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AAND Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS AND NORTHERN DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES ET DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 29 avril 1998

• 1538

[Français]

Le président (M. Guy St-Julien (Abitibi, Lib.)): Nous allons commencer la réunion.

Voici l'ordre du jour:

    ORDONNÉ,-Que le projet de loi C-39, Loi modifiant la Loi sur le Nunavut et la Loi constitutionnelle de 1867, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.

(Extrait des Journaux de la Chambre des communes du mardi 28 avril 1998)

Nous étudions l'article 1.

Nous recevons aujourd'hui plusieurs groupes: le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien; le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest; le Nunavut Tunngavik Inc.; le Grand Conseil des Cris du Québec (Eeyou Istchee); et Inuit Tapirisat of Canada.

Est-ce que vous avez une déclaration d'ouverture, monsieur Binda?

Vous avez cinq minutes. Étant donné que les députés ont plusieurs rencontres ce soir, je pense qu'on pourrait s'en tenir à une déclaration de cinq minutes et une période de questions de 15 minutes pour chaque groupe.

Madame Tanguay.

[Traduction]

Mme Judy Tanguay (directrice de la Politique et de la planification, Secrétariat du Nunavut, Programme du Nord, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Je m'appelle Judy Tanguay et je suis directrice de la Politique et de la planification au Secrétariat du Nunavut, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Nous sommes heureux de pouvoir nous présenter devant le comité pour parler du projet de loi C-39, Loi modifiant la Loi sur le Nunavut et la Loi constitutionnelle de 1867.

J'aimerais vous présenter les fonctionnaires du ministère qui m'accompagnent: M. John Merritt, conseiller principal et M. Gilles Binda, conseiller principal en matière de politiques. Mme Mary Douglas, conseillère juridique du ministère de la Justice est aussi présente.

Nous aimerions commencer par quelques observations préliminaires sur deux points relatifs au projet de loi, soit le contexte politique de son élaboration et les principales dispositions qui y sont contenues. Je vais commencer notre présentation en anglais et M. Binda suivra avec des commentaires en français.

• 1540

La Loi sur le Nunavut a été adoptée en 1993. Elle était associée à un projet de loi ratifiant l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. L'adoption de la Loi sur le Nunavut faisait suite à un engagement pris par la Couronne et énoncé à l'article 4 de l'Accord sur les revendications territoriales concernant la création du Nunavut.

Cet engagement avait été élaboré dans un Accord politique sur le Nunavut, lequel a été signé le 30 octobre 1992. Depuis l'adoption de la Loi sur le Nunavut en 1993, un certain nombre de dispositions de cette loi ont été mises à exécution, en particulier celles qui ont trait à la désignation et aux fonctions du Commissaire à l'établissement du Nunavut et du Commissaire provisoire du Nunavut.

La plupart des dispositions de la Loi sur le Nunavut n'entreront en vigueur que le 1er avril 1999, date de l'établissement officiel du nouveau Territoire du Nunavut et de son gouvernement.

La Commission d'établissement du Nunavut a été créée à la fin de 1993, avec le mandat de conseiller le gouvernement du Canada, le gouvernement des Territoires du Nord-ouest et la Nunavut Tunngavik Inc. quant au projet d'établissement du Nunavut. Depuis sa création, la Commission a présenté deux rapports globaux intitulés L'empreinte de nos pas dans la neige fraîche (volumes 1 et 2), et une douzaine de rapports portant sur des sujets particuliers.

Dès le départ, la Commission a indiqué qu'il serait souhaitable de prendre une série de mesures législatives pour faciliter la transition vers l'établissement du Nunavut. Les principales mesures proposées étaient les suivantes: modifier la Loi sur le Nunavut pour permettre l'organisation et la tenue des premières élections à l'Assemblée législative du Nunavut 1999 avant le 1er avril 1999; modifier la Loi sur le Nunavut pour établir une plus grande certitude juridique quant au maintien des lois des Territoires du Nord-Ouest au Nunavut, surtout en ce qui a trait aux éléments produits en vertu d'une loi (comme les permis de conduire ou les conventions collectives) mais sans être inscrits dans la loi; modifier la Constitution pour y faire mention de la représentation du Nunavut au Sénat et à la Chambre des communes.

Le projet de loi dont est saisi le comité contient des dispositions qui font suite aux principales recommandations de la Commission d'établissement du Nunavut en matière législative. Le projet de loi contient aussi des dispositions découlant des consultations menées pendant sa rédaction, incluant certaines dispositions faisant écho à des orientations préconisées par le gouvernement fédéral.

Le processus de consultation, qui a débuté en 1996, a donné lieu à plus d'une vingtaine de réunions, dont quelques-unes sous forme de téléconférences. Les participants au processus de consultation étaient des représentants du gouvernement du Canada, du gouvernement des Territoires du Nord-ouest, de la Nunavut Tunngavik Inc., de la Commission d'établissement du Nunavut et, plus récemment, du Bureau du Commissaire provisoire du Nunavut. Il y a eu, également, échange d'informations avec d'autres groupes, dont des syndicats et des associations professionnelles des Territoires du Nord-Ouest.

Gilles.

[Français]

M. Gilles Binda (conseiller principal en matière de politique, Secrétariat du Nunavut, Programme du Nord, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Voici un bref résumé des principales dispositions du projet de loi.

La partie 1 propose des modifications à la Loi sur le Nunavut aux fins suivantes:

a) préciser qu'en général, les lois initiales du Nunavut reproduiront les lois des Territoires du Nord-Ouest, sous réserve de certaines exceptions;

b) établir clairement qu'à l'instar des lois, les organismes publics et les fonctions publiques du Nunavut créés en vertu des lois seront identiques à ceux des Territoires du Nord-Ouest, là encore à quelques exceptions près;

c) maintenir au Nunavut tous les droits acquis en vertu des lois des Territoires du Nord-Ouest avant la création du Nunavut;

d) attribuer au gouvernement du Nunavut les baux passés par le gouvernement fédéral pour les bureaux et locaux du Nunavut;

e) préciser les pouvoirs du commissaire provisoire du Nunavut, notamment en ce qui concerne les ententes intergouvernementales touchant au partage de l'actif et du passif et à l'attribution de contrats à des intervenants du secteur privé;

f) donner au gouverneur en conseil, en l'absence d'entente entre le commissaire provisoire et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest sur le partage de l'actif et du passif, le pouvoir de transférer au gouvernement du Nunavut la propriété des biens autres que les biens immobiliers et le pouvoir de mettre fin à des contrats entre le gouvernement fédéral et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest pour ainsi permettre la négociation de nouveaux contrats pour chacun des territoires;

g) permettre que les premières élections à l'Assemblée législative du Nunavut soient tenues avant la création du nouveau territoire, de telle sorte que la législature puisse commencer à fonctionner dès le moment de l'établissement du Nunavut;

• 1545

h) reconduire pour le Nunavut les conventions collectives conclues par le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest avec les représentants des travailleurs du secteur public du territoire maintenant appelé Nunavut et préciser de quelle façon seront traitées les questions pendantes soumises aux entités administratives avant la création du Nunavut;

j) établir clairement que les tribunaux des Territoires du Nord-Ouest ont toujours compétence pour statuer sur certaines questions dont l'étude a été entreprise avant la création du Nunavut.

Dans la partie 1 du projet de loi, il est également proposé de réduire de 15 à 14 le nombre minimum de représentants à l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest puisqu'il restera probablement 14 membres immédiatement après la création du Nunavut. Un certain nombre de modifications corrélatives sont aussi contenues dans ce projet de loi.

Dans la partie 2 du projet de loi, il est proposé de modifier la Loi constitutionnelle de 1867 pour tenir compte de la représentation nécessaire du Nunavut au Sénat et à la Chambre des communes. Une modification semblable a été faite en 1975 pour assurer la représentation du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest au Parlement.

Merci de nous avoir permis de présenter cet exposé aujourd'hui. Nous serons heureux de répondre à vos remarques et à vos questions le cas échéant.

Le président: Merci, madame Tanguay et monsieur Binda.

Nous allons passer immédiatement à la période des questions.

Monsieur Konrad, s'il vous plaît.

[Traduction]

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Merci, monsieur le président.

Avant de commencer, je tiens à vous remercier de vous être déplacés et à vous féliciter pour ce que vous faites, même si le Parti réformiste se pose de sérieuses questions à tout ce sujet. Par exemple, nous sommes préoccupés par le peu de temps qui nous est accordé pour examiner ce projet de loi. Étant donné l'ampleur de ce que nous sommes en train de créer, je trouve qu'on aurait dû vous accorder plus de temps pour faire vos exposés. Il y a 22 questions pour le MAINC seulement.

Vous avez parlé de vastes consultations, mais la communauté autochtone a-t-elle été consultée? Je sais, par exemple, que des non autochtones ont été consultés. À la Chambre, quelqu'un a dit qu'on avait déjà créé un gouvernement Inuit, là-bas. Est-ce la façon dont vous voyez les choses?

M. John Merritt (conseiller principal, Secrétariat du Nunavut, Programme du Nord, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Pour commencer par répondre à votre dernière question, sachez que le Nunavut sera un gouvernement public. Tous les résidents auront le droit de briguer les suffrages et de participer à son élection.

Quant aux consultations, elles ont presque essentiellement consisté en discussions avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et la Nunavut Tunngavik. Comme vous le savez sans doute, l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut est assorti de l'obligation de consulter les résidents représentés par la Nunavut Tunngavik, surtout en ce qui concerne les questions législatives liées à la mise en oeuvre de cet accord. En 1992, comme l'a, je crois, mentionné Mme Tanguay dans ses remarques liminaires, le gouvernement du Canada a conclu un accord politique l'engageant à tenir des consultations poussées avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et la Nunavut Tunngavik.

Il y a eu d'autres occasions, quoique moins structurées que celles-ci, de recueillir l'opinion d'autres groupes, notamment des syndicats et des associations professionnelles. Il y a eu également des échanges assez poussés avec les membres de la communauté juridique. Le Bureau du commissaire provisoire a organisé une importante conférence juridique l'année dernière à Iqaluit, à l'occasion de laquelle il a été possible de recueillir le point de vue des juges, des avocats de l'aide juridique, des techniciens parajuridiques et de représentants d'autres groupes assimilés.

M. Derrek Konrad: S'est-on majoritairement entendu, à l'occasion de ces consultations, sur le fait que ce projet de loi constitue bel et bien la voie à suivre?

M. John Merritt: Nous n'avons pas effectué de sondage, et nous ne pourrions donc pas vous citer de données chiffrées, mais nous sommes convaincus que ce projet de loi fait l'objet d'un important appui parmi la population et parmi les responsables.

M. Derrek Konrad: Très bien. J'ai ici des pages et des pages de notes sur la nomination d'un nouveau sénateur pour le Nunavut, sujet sur lequel je pourrais beaucoup argumenter, même si je ne le maîtrise qu'à moitié. Pour l'essentiel, je dirais que le Parti réformiste, comme presque tout le monde le sait au Canada, estime qu'un Sénat selon la proposition des «trois E» serait un élément important de la vie politique du Canada, qui nous permettrait de réaliser un certain équilibre parlementaire. Que pensez-vous de notre point de vue, c'est-à-dire de faire élire votre sénateur?

• 1550

M. John Merritt: Honnêtement, tout ce que je peux vous dire à ce sujet, c'est que la question d'un Sénat élu est, de toute évidence, une très importante question politique. Or, ce projet de loi n'en traite pas et j'ai l'impression que c'est le genre de question dont les responsables élus devraient débattre entre eux. Comme vous le savez, ce projet de loi n'en traite pas vraiment.

M. Derrek Konrad: Je sais bien, mais nous nous sommes engagés à appuyer ce projet de loi à condition qu'on opte pour un Sénat élu, ce qui nous a amenés à proposer un amendement au projet de loi dans ce sens. Cette question va être importante pour nous.

Que se passe-t-il dans le cas de la Division de la NTPC, Northwest Territories Power Corporation?

M. John Merritt: Le gouvernement du Canada, Nunavut Tunngavik et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest ont tous trois jugé souhaitable de conserver une seule compagnie d'électricité dans la période qui suivra immédiatement la division du territoire, pour servir le Nunavut et la partie restante des Territoires du Nord-Ouest. C'est d'ailleurs cette formule qu'a recommandé la Commission d'établissement du Nunavut.

Des discussions sont en cours entre le Bureau du commissaire provisoire, qui représente le Nunavut, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et la NTPC, et bien que celle-ci n'ait encore donné lieu à aucune entente, notre ministère espère qu'elles déboucheront sur un accord.

À la façon dont la Loi sur le Nunavut est rédigée, il faudra, à un moment donné, que le gouvernement fédéral approuve un tel accord. Le ministère suit donc avec grand intérêt cette question et nous espérons qu'une entente sera prochainement conclue.

M. Derrek Konrad: Quels sont les autres sujets de préoccupation de nature transterritoriale? Je viens juste de parler de la Northwest Territories Power Corporation, mais y a-t-il d'autres sociétés qui soient concernées par la division? Sont-elles satisfaites? Que se passe-t-il du côté des ministères fédéraux qui vont devoir être divisés, comme ceux assurant les services sociaux ou les services juridiques; que se passe-t-il dans le cas des autres domaines d'activité qui vont devoir être divisés? Étant donné qu'il ne reste plus qu'une année avant que le Territoire soit officiellement reconnu, que se passe-t-il de ce côté-là?

M. John Merritt: Comme l'a dit Mme Tanguay dans ses remarques liminaires, plusieurs dispositions de la loi de 1993 ont déjà été mises à exécution, notamment en ce qui a trait à la création de la Commission d'établissement du Nunavut. Dans deux rapports exhaustifs qu'elle a publiés en 1995 et 1996, cette commission recommande l'adoption d'un certain modèle de gouvernement.

Les trois parties concernées, c'est-à-dire le gouvernement du Canada, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et Nunavut Tunngavik se sont entendus sur ce modèle et notre ministre a demandé au commissaire provisoire du Nunavut, dans une lettre d'orientation, de structurer le gouvernement suivant le modèle en question. Notamment, le nombre de ministères seraient inférieur à celui du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, car la structure proposée est un peu plus simple.

On a déjà commencé à recruter les premiers sous-ministres de cette future fonction publique. On vient d'entreprendre un ambitieux programme de formation pour les futurs fonctionnaires, auquel participeront jusqu'à 600 Inuit.

M. Derrek Konrad: Permettez-moi de vous interrompre...

Le président: Nous n'avons pas le temps. Je vous remercie beaucoup.

[Français]

Monsieur Fournier.

M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Ma question s'adresse aux fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

J'aimerais savoir où on est la négociation sur le contentieux entre le gouvernement du Québec et Ottawa au sujet des îles Belcher et des eaux entourant le Nunavik, le long du Québec. Est-ce qu'il y a un accord avec les Cris, par exemple, en ce qui concerne cette entente entre le Canada et le Québec sur les îles Belcher?

• 1555

[Traduction]

M. John Merritt: Pendant la négociation de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, qui a finalement été signé en mai 1993, il y a eu énormément de discussions avec la Makivik Corporation représentant les Inuit du nord du Québec, au sujet des îles et de la région marine au large du Nunavik. Ces négociations ont donné lieu à un chapitre, dans l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, énonçant les droits spéciaux des Inuit du nord du Québec sur les diverses îles et les régions marines qui, sinon, auraient été incluses dans la région visée par le règlement des revendications territoriales. Ce chapitre de l'accord couvre non seulement des aspects comme les droits de chasse, mais aussi des questions comme la propriété foncière dans certaines régions d'îles communes ainsi que la participation des Inuit du nord du Québec à certains processus de gestion, notamment sur le plan de l'environnement, dans le Nunavut.

Donc, pour répondre à votre question, je dirais que l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, en 1993, porte effectivement sur les droits des Inuit du nord du Québec et cet accord a reçu l'appui de Makivik, au nom des Inuit du Nunavik.

[Français]

M. Ghislain Fournier: Est-ce que je peux poser une autre question?

Le président: Je m'excuse, mais la cloche sonne. Nous avons vérifié pour la question du quorum. C'est la mention pour les députés. Allez-y, monsieur Fournier. Il reste deux minutes.

M. Ghislain Fournier: Merci. Lors de la rédaction du projet de loi C-39, avez-vous fait beaucoup de consultations? Est-ce que vous avez consulté des groupes ou des organismes? J'aimerais savoir s'il y a des groupes inuits qui sont moins favorables au projet de loi C-39 ou à la création du Nunavut. Est-ce qu'il y en a qui sont réticents devant ce projet de loi?

