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D'accord. Laissez-moi voir si je puis vous répondre, afin que tout le monde sache ce qu'il en est.
À la dernière séance, tandis que nous débattions de la motion précédente de M. Martin, il m'est apparu très tard au cours de la séance que cette question ne pourrait être achevée. J'étais également pleinement conscient que nous avions prévu la visite de témoins qui devaient se déplacer jusqu'ici, et j'ai demandé au greffier du comité de donner avis d'une autre réunion à l'appel de la présidence, afin que nous poursuivions les travaux du comité.
Il s'est avéré que nous avons conclu cette question. J'ai oublié de dire au greffier de ne pas convoquer la séance. Il a suivi les instructions qu'il avait; c'était mon erreur. Mais je ne veux pas que les membres aient l'impression qu'il y a d'autres causes. J'ai déjà indiqué à M. Hiebert qu'à moins que le comité n'en décide autrement, nos séances sont prévues selon l'horaire régulier, soit de 15 h 30 à 17 h 30 les mardis et jeudis.
En ce qui a trait à cette question, j'ai cru comprendre qu'une fois que nous aurons commencé l'étude de cette motion, si nous devions nous retrouver dans la situation que vous avez décrite, le comité pourra s'entendre pour dire que dans le meilleur intérêt de tous, ainsi que de nos témoins, nous devrions entendre les témoignages de ceux-ci aujourd'hui. Ils sont là, ils se sont déplacés jusqu'ici. Nous pourrions également convenir qu'il y a un point où, logiquement, nous pourrons interrompre les délibérations ou le débat sur la question qui nous occupe pour le reprendre là où nous l'avions laissé à notre prochaine séance, quand nous aurons un peu plus de temps pour nous en occuper.
Voilà ce que je propose au comité. Si vous souhaitez procéder autrement, je considérerai certainement toute proposition. Mais entre-temps, je demanderais à M. Hubbard de présenter sa motion.
J'ai fait quelques consultations sur cette question, et je suis prêt à rendre une décision quant à l'admissibilité de la motion.
Je n'ai pas à expliquer aux membres qu'il s'agit d'une situation où Élections Canada a découvert qu'un parti politique s'était livré à une pratique qui, selon Élections Canada, était une tentative d'esquiver le plafond fixé pour les dépenses publicitaires nationales du parti, et qu'un certain nombre de candidats avaient été recrutés pour participer à ces actions.
Vous vous souviendrez peut-être que les mandats des comités sont prescrits à l'article 108 du Règlement. En fait, le nôtre en particulier figure à l'alinéa 108(3)h) du Règlement, aux sous-alinéas (i) à (vi). Comme dans le cas de l'affaire Mulroney-Schreiber, le sous-alinéa 108(3)h)vi) stipule que notre mandat inclurait « la formulation de propositions d’initiatives... en matière d’éthique des titulaires de charge publique, ainsi que la promotion, le contrôle et l’évaluation de ces initiatives ». C'est très important, et c'est l'une des raisons pour lesquelles je souhaitais être prudent à l'égard de cette question. Comme les membres le savent, les titulaires de charge publique sont des ministres, des secrétaires d'État et des secrétaires parlementaires, comme les personnes nommées par le gouverneur en conseil, qui représentent quelque 1 200 ou 1 300 personnes.
La motion dont nous sommes saisis nous demande ultimement de déterminer si ces actions alléguées ou décrites par Élections Canada ainsi que les actions des titulaires de charge publique qui sont liées à cette question répondent aux normes en matière d'éthique exigées des titulaires de charge publique.
La question avec laquelle j'ai dû me débattre, chers collègues, était le fait qu'au moment de l'élection, il y avait des candidats, et aucun titulaire de charge publique n'était concerné. Toutefois, une fois les élections terminées, le gouvernement s'est formé, et les titulaires de charge publique ont été nommés — ministres, secrétaires parlementaires, etc. — et une mesure supplémentaire a été prise: le dépôt des déclarations concernant les dépenses d'élections par tous les candidats qui s'étaient présentés lors de ces élections. Ainsi, on avait l'obligation formelle, en vertu de la Loi électorale du Canada, de produire une déclaration et de faire toutes les déclarations nécessaires conformément à la loi.
Dans cette affaire, 67 candidats qui ont participé ont été identifiés par Élections Canada. Là-dessus, 17 sont devenus députés. Ils ont été élus. Sur ces 17 députés, 10 sont actuellement, ou étaient à l'époque des titulaires de charge publique.
