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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 028 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 11 décembre 2006

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Je voudrais ouvrir la séance, s'il vous plaît. C'est la séance numéro 28 du Comité permanent du patrimoine canadien.
    Oui, monsieur Bélanger.
    Monsieur le président, pourrais-je revenir sur certaines questions qui ont été posées au cours d'une réunion antérieure et qui ont pu, peut-être par inadvertance, laisser planer des calomnies, à l'endroit d'une personne qui n'était pas là et qui n'a pas été invitée à comparaître? Je pense que nous devrions être très prudents. Vous avez dû nous réprimander, monsieur le président, et j'ai accepté vos remontrances.
    Lorsque M. Warkentin a questionné quelqu'un, il a semblé insinuer qu'une personne qui fait partie du conseil d'administration du Programme de contestation judiciaire était peut-être en conflit d'intérêts. Au cours des témoignages, on a mentionné le fait que la charte de cet organisme comporte des lignes directrices à l'égard des conflits d'intérêts. Je les ai obtenues et je suis certain que tout le monde pourrait les obtenir.
    Monsieur le président, ce sont des questions sur lesquelles nous devrions faire preuve d'une grande prudence. Je pense que nous devrions donner aux personnes que nous nommons la possibilité de venir comparaître devant le comité.
    Merci. Nous en prenons bonne note.
    Avant de commencer l'audition de notre témoin, je dois dire qu'il devait y avoir deux témoins aujourd'hui. Le greffier a reçu tout à l'heure un courriel l'informant l'un d'eux ne pouvait pas venir. Comme nous avons quatre témoins pour la deuxième partie de notre séance, je suggère que nous limitions la durée de la première partie à trois quarts d'heure. Êtes-vous d'accord?
    Monsieur Angus.
    Comme nous n'avons pas pu examiner la motion de M. Kotto la semaine dernière, nous allons sans doute devoir limiter les deux parties de notre discussion d'aujourd'hui pour être sûrs d'avoir le temps nécessaire. Nous avons un certain nombre de questions à régler et nous avons dit que nous voulions nous réserver du temps pour cela. Je ne vois donc pas d'inconvénient à ce que nous réduisions la durée de la première partie de la séance, mais nous allons sans doute devoir empiéter aussi sur la deuxième partie pour nous occuper des travaux du comité.
    Si je comprends bien, nous allons discuter de 15 h 30 à 16 h 15, et ensuite de 16 h 15 à 17 h 30, ce qui laissera trois quarts d'heure de plus pour les quatre témoins. Nous pourrons ensuite nous pencher sur les motions de M. Kotto entre 17 h 30 et 18 heures.
    C'est ce que je suggère.
    Nous allons donc entendre le premier témoin jusqu'à 16 h 20, pendant 45 minutes?
    Oui, cela peut durer jusqu'à 16 h 20. Et la deuxième partie durera jusqu'à 17 h 30.
    C'est correct.
    Margaret, nous vous souhaitons la bienvenue à notre séance d'aujourd'hui. Si vous avez un exposé à nous présenter, la parole est à vous.
    Désolée, mais je suis enrouée et je vais donc essayer de projeter ma voix un peu plus.
    Je suis reconnaissante aux membres de ce comité de m'accueillir pour présenter un exposé au nom de l'Association nationale de la femme et du droit.
    Je m'appelle Margaret Denike. Je suis professeur en droit de la personne à l'Université Carleton. Je suis membre de l'Association nationale de la femme et du droit depuis plusieurs années, de même que membre du Fonds d'éducation et d'action juridiques pour les femmes. Je connais bien le Programme de contestation judiciaire, sans doute pour m'y être intéressée à ces différents titres, mais c'est seulement au nom de l'Association nationale de la femme et du droit que je vous parlerai aujourd'hui.
    L'Association nationale de la femme et du droit est un organisme sans but lucratif qui, depuis 1974, cherche à améliorer la situation juridique des femmes canadiennes grâce à l'éducation juridique, la recherche et la réforme du droit. Nous reconnaissons que pour promouvoir le droit à l'égalité des femmes et de divers groupes qui ont toujours été désavantagés en raison de facteurs comme la race, les capacités, l'âge, l'ethnicité et l'orientation sexuelle, il faut mettre en oeuvre tout un éventail de stratégies visant à réformer le droit. Cela exige notamment un dialogue, de la recherche et des bourses pour informer les communautés locales et nationales, ainsi que nous-mêmes, sur la situation et les besoins des autres; de nouvelles lois et politiques pour favoriser le respect entre les personnes et les groupes et pour protéger ceux qui sont vulnérables aux préjugés sociaux et politiques; des interventions dans des causes-types et des contestations judiciaires pour contester les lois et politiques discriminatoires, surtout celles qui touchent les groupes déjà désavantagés en n'en tenant pas compte.
    À notre avis, pour parvenir à une société juste et égalitaire, il est nécessaire d'offrir les moyens de parvenir à la justice et à l'égalité. Il faut pour cela financer les programmes et les services permettant d'atteindre cet objectif. Le Programme de contestation judiciaire est, à notre avis, l'exemple par excellence de ce genre de programmes. Il a pour mandat de favoriser la promotion du droit à l'égalité et des droits linguistiques qui sont enchâssés dans la Charte canadienne des droits et libertés. L'ANFD, l'Association nationale de la femme et du droit s'inquiète donc vivement des répercussions de l'annulation du financement du Programme de contestation judiciaire, surtout sur les groupes désavantagés de notre société.
    Une caractéristique de notre héritage qui fait notre réputation sur la scène internationale est notre engagement vis-à-vis des valeurs constitutionnelles et des principes de justice. Le Canada est reconnu pour s'être engagé non seulement à accorder une égalité véritable dans une démocratie inclusive et participative, mais encore à mettre en place les moyens de défendre ces droits de façon proactive. Ces valeurs sont reconnues universellement dans les normes et les lois internationales sur les droits de la personne. Le Canada s'est distingué en concrétisant cet engagement avec le Programme de contestation judiciaire, ce qui lui a valu la reconnaissance explicite et les applaudissements des experts internationaux et des commissions des Nations Unies, y compris le Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, en 2003, et le Comité sur les droits sociaux, culturels et économiques, en 2006.
    Un des principes fondamentaux du constitutionnalisme — et je vais dire quelques mots à ce sujet — est que les droits qui sont inscrits dans les constitutions doivent être reconnus à tous et pas seulement aux privilégiés qui ont les moyens de les défendre. Depuis qu'il a établi en 1978, le Programme de contestation judiciaire du Canada a permis à des personnes et à des groupes qui n'auraient pas pu le faire autrement d'avoir accès à la justice et d'invoquer les garanties constitutionnelles prévues à l'article 15 de la Charte pour défendre leur droit à l'égalité devant les tribunaux. Ce programme a permis à tous les membres de la société canadienne d'obtenir les droits que prévoit la Charte en finançant ceux qui n'ont pas les moyens d'intenter une coûteuse action en justice.
(1535)
    Comme l'a déclaré un jour Beverley McLachlin, la juge en chef de la Cour suprême du Canada, lorsqu'elle a examiné qui devait bénéficier de la Charte et où ces droits devaient s'appliquer :
La Charte n'est pas un texte sacré que seuls les initiés des cours supérieures peuvent aborder. C'est un document qui appartient aux citoyens, et les lois ayant des effets sur les citoyens, ainsi que les législateurs qui les adoptent, doivent s'y conformer.
    J'ajouterais que le Programme de contestation judiciaire du Canada a cherché à faire en sorte que tous les citoyens, particulièrement ceux qui sont défavorisés ou qui défendent les intérêts des défavorisés, puissent invoquer la Charte devant les tribunaux.
    Notre régime constitutionnel, ou tout autre régime constitutionnel, exige un financement pour soutenir certaines contestations constitutionnelles. Sans cela, nous empêchons l'expression de tous les points de vue relatifs à la Constitution, et surtout des points de vue des personnes défavorisées sur le plan économique. Le constitutionnalisme et l'État de droit exigent que le gouvernement finance ceux qui n'en ont pas les moyens pour qu'ils puissent porter leurs litiges devant les tribunaux et qu'il fournisse la possibilité, à tous les citoyens, d'exiger du gouvernement qu'il rende compte de ses obligations constitutionnelles.
    Dans la cause célèbre récente de Law c. Canada, la Cour suprême du Canada a défini et clarifié le but des garanties d'égalité énoncées à l'article 15 de la Charte en disant qu'elles avaient deux objectifs précis.
    Comme l'a déclaré le juge Iacobucci :
En termes généraux, l'objet du par. 15(1) est d'empêcher qu'il y ait atteinte à la dignité et à la liberté humaines essentielles au moyen de l'imposition de désavantages, de stéréotypes et préjugés politiques ou sociaux, et de promouvoir une société dans laquelle tous sont également reconnus dans la loi en tant qu'êtres humaines ou que membres de la société canadienne, tous aussi capables, et méritant le même intérêt, le même respect et la même considération.
    Ce deuxième objectif de la promotion de l'égalité et de la promotion d'une société qui favorise l'égalité de tous ses membres nécessite clairement un engagement positif de la part des gouvernements pour que ces droits et principes soient entièrement réalisés. Le droit constitutionnel à l'égalité ne peut pas être réduit à une simple notion de droits négatifs; autrement dit, il ne s'agit pas seulement de mettre fin à la discrimination lorsqu'elle risque de se produire. Selon la Cour suprême, il faut un engagement positif et proactif à promouvoir ces droits.
    Le Programme de contestation judiciaire illustre cet engagement étant donné que son mandat caractérise ce double objectif en soutenant et favorisant les bourses, les débats, l'éducation et le dialogue sur l'égalité, de même qu'en parrainant des conférences, des colloques et des publications de recherche sur l'égalité.
    Certaines des causes défendues avec l'appui du Programme de contestation judiciaire ont eu un impact très profond sur ce que l'égalité peut signifier et signifie pour les Canadiens, notamment en ce qui concerne la façon dont les tribunaux se sont attaqués au problème de la violence systémique à l'endroit des femmes.
    Ce programme a accordé un financement aux groupes qui cherchent à obtenir l'égalité pour les femmes afin qu'ils puissent travailler en collaboration de façon à fournir des analyses des dispositions discriminatoires de nos procédures pénales, par exemple en ce qui concerne les mythes et les stéréotypes au sujet des victimes d'agression sexuelle. Des stéréotypes dégradants concernant le manque de crédibilité des femmes ont influencé les lois et les procédures relatives au viol pendant des siècles et ils ont empêché les femmes de dénoncer les agressions et de porter des accusations contre leurs agresseurs.
    Par exemple, grâce à leur intervention, en 1999, dans l'affaire Ewanchuk, les groupes de femmes ont pu contester le raisonnement de la Cour d'appel de l'Alberta pour qui la façon dont une femme s'habille et le fait qu'elle ne soit pas mariée légalement témoignent suffisamment de son caractère et de sa crédibilité pour justifier que son agresseur soit acquitté des accusations d'agression sexuelle portées contre lui.
    Ce financement a également été crucial pour faire valoir des arguments et des analyses dans la cause d'agression sexuelle de l'évêque Hubert O'Connor ainsi que dans l'affaire Mills. Les arguments portaient sur les circonstances dans lesquelles le dossier médical et psychiatrique des plaignants dans une cause de viol devait être communiqué aux personnes accusées d'agression sexuelle pour pouvoir mettre en doute la crédibilité des plaignants.
(1540)
    Ces interventions ont contesté des hypothèses et des pratiques établies de longue date qui touchent à la sécurité et la liberté de toutes les jeunes filles et femmes du pays. Dans ce genre de contexte, la possibilité de fournir à nos tribunaux, grâce à ces interventions, des analyses éclairées tenant compte des divers points de vue qui permettent de mieux comprendre les répercussions sur le droit à l'égalité, fait partie de ce que le Programme de contestation judiciaire du Canada nous a apporté. Le soutien de ce programme est essentiel pour que les tribunaux continuent de considérer la violence à l'endroit des femmes comme une question d'égalité.
    Pour conclure, je dirais que lorsque nous sommes confrontés à des questions concernant les droits des minorités, et surtout de celles qui subissent le mépris et les préjugés de la majorité, nous ne devons pas perdre de vue l'ironie intrinsèque de la constitutionnalisation et de la protection du droit à l'égalité. Comme le professeur Jennifer Nedelsky l'a déclaré :
... lorsque nous choisissons de traiter une valeur telle que l'égalité comme un droit constitutionnel, cela revient à dire que nous reconnaissons l'importance de cette valeur et que nous pensons qu'elle est vulnérable, que les personnes qui la valorisent risquent de la violer par leur processus politique ordinaire.
    C'est là une considération fondamentale du droit constitutionnel à l'égalité, car c'est ce droit qui permet à tous les membres de la société de s'épanouir et d'avoir des relations d'égal à égal les uns avec les autres, même si nous sommes très inégaux sur le plan de nos besoins, de nos capacités et de notre situation.
    Les personnes et les groupes, tels que les minorités sexuelles, qui sont les plus exposés aux préjugés sociaux, au mépris et à la haine et qui risquent le plus d'être dépouillés de leurs droits fondamentaux sont ceux qui ont le plus besoin de la protection de la Constitution. Cette protection doit inclure les services et les programmes qui offrent des possibilités de dialogue et d'éducation concernant les différents besoins et les différentes circonstances, peu importe si la majorité répugne à les accepter. C'est là une caractéristique de notre héritage, de ce programme dont un grand nombre de Canadiens tirent fierté. Il s'agit de respecter la dignité de toutes les personnes, y compris celles au sujet desquelles nous pourrions nous-mêmes avoir des doutes, en leur donnant accès à la justice, à la protection et aux avantages de la loi.
    Je vous remercie de votre attention.
(1545)
    Merci.
    Monsieur Bélanger.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Denike, je vous remercie pour votre exposé.
    Je voudrais d'abord vous poser une question bien simple que j'ai également posée aux autres personnes qui ont comparu devant nous.
    Êtes-vous intervenue dans certaines des causes qui ont été portées devant les tribunaux avec l'aide du Programme de contestation judiciaire, de façon périphérique ou indirecte?
    De façon périphérique.
    Merci.
    Pour commencer, je voudrais donc savoir si, lorsque l'on choisit les avocats qui représenteront les groupes, l'affiliation politique de ces avocats entre en ligne de compte?
    Absolument pas.
    C'est pour établir si c'est le cas ou non, car pour justifier la décision d'annuler le Programme de contestation judiciaire, le gouvernement a dit que c'était une des raisons. Nous essayons simplement d'établir si c'est la réalité ou non.
    Pourriez-vous nous dire pourquoi, à votre avis, le Programme de contestation judiciaire a été annulé?
    Il m'est très difficile d'émettre des hypothèses. J'avoue que cette décision a été une surprise pour moi, car je pensais que le gouvernement actuel et les gouvernements précédents considéraient qu'il s'agissait d'un programme dont nous pouvions tous être fiers.
    Je dis cela compte tenu des principes dont je viens de parler. Comme un bon nombre d'entre nous l'avons constaté à un moment donné de notre vie, sur le plan professionnel ou personnel, les personnes qui devraient avoir droit à une protection contre la discrimination parce qu'elles ont toujours été désavantagées sont celles à l'égard desquelles nous avons nous-mêmes tendance à avoir des opinions discriminatoires.
    Autrement dit, le droit à l'égalité, qui est garanti par la Constitution et que ce programme vise à protéger, l'emporte sur toutes nos impulsions personnelles. Je pensais que tout le monde le reconnaissait.
    Je ne peux pas vraiment formuler d'hypothèses.
(1550)
    Pourriez-vous nous donner, pendant les deux minutes qui me restent, quelques exemples de causes dans lesquelles vous êtes intervenue de façon périphérique et qui ont eu pour résultat de nous rapprocher davantage de l'égalité?
    Quand je dis que je m'en suis occupée de façon périphérique, c'était vraiment périphérique, surtout dans certaines des causes auxquelles je pense.
    Je veux dire par là que j'ai fait partie d'une organisation qui constitue des comités, des organisations différentes, pour s'attaquer à des questions précises. Ces comités sont toujours en mouvement. Par conséquent, pour répondre à votre première question concernant l'affiliation politique des avocats, les avocats ou les juristes qui sont engagés ne sont pas rémunérés, pour la plupart, et nous ne couvrons que quelques dépenses minimes. Les avocats sont engagés en fonction de leurs connaissances dans un domaine particulier.
    Pour nous, c'est-à-dire pour l'Association nationale de la femme et du droit et le Fonds d'éducation et d'action juridiques pour les femmes... cela porte sur les aspects qui nous intéressent particulièrement, disons le droit pénal ou le droit de la famille ou un autre domaine ou sur la théorie et l'analyse de l'égalité. On constitue donc toujours un comité différent pour chaque contestation judiciaire.
    Je voudrais vous en parler dans les grandes lignes avant d'entrer dans les détails. Pour ce qui est de gagner une cause, lorsque nous intervenons en tant que tierce partie, ce n'est pas vraiment « nous » qui la gagnons, car nous n'avons pas d'intérêts personnels en jeu et je dirais que nous avons souvent perdu. On a l'impression que les organisations ont des intérêts personnels dans une cause. Lorsque nous gagnons une cause, en ce qui me concerne, c'est au niveau de l'élaboration de la théorie et de l'approche des principes de droit tels que l'égalité véritable.
    Le Canada est reconnu sur la scène internationale pour son approche de l'égalité, pour avoir compris que pour assurer l'égalité, par exemple, il ne s'agit pas de traiter les gens de la même façon, mais plutôt de tenir compte de leurs différents besoins, de leur situation et de la place qu'ils occupent dans la société. Un excellent exemple est celui de la cause Eldridge dans laquelle une femme enceinte malentendante n'a pas pu obtenir, à l'hôpital, les mêmes services médicaux que toutes les autres femmes sans handicap auditif.
    À mes yeux, la victoire consiste à amener les tribunaux à participer aux efforts collectifs visant à mieux faire comprendre où se trouve l'égalité et j'ai participé de façon périphérique à des causes qui ont contribué à cette lutte.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Kotto.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Margaret Denike, je vous souhaite la bienvenue.
    Un philosophe français du nom de  Paul Valéry, si ma mémoire est bonne...
    Vous ne m'entendez pas?

