions pu financer cette activité qui était devenue rentable. Les propriétaires ont alors voulu étendre leurs activités et ils ont vendu le volet exploitation agricole. Ils sont revenus nous voir en nous demandant un financement complémentaire pour élargir leurs activités de classement des oeufs, mais nous avons dû leur dire non étant donné qu'ils n'étaient plus des producteurs primaires.
• 1020
C'est un exemple seulement, mais j'en aurais tout un tas
d'autres points.
Le président: Rick.
M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.
Je pense que Dick a précisément pris la tangente que je voulais moi-même emprunter. Nous parlons ici de crédit-bail, c'est-à-dire une expansion de vos activités qui vous permettrait d'offrir du crédit-bail, en particulier dans le domaine du matériel agricole. Il n'y a là rien de nouveau. Cela fait dix ans que les producteurs agricoles louent leur matériel. Ce serait d'ailleurs plutôt la règle que l'exception depuis dix ans. Au lieu d'acheter leur matériel, ils le louent pour des raisons de trésorerie et aussi parce que cela leur permet d'acquérir du matériel neuf avec une mise de fonds initiale moins grande.
Êtes-vous toujours à la traîne? Vous voulez vous lancer dans le crédit-bail pour le matériel agricole, ce que les producteurs réclament depuis dix ans. Et c'est maintenant que vous venez nous dire que vous devez le faire. Et après cela? Pourquoi êtes-vous toujours à la traîne? Pourquoi ne pas songer aux dix prochaines années? Nous pourrions peut-être faire une loi qui pourra vous aider plus tard au lieu de vous permettre de faire simplement du rattrapage.
M. John Ryan: Eh bien, il est évident que ce n'est pas intentionnellement que nous sommes à la traîne. Je pense que la Société a les moyens de faire ce qu'elle pourra faire et d'établir ses priorités. Avec ce projet de loi, nous tentons d'obtenir suffisamment de marge de manoeuvre pour avoir les moyens d'intervenir, même si nous ne pouvons pas prévoir quels seront les besoins d'ici cinq ou dix ans, pourvu que...
M. Rick Borotsik: Cela se trouve dans la loi?
M. John Ryan: Je pense bien, à tel point même que certains viendront vous dire qu'elle va trop loin.
M. Rick Borotsik: Ce n'est pas mon cas. Je penserais plutôt le contraire. C'est ce que dit la loi?
M. John Ryan: C'est ce que nous pensons, étant donné qu'elle éliminerait les restrictions qui existent actuellement.
M. Rick Borotsik: D'accord.
Pour en revenir aux capitaux, vous avez dit quelque chose... en fait, pour commencer, Moyez, vous avez dit que le gouvernement se portait garant. Vous allez chercher votre capital en utilisant la garantie du gouvernement et en profitant de sa cote de solvabilité. John, vous nous avez dit qu'au niveau des notes, au niveau des prêts, la différence était de un quart à un demi pour cent. Est-ce que vous avez du mal à obtenir des capitaux ou est-ce que vous essayez simplement de tirer davantage d'argent des producteurs agricoles?
M. John Ryan: En réalité, nous regardons nos livres et nous disons voilà ce que nous coûtait cet argent. Quels sont nos frais de fonctionnement?
M. Rick Borotsik: Est-ce que le loyer de l'argent offert par les autres institutions financières est inférieur au vôtre?
M. John Ryan: Je pense qu'il faut regarder les choses sous l'angle... si les autres institutions financières utilisent leurs fonds mis en dépôt, alors la réponse est oui.
M. Rick Borotsik: Normal.
M. John Ryan: C'est incontestable.
J'aimerais savoir jusqu'où vous voulez m'amener.
M. Rick Borotsik: Non, c'est tout à fait normal. Il n'en reste pas moins que vous réclamez entre un quart et un demi pour cent de plus que les autres institutions financières, n'est-ce pas?
M. John Ryan: En effet.
M. Rick Borotsik: J'aimerais parfois être une petite mouche pour entendre ce qui se dit à vos conseils d'administration. Est-ce qu'on y parle de devenir plus concurrentiel, est-ce qu'on dit qu'il faudrait éliminer cette différence d'un quart à un demi pour cent, et que vous devriez vous aligner davantage sur les taux pratiqués par les autres institutions financières?
M. John Ryan: Je pense que le conseil d'administration parle surtout de ce que nous allons faire pour aider les producteurs agricoles. Nous ne passons guère de temps...
M. Rick Borotsik: Je pense qu'un quart ou un demi pour cent d'intérêt en moins serait utile pour le producteur, n'est-ce pas?
M. John Ryan: C'est un élément en effet, mais que pouvons-nous faire d'autre? Il est évident que notre conseil d'administration essaye de gérer les choses différemment. Lorsque les membres examinent leurs états financiers annuels, ils nous demandent quels sont nos frais. Ils nous demandent si nous les contrôlons bien. Parce que si nous ne les contrôlons pas bien, eh bien c'est le client qui va devoir payer plus. De sorte qu'ils surveillent cela de très près.
