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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 020 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 12 mai 2009

[Enregistrement électronique]

(0805)

[Traduction]

    Bienvenue à tous à cette première audience plus ou moins officielle dans le cadre de nos déplacements dans l'ouest du pays pour étudier l'impact des sables bitumineux sur les ressources hydriques.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos deux premiers témoins, Mme Selma Guigard, professeure agrégée au programme de génie de l'environnement à l'Université de l'Alberta, et M. Murray Gray, professeur à l'Université de l'Alberta.
    Chaque témoin débutera par une présentation de 10 minutes, puis nous passerons à la série de questions habituelle.
    Qui aimerait commenter?
    C'est un plaisir de rencontrer les membres du comité ce matin. Je suis bien placé pour suivre votre visite des exploitations de sables bitumineux d'hier, ainsi que votre réunion avec la collectivité de Fort Chipewyan.
    Je suis professeur de génie chimique à l'Université de l'Alberta, et je suis le directeur du Centre for Oil Sands Innovation — je vous ai apporté de la documentation à ce sujet. Ce matin, j'aimerais aborder brièvement deux questions qui me préoccupent particulièrement en tant que chercheur dans le domaine des sables bitumineux. La première question est de savoir si l'industrie des sables bitumineux peut utiliser de nouvelles technologies pour améliorer son rendement environnemental. La deuxième question est de savoir quels travaux de recherche sont nécessaires pour développer ce que l'on appelle des technologies transformatrices pouvant être utilisées dans le domaine des sables bitumineux.
    En ce qui concerne la première question, le passé nous a démontré que cette industrie, dans laquelle d'énormes investissements frôlant les 10 milliards de dollars ont été faits, a été très innovatrice et disposée à accepter le changement. Les installations que vous avez survolées hier ne ressemblent en rien à ce que Suncor avait l'air en 1967 ou à ce que Syncrude avait l'air en 1978. Les activités ont été complètement transformées en raison des activités minières et des activités d'extraction. Ces transformations reposent sur la recherche et le développement, les essais pilotes et les innovations industrielles réalisés au Canada. Selon moi, l'industrie des sables bitumineux a démontré qu'elle est capable d'apporter des innovations techniques uniques dans toutes les industries canadiennes d'extraction des ressources.
    Le principal moteur de ces changements a été les coûts. Au cours des deux dernières décennies, l'industrie s'est efforcée de réduire ses dépenses afin d'accroître sa rentabilité. Cela peut sembler étrange, mais en 1990, Suncor Energy a envisagé sérieusement de fermer sa division des sables bitumineux. Cette entreprise, parfois un des chouchous sur le marché boursier canadien, est présentement en train de racheter Petro-Canada. En 1990, l'entreprise a évalué la possibilité de mettre fin à ses activités dans le domaine des sables bitumineux parce qu'elles étaient peu importantes. À la place, elles ont adhéré au changement technologique, réorganisé leurs activités minières et leurs activités d'extraction et elles ont fait des sables bitumineux un centre de profit important.
    L'autre chose qui motive ces entreprises pour les années à venir est la pression du public sur le plan environnemental. Je crois qu'il faut être réaliste par rapport aux mesures incitatives qui font que les entreprises acceptent les innovations et les changements technologiques. Les coûts sont toujours un facteur, la réglementation environnementale et les attentes du public sont, bien sûr, d'autres facteurs.
    Je suis un chercheur universitaire. Je me soucie particulièrement de la recherche sur les innovations à long terme. Je ne m'intéresse pas tant aux technologies qui sont disponibles aujourd'hui qu'à ce qui est nécessaire en ce moment pour élaborer des technologies qui seront prêtes dans 5, 10 ou 15 ans. Les sables bitumineux de l'Alberta sont une énorme ressource stratégique, et ce serait une erreur de voir les choses uniquement à court terme; il est important de se préparer non seulement pour la prochaine année, mais également pour les décennies à venir.
    J'aimerais vous parler brièvement du centre unique en son genre que je dirige à l'Université de l'Alberta, le Centre for Oil Sands Innovation. Il y a cinq ans, en 2003, l'intérêt international pour les sables bitumineux ne faisait que commencer à s'accentuer. L'industrie commençait à prendre de l'expansion et, à ce moment-là, le président d'Imperial Oil, M. Tim Hearn, a fait une proposition extraordinaire au président de l'Université de l'Alberta. Il a dit: « Nous avons besoin d'aide. Nous disposons d'importantes ressources dans le Nord de l'Alberta, mais nous ne croyons pas que la technologie actuelle est viable à long terme, nous souhaitons donc travailler avec vous pour faire de la recherche et du développement à long terme afin de trouver des technologies transformatrices pour les sables bitumineux ».
    Lorsque je parle de technologies transformatrices, je parle de techniques d'exploitation minière dont les répercussions sur le paysage sont réduites, des technologies d'extraction qui n'utilisent pas une grande quantité d'eau douce provenant de la rivière Athabasca et qui n'entraînent pas la création de bassins de résidus ainsi que de la mise à jour des processus en vue de réduire la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre.
    Imaginez un président d'université confronté à un dirigeant de l'industrie qui lui demande de faire de la recherche fondamentale à long terme. Bien sûr, nous avons répondu oui sans hésitation. Nous avons travaillé à la mise sur pied d'un centre dont l'envergure est désormais nationale.
    Pourquoi M. Hearn s'est-il présenté à l'Université de l'Alberta? Ce n'est pas uniquement parce qu'Edmonton est le grand centre le plus près des sables bitumineux. Grâce à l'appui du gouvernement du Canada par le biais du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, et aux partenariats avec des entreprises comme Syncrude et Suncor, l'Université de l'Alberta a réuni un groupe de professeurs exceptionnels capables de mener des recherches et d'innover dans le domaine des sables bitumineux. C'est donc l'investissement à long terme du gouvernement du Canada qui a permis de mettre en place des ressources scientifiques — les gens qui étaient en mesure de relever ce défi. Plus particulièrement, le programme de chaires industrielles et les programmes de partenariat du CRSNG ont été des éléments clés du développement de ces ressources à l'université.
    Je suis fier de dire que depuis son ouverture officielle en 2005, le Centre for Oil Sands Innovation s'est développé et regroupe 20 projets différents dans le domaine de la chimie, de la biologie, de la physique et du génie fondamentaux. Le succès de notre collaboration avec Imperial Oil les a menés à renouveler leur engagement. Il nous accorde encore cinq ans de financement, soit 10 millions de dollars au total, parce qu'ils sont très satisfaits du succès obtenu au cours des cinq premières années de notre collaboration. En partenariat avec la province de l'Alberta et le gouvernement du Canada, nous entreprenons encore cinq ans de recherche sur les innovations dans le domaine des sables bitumineux.
    Je suis très fier de l'Université de l'Alberta et de nos ressources scientifiques, mais lorsqu'il s'agit de défis de recherche aussi importants, nos ressources scientifiques sont restreintes. Nous avons donc établi un réseau de recherche sur les sables bitumineux dont font partie l'Université de la Colombie-Britannique, l'Université de Victoria et l'Université Queen's. Nous entreprendrons bientôt des projets en collaboration avec Ressources naturelles Canada, le Conseil national de recherches et l'Université d'Ottawa.
    En ma qualité de directeur du Centre for Oil Sands Innovation, j'ai à relever un défi fascinant. J'enseigne à des professeurs au sujet des sables bitumineux et des défis qu'ils représentent et j'essaie de susciter leur intérêt et leur attention.
    Les sables bitumineux de l'Ouest du Canada, présents en Alberta et en Saskatchewan, constituent une ressource de niveau mondial. Dans l'industrie des sables bitumineux, nous avons une étonnante capacité réceptrice pour les nouvelles technologies et les nouvelles idées, et nous avons d'excellentes bases en science et en génie pour faire de la recherche et du développement concernant les nouvelles technologies afin de pouvoir exploiter cette ressource de façon durable pour l'environnement.
    J'aimerais vous remercier de m'avoir invité à témoigner ce matin, et j'espère pouvoir répondre à vos questions et discuter avec vous des innovations dans le domaine des sables bitumineux.
    Merci beaucoup.
    Le vice-président (M. Francis Scarpaleggia): Merci beaucoup, monsieur Gray.
    Nous céderons la parole à Mme Guigard.
(0820)
    Je remercie également les membres du comité de me permettre de témoigner aujourd'hui. J'ai un bref dossier dont j'espérais vous faire part sous forme de présentation PowerPoint. J'aimerais prendre le temps de vous présenter ce document, si vous me le permettez.