[Traduction]

    Non, juste un instant.

[Français]

    M'entendez-vous? Je pense qu'il faut arrêter le décompte du temps qui m'est alloué.

[Traduction]

    Je crois que j'entends bien. Oui, merci.

[Français]

    Vous m'entendez? D'accord.
    On repart la montre à partir d'ici, monsieur le président?

[Traduction]

    Oui. Bien...

[Français]

    Merci. Un philosophe français du nom de Paul Valéry, si ma mémoire est bonne, disait qu'on reconnaissait la grandeur d'un gouvernement à la manière dont il se comporte vis-à-vis de ses minorités, au sort qu'il réserve à ses minorités, en somme.
    Le Programme de contestation judiciaire avait pour mandat de protéger les droits des minorités, de préserver la démocratie et d'éviter sa destruction. L'accès à la justice en français, la promotion et la défense des droits linguistiques des communautés francophones et acadienne étaient également un de ses mandats. Je ne cite que ces deux exemples. À nos yeux, au Bloc québécois, et de ce côté-ci de la salle, cela avait un sens incontournable et non négociable à la lumière de ce qu'on a vu depuis le 25 septembre dernier.
    Je passe maintenant à ma question. Dans l'hypothèse où ce programme serait aboli — pour l'instant, il est question de l'abolir parce qu'une moitié du fonds est supprimée et que l'autre le sera —, dans l'hypothèse où ce fonds est aboli, quelles seront, selon votre perspective des choses, les conséquences?
(1555)

[Traduction]

    De façon générale, je dirais que la conséquence est que cela portera un coup terrible aux valeurs qui étaient celles de Valéry qui a reconnu ce qui fait la grandeur d'un gouvernement. J'ai réfléchi un peu à la question. En fait, j'essaie de trouver d'autres moyens de comprendre. Je crois que souvent, nous ne comprenons pas bien les choses, mais nous avons bien compris celle-ci. Malgré nos impulsions, nos tendances et celles de la majorité, nous avons pris cet engagement envers les minorités, malgré ce que cela coûte, parce que nous étions déterminés à affirmer notre diversité et à célébrer l'égalité.
    Lorsque vous supprimez les moyens d'y parvenir, vous portez un coup à cet engagement, à ces principes et à ces valeurs. Cela a un coût humain, à savoir que les plus désavantagés ne peuvent pas défendre leur droit à l'égalité. C'est envers les défavorisés que nous devons prendre cet engagement.

[Français]

    Je vais vous poser une question que j'ai posée à d'autres témoins. Croyez-vous que le Programme de contestation judiciaire affaiblit ou, devrais-je dire, affaiblissait les pouvoirs du législateur au profit du judiciaire?

[Traduction]

