AAND Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS AND NORTHERN DEVELOPMENT
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES ET DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 27 octobre 1998
[Français]
Le président (M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.)): Bonjour. J'aimerais souhaiter la bienvenue aux représentants de la Commission crie-naskapie. Conformément au paragraphe 32(5) du Règlement, nous procédons aujourd'hui à l'étude du rapport 1998 de la Commission crie-naskapie.
La Commission crie-naskapie est représentée par M. Richard Saunders, président par intérim; M. Robert Kanatewat, commissaire; M. Philip Awashish, commissaire; et M. Brian Shawana, directeur général.
Monsieur Saunders, je vous invite à faire une déclaration, après quoi j'inviterai M. Kanatewat et M. Awashish à prendre la parole.
[Traduction]
M. Richard Saunders (président, Commission crie-naskapie): Merci beaucoup, monsieur le président.
Mes commentaires liminaires seront brefs; ainsi nous disposerons de plus de temps pour répondre aux questions des membres du comité.
J'aimerais vous tracer un bref historique de notre commission, puis vous expliquer pourquoi nous sommes ici aujourd'hui.
Comme les députés le savent peut-être, le 11 novembre 1975, la Convention de la Baie James et du Nord québécois a été conclue entre le gouvernement du Canada et les Cris du nord du Québec. Par la suite, le 31 juin 1978, la Convention du Nord-Est québécois a été signée avec les Naskapis, près de Schefferville, dans le nord-est du Québec.
Conformément à ces deux conventions, le gouvernement s'est engagé à adopter une mesure législative visant à assurer l'autonomie de ces groupes pour remplacer la Loi sur les Indiens en ce qui a trait aux nations cries et naskapies.
Le 8 juin 1984, la Loi sur les Cris et les Naskapis a été promulguée; cette mesure législative prévoyait, entre autres choses, que des pouvoirs d'autonomie politique seraient accordés aux Cris et aux Naskapis et cette mesure remplaçait à toutes fins pratiques la Loi sur les Indiens.
La Loi sur les Cris et les Naskapis prévoyait entre autres choses la constitution d'une commission, la Commission crie-naskapie, dont les membres seraient proposés par les nations cries et naskapies du nord du Québec et nommés par décret du conseil.
Les premiers commissaires—soit Robert Kanatewat, moi-même et monsieur le juge Réjean Paul—avons été nommés en février 1986. Le juge Paul nous a quittés, et j'ai été par la suite nommé président. En novembre dernier, Philip Awashish a été nommé à la Commission.
Les principales fonctions de la Commission sont la préparation d'un rapport biennal qui doit être déposé au Parlement et porter sur l'application de la Loi sur l'autonomie gouvernementale—soit la Loi sur les Cris et les Naskapis. Ainsi, tous les deux ans, nous déposons un rapport au Parlement. Voici le dernier rapport.
On m'a demandé ce que représentait cette photo; il s'agit de Chisasibi, la communauté de Robert, avec l'aurore boréale et la comète Hale-bopp. Ce n'est pas l'explosion d'un ministre. C'est simplement la comète.
[Français]
Le président: Pourriez-vous nous dire si c'est un Cri qui a pris cette photo-là et quel est son nom?
[Traduction]
M. Richard Saunders: C'était en fait un membre de la collectivité, Jimmy Sam.
Le président: Merci.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): C'est une très belle photo.
M. Richard Saunders: Nous préparons un rapport biennal sur l'application de la loi. Ce rapport est notre sixième rapport.
Nous devons également enquêter sur les réclamations qui nous sont présentées par des particuliers ou des organisations, les Premières nations, et d'autres intervenants, concernant l'exercice de pouvoirs et de fonctions conférés sous le régime de cette loi.
• 1115
C'est la première fois que nous comparaissons devant votre
comité. Par le passé nous avons simplement déposé notre rapport au
Parlement. La ministre le reçoit et elle le dépose au Parlement.
Aucune autre mesure n'est prévue dans la loi.
Un des problèmes que nous et la collectivité avons relevés, c'est que très peu de suivi est accordé à nos rapports. C'est un problème.
Un peu plus tôt cette année, nous avons rencontré le président du comité et lui avons demandé à rencontrer le comité. Nous avons également demandé à rencontrer le comité du Sénat. Le sénateur Charlie Watt a accepté notre demande.
Nous espérons faire ressortir certains des grands points abordés dans notre rapport; nous espérons que votre comité jugera bon d'étudier plus à fond nos conclusions et nos recommandations, et d'y donner suite.
Je vais conclure rapidement puis je céderai la parole à mes collègues.
Le rapport contient essentiellement des renseignements sur le succès remporté par l'application de la Loi sur les Cris et les Naskapis ainsi que sur les problèmes qui découlent de l'application de cette mesure législative. Nous parlons de notre propre compétence, une question que nous n'avons jamais abordée auparavant. Nombre d'intervenants nous ont parlé du problème auxquels ils se heurtaient ou qu'ils n'avaient aucun recours s'ils avaient des appréhensions au sujet de l'application des conventions, de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et la Convention du Nord-Est québécois; ces gens s'adressent souvent à nous. Nous avons étudié la loi en détail pour voir si nous avions vraiment compétence dans le domaine. Nous croyons que nous avons une compétence limitée à cet égard et il nous appartient de nous acquitter de cette responsabilité.
Le rapport porte également sur des modifications structurelles et législatives que nous jugeons appropriées. Je crois que cette question étudiera tout particulièrement les députés. Évidemment la loi n'a pas été modifiée depuis son adoption, et elle doit être mise à jour.
Enfin, nous étudions dans ce document certains des problèmes particuliers qui touchent l'application de la loi. Ces questions sont étudiées en détail dans le rapport. Mes collègues en aborderont quelques-unes.
Notre processus de consultation a été freiné par les restrictions financières. Comme vous le savez pertinemment, les déplacements dans le Nord sont très coûteux. Notre budget n'a pas été augmenté depuis 1992.
Le gouvernement, conformément aux dispositions de la loi, a mis sur pied, cinq ans après la création de la Commission, soit en 1990, la Commission d'enquête Cowie, sous la présidence de M. Ian Cowie. Cette commission d'enquête avait pour mandat d'examiner les activités de notre commission. La loi stipulait qu'un rapport devrait être déposé sur la question.
Pour votre gouverne, nous avons des exemplaires de ce document. Les membres de la Commission Cowie ont proposé plusieurs choses, y compris une augmentation considérable de notre budget. En fait, ils ont prétendu que les contraintes budgétaires qui nous étaient imposées étaient le fait des fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes qui voulaient limiter l'action de notre commission et l'empêchaient de fonctionner vraiment efficacement.
Cette année nous n'avons pas pu rencontrer autant gens que nous l'aurions voulu. Et ce pour des raisons financières. Nous avons abordé le problème avec la ministre à deux reprises.
Je dois cependant dire publiquement que pour ce qui est des problèmes financiers de l'année en cours, son personnel nous a dit qu'elle avait accepté de nous accorder un budget supplémentaire de 150 000 $ pour l'année financière en cours pour que nous puissions nous acquitter de nos fonctions de façon appropriée au cours des six prochains mois. En fait, nos ressources financières étaient si limitées, que nous n'aurions pas pu nous acquitter du mandat qui nous a été confié dans la loi. La ministre a, il faut l'avouer, réglé ce problème pour l'année financière en cours.
Cependant des problèmes financiers s'annoncent pour les années à venir et notre personnel et les fonctionnaires du ministère discutent actuellement de la question pour essayer de régler le problème. Nous l'avons signalé à la ministre également et nous espérons qu'elle le réglera comme elle a su régler celui de cette année.
[Français]
Le président: Je m'excuse, monsieur Saunders.
[Traduction]
Pouvez-vous me dire à combien s'élève votre budget actuellement?
M. Richard Saunders: Oui. Nous avions demandé 1,37 million de dollars par an et le ministère nous a offert 645 000 $.
• 1120
La ministre a dit très bien, notre budget est fort limité,
alors dites-moi ce dont vous avez absolument de besoin? Je ne vous
demande pas ce que vous voudriez faire, mais simplement ce qu'il
vous faut pour vous acquitter du mandat que vous a accordé la loi.
Nous lui avons dit qu'il nous fallait 850 000 $. Nous espérons qu'elle pourra donner suite à notre demande.
Monsieur le président, je crois que j'ai pris suffisamment de temps. J'aimerais demander à mon collègue, M. Philip Awashish, de poursuivre l'exposé.
Merci.
M. Philip Awashish (commissaire, Commission crie-naskapie): Meegwetch.
[Le témoin parle en langue autochtone]
Merci, monsieur le président, messieurs et mesdames membres du comité permanent. Je vous offre mes meilleures salutations et j'espère que tout va bien pour vous, y compris en ce qui a trait à vos fonctions et responsabilités au Parlement.
Je crois qu'il importe que j'explique quelle était la situation avant les traités modernes—c'est-à-dire avant la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois.
Avant la signature de ces conventions, les Cris et les Naspakis avaient leur propre forme d'autonomie gouvernementale, il s'agissait d'un droit inhérent qui était exercé conformément aux lois traditionnelles cries et naskapies.
Puis on a adopté la Loi sur les Indiens, il s'agissait évidemment d'une loi du Parlement canadien, visant à établir un régime formel destiné aux gouvernements locaux où les chefs et conseils étaient élus conformément aux dispositions de cette mesure législative. Le ministre des Affaires indiennes, évidemment, exerçait des pouvoirs énormes aux termes de la Loi sur les Indiens.
Quant aux Cris et aux Naskapis, comme ils disent, la Loi sur les Indiens antérieurement aux accords limitait l'exercice de l'autonomie gouvernementale. Elle limitait l'exercice de cette autonomie politique simplement parce que le ministre des Affaires indiennes avait beaucoup trop de pouvoirs et d'autorité sur les Indiens et les terres indiennes.
