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Merci beaucoup de m'offrir l'occasion de vous parler de l'assurance-emploi.
J'ai comparu devant le comité sur le même sujet en novembre 2006. J'ai aussi comparu devant un comité sénatorial sur ce sujet il y a environ un an, et j'ai fourni les mémoires que j'ai présentés à ces deux occasions au personnel du comité.
L'assurance-emploi est un programme qui fait l'objet d'abus depuis longtemps. Le programme est de moins en moins efficace pour ce qui est d'atteindre son but premier, c'est-à-dire d'offrir un revenu d'appoint temporaire aux chômeurs, parce que les fonds sont maintenant utilisés à toutes sortes d'autres fins.
Permettez-moi de mettre en lumière les principaux assauts dont a fait l'objet ce programme d'assurance : la fin des prestations dans les cas de « départs volontaires », la fin de la responsabilité fédérale quant aux prestations dans les régions où le taux de chômage est élevé, ce qu'on appelait les prestations de prolongation fondée sur le taux de chômage régional, quand le gouvernement fédéral versait une partie des prestations à même le Trésor lorsque le taux de chômage était élevé, le passage des semaines aux heures, en 1996, ce qui a marginalisé encore davantage les gens qui l'étaient déjà, et la compression du maximum de la rémunération assurable.
Les cotisations au régime d'assurance-emploi sont une forme d'impôt régressif. Aujourd'hui, ces cotisations servent à payer la formation, et les surplus de la caisse, comme vous le savez, ont été récupérés et versés au Trésor, à mon avis pour permettre des réductions d'impôt.
J'ai distribué un tableau dans lequel vous pouvez voir la proportion des chômeurs qui sont des bénéficiaires de prestations « régulières » d'assurance-emploi, proportion qui a chuté, par rapport à ce qu'elle était avant 1990, c'est-à-dire de l'ordre de 80 à 90 p. 100. Les gens qui appartiennent à la catégorie des « départs volontaires » ont été exclus du bénéfice des prestations d'assurance-emploi, et la proportion a chuté, pour s'établir à environ 45 p. 100 en 1996.
En 1996, le critère d'admissibilité est passé de tant de semaines d'emploi au cours de la dernière année à tant d'heures d'emploi au cours de la dernière année. C'était désavantageux pour les travailleurs à temps partiel, pour les jeunes, et particulièrement pour les gens qui ont des enfants, et donc pour les femmes. La proportion des chômeurs qui bénéficient de prestations « régulières » d'assurance-emploi est donc aujourd'hui d'environ 50 p. 100 chez les hommes et de 40 p. 100 chez les femmes.
Un meilleur indicateur de cette proportion, pour ce qui est de la couverture offerte par l'assurance-emploi, c'est celui qui ne tient compte que des chômeurs qui ont cotisé au régime au cours de la dernière année. Les données ne sont pas faciles à obtenir, mais j'ai publié certains résultats de travaux de recherche à cet égard dans le passé. Dans ce cas-ci, la proportion est légèrement plus élevée, parce que le dénominateur n'inclut que les chômeurs qui ont cotisé au régime, mais il demeure qu'elle est de 20 à 25 p. 100 chez les jeunes et chez les mères qui travaillent à temps partiel. Les travailleurs vulnérables sont beaucoup moins susceptibles de toucher des prestations d'assurance-emploi que les chômeurs qui ne sont pas vulnérables.
Avec le temps, l'assurance-emploi s'éloigne de plus en plus de son but premier. Si nous jetons un coup d'oeil seulement sur les prestations régulières, c'est-à-dire les prestations offertes aux chômeurs, elles comptaient auparavant pour 90 p. 100 des prestations de revenu. Les prestations de revenu sont les prestations régulières plus les prestations de maladie et les prestations de maternité, les prestations parentales et les prestations de soignant.
Quelle proportion des prestations de revenu forment donc les prestations régulières offertes aux chômeurs? Avant, c'était 91 p. 100. Aujourd'hui, c'est 58 p. 100 des prestations de revenu. Les prestations régulières correspondent aujourd'hui à environ 47 p. 100 des cotisations. Elles correspondent donc à moins de la moitié des cotisations de tout un chacun au régime, parce qu'une bonne partie de l'argent sert maintenant à financer la formation.