[Français]

    Si vous me le permettez, je vais parler un peu en français.

[Traduction]

    Je suis professeure à l'Université de l'Alberta au sein du groupe de génie de l'environnement du département de génie civil et de génie de l'environnement. Je vais axer ma présentation sur les questions environnementales liées aux sables bitumineux. Je crois que ces points ont été abordés lors de rencontres précédentes du comité, mais je pensais les passer en revue et brosser un tableau des technologies que nous examinons afin de résoudre certaines de ces questions environnementales.
    Hier, vous avez pu constater de vos propres yeux une partie de cette information au cours de votre survol, et vous verrez que les sables bitumineux couvrent une très grande superficie. Les réserves connues sont importantes. La plupart d'entre elles sont accessibles par des techniques de récupération in-situ, mais environ 20 p. 100 de ces réserves sont présentement accessibles par l'exploitation à ciel ouvert. Ainsi, ce que vous avez vu hier était probablement des activités d'exploitation à ciel ouvert, et c'est là-dessus que j'aimerais m'attarder.
    Quelles sont les trois questions environnementales liées à l'exploitation à ciel ouvert des sables bitumineux? Vous êtes ici aujourd'hui pour discuter de celle qui entoure l'utilisation de l'eau pour l'exploitation à ciel ouvert des sables bitumineux et l'exploitation minière des sables bitumineux. Mais la question des bassins de décantation y est directement reliée. Il y a également, comme l'a souligné M. Murray Gray, l'utilisation de l'énergie qui fait partie de ces questions environnementales. J'aimerais vous parler un peu de chacune de ces questions.
    J'aimerais d'abord vous parler de l'utilisation de l'eau. Pour extraire le bitume des sables bitumineux, on utilise le procédé d'extraction à l'eau chaude. Il y a toujours eu un peu de confusion, je crois, concernant la quantité d'eau réellement nécessaire à l'extraction du bitume des sables bitumineux. Vous remarquerez que selon les chiffres que je vous donne, il faut de 12 à 13 barils d'eau par baril de bitume. Le processus nécessite cette grande quantité d'eau, mais de 80 à 90 p. 100 de cette eau est recyclée. Il faut de 2 à 4,5 barils d'eau douce pour compenser la perte de l'eau qui ne peut pas être recyclée. Je crois que ce sont des chiffres importants à examiner lorsque nous discutons des problèmes d'eau liés à l'exploitation des sables bitumineux.
    Cela signifie que des quantités excessives d'eau douce doivent être puisées dans la rivière Athabasca. Les besoins en eau provenant de la rivière Athabasca continueront d'augmenter au fur et à mesure que le développement des sables bitumineux se poursuivra. La plupart de l'eau utilisée dans le procédé se retrouve dans les bassins de décantation. En raison de la politique des entreprises qui exploitent les sables bitumineux interdisant les rejets, l'eau n'est pas retournée dans l'environnement.
    Le problème des bassins de décantation est directement lié à l'utilisation de l'eau.

[Français]

    Je vais poursuivre en français.
    Je veux parler justement des bassins de décantation, tailing ponds en anglais. Ceux-ci sont des structures que nous avons mises en place pour retenir les résidus de l'extraction. Ces résidus sont placés dans ces bassins de décantation, et après trois à cinq ans, les résidus forment ce qu'on appelle les résidus mûrs fins, qui sont constitués d'environ 30 p. 100 de solides, le reste n'étant pratiquement que de l'eau. Cette eau est très difficile à recycler car elle est emprisonnée dans les résidus.
    Les résidus mettent très longtemps à se déposer, ce qui signifie que nos bassins de décantation resteront là pendant plusieurs années. Il faut aussi reconnaître qu'il y a à peu près 130 kilomètres carrés de bassins de résidus. Le chiffre qu'on entend souvent est 50 kilomètres carrés, mais le gouvernement de l'Alberta a refait ses estimations et on parle maintenant de 130 kilomètres carrés de bassins de décantation. Donc, ces bassins de résidus de décantation augmentent beaucoup. De plus, nous avons besoin de nouveaux bassins de décantation pour mettre les résidus de notre développement.
    Vous avez constaté, malheureusement, le décès de plusieurs canards. Quand vous avez survolé ces bassins de décantation, vous avez remarqué qu'ils contiennent du bitume, qui reste du procédé qui n'est pas extrait. Il y a aussi beaucoup de sel et des composés toxiques comme les acides naphténiques, ainsi que d'autres composés tels que des métaux lourds.
    La conséquence de la présence de ces composés, c'est que l'eau ne peut pas être rejetée dans l'environnement. Il faut garder cette eau, qui est présentement recyclée, mais elle ne peut pas l'être indéfiniment. Il faudrait traiter cette eau avec des moyens assez importants, afin de pouvoir continuer à l'utiliser dans le futur.

[Traduction]