Lorsque les Cris ont signé la Convention de la Baie James et du Nord québécois, il y avait quelques 6 000 Cris. Aujourd'hui en 1998, nous en comptons environ deux fois plus; il y a donc maintenant 12 000 Cris qui vivent dans les neuf collectivités cries. Il y a une collectivité naskapie. La Loi sur les Cris et les Naskapis, s'applique donc à dix collectivités autochtones—neuf collectivités cries et une collectivité naskapie.
Comme l'a signalé le président de la Commission crie-naskapie, la Loi sur les Cris et les Naskapis est prévue à l'article 9 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et à l'article 7 de la Convention du nord-est québécois. Il s'agit d'une loi fédérale spéciale qui prévoit la gestion et l'administration des terres des catégories 1A et 1A-N.
• 1125
Ces traités modernes, soit la Convention de la Baie James et
du Nord québécois et la Convention du nord-est québécois, prévoient
la répartition des terres en trois catégories, la catégorie I, II,
et III. Ces conventions portent donc sur un vaste territoire dans
le nord du Québec.
Toutes les collectivités cries-naskapies sont situées sur ce qu'on appelle des terres de catégorie I, en particulier les terres de catégorie IA. Les terres de catégorie IA relèvent de la compétence fédérale. C'est là où intervient la Loi sur les Cris et les Naskapis. Elle prévoit l'administration et la gestion de ces terres. Elle stipule que les gouvernements locaux sont en fait responsables de cette gestion. Il s'agit d'une loi spéciale qui, d'après les Cris et les Naskapis, les Premières nations, reconnaît leurs droits inhérents à l'autonomie politique.
La Loi sur les Cris et les Naskapis prévoit la création d'une commission, la Commission crie-naskapie. Lorsque les Cris et les Naskapis ont négocié leurs dispositions respectives de la Loi sur les Cris et les Naskapis, ils ont évidemment négocié avec le gouvernement du Canada les modalités de la Loi sur les Cris et les Naskapis. Ils ont insisté pour qu'on établisse un processus qui permettrait aux parties signataires de surveiller, examiner et évaluer les gouvernements locaux et leur fonctionnement. Ainsi, la Commission crie-naskapie a été mise sur pied pour surveiller l'application de la Loi sur les Cris et les Naskapis.
Comme l'a signalé notre président, la Commission rend compte de l'application de la loi. Il s'agit d'un conseil consultatif créé par une loi spéciale. La Commission prépare un rapport biennal, dans quatre langues, qui est présenté à la ministre, qui à son tour dépose ce rapport à la Chambre des communes.
La loi prévoit un examen spécial de la Commission, et de la loi proprement dite, à certains égards. Cette étude, comme l'a signalé le président, a été effectuée par Ian Cowie, un autre commissaire. En 1989, la Commission Cowie a déposé un rapport. À notre connaissance, on n'a jamais vraiment donné suite aux recommandations qui y étaient formulées.
Nous savons que le ministère des Affaires indiennes a procédé à un examen de la Loi sur les Indiens qui, évidemment, ne s'applique plus de façon générale aux Cris et Naskapis. La Loi sur les Cris et les Naskapis remplace la Loi sur les Indiens. Cependant, le ministère des Affaires indiennes a procédé à un examen de la Loi sur les Indiens, et étudié diverses questions comme les territoires, les recettes et la fiducie. En 1996, le vérificateur général a présenté un rapport sur cet examen.
• 1130
L'examen de la Loi sur les Indiens a coûté environ 21 millions
de dollars au gouvernement du Canada, pourtant on n'a pas encore
procédé à un examen officiel de la Loi sur les Cris et les Naskapis
pour savoir comment cette loi pourrait être modifiée de façon à
mieux refléter la situation et la réalité actuelles des
gouvernements locaux cris et naskapis. Il est clair que la Loi sur
les Cris et les Naskapis doit évoluer de façon parallèle aux
gouvernements locaux cris et naskapis.
La Commission crie-naskapie a procédé à un processus de consultation publique. Notre rapport, dont je crois que tout le monde a reçu copie, est le résultat des consultations publiques de toutes les collectivités.
Nous tenons donc des audiences publiques dans chaque collectivité quand nous le pouvons. Les gens expriment leurs opinions. Ce n'est pas simplement les gouvernements locaux qu'on consulte mais les membres de la collectivité. Nous devons faire rapport de ce que les représentants des gouvernements locaux et les membres des collectivités disent. Comme je l'ai déjà signalé, il y a dix collectivités, neuf collectivités cries et une collectivité naskapie.
Puisque les Cris-Naskapis interviennent sur bien des questions, la principale plainte que nous recevons à titre de commissaires, est que les gouvernements ne respectent pas les modalités de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois.
Les intervenants disent qu'il faut pleinement mettre en oeuvre toutes les dispositions de ces conventions.
Ils disent que la loi fédérale, comme la Loi sur les Cris et les Naskapis, doit évoluer pour tenir compte de la situation et des réalités actuelles en ce qui a trait à l'autonomie gouvernementale, aux gouvernements locaux, dans les collectivités cries-naskapies.
Ils font valoir qu'il faut revoir le rôle de notre commission, la Commission crie-naskapie, car elle doit avoir une voix et rôle efficaces, pour que les Cris-Naskapis puissent exercer leur droit inhérent à l'autonomie politique d'une façon qui corresponde à leurs propres besoins, leur propre situation et leur propre réalité.
La Commission crie-naskapie doit évidemment jouer un rôle permanent et surveiller en fait l'application des dispositions touchant l'autonomie politique dans la Loi sur les Cris et les Naskapis et, évidemment, dans les traités modernes, soit la Convention du Nord-Est québécois et la Convention de la Baie James et du Nord québécois.
• 1135
Ils disent qu'ils ont leurs propres problèmes dans leurs
propres collectivités, des problèmes dont ils veulent faire état
aux gouvernements. Le gouvernement prévoit un budget particulier
pour les administrations et gouvernements locaux en ce qui a trait
à l'administration et la gestion des terres de catégorie 1A. Les
ententes de financement sont établies par l'entremise de ce qu'on
appelle les ententes de financement concernant «les opérations et
l'entretien». Ces ententes de financement doivent être revues de
manière à ce qu'elles puissent mieux répondre aux besoins, aux
exigences et aux réalités actuelles des gouvernements cris et
naskapis.
Le rapport aborde également le besoin d'améliorer les relations entre le gouvernement fédéral et les Cris afin de régler les problèmes de compétence qui existent entre le Québec, le gouvernement du Canada et le gouvernement cri. Il y a également des problèmes d'ordre territorial non réglés.
L'expansion économique est une autre question qui a été abordée par les collectivités cries-naskapies. Les intervenants ont dit que les dispositions sur l'expansion économique des traités modernes n'ont pas été mises en oeuvre. Ils sont d'avis qu'on ne leur permet même pas de participer à l'expansion économique de leurs propres territoires, et que des sociétés et gouvernements ont adopté une politique de refus: le refus de reconnaître les droits de participer à l'expansion économique et d'en tirer profit.
Les gens ne disent pas qu'ils s'opposent à l'expansion économique par principe, mais qu'ils s'opposent à une expansion économique qui se déroule de façon irresponsable au point de vue environnemental, social, moral et juridique.
Les Premières nations cries d'Oujé-Bougoumou veulent être reconnues comme une bande indienne dans la Loi sur les Cris et les Naskapis, car c'est ce qu'ils désirent. Les Naskapis ont leurs propres préoccupations.
Nous avons présenté, dans notre rapport de 1998, 41 recommandations. Clairement, comme l'a signalé notre président, nous demandons au Comité permanent des affaires indiennes et du développement du Nord de s'assurer que le gouvernement du Canada tiendra vraiment compte de ces recommandations et qu'il y donnera suite.
J'ai signalé que notre commission a comme responsabilité permanente d'assurer l'application de façon appropriée de la Loi sur les Cris et les Naskapis. Certains Cris-Naskapis dans leurs propres collectivités ont aussi exprimé leur point de vue sur le rôle et le mandat de notre commission.
Je demanderai maintenant à mon collègue, Robert Kanatewat, de terminer notre exposé.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Awashish.
• 1140
Monsieur Kanatewat, croyez-vous que les députés pourraient
aller voter à la Chambre des communes, puis revenir pour entendre
votre exposé?
M. Robert Kanatewat (commissaire, Commission crie-naskapie): Certainement.
Le président: Merci beaucoup.
[Français]
Nous laissons tous nos documents ici. Nous nous absenterons pendant 15 à 20 minutes.
Le président: Nous reprenons notre séance qui avait été interrompue en raison d'un vote imprévu. Nous nous excusons de cette interruption, monsieur le président et messieurs les commissaires. Certains députés sont tenus de participer à d'autres réunions, mais ils se joindront à nous dès qu'il leur sera possible de le faire.
Je cède à nouveau la parole à M. Robert Kanatewat, grand chef de Fort George du temps de sa jeunesse et aujourd'hui membre de la commission qui nous fait profiter de son expérience. À vous la parole, monsieur Kanatewat.
[Traduction]
M. Robert Kanatewat: Merci, monsieur le président.
[Le témoin parle en langue autochtone]
Bonjour, mesdames et messieurs. J'espère que vous allez bien. J'aimerais vous faire part des préoccupations des diverses collectivités que nous avons établies.
On s'inquiète, entre autres choses, de l'accessibilité et de la visibilité dans les collectivités. En fait, le grand conseil, l'ARC, et les chefs qui en font partie, le Grand chef, et même le ministre des Affaires indiennes, ont tous clairement indiqué que nous ne sommes pas suffisamment visibles dans les collectivités. Nous voudrions que cela change.