[Traduction]

M. John Merritt: À ce que je sache, aucun organisme représentant des Inuit ne s'est opposé ni à la création du Nunavut ni aux réformes envisagées dans le projet de loi.

[Français]

M. Ghislain Fournier: Est-ce que vous avez fait des consultations sérieuses auprès des groupes? Est-ce qu'on a inscrit des recommandations de ces groupes dans le projet de loi? Ces consultations vous ont-elles amenés à modifier le projet de loi C-39?

[Traduction]

M. John Merritt: Je vais commencer par répondre à votre dernière question. Ce projet est l'aboutissement d'une consultation très large. Je peux donc vous répondre par l'affirmative: le projet a effectivement été modifié pour essayer de tenir compte des nombreux points de vue soulevés au cours de la consultation.

D'une façon générale, je dirais que tout le projet de création du Nunavut est, dans une certaine mesure, le résultat d'un processus de revendication territoriale ayant lui-même porté sur des négociations qui se sont étalées sur plus de 20 ans. La Loi du Nunavut de 1993 est le produit d'intenses consultations avec les Inuit, à l'époque, maintenant représentés par la Nunavut Tunngavik, organisme ayant officiellement pour mandat de représenter le Nunavut dans les différentes questions touchant aux revendications territoriales; je dois ajouter que le Ministère a placé cette loi à l'avant scène de tous les efforts de consultation qu'il a lui-même déployés.

La dernière fois que j'ai fait le point à ce sujet, j'ai constaté que, depuis 1996, nous avons tenu 26 réunions, en personne ou par téléconférences, avec les représentants du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et de la Nunavut Tunngavik à propos de ce projet de loi.

Je terminerai en précisant qu'une grande partie de ce projet de loi reflète les recommandations formulées par la Commission d'établissement du Nunavut, elle-même composée de personnes nommées par Nunavut Tunngavik ainsi que par le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, en plus des personnes nommées par le gouvernement fédéral.

[Français]

M. Ghislain Fournier: Il y a quelque chose qui m'intrigue dans votre réponse. Je ne dis pas qu'elle n'est pas bonne, mais il y a quand même quelque chose qui me chatouille. Si je vous demandais si le projet de loi C-39 est nécessaire et si les modifications sont bonnes, vous me répondriez sûrement que c'est le cas, mais pourquoi a-t-on attendu aussi longtemps? Vous parlez de 20 ans. Il y a des Inuits qui parlent de cinq ans. Pourquoi est-ce aussi long? S'il est si important de modifier la loi aujourd'hui, pourquoi a-t-on attendu aussi longtemps?

• 1600

[Traduction]

M. John Merritt: Il est important, je crois, de préciser ici que ce projet de loi était destiné à régler certains des problèmes que posait la loi en 1993. Donc, ce n'est que dans le sillage de la loi de 1993 qu'on a senti la nécessité d'apporter ces modifications.

En outre, la Loi du Nunavut de 1993 prévoyait une procédure selon laquelle on se livrerait à un examen beaucoup plus détaillé de tout ce qui allait toucher à l'établissement du Territoire. Comme vous le savez, on a repoussé à 1999 la création du gouvernement ce qui a permis, en 1993, de se rendre compte qu'on disposerait de six ans pour mieux planifier la mise en place de ce gouvernement.

Tout s'est déroulé comme on l'avait envisagé dans la Loi sur le Nunavut. On a d'abord créé la Commission d'établissement du Nunavut qui a produit des rapports complets et détaillés. Elle a notamment recommandé l'adoption de certaines mesures législatives, ce à quoi le gouvernement du Canada s'est efforcé de répondre le plus favorablement possible.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Fournier. Merci, monsieur Merritt.

Monsieur Keddy, vous avez cinq minutes.

[Traduction]

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Merci, monsieur le président.

Après avoir lu votre mémoire, je me dois de vous poser une question. Vous dites:

    Mon dernier commentaire au sujet des modifications apportées à la Constitution du Canada pour tenir compte du Nunavut concerne l'inquiétude, soulevée dans certains cercles, que la Loi sur le Nunavut de 1993 soit constitutionnellement invalide parce qu'elle introduit une province par la porte de service.

Pourquoi mentionnez-vous cela? Qu'est-ce que cela signifie? Je ne comprends pas.

M. John Merritt: Je pense que vous citez le texte d'un autre groupe.

M. Gerald Keddy: Ah bon? Eh bien, je lui poserai la question alors. Je ne comprends pas. Quoi qu'il en soit, si tel est le cas, il faudra bien que quelqu'un s'en explique.

Bon, revenons-en à ce dont nous discutions, c'est-à-dire le Bureau du commissaire provisoire. Plusieurs nous ont dit que le nouveau Territoire du Nunavut ne verrait pas le jour dans le délai fixé de 1999. Nous apprenons maintenant de la bouche du ministre et des représentants du ministère que toutes les infrastructures ne seront peut-être pas construites, mais qu'on pourra tout de même respecter l'échéance du 1er avril 1999.

Il y a cependant lieu de s'inquiéter. Au cours des deux ou trois derniers jours, j'ai vu que des médecins, des avocats, des infirmiers et des employés administratifs font paraître des annonces dans les journaux. Personnellement, j'avais cru comprendre qu'un grand nombre d'employés excédentaires du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest pourraient se retrouver automatiquement à la tête des opérations de ce qui est actuellement l'est de l'Arctique et qui va devenir le Nunavut. J'avais cru comprendre qu'on transférerait le plus grand nombre possible de ces gens-là.

À l'époque, certains avaient exprimé la crainte au ministre que, sauf si l'on accordait une rallonge budgétaire au gouvernement des T.N.-O., celui-ci n'aurait pas les fonds nécessaires pour conserver les employés en question. J'aimerais savoir si tel est le cas.

M. John Merritt: Tout d'abord, il faut savoir que la création du Nunavut passe par le recrutement de tout un personnel administratif dont une grande partie, pour ne pas dire la majorité, est déjà en place dans les régions et les collectivités du Nunavut et est actuellement employée par le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. Ces personnes conserveront leur poste. Elles seront simplement transférées dans les effectifs du gouvernement du Nunavut.

Pour l'instant, on est en train de rechercher les futurs employés qui travailleront au sein des différents ministères centraux, en plus des effectifs régionaux et locaux. Comme je l'ai dit tout à l'heure, le recrutement a déjà commencé par les cadres supérieurs. Nous prévoyons que le recrutement sera terminé le 1er avril 1999.

Selon moi, personne ne s'attend à ce que le gouvernement du Nunavut fasse tout, tout seul, dès le premier jour. Il est prévu, en revanche, de maintenir certaines institutions communes, comme la NTPC et la Commission des accidents du travail.

• 1605

On est aussi conscient, et cela est d'ailleurs prévu dans la répartition des pouvoirs établis dans la Loi sur le Nunavut, que certains programmes et services seront en partie assurés à contrat par des instances voisines. De toute évidence, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest serait tout à fait compétent pour offrir ce genre de services au gouvernement naissant du Nunavut.

À plus long terme, il est évident qu'on tendra vers les objectifs énoncés, mais force est de reconnaître que tout ne sera pas en place le 1er avril 1999. Tout le monde veut assurer une transition en douceur, jusqu'au 1er avril mais aussi par la suite.

M. Gerald Keddy: Pouvez-vous nous dire, du moins d'après ce que vous savez, combien il reste de postes à combler? Donnez-moi un pourcentage, pas des chiffres.

M. John Merritt: Pour le moment—et mes collègues pourront me corriger si je me trompe—, je dirais que 25 à 30 p. 100 des postes dans les administration centrales ont été comblés. L'effectif complet pour les administrations centrales du gouvernement du Nunavut, d'après le modèle approuvé, se situe entre 600 et 700 employés.

Il y a forcément un compromis à faire. D'un côté, on sent la pression pour engager le plus grand nombre d'employés possible afin qu'ils aient le temps de découvrir ce qu'on attend d'eux. D'un autre côté, il y a les arguments en faveur de l'efficacité et de la rentabilité, selon lesquels il faudrait recruter le gros des employés le plus près possible de la date de naissance du Nunavut. C'est pour cela qu'on jongle un peu.

Il ne faut pas non plus négliger le fait qu'il faut beaucoup de temps pour trouver les gens qui conviennent et, au cours des 11 prochains moins, le Bureau du commissaire de district va consacrer la quasi-totalité de ses énergies à trouver les personnes convenant aux postes à combler.

Le président: Merci, monsieur Keddy.

Monsieur Finlay.

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Merci, monsieur le président.

C'est sympathique de vous accueillir ici. La dernière fois que nous nous sommes vus, c'était à Iqaluit. Vous voyez, nous avons une agréable température printanière alors que, si je me rappelle bien, à Iqaluit, c'était plutôt tonifiant et le fond de l'air était frais.

J'ai été emballé de pouvoir participer à une réunion du Comité d'établissement de la Nunavut Tunngavik, aux côtés du ministre, alors qu'on en était à peu près à mi-chemin par rapport à la situation d'aujourd'hui.

Je me rappelle une idée très intéressante qui circulait alors, monsieur Merritt. J'en ai cherché la trace dans le projet de loi, aux articles 13 et 14, concernant l'Assemblée législative du Nunavut. On envisageait, à l'époque, d'avoir une double représentation dans chaque circonscription législative: un homme et une femme, côte à côte. Cette formule aurait permis de réaliser un parfait équilibre des sexes à l'assemblée législative.

Cette idée a-t-elle encore court; la considère-t-on encore comme valable ou l'a-t-on remplacée? Je trouvais que c'était une façon plutôt unique et admirable de veiller à ce que les questions féminines, les questions intéressant celles qui élèvent nos enfants, soient prises en compte dans les assemblées du Nunavut.

M. John Merritt: Vous ne trouverez pas cette idée dans le projet de loi. Je vais vous dire ce qui s'est passé. Cette idée avait été formulée par la Commission d'établissement du Nunavut comme étant un moyen de constituer, dans ce nouveau Territoire, une assemblée qui serait différente de celles des autres parties du pays et même du monde. On s'était appuyé pour cela sur un document de recherche plutôt exhaustif indiquant que des formules semblables avaient été proposées dans d'autres pays.

Cette idée a donné lieu à des débats animés lors de plusieurs réunions publiques et tribunes radiotélévisées. Finalement, on a tenu un plébiscite à son sujet. Malgré des écarts d'une collectivité à l'autre, la population s'est généralement exprimée contre cette idée.

Elle n'a donc plus court en ce sens qu'elle a été évacuée des propositions dont vous êtes saisies. En revanche, l'Assemblée du Nunavut aura, plus tard, la possibilité d'en débattre à nouveau, si c'est ce que la population désire.

• 1610

M. John Finlay: Merci beaucoup.

Je vais vous poser une autre question, à peu près dans le même ordre d'idée, qui inspirée de votre document où l'on peut lire ceci:

    ... il est également proposé de réduire de 15 à 14 le nombre minimum de représentants à l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest puisqu'il restera probablement 14 membres immédiatement après la création du Nunavut.

Si je calcule bien, cela veut dire qu'actuellement le Territoire du Nunavut n'est représenté que par un député à Yellowknife.

M. John Merritt: Notre idée n'a peut-être pas été bien exprimée. En 1999, les députés du Nunavut qui siègent actuellement à l'assemblée des T.N.-O. démissionneront. Cela étant, il faut modifier le nombre minimum de députés pour s'assurer que les représentants des régions des Territoires du Nord-Ouest pourront continuer de former une assemblée, telle que le prévoit la loi.

Il y en a plus d'un pour l'instant. Je crois qu'il y a dix députés de la région de Nunavut qui siègent à l'assemblée des T.N.-O.

Il est possible que nous ne nous soyons pas clairement exprimés sur ce point.

M. John Finlay: Alors, ce chiffre représente-t-il le nombre de sièges avec lequel on va se retrouver?

M. John Merritt: Oui. Je dois préciser, par ailleurs, que cette mesure ne fige pas le nombre de sièges de l'assemblée des T.N.-O. L'intention visée est de veiller à ce qu'il y ait un nombre minimum de sièges à l'assemblée pour que celle-ci continue d'exister après la division.

M. John Finlay: Merci.

Le président: Merci, monsieur Finlay.

Monsieur Konrad.

M. Derrek Konrad: Nous en sommes à la deuxième série de questions. Voyons, quelle est la première question à laquelle je voulais obtenir réponse, tout à l'heure? Je ne m'en souviens pas. Je ne pensais pas que nous passerions tout de suite à une autre série de questions.

Je sais que ce n'est pas ce dont nous parlons, mais vous avez mentionné tout à l'heure un effectif de 600 à 700 fonctionnaires, dans la future administration du Nunavut. En vous entendant citer ce chiffre, il m'est venu une question intéressante à l'esprit. Quel rapport fonctionnaires-population cela donne-t-il par rapport aux autres instances au Canada? On se doit, je crois, de poser cette question au nom de tous ceux qui se soucient de reddition de compte.

M. John Merritt: Je n'ai pas cette proportion en tête. Je mettrais un bémol sur ce chiffre, car il s'agit des effectifs qui seront nécessaires dans les administrations centrales du Nunavut. Par ailleurs, on s'attend à ce que les effectifs de la fonction publique de ce qui restera des Territoires du Nord-Ouest seront moindres, car cette instance sera réduite. On est encore en train de débattre l'importance de la réduction des effectifs de la fonction publique, mais je crois que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest dispose d'un processus pour régler ce problème.

Le nombre de 600 à 700 employés de la fonction publique ne représente pas tout. Il ne concerne que le Territoire du Nunavut.

Tout cela aura pour effet de créer des emplois dans l'est de l'Arctique et d'en supprimer dans le Mackenzie, si bien que ce nombre de 600 à 700 personnes ne traduit pas le changement global et définitif qui caractérisera les effectifs de la fonction publique.

[Français]

Le président: Je m'excuse. J'avais dit au début de la séance qu'on ne ferait qu'un tour. J'ai pris vite ma décision. M. Konrad a été surpris. Je lisais mes notes et je lui ai donné la parole. On s'était entendus pour faire un seul tour vu qu'on rencontre plusieurs témoins aujourd'hui. Je m'excuse. Vous avez eu la chance de poser une question de plus que tous les autres. On va devoir passer à un autre groupe.

Je tiens à vous remercier de votre présence aujourd'hui. Les fonctionnaires peuvent rester ici au cas où des groupes voudraient leur poser des questions. Merci.

Nous entendrons maintenant le groupe du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, représenté par M. Arlooktoo, vice-premier ministre, ministre de la Justice et responsable pour le Nunavut, et M. Alastair Campbell, conseiller.

• 1615

Bonjour, monsieur Arlooktoo et monsieur Campbell.

[Traduction]

Vous avez cinq minutes. Merci beaucoup.

M. Goo Arlooktoo (vice-premier ministre, ministre de la Justice et responsable pour le Nunavut, gouvernement des Territoires du Nord-Ouest): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis à la fois heureux et honoré de comparaître devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord au sujet du projet de loi C-39, loi modifiant la Loi sur le Nunavut et la Loi constitutionnelle de 1867.

Je m'appelle Goo Arlooktoo. Je suis vice-premier ministre du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et ministre responsable de la planification de la transition au Nunavut. Je suis accompagné de M. Alastair Campbell, conseiller auprès de notre Secrétariat de division.

Je suis un des dix députés de l'assemblée législative actuelle venant de la région du Nunavut. Pour la petite histoire, je représente la circonscription de Baffin Sud, composée de trois collectivités: Cape Dorset et Kimmirut, dans le sud de l'île de Baffin, et Sanikiluaq, sur les îles Belcher, dans la Baie d'Hudson.

Nous sommes dans la dernière année qui nous sépare de la subdivision des T.N.-O. en deux territoires: le Nunavut et le Territoire de l'Ouest. La création du Nunavut sera la concrétisation d'une des aspirations les plus fondamentales des résidents de l'est et du centre de l'Arctique. Cet objectif a d'abord été énoncé par l'organisation Inuit nationale, Inuit Tapirisat du Canada, au milieu des années 70. Puis, il a été entériné par le gouvernement du Canada dans l'article 4 de l'Accord des revendications territoriales Nunavut et de l'Accord politique sur le Nunavut de 1992, de même que dans l'application de la Loi sur le Nunavut de 1993.