Les quatre secrétaires parlementaires sont le , celui du , celui du et le .
Les ministres ou secrétaires d'État qui ont été nommés par Élections Canada comprennent le ; le ; le ; la ; l'ancien ministre des Affaires étrangères; et le .
Chers collègues, cette motion et notre mandat peuvent uniquement être en lien avec les titulaires de charge publique. Vous trouverez le Code sur le site Internet du commissaire à l'éthique. C'est un document qui fait 34 pages et qui, conformément à la Loi sur le Parlement du Canada, doit être remis au .
J'aimerais simplement citer quelques extraits de ce document. L'un d'eux est un commentaire du :
Notre gouvernement doit préserver la confiance du public en maintenant les plus hautes normes possible, et cette responsabilité incombe plus particulièrement à l'ensemble des titulaires de charge publique, à commencer par les ministres.
Dans le Code régissant la conduite des titulaires de charges publiques en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat, dans la partie qui traite de l'objet et des principes du Code, sous le titre « Normes en matière d'éthique », on dit ce qui suit:
Le titulaire d'une charge publique [...] agira avec honnêteté ainsi que selon des normes supérieures en matière d'éthique de façon à préserver et à faire croître la confiance du public dans l'intégrité, l'objectivité et l'impartialité du gouvernement.
Par ailleurs, sous le titre « Examen public », on précise ce qui suit au sujet du titulaire de charge publique:
Il doit exercer ses fonctions officielles et organiser ses affaires personnelles d'une manière si irréprochable qu'elles puissent résister à l'examen public le plus minutieux; pour s'acquitter de cette obligation, il ne lui suffit pas simplement d'observer la loi.
Je note également qu'il y a une obligation de conformité, en plus d'une observation particulière, afin que les mesures nécessaires prévoient que « le commissaire à l'éthique peut imposer toute autre mesure, y compris le dessaisissement ou la récusation, à l'égard de tout élément », exigibilité, etc. C'est relié au conflit d'intérêts. Or, il me semble que ce n'est pas ce dont il s'agit, en l'occurence. Mais cette disposition fournit un modèle lorsque survient un problème comme un événement subséquent.
On dit également, à l'article 9, que dans un délai de 60 jours à compter de la nomination, un rapport confidentiel est nécessaire. Un autre rapport est requis 120 jours après la nomination. Ce rapport doit inclure une description de toutes les activités extérieures auxquelles les titulaires de charge publique ont participé au cours des deux années précédant leur entrée en fonction. Il doit également faire état de la totalité de leurs biens, de leurs passifs réels et de leurs exigibilités éventuelles. J'insiste sur les exigibilités éventuelles, car comme vous le savez, en vertu de la Loi électorale du Canada, lorsqu'une personne est un candidat officiel, le surplus ou le déficit est sa responsabilité, et non celle du parti ni de l'association de circonscription, etc. En fait, toute la disposition et la responsabilité incombent au candidat.
En conséquence, selon la situation d'un candidat particulier, il pourrait y avoir des implications quant à la manière dont cette affaire avec Élections Canada sera résolue par les tribunaux, et quant à la façon dont elle touchera les gens. Il pourrait y avoir des conséquences pour certaines personnes, selon l'issue de l'affaire.
Enfin, à l'article 15, qui concerne les activités extérieures, on affirme que « la participation du titulaire d'une charge publique à des activités non liées à ses fonctions officielles sert souvent l'intérêt public ». On poursuit en dressant la liste des activités interdites, etc.
Cela dit, chers collègues, il semblerait que des questions d'intérêt public sont en cause. Il ne fait aucun doute que les titulaires de charge publique ont un rôle à jouer pour remplir leurs obligations en vertu de la Loi électorale du Canada, et pour ce qui est de réclamer des dépenses en lien avec l'affaire alléguée par Élections Canada, dépenses au sujet desquelles l'organisme a rendu un jugement. Cette décision est maintenant contestée en cour, comme vous le savez. Je ne vais pas élaborer davantage.