    Pas du tout. Je pense que c'est une question intéressante.
    Je ne vois pas cela comme une lutte pour le pouvoir. À mon avis, une véritable démocratie fait appel au plus de décideurs, d'influences et de voix possible pour orienter et formuler ses lois. J'aurais dû réfléchir un peu plus à cette question, car je me rends compte qu'elle est dans l'esprit de bien des gens.
    Chaque fois qu'on se plaint que nos tribunaux ont trop de pouvoirs, je constate que c'est souvent à l'occasion d'une décision particulière... Je ne m'exprime pas très clairement, mais souvent, je ne constate pas vraiment ce dont les tribunaux sont accusés; nous ne parlons pas de faire et d'imposer des lois contre la majorité, en dépit des intérêts des gens. Nous parlons de l'interprétation des principes qui ont été adoptés de façon démocratique.
    Par conséquent, je ne vois pas les choses sous cet angle.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Angus.
    Merci beaucoup.
    J'apprécie votre présence ici aujourd'hui.
    J'ai trouvé intéressante notre discussion sur les contestations judiciaires, car cela nous a permis de clarifier un certain nombre de choses. Ce qui a commencé comme un exercice dit de responsabilité — notre président du Conseil du Trésor a dit qu'il se débarrassait des programmes inutiles — est devenu... il est évident que c'est là un cheval de Troyes pour le Parti conservateur en ce qui concerne la notion de droits. Nous voyons très clairement maintenant, au Canada, que la notion d'accès, d'égalité d'accès aux droits n'est pas vraiment en harmonie avec la notion de droits individuels.
    Je voudrais parler avec vous de votre expérience du droit constitutionnel. Notre droit constitutionnel prévoit des droits individuels, mais aussi des droits collectifs : les droits linguistiques des Francophones; les droits que l'article 35 reconnaît aux premières nations. Lorsque ces droits ont été proclamés, ils n'ont pas été appliqués. Les premières nations n'avaient pas plus de droits en vertu de l'article 35 après la proclamation de la Constitution qu'avant; elles ont dû se battre devant les tribunaux pour obtenir ces droits. Nous avons eu un certain nombre de causes très coûteuses pour établir la nature de ces droits.
    Je voudrais savoir s'il est exact de dire que selon la jurisprudence canadienne nous avons une notion des droits collectifs en même temps qu'une notion des droits individuels? Est-ce la pratique courante au Canada?
(1600)
    Je ne suis pas experte en la matière. C'est une simple hypothèse de ma part, mais je dirais que cela correspond, de façon générale, à notre engagement envers les droits collectifs. Néanmoins, nos tribunaux ne seront pas nécessairement d'accord avec cette hypothèse.
    Nos tribunaux diraient-ils que les droits collectifs l'emportent sur les droits individuels? Où situeraient-ils l'équilibre? A-t-on eu l'impression que les droits collectifs menaçaient les droits individuels? Est-ce une question dont on parle dans la magistrature au Canada?
    Je ne peux pas vous le dire.
    Revenons-en alors simplement à la question de l'égalité d'accès. Les droits sont-ils vraiment des droits si les gens ne peuvent pas les exercer, s'ils n'ont pas la possibilité de les faire proclamer?
    Deuxièmement, est-ce que la reconnaissance des droits des groupes minoritaires se fait aux dépens du bien commun? Cela nuit-il aux droits de la majorité? Cela semble être l'argument que j'entends avancer. On semble dire que si nous laissons un groupe exercer ses droits et s'il peut avoir accès à la loi pour faire reconnaître ses droits, c'est aux dépens de la majorité. Pourrais-je savoir ce que vous en pensez?
    Je ne comprends pas tout à fait votre question. Je pourrais peut-être essayer d'y répondre et vous pourrez me dire si j'ai bien compris.
    Je crois avoir des droits humains et c'est ce dont nous parlons lorsque nous parlons des droits. Ce sont les droits que nous sommes tous prêts à reconnaître. Nous pourrions le vérifier en demandant aux Canadiens ce qu'ils pensent de l'égalité ou de la liberté de mouvement. Je pense que c'est dans l'intérêt de tous. Je ne vois pas nécessairement de collision, comme vous l'avez peut-être laissé entendre.
    Je ne pense pas qu'il y ait eu de collision, mais cela semble être une des objections à l'égard du Programme de contestation judiciaire. On croit que si l'on met de l'argent de côté pour permettre à un groupe minoritaire d'avoir accès aux tribunaux pour établir ses droits, l'établissement des droits d'un groupe minoritaire se fait aux dépens de la majorité. Cela semble être l'argument invoqué et j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Je comprends.
    Dans ce cas, mes propos de tout à l'heure sont tout à fait appropriés. La promotion et la protection des droits de ceux qui en ont le moins, ce dont nous devons nous soucier le plus, est à mon avis dans l'intérêt de la majorité. Voilà ce que j'en pense. Ce sera toujours dans l'intérêt de la majorité.
    Je ne me situe pas tout à fait du même point de vue quand je dis cela, car la majorité, dans la mesure où il s'agit de la société canadienne dont nous faisons tous partie, vit dans un pays où tous les citoyens peuvent être sûrs que si leur fils, leur fille ou eux-mêmes deviennent invalides, ils ne perdront pas leurs droits et l'accès à la justice dont ils bénéficiaient jusque-là.
(1605)
    Très bien. Merci.
    Merci.
    Monsieur Fast, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d'être venue. J'apprécie votre présence ici.
    Je voudrais d'abord faire une mise au point. M. Angus a laissé entendre qu'une des principales objections à l'égard de ce programme était l'écart entre l'accès aux moyens d'affirmer le droit à l'égalité et l'exercice du droit à l'égalité comme tel. Je ne pense pas que ce soit la principale objection. L'accès est comme un portail, comme une porte et la principale objection est que cette porte a été ouverte pour certains, mais fermée pour d'autres. À ma connaissance, c'est le principal argument qui a été invoqué par les adversaires de ce programme. De plus, notre gouvernement cherche à cibler les ressources de façon plus efficace et à s'assurer que l'argent va à ceux qui en ont besoin.
    Je voudrais me familiariser un peu plus avec votre organisme. Je crois que vous représentez l'Association nationale de la femme et du droit, n'est-ce pas?
    Je crois que vous avez mentionné tout à l'heure un certain nombre d'organismes auxquels vous êtes également affiliée.
    Oui.
    J'ai oublié de quels organismes il s'agissait. Pourriez-vous les mentionner de nouveau?
    Il y en a seulement un autre, le Fonds d'éducation et d'action juridiques pour les femmes, et je crois qu'une représentante de cet organisme a déjà témoigné devant le Comité de la justice.
    Très bien. Il s'agit donc du FEAJ et de l'ANFD.
    Est-ce que l'ANFD a déjà reçu un financement du Programme de contestation judiciaire?
    Oui, bien que l'ANFD n'intervient pas vraiment dans les causes portées devant les tribunaux comme le fait le FEAJ. Comme je l'explique à mes étudiants qui veulent une réponse rapide à la question de savoir « Quelles sont les organisations nationales juridiques de femmes? », ces deux organismes s'intéressent aux deux façons dont les lois sont généralement déposées, élargies et révisées dans notre pays, c'est-à-dire par l'entremise des assemblées législatives et par l'entremise des tribunaux. Le FEAJ s'intéresse aux causes portées devant les tribunaux.
    Je comprends.
    Mais l'ANFD a déjà obtenu un financement, n'est-ce pas?
    Oui, pour des consultations, au nombre de trois...
    Très bien. C'était donc à trois occasions différentes.
    ... et une intervention. Elle n'a participé qu'à une intervention devant les tribunaux qui a fait l'objet d'un financement.
    Il y a donc eu trois consultations et une intervention. C'est bien cela?
    Oui.
    Et le FEAJ?
    Presque exclusivement, le FEAJ est intervenu dans des causes-types parce qu'il a pour mandat d'avancer des arguments en faveur de l'égalité devant les tribunaux.
    Savez-vous combien de fois?
    Je ne saurais pas le dire, non.
    Mais c'était plus qu'une fois?
    Oui.
    Très bien.
    Est-ce que l'ANFD ou le FEAJ étaient également représentés au Programme de contestation judiciaire, soit au conseil d'administration, soit dans des groupes ou des comités consultatifs ou des sous-comités?
    L'ANFD y est actuellement représentée et je me sentirais plus à l'aise — car c'est que j'ai accepté de faire — de parler au nom de l'ANFD.
    Tout d'abord, à mon connaissance, le seul élément du Programme de contestation judiciaire qui a des représentants est le comité consultatif si je ne m'abuse. Mais je crois connaître assez bien le Programme pour pouvoir dire que le comité de sélection, par exemple, le conseil d'administration ou les groupes qui prennent des décisions concernant la répartition du financement ne comptent aucun représentant des diverses organisations.
    Je ne sais pas exactement quel est le mandat du comité consultatif, mais je crois qu'il comprend des représentants des organismes de lutte contre la pauvreté, des organisations homosexuelles, des organisations féminines, ce genre de groupes, et qu'il y a aussi un comité consultatif sur les droits linguistiques. Je ne pourrais pas vous dire quel est son mandat, mais je crois qu'il a pour tâche de réunir les points de vue sur l'égalité de toutes ces organisations qui représentent les groupes désavantagés.
    On peut dire que certains des organismes qui peuvent bénéficier du financement de ce programme sont représentés soit au conseil, soit au comité consultatif ou...
(1610)
    Comme je l'ai dit, un comité consultatif ne prend aucune décision. Il n'a aucun budget et aucun pouvoir décisionnel sur la répartition des fonds ou la sélection des causes. C'est le seul comité où ces organismes ont des représentants.
    Mais il conseille le PCJ sur diverses questions reliées à la mise en oeuvre du Programme, n'est-ce pas?
    J'aimerais bien voir quel est le mandat de ce comité consultatif. Je peux seulement faire des suppositions à cet égard.
    J'ai une question de plus. Merci, monsieur le président.
    Le problème vient de ce que certaines personnes considèrent que le Programme a été appliqué de façon inéquitable. Nous avons beaucoup entendu parler de l'égalité, mais en réalité ce programme s'est adressé à certains groupes et pas à d'autres qui méritent peut-être aussi un financement.
    Je vais vous citer un extrait de l'évaluation sommative du Programme de contestation judiciaire de 2003 :
L'examen de dossiers administratifs et les entrevues auprès des informateurs clés représentant l'organisme chargé de l'administration du PCJ indique que le Programme, tel qu'il est aujourd'hui exécuté, n'appuie que les causes qui protègent les droits liés par le Programme et les fonds avancés. En d'autres termes, un groupe ou un particulier qui présenterait des arguments juridiques prônant une application restrictive de ces droits ne recevrait pas de fonds du PCJ.
    Le rapport réitère ensuite à plusieurs reprises qu'apparemment, l'expression « groupes désavantagés » a été définie de façon très étroite et cela peut-être pour réfléter une certaine idéologie plutôt qu'un souci de justice.
    Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez?
    Soyez brève.
    Je pense que c'est vraiment une question importante, car cela touche au coeur de ce programme à bien des égards, mais également à une question à laquelle nos tribunaux et nos assemblées législatives s'intéressent depuis longtemps, c'est-à-dire la mesure dans laquelle cela vise à assurer l'égalité.
    Je reconnais que certaines personnes ne s'intéressent pas à l'égalité, mais c'est une autre question. Néanmoins, dans la mesure où nous nous engageons à assurer l'égalité, nous reconnaissons — et il est intéressant de voir, au cours de notre histoire juridique, comment on a progressivement reconnu ce que cela exige ou ce que l'égalité signifie, ou ce que nous voulons qu'elle signifie — et dans la mesure où il s'agit de traiter tout le monde de la même façon...
    Non, je ne devrais pas commencer ma phrase ainsi.
    Je pense que nos tribunaux, ou du moins la Cour suprême du Canada a reconnu que c'est une conception assez limitée de l'égalité. Quand nous disons que le Programme vise à promouvoir certains droits, je pense qu'il s'agit de promouvoir le droit à l'égalité, particulièrement du fait qu'il est reconnu dans la Constitution, non seulement dans notre pays, mais sur la scène internationale.
    Si vous me permettez... D'accord, je ne vais pas raconter cette anecdote.
    En réalité, cet engagement ne consiste pas simplement à donner la même chose à tout le monde, car si nous le faisons, cela ne changera rien dans notre société. Si vous avez la moitié des gens autour de la table qui n'ont pas accès aux services et des gens en fauteuil roulant, de l'autre côté de la table, qui y ont accès, si nous traitons tout le monde exactement de la même façon, la deuxième moitié ne pourra toujours pas se rendre à l'étage supérieur si nous ne leur fournissons pas d'ascenseur, par exemple.
    En réalité, pour assurer l'égalité, il faut aider non pas tout le monde, mais ceux qui sont désavantagés. Bien entendu, nous devons pour cela établir que certains groupes méritent davantage certaines ressources, car nous voulons qu'ils puissent se rendre au deuxième étage ou avoir accès à des soins de santé. Cela peut vouloir dire qu'on accordera un financement plus important à ceux qui sont malentendants, par exemple, ou encore en fauteuil roulant lorsqu'ils ont besoin de services médicaux.
    Bien des gens diront : « Ce n'est pas juste. Pourquoi ces gens-là obtiennent-ils ces ressources  — disons les services d'un interprète —  et pas nous? » C'est là que nous devons oublier nos propres intérêts et dire que c'est parce que nous nous sommes engagés envers ce que nous appelons maintenant l'égalité véritable, ce qui consiste à mettre ces ressources à la disposition de tous. Ce n'est pas seulement ce que vous donnez et distribuez, mais ce qui est disponible et les possibilités qui sont offertes.
(1615)
    Merci.
    Monsieur Simms, comme il ne nous reste que cinq minutes, c'est vous poserez les dernières questions.
    Merci, madame, pour votre exposé. Je voudrais aborder très brièvement — car nous n'avons pas suffisamment de temps — l'expression « désavantagé sur le plan économique » que vous avez utilisée et qui constitue, je suppose, la principale raison pour laquelle les gens veulent invoquer l'article 15 de la Charte, par exemple.
    Pourriez-vous nous donner une idée des dépenses que doit faire un groupe ou une personne qui désire aller devant les tribunaux pour invoquer l'article 15, par exemple?
    Tout dépend de votre objectif. Si c'est pour une consultation sur les relations... par exemple, vous avez raison, il n'y a pas de frais de litige. On reconnaît généralement qu'il coûte beaucoup moins cher de porter une cause devant un tribunal des droits de la personne que d'introduire une action qui exige une longue liste de transcriptions, étant donné que la cause a été portée en appel à plusieurs reprises et qu'elle se trouve devant la Cour suprême du Canada. Je crois que le Programme de contestation judiciaire accorde un montant maximum de 30 000 $ pour les causes qui coûtent des dizaines de milliers, sinon des centaines de milliers de dollars, selon la nature de la revendication, ce que cela implique et selon qu'il est nécessaire ou non de voir toutes les transcriptions.
    Comme je ne suis pas avocate, je vous relate seulement ce dont j'ai entendu parler.
    Je suppose que je me fie seulement à votre connaissance périphérique des causes récentes.
    Je sais que pour un grand nombre d'interventions, surtout devant la Cour suprême du Canada, le financement accordé par le Programme de contestation judiciaire ne couvre généralement que ce qu'on appelle les frais déboursés. Ce sont les dépenses qui sont faites pour obtenir les documents, les redistribuer ou les diffuser, pour réunir les équipes, pour passer des appels téléphoniques.
    Aucun des organismes avec lesquels j'ai travaillé n'a mis le moindre sou dans sa poche. D'accord?
    D'accord.
    Je suppose que pour les grandes entreprises qui sont là pour réaliser des bénéfices, ce serait prohibitif. Je ne peux même pas imaginer combien cela coûterait.
    Vous avez utilisé l'expression « égalité véritable ». Dans quelle mesure estimez-vous que l'absence du Programme de contestation judiciaire réduirait l'égalité véritable?
    L'élimination de ce programme porterait un coup terrible à l'égalité véritable, car l'égalité véritable est la différence entre l'égalité théorique, c'est-à-dire lorsqu'on traite tout le monde de la même façon, ce qui est l'attitude habituelle... J'ai grandi en pensant que c'était cela l'égalité, mais l'égalité véritable tient compte du fait que les gens sont dans des situations différentes et en tient compte.
    Par conséquent, l'élimination de ce programme reviendrait à éliminer l'égalité véritable dans la mesure où le gouvernement peut apporter son soutien et son financement pour réaliser l'égalité en tant qu'idéal, mais aussi en pratique, pour ce qui est des questions concrètes.
    Les gouvernements antérieurs ou le gouvernement actuel ont-ils jamais communiqué avec votre groupe pour savoir ce que vous pensiez de ce programme?
    Pas à ma connaissance, mais je ne suis pas membre du personnel; je suis seulement bénévole.
    Merci.
    Merci, et cela met fin aux questions pour cette partie de notre réunion.
    Je dois vous remercier, madame Denike. Excusez-moi de vous avoir appelée seulement Margaret la première fois. Merci beaucoup pour vos réponses.
    Je remercie le comité pour ses questions.
    Merci d'avoir pris le temps de me recevoir.
    Merci.
    Nous allons faire une pause de cinq minutes en attendant que les prochains témoins prennent place.