M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.
Le président: Nous revenons à David.
M. David Anderson: J'aimerais revenir à ce dont parlait M. Sorenson, en l'occurrence qu'à mon avis, la loi doit être précise. Cela vise peut-être davantage M. McCormick que les employés, et nous allons apporter des amendements dans ce sens. Mais son argument est bon.
L'une des raisons pour lesquelles la SCA s'est retrouvée avec 1,2 million d'acres en sa possession, c'est parce qu'il y avait eu des pressions politiques pour qu'elle les conserve, et parce qu'il y avait eu des pressions politiques au niveau local également, dans la province. Cette loi doit donc être précise pour remédier à cet état de chose.
Il ne suffit pas de pouvoir l'interpréter. Lorsque vous dites que les petites et moyennes entreprises font partie de l'ensemble, pour moi cela veut dire qu'elles ne représenteront probablement qu'une petite partie, étant donné qu'un seul prêt de 50 millions de dollars fait disparaître de la carte 100 producteurs agricoles qui, eux, n'obtiendront pas de prêt. Ici encore, je pense que laisser libre cours à l'interprétation risquerait d'ouvrir la porte à des problèmes et nous en avons précisément eu l'exemple avec la Banque de développement. J'exhorte donc simplement le gouvernement à être très précis dans ce qu'il entend faire.
J'aurais une ou deux questions à vous poser, et d'abord, avez- vous une idée de ce que le changement de nom coûtera à l'organisation?
M. John Ryan: J'ai déjà vu cette question évoquée quelque part et j'imagine que je vais lire le débat en deuxième lecture. Il faudrait que je commence par vous dire qu'avec le changement de nom, si tout se déroule comme prévu, il est évident que nous n'allons pas mettre à la poubelle du jour au lendemain tout notre papier à lettre en disant que nous devons tout reprendre à zéro. Le plan prévoit très clairement que nous allons continuer à utiliser le papier à lettre et tout ce qui porte la mention Société du crédit agricole. Lorsque nous aurons épuisé les stocks, à ce moment-là nous allons passer commande en utilisant le nouveau nom.
• 1025
En revanche, nous entendons bien afficher notre nouveau nom
sur les bâtiments que nous avons un peu partout au Canada. Il
faudra probablement quelques mois. À l'heure actuelle, nous
chiffrons cette dépense à 2 000 $ environ par panneau. Il s'agit de
la meilleure estimation que nous puissions faire étant donné que
nous n'avons pas encore demander de devis.
M. David Anderson: Je vais un peu changer d'orientation pour parler plutôt du volet du projet de loi concernant votre financement par capitaux propres, un volet qui, à mon avis, est bon pour l'essentiel. J'aime bien l'idée. Pourriez-vous nous donner l'exemple d'un cas précis dans lequel ce financement par capitaux propres permettrait à quelqu'un d'obtenir un crédit impossible à obtenir dans le secteur privé. À votre avis, quels seraient les secteurs dans lesquels cela serait...? Ici encore, je suis convaincu que cela devrait valoir pour les producteurs primaires et qu'ils devraient avoir accès à ce genre de financement étant donné, et je le répète, que vous ouvrez les portes à tout un groupe de gens qui n'ont pas nécessairement un lien direct avec l'agriculture et qui, pourtant, pourraient avoir accès à ce genre de financement.
M. John Ryan: S'agissant de ce genre de financement, comme nous ne sommes jamais allés en Bourse et comme personne n'est donc jamais venu nous demander un financement par actions étant donné que ce n'était pas notre domaine, je n'aurais pas vraiment d'exemples à vous donner pour ce qui est de la valeur ajoutée et du volet prêt simple.
Mais prenons par exemple quelques-unes des propositions que nous avons reçues. Assez récemment, une usine de nettoyage des semences avait commencé à installer une technologie de pointe, le fruit de plusieurs années de travail, qui allait faire d'elle la plus performante de toute l'Amérique du Nord, voire du monde entier. Ces gens avaient de l'argent à investir eux-mêmes et d'autres établissements de prêts étaient disposés à intervenir aussi, mais il leur fallait encore davantage de fonds parce qu'il allait y avoir une période de transition avant la phase opérationnelle, avant que leur trésorerie devienne suffisante pour leur permettre de commencer à rembourser. En d'autres termes, ils avaient besoin d'un fonds de roulement. Cela, c'est un exemple.
M. David Anderson: Lorsque vous parlez de ce genre de financement, est-ce que vous songez à des entreprises comme des usines de conditionnement des semences, qui ont beaucoup de garanties, ou plutôt à des parcs d'engraissement qui ne peuvent essentiellement offrir en garantie que le bétail qui y passe...?