    J'aimerais poursuivre brièvement sur la question de l'utilisation de l'énergie. Je sais que ce n'est pas nécessairement la priorité, mais c'est une question environnementale importante que nous devons aborder.
    L'énergie utilisée pour l'extraction, l'exploitation minière et la valorisation des sables bitumineux varie entre 0,7 et 1,3 gigajoule par baril de bitume. Si on fait le calcul, cela signifie qu'il faut l'équivalent en énergie d'environ 20 p. 100 d'un baril de bitume pour en produire un autre. Cela a pour conséquence d'augmenter les émissions de gaz à effet de serre, ce qu'on a pu observer avec l'augmentation du développement des sables bitumineux. Il faut vraiment penser à ce que nous pouvons faire pour atténuer ces problèmes environnementaux. Comme Murray Gray l'a souligné, nous devons élaborer de nouvelles technologies novatrices, une technologie qui se distingue ou une technologie transformatrice.
    J'observe ces technologies de deux façons. Je regarde ces technologies à l'intérieur du paradigme — de la technologie que nous utilisons en ce moment — et à l'extérieur du paradigme, d'où nous pourrions réellement faire un bond en avant et étudier les nouvelles technologies qui transformeraient véritablement la façon de faire les choses dans l'industrie des sables bitumineux. De quoi avons-nous besoin pour parvenir à mettre en place ces nouvelles technologies, qu'elles soient à l'intérieur ou à l'extérieur du paradigme? Il y a des défis à relever. Par exemple, il y a une importante infrastructure, et vous l'avez tous vue lorsque vous avez survolé les sables bitumineux hier. Il y a une infrastructure très importante. Souvent, le commentaire que nous avons entendu à propos des technologies nouvelles et novatrices à l'extérieur du paradigme est que nous pouvons apporter des changements progressifs — des changements progressifs mineurs, mais qui sont certainement nécessaires, cela ne fait aucun doute.
    Nous ne pouvons pas laisser tomber cette infrastructure du jour au lendemain pour laisser la place aux technologies transformatrices qui apporteraient de grands changements. Ainsi, ce que nous devons et pouvons faire, selon moi, est d'encourager la recherche de nouvelles technologies novatrices. Pour y arriver, nous devons élaborer des politiques qui favoriseront l'innovation et mettre en place une structure qui permettrait de développer ces technologies et de faire la preuve qu'elles vont au-delà de la recherche fondamentale.
    Il faut donc faire un pas de plus, et mettre en place une structure afin que les technologies élaborées en laboratoire puissent être utilisées sur le terrain. Nous devons également continuer d'appuyer la recherche et le développement afin d'améliorer le procédé utilisé présentement. C'est un point très important. Nous devons faire face aux problèmes maintenant, mais nous devons également nous tourner vers l'avenir et élaborer des technologies transformatrices.
    En résumé, j'aimerais dire qu'il y a des questions environnementales liées aux sables bitumineux que vous connaissez tous, mais qu'il faut croire qu'il est possible d'apporter des innovations et des améliorations durables — et pas seulement de petites améliorations, mais des améliorations importantes — et nous devons exploiter les sables bitumineux de façon plus responsable dans l'avenir.
    Merci.
    Je remercie les deux témoins.
    Nous commencerons par la première série de questions. Monsieur Trudeau, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup pour votre présentation. C'est intéressant d'entendre des gens du domaine scientifique et de la recherche.
    Hier, notre journée a été bien remplie. Des représentants de l'industrie nous ont fait visiter des installations et nous ont présenté le côté positif des choses, et nous avons eu un après-midi déchirant en compagnie de membres des communautés autochtones qui sont très préoccupés par les répercussions sur leur vie et leur mode de vie. J'aimerais donc entrer dans le vif du sujet.
    Madame Guigard, vous avez parlé de l'eau dans les bassins de décantation qui ne peut pas être retournée dans l'environnement à moins d'être traitée. Une des choses que nous avons vues hier matin portait sur la récupération du contenu des bassins de décantation et la remise en état des terrains où ils sont installés. Que fait-on de l'eau qui était dans ces bassins de décantation lorsqu'elle est retirée des sables pour qu'on récupère le contenu du bassin? Où cette eau se retrouve-t-elle? Comme vous l'avez dit, elle ne peut pas être recyclée indéfiniment.
(0825)
    En ce moment, la plupart de l'eau est recyclée.
    À l'heure actuelle, nous tentons de procéder de deux façons pour récupérer le contenu des bassins de décantation. Il y a ce que l'on appelle les « terrains humides » et les « terrains secs ». Dans certains cas, la remise en état permet de créer un terrain humide — l'eau reste là et recouvre les bassins de décantation qui deviennent essentiellement des lacs. On obtient donc un terrain humide. On effectue beaucoup de travail en ce moment pour être en mesure de créer des terrains secs; nous examinons des technologies qui permettraient aux résidus de se déposer ou d'être sains sur le plan géotechnique afin que les terrains deviennent secs.
    Présentement, l'eau n'est pas réintégrée à l'environnement. D'après ce que je comprends, elle est retenue dans des lacs de kettlo si on tente de récupérer le contenu des bassins de décantation. Pour le moment, on récupère le contenu d'un seul bassin de décantation, celui de Suncor.
    Pouvez-vous me parler de la nature du sol des terrains secs qui seront éventuellement créés après la récupération du contenu des bassins de décantation? Beaucoup de choses ont été faites pour que la forêt boréale puisse se réinstaller. Une fois que le sol a été traité et qu'il est redevenu du sable, que reste-t-il dans le sol qui nous porterait à croire qu'on pourrait remettre en état la forêt naturelle? Ou est-ce impossible? Quelles sont les données scientifiques à ce sujet?
    D'après ce que je comprends, les déchets solides seraient brûlés à peu près de la même façon que dans un site d'enfouissement. Les solides seraient recouverts d'un sol propice à la vie.
    Les chiffres que vous avez donnés, l'équivalent en énergie de 20 p. 100 d'un baril de bitume nécessaire pour en produire un autre, est-ce que le bitume doit encore être transformé en pétrole brut synthétique et en d'autres choses, ou est-ce qu'il est fréquemment utilisé tel quel?
    Ce calcul comprend la valorisation, c'est donc l'énergie requise pour la valorisation. Il n'est d'aucune façon le calcul du cycle de vie complet du bitume, mais il comprend l'exploitation minière, l'extraction et la valorisation du bitume.
    Mais en bitume.
    En pétrole brut, qui doit ensuite être raffiné.
    Avez-vous des chiffres sur la transformation? Je tente d'avoir une idée de la quantité d'énergie requise pour transformer le bitume de manière à ce que nous puissions l'utiliser et le consommer, dans les voitures ou dans l'industrie lourde, à ce niveau de transformation. Avez-vous une idée de la quantité d'énergie requise pour en arriver là?
    Je n'ai pas de chiffres à ce sujet.
    Peut-être que M. Gray en aurait?
    Une fois que le bitume a été transformé en pétrole brut synthétique, il faut environ 10 p. 100 d'énergie supplémentaire pour produire de l'essence, l'acheminer jusqu'à l'utilisateur et ainsi de suite. Lorsque vous avez du pétrole brut synthétique, le raffinage est assez efficace.
    Au sujet des besoins en énergie, j'aimerais simplement ajouter que pour transformer et récupérer le bitume, comme l'a mentionné Mme Guigard, il y a deux techniques principales qui sont utilisées. Il y a la technique de récupération in-situ. Je ne suis pas certain que vous ayez vu l'utilisation de cette technique lors de votre survol d'hier. C'est une technique complètement différente qui consomme énormément d'énergie. Il y a également la technique de l'exploitation minière qui, comme l'a indiqué Mme Guigard, est utilisée pour l'exploitation d'environ 20 p. 100 de la ressource; cette technique a beaucoup plus d'impacts sur les terres et sur l'eau, mais elle est beaucoup plus efficace sur le plan énergétique. L'industrie a donc deux côtés, elle est un peu schizophrène. Ainsi, lorsqu'on regarde les statistiques, on examine deux ensembles de questions très différentes en ce qui concerne les répercussions environnementales et l'utilisation de l'énergie.
    Les 20 p. 100 s'appliquent à la récupération in situ ou à l'exploitation à ciel ouvert?
    Ça serait une moyenne.
    C'est une moyenne.
    Pourriez-vous me donner une idée — je ne vous demande pas les chiffres exacts — du pourcentage pour la récupération in situ?
(0830)
    Selon mes calculs, c'est à peu près entre 15 et 25 p. 100, je crois. Ce serait probablement entre 15 et 30 p. 100.
    Comment cela se compare-t-il aux autres technologies ou aux autres sources d'énergie — charbon, gaz naturel — pour ce qui est du coût énergétique de l'extraction?
    Je crois qu'il faut faire la comparaison avec les technologies de rechange. Il ne faut pas regarder le pétrole brut conventionnel parce que nous n'en avons pas de disponible ni le gaz naturel normal. J'aime mieux faire deux comparaisons avec le charbon, qui est abondant dans l'Ouest du Canada et des États-Unis, et avec l'éthanol provenant de l'exploitation agricole.
    Les sables bitumineux sont beaucoup plus propres que le charbon sur le plan des émissions de carbone, et beaucoup plus efficaces sur le plan énergétique. La fabrication du carburant de transport liquide à partir du charbon nuit encore plus à l'équilibre énergétique.
    Je fais une autre comparaison avec l'éthanol. Les producteurs d'éthanol aux États-Unis et au Canada obtiennent de 1,25 à 1,4 unité d'énergie pour chaque unité d'énergie dépensée. La plupart de l'énergie utilisée est de l'énergie fossile. Le rendement énergétique est bien inférieur à celui des sables bitumineux. La différence, bien sûr, est que lorsque vous consommez un litre d'éthanol, le carbone est d'origine végétale et non d'origine fossile.
    Nous devons céder la parole à M. Ouellet.
    Monsieur Ouellet.

