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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 024 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 21 août 2006

[Enregistrement électronique]

(1340)

[Traduction]

    Nous allons commencer la 24e séance du Comité permanent du commerce international. Nous nous penchons aujourd'hui sur l'entente du 1er juillet 2006 conclue par les gouvernements des États-Unis et du Canada au sujet du bois d'oeuvre.
    Nos témoins d'aujourd'hui sont John Brodrick, gestionnaire de projet chez Buchanan Lumber, qui est également maire de High Prairie en Alberta -- merci beaucoup d'être venu, monsieur le maire -- David Milton, président de l'Association des manufacturiers de bois de sciage de l'Ontario et Guy Chevrette, président-directeur général du Conseil de l'industrie forestière du Québec.
    Nous allons commencer, comme d'habitude, par de brefs exposés. Veuillez les limiter à six minutes chacun. Nous passerons ensuite aux questions et cela dans le même ordre que celui des noms figurant sur la liste.
    Monsieur Brodrick, allez-y, s'il vous plaît.
    Avant de commencer, je voudrais préciser à quel titre je suis ici aujourd'hui. Je suis actuellement le maire de High Prairie. Je travaille dans l'industrie forestière de l'Alberta depuis 40 ans. Je siège au conseil d'administration de l'Alberta Forest Products Association, de même que comme suppléant à l'Alberta Softwood Lumber Trade Council. Les opinions que je vais exprimer ici aujourd'hui sont les miennes et tiennent compte principalement de mes préoccupations de maire.
    High Prairie est une ville du nord de l'Alberta dont l'économie et, dans une large mesure, la survie dépendent largement de l'industrie forestière. Les deux usines de fabrication de produits forestiers de la région emploient environ 400 personnes et ce chiffre atteint 600 à 700 pendant la saison d'abattage hivernale. Ces deux entreprises apportent à l'économie locale 22 millions de dollars sous forme de salaires et 40 millions de dollars sous forme d'achats et de contrats.
    Bon après-midi. Je vous remercie de m'avoir invité à venir ici aujourd'hui, le dernier jour. Je ne sais pas qui a proposé mon nom, mais j'espère que vous n'aurez pas changé d'avis après mon exposé. Vous avez entendu un grand nombre d'opinions différentes au sujet de l'accord que nous avons sous les yeux aujourd'hui. Je vais ressasser certaines des choses qui vous ont déjà été dites par le gouvernement, les associations d'exploitants forestiers, les conseils commerciaux, les entreprises et les particuliers, mais j'espère apporter également des éléments nouveaux, si la chose est possible.
    Tout d'abord, je dirais que cette entente ne va pas apporter la paix à l'industrie canadienne. Je voudrais vous faire part de mes préoccupations au sujet de cet accord.
    Oui, c'est depuis longtemps une épine dans le pied de l'industrie et cette situation perdurera si la clause d'extinction au bout de deux ans est maintenue. Le gouvernement fédéral a toujours insisté sur le fait qu'il n'accepterait pas une entente à n'importe quel prix. Pourquoi a-t-il renoncé à cet élément crucial des négociations? Le paiement d'un demi-milliard de dollars aux entreprises qui ont intenté ces recours contre notre industrie nous garantit un cinquième recours suite à cette clause d'extinction.
    Selon le texte du projet d'accord qui a été distribué entre le 27 avril et le 1er juillet, 250 millions de dollars devaient servir à financer des initiatives conjointes dans l'intérêt du marché du bois d'oeuvre nord-américain. Dans la version du 1er juillet de l'accord, ce montant a été réduit à 50 millions de dollars, ce qui ne représente pas grand-chose. De plus, sur ces 50 millions de dollars, 10 millions sont réservés au règlement des différends ce qui laisse seulement 40 millions pour améliorer le marché nord-américain du bois d'oeuvre. Selon le projet d'entente, 250 millions de dollars devaient servir à financer, aux États-Unis, des initiatives méritoires désignées par le gouvernement américain en consultant le Canada. Dans l'accord du 1er juillet, ce montant est porté à 450 millions de dollars. Nous allons donc une fois de plus, aider la coalition et les collectivités où elle opère, aux dépens de nos propres collectivités, ici, au Canada.
    Le fait que cet accord oblige une entreprise à vendre ses produits alors qu'à un moment donné on l'avisera qu'elle a dépassé son quota et qu'elle va devoir payer des droits supplémentaires de 50 p. 100 sur toutes les livraisons qu'elle a faites au cours de cette période rend les casinos de Las Vegas très attrayants. Si cet accord était signé aujourd'hui, l'option A obligerait l'industrie à payer 15 p. 100 et peut-être même 22,5 p. 100 au lieu de 10,8 p. 100 si le mécanisme en cas de dépassement était déclenché. Dans le marché d'aujourd'hui, cela signifierait la faillite de nombreuses entreprises et causerait des difficultés à des collectivités comme la nôtre. Avec l'option B et la situation actuelle du marché, les entreprises canadiennes seront limitées à 30 p. 100 et non pas 34 p. 100 du marché américain. Attendez-vous à ce que nos livraisons de bois soient renvoyées à l'expéditeur lorsqu'elles arriveront à la frontière.
    Le premier ministre Harper et son ministre du Commerce international se sont hâtés de négocier cet accord pour marquer des points politiques et non pas pour favoriser le commerce. Voilà où est le problème. Il est très facile d'obtenir un mauvais accord. Il faut de véritables hommes d'État et de solides négociations pour obtenir un bon accord. Le Canada remporte la totalité des principaux différends devant les tribunaux, mais nous avons décidé d'abandonner la partie alors que nous avions les quatre as en main. Nous sommes certainement les pires joueurs de poker au monde. Lorsqu'on négocie, toutes les parties doivent se faire des concessions mutuelles. Dans ce cas-ci, nous avons été les seuls à en faire.
    Je voudrais maintenant répondre à quelques-unes des déclarations de certains représentants de notre gouvernement.
    M. Harper a déclaré que cette entente était la meilleure que le Canada puisse obtenir et que son rejet condamnerait l'industrie du bois d'oeuvre à une guerre commerciale perpétuelle. En réalité, c'est cette entente qui va garantir une guerre commerciale perpétuelle. Voici ce qui se passe lorsqu'une industrie américaine intente un recours commercial contre une industrie canadienne: pendant cinq ans, l'industrie américaine réalise des profits records parce que son recours commercial grossit son marché; tous ses frais juridiques lui sont remboursés cinq fois à dix fois; les collectivités dans lesquelles elle est implantée bénéficient d'une manne de 450 millions de dollars pour s'équiper de terrains de base-ball et de soccer, etc. Une industrie inefficace se voit garantir 66 p. 100 à 70 p. 100 de son marché national, sans aucune concurrence.
(1345)
    Cet accord n'ouvre absolument pas la porte au libre-échange ou à un commerce équitable. Lorsqu'il expirera, que ce soit dans deux ans, sept ans ou neuf ans — et à mon avis ce sera dans deux ans — nous nous retrouverons devant un cinquième litige. En attendant, ne vous étonnez pas lorsque d'autres industries américaines poursuivront leur rêve américain grâce à l'argent des Canadiens en intentant, elles aussi, un recours commercial.
    Si ce différend commercial a duré aussi longtemps c'est parce que nous n'avons jamais pris la peine d'aller jusqu'à la victoire complète, une victoire que nous avons maintenant à portée de la main.
    Je dirais à M. Emerson qu'au lieu de négocier âprement et de menacer l'industrie canadienne de la laisser tomber, il aurait mieux valu qu'il consacre son temps à obtenir pour le Canada un accord que nous serions tous prêts à appuyer et à signer.
    J'ai parlé à des chefs d'entreprise de l'Ontario, de la Colombie-Britannique et de l'Alberta et je n'en ai pas trouvé un seul qui aime cet accord. Je les ai plutôt entendu dire: « Je ne peux pas me battre contre les Américains sans l'aide du gouvernement fédéral »; « Si je ne signe pas, qu'arrivera-t-il la prochaine fois que je soumettrai une demande à Ottawa? »; et « Je ne veux pas être le seul à tenir bon, mais je n'arrive pas à savoir ce que font les autres entreprises ».
    Par conséquent, même si cet accord est ratifié, il faudra reconnaître qu'il s'agit en réalité d'une victoire bien mince qui a été remportée par des méthodes douteuses. Cette entente garantira la fermeture d'usines et de villes dans tout le nord du Québec et de l'Ontario, et l'Alberta verra augmenter son taux de chômage et son économie ralentir comme jamais auparavant.
    Pour terminer, je voudrais remercier le comité de son invitation. J'espère également que la Chambre sera réunie au complet lorsque cet accord lui sera soumis.
    Merci.
    Merci, monsieur Brodrick.