(1625)
    Je déclare ouverte cette partie de notre séance.
    Nous souhaitons la bienvenue à nos témoins. Nous avons réorganisé notre horaire de façon à respecter l'ordre initial.
    Nous allons demander à chacun d'entre vous de bien vouloir se présenter en indiquant le groupe auquel vous êtes affilié.
    Comme la séance prendra fin à 17 h 30, nous allons essayer de limiter les observations et les réponses le plus possible. Lorsque nous en arriverons aux questions, nous nous en tiendrons à des tours de cinq minutes.
    Nous allons commencer par Mme Landolt, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président. C'est avec plaisir que nous sommes ici.
    REAL Women s'est penchée sur le problème des contestations judiciaires, mais je dois dire que c'est un programme dont nous avons été entièrement exclues. Pendant des années, nous avons essayé d'obtenir un financement et une reconnaissance quelconque. Comme notre idéologie ne correspond pas à celle du Programme de contestation judiciaire, on nous a toujours refusé une aide financière.
    Nous avons de sérieuses objections à l'égard du fonctionnement de cet organisme. Il s'agit, à notre avis, d'un bon exemple de corruption gouvernementale aux dépens des contribuables. Ce programme ne relève pas du Parlement et la Loi sur l'accès à l'information ne s'y applique pas. En conséquence, les administrateurs du Programme ont été libres de faire tout ce qu'ils voulaient.
    Par exemple, selon son mandat, le Programme doit s'adresser aux groupes désavantagés, se fonder sur le mérite juridique et contribuer à l'égalité. Ces expressions n'ont jamais été définies si bien que les administrateurs du Programme les ont définies de façon à servir leurs propres intérêts. Je peux vous donner un exemple. Je crois que vous avez reçu copie de notre mémoire. À la page 2, nous donnons quelques exemples de financement. Par exemple, en 1992, une avocate de Bay Street, à Toronto, Elizabeth Symes, qui est l'une des fondatrices du Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes, a obtenu un financement pour pouvoir revendiquer une déduction d'impôt pour la nounou de ses enfants. Vos chances d'obtenir un financement dépendent de qui vous êtes et de vos liens avec le mouvement féministe et d'autres groupes d'intérêts particuliers.
    En 1995, le PCJ a versé 5 000 $ à une travailleuse sociale de Saskatoon pour réunir des arguments en faveur de la suppression de l'article 43 du Code criminel. L'article 43 permet aux parents et aux enseignants de discipliner les enfants s'il est raisonnable de le faire dans les circonstances. Cette personne a fait pour 5 000 $ de recherches, après quoi le PCJ a accordé de l'argent à un autre groupe d'intérêts particuliers pour qu'il porte la cause devant les trois instances judiciaires pour supprimer l'article 43. REAL Women n'a pas obtenu le moindre financement. Pour protéger les parents, nous avons dû aller devant les tribunaux, aux trois niveaux, sans la moindre aide financière extérieure.
    Un autre groupe prétendument désavantagé est le Syndicat canadien de la fonction publique, le SCFP. Ce syndicat est très riche étant donné que les cotisations syndicales sont obligatoires. Il a obtenu de l'argent pour deux causes dans lesquelles REAL Women a dû intervenir en payant de sa propre poche. Ces deux causes portaient sur les avantages sociaux et les droits des homosexuels. Comme nous protégions la famille traditionnelle, bien entendu, le Programme de contestation judiciaire n'a pas voulu nous aider.
    Nous avons été particulièrement mécontentes de constater que, depuis le début, le Programme de contestation judiciaire a financé un groupe féministe, le Fonds d'éducation et d'action juridiques pour les femmes ou FEAJ, sous prétexte qu'il allait promouvoir l'égalité des femmes. Je peux vous dire que le FEAJ ne représente pas les femmes, mais seulement un groupe de féministes. Personne ne peut prétendre représenter les femmes. Nous sommes aussi diverses que les hommes. Pourtant, le PCJ a financé ce groupe pour plus de 140 causes. Ces causes sont toujours prétendument défendues au nom des « femmes », mais en réalité, c'est seulement au nom d'une idéologie féministe.
    Je pourrais dire que l'ANFD, dont le témoin précédent fait partie, ne représente pas non plus les femmes. Dans certaines des causes qui ont été mentionnées... la majorité des femmes canadiennes n'appuieraient jamais les arguments qui ont été défendus devant le tribunal, à part un ou deux. La majorité de ces causes étaient extrémistes, féministes et idéologiques. On s'est servi des tribunaux pour contourner le Parlement à qui reviennent ces décisions. Grâce au financement du PCJ, les féministes radicales ont été financées pour contourner le Parlement sur un grand nombre de questions.
(1630)
    Nous avons constaté qu'il n'y avait aucune égalité d'accès au PCJ et nous en sommes un excellent exemple. Il est pour le moins sidérant que le FEAJ, dont on a financé 140 causes, soit considéré comme un groupe désavantagé. Grâce à la Loi sur l'accès à l'information, nous avons découvert qu'entre 1985 et 1989, le FEAJ a reçu plus de 800 000 $ de Condition féminine Canada. Il a obtenu un million de dollars de Ian Scott lorsqu'il était procureur général de l'Ontario. Il a obtenu plus 900 000 $ entre 1992 et 2002. Notre organisation, qui n'est financée que par nos membres et par des dons, a un budget total annuel de 120 000 $. Nous sommes certainement désavantagées, mais nous n'avons jamais pu bénéficier du Programme de contestation judiciaire, car notre idéologie ne correspond pas à celle des administrateurs du Programme.
    Le PCJ est très discriminatoire. Il est vraiment ironique qu'un organisme qui est censé favoriser la justice et l'égalité au Canada est en réalité l'un des plus discriminatoires, inéquitables et injustes que nous ayons actuellement au sein du gouvernement canadien. Notre organisation a fait directement l'expérience de la discrimination du PCJ. À la page 6 de notre mémoire, nous vous citons trois cas dans lesquels notre demande a été rejetée sous prétexte que nos opinions ne favorisaient pas l'égalité. L'égalité figure pourtant dans nos statuts constitutifs. Le mot égalité figure également dans notre nom. REAL Women signifie « Realistic,  Equal and Active for Life ». Nous croyons tous dans l'égalité des femmes, mais nous n'avons pas l'interprétation féministe de l'égalité; par conséquent, nous avons été victimes de la discrimination de ce programme de contestation judiciaire.
    Chaque fois que nous avons demandé des subventions, on nous a dit que nous n'appuyons pas l'égalité. C'est toujours le FEAJ et d'autres organismes féministes qui obtiennent le financement, car apparemment ils sont les seuls à comprendre l'égalité. La majorité des autres femmes sont totalement laissées de côté, car de toute évidence nous ne sommes pas bien informées.
    Je suis avocate et je suis allée bien des fois devant les tribunaux. REAL Women est intervenue devant la Cour suprême du Canada environ 12 fois, avec son propre argent, sur des questions pour lesquelles le FEAJ, l'ANFD et les organisations homosexuelles ont toutes été financées.
    Nous craignons fort qu'on ait utilisé le Programme de contestation judiciaire pour changer les valeurs sociales de notre pays en finançant uniquement un des points de vue sans ouvrir la porte aux autres. Lorsque d'autres groupes, comme la femme qui vient de parler au nom de l'ANFD, parlent de l'égalité d'accès, c'est très insultant pour ceux d'entre nous qui ont dû aller devant les tribunaux à nos propres frais.
    L'organisme activiste homosexuel du Canada, Égale, a déclaré dans son propre journal le 19 octobre : « Aucun groupe n'a bénéficié davantage du financement du Programme de contestation judiciaire que la communauté gaie », ce dont il se félicite. On peut lire que l'argent du Programme de contestation judiciaire a aidé Égale à obtenir le même droit au mariage par l'entremise des tribunaux de Colombie-Britannique, de l'Ontario et du Québec.
    Ce groupe a été financé alors que REAL Women, qui lutte pour protéger la notion traditionnelle de mère, de père et d'enfants, a dû aller devant les tribunaux à ses frais. Nous avons essayé de protéger les valeurs traditionnelles. Nous avons essayé de protéger les lois que le Parlement et les assemblées législatives ont adoptées. Les groupes qui ne sont pas d'accord avec ces lois se sont servis de cet argent pour usurper les lois et faire triompher leurs propres objectifs et leur idéologie sur notre système de gouvernement.
(1635)
    Il est grave à nos yeux que la définition traditionnelle de la famille, qui se définit comme une mère, un père et des enfants, ait été sévèrement ébranlée par les causes que le Programme de contestation judiciaire a financées. Il ne fait aucun doute que les enfants s'épanouissent mieux dans un environnement familial où les parents sont de sexe opposé et où ils peuvent acquérir leur identité sexuelle et leurs attentes sexuelles en prenant exemple sur leurs parents biologiques. Ces enfants réussissent mieux sur le plan scolaire, financier, émotionnel, psychologique et comportemental, comme cela a été démontré.
    Néanmoins, ces groupes extrémistes se sont servis des tribunaux, grâce à l'argent du Programme de contestation judiciaire, pour créer une situation préoccupante pour les enfants.
    Par exemple, l'Assemblée nationale de France a déclaré, en janvier 2006, qu'elle ne pouvait pas accepter le mariage entre conjoints du même sexe à cause de ses effets sur les enfants. En juillet 2006, la Cour d'appel de l'État de New York et la Cour suprême de Washington ont également opposé un refus au mariage entre conjoints du même sexe.
    Au lieu d'en faire autant, nos tribunaux nous disent que les adultes ont le droit de ne tenir aucun compte des droits des enfants. Il y a lieu de se demander pourquoi le Programme de contestation judiciaire canadien penche en faveur des féministes et des homosexuels. Après avoir étudié très attentivement la question, nous pouvons dire que c'est parce que des membres du groupe homosexuel Égale siègent à la fois au conseil d'administration et au conseil consultatif de cette organisation.
    Pourriez-vous conclure?
    Oui, merci, monsieur le président.
    Il y a un conflit d'intérêts. Par exemple, la directrice exécutive actuelle de l'Association nationale de la femme et du droit est l'ancienne directrice exécutive du Programme de contestation judiciaire. Tout est relié et les fonds ne sont attribués qu'à leurs propres groupes. Encore une fois, à la page 11 de notre mémoire, nous donnons quelques exemples des relations étroites entre le conseil consultatif, le conseil d'administration et toute l'administration du Programme.
    Pour résumer, le PCJ, qui est financé par les contribuables canadiens, a été créé pour soutenir l'inéquité et la discrimination au Canada. À quelques exceptions près, il n'a pas défendu les droits des minorités et des groupes désavantagés. Il a plutôt défendu les intérêts des groupes d'intérêts particuliers qui ne sont certainement pas désavantagés étant donné le financement considérable qu'ils obtiennent du gouvernement.
    Par exemple, en 2004-2005, Égale a reçu du ministère du Patrimoine une subvention de 21 000 $. À quelles fins? Cela s'ajoutait au financement du PCJ.
    Le FEAJ a touché des centaines de milliers de dollars et l'ANFD obtient chaque année 200 000 $ à 300 000 $ de Condition féminine Canada. Ces groupes peuvent difficilement se dire désavantagés.
    Ils vont devant les tribunaux et ces derniers ne sont pas en mesure de se prononcer sur ces questions morales. Je le sais en tant qu'avocate. Ils n'ont pas accès à des études, à tous les faits sociaux reliés à une cause. Ils entendent seulement un point de vue et ne sont pas prêts à aller plus loin. Il faut qu'ils se prononcent pour ou contre. Ils ne peuvent pas faire de compromis comme le Parlement. Le Programme de contestation judiciaire est tout simplement un mauvais programme tant sur le plan du principe que des résultats.
    Merci, monsieur le président.
(1640)
    Merci.
    Nous allons devoir respecter le temps imparti, car nous devons terminer à 17 h 30.
    Monsieur Carpay.

[Français]

