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Merci, et bon après-midi, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.
Nous sommes très heureux de l'occasion qui nous est offerte de faire part de nos observations au comité dans le cadre de son enquête approfondie du rôle d'un diffuseur public au XXIe siècle.
L'Association canadienne des annonceurs est la seule association qui représente exclusivement les intérêts des annonceurs du pays. Nos membres, soit plus de 200 entreprises et filiales, représentent une vaste gamme de secteurs d'activité, notamment la fabrication, la vente au détail, les produits conditionnés, les services financiers et les communications. Ils arrivent en tête de liste des annonceurs au Canada, avec des ventes annuelles évaluées à près de 350 milliards de dollars.
Notre organisme s'intéresse particulièrement au rôle de la publicité dans notre économie et aux diverses formes que cela peut prendre. Le mandat de votre comité pour cette enquête est très large. Il inclut le rôle de la SRC/CBC, les services qu'elle offre et l'émergence de nouveaux médias. Toutefois, nos observations se limiteront à l'aspect financier énoncé dans le mandat.
La publicité est une force économique importante dans le monde. La plupart des pays développés la considère comme un rouage essentiel de l'infrastructure des communications. On estime que l'an dernier, les dépenses publicitaires mondiales ont atteint près de 2 billions de dollars américains.
La publicité constitue aussi, comme on pourrait s'y attendre, une force économique appréciable au Canada. En 2005, on prévoyait des dépenses publicitaires de l'ordre de 13 milliards de dollars. Le secteur compte environ 250 000 emplois directs et indirects, soit environ 2 p. 100 de l'ensemble des emplois au Canada. Fait important, environ 79 p. 100 de toutes les dépenses de publicité au Canada restent dans l'économie canadienne comme valeur ajoutée. Comparativement à la plupart des industries nationales, la publicité représente un contenu canadien très élevé.
La publicité augmente les recettes des gouvernements grâce aux impôts sur le revenu générés par les emplois qu'elle crée et à l'élargissement de l'assiette de la taxe de vente qui en résulte. Bref, l'économie canadienne ne serait pas aussi dynamique sans la capacité de faire connaître et d'imposer, par la publicité, des marques de qualité et leurs avantages distincts.
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Il est évident que la publicité apporte une contribution importante à notre pays. Elle constitue un véritable carburant économique. De plus, la publicité permet à la télévision de remplir les objectifs publics fixés par la Loi sur la radiodiffusion. Sans revenus publicitaires, notre système de radiodiffusion ne pourrait pas survivre.
C'est pour cette raison que les annonceurs prônent un accès illimité aux médias. Nous croyons que la radiodiffusion, les publications et les services Internet aussi devraient permettre la publicité commerciale, et d'ailleurs, elles en profiteraient.
Cela vaut aussi pour la CBC. Les annonceurs ont toujours soutenu la CBC et nous sommes fiers du rôle que nous avons joué dans sa réussite. Le soutien des annonceurs au radiodiffuseur public permet aux gouvernements d'exercer une prudence budgétaire, tout en faisant la promotion d'objectifs d'intérêt public.
La télévision de la SRC/CBC, tant en anglais qu'en français, fournit un important bassin d'auditeurs au marché de la publicité; elle offre aux annonceurs la possibilité de commanditer une programmation distincte qui répond aux souhaits des téléspectateurs. Les auditoires de la CBC intéressent particulièrement les annonceurs puisqu'ils sont habituellement moins touchés par la multiplication des annonces commerciales que les diffuseurs privés.
Certains estiment que la télévision de la CBC devrait réduire sa dépendance à l'égard des revenus de publicité. Pour les annonceurs, cette mesure n'est pas envisageable, puisqu'elle se traduirait par une perte de 400 millions de dollars — valeur approximative — pour le marché, réduisant ainsi l'offre de façon considérable et entraînant inévitablement une augmentation des coûts de la publicité à la télévision qui serait répercutée sur les consommateurs.
Selon nous, il n'y a actuellement pas assez des médias conventionnels, surtout à l'échelle locale, pour remplacer sans risque ce bassin d'auditeurs. Sans un auditoire de remplacement, qui n'ajouterait pas à la multiplication des annonces, ou sans véritable concurrence, le prix de la publicité télévisuelle augmenterait et les annonceurs consacreraient une certaine partie de leur budget à d'autres médias moins coûteux et seraient forcés de refiler la facture aux consommateurs. Cela ne ferait que diminuer l'ensemble des dépenses publicitaires, augmenter les coûts pour les consommateurs et, au bout du compte, affaiblir le système de radiodiffusion.
Depuis des années, nos annonceurs ont dû faire face à un accès de plus en plus restreint aux auditoires canadiens. En gros, entre le quart et le tiers de toutes les émissions regardées au pays proviennent de signaux qui ne sont pas commercialement accessibles aux annonceurs canadiens. Une CBC sans publicité ne ferait qu'aggraver le problème.
Un chercheur indépendant, chargé par l'ACA d'examiner les incidences d'une CBC sans publicité sur les annonceurs, a évalué que les coûts des annonceurs au Canada anglais grimperaient d'environ 10 p. 100 et, au Canada français, où la SRC domine, de 24 p. 100. Cette estimation a été faite avant la série stupéfiante de consolidations survenues récemment dans l'industrie de la radiodiffusion canadienne, comme la fusion entre CTV et CHUM, et les répercussions concurrentielles et financières qui en découlent.
Il faudrait également remplir le temps que laisserait libre la suppression des annonces publicitaires et, bien sûr, payer également pour ce temps-là. Si l'on supprimait la publicité à la télévision de la CBC, par exemple, il faudrait produire ou acheter plus de 1 000 heures supplémentaires de programmation par an, ce qui représenterait bien évidemment un coût important. Les annonceurs croient qu'une politique de commercialisation devrait être appliquée également à la radio de la CBC. Les auditeurs de la CBC sont déjà très habitués au contenu commercial, sous forme de messages d'intérêt public gratuits annonçant des activités culturelles et communautaires, de même qu'aux nombreuses autopublicités, une pratique essentiellement discriminatoire.
La radio de la CBC génère plusieurs auditoires uniques, désirables et commercialement viables dont la valeur financière pourrait être aisément monnayée pour contribuer à l'atteinte des objectifs des radiodiffuseurs publics. Il pourrait s'agir, au lieu des messages traditionnels envahissants de 30 ou 60 secondes, de courts messages d'identification d'entreprise, comme on en entend, par exemple, à la National Public Radio, aux États-Unis. Les commandites d'entreprise constituent actuellement une partie importante des recettes de la NPR, qui sont générées à partir de messages d'une durée moyenne de seulement 90 secondes par heure de publicité commanditée.
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Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs.
Je m'appelle Gary Maavara et je suis le vice-président et avocat général de Corus Entertainment Inc. Sylvie Courtemanche, notre vice-présidente aux relations gouvernementales, m'accompagne aujourd'hui.
Nous remercions le comité de nous avoir invités à présenter nos idées sur le rôle de la CBC au XXIe siècle. Corus a déposé un mémoire le 26 février. Nous y avons exposé comment nous pensons que le secteur de la radiodiffusion allait évoluer et expliqué que la CBC devait faire partie de notre avenir collectif.
Corus exploite trois divisions : la télévision, la radio et le contenu. C'est le premier diffuseur canadien d'émissions pour enfants. Nous exploitons les réseaux spécialisés YTV et Treehouse, et avons une participation dans Télétoon. Nous sommes également propriétaire de Nelvana, un des premiers producteurs au monde d'émissions d'animation pour enfants. Au cours des cinq dernières années, Nelvana a dépensé des centaines de millions de dollars pour produire des émissions d'animation canadiennes de qualité supérieure.
La filiale livres de Corus, Kids Can Press, est le premier éditeur canadien de livres pour enfants. Notre réseau de films, comme Movie Central et des services comme W Network et CMT, font de nous des fournisseurs importants d'émissions destinées aux adultes.
Corus est le premier opérateur radio au Canada, si l'on se base sur les auditoires. Nous exploitons 50 stations dans les marchés de langue anglaise et de langue française. Un bon nombre de nos stations de patrimoine qui diffusent de l'information et des analyses desservent les circonscriptions représentées par les membres du comité, et vous comprenez donc que nous connaissons très bien les questions auxquelles réfléchissent les Canadiens.
Si nous sommes ici aujourd'hui, c'est principalement parce que nous sommes propriétaire et exploitant de trois stations de télévision affiliées à la CBC, qui desservent Peterborough, Oshawa et Kingston. Ce sont les seules stations de télévision locale dans ces marchés, et c'est ce qui explique qu'elles jouent un rôle crucial dans ces collectivités.
L'enquête qu'effectue à l'heure actuelle le comité au sujet du mandat actuel et futur de la CBC est une enquête très ambitieuse.
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Corus pense que la succès que connaîtront les entreprises de médias au XXI
e siècle dépendra de leur capacité à fournir un contenu qui intéresse leurs auditoires. L'idée que le contenu est roi prend de plus en plus d'importance dans un environnement où la diffusion analogue linéaire est programmé évolue vers un environnement numérique interactif.
Au cours des cinq prochaines années, on prévoit que la consommation de télévision linéaire va décliner et qu'elle sera progressivement remplacée par ce nouveau monde numérique interactif de télévision haute définition, par satellite, de télévision mobile, IPTV, les services d'abonnement, la baladodiffusion et les services regroupés sur des sites Web. Les consommateurs regarderont ce qu'ils veulent, au moment où ils le veulent et où ils le veulent. Nous regarderons également ce que créent les gens ordinaires. Le phénomène que représentent YouTube et MySpace illustre ce changement. En tant que législateurs, vous suivez cette révolution puisque vous êtes maintenant obligés de tenir à jour des sites Web, de répondre rapidement aux courriels de vos électeurs et de vous inquiéter de ce que quelqu'un pourrait dire à votre sujet ou au sujet des politiques de votre parti sur un blogue. Les changements qui s'opèrent dans le monde nous touchent tous.
Entre-temps, au sein de cet environnement numérique interactif, la même règle éternelle s'applique. Les Canadiens exigent qu'on leur raconte de belles histoires qui leur apportent quelque chose. Ils veulent avoir de bonnes émissions d'information et de sport. Ils veulent savoir ce qui se passe chez eux et à l'étranger. Ils veulent également être divertis. La nouvelle technologie ne changera pas ce principe.
Corus pense que les objectifs des politiques canadiennes en matière de diffusion sont bien servis lorsque l'on répond à cette demande. Les Canadiens exigent des programmes très intéressants et de haute qualité. C'est la raison pour laquelle cette stratégie devrait favoriser la création de ce genre de contenu. Elle ne devrait toutefois pas tenter de manipuler de façon artificielle le système de l'offre. Cela veut dire que la politique devrait viser le contenu et non pas son auteur.