Auparavant, les prestations d'assurance-emploi correspondaient à environ 2 p. 100 du salaire des Canadiens. Si on prenait la somme des prestations d'assurance-emploi et qu'on la divisait par le total de la rémunération sous toutes ses formes touchée par les Canadiens, les prestations d'assurance-emploi correspondaient à environ 2,1 p. 100 du total. Aujourd'hui, ce chiffre est de 1,2 p. 100, c'est-à-dire qu'il a pratiquement diminué de moitié.
Compte tenu de l'inflation, les prestations d'assurance-emploi par famille ont diminué du tiers environ au cours des 20 dernières années. Chez les familles pauvres, les prestations ont diminué de moitié environ, à cause des changements qui ont eu pour effet qu'il est plus difficile pour les gens vulnérables d'obtenir des prestations.
L'incidence régionale de l'assurance-emploi, comme vous le savez bien, a pour effet que les gens qui vivent dans une région où le taux de chômage est faible ont plus de difficulté à obtenir des prestations que ceux qui vivent dans une région où le taux de chômage est élevé. J'ai publié certains résultats de travaux de recherche effectués en collaboration avec des gens de Toronto qui montrent que les habitants de Toronto ont versé une cotisation d'environ 19 p. 100 à la caisse de l'assurance-emploi et ont touché environ 10 p. 100 des prestations versées en 2002. Pour l'ensemble de la province, c'est environ 41 p. 100 des cotisations et 28 p. 100 des prestations.
J'aimerais formuler deux ou trois observations au sujet de l'assurance-emploi dans le contexte économique actuel. Nous savons que l'effet de multiplication des prestations d'assurance-emploi sur l'économie est plus puissant — et il s'agit d'une mesure d'incitation économique — que toute autre forme de soutien du revenu. Nous savons également que cet effet de multiplication est plus puissant lorsque les prestations sont accordées de façon ciblée aux populations vulnérables. D'après ce que j'ai vu dans les médias, des intervenants de l'ensemble du spectre politique demandent que l'accès aux prestations d'assurance-emploi soit facilité. Rien dans le récent budget n'améliore l'accès aux prestations. Nous prenons acte de ce que les gens qui respectent les exigences d'accès vont obtenir jusqu'à cinq semaines de prestations de plus qu'auparavant, mais il n'y a rien, dans le budget que j'ai lu, pour améliorer l'accès au programme.
Comme vous vous intéressez à la question de l'assurance-emploi et des femmes, et comme il s'agit du Comité permanent de la condition féminine, je vais parler des prestations parentales et de maternité. Je dirais que l'ajout récent des prestations de compassion, des prestations parentales et des prestations de maternité obscurcit l'objectif du programme d'assurance-emploi. Ce sont des programmes utiles. Cependant, je ne suis pas sûr que de les inscrire dans le cadre du régime d'assurance-emploi soit la meilleure idée. Je suis même plutôt convaincu que ce n'est pas le cas.
Environ la moitié seulement des nouvelles mères ont droit à des prestations de maternité. Les femmes qui travaillent à leur compte n'y ont pas accès. Environ la moitié des nouvelles mères qui n'obtiennent pas de prestations de maternité ont travaillé au cours de l'année précédente; soit elles n'ont pas accumulé suffisamment d'heures, soit elles travaillent à leur compte. Les nouvelles mères qui touchent des prestations de maternité ne peuvent faire augmenter leur revenu en travaillant. Elles peuvent le faire, mais les sommes qu'elles gagnent sont soustraites intégralement de leurs prestations de maternité. C'est une partie du problème engendré par le fait que ces prestations s'inscrivent dans le cadre du régime d'assurance-emploi.
L'Association du Barreau canadien a commandé une étude sur les prestations de maternité pour les travailleurs autonomes, les conséquences du fait d'offrir des prestations d'assurance-emploi aux travailleurs autonomes et aussi les conséquences de l'instauration d'un programme canadien modelé sur celui du Québec. L'étude a été publiée il y a environ un an. Votre personnel a un exemplaire de ce rapport. C'est un document publié, alors je vous encourage à le consulter.