Donc, la question des intérêts, telle que je la conçois, peut impliquer des considérations telles que de déterminer si les titulaires de charge publique savaient, ou auraient dû savoir que leurs actions en lien avec cette affaire avaient pu être en violation de la Loi électorale du Canada, ou encore d'établir si le code régissant les conflits d'intérêt traite de manière appropriée de ce type de questions. Nous savons qu'il traite des conflits d'intérêts, mais certainement pas précisément d'une atteinte alléguée à d'autres lois du Canada, telle que la Loi électorale du Canada, et qu'il ne précise pas non plus si cela nécessiterait des obligations de divulgation et la possible récusation de toutes les parties concernées par une affaire en ce qui concerne des votes ou un débat, en attendant la résolution de l'affaire. Ce n'est pas particulièrement clair. Un point que le comité voudra peut-être considérer consiste à savoir s'il faudrait apporter des modifications au code régissant les conflits d'intérêt.
Nous ne voulons attaquer aucun député ni parti dans cette affaire. Elle est très sérieuse. Mais il s'agit également de déterminer s'il y a des mesures que les titulaires de charge publique auraient dû prendre, ou auraient pu respecter pour se conformer aux normes d'éthique qu'on attend d'eux.
Cela pourrait comprendre une évaluation du fait que les intéressés ou les gens responsables de leur déclaration des dépenses électorales ont agi ou non avec la diligence voulue, qu'ils aient ou non accompli la tâche de procéder à des enquêtes nécessaires auprès des fonctionnaires, des experts ou d'Élections Canada, en cherchant des décisions sur des questions ayant pu être contestées. Et enfin, il s'agit de déterminer si on avait une obligation de faire rapport au commissaire à l'éthique, et peut-être même de se récuser soi-même en attendant la résolution de l'affaire.
Par ailleurs, comme je l'ai indiqué, en vertu de l'article 8 du code, il y a un rapport confidentiel...
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Pour commencer, le président n'est pas obligé de vous expliquer sa décision, ni de répondre à votre question ou à celle des autres. Je vous dirai simplement que cette motion nous demande de déterminer si ces actes respectent les normes éthiques attendues des titulaires de charge publique, mais la question ne se limite pas à cela. Il faudrait déterminer si la nature de la question est bien visée par le Règlement et le code qui régissent nos obligations. C'est comme un exemple. Il ne s'agit pas des détails de la norme en tant que tels, mais de la question de savoir s'il y a des normes.
Quoi qu'il en soit, nous avons parmi nous des témoins. De l'Association du Barreau canadien, nous recevons Gregory DelBigio, président de la Section nationale du droit pénal, ainsi que David Fraser, trésorier de la Section nationale du droit de la vie privée et de l'accès à l'information.
Bienvenue messieurs.
Je m'excuse du retard. Il était important que nous nous débarrassions de cette motion.
Nous savons que nous avons jusqu'à 17 h 30 ou peut-être un peu plus, si les députés veulent vous poser des questions d'importance.
Comme vous le savez, nous étudions la Loi sur la protection des renseignements personnels. Ce n'est pas nécessairement une révision exhaustive, mais comme vous le savez probablement, nous voulons nous concentrer sur de petites améliorations rapides qui pourraient nous permettre d'améliorer la situation dans une certaine mesure pendant qu'on envisage une révision plus détaillée de la loi.
Je vous souhaite la bienvenue. Je pense que vous avez préparé une brève déclaration d'ouverture, et je vais vous demander de nous la présenter dès maintenant.
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Je vous remercie de cette opportunité.
Nous examinons ici la loi fédérale canadienne sur la protection des renseignements personnels qui, quand elle a été adoptée en 1982, était sans équivoque très à l'avant-garde du droit en la matière. Elle commence toutefois à montrer des signes de vieillissement. Elle a été conçue sur le modèle des lignes directrices de l'OCDE, qui ont été établies par consensus par les membre de l'Organisation de coopération et de développement économiques sur les changements à apporter dans la façon dont les gouvernements recueillent, traitent et communiquent les renseignements personnels.
En 1982, le gouvernement fédéral a ouvert la marche au Canada. C'était l'un des premiers pays à se doter d'une loi régissant les renseignements que le gouvernement peut recueillir, sa façon de les utiliser et à qui il peut les communiquer. Depuis, toutes les provinces et tous les territoires du Canada lui ont emboîté le pas en se dotant de lois sur la protection des renseignements personnels, qui se conjuguent souvent à une loi sur l'accès à l'information.