[Français]

    Puis-je parler en français ou en anglais?
    Vous pouvez essayer en français. On me dit que les appareils de traduction simultanée fonctionnent maintenant.
    Je vous remercie.
    Je m'excuse d'être en retard, j'avais mal compris à quelle heure la réunion débutait et j'ai malheureusement manqué une partie de votre présentation.
     Madame Guigard, je crois que vous avez parlé de pollution « naturelle » de la nappe phréatique par les sables bitumineux. De toute façon, ceux-ci contiennent des agents qui sont présents et qui polluent depuis toujours.
    Qu'est-ce, exactement, que la pollution « naturelle » de la nappe phréatique?
    On parle de la nappe phréatique, et non pas de la rivière.
    On fait beaucoup d'études à l'Université de Waterloo sur les composés présents dans les nappes phréatiques aux alentours des sables bitumineux. Ce n'est pas mon domaine. Par conséquent, je n'ai pas beaucoup de renseignements sur ce sujet. Par contre, le composé toxique que je connais un petit peu concerne les acides naphténiques.
    Je sais que les concentrations d'acides naphténiques sont beaucoup plus élevées dans les bassins de rejets ou de décantation que dans les nappes phréatiques. Les études qui sont menées à l'Université de Waterloo et à l'Université de l'Alberta en ce moment essaient d'établir s'il y a moyen de distinguer les acides naphténiques qui sont présents naturellement de ceux qui sont présents suite à l'extraction du bitume. En ce moment, on essaie de déterminer si ces composés proviennent du bitume qui est présent naturellement ou s'ils sont présents suite à son extraction et, par conséquent, si cela vient des bassins de décantation.
    Je ne connais pas les niveaux actuels. Aussi, toutes les données du Programme de surveillance aquatique régionale, qui étudie, bien sûr, la rivière Athabasca et pas seulement les nappes phréatiques, ont montré qu'il n'y avait pas beaucoup d'acides naphténiques dans la rivière Athabasca. Je suppose que c'est la même chose pour les nappes phréatiques, mais je n'ai pas les données avec moi.
    L'eau était donc relativement dangereuse pour la santé. Les puits étaient relativement dangereux, de façon naturelle.
    Les concentrations n'étaient pas élevées. À ce que je sache, les concentrations d'acides naphténiques sont très basses dans les nappes phréatiques. Elles sont très élevées dans les bassins de rejets, mais dans les nappes phréatiques, les concentrations sont assez basses, voire non toxiques.
(0835)
    Sont-elles assez basses pour que les gens puissent puiser de l'eau sans danger pour leur santé?
    Encore une fois, je n'ai pas les données avec moi. Je n'ai pas fait de suivi des concentrations. Je n'en suis donc pas certaine. Il faudrait peut-être voir les données que l'Université de Waterloo a publiées dans ce domaine.
    Des métaux lourds sont-ils rejetés dans la rivière?
    Pas à ce que je sache.
    Y a-t-il des métaux lourds dans les bassins de décantation?
    Il y a des métaux lourds dans les minerais. Ce sont des métaux lourds qui étaient présents, mais dont le niveau de concentration a beaucoup augmenté à cause du procédé.
    Un jour ou l'autre, peuvent-il aboutir dans la rivière en traversant le sol ou d'une autre façon?
    Les métaux lourds ne sont pas très mobiles dans l'environnement. On les trouve souvent avec les résidus solides, pas dans la partie liquide. Ils sont souvent associés aux solides, pas aux liquides, sauf s'ils sont combinés de façon chimique à d'autres composés. Cependant, ils restent souvent avec les résidus solides.
    Les métaux lourds pourraient-ils être transportés loin par la rivière? S'ils passaient au travers du sol, pourrait-on les retrouver des kilomètres plus loin?
    Les métaux lourds sont souvent associés aux solides. Par conséquent, si des métaux lourds se trouvent dans les rivières, on les retrouvera dans les sédiments des rivières.
    À l'époque où la rivière n'était pas exploitée et qu'elle était à l'état naturel, des métaux lourds qui se dégradaient à partir des rives coulaient-ils dans la rivière?
    Je ne le sais pas. Il faudrait peut-être consulter les données du Programme de surveillance aquatique régionale.

[Traduction]