Le Canada est un petit marché qui jouxte le plus important créateur de contenu au monde. Si l'on ajoute à cela l'existence d'un environnement multimédia en pleine évolution, on s'aperçoit qu'il n'est plus réaliste de demander uniquement au secteur de la production indépendante de fournir un contenu canadien de haute qualité. Un tel système suscite un débat sans fin sur l'attribution des droits, et non pas sur la création et l'exploitation de ces droits. Cela voudra également dire que nous n'obtiendront pas ce que nous souhaitons, c'est-à-dire de bonne émissions canadiennes.
La politique consistant à s'en remettre à un secteur de production indépendant n'a pas eu pour effet de donner naissance à une industrie viable. Elle a échoué parce qu'elle n'a pas réussi à inciter les investisseurs à mettre de l'argent dans l'élaboration de projets et les talents créateurs. Le secteur indépendant n'a pas les moyens de lutter sur les marchés étrangers. Il faut disposer de beaucoup de ressources pour obtenir de la propriété intellectuelle. Nous sommes un des principaux créateurs et exportateurs de programmes et nous avons donc une expérience directe de cette situation.
Corus pense que pour réussir, il faut créer des entreprises parfaitement intégrées si nous voulons que les programmes canadiens puissent soutenir la comparaison avec tout ce que les autres pays ont à offrir.
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Entre-temps, il faut admettre que tous les programmes qui intéressent les Canadiens ne seront pas nécessairement rentables. La CBC va continuer à avoir besoin d'un financement de base stable pour qu'elle puisse atteindre les objectifs que nous lui avons fixés dans ce domaine.
La CBC devrait également avoir la liberté d'évoluer. Nous pensons que la CBC, avec ses services basés sur le Web, la radio satellite et ses autres services spécialisés, prend les mesures nécessaires pour continuer à jouer un rôle clé dans le monde des nouveaux médias que nous avons décrit. Le changement technologique le plus urgent auquel fait face la CBC actuellement est le passage à la production et à la transmission en TVHD. La TVHD ne fournit aucune recette supplémentaire à l'heure actuelle, parce qu'elle n'entraîne aucune recette supplémentaire dans le domaine de la publicité ou des abonnements; cependant, tous les diffuseurs, y compris la CBC, doivent adopter la TVHD. Cette transition est déjà en train de se faire aux États-Unis — elle sera achevée d'ici moins de deux ans là-bas — et nous devons procéder à cet important changement si nous voulons conserver les auditoires canadiens.
Corus pense que le modèle mixte adopté par la CBC est le bon. Elle envisage une diffusion numérique par les airs dans les zones urbaines et elle s'en remet aux entreprises de distribution canadiennes pour les autres marchés. C'est là un plan concret et rentable qui répond aux besoins des Canadiens.
Avec un accès illimité à un contenu provenant de toutes les parties du monde, le principal élément de différenciation sera les programmes locaux présentés aux auditoires canadiens. Corus est une société affiliée à la CBC dans trois petits marchés de l'est de l'Ontario et elle comprend tout à fait l'importance des aspects locaux. Ce contenu local constituera un élément clé pour assurer le succès de nos stations locales et de la CBC en tant que réseau. Les stations locales affiliées jouent un rôle important dans la transmission des nouvelles et des informations locales aux téléspectateurs. Elles participent également activement à divers organismes et initiatives communautaires qu'elles appuient financièrement. C'est vers elles que les citoyens se tournent, notamment en cas de difficultés. Les diffuseurs locaux sont au coeur de la vie communautaire. Toute nouvelle politique doit tenir compte de cette réalité.
Pour conclure, l'avenir sera très différent des mécanismes de contrôle et de réglementation que nous avons connus pendant quelques dizaines d'années. Cela viendra du fait que la façon dont les médias seront consommés, achetés et distribués va changer énormément. Si nous voulons un contenu canadien de haute qualité, il faudra que collaborent toutes les composantes du système de diffusion canadien. La CBC peut et doit jouer un rôle important dans ce nouveau paysage. Si l'on veut que la CBC, notre diffuseur public, réalise les objectifs que lui fixe la Loi sur la radiodiffusion, il faudra que la CBC optimise ses actifs sur les diverses plates-formes médiatiques. Ces objectifs sont toujours d'actualité. C'est simplement la façon de les réaliser qu'il faudra désormais diversifier.
Du point de vue de Corus, si l'on veut avoir un paysage médiatique sain au Canada, il faudra qu'il soit encadré par un régime de réglementation qui permette aux Canadiens de faire des expériences. Ce cadre réglementaire reposera sur le principe qu'il y a lieu de favoriser la compétitivité mondiale de notre industrie. Il récompensera les réussites et augmentera les chances de succès en encourageant la création d'entreprises de grande envergure.
Je vous remercie pour votre temps et votre attention. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
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Avant de poursuivre, je pense qu'il y a lieu d'énoncer clairement que les documentaristes sont très favorables à la notion de diffusion publique, tant sur le plan des principes que de la réalité. Nous voulons vraiment travailler dans un monde où la CBC joue un rôle essentiel et collabore avec le secteur indépendant pour diffuser des émissions de qualité.
Ce secteur indépendant est en fait une industrie solide et dynamique. D'après les dernières statistiques — elles sont un peu dépassées parce que nous n'avons pas eu le temps de mettre à jour notre étude —, en 2003-2004, le secteur de la production indépendante a entraîné des exportations de 42 millions de dollars et créé quelque 14 000 postes équivalents temps plein.
Si l'on prend en compte le FCT, nous recevons près de 17 p. 100 de ces fonds et produisons 40 p. 100 de toutes les heures d'émission. Cela représente donc un investissement très rentable qui débouche sur un grand nombre d'émissions, que diffusent largement aussi bien les diffuseurs publics que privés.
Comme nous l'avons mentionné au cours de l'audience de renouvellement du permis de la CBC en 1999, nous estimons qu'il faut qu'elle s'engage à créer un secteur consacré aux documentaires qui sont une forme d'art et jouent un rôle de catalyseur pour les changements sociaux. Nous appelons cela des documentaires d'opinion et d'autres les appellent des documentaires créatifs. Ils sont différents des documentaires produits à l'interne parce que les auteurs jouent un rôle important en matière de contrôle et d'expression, ils reflètent des voix indépendantes et ne sont pas limités par les règles et les mandats comme l'est la CBC.
Si nous nous basons sur ce que l'on retrouve dans les cinémas, à la télévision et sur ce qui fait partie de la conscience collective, nous constatons que les documentaires relèvent le niveau des discussions et du discours publics au Canada et nous devrions continuer dans cette direction. Je suis convaincue qu'il est dans l'intérêt public de favoriser ce type de production.
Les Documentaristes du Canada aimeraient que le gouvernement s'engage à soutenir la production régionale de documentaires ou la coproduction interrégionale de documentaires, pour que l'on puisse voir à la télévision l'expression de divers points de vue canadiens et, pour nous, de façon à ce que nous puissions vivre ailleurs que dans deux ou trois endroits au Canada et pouvoir quand même poursuivre une carrière de producteur de documentaires.
Je mentionne en passant qu'il est important de dire qu'un bon nombre de nos membres estiment qu'il faudrait faciliter la collaboration entre la CBC et la SRC, parce que les documentaires se prêtent très bien à la notion de diffusion multilingue, étant bien souvent dès le départ déjà sous-titrés, de façon à ce que les documentaires bénéficient d'une véritable diffusion nationale.
Au nom de mon conseil d'administration et de mon président, Michael McNamara, de mon collègue Daniel et moi, et de tous les membres des Documentaristes du Canada, nous vous remercions de nous avoir invités à présenter notre point de vue au comité.
Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Corus, par exemple, est un des principaux producteurs d'émissions pour enfants, pas seulement au Canada, mais dans le monde entier. Lorsqu'on examine les diverses politiques, que ce soit celles du Fonds canadien de la télévision ou les conditions d'attribution des permis du CRTC — Par exemple, nous sommes un gros producteur d'émissions. Nous sommes également un des marchés les plus importants pour les émissions pour enfants. Mais les dernières conditions du permis que nous a accordé le CRTC nous interdisait en fait de consacrer plus de 25 p. 100 de nos heures de diffusion à nos propres émissions.
Cela nous paraît une idée vraiment stupide. Cela vient du fait que les émissions sont diffusées par un nombre de plates-formes de plus en plus fragmentées, de sorte que, si nous créons une émission comme Miss Spider's Sunny Patch Friends, qui vise les enfants de six ans, nous allons la diffuser sur notre propre chaîne. Nous la montrerons peut-être sur notre site Web. Nous pourrions également la diffuser sur les téléphones mobiles et ce genre de choses. Lorsque la politique du FCT ou du CRTC nous empêche de diffuser nos émissions sur telle ou telle plate-forme, cela revient en fait à compromettre notre capacité à faire de ces émissions un grand succès et cela nous oblige à faire toutes sortes de contorsions.
L'autre côté de la médaille — Le secteur de la production indépendante dirait qu'il a besoin d'un accès privilégié au marché de la diffusion. Il est bon de faire une comparaison avec ce qui se passe aux États-Unis. Il y a eu cette discussion aux États-Unis il y a environ 10 ans avec ce que l'on appelé les règles d'exclusivité de distribution. On craignait en fait que, si les réseaux de distribution pouvaient créer leurs propres émissions, les studios n'auraient plus de travail.
La règle fondamentale que doivent respecter tous les diffuseurs d'émissions télévisées est de ne diffuser que de bonnes émissions. Par exemple, à l'époque où le réseau ABC a essayé de produire toutes ses émissions, il a constaté que le processus créateur n'était pas aussi prévisible qu'il le pensait. Ce n'est pas comme fabriquer des chaussures. Il y a des gens qui ont d'excellentes idées; il font parfois partie de la maison, ils sont parfois de l'extérieur.
La deuxième chose qui est arrivée est que les diffuseurs ne sont pas devenus des usines à émissions; ce sont les studios qui ont acheté les diffuseurs. Universal a acheté NBC et Disney a acheté ABC, parce que ces sociétés voulaient disposer d'un réseau de diffusion pour le contenu qu'elles produisaient.
Parallèlement, il y a toujours à Hollywood, que l'on pourrait qualifier de méga Mecque de la production, si on peut l'appeler comme cela, des producteurs indépendants qui sont extrêmement puissants, comme Jerry Bruckheimer, par exemple. Ils sont puissants parce qu'ils sont créateurs. Ce sont eux qui ont toutes ces excellentes idées.
Aux fins de la présente discussion, nous pensons que si la CBC trouve une idée excellente et qu'elle est capable de produire des émissions basées sur cette idée, il ne devrait pas y avoir de règle qui l'empêche de le faire. Si nous avons la capacité de produire tous nos propres programmes pour nos propres services, alors les divers mécanismes de réglementation ne devraient pas nous empêcher de le faire.
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Cela dépend en partie de la chaîne que nous exploitons. Je crois qu'il y a un aspect que nous allons devoir examiner en tant que décideurs, organismes de réglementation et diffuseurs, c'est le fait que le système est en train de passer très rapidement d'émissions programmées de façon linéaire à des émissions sur demande.