M. John Ryan: Peu importe le dossier que nous examinons, ce sera toujours un cas où il n'y aura pas beaucoup de garanties. Lorsqu'il s'agit par exemple d'un financement par actions, il est rare qu'on puisse offrir quelque chose en garantie. La personne qui investit est ni plus ni moins un actionnaire.
M. David Anderson: D'accord. Il y a donc un risque élevé. Est- ce que vous pensez que les autres prêteurs vont voir le coût de leurs prêts augmenter pour la même raison?
M. John Ryan: Ce que nous pensons, c'est que nous allons pouvoir intervenir en tant qu'actionnaire. Ils s'en trouveront assurés d'une certaine façon, et plus ils réuniront de capitaux, moins ils seront endettés. Ce sera plutôt une amélioration, c'est ce que j'espère, et les autres banques verront cela d'un oeil favorable. Du moins, c'est la réaction que nous avons pu observer lorsque nous avons procédé à nos consultations. Elles nous ont dit fort bien, nous voyons passer tout un tas de propositions qui sont un peu faibles au niveau de la capitalisation, et nous trouvons excellent que vous puissiez intervenir en en offrant une partie.
M. David Anderson: Ma dernière question s'adresse à M. McCormick. Est-ce que le gouvernement s'opposerait à ce que l'on apporte à ce projet de loi des amendements qui réserveraient le financement par avoirs propres aux opérations directement liées à la production primaire?
M. Larry McCormick: Je pense avoir déjà répondu.
M. David Anderson: Est-ce qu'il pourrait l'envisager?
M. Larry McCormick: Tout est envisageable; c'est à voir.
M. David Anderson: Je cède la parole à monsieur Sorenson.
M. Kevin Sorenson: Si j'ai une autre question à poser...
Le président: Vous n'aurez peut-être pas le temps d'écouter la réponse. C'est le seul problème. Vos cinq minutes sont presque écoulées. Je vous redonnerai la parole plus tard.
M. Kevin Sorenson: Je cède la minute qui me reste à...
Le président: Marcel.
[Français]
M. Marcel Gagnon: Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir sur la notion de «ferme familiale» et aussi sur les possibilités de financement de la ferme, en amont et en aval. C'est que personnellement, et je sens que je ne suis pas le seul, la façon dont va l'agriculture m'inquiète.
J'en veux pour exemple ce qui se passe au Québec. Dans les années 1970, j'ai été parmi ceux qui ont travaillé très fort à instaurer la gestion de l'offre, les plans conjoints, les quotas de production, etc. À ce moment-là, le but était vraiment de protéger la ferme familiale. On avait même donné une définition de la ferme familiale en rapport avec notre action.
Aujourd'hui, je suis à peu près certain que dans les grosses productions—le porc, le poulet, les oeufs—, on pourrait calculer facilement, sans savoir compter trop loin, le nombre de propriétaires de véritables entreprises familiales. À mon point de vue, beaucoup de fermes emploient des travailleurs pour des entreprises qui se situent en amont et en aval, c'est-à-dire de grosses compagnies productrices de moulée ou des abattoirs, ou les deux types d'entreprises conjointement. Ce n'était pas l'objectif que l'on visait quand on a mis sur pied la gestion de l'offre.
• 1030
Quand je vois qu'on ouvre le financement de cette
façon, personnellement, je m'inquiète pour l'avenir de
l'agriculture. Je ne dis pas que je suis contre, mais
je pense qu'on s'oriente vers des fermes immenses et je
me demande si le vrai producteur agricole ne deviendra
pas de plus en plus un salarié sur sa ferme,
c'est-à-dire un contractuel engagé par de grosses
entreprises.
Vous dites que vous vous limitez le plus possible à la ferme familiale, mais à la ferme familiale élargie, et que la trop grosse entreprise n'aurait pas accès à ces crédits. Cependant, ceux qui connaissent toutes les possibilités de crédit existantes peuvent facilement subdiviser leur entreprise.
Je me demande si, selon vous, mes préoccupations sont exagérées. Est-ce que la Société du crédit agricole a vraiment l'intention de limiter le plus possible le crédit aux entreprises familiales?
Mme Louise Neveu: Monsieur Gagnon, je serais certainement d'accord sur votre dernière interprétation. Comme vous le savez certainement, cela évolue toujours. Alors, comment arriver à déterminer à quel moment dans l'histoire nous pourrons établir ce qui est acceptable pour la communauté agricole? Aujourd'hui, dans l'état actuel du marché, il nous serait certainement possible de dire qu'en effet, nous nous proposons ou nous anticipons de limiter nos prêts jusqu'à un maximum de 80 p. 100 au secteur agricole primaire tel que nous pouvons l'entrevoir.
Maintenant, définir l'agriculture primaire... Naturellement, ce n'est pas nous qui décidons de l'évolution de la science. Je trouve très difficile de vous répondre d'une façon précise parce que nous, dans ce domaine, on s'adapte habituellement à ce qui se passe.