    C'est au tour de M. Milton, s'il vous plaît.
    Je remercie le comité de m'avoir invité une nouvelle fois à comparaître. Même si mon association est toujours très occupée à défendre les intérêts de l'industrie forestière de l'Ontario, rien n'est plus important que le projet de règlement du conflit avec les États-Unis concernant le bois d'oeuvre. Je vous suis donc reconnaissant pour cette occasion de vous adresser la parole.
    Bien entendu, je vais seulement vous parler en mon propre nom et au nom de mon association, mais je suppose que les dirigeants des autres associations de l'industrie partagent mon désarroi lorsque le gouvernement nous reproche, comme il le fait souvent, de critiquer l'entente proposée. Aussi bizarre cela puisse-t-il paraître, je crois nécessaire de vous rappeler que nos associations ont pour rôle de faire part de leur opinion collective et que leurs dirigeants représentent leurs membres et parlent en leur nom. Nos membres ne sont pas toujours prêts à s'exprimer personnellement et ils comptent sur nous pour défendre fidèlement leurs opinions. Si nous ne faisions pas notre travail, nous serions remplacés. Le gouvernement a peut-être remarqué qu'aucun de nous, qu'aucun des dirigeants des associations du pays, n'a été remplacé. Lorsque le gouvernement essaie de nous diviser en disant qu'il doit s'adresser aux véritables décideurs ou que les véritables décideurs et les dirigeants des associations avaient des opinions différentes, il ne sert les intérêts de personne. Il remplace la recherche de la vérité par la démagogie.
    Nous parlons au nom de nos membres et nous disons ce qu'ils veulent que nous disions.
    Lorsque j'ai comparu devant vous le 31 mai, j'ai dit que mes membres n'étaient pas opposés à une entente, que jusqu'ici l'histoire des ententes sur le bois d'oeuvre n'avait pas été très positive et que les modalités de l'accord du 27 avril laissaient un peu trop de place à l'imagination. Nous voulions en savoir beaucoup plus avant de pouvoir prendre une décision éclairée au sujet de cette entente.
    Nous en savons maintenant beaucoup plus, mais je suis sidéré de voir qu'un très petit nombre des questions que j'ai posées en mai ont obtenu une réponse. Voici quelques exemples: Notre part global du marché des États-Unis pourrait-elle dépasser 34 p. 100 à cause des provinces de l'Atlantique qui, selon les termes actuels de l'entente, sont autorisées à exporter vers les États-Unis la totalité de leur bois d'oeuvre manufacturé? Ou encore, du fait que la Colombie-Britannique pourrait opter pour une taxe à l'exportation progressive au lieu de limiter la quantité de bois d'oeuvre qu'elle peut exporter, et en supposant que l'Ontario accepte un quota, le volume de bois d'oeuvre que l'Ontario pourra expédier vers les États-Unis va-t-il diminuer parce que la Colombie-Britannique pourra augmenter ses livraisons qui seront seulement limitées par la taxe à l'exportation?
    Même si nous sommes en possession du texte dit définitif, nous ignorons toujours comment les quotas d'une province peuvent être touchés par les taxes à l'exportation en vigueur dans d'autres provinces. Nous savons toutefois que nous ferons l'objet d'une surveillance mensuelle et que les modalités, les règles d'application, ne sont pas viables sur le plan commercial. Nous savons que les provinces qui optent pour les quotas ne les atteindront sans doute jamais, car c'est une industrie saisonnière et les règles prévues imposent de lourdes pénalités si les quotas sont dépassés au cours d'un mois donné.
    Nous savons aussi que la fin du litige signifie l'élimination de nos victoires juridiques. Lorsque j'ai comparu le 31 mai, j'ai souligné combien il était important pour nous que ces victoires soient préservées. Nous savons maintenant qu'un mécanisme de règlement des différends exclut entièrement l'industrie et nous oblige à compter uniquement sur le gouvernement du Canada pour protéger nos intérêts pendant la durée de l'accord. Nous savons que cette durée a changé, qu'elle n'est plus de sept ans, mais de deux ans et que pour ces deux années suivies d'une année de statu quo, ce qui ne sera pas suffisamment long pour nous protéger contre le dumping qui s'ensuivra inévitablement, nous allons payer un milliard de dollars. Et même si le libellé de l'entente du 27 avril nous a portés à croire qu'environ la moitié de cet argent financerait une initiative conjointe qui pourrait aider l'industrie à coopérer avec l'industrie américaine, nous savons maintenant qu'environ 40 millions de dollars seulement seront consacrés à cette initiative et que les 450 millions de dollars restants représenteront peut-être l'aide étrangère la plus importante qu'aient jamais reçue les États-Unis et que leur président pourra dépenser pratiquement à sa guise.
    Le premier ministre et M. Emerson ont dit à tout le monde que le texte final du 1er juillet respectait fidèlement les modalités de base de l'entente du 27 avril, mais qu'elles avaient été améliorées. Ils ont dit que nous obtiendrions davantage d'argent sans mentionner qu'en raison de la suspension de la contestation extraordinaire comme nous donnons plus d'argent au départ, il est normal que nous récupérions davantage d'argent.
(1350)
    Ils disent que cet argent nous sera rendu plus rapidement, mais sans préciser que c'est parce que les contribuables canadiens vont nous l'avancer et qu'ils vont également avancer un milliard de dollars aux États-Unis. Il n'est pas nécessaire de conclure une entente avec les États-Unis pour que le gouvernement canadien nous avance l'argent qui nous appartient légalement. En fait, nous avons seulement demandé des garanties de prêt, ce qui n'aurait rien coûté aux contribuables.
    Par conséquent, même si nous en savons plus, nous en savons beaucoup moins qu'il ne le faudrait. Cela ne nous a pas rendus plus enthousiastes.
    Le gouvernement dit que c'est le mieux qu'il pouvait faire, le mieux que qui que ce soit ait jamais fait. Ce n'est pas le cas. Les efforts déployés précédemment pour gérer le commerce n'ont peut-être pas été couronnés de succès, mais ils étaient quand même préférables. Ils étaient au moins logiques sur le plan commercial, ils nous donnaient des portes de sortie, ils ne nous ont pas coûté une fortune et n'ont pas enrichi nos adversaires pour leur permettre de renouveler leurs munitions pour nous attaquer de nouveau dans trois ans.
    Il faut cesser de faire de la propagande et d'essayer de sauver la face. C'est un très mauvais accord. Il y a pourtant des membres de notre association qui sont prêts à l'accepter à cause des menaces du gouvernement: il n'y aura pas d'aide, pas de coopération, pas de négociations.
    La dernière fois que je suis venu ici, j'ai dit qu'un grand nombre d'entreprises de l'Ontario feraient faillite. C'est encore plus vrai que ce ne l'était au mois de mai. Nous allons souffrir. Les contribuables devront nous aider davantage suite à ces faillites que ce n'est le cas maintenant malgré notre victoire.
    Le gouvernement déclare d'une part que les victoires sur le plan de l'ALENA nous aident à négocier, mais d'autre part, que le litige ne nous a rien donné et qu'il doit cesser. Il faudrait qu'il se branche. Nous estimons que le gouvernement n'a pas su profiter de son avantage.
    Le ministre Emerson a déclaré au comité, le 31 juillet, qu'il s'étonnait que nous récupérions 80 p. 100 de notre argent. Pourquoi? Le 7 avril, le Tribunal du commerce international des États-Unis a jugé que l'industrie américaine n'avait aucun droit à notre argent, à pas un sou, peu importe la façon dont évoluerait le litige. Ensuite, 20 jours plus tard, le gouvernement a promis à l'industrie des États-Unis 500 millions de dollars qui nous appartiennent, plus 500 millions supplémentaires comme aide étrangère, toujours avec notre argent. Étant donné que les États-Unis n'avaient pas droit à un seul sou et que nous leur faisons cadeau d'un milliard de dollars, ne devrions-nous pas obtenir plus en échange que deux années de commerce hautement réglementé?
    Pour terminer, je poserai quelques questions supplémentaires. Le Parlement va-t-il se porter à notre secours en nous accordant immédiatement, dès qu'il reprendra ses travaux le mois prochain, les garanties de prêt qui nous permettront de terminer le combat? Insistera-t-il pour ranimer l'ALENA au lieu de l'abandonner? Promettra-t-il de travailler avec l'industrie au lieu de la menacer? Si le Parlement ne le fait pas, nous capitulerons; nous n'allons pas appuyer l'accord ou nous en réjouir, mais nous devrons rendre les armes, parce que nous n'aurons pas d'avenir et nous n'aurons pas le choix. Nous demandons au Parlement de nous donner ce choix.
    Merci.
(1355)
    Merci, monsieur Milton.
    Monsieur Chevrette, président-directeur général du Conseil de l'industrie forestière du Québec, veuillez nous faire votre exposé, s'il vous plaît.