Corus est, par exemple, une des premières sociétés de radio au monde à faire des balados. Nous avons commencé cela avant que toutes les revues américaines s'y intéressent. Nous avons lancé il y a bientôt un an aux États-Unis un service de VSD sur Comcast Digital, Comcast étant le premier câblodiffuseur aux États-Unis et je pense, au monde. Nous sommes allés les voir et leur avons parlé pendant près d'un an. Ils offrent maintenant un service que nous appelons Vortex. Il contient des émissions canadiennes pour enfants qui peuvent être obtenues sur demande et c'est un énorme succès. Nous sommes vraiment très contents mais ce ne sont pas des émissions programmées. Les gens se rendent dans un menu et choisissent leurs émissions.
Nous allons donc devoir nous intéresser à ce genre de choses. Que veut dire « contenu canadien » dans un programme linéaire alors qu'en fait, les gens ne veulent pas nécessairement regarder des émissions de façon linéaire? Nous commençons à voir ce genre de choses avec les enregistreurs vidéo personnels, par exemple. Les gens établissent maintenant leurs propres horaires. Vous remarquerez que The Sopranos, que nous diffusons sur Movie Central dans l'ouest, passe le dimanche soir en première diffusion et nous montrons cette émission également de façon linéaire. Mais si vous avez des systèmes de câble numérique, vous pouvez regarder The Sopranos quand vous le voulez.
Est-ce que l'exigence relative à un contenu canadien de 60 p. 100 est encore pertinente? Dans une certaine mesure, oui. Et nous sommes sérieux lorsque nous disons que nous ne pourrions pas survivre si nous n'avions pas le droit de créer tous les genres d'émissions canadiennes. Nous disparaîtrions parce que ce sont les téléspectateurs et les annonceurs qui décideront, pas nous. Corus applique un principe fondamental qui consiste à savoir où vont les annonceurs et où vont nos téléspectateurs.
Je peux vous en parler personnellement parce que je reviens d'une foire commerciale à Las Vegas, le salon de la National Association of Broadcasters, et je me trouvais dans une salle comme celle-ci. Bien sûr, il y a eu le triste événement de Virginia Tech, où une vidéo avait été enregistrée avec un de ces appareils. J'ai vu quelque chose encore plus étonnant; quelqu'un utilisait la caméra vidéo de son téléphone cellulaire en temps réel, l'envoyait à un autre téléphone cellulaire, qui était branché sur un écran aussi grand que ce mur et la qualité était incroyable. J'ai vu un autre téléphone cellulaire avec un écran qui se transforme en un écran de 16 par 9 et j'ai regardé un épisode de l'émission de David Letterman. La qualité était meilleure que la plupart de celle des vieux téléviseurs que j'ai chez moi. Tout cela pour dire que le monde est en train de changer très, très rapidement.
Nous avons besoin d'éléments essentiels comme le FCT. Il faut examiner une à une toutes les règles en vigueur et nous demander si telle règle va permettre de produire des émissions canadiennes et de les diffuser aux Canadiens. Il faut se demander s'ils voudront la regarder, l'acheter, la télécharger ou utiliser un autre moyen de l'avoir. Je pense que le côté positif est que nous avons une possibilité incroyable à exploiter.
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Merci, monsieur le président.
C'est un honneur pour moi de comparaître devant vous et je vous remercie de me permettre de parler de l'avenir de la CBC.
J'ai personnellement déjà participé à ce genre de discussions. Je disais à mes collègues que j'avais commencé dans ce métier en 1959 et que j'avais toujours été associé directement à la télévision canadienne depuis. J'ai commencé à travailler pour une station affiliée à la CBC à Medicine Hat, en Alberta, ma ville natale. J'ai travaillé pour la CBC, en Alberta, lorsque la télévision a commencé au début des années 1960. J'ai dirigé des stations affiliées à la CBC à Calgary et à Kingston, en Ontario, et j'ai fait partie, directement ou indirectement, de la CBC pendant environ 13 ans.
En 1974, j'ai fondé et assuré la direction générale de ITV Edmonton, qui fait maintenant partie du réseau Global Television. J'ai également été le directeur général et fondateur de CTS à Toronto, offert au canal 9 par Rogers Cable.
Je me suis consacré à la production télévisuelle pendant une bonne partie de ma carrière. J'ai créé des centaines d'heures d'émissions télévisées et en ai vendu plusieurs à la CTV. Je lui ai vendu une série bien connue qui était intitulée SCTV, ou Second City Television. J'ai aussi produit de nombreuses émissions télévisées pour la CBC, y compris pour les programmes de langue française, devrais-je ajouter.
Je préférerais limiter mes commentaires aujourd'hui aux émissions en anglais et la raison en est fort simple. Je pense que, lorsqu'il s'agit des émissions de langue française, c'est aux Québécois d'en parler et de faire des commentaires. J'ai bien sûr des opinions, mais je ne pense pas que je sois bien placé, même avec l'expérience acquise en travaillant au Québec, pour savoir ce que veulent ou méritent les Québécois. J'aimerais donc parler de la télévision anglaise, pour la principale raison que la télévision française, du moins celle de la Société Radio-Canada, n'a pas besoin d'un remaniement en profondeur et il ne faut pas réparer ce qui n'est pas cassé.
Dans le mémoire que je vous ai remis, j'affirme que la CBC n'est pas une véritable chaîne publique. Elle l'a déjà été. Elle a déjà ressemblé à une telle chaîne, mais en cours de route, la direction de la société est devenue l'esclave des cotes d'écoute et a perdu le contact avec le public. Je me souviens que nous avions des parts d'écoute qui allaient jusqu'à 40 p. 100. Nous sommes tombés à 7 p. 100. Et de nos jours, la CBC n'est pas une chaîne très intéressante et elle l'est de moins en moins. Il est temps de prendre des mesures concrètes et de faire vraiment de la CBC une chaîne publique pour le Canada.
Vous ne le croirez peut-être pas, mais à une certaine époque, on ne diffusait jamais de publicité pendant les informations à la CBC. Aujourd'hui, Peter Mansbridge et son équipe d'animateurs interrompent régulièrement les nouvelles canadiennes et étrangères pour vendre du savon, des lits et de la bière, et à peu près n'importe quoi, contrairement à ce que font les meilleurs réseaux de télévision publique au monde, comme la BBC au Royaume-Uni, PBS aux États-Unis, qui diffuse actuellement une série de mes émissions. La CBC a adopté un style qui s'apparente à celui des radiodiffuseurs commerciaux comme CTV, Global, NBC, CBS, Fox, CNN et ABC. Dans les endroits où j'ai travaillé, comme à Calgary, The National de la CBC, l'émission d'information quotidienne, diffusée à 22 h, était régulièrement battue par la station de télévision locale indépendante.
La CBC diffuse autant d'annonces parce que d'après elle, « Elle a besoin de cet argent en raison de l'irrégularité du financement que nous accorde le Parlement ». Les téléspectateurs canadiens ne voient aucune différence entre le contenu des émissions de la CBC et celui des autres réseaux, de sorte qu'elle a perdu son caractère unique et la confiance des téléspectateurs. À l'heure actuelle, un grand nombre de Canadiens s'interrogent sur l'utilisation qui est faite de leurs impôts et se demandent si la télévision anglaise de la CBC mérite de recevoir des fonds publics.
Depuis que la télévision anglaise de la CBC est obsédée par les cotes d'écoute, elle a perdu beaucoup de son intérêt et son auditoire représente seulement 7 p. 100 des téléspectateurs, comme je l'ai mentionné. En bref, la CBC n'a pas réussi, et ne réussit pas à l'heure actuelle, à préserver son caractère original. De plus, elle n'a pas réussi sur le plan commercial. Autrement dit, elle n'a pas rempli son objectif, qui consistait à réussir sur le plan commercial, mais je me demande pourquoi elle a même essayé de le faire. Ce n'est pas son mandat. Le Canada a besoin d'une télévision publique indépendante qui inspire confiance.
La situation a déjà été différente. J'ai remarqué l'âge qu'avait certains d'entre vous et vous ne vous souvenez sans doute pas des émissions dont je vais parler, mais il y en a peut-être quelques-uns qui se souviennent de This Hour Has Seven Days. Elle a fasciné tous les Canadiens. Ce n'était pas une émission coûteuse mais c'était tout simplement de l'excellente télévision. Front Page Challenge a, pendant 25 ans, présenté l'actualité aux Canadiens en leur faisant connaître des personnalités. C'était une émission peu coûteuse, bien conçue, bien écrite et ses animateurs sont devenus des légendes au Canada. La CBC a connu de francs succès dans tout le pays avec des émissions qui présentaient des artistes canadiens comme Don Messer's Jubilee, Juliette, The Tommy Hunter Show, Country Hoedown, et The Irish Rovers. Ces émissions ne coûtaient pas cher mais elles étaient bien présentées et préparées de façon efficace à Montréal, Toronto, Halifax et Vancouver.
Je ne propose pas de ressortir ces formules. Je dis simplement que la CBC a déjà fait preuve de génie créateur et d'imagination qui lui ont valu de belles réussites. Elle n'avait pas besoin d'un million de dollars par heure pour le faire. Aujourd'hui, la CBC ne couvre même pas les Prix Juno qu'elle a créés. Elle ne diffuse pas non plus le football de la LCF, ni les Jeux Olympiques qu'elle a été l'une des premières à présenter, tout cela est passé au secteur privé.
Le plus consternant, c'est que le Canada perd ses plus grands créateurs. Nos scénaristes, acteurs, rédacteurs, monteurs, producteurs et journalistes vedettes nous quittent pour passer chez ABC, CBS, FOX et NBC, qui profitent de leurs talents. Il n'y avait pas d'entreprise au Canada qui leur permettait d'exercer leur créativité.
Téléfilm Canada et les fonds des câblodistributeurs n'ont produit jusqu'ici que des maux de tête et des flops, avec de très rares succès, et la CBC a entre-temps presque disparu. Vous, nos élus, avez réparti avec tant de parcimonie les maigres fonds publics affectés à la culture que vous n'avez créé que de la médiocrité. Pourquoi acceptons-nous que cette mauvaise gestion subsiste? La CBC n'est pas la seule fautive. Le soutien politique des parlementaires est mal orienté et sans effet. Ils essaient d'aider tous les groupes d'intérêts, mais au bout du compte, ils ne contentent personne.
Pourquoi la CBC ne fait-elle pas davantage de coproductions avec les réseaux BBC, RAI et PBS? C'est parce qu'elle a adopté un format commercial qui l'empêche de diffuser un véritable contenu de télévision publique, c'est-à-dire des émissions sans publicité.
Qu'est-il advenu des dramatiques que la CBC diffusait toutes les semaines pendant de très nombreuses années et qui n'étaient pas entrecoupées de pauses publicitaires? Je ne sais pas si certains d'entre vous se souviennent de Festival. On y présentait chaque semaine des oeuvres théâtrales créées par les meilleurs dramaturges au monde. Est-ce qu'on diffuse aujourd'hui des pièces du Festival Shaw de Niagara ou du Festival de Stratford? Qu'est-il advenu des concerts symphoniques, des ballets, des opéras que présentait la CBC? Nous connaissons tous la réponse. Les auditoires pour ce genre d'émissions artistiques sont trop restreints. Autrement dit, les cotes d'écoute l'emportent sur la culture.