Permettez-moi de prendre un instant pour décrire la façon dont le programme de prestations de maternité fonctionne dans le cadre du régime d'assurance-emploi. Si vous êtes malade ou que vous avez été au chômage au cours de la dernière année, vos prestations de maternité de l'assurance-emploi peuvent être réduites. Il y a un délai de carence de deux semaines pour les prestations de maternité de l'assurance-emploi, et la raison pour laquelle ce délai existe m'échappe totalement. Le taux de remplacement des prestations d'assurance-emploi est de 55 p. 100, et le montant maximal des prestations est d'environ 450 $ par semaine. Comme je l'ai mentionné déjà, on ne peut pas toucher une rémunération et recevoir des prestations de maternité en même temps.
Si vous comparez ces conditions à celles dont s'assortissent les prestations de maternité auxquelles ont accès les gens qui bénéficient de prestations complémentaires offertes par leur employeur, vous constaterez que le programme de l'assurance-emploi n'est pas un programme généreux. En réalité, les gens dont la situation financière est bonne ont, de façon générale, négocié des prestations de maternité beaucoup plus intéressantes pour eux-mêmes que celles qui sont offertes à la population en général, ce qui porte à croire que ces gens considèrent que les prestations offertes dans le cadre du régime d'assurance-emploi sont insuffisantes.
Il y a quelque chose de nouveau ces dernières années: l'expérience du Québec par rapport à ce que la province appelle le Régime québécois d'assurance-parentale. Je présume que vous savez que le Québec s'est retiré du volet des prestations parentales et de maternité du programme d'assurance-emploi. La province a créé son régime en janvier 2006, ce qui fait que nous pouvons maintenant tirer parti de son expérience.
Le régime vise les travailleurs autonomes; tous les travailleurs autonomes versent une cotisation sociale spéciale à ce régime. Il ne s'agit pas d'une cotisation volontaire; tout le monde cotise, même les hommes qui, de façon générale, n'envisagent pas d'être père, cotisent à ce programme.
Les prestations de maternité offrent une certaine souplesse. On peut toucher des prestations d'un montant plus élevé. On peut obtenir un taux de remplacement du revenu de 75 p. 100 pour une période raccourcie, ou encore un taux de remplacement inférieur pendant une période plus longue, en fonction de ses besoins.
Il n'y a pas de délai de carence de deux semaines. Par ailleurs, le montant maximal des prestations dans le cadre du régime québécois est deux fois plus élevé que le montant maximal dans le cadre du régime d'assurance-emploi, d'une part, parce que le taux de remplacement est supérieur, et d'autre part, parce que le maximum de la rémunération assurable aussi l'est.
Le montant moyen des prestations est supérieur d'environ 40 p. 100 au montant des prestations d'assurance-emploi touchées par des hommes, et il est supérieur d'environ 33 p. 100 chez les femmes. Le nombre de bénéficiaires dans le cadre de l'expérience réalisée au Québec est d'environ 20 p. 100 supérieur au nombre de bénéficiaires du programme d'assurance-emploi chez les femmes, et il est de deux à trois fois plus élevé — 200 ou 300 p. 100 — chez les hommes, parce que la province offre des prestations de paternité auxquelles seulement les pères ont droit.
Le régime est plus souple. J'ai parlé de la durée variable de la période de prestations et du taux de remplacement. L'accès est également plus facile. Les prestataires doivent avoir gagné 2 000 $ au cours de la dernière année, plutôt que d'avoir accumulé 600 heures d'emploi. Ainsi, la somme des prestations versées dans le cadre du régime québécois est d'environ le double de la somme des prestations qui étaient versées au Québec dans le cadre du régime d'assurance-emploi.
J'espère que ces observations vont vous être utiles d'une façon ou d'une autre. J'ai hâte de prendre part au débat, qui sera certainement intéressant.
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Monsieur Shillington, merci de vous joindre à nous aujourd'hui.
Vous dites vous être présenté devant le comité, mais ce n'était pas devant le Comité de la condition féminine, car il n'existait pas en 2000. Vous dites avoir fait des présentations en 2000, en 2005 et en 2007 devant le Sénat au sujet de la même problématique.
Monsieur Shillington, la levée de la droite qu'on observe un peu partout dans le monde, sauf en Amérique du Sud, tend à distancer les classes encore plus qu'il y a 10 ans. Petit à petit, on fait disparaître la classe moyenne, et les divers gouvernements utilisent différents moyens pour y parvenir.