    Bonjour. Je m'appelle John Carpay et je suis directeur exécutif de la Canadian Constitution Foundation. J'ai appris le français au Québec, à l'Université Laval, où j'ai fait mon bac en sciences politiques. J'ai aussi un bac en droit, obtenu à l'Université de Calgary.
    Notre organisation s'intéresse au Programme de contestation judiciaire parce qu'un homme de Colombie-Britannique, du nom de James Robinson, chef de la bande autochtone Nisga'a, dans le nord-ouest de la province, a voulu s'en servir. Comme députés, vous savez sans doute qu'en 2000, il y a eu l'adoption de la Loi sur l'Accord définitif Nisga'a, qui a créé un nouveau gouvernement ainsi qu'une nouvelle constitution, une nouvelle citoyenneté pour ces Autochtones du nord-ouest de la Colombie-Britannique. James Robinson, avec l'aide de notre organisation, a fait une demande de financement, parce qu'il croyait que cet accord violait le droit à l'égalité en vertu de l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés.
    En 2003, le Programme de contestation judiciaire a répondu qu'il ne voulait pas accorder d'aide financière à M. Robinson parce que le programme n'était pas d'accord avec le but de M. Robinson. Autrement dit, le programme ne partageait pas sa vision de l'égalité. Je vois devant moi aujourd'hui des députés de plusieurs partis. Il y a quatre partis qui sont représentés à la Chambre des communes, c'est-à-dire qu'il y a quatre visions de la justice. Chaque parti a sa propre définition de la justice.
    Comme vous le savez, c'est une question dont on débat depuis que Platon a écrit La République. Quelle est la définition de la justice? Quels sont ses aspects? Il en est de même en ce qui a trait à l'égalité. Il y a plusieurs définitions de l'égalité, non pas seulement une vision de celle-ci.
    Par le biais du Programme de contestation judiciaire, l'argent des contribuables a été versé au groupe féministe LEAF, le Legal Education and Action Fund, qui, dans sa définition de l'égalité, prône un droit constitutionnel à l'aide sociale, l'avortement, ainsi qu'un changement de la définition du mariage. C'est son droit. Nous avons la liberté d'expression, ainsi que la liberté de nous adresser aux tribunaux pour demander des changements, pour nous engager dans la politique. Tout ça est bien et beau. Par ailleurs, est-il juste que l'argent des contribuables soit utilisé pour promouvoir la vision d'égalité de seulement un groupe et que ce même programme rejette toutes les autres visions de l'égalité? Il y a plusieurs visions de la justice et de l'égalité.
    Dans une démocratie, on voit des débats, y inclus des débats devant les tribunaux entre des individus qui sont égaux entre eux. Mais lorsque l'État donne l'argent des contribuables pour aider seulement un groupe ou seulement quelques groupes qui partagent une seule vision de l'égalité, ce n'est pas juste. C'est pourquoi j'espère que le gouvernement va maintenir la décision qu'il a prise de ne plus verser l'argent des contribuables pour prôner et favoriser seulement une vision de l'égalité.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur McVety.
    Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de m'accorder la parole.
    Je suis le président du Canada Christian College. Nous sommes une institution, créée il y a 40 ans, qui forme des travailleurs pour les églises, à Toronto. Nous comptons environ 1 200 étudiants. Depuis 40 ans, plus de 4 500 diplômés sont sortis de notre établissement et travaillent pour la plupart dans les congrégations des quatre coins du pays.
    Environ 80 p. 100 de nos étudiants font partie des minorités visibles et 90 p. 100 font partie des minorités. Ces néo-Canadiens qui sont citoyens de notre grand pays ont été exclus du Programme de contestation judiciaire. Quel péché ont-ils commis pour ne pas pouvoir bénéficier de ce programme? Ce péché est qu'ils sont pour la famille et pour la religion, ce qui ne correspond tout simplement pas à l'idéologie du Programme de contestation judiciaire. Ce programme semble dire que tous les Canadiens sont égaux, mais certains sont plus égaux que d'autres. Certains méritent d'être financés tandis que d'autres ne le méritent pas. Il se trouve qu'on a décidé que nous étions moins égaux que les autres, et cela pour des raisons purement idéologiques.
    Le Programme de contestation judiciaire a été fondé pour clarifier le droit à l'égalité au Canada. Il n'a pas été fondé pour promouvoir des groupes d'intérêts particuliers. Néanmoins, selon l'étude, selon le rapport des administrateurs du Programme, le rapport qu'ils ont présenté en 2003, c'est pour promouvoir des droits égaux. Nous ne croyons pas que c'est le but du Programme de contestation judiciaire. Par conséquent, ce programme ne devrait pas être financé par un gouvernement qui est déterminé à assurer l'égalité.
    En tant que Canadiens et croyants, nous sommes bien entendu pour l'équité. Nous sommes pour l'égalité. Nous voulons un traitement équitable pour tous et non pas pour certains plus que pour d'autres. Nous ne voulons pas que certains cherchent à limiter des droits pendant que d'autres cherchent à promouvoir des droits. C'est exactement ce que dit le Programme de contestation judiciaire. De plus, il le fait dans un contexte de conflits d'intérêts.
    Pensez-y un peu. Le gouvernement paie des citoyens canadiens pour poursuivre le gouvernement. Nous sommes le seul pays au monde qui paie ses citoyens pour le poursuivre. C'est un énorme conflit d'intérêts et cela ne devrait donc pas être financé.
    Il y a un autre conflit d'intérêts dont on vous a déjà parlé plusieurs fois aujourd'hui. Le groupe consultatif est composé de personnes qui reçoivent un financement. Ces personnes, qui ont accès à des millions de dollars, sont celles qui conseillent au Programme de contestation judiciaire à qui donner l'argent, c'est-à-dire à des organismes comme l'Association nationale de la femme et du droit et le Fonds d'éducation et d'action juridiques qui ont accumulé plus de 140 causes à eux seuls; des organisations comme Égale et les autres dont vous avez entendu parler. Le Programme finance des contestations judiciaires afin que quelqu'un comme Robin Sharpe puisse faire valoir qu'il devrait obtenir le droit à l'égalité dans notre pays en tant que pornographe qui crée de la pornographie juvénile. N'est-il pas dégoûtant que notre gouvernement finance ce genre de contestation? Lorsque ceux d'entre nous qui sont pour la famille disons que nous ne voulons pas que ce droit soit accordé à Robin Sharpe, on déclare que nous cherchons à limiter des droits et que nous ne pouvons donc obtenir aucun financement pour intervenir au nom des Canadiens de toutes les régions du pays.
    Qui paie la facture? Pas vous, pas le Parlement, mais les contribuables canadiens. Ils paient les millions de dollars que ce programme coûte chaque année. Mais ce n'est que la pointe de l'iceberg. Une fois que l'on a injecté des millions de dollars dans le Programme, les contestations judiciaires commencent, un bon nombre d'entre elles sur des sujets futiles, après quoi le gouvernement doit payer des millions de dollars à des avocats pour défendre sa position contre les contestations qu'il finance.
(1645)
    En réalité, les gens comme moi, les membres du clergé, les enseignants, les parents et les enfants, n'ont pas des droits égaux vis-à-vis du Programme de contestation judiciaire. Par contre, ceux qui veulent s'attaquer aux droits des gens comme nous semblent être plus égaux que les autres. Le Programme de contestation judiciaire n'a rien à voir avec les droits, mais tout à voir avec la promotion d'une idéologie qui nous exclut en tant que parents.
    Nous croyons en l'équité. Nous croyons en l'égalité. Nous croyons dans les droits. Néanmoins, le Programme de contestation judiciaire ne croit pas dans nos droits. Nous demandons donc que le gouvernement du Canada annule le financement de ce programme.
    Merci beaucoup.
(1650)
    Merci.
    Monsieur Rushfeldt.
    Merci, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité, de me permettre de présenter officiellement les préoccupations et les idées de la Coalition de l'action pour la famille au Canada au sujet du financement d'un programme comme le Programme de contestation judiciaire.
    Permettez-moi de dire tout d'abord que nous sommes d'accord avec la décision du gouvernement d'interrompre ce programme. Nous lui demandons de ne pas le rétablir et je vais vous expliquer pourquoi.
    Notre opposition à l'utilisation des deniers publics pour financer un programme comme le PCJ se fonde sur trois principes. Premièrement, le principe même de l'article 15 de notre Charte, égalité devant la loi, exigerait que tout citoyen du Canada se voie attribuer un financement s'il s'estimait défavorisé. L'existence d'un programme qui fournit une aide financière de l'État, en fait l'argent des contribuables, à une organisation sans but lucratif pour que cette dernière puisse choisir qui elle financera viole ce principe d'égalité même. Le fait de financer seulement certaines personnes ou certains groupes crée une inégalité d'accès à la loi. L'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés dit ceci : la loi ne fait exception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination.
    Le site Web du PCJ indique qu'un de ses objectifs consiste à aider les groupes défavorisés à préparer des causes et à intenter des actions contre le gouvernement lorsque, de l'avis d'une personne, il semble y avoir violation de quelque droit. On proclame que l'égalité constitue une de ses raisons d'être fondamentales, mais le fonctionnement du Programme ne réalise pas l'égalité, selon moi.
    Certains experts ont déclaré que les actions judiciaires sont un dialogue entre les tribunaux et le public. Néanmoins, lorsque certains groupes sont financés, le dialogue n'a pas vraiment lieu entre les tribunaux et le public, mais entre certaines personnes et les tribunaux.
    L'utilisation des deniers publics pour avantager des personnes choisies constitue, selon moi, une violation de la Charte. C'est aussi une façon inappropriée de résoudre ce que l'on considère comme des inégalités inhérentes à la Constitution. Nous avons vu un certain nombre de cas où les deniers publics ont été dépensés pour diverses raisons que la vérificatrice générale elle-même a contestées.
    Deuxièmement, nous nous inquiétons de la façon dont la société résout les inégalités réelles ou apparentes inhérentes à la Constitution. Je pense que, si votre comité examinait les contestations qui ont été financées avec l'argent des contribuables, il constaterait que, dans la plupart des cas, les questions en litige auraient dû être résolues dans le cadre d'un dialogue entre le Parlement élu et le public, et non pas par un tribunal imposant son opinion unilatérale.
    Nous demandons que l'on cesse de tout vouloir régler devant les tribunaux avec l'argent des contribuables au lieu de laisser le Parlement remplir sa fonction démocratique. Je vous demande de penser aux dispositions constitutionnelles strictes qui régissent la modification de notre Constitution. Pourquoi sont-elles si strictes? C'est pour empêcher quelques personnes, élues ou non élues, de modifier la loi au gré de la fantaisie d'une personne ou d'un groupe quelconque. Le mode de révision de notre Constitution prévoit que le consentement d'un grand nombre de citoyens — une majorité des citoyens d'un grand nombre de provinces, en fait — est nécessaire pour effectuer de telles modifications. Néanmoins, nous utilisons l'argent des contribuables pour encourager les démarches de quelques-uns et leur permettre, dans certains cas, de se présenter devant un juge en vue de faire modifier notre Constitution.
    Troisièmement, si jamais ce programme ou un autre semblable devait être rétabli, je voudrais savoir quelle politique et quelles protections seront en place pour décider qui est compétent pour déterminer qui est la partie défavorisée. Je ne vois le nom d'aucune grande autorité dans la liste qui figure sur le site du PCJ. Est-ce que l'un de ses responsables ou tous possèdent des compétences particulières pour déterminer qui est cette « personne ou ce groupe défavorisé »? Il est question du comité consultatif des droits à l'égalité; je vois ici encore une liste de personnes de secteurs très limités de la société. Ces personnes possèdent-elles les compétences voulues pour décider quels groupes recevront l'argent des contribuables?
    Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, le fait de financer une partie à une contestation, mais pas une autre, crée une inégalité. Je peux nommer un grand nombre de personnes que j'estime défavorisées: les personnes âgées, les personnes handicapées, les enfants, les groupes religieux, les gauchers comme moi qui n'arrivent pas à trouver une paire de ciseaux pour gauchers, les propriétaires de Ford, voire les non-citoyens qui sont ici illégalement. Est-ce que toutes ces personnes recevraient un financement pour leurs contestations? Qui décide que vous êtes désavantagé ou non?
    Le gouvernement a eu raison de décider de cesser de financer la création d'inégalités dans le cadre de ce programme. Personne n'a un droit ou une garantie établie par la Charte à l'égard de l'argent des contribuables. Il faut que les gens cessent de s'imaginer qu'ils ont droit à l'argent des contribuables.
(1655)
    La Coalition de l'action pour la famille au Canada demande respectueusement au comité de recommander dans son rapport de ne plus financer les programmes qui créent des inégalités.
    Merci.
    Merci.
    Pour la première question, madame Keeper.
    Je crois que nous n'avons que cinq minutes. Ma première question s'adressera à tous les témoins.
    Je vous remercie pour vos exposés. C'était intéressant.
    Je voudrais que vous me répondiez par oui ou non. Croyez-vous en la Charte canadienne des droits et libertés?
    Bien entendu, cela dépend de la façon dont elle est interprétée et si un seul point de vue est défendu...
    Donc, cela dépend. Pourriez-vous répondre brièvement, s'il vous plaît?
    On ne peut pas répondre à cette question. Est-ce que vous battez encore votre mari? C'est le même genre de question.
    Donc cela dépend. C'est votre réponse?
    Cela dépend de la façon dont elle est interprétée, en effet. À cause du Programme de contestation judiciaire, il y a eu un grand nombre de mauvaises interprétations.
    Je ne parle pas du Programme de contestation judiciaire; je parle de la Charte canadienne des droits et libertés. Y croyez-vous?
    Cela dépend de la façon dont elle est interprétée. C'est ma seule réponse. Je ne peux pas dire qu'elle est parfaite, car tout dépend de la façon dont on interprète son libellé très vague.
    Merci.
    Monsieur Carpay.
    Nous savons tous que la Charte a force de loi. Je ne pense pas que c'est une chose dans laquelle vous pouvez croire ou ne pas croire; nous avons la Charte et c'est une réalité.
    Merci. Désolée, mais nous n'avons que cinq minutes.
    Je crois absolument en la Charte des droits et libertés. C'est un merveilleux document, mais c'est un document vivant et tout dépend de la façon dont vous l'interprétez d'un jour à l'autre. En tant que membre du clergé, je trouve très inquiétant que la question de la liberté de religion ait été interprétée comme la liberté vis-à-vis de la religion plutôt que la liberté de culte, et c'est une des interprétations auxquelles je m'objecte.
    Merci, monsieur McVety.
    Monsieur Rushfeldt.
    Je suis d'accord pour dire que nous avons besoin de la Charte des droits et libertés et j'y souscris presque entièrement. Je crois qu'elle contient certaines lacunes, comme nous pouvons le voir lorsque diverses questions sont soumises aux tribunaux et reviennent parfois devant le Parlement. Je ne sais pas si nous aurons un jour une charte parfaite, mais nous avons certainement besoin d'une charte.
    Merci beaucoup.
    Ma deuxième question est la suivante — et une fois de plus, je le regrette, mais il faudrait peut-être répondre brièvement — croyez-vous dans le concept d'un Programme de contestation judiciaire?
    Absolument pas. Ce n'est pas juste. Cela ne peut pas être juste.
    Vous croyez donc qu'il n'est pas possible que ce soit juste.
    Ce n'est pas possible.
    Même si vous avez demandé à bénéficier du Programme de contestation judiciaire, vous ne croyez pas dans ce concept?
    Non. Ce n'est pas un bon concept, car vous ne pouvez pas appuyer un seul point de vue, qu'il s'agisse d'une question constitutionnelle ou d'une valeur morale. Ce concept n'est pas du tout valide et il est nécessairement discriminatoire.
    Dans ce cas, pourquoi avez-vous demandé à bénéficier du Programme?
    Parce que nous voulions être sur un pied d'égalité avec le FEAJ, qui obtient tout l'argent, ou avec les groupes homosexuels. Nous voulions nous faire entendre. Sinon, comment allons-nous...
    Vous avez donc estimé que ce programme vous permettrait de vous faire entendre?
    Non. Nous nous sommes dit que si le Programme finançait l'autre partie il devait nous financer aussi. Nous n'avons pas pensé que c'était équitable, mais en faisant une demande, nous avons voulu montrer qu'il s'agissait d'un organisme discriminatoire. Les documents et toutes les lettres que nous avons reçues et dont certaines sont incluses dans notre mémoire montrent bien qu'il s'agissait d'un organisme discriminatoire. Nous en avons obtenu la preuve en lui adressant notre demande.
(1700)
    Merci.
    Ce programme devrait-il exister? Est-ce la...?
    Croyez-vous dans le concept du Programme de contestation judiciaire?
    Non. Comme je l'ai dit, il y a de nombreuses façons de concevoir l'égalité et le gouvernement ne doit pas distribuer l'argent de nos impôts de façon à promouvoir certaines de ces conceptions, mais pas les autres.
    J'ajouterais, car c'est tout à fait pertinent, que la contestation du chef Mountain a abouti en l'absence de financement, parce qu'elle était appuyée par les contributions volontaires des Canadiens qui croyaient dans sa cause et c'est ainsi que cela devrait se passer. Le chef Mountain est plus désavantagé que tous ces autres groupes qui ont reçu un financement du PCJ. C'est un charpentier qui n'a pas d'argent, mais sa cause a abouti parce que les Canadiens ont apporté leur contribution volontaire.
    Merci.
    Je n'y crois pas. Il est insensé que le gouvernement paie des gens pour le poursuivre.
    Merci.
    Je ne suis pas d'accord non plus avec le principe, car nous ne croyons pas qu'il faudrait utiliser l'argent des contribuables pour inciter les gens à aller devant les tribunaux pour résoudre des questions alors que nous avons pour cela un Parlement démocratique.
    Pourrais-je poser une dernière question?
    Vous pouvez poser une brève question.
    Je vais peut-être l'adresser à Mme Landolt.
    Nous avons entendu parler aujourd'hui de l'égalité véritable, de même que de l'application restrictive des droits. Croyez-vous que le travail que vous avez accompli entre dans la catégorie de l'application restrictive des droits?
    Que me demandez-vous?
    Croyez-vous que votre action entre dans la catégorie de l'application restrictive des droits prévus par la Charte?
    Non, absolument pas. Nous avons un large rayon d'action et nous sommes très inclusives. Ce sont les féministes radicales et les homosexuels qui sont très exclusifs. Nous avons été à l'opposé. Nous voulons élargir les droits des familles. Nous voulons élargir les droits des enfants. Nous voulons l'élargissement des droits.
    Et vous croyez aussi que...
    C'est votre dernière question.
    C'est la dernière.
    Vous croyez aussi que la loi devrait rester entre les mains des parlementaires, mais vous avez pourtant demandé le démantèlement de Condition féminine Canada. Pourriez-vous nous expliquer cela?
    Oui, parce que cet organisme ne finance qu'une idéologie qui, de toute évidence, n'est pas représentative des femmes, car un grand nombre de femmes ne souffrent d'aucune discrimination. Certaines en souffrent. Cet organisme finance toutefois une idéologie et devrait être démantelé parce que c'est totalement et absolument injuste et discriminatoire.
    Très bien. Merci.
    Monsieur Kotto.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    La perspective de la violation des droits fondamentaux des minorités par la majorité ne fait pas partie de la vision démocratique québécoise. Nous sommes ici dans une zone de rupture de valeurs. Aussi, monsieur le président, vous nous permettrez de nous en tenir aux déclarations des témoins qui, en soi, sont assez éloquentes. Nous passons notre tour. Merci.