[Français]

    Madame la secrétaire d'État, messieurs les députés, permettez-moi d'abord de vous présenter l'industrie forestière québécoise et de vous montrer par la même occasion que sa complexité ne se retrouve pratiquement nulle part ailleurs.
    On a des compagnies intégrées et des compagnies non intégrées, de très gros producteurs de même que de tout petits. On a également de grands, de très grands et de tout petits exportateurs. Le domaine du sciage résineux compte présentement 110 membres. On a des compagnies frontalières qui s'approvisionnent presque exclusivement en bois américain et d'autres qui s'approvisionnent presque exclusivement sur des terres publiques du Québec. On a des compagnies dont les activités se déroulent dans plusieurs provinces canadiennes.
    Je dirais qu'environ le quart de l'approvisionnement québécois provient de forêts privées. Ça vous donne une idée de ce qu'est l'industrie québécoise et de ce qu'implique cette situation pour ceux qui la vivent.
    Le 27 avril dernier, nous avons voté très majoritairement en faveur de l'entente-cadre, principalement parce qu'on nous promettait une paix de sept ans assortie d'une option de deux ans. Il y avait aussi d'autres motifs. Il reste qu'on nous donnait à penser que la souplesse serait de mise, et ainsi de suite.
    Le 1er juillet dernier, on a déchanté. On a voté contre l'entente et proposé quatre amendements. On ne devrait pas les appeler ainsi, si j'ai bien compris ce que M. Wilson a dit ce matin, on devrait plutôt parler de petits changements ou d'améliorations. Appelez cela comme vous le voudrez, mais il reste qu'on a proposé quatre points assez importants portant sur la clause de résiliation, sur la flexibilité des règles en matière d'exportation, sur l'anticontournement et sur les remanufacturiers.
    Il y a eu des pourparlers — je ne parlerai pas de négociations puisque je veux faire plaisir à tout le monde —; cependant, dans la lettre que M. Emerson a envoyée à nos membres, on remarque les améliorations, clarifications ou changements suivants. Je les mentionne parce qu'ils ont eu de l'effet sur le vote du 18 août.
    Tout d'abord, nous croyions qu'un préavis de 6 mois plutôt que de 30 jours constituait une amélioration. Ce genre de délai permet, par exemple, de faire des campagnes de sensibilisation, voire de l'action publique visant à modifier les points de vue. Quoi qu'il en soit, dans ce genre de combat, nous sommes d'avis que 6 mois sont préférables à 30 jours.
    De plus, le fait d'ajouter une période de 12 mois aux 7 ans déjà existants, en l'occurrence un autre stand still après 7 ans, est à notre avis une amélioration. Quant au comité traitant de la souplesse, nous l'envisageons avec confiance parce que nous savons que la partie américaine est déjà au courant de l'ensemble du problème de flexibilité relatif aux règles sur l'exportation. Nous voulons être en mesure d'honorer nos contrats commerciaux, ce qui n'est pas sorcier. Ça ne coûte rien. Par ailleurs, nous avons l'autorisation de transiger du bois annuellement, et nous ne voyons pas pourquoi il serait nécessaire de se soumettre chaque mois à des tracasseries.
    Nous croyons qu'un comité agissant de bonne foi pourrait arriver facilement à une entente sur ce sujet bien précis. En outre, nous avons l'intention de participer activement et positivement aux travaux de ce comité. Nous espérons y être associés. De fait, les propos tenus par M. Wilson ce matin donnent à penser que l'industrie serait associée très étroitement au travail de ce comité portant sur la flexibilité. Notre espoir est donc très grand à cet égard.
    Quant à l'anticontournement, je vais vous avouer bien candidement que nous avons eu plus de facilité à expliquer à la partie américaine qu'à notre représentant de Québec tout ce que cela exigeait. Selon nous, l'anticontournement doit s'appliquer spécifiquement au bois d'oeuvre de sciage résineux, et non au régime forestier. Je vous expliquerai, à la fin de mon intervention, la nuance importante que cela comporte, selon nous.
(1400)
    Si on laisse dans un texte légal l'expression « régime forestier », rien ne pourra empêcher la partie américaine, ou même le gouvernement d'une province, de se baser sur ce fait pour refuser tout amendement au régime forestier, même si cela ne touche pas le bois d'oeuvre. Sur ce point, nous n'avons pas obtenu des gouvernements l'assurance d'une clarification qui préciserait que l'entente ne porte que sur le bois d'oeuvre résineux. Cependant, la partie américaine nous a donné cette assurance. Par conséquent, nous avons fait confiance à la partie américaine sur ce point; je le dis candidement. En ce qui a trait aux remanufacturiers, nous avons laissé tombé, tout comme les autres associations nationales.
    Le 18 août, l'industrie québécoise s'est demandée s'il valait mieux accepter une entente un peu imparfaite ou ne pas en avoir. Le consensus a été d'accepter une entente imparfaite, et cela pour une multitude de raisons. Si on me pose la question, j'y répondrai. Au Québec, nous vivons une crise structurelle majeure. Comme un intervenant l'a dit un peu plus tôt, les coûts de production sont énormes, la matière ligneuse est la plus chère au monde, les copeaux sont les plus chers au monde. Nous traversons une crise structurelle très grave. Elle est sans précédent. Ce n'est plus une crise conjoncturelle qui ne serait attribuable qu'au dollar. C'est faux. Il existe vraiment des raisons beaucoup plus profondes. Le fédéral ne peut régler à lui seul la crise structurelle; il faut que notre gouvernement s'en occupe également.
    En terminant, nous allons nous pencher très prochainement sur cette négociation et nous allons en faire un bilan. Je vous avoue qu'en ce qui a trait au processus, il faudrait se regarder dans le miroir. C'est un processus bâtard, permettez-moi l'expression. Comme le disait notre représentant le 27 avril, c'était à prendre ou à laisser. Malgré cela, nous avons attendu et nous avons réussi. Le CIFQ a obtenu, seulement au cours de l'avant-midi du 27 avril, que les calculs ne soient pas basés sur une année, mais sur une moyenne allant de 2001 à 2005.
    C'était également à prendre ou à laisser le 1er juillet. Pourtant, nous avons obtenu des amendements depuis cette date, que l'on peut appeler des améliorations de clarification. Il y a eu de petits changements.
     On ne peut pas agir par ultimatum. On ne peut pas non plus constamment profiter, au cours d'un processus, de l'état et de la situation d'une industrie. Je pense qu'il va falloir parler de processus beaucoup plus intelligent et plus important.
    En terminant, j'ai hâte, pour ma part, que le libre-échange soit autre chose que le commerce du droit. J'ai également hâte que les gouvernements, qui doivent trouver des mécanismes pour gérer les règles de l'exportation, ne « technocratisent » pas ad nauseam les règles du jeu. Si on « technocratise » ad nauseam les règles du jeu, il en coûtera encore davantage à une industrie qui a de la difficulté à joindre les deux bouts.
    Je vous remercie.
(1405)

[Traduction]

    Merci à tous.
    Nous allons maintenant passer aux questions. Nous commençons par M. Proulx, de l'opposition officielle.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Brodrick et monsieur Milton, je vous remercie infiniment pour vos exposés.
    Je vais adresser mes observations et mes questions à monsieur Chevrette et un de mes collègues.
    Merci.

[Français]