• 1320
Évidemment, une visite à tous les deux ans ne suffit pas, mais
en fait les renseignements et commentaires que nous recueillons
pendant cette période la plupart du temps tombent dans l'oreille
d'un sourd. C'est pourquoi un nouveau commissaire a été nommé en
novembre et pour la première fois depuis bien longtemps tous les
postes au sein de la Commission ont été comblés. La loi stipule
qu'il faut trois commissaires. Auparavant nous n'en avions que deux
et même un seul vers la fin.
Nous supposons qu'à partir d'aujourd'hui la Commission comptera toujours trois membres, ce qui en fait est stipulé dans la Loi sur les Cris et les Naskapis. Nous ferons tout ce que nous pouvons dans ces circonstances pour répondre aux préoccupations et aux aspirations des Cris et des Naskapis.
Cela dit, notre rôle de commission nous pose bien des problèmes principalement parce que nous savons à quel point ce rôle est limité. On stipule dans la loi que nous devons présenter un rapport biennal au gouvernement, et entendre les instances présentées par les collectivités locales et également le gouvernement le cas échéant.
Certaines des tâches qu'on nous a confiées n'ont pas été effectuées simplement faute de financement; il faut que ce genre de choses soit précisé lorsqu'on va réviser la loi. Dans une large mesure, cette loi doit être modifiée. Il n'existe actuellement aucun mécanisme de règlement des différends pour résoudre les problèmes qui existent dans les collectivités. Il existe un écart énorme entre les négociations et le processus de médiation. Ainsi, il nous faut modifier ces lois afin de préciser ce que le gouvernement veut savoir des attentes qu'ont les Cris de la Commission.
Nombre de collectivités sont d'avis qu'il faudrait élargir notre mandat, et que nous ne devrions pas nous contenter de déposer un rapport biennal, mais jouer aussi le rôle de médiateur lors de différends entre le gouvernement et les Cris et les Naskapis. Évidemment, on a fait état de cette tendance dans le rapport Cowie. Notre rôle est très limité et nous n'avons que quelques ressources. Si on élargissait notre mandat, nous pourrions probablement accomplir plus.
Comme mes collègues l'ont déjà signalé au comité, nous avons beaucoup de problèmes, pas simplement financiers mais au chapitre des responsabilités. Notre mandat est très limité mais je crois qu'il pourrait être élargi pour nous permettre en fait de mieux répondre aux besoins des Cris.
Évidemment, puisqu'il n'y a pas de mécanisme de règlement des différends comme je l'ai signalé tout à l'heure, les Cris se tournent vers la Commission pour qu'elle règle leurs problèmes. Évidemment, il y a eu plusieurs rapports au fil des ans, et en 1991, nous avons également fait ressortir le fait qu'il fallait assurer la participation des jeunes et des anciens pour régler leurs problèmes dans la collectivité.
• 1325
Certaines collectivités ont effectivement mis sur pied des
regroupements d'anciens et, de jeunes et dans certains cas, cela a
créé un conflit entre les conseils de bande parce qu'il n'y avait
pas de processus établi. Au fil des ans, évidemment, dans une
certaine mesure, on a modifié un peu rajusté les choses pour
résoudre la situation.
De plus, j'aimerais vous signaler qu'il existe un problème aux îles au large des côtes car les gens s'inquiètent de l'impact du nouveau territoire qui sera créé en 1999, le Nunavut. On parlait jadis des Territoires du Nord-Ouest et on changera le nom de cette nouvelle région qu'on appellera désormais le Nunavut. Évidemment, comme vous le savez, il y a beaucoup d'îles dans la baie James et dans la baie d'Hudson et les Cris s'inquiètent de ce changement de situation parce que par le passé ils se sont rendus dans ces îles pour se livrer à leurs activités traditionnelles pendant les quatre saisons de l'année. Nombre de ces îles sont les endroits où ils chassent et beaucoup servaient d'abris. On s'en servait pour se livrer à des activités traditionnelles. En raison de la nature il n'y avait peut-être plus d'habitants permanents sur ces îles mais ces dernières ont beaucoup aidé les Cris qui s'y rendaient.
Nous avons appris à nous servir de ces îles plus souvent que par le passé, et nous avons appris à en exploiter les ressources pour la pêche, la chasse et le piégeage. En fait, tout au bas de la baie James, vers le territoire ou la région Waskaganish, se trouve une grosse île qu'on appelle l'île Charlton, où est installée une ligne de piégeage qui appartient à l'un des membres de la collectivité de Waskaganish; évidemment la création de ce territoire préoccupe les gens de Waskaganish ainsi que la famille qui est propriétaire de cette ligne de piégeage.
En raison de leur utilisation fréquente de ces îles, les Cris voudraient que ces dernières soient reconnues comme faisant partie du territoire cri. Personnellement, je ne crois pas que les Inuit s'intéressent particulièrement à ces îles, surtout qu'elles se trouvent dans le bas de la baie James. Je ne crois pas qu'en être propriétaires les intéresse particulièrement. Ils ne se sont jamais rendus dans la région et je ne m'attends pas à ce qu'ils s'y rendent à l'avenir.
QQuant aux autres choses, comme la visibilité dont je parlais tout à l'heure, nous voudrions aider dans une plus grande mesure les Cris dans leur collectivité, particulièrement en ce qui a trait à certaines choses. Même si nous ne pouvons pas nous mêler de problèmes internes des collectivités locales, nous essayons toujours de nous assurer qu'ils savent à qui s'adresser pour obtenir réponse à leurs doléances. Nous aimerions les orienter dans la bonne voie. Nous ne pouvons pas nous mêler de conflits internes, mais ça ne veut pas dire que nous ne pouvons pas dire aux personnes visées ce qu'elles pourraient faire.
Évidemment, pour assurer cette visibilité dans les collectivités il faut un certain financement. Comme on le disait tout à l'heure lorsque notre président a parlé de notre situation financière, il faut beaucoup d'argent pour répondre aux besoins et aux exigences de la collectivité. Un financement additionnel nous permettrait de mieux répondre aux besoins de la collectivité que nous ne l'avons fait par le passé.
• 1330
Évidemment, nous avons également signalé qu'il s'agit là de
notre sixième rapport; c'est la première fois que nous nous
adressons à votre comité. Après la présentation de nos rapports
précédents, personne n'a fait quoi que soit pour donner suite à nos
recommandations ou pour essayer de redresser les problèmes dont
nous avions fait état. Ainsi, les gens au niveau local se demandent
pourquoi on a créé une commission si on ne tient pas compte de ses
recommandations. Pourquoi mettre sur pied un organisme qu'on
ignorera complètement?
Nous avons l'intention d'assurer un certain suivi dans nos rapports afin que les gens puissent mieux être au courant de ce qui préoccupe les membres de la localité. Nous ne pouvons pas nous pencher sur nombre des questions qui préoccupent les gens parce que le temps nous presse, mais en général ces derniers—tout particulièrement ceux qui n'ont pas l'occasion de venir faire part de leurs préoccupations dans un contexte comme celui-ci—jugent qu'il est temps que l'on donne suite à nombre des engagements qu'on a déjà pris.
Ils se fient à leurs chefs—et nous avons également hâte de rencontrer les chefs des diverses collectivités au cours des prochains jours—pour régler certains des problèmes locaux.
J'espère que votre comité tiendra compte des commentaires que nous avons faits ici.
Nous avons hâte de répondre à vos questions afin de mieux préciser les problèmes qui existent dans notre région.
Merci.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Kanatewat. Nous sommes impressionnés par vos déclarations. Sachez que nous sommes ici pour essayer de trouver des solutions.
Nous allons passer à M. Bachand et entamer la première période de questions.
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Il est un peu difficile de subir des interruptions comme celles qu'on a subies aujourd'hui, mais, que voulez-vous, cela fait partie des impondérables de la politique sur la Colline du Parlement. Avant que nous soyons interrompus, j'avais pris note d'une série de questions, mais quand je suis revenu, monsieur le président, mon bout de papier avait disparu. J'ai donc été obligé de me préparer une autre série de questions. Heureusement que je les avais gardées dans mon ordinateur cérébral.
Le président: Félicitations, monsieur Bachand, vous avez une bonne mémoire.
M. Claude Bachand: Monsieur Saunders, les documents que j'ai en main indiquent que vous êtes le président intérimaire de la commission. Je sais que cela a pris du temps avant que les nominations à la commission soient faites par le gouverneur en conseil. Je me demande si vous en êtes actuellement le président et si, au moment où l'on se parle, tous les commissaires ont été nommés en bonne et due forme par le gouverneur général.
Deuxièmement, j'aimerais qu'on parle de la question des îles. Je crois que M. Kanatewat avait soulevé cette question qui préoccupe les Cris. Je partage cette préoccupation parce que le Nunavut revendique actuellement qu'on lui cède les îles qui sont très près des côtes du Québec. Selon moi, ces îles font plutôt partie du territoire des Inuits ou des Cris du Québec. Vous semblez dire que des négociations se poursuivent et j'aimerais en connaître l'état actuel. Est-ce que les discussions se poursuivent toujours et est-ce que des ententes à court et à moyen termes semblent possibles? Autrement dit, j'aimerais savoir quel est l'état de la situation du côté des îles Belcher et des îles qu'on revendique dans la Baie d'Ungava et la Baie James.
Monsieur Awashish, vous avez aussi insisté sur l'importance d'apporter des modifications à la loi. J'ai cru comprendre qu'il faudrait peut-être qu'on arrête une fois pour toutes de parler de questions de financement. Vous avez parlé de la création d'un secrétariat et recommandé que la commission joue un rôle plus important. Souhaitez-vous qu'on apporte des amendements de cet ordre ou qu'on aille encore plus loin? J'aimerais que vous décriviez le type d'amendements que vous nous proposez d'apporter à cette loi-là. Je vous comprends de vouloir moderniser la loi puisqu'elle date déjà d'un certain nombre d'années.