[Traduction]

    Monsieur Angus.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d'être venus aujourd'hui. Comme je l'ai dit à la personne qui a témoigné avant vous, nous avons eu des audiences intéressantes ces derniers jours, car nous commençons à parler de différentes conceptions des droits.
    Votre groupe a fait valoir deux principaux arguments. Le premier, celui de Mme Landolt, est que le Programme est idéologique et corrompu et qu'il défend les intérêts des homosexuels — ce qui est son point de vue, mais je ne suis pas intéressé...
    Et des féministes.
    Et des féministes, désolé. J'ai oublié les féministes.
    Je suis plus intéressé à faire suite à ce qu'ont dit ces messieurs — je ne voudrais pas passer pour un anti-féministe — car ils ont parlé davantage de la question des droits et de la façon de les promouvoir dans une société démocratique. Je voudrais parler un peu du processus et vous poser une question à ce sujet, car je pense que c'est une question très intéressante.
    Monsieur Carpay, vous avez dit que l'égalité entre les divers groupes ne peut être atteinte qu'aux dépens de la véritable égalité devant la loi. J'ai étudié les mémoires en détail avant la réunion, car j'ai beaucoup réfléchi à cette question.
    Dans ma région il y a une population francophone très importante. Les droits linguistiques des Francophones, leur droit d'aller à l'école dans leur langue, les droits des minorités sont maintenant garantis par les tribunaux, mais ces droits n'avaient jamais été inscrits dans la loi... Je veux dire que la communauté francophone a dû aller constamment devant les tribunaux. Elle a toujours dû s'adresser aux tribunaux. J'ai souvent entendu l'argument voulant que ces droits soient accordés aux dépens des droits des autres. Sans vouloir insulter qui que ce soit, ce sont là des discours anti-francophones. Les personnes qui les tiennent sont prêtes à reconnaître le droit des Francophones de parler français à la maison, mais elles ne veulent certainement pas qu'ils obtiennent des droits devant les tribunaux, dans les écoles ou ailleurs. Ce sont donc des droits pour lesquels il a fallu se battre.
    Pour ce qui est d'accorder à un groupe des droits que d'autres groupes n'ont pas... J'ai siégé à un conseil scolaire catholique et, en Ontario, nous nous sommes battus pour le droit de préserver nos conseils scolaires catholiques. Ce droit était garanti aux minorités et rien n'autorisait le Parlement — dans ce cas, Queen's Park — à nous l'enlever. Il s'agissait là d'un droit historique et garanti. Nous nous sommes battus à de nombreuses reprises devant les tribunaux pour le préserver, car c'est une notion que nous avons acceptée.
    La semaine dernière, un représentant d'une organisation de malentendants s'est présenté devant nous. On a reproché à ce programme d'être inutile et de nuire à d'autres droits, mais si nous suivons cette logique... Monsieur Rushfeldt, vous avez demandé pourquoi nous ne finançons pas les gens qui ont besoin de ciseaux pour gauchers ou qui conduisent une Ford. L'homme en question se battait pour obtenir des droits fondamentaux en tant que sourd et il devait s'adresser pour cela aux tribunaux, car sinon on refusait de lui reconnaître ses droits. Je serais donc curieux de savoir en quoi cette personne est favorisée par rapport aux autres.
    La question à se poser ici porte sur l'existence d'un programme qui accorde une aide gouvernementale à certains demandeurs. J'ai moi-même une enfant sourde. Nous avons dû nous battre pour obtenir une aide financière pour que notre enfant sourde ait accès à l'éducation. Je me souviens du jour où son enseignant a dit qu'il ne voulait pas d'elle parce que cela interrompait son enseignement. Il a demandé à ma fille pourquoi elle ne pensait pas aux autres. Que fait-on des 26 enfants qui ne sont pas sourds? A-t-elle jamais pensé à eux? Je me souviens d'avoir pensé à l'époque que sa conception des droits... Bien entendu, c'était une élève qui posait des problèmes parce que l'enseignant ne voulait pas s'adapter à ses besoins. Si une enfant sourde de 14 ans doit répondre aux besoins d'un enseignant payé 60 000 $ par année, comment pourra-t-elle jamais se trouver sur un pied d'égalité avec les autres élèves?
    La question des contestations judiciaires, dont nous discutons, nous ramène à la question des droits individuels, car tous les droits individuels ne sont pas égaux étant donné que certaines personnes n'y ont pas accès.
    Les opinions que vous émettez ne sont certainement pas celles que je partage ou que le Nouveau Parti démocratique appuie. Je suis certain que vous le saviez déjà. Je ne sais pas si mes collègues seront d'accord, mais c'est certainement un point de vue que le Parti conservateur semble soutenir, la notion des droits individuels par opposition aux droits collectifs.
    Après ce long préambule, ma question est donc bien simple. Pensez-vous avoir beaucoup plus de chances de vous faire entendre du gouvernement de Stephen Harper, qui est un ancien dirigeant de la National Citizens' Coalition, que par un parti comme le nôtre, le Bloc québécois ou les libéraux?
(1705)
    Premièrement, je n'apprécie pas ces propos arrogants selon lesquels les néo-démocrates, les libéraux ou vous-même, par opposition à nous, avez le monopole de la compréhension des droits de la personne...
    Je n'étais pas arrogant. J'ai dit que je...
    ... et que nous sommes les seuls à ne pas s'en soucier.
    J'ai dit que je n'étais pas d'accord.
    Laissez-le répondre.
    J'ai dit que je n'étais pas d'accord, ce qui ne vous dérange probablement pas. Je vous demande si vous vous sentez plus à l'aise avec le point de vue conservateur.
    Non. Nous sommes pour les droits de la personne et ce que nous réclamons, c'est l'égalité, car certains sont plus égaux que d'autres. Nous n'avons rien contre les tribunaux. Nous n'avons rien contre l'existence d'un processus. Voilà pourquoi nous avons un processus politique pour défendre les droits des gens. Mais cela doit s'appliquer de façon égalitaire et le Programme de contestation judiciaire n'est pas égalitaire.
    Il est ironique qu'une mesure qui est censée permettre aux gens de se battre pour défendre leurs droits soit aussi fondamentalement discriminatoire, et c'est pourquoi nous sommes contre.
    Vous avez notamment mentionné les droits individuels. Parlons-nous des droits collectifs? Si nous parlons des droits individuels, je suis convaincu qu'il doit exister une bien meilleure façon de résoudre les problèmes à ce niveau-là qu'au moyen d'un programme de contestation judiciaire financé par l'argent des contribuables et administré par un groupe particulier.
    Je ne connais pas la solution idéale, mais vu la façon dont le Programme de contestation judiciaire a fonctionné depuis sa création, je dirais que ce n'est pas la bonne façon de résoudre les problèmes comme celui de votre fille qui veut qu'on l'accepte comme élève. Ce genre de cause devrait-il obtenir l'appui d'un programme de contestation judiciaire financé par les contribuables? Je ne le crois pas. Je crois qu'il doit y avoir une meilleure façon de procéder et je ne pense pas que nous devrions avoir ce genre d'organisme, peu importe s'il est sans lien de dépendance ou sans aucun lien, qui se sert de l'argent des contribuables pour porter ce genre de causes devant les tribunaux.
(1710)
    En ce qui concerne votre question quant à savoir si nous nous sentons plus à l'aise ou avons de meilleures chances de nous faire entendre... je ne comprends pas votre question, mais comme vous semblez nous demander pour qui nous votons aux élections fédérales, ce qui est vraiment...
    Non. Je pense devoir être plus précis. D'après ce que disent mes collègues conservateurs, lorsqu'on permet à des personnes que l'on considère désavantagées d'avoir accès à certains droits, c'est aux dépens de la majorité. On peut dire, je pense, que c'est un point de vue que le Nouveau Parti démocratique ne partage pas. Et de façon générale, les propos que j'ai entendus...
    Nous devons accélérer.
    Je vous demande si vous pensez que ce point de vue, qui n'a pas eu beaucoup d'appuis sur la scène politique, comme le dira sans doute Mme Landolt, a de meilleures chances de se faire entendre du gouvernement actuel. Je ne vous demande pas comment vous votez. Je vous demande si vous pensez qu'il s'agit d'un gouvernement qui est sensible à votre opinion. Cela me paraît assez simple.
    Je suis ici aujourd'hui. J'ai été invité à dire si le Programme de protestation judiciaire devrait ou non être financé et j'ai indiqué les raisons pour lesquelles il ne devrait pas l'être. Je pense que votre question ne correspond pas aux raisons pour lesquelles j'ai été invité ici aujourd'hui.
    Pour ce qui est de certains exemples que vous avez cités au sujet des droits de la minorité francophone, etc., le chef Mountain, de Colombie-Britannique, est une personne désavantagée à qui le Programme de contestation judiciaire a refusé d'accorder une aide financière sous prétexte qu'il ne cadrait pas dans sa conception de l'égalité. Le fait est qu'il y a des conceptions différentes de l'égalité. Il y a des conceptions différentes de la meilleure façon de reconnaître les droits des minorités. Je pense qu'il vaut beaucoup mieux le faire sans avoir recours aux tribunaux, mais même si l'on a recours aux tribunaux, il y a différents points de vue quant à la façon dont ces derniers devraient se prononcer sur les droits des minorités. Même un grand nombre des décisions de la Cour suprême du Canada ne sont pas unanimes. Elles sont rendues par cinq voix contre quatre, six contre trois, huit contre une, ou peu importe. Il y a donc des opinions divergentes.
    Ce n'est pas ce que vous avez déclaré dans votre exposé.
    Vos questions doivent s'arrêter là, monsieur Angus. Vous avez eu beaucoup de temps.
    Madame Boucher.
    Je vous en suis très reconnaissant.
    Allez-y.

[Français]

    Bonjour. Merci d'être ici aujourd'hui.
    Nous sommes un comité et nous essayons de trouver des avenues de solution. J'ai lu votre mémoire sur le Programme de contestation judiciaire. Vous nous dites que vous l'avez considéré comme discriminatoire pour x raisons qui sont écrites dans votre document.
    Monsieur Carpay, quelles avenues de solution pourriez-vous donner à notre comité en vue d'uniformiser le principe de l'égalité? Quelle serait pour nous la meilleure façon de procéder?
     Tout le monde sait que les contestations judiciaires ont été mises de côté, mais si un jour un gouvernement ou l'autre voulait mettre en place un certain système, comment devrait-il s'y prendre pour uniformiser l'aspect égalitaire, afin que tous ceux qui sont en situation de conflit aient des chances égales?
    Ce serait très difficile. Un des principaux problèmes du Programme de contestation judiciaire est qu'il donne de l'argent pour défendre un seul point de vue, une seule perspective. Cependant, très souvent, il n'y a pas qu'un ou deux points de vue, mais plusieurs, surtout lorsqu'il s'agit d'un litige concernant l'éducation, la définition du mariage ou le système de santé. Dans le domaine de la santé, je peux donner l'exemple de la décision Chaouli, qui était assez compliquée.
    Selon moi, il est impossible de créer un programme gouvernemental qui accorderait des fonds de façon équitable afin de défendre plusieurs points de vue. De plus, dans chaque cas, on devrait décider si on donne ou non l'argent des contribuables pour défendre deux, trois ou quatre points de vue différents et à combien de personnes.
    C'est impossible. La décision du gouvernement de couper les fonds de ce programme s'est avérée la meilleure solution, car il était intrinsèquement injuste.
(1715)

[Traduction]