M. Marcel Gagnon: Une définition qu'on s'était donnée à l'époque, et je ne sais pas si elle serait encore applicable, c'était une unité homme/travail. C'est ce qui représentait une entreprise familiale et qui pouvait être multiplié par deux, trois ou quatre unités selon le nombre de producteurs qui travaillaient ensemble. Est-ce qu'une telle définition est absolument dépassée? Serait-il possible de cerner la nature de l'entreprise familiale à l'aide du concept unité homme/travail?
Mme Louise Neveu: À ce moment-ci, ce serait extrêmement difficile de limiter l'unité à une personne. Je crois que dans la majorité des entreprises, une seule personne ne suffit plus.
M. Marcel Gagnon: D'accord. Mais elle peut être multipliée.
Mme Louise Neveu: Ça pourrait certainement être multiplié. Encore là, cela peut dépendre du secteur, du type de ferme, de la géographie des lieux. Il me paraît peu probable qu'on arrive à trouver une définition valable pour l'ensemble du Canada.
M. Marcel Gagnon: C'est grand, le Canada, hein? Nous, nous le savons.
Vous travaillez dans le secteur agro-forestier, c'est-à-dire que vos services s'étendent à l'agro-foresterie, à l'acériculture et à l'aquaculture. Est-ce qu'actuellement ce sont des domaines qui prennent de l'expansion assez rapidement? Est-ce que le rythme de leur progression est bon?
Mme Louise Neveu: Je ne dirais pas que c'est rapide. Dans le domaine de l'aquaculture, nous avons un portefeuille d'environ 50 millions de dollars. Dans l'acériculture, je ne suis pas certaine du montant exact. M. Lagacé est certainement plus au courant que moi. Je pourrais certainement vous procurer le chiffre exact.
Dans l'agro-foresterie, on commence. Nous nous en occupons vraiment seulement depuis quelques années. Alors, c'est un portefeuille qui est encore tout petit. Ce n'est pas quelque chose qui évolue rapidement.
M. Marcel Gagnon: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, Marcel.
Paul.
M. Paul Steckle: Je vais poser une question qui est peut-être hors sujet, mais c'est une question qu'on doit vous poser de temps en temps.
Prenons le cas d'une assez grosse exploitation, de plusieurs milliers d'acres, dont l'exploitant souhaite prendre de l'expansion à l'étranger, et envisage de déménager une partie de ces activités au Brésil. Qu'auriez-vous à lui répondre s'il venait vous dire: «Je voudrais hypothéquer des terres agricoles au Brésil sur une partie de mes terres agricoles au Canada, et je sollicite un prêt de la SCA»?
M. John Ryan: Je consulte Louise pour savoir si nous pouvons intervenir ou non.
Nous ne pouvons pas assurer de financement dans le cadre d'une opération internationale, et notamment accepter de garantie provenant du Brésil. Nous pourrions le faire si nous avions intérêt à réaliser une opération de financement ici au Canada en acceptant en garantie la propriété canadienne, mais pas les terres brésiliennes.
M. Paul Steckle: Bien, c'est la réponse que j'attendais. Mais je suppose que d'autres vont refaire la même expérience.
En ce qui concerne la promotion du capital de risque, pour les investisseurs qui s'attendent à un rendement assez élevé en contrepartie d'un risque, quelles mesures d'incitation comptez-vous prendre et quelles sont les industries liées à l'agriculture qui pourraient s'y prêter?
M. John Ryan: Si nous pouvons nous appuyer sur une loi qui nous habilite à proposer du capital de risque, nous nous adresserons tout d'abord aux détenteurs de capital de risque au Canada pour voir s'ils s'intéressent au secteur agricole. D'après les travaux que nous avons déjà faits, il existe des investisseurs régionaux qui s'intéressent dès maintenant à l'agriculture. Mais ils ont besoin d'aide. Ils s'adressent directement à moi pour me dire qu'ils souhaitent que la société soit dotée de pouvoirs nouveaux en la matière de façon que nous puissions former des entreprises en coparticipation sur certaines propositions.
Je m'attends à ce que nous soyons amenés à constituer des partenariats avec différents groupes régionaux, car il n'en existe aucun qui puisse s'associer avec nous à l'échelle nationale.
M. Paul Steckle: Et pour l'achat-bail de terrain, pouvez-vous répondre par oui ou par non?
M. John Ryan: Pour l'achat-bail de terrain, c'est non, nous ne nous intéressons pas à la gestion des terrains.
M. Paul Steckle: Parfait.
Le président: Merci, Paul.
Kevin, êtes-vous prêt?
M. Kevin Sorenson: Ma question est d'un niveau de technicité qui dépasse la portée de ce projet de loi, mais que feriez-vous dans la situation inverse de celle évoquée par M. Steckle, c'est-à- dire si des Brésiliens s'adressaient à vous?