Le but que s'étaient fixé les résidents du Nunavut a été accepté par la population des T.N.-O. La création du Nunavut est l'aboutissement d'un processus de consultation et de recherche de consensus qui est quasiment sans égal dans le monde. Ce processus a d'ailleurs donné lieu à pas moins quatre de plébiscites. En 1992, la majorité des électeurs des T.N.-O. se sont prononcés en faveur du principe de la division. En 1992, une majorité des mêmes électeurs appuyait les frontières proposées entre le Nunavut et le Territoire de l'Ouest et, en 1996, une majorité d'électeurs choisissait Iqaluit comme capitale du futur Territoire du Nunavut. En 1997, une majorité d'électeurs, une nouvelle fois, décidait de la constitution de l'Assemblée législative du Nunavut. Je parle ici de la représentation équitable des deux sexes dont il a été question il y a un instant. De plus, l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, élément essentiel de tout ce processus, a été avalisé par la majorité des électeurs Inuit en 1992.

Nous avons toujours imaginé que le Nunavut serait dirigé par un gouvernement public et démocratique, mais la Loi sur le Nunavut de 1993 comporte un défaut majeur. En effet, elle prévoit un décalage entre son entrée en vigueur et la tenue de la première élection dans le Nunavut, car les brefs d'élection ne pourront être émis qu'après l'entrée en vigueur des principaux articles de la loi.

Un certain temps doit forcément s'écouler entre l'émission des brefs d'élection, la tenue des élections et la convocation de la première Assemblée législative du Nunavut. Ainsi, dans le meilleur des cas, le Nunavut pourrait se retrouver sans gouvernement démocratiquement élu pendant deux mois et demi, et cette période pourrait atteindre quatre mois.

Qui donc gouvernera le Nunavut pendant ce temps-là? Seul le commissaire est investi du pouvoir légal pour ce faire, mais ce serait faire machine arrière de façon non démocratique, à l'occasion de l'abolition du gouvernement territorial, que de placer le gouvernement du nouveau territoire, dans ses premiers jours, sous la houlette d'un officiel nommé. Dans les T.N.-O., nous n'avons une assemblée législative pleinement élue que depuis 1975 et un gouvernement responsable que depuis 1985. Nous nous devons de protéger et d'entretenir cette jeune tradition dès les premiers instants de vie du Nunavut.

Deuxièmement, il y a la question de la représentation à la Chambre des communes et au Sénat qui n'a pas, non plus, été réglée en 1993. Ce projet de loi permettra d'attribuer au Nunavut l'un des deux sièges des T.N.-O. et de créer un siège au Sénat. Les limites des circonscriptions électorales de l'ouest de l'Arctique et du Nunavut ont déjà été redéfinies pour correspondre avec la frontière entre le Nunavut et les T.N.-O., avant la dernière élection fédérale.

• 1620

Nous estimons que la représentation au Sénat est importante, car elle permettra de confirmer la place du Nunavut au sein d'une institution nationale existante et en tant que participant à la Confédération.

Certaines autres modifications de nature technique sont également souhaitables. Tel qu'il se présente actuellement, le projet de loi laisse planer une relative incertitude quant à la façon dont certaines questions seront réglées après la création du Nunavut. Par exemple, qu'adviendra-t-il des poursuites juridiques déjà entreprises? Les licences, permis et autres autorisations émises par le gouvernement du Nunavut demeureront-ils valables? L'incertitude juridique qui plane sur ces questions et d'autres pourraient avoir une incidence marquée sur la période de transition.

Les T.N.-O. ont activement participé à la formulation de ces amendements. Nous avons également collaboré avec le gouvernement fédéral, Nunavut Tunngavik, la Commission d'établissement du Nunavut et le Bureau du commissaire provisoire. Quoi qu'il en soit, ce projet de loi a été rédigé par le gouvernement fédéral et il constitue un compromis. Certaines de ses parties auraient pu être modifiées différemment et le gouvernement fédéral sait quelles préoccupations nous entretenons à cet égard. Nous comptons sur la coopération du gouvernement fédéral pour résoudre toutes les questions qui pourraient se poser pendant la transition.

En conclusion, monsieur le président, j'insisterais sur la nécessité d'adopter rapidement ce projet de loi.

À peine 336 jours nous séparent du 1er avril 1999. La période de transition représente un travail énorme. Pour progresser normalement, nous devons connaître l'environnement juridique dans lequel nous évoluons. Par exemple, le gouvernement des T.N.-O. va, d'ici l'an prochain, appliquer plusieurs mesures législatives portant uniquement sur la division du territoire. Nos rédacteurs doivent connaître le droit fédéral et les bases juridiques en fonction desquelles nous exerçons notre autorité territoriale.

Par ailleurs, nous devons être investis d'un pouvoir légal clair pour commencer à organiser la première élection dans le Nunavut. Il nous faudra, notamment, recruter et former les directeurs de scrutin, les agents de recensement et ainsi de suite. Une élection ordonnée exige des mois de préparation.

Monsieur le président, il y a 100 ans, le Yukon était formé après une première division des T.N.-O., et il y a 50 ans, Terre-Neuve entrait dans la Confédération. La création du Nunavut va marquer le premier grand changement apporté à la carte du Canada depuis lors. Pour le peuple du Nunavut, ce sera là un événement monumental, que tous les Canadiens et toutes les Canadiennes devraient célébrer.

En conclusion, je tiens à féliciter la ministre Stewart pour la collaboration qu'elle nous a apportée et pour avoir fait une priorité de ce projet de loi. Je vous exhorte tous et toutes à faire votre part pour contribuer à la naissance du Nunavut en accélérant l'adoption de ce projet de loi.

Merci, monsieur le président.

[Français]

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Vous êtes mon voisin au nord de l'Abitibi. Je suis un des rares députés en haut du 60e parallèle et je ne savais pas que vous étiez mon voisin. C'est un honneur pour moi de vous recevoir.

Monsieur Konrad.

[Traduction]

M. Derrek Konrad: Merci, monsieur le président.

Merci, monsieur Arlooktoo, pour votre exposé.

J'ai écouté avec intérêt ce que vous avez dit à propos de la nécessité du Nunavut d'être représenté à Ottawa, en tant que membre à part entière de la Confédération. Vous avez également parlé de la représentation au Sénat. Dans vos délibérations, avez-vous envisagé de faire élire votre sénateur?

M. Goo Arlooktoo: Merci. En un mot comme en cent: non! Nous nous sommes simplement mis comme priorité d'obtenir un siège au Sénat. Nous savons que l'avenir du Sénat est une question importante, mais nous n'avons pas discuté des divers aspects dont vous parliez plus tôt au sujet d'un Sénat élu et du reste. Donc, nous n'avons pas réfléchi à cet aspect.

M. Derrek Konrad: Cette idée vous gêne-t-elle?

M. Goo Arlooktoo: Comme je le disais tout à l'heure, la création du Nunavut exige la réalisation de centaines et de centaines de tâches. Nous devons établir des priorités quant à ce qu'il convient de faire tout de suite, dans les douze prochains mois. Or, l'élection d'un sénateur ne fait pas partie de ces priorités.

• 1625

M. Derrek Konrad: Je le comprends bien, étant donné que vous êtes surtout préoccupé par la création de votre territoire. Vous avez sans doute vos propres problèmes, car vous devrez vous faire réélire en plus de devoir mener ce projet à bon port. Je comprends tout à fait votre position.

Cependant, j'aurais une autre question à vous poser toujours à propos du Sénat. Accepteriez-vous que votre sénateur nommé soit appelé à être élu après la création du Nunavut, un peu comme l'Alberta envisage maintenant de le faire?

M. Goo Arlooktoo: Telles que les choses sont actuellement prévues, le Nunavut bénéficierait tout simplement d'un siège au Sénat. Le sénateur qui représente actuellement les Territoires du Nord-Ouest deviendrait donc notre sénateur. Je n'ai rien contre le fait de le faire élire par la suite, mais je ne vois aucune nécessité de se presser pour changer les choses.

M. Derrek Konrad: Très bien. Merci.

Me reste-t-il du temps?

Le président: Vous pouvez poser une autre question.

M. Derrek Konrad: Le gouvernement fédéral a le pouvoir de jouer les arbitres entre les deux territoires dans les questions pour lesquelles ils ne se seront pas entendus. Voyez-vous un problème au fait que le gouvernement fédéral soit appelé à intervenir et éventuellement à imposer un règlement?

M. Goo Arlooktoo: Comme je le disais, il y a de nombreuses questions à régler. Jusqu'ici, nous sommes parvenus à en régler la plupart. Mais il faut savoir que, dans un projet aussi complexe que la création d'un territoire comme le Nunavut, les deux parties concernées ne parviendront pas à s'entendre sur certains aspects et il est donc important de pouvoir se replier sur un mécanisme de règlement des différends.

Personnellement, je préférerais, et de loin, que nous parvenions à nous entendre entre nous, dans le Nord, pour régler les problèmes auxquels nous nous heurterons. Mais tant qu'à faire intervenir une tierce partie, autant que ce soit le gouvernement fédéral.

Le président: Merci, monsieur Konrad.

Monsieur Fournier.

[Français]

M. Ghislain Fournier: J'avais l'intention de poser deux questions, mais je pense que je vais en poser une autre à la suite de l'intervention de M. Konrad. Vous me reprendrez si j'ai mal compris.

J'ai vu dans le projet de loi qu'on parlait d'une première élection, mais je n'ai rien vu de spécifique sur les sénateurs. Je suis surpris. J'aimerais savoir si les sénateurs sont une priorité dans votre consultation et pourquoi.

J'ai compris que ce n'était pas votre priorité et j'en suis heureux. Si on me donnait le choix aujourd'hui dans mon milieu et si j'avais à constituer d'autres gouvernements, je ne parlerais pas d'abord des sénateurs; je parlerais d'un gouvernement démocratique. Je ne crois pas que les sénateurs soient leur priorité.

J'aimerais savoir si vous retardez cette chose. Est-ce qu'on élit un gouvernement strictement dans leur intérêt à eux?

[Traduction]

M. Goo Arlooktoo: Comme je l'ai dit, notre priorité est d'obtenir un siège au Sénat, de faire en sorte que le Nunavut soit représenté à la Chambre haute et qu'il puisse y faire entendre ses points de vue. Nous admettons que l'élection éventuelle des sénateurs ou la réforme du Sénat sont des questions très importantes dont il convient de débattre davantage, à la grandeur du pays. Nous désirons prendre part à ce débat, mais selon moi le temps n'est pas venu pour cela et ce projet de loi n'est pas la tribune pour ce faire.

• 1630

[Français]

M. Ghislain Fournier: Je comprends que vous vouliez être représentés au Sénat. Est-ce que votre sénateur sera élu ou non élu? Est-ce que vous allez le préciser dans votre projet de loi?

[Traduction]

M. Goo Arlooktoo: Monsieur le président, à la façon dont j'interprète ce projet de loi, celui-ci prévoit la création d'un siège de sénateur pour le Nunavut. Il existe pour l'instant un siège de sénateur pour les Territoires du Nord-Ouest et celui-ci serait subdivisé: l'un pour le Nunavut et l'autre pour l'ouest de l'Arctique.

Cela étant, l'actuel sénateur, M. Willie Adams, un Inuk de Nunavut, deviendrait le sénateur du Nunavut et il resterait à combler le siège du Territoire de l'Ouest.

[Français]

M. Ghislain Fournier: Nonobstant les sénateurs, pensez-vous qu'on s'est penché sur les principales inquiétudes dans ce projet de loi? À votre avis, y a-t-il des questions que le projet de loi n'aborde pas et qui devraient y figurer, ou si vous pensez que le projet de loi est complet? Avez-vous des recommandations qui n'ont pas été inscrites dans ce projet de loi ?

[Traduction]

M. Goo Arlooktoo: Comme je le disais, nous avons travaillé coude à coude avec le gouvernement fédéral sur ce projet de loi, et avec les grands groupes du Nord. Ce projet de loi a d'abord été rédigé par le gouvernement fédéral. Nous avons eu plusieurs échanges à son sujet à l'occasion desquels nous avons pu amener le gouvernement fédéral à apporter de nombreux changements. Donc, les choses ont changé sur ce plan et nous en sommes très contents. Bien sûr, il reste encore certains aspects secondaires sur lesquels nous divergeons d'opinion et pour lesquels nous souhaiterions, en ce qui nous concerne, voir quelques changements.

Dans l'ensemble, nous sommes heureux de constater qu'on a tenu compte de notre opinion, mais nous aurions souhaité que les choses se passent un peu différemment. Si le président le permet et si c'est ce que vous voulez, M. Campbell pourrait très rapidement vous exposer certaines de nos préoccupations.

M. Alastair Campbell (conseiller, gouvernement des Territoires du Nord-Ouest): Comme vous en doutez sûrement, quand des avocats représentant plusieurs parties s'assoient autour d'une table, ils perçoivent forcément les questions qui leur sont présentées de différentes façons et les discussions dans lesquelles ils s'engagent sont très complexes et ils s'efforcent, essentiellement, de parvenir à un compromis. Au-delà de cela, il incombe au gouvernement fédéral de faire adopter ce texte de loi et, à ce titre, il agit dans les limites des compétences qui sont les siennes.

Pour ce qui est des répercussions du projet de loi sur les Territoires du Nord-Ouest, sachez que nous aurions abordé différemment certaines parties de ce texte. En effet, nous avons craint que certains articles des premières versions de ce texte soient inapplicables. Nous avons fait valoir notre point de vue à cet égard et la plupart des aspects que nous avons soulevés ont fait l'objet de modifications. Certes, il demeure certains aspects que nous aurions traités différemment, mais ils ne sont pas assez importants à nos yeux pour vouloir bloquer le projet de loi. En cas de difficultés dans le processus de transition, nous nous attendons à ce que le gouvernement fédéral nous apporte sa collaboration pour estomper les problèmes.

Le président: Merci.

[Français]

Merci, monsieur Fournier.

Monsieur Keddy.

[Traduction]

M. Gerald Keddy: Merci, monsieur le président.

Je suis heureux de vous accueillir tous deux ici. Je ne sais si vous vous en souvenez, parce que cela remonte à pas mal de temps déjà, mais nous nous sommes parlés à Yellowknife.

J'ai bien écouté votre exposé et je tiens tout de suite à vous dire que je n'aborderai pas la question du Sénat, parce que votre texte est très clair à ce sujet. Il est évident qu'il y a plusieurs questions—des questions importantes—auxquelles il faut trouver réponse à propos de la formation d'un nouveau territoire au Canada, des questions qui ont préséance sur tout le reste, sur tout ce dont nous pourrons toujours reparler ensuite. Je n'en dirai pas plus à propos du Sénat.

• 1635

Vous dites que le commissaire provisoire pourrait être chargé de gouverner le nouveau Territoire du Nunavut pendant une période de quatre mois et demi. Cela étant, il y a une chose que vous n'avez pas précisée. Qui d'autre que le commissaire provisoire pourrait être chargé de gouverner le Territoire avant la tenue d'une élection et la nomination d'un gouvernement de plein titre? Laissez-vous entendre que le Territoire pourrait continuer de dépendre du gouvernement des T.N.-O. pendant ce temps là...

M. Goo Arlooktoo: Non, absolument pas. Des changements sont proposés et nous espérons qu'ils seront adoptés pour que nous puissions organiser une élection sans tarder et faire élire un gouvernement qui puisse tout de suite prendre les rênes du nouveau Territoire.

Sinon, nous pourrons compter sur le commissaire provisoire ou sur un commissaire qui sera chargé de gouverner le Territoire en attendant l'application complète de la loi, l'émission des brefs d'élection, l'assermentation du nouveau gouvernement et la convocation de la première assemblée législative. Tout cela nécessitera entre deux mois et demi et quatre mois.

Voilà les deux scénarios que nous envisageons. Le premier serait que ce projet de loi permette la tenue rapide d'une élection, et nous n'aurions plus alors à nous inquiéter de quoi que ce soit; le deuxième serait que le commissaire provisoire soit chargé du gouvernement du Territoire. Nous n'avons pas d'autre suggestion à formuler à cet égard.

M. Gerald Keddy: Si nous modifiions le projet de loi pour vous permettre cela ou si le gouvernement décidait d'avancer la date des élections, de combien faudrait-il avancer cette date pour permettre aux députés élus d'occuper leurs sièges dès le 1er avril 1999?