    Bonjour, monsieur Chevrette.
     Avant d'aller plus loin, j'aimerais vous citer un passage du communiqué de presse émis le 28 avril dernier par le Conseil de l'industrie forestière du Québec. On peut y lire ceci:
Enfin, le CIFQ demande que soit confirmé le fait que, dès l’acceptation de la proposition, les dépôts qui pourraient devoir être versés malgré tout à la frontière jusqu’à la mise en œuvre d’une entente finale, seront remboursés à 100 % et non à 80 %.
     Pouvez-vous me dire brièvement si vous avez obtenu que le remboursement soit de 100 p. 100?
    Le taux est demeuré à 80 p. 100. Je vous ai dit un peu plus tôt qu'une foule de raisons avaient amené les gens à voter comme ils l'ont fait. Certains éprouvent carrément une « écoeurantite » aiguë face à ce conflit. La situation financière de certains autres est assez lamentable. D'autres, comme vous le savez très bien, viennent de se placer sous la protection de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité. Pour eux, ces dépôts peuvent constituer un peu d'oxygène. Certains considèrent que c'est une excellente entente pour toutes sortes de raisons. J'ai entendu toute la panoplie des motifs. Si vous me demandez demain matin quel est le motif principal de ce vote positif...
    Est-ce que je peux vous le demander aujourd'hui, plutôt que d'attendre à demain?
    Oui.
    Quel est le motif principal?
    Aujourd'hui, je vous dirais que c'est avant tout que l'industrie du Québec est mal en point financièrement et que, pour plusieurs membres, cette entente est comme de l'oxygène. C'est sans doute la raison première. Le fait de toucher de l'argent à court terme est pour eux une question de survie.
    C'est donc une solution à court terme.
    Je suis persuadé que vous avez raison de penser qu'étant donné la crise structurelle, la restructuration va quand même se faire au Québec. Certains vont survivre pendant quelques mois additionnels. Cependant, cela ne règle pas la crise structurelle. Vous avez raison sur ce point également.
(1410)
    Monsieur Chevrette, pourriez-vous nous parler de la flexibilité de l'option B et nous dire ce que vous avez pu demander, ce que vous avez pu souhaiter voir et ce que vous voyez?
    Pour ce qui est du mécanisme, nous avons dû nous charger de l'expliquer à plusieurs personnes.
     Par exemple, on peut emprunter du mois précédent si on n'a pas utilisé au complet le volume qui était permis le mois précédent, comme on peut emprunter sur le mois à venir un certain pourcentage; je crois qu'il s'agit de 12 p. 100 par mois. Afin d'être en mesure d'honorer les contrats commerciaux, nous avons demandé un compromis, en l'occurrence qu'on nous accorde au moins trois mois avant et trois mois après, mais on chercherait un mécanisme.
    L'objectif est de faire en sorte que les compagnies respectent leur quota annuel. On pourrait démontrer que le fait de permettre l'exportation de l'ensemble de ce quota est un acte de bonne foi. Si les mille et un stratagèmes ou complexifications reliés aux normes mensuelles font en sorte qu'une compagnie élimine 10 ou 15 p. 100 de son volume à l'exportation, on ne parle plus vraiment d'un esprit de libre-échange. C'est mon point de vue personnel.
    Monsieur Chevrette, on parlait au départ de récupérer quatre des cinq milliards de dollars. On jugeait alors à peu près raisonnable de payer un milliard de dollars, étant donné qu'il s'agissait d'acheter la paix pour une période allant de cinq à sept ans. Aujourd'hui, en réalité, cette paix n'est même pas garantie pour deux ans. Vous avez entendu M. Wilson, ce matin. Selon lui, les six mois additionnels qui ont été obtenus pour allonger la période d'avis seront inclus dans les 24 mois. On parle donc d'une paix de 18 mois.
    Croyez-vous que pour ces 18 mois, il est raisonnable de sacrifier un milliard de dollars?
    Sur cette question, la position de nos membres diverge. Certains disent qu'il en coûterait aussi cher d'attendre deux ou trois ans supplémentaires. C'est le calcul que certains font. Pour ma part, j'ai déclaré si souvent que cela faisait cher la semaine que je ne peux pas le nier. En fait, monsieur Proulx, vous pourriez même nous montrer une coupure de presse qui en fait état. Je serai donc cohérent et dirai qu'à mon avis, c'est très chèrement payé.
    D'autre part, la lettre de M. Emerson nous a appris que la partie américaine avait l'intention de contracter une obligation relative au fait qu'elle ne voulait pas rompre prématurément l'entente. J'ai négocié toute ma vie et je considère que la bonne foi se présume au départ mais se prouve par la suite.
    Vous vous sentez à l'aise parce que vous avez négocié avec les Américains et que ceux-ci vous comprennent quand vous parlez de bois de sciage résineux. Mais est-ce que je dois comprendre que les Américains vont vous accorder ce que vous demandez sans que le Canada en ait fait la demande?
    Si je me fie à ce qui s'est dit ce matin, j'en conclus qu'une clarification dans le cadre d'une entente n'exige pas systématiquement un amendement. Soyez assuré que j'en ai pris bonne note. J'ai en outre l'intention d'obtenir le compte rendu de la réunion.
    Ça va nous faire plaisir de vous le fournir.
    Maintenant, avant qu'on m'arrête, je vais vous poser une question hypothétique. S'il y avait des garanties de prêt et que le gouvernement continuait à fournir son soutien dans le cadre des litiges, croyez-vous que l'entente serait appuyée? Est-ce que vous voudriez plutôt aller plus loin?
    Le vote aurait-il été le même? Permettez-moi d'affirmer qu'il n'y aurait pas eu un aussi large consensus s'il y avait véritablement eu des garanties de prêt. Le gouvernement précédent avait dit qu'il en offrirait après les élections. Comme il a perdu, nous n'avons pas pu avoir droit à ce programme. Nous sommes allés voir M. Bernier, qui nous a dit qu'il était obligé de considérer cela comme faisant partie de ses crédits. J'ai personnellement rencontré M. Bernier. Il nous a dit qu'il ne pouvait pas faire cela et qu'il préférait la négociation. Je pense que le vote n'aurait pas été le même, vous avez raison.
    Malheureusement, le président s'apprête à nous couper les deux jambes. Je vais donc céder ma place à quelqu'un d'autre, et on y reviendra. Je vous remercie de votre candeur et de votre honnêteté.

[Traduction]

    Monsieur Paquette, allez-y, s'il vous plaît. Vous disposez de sept minutes.
(1415)

[Français]

    Je vous remercie de votre témoignage, qui est assez troublant. Quand on entend cela, on voit bien qu'une partie de l'industrie appuie presque par défaut l'accord, parce qu'elle ne voit pas de lumière au bout du tunnel. Cela me fait m'interroger sur la qualité de l'appui à cet accord.
     Avant de continuer, j'aimerais poser une question à MM. Chevrette et Milton, pour que cela apparaisse dans le compte rendu du comité. Je voudrais rappeler qu'on a vérifié auprès du Bureau du vérificateur général: les garanties de prêt n'apparaissent pas dans les crédits. Il ne s'agit pas d'une dépense du ministère de l'Industrie et par conséquent, cela n'apparaît du tout dans les crédits. C'est une des nombreuses demi-vérités, pour ne pas dire autre chose, qui a été colportée dans ce dossier.
    Monsieur Chevrette, je voudrais revenir à la question du processus. Je vais vous lire le dernier paragraphe de la lettre que M. Emerson a fait parvenir à vos membres. C'est un peu paradoxal:
Le gouvernement a fait participer votre industrie et les provinces à toutes les étapes de ce processus. Je suis conscient que ce dernier s'est avéré long et complexe et je tiens à vous remercier de votre collaboration jusqu'à présent.
    Selon le ministre, il semble que le processus a été parfait. On nous a constamment dit que l'industrie était consultée et partie prenante et que les provinces l'étaient également. D'autre part, vous avez utilisé une expression, et je disais la même chose en d'autres mots à l'ambassadeur, M. Wilson, ce matin. Nous avons senti tout au long du processus que c'était toujours à prendre ou à laisser. Même quand il s'agissait de modifications techniques relativement mineures, on aurait dit que modifier un texte dans le sens des préoccupations de l'industrie faisait extrêmement mal au gouvernement. Vous avez mentionné que le processus était à revoir.
    Selon vous, cette approche du « crois ou meurs » nuit-elle beaucoup à votre capacité de faire valoir vos préoccupations et d'apporter des modifications à l'entente afin qu'elle soit moins imparfaite?
    Il y a une question de délais. Prenons l'exemple du 27 avril. On nous a donné 48 heures et c'était à prendre ou à laisser. Nous avons des règles du jeu à respecter. Nos règlements exigent un minimum de trois jours pour convoquer une assemblée générale spéciale, avec l'abolition de toute règle. Cela n'a pas grand bon sens. Nous l'avons accepté, nous avons suivi les règles du jeu et nous avons réussi à négocier quelques aménagements au cours de l'avant-midi du 27 avril. La veille de la fête du Canada, c'était encore à prendre ou à laisser, et cela pressait. Franchement! Nous nous sommes réunis le 11 juillet et nous avons fait part de nos raisons, mais nous nous sommes fait bousculer!
     Je suis d'accord avec M. Wilson que le même sujet ne doit pas traîner indéfiniment en longueur. Toutefois, il faut au moins prendre le temps d'expliquer à ses industriels les règles du jeu, surtout compte tenu de la conjoncture que traverse le Québec et de la crise structurelle actuelle. Les gens calculent si cela peut les sauver. Il faut prendre le temps d'expliquer. Nous aurions peut-être pris le temps. J'aurai sûrement des remarques à faire par écrit sur le processus. Je ne veux pas faire le bilan seul. Je souhaite le faire avec tout le comité du commerce international de mon association. Nous ferons part à tous les parlementaires de ce que nous avons vécu et de la façon de procéder.
     J'ai dit que tout cela était devenu un commerce du droit. Les coûts astronomiques du suivi de cette application, supposément pour éviter les chicanes, n'ont plus de sens Nous dépensons des fortunes en droit. Remarquez que je ne veux pas minimiser le travail de nos procureurs dans ce domaine, mais on parle d'un coût astronomique pour appliquer une règle qui est supposée être fort simple. J'ai la trouille quand je pense à la technocratie qu'on va mettre sur pied pour gérer les règles d'exportation des quotas. C'est bien simple, ce sera paperasse par-dessus paperasse, on nous demandera de justifier l'embauche de 50 ou 100 fonctionnaires. Qui va payer? L'industrie devra payer, et le reste ira aux provinces. C'est à peu près ce que disent vos textes. Pouvons-nous nous organiser pour qu'il en revienne plus aux provinces et qu'il en coûte moins à l'industrie?
    J'espère que vous nous ferez parvenir votre bilan, comme vous l'avez mentionné. Je crois qu'il faut aussi faire une réflexion sur ce sujet.
     Monsieur Milton, vous avez terminé en disant que vous espériez que le Parlement donne le choix à l'industrie. J'aimerais que vous nous expliquiez un peu plus le sens de votre remarque. Quel choix, exactement, voulez-vous que le Parlement donne à l'industrie canadienne et québécoise du bois d'oeuvre?
(1420)

[Traduction]