Murray Calder a parlé d'une société sucrière de Taiwan. Ces gens-là sont en train d'établir une immense installation de production porcine dans ma circonscription, à une vingtaine de milles de chez moi. Est-ce que la législation autorise des étrangers à s'établir ici s'ils s'engagent à fournir de l'emploi à la population locale? Une telle société peut-elle s'adresser à vous?
M. John Ryan: Cela se fait déjà, n'est-ce pas?
Mme Louise Neveu: Des résidents canadiens peuvent le faire.
M. John Ryan: Je crois qu'on reçoit des demandes de ce genre.
M. Kevin Sorenson: Dans le cas d'une société de Taiwan, si les propriétaires de la société sont à Taiwan, c'est une société étrangère.
M. John Ryan: Mais là, ce sont des entreprises canadiennes.
Mme Louise Neveu: Je n'ai jamais été confrontée à cette situation. Nous vérifierons auprès de notre conseiller juridique, mais je pense qu'il faut donner une réponse négative.
M. Kevin Sorenson: Je suis sûr que l'administration centrale restera en place. Ils vont envoyer des PDG et des gestionnaires, ils vont recruter beaucoup de monde, mais je ne pense pas qu'il y ait de problème d'argent. S'ils viennent s'établir ici, ils ont certainement de quoi financer leur exploitation. Mais est-ce une question de citoyenneté canadienne ou de propriété?
M. John Ryan: Nous ne pouvons financer que des sociétés canadiennes. Il faudrait analyser la situation et se demander ce que cela signifie du point de vue de la définition juridique.
Comme Louise l'a dit tout à l'heure, on ne nous a pas encore soumis d'exemple de ce genre et je ne peux donc pas vous répondre de façon catégorique sans vérifier les faits de l'espèce, mais nous avons des clients qui viennent de l'étranger, achètent des terres ici, et créent une entreprise, auxquels nous avons accordé du financement dans les secteurs de production laitière et porcine.
M. Kevin Sorenson: J'ai une autre courte question.
Vous dites que vous ne vous hasarderez pas dans le domaine de l'achat-bail de terrain, et il est certain que vos biens-fonds vont encore diminuer cette année. Mais vous allez prêter de l'argent à des concessionnaires de machines agricoles, peut-être pour les maintenir en activité, et vous pourriez vous retrouver en concurrence avec eux dans le crédit-bail.
M. John Ryan: C'est une possibilité, mais nous nous sommes adressés aux concessionnaires de machines agricoles en leur disant que nous avions un programme qui leur était destiné: ils ont des machines agricoles à vendre et nous pouvons leur proposer du financement pour les aider à les vendre. Je ne sais pas combien de concessionnaires ont accepté notre proposition; peut-être une trentaine.
Mme Louise Neveu: Il y a 25 dossiers très actifs, mais nous avons reçu une centaine d'acceptations.
M. John Ryan: Ce sont des gens qui vendent des machines agricoles et qui se servent de la SCA pour assurer le financement de ces machines.
Nous nous trompons peut-être, mais nous ne pensons pas qu'il y ait là de situation de conflit. L'objectif principal de la société est d'en faire plus pour l'agriculture et de mieux tirer partie de ce dont elle dispose. C'est là que le partenariat intervient.
M. Kevin Sorenson: Vous dites que vous n'êtes pas en concurrence avec ceux à qui vous prêtez de l'argent, que vous ne concurrencez que les autres concessionnaires de machines agricoles, qui sont tout de même en concurrence avec les gens à qui la SCA prête de l'argent. C'est sans doute vrai, parce que vous aidez ces entreprises.
M. John Ryan: En définitive, nous leur disons que nous pouvons leur venir en aide si nos services les intéressent. C'est à eux de décider en connaissance de cause. C'est une question d'accès aux capitaux.
Le président: Cela vous convient, Kevin?
M. Kevin Sorenson: Oui, merci.
Le président: En ce qui concerne le crédit-bail, monsieur Ryan, il en existe diverses modalités. Certains manufacturiers proposent du crédit-bail par l'intermédiaire de sociétés comme Citicorp, qui viennent ici pour ramasser ces contrats, et on se retrouve ainsi à un deuxième ou à un troisième niveau d'intermédiaire.
Que pensez-vous de l'arrivée de la Société du crédit agricole dans le domaine du crédit-bail? Est-ce que vous êtes propriétaire des biens vendus, et est-ce qu'au bout de trois ans, ils réapparaissent à leur valeur résiduelle dans votre comptabilité? Nous avons vu le cas des fabricants de voitures, qui ont un sérieux problème de crédit-bail. Ils l'ont apprécié, mais au bout d'un certain temps, on voit revenir chez les concessionnaires toutes ces voitures dont la valeur réelle est inférieure à la valeur résiduelle.