Ce comité s'est vu confier la tâche d'examiner la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Depuis peu, certaines lois sur la protection des renseignements personnels s'appliquent au secteur privé au Canada, de sorte qu'aujourd'hui, quelques années plus tard, les renseignements personnels sont abondamment protégés d'un océan à l'autre, dans le secteur privé comme dans le secteur public.
Depuis 1982, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts. Nous avons beaucoup d'expérience de l'application des lois sur la protection des renseignements personnels. Nous en suivons la mise en oeuvre à divers endroits et nous savons comment elles fonctionnent. Elles ne s'appliquent pas partout exactement de la même façon, et nous avons eu l'occasion de constater comment elles fonctionnent dans certaines circonstances.
De même, le monde a bien évolué depuis 1982. La principale différence est probablement liée au changement technologique. Jamais on ne prévoyait un tel essor de la technologie en 1982. Le boom n'était pas encore commencé. Nous sommes maintenant confrontés à des phénomènes comme le couplage de données, les données biométriques, l'information génétique, le décodage du génome humain, les appareils électroniques portables, la surveillance, la vidéosurveillance, les GPS et j'en passe.
L'environnement a aussi beaucoup changé dans le secteur public pour ce qui est de la façon de recueillir l'information, de l'utiliser et de la communiquer. Il y a de plus en plus de programmes déployés conjointement par les gouvernements fédéral et provinciaux. La donne a également changé considérablement pour la sécurité depuis 1982, depuis les attentats du 11 septembre.
Depuis 1982, il y a eu énormément de consultations avec divers intervenants, surtout dans le secteur privé. Nous en avons tiré le consensus remarquable qui se dégage du Code modèle pour la protection des renseignements personnels de l'Association canadienne de normalisation. Ce code constitue le noyau de la LPRPDE, à laquelle ce comité a consacré beaucoup de temps récemment.
En outre, les citoyens se préoccupent de plus en plus de la façon dont les renseignements sont recueillis, utilisés et communiqués. Cela ne se limite pas au secteur public ou au secteur privé. On ne peut pas fermer les yeux sur les brèches entourant la sécurité des renseignements personnels dans le secteur privé. Cependant, depuis l'adoption de la Loi sur la protection des renseignements personnels en 1982, nous avons également constaté de graves lacunes dans le secteur public. On entend des histoires de serveurs volés dans les ministères, de courriels envoyés aux mauvaises personnes, ainsi que d'enregistrements et de CD de secours manquants.
Nous sommes maintenant à l'époque du vol d'identité, ce qui constitue un changement important dans notre environnement. L'année même où la Loi sur la protection des renseignements personnels a été adoptée, la Charte canadienne des droits et libertés est entrée en vigueur, ce qui a modifié les attentes des citoyens à l'égard de leurs propres renseignements personnels, de leurs détails intimes.
Dans nos consultations auprès des membres de l'Association du Barreau canadien, nous avons constaté un consensus croissant que dans bien des cas, les lignes directrices ne suffisent pas, et bon nombre de nos recommandations font l'objet de lignes directrices. Elles peuvent être utiles provisoirement, mais très souvent, on en fait fi, il est très facile de ne pas en tenir compte, et elles ne prévoient pas suffisamment de mesures de reddition de comptes pour prévenir l'utilisation de renseignements personnels à mauvais escient. La seule façon d'éviter les dérives, c'est la voie législative et donc, les modifications à la Loi sur la protection des renseignements personnels.
La responsabilité est la pierre angulaire de deux de nos recommandations, de même que le rôle du commissaire fédéral à la protection des renseignements personnels, pour que la Cour fédérale exerce une surveillance judiciaire au chapitre de la protection des renseignements personnels et que la loi prévoie une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Ces dispositions feraient de la responsabilité une obligation juridique devant les tribunaux et iraient de pair avec la recommandation que nous serons heureux de vous présenter de façon plus détaillée plus tard en ce qui concerne l'autorisation du commissaire à communiquer l'information d'intérêt public en plus de son obligation de faire rapport au Parlement chaque année.
Certaines mesures découlent directement de la nouvelle donne en matière de droit pénal, pour ainsi dire. Nous savons maintenant que le vol d'identité est l'un des crimes dont l'incidence augmente le plus au monde, voire même au Canada. Le gouvernement du Canada, avec ses nombreux ministères et sociétés d'État, possède d'importantes bases de données qui contiennent ce qu'on considère souvent comme l'information de base pour le vol d'identité: le nom au complet, la date de naissance, le numéro d'assurance sociale et d'autres renseignements du genre, qui, s'ils sont communiqués et utilisés à mauvais escient, peuvent mener au vol d'identité. Il y a diverses bases de données gouvernementales qui contiennent ces renseignements.