    Certainement. Le choix dont je parle, monsieur Paquette, c'est celui avec lequel nous avons commencé, celui que nous pensions avoir au début de cette aventure, et qui était un retour à un libre-échange total et véritable sans qu'on nous reproche d'être subventionnés et de causer des préjudices. Le pacte que nous avons conclu entre nous en Ontario — et je dirais que nous avons été les premiers à galvaniser la version canadienne de l'alliance pour répondre à ses allégations — partait du principe que, sachant que nous n'étions pas subventionnés et que nous ne causions pas de préjudice aux États-Unis, nous devions aller devant les tribunaux, car une cour de justice compétente et indépendante nous donnerait raison.
    Nous sommes maintenant sur le point de franchir les deux ou trois derniers obstacles. Qu'une entente soit conclue ou non par la suite, nous demandons au Parlement de laisser la procédure juridique suivre son cours et rendre son verdict. C'est tout. Si à ce moment-là les Américains nous disent que peu leur importe que nous soyons subventionnés ou que nous leur causions un préjudice, que tout cela n'est qu'un prétexte parce qu'ils veulent simplement gérer le commerce, nous serons alors prêts à en discuter. Comme nous l'avons toujours dit en Ontario, nous ne nous opposons pas à une entente, mais nous n'en voulons pas lorsque les allégations portées contre nous sont tellement fausses que nous nous croyons forcés d'accepter parce que nous n'avons plus d'autres recours et que nous n'avons plus d'argent.
    Il y a aussi, bien entendu, les garanties de prêt que beaucoup de gens demandent depuis des mois, simplement pour nous permettre de suivre la procédure judiciaire jusqu'au bout afin que le Canada récupère la totalité de son argent. Nous voulons des garanties afin que nous puissions récupérer notre argent.
    Voilà les deux choses que nous avons demandé au Parlement.
    Merci, monsieur Milton.
    Comme ce tour est terminé, nous allons maintenant passer du côté ministériel. Trois membres du comité vous poseront des questions, messieurs. Ils vont tous poser leurs questions avant que vous ne répondiez. Alors prenez simplement note des questions.
    Nous commençons par M. Paradis.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Chevrette.
    Monsieur Chevrette, je vous remercie de votre témoignage. Nul doute, l'industrie est bien servie par quelqu'un comme vous. Vous avez fait état de la situation de l'industrie québécoise en quelques lignes de façon claire pour des gens qui la connaissent moins bien que vous. Si je comprends bien, on produira un bilan. Nous en prendrons connaissance avec attention. Malgré tout, il est sûr qu'il y avait plusieurs lignes de conduite et que le gouvernement devait suivre la sienne.
    Je veux bien comprendre le sens de votre témoignage. Malgré que vous puissiez avoir des remarques à faire au sujet de certains aspects des négociations, il faut quand même souligner que des demandes qui ont été faites par l'industrie québécoise ont été satisfaites. Je pense ici à la dénonciation et à d'autres points, comme le stand still, notamment.
    Je veux seulement bien comprendre. L'industrie québécoise voit-elle cela comme un apport d'oxygène? Vous avez dit que plusieurs raisons ont motivé le vote positif, et ce n'était pas seulement une question d'argent. Des demandes ont été satisfaites.

[Traduction]

    Monsieur Lemieux, allez-y, s'il vous plaît.
    Avant de poser ma question, je voudrais apporter deux correctifs importants. Le premier concerne l'extinction.
    Ce matin, nous avons entendu dire que l'accord était en vigueur pour 23 mois et qu'il y aurait ensuite un mois de préavis. Ensuite, M. Julian a fait valoir qu'il s'agissait de 18 mois. Ce qu'il n'a pas mentionné c'est qu'il y avait ensuite un préavis de six mois. C'est l'industrie qui a demandé ce changement et c'est un changement positif pour elle, car cela lui laisse davantage de temps pour réagir.
    Néanmoins, ce qu'il faut retenir c'est que dans les deux cas, il s'écoulera 24 mois avant l'annulation de l'accord. Si j'en parle c'est parce que M. Julian devrait faire preuve d'une plus grande franchise. Quand il a été question de 23 mois, il n'a fait aucune mention du préavis d'un mois. En fait, il a interrompu notre ambassadeur lorsqu'il a répondu à cette question. Quand l'ambassadeur a répondu complètement à la question, M. Julian l'a résumée en disant « 18 mois ». Non, ce n'est pas la réponse qui a été donnée.
    J'invite donc tous mes collègues à s'exprimer en phrases complètes lorsque nous parlons de clauses importantes comme la clause d'extinction. Si vous parlez de « 18 mois », ajoutez le préavis de six mois. Et en même temps, vous pourriez aussi mentionner qu'au bout des 24 mois, il y aura une période de statu quo de 12 mois.
    La deuxième rectification que je voudrais apporter concerne les prix repères. Quelqu'un a dit qu'aux prix actuels, l'industrie paierait davantage en droits de douane qu'avec les droits américains actuellement en vigueur. Il y a toutefois certains faits à préciser. Le premier est que les États-Unis vont réviser ces droits cette année et qu'ils seront portés à 14 p. 100. Le nouvel accord prévoit que c'est le Canada qui percevra cet argent et non pas le Trésor américain. Il est important de le souligner. D'autre part, les taux ne seront pas révisés chaque année.
    Encore une fois, lorsque nous parlons de ces clauses importantes, il faut faire des phrases complètes afin qu'on sache exactement ce qu'il en est.
    La question que je voudrais poser à M. Chevrette est la suivante: pourriez-vous indiquer au comité certains des principaux avantages que cet accord offre, selon vous, à l'industrie du bois d'oeuvre?
    Merci.
(1425)
    Monsieur Cannan, pour terminer les questions avant que nous ne passions aux réponses, il vous reste environ trois minutes et demie.
    Cela comprend-il les réponses?
    Y compris les réponses.
    Je vais donc passer directement aux réponses. Laissez-le répondre.
    D'accord. Alors allez-y, messieurs, donnez les réponses.
    Monsieur Chevrette, je crois que c'était d'abord adressé à vous.

[Français]

    Pour ce qui est des points soulevés par M. Paradis, je les ai abordés au début et je vais y revenir rapidement.
     Tout d'abord, l'ajout d'une période de 12 mois après les 7 ans est pour nous un élément positif. Un terme de six mois plutôt que d'un mois, même si cela ne change pas les 24 mois, est à notre avis un changement positif parce que cela nous permet de poser des gestes et, éventuellement, de changer la direction du vent. Ces six mois nous permettront d'entamer des pourparlers, des négociations, des campagnes publicitaires, bref à peu près n'importe quoi sur le plan des communications.
    En ce qui concerne le comité portant sur la flexibilité, c'est pour nous un point positif. Nous sommes convaincus que les Américains en savent déjà assez long sur la question de la flexibilité. En fait, nous sommes nous-mêmes allés leur expliquer à quel point elle était importante dans le cadre des transactions commerciales. On peut présumer qu'ils connaissent un peu le sujet. La partie américaine traitera sûrement de cette question avec son industrie qui, pour sa part, y est très sensibilisée.
    La partie américaine nous assure qu'on nous entendra en ce qui concerne l'anticontournement. L'objectif est de bien se concentrer sur le bois d'oeuvre de sciage résineux, et non sur le régime forestier. Vous savez ce que cela implique. Une province pourrait invoquer le fait que dans l'entente, il est question de « régime forestier » et que par conséquent, elle ne peut rien changer. Je vous donne un exemple. Si on faisait le changement, dans le cas du bois de pâte, qui vaut peut-être 25 ¢ le mètre cube, et du bois attaqué par le dendroctone du pin ponderosa, en Colombie-Britannique, il serait possible d'avancer que le régime forestier a changé. On pourrait nous pénaliser, alors que cela n'a rien à voir avec le bois d'oeuvre de sciage résineux.
    En ce qui a trait à la question relative aux avantages de l'entente, j'ai en bonne partie répondu à M. Lemieux.

[Traduction]

    L'un ou l'autre de vous deux, messieurs, voudrait-il répondre aux questions qui ont été posées jusqu'ici?

[Français]