Dans le cadre de cet amendement, qui considérez-vous comme les propriétaires des biens vendus? Lorsque tous ces vieux tracteurs et ces vieilles machines agricoles reviennent au bout de trois ans, parfois en très mauvais état, est-ce vous qui en êtes propriétaire? Ou avez-vous l'intention de les céder à quelqu'un d'autre ou de vous en débarrasser au prix du marché?
On connaît la société Odessa qui s'occupe chaque semaine de milliers de voitures vendues à l'encan. Quel changement souhaitez- vous voir intervenir dans le domaine du crédit-bail? Pouvez-vous expliquer au comité en quoi un organisme gouvernemental peut avoir intérêt à se retrouver propriétaire de la moitié des tracteurs disponibles au Canada d'ici trois ans?
M. John Ryan: Notre objectif n'est certainement pas de devenir le plus gros propriétaire de tracteurs au Canada. Si un producteur ou un transformateur vient nous voir parce qu'il souhaite acquérir une machine, nous lui donnons le choix: il peut la financer par un prêt direct, ou il peut l'acquérir par crédit-bail. S'il opte pour le crédit-bail, notre intention—et c'est simplement une intention ou un objectif, car nous n'avons pas encore les pouvoirs pour le faire—est de travailler avec les concessionnaires. Pour en revenir à une question précédente du député, nous voulons faire en sorte d'avoir un recours auprès du concessionnaire. De cette façon, nous travaillons ensemble, c'est-à-dire avec le producteur et le concessionnaire. Si au bout de trois ans ou aux termes du crédit- bail, le bien en question est restitué, nous travaillerons avec le concessionnaire pour le remettre sur le marché.
Il faut aussi considérer que nous faisons du financement d'équipement depuis sept ou huit ans. Lorsque l'emprunteur est en défaut de paiement, nous risquons toujours de voir le bien nous revenir. Mais pour le matériel agricole, cela ne représente pas des volumes bien considérables. En définitive, nos producteurs s'acquittent très sérieusement de leurs obligations en cours et font leur remboursement, comme nous l'avons dit la dernière fois lorsqu'il était question de l'ensemble des arriérés au sein de la société.
Le président: Votre objectif est d'assurer un financement pendant les trois ou cinq premières années, en souhaitant que l'agriculteur conserve le bien à sa valeur résiduelle, plutôt que...
M. John Ryan: Il peut le garder à la valeur résiduelle ou s'entendre avec le concessionnaire.
Tant que nous ne l'aurons pas négocié, rien ne sera définitif, mais c'est là l'objectif de la société. C'est comme pour la gestion des terres. Nous ne souhaitons pas être de gros propriétaires fonciers pas plus que nous ne souhaitons être propriétaires de grande quantité de matériel agricole.
Le président: Bien.
Dick.
M. Dick Proctor: Merci beaucoup.
Revenons à la question de Paul et à l'intervention de Kevin sur la propriété étrangère, et disons que l'exemple ne concerne pas le Brésil ou Taiwan, mais les États-Unis. Quelqu'un sollicite un prêt auprès de la Société du crédit agricole, et vous refusez parce qu'il ne s'agit pas d'un citoyen canadien. Certains d'entre nous se préoccupent des dispositions concernant les différends entre un investisseur et un État. Qu'est-ce qui empêcherait cet emprunteur de s'adresser à un groupe spécial de l'ALENA et de se plaindre de discrimination, puisqu'il existe un accord de libre-échange entre ce pays et le Canada?
Ma question comporte deux volets. Qu'est-ce qui l'empêche d'agir ainsi, est-ce que vous avez envisagé cette proposition et pensez-vous être à l'abri de ce genre de situation, ou pensez-vous pouvoir vous en protéger?
M. John Ryan: Nous ne l'avons pas envisagée, monsieur Proctor. Nous avons une loi, qui nous oblige à proposer du financement au Canada, et c'est ce à quoi nous nous consacrons. Je ne sais pas...
M. Dick Proctor: Oui, mais tout cela se passe au Canada. Je vous parle de quelqu'un qui viendrait s'établir en Alberta, qui achèterait des terres agricoles et dont la demande serait admissible à tous autres égards, sauf en ce qui concerne la propriété étrangère. Je ne suis pas avocat et je n'y connais pas grand chose en droit, mais il me semble qu'il faut se poser la question lorsqu'on étudie cette loi.
M. John Ryan: L'argument me semble bon. Je n'ai pas de réponse à vous donner dans l'immédiat, mais je vais me renseigner et je communiquerai ma réponse au comité.
Le président: David.
M. David Anderson: J'ai quelques questions concernant le capital de risque. Les financiers et les prêteurs s'attendent à des risques importants, mais ils veulent aussi obtenir un rendement élevé. Comment entendez-vous vous situer par rapport à ces deux éléments?