    Est-ce que je peux ajouter quelque chose à l'intervention de Mme Guigard?
    Les métaux lourds sont extrêmement difficiles à retirer du bitume. Ils ne sont pas mobiles dans l'écosystème. J'ai personnellement mené des recherches pour trouver des façons de retirer ces métaux du système des sables bitumineux. Nous n'y sommes pas parvenus jusqu'à maintenant. C'est tellement difficile que même en laboratoire, nous n'avons pas trouvé de façon efficace pour retirer ces métaux et les mobiliser. Si quelqu'un avait une méthode à nous proposer, nous serions ravis de l'utiliser pour traiter ce matériau lourd afin que les métaux ne soient plus un problème.
    La question des résidus et de la nature des sables bitumineux ne se compare pas avec ce qui se fait en matière d'exploitation minière partout ailleurs dans le monde. Si vous entendez parler de problèmes de résidus dans des mines ailleurs au Canada, il s'agit de résidus complètement différents de ceux des sables bitumineux. La contamination est de la matière organique. Elle est partiellement biodégradable, comme l'a mentionné Mme Guigard, selon des études réalisées à Waterloo et en Alberta. Il ne s'agit pas d'arsenic, de cyanure, de nickel ou d'autres métaux lourds qui sont de gros problèmes de résidus ailleurs au Canada.
    Il s'agit donc d'un système tout à fait unique. Si vous canotez sur ces rivières, ce que j'ai fait, vous verrez que le pétrole fait partie de l'écosystème naturel de la région de Fort McMurray. Si vous allez sur un terrain de camping au bord de la rivière Clearwater, vous verrez de petites gouttes de pétrole sur la rive ainsi que des acides naphthéniques en faible concentration. Comme Mme Guigard l'a dit, la question principale concernant l'écosystème n'est pas de savoir si ces éléments sont présents, mais plutôt de connaître leur concentration. C'est un système unique. La rivière Athabasca est capable de dégrader le pétrole. Vous pouvez observer de petites nappes de pétrole, puis les voir disparaître lorsque les organismes présents dans l'eau les dégradent.
    La question principale est la charge. Quelle quantité sera libérée, quelle concentration et quelle quantité descendra la rivière pour atteindre les collectivités comme celle de Fort Chipewyan? C'est la question à laquelle, comme Mme Guigard l'a dit, nous n'avons pas de réponse.
    Vous m'avez beaucoup intéressée, monsieur Gray, au tout début lorsque vous avez parlé de ce qui nous empêche d'avancer et de rendre l'exploitation des sables bitumineux rentable et inoffensive pour l'environnement. Je suis heureuse de voir que vous avez parlé non seulement de coût, mais également de réglementation. Croyez-vous que la réglementation en place est suffisamment sévère pour inciter à l'introduction d'innovations et de méthodes de production propres?
(0840)
    Je crois qu'il faut examiner les répercussions qui vous préoccupent. Je crois qu'il faut les segmenter un peu. Les répercussions que je vois sont les répercussions sur les terres et la valorisation des terres, l'utilisation de l'eau et les résidus, l'utilisation de l'énergie et les gaz à effet de serre.
    Les deux premières peuvent faire l'objet d'une réglementation et amener l'industrie à accélérer la valorisation ainsi qu'à réduire l'accumulation de résidus. Il est, selon moi, moins facile de mettre en oeuvre une réglementation touchant la question des gaz à effet de serre parce que les technologies disponibles pour gérer le dioxyde de carbone coûtent très cher.
    Si je peux, je vais intervenir parce que je ne comprends pas votre réponse.
    J'aimerais savoir si vous pensez que la réglementation touchant les répercussions sur les terres et l'eau est suffisamment stricte pour favoriser les investissements dans l'amélioration de la technologie?
    Oui, je crois qu'elle l'est. Mais l'autre chose à garder à l'esprit est que, à tout le moins dans l'industrie telle qu'elle est aujourd'hui, lorsqu'on ouvre une nouvelle mine, on le fait après avoir suivi un processus réglementaire visant à approuver le plan qui décrit comment la ressource sera exploitée, comment les résidus seront gérés et comment la mine sera fermée. L'occasion de réglementer et d'entendre le discours public n'est essentiellement présente qu'à l'étape où le projet minier est soumis pour approbation. Une fois approuvé, le projet devient essentiellement un contrat entre les organismes de réglementation et les entreprises, qui encadre la façon dont l'exploitation sera faite pendant la durée du bail.
    Si j'examine l'histoire en Alberta, je constate qu'il est impossible de réécrire les règles établies avec une entreprise. À mon avis, on ne peut pas modifier les règles une fois que l'entreprise a réalisé la moitié de son plan. Par exemple, le plan de Syncrude a été présenté bien avant l'ouverture de sa mine, en 1978. Ils ont décrit, en fonction de la technologie disponible à ce moment-là, ce qu'ils allaient faire des sables bitumineux et comment ils allaient remettre en état le site de la mine, et ils sont allés de l'avant avec ce procédé de remise en état.
    Mais la législation actuelle — et j'examine en fait la réglementation fédérale aussi, parce que nos témoins nous entretiennent de questions fédérales... Je sais comment le système réglementaire fonctionne et je sais que la réglementation pourrait être revue si nous estimons qu'il faut améliorer les normes.
    J'aimerais poser cette question à Mme Guigard. Mme Guigard, dans votre présentation, vous avez laissé entendre qu'il y a plusieurs problèmes graves avec les sables bitumineux et plusieurs questions qu'il faut aborder. Vous avez mentionné que vous sembliez avoir trouvé des solutions en laboratoire, mais que ces solutions n'étaient pas transférées sur le terrain. C'est là que j'aimerais en venir. J'essaie de comprendre pourquoi.
    Tout d'abord, pouvez-vous me dire si vous croyez que certains progrès pourraient permettre de réduire substantiellement l'utilisation de l'eau ou d'exploiter les sables bitumineux en réduisant les répercussions sur les terres et ainsi de suite?
    Est-ce que ce que vous avez élaboré en laboratoire se rend sur le terrain, dans les nouvelles exploitations? Si ce n'est pas fait, pourquoi?
    Il y a de nouvelles innovations en laboratoire, par exemple sur le plan des technologies d'extraction sans eau. Vous avez peut-être entendu parler du travail que je fais sur les procédés d'extraction sans eau. Nous travaillons là-dessus en laboratoire. On a également parlé d'autres innovations dans les journaux, et un peu moins dans les revues évaluées par des pairs parce qu'il y a beaucoup de problèmes de brevets. Mais les technologies existent. Laquelle est la meilleure? Nous n'avons toujours pas les réponses.
    J'aimerais vous parler un peu de mon expérience personnelle. Un des défis auxquels nous faisons face lorsque nous faisons de la recherche dans ce domaine — et c'est la même chose pour d'autres chercheurs qui font un travail similaire — est qu'il coûte très cher de passer du laboratoire à un projet pilote pour prouver le potentiel économique et les gains environnementaux qu'une innovation apporte. Nous parlons de plusieurs millions de dollars et d'un niveau de risque très élevé. Il est donc difficile pour un chercheur ou pour quelqu'un qui propose de nouvelles innovations technologiques de mettre en balance le coût de son projet avec le haut niveau de risque.
    Puis, comme je l'ai mentionné dans ma présentation, il faut se demander comment nous pouvons aller de l'avant avec les nouvelles technologies et laisser derrière l'importante infrastructure déjà en place. Je crois que ce sont les deux difficultés auxquelles j'ai fait face, essentiellement le risque et les coûts associés à la transformation en quelque chose qui démontre...
(0845)