    Vous parlez du prix fixé? Vous dites que ce sont les provinces qui hériteraient de l'argent, mais il reste que c'est l'industrie qui paye.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Cannan, vous avez du temps pour une brève question, si vous le désirez.
    Je voudrais seulement clarifier une chose, monsieur Brodrick, au sujet de l'Alberta et de l'Alberta Lumber Association. Vous avez dit que vous parliez à titre personnel. L'Association a-t-elle pris position également?
    Elle est venue ici le 31 juillet et je n'ai rien à ajouter. Non, je suis ici en temps que maire de High Prairie.
    Si nous examinons les deux options dont on nous a parlé, c'est comme le problème de Monty Hall: derrière la porte numéro un, nous avons l'accord du gouvernement de l'Alberta, du gouvernement de l'Ontario, du gouvernement du Québec et des provinces de l'Atlantique et l'ambassadeur a dit que l'industrie se ralliait à cette position alors que derrière la porte numéro deux, il y a l'incertitude de poursuivre le litige et d'attendre trois ou quatre ans avant d'avoir de bonnes chances de récupérer notre argent. Ne préférez-vous pas tenir que courir?
(1430)
    Exactement. Si la seule question posée était: voulez-vous cet accord et si vous n'en voulez pas, nous retournerons à Washington, nous poursuivrons le litige et nous essaierons d'obtenir une meilleure entente, voilà où nous en serions aujourd'hui, à ce deuxième choix. Mais ce choix ne nous a pas été donné. Le gouvernement nous a dit que nous devions accepter ou qu'il nous laisserait tomber. Voilà le problème.
    Mais si vous n'avez personne avec qui négocier à l'autre bout…? C'est également ce qui risque de se passer à l'autre bout et je crois donc que c'est la meilleure solution dans les circonstances.
    Je pense que nous avons entendu dire à trois reprises que c'était l'accord final. Chaque fois, on retourne négocier et on obtient autre chose. Je ne suis pas d'accord.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Julian, du NPD, qui dispose de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie également pour vos exposés.
    Je suis certainement d'accord avec M. Brodrick lorsqu'il dit que le gouvernement révise constamment sa position; je ne dirais pas pour autant qu'il obtienne quelque chose de plus. Nous avons commencé, le 27 avril, avec une clause d'extinction de sept ans qui a été réduite à 23 mois le 1er juillet. Nous sommes maintenant le 21 août et il n'y a plus que 18 mois. Comme M. Wilson l'a confirmé ce matin, l'article XX porte qu'à compter de 18 mois après son entrée en vigueur, l'une ou l'autre des deux parties peut annuler l'entente. Bien entendu, cela ne tient pas compte du fait que les États-Unis peuvent y mettre fin n'importe quand en alléguant que les conditions n'ont pas été respectées.
    Par conséquent, lorsque le gouvernement dit que c'est une entente ferme, c'est seulement parce qu'elle sent la ferme et qu'elle sent de plus en plus le fumier. Je ne dirais certainement pas qu'il s'agit d'une entente ferme.
    Je voudrais en revenir à vos excellents exposés. Je vais commencer par M. Brodrick.
    Vous avez émis de graves inquiétudes quant aux répercussions que ces négociations bâclées et cet accord sérieusement déficient pourraient avoir dans votre ville et votre région. J'aimerais que vous me précisiez davantage, si possible, ce que disent vos concitoyens et à quelles conséquences vous vous attendez dans votre région si cette entente est adoptée hâtivement.
    Monsieur Milton, vous avez soulevé deux questions très importantes. L'une d'elle concernait les règles d'application de l'accord. J'aimerais que vous nous parliez un peu plus, si possible, des diverses mesures punitives qui seront imposées rétroactivement et des répercussions qu'elles pourraient avoir sur une entreprise. Vous avez dit que les quotas étaient établis mensuellement, mais j'aimerais que vous nous fournissiez plus de précisions, car M. Wilson nous a dit ce matin qu'aucun changement n'avait été apporté aux règles.
    Vous avez également mentionné les révélations de M. Feldman selon lesquelles la Maison-Blanche obtiendra $450 million. On doit avoir de bonnes raisons de vouloir imposer cet accord. Les conservateurs veulent peut-être aider leurs amis républicains. J'aimerais beaucoup avoir un peu plus de précisions à ce sujet.

[Français]

    Pour terminer, monsieur Chevrette, je dois dire que je suis vraiment attristé de savoir que l'industrie du Québec a été si mal traitée et divisée par ce gouvernement. Vous avez dit que les garanties de prêt auraient changé l'approche de l'industrie du Québec face à cette entente.
    Si, tel qu'exprimé par notre vote il y a une heure à peine, des garanties de prêt étaient octroyées au cours des prochains jours, est-ce que la situation changerait, dans la mesure où il serait possible d'offrir à l'industrie québécoise l'aide dont elle a tant besoin?

[Traduction]

    Pour répondre à votre question concernant High Prairie, le dendroctone du pin a été repéré à 100 kilomètres de notre ville. Vous pouvez donc comprendre nos inquiétudes.
    Une des réponses que j'ai entendues à une réunion précédente aujourd'hui était que la disposition anticontournement nous permettrait de nous attaquer au problème du dendroctone du pin. C'est sans doute vrai pour la gestion forestière, mais cela ne nous autorise pas à expédier davantage de bois de l'autre côté de la frontière. Qu'allons-nous faire de ce bois? Voilà le problème. L'Alberta se retrouvera dans la même situation que celle où se trouve actuellement la Colombie-Britannique.
    En fait, j'ai assisté, à Calgary, à un sommet sur le dendroctone du pin qui était organisé par le gouvernement provincial. On nous a envoyés faire un tour en Colombie-Britannique où j'ai rencontré plusieurs maires. Les dégâts sont tels qu'ils ne savent plus quoi faire.
    Cela ne touche pas seulement le bois d'oeuvre. Il y a aussi le problème de l'envasement, des forêts mortes, des incendies de forêt, des inondations et tout le reste. Si vous n'avez pas une couverture végétale…
    Quelques villes étaient en train de développer les activités touristiques en milieu sauvage. Je suis sûr que personne parmi vous ne voudrait camper dans un forêt morte; moi non plus. C'est un des problèmes.
    En quoi cela toucherait-il notre ville? C'est une petite municipalité de 3 000 habitants même si nous desservons environ 17 000 personnes dans la région avoisinante. Mais si vous supprimez 600 emplois, je ne sais pas ce que nous ferons. Je ne sais vraiment pas.
(1435)
    Parlons un peu des règles d'application de l'accord. Il faut voir à la fois ce qu'elles devaient être, s'il est nécessaire d'en avoir, et ce quelles sont supposément.
    Pendant longtemps, nous avons cru, en Ontario, que si l'on concluait une entente, elle ne serait pas très différente de certaines des ententes précédentes qui prévoyaient des quotas.
    Votre entreprise obtient un quota qui se base, par exemple, sur vos exportations passées, un certain pourcentage du volume ou votre production. Vous pouvez être obligé d'expédier un certain volume tous les 90 jours sans pouvoir le varier de plus ou moins de 5 p. 100, sans que la différence ne puisse être accumulée ou reportée. Mon collègue, M. Chevrette, parle de la même chose et des conditions qui ont été imposées aux entreprises. Même les petites et moyennes entreprises peuvent y faire face.
    D'après ce que nous en savons, les règles d'application prévoient des ajustements mensuels, des mécanismes en cas de dépassement et certains pourcentages que vous pouvez reporter. Il y a un pourcentage que vous pouvez reporter rétroactivement, mais que vous ne pouvez pas ajouter ou soustraire. Qu'arrive-t-il à la fin d'une période? Ces règles sont si difficiles à comprendre parce qu'elles ne sont écrites nulle part que c'en est ridicule et risible. Nous ne les connaissons pas vraiment. Chaque réponse soulève une nouvelle question. Vous vous dites: « Qu'arrivera-t-il si…? »
    Je dirais que si vous devez renoncer à exporter 10 p. 100 ou 15 p. 100 au cours d'un mois, d'un trimestre ou de n'importe quelle autre période, cela dépasse largement votre marge bénéficiaire. Ces règles vont donc vous achever, sans parler de tout le reste. Mais le simple fait d'observer les règles d'application peut vous conduire à la faillite.
    Mais pour ce qui est des 450 millions pour la Maison-Blanche, il s'agit d'une allégation. Je n'hésite pas à la reprendre, car le fait que c'est peut-être vrai peut amener les gens à se demander à quoi serviront ces 450 millions de dollars? Quelles sont les initiatives méritoires? Voyons cela d'un peu plus près. Quelle est la liste des initiatives méritoires?
    Lorsqu'il a été question d'un accord, l'industrie pensait que cet argent devait servir à améliorer le marché des produits forestiers en Amérique du Nord. Nous étions prêts à consacrer de l'argent à cette initiative et en fait, les Canadiens étaient prêts à payer la part du lion, la part la plus importante. Tout ce qu'il nous fallait c'était l'accord des États-Unis et un mécanisme.
    Je vous remercie de votre attention.

[Français]

    Si des garanties de prêt étaient disponibles dans quatre jours et que les prêts étaient garantis à 80 p. 100, je referais un vote.

[Traduction]

    Nous allons maintenant commencer le deuxième tour.
    Monsieur Boshcoff, vous avez cinq minutes.
    Monsieur Milton, je vous remercie d'abord d'avoir répondu à cette première question: à quoi l'accord aurait-il dû ressembler et qu'aurions-nous dû obtenir?
    Je vais poser trois questions, une à chacun d'entre vous.
    Le gouvernement de l'Ontario a accepté l'entente vendredi et comme on nous a dit qu'entre-temps il y avait eu des améliorations —voici comment je calcule — nous sommes passés de 84 mois à 23 mois et nous sommes ensuite tombés à 18 mois. Ce n'est pas une amélioration. Je vais donc vous laisser essayer de répondre à cela: quelles sont les améliorations?
    Monsieur Chevrette, la clause anticontournement inquiète particulièrement le nord-ouest de l'Ontario. Les prix de l'énergie sont les mêmes dans les différentes régions de la province. Le nord-ouest de l'Ontario produit de l'énergie pour moins cher que les autres régions de la province. Un mouvement a été amorcé pour que l'industrie, et surtout l'industrie forestière obtienne de l'aide sur ce plan et je me demande quels seront les effets de cette clause. Également, en ce qui concerne la modernisation des usines et l'aide aux travailleurs, pourrons-nous faire face aux dispositions anticontournement?
    Monsieur le maire, lorsque nous parlons de remboursements et d'erreurs de calcul sans mécanisme d'appel, comment votre association pourrait-elle appuyer cet accord en sachant que si elle fait une erreur de 1 million, 2 millions ou 3 millions de dollars pour l'Alberta vous n'aurez aucun recours pour récupérer cet argent ou régler ce différend?
    Merci.
(1440)
    Monsieur Boshcoff, j'aurais préféré que le gouvernement de l'Ontario reste silencieux à propos de l'accord. J'ai lu ses propos, comme nous l'avons tous fait, et je peux seulement faire des hypothèses.
    Je dirais d'abord que ce n'était pas une approbation très enthousiaste. Cela revenait pratiquement à dire qu'on approuvait l'accord parce qu'il fallait dire quelque chose, mais ce n'était pas une approbation aussi enthousiaste que celles d'autres provinces. Je suppose que cela se résume à trois choses: l'entente avec les États-Unis a été réitérée, une lettre d'accompagnement décrit que la durée passe à sept ou neuf ans ou peu importe et on s'engage à faciliter la discussion pour préciser les règles d'application. C'est un incitatif très important pour l'Ontario, car la confusion règne dans tous les esprits à ce sujet. Et en fin de compte une carotte est tendue à propos des boisés privés de l'Ontario. C'est surtout en Colombie-Britannique que se pose la question des boisés privés, mais il y en a aussi beaucoup en Ontario.
    Voilà donc les choses qui expliquent, selon moi, pourquoi l'Ontario a fini par donner sa tiède approbation.