À l'heure actuelle, il n'y a aucune disposition législative qui oblige le gouvernement à protéger ces renseignements, et rien ne l'oblige à aviser les personnes touchées en cas de perte ou de divulgation de leurs renseignements. Ce n'est pas seulement que les gens veulent savoir ce qui se passe avec leurs renseignements, même si c'est sans doute leur droit et que ce doit être leur droit, mais il faut permettre aux gens de prendre des mesures pour atténuer les préjudices auxquels ils s'exposent si leurs renseignements personnels sont utilisés à mauvais escient.
Il y a une autre maxime importante qui s'applique aux pratiques exemplaires de collecte, d'utilisation et de communication des renseignements personnels depuis 1982, et c'est ce qu'on appelle le « critère de la nécessité ». Simplement, il s'agit de recueillir seulement les renseignements raisonnablement nécessaires, afin de nous prémunir contre la tendance naturelle ou ce qui semble être une tendance naturelle à collecter plus de renseignements que nécessaire, puisqu'il faut bien sûr les protéger après. Si l'on recueille des renseignements qui ne sont pas nécessaires, la probabilité qu'ils soient mal utilisés augmente.
Nous parlons aussi brièvement du couplage de données dans notre présentation, étant donné qu'il contribue probablement au final, à tout le moins au sens de la loi, à la collecte de renseignements supplémentaires au-delà du nécessaire et sûrement aussi à l'utilisation accrue de ces renseignements.
Il y a d'autres questions qui ne sont probablement pas aussi controversées, mais que nous estimons également importantes.
Il y a la distinction entre les renseignements consignés et non consignés. Il ne semble pas y avoir de raison de faire la distinction. Les lois provinciales et fédérales adoptées au Canada récemment pour protéger les renseignements personnels ne font pas cette distinction. Nous ne croyons pas que les images et les renseignements éphémères, comme les vidéos enregistrées sur le moment, par exemple, devraient nécessairement être exclus de l'application de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
Nous sommes d'accord qu'il est nécessaire de privilégier une révision quinquennale et que le commissaire à la vie privée devrait avoir un rôle de sensibilisation du public ainsi que le pouvoir discrétionnaire de refuser ou d'abandonner les plaintes concernant la protection de la vie privée quand ces plaintes semblent futiles, mal intentionnées ou vexatoires, tout cela pour augmenter l'efficacité du Bureau du commissaire à la vie privée du Canada.
En bout de ligne, nous croyons qu'il serait temps de réviser en profondeur la Loi sur la protection des renseignements personnels. À l'assemblée générale annuelle de l'Association du Barreau canadien il y a quelques années, le conseil des sections nationales a adopté une motion, sans dissidence, recommandant une révision complète de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Depuis, les choses n'ont pas bougé, nous n'avons que l'occasion de nous exprimer sur de petites améliorations. Nous ne pouvons pas rester là à rien faire.
Pour terminer, je vais céder la parole à Greg, qui pourra vous parler brièvement de la communication des renseignements personnels avec les gouvernements étrangers.
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Monsieur le président, le rapport de la Commission Arar illustre bien les risques et la complexité de la collecte de renseignements par les organismes d'application de la loi, du partage de données entre les différents organismes au Canada et à l'étranger et l'ampleur des torts potentiels quand le système fait défaut. Ce qu'on pourrait qualifier de maintien de l'ordre en fonction du renseignement présente le risque de mener à la collecte d'une vaste quantité de renseignements qui ne sont pas tous vérifiés ou même vérifiables.
Nous sommes d'avis qu'il manque au cadre législatif en place un mécanisme pour assurer une surveillance efficace et continue du gouvernement canadien et de ses institutions pour le partage de données entre États. Le cadre législatif en place ne prévoit pas de mécanisme adéquat pour assurer la conformité et la responsabilité.
À notre avis, il devrait être obligatoire d'exercer une surveillance continue efficace compte tenu de la confiance énorme et des pouvoirs qu'on accorde au gouvernement et à ses institutions pour l'application de la loi et le partage de données.