M. Goo Arlooktoo: L'assemblée actuelle—c'est-à-dire celle constituée par mes collègues et moi-même—sera maintenue jusqu'au 1er avril 1999. La modification au projet de loi permettrait la tenue d'élection en février 1999, pour que les députés puissent occuper leurs sièges dès le 1er avril, après la dissolution de la législature actuelle.

M. Gerald Keddy: Merci.

Le président: Monsieur Wilfert.

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je retiens essentiellement de votre position que vous cherchez à réaliser une transition qui soit la plus douce possible durant la période qui s'écoulera entre le 31 mars 1999 et la création du nouveau Territoire. Pourriez-vous me décrire à grands traits la nature de cette transition? J'ai un peu relu l'histoire de la formation du Yukon. Certes, à cette époque, la situation était très différente, notamment sur le plan démographique et sur celui des répercussions qu'a eu cette première division. Il est bien sûr question d'atténuer les effets du changement, mais en ce qui concerne les collectivités, les gens continueront de bénéficier des mêmes services qu'auparavant, de sorte qu'il n'y aura pas vraiment de changements à cet égard. En revanche, dès qu'on se demande à qui va revenir tel ou tel camion, telle ou telle propriété foncière... J'aimerais savoir quels rapports vous entretenez avec la Commission et j'aimerais savoir ce que va donner cette collaboration puisqu'il n'y a pas encore de gouvernement élu dans l'est de l'Arctique pour prendre éventuellement acte de vos décisions. Comment tout cela fonctionne-t-il?

• 1640

M. Goo Arlooktoo: À la façon dont fonctionne actuellement le gouvernement—et c'est ainsi depuis plusieurs mandats—, peu de temps après son élection, l'assemblée législative élit en son sein les ministres devant composer le cabinet. Il a été décidé de répartir également les portefeuilles entre le Nunavut, la région de l'Est et l'Arctique de l'ouest. Cette formule a permis d'équilibrer le gouvernement. Quatre membres du cabinet sont des résidents du Nunavut, et c'est ainsi depuis plusieurs années. Ce faisant, nous sommes certains que les décisions prises par le gouvernement sont relativement influencées par le Nunavut ou que le Nunavut a son mot à dire à leur sujet. Encore une fois, c'est ainsi depuis plusieurs années.

M. Bryon Wilfert: Parlant de l'établissement du nouveau Territoire, vous avez indiqué à plusieurs reprises, aujourd'hui, votre désir que le projet de loi soit adopté le plus rapidement possible. Pouvez-vous nous dire pourquoi précisément, outre que vous désirez rassurer la population quant à l'aboutissement de ce projet? En quoi cela vous aidera-t-il dans la transition?

M. Goo Arlooktoo: Comme je le disais, la création du Nunavut est un projet très complexe qui exige l'accomplissement de centaines et de centaines de tâches, la mise sur pied d'un gouvernement, la mise en place d'une fonction publique et ainsi de suite. Par ailleurs, de nombreux problèmes d'ordre technique et bureaucratique doivent être réglés; il y a aussi les aspects juridiques et il faut veiller à avoir un gouvernement élu en place.

L'adoption de ce projet de loi nous permettrait d'avoir les 19 députés nécessaires à la constitution du gouvernement du Nunavut. Ainsi, il n'y aurait plus d'incertitude relativement aux marchés publics, aux poursuites juridiques et autres. Si ce projet n'était pas adopté—mais je ne veux pas m'engager dans ce débat—, nous aurions des problèmes dans les douze prochains mois.

M. Bryon Wilfert: Merci.

Le président: Merci, monsieur Wilfert.

Monsieur Bryden.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Merci, monsieur le président.

Avez-vous été déçu par le texte originel de la Loi sur le Nunavut, tel qu'il a finalement été adopté? Avez-vous eu la chance de l'examiner avant cela? Je crains que de nombreuses anomalies ne soient pas réglées par le projet de loi C-39. Ne pensez-vous pas que nous aurions pu faire un meilleur travail la première fois?

M. Goo Arlooktoo: Il est difficile de répondre à cette question, de plus je n'étais pas là, à l'époque.

Tout cela nous rappelle à quel point l'exercice que nous avons entrepris est complexe et qu'à chaque tournant de la création de ce nouveau Territoire, nous nous retrouvons en terrain inconnu. Nous sommes en train de faire ce qui n'a pas été fait depuis 50 ans ou plus. Il est donc normal qu'on se heurte à des difficultés qui n'ont pas été réglées la première fois. On aurait sans doute pu mieux s'y prendre la première fois, mais tel n'a pas été le cas et nous en sommes où nous en sommes.

M. John Bryden: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Merci, monsieur le ministre. J'ai beaucoup aimé votre déclaration et vos commentaires.

[Français]

Nous entendront maintenant, du Nunavik Implementation Commission, M. John Amagoalik et M. Randy Ames.

• 1645

Monsieur Amagoalik, si vous avez une déclaration à faire, vous pouvez commencer. Il y aura ensuite une période de questions.

[Traduction]

M. John Amagoalik (commissaire en chef, Commission d'établissement du Nunavut): Merci, monsieur le président et merci beaucoup au comité de m'avoir invité à lui faire part de mon point de vue sur ce projet de loi.

Je m'appelle John Amagoalik et je suis président de la Commission. M. Randy Ames, chercheur pour le compte de la Commission, m'accompagne ici aujourd'hui.

Je pense que notre mandat et la façon dont nous avons été créés ont déjà été expliqués au comité, et je ne m'y attarderai pas. On vous a aussi parlé de nos deux rapports d'envergure—L'empreinte de nos pas dans la neige fraîche, volume 1 et volume 2—et de tous les autres rapports que nous avons déposés.

Dès le début, les commissaires se sont efforcés de formuler des conseils pratiques qui permettraient d'assurer une transition harmonieuse et ordonnée vers la création de Nunavut. Nous avons constaté avec plaisir que les trois parties en cause ont adopté nos recommandations de base sur la conception du gouvernement du Nunavut, notamment la taille de la fonction publique et le nombre de ministères.

Plusieurs autres recommandations ont aussi été bien accueillies, y compris celles qui préconisaient au Parlement de procéder à certaines modifications législatives.

Dans leur deuxième rapport exhaustif, les commissaires précisaient deux mesures législatives exigeant l'attention du Parlement: la première visait les modifications à apporter à la Loi sur le Nunavut de 1993, afin de mieux ordonner la transition et de rendre la vie initiale du Nunavut plus prévisible; la seconde visait les modifications à apporter à la Constitution du Canada, de sorte qu'elle reflète la réalité après le 31 mars 1999, alors que le Canada sera composé non plus de dix provinces et de deux territoires, mais de dix provinces et de trois territoires. Permettez-moi de commenter brièvement ces deux questions.

Pour ce qui concerne la modification de la Loi sur le Nunavut, les recommandations du deuxième rapport exhaustif étaient formulées comme suit:

    La Commission recommande que (...) un groupe de travail particulier soit constitué afin d'examiner le fond et la forme que pourraient prendre les mesures législatives permettant:

      1. de souligner la validité et de clarifier le statut, par rapport au Nunavut, des permis, licences et autres autorisations accordés en vertu des lois territoriales avant le 1er avril 1999, et de prévoir que la reconnaissance professionnelle et l'agrément des personnes agréées dans les T.N.-O. immédiatement avant le 1er avril 1999 demeurent valides au moins pour un certain temps au Nunavut;

      2. de stipuler que les personnes morales régissant une profession ou un métier à l'échelle des T.N.-O. avant le 1er avril 1999—par exemple le Barreau des Territoires du Nord-Ouest—conservent au moins provisoirement leurs attributions au Nunavut;

      3. d'énoncer des dispositions particulières pour les activités d'autres personnes morales créées en vertu des lois territoriales, notamment la Commission des accidents du travail et la Northwest Territories Power Corporation;

      4. au commissaire provisoire de reprendre à son compte, au nom du gouvernement du Nunavut, les devoirs et les avantages assignés au gouvernement des T.N.-O. dans les marchés (...) qu'il aura conclus en rapport avec le Nunavut, et de surmonter tout autre obstacle pouvant exister quant au pouvoir du commissaire provisoire de conclure des accords raisonnables visant la période de transition;

      5. d'assurer que les premières élections de l'Assemblée législative du Nunavut se déroulent en temps opportun suivant un processus harmonieux.

    Le groupe de travail devrait précisément examiner le besoin d'apporter des modifications à la Loi sur le Nunavut.

• 1650

La Commission a trois commentaires à formuler relativement aux suites données aux amendements recommandés à la Loi sur le Nunavut. En premier lieu, le gouvernement du Canada a pris à coeur la suggestion des commissaires d'établir un groupe de travail multipartite afin d'examiner les modifications pertinentes à la Loi sur le Nunavut. Très actifs, les membres du groupe de travail sur les questions de droit et les mesures législatives—qui représentaient le gouvernement du Canada, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, Tunngavik, et, dans une moindre mesure, notre Commission ainsi que le Bureau du commissaire provisoire—ont travaillé dans un esprit de franchise et de collégialité à formuler le projet de loi que le comité examine présentement. Les commissaires croient que ce processus de consultation a été très utile et a largement concouru aux points forts du projet de loi.

En second lieu, les modifications proposées à la Loi sur le Nunavut vont au-delà des défauts relevés dans les travaux de la Commission. Cela n'a rien d'étonnant. Le processus de consultation multipartite a donné lieu à un examen minutieux de la Loi sur le Nunavut de 1993, ce qui a permis de relever des zones grises et imprévisibles que la Commission n'avait pas noté dans son analyse initiale. Du point de vue des commissaires, moins il y aura de zones grises et d'imprévus, mieux cela sera pour toutes les parties concernées.

En troisième lieu, les modifications proposées dans le projet de loi ont réussi à bien équilibrer les paires de facteurs opposés, ce dont on doit tenir compte dans l'évaluation de son contenu. Ainsi, le projet de loi conserve l'équilibre entre les aspects suivants: le besoin, pour l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest, de conserver une certaine marge de manoeuvre en modifiant les règles sur la continuité juridique des lois au Nunavut, par rapport au besoin d'assurer que ces modifications ne portent pas atteinte aux intérêts du Nunavut; le besoin de reproduire au Nunavut des institutions publiques qui partageront équitablement l'actif et le passif de leurs contreparties dans les T.N.-O., par rapport au besoin, pour les institutions publiques des T.N.-O., de continuer à fonctionner sans interruption dans la partie ouest des T.N.-O.; le besoin que les représentants désignés du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest concluent des accords sur la répartition de l'actif et du passif du gouvernement des T.N.-O., par rapport à la responsabilité du gouvernement du Canada d'agir efficacement au cas où les parties en cause se retrouvent dans l'impasse. On pourrait aussi signaler d'autres exemples montrant que le projet de loi est bien équilibré.

Les diverses dispositions du projet de loi ne plairont sans doute pas à tous et chacun, et les commissaires ne prétendent pas saisir toutes les nuances d'un texte de loi aussi complexe. Néanmoins, ils sont confiants qu'il représente un compromis sensible et raisonnable entre les intérêts concurrentiels.

La deuxième mesure législative préconisée par la Commission visait les modifications à la Constitution du Canada. À cet égard, les commissaires formulaient ce qui suit dans leur deuxième rapport exhaustif:

    La Commission recommande d'ajouter aux Lois constitutionnelles de 1867 à 1892 la mention du Nunavut spécifiquement afin de prévoir la nomination de deux sénateurs et l'élection de deux députés à la Chambre des communes qui représenteront respectivement le Nunavut et les T.N.-O., et afin d'assurer que la Charte canadienne des droits et libertés s'applique à la législature et au gouvernement du Nunavut.

Comment le projet de loi a-t-il donné suite à cette recommandation? Ma première observation est que le projet de loi respecte le point clé, soit qu'il garantit la représentation du Nunavut au sein de l'institution démocratique la plus importante du Canada: le Parlement. Pour les résidents du Nunavut, et, je pense, pour tous nos concitoyens du Canada, c'est là une simple question de justice. En 1975, la Constitution du Canada a été modifiée afin de garantir la représentation des résidants du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest au sein du Parlement. Il ne saurait en être autrement pour le peuple du Nunavut.

Les membres du comité noteront que la Commission a recommandé une modification pour faire en sorte que le Nunavut soit spécifiquement mentionné dans la Charte canadienne des droits et libertés. Pareille modification exigerait le consentement des provinces, et, bien qu'elle demeure souhaitable, il n'y a aucune raison de retarder la garantie de la représentation parlementaire à cause de cette question. Il ne fait pas de doute que la Charte s'appliquera au Nunavut, même si ce Territoire n'y est pas explicitement mentionné.

Mon dernier commentaire au sujet des modifications apportées à la Constitution du Canada pour tenir compte du Nunavut concerne l'inquiétude, soulevée dans certains cercles, que la Loi sur le Nunavut de 1993 soit constitutionnellement invalide parce qu'elle introduit une province par la porte de service. Cela me paraît un argument sans fondement. Ayant travaillé presque toute ma vie adulte à la création du Nunavut, je puis vous assurer que la question ne prête à aucune confusion dans le Nord: le Nunavut sera un Territoire et non pas une province.

• 1655

Les dossiers complets et volumineux des consultations et du débat publics en font foi. Cette conclusion s'appuie aussi sur les documents pertinents, notamment les questions posées lors des referendums de 1982 et de 1992, et les termes de l'Accord politique sur le Nunavut de 1992.

Mais la preuve la plus importante réside dans l'engagement contracté par les Inuit aux termes du chapitre 4 de l'Accord sur les revendications territoriales, et dans la reformulation de l'article 3 de la Loi sur le Nunavut—«Est constituée en Territoire, sous la dénomination de Nunavut...»—qui traduit clairement l'intention de créer un Territoire, et non pas une province. La Commission est convaincue que l'existence du Nunavut sera solidement ancrée dans la Constitution.

Dans l'ensemble, la Commission croit que si le projet de loi C-39 est adopté sans tarder, il contribuera de manière non négligeable à établir le Nunavut dans l'efficacité, l'équité et l'harmonie.

Merci. Je suis prêt à répondre à vos questions.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Amagoalik. Très intéressante, votre déclaration.

Monsieur Konrad, vous avec cinq minutes.

[Traduction]

M. Derrek Konrad: Merci.

Vous allez me trouver obstiné, mais vous nous dites que vous êtes en train de former les futurs députés, alors pourquoi ne pas former le futur sénateur, puisqu'il est possible qu'il soit élu? Vous parlez de faire représenter le Nunavut au sein de l'institution démocratique la plus importante du Canada: le Parlement. Eh bien, que penseriez-vous de faire élire le sénateur?

M. John Amagoalik: Je n'ai pas d'avis à vous donner à ce sujet.

M. Derrek Konrad: Et pas de recommandations non plus?

M. John Amagoalik: Comme l'ont indiqué les témoins qui m'ont précédé, il y a beaucoup de travail à faire entre maintenant et le 1er avril 1999. La liste est longue, on y retrouve des choses comme le recrutement des fonctionnaires, la constitution des ministères et la mise en place de l'infrastructure. Pour être honnête, personne n'a soulevé la question du Sénat. Celle-ci est tout en bas de la liste des priorités. En ma qualité de président de la Commission d'établissement du Nunavut, je dois d'abord me préoccuper de la création de ce Territoire. Si le reste du pays veut se pencher sur cette question du Sénat et s'il y trouve une solution, nous serons heureux de vous appuyer.

M. Derrek Konrad: Mais nous serions heureux que vous fassiez partie de cette solution.

J'ai deux ou trois questions à vous poser sur la formation des députés. Combien sont déjà en formation, combien prévoyez-vous en accueillir en tout et comment ces gens-là sont-ils choisis? Ont-ils eux-mêmes proposé leur candidature?

M. John Amagoalik: Vous parlez des députés?

M. Derrek Konrad: Oui! J'ai cru vous entendre dire que vous formez les futurs députés.

M. John Amagoalik: Il est impossible de former un politicien.

M. Gerald Keddy: Ce n'est pas nouveau!

M. John Amagoalik: Les politiciens sont élus par le peuple. Il y aura 19 circonscriptions et les élections se dérouleront vers la mi-février, autour de la Saint-Valentin. Les députés seront assermentés le 1er avril 1999 et ils pourront alors prendre en main les destinées du nouveau Territoire.