• 1335
En juin 1998, on mettait sur pied une table
Canada-Cris. Quel genre de discussions y tient-on? Par
exemple, essaie-t-on de convaincre la ministre de nous
accorder un financement accru ou de modifier la loi?
J'aimerais que vous nous donniez un bref aperçu
du type de discussions qui se tiennent à la table
Cris-Canada, si discussion il y a. J'ai déjà vu des
tables qu'on a constituées où il n'y a
jamais eu de discussion. Enfin, pourriez-vous décrire
l'état actuel de cette table et les propos qu'on y
tient?
[Traduction]
M. Richard Saunders: Certainement, monsieur le président, nous nous sentons parfaitement libres de répondre à toutes les questions. Nous voulons également être brefs parce que nous ne voulons pas trop monopoliser votre temps.
Pour répondre à la première question de M. Bachand au sujet de notre statut de commissaires, Philippe Awashish et Robert Kanatewat ont été nommés commissaires pour un mandat de quatre ans en novembre dernier; leurs mandats expirent donc en novembre 1999.
J'ai été nommé président par intérim pour terminer le mandat du juge Paul, mandat qui a expiré le 14 juillet dernier. Avant cela, la ministre a écrit aux dirigeants des Cris et des Naskapis, pour répondre à leur proposition de me nommer président ordinaire, en signalant qu'elle demanderait un décret du conseil pour rendre cela officiel. Nous n'avons pas encore vu ce décret. Je crois comprendre qu'il est en cours de préparation au Bureau du Conseil privé. C'était en juin dernier, si je ne m'abuse, que la ministre a signifié son intention de le faire. Si je comprends bien, les roues tournent lentement au BCP.
Pour ce qui est de la question des îles, mes deux collègues sont des encyclopédies vivantes à ce sujet. Je voudrais toutefois dire rapidement quelques mots sur notre perspective comme groupe, comme commission, sur les îles. Il y a un certain nombre de questions liées aux îles.
Il y a un dossier qui concerne les Cris. Il s'agit d'un territoire cri traditionnel. Il n'était pas visé par la Convention de la Baie James et du Nord québécois, mais il reste territoire cri traditionnel. La problématique consiste à répondre à ce que nous disent les Cris.
Nous comprenons très bien qu'il y a, entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral, des divergences de vues pour ce qui est de savoir si certaines des îles ou toutes devraient être situées dans le territoire du Québec ou si elles doivent continuer d'appartenir aux Territoires du Nord-Ouest, à la région qui deviendra bientôt le territoire du Nunavut. Nous comprenons qu'il s'agit là de questions importantes. Nous ne nions pas cela du tout.
Toutefois, notre préoccupation n'est pas vraiment de nous ingérer dans ce dossier fédéral-provincial particulier mais de communiquer le fait que les Cris ont des intérêts traditionnels—pour les juristes présents dans la salle, c'est ce qu'on appelle des droits d'usufruit—et qu'ils veulent que ces intérêts soient pris en considération.
Il y a quelques années, le ministre de l'époque, Judd Buchanan, avait écrit au grand chef, lui signalant que le gouvernement était prêt à discuter de ces questions. À ma connaissance, les discussions n'ont pas eu lieu, mais Robert et Philip auront beaucoup de choses à dire à ce sujet.
Pour ce qui est des modifications à la loi, comme l'a mentionné un de mes collègues, il y a eu un processus visant à envisager les modifications nécessaires à la Loi sur les Indiens. Plusieurs millions de dollars ont été consacrés à ce processus. Malheureusement, il n'y a pas eu consensus entre toutes les Premières nations au Canada au sujet des amendements qu'il faudrait apporter. Cela se comprend: il y a un peu plus de 600 Premières nations. Le consensus a été difficile à réaliser et ce processus en est Dieu seul sait où.
Dans le cas de la Loi sur les Cris et les Naskapis, il y a uniquement dix bandes et il y a un consensus assez général sur certaines modifications nécessaires. L'une d'elles consiste à inclure la nation crie Oujé-Bougoumou, une autre consiste à régler la question des quorums requis en vertu de la Loi pour effectuer certaines transactions tels que des emprunts à long terme. Il y a également un certain nombre de questions sur lesquelles tout le monde semble s'entendre.
• 1340
Il y a probablement quelques autres idées qui pourraient
découler de ces rencontres et pour lesquelles il pourrait ne pas y
avoir consensus absolu, mais je pense qu'il y a un consensus
suffisant pour que certaines modifications soient envisagées par le
gouvernement. Nous en avons parlé dans notre rapport.
Robert, voulez-vous dire quelque chose au sujet des îles et de ces autres questions? Ensuite, Philip?
M. Robert Kanatewat: Merci, monsieur le président.
Pour ce qui est des îles au large des côtes, je tiens à souligner, comme je l'ai déjà dit, que ces îles ont été utilisées par les Cris en général, en particulier dans la région de la baie James et dans une partie de la Baie d'Hudson.
Toutefois, monsieur Bachand, vous n'avez pas parlé des Îles Belcher. Il y a là une communauté inuit. Les Cris n'iront pas jusqu'à dire tout à fait qu'ils souhaitent que ces îles fassent partie de leur territoire. Nous ne tenons pas absolument à ce que les Îles Belcher fassent partie des terres dont les Cris ont l'usufruit. Nous nous préoccupons surtout de la baie James, où nous avons des îles, et d'une partie de la Baie d'Hudson, près des côtes. L'une de ces îles s'appelle Long Island et l'autre, je crois, se trouve près de Grande-Baleine ou de Poste-de-la-Baleine, comme vous voulez l'appeler—en cri, c'est Whapmagoostui—et ce sont principalement les îles dont se préoccupent les Cris. Étant donné que les Inuit occupent les Îles Belcher, nous n'allons pas nous battre pour des choses que nous ne pourrons pas obtenir.
En ce qui concerne les autres îles, que le président a considérablement décrites en réponse aux autres questions, je veux simplement dire qu'en général les gens craignent beaucoup de les perdre et d'y perdre les droits de pêche, d'occupation, etc. à ce sujet, je vais laisser mon autre collègue prendre la parole.
M. Philip Awashish: Je voudrais parler de la question des modifications à la loi. J'ai dit que la loi devait être modifiée de façon à représenter les réalités et la situation des gouvernements locaux, c'est-à-dire des gouvernements cris et naskapis.
Nous avons déjà dit que la loi a été promulguée en 1984. Cela signifie donc qu'elle est en vigueur depuis 14 ans sans aucune modification. Or, elle est censée évoluer du fait de l'autonomie gouvernementale, du fait de l'exercice de l'autonomie gouvernementale dans les localités cries et autres.
En général, la loi est modifiée pour les raisons suivantes: premièrement, surmonter les obstacles ou les empêchements au processus de prise de décisions dans les administrations et les gouvernements locaux; deuxièmement, améliorer et simplifier le processus de modification de la loi.
Après 14 ans d'application de la loi, le fait qu'elle n'ait pas été modifiée, signifie selon moi, que ce processus est certainement long et difficile. Je ne sais pas combien de temps il faudra pour modifier la loi, mais c'est certainement... Ce que nous savons avec certitude, c'est qu'il faut que le gouvernement du Canada, qui a promulgué cette loi, prenne les mesures qui s'imposent.
• 1345
La loi doit également être modifiée pour permettre d'établir
et d'améliorer les services de police. Les forces policières
locales éprouvent certains problèmes d'autorité lorsqu'elles
doivent exercer leur mandat et rétablir l'ordre au sein des
localités cries.
Pour ce qui est du classement des terres, comme je l'ai dit, les territoires les ont classées en trois catégories, les catégories I, II et III. Il y a des terres qui ressortissent à la compétence fédérale, d'autres à la compétence provinciale. Les Cris-Naskapis estiment que ce sont leurs terres, qu'elles relèvent également de leur compétence.
La loi doit également être modifiée de façon à constituer en personne morale les Cris Oujé-Bougoumou. Il existe neuf communautés cries. Huit ont été constituées en bandes en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis. La Nation crie Oujé-Bougoumou est la seule qui ne soit pas encore constituée en bande d'après la loi.
Il faut également modifier la loi de façon à améliorer l'efficacité de la Commission crie-naskapie. Mes collègues et moi avons évoqué les problèmes relatifs au rôle et au mandat de la Commission qui est un organisme consultatif. Voilà le résultat de négociations entre les Cris-Naskapis et le gouvernement du Canada. La Loi sur les Cris et les Naskapis a donné lieu à la création d'un organisme consultatif appelé la Commission crie-naskapie, qui surveille la mise en oeuvre de la loi.
Comme l'a dit mon collègue Robert Kanatewat, nous devons certainement nous interroger sur le rôle et le mandat de cette commission. Les gens ne se gênent pas pour le faire. S'il s'agit d'un organisme consultatif, alors ses conseils, ses recommandations doivent être suivis des décisions voulues de la part du gouvernement, afin que l'exercice et la pratique de l'autonomie gouvernementale par les gouvernements locaux puissent évoluer. Il y a une certaine évolution à l'échelle locale, mais elle n'est pas conforme à celle qui est prévue par la loi. La loi doit être modifiée de façon à se conformer à la pratique actuelle des gouvernements locaux.
Si vous voulez des détails, je vous invite à lire le chapitre 11 de notre rapport, qui parle de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Les dispositions relatives à un quorum font problème. Il y a un obstacle à l'efficacité de la prise de décisions. Les quorums sont trop élevés pour être respectés. Il y a des dispositions de fiscalité qui causent des problèmes aux bénéficiaires cris-naskapis des accords. Il y a les problèmes policiers dont j'ai parlé. Il y a le problème de l'autorité de la Commission crie-naskapie, déjà évoqué, celui de la constitution en personne morale de la Nation crie Oujé-Bougoumou et celui des dispositions visant à modifier la loi.