Serait-il plus intéressant de regarder The Nature of Things, The Fifth Estate ou The National s'il n'y avait pas de publicité? Pouvons-nous croire qu'un réseau nous dit la vérité sur les entreprises qui commanditent ses émissions? Sur tous les canaux, les émissions pour enfants devraient être exemptes de publicité, et cela est obligatoire pour la CBC. Qu'en est-il du nouveau projet pour enfants de la CBC-TV? Il a été abandonné car la télévision pour enfants ne produit pas de recettes.
Nous sommes maintenant à une étape critique. Il est possible d'en tirer parti et nous devrions essayer de le faire. Le remède qui chassera la maladie qui a affaibli un trésor national qui ne diffuse qu'une seule émission parmi les 25 émissions les plus regardées par les Canadiens est simple : le gouvernement fédéral doit cesser de verser nos précieux dollars culturels aux réseaux commerciaux comme CTV/CHUm, Global/CH, Rogers, Alliance Atlantis et même Corus, et affecter le tout là où il le devrait, à savoir à la télévision publique. Le gouvernement éparpille les fonds dans d'innombrables directions, comme il diluerait un bon vin — et je viens de Niagara, je suis un expert dans ce domaine. Il n'a aucun goût et ne plaît à personne lorsqu'on le mélange avec de l'eau.
Pourquoi est-ce qu'un radiodiffuseur public utilise les subventions gouvernementales pour acheter les droits de l'émission Hockey Night in Canada alors que celle-ci est rentable? Pourquoi ne fait-on pas de CBC Sports un canal distinct comme TSN ou Rogers Sportsnet, qui sont payants? On pourrait vendre l'entreprise ou créer une chaîne de sport distincte.
Si la CBC cessait de rechercher des revenus publicitaires, on pourrait demander aux exploitants de la télévision privée de renoncer aux subventions que le gouvernement leur verse pour leurs émissions. Il faut mettre tout l'argent qu'on attribue actuellement — Il faut faire une fusion, si je peux m'exprimer ainsi, une fusion entre les différents fonds, une fusion avec l'Office national du film, faire un seul fonds. Il y a à l'heure actuelle tellement de fonds qu'aucun n'a un effet notable. Je ne dis pas cela pour le plaisir de critiquer. C'est une situation vraiment très triste.
Lorsque nous regardons une émission dramatique au Canada, 97 p. 100 du temps, c'est une émission étrangère. Cela veut dire que nous regardons seulement 3 p. 100 d'émissions canadiennes. Nous regardons des dramatiques américaines et étrangères. Les recettes provenant des films canadiens projetés dans les collectivités canadiennes représentent moins de 3 p. 100 des recettes totales. Heureusement qu'il y a les producteurs québécois.
Mes recommandations ne nuiraient pas aux créateurs indépendants d'émissions canadiennes. Ceux-ci produiraient tout simplement des émissions, subventionnées par le gouvernement, destinées au radiodiffuseur public national, la CBC, plutôt qu'à Global ou à CTV.
Les réseaux de télévision privés récupéreraient ces recettes publicitaires, qui représentent près de 300 millions de dollars par an. La CBC toucherait dorénavant la totalité de l'allocation pour la télévision versée par le gouvernement. C'est ce que nous proposons.
Ne venez pas nous dire qu'il n'y a pas au Canada suffisamment de talents pour soutenir la concurrence des États-Unis. Nous sommes les meilleurs au monde. Nous pouvons produire des films pour la télévision, des feuilletons, des comédies de situation, des dramatiques comparables à ce qui se fait de mieux au monde.
Vous avez la possibilité de donner un nouveau souffle à ce réseau qui est très mal en point. Il serait extraordinaire que le gouvernement du Canada finance enfin une vraie télévision publique. Que la télévision de la CBC prenne modèle sur la radio de la CBC et cela contribuera à sauver la nation canadienne. La CBC n'est pas seulement un diffuseur. C'est elle qui renforce l'unité de notre pays. Si nous n'arrivons pas à sauver la CBC, nous n'arriverons peut-être pas à sauver notre pays. Je suis convaincu que c'est le risque que nous courons.
Une dernière remarque; ce matin j'ai lu une colonne écrite dans un journal local par un monsieur du nom de Knowlton Nash, qui a d'ailleurs fait une brillante carrière à la tête d'une section de la CBC. Dans cette colonne il évoque ce que vous faites ici aujourd'hui et l'importance de ce travail. Il dit qu'il ne faudrait pas que la même chose se produise pour toutes les autres commissions, audiences du Sénat et audiences spéciales qui ont envisagé cet avenir depuis 1936, lors de la création de la télévision à la SRC.
Le président de la SRC, Robert Rabinovitch, a dit que vous devriez tenir ce genre d'audience tous les dix ans afin d'assurer le renouvellement de la Société, mais franchement nous en avons assez. Je suis ici depuis 1959, et j'ai participé à au moins dix de ce genre d'échanges. Ils sont sains, mais ne débouchent jamais sur rien de concret.
Le moment est venu d'effectuer une des plus grandes fusions publiques de notre histoire, et vous êtes les seuls à pouvoir le faire. Le reste d'entre nous est totalement impuissant. Ce sont les parlementaires qui devraient déclarer fièrement « Nous sommes les parrains de la SRC; il n'y en a pas d'autre. Nous, parlementaires, au nom de tous les Canadiens, parrainons la SRC ». Quel grand jour ce serait pour le Canada.
Je vous remercie.
:
Bonjour. Je vous remercie de votre invitation.
Je m'appelle Joe Clark. Je viens de Toronto. C'est la troisième fois que je témoigne devant votre honorable comité. J'étais ici en 2002 et aussi en 1990. J'espère que cette fois-ci il se passera vraiment quelque chose après ma comparution.
Je m'intéresse depuis 25 ans au problème de l'accessibilité des personnes handicapées. Je travaille comme consultant dans ce domaine. Il s'agit surtout d'accessibilité au web et de sujets tels que le sous-titrage et la description audio. J'ai un peu travaillé pour la SRC, de temps à autre, mais je n'ai pas de contrat avec elle en ce moment. Je donne des conférences et fais des présentations dans le monde entier sur l'accessibilité et autres sujets, et j'ai écrit un livre sur l'accessibilité au web.
Commençons donc par un peu de terminologie. Je crois que toutes les personnes ici présentes savent ce qu'est le sous-titrage. C'est une transcription du dialogue et des effets sonores importants pour les spectateurs sourds ou malentendants. Pour les spectacles en direct et quelques autres, nous utilisons le sous-titrage en temps réel; cela implique habituellement la participation d'un sténographe utilisant un clavier spécial, encore que maintenant, certains essaient d'utiliser un système de reconnaissance de la voix. Il y a deux styles principaux de présentation pour le sous-titrage. Si vous avez suivi un spectacle en direct sous-titré, vous avez vu le sous-titrage à défilement, dans lequel les mots défilent de gauche à droite pour céder la place à la ligne suivante. L'autre option est le sous-titrage dans lequel une seule légende apparaît dans un bloc stationnaire qui est remplacé par un autre bloc stationnaire ou par un écran vide.
Aujourd'hui, je n'ai pas suffisamment de temps pour parler de sujets vraiment importants, la description audio pour les aveugles et l'accessibilité sur le Web, y compris celle de la vidéo. Vous pourrez me poser des questions à ce sujet tout à l'heure, si vous le désirez. Aujourd'hui je vais uniquement parler du sous-titrage.
Où en est le sous-titrage à la SRC? Savez-vous que la SRC est le seul diffuseur au monde qui soit tenu de sous-titrer chaque seconde de ses émissions quotidiennes? C'est parce qu'un avocat sourd, Henry Vlug, avait déposé une plainte liée au droit de la personne concernant l'absence ou l'insuffisance de sous-titrage, et il a gagné. Depuis novembre 2002, la SRC soutient qu'elle se conforme à cette décision et qu'elle sous-titre tout ce qui passe à CBC Television et à Newsworld. Mais ce n'est pas vrai. Pendant trois ans, j'ai suivi les programmes et j'ai pris des notes. J'ai relevé nettement plus de 100 cas d'absence ou d'insuffisance de sous-titrage. J'ai publié les résultats en novembre 2005, et apparemment, on m'a pris au sérieux.
La Commission canadienne des droits de la personne a transmis mes observations à la CBC, qui a finalement condescendu à répondre. Elle a reconnu que tous les types d'erreurs de sous-titrage que j'avais relevés s'étaient produits ou auraient effectivement pu se produire, et a déclaré qu'elle donnerait dorénavant plus de rigueur à ses procédures. Mais sur d'autres points, la CBC a eu une attitude défensive et a réagi avec colère. Elle a déclaré que les films avec sous-titres n'ont pas besoin d'être sous-titrés, même si les effets sonores ne le sont jamais; que le sous-titrage à défilement était parfaitement satisfaisant pour les drames et les comédies; et qu'il fallait absolument utiliser le sous-titrage en temps réel pour les programmes qui ne sont pas transmis en direct. La CBC a violemment réagi et s'est défendue en employant des termes tels que « Nous nous inscrivons catégoriquement en faux » et « nous contestons vigoureusement ».
Ensuite, la Commission des droits de la personne a essayé de saborder l'affaire. Mon avocat a commis l'erreur d'utiliser le mot « plainte » dans une lettre à cette Commission qui en a profité pour déclarer qu'il n'y avait jamais eu de plainte au départ et qu'il faudrait que j'en présente d'abord une. Essentiellement, le but de la Commission était d'essayer d'annuler sa propre enquête. Le sous-titrage à la CBC ne s'est pas vraiment amélioré. Rien n'a été totalement réglé. Je continue à prendre des notes, et les résultats sont présentés sur mon site Web.
S'il est impossible à la CBC d'assurer une accessibilité à 100 p. 100, qui peut le faire? Si un radiodiffuseur public ne peut pas respecter l'obligation juridique qui lui est faite d'assurer un sous-titrage à 100 p. 100, comment peut-on espérer l'obtenir ailleurs? Pourquoi des diffuseurs privés, qui sont prêts à tout faire pour économiser un sou, feraient-ils le moindre effort pour parvenir à tout sous-titrer? Comment oser espérer que la plupart des émissions ou toutes les émissions soient accompagnées d'une description audio pour les aveugles?
J'ai proposé à plusieurs reprises à la CBC de venir lui parler de sous-titrage et d'accessibilité en général. Mais j'ai toujours essuyé un refus, même après qu'elle ait promis de me rencontrer en 2002. Il est très embarrassant de voir que j'ai trouvé que la CBC ne respecte pas ses obligations et que la Commission canadienne des droits de la personne s'est laissée prendre de court et n'a pas fait appliquer sa propre décision.