Dans un contexte économique normal, les programmes qui sont mis de l'avant depuis quelques années seraient probablement favorables à l'ensemble des citoyens et des citoyennes. Ce n'est pas le cas actuellement. Par exemple, la prestation pour enfants de moins de 6 ans profite plus aux gens qui ont un salaire plus élevé, car ils peuvent obtenir l'entièreté de la prestation. Comme vous l'avez si bien dit, l'assurance-emploi profite plus à ceux qui ont un meilleur salaire, et il en va de même des crédits d'impôt.
Monsieur Shillington, vous avez parlé plus tôt d'un effet multiplicateur. Croyez-vous que les différents programmes ont un tel effet sur la vie des personnes les plus vulnérables, soit les femmes chefs de famille monoparentale qui n'ont pas accès à ces programmes à cause des obstacles qui les en empêchent?
Merci.
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Je vois cette question comme étant une question très générale.
Pour ceux d'entre vous qui ne le savent pas déjà, j'ai une formation de mathématicien, de statisticien. J'essaie de comprendre le monde à l'aide de chiffres.
J'ai travaillé récemment sur les écarts de revenu entre les Canadiens. Ce n'est pas tellement que les pauvres s'en tirent moins bien que dans le passé — je ne pense pas qu'on puisse l'affirmer pour ce qui est des 30 dernières années —, mais il est clair que de 30 à 40 p. 100 des gens les plus favorisés se détachent du peloton; il ne fait aucun doute que cela s'est déjà produit.
Si vous jetez un coup d'oeil du côté des grands programmes du gouvernement fédéral qui sont importants pour la protection des Canadiens vulnérables — le programme d'assurance-emploi en fait partie —, le résumé, c'est que les prestations ont été réduites du tiers environ au cours des 20 dernières années. Celles qui sont offertes aux pauvres ont été réduites de moitié. C'est quelque chose d'évident.
Pour ce qui est de la prestation fiscale pour enfants et de l'idée d'accroître le soutien offert aux familles pauvres avec enfants, je suis tout à fait pour, à 100 p. 100. Dommage que M. Battle ne soit pas ici, mais je suis forcé de dire que la prestation a été conçue de façon à ce que les gens qui touchent de l'aide sociale ne bénéficient pas de la majoration de la prestation fiscale pour enfants. Ce sont les provinces qui s'occupent de l'assistance sociale, le gouvernement fédéral a choisi de supprimer les mécanismes de protection des droits de la personne. Il y avait autrefois ce qu'on appelait le Régime d'assistance publique du Canada, et le gouvernement fédéral offrait du financement sous réserve du respect de certaines normes. Ce régime a été aboli en 1995.
Au cours des 10 dernières années, j'ai beaucoup travaillé sur la question des prestations offertes aux aînés, sur la SV et sur le supplément de revenu garanti. Permettez-moi de profiter de l'occasion pour dire que le revenu moyen des personnes âgées du Canada qui prennent leur retraite et qui n'ont pas accès à un régime de pension de l'employeur est de 15 000 $ par année et que 80 p. 100 d'entre eux ont un revenu inférieur à 20 000 $ par année. En 25 ans, c'est-à-dire depuis que je fais ce genre de travail ici, je n'ai vu qu'un programme qui aurait pu accroître le revenu des personnes âgées qui sont pauvres. Les prestations de la sécurité de la vieillesse sont indexées en fonction de l'IPC depuis 1985 et même avant, et il n'y a pas eu d'autres augmentations en 25 ans. Le SRG, qui vise les personnes dont le revenu est faible, a fait l'objet d'une augmentation de 35 $ par mois il y a environ quatre ans. C'est la seule occasion où le pouvoir d'achat découlant du supplément d'un revenu garanti a été accru au cours des 25 dernières années.
Au cours de la même période, le plafond de cotisation à un REER est passé d'environ 4 000 $ à environ 22 000 $. Il y a de nouvelles dispositions de fractionnement du revenu dont profiteront les aînés qui s'en tirent suffisamment bien pour avoir à s'inquiéter des impôts qu'ils paient. Il y a eu des majorations du crédit accordées en raison de l'âge et des déductions fiscales dont profiteront les aînés qui sont assez chanceux pour payer de l'impôt. Mais pour ceux dont le revenu de retraite est de 15 000 $ par année, l'augmentation totale du soutien offert par le gouvernement fédéral est de 35 $ par mois pour les 25 dernières années.