Il doit bien y avoir un procédé qui permette plus facilement de modifier la loi. À l'heure actuelle, c'est extrêmement difficile, comme le prouve l'histoire. Jusqu'à présent, la loi n'a jamais été modifiée, malgré les recommandations de la Commission, du sixième rapport de la Commission, et après une enquête prévue par la loi. Il s'agit du rapport Cowie, découlant de l'enquête Cowie sur la Commission, qui a également recommandé que des modifications soient apportées à la loi.
Donc, après six rapports de la Commission et un rapport d'enquête qui a réclamé des modifications à la loi, le gouvernement du Canada n'a toujours pas agi de manière à modifier la loi pour qu'elle évolue en fonction de la situation actuelle et qu'elle témoigne de la réalité des gouvernements locaux des collectivités cries-naskapies.
• 1350
Je veux également faire une observation sur la table ronde
Cris-Canada. Pour la Commission, il s'agit d'un processus récent
dont sont convenus les chefs cris et le gouvernement du Canada. Si
nous avons bien compris, cette table ronde vise à établir entre les
Premières nations cries et le gouvernement du Canada une nouvelle
relation de travail, plus avantageuse. C'est un nouveau processus
qui s'est amorcé.
Il y a eu une rencontre initiale des chefs cris et des représentants du gouvernement du Canada à la table ronde. Cela a commencé par une séance d'orientation, pour qu'ils apprennent à se connaître. D'après ce que j'en sais, cette table ronde Cris-Canada n'est pas parvenue au point où l'on discute de dossiers précis et où l'on tâche de les régler.
Il y a toutefois également un autre processus en cours. Il s'agit des négociations entre les Cris et le gouvernement du Canada, appelé le processus Vennat-Moses. Il a été prévu pour régler certains problèmes d'application de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.
Le président: Merci, monsieur Awashish.
Merci, monsieur Bachand.
Monsieur Bryden.
M. John Bryden: Merci, monsieur le président.
Je note, à la recommandation 8, que vous demandez au gouvernement de passer en revue l'entente sur le paiement de transfert du financement sur les opérations et l'entretien en vue de répondre à certaines de vos préoccupations touchant la situation actuelle, l'évolution des circonstances et la nécessité d'accroître le financement dans ce contexte. Sur quoi vous basez-vous pour faire cette recommandation? Quelles preuves avez-vous qu'il existe un problème?
M. Richard Saunders: Je vais demander au commissaire Awashish de répondre à cela en premier.
M. Philip Awashish: Merci. Ces dernières années, ces ententes sur le paiement de transfert du financement sur les opérations et l'entretien ont été négociées par les Cris et le gouvernement du Canada. En général, il s'agit d'ententes quinquennales qui prévoient l'examen des besoins et des situations particuliers des administrations et des gouvernements cris, même pendant le mandat quinquennal. Souvent, les bandes cries ont demandé au gouvernement de réexaminer ces ententes de transfert pendant leur mandat de cinq ans, en évoquant l'évolution de la situation de la bande. Il arrive parfois des situations que la bande trouve incontrôlables et...
M. John Bryden: Monsieur le président, je voudrais rapprocher le témoin de la question que je pose, parce que nous manquons de temps. Je veux savoir quelles preuves la Commission a-t-elle qu'il existe un problème touchant des pénuries de fonds ou une évolution de la situation. Comment savez-vous qu'il s'agit-là d'un problème? Qu'avez-vous fait pour savoir qu'il y avait là un problème?
M. Philip Awashish: Comme nous l'avons dit plutôt, nous avons tenu des rencontres et des audiences publiques au sein des localités cries. Les gouvernements et les administrations cries nous informent de leurs problèmes particuliers dans l'exercice de leurs pouvoirs respectifs. Ils nous ont parlé des ententes quinquennales et des problèmes qui en découlent.
M. John Bryden: Dans ce cas, permettez-moi d'aller un peu loin. Vous n'examinez pas vraiment ce que ces administrations dépensent. Examinez-vous les registres qui font état des sommes dépensées par ces diverses organisations? Comment savons-nous qu'elles dépensent l'argent de façon appropriée? Examinez-vous réellement les documents?
M. Philip Awashish: Les gouvernements et les administrations locales font des démarches auprès de nous. Nous obtenons les ententes proprement dites sur le paiement de transfert du financement sur les opérations et l'entretien. Les administrations signalent les secteurs précis où elles ont des difficultés à respecter les ententes.
M. John Bryden: Donc, si je peux en arriver à l'essentiel de ma question, y a-t-il suffisamment de transparence dans l'administration de ces fonds, pour que vous, la Commission, puissiez juger des besoins? Dans ce contexte, je vous signale que vous ne fournissez aucune preuve documentée dans votre rapport. Vous ne présentez que des preuves anecdotiques. Si l'on parle d'augmenter le financement, chose que je serai ravi de faire si c'est nécessaire, où se trouve la preuve documentée à l'appui de votre recommandation?
M. Richard Saunders: Je voudrais traiter de cette question, monsieur le président. Une des choses que nous avons dites au tout début du rapport c'est que nous estimons qu'à certains égards il ne se conforme pas aux normes jugées appropriées pour les rapports présentés à des parlementaires.
Une des lacunes, pour une commission comme la nôtre, tient au fait que nous obtenons nos preuves auprès de différents témoins, ce qui en fait bien sûr des preuves anecdotiques. Contrairement à d'autres conseils, tribunaux et commissions, nous n'assermentons pas d'ordinaire les témoins que nous rencontrons. Nous n'exigeons pas de voir des documents. Nous ne pouvons pas obtenir de l'information par assignation de témoins. Dans ces circonstances, n'ayant pas ce type d'autorité, nous devons faire des recherches prudentes, pour vérifier si ce que l'on nous dit est exact, s'il s'agit d'une impression ou d'une déclaration politique, ou s'il s'agit d'une réalité.
Cela signifie que nous devons avoir la capacité d'effectuer des enquêtes indépendantes pour voir si les déclarations qui nous sont faites sont valables. Or, cette commission elle-même étant sous-financée, nous n'avons pas du tout réussi à passer en revue adéquatement les preuves documentées ni à faire une vérification indépendante des déclarations que nous recevons. Nous ne disons pas que les témoins nous disent le contraire de la vérité, loin de là. Nous disons que nous n'avons pas eu la capacité de vérifier leurs dires. Cela nous préoccupe considérablement et, franchement, c'est une des faiblesses de notre commission à l'heure actuelle: nous n'avons pas les capacités de recherche pour vérifier certaines des déclarations qui nous sont faites.
Toutefois, nous pouvons constater la situation lorsque nous sommes dans les localités. On nous dit, par exemple, ne pas être capable de régler les problèmes de voirie ou de logement; on nous fournit de l'information sur le nombre de logements nécessaires et le nombre de logements existants. Nous devons considérer cela comme une information qui nous a été communiquée. Nous ne pouvons pas faire de recherche pour établir, par exemple, ce que sont les besoins réels en matière de logement. Il y a beaucoup de renseignements que vous êtes en droit d'avoir et que nous ne pouvons pas obtenir avec certitude. C'est là le problème.
M. John Bryden: Cela n'explique-t-il pas, entre autres choses peut-être, pourquoi les recommandations de la Commission n'ont jamais été suivies? Elles ne se fondent pas sur une analyse solide. Elles se fondent uniquement sur des informations anecdotiques. En ma qualité d'homme politique, je participe à beaucoup de rencontres municipales et une grande partie des renseignements qui m'y sont communiqués relèvent du ouï-dire et ne sauraient constituer la base de recommandations présentées au gouvernement. Voilà votre problème. Il ne s'agit pas tellement d'une question d'argent, mais plutôt du fait que votre commission n'a pas le pouvoir d'obtenir le type de renseignements dont des politiques auraient besoin pour porter un jugement.
M. Richard Saunders: En général, l'information nous est communiquée. Notre problème, c'est que nous n'avons pas le personnel ou les ressources pour la vérifier. N'ayant pas le pouvoir d'assignation, et ne pouvant pas interroger des témoins sous serment, je pense que nous devrions faire des recherches pour vérifier certaines questions précises. Il y a beaucoup de déclarations générales qui sont vraisemblables et qu'il n'est pas vraiment nécessaire de vérifier. Toutefois, certaines des précisions que vous recherchez méritent d'être examinées de plus près.
M. John Bryden: J'ai une dernière question, monsieur le président, parce que je sais que mon ami, M. Finlay, voudra peut-être en poser une.
Si le gouvernement examinait l'utilisation du fonds des opérations, puis-je supposer ou espérer qu'en général vous seriez d'accord pour que cet examen permette au gouvernement ou à un comité d'obtenir des collectivités cries des détails sur la façon dont l'argent est dépensé et sur ce que sont leurs besoins financiers?
• 1400
Autrement dit, nous aurions essentiellement une vérification
comptable des dépenses des diverses collectivités afin de juger
nous-mêmes des besoins qui existent réellement. Cela serait-il
raisonnable, selon vous?
M. Richard Saunders: Oui, je crois. Je pense que nous devons pouvoir vérifier les déclarations qui méritent d'être vérifiées, et vous aussi.
Le président: Merci, monsieur Bryden. Monsieur Finlay.
M. John Finlay (Oxford, Lib.): Merci, monsieur le président. Je vais essayer de traiter de questions un peu plus générales. Je note que la convention a été signée en 1975, que la Convention du Nord-Est québécois a été signée en 1978 et que la Loi sur les Cris et les Naskapis date de 1985, comme vous l'avez dit. Cette commission, ce me semble, est une sorte d'organisme chargé de surveiller le fonctionnement de la convention.