Bon, et le sous-titrage en français? Eh bien, en 2004, le sénateur en retraite Jean-Robert Gauthier, que certains d'entre vous connaissent personnellement, et qui était malentendant, avait déposé une plainte contre la Société Radio-Canada au sujet du sous-titrage. Dans le cadre du processus de règlement, la SRC avait accepté de présenter un rapport sur l'état du sous-titrage, en particulier le sous-titrage en temps réel, sur Radio-Canada et au Réseau de l'information. J'ai lu le rapport et j'en ai écrit la seule qui existe à ma connaissance. Tout ce que proposait la SRC était d'ajouter deux personnes au groupe des sous-titreurs en temps réel, s'en s'engager à assurer un sous-titrage à 100 p. 100. Rien n'était dit des normes de qualité.
Qu'en est-il donc des normes de qualité? Eh bien, la SRC connaît bien des problèmes dans ce domaine. Premièrement, elle persiste à ne vouloir utiliser que des capitales, ridicule héritage des années 1970. La CBC a une norme bien à elle qui n'est pas la même que celle qu'utilise Radio-Canada. Utiliser deux normes différentes équivaut à ne pas en avoir du tout.
D'ailleurs, aucune de ces normes n'a été publiée, voire même mise à l'essai. Le sous-titrage en temps réel est utilisé pour les programmes qui ne sont pas transmis en direct. Les sous-titreurs en temps réel sont insuffisamment préparés. Si vous suivez une émission sportive qui n'est pas consacrée à un sport professionnel, vous constaterez que la plupart des noms propres sont massacrés, parce qu'ils n'ont pas été communiqués d'avance au sous-titreur. Bon nombre de ces émissions sont d'ailleurs préenregistrées et, de toute façon, elles ne devraient pas utiliser de sous-titrage en temps réel. La CBC adore le sous-titrage à défilement parce qu'il est peu coûteux, et elle l'utilise pour des programmes totalement inappropriés tels que les émissions d'histoires fictives. Il est impossible de suivre un drame ou une comédie en utilisant ce type de sous-titrage. Essayez et vous verrez.
La CBC refuse de le faire pour les programmes sous-titrés ou pour les messages publicitaires de l'extérieur. Seuls les messages de la CBC elle-même, comme les promos concernant les spectacles à venir, sont sensés être sous-titrés, et même là, ce n'est pas toujours le cas. La CBC refuse d'utiliser l'anglais du Canada. On pourrait penser que ce genre de colonialisme n'existe plus aujourd'hui, mais la CBC utilise l'anglais britannique, et encore ne le fait-elle pas toujours parfaitement.
Ce qui est assez amusant, c'est que j'ai une solution à offrir pour ce problème. Je suis le fondateur du open and closed project. C'est un projet de recherche sans but lucratif que j'ai en gestation depuis cinq ans. Notre objectif est de rédiger une série de normes pour les quatre domaines d'accessibilité audiovisuelle : sous-titrage et description audio, traduction en sous-titre, doublage. Ces normes n'existent pas encore; en tout cas, aucune n'a été élaborée dans le cadre d'un processus ouvert, ni testée auprès du public. Nous allons consacrer trois années à l'élaboration de ces normes, puis une année supplémentaire pour les tester dans le monde réel. Nous publierons les spécifications et nous assurerons la formation et l'accréditation des pratiquants. Il sera alors possible pour les diffuseurs tels que la CBC, les producteurs et le CRTC, et aussi le public, pour réclamer que toute leur accessibilité soit ouverte et fermée.
D'autre part, arrivé à ce point, il n'y aura pas autant de types de sous-titrage qu'il y a d'entreprises qui le pratiquent. Tout sera normalisé. Il y aura un sous-titrage pur et simple. Il n'y aura pas six sous-titrages de style CBC ou CTV, ou de sous-titrage imposé par le moins offrant pour les contrats. Nous avons besoin d'un demi-million pour la première année, et de cinq à sept millions de dollars pour toute la durée de ce projet de sept années — ce qui n'est vraiment pas grand-chose. Nous avons fait une demande d'aide financière qui serait fournie par les dépenses au titre des avantages sociaux provenant de plusieurs fusions dans l'industrie de la radiodiffusion. Nous n'avons rien obtenu jusqu'à présent, mais cela ne peut pas durer car nous avons des appuis partout.
Nous avons l'appui de l'industrie. Nous avons des lettres de soutien signées de fournisseurs de sous-titrages et de descriptions, de fabricants de logiciel et de radiodiffuseurs de quatre pays.
Nous avons l'appui du public. Et j'ai créé un programme de « micro-patronage » afin d'avoir les ressources nécessaires pour trouver des fonds pour l'ensemble du projet. Deux cent quinze personnes y ont volontairement contribué financièrement, et des douzaines d'entre elles ont écrit des lettres de soutien.
Nous somme amis avec tous les chercheurs valables. Nous connaissons non seulement intimement les bons chercheurs dans le domaine de l'accessibilité, mais nous avons aussi des ententes verbales avec certains d'entre eux.
Mais le open and closed project ne bénéficie pas du soutien de la SRC. En privé, certains membres de son personnel lui sont favorables, y compris une personne qui nous a écrit une lettre de soutien. Mais ce n'est pas suffisant. Il serait vraiment important que le radiodiffuseur public national du Canada reconnaisse la nécessité de normes indépendantes extérieures et en appuie l'élaboration. Un tel appui serait inestimable. Il n'est pas nécessaire que cela coûte de l'argent. Une déclaration publique à ce sujet serait un bon point de départ. Mais pour que cela se produise, il faudrait que la SRC cesse de ne penser qu'à elle-même et de se montrer aussi arrogante et défensive. À ce propos, la SRC ne s'est pas contentée de ne pas appuyer le open and closed project, elle a tenu des réunions secrètes à huis clos avec d'autres diffuseurs et d'autres fournisseurs de services de description audio dans le but de réécrire les normes actuelles.
En résumé, la SRC a une exigence tout à fait particulière en matière de sous-titrage, et elle ne fait rien pour respecter cette exigence. La Commission des droits de la personne a refusé d'appliquer sa propre décision ou même de faire enquête sur son application. La SRC préfère fabriquer ses propres normes plutôt que d'apporter un soutien à des normes ouvertes indépendantes.
Merci
:
Si vous me le permettez, monsieur le président, j'interviendrai le premier.
Premièrement, je vous remercie vivement vous et les membres du comité de nous offrir cette occasion de comparaître devant vous.
Je souhaiterais vous présenter mes collègues. Je suis accompagné aujourd'hui par John Spence, rédacteur de cbc.watch.ca, un site Web consacré à la documentation et à l'examen de questions touchant au manque d'impartialité et à l'équilibre dans les programme de la CBC, et Frank Gue, un ingénieur professionnel à la retraite qui a travaillé dans le domaine de la fabrication, de la gestion et de l'enseignement. Je m'appelle Viggo Lewis. Je suis homme d'affaires à la retraite qui a fait carrière dans plusieurs sociétés manufacturières au Canada et aux États-Unis.
Je commencerai par un exposé de six minutes, et chacun de mes collègues en fera ensuite un de deux minutes. Nous sommes tout à fait conscients des contraintes de temps qui vous sont imposées.
Nous avons présenté un mémoire qui recommande, en résumé, premièrement, la révision du mandat de la SRC afin d'y inclure deux clauses de la Loi sur la radiodiffusion qui ont trait à l'exigence selon laquelle la programmation canadienne « devrait à la fois être variée et aussi large que possible en offrant une programmation équilibrée qui renseigne » et, c'est la seconde clause — « dans la mesure du possible, offre au public l'occasion de prendre connaissance d'opinions différentes sur des sujets qui l'intéresse ».
En soi, cette recommandation n'est pas suffisante. C'est une chose d'avoir un mandat et des politiques, mais c'est toute autre chose de s'assurer que ce mandat est mis en oeuvre. À cette recommandation, nous en avons donc joint deux autres que nous considérons comme en faisant partie intégrante et ayant une importance égale, à savoir premièrement : que s'il est indiscutable que la SRC a mis en place des contrôles pour assurer l'observation d'autres aspects importants de sa politique, notamment la sécurité, l'égalité d'accès, etc., des contrôles devraient aussi être établis afin d'éliminer les manifestations de parti pris dans la programmation et d'imposer partout un équilibre; deuxièmement, que tous les futurs ombudsmen soient choisis hors des rangs des employés anciens et actuels de la CBC.
La politique actuelle consistant à affecter à ce poste des employés anciens ou actuels impose une charge trop lourde à la personne ainsi nommée lorsqu'elle est appelée à présenter un jugement impartial sur d'anciens collègues et amis avec lesquels elle entretient des rapports depuis des années. En outre, cette personne devrait être capable d'avoir une vision personnelle claire des choses, au lieu d'être obligée de se soumettre à la vision de la SRC.
Notre mémoire n'est pas fondé sur des opinions ou des impressions, mais sur du concret. Comme nous l'avons montré dans celui-ci, c'est un fait que la direction de la SRC admet volontiers que le public a raison lorsqu'il a l'impression que la Société favorise la gauche et qu'il y a un manque d'équilibre dans la programmation; nous avons d'ailleurs nous-mêmes fourni des preuves qui confirment cette situation. En revanche, la direction de la SRC nie catégoriquement l'existence de cette partialité et de ce manque d'équilibre.
Qui donc a raison? Nous croyons que c'est le public, qui représente toutes les nuances de la société.
Pourquoi avons-nous fait ces recommandations? À quoi bon? Comment amélioreront-elles la situation de la radiodiffusion au Canada, et cela d'autant plus que la nécessité d'un équilibre journalistique est une question qui est parfaitement traitée dans les normes et pratiques journalistiques de la SRC?
La réponse est que la nécessité d'un équilibre au sein d'une société qui est la plus importante organisation de journalisme de télévision au Canada, et qui est financée par nous tous, se fait profondément sentir. La SRC occupe une position de confiance unique au Canada et, du fait de sa taille et de son rayonnement, elle exerce une énorme influence sur l'opinion publique, ce que la prise de ces mesures contribuera à équilibrer.
La SRC remplit certaines parties de son mandat; elle reflète le caractère multiculturel du Canada, elle est typiquement canadienne, elle contribue activement à l'expression culturelle et à l'échange des diverses formes qu'elle peut prendre. En revanche — et c'est important — elle reconnaît elle-même, aux yeux du public, qu'elle ne respecte pas ses propres normes journalistiques lorsqu'il s'agit d'un équilibre. Cela est inacceptable, et nous disons donc que puisque son mandat est muet au sujet de cet équilibre et puisqu'il s'agit d'un sujet d'une telle importance, celui-ci devrait être une des composantes du mandat de la CBC.
Si le comité du patrimoine approuve cette recommandation, il pourrait, et devrait avoir un élément déterminant de la politique et des activités de la SRC à l'avenir et aider à accroître son public. Cela nous paraît très important.
En conclusion, nous estimons que nous avons besoin d'un radiodiffuseur public, mais il faut que celui-ci respecte un certain équilibre. La SRC — je suis certain que vous le savez parfaitement, car vous avez eu affaire avec elle — fait face aux coûteuses exigences exprimées de divers groupes d'intérêt. Mais ces recommandations ont un caractère unique, en ce sens qu'elles ne s'adressent pas à un seul groupe d'intérêt, mais à l'ensemble du public et qu'elles ne coûtent pas cher.