Il est donc évident que les écarts se creusent. C'est inévitable, vu ce qui s'est passé au cours des 25 dernières années.
Vous avez vu le grand titre du Globe and Mail, il y a six mois peut-être, selon lequel l'augmentation du salaire moyen des gens qui travaillent à temps plein toute l'année a été de 53 $ par année au cours des 20 dernières années — c'était moins de 100 $. Pourquoi y a-t-il eu une très forte croissance du PIB, une très forte croissance de la productivité, une augmentation très importante des profits des grandes entreprises au cours des 25 dernières années, et aucune augmentation du pouvoir d'achat lié aux salaires? Comment la dynamique d'opposition entre les employeurs et les employés quant à la négociation d'un salaire en échange des heures de travail a-t-elle évolué?
Assurément, les gens qui connaissent ce domaine mieux que moi savent que le règlement concernant les « départs volontaires », qui dit que, si vous quittez votre emploi, vous n'avez pas droit aux prestations d'assurance-emploi — que vous n'obtiendrez rien dans le cadre du régime d'assurance-emploi si vous quittez votre emploi volontairement, ou encore que, si je vous congédie, vous n'obtiendrez rien de l'assurance-emploi — a modifié la position des employeurs et des employés dans le conflit qui les oppose.
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Merci, madame la présidente.
Merci d'être ici, monsieur Shillington. J'ai beaucoup aimé votre exposé. Je pense que nous avons entendu des choses que nous avons tous besoin d'entendre et que peut-être que nous n'avions pas encore entendues de façon aussi claire que ce matin.
J'ai tout un tas de notes devant moi, alors je vais brasser les feuilles le temps de mettre tout ça en ordre. Il y a une chose qui m'a toujours déroutée. Vu votre formation, peut-être pouvez-vous m'aider à cet égard.
Différentes personnes viennent témoigner devant le comité et nous présentent différents chiffres sur la situation actuelle. Il y a des gens qui parlent d'une proportion d'environ 25 p. 100 des femmes qui ont accès à l'assurance-emploi. Ensuite, nous entendons dire que 80 ou 81 p. 100 de celles qui sont admissibles aux prestations sont en mesure de les toucher. Par ailleurs, quelqu'un m'a parlé du ratio du nombre de bénéficiaires par rapport au nombre de chômeurs, et que c'est ainsi que l'on obtient l'une de ces séries de chiffres, tandis que l'autre est issue d'une autre méthode que Statistique Canada utilise pour recueillir des données.
On me dit que le ratio du nombre de bénéficiaires par rapport au nombre de chômeurs tient compte des gens qui n'ont jamais travaillé, ce qui fait qu'ils n'ont jamais cotisé au régime d'assurance-emploi — ou qui ont peut-être travaillé, mais pas au cours de la dernière année, qui quittent leur emploi sans justification ou encore qui étaient travailleurs autonomes et qui n'ont pas cotisé au programme.
Ce sont là toutes les raisons, je pense, pour lesquelles les gens ne touchent pas les prestations, mais devons-nous penser que 80 p. 100 des gens sont admissibles, que 81 p. 100 des gens sont admissibles aux prestations et touchent des prestations, ou devons-nous penser que c'est plutôt 25 p. 100? Il y a un écart énorme entre les chiffres. N'importe qui peut utiliser n'importe quel chiffre pour prouver le bien-fondé de sa version des faits ou pour étayer sa position sur la question.
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Et la situation dans laquelle vous vous trouvez est difficile, parce que les gens utilisent l'information pour faire valoir leur point de vue.
Le tableau que j'ai distribué concerne la proportion des chômeurs qui bénéficient des prestations. Je crois avoir dit dans mon exposé qu'il existe une meilleure façon de mesurer la couverture du régime. En fait, j'étais l'un des trois « spécialistes » qui ont rédigé quelques rapports pour le ministère il y a environ quatre ans sur la façon d'évaluer cette couverture. J'ai utilisé certains des chiffres que je vous ai présentés dans ce rapport, quant à la façon de mesurer la couverture à l'aide de ce qui est à mon avis la meilleure mesure.