    Monsieur Fast.
    Merci, monsieur le président.
    Pour faire suite à ce qu'a dit M. Angus, il a déclaré que ce qui le distingue peut-être des membres du Parti conservateur, c'est que le Parti conservateur ne croit pas qu'il faut accorder quelque chose aux désavantagés si nous n'en faisons pas autant pour la majorité. C'est à peu près ce qu'il a dit. Ce n'est pas l'argument que j'ai entendu aujourd'hui ou ailleurs au sujet du Programme de contestation judiciaire. Ce qu'on demande, si j'ai bien compris, c'est que si nous donnons accès aux tribunaux à ceux qui sont défavorisés, il faut que tous les défavorisés y aient accès également.
    Un collègue vient de demander à M. Carpay s'il existe un moyen d'améliorer les choses. Permettez-moi de poser à chacun de vous la question suivante. Pensez-vous qu'il ne faut pas permettre aux défavorisés d'avoir accès aux tribunaux? Si c'est le cas, verriez-vous d'autres moyens, que ce soit par l'entremise d'un programme de contestation judiciaire ou autre, pour que les défavorisés puissent se faire entendre et aient accès aux tribunaux?
    Je dirais la même chose que ce que nous avons dû... Nous avons dû puiser dans nos propres poches. Comme nous avions le soutien d'autres personnes un peu partout au Canada, nous avons dû payer de notre poche. Si vous avez l'appui de vos concitoyens, qu'est-ce qui vous empêche d'aller devant les tribunaux? M. Carpay a dit la même chose à propos de la question autochtone. Le financement a été apporté par les citoyens concernés.
    Pourquoi accorder l'aide de l'État à une cause qui ne bénéficie pas de l'appui du public? Si vous avez le soutien du public, vous pouvez aller devant les tribunaux, comme nous l'avons fait plus de 12 fois, simplement parce que nous avons demandé l'argent nécessaire à nos membres. Nous sommes allés devant les tribunaux, à grands frais, mais nous l'avons fait. Pourquoi les autres groupes ne peuvent-ils pas en faire autant?
    Monsieur Angus, pourquoi les sourds ne peuvent-ils pas le faire? Pourquoi n'ont-ils pas accès...? Les parents d'enfants autistes sont allés devant les tribunaux. Pourquoi faut-il que les contribuables donnent leur argent?
    Monsieur Carpay, monsieur McVety et monsieur Rushfeldt, si vous pouviez répondre rapidement...
    Pour répondre très brièvement, je crois que les Canadiens ont suffisamment de sagesse et de compassion pour vouloir financer des causes utiles. Les Canadiens savent où est la justice. Le Programme de contestation judiciaire est, ou était, une insulte, la marque d'un manque de confiance dans la sagesse et la compassion des Canadiens qui sont prêts à donner pour défendre une juste cause.
    Une collègue de ma grand-mère, Nellie McClung, s'est battue pour l'égalité au Canada dans l'affaire « personne », pour que les femmes obtiennent le droit de vote, pour qu'elles soient reconnues comme des personnes et elle l'a fait sans programme de contestation judiciaire. Elle l'a fait sans aller devant la Cour suprême. Elle l'a fait en marchant dans les rues et en demandant l'égalité aux parlementaires réunis dans cet édifice. C'est la raison d'être du Parlement. Si nous exerçons ce droit, nous obtiendrons l'égalité au lieu de cette égalité sélective qu'un conseil incestueux décide d'accorder à ses propres collègues en finançant des projets qui leur sont chers.
    Je dirais que personne n'est actuellement exclu de l'accès aux tribunaux. Comme l'ont dit les autres témoins, il est possible de lever des fonds. Je ne crois donc pas que l'argent des contribuables soit la solution. Selon moi, il n'est interdit à personne d'aller devant les tribunaux pour quelque raison que ce soit.
    Il faudrait au moins discuter de la possibilité de cesser de recourir aux tribunaux pour résoudre les questions pour lesquelles nous vous avons élus.
(1720)
    Merci.
    Monsieur Bélanger.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Lorsque le gouvernement a présenté une motion pour élargir la liste des témoins, je l'ai appuyée. Je crois qu'il vaut la peine d'écouter les gens qui ont des points de vue différents. Pour cette raison, et compte tenu de propos similaires que j'ai entendus aujourd'hui et mercredi dernier, je vous ai dit, monsieur le président, qu'il serait très important que nous entendions également les représentants du Programme de contestation judiciaire.
    Comme on a dit bien des choses ici aujourd'hui, posé de nombreuses questions et fait certains sous-entendus, je voudrais les entendre. Je signale qu'il y a une motion à cet effet de façon à ce que les gens le sachent. Si nous en tenons compte, comme nous l'avons fait aujourd'hui, nous devrions également entendre ces personnes.

[Français]

    Je vais parler de la question des droits linguistiques. M. Angus l'a soulevée plus tôt, mais je n'ai pas eu de commentaires des panélistes.
    Je fais partie d'une minorité linguistique au pays: je suis un francophone vivant en Ontario. Cela n'a rien à voir avec le gouvernement du Canada et avec le fait que je suis un parlementaire. La Constitution reconnaît les droits linguistiques, le droit à l'éducation dans la langue maternelle partout au pays, là où le nombre le justifie, quoiqu'il soit parfois arrivé que ce droit n'existe même pas là où le nombre le justifiait, si l'on se réfère à l'article 133 de la Loi constitutionnelle.
    Votre raisonnement sur l'égalité s'applique-t-il également aux droits linguistiques des minorités de langue officielle du pays?
    Oui. Ceux et celles qui veulent porter une cause devant les tribunaux peuvent demander à d'autres personnes de les appuyer de façon bénévole. Je fais confiance aux Canadiens: ils donneront de leur temps bénévolement pour défendre une cause qu'ils estiment juste.
    Je comprends votre point de vue, car je fais aussi partie d'une minorité linguistique: je suis né aux Pays-Bas, et ma langue maternelle est le néerlandais. Je dois lutter beaucoup plus que les francophones pour enseigner le néerlandais à mon fils. Je suis responsable...
    Avec tout le respect que je vous dois, le néerlandais n'est pas une des deux langues officielles du pays.
    Voilà la discrimination!
    Vous êtes libre d'appeler cela de la discrimination, mais je vous avoue qu'on ne sera peut-être pas d'accord.
    Puis-je avoir une réponse des autres panélistes? Appliquez-vous votre approche de l'égalité aux droits linguistiques également?

[Traduction]

    Je ne vois pas pourquoi les gens ne peuvent pas trouver eux-mêmes de l'argent pour défendre les droits linguistiques. Je suis tout à fait pour le bilinguisme, mais je ne vois pas pourquoi le gouvernement verse de l'argent à cet effet alors que les gens peuvent lever des fonds eux-mêmes. Pourquoi le gouvernement s'occupe-t-il des actions en justice? Ce n'est pas normal. Que ce soit pour les droits linguistiques ou le droit à l'égalité, il y a de meilleures façons d'utiliser l'argent des contribuables.
    J'ai un collègue qui est originaire de Corée. Devrait-il avoir les mêmes droits linguistiques dans notre pays? C'est là où nous voyons que tout le monde est égal, mais que certains sont plus égaux que d'autres.
    Lorsque nous avons un programme de contestation judiciaire comme celui-ci qui prend des décisions arbitraires ou qui octroie un financement... Les Coréens n'obtiennent pas de financement pour obtenir des droits égaux sur le plan linguistique au Canada. Nous avons une organisation qui ne traite pas les Canadiens sur un pied d'égalité et nous devrions donc permettre à tous les Canadiens de faire valoir leurs droits linguistiques particuliers.
(1725)
    Ma réponse est en fait une question. Vous parlez des droits linguistiques, du fait que vos droits linguistiques ne sont pas reconnus en Ontario. Si c'est le cas, est-ce le gouvernement du Canada qui refuse de reconnaître vos droits ou ne faudrait-il pas intenter une action en justice contre ceux qui refusent de reconnaître ces droits?
    À mon avis, les droits linguistiques ne sont pas différents des autres droits. Si nous défendons les droits individuels, nous devons couvrir tous les droits. Mais je ne suis pas certain que nous ayons un programme qui vous permettrait d'obtenir vos droits linguistiques en Ontario, au niveau fédéral. Je ne suis pas certain que cela relève du gouvernement fédéral.
    C'est ce qui s'appelle l'article 23 de la Charte des droits et libertés, monsieur.
    Je le comprends, mais je ne pense pas que ce soit nécessairement le gouvernement du Canada, et certainement pas les contribuables canadiens qui refusent de reconnaître vos droits.
    D'accord. Me reste-t-il un peu de temps? Une brève question?
    Oui, elle doit être brève.
    En ce qui concerne l'intervention des tribunaux, ou peut-être le fait que les tribunaux ont trop de pouvoirs, pourriez-vous nous dire ce que vous pensez de l'idée que les tribunaux de notre pays font ce que le Parlement leur a demandé de faire lorsqu'il a adopté la Charte des droits et libertés, au début des années 80, en s'attendant à ce que les tribunaux, jusqu'à la Cour suprême, l'interprètent et puissent avoir le dernier mot à l'égard de la disposition dérogatoire de la Charte.
    J'ai entendu dire que les tribunaux usurpaient les pouvoirs du Parlement. En tant que législateur, je ne me sens pas menacé par les tribunaux, sachant que si ces derniers faisaient quelque chose que je jugerais inacceptable en tant que législateur, j'aurais la possibilité d'invoquer la disposition dérogatoire. Avez-vous une opinion au sujet de cette conception des tribunaux par opposition aux assemblées législatives?
    Oui. Ce qui s'est passé, depuis l'adoption de la Charte, en fait depuis l'adoption de l'article sur l'égalité en 1985 et de la Charte en 1982, c'est que les tribunaux se sont arrogés de plus en plus de pouvoirs et ont élargi leur champ de compétence. Ce n'est pas ainsi que les choses devaient se passer et les tribunaux usurpent le rôle du Parlement.
    C'est le Parlement qui devait représenter et défendre les opinions des citoyens. Vous avez neuf juges de la Cour suprême du Canada qui sont... Je pourrais vous parler de l'affaire Schachter, par exemple. Je pourrais vous citer toute une série de causes montrant que la Cour suprême s'est arrogé un champ de compétence beaucoup plus vaste que le libellé de la Charte ne le prévoit.
    J'estime que notre démocratie est menacée, que toutes ces questions très importantes sont tranchées en fonction — j'ai peur de le dire, mais je vais le dire — de l'idéologie de neuf personnes qui ont été nommées alors que c'est le Parlement qui devrait se prononcer. Le Parlement a été constitué pour parler au nom des gens. Il a accès à des recherches, comme je l'ai déjà dit. Il a accès à tous les faits sociaux, ce qui n'est pas le cas de la Cour suprême. Également, le Parlement peut faire...
    Une courte réponse, s'il vous plaît.
    ... des compromis, contrairement à un tribunal. Ce dernier ne peut se prononcer que pour ou contre.
    J'estime donc qu'il y a eu une usurpation de pouvoir. Les causes qui ont été jugées depuis 1985, depuis l'entrée en vigueur de l'article sur l'égalité, ont conféré graduellement de plus en plus de pouvoir aux tribunaux du fait de leurs propres décisions et en élargissant leur champ de compétence, ce qui n'avait jamais été prévu lorsque la Charte a été adoptée en 1982.
    Tout le monde est d'accord, je pense, pour dire que les tribunaux peuvent interpréter la loi et qu'ils doivent être respectés. Néanmoins, nous ne sommes pas d'accord pour que les tribunaux écrivent les lois. Ce n'est pas leur rôle. Ils sont là pour les interpréter. Malheureusement, dans certains cas, les tribunaux ont outrepassé leur mandat.
    Pour répondre à la question de savoir si les tribunaux font ce que le Parlement leur a demandé de faire, je dirais que oui, en général, mais que, comme les tribunaux sont devenus très puissants, et cela beaucoup plus qu'avant 1982, le Programme de contestation judiciaire a causé des distorsions dans le processus judiciaire à cause de son financement sélectif.
    Je suis assez d'accord. Je pense que les distorsions du processus... peut-être qu'il faudrait un dialogue entre les législateurs et les tribunaux pour établir à qui il revient vraiment de prendre les décisions et comment les divergences d'opinions doivent être réglées.
(1730)
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Je dois vous remercier infiniment d'être venus aujourd'hui et d'avoir répondu à nos questions comme vous l'avez fait.
    Nous allons faire une courte pause, après quoi nous étudierons certaines motions.

(1735)
    Nous reprenons la séance, si vous le voulez bien. Nous allons passer aux travaux du comité.
    Nous sommes saisis de quatre avis de motion de Maka Kotto.
    Nous devrons peut-être les examiner mercredi...
    Je pense que nous allons les examiner mercredi.
    ... à moins que l'on soit prêt à le faire aujourd'hui.
    Je ne sais pas si nous en aurons le temps.
    Pour commencer, comment voulez-vous procéder pour ces motions?

[Français]

    J'aimerais si possible accorder la priorité à la troisième et à la première, dans un premier temps, et couvrir le reste par la suite.