Cette surveillance est nécessaire pour les raisons suivantes: un individu peut ne pas avoir l'occasion de savoir quand un organisme chargé de l'application de la loi a recueilli des renseignements sur lui; si des données ont été recueillies, un individu n'aura pas l'occasion de découvrir en quoi consiste ces données et si elles sont exactes; un individu n'aura pas l'occasion de savoir si les données ont été partagées avec un État étranger ou une institution étrangère et, dans ce cas, avec quel État étranger ou quelle institution étrangère elles ont été partagées; un individu n'aura pas l'occasion de découvrir à quelle fin les données seront utilisées par un État étranger ou une institution étrangère; un individu n'aura pas l'occasion de découvrir si l'État étranger ou l'institution étrangère aura partagé les données avec d'autres institutions ou États étrangers; un individu n'aura aucun moyen de savoir si l'État étranger ou l'institution étrangère qui a reçu les données se conformera aux modalités de toute entente en vertu de laquelle les données ont été transférées par le gouvernement du Canada; les données peuvent être utilisées par un État étranger ou une institution étrangère d'une manière ou à une fin qui met grandement en péril l'individu et ses amis ou les membres de sa famille.
De plus, même si un individu sait qu'un État étranger ou une institution étrangère a enfreint les modalités de l'entente en vertu de laquelle les données ont été transférées, l'individu n'a aucun recours ou remède.
Pour cette raison, l'ABC fait les recommandations énoncées aux pages 22 et 23 de notre mémoire, et particulièrement que:
les ententes de communication de renseignements personnels à un État étranger ou une institution étrangère doivent être écrites, officielles, détaillées et rendues publiques; les ententes conclues avec un État étranger ou une institution étrangère qui ne respecte pas les principes fondamentaux de la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit devraient être soigneusement étudiées; enfin, une consignation complète doit être faite des renseignements personnels communiqués, ... de l'entente en vertu de laquelle ils ont été communiqués et des objectifs...
Pour résumer, nous sommes d'avis que le régime actuel ne prévoit pas de mécanisme suffisant ou efficace pour assurer la responsabilité. Nous reconnaissons pleinement — et je sais que le surintendant principal Paulson a comparu devant le comité — les besoins inhérents à l'application de la loi, ainsi que la complexité d'une application de la loi efficace, mais malgré ces besoins et cette complexité, nous vous exhortons à maintenir et à garantir la primauté du droit et ce, grâce à un mécanisme de reddition de comptes efficace.
Merci.
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Je tiens à vous remercier d'être ici aujourd'hui.
Je suis membre d'un autre comité qui ne siège pas ces jours-ci, le comité de la justice, mais je suis heureux d'être ici. Pardonnez-moi si je ne suis pas tout à fait au courant de tout ce que votre comité a étudié au cours de la dernière année.
David, j'aimerais clarifier une chose à propos des pages 11 et 12 de votre mémoire concernant les avis dans les cas d'atteinte à la vie privée. Je crois qu'au deuxième paragraphe de la page 11, on indique qu'il n'y a actuellement aucune ligne directrice imposée par la loi en ce qui concerne la notification. Dans le dernier paragraphe, vous dites que c'est dommage que la commissaire n'ait pas fait la recommandation explicite qu'un avis obligatoire soit prévu par la loi, un peu comme on l'a fait dans la LPRPDE.
Dans la réponse du CPVP, à la page 13, on indique: « Le CPVP est d'avis que ces exigences devraient être intégrées dans la loi elle-même » — c'est-à-dire, les lignes directrices du Conseil du Trésor.
Dois-je comprendre que le CPVP est d'avis que les lignes directrices du Conseil du Trésor devraient être incluses dans la loi, mais que vous proposez que les critères qui sont dans la LPRPDE concernant les avis fassent également partie de la loi, et que c'est malheureux que la CPVP ne l'ait pas précisé?
Est-ce clair?
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Merci, monsieur le président.
Je tiens aussi à remercier les deux témoins. C'est très intéressant.