M. John Ryan: Je crois que les deux vont de pair: plus le risque est élevé, plus on en attend un rendement élevé. Nous considérons qu'après avoir passé 40 ans en agriculture, nous connaissons le domaine, nous connaissons le marché et nous connaissons l'activité agricole. Nous devrions être en mesure de distinguer les gagnants de ceux qui sont voués à l'échec. Évidemment, on ne peut pas gagner à tous les coups. En fait, les spécialistes du capital de risque disent que pour deux opérations qui réussissent, il y en a six qui ont déjà échoué et deux autres qui s'écouleront d'ici six mois. Il n'est donc pas douteux dans mon esprit que l'élément de risque va augmenter.
Certains experts au capital de risque que je connais et qui, au niveau régional ou parfois provincial, ont investi en agriculture ont réussi à prouver que les bonnes propositions existent et qu'elles donnent des rendements intéressants. Notre objectif est de travailler en étroite collaboration avec ces experts, qui se joindront aux nôtres, de façon que nous puissions prendre de bonnes décisions d'affaires.
M. David Anderson: Est-ce que vous envisagez de constituer une filiale?
M. John Ryan: C'est une possibilité. Nous ne sommes pas encore assez avancés dans l'opération, mais nous pourrions l'envisager dans la nouvelle loi. La loi actuelle s'applique depuis huit ans; la nouvelle s'appliquera pendant huit ou dix ans, qui sait? Mais donnez-nous les pouvoirs nécessaires, et s'il y a des mesures à prendre dans notre intérêt ou dans celui de nos partenaires, nous les prendrons.
M. David Anderson: L'agriculture a bien du mal à attirer du capital de risque dans certains secteurs. Pensez-vous que votre formule est préférable à des mesures fiscales?
M. John Ryan: Nous n'avons pas fait de comparaisons. Nous considérons simplement que nous avons quelque chose à offrir dans ce domaine au monde agricole. Nous avons un rôle à jouer. Je ne sais pas ce qu'il en est du point de vue fiscal, nous ne nous sommes pas posé la question.
M. David Anderson: Voici ma dernière question: Avez-vous l'intention de proposer du capital de risque dans le secteur de la biotechnologie? Avez-vous l'intention d'intervenir dans ce domaine?
M. John Ryan: Nous considérons effectivement que l'industrie de la biotechnologie a besoin de capital de risque. Nous pouvons donc lui proposer du financement de départ sous forme de capitaux propres. Est-ce que nous avons déjà un plan d'entreprise visant spécifiquement la biotechnologie? Pas encore.
M. David Anderson: J'ai encore une question. Vous dites que vous ne voulez pas donner des terres agricoles à bail et d'après votre témoignage, c'est assez évident. Mais j'aimerais savoir pourquoi cela ne figure pas dans la loi et pourquoi la question n'a jamais été abordée. Vous nous dites aujourd'hui, de façon très précise, que vous vous intéressez au matériel agricole mais pas aux terres agricoles. Il me semble qu'on pourrait envisager de le stipuler dans la loi.
M. John Ryan: Le seul moment où la société acquiert des terres, c'est quand l'entreprise périclite et que nous la récupérons. Il en a toujours été ainsi, et il en sera toujours ainsi. Quant à l'acquisition de terres agricoles qui feraient de nous un gros propriétaire foncier, cela ne nous intéresse pas. Nous avons déjà eu une division des terres agricoles qui s'occupait des cas de ce genre. Mais cette division est beaucoup plus modeste aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a deux ans. Nous l'avons réduite délibérément.
M. David Anderson: Personne ne souhaite voir la société acquérir d'immenses superficies de terres agricoles, mais je sais que le gouvernement provincial vous a imposé certaines contraintes dans ce domaine.
M. John Ryan: Oui.
[Français]
Le président: Suzanne.
Mme Suzanne Tremblay: Monsieur le président, j'ai juste une petite question, étant donné ce qu'on nous a donné. Je trouve cela intéressant parce qu'on nous pose des questions et qu'on n'a pas la réponse.
Si on part du principe qu'une brasserie transforme de l'orge, un producteur de bière qui récolte plusieurs millions de dollars de chiffre d'affaire par année pourrait-il être admissible à des prêts de votre banque, de la société? Pourrait-il être un nouveau client?
[Traduction]
M. John Ryan: Cela risque toujours de se produire. Mais il faut faire une distinction, selon qu'on a affaire à Molson ou à une microbrasserie. Pour Molson, c'est «non», mais pour la microbrasserie, c'est «peut-être».
Mme Suzanne Tremblay: Monsieur le président, j'aimerais beaucoup qu'on obtienne un avis sur la question qui a été posée par notre collègue. En vertu du chapitre 11 de l'ALENA, relativement aux États-Unis et au Mexique, ces derniers pourraient-ils prétendre, si on leur refuse un prêt, qu'ils n'ont pas été traités comme les autres et alors poursuivre le Canada? Pourrait-on avoir un avis formel là-dessus?
Une voix: [Note de la rédaction: inaudible].
Mme Suzanne Tremblay: D'accord. Merci.