[Français]
Merci de votre attention et de l'invitation à participer.
[Traduction]
Je cède la parole à John Spence.
Je suis le rédacteur de CBC Watch, un site Web qui a pour titre www.cbcwatch.ca. Il a été créé au début de 2004 par des Canadiens lassés par l'activisme partial et l'extrémisme de la Société Radio-Canada. CBC Watch présente des points de vue divers sur les questions que la SRC néglige volontairement d'inclure dans les débats de fond. Ces omissions se font au préjudice du débat public général. Depuis sa création, le site Web a reçu plus de trois millions et demi de visites individuelles — à ne pas confondre avec les visites ordinaires. CBC Watch est un site Web qui ne coûte pas un sou aux Canadiens. Il est actuellement en cours de réorganisation et recommencera à fonctionner en mai.
Le site révèle régulièrement des violations manifestes par la SRC des dispositions de la Loi sur la radiodiffusion. Il révèle aussi diverses autres actions, productions ou omissions de la SRC qui compromettent l'intégrité de la radiodiffusion au Canada.
Contrairement à ce que croient de nombreux partisans de la SRC ce n'est pas un site Web anti-SRC. CBC Watch est simplement opposée à la partialité et à l'activisme manifesté par la Société. Contrairement à la SRC, CBC Watch n'est pas tenu de respecter un équilibre par quelque loi canadienne que ce soit. Le sous-alinéa 3(1)(i)(iv) de la Loi canadienne sur la radiodiffusion dit que la SRC doit, « dans la mesure du possible, offrir au public l'occasion de prendre connaissance d'opinions divergentes sur des sujets qui l'intéressent ». Manifestement, la SRC a échoué sur ce plan; nous considérons donc que certaines parties de cet article devraient être ajoutées au mandat de la SRC.
La SRC sait qu'elle a un problème. Dans une note rendue publique en novembre 2003, Tony Burman, le rédacteur en chef de CBC News reconnaissait que la SRC avait commandé une étude qui avait conclu que les Canadiens jugeaient que la SRC manquait d'impartialité. On ne sait pas exactement sur quoi cette impression était fondée. La SRC refuse de communiquer des détails sur cette étude qui a coûté plusieurs millions de dollars à ceux qui l'ont financée, c'est-à-dire les contribuables canadiens. Ce qu'il y a d'intéressant dans la réaction de Tony Burman, c'est qu'il a en fait trouvé une consolation dans le fait que cette étude montrait que les Canadiens ne jugeaient pas la SRC faisait autant preuve de partialité que CNN.
Autrement dit, Burman semble croire que la partialité manifestée par la SRC est tout à fait acceptable, tant que cette partialité n'est pas aussi manifeste que celle d'une quelconque chaîne américaine de nouvelles par câble. Je regrette, mais la loi dit que ce n'est pas suffisant. Le mécanisme de présentation et de règlement des plaintes à la SRC n'a pas pour objet de corriger toute manifestation constante de partialité ou d'y répondre, même si la SRC en découvrait l'existence. C'est un simple rideau de fumée. Le mécanisme interne de règlement des plaintes de la SRC ne donne pratiquement aucun résultat.
Robert Fulford, un ancien employé de la CBC — sa femme est productrice à la CBC — l'a exprimé mieux que personne, lorsqu'il déclarait :
Mais les citoyens qui se plaignent à la direction en reçoivent des lettres d'autojustification qui expliquent inévitablement que la SRC se montre toujours impartiale. Ces lettres sont si longues et ennuyeuses qu'elles paralysent, peut-être fatalement, l'esprit de tous ceux qui les lisent. J'appellerais ce processus, la Mort par ombudsman. Le but poursuivi est de s'assurer que le citoyen en question n'écrira plus jamais, au grand jamais, une lettre de protestation.
C'est la raison pour laquelle nous avons recommandé que les futurs ombudsmen soient choisis hors des rangs de la SRC.
Plus loin dans la même colonne, M. Fulford évoque le manque de diversité des opinions exprimées à la CBC :
De nombreux journalistes trouvent qu'il est extrêmement instructif de travailler pour la CBC. Cela a certainement été le cas pour moi. À l'époque où j'ai commencé à participer à des émissions de la CBC, le terme « politique non correcte » n'existait pas. Mais personne à la CBC n'en avait besoin. Il se conformait scrupuleusement à cette notion sans en savoir le nom. En les écoutant, je me suis rendu compte qu'ils lisaient tous les mêmes publications et partageaient les mêmes idées. Beaucoup d'entre eux sont devenus des amis, mais j'ai acquis une véritable aversion à l'égard de leur étrange et inquiétante uniformité de vues.
Il s'agit d'un extrait du National Post du 23 septembre 2006.
Les critiques font valoir que cette partialité agit comme contrepoids aux médias privés. Ces médias privés peuvent se permettre d'avoir une orientation éditoriale, mais il est cependant possible de parvenir à un équilibre si l'on prend toute la gamme de ces médias privés. La SRC, cependant, est tenue par la loi de refléter les vues de tous les Canadiens, et pas seulement ceux de gauche, ou de jouer à la fois le rôle d'interprète et de contrepoids. Il faut que cet équilibre existe. Pour l'assurer, nous avons recommandé que l'on institue des contrôles. Avec le temps, les partis pris de la SRC, s'ils demeurent incontrôlés, finissent par créer une vision historique faussée du Canada.
Je le répète, la SRC est tenue par la loi de refléter les caractéristiques de tous les Canadiens, et pas seulement des Canadiens de gauche. Elle a l'obligation d'être équilibrée, et pourtant, elle refuse de se montrer équitable et objective dans la manière dont elle présente les grandes questions, les idées, les organisations et les sujets politiques. Pour assurer cet équilibre, nous avons recommandé d'instituer des mesures de contrôle des procédures et du recrutement.
Je vous remercie.
:
Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Frank Gue, et je constate que j'ai beaucoup de points communs avec M. Wilks, car je suis un vrai journaliste à l'ancienne, du genre « Nouvelle de l'heure, Washington : le Département d'État annonce que les Japonais ont attaqué Pearl Harbour ». J'étais rédacteur aux informations par ce beau dimanche matin.
Ce dossier contient 13 années de critiques et aussi de commentaires positifs au sujet de la CBC, en particulier de Radio One. M. Lewis a justement fait remarquer que la SRC devrait donner plus d'importance à l'équilibre et devrait en faire une des composantes de son mandat. La nécessité d'une approche équilibrée est illustrée par un échantillon de 99 journées d'observations que j'ai faites au sujet de Radio One. Un auditeur, qui aurait retenu tout ce qu'une journée bien remplie lui aurait permis de faire, aurait entendu 31 remarques péjoratives à l'égard des conservateurs, qu'il s'agisse de personnes ou de partis, une seule à l'égard des libéraux et aucune à l'égard du NPD. Un autre auditeur noterait certainement des chiffres différents, mais le message n'aurait pas changé depuis que j'ai recueilli cet échantillon.
En ce qui concerne les commentateurs, il est regrettable que la CBC s'abrite parfois derrière eux en disant qu'elle ne peut pas être tenue responsable de leurs déclarations; il n'en reste pas moins qu'elle peut être responsable des commentateurs choisis par elle. Et des commentateurs qu'elle choisit, la CBC se montre très généreuse en ce qui concerne le temps qu'elle accorde la gauche — cette expression me déplaît, mais apparemment, tout le monde la comprend — alors qu'elle accorde très peu de temps aux voix de la droite compétentes, souvent brillantes et de renommée mondiale. Suzuki obtient une heure; Hargrove 20 minutes; le Centre canadien de politiques alternatives 10 minutes; le Fraser Institute ou l'Atlantic Institute for Market Studies, pratiquement rien.
L'ombudsman et les producteurs auxquels il transmet les plaintes au sujet du manque d'équilibre, lui répondent par des lettres courtoises, mais ils reconnaissent rarement, pour ne pas dire jamais, l'existence d'un problème. Leur argument typique est qu'il n'est pas possible de déterminer d'après un seul programme si un équilibre existe, ce qui n'est certainement pas faux, mais il faudrait alors revenir à l'échantillon de 99 jours.
Le défi que doit relever la direction de la SRC est le suivant : faire une place à l'équilibre dans son mandat et réorienter et contrôler les gens en conséquence.
Un mot au sujet du contrôle : il est absolument indiscutable que certains producteurs ont des politiques locales totalement contraires à celles de la SRC, et je peux vous en donner des exemples. La SRC doit utiliser des commentateurs représentant toutes les nuances et faire le point en utilisant, comme le disait M. Lewis, des vérificateurs étrangers au milieu de la radiotélévision et, si je peux me permettre de le dire, qui ne sont pas non plus des universitaires. Je vous en prie, faites en sorte que le statut et les pouvoirs de l'ombudsman soient renforcés.
Je vous remercie.
:
Merci, monsieur le président.
Je suis heureuse d'être ici, parce que j'écoute CBC depuis plusieurs années et que j'ai des préoccupations à ce sujet.
Lorsque la CBC-SRC a été établie en 1932, notre pays était totalement différent. Il était peu peuplé. Les contacts avec d'autres Canadiens étaient peu fréquents et il y avait très peu de communications dans le monde, parce que la seule façon de le faire était d'utiliser la poste. Il y avait peu de téléphones. Nous savons tous que le Canada a beaucoup changé depuis cette époque. Il y a aujourd'hui 500 chaînes de télévision et aussi la télévision par satellite. De plus, nous entrons dans l'ère du numérique. La situation est totalement différente de celle qu'elle était au moment de la fondation du Canada.
Chose certaine, la Loi sur la radiodiffusion de 1991 ne reflète plus ce que la CBC-SRC devrait être. Les deux considérations les plus importantes en vertu de l'article 3 de la Loi sur la radiodiffusion sont que la CBC doit être principalement et distinctement canadienne et qu'elle doit refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays.
Toutefois, j'aimerais vous dire que, à titre de femmes aux valeurs conservatrices — et nous sommes nombreuses au Canada — nous n'avons jamais eu notre mot à dire concernant la CBC-SRC. Quand il y a de soi-disant questions qui peuvent refléter la réalité des femmes — et toutes les questions concernent les hommes et les femmes — elles sont presque toujours véhiculées par des féministes libérales de gauche — je hais ce mot. Pourtant, il y a plusieurs porte-parole compétentes chez les femmes conservatrices au Canada. Nous avons droit de vote et nous l'exerçons. Nous pensons. Nous sommes instruites, du moins plusieurs d'entre nous, et pourtant il y a une forte réticence à entendre notre point de vue au Canada. Nous sommes assurément tout aussi Canadiennes que quiconque, mais personne ne nous entend.