Les données ne sont pas faciles à obtenir. En vue de cette réunion, je suis allé à Statistique Canada et j'ai dépensé environ 100 $ pour obtenir des données faciles d'accès et pour générer ce tableau. Comme vous le savez, personne ne me paie pour être ici. En réalité, comme je suis travailleur autonome, être ici me coûte de l'argent. Si je voulais faire une bonne analyse, il faudrait que j'y consacre une semaine et peut-être 3 000 $, et je n'étais pas prêt à faire cela.
Il existe des données qui permettraient de mieux mesurer ça. Je vous ai donné des chiffres dans mon exposé qui, si vous étiez mieux renseignés, ne vous donneraient quand même pas 80 p. 100. Je sais comment arriver au chiffre de 80 p 100, et je vais vous l'expliquer.
L'avantage du ratio du nombre de bénéficiaires par rapport au nombre de chômeurs, c'est que c'est un chiffre facile à obtenir — je peux faire l'acquisition des données brutes pour 100 $ —, mais ce n'est pas la meilleure mesure. Vous avez raison, il y a des gens qui n'ont pas cotisé dans le dénominateur. Si vous en tenez compte — et c'est l'article que j'ai écrit il y a quatre ou cinq ans pour le ministère — la proportion ne passe pas de 45 p. 100 à 80 p. 100. Elle passe d'environ 45 p. 100 à environ 55 p. 100. Mais les chiffres concernant la couverture offerte aux jeunes, aux femmes qui ont des enfants et aux gens qui travaillent à temps partiel demeurent extrêmement basse.
La façon d'obtenir le chiffre de 85 p. 100, c'est... Imaginez l'assurance-emploi comme une série d'obstacles dans une course. Pour être admissible à vos prestations, vous devez tout d'abord avoir occupé un emploi rémunéré — le travail autonome ne compte pas. Il faut que vous ayez accumulé un certain nombre d'heures d'emploi. Vous devez avoir quitté votre emploi pour la bonne raison — vous ne pouvez être congédié; il faut que ce soit une mise à pied. Ce qu'ils disent, c'est que, une fois que vous avez franchi tous ces obstacles, combien de gens sont exclus par le dernier, c'est-à-dire les heures? Ça arrive à 85 p. 100.
Ce chiffre de 85 p. 100 que je connais très bien, ne dit même pas que 80 p. 100 des chômeurs sont admissibles — je ne pense pas, quoique je puisse me tromper. Je pense que c'est 80 p. 100 de la population active en général. Habituellement, la façon dont ce chiffre est utilisé pour convaincre les gens, c'est que 85 p. 100 des gens qui travaillent en ce moment seraient admissibles s'ils perdaient leur emploi.
Eh bien, la plupart des gens qui travaillent en ce moment ne risquent pas de perdre leur emploi. Si vous perdez votre emploi, plus vous êtes vulnérable, moins vous êtes susceptible d'être admissible. La plupart des gens qui travaillent à l'heure actuelle occupent leur emploi depuis plus d'un an, et la plupart de ces emplois sont des emplois à temps plein. Il en découle que la plupart des gens qui travaillent en ce moment seraient admissibles s'ils perdaient leur emploi. Ce n'est pertinent que si tout le monde perd son emploi, ce qui ne va pas se produire.
C'est donc un échafaudage d'idées conçues pour arriver à un chiffre élevé.
J'espère que ça répond à votre question. Je suis mathématicien, et je sais comment on peut faire en sorte qu'un ratio soit plus ou moins élevé, et ce n'est pas tout le monde qui est juste.
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Je suis associé de recherche à Informetrica. Informetrica est un cabinet de chercheurs spécialisé dans le domaine de l'économie et qui font des prévisions. Ils ont des données sur les répercussions probables de la récession sur les deux sexes.
Je ne suis pas du tout qualifié. Je suis statisticien, mais pas économiste. Je ne vais donc même pas vous faire part des résultats. Vous pouvez les leur demander.
Vous remarquez qu'il est probable que les mesures de stimulation et l'argent consacré à l'infrastructure profitent aux gens qui travaillent dans la construction. De prime abord, on est porté à penser que ce sont surtout les hommes qui vont en profiter, mais ce n'est pas ce que les données montrent. Comme je le disais, l'expérience sociale que nous nous apprêtons à faire, celle d'une profonde récession qui survient après que nous avons gravement... « démantelé », le mot est trop fort, mais handicapé le régime d'assurance-emploi et d'assistance sociale, cette expérience devrait être très intéressante.