À l'époque où j'étais membre du Comité de l'environnement, nous nous sommes rendus dans le Nord québécois et avons rencontré des témoins cris qui nous ont dit que certaines des choses qu'ils attendaient lorsque la convention a été signée, ne se sont jamais adéquatement produites. L'une d'elles était la cogestion des ressources. Lorsque j'ai demandé comment fonctionnait cette cogestion, il s'est avéré que les conseils étaient... Je ne me rappelle plus la réponse. Un tiers était composé d'Autochtones, un tiers représentait le Québec et un tiers représentait le gouvernement fédéral.
Les membres autochtones ont toutefois précisé qu'il arrivait souvent que le gouvernement fédéral n'envoie qu'une seule personne ou même aucune pour le représenter. Pourtant, il y avait des votes, où votaient les homologues représentant l'administration québécoise. On ne pouvait donc pas vraiment parler de cogestion.
J'ai lu qu'en février 1998, la Cour supérieure du Québec, dans l'affaire opposant la Commission scolaire crie au procureur général du Canada a rendu un jugement selon lequel la Convention de la Baie James et du Nord québécois est une convention au sens où l'entend le paragraphe 35(3) de la Loi constitutionnelle de 1982 peut être considérée comme un traité approuvé et mis en oeuvre par le Canada et le Québec, malgré les arguments présentés par le Canada et le Québec selon lesquels la Convention de la Baie James et du Nord québécois est un contrat et non un traité.
Je ne veux pas de longues explications, mais il me semble que vous pourriez dire quelques mots sur la position adoptée par les deux gouvernements. J'aimerais savoir si les positions des gouvernements ont évolué depuis la signature de la convention ou, selon vous, si elles sont simplement demeurer inchangées? Les gouvernements ne vont-ils pas s'orienter vers la cogestion, l'autonomie gouvernementale pour les terres de la catégorie I, le règlement de ces conflits? Vont-ils simplement continuer de faire tourner la roue? Je commence à être las d'entendre toujours la même chose. On doit pouvoir faire quelque chose.
J'ai deux ou trois autres questions. Mais vous voulez peut-être répondre à celle-là d'abord, pour fournir une mise au point historique. Si je me trompe du tout au tout, dites-le-moi. Si j'ai raison, eh bien...
M. Richard Saunders: Nous avions un chapitre portant sur les conventions et je vais demander à mes collègues de traiter de ces questions dans quelques instants, car il s'agit là de questions très importantes.
Je crois que le problème fondamental, et on en entend parler partout au Canada—je suis sûr que vous l'entendez dire tout le temps—c'est que le gouvernement n'honore pas ses traités. Tout le monde le sait. Et il y a lieu de croire que c'est vrai.
Je ne pense toutefois pas que cela soit dû au fait que le gouvernement soit composé de sinistres individus qui concluent des ententes pour les violer ensuite. Je ne pense pas que ce soit le cas. Je crois qu'il existe certains problèmes structuraux, des problèmes de processus. Nous en parlons un peu au chapitre 2.
Je crois que lorsque vous êtes ministre, lorsque vous êtes au cabinet, vous avez été élu, vous avez remporté des élections, vous estimez avoir le mandat de prendre des décisions touchant les orientations politiques, les dépenses, et ainsi de suite. Et c'est ce que vous faites. C'est pourquoi nous avons des élections au Canada.
Vous prenez donc des décisions au sujet de la politique relative aux Affaires indiennes, au sujet de la politique économique, etc. Tout cela est très bien, et lorsque quelqu'un s'oppose à ce que vous faites, vous répondez «c'est une question politique; si vous n'êtes pas d'accord, nous entendrons ce que vous avez à dire, mais nous avons été élus pour prendre des décisions, dont certaines sont difficiles. Si on en arrive à cela, vous pouvez voter contre nous. C'est votre droit». C'est ainsi que devraient fonctionner la plupart des activités gouvernementales. Il s'agit d'un processus politique, démocratique.
• 1405
Toutefois, lorsque vous signez une convention qui, selon le
tribunal, constitue un traité en vertu de la Constitution, cela ne
donne pas lieu à toute une série d'options politiques. Cela crée
plutôt des obligations à faire respecter.
L'ennui, c'est que le ministère des Affaires indiennes et tous les autres ministères fonctionnent selon le modèle discrétionnaire, celui du choix parmi des options politiques diverses. Ces fonctionnaires ne travaillent pas comme si leur mission était de d'exécuter un contrat, de mettre en oeuvre un accord ou d'honorer un traité. Ce n'est pas le cadre dans lequel ils opèrent. Leur état d'esprit les amène à agir comme un gouvernement qui doit prendre des décisions, et ils estiment que, cette année par exemple, ils ne peuvent pas accorder plus d'argent pour les dossiers relatifs aux Cris ou pour régler les problèmes du Traité no 7 en Alberta, parce qu'ils ont des contraintes budgétaires ou autres. Et ce comportement est approprié dans la plupart des cas.
Il n'est toutefois pas approprié dans le cas d'un traité. Nous pensons donc que le gouvernement devrait établir un secrétariat chargé d'administrer ses obligations légales. Ce serait un secrétariat bien distinct des fonctions d'élaboration de la politique et de choix des dépenses au sein du ministère. Nous pensons que la mise en oeuvre de la Convention de la Baie James ne devrait pas relever du ministère. Et cela s'applique également aux traités et autres ententes.
M. John Finlay: Monsieur le président, chers collègues, cela m'amène directement à la question suivante. Il ne me semble pas que la Commission, dont j'ai lu l'énoncé de mission, ait la capacité de faire ce qu'elle doit faire, c'est-à-dire de surveiller la mise en oeuvre du Pacte sur les Cris et les Naskapis. N'est-ce pas là le rôle de la Commission?
M. Richard Saunders: Surveiller la mise en oeuvre.
M. John Finlay: Très bien. Mais cela ne fonctionne pas, parce que vous exercez une surveillance et que vous ne présentez des rapports au ministère des Affaires indiennes. Certaines choses se produisent, d'autres non, et c'est pourquoi, j'imagine, monsieur le président, que l'on nous amène ces questions ici. Nous allons essayer, mais...
Donc cette commission ne fonctionne pas et nous allons essayer de créer un secrétariat. Ensuite, à la page suivante, nous allons créer une «cour supérieure de compétence nationale» pour traiter des affaires judiciaires.
Mon problème est le suivant: si nous ne réussissons pas à amener le ministre, le ministère ou le gouvernement à régler les problèmes que nous avons tranchés en 1975 et en 1979, à faire quelque chose, comment le fait de créer un autre organisme que nous allons devoir payer et doter d'un personnel...? Je pense que nous créons parfois des conseils et des commissions afin d'éviter de prendre des décisions difficiles. Je crois que c'est parfois une tactique bureaucratique. Ce n'est pas de cela dont je vous accuse, et pourtant c'est la solution que vous avez proposée.
M. Richard Saunders: C'est une bonne question, et je pense que notre recommandation mérite d'être expliquée. Lorsque nous parlons d'un secrétariat, nous ne parlons pas d'élargir encore la bureaucratie. Je ne pense pas que cela soit la réponse à quoi que ce soit. Il existe un secrétariat de la mise en oeuvre au ministère des Affaires indiennes, mais il est enfoui quelque part au bas de l'échelle, avec un patron qui est directeur général. Il a sous ses ordres un directeur qui s'occupe de la baie James. Le patron de ces gens-là est un sous-ministre adjoint qui, lui, fonctionne selon le modèle normal du choix des options politiques, du choix des dépenses. Au-dessus de lui, il y a un sous-ministre et, au-dessus de ce dernier, il y a un ministre.
Alors, tout en bas, nous avons ce service qui a des moyens très limités. Pour tout vous dire, j'estime que ces gens-là n'ont aucune autorité en ce qui concerne les dépenses de programme. Ce sont de bonnes personnes, mais elles n'ont aucune autorité, et elles font partie du système général à l'intérieur duquel on détermine les choix politiques, on établit les priorités des dépenses, etc. Ce ne sont pas des gens qui sont là uniquement pour veiller à la mise en oeuvre de l'accord.
Je propose donc que les années-personnes affectées à ce service soient reprises aux Affaires indiennes et qu'on donne au service une certaine indépendance et le mandat clair de mettre en oeuvre les accords. Il ne s'agit pas uniquement d'une seule convention, mais des deux conventions dont il est question ici, de tous les traités numérotés, des traités conclus avant la numérotation et des autres revendications territoriales.
Nous avons parlé de la création d'un tribunal. Quand nos avons tenu nos audiences, nous avons interrogé les fonctionnaires qui sont venus témoigner sur le fait qu'il y avait eu beaucoup de décisions de la Cour suprême du Canada sur les droits ancestraux et issus de traités, qui ont été rendus depuis 1982. J'en ai cité quelques-unes—Sparrow, Sioui, Badger, etc.—et je leur ai demandé: «Dans quelle mesure ces jugements influent-ils sur la mise en oeuvre et l'application des conventions dans la pratique?» Figurez-vous qu'ils n'étaient guère renseignés sur ces jugements de la Cour.
• 1410
Quand on examine les diverses causes—concernant non pas
seulement les Cris et les Naskapis, mais les Autochtones de toutes
les régions du Canada—portant sur des traités, sur des
revendications territoriales et le reste, nous constatons que, bien
souvent, le temps qu'il faut pour que la cause fasse son chemin
depuis les tribunaux de première instance, qui en sont saisis au
départ parce qu'untel a été accusé d'avoir chasser en dehors de la
saison ou a fait autre chose, jusqu'à l'instance suprême, en
passant par les différentes étapes intermédiaires. Sauf tout le
respect que je dois aux juges, il n'y a pas d'uniformité dans
l'application de l'article 35, si ce n'est au niveau de la Cour
suprême du Canada.