La formation à laquelle vous faites allusion est en place depuis 25 ans. Nous avons acquis une grande expérience dans la conduite de nos organisations et dans la compréhension de la démocratie. Les Inuit du nord du Canada ont adopté la démocratie sans aucune réserve, si bien qu'il n'est pas vraiment nécessaire de former les députés.

M. Derrek Konrad: Il n'y a peut-être rien à tirer de nous, pourtant ce Parlement a essayé de nous former quand nous sommes arrivés.

Puisque vous parlez de l'importance de la démocratie, vous comprenez ce que je veux dire à propos de l'élection des sénateurs.

• 1700

Quand la Commission d'établissement du Nunavut terminera-t-elle ses travaux?

M. John Amagoalik: La Loi sur le Nunavut précise que la commission continuera d'exister jusqu'à la fin juin 1999. Nous avons conclu une entente avec le ministre des Affaires indiennes prévoyant notre maintien jusqu'à cette date.

M. Derrek Konrad: Merci beaucoup. Je pense que c'est tout.

Le président: Merci.

[Français]

Monsieur Fournier.

M. Ghislain Fournier: Dans l'hypothèse d'une réception négative aux recommandations qui sont formulées dans le projet de loi, à quelles priorités les parlementaires d'ici devraient-ils donner suite?

[Traduction]

M. John Amagoalik: Le projet de loi dont vous êtes saisis est le résultat d'une collaboration entre les différentes parties concernées par la création du Nunavut. Je veux parler du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, du gouvernement des T.N.-O. et de Nunavut Tunngavik Inc., de même que, dans une moindre mesure, de la Commission d'établissement du Nunavut et du Bureau du commissaire provisoire.

Étant donné la collaboration dont fait l'objet la rédaction de ce projet de loi, je suis certain que toutes les parties conviendront que ce texte mérite d'être adopté et que nous n'aurons pas à trop nous inquiéter de ce côté là.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Fournier.

Monsieur Keddy.

[Traduction]

M. Gerald Keddy: Merci, monsieur le président.

J'ai une question pour M. Amagoalik. Je voulais qu'on y réponde plus tôt, mais j'avais lu le mauvais document.

Pas plus à la lecture de la Loi sur le Nunavut—que tout le monde a ici—que dans mes échanges avec de nombreux interlocuteurs, dans le Nord comme ici, je n'ai eu l'impression que certains cercles estiment que la loi introduit une province par la porte de service, comme vous l'affirmez ici. Sur quoi fondez-vous cette remarque?

De plus, j'espère que le Yukon, les T.N.-O. et le Nunavut n'en sont qu'à des étapes transitoires et qu'un jour, ils viendront se ranger au côté du reste du Canada avec le statut de province. Ce serait là, selon moi, une évolution normale de la démarche politique. Quoi qu'il en soit, je n'ai jamais entendu dire, ni directement ou ni indirectement, que cela serait mal. Je ne comprends donc pas votre remarque. Vous dites qu'il serait inconstitutionnel de créer une province par la porte de service? C'est cela?

M. John Amagoalik: Nous n'avons fait que reprendre ce qu'a dit votre chef, M. Preston Manning.

M. Gerald Keddy: Il se trouve que je suis Conservateur. De plus, nous n'affichons pas notre allégeance politique sur nos plaquettes patronymiques. Vous vous êtes trompé de cible, vous devriez hausser le tir.

M. Bryon Wilfert: Ou plutôt le baisser, dans ce cas.

M. Gerald Keddy: Trêve de plaisanteries, votre déclaration m'embête. Nous voulons tous, ici, que la transition se passe bien et je m'attendrai personnellement qu'à un moment donné du processus, tous les Territoires... En ce qui me concerne, deux Territoires sont prêts à recevoir un statut de province, mais cette remarque n'engage que moi.

Si c'est ce que vous voulez dire, je vous croirai sur parole, mais...

M. John Finlay: Vous devez tenir compte de qui cela vient.

M. Gerald Keddy: J'en ai tenu compte.

Plusieurs aspects ne sont encore pas réglés, le principal étant le délai pour le transfert de pouvoir et le fait que tout doit être prêt à fonctionner à temps, autrement dit que les rouages doivent être prêts à fonctionner.

• 1705

Tout à l'heure, on a recommandé d'avancer la date des élections ou d'adopter des dispositions dans la loi en ce sens, ce que tout le monde comprend, je pense. Estimez-vous que ce soit la principale pierre d'achoppement, un aspect auquel ils conviennent de s'attaquer tout de suite? Dans l'affirmative, quelle serait, ensuite la chose la plus importante à laquelle les parlementaires devraient s'attaquer?

M. John Amagoalik: Je dirais que ce qui nous préoccupe par-dessus tout, c'est l'élection de l'assemblée législative dans les plus brefs délais possible. Nous ne voulons pas traverser de période de flottement. Nous ne voulons pas nous retrouver dans une situation où des officiels non élus gouverneront le Territoire. Nous voulons nous assurer que les personnes qui auront été élues par la population du Nunavut auront les pouvoirs voulus pour gouverner à partir du 1er avril 1999. C'est là notre priorité.

Quant au reste, je n'y ai pas vraiment pensé. Nous voulons simplement être certains qu'il n'y aura pas de zones grises juridiques. Nous voulons garantir aux employés travaillant actuellement pour le gouvernement des T.N.-O. qu'ils auront un emploi le 1er avril 1999, et ainsi de suite. Nous voulons être certains qu'il n'y aura pas d'incertitudes.

M. Gerald Keddy: J'ai une petite question à vous poser. J'ai l'impression que la plupart des zones grises ont été couvertes dans la loi. Par ailleurs, tout ce qui ne l'a pas été pourra faire l'objet de modifications dont beaucoup ont déjà été recommandées.

Sur les points où il y a recoupement des responsabilités avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest... Ce que je veux dire, c'est que rien ne presse dans les domaines à responsabilités partagées. Vous pouvez toujours mettre votre gouvernement sur pied, faire construire les infrastructures nécessaires et négocier certains de ces aspects plus tard, tant que vous avez la possibilité de revenir en arrière et de négocier ce que vous n'aurez pas réalisé dans un premier temps.

M. John Amagoalik: Certes, mais...

M. Gerald Keddy: Bien sûr, je craindrai alors personnellement que les choses ne s'éternisent.

M. John Amagoalik: C'est ce que nous craignons également. Nous ne voulons pas que les choses s'éternisent. Nous n'avons rien contre le fait que le gouvernement des T.N.-O. offre une partie de nos services à contrat, en attendant que tout soit en place, mais nous ne voulons pas que la transition prenne trop de temps. Nous aimerions que le gouvernement du Nunavut jouisse de ses pleins pouvoirs en quelques années, pas plus. Je pense que...

Le président: Merci, monsieur Keddy.

[Français]

Nous allons passer au dernier intervenant, M. Bryden. Vous avez cinq minutes.

[Traduction]

M. John Bryden: Vous avez étroitement participé à la rédaction de la première mouture de la Loi sur le Nunavut, si j'ai bien compris. C'est un travail qui s'est échelonné sur plusieurs années et vous avez mis la main à la pâte à cette étape. C'est cela?

M. John Amagoalik: Oui, l'idée de créer le Nunavut remonte aux environ de 1971, à l'époque où notre organisation nationale, Inuit Tapirisat du Canada, a été créée. Personnellement, j'y travaille depuis 1975, soit 22 ans.

M. John Bryden: Il n'en a jamais été question avant l'adoption de la Loi sur le Nunavut? Il n'a jamais été question pour vous d'être représentés à la Chambre des communes et au Sénat?

M. John Amagoalik: Au contraire, il en a toujours été question. Nous parlons du Nunavut et nous consultons notre peuple à ce sujet depuis 26 ans, et nous avons toujours envisagé que le Territoire aurait son député et son...

M. John Bryden: Mais en a-t-il été question avec le gouvernement?

M. John Amagoalik: Nous avons toujours cru comprendre du gouvernement que cela nous serait accordé.

M. John Bryden: A-t-il été question d'une période transitoire après l'élection de la première assemblée législative? N'en a-t-il pas été question dans ces discussions?

• 1710

J'essaie de déterminer pourquoi nous devons apporter ce genre de correctifs maintenant, si vous avez déjà parlé de tous ces aspects avant l'adoption de la première Loi sur le Nunavut.

M. John Amagoalik: Voilà d'où vient le problème, selon moi: nous avions supposé que, d'après la loi, les élus seraient responsables dès le premier jour de la création du Territoire. C'est ce que nous avions supposé. Apparemment, ce n'est pas ainsi qu'avaient raisonné les gens du ministère des Affaires indiennes. Voilà le problème. C'est un problème de négligence et rien d'autre.

M. John Bryden: Donc, vous avez été surpris de découvrir que la Loi sur le Nunavut ne prévoyait pas de représentation du nouveau Territoire à Ottawa.

M. John Amagoalik: Effectivement.

M. John Bryden: Et vous avez été aussi très étonné de constater que rien n'était prévu pour la période de transition.

Je pourrais donc conclure de tout cela—moi qui n'ai pas participé à la rédaction de la Loi originelle sur le Nunavut—, qu'étant donné les corrections qu'il faut maintenant apporter à ce texte, la loi de 1993 était plutôt nullarde. Je me trompe?

M. John Amagoalik: Je ne dirai pas qu'elle était nullarde.

M. John Bryden: Eh bien, pour employer un langage plus «politiquement correct», disons qu'elle n'était pas très bien conçue.

M. John Amagoalik: Elle était nécessaire... À cette époque, il fallait que quelque chose soit fait. Il ne nous était pas possible de parvenir à la perfection du premier coup. Nous devions faire adopter ce projet de loi par la Chambre avant de pouvoir tenir une élection. Il y a eu des pressions pour le faire adopter. Il n'était sûrement pas parfait, mais nous savions que nous aurions d'autres occasions pour y apporter les modifications nécessaires.

M. John Bryden: Je ne voulais pas tant faire ressortir votre souci de disposer d'une loi que de l'échec du gouvernement fédéral de vous doter d'une loi convenable dès la première fois. Ce n'est pas ce qui s'est passé? Si vous avez réclamé une représentation au Sénat et à la Chambre des communes, et si vous avez insisté pour l'obtenir—ce qui me paraît tout à fait évident—, cela prouve que le gouvernement n'a pas donné suite à votre requête et que cela n'a rien à voir avec les pressions exercées pour faire adopter le projet de loi en question.

Est-ce le genre de loi à laquelle vous vous attendiez?

M. John Amagoalik: Oui!

M. John Bryden: Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Merci beaucoup, monsieur Amagoalik et monsieur Ames pour vos déclarations et vos réponses. Bonne chance dans vos entreprises.

[Français]

Nous allons passer au groupe

[Traduction]

Nunavut Tunngavik Incorporated, représenté par M. Alex Campbell, directeur général, et par Mme Leena Evic-Twerdin, conseillère en politique et programme.

Voulez-vous nous faire un exposé de cinq minutes?

M. Alex Campbell (directeur général, Nunavut Tunngavik Inc.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, Ublukkut, bonjour!. Je m'appelle Alex Campbell et je suis directeur général de Nunavut Tunngavik Incorporated, successeur de la Tunngavik Federation of Nunavut qui a négocié le règlement des revendications territoriales. Je suis accompagné de Leena Evic-Twerdin, conseillère en politique et programme à la NTI.

Nous sommes venus exprimer nos réactions au sujet du projet de loi C-39 du gouvernement, loi modifiant la Loi sur le Nunavut et la Loi constitutionnelle de 1867, au nom de la NTI et des Inuit du Nunavut.

Nous allons nous relayer au cours de cet exposé et c'est Leena qui va commencer.

Il a déjà été question de certains des aspects que nous comptons aborder et je vous prierais de nous en excuser d'avance. Nous nous sommes essentiellement fixé pour objectif d'informer les députés sur le rôle de la NTI dans tout ce processus et de leur donner une idée de ce à quoi correspond tout cet exercice.

Merci.

[Français]

Le président: C'est la cloche qui sonne à la Chambre des communes. C'est pour le quorum.

[Traduction]

Je vous en prie.

Mme Leena Evic-Twerdin (conseillère en politique et en programme, Nunavut Tunngavik Inc.):

[Note de la rédaction: Le témoin s'exprime dans sa langue]

• 1715

Je vais commencer par vous parler un peu de l'histoire de Nunavut Tunngavik Incorporated. En 1993, les Inuit et le gouvernement du Canada ont conclu le plus important accord sur les revendications territoriales autochtones de toute l'histoire du Canada. Cet accord, protégé par la Constitution, précise les droits des Inuit en matière de propriété et d'utilisation des terres et des ressources, ainsi que leurs droits à l'exploitation des ressources fauniques et à la participation au processus de décision relatif à l'utilisation, à la gestion et à la conservation des terres, des ressources fauniques, de l'eau et des ressources naturelles, notamment au large. De plus, les Inuit ont eu droit à un dédommagement financier et on leur a donné les moyens de participer à la vie économique.

Quant au sujet qui nous réunit ici aujourd'hui, il faut savoir que cet accord prévoyait également que le gouvernement du Canada recommande au Parlement la création du Territoire du Nunavut et négocie un accord politique avec le Nunavut en vue d'arrêter les détails concernant le nouveau Territoire.

L'Accord sur les revendications territoriales se veut un outil visant à encourager l'autonomie ainsi que le bien-être culturel et social des Inuit; il est aussi destiné à leur permettre de réaliser en partie leur aspiration à disposer d'un gouvernement autonome inuit.

Quand la Loi concernant l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut a été adoptée par le Parlement du Canada en 1993, un autre texte législatif, intitulé Loi sur le Nunavut, a également pris effet. Ces mesures législatives conduiront à la création du Territoire du Nunavut le 1er avril 1999, qui sera ainsi le premier Territoire à se joindre à la Confédération du Canada après Terre-Neuve, en 1949.

L'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut est, comme je le disais, le plus important accord du genre à avoir été conclu dans l'histoire du Canada, puisqu'il concède aux Inuit un droit sur 355 842 kilomètres carrés, d'une grande région située à l'est de l'Arctique, qui englobe également des terres domaniales. Le Nunavut, qui couvre 1,9 million de kilomètres carrés environ est une immense région qui fait presque un cinquième de la superficie du Canada.

La NTI est une société sans but lucratif créée en 1993 afin de veiller à ce que les promesses formulées dans l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut soient respectées, notamment en ce qui a trait à la création du Territoire du Nunavut. La société représente les intérêts de près de 19 500 Inuit de cette région, visés par un accord de 1,1 milliard de dollars. Tous les Inuit de la région sont considérés comme étant des actionnaires de la NTI et ils sont appelés à se prononcer par suffrage sur les questions dont est saisie l'assemblée annuelle des actionnaires qui se déroule dans l'une des collectivités du Nunavut.

En vertu de la Loi sur le Nunavut, la NTI est une des trois parties responsables—au côté du gouvernement du Canada et du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest—, de recueillir et de prendre acte des conseils et recommandations de la Commission d'établissement du Nunavut relativement à la création du gouvernement de ce Territoire. La NTI a participé étroitement à la prise de décision, sur la base des recommandations de la commission, de même qu'à la préparation des orientations écrites que le ministre du MAINC a adressées au commissaire provisoire du Nunavut.

M. Alex Campbell: Je vais continuer à partir d'ici.

Nous ne sommes pas venus ici pour débattre ni pour défendre la création du Nunavut. Ce débat a déjà eu lieu et il a été clairement décidé de créer ce Territoire à l'occasion de l'adoption de la Loi sur le Nunavut en 1993. Cette loi démontre l'engagement du gouvernement du Canada à créer un nouveau Territoire et à mettre en place un gouvernement pour le Nunavut et ses résidents.

Je suis venu, ici aujourd'hui pour vous rappeler que nous avons toujours besoin de votre soutien, cette fois pour adopter les modifications à la Loi sur le Nunavut et à la Loi constitutionnelle de 1867, proposées à la Chambre des communes. Nous vous demandons de faire ce dernier effort parce que nous sommes sur le point de réaliser le rêve des résidents du Nunavut.

Permettez-moi de vous dire deux mots sur le projet de loi C-39. Il n'est pas inconnu à la NTI, puisque celle-ci a participé à un groupe de travail multipartite sur les questions légales et législatives concernant le Nunavut. Ce groupe de travail est constitué de représentants du gouvernement du Canada, du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, de la NTI, de la Commission d'établissement du Nunavut et, plus récemment, du Bureau du commissaire provisoire. Grâce à cette tribune, qui a permis des consultations, une collaboration et un engagement multipartites, il a été possible d'isoler les points durs, les conflits et les omissions, et d'y remédier par le truchement du projet de loi C-39.