Si jamais un grand nombre de gens finissent par dépendre de l'aide sociale au pays, nous allons vraiment nous trouver dans une mauvaise situation. En Ontario, par exemple, pour avoir droit à l'aide sociale, il faut avoir des actifs ne dépassant pas 1 000 $. Vous imaginez la famille hypothétique — deux personnes, l'une travaillant à Nortel, l'autre à... prenez une autre entreprise —, et son revenu est réduit à rien. Dans cette situation, la plupart d'entre nous épuiserions très rapidement les actifs que nous ne pouvons avoir, puis il faut commencer à vendre des choses.
Vous auriez peut-être droit à des prestations d'assurance-emploi, mais, même dans ce cas, si vous vivez dans une région où le taux de chômage est faible, la période de prestations ne durera pas 46 semaines. Si vous êtes admissible à l'assurance-emploi, vous ne toucherez pas des prestations pendant un an. Il y a beaucoup de gens qui n'arriveraient pas à payer leur hypothèque même avec le maximum de prestations, qui est de 450 $ par semaine. Nous verrons bien. Chose certaine, nous avons épargné beaucoup d'argent en 20 ans en effectuant des compressions dans ces programmes.
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais remercier M. Shillington. Certaines des choses qu'il a dites m'ont beaucoup intéressée.
J'aimerais faire quelques brèves observations avant de poser une question. Il semble, d'après ce que vous avez dit aujourd'hui, que c'est très positif que l'assurance-emploi ait été protégée contre la possibilité... C'est maintenant vraiment quelque chose d'indépendant et un programme d'assurance-emploi, par opposition à la possibilité d'utiliser la caisse pour les recettes générales, comme avant. Ça semble être une décision très positive.
Je suis vraiment très frappée par certaines des données dont j'avais pensé qu'elles seraient très simples, mais c'est quelque chose qui, selon vous, exige davantage d'argent et de temps. Dans ce tableau, je pensais pouvoir voir des choses comme le nombre de femmes qui travaillent à leur compte par rapport à tout un ensemble de mesures. Il semble que, pour vraiment comprendre le problème, nous devons combler de très importantes lacunes au chapitre des données, ou à tout le moins des lacunes à l'égard de données faciles d'accès.
Pour revenir au fait, cependant, je comprends ce que vous dites au sujet du programme de maternité et du délai de carence de deux semaines. Il est assez sensé de dire que nous devons déterminer ce que nous pouvons nous permettre d'offrir dans le cadre de ces programmes. Si c'est 17 semaines, alors c'est 17 semaines. Qu'il y ait un délai ou non, ça, c'est une autre question. Je pense donc qu'il s'agit d'un sujet de débat différent de celui du délai de carence de deux semaines pour la population générale.
Nous avons procédé à d'assez vastes consultations, et, ce qu'on nous a dit, c'est que, si le financement est limité, les gens préféreraient avoir cinq semaines à la fin, plutôt que d'en avoir deux ou trois. C'est ce qu'on nous a dit dans le cadre des consultations que nous avons effectuées. Ensuite, on nous a expliqué de toutes sortes de manières pourquoi on considérait que ça viendrait en aide aux personnes les plus vulnérables, et ainsi de suite.
Je serais donc très curieuse d'entendre ce que vous avez à dire là-dessus. Comme je le disais, pour moi, le délai de carence de deux semaines touchant des prestations de maternité, c'est quelque chose de très différent de l'assurance-emploi.
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Madame Demers, vous me demandez de prendre une décision à titre de présidente. Je demande aux membres du Comité de décider de la façon dont ils souhaitent procéder, surtout parce que... oui, je suis d'accord avec vous: si Mme Deschamps présente sa motion maintenant, elle n'a pas à la présenter dans les deux langues. Je viens juste de l'expliquer à Mme McLeod, alors vous avez répété ce que je viens de dire.
Ce que je dis, c'est que, si Mme Deschamps présente la motion et que celle-ci est pertinente par rapport à ce que nous sommes en train de faire, nous devons en débattre. Je propose que nous réglions le problème en limitant la durée du débat, de façon à avoir suffisamment de temps pour nous occuper du plan de travail. Sinon, nous n'allons pas pouvoir le faire.