Je ne suis pas sûr de bien comprendre Brian lorsqu'il dit que la Loi sur la protection des renseignements personnels devrait contenir les mêmes dispositions relatives à l'obligation de notification que la LPRPDE. L'une des lacunes importantes de cette loi, c'est qu'elle ne prévoit justement pas d'obligation de notification, et lorsque notre comité l'a étudiée, nous avons recommandé à l'unanimité au gouvernement d'inclure cette obligation. Mais le gouvernement a réagi à notre rapport, déposé au Parlement, en disant clairement qu'il n'est pas intéressé à inclure cela dans la LPRPDE. Je crois donc que cette obligation n'est pas près d'être inscrite dans la loi, ce que je trouve très inquiétant, car beaucoup de Canadiens seraient horrifiés d'apprendre que la confidentialité de leurs renseignements personnels a été compromise dans le secteur privé ou le secteur public.
La commissaire à la protection de la vie privée a déposé aujourd'hui son rapport sur la LPRPDE au Parlement. Vous pouvez en obtenir un exemplaire. Il y est question de l'affaire TJX, dans laquelle des renseignements personnels ainsi que 94 millions de numéros de cartes de débit et de crédit ont été divulgués dans cette seule infraction. Quatre-vingt quatorze millions de personnes de partout dans le monde — dont beaucoup de Canadiens — ont été touchées. Cela m'inquiète, et je crois que l'on devrait inclure une obligation stricte de notification dans la Loi sur la protection des renseignements personnels.
Le partage transfrontalier des renseignements personnels nous préoccupe beaucoup. Je vous remercie de nous avoir donné votre point de vue à ce sujet, notamment en citant l'affaire Maher Arar comme un exemple frappant de ce qui peut mal tourner.
Voulez-vous ajouter quelque chose à propos du point de vue de l'Association du Barreau canadien sur cette question? Ou préféreriez-vous discuter davantage de la façon d'éviter un autre incident comme celui dont a été victime Maher Arar?
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L'ABC a certainement pris position dans ce dossier depuis le dépôt de la Loi sur l'antiterrorisme. Nous avons en outre comparu devant divers comités, soulignant le besoin de mettre en place des mesures de protection appropriées.
Nous admettons qu'il est très facile de parler en termes généraux et de clamer l'importance des mesures de protection et de l'application efficace de la loi. C'est lorsqu'il faut élaborer une mesure législative que les choses se compliquent. Mais, par principe, il faut que l'on s'entende pour dire s'il y aura un mécanisme de reddition de comptes.
Selon nous, ce mécanisme devrait relever d'un organisme indépendant. Nous considérons que la GRC, par exemple, ne devrait pas superviser elle-même ce genre de dossiers. Si un organisme indépendant se charge de la supervision, il pourra peut-être assurer une meilleure conformité et vérifier plus étroitement ce qui se passe, puisqu'il n'est pas directement concerné.
Quelles leçons pouvons-nous tirer de cela? Eh bien, espérons que l'affaire de M. Arar... le Canada tout entier doit espérer vivement que pareille chose ne se reproduise pas.
Y a-t-il un mécanisme en place pour que nous ne répétions pas les erreurs du passé? Je n'en suis pas certain, car je crois que la loi autorise les organismes canadiens et étrangers à continuer de recueillir et d'échanger une énorme quantité de renseignements. Jusqu'à ce que l'on sache exactement quelle quantité d'information est recueillie, la nature des renseignements, à qui on les communique et s'il existe des mécanismes de freins et de contrepoids, il est impossible de savoir si les erreurs du passé se reproduiront ou non.
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La recommandation de la page 7 m'inquiète un peu. Il semble y avoir un problème avec les détenus, et je crains un peu que cette recommandation particulière ne l'aggrave. Il s'agit simplement d'une observation personnelle.
Selon moi, la recommandation faite à la page 14 est bonne. La modification s'impose.
À la page 15, quand nous arrivons à la dernière liste de recommandations, je ne partage pas votre avis. Peu m'importe en réalité de savoir si les gouvernements étrangers ont des données personnelles à mon sujet. Monsieur Fraser, vous avez dit que quelqu'un pourrait demander: « Pour quelle raison collectent-ils ces données? ». La réponse serait: « Parce qu'ils le peuvent ». On se demandait alors comment on pouvait mettre fin à un tel processus. Pourquoi?
Pourquoi s'en inquiéter si l'on n'a rien à cacher? Et je vais vous dire pour quelle raison je suis enclin à être d'accord avec cette disposition. J'ai eu un entretien intéressant avec un criminologue. Je sais que M. Martin invoquerait immédiatement l'affaire Arar, mais elle est survenue immédiatement après les attaques du 11 septembre, et nous avons pris une mauvaise décision. Je me demande donc pourquoi nous ne corrigeons pas la situation.