    Madame Guigard, constatez-vous que les choses évoluent? J'apprécie votre témoignage très instructif, mais on nous présente beaucoup de demandes. Nous recevons beaucoup de propositions, et lorsque l'argent sera sur la table, les choses iront de nouveau de l'avant. Il semble donc que le gouvernement fédéral investit beaucoup d'argent dans la recherche et le développement, mais que ça ne donne pas de résultats parce que personne ne veut dépenser les sommes, ou parce que c'est trop risqué et ainsi de suite.
    Dans quelle mesure la RD effectuée au Canada est-elle réellement appliquée à la délivrance de permis et à l'exploitation?
    Il est difficile de répondre à cette question parce que lorsque nous faisons de la recherche et du développement, c'est seulement ça que nous faisons. Tout ce qui est testé en laboratoire et le travail de laboratoire peut ne plus fonctionner dans le cadre d'un projet pilote. Par exemple, il y a des technologies qui donnent de très bons résultats en laboratoire, mais lorsqu'on tente de démontrer leur efficacité à l'échelle pilote, il faut affronter une panoplie de nouveaux défis.
    Je crois donc que l'argent investi finira par porter ses fruits. Éventuellement, il pourrait même en découler d'autres innovations, mais il y a des technologies... Je crois que nous estimons, mes collaborateurs sur ce projet et moi-même, que le pas à franchir pour passer d'un petit projet pilote à un projet pilote à grande échelle est grand. Nous constatons qu'il y a eu un peu de changement avec les investisseurs privés et les sociétés de capital-risque, si vous voulez, ou les investisseurs providentiels. Ils semblent disposés à prendre un peu plus de risques que les autres.
    Qui décide des sommes qui seront dépensées dans un centre d'innovation? Est-ce simplement les scientifiques? Est-ce que ce sont ceux qui apportent du financement? Est-ce que les premières nations participent aux décisions? Je suis curieuse de savoir qui fixe les priorités du centre d'innovation.
    Pour ce qui est de notre centre d'innovation, les priorités sont établies par ceux qui assurent le financement en collaboration avec l'Université de l'Alberta. Nous avons donc un comité de direction composé de représentants de l'industrie, du gouvernement de l'Alberta et de l'Université de l'Alberta, des principaux partenaires du centre, et ils décident de l'orientation scientifique.
    Je vais devoir céder la parole à M. Warawa.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici. Vous nous avez été chaudement recommandés, c'est intéressant d'entendre vos témoignages ce matin.
    Nous avons surtout parlé de l'exploitation minière à ciel ouvert plutôt que des techniques in situ. Êtes-vous spécialisés dans ce domaine? Est-ce que je devrais poser des questions sur l'exploitation à ciel ouvert plutôt que sur la récupération in situ?
    Je connais certaines choses sur la récupération in situ, mais pas autant que sur l'exploitation à ciel ouvert, puisque c'est sur quoi porte mon travail.
    Vous pouvez essayer.
    Le comité s'intéresse principalement à l'eau. Comme nous l'avons déjà vu ce matin, les questions ont été assez vastes, nous avons parlé des répercussions énergétiques avec M. Trudeau, et ainsi de suite. Hier, nous avons entendu des témoignages sur les questions liées aux traités. Nous constatons que la discussion évolue plutôt rapidement.
    Lors de mon dernier voyage ici il y a deux ans, j'ai pris part à une excursion sur la rivière Athabasca. Je n'avais pas pu survoler la région, comme nous l'avons fait hier, j'ai donc vu la région sous deux angles différents et je me suis rendu au centre d'information touristique. Je trouve que c'est édifiant et j'apprécie votre contribution.
    Il y a deux ans, j'ai vu que les hydrocarbures s'écoulaient naturellement dans la rivière Athabasca, comme vous l'avez dit. Monsieur Gray, vous avez mentionné que les organismes dans la région de Fort McMurray où se trouvent les sables bitumineux réagissent de façon unique au pétrole. En tant qu'humains, réagissons-nous à ces hydrocarbures de façon unique? Ou ces organismes sont-ils particuliers? Autrement dit, est-ce que les humains seraient touchés au point où il serait dangereux de boire l'eau dans le secteur de la rivière Athabasca parce que son contenu en hydrocarbures est plus élevé que la norme? Est-ce que nous réagissons et tombons malade ou est-ce que nous développons des maladies ou des cancers parce que nous buvons de l'eau qui est peut-être contaminée naturellement?
(0850)
    Je suis professeur de génie chimique, je dois donc avouer mon ignorance sur les aspects médicaux détaillés. Je sais que j'ai goûté à l'eau. Comme je l'ai mentionné à M. Ouellet, le point important est la concentration. La grande question pour quiconque s'intéresse aux effets de la consommation de l'eau est de savoir quelle est la concentration de ces composés dans l'eau. C'est essentiel pour savoir comment l'eau a des effets sur un organisme, qu'il s'agisse d'un microorganisme qui adore absorber ce pétrole ou d'un poisson ou de gros animaux comme l'humain et l'orignal et pour déterminer ce qui n'a aucun effet.
    Certaines de ces toxines sont bio-accumulables, et chez l'humain, elles peuvent continuer de s'accumuler au point où la quantité présente dans votre corps vous rend malade. C'est une occurrence naturelle, parce que vous avez bu de l'eau contenant des hydrocarbures.
    Il s'agit d'une question qu'il faudrait poser à un toxicologue, je dirais, à un écotoxicologue.
    Je peux répondre à votre question sur les hydrocarbures, en général, ils ne s'accumulent pas dans les humains. Cela ne signifie pas qu'il n'y a aucune incidence sur la santé. Certains des hydrocarbures légers qui sont présents dans l'essence, par exemple, peuvent causer des cancers chez les humains, mais ils n'ont pas tendance à s'accumuler dans leur organisme.
    D'accord. Je vais changer de sujet — je vous remercie pour ces précisions.
    Je veux parler des bassins de décantation que nous avons vus. Nous avons entendu parler de l'ajout de gypse. En ce moment, il y a de l'eau, et le sable qui y est mélangé, qui sont versés dans ce grand réservoir, le bassin de décantation. Le sable, parce qu'il est lourd, se dépose au fond, mais il y a de l'argile qui demeure en suspension pendant des années. Nous avons lu et entendu que cet argile pouvait demeurer en suspension pendant 30 ans, 40 ans. Pour accélérer le processus, on ajoute du gypse à l'eau, et soudainement l'argile se dépose au fond et l'eau est plus propre. Il est donc possible de récupérer le contenu des bassins de décantation en très peu de temps en y ajoutant du gypse. Est-ce l'une des nouvelles technologies transformatrices qui a été trouvée grâce à la recherche et au développement, l'ajout du gypse qui permet de procéder à la récupération très rapidement?
    L'ajout de gypse, ou de sulfate de calcium, est un procédé assez bien connu depuis longtemps. Ce qui est plus innovateur est la technique que les entreprises ont élaboré pour procéder au mélange. Elles prennent les résidus, y ajoutent le gypse et le sable, et elles remettent ce mélange dans la mine. Essentiellement, elles peuvent retirer la boue du bassin de décantation et la remettre dans la mine.
    La difficulté de tout ce processus est que lorsque vous avez ajouté du gypse, l'eau devient très difficile à recycler pour récupérer le bitume. Dans le passé, les entreprises déterminaient la composition de l'eau de manière à pouvoir tirer le plus de pétrole possible des sables bitumineux. Le côté négatif était que cela créait les pires problèmes de résidus possibles. Si on traite l'eau pour obtenir les meilleurs résultats possibles sur le plan des résidus, la récupération du bitume est la plus mauvaise qui soit lorsque vous recyclez l'eau. C'est le problème avec lequel elles tentent de jongler en ce moment.