Une des raisons est que effectif-téléspectateurs et l'auditoire de la CBC-SRC diminue sans cesse. Dans un rapport publié dans le National Post, on peut lire que seulement 5 p. 100 des gens regardent la télévision nationale de la CBC-SRC. J'ai vu 2 p. 100. En d'autres mots, la CBC-SRC ne répond pas aux besoins des Canadiens, non seulement ceux des femmes, mais ceux de tous les Canadiens. Le problème est que la CBC-SRC, plutôt que d'être un élément unificateur de la société canadienne, ce qui a toujours été l'intention, c'est-à-dire d'unifier les Canadiens, est devenue une organisation qui divise parce qu'elle est perçue, par plusieurs, comme une source d'endoctrinement et de propagande pour l'aile gauche de la scène politique et sociale, plutôt qu'une source d'information impartiale.
J'ai fourni quelques exemples à la page 4 de mon mémoire. Je ne voudrais pas que vous vous imaginiez que j'invente tout cela et qu'il ne s'agit que d'une perception. J'ai des exemples concrets des raisons pour lesquelles la CBC-SRC suscite tant la division chez Canadiens. Elle ne reflète plus un grand nombre de Canadiens, et c'est la raison pour laquelle elle est impopulaire. Comment savons-nous qu'elle n'est plus populaire? Nous le savons à cause du petit nombre de gens qui la regarde la télévision de la CBC, par exemple le bulletin de nouvelles de la CBC diffusé à l'échelle nationale à 22 h, parce qu'ils ne veulent pas entendre l'interprétation que l'on fera de l'actualité. Tout ce que vous voulez, ce sont des faits. Vous voulez de l'information. Vous ne voulez pas une interprétation d'un point de vue de la gauche.
Quand les radiodiffuseurs cherchent des commentateurs ou des intervenants, ils ne considèrent jamais les femmes conservatrices. Les commentateurs masculins ne sont jamais des conservateurs. Ce sont toujours des gens de l'autre côté. On ne nous donne pas une occasion appropriée et objective de faire une analyse de ce que veulent les Canadiens, et pourtant les Canadiens doivent payer un milliard de dollars par année pour financer la CBC-SRC. Comme je l'ai dit, la société répondait à un besoin, mais ce n'est plus le cas.
Il y a aussi autre chose, et c'est flagrant selon moi. Non seulement la CBC ne représente-t-elle plus les Canadiens, mais elle a essayé d'éliminer son rôle de radiodiffuseur public. Par exemple, la CBC diffuse des émissions de sport et cherche à concurrencer d'autres chaînes de télévision comme CTV ou Global.
De toute évidence, la CBC, dont l'auditoire décline et qui perd des revenus du gouvernement et de la publicité, ne répond pas aux besoins du Canada. Après avoir critiqué la CBC-SRC — et je pourrais continuer presque indéfiniment en vous fournissant des exemples — je vous dis qu'il y a des écarts considérables au sein de la CBC, notamment le Service du Nord de Radio-Canada/CBC Northern Service. J'étais au Nunavut et j'ai été étonnée que la CBC prenne un aspect que je ne connaissais pas. Le Service du Nord répond aux besoins des Inuits. Ce service est un lien important pour les chasseurs et les pêcheurs, mais plus encore, il reflète leur culture et offre une programmation en langue inuite.
Dans certains des villages éloignés, le seul contact que ces gens ont avec l'extérieur est le Service du Nord. Je disais aux gens « Oh! si c'est la CBC, vous ne voulez pas l'écouter, parce qu'elle ne reflète pas ce que vous êtes ». Ce sont des gens aux valeurs très traditionnelles, qui ont une culture tout à fait traditionnelle. Tous m'ont dit, « Oh! non, ce service est merveilleux, les responsables nous écoutent et nous appuient ».
Par conséquent, la chose est possible pour la CBC-SRC. Nous avons des membres dans les Territoires du Nord-Ouest qui nous disent « Oui, nous avons besoin d'un service régional de radiodiffusion qui reflète nos points de vue en tant qu'habitants du Nord ». Il est donc possible que la culture de la CBC se modifie.
Je crains qu'une grande partie de la culture de la CBC ne vienne du centre-ville de Toronto, où j'habite, mais cela ne signifie pas que le centre-ville de Toronto soit le Canada. C'est là un des problèmes.
Il faut se demander pourquoi l'auditoire de CNN compte 2,7 p. 100 de Canadiens et que seulement 1,7 p. 100 de Canadiens regardent Newsworld à CBC? Ce réseau est censé être le nôtre, mais nous ne le fréquentons pas; nous cherchons plutôt à obtenir les faits de CNN. Voilà un exemple de la façon dont la culture de la CBC-SRC est devenue si inacceptable pour plusieurs Canadiens. Mais comme je le dis, la société peut être utile en région.
Ainsi, REAL Women aimerait suggérer une solution de rechange pour la CBC-SRC, c'est-à-dire que la société se contente de travailler en région où il n'y a pas de radiodiffuseurs privés. Il y a des radiodiffuseurs privés à peu près partout au Canada, mais il faut quand même une radiodiffusion publique dans les régions éloignées. C'était là un des rôles de la CBC-SRC en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, et c'est là que cette loi peut servir.
Il y a un autre problème. Pour que la société respecte son mandat de service public, il faudrait ramener la CBC-SRC au rang de radiodiffuseur public comme c'est le cas aux États-Unis. Il est ironique que les services de radiodiffusion publics aux États-Unis, à la frontière canadienne, soient soutenus par des Canadiens. Les Canadiens n'obtiennent pas de reçu aux fins de l'impôt pour leurs contributions, mais ce réseau frontalier bénéficie d'un appui financier. Pourquoi en est-il ainsi? Parce que le radiodiffuseur public présente ce que les Canadiens veulent voir. C'est la raison pour laquelle les Canadiens investissent dans la radiodiffusion publique, mais ils ne veulent pas que leur argent aille à la CBC-SRC.
À l'ère des 500 chaînes de télévision, il est inhabituel pour les contribuables de continuer de dépenser un milliard de dollars pour financer la programmation du service général de la CBC-SRC dans un contexte aussi segmenté et encombré que ce que nous connaissons actuellement. Nous savons que de plus en plus de Canadiens regardent des chaînes spécialisées. Ils ne regardent plus les chaînes conventionnelles de CTV ni de la CBC-SRC.
Je ne dis pas que CTV et Global n'ont pas de problèmes. Leur auditoire diminue, mais pas autant que celui de la CBC-SRC. Leur auditoire diminue parce que les Canadiens ont d'autres habitudes télévisuelles et qu'ils s'intéressent davantage aux chaînes spécialisées.
Si la CBC-SRC veut continuer, les gens qui s'y intéressent devraient être capables de payer pour la chaîne, et ceux qui ne veulent pas la regarder, et qui ne sont pas d'accord avec la culture de la CBC, ne devraient pas être obligés de continuer de payer. Nous devrions fonctionner comme pour la radiodiffusion publique : si nous en voulons, nous payons. Si nous n'en voulons pas, nous ne devrions pas être obligés, en tant que contribuable, de payer pour un système de radiodiffusion qui ne signifie absolument rien pour nous. De fait, cette chaîne a perdu toute pertinence.
Je ne regarde pas les nouvelles nationales de la CBC et je n'écoute pas les nouvelles à la radio de la CBC. Pourquoi m'encombrer de tout cela? Est-ce que je veux entendre une interprétation qui ne reflète pas mon point de vue? En ma qualité de représentante et de porte-parole d'une organisation nationale de femmes, j'affirme que la programmation de cette société ne reflète pas ce que plusieurs Canadiennes pensent et ne reflètent pas non plus nos points de vue sur une diversité de questions. Et c'est la même chose pour de nombreux Canadiens. La CBC-SRC ne reflète pas leurs points de vue.
SI vous voulez garder la CBC, vous devrez changer toute sa culture. Vous devrez éliminer toute concurrence avec la radiodiffusion publique et vous devrez insister sur ce qui est important, c'est-à-dire la radiodiffusion régionale.
Merci beaucoup.
Permettez-moi de mentionner avant de commencer mon exposé, que je m'écarterai de mon texte préparé par souci de brièveté et pour tenir compte des impératifs de votre comité. Je vous ai remis un exemplaire de mon exposé. J'ai réduit la longueur de cet exposé pour que la période de questions et réponses soit plus longue.
[Français]
Bon après-midi, monsieur le président et membres du comité. Merci de me recevoir ici, à Toronto. Je suis aujourd'hui accompagné de Joel Fortune du cabinet Fasken Martineau.
Les membres du comité ont tous appris de leurs expériences politiques que la vision que chacun se fait du monde dépend de ses origines et des moments marquants de sa vie. Mes commentaires s'inscrivent donc dans cet esprit.
Tout d'abord, je vous brosserai un tableau d'APTN, le réseau de télévision des peuples autochtones.
Deuxièmement, puisque le comité s'intéresse à la radiodiffusion publique, je parlerai du rôle d'APTN à ce chapitre.
Troisièmement, j'aborderai la manière dont APTN et CBC/Radio-Canada pourraient se soutenir davantage pour mieux servir les Autochtones du Canada et l'ensemble des Canadiens.
[Traduction]
Le CRTC a octroyé à APTN une licence nationale de radiodiffusion en 1999. Nous avons commencé à diffuser en septembre de cette année-là.
APTN existait déjà auparavant. Nous étions connus sous l'appellation Television Northern Canada ou TVNC. TVNC exploitait un réseau de transmetteurs dans le Nord et offrait une programmation produite par des sociétés de communications autochtones partout dans le Nord. Les sociétés de communications obtenaient leur financement dans le cadre du Programme fédéral d'accès des Autochtones du Nord à la radio-télédiffusion (PAANR). L'infrastructure du réseau nordique était soutenue par un autre programme du gouvernement fédéral, le programme d'aide à la distribution dans le Nord. APTN continue d'offrir une programmation produite par des sociétés de communications autochtones, avec l'appui du PAANR.
APTN offre toujours une programmation abondante produite par des sociétés de communications autochtones, avec l'appui du PAANR. Cette programmation ne correspond à rien d'autre de ce que vous verrez dans le système de radiodiffusion. Elle concerne directement l'expérience des Autochtones dans le Nord et elle est habituellement diffusée en langue autochtone. Quand nous diffusons sur APTN, nous offrons un service de sous-titrage destiné à un auditoire national plus vaste.
APTN bénéficie également d'un soutien du gouvernement fédéral dans le cadre du Programme d'aide à la distribution dans le Nord (PADN), c'est-à-dire un montant de 2,1 milliards de dollars par année pour compenser une partie des coûts du réseau de distribution dans le Nord. Depuis quelques années, les coûts d'APTN ont dépassé le montant prévu à l'accord de contribution.
APTN diffère de TVNC. Aujourd'hui, grâce au CRTC, nos émissions sont à l'échelle du Canada et sont incorporées au service de base des câblodistributeurs et de deux services de diffusion directe par satellite. Nous offrons trois signaux — un dans l'Est, un dans l'Ouest et un dans le Nord — et nous espérons bientôt ajouter un signal en haute définition.
Permettez-moi d'attirer votre attention sur un exemplaire de notre horaire, qui vous a été remis. La seule raison pour laquelle nous avons choisi le rouge est qu'il s'agit d'une couleur voyante. Vous voyez que le rouge correspond au contenu canadien et que la plupart de ces émissions sont produites par des Autochtones au Canada, par des producteurs autochtones.