Pour en revenir au criminologue, le plus grand problème qui se pose à ceux qui exécutent la loi actuellement sont les criminels qui ont recours à ces dispositions. Je ne pose pas de jugement, mais j'aimerais bien qu'on frappe un juste équilibre. À mon avis, si l'on était en train de rédiger un texte, les personnes inquiètes de la protection des renseignements privés sont probablement, pour la plupart, des criminels. Si vous étiez un criminel, vous aimeriez qu'il y ait des lois qui vous permettent d'avoir gain de cause. Comprenez-vous de quoi je parle?
Je ne pose pas de jugement. Je ne dis pas que vous êtes cynique. Je me demande simplement si ce n'est pas ce que nous faisons, si nous ne sommes pas en train de protéger le criminel encore plus. Il est si difficile actuellement pour les organismes d'exécution de la loi de faire leur travail. Il est si difficile pour les gouvernements de traiter des groupes de terroristes. Pourquoi vouloir leur rendre la tâche encore plus difficile?
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Si je me souviens bien, les tribunaux ont jugé cette pratique légale. Et ces exemples ne sont pas les seuls, car le couplage des données peut servir à plusieurs fins, dans le contexte de l'exécution de la loi, dans le domaine de l'immigration, ainsi de suite.
Il faut examiner la question plus à fond, car le couplage des données pourrait être utilisé tout simplement pour des raisons d'ordre pratique, les renseignements étant un outil très précieux. Les données constituent la pierre angulaire de Revenu Canada, du gouvernement du Canada, il n'y a aucun doute là-dessus.
Cela dit, la centralisation des données a ceci de dangereux qu'elle présente une menace plus grande pour la vie privée des particuliers. Le danger augmente quand cette information fait l'objet de fuites. Il y a plusieurs années, Développement des ressources humaines Canada a procédé au lancement du fichier longitudinal sur la main-d'oeuvre. Ce fichier contenait des renseignements tirés de la base de données de l'assurance-emploi, de l'impôt sur le revenu, de diverses sources. On y trouvait des renseignements sur les particuliers, leurs antécédents de travail, leur vie privée, tous regroupés dans une seule base de données. Ce système était jugé légal, sauf qu'il posait tellement de problèmes d'un point de vue politique qu'il a dû être démantelé, vu les nombreuses réserves qu'il soulevait.
Donc, ce que nous devons faire, c'est non pas dire que tel mécanisme est bon et que tel autre ne l'est pas, mais mettre en place un cadre pour nous assurer que nous posons les questions pertinentes au moment opportun.
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Merci, monsieur le vice-président.
J'accepterai volontiers de partager mon temps de parole avec Mme Lavallée, s'il reste quelques minutes.
Quand je suis arrivé ici, j'ai parrainé un projet de loi qui proposait la mise sur pied d'une base de données pour les personnes disparues. Il n'existe pas de telle base à l'échelle fédérale, mais à l'échelle provinciale, oui, ce qui soulève certaines questions de compétence.
Ce qui m'a étonné, entre autres, c'est que la protection de la vie privée constituait un enjeu pour les personnes qui ne voulaient être trouvées, qui se cachaient parce qu'elles souhaitaient fuir une relation de violence, par exemple. Mais pour la grande majorité... Par exemple, il y a une femme à Hamilton qui soutient avoir un échantillon d'ADN de son fils disparu qui pourrait peut-être servir à le trouver. Autrement, vous devez vous fonder sur l'information qui existe ou visiter les diverses morgues à l'échelle du pays pour voir si la personne en question s'y trouverait, ainsi de suite.
Cela ne règle pas tous les problèmes, mais voici ce que j'aimerais savoir : est-ce que la Loi sur la protection des renseignements personnels, compte tenu de votre expérience pratique dans l'application de cette loi et des recommandations que j'ai devant moi, pourrait compromettre la mise sur pied d'une base de données de personnes disparues qui viendrait s'ajouter à celles qui existent déjà?
Comme vous le savez, il y a une base de données pour les criminels, les délinquants sexuels, ainsi de suite. Je voudrais que l'on crée une base de données plus efficace à laquelle les gens pourraient avoir accès s'ils ont des échantillons d'ADN de personnes portées disparues.
D'après l'Association, ou d'après les recommandations que vous proposez, est-ce que concept soulèverait des difficultés?