• 1720

La NTI tient à féliciter les gens du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour la démarche qu'ils ont empruntée afin de rédiger ce texte de loi. Toutes les parties concernées ont montré leur volonté de parvenir à un consensus dans l'élaboration des premiers principes et objectifs, puis dans la rédaction des ébauches de cette mesure législative.

Nous ne prétendons pas que les modifications apportées répondent à tous les problèmes et nous ne disons pas non plus que la NTI n'aurait pas préféré certaines autres solutions en cours de route, mais en dernière analyse, il faut reconnaître que tous les facteurs ont été abordés. Nous apportons notre soutien sans réserve à ces modifications sur la foi du travail acharné et des compromis difficiles qui ont été réalisés par le groupe de travail.

Ce groupe de travail est un des nombreux groupes à s'être constitués pour se pencher sur toute la série des problèmes que posait la création d'une nouvelle instance politique au Canada. Comme d'autres vous l'ont dit plus tôt aujourd'hui, dans 306 jours, le tout dernier élément de la mosaïque qu'est le Canada viendra s'emboîter parfaitement parmi les autres. Le Nunavut aura enfin un gouvernement qui le représentera. Il pourra compter sur une fonction publique, appelée à prendre de l'essor, pour administrer le Territoire par le truchement de services décentralisés, répartis dans 11 collectivités. Le Nunavut assurera la promotion, la protection et la conservation de notre langue et de nos cultures en milieu de travail, de nos lois, ainsi que des programmes et des services que nous dispenserons à nos citoyens. Comme toujours, le Nunavut tirera les enseignements du passé en vue d'améliorer les conditions de vie dans ce coin de pays. Telle est la volonté, tel est le désir des Inuit du Nunavut.

Il reste encore une étape importante à franchir dans la reconnaissance que le gouvernement du Canada compte accorder aux aspirations des Inuit à l'autodétermination, pour assurer une transition en douceur vers la création d'un Territoire du Nunavut et la mise en place d'un gouvernement après le 1er avril 1999: l'adoption de la loi modifiant la Loi sur le Nunavut et la Loi constitutionnelle de 1867.

Le travail de base, réalisé au cours de plusieurs années de négociation entre les Inuit et le gouvernement, a été couronné par la signature de l'Accord politique sur le Nunavut, en octobre 1992, accord qui fut ratifié à l'occasion d'un vote des Inuit en novembre 1992, par l'adoption et la sanction royale de la Loi sur le Nunavut, le 10 juin 1993, et par l'entrée en vigueur de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, en juillet 1993.

Je repasse la parole à ma collègue.

Mme Leena Evic-Twerdin: Merci.

Revenons-en au projet de loi C-39. Les modifications apportées à la Loi sur le Nunavut et à la Loi constitutionnelle de 1867 vont nous permettre de régler certains problèmes en suspens pour créer le nouveau Territoire et de mettre en place le nouveau gouvernement—dans les délais fixés et de façon efficace—, car tous les problèmes n'ont pas été réglés lors de la première série d'échanges à teneur juridique sur le Nunavut.

Un de ces amendements permettra la tenue d'une première élection au Nunavut avant le 1er avril 1999. Comme Jane Stewart, ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, l'a fait remarquer la semaine dernière dans son témoignage à ce propos, il faudra que les élections se déroulent avant le 1er avril 1999 afin que le Nunavut dispose d'une assemblée législative élue dès sa création.

La transition en vue de l'établissement d'une nouvelle instance politique doit se faire le plus en douceur possible pour continuer d'assurer au peuple du Nunavut la même qualité et le même niveau de service. À cet égard, d'autres amendements s'imposent afin de s'assurer que les lois du Nunavut seront conformes à celles auxquelles les résidents de cette région sont habitués.

Les lois des Territoires du Nord-Ouest deviendront les lois du Nunavut dans la mesure où l'on pourra les reproduire et où elles demeureront valables pour le nouveau Territoire. Toutes les institutions gouvernementales seront reproduites au Nunavut, comme les conseils scolaires, les municipalités, les commissions, les offices et les organismes qui sont tous à créer. Les résidents du Nunavut doivent avoir la certitude que leurs licences, permis et certificats divers demeureront valables au Nunavut, pendant la période de transition.

En cas de désaccords ou d'absence de consensus sur des questions comme la répartition du passif et de l'actif entre le Nunavut et ce qui restera des Territoires du Nord-Ouest, le Cabinet fédéral aura, jusqu'au 1er avril 1999, la possibilité de transférer unilatéralement les propriétés au Nunavut. Cependant, nous espérons, et nous sommes même certains, que tout le monde fera tout en son pouvoir pour répartir convenablement et équitablement l'actif et le passif.

• 1725

Une autre modification permettra à l'Assemblée législative des Territoires du Nord-ouest de se doter d'une loi spéciale en adoptant une version différente des lois existantes. Cette nouvelle version sera destinée au Nunavut et ne s'appliquera pas aux Territoires du Nord-Ouest. Cependant, avant de pouvoir adopter une telle loi spéciale, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest devra d'abord consulter la NTI et obtenir le consentement du Bureau du commissaire provisoire. Ce faisant, il sera possible de faire modifier une loi créée à Yellowknife pour l'adapter aux réalités du Nunavut.

M. Alex Campbell: En outre, les amendements portent sur le règlement des affaires en instance, des causes et des décisions juridiques ainsi que de leurs transferts à la nouvelle instance, quand cela s'impose. Après tout, il est normal que les résidents du Nunavut sachent quel tribunal entendra leurs causes éventuelles après le 1er avril 1999.

Dans l'ensemble, tous ces amendements à la Loi sur le Nunavut devraient faciliter une transition en douceur, efficace et dans les délais prescrits vers l'instauration d'un nouveau Territoire et d'un nouveau gouvernement du nunavut. Il faudra cependant que ce gouvernement et ce Territoire soient représentés à la plus haute instance décisionnelle du pays, et il faudra donc confirmer aux résidents du Nunavut que leurs intérêts seront défendus par un député et un sénateur. Pour cela, il convient de modifier la Loi constitutionnelle de 1867.

Ces amendements sont vitaux pour permettre au gouvernement du Nunavut de fonctionner dès le 1er avril 1999. Ils permettront de donner effectivement naissance au nouveau Territoire grâce à l'élection d'une assemblée législative. L'état du droit sera précisé et l'on confirmera le rôle des tribunaux qui pourront intervenir afin de contribuer à l'élaboration des lois.

Le processus de modification est une entreprise, comme tant d'autres, qu'il convient de mener à terme pour le bénéfice des résidents du Nunavut. Entre autres problèmes, mentionnons également le financement adéquat du nouveau Territoire, ainsi que le recrutement, l'engagement et la formation des Inuit. Nous nous attellerons allègrement à ces tâches et à d'autres, dans le cadre de nos négociations suivies avec le gouvernement.

Il faut que ces amendements soient appuyés et adoptés le plus rapidement possible. Comme l'a si bien dit la semaine dernière Mme Nancy Karetak-Lindell, députée du Nunavut, il convient de donner une orientation au commissaire provisoire du Nunavut et de lui confirmer les tâches qu'il doit accomplir. Cela est nécessaire pour que la création du Nunavut aboutisse. La NTI est attachée à la réalisation de la vision du Nunavut.

Le cadre nécessaire à la mise sur pied du gouvernement du Nunavut découle de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, de la Loi sur le Nunavut et de l'accord politique sur le Nunavut. Depuis les années 60, les Inuit du Nunavut se battent pour donner forme à un gouvernement autonome qui leur convienne. Les droits et les avantages mentionnés dans l'Accord sur les revendications territoriales, notamment pour ce qui est du rôle garanti du gouvernement en matière de gestion commune des terres et des ressources dans le Nunavut, ainsi que l'établissement d'un Territoire et d'un gouvernement du Nunavut, devraient doter les Inuit de cette région de la plupart des instruments dont ils auront besoin pour s'autogouverner.

La NTI est donc chargée de protéger les droits des Inuit du Nunavut, en vertu de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. Il est de notre devoir de nous exprimer au nom des Inuit sur les questions de nature politique dans le Nunavut et de favoriser la naissance sans problème de ce Territoire devant être dirigé par un gouvernement public, qui est l'aboutissement de nos revendications autochtones.

La NTI a joué un rôle actif à chaque étape du processus de création du Nunavut et elle va continuer de contrôler et d'étayer le processus une fois que le Nunavut sera réalité. Cette réalité s'appuiera d'ailleurs sur plusieurs années de travail acharné, non seulement au Nunavut, mais aussi à Yellowknife et à Ottawa. Inuit et non Inuit ont contribué à cette réalité. Vous êtes en train, aujourd'hui, d'y contribuer en reconnaissant notre travail et nos aspirations et en favorisant l'adoption sans heurt de ce projet de loi.

Je tiens, en toute humilité, à remercier la ministre Jane Stewart pour son engagement envers le Nunavut et les aspirations inuit. Nous tenons, par ailleurs, à remercier d'avance les membres du comité qui voudront bien adopter cette loi tellement importante pour nous.

Il ne fait aucun doute que le Nunavut est unique. J'espère que c'est au moins ce qu'auront retiré nos invités présents lors des célébration du compte à rebours en vue de la création du Nunavut, le 31 mars derniers, au Musée canadien de la nature.

• 1730

Un vent d'enthousiasme souffle sur le Nunavut et j'espère que vous sentez cette brise à l'heure où vous venez vous ranger à nos côtés pour franchir le dernier pas. Nous sommes conscients que le projet de création d'un nouveau Territoire est une entreprise énorme, fort complexe, qui ne se révèle pleinement à nous qu'au moment où cette loi est mise en oeuvre. Nous nous attendons à devoir surmonter d'autres difficultés en cours de route. Nous vous demandons d'apporter votre soutien à cette loi et d'accepter notre invitation à prendre part à l'une des plus importantes mesures qui nous permettra de remplir notre rêve et de faire en sorte que le Nunavut devienne réalité.

Qujannamiik. Merci de nous avoir autorisé ces cinq minutes pour vous faire cet exposé et vous faire part de nos remarques sur le projet de loi C-39. Merci, monsieur le président.

Le président: De rien. Qujannamiik.

[Français]

Nous allons passer à la période des questions. Monsieur Konrad.

[Traduction]

M. Derrek Konrad: Merci pour votre exposé. J'espère que le comité pourra vous aider à obtenir la meilleure loi possible.

Je vais enchaîner sur ce que vient de dire le dernier témoin et je vais revenir sur la remarque de M. Bryden, qui a souligné que, dans notre précipitation à obtenir la sanction royale la dernière fois, nous avons oublié les sénateurs et la mise en place d'une assemblée législative élue, sans compter qu'il est possible, d'un point de vue constitutionnel, qu'on soit en train de créer une province par la porte de service. Cela dit, je crois utile d'inviter les autres partis à examiner de très près ce projet de loi pour nous assurer que tout se passera sans heurts.

Quoi qu'il en soit, vous nous avez dit que la création du Nunavut répond en partie aux aspirations des Inuit en matière de gouvernement autonome. Je me demande à quoi correspondent les autres aspirations.

M. Alex Campbell: Je tiens à vous préciser—et c'est une précision que nous avons toujours faite, de Nunavut à Inuvik—qu'il est question ici d'un gouvernement public, concept qu'appuie la NTI qui représente les Inuit. Cela a toujours été clair pour nous.

Je vais maintenant demander à Leena de vous parler des autres aspirations des Inuit du Nunavut.

Mme Leena Evic-Diverin: Comme près de 80 p. 100 de la population du Nunavut est inuk, les résidents et le gouvernement du Nunavut espèrent que ce changement leur donnera la possibilité de croître et de se développer dans toutes les facettes de leur vie. Dans une grande mesure, leurs aspirations portent sur l'utilisation de leur langue et le respect de leur culture.

M. Derrek Konrad: C'est toutes les questions que je voulais poser, étant donné le peu de temps que nous avons. Je vous remercie.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Konrad. Monsieur Fournier.

M. Ghislain Fournier: J'ai cru comprendre que vous étiez satisfaits du contenu du projet de loi C-39. J'aimerais savoir en quoi il vous satisfait. Y a-t-il des textes qui vous satisfont moins? D'après vous, y a-t-il des questions que ce projet de loi devrait aborder et qui n'y figurent pas à l'heure actuelle?

[Traduction]

M. Alex Campbell: Comme je l'ai dit dans notre exposé, nous avons participé au groupe de travail qui a rédigé le projet de loi. À cette occasion, nous avons recommandé ce que nous souhaitions voir dans la Loi sur le Nunavut. La NTI est satisfaite des amendements apportés et de la démarche empruntée jusqu'ici, de même que du genre de consultation qu'a tenu le gouvernement.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Fournier.

Monsieur Keddy.

[Traduction]

M. Gerald Keddy: Merci, monsieur le président. Je pense qu'on a répondu à pas mal de nos questions, mais je veux tout de même revenir sur certaines choses.

• 1735

Comme il sera peut-être question d'autres revendications sur des Territoires voisins, surtout en ce qui concerne le prochain groupe, sur les îles du large dans le sud de la Baie d'Hudson et dans l'est de la Baie James—qui font partie du Nunavut—et étant donné l'autre revendication des Indiens cris, est-il prévu de tenir ou tient-on déjà des négociations pour régler ces questions et faire en sorte que les deux groupes auxquels je pense puissent passer à autre chose? Que pensez-vous de cela?

M. Alex Campbell: Pendant le processus de consultation, nous avons eu des échanges avec la Makivik Corporation, qui représente les Inuit du nord du Québec, au sujet de certains des intérêts qu'ils ont au large. Quant aux Cris, ils n'ont pas directement pris contact avec notre bureau pour discuter de leurs préoccupations relativement aux frontières et à l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.

M. Gerald Keddy: Pour rester dans la même veine, dites-moi si ces terres ont toujours été considérées comme étant inuit, du moins dans une histoire récente. Je suis intéressé à entendre le point de vue de quelqu'un qui vit dans cette région.

M. Alex Campbell: Oui, Sanikiluaq, sur les îles Belcher, sont inuit. Cette région fait partie du Nunavut et nous considérons aussi qu'elle est visée par les revendications territoriales. Voilà donc quelle serait notre position de départ dans les discussions à propos des intérêts que les Indiens Cris disent avoir sur les îles au large.

M. Gerald Keddy: Merci.

Le président: Monsieur Bryden.

M. John Bryden: Dès que la première assemblée législative sera constituée, dans le nouveau Territoire du Nunavut, votre organisation va-t-elle disparaître?

M. Alex Campbell: Certainement pas. NTI a été établie en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes et elle demeurera en existence en tant qu'organisme de défense politique, sans compter, bien évidemment, que nous continuerons de suivre la mise en oeuvre de l'Accord sur les revendications territoriales. Dans ce cas, nous surveillerons également dans quelle mesure le gouvernement du Nunavut s'acquitte de ses obligations.

M. John Bryden: Je vois. Si vous me permettez cette question, qui finance votre organisme à l'heure actuelle? Où allez-vous chercher votre argent?

M. Alex Campbell: Le gouvernement alimente le capital de la Fiducie du Nunavut. Nous avons en effet créé une fiducie que le gouvernement du Canada alimente en finance en vertu de l'Accord sur les revendications territoriales. Cet argent est administré par la Fiducie du Nunavut. L'argent est investi pour le Nunavut. Pour l'instant, il est placé et nous nous en servons de garantie pour emprunter ce dont nous avons besoin pour faire fonctionner notre organisme. À un moment donné, nous obtiendrons suffisamment de revenus de placement pour nous contenter des intérêts que rapportera le fonds.

Bien sûr, nous voulons obtenir de véritables dédommagements pour les droits auxquels les Inuit ont renoncé lors des négociations sur les revendications territoriales. Ainsi, la NTI est en train de chercher une façon novatrice de dédommager les Inuit.

M. John Bryden: Mais je suppose qu'après la constitution du Nunavut, le gouvernement fédéral n'aura plus de responsabilité financière vis-à-vis de votre organisme et que tout le financement que vous recevrez viendra du Nunavut.