[Français]

    En ce qui a trait à la disposition anticontournement, je ne nie pas que cela pourrait aussi avoir une certaine importance en Ontario. Cependant, l'entente n'a pas encore été signée. On en a juste entendu parler, et déjà l'attaché de presse du ministre des Ressources naturelles et de la Faune du Québec précise que, à cause de l'entente, il ne pourrait pas changer telle ou telle chose dans le régime forestier. L'entente n'a pas encore été signée, et on s'en sert déjà, d'où l'importance de bien définir et de bien circonscrire l'entente sur le bois d'oeuvre de sciage résineux, et non pas de parler du régime forestier en général.

[Traduction]

    Monsieur Brodrick.
    Premièrement, notre association ne s'est pas prononcée en faveur de cet accord. Je suppose que nous sommes la seule qui n'ait pas fait connaître officiellement sa position.
    Nous avons tenu une réunion avec tous les représentants de l'industrie. Tout le monde a été invité à participer, mais bien entendu, il y avait des absents. Nous avons tenu un vote, une table ronde, rien d'officiel. Le résultat a été dix voix contre et cinq voix pour. Nous avons établi une prise de position et les conditions à remplir pour que nous puissions approuver l'accord. Ces conditions n'ont pas encore été remplies.
    Merci.
    Votre temps est écoulé, monsieur Boshcoff.
    Nous passons maintenant à M. Vincent pour quatre à cinq minutes.

[Français]

    Je suis ici depuis ce matin et j'essaie de comprendre comment le gouvernement a pu prendre la décision de conclure un tel accord avec les États-Unis. Les syndicats ont témoigné et sont en désaccord sur cette entente. J'ai entendu M. Brodrick, M. Chevrette et M. Milton. Selon M. le maire, le pire négociateur qu'il ait jamais vu, le pire joueur de poker qui soit a négocié cette entente. Je ne comprends pas comment le gouvernement conservateur peut penser qu'il a la meilleure entente au monde. Depuis ce matin, nous entendons ces gens nous dire que cet accord est le pire qu'ils aient vu de leur vie.
    Comment peut-on en arriver à penser que cette entente fait l'affaire de tout le monde alors que tous les gens qui sont venus témoigner ici disent le contraire? Comment pouvez-vous affirmer dans les médias que les gens sont favorables à cette entente, alors que personne ici ne nous a dit être favorable à cette entente? Je ne comprends pas. Quelqu'un va devoir m'expliquer à qui profite cette entente. Si ce n'est à personne, si ce n'est ni aux syndicats ni à l'industrie, à qui profite cet accord?
(1445)

[Traduction]

    Je vais répondre à cela, si vous le voulez bien.
    Avant de remettre ce discours aux interprètes, j'ai omis un paragraphe. Je voudrais le lire en réponse à votre question. Ce n'est pas une chose que je fais à la légère:
Avant d'aller plus loin, je voudrais apporter quelques précisions me concernant. J'estime que c'est très important. J'aurai 63 ans en novembre. J'ai seulement voté pour quatre partis politiques fédéraux au cours de ma vie: le Parti progressiste-conservateur, le Parti réformiste, l'Alliance canadienne et, enfin, le nouveau Parti conservateur. Je sais que le vote est une question très personnelle, mais avant de continuer, je crois important de souligner que je suis ici pour parler de cet accord et non pas pour m'attaquer à un parti politique quelconque. C'est un mauvais accord.

[Français]

    Monsieur le président, je vais tenter de répondre. Je me veux le reflet des membres du conseil que je représente. Si, pour toutes sortes de raisons, nos membres ont opté démocratiquement pour cet accord et qu'ils préfèrent conclure une entente à la situation actuelle, en toute honnêteté intellectuelle, je dois présenter leur point de vue. Et c'est ce que j'essaie de faire.
    Le dernier communiqué de presse du CIFQ contient une citation de son président-directeur général. On peut lire ceci à la dernière phrase:
C’est maintenant la responsabilité de chaque entreprise exportatrice de répondre individuellement au ministre Emerson puisque c’est de leur argent dont il s’agit [...]
     L'industrie québécoise a décidé ce dont je viens vous rendre compte, avec toutes les nuances possibles. Je pense sincèrement que l'industrie québécoise préfère l'entente aux fameux recours juridiques à répétition. Elle en a ras le bol. J'ai parlé d' « écoeurantite » aiguë; vous comprenez ce que cela veut dire. Je vous avoue que ce traité de libre-échange, galvaudé comme il l'a été depuis le début, fait pitié. Cela n'encourage pas les citoyens à croire à des échanges harmonieux.
    Selon nous, seule la voie de la négociation de bonne foi doit prévaloir. Si le gouvernement actuel s'achemine vers la négociation de bonne foi, qu'il applique correctement cette entente et qu'on évite des recours à répétition sur le plan juridique, qu'on met fin à ce commerce du droit, qu'on se parle et qu'on trouve des solutions au profit de l'économie de chacune des parties en présence, nous serons heureux.

[Traduction]