    Pour moi, cela donne l'occasion d'élaborer de nouvelles approches. Si vous pouvez modifier les propriétés chimiques de l'eau entre le bassin de décantation et l'usine, vous pourriez être capable d'obtenir du bitume et de vous débarrasser des problèmes de résidus en même temps. C'est une des voies que l'on pourrait suivre lorsqu'il est question de l'utilisation de l'eau. L'autre voie à suivre est d'utiliser des technologies qui n'utilisent pas d'eau du tout — on ne prendrait plus d'eau dans la rivière Athabasca et on ne créerait pas de résidus humides dès le départ. Ces approches sont certainement très intéressantes.
    C'est ce qu'on appelle le processus « RC », ou résidus composites. Des recherches sont menées à ce sujet depuis plusieurs années. Il y a des problèmes avec la qualité de l'eau recyclée. Elle contient de très hauts niveaux de calcium — parce qu'on y a ajouté du gypse — qui ont causé des problèmes lors du procédé d'extraction.
    Les procédés liés aux résidus et à l'extraction, le procédé d'extraction à l'eau, sont étroitement reliés. La question est de savoir si on veut mettre l'accent sur l'extraction, c'est-à-dire le pain et le beurre, ou sur les problèmes de résidus. Les résidus constituent un véritable défi parce qu'on veut également s'assurer de la bonne qualité de l'eau recyclée afin de réduire la demande en eau provenant de la rivière Athabasca. C'est un problème difficile à résoudre, et un défi qui touche le procédé d'extraction à l'eau.
(0855)
    Nous avons vu les bassins de décantation ainsi que les fossés qui les entourent. Autour de la base, il y avait un système permettant de s'assurer que le contenu des bassins de décantation ne fuit pas dans la rivière Athabasca. Les eaux souterraines étaient aspirées, puis repompées dans les bassins de décantation. Le système semble être bien conçu pour empêcher les fuites dans la rivière Athabasca.
    Savez-vous s'il y a déjà eu des fuites des bassins de décantation vers la rivière Athabasca?
    Vous avez vu les digues empêchant les fuites et les canaux entourant les bassins de décantation qui servent à contenir les fuites. Les bassins de décantation n'ont pas de membranes d'étanchéité, les systèmes sont donc conçus pour récupérer l'eau qui fuit et la retourner dans les bassins de décantation. Une étude de l'Université de Waterloo porte sur les eaux souterraines et se penche sur les moyens de prévenir les fuites. Les chercheurs tentent d'utiliser les acides naphténiques, d'examiner l'empreinte qu'ils laissent dans les bassins de décantation et de savoir s'il y a des fuites vers les cours d'eau adjacents, comme la rivière Athabasca ou les eaux souterraines.
    Cette étude est-elle en cours? Y-a-t-il des éléments qui laissent croire qu'il y a un problème de fuites?
    En ce moment, les scientifiques et les ingénieurs, d'après ce que je comprends, examinent les techniques d'analyse permettant de mesurer les acides naphténiques. Comme leur nom l'indique, les acides naphténiques sont un groupe d'acide. Beaucoup de recherches sont effectuées pour élaborer des techniques d'analyse suffisamment sensibles pour détecter de faibles concentrations d'acides naphténiques ainsi que des techniques d'analyse permettant de voir les empreintes laissées par ces acides naphténiques. Cela nous permettrait de dire avec certitude s'il y a des fuites.
    Mais pour le moment, nous ne le savons pas.
    D'après ce que je comprends, nous ne savons pas exactement, selon les analyses, s'il y en a ou non.
    Merci, monsieur Warawa.
    Comme nous sommes en voyage, nous devons nous organiser. Il ne nous reste que quelques minutes dans ce segment. Je suggère, si les membres du comité sont d'accord, que nous accordions quatre minutes à quelqu'un qui n'a pas encore posé de questions. J'aimerais également en poser une. Cela nous mènera à 9 h 15 environ. Est-ce que ça vous convient?
    Des voix: D'accord.
    Le vice-président (M. Francis Scarpaleggia): Parfait.
    J'ai une courte question à poser. Est-ce que les résidus composites sont des résidus empilables? Est-ce que c'est la même chose?
    Non.
    Quelqu'un a employé ce terme, « résidus empilables ».
    Je crois que les résidus empilables sont le rêve de ceux qui font de l'exploitation minière dans l'industrie. Cela signifie que vous pourriez remettre les résidus dans les mines et commencer la remise en état sur-le-champ.
    Une des caractéristiques de ces mines est qu'en raison de l'existence de résidus, il faut attendre longtemps entre le moment où la mine commence ses activités et celui où on peut commencer la remise en état. Les résidus composites rejettent beaucoup d'eau, ce qui nécessite un bassin. Avec les résidus empilables, vous pourriez immédiatement retourner les solides dans la mine.
    Sans passer par un bassin de décantation?
    Sans avoir besoin d'un bassin.
    J'imagine que vous connaissez M. Randy Mikula. Est-ce là-dessus qu'il travaille, les résidus empilables?
    Oui. C'est un spécialiste reconnu mondialement dans le domaine des résidus de tout ordre.
    Vous disiez que l'eau qui reste après le processus de consolidation est de mauvaise qualité et qu'elle ne peut pas vraiment être utilisée pour l'extraction. Est-ce que vous voulez dire qu'elle ne peut pas être utilisée efficacement, qu'elle est quand même utilisée pour l'extraction, mais qu'on n'obtient pas de bons résultats, ou qu'elle n'est tout simplement pas utilisée? Dans ce cas, où l'eau s'en va-t-elle?
    L'eau s'en va toujours dans les bassins de décantation, mais on étudie des technologies pour la traiter afin qu'elle soit de qualité acceptable pour l'extraction. Donc, l'eau est utilisée, mais on a remarqué que la qualité... Avec le processus RC — et je ne sais pas depuis combien d'années il est en place —, la plupart des bassins de décantation contiennent toujours des résidus fins matures qui n'ont pas nécessairement été touchés par les RC, et l'eau est toujours utilisée pour le recyclage. On s'est donc rendu compte qu'il serait peut-être nécessaire de traiter l'eau avec celle qui provient des RC avant de procéder à l'extraction.
(0900)
    Donc, en ce moment, lorsqu'on récupère le contenu d'un bassin — je crois que c'est ce que Suncor fait en ce moment —, que fait-on de l'eau qui est dégradée au point où elle ne peut pas être utilisée pour l'extraction ni être retournée dans la rivière?
    Je me demande si nous ne faisons que déplacer l'eau.
    Je crois... Je ne suis pas certaine.
    Je sais que vous menez des recherches intéressantes, madame Guigard. Vous pourriez peut-être nous en parler.
    D'après ce que vous me dites, j'ai l'impression que ces technologies originales sont peu financées, peut-être en partie parce que du point de vue des entreprises pétrolières, si elles financent vos technologies et qu'elles fonctionnent, des fonds encore plus importants seront nécessaires pour mener des projets pilotes d'envergure. Et si les projets pilotes fonctionnaient, elles devraient repenser toute leur infrastructure. Cela est-il un frein?
    Je mets cette question en opposition avec l'idée que l'industrie vous a accordé 10 millions de dollars, monsieur Gray, ce qui n'est pas rien, mais si on songe à l'investissement global, nous parlons d'un investissement à venir au cours des quoi, 10, 20 prochaines années, qui s'élèvera à environ 120 milliards de dollars. L'industrie ne vous accorde que 10 millions de dollars. Je le répète, ce n'est pas rien, mais étant donné les problèmes auxquels nous faisons face, c'est une goutte d'eau dans l'océan. Je suis certain que vous êtes heureux de recevoir cette somme et que vos chercheurs le sont aussi, et cela garde les activités de recherche au Canada, mais j'aimerais avoir votre avis à ce sujet.
    Nous passerons ensuite à M. Braid.
    La technologie que j'utilise s'appelle l'extraction par fluide supercritique. Elle a été utilisée avec succès en laboratoire pour extraire le bitume des sables bitumineux.