M. Alex Campbell: Le gouvernement ne finance pas notre organisme; il verse les dédommagements qu'il doit aux Inuit. Il n'a donc pas le choix sur ce plan. L'échéance de 1999 ne marquera pas l'extinction de cette responsabilité.

M. John Bryden: Non? J'essaie simplement de comprendre. Le gouvernement fédéral s'est engagé à vous verser cet argent qui vous permet de fonctionner, mais il ne représente pas pour autant une redevance perpétuelle qui vous est due.

• 1740

M. Alex Campbell: C'est tout à fait cela. Nous percevons des montants annuels du gouvernement du Canada. Le dernier sera versé en 2007. En constituant le capital du fonds de Fiducie Nunavut, le gouvernement ne fait que s'acquitter des obligations qu'il a contractées en vertu de l'Accord sur les revendications territoriales.

M. John Bryden: Je me dois d'expliquer la raison de mon intervention. Je trouve que les ONG ont la fâcheuse tendance de continuer à exister après leur durée de vie utile, parce qu'elles... Je ne veux pas suggérer que c'est le cas en ce qui vous concerne, mais je ne comprends vraiment pas pourquoi vous estimez devoir demeurer—quels termes avez-vous employé déjà?—«La voix des Inuit sur les questions politiques», quand vous aurez des représentants élus qui seront censés être la voix des Inuit. Je ne comprends pas en quoi une société sans but lucratif peut être nécessaire pour parler au nom du peuple quand vous aurez des représentants élus.

M. Alex Campbell: Comme je le disais plus tôt, vous avez tout à fait raison, nous aurons des députés élus à l'Assemblée législative du Nunavut, mais il ne faut pas perdre de vue la nécessité de suivre la mise en oeuvre des Accords de revendications territoriales par les gouvernements, c'est-à-dire le gouvernement fédéral et les gouvernements territoriaux. Il faut donc que quelqu'un soit là pour tirer la sonnette au cas où le gouvernement ne s'acquitterait pas correctement de ses obligations envers les Inuit. C'est là que la NTI intervient. Pour l'instant, la NTI se préoccupe essentiellement de mettre sur pied le gouvernement du Nunavut dans le cadre du mandat qui lui est confié en vertu de l'article 4.

M. John Bryden: Je vois.

M. Alex Campbell: Ce faisant, cet aspect revêtira peut-être moins d'importance ou notre responsabilité à cet égard sera moindre, après les élections. Voilà essentiellement ce dont il retourne.

M. John Bryden: Donc, vous serez là jusqu'en 2007.

M. Alex Campbell: Non! Nous continuerons d'exister après. Pour l'instant, nous nous intéressons surtout au développement économique et à l'amélioration des conditions sociales des Inuit. C'est pour cela, comme je le disais, que la NTI va mettre en oeuvre certains mécanismes destinés à faire dédommager les Inuit qui ont renoncé à leur droit à l'occasion des revendications territoriales.

Le président: Merci, monsieur Bryden.

Monsieur Patry.

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Monsieur Campbell, j'ai deux petites questions à vous poser. D'abord, je veux revenir sur celle soulevée par M. Bryden à propos de l'existence de la NTI après le 1er avril 1999.

Vous avez commencé par déclarer que vous resteriez là, mais que votre organisme sera remplacé par les députés élus de l'assemblée nationale. Vous allez donc prendre vos... Je ne dirai pas prendre vos ordres, mais disons qu'après le 1er avril 1999, vous allez suivre les indications de l'Assemblée nationale du Nunavut.

M. Alex Campbell: Non! Et c'est ce que j'essaie de vous faire comprendre. La NTI va continuer d'exister en tant que société à but non lucratif, même si cinq ou dix gouvernements doivent se succéder après la création du Nunavut le 1er avril 1999. Nous correspondons à une obligation du gouvernement, et nous existons en fonction d'un accord qui a été signé.

M. Bernard Patry: Parfait. L'autre question que je voulais vous poser s'inscrit dans la foulée de celle de M. Keddy à propos des îles, de la Baie James et de la Baie d'Hudson. Votre réponse était mitigée. Vous avez répondu en politicien au sujet des îles Belcher, et je n'ai rien contre. Vous nous avez indiqué qu'elles sont Inuit. Mais qu'advient-il de celles qui sont près de la Baie d'Hudson: Long Island, les Twin Islands, nord et sud, ainsi que l'île Charlton? Ces îles sont désignées par l'association Cri.

À la façon dont je vois les choses, ni ce projet de loi ni la Loi sur le Nunavut de 1993 ne changent quoi que ce soit dans le droit des uns et des autres; ce n'est qu'une modification de l'instance politique. Vous êtes d'accord avec cela?

M. Alex Campbell: Oui.

M. Bernard Patry: Merci.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Patry.

J'ai une question à vous poser concernant Makivik. Vous avez parlé de Makivik, monsieur Campbell. Dans ma circonscription fédérale, il y a 14 villages inuits. Vous êtes mes voisins. Vous avez des discussions avec Makivik et avec le fédéral. Je sais qu'on est à la veille d'une entente. Est-ce qu'on a discuté de la question de la compensation des coûts?

[Traduction]

M. Alex Campbell: Non, nous n'avons pas du tout parlé de dédommagements en ces occasions.

[Français]

Le président: Merci beaucoup.

En terminant, je tiens à vous dire que la députée qui représente à la Chambre des communes votre grande et belle région, madame Karetak-Lindell, vous représente très bien chaque jour. Elle a l'occasion de nous parler de vous, de votre peuple inuit et on est enchantés de son travail. On dit en inuit qujannamiik . Ça veut dire thank you. Chez nous, on dit nakungmiik.

Le comité vous rencontrera à Iqaluit dans deux ou trois semaines.

• 1745

[Traduction]

Merci beaucoup.

M. John Finlay: Monsieur le président, j'ai une petite question à poser. C'est très bien que nous ayons ce projet de loi en anglais et en français, mais je me demande si nous allons l'avoir en Inuktitut d'ici le 1er avril 1999, qui sera la langue officielle du Nunavut.

M. Alex Campbell: C'est le point de vue que la NTI défend, car nous voulons que toutes les lois du Nunavut soient traduites en Inuktitut. Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup. J'apprécie beaucoup ce que vous nous avez dit, monsieur Campbell et vous madame Evic-Twerdin. Merci beaucoup. Bonne journée.

[Français]

Nous allons maintenant rencontrer le Grand Conseil des Cris, représenté par M. Bill Namagoose et M. Brian Craik, directeur des relations fédérales.

[Traduction]

Nous allons prendre une pause-café de deux minutes.

• 1746




• 1751

[Français]

Le président: Nous commençons.

C'est un honneur pour moi de recevoir mes amis Bill Namagoose et Brian Craik, qui connaît très bien ma région de l'Abitibi. Ce sont des amis. On vous souhaite la bienvenue au comité.

Vous pouvez commencer votre déclaration.

[Traduction]

M. Bill Namagoose (directeur général, Grand Conseil des Cris du Québec): Merci, de nous accueillir au comité, monsieur le président.

Je suis directeur général du Grand Conseil des Cris, qui représente neuf communautés Cris sur le Territoire de la Baie James et qui est signataire de l'Accord sur la Baie James et le nord du Québec, conclu en 1975 dans le cadre d'un règlement des revendications territoriales.

Pour situer un peu notre position par rapport au Nunavut, sachez que le Grand Conseil des Cris et la nation cri ont signé l'Accord de la Baie James et du nord du Québec en 1975. La négociation de cet accord a été provoquée par le gigantesque projet hydroélectrique qui devait être entrepris sur notre Territoire. Bien sûr, tout ce qui entoure ce dossier constitue une autre histoire.

Après deux ans de négociation, les pressions étaient devenues énormes pour que nous signions l'Accord de la Baie James et du nord du Québec qui se trouvait à tirer au clair certaines activités qui allaient se dérouler sur notre Territoire.

Certains dossiers sont demeurés en suspens et n'ont pas fait l'objet d'une entente ou n'ont pas été inclus dans l'Accord de la Baie James et du nord du Québec, notamment la question des îles de la Baie James situées au large. Le chapelet d'îles en question s'étend de l'Ontario et de la frontière nord du Québec jusqu'à la Baie James et dans les eaux de la Baie d'Hudson. À l'époque, ces questions ont notamment été réglées sous la forme d'une lettre, que nous avons baptisée «lettre d'engagement», signée par Judd Buchanan, qui était alors ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. C'était en 1974.

Nous avons eu plusieurs discussions à ce sujet, mais nous n'avons jamais conclu quoi que ce soit au sujet des îles du large. Les Cris sont les premiers habitants et les premiers utilisateurs de ces îles qui, légalement et techniquement, font maintenant partie des Territoires du Nord-Ouest. Quand nous voyageons par bateau de Waskaganish à Moosonee ou Moose Factory, nous traversons donc, techniquement et légalement, les Territoires du Nord-Ouest. Quand un bateau coule dans la Baie James, il coule dans les Territoires du Nord-Ouest; il n'en demeure pas moins que nous avons la responsabilité de rechercher les sinistrés et de leur porter secours, où qu'ils soient à proximité des îles du large. Voilà donc nos revendications d'origine et les revendications autochtones des Cris.

On propose maintenant d'intégrer ces îles au Nunavut, sans qu'il y ait eu consultation avec les Cris et sans nous avoir demandé si nous sommes d'accord avec cette proposition.

Nous avons revendiqué ces îles et entamé des négociations à cet égard avant que le processus de création du Nunavut s'enclenche et qu'un accord soit conclu. Nous estimons donc que notre revendication est antérieure à celle du Nunavut. Voilà pourquoi nous sommes étonnés que le gouvernement du Canada n'ait pas consulté les Cris, ce qu'il est pourtant tenu de faire.

Nous demandons maintenant au comité d'utiliser ses pouvoirs pour faire pression sur le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien afin de provoquer les négociations. Cela fait longtemps que nous sommes prêts à entamer des négociations, mais nous n'avons pas d'interlocuteurs du côté ministériel, parce que personne n'est investi du mandat voulu pour cela.

Je vais maintenant demander à notre directeur des relations fédérales, Brian Craik, de vous donner un petit aperçu des tentatives que nous avons déployées en vue de tenir de telles négociations.

• 1755

[Français]

Le président: Monsieur Craik, nous avons reçu une lettre concernant les îles côtières. Pourriez-vous lire cette lettre?

M. Brian Craik (directeur des relations fédérales, Grand Conseil des Cris du Québec: Je peux la lire.

[Traduction]

Voici ce que dit cette lettre:

    Je vous écris au sujet de l'étude par le Comité permanent de la question de la création du Territoire du Nunavut. Pour les Cris, un élément du dossier demeure en litige et nous prions le Comité permanent de s'enquérir auprès du ministre pour savoir où en est l'organisation des négociations sur les îles côtières de l'est de la Baie James et du Sud de la Baie d'Hudson avec le Grand Conseil des Cris.

    Le ministre des Affaires indiennes et du Grand Nord reconnaît les droits que revendiquent les Cris sur ces îles, les glaces de mer et les eaux qui les entourent, le paysage marin et les ressources qui s'y trouvent. Les droits des Cris sur cette région avaient été reconnus pour la première fois par le ministre en 1977...

En fait, cela remonte à plus loin, à 1974, mais ces droits ont été reconfirmés en 1977.

    ... les négociations avaient alors débuté. Elles ont par la suite été suspendues en raison de divergences fondamentales au sujet des dédommagements et du statut de la région faisant l'objet des négociations. Depuis les premières démarches en vue de créer le Territoire du Nunavut, les Cris insistent auprès du gouvernement pour qu'il entame un débat sur la question.

    En 1996, le ministre de l'époque, Ron Irwin, a confirmé que la revendication des Cris englobait les eaux et les glaces de mer au large des côtes et a annoncé que les négociations pouvaient débuter. Depuis sept ans, le Ministère se traîne toutefois les pieds en ce qui touche la revendication. Les représentants du Ministère ont d'abord voulu connaître l'ampleur de la revendication des Cris en demandant si elle englobait les mammifères marins et le gibier à plumes. Ces renseignements avaient déjà été fournis lors de réunions avec des fonctionnaires et dans d'autres forums de négociation.

Il est question ici des négociations conduites avec M. Vennat au sujet de l'Accord sur la Baie James et le nord du Québec.

    Le grand chef a répondu aux demandes successives et confirmé qu'effectivement, les Cris revendiquaient toutes les ressources et que cette question et toutes les autres pourraient être mises au clair au cours des débats futurs. On ne nous a toujours pas fait savoir si le Ministère s'est déjà entendu ou non avec le Cabinet au sujet du mandat de négociation. Nous avons fait des démarches auprès du ministre pour demander que le mandat soit accordé immédiatement, et avons recommandé qu'il doit confier à Michel Vennat, qui représente le ministère dans les négociations portant sur d'autres droits et pensions concernant les Cris. Le ministre ne nous a pas encore répondu.

    Vu son silence, nous sommes maintenant obligés d'envisager des recours en justice. La question des droits des Cris est étudiée dans le contexte de la création du Nunavut, projet que nous appuyons sans réserve. Nous ne laisserons toutefois pas le gouvernement agir comme si les droits des Cris n'existaient pas. Nous sommes prêts à négocier, mais l'inaction du Ministère et du gouvernement du Canada nous oblige à envisager d'autres solutions.

[Français]

Le président: Nous passons à la période des questions.

Monsieur Konrad.

[Traduction]

M. Derrek Konrad: Si je comprends bien, votre tactique consiste à utiliser le projet de loi C-39 pour contraindre le gouvernement à s'asseoir à la table des négociations.

M. Bill Namagoose: Je ne parlerai pas de tactique, car c'est une question qui est en suspens depuis 1974.

M. Brian Craik: Nous avons entendu dire que vous teniez des audiences sur ce sujet et nous nous sommes demandés si nous allions demeurer cois ou si nous allions profiter de cette occasion pour faire valoir notre point de vue. N'oubliez pas que le Nunavut, tel qu'il est décrit dans le projet de loi et tel qu'il sera créé, englobe les îles Cris. La question de la création du Nunavut a donné lieu à de nombreuses discussions et à plusieurs plébiscites dans les Territoires du Nord-Ouest. En revanche, jamais aucun responsable fédéral ne s'est rendu en Territoire cri pour nous parler du Nunavut.

M. Derrek Konrad: À propos des plébiscites, dont on nous a parlé un peu plus tôt, est-ce que les résidents des îles cris, s'il y en a, ont été appelés à participer à cette forme de consultation? Si oui, comment ont-ils réagi?

M. Brian Craik: Les îles cris ne sont habitées que durant une partie de l'année. Certaines sont habitées à l'heure actuelle, mais il y en a aussi qui sont habitées l'hiver. Certaines de ces îles sont très petites. D'autres, comme l'île Charlton est assez grosse pour soutenir une population de gibiers suffisamment importante pour attirer les chasseurs l'hiver.

M. Derrek Konrad: Je veux tirer une chose au clair: est-ce que les Cris concernés résident au Québec?

M. Bill Namagoose: Oui, ils vivent au Québec.

M. Derrek Konrad: Comme les îles que vous revendiquez font partie du Nunavut, vous vous retrouvez avec un gros problème de compétence sur les bras.

M. Bill Namagoose: Pour l'instant, elles font partie des Territoires du Nord-Ouest, mais on se propose de modifier leur statut légal après l'adoption de ce projet de loi.

• 1800

M. Derrek Konrad: Cela vous faisait-il problème avant, quand ces îles appartenaient aux Territoires du Nord-Ouest? Je suppose que si ces négociations se sont déroulées dans le contexte des Territoires du Nord-Ouest, la question ne se pose plus.

M. Bill Namagoose: Il y a des problèmes, mais pour l'instant... Le service de police cri n'a pas le pouvoir d'intervenir dans les Territoires du Nord-Ouest. Nous ne pouvons pas, légalement, entreprendre des missions de recherche et de sauvetage dans les îles du large, mais nous le faisons tout de même, parce que c'est souvent une question de vie ou de mort. Quand nous demandons l'intervention des services de police ou d'autres services des Territoires du Nord-Ouest, nous ne les obtenons pas. Il nous faut appeler Yellowknife pour que des agents de police interviennent dans certains cas. Des passeurs transportent de l'alcool par les Territoires du Nord-Ouest, de Moosonee à notre région. Comme vous le disiez, nous planons dans l'incertitude juridique. Il faut régler cela.