[Traduction]

    Nous allons donc commencer par la motion suivante :
Attendu qu'il devrait être possible de développer la production cinématographique sur tout le territoire;
Attendu qu'au Québec tous les centres de décisions relatifs à l'industrie télévisuelle sont à Montréal;
Attendu qu'au Québec seulement 3 p. 100 des productions télévisuelles sont faites à l'extérieur de Montréal;
Attendu qu'il y a carence en matière de développement des régions;
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent du patrimoine canadien recommande au gouvernement de prendre de toute urgence des mesures adéquates dans les régions, tant québécoises que canadiennes, et de veiller à ce qu'un crédit d'impôt bonifié soit accordé pour la production cinématographique à l'extérieur des grands centres. Et que rapport soit fait à la Chambre par la présidence.
    Telle est la motion dont nous sommes saisis.
    Monsieur Kotto, voulez-vous parler de la motion en premier, ou monsieur Bélanger?
    Monsieur Bélanger.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je suppose qu'on parle dans la motion de production télévisuelle ou cinématographique francophone, mais ce n'est pas précisé.
    Il s'agit de la production dans son ensemble. Ce n'est pas précisé, en effet.
    Si c'est le cas, la motion n'est pas exacte.
    On dit : « Attendu qu’il devrait être possible de développer la production cinématographique sur tout le territoire; ». On parle de la production au Québec. Ce n'est pas nécessaire de préciser si c'est en anglais ou en français.
    Ce que j'essaie de souligner ici, c'est que la même critique peut être soulevée à l'égard des deux autres grands centres urbains du Canada, soit Toronto et Vancouver. Le même phénomène existe. Hors de Montréal, Vancouver ou Toronto, point de salut. Halifax est une exception. J'avais cru comprendre qu'on parlait de la production télévisuelle francophone, ici. Autrement, il faudrait retravailler la motion.
    Je n'ai pas d'objection fondamentale envers la motion qui est présentée, monsieur le président. Il faut simplement comprendre exactement de quoi il s'agit.
    Ici, on prend en considération le fait que les centres de décision sont à Montréal. En effet, ce sont les projets développés dans ce grand centre qui sont prioritaires aux yeux des bailleurs de fonds. Par contre, si on veut stimuler la production en région, on peut proposer des incitatifs pour ces gens qui, afin d'exister en tant que producteurs, doivent composer avec la réalité d'aujourd'hui, donc travailler à Montréal.
(1740)
    Mais on parle alors de productions francophones. Dans le cas contraire, malgré tout le respect que je vous dois, on ne peut pas dire que seulement 3 p. 100 des productions télévisuelles sont réalisées à l'extérieur de Montréal. C'est faux.
    Je parle de la production dans son ensemble. Il se pourrait qu'à Sherbrooke, par exemple, un producteur anglophone mette sur pied une maison de production et profite d'incitatifs offerts par Téléfilm Canada. Je ne veux pas créer de schisme linguistique; je parle simplement de la production.
    Autrement, il faudrait également prendre en considération le fait que certaines productions dont la création artistique est essentiellement francophone sont développées en anglais et doublées par la suite en français pour le marché francophone parce que les réserves du volet francophone sont dans bien des cas plus à sec que celles du volet anglophone.

[Traduction]

    Monsieur Angus.
    Je suis certainement pour, en principe.
    J'ai deux questions. Tout d'abord, je crois que nous devons préciser que cette situation est similaire à celle qui règne dans d'autres régions du pays. La production est centrée dans quelques grandes villes et il n'y a pas de développement régional. Nous pourrions modifier la motion en ajoutant après « Attendu qu'au Québec tous les centres de décisions relatifs à l'industrie télévisuelle sont à Montréal » les mots « et que la même situation existe dans d'autres régions du Canada ». Cela permettrait de le préciser.
    J'ai une question concernant le dernier paragraphe. Nous savons que le ministère du Patrimoine a eu notre rapport sur l'industrie cinématographique. Je me demande s'il ne vaudrait pas mieux dire :
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent du patrimoine canadien, recommande au gouvernement, d'examiner de toute urgence une stratégie qui fournirait des mesures adéquates pour stimuler les productions régionales à l'extérieur des grands centres urbains, et aussi d'examiner l'usage de crédits d'impôt bonifiés pour la production de films à l'extérieur des centres urbains...
    La seule chose qui m'inquiète est que nous attendons la réponse du gouvernement. Il se penche toujours sur la question du crédit d'impôt. Je préférerais dire que nous lui demandons d'examiner la possibilité de se servir des crédits d'impôt pour développer la production cinématographique à l'extérieur des centres urbains plutôt que d'insister pour qu'il le fasse.
    Ce serait un amendement amical.
    Monsieur Kotto.

[Français]

    Monsieur le président, pour mettre de l'eau au moulin de M. Angus, je dirai qu'au Québec, une telle disposition existe. C'est à Téléfilm, donc à Patrimoine canadien, que ça n'existe pas.

[Traduction]

    Très bien.
    Monsieur Warkentin.
    Je ne pense pas que l'importance de l'industrie télévisuelle au Québec et dans l'ensemble du Canada suscite le moindre doute.
    Je demanderais seulement au comité si nous ne risquons pas, sans tenir de consultations supplémentaires, d'émettre une idée qui nous amènera à distribuer nos ressources d'une façon qui va empêcher cette industrie de continuer à travailler dans les mêmes conditions que celles dans lesquelles elle a déjà réussi à se développer. Je tiens à ce que nous fassions en sorte d'avoir une industrie solide et concurrentielle. Je pense que nous prenons des mesures très timides dans cette direction, mais je crains que si nous commençons à faire sortir la production des grands centres, nous risquions de l'éparpiller un peu trop.
    Je ne voudrais pas parler au nom de la ministre, mais je sais qu'elle a rencontré un certain nombre d'organisations et qu'elle travaille en ce sens. Elle espère pouvoir consolider l'industrie, tant dans les grandes villes que dans l'ensemble du pays.
    Je vous demande seulement si nous ne risquons pas de trop éparpiller nos ressources actuelles et de diminuer ainsi l'efficacité de ce que nous avons déjà? Je ne connais pas la réponse, mais je me demande si le comité ne devrait pas se pencher sur la question.
    Monsieur Simms.
    Je vais être très bref, car je pense que M. Angus a abordé la plupart des questions que je voulais soulever.
    Nous avons abordé la plupart de ces sujets dans l'étude de l'industrie cinématographique que nous avons réalisée au cours de la dernière session. Si vous y jetez un coup d'oeil, vous verrez que les crédits d'impôt avaient été conçus au départ pour favoriser le développement en dehors des grands centres. Dans ma province, nous avons une industrie cinématographique, mais elle est principalement reliée à Toronto. Par conséquent la présence du mot « Montréal » est un peu problématique, car Montréal ne représente qu'une très petite partie de cette industrie.
    Pour ce qui est des crédits d'impôt, s'il est possible de se reporter à cette étude, comme l'a dit M. Angus, il en a été question au cours des audiences que nous avons tenues à Toronto et autour de cette table. Cela répondait à certaines des préoccupations de M. Warkentin.
(1745)
    Oui, je le comprends. Cela faisait partie également de cette étude. Il est parfois difficile de sortir une partie de l'infrastructure existante de certaines grandes villes.
    Pourrais-je demander à M. Kotto s'il est prêt à reformuler légèrement sa motion, en consultant d'autres membres du comité, car je pense que l'on est généralement d'accord autour de la table pour dire qu'il ne faudrait pas empêcher le développement régional en dehors des grands centres urbains, en tenant compte de certaines observations de M. Warkentin et de M. Angus? Serait-il prêt à remanier un peu sa motion? J'espérais que M. Kotto pourrait peut-être...
    Monsieur Angus.
    Accordez-moi 30 secondes, chers collègues, et nous pourrons peut-être régler cette question. Je pense que nous touchons au but.
    Pendant que vous y travaillez, monsieur Angus, nous allons passer à la motion numéro 1, une autre motion de M. Kotto :
Attendu que le succès retentissant de longs métrages au Québec ne durera que si de nouvelles sources de financement sont injectées dans les productions cinématographiques de langue française;
Attendu que le Fonds du long métrage a connu une coupure permanente de 2 millions de dollars et que la capacité d'investissement de Téléfilm Canada a été diminuée par l'impact de l'inflation;
Attendu que le coût de production n'a cessé d'augmenter, de même que les demandes de financement auprès de Téléfilm;
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent du patrimoine canadien recommande au gouvernement d'apporter de toute urgence au Fonds du long métrage un montant récurrent de 50 millions de dollars tel que réclamé par l'industrie et que rapport soit fait à la Chambre par la présidence.
    Allez-y, monsieur Bélanger.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais proposer un amendement.

[Traduction]

    Je propose de dire :
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent du patrimoine canadien recommande au gouvernement d'apporter de toute urgence au Fonds du long métrage un montant récurrent adéquat...
Autrement dit, je propose de supprimer la mention du chiffre exact de 50 millions de dollars.
    Je propose d'apporter cet amendement à la motion, monsieur le président.
    Allez-y, monsieur Abbott.
    Merci, monsieur le président.
    Les membres du gouvernement n'ont absolument aucune intention de mettre des bâtons dans les roues du comité au sujet de cette motion ou de n'importe quelle autre motion. Néanmoins, si le comité l'adopte, nous tenons à bien préciser que nous ne voterons pour aucune de ces motions. Autrement dit, si la motion est adoptée par le comité, très bien; si rapport en est fait à la Chambre, très bien. Mais je ne veux pas qu'on s'imagine que les membres du gouvernement partageaient unanimement l'opinion des autres membres du comité.
    Très bien, cela dit...
    Je me demande si cette déclaration est aussi ferme que lorsqu'on nous a dit que les ministériels ne siégeraient pas si nous tenions des audiences sur le Programme de contestation judiciaire.
    Monsieur Kotto, allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

    M. Bélanger a proposé un amendement à la motion, mais on ne m'a pas demandé mon avis à ce sujet. Néanmoins, je me permets de vous le donner. Je suis tout à fait favorable à son amendement.

[Traduction]

    Allez-y.

[Français]

    C'est tout.

[Traduction]

    Très bien. Merci.
    Monsieur Angus, avez-vous terminé l'autre motion?
    Je suis...
    A-t-elle été adoptée?
(1750)
    Je vais mettre l'amendement amical aux voix, ensuite...

[Français]

    Je demande un votre par appel nominal, monsieur le président.

[Traduction]

    Voulez-vous dire que vous désirez un vote par appel nominal?

[Français]

    S'il vous plaît.

[Traduction]

    Ce sera sur la motion modifiée. C'est un amendement amical.
    Je ne vais pas lire tout le texte. Le dernier paragraphe de l'amendement amical porte maintenant ce qui suit :
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent du patrimoine canadien recommande au gouvernement d'apporter de toute urgence au Fonds du long métrage un montant récurrent adéquat tel que réclamé par l'industrie. Et que rapport soit fait à la Chambre par la présidence.
    C'est un vote par appel nominal.
    (La motion est adoptée par sept voix contre quatre.)
    Monsieur Angus, allez-vous lire votre amendement amical?
    Oui. Mon amendement amical, à ne pas confondre avec les tirs amis, dit que :
Attendu qu'il devrait être possible de développer la production cinématographique sur tout le territoire;
Attendu qu'au Québec tous les centres de décisions relatifs à l'industrie télévisuelle sont à Montréal et que la même situation existe dans d'autres régions du Canada;
... et je ne sais pas trop si nous devrions reprendre la ligne suivante ou non étant donné que la question a déjà été abordée à la ligne précédente...
Attendu qu'il y a carence en matière de développement des régions;
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent du patrimoine canadien, par mesure d'urgence, conseille le gouvernement sur le besoin de développer une stratégie qui fournirait des mesures adéquates pour stimuler les productions régionales à l'extérieur des grands centres urbains, et aussi d'examiner l'usage de crédits d'impôt bonifiés pour la production de films à l'extérieur des centres urbains.
    Cela vous satisfait-il, monsieur Kotto?
    Oui.
    Nous allons voter sur la motion modifiée.
    Voulez-vous un autre vote par appel nominal?
    Des voix: Oui.
    (La motion est adoptée par sept voix contre quatre.)
    Nous allons maintenant passer à la motion numéro 2 qui porte que :
Attendu que Téléfilm Canada doit réagir plus rapidement aux nouvelles réalités de marché de nouveaux médias;
Attendu que la croissance du nouveau Fonds canadien pour les nouveaux médias est cruciale pour l'avenir du contenu canadien dans ce domaine;
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent du patrimoine canadien recommande au gouvernement d'apporter de toute urgence un soutien financier adéquat dans ce secteur, dans le dessein de le voir atteindre tout son potentiel, et de prendre par ailleurs des mesures législatives adéquates afin de permettre à Téléfilm Canada d'opérer avec plus de souplesse. Et que rapport soit fait à la Chambre par la présidence.
    Vous avez entendu la motion. Voulez-vous en discuter?
    (La motion est adoptée par sept voix contre quatre.)
(1755)
    Nous allons maintenant passer à la motion numéro 4.
    Monsieur Kotto.

[Français]

    Monsieur le président, M. Bélanger a proposé que des représentants du Programme de contestation judiciaire comparaissent mercredi prochain. Cette motion pourrait attendre jusque-là, et on pourrait, en attendant, débattre de celle voulant qu'on invite ces personnes au comité.

[Traduction]

    À moins que le comité ne consente à l'unanimité à être saisi de cette motion, dont on nous a seulement donné avis hier, je suggère que nous l'examinions mercredi. Il est presque 18 heures.
    Nous savons déjà qui seront nos témoins de mercredi et si la Chambre siège mercredi, nous procéderons à l'audition de ces témoins.

[Français]

    Monsieur le président, j'apprécie le fait que M. Kotto nous offre de retenir sa quatrième motion, et j'aurai d'autres commentaires à faire lorsqu'on abordera ce sujet. Je sais qu'on n'a pas le consentement unanime pour disposer de la motion que j'ai présentée aujourd'hui, à savoir qu'on demande à des représentants du Programme de contestation judiciaire de comparaître.
    Nos témoins ont déjà été appelés, et ils ont confirmé leur présence. Est-ce qu'on peut s'entendre pour se réunir mercredi après-midi, peu importe que le Parlement siège ou non?

[Traduction]

    Quelqu'un a-t-il quelque chose à dire à ce sujet?
    Personnellement, je n'y vois pas d'objection, car ils vont venir de toute façon et, au cours de la dernière session, nous avons tenu notre dernière réunion après l'ajournement de la Chambre. Je ne vois donc aucune raison qui nous empêcherait de le faire.
    Vous parlez seulement de mercredi, n'est-ce pas?
    Ce mercredi, en effet.
    Nous allons donc examiner cette motion mercredi.
    Oui.

[Français]

    Monsieur le président, je vais remettre au greffier, pour qu'il les distribue aux membres du comité, une copie des politiques régissant les conflits d'intérêts du Programme de contestation judiciaire et un exemplaire de l'engagement que doivent signer tous ceux qui y participent. Je pense qu'il serait utile que tous les membres du comité y jettent un coup d'oeil en prévision d'une éventuelle comparution des représentants de ce programme.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Sur ce, la séance est levée.