Nous sommes d'avis qu'APTN a connu beaucoup succès. Premièrement, APTN a permis de faire une place aux Autochtones dans la télévision canadienne et dans la télévision tout court. APTN a été le premier radiodiffuseur autochtone national au monde. Avant APTN, la probabilité de voir un visage autochtone en allumant le téléviseur était presque inexistante.
Je me souviens que quelqu'un a dit qu'il y avait davantage d'extraterrestres à la télévision que d'Autochtones. Cette personne avait raison et peut-être a-t-elle encore raison, mais au moins vous avez le choix, les Canadiens ont un choix. Tout ce qu'ils ont à faire est de trouver APTN dans la liste des chaînes disponibles.
Deuxièmement, le fait qu'APTN fasse partie du système a aidé d'autres radiodiffuseurs à mieux représenter les Autochtones.
Troisièmement, APTN a offert des opportunités incroyables aux Autochtones dans les médias.
Enfin, l'importance d'APTN comme symbole d'inclusion pour les Autochtones ne devrait pas être sous-estimée. Je ne crois pas exagérer quand je dis que la présence d'APTN à la télévision valide la présence des Autochtones dans la société canadienne.
[Français]
Vous êtes donc à même de constater la raison pour laquelle APTN est fermement convaincu qu'il doit être vu comme un radiodiffuseur public qui exécute un mandat important auprès du public.
Nous ne sommes pas motivés par le profit. APTN est un organisme sans but lucratif. Toutes nos ressources servent à étendre la place des Autochtones à la télévision canadienne, et la plupart de ses ressources sont investies dans des émissions qui se retrouvent à l'écran. Naturellement, nous voulons réussir et augmenter nos revenus, mais ce n'est que secondaire à notre mandat.
Indépendants du gouvernement, nous sommes dirigés par un conseil d'administration formé de 21 membres qui représentent les collectivités métisses, inuites et des premières nations de toutes les régions du Canada. Soyez assurés que notre conseil prend son travail au sérieux et veille à ce qu'APTN s'acquitte de son mandat.
Nos activités sont transparentes et nous rendons des comptes aux collectivités que nous desservons. Sur notre site Web, vous trouverez parmi les blogues, les groupes de clavardage, les fichiers à télécharger et les renseignements sur nos émissions, nos états financiers vérifiés de la dernière année de radiodiffusion, de l'information sur les membres de notre conseil d'administration et notre direction, nos règlements, les possibilités d'emploi et les renseignements détaillés à l'intention des producteurs indépendants au sujet de notre processus ouvert de DP pour de nouvelles émissions.
[Traduction]
L'existence et les ressources d'APTN font suite à l'application de la politique publique par le CRTC et sont également redevables à Patrimoine canadien et aux programmes mentionnés plus tôt. APTN reflète l'application directe, dans l'intérêt public, de la politique de radiodiffusion du Canada énoncée dans la Loi sur la radiodiffusion.
APTN relève directement de la partie de la politique de radiodiffusion canadienne en vertu de la Loi canadienne sur la radiodiffusion. Elle précise que le système de radiodiffusion devrait refléter ce que l'on appelle « la place spéciale » des Peuples autochtones dans la société canadienne. Notre place dans le système de radio-télédiffusion est par conséquent inspirée par la législation publique.
Pourquoi, peut-on se le demander, est-il important de considérer APTN comme un radiodiffuseur public? La conséquence la plus importante est qu'APTN, et de façon plus large, les Autochtones en matière de radio-télédiffusion, font partie du système officiel de radiodiffusion publique. La desserte des Peuples autochtones est devenue un élément du système qui devrait bénéficier du soutien des ressources publiques et du cadre de réglementation qui rendent la radiodiffusion possible.
Parlons maintenant de la Loi sur la radiodiffusion. Selon nous, la loi ne reflète pas assez clairement ce qui devrait être la place de la radiodiffusion autochtone dans le système. De même, il y a une partie de la loi que les Autochtones considèrent comme inadmissible. C'est la partie qui précise, à l'alinéa 3(1)o), que la programmation qui reflète les Autochtones au Canada devrait être offerte au fur et à mesure de la disponibilité des ressources à cette fin.
Réfléchissez-y. Les Autochtones font partie de la « population » du Canada. Vous devriez le penser et vous devriez vous demander pour quelle raison cette partie de la population est traitée sur une population de seconde classe dans la Loi sur la radiodiffusion?
Nous savons que les ressources ne sont pas sans limite. L'affectation des ressources est toujours une question d'équilibre, cela va de soi. Par conséquent, pourquoi est-il nécessaire de dire à une partie du « public » — aux Autochtones — que notre culture, par opposition à la culture française ou à la culture anglaise, devrait être reflétée dans le système uniquement si les ressources sont disponibles? Pourquoi isoler les Autochtones de cette manière et les reléguer à un statut de seconde classe?
C'est un aspect de la loi facile à corriger. Votre comité a eu l'occasion, dans le Parlement précédent, de recommander que cette correction soit apportée et nous prions instamment votre comité de faire ce qu'il peut dans ce but.
Cela fera une différence. Au risque de vous surprendre, certains ne sont pas favorables à APTN, dont I'arrivée n'a été possible que grâce à des règlements constructifs. II y a quelques semaines à peine, une des entreprises de communication les plus grandes et les plus puissantes au Canada a dit au CRTC qu'il avait fait erreur en faisant d'APTN un service de base offert à tous les Canadiens, et ce malgré la forte discrimination et I'exclusion qui sont le lot des Autochtones dans la société canadienne.
On a dit que la Commission devrait retirer la protection qu'elle accorde à APTN — Ie fondement de I'existence d'APTN — et adopter une approche prétendument « tournée vers Ie consommateur ». On a ajouté que cette approche devrait : « tenir compte des besoins des gens, conformément à la Loi sur la radiodiffusion et selon les ressources disponibles pour satisfaire à ces exigences ».
Dans ce contexte, qui en clair revient à éliminer APTN, ce commentaire me donne froid dans Ie dos. Peut-être saisissez-vous maintenant I'importance d'éliminer la portion « au fur et à mesure de la disponibilité des moyens ».
Au Canada, les ressources existent. II s'agit d'établir des priorités. On nous a déjà dit que les « ressources ne sont pas disponibles ». Nous I'entendons aujourd'hui pour une foule de difficultés qui touchent les Autochtones du Canada, et nous I'entendrons encore. Éliminons pour de bon Ie traitement de second ordre que la Loi sur la radiodiffusion réservé aux Autochtones.
Incidemment, je ne vois pas vraiment en quoi le fait de se débarrasser d'APTN au sein du service de base serait avantageux pour le consommateur. Selon BBM — il s'agit d'un organisme national de mesure des cotes d'écoute — APTN attire en moyenne près de trois millions de téléspectateurs canadiens par semaine et atteint des pointes de près de quatre millions de téléspectateurs, et il s'agit presque exclusivement de Canadiens qui ne sont pas des Autochtones. Notre auditoire autochtone est également considérable.
[Français]
Dans nos observations écrites, nous avons signalé que la CBC et APTN avaient entretenu des collaborations fructueuses par le passé, en tant que radiodiffuseurs publics, afin d'atteindre des objectifs communs. Nous avons été encouragés par cette communion d'efforts. Cependant, nous croyons qu'il y a place à amélioration.
[Traduction]
Nous avons formulé des recommandations particulières à cet égard dans notre mémoire, et je ne prendrai pas davantage du temps de votre comité pour les répéter.
Ces dernières années, nous avons établi des partenariats avec les radiodiffuseurs et avec des EDR, les intervenants clés étant CTV, Rogers OMNI Television, Bell ExpressVu, S-VOX, CanWest, Cancom, Harvard Broadcasting Radio Group, et nous avons clairement défini notre place au sein de cette industrie majeure.
J'aimerais dire à votre Comité qu'il est maintenant temps d'abattre Ie dernier obstacle à notre pleine reconnaissance par la Loi sur la radiodiffusion. J'ai bon espoir que votre Comité continuera de soutenir la modification de la Loi sur la radiodiffusion, et qu'il nous aidera à résister à ceux qui souhaitent nous voir disparaître.
[Français]
Je vous remercie. Je vais répondre à vos questions.
:
Oui, dans le nord du Canada. Certains étaient un peu au sud du 60
e parallèle, mais la majorité se trouvaient au nord de cette ligne. Et comme vous l'avez dit fort justement, la loi ne fait pas état des peuples autochtones dans le mandat de la CBC. Elle dit uniquement que les Autochtones doivent avoir l'occasion de participer à l'activité du secteur de la radiodiffusion si les ressources le permettent.
Évidemment, nous n'avons jamais obtenu de ressources qui se comparent un tant soit peu à celles de la CBC et de Radio-Canada. De fait, nous avons aujourd'hui un système où le CRTC utilise la Loi sur la radiodiffusion pour créer une obligation de diffusion aux termes de l'alinéa 9(1)h) — la diffusion obligatoire — et des frais d'abonnement qui ont permis de créer l'APTN. Si le CRTC n'avait pas instauré cette forme de diffusion, ni l'APTN ni le réseau n'existeraient aujourd'hui, car Patrimoine canadien avait réduit le financement des sociétés du Nord.
Bref, nous avons aujourd'hui le seul réseau mandaté pour refléter la réalité des Autochtones. Je veux toutefois aller plus loin et affirmer aux membres du comité que la CBC et Radio-Canada, qui sont notre radiodiffuseur public national, ont une certaine responsabilité lorsqu'il s'agit de refléter la réalité des Autochtones.
Nous sommes nous aussi des téléspectateurs. Alors que des réseaux comme CTV, CanWest, etc., sont disposés à conclure des partenariats avec l'APTN et à produire des émissions qui reflètent nos vies, notre réalité, nos cultures, nos collectivités, il me faut demander que la CBC devienne volontairement un partenaire de l'APTN — et j'espère que cela se fera — pour contribuer à sensibiliser les Canadiens à ce que nous sommes.
Votre comité, j'en suis sûr, est tout à fait conscient des nombreux stéréotypes qui perdurent, des nombreux torts subis par les Autochtones du Canada et des nombreuses idées fausses qui circulent encore. La seule façon d'y remédier, c'est d'exposer les Canadiens à la réalité des Autochtones. Je crois que la CBC et Radio-Canada ont un rôle essentiel à jouer à cet égard, et ma proposition comprend deux volets.
Je ne crois pas que la CBC s'acquitte bien de ce devoir. Elle peut soutenir que cela ne s'inscrit pas dans son mandat, et je crois donc que le comité devrait l'y inclure, du moins dans une large mesure.
Mais il faut travailler en collaboration avec l'APTN. Je crois que seuls les Autochtones peuvent parler au nom des Autochtones. Nous pouvons parler en notre nom, mais nous serions prêts à collaborer avec la CBC pour produire des émissions destinées tant aux Canadiens qu'aux Autochtones et qui refléteraient bien ce que nous sommes.