J'ai aussi dit à Mme Deschamps que, si la motion n'est pas urgente, si elle n'a pas à être présentée aujourd'hui, elle pourrait la présenter à la prochaine séance, et les membres du Comité pourraient en débattre en séance publique.
Je lui demande d'abord de faire un choix. On dirait que personne ne comprend.
Voulez-vous que la motion soit présentée maintenant, parce qu'elle est urgente, auquel cas nous allons limiter la durée du débat, ou voulez-vous plutôt attendre la prochaine séance, où nous pourrons en débattre pleinement? C'est la première question.
Vous devez le faire maintenant; c'est une motion urgente. Très bien, dans ce cas, allez-y.
Avant que nous ne faisions cela, je vais proposer que nous limitions le débat. Êtes-vous d'avis que nous devons limiter la durée du débat?
Des voix: D'accord.
La présidente: Dans ce cas, quelle sera la durée maximale du débat? Puis-je proposer que ce soit cinq minutes?
Madame Davidson.
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Il nous reste cinq minutes.
Mme Morgan, l'analyste, a créé un plan de travail qui montre ce qui va se passer chaque semaine. D'un côté du plan de travail, il y a les semaines, et au milieu, il y a les thèmes, alors elle a réparti les semaines en fonction des thèmes et regroupé les noms des personnes sous ces thèmes à partir de toutes vos listes.
Le plan de travail n'est pas encore dans les deux langues officielles. Nous allons nous assurer qu'il sera traduit et qu'il vous parviendra.
La liste des gens qui vont venir témoigner, pour chacun des thèmes, figure dans une colonne, et nous avons mis entre crochets le nom du parti qui a proposé d'inviter chacune des personnes. Ainsi, pour chacun des thèmes et chacune des semaines, il est possible de déterminer que, par rapport à un ratio de trois pour un... imaginons que, à un moment donné, nous avons reçu dans le cadre de certains thèmes que des témoins invités par trois partis politiques; dans ce cas, nous allons permettre à un quatrième parti politique d'inscrire le nom d'un témoin qu'il souhaite inviter sous ce thème. Vous allez donc avoir le temps, avant la séance suivante, de proposer des noms pour compléter la liste de témoins. En gros, ce que nous allons essayer de faire, donc, c'est de nous assurer qu'il y aura quatre témoins pour chacun des thèmes et pour chacune des séances, et que chacun de ces témoins représente l'un des quatre partis qui sont ici.
Ce sera donc équitable. Le plan de travail nous permettra de comprendre le fonctionnement des différents thèmes. Parmi ceux-ci, nous pensons, vu ce que M. Shillington nous a dit aujourd'hui et vu ce que Mme Deschamps a proposé, que nous devrions demander au ministère, RHDCC, de nous envoyer un témoin, qui apportera certains des rapports que M. Shillington a fait pour le ministère, et que nous devrions offrir à Statistique Canada l'occasion de nous envoyer un témoin et de nous fournir une partie de l'information que Mme Davidson et d'autres ont dit ne pas avoir. Nous allons également demander à des représentants du Québec de venir témoigner et de nous parler des mesures concernant les travailleurs autonomes au Québec. Il y aura donc un thème concernant les représentants des ministères qui vont venir nous présenter des données, des faits, etc.
Vous pourriez donc jeter un coup d'oeil sur ce plan de travail et voir si vous pensez qu'il y a un autre ministère que nous avons oublié. Faites-le nous savoir; nous allons prendre des mesures pour corriger la situation s'il y a lieu. Ensuite, nous devons réserver une journée pour la table ronde des chercheurs universitaires. Nous n'avons pas prévu de temps pour ça, alors nous devons vous demander de réserver une journée, ainsi que de jeter un coup d'oeil sur le nombre de personnes dont le nom est inscrit sur la liste à titre de chercheur pour la table ronde et de trouver l'équilibre par rapport au ratio dont nous avons parlé, de façon à ce que tous les partis puissent inviter des gens à participer à cette table ronde.
Vous allez voir, donc, que Mme Morgan a fait un excellent travail. Le plan tient compte de l'équité, des thèmes, des échéances, et il permet à tout le monde de participer, d'inviter la personne choisie par son parti à venir témoigner sur tel ou tel thème. Nous allons donc vous le faire parvenir une fois qu'il sera traduit.
Madame Hoeppner.