M. Derrek Konrad: Très bien. Je vais écouter avec intérêt les autres députés, qui auront peut-être des questions plus longues et plus intéressantes que les miennes à poser. Quoi qu'il en soit, je vois tout à fait quel est votre problème.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Konrad.

Monsieur Craik, pourriez-vous nous donner les noms des villages comme Waskaganish qui sont sur la côte?

[Traduction]

M. Brian Craik: Le village de la partie sud-est de la Baie James s'appelle Waskaganish. Le suivant, au nord, s'appelle Eastmain. Toujours vers le nord, vient ensuite Wemindji, puis Chisasibi; le dernier, en bas de la Baie d'Hudson, s'appelle Whapmagoostui.

[Français]

Le président: Y a-t-il une grande population là?

M. Brian Craik: Il y a une grande population. Je dirais que presque la moitié de la population crie se trouve sur la côte. C'est plus de 6 000 personnes.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Fournier.

M. Ghislain Fournier: J'ai une question à trois volets. Dans un premier temps, j'aimerais savoir pourquoi les négociations concernant vos droits, dans le contexte de la création du Nunavut, sont interrompues depuis 1996. Deuxièmement, pouvez-vous préciser la nature de vos revendications? Troisièmement, en quoi sont-elles liées au projet de loi sur le Nunavut?

M. Brian Craik: Je pourrais vous dire qu'en 1977, les négociations concernant les îles côtières entre le gouvernement du Canada et les Cris ont été bloquées surtout, à l'époque, par les questions concernant la compensation qui serait payée aux Cris. On avait élaboré à l'époque un régime pour ces îles, mais il y avait un grand différend entre les deux parties concernant la compensation.

Il y avait d'autres questions, qui n'ont pas été prises en considération par la population crie. On ne voulait pas aller plus loin dans les consultations avec les gens des villages parce qu'on n'était pas très près d'une entente. Donc, on n'a pas terminé les consultations auprès de la population crie. Nos revendications sur les îles côtières ont évolué avec le temps parce que les droits des autochtones ont aussi évolué dans les cours du Canada. On devrait donc maintenant traiter de la question des titres des Cris sur ces îles côtières et aussi de questions des droits aborigènes des Cris.

À l'époque, en 1977, c'était surtout une question de droits aborigènes des Cris. Il n'y avait pas de titres à la terre reconnus par la cour. Depuis ce temps, le titre à la terre a été reconnu. Donc, on va aller de l'avant avec nos revendications là-dessus.

M. Ghislain Fournier: En quoi vos revendications sont-elles liées au projet de loi sur le Nunavut? Pourquoi y a-t-il un lien entre les deux?

M. Brian Craik: Les gens qui mettent en place des régimes comme celui de Nunavut disent toujours à ceux qui ne sont pas consultés que ça ne touche pas leurs droits. C'est ce qu'on dit toujours, mais ce n'est pas toujours accepté par les Cris.

• 1805

M. Ghislain Fournier: Je vous remercie beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Fournier.

J'aimerais que vous nous précisiez une petite chose. Vous avez même des Inuits dans vos villages cris.

M. Brian Craik: On a des Inuits dans le village de Chisasibi, et eux aussi ont des intérêts dans les îles côtières. Ce n'est pas une question de prendre le droit des Inuits sur les îles côtières. On veut négocier avec les Inuits pour savoir quels sont les droits des Inuits et les droits des Cris sur les îles.

Le président: Merci, monsieur Craik.

Monsieur Keddy.

[Traduction]

M. Gerald Keddy: Merci, monsieur le président.

On vient, je crois, de nous donner une information très intéressante que je me propose de résumer.

Les Indiens cris du Québec sont aux prises avec une revendication territoriale qui remonte à longtemps, puisque vous avez parlé de 1974 et de 1977. Vous avez sûrement des preuves de ces discussions de l'époque. Tant que la revendication territoriale n'est pas réglée, vous n'avez pas de problème à couper les frontières territoriales, en passant, par exemple, du Territoire québécois à celui des Territoires du Nord-Ouest...

J'essaie de vous suivre, mais cela me semble être une véritable énigme territoriale. Je suis un peu choqué de constater toutes les négociations et tous les accords auxquels ont pris part le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et le nouveau Territoire du Nunavut, étant donné qu'on pouvait s'attendre à ce que le tracé des frontières soit relativement facile, puisque tous ces gens-là appartiennent actuellement à la même assemblée législative. On y a cependant beaucoup travaillé et il semble que cela ait donné de bons résultats, mais voilà qu'on a complètement négligé une autre frontière.

Je ne vois rien dans... Je ne dis pas que votre revendication est fondée, ni qu'elle n'est pas fondée. Je ne dispose pas de suffisamment d'information pour porter ce genre de jugement et je ne suis même pas certain que je me prononcerais si je le pouvais. Quoi qu'il en soit, il y a quelque part dans la loi ou dans les amendements à la loi, matière à une revendication territoriale non réglée, si bien que nous devons trouver une solution pour régler ce différend. Ce qui m'inquiète, c'est qu'on n'ait pas encore entamé les négociations.

Corrigez-moi si je me suis trompé dans mon résumé de la situation, mais dans tous les cas de figure, les négociations ont été rompues en 1977 sur la question des dédommagements.

M. Brian Craik: Surtout à cause des dédommagements.

M. Gerald Keddy: Très bien. Trois parties sont concernées par cela. D'abord, la province du Québec, deuxièmement les Cris et, troisièmement, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, auquel il faut maintenant rajouter le nouveau Territoire du Nunavut. C'est extraordinaire cette question des compétences territoriales. Voulez-vous répondre avant que je ne m'emmêle trop les pinceaux.

M. Bill Namagoose: Pour ce qui est de la définition des frontières, on est en train de diviser les actuels Territoires du Nord-Ouest.

M. Gerald Keddy: Tout à fait.

M. Bill Namagoose: Ce qui donnera naissance au Nunavut. Pour l'instant, les frontières du Québec se terminent à la ligne de marée haute, après quoi on passe dans les Territoires du Nord-Ouest. Donc, nos camps de chasse se trouvent du côté québécois et l'on va chasser dans les Territoires du Nord-Ouest. C'est comme cela que la frontière a été dessinée.

Il nous reste 11 mois pour régler ce problème. Nous sommes prêts à nous asseoir et à négocier avec le gouvernement du Québec, mais il nous faut un interlocuteur de l'autre côté, c'est-à-dire au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, au gouvernement fédéral.

• 1810

Le président: Ce sera votre dernière question.

M. Gerald Keddy: Merci, monsieur le président.

À l'instar des autres membres du comité, j'ai demandé des renseignements additionnels, mais j'ai besoin de plus encore. En revanche, nous n'avons pas besoin de données supplémentaires pour savoir que le ministère et le ministre doivent tout de suite s'attaquer à ce problème.

M. Bill Namagoose: C'est ce que nous demandons.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Keddy. Monsieur Patry.

[Traduction]

M. Bernard Patry: Merci, monsieur Craik et monsieur Namagoose. J'ai été très heureux de vous accueillir.

Comme je le disais avec les représentants de la NTI, il est certain que les frontières du Nunavut coïncideront avec les anciennes frontières des T.N.-O. En outre, ce qui est très important dans le cas de ce projet de loi, comme je le disais en réponse à une question de M. Campbell, c'est que cette mesure législative et la Loi sur le Nunavut de 1993 ne modifient en rien les droits des peuples autochtones vivant dans la région du Québec, notamment des Cris.

Vous avez posé une question au sujet des négociations. Personnellement, je me suis déjà entretenu avec des représentants du ministère sur certaines questions, et ce sujet a parfois été mis sur la table. J'espère—je précise ici que je ne suis pas le ministre, mais simplement le secrétaire parlementaire—que nous pourrons nommer un négociateur le plus tôt possible, parce que, comme vous venez de l'indiquer, nous ressentons, nous aussi, le besoin d'entreprendre des négociations. Vous êtes prêts à négocier, mais je ne sais pas si ce sera avec la personne que vous mentionnez dans votre lettre, c'est-à-dire M. Vennat, et j'espère, dans tous les cas, que nous pourrons vous fournir un nom et que nous entreprendrons des négociations avec le Grand Conseil des Cris et avec les Inuit.

C'est tout ce que je voulais dire. Merci.

Le président: Merci, monsieur Patry.

M. Bill Namagoose: Pour ce qui est des droits des Cris, notre peuple, qui avait des revendications sur certaines terres ou îles au large, s'est vraiment fâché quand le gouvernement du Québec—ou plutôt le gouvernement fédéral—a modifié le statut légal de ces terres sans d'abord nous consulter. Il faut conclure un protocole et le respecter. C'est un vieux problème que nous étions prêts à régler il y a longtemps déjà. On n'aurait donc pas dû modifier le statut légal de ces Territoires.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Craik et monsieur Namagoose. Je tiens à vous dire que le comité a très bien compris votre revendication. Je pense que nous devons respecter la Convention de la Baie James. Il y a des fonctionnaires qui sont ici présents et qui ont très bien compris votre déclaration. C'est à nous d'agir.

[Traduction]

Merci beaucoup.

[Français]

Nous allons maintenant rencontrer le Inuit Tapirisat of Canada, représenté par M. Alan Braidek, directeur général.

[Traduction]

Monsieur Braidek, vous avez une déclaration à faire. Vous avez cinq minutes.

M. Alan Braidek (directeur général, Inuit Tapirisat du Canada): Merci, monsieur le président. Je serai bref.

Je m'appelle Alan Braidek et je suis directeur général de Inuit Tapirisat du Canada. ITC est l'organisation inuit nationale représentant environ 40 000 Inuit répartis dans 53 collectivités, dans six régions du nord du Canada.

Pour tous les Inuit du Canada, l'établissement du Nunavut illustre de façon éclatante, la reconnaissance de la place qu'ils occupent au Canada. Le projet de loi C-39 apporte les changements nécessaires à la Loi sur le Nunavut en vue de faciliter la transition vers cette nouvelle instance et de la rendre plus efficace. Comme il a été question, plus tôt aujourd'hui, des changements nécessaires, je ne m'y attarderai pas.

• 1815

ITC est satisfaite du niveau de consultation ainsi que du processus de consultation entrepris à l'occasion de la préparation du projet de loi C-39. Comme vous le savez, NTI a étroitement participé à ces consultations.

Par l'intermédiaire de ses membres siégeant au conseil d'administration d'ITC, Nunavuk Tunngavik Inc. a tenu au courant les Inuit Tapirisat du Canada, la Inuvialuit Regional Corporation (représentant les Inuit du Delta du Mackenzie), la Makivik Corporation (représentant les Inuit du nord du Québec), et la Labrador Inuit Association (représentant les Inuit du Labrador), des progrès réalisés à propos du projet de loi C-39, de la nécessité de modifier la Loi sur le Nunavut et des particularités des modifications envisagées.

ITC estime que le projet de loi C-39 modifie, comme il se doit, la Loi sur le Nunavut et qu'il représente un compromis acceptable entre les différentes parties pour parvenir à établir le Nunavut, dans les délais voulus et de façon efficace. ITC demande l'adoption rapide du projet de loi C-39, tel qu'il a été soumis.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Braidek.

Monsieur Konrad.

M. Derrek Konrad: Merci.

Vous ne nous avez pas donné beaucoup matière à vous interroger. C'est peut-être une stratégie de votre part.

Je vais revenir sur la question que j'ai posée plusieurs fois, parce que vous représentez tous les Inuit du Nord, mais je vais vous demander de me répondre plus particulièrement ce qui concerne les Inuit du Nunavut.

Encore une fois, je le rappelle, le Parti réformiste estime que ce projet de loi devrait être modifié pour permettre l'élection d'un sénateur à la Chambre haute, de façon à correctement représenter le peuple du Nunavut, plutôt que d'y envoyer quelqu'un qui serait nommé par le Premier ministre. Que pensez-vous de cela?

M. Alan Braidek: Je dirais, très brièvement, que les Inuit Tapirisat du Canada n'ont pas de position officielle relativement à l'élection ou à la nomination de ce sénateur. Tout ce que je dirais, c'est qu'il est prévu, dans la Loi sur le Nunavut, que ce Territoire doit prendre la place qui lui revient au sein de la Confédération canadienne, telle qu'elle existe actuellement, et qu'il soit donc représenté, comme c'est actuellement le cas, par un sénateur nommé. Personnellement, je dirais que la méthode actuelle est la bonne, puisque c'est celle à laquelle le Nunavut va adhérer.

M. Derrek Konrad: Avez-vous dit que tous les Inuit du Canada ont été consultés relativement à l'établissement du Nunavut et qu'ils étaient d'accord avec cela?

M. Alan Braidek: Les organisations les représentant, par la voie de leurs membres siégeant au conseil d'administration des Tapirisat, ont été informées des progrès réalisés relativement à la création du Nunavut et à la nécessité d'apporter des modifications à la Loi sur le Nunavut. ITC est d'accord avec la nécessité d'effectuer ces modifications, telles qu'on vous les a soumises.

M. Derrek Konrad: Comment êtes-vous financé, si vous me permettez de vous poser cette question, et quelle est votre mission au juste?

M. Alan Braidek: Nous avons pour mission de représenter les intérêts des Inuit du Canada à propos des questions nationales.

Quant au financement, nous sommes financés pour chaque projet que nous entreprenons et nous bénéficions en outre d'un financement de base, qui nous vient essentiellement du gouvernement fédéral, mais aussi d'autres sources.

M. Derrek Konrad: Donc, votre organisme n'est pas financé par les Territoires du Nord-Ouest, par le Yukon ni par aucun autre gouvernement provincial ou territorial. C'est cela?

M. Alan Braidek: C'est cela.

M. Derrek Konrad: Merci.

Le président: Merci, monsieur Konrad.

Monsieur Fournier.

• 1820

[Français]

M. Ghislain Fournier: Pendant votre intervention, j'ai noté trois questions. En tant qu'organisme représentant les Inuits du Canada, vous êtes à l'origine de l'élaboration de ce projet de loi C-39 dans son ensemble. Êtes-vous satisfaits du projet de loi ou s'il y a des questions qui n'ont pas été abordées et qui devraient l'être?

[Traduction]

M. Alan Braidek: Le projet de loi nous satisfait.

[Français]

M. Ghislain Fournier: Vous êtes satisfaits du projet de loi dans son ensemble.

Est-ce que la création du Nunavut est positive, dans l'ensemble, pour la population inuit? Est-ce que votre population a été largement consultée et peut-on retenir qu'elle en est satisfaite?

[Traduction]

M. Alan Braidek: Comme cela a été indiqué plus tôt aujourd'hui, l'un des premiers objectifs des Inuit Tapirisat du Canada était d'obtenir la création du Territoire du Nunavut. Nous sommes donc très satisfaits de ce qui a été réalisé, nous sommes satisfaits que le Territoire va être établi, et nous estimons très positif pour l'ensemble des Inuit du Canada qu'on reconnaisse ainsi la place qui revient aux Inuit du Nunavut, au sein de la Confédération.

[Français]

M. Ghislain Fournier: Donc, si je vous demandais si vous avez l'impression que vous avez été bien consultés et que vos recommandations ont été prises au sérieux, vous répondriez que c'est le cas. Donc, je pars sans inquiétude. Je sais que les Inuits ont été bien consultés, que leurs recommandations ont été prises au sérieux et que l'adoption de ce projet de loi va satisfaire votre nation.

[Traduction]

M. Alan Braidek: Oui, ITC estime que les Inuit du Nunavut ont été correctement consultés et nous appuyons tout à fait le projet de loi.

[Français]

M. Ghislain Fournier: Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Braidek. Merci, monsieur Fournier. Comme d'habitude, vous avez toujours des bonnes questions et vous faites bien votre travail de député.

Monsieur Keddy.

[Traduction]

M. Gerald Keddy: Merci, monsieur le président. Je n'ai pas de question.

[Français]

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Braidek, je sais que c'est court, mais les députés ont des réunions à 18 h 45. Il y en a qui ont deux réunions ce soir. Il y en a qui ont l'intention d'aller prendre une soupe rapidement. Je tiens à vous remercier d'être venu. Je tiens à remercier aussi les fonctionnaires qui sont ici présents, notre équipe de travail et les gens qui sont venus d'aussi loin qu'Iqaluit.

[Traduction]

Je vous souhaite une bonne journée. Merci beaucoup.

[Français]

La séance est levée jusqu'à demain, 11 heures.