[Traduction]
Le président: Y a-t-il d'autres questions?
M. David Anderson: Oui, une.
Vous avez parlé de vos rapports avec la Banque de développement du Canada. Pouvez-vous nous dire où elle se situe actuellement dans le domaine du prêt agricole en fonction de notre définition de l'entreprise agricole? Est-ce que le changement de définition va vous faire pénétrer dans des domaines dont elle s'occupe actuellement?
M. John Ryan: Le premier domaine de ce genre est celui de la transformation alimentaire. La Banque de développement du Canada finance actuellement certaines activités de transformation alimentaire. Elle n'intervient pas dans le secteur de la production primaire. Je le dis de façon générale. Elle s'intéresse davantage à la valeur ajoutée.
D'après mes discussions avec les gens de la Banque de développement du Canada, ils nous considèrent comme des experts en agriculture. Eux sont experts dans d'autres domaines. Reste à savoir comment nous pouvons collaborer de façon qu'en définitive, nous puissions assurer un meilleur service dans le domaine de la valeur ajoutée que nous ne pouvons le faire aujourd'hui chacun de notre côté.
M. David Anderson: Grâce à votre réponse, j'ai moins de difficulté à laisser les choses en l'état qu'à les modifier pour étendre vos activités dans des secteurs où la Banque de développement est déjà présente.
M. John Ryan: Tout est une question de proportion. Quel est notre principal domaine d'activité? À la Société du crédit agricole, nous n'hésitons pas à dire que c'est l'agriculture. Pour la Banque de développement du Canada—et je suis sûr que ses responsables pourraient vous le dire eux-mêmes, l'essentiel n'est pas l'agriculture. Ils ne sont pas experts dans ce domaine, mais ils le sont dans d'autres, et je pense que si nous travaillons ensemble, l'agriculture ne pourra qu'en profiter.
Le président: Merci, David.
Avant de mettre un terme à cette séance, je repense à certains journaux de l'Ouest qui relancent la question des embranchements ferroviaires de courte distance. Est-ce qu'ils sont totalement en dehors du domaine de compétence de la Société du crédit agricole? Où pourraient-ils aller chercher de l'aide? Que peuvent-ils faire s'ils ont des problèmes? Leur maintien est essentiel pour certains producteurs de l'Ouest. Est-ce que vous avez envisagé...?
M. John Ryan: En fait, notre mandat actuel nous permettrait d'intervenir en leur faveur, sous réserve que des producteurs primaires se réunissent pour les exploiter.
Je suis intervenu directement dans l'étude d'une proposition à ce sujet il y a un peu plus d'un an. Nous n'avons pas pu intervenir, mais nous avons étudié le dossier pour voir ce qu'il était possible de faire.
M. David Anderson: Est-ce que la nouvelle loi vous permettrait d'accorder du financement à un embranchement de ce genre?
M. John Ryan: La loi actuelle nous permet d'intervenir si l'embranchement est exploité par un producteur primaire.
Le président: Murray, vous avez quelque chose à dire à ce sujet.
M. Murray Calder: Oui, je me suis occupé de la gestion de l'un de ces embranchements. La question est la suivante: Pouvez-vous envisager d'aider des municipalités à s'en occuper et à les financer? Le problème avec les embranchements ferroviaires de courte distance, c'est que lorsqu'ils appartiennent à la municipalité, ils ne payent pas d'impôt foncier, puisque l'emprise appartient à la municipalité. Mais si des agriculteurs se regroupent pour acheter l'embranchement, ils vont devoir payer de l'impôt foncier. La question est donc de savoir si vous pouvez envisager de financer une municipalité pour l'acquisition d'un embranchement.
M. John Ryan: Ou peut-être se renseigner pour savoir qui est le propriétaire, et qui va l'exploiter pour avoir la certitude qu'en bout du compte, il y a une possibilité de succès. Je ne sais pas si nous avons déjà envisagé—peut-être pourriez-vous m'aider, Louise—l'octroi de prêt à une municipalité. Je ne le crois pas, monsieur Calder.
M. Murray Calder: Bon.
Le président: Merci, monsieur McCormick, d'avoir bien voulu comparaître ici aujourd'hui.
Je crois savoir que mardi nous étudierons les plans et priorités. Mercredi, du moins l'espérons-nous, nous recevrons quelques témoins. Nous nous réunirons donc mercredi après-midi de la semaine prochaine pour étudier le projet de loi C-25.
Alors, monsieur Ryan, madame Neveu et monsieur Somani, merci bien.
Larry, nous aurons peut-être d'autres questions à poser, mais je crois que nous les avons à peu près toutes abordées ce matin. Chacun d'entre nous peut maintenant étudier le projet de loi plus en profondeur sans oublier de lire entre les lignes. Si vous avez des modifications à proposer, saisissez-en le greffier le plus tôt possible. Merci.
Sur ce, nous levons la séance de ce matin.