Qu'on crée donc un tribunal provisoire qui pourrait être saisi de ces causes, de façon qu'il ne soit pas nécessaire de passer par quatre ou cinq instances d'appel. Le tribunal ainsi créé serait la première instance. Il aurait une certaine expertise et nous osons espérer qu'il aurait lu les jugements de la Cour suprême. Le tribunal rendra des jugements et, une fois que nous aurons ainsi établi un certain nombre de précédents, nous pourrons l'éliminer et permettre aux tribunaux ordinaires de s'occuper d'exercer leur activité.
Ce serait un moyen de faire en sorte que les causes soient réglées rapidement et d'éviter toutes les dépenses et tout le ressentiment qui s'accumulent quand les litiges se poursuivent devant divers tribunaux. Nous voulons des décisions rapides. Le tribunal serait immédiatement en dessous de la Cour suprême, avec peut-être une autre instance entre les deux, il serait spécialisé et, dans dix ans, nous pourrions revoir le tout et décider, s'il s'avère que nous avons un bon corpus de précédents et que nous avons réussi à étoffer les dispositions de l'article 35, les causes peuvent alors retourner dans le système judiciaire habituel.
M. John Finlay: La proposition me paraît très valable.
Ma dernière question, et le président voudra peut-être y ajouter quelque chose, a trait au fait que vous faites beaucoup de recommandations. Je songe tout particulièrement à votre recommandation concernant les îles; ce serait bien que toutes les parties puissent en venir à une entente là-dessus d'ici à avril 1999. Nous savons tous ce qu'il en est de l'accord du Nunavut, et j'ai été surpris d'apprendre que la question n'avait pas encore été réglée, que la question des îles au large des côtes de la Péninsule du Nord québécois n'avait pas encore été réglée et qu'il y avait aussi des petites questions concernant le Labrador qui n'avaient pas encore été réglées. Le problème n'est pas tellement un problème de mauvaise foi, comme vous l'avez dit, Philippe et Robert, et il y a sûrement une solution. Il faut qu'il y ait une solution à toutes ces questions. J'estime que c'est là la façon canadienne de faire les choses.
Ma dernière question est donc la suivante. Pourriez-vous nous signaler une ou deux ou peut-être trois questions non encore réglées, des questions préoccupantes, qui reviennent sans cesse, pour que nous puissions dire à la ministre, quand nous aurons terminé notre étude, que les trois questions à régler sont les suivantes? Il ne s'agit pas de dire comment elles seront réglées, bien que ce puisse être par l'entremise du secrétariat, du tribunal ou d'une quelque autre instance. Nous pourrions dire qu'il y a ces trois questions à régler et qu'il faudrait que nous nous engagions à ce qu'elles soient réglées au plus tard le 1er avril 1999. Le délai est très court, j'en conviens, et nous n'aurons peut-être pas assez de temps, mais...
M. Richard Saunders: Je peux tout de suite vous faire une suggestion.
M. John Finlay: Très bien.
M. Richard Saunders: Assurer la mise en oeuvre complète des conventions déjà en place.
M. John Finlay: Ah, mais nous n'y arriverions pas d'ici au 1er avril 1999.
Des voix: Ah, ah!
M. Richard Saunders: Tout le reste... Tout le monde arborerait un sourire. Qu'on mette en oeuvre la Convention de la Baie James et du Nord québécois ainsi que la Convention du nord-est québécois, et ce, complètement.
M. John Finlay: D'après vous, combien cela coûterait-il? Combien de personnes faudrait-il? Combien de réunions? Combien de temps? Que faudra-t-il faire? Vous avez traité avec les fonctionnaires et vous pouvez manifestement nous renseigner là-dessus. Vous nous avez expliqué où le secrétariat se trouve dans la hiérarchie et je peux voir exactement où se pose le problème: il est tout simplement impossible de remonter jusqu'en haut de l'entonnoir pour en arriver à une conclusion. Il faut trouver le moyen de court-circuiter tout cela.
M. Richard Saunders: C'est précisément ce qu'il faut faire: court-circuiter le système. C'est pourquoi il faut un secrétariat qui a pour mandat, non pas de faire asphalter les routes et de faire vacciner les enfants, mais d'assurer la mise en oeuvre des conventions. Ces autres fonctions sont toutes importantes, mais le secrétariat devrait avoir pour unique mandat d'assurer la mise en oeuvre les conventions. Ce devrait être là sa fonction, sa seule responsabilité.
Ce ne sera pas facile. Je ne prétends pas le contraire, monsieur. Je ne crois pas qu'il n'y ait de tâche plus difficile.
M. John Finlay: Je suis d'accord avec vous, mais j'estime qu'il faut en faire une priorité. Il faut en faire un objectif. Nous aurons 50 autres conventions en Colombie-Britannique qui...
M. Richard Saunders: Exactement.
M. Philip Awashish: J'estime que la deuxième chose à faire serait de modifier la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec afin de tenir compte de la situation actuelle, des besoins et de la réalité des gouvernements cris et naskapis.
M. John Finlay: Sauf le respect que je vous dois, monsieur Awashish, combien de temps cela peut-il prendre pour faire de la collectivité Oujé-Bougoumou la dixième collectivité crie? Serait-ce la dixième, ou est-ce que je me trompe? Quand vous parlez de neuf et de un, comptez-vous la collectivité au nombre des neuf?
M. Philip Awashish: Ce serait la neuvième collectivité crie.
M. Richard Saunders: Oui.
M. John Finlay: La neuvième collectivité crie. D'accord. Bon, alors, combien de temps cela peut-il prendre pour confirmer que la collectivité existante est bel et bien une collectivité crie et pour l'ajouter à la loi?
Je pourrais sans doute demander à un attaché de recherche de la Bibliothèque du Parlement de me préparer un document à ce sujet, que je pourrais obtenir d'ici à demain midi, que je pourrais faire traduire d'ici à vendredi, mais alors, que faut-il...
M. Richard Saunders: Vous devrez peut-être en discuter avec les intéressés pendant quelques semaines, puis demander à votre attaché de recherche de rédiger un projet de loi. Consultez-les, assurez-vous qu'ils estiment que leurs besoins sont satisfaits, et faites-le.
Le président: Faites-le, monsieur Finlay, faites-le.
Des voix: Ah, ah!
M. John Finlay: Il faut faire quelque chose.
M. Richard Saunders: Vous avez raison. C'est pour cela que nous sommes là, monsieur le président.
M. John Finlay: Merci, monsieur le président.
La séance a été fort intéressante, même si elle a été souvent interrompue, mais j'espère que vous comprenez mes propos.
[Français]
Le président: Monsieur Finlay, soyez assuré que je vais vous appuyer.
Avant que nous terminions la séance, j'aimerais poser deux petites questions. En lisant votre rapport, j'éprouve des inquiétudes face aux problèmes de santé qui affectent les jeunes, qu'il s'agisse de problèmes respiratoires ou du diabète. Dans presque dans tous les villages des communautés cries, y compris celle d'Oujé-Bougoumou, on éprouve des problèmes en raison de la poussière. Ce problème n'a jamais été réglé. On a pourtant pavé toutes les ruelles dans les villes et villages au Canada pour contrer ce problème de poussière. Dans les communautés cries, les personnes âgées ne peuvent pas aller dehors l'été et doivent rester encabanées. Si on pouvait paver les rues dans toutes les communautés et aménager des terrains de jeu pour nos jeunes, les Cris seraient heureux.
Il y a aussi des problèmes au niveau du logement. J'ai visité toutes les communautés et constaté qu'il arrive souvent que 12, 13, 14, 15 ou 16 personnes vivent sous le même toit. Ce n'est pas si mal l'été parce que les gens s'adonnent aux activités de pêche et de trappe sur leur territoire, mais c'est très difficile l'hiver venu. Les étudiants qui doivent vivre dans ces maisons où habitent 13, 14 ou 15 personnes en sont perturbés. Ils vivent une situation bien différente de celle des familles de 2, 3 ou 4 membres qui vivent dans nos villes.
Dans votre conclusion, vous dites qu'en raison des contraintes financière et des délais, la commission n'a pas été en mesure de tenir des audiences portant sur les aînés, les jeunes, les trappeurs et d'autres sous-groupes des communautés cries et naskapies. J'ai l'impression que certains fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes du Canada croient que vos problèmes pourront être réglés à vol d'oiseau ou par satellite. Il faudrait que les hauts fonctionnaires des Affaires indiennes et le gouvernement reviennent sur terre et qu'on règle rapidement plusieurs revendications.
Je suis heureux que vous ayez comparu devant notre comité aujourd'hui pour la première fois. Tous les membres de tous les partis semblent souhaiter que nous poursuivions les recommandations que vous nous avez présentées.
De combien d'argent auriez-vous besoin? Tout à l'heure, vous avez mentionné la somme de 850 000 $. Cette somme est-elle suffisante à la lumière de l'analyse qu'ont faite vos comptables? Le nord du Québec est une grande région. On ne parle pas ici de simplement traverser de l'autre côté de la rivière pour aller régler un problème dans une communauté. Vous devez parcourir de grandes distances. Les routes ne mènent même pas à certaines communautés, dont Waskaganish. De combien d'argent avez-vous réellement besoin pour vous acquitter de votre mandat? Je vous rappelle qu'on est prêt à dépenser 250 000 $ pour construire un dinosaure dans l'ouest du Canada pour le millénaire. De quelle somme avez-vous besoin pour qu'on puisse vous aider adéquatement? Donnez-moi un chiffre réel.
[Traduction]
M. Richard Saunders: Je répondrai pour ma part à la question concernant l'argent, monsieur le président, puis je laisserai mes collègues répondre aux questions concernant la santé, les jeunes et le logement.
• 1420
En ce qui a trait à l'argent, nous avons demandé à la ministre
1 037 000 $ pour chaque année où nous n'avons pas à présenter de
rapport. Ces fonctionnaires ont répondu en disant: «Vous recevez
480 000 $ depuis 1990—le montant n'a pas augmenté—, si bien que
nous serions disposés à vous accorder 645 000 $ l'an prochain, tout
en prévoyant un montant un peu plus élevé pour les années où vous
devez présenter un rapport.»