    Monsieur Milton, une brève réponse.
    Je me ferais plaisir de répondre brièvement.
    Qui va en profiter? Certainement pas les industries canadiennes qui ont investi leur temps et leurs efforts pour répondre aux allégations initiales. Selon ces allégations, elles étaient subventionnées et causaient des préjudices. Cela n'a rien à voir avec cet accord. Ce dernier n'en parle pas du tout. Cet accord handicape l'industrie canadienne et pas seulement l'industrie forestière ou le secteur des ressources naturelles, mais toute industrie qui, à l'avenir, se fierait aux principes de l'ALENA qui sont maintenant pratiquement devenus caducs.
    Merci, monsieur Milton.
    Maintenant, Mme Guergis, du côté ministériel.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je voudrais remercier les témoins pour leurs témoignages.
    Il y a seulement une ou deux choses que je voudrais souligner ici.
    Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de lire tous les témoignages que le comité a reçus jusqu'ici, mais je pense que ce serait une excellente idée, surtout pour ce qui est du témoignage de Gordon Ritchie qui est, bien sûr, l'un des artisans de l'Accord de libre-échange Canada—États-Unis sur lequel se basait l'ALENA. Certaines de ses observations vous seront sans doute très utiles, car elles remontent aux origines de toute cette initiative. Il dit que, dès le départ, les États-Unis n'avaient jamais eu l'intention d'inclure le bois d'oeuvre dans l'ALENA. En fait, à un moment donné, un protocole d'entente a été rédigé pour exclure le bois d'oeuvre.
    Par conséquent, l'entente que nous avons sous les yeux, celle que notre ministre, M. Emerson, a pu négocier, contient un mécanisme de règlement des différends. Certains ont dit que la simple présence de ce mécanisme justifiait que l'on signe cet accord étant donné la procédure qu'il prévoit. Je me ferais un plaisir de vous en parler plus en détail plus tard, car je sais que notre temps de parole est limité. Je me demande si vous avez eu l'occasion d'examiner ce mécanisme de règlement des différends et si vous avez des observations à formuler à ce sujet.
    D'autre part, je vois qu'il y a beaucoup de désinformation qui circule ici au sujet des initiatives méritoires et du conseil binational. Premièrement, sur les 500 millions que recevra la coalition, n'oubliez pas que cette dernière est composée de représentants des petites entreprises et que c'est eux qui toucheront cet argent. Il s'agit de négociations et, bien entendu, les négociations doivent s'arrêter un jour ou l'autre. Il ne peut pas en être autrement. Tout le monde espère pouvoir obtenir quelque chose de plus, mais ce n'est pas toujours le cas. Il faut arrêter à un moment donné; les négociations doivent finir par s'arrêter.
    Les initiatives méritoires ou les 450 millions de dollars qui y seront consacrés, seront prises et désignées en consultant le Canada. Je pense pouvoir dire — et je serais même prête à le parier — qu'en ce qui concerne l'échange d'argent entre le Canada et les États-Unis, nous allons surveiller de très près ce qui en sera fait et les décisions qui seront prises à cet égard.
    D'autre part, pour dire un mot au sujet du conseil binational, vous devez reconnaître qu'il est très avantageux d'avoir un conseil binational où siégeront des représentants de l'industrie des deux pays qui travailleront ensemble non seulement pour améliorer l'accord, mais également pour renforcer la confiance entre les deux pays, donner suite à l'accord et préparer la suite après les sept années prévues. Et peut-être prendront-ils la décision de faire durer l'accord la totalité des neuf ans.
    Je voudrais donc savoir ce que vous pensez des éléments très positifs dont je viens de parler.
(1450)
    Cela s'adresse-t-il à quelqu'un en particulier, madame Guergis?
    Personne en particulier.
    Très bien, monsieur Milton, je vous ai vu lever la main le premier.
    Je pourrais peut-être commencer.
    En ce qui concerne Gordon Ritchie et le protocole d'entente, c'est un dossier qui remonte à longtemps. J'ai commencé à m'intéresser à la question en 1982. Gordon Ritchie et moi-même travaillons sur ce dossier depuis longtemps, de même que plusieurs autres.
    L'Accord de libre-échange initial entre le Canada et les États-Unis excluait spécifiquement le bois d'oeuvre du libre-échange. Nous nous demandons parfois si le bois d'oeuvre a déjà fait l'objet d'un libre-échange étant donné le caractère conflictuel de nos relations depuis 1789 et Aroostook. Le règlement des différends représentait un espoir et une promesse d'amélioration. C'est ce que notre collègue, l'ambassadeur Wilson, a soutiré aux États-Unis à la onzième heure dans le cas de l'ALENA afin que le mécanisme de règlement des différends inclus dans cet accord dans deux chapitres différents permette de régler un conflit. Dans le contexte actuel, il semble que cela ne marche pas très bien si vous y renoncez si près du but.
    Le nouveau mécanisme de règlement des différends sera-t-il plus efficace dans le contexte du bois d'oeuvre? Excusez-moi, mais je viens de Hearst et je crois seulement ce que je vois.
    Pour ce qui est des initiatives méritoires qui seront entreprises en consultant le Canada, pourrais-je proposer d'ajouter mon nom à la liste des personnes qui examineront ces initiatives? J'aimerais beaucoup savoir ce dont il s'agira avant qu'elles ne soient entreprises. Nous craignons fort qu'une initiative qui sera jugée méritoire parce qu'elle consistera à reconstruire quelque chose dans une région touchée comme celle de la Nouvelle-Orléans devra passer par tous les méandres de la politique avant d'aboutir.
    Merci de votre attention.
    Nous manquons de temps. Une dernière personne va terminer le second tour.
    Monsieur Julian.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Brodrick, pour faire suite à ce que vous avez dit au sujet des associations de l'industrie, l'Alberta n'est certainement pas seule. Il y a eu la Saskatchewan ainsi que les associations de l'Ontario et de la majeure partie de la Colombie-Britannique. De toute évidence, les associations de l'industrie ont dit que ces négociations très déficientes leur posaient d'énormes problèmes.
    Je voulais aborder une ou deux questions pour terminer.
    Monsieur Milton, vous avez mentionné qu'il était ironique que le gouvernement refuse des garanties de prêt à l'industrie du bois d'oeuvre alors qu'il veut que les contribuables versent une avance — pour la deuxième fois par l'entremise d'Exportation et développement Canada — pour que les entreprises puissent récupérer un certain montant d'argent. J'aimerais que vous nous parliez du produit de ce crime commercial, des milliards que recevront les États-Unis, de l'argent canadien, obtenu illégalement comme nous le savons tous. Il était évident, à toutes les étapes de la procédure judiciaire, que c'était illégal.
    En récompensant l'industrie américaine pour son crime commercial, en lui donnant une tape sur l'épaule en lui disant qu'on lui donne un milliard de dollars pour avoir pris la peine de commettre ce crime, pensez-vous que nous augmentons la probabilité d'une guerre du bois d'oeuvre? Cela va-t-il accroître le trésor de guerre grâce auquel cette industrie s'attaquera de nouveau à nous?
    Oui, c'est ce que je crois et je m'attends à devoir faire face à un cinquième litige avant de prendre ma retraite. Car c'est inévitable. Même si cette entente dure à peu près sept ans, un jour quelqu'un sortira son fusil parce qu'un paramètre aura changé et le conflit reprendra.
    Je sais qu'un bon nombre de nos collègues de la coalition américaine du bois d'oeuvre sont des gens d'affaires très avisés. Ils comprennent l'avantage d'être solidaires et de poursuivre un même but et cela fait longtemps qu'ils poursuivent ce dossier avec l'acharnement d'un terrier. Je ne peux pas croire qu'ils changeront d'avis. En fait, cela va intensifier leur ardeur parce qu'une partie de l'argent qui sera versé aux personnes qui ont signé sera mise de côté pour préparer le nouveau litige.
    Je ne peux pas croire que cet accord aussi compliqué soit parfait et qu'un de ses éléments ne finira pas par lâcher et déclencher un nouveau contentieux. C'est ce que nous espérions tous éviter.
(1455)
    Par conséquent, si le gouvernement essayait d'imposer cet accord, cela augmenterait sans doute le risque d'instabilité dans l'industrie et d'une nouvelle guerre du bois d'oeuvre.
    Cela va entraîner une nouvelle déstabilisation.
    Monsieur Chevrette.

[Français]

    Permettez-moi de répondre à des questions qui sont posées y compris par Mme la secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international et M. Julian.
     Je connais le genre de gestes que vous avez à poser, car j'ai déjà vécu cela dans une vie antérieure. Peu importe les gestes que vous poserez en tant que parlementaires, je vous demande de ne pas oublier l'industrie, quelles que soient vos positions politiques. L'industrie que je représente souhaite avoir de l'oxygène. Il n'y a pas de cachette. Je vous supplie de nous donner de l'oxygène. Prenez le moyen que vous voudrez, mais arrangez-vous pour le faire, au-delà des gestes politiques bien calculés. En tant que groupe de parlementaires, je vous supplie, au nom de l'industrie québécoise qui est mal en point, d'adopter des mesures qui lui permettront de vivre.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Monsieur Brodrick.
    Si vous le permettez, je voudrais répondre à une question précédente.
    Vous avez dit que c'étaient des petites entreprises américaines. Sur ces 500 millions de dollars ou ce demi-milliard de dollars, International Pater doit toucher 150  millions. Il y a aussi Plum Creek qui est membre de la coalition. C'est le propriétaire de boisés privés le plus important et le plus diversifié géographiquement du pays qui possède plus de huit millions d'acres de terres forestières. J'aimerais être aussi petit.
    Monsieur Julian, vous avez 15 secondes, si vous voulez poser une question très brève. Ou laissons-nous tomber?
    Non, je prends toujours mes 15 secondes.

[Français]

    Monsieur Chevrette, vous avez parlé de quatre amendements. En effet, trois des éléments n'ont pas connu d'amendement ou de changement. Le seul changement qu'on a vu, c'est la diminution de la clause de dénonciation, qui est passée de 23 mois à 18 mois, et une disposition sur le standstill qui est un peu plus longue.
    L'industrie est-elle déçue du fait que ces demandes, qui étaient tout de même très raisonnables, aient été ignorées ou n'aient pas reçu l'appui du gouvernement?
    Comme je l'ai indiqué un peu plus tôt, 6 plus 18 font 24, tout comme 23 plus 1 font 24. Selon notre analyse, la période de six mois est plus avantageuse que celle d'un mois puisqu'il est possible de s'organiser pour prendre des mesures. On peut organiser des contestations publiques. On peut faire des campagnes publicitaires contre le fait que l'entente ait été dénoncée. On peut manifester sur le plan international, mais on pourrait aussi vouloir dénoncer cette entente. D'ailleurs, j'ignorais que la Colombie-Britannique avait demandé de réduire cette période à 24 mois. On l'a appris par la suite, lorsqu'on nous a annoncé le 1er juillet que la période était réduite à 23 mois. Nous étions très déçus puisque, selon nous, sept ans de paix, c'était fantastique. En fait, les gens en ont soupé de payer. Notre petit conseil dépense 5 millions de dollars en frais juridiques, en plus de ce que chaque compagnie paye pour ce fameux traité. Il s'agit de 10 à 15 millions de dollars uniquement pour le Québec. Pour la Colombie-Britannique, c'est sûrement 25 ou 30 millions de dollars. Il y a aussi l'Alberta et l'Ontario. Il est devenu prohibitif de faire des échanges supposément beaucoup plus ordonnés sur le plan international. Cela n'a plus de bon sens, selon moi, et c'est pourquoi toute voie qui porte le mot « négociation » est préférable aux conflits juridiques.
(1500)

[Traduction]

    Merci, monsieur Chevrette et à vous tous messieurs, merci encore une fois d'être venus aujourd'hui.
    Nous avons une séance de plus. Je demanderais aux témoins de bien vouloir, si possible, prendre place à la table dans une ou deux minutes. Merci encore.
    La séance est levée.