Nous avons alerté la ministre au problème et, bien entendu, les fonctionnaires ne cessent de lui répéter que nous n'avons pas besoin d'argent, qu'elle peut «rester à Ottawa.»
Le rapport Cowie a indiqué, soit dit en passant—et ce rapport remonte à 1991—que la Commission était sous-financée et qu'elle n'était déjà pas, à ce moment-là, en mesure de faire son travail. Or, nous recevons le même montant maintenant que nous recevions à l'époque. Le gouvernement a créé une commission d'enquête indépendante qui a été chargée d'étudier les activités et qui a dit, très clairement, que nous étions sous-financés à l'époque, que nous ne pouvions pas accomplir notre travail. Or, nous n'avons pas eu d'augmentation depuis, si bien que la situation n'a fait qu'empirer.
[Français]
Le président: Pourriez-vous nous remettre une photocopie de ce passage-là?
[Traduction]
M. Richard Saunders: Je peux déposer cette photocopie-ci, monsieur le président.
[Français]
Le président: D'accord, merci.
[Traduction]
M. Richard Saunders: Les auteurs du rapport avaient raison.
Manifestement, la situation a empiré depuis, puisque les coûts ont augmenté, notamment les frais de voyage.
Ainsi, quand nous avons demandé 1 037 000 $, c'était pour pouvoir nous mettre à la disposition des collectivités qui voudraient nous entretenir de certains problèmes; les commissaires pourraient ainsi se rendre dans les collectivités pour discuter des problèmes.
Si quelqu'un signalait un problème en présentant une plainte officielle aux termes de la loi, nous pourrions répondre promptement et faire des recherches sur certains points—je crois que c'est M. Bryden qui a soulevé cette question—afin de vérifier les faits et de pouvoir faire autre chose que de prononcer simplement un discours politique. Il faudrait que nous sachions quels sont les faits. Nous avons aussi besoin de temps en temps de conseils juridiques. Avec 400 000 $ et des poussières, nous n'avons pas les moyens de faire ces choses-là. Avec 1 037 000 $, nous croyons pouvoir nous acquitter de toutes ces fonctions convenablement.
À la dernière rencontre que nous avons eue avec elle, la ministre nous a un peu forcé la main. Elle nous a dit: «Mais vous savez que ce montant n'est pas réaliste. Ce serait une hausse énorme.» Elle s'est ensuite lancée dans son baratin: ne parlons pas de ce que vous aimeriez faire, de ce que les collectivités voudraient que vous fassiez, mais uniquement de ce qu'il vous faut pour respecter la loi; qu'est-ce qu'il vous faut au minimum pour accomplir ce que vous devez accomplir aux termes de la loi, comme de vous occuper des plaintes officielles?
C'est alors que nous avons dit qu'il faudrait sans doute 850 000 $. Ainsi, quand une collectivité ferait appel à nous pour venir discuter de certains problèmes, nous répondrions que la chose serait impossible à moins que nous ne recevions une plainte officielle.
Voilà donc les chiffres: avec 1 037 000 $, nous pourrions faire un travail raisonnable et nous acquitter assez bien de notre mandat et, avec 850 000 $, je pense bien que nous ne risquerions pas d'être poursuivis pour avoir refusé de nous acquitter des obligations minimales que nous impose la loi.
Vous aviez des questions au sujet de la santé communautaire, notamment du diabète et des problèmes causés par la poussière. Vous aviez aussi une question au sujet du logement. Je vais demander à mes collègues d'y répondre. Ces deux gars-là sont de véritables encyclopédies quand il s'agit de la vie communautaire.
Le président: Monsieur Awashish.
M. Philip Awashish: Merci. Avant que je ne réponde aux questions qui ont été posées, je voudrais simplement dire quelque chose au sujet des trois questions dont a parlé M. Finlay.
Nous en avons déjà évoqué deux: premièrement, mettre les traités en oeuvre comme il se doit et, deuxièmement, apporter les modifications voulues à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. La troisième question est celle du règlement des droits, revendications, intérêts et préoccupations des Premières nations cries et naskapies qui ne sont pas encore réglées. Cette énumération comprendrait notamment les îles au large des côtes, les problèmes de compétence et les revendications territoriales dont nous parlons dans notre rapport.
M. John Finlay: Vous voulez parler du premier concernant le fonctionnement efficace de la Commission?
M. Philip Awashish: Le premier point que nous avons évoqué était la mise en oeuvre complète...
M. John Finlay: D'accord.
M. Philip Awashish: ...de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord québécois. Le deuxième, c'est d'apporter les modifications voulues à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.
M. John Finlay: D'accord.
M. Philip Awashish: Le troisième, c'est le règlement et la résolution des revendications, droits, intérêts et préoccupations non encore réglés des Premières nations cries et naskapies.
M. John Finlay: Merci.
M. Philip Awashish: J'aborde maintenant la question du logement, qui est certainement un des problèmes dont nous avons parlé dans notre rapport comme étant un problème commun à toutes les collectivités cries, y compris aux communautés naskapies, et qui n'est pas encore réglé. Le problème concerne non pas seulement les Premières nations cries et naskapies, mais toutes les nations autochtones du Canada. Chose certaine, d'autres Premières nations des différentes régions du Canada ont aussi signalé une grave pénurie de logements ainsi qu'une grave pénurie de moyens financiers pour répondre aux besoins à ce chapitre des Premières nations de tout le Canada, y compris des Premières nations cries et naskapies.
Naturellement, les Cris n'ont droit qu'à une certaine part de l'enveloppe nationale au titre du logement. Ils en sont conscients. Ils ont déployé des efforts considérables pour multiplier dans leurs collectivités les projets et les programmes de logement à l'aide de leurs fonds et de leurs ressources à eux.
La population de la nation crie a toutefois doublé depuis la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, passant de 6 000 à 12 000. Manifestement, la population de la nation crie est assez jeune. La majorité des Cris—60 p. 100—ont moins de 25 ans. Chaque collectivité comprend donc de jeunes familles qui se développent progressivement et qui ont besoin de logements. Il existe certainement une pénurie dans les collectivités cries. Les Cris cherchent à répondre aux besoins en logement de leurs collectivités respectives à l'aide non pas seulement des fonds publics, mais aussi de leurs fonds à eux. Le problème n'est toutefois pas encore réglé.
J'inviterai mon collègue, Robert, à vous parler de la santé. Il s'y connaît davantage en ce qui a trait aux problèmes de santé des collectivités cries.
Le président: Monsieur Kanatewat.
M. Robert Kanatewat: Je n'ai pas les chiffres exacts concernant le diabète sur le territoire, mais le nombre de cas a triplé depuis la création de l'Office de la santé cri. Le diabète est un des principaux problèmes auxquels se heurtent les nations cries dans leur ensemble. Même si elles prennent des mesures pour s'y attaquer, elles n'ont pas encore réussi à mater le problème en raison de l'expansion démographique dont le commissaire Awashish a parlé, notamment le fait que la population a doublé.
Bien que la population ait doublé, le nombre de cas a triplé, et, en dépit des bonnes installations sanitaires que nous avons en place dans chaque collectivité crie. D'une certaine façon, ce problème résulte effectivement de la pénurie qui fait, dans toutes les collectivités cries, les logements sont surpeuplés. C'est là finalement l'une des raisons qui explique qu'à divers moments nous soyons confrontés à des situations de crise dans le domaine de la santé.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Kanatewat. Avez-vous d'autres questions, monsieur Finlay?
[Traduction]
M. John Finlay: J'ai un petit problème. Je veux poser la question à Philip Awashish. Vous avez parlé de la mise en oeuvre complète de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du nord-est québécois ainsi que de la nécessité d'apporter les modifications voulues à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, puis vous avez parlé de régler toutes les revendications en instance concernant les terres et les ressources. N'est-ce pas là ce que ces lois et ces conventions étaient censées faire? Y a-t-il quelque chose que je ne comprends pas?
M. Philip Awashish: Oui. J'ai dit qu'il fallait régler et résoudre les droits, revendications, intérêts et préoccupations non encore réglés des Premières nations cries et naskapies. La question des îles au large des côtes serait du nombre.
M. John Finlay: Très bien. D'accord.
M. Philip Awashish: Des questions dont il n'est pas fait état dans les conventions proprement dites.
M. Richard Saunders: Ainsi, les Naskapis ont des revendications à l'égard du Labrador; ces revendications relèvent manifestement de la compétence fédérale, mais ne faisaient pas partie de la convention. Il en est de même pour les îles au large des côtes et aussi pour un certain nombre d'autres questions.
M. John Finlay: D'accord. Merci beaucoup.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Finlay.
Je remercie nos témoins, messieurs Saunders, Kanatewat et Awashish, d'être venus partager le fruit de leur expérience avec les membres de notre comité et de nous avoir parlé de leur rapport. Nous ferons un suivi des questions que vous avez soulevées. Je tiens à vous dire que vous êtes toujours les bienvenus ici, que ce soit trois fois ou cinq fois par année. Si vous désirez venir nous rencontrer à nouveau, n'hésitez pas à communiquer avec nous. Nous, les députés de la Chambre des communes, sommes à votre service et sommes tout disposés à aider nos amis les Cris ou les gens du Nord à trouver des solutions en vue d'améliorer leur qualité de vie.
Nous tenons à vous remercier d'être venus ici aujourd'hui. Thank you very much.
[Traduction]
M. Richard Saunders: Merci, monsieur le président et monsieur Finlay. Je vous demanderais de bien vouloir transmettre nos remerciements aux autres membres du comité qui ont dû partir. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir permis de vous rencontrer. Si vous avez besoin de documents, de renseignements ou de quoi que ce soit d'autre, n'hésitez pas à communiquer avec nous.
[Français]
Le président: La séance est levée.