    En ce moment, nous nous intéressons au dioxyde de carbone. Nous utilisons du dioxyde de carbone à 40 degrés à un niveau de pression relativement élevé. Il agit comme un solvant qui peut extraire le bitume des sables bitumineux. On peut utiliser ce procédé avec peu ou pas d'eau.
    Le dioxyde de carbone est un exemple de solvant supercritique, mais de nombreux autres composés pourraient être utilisés comme solvants supercritiques. Il faut amener le solvant à une certaine pression et à une certaine température, puis l'utiliser, faire baisser la pression, récupérer le bitume et recycler le solvant. Le solvant agit essentiellement dans un procédé fermé. Le procédé nécessite peu ou pas d'eau.
    En ce moment, nous tentons d'utiliser de l'eau pour élaborer un procédé continu qui permettrait de manipuler de grandes quantités de minerai. Nous voulons démontrer à l'aide d'un projet pilote s'il est possible d'utiliser ce procédé à grande échelle.
    Un des grands défis consiste à chercher des façons de modifier complètement l'infrastructure, de changer complètement la façon de faire les choses. C'est également une technologie qu'il faut développer, et cela prendra du temps.
    Le procédé d'extraction à l'eau fonctionne. Nous sommes en train de le perfectionner, mais il fonctionne. Comment arrive-t-on à imposer un si grand changement?
    C'est le grand défi.
    Allez-y, monsieur Gray.
    Je vais simplement revenir sur quelques commentaires formulés par Mme Guigard.
    Lorsqu'on parle de développement technologique, il faut s'attendre à examiner de 10 à 20 idées différentes dans le cadre de recherches universitaires pour en arriver à élaborer une technologie transformatrice. Il faut ensuite décider lesquelles sont les plus prometteuses et valent la peine qu'on investisse 10 millions de dollars pour qu'elles soient entièrement prêtes et commercialisées. Je crois qu'il est donc important de demander aux représentants de l'industrie quel genre de possibilités ils recherchent. Il ne faut pas s'imaginer que chacune de ces idées pourra être concrétisée et commercialisée.
    En ce qui concerne la recherche, nous pensons avoir beaucoup d'idées à développer. Certaines d'entre elles mèneront à l'élaboration de nouvelles technologies, et d'autres non. Il est normal d'avoir autant d'échecs que de réussites.
    Nous céderons la parole à M. Braid.
    Merci beaucoup, monsieur le vice-président.
    J'ai quatre minutes. Est-ce bien cela? Je veux m'assurer de pas manquer de temps. Pouvez-vous m'avertir 30 secondes avant la fin?
    Bien sûr. Tout se passera bien, j'en suis certain.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie, monsieur Gray et madame Guigard, d'être ici ce matin pour nous présenter vos témoignages. J'étais très heureux d'en apprendre plus sur le Centre for Oil Sands Innovation et sur le travail de Mme Guigard.
    Monsieur Gray, j'aimerais commencer avec vous. Pourriez-vous décrire brièvement les principaux domaines d'innovation du centre que vous dirigez? J'imagine que l'un d'entre eux est la capture et le stockage du carbone. J'ai aussi brièvement entendu parler de l'extraction sans eau. Quels sont les principaux domaines de recherche, selon vous?
(0905)
    Nous travaillons sur trois thèmes principaux. Le premier est l'amélioration des techniques d'exploitation minière dans le but que l'exploitation minière ait moins d'impact sur le paysage. Le deuxième est l'extraction sans eau ou pratiquement sans eau, notamment pour réduire la quantité de résidus. Dans mon esprit, l'utilisation de l'eau est un problème moins important que l'accumulation de résidus et la contamination de l'eau qui provient des résidus. Mais pour nous, il est important de pouvoir se débarrasser de cette technologie complètement. Le troisième thème touche les nouvelles technologies de valorisation du bitume.
    Ironiquement, nous ne travaillons pas sur la capture du carbone en ce moment, et la raison en est bien simple. Nous n'avons pas encore trouvé d'avantages propres aux sables bitumineux dans la capture du carbone. La capture du carbone est un enjeu important pour l'industrie, mais cet enjeu concerne également l'industrie de l'électricité, qui brûle du charbon dans l'Ouest du Canada, et touche d'autres aspects du raffinage et du traitement des hydrocarbures. À notre centre, nous tentons de trouver des domaines de recherche qui peuvent mener à des technologies transformatrices dans l'industrie des sables bitumineux. Nous tentons encore de trouver des projets dans le domaine de la capture du carbone qui s'appliqueraient uniquement aux sables bitumineux.
    Est-ce que vous travaillez en collaboration avec les universités canadiennes ou américaines?
    Nous collaborons avec les universités. Comme je l'ai mentionné plus tôt, notre centre réalise des projets avec l'Université de la Colombie-Britannique, l'Université de Victoria et l'Université Queen's. Nous espérons mettre en branle un projet d'ici quelques semaines avec l'Université d'Ottawa. Je me suis rendu à l'Université Rice à Houston la semaine dernière et nous avons discuté d'une éventuelle collaboration, et nous avons discuté avec des groupes de l'Université Tohoku à Sendai, au Japon, d'une éventuelle collaboration. Nous établissons des contacts là où nous voyons qu'il y a une expertise particulière que nous aimerions obtenir pour réaliser nos projets.
    Excellent.
    Je suis le député de Kitchener—Waterloo. L'Université de Waterloo est dans ma circonscription, et je suis un peu au courant de l'excellent travail effectué à la faculté de l'environnement et à l'institut sur les eaux. Croyez-vous qu'il serait utile que notre comité en apprenne davantage sur les travaux de MM. George Dixon et David Rudolph et d'autres personnes?
    Oui.
    C'était une question rhétorique. Merci.
    Parlons du procédé de remise en état. Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez du taux de réussite associé au procédé de remise en état et nous parler des autres améliorations qui doivent être apportées à ce chapitre?
    Beaucoup de recherches sont actuellement en cours concernant la récupération du contenu des bassins de décantation. Essentiellement, on essaie de faire en sorte que les résidus se déposent plus rapidement dans les bassins afin que nous puissions les récupérer. Mais il y a un autre enjeu: si les résidus se déposent plus rapidement, ils libéreront plus d'eau, que nous pourrons ensuite recycler. Il y a donc beaucoup de travaux en cours dans ce domaine.
    Il y a deux croyances relatives à un bassin de décantation dont le contenu a été récupéré. Ressemble-t-il à un terrain sec où nous pouvons planter des arbres et repeupler la forêt? Ressemble-t-il plutôt à un terrain humide où il pourrait y avoir un lac qui pourrait servir ultérieurement? Il y a donc deux approches différentes, et de nombreux débats tournent autour de l'approche qui conviendrait le mieux.
    Je participe actuellement au projet sur les résidus à l'Université de l'Alberta par l'entremise de l'Alberta Water Research Institute. Le projet porte sur la densification accélérée des résidus, si on veut, et il vise à obtenir davantage d'eau recyclée et, au bout du compte, à récupérer les résidus des bassins.
    Il y a donc beaucoup de recherches en cours dans ce domaine.
    Très bien.
    J'aimerais simplement ajouter que je ne suis pas du tout un spécialiste du domaine, mais en tant que Canadien, l'une des questions stratégiques clés consiste à déterminer ce qui constitue une remise en état réussie. C'est une question qui fait l'objet de nombreux débats. La remise en état consiste-t-elle à remettre le terrain en mode production à des fins de loisirs et d'autres activités humaines, ou consiste-t-elle à remettre le terrain dans le même état qu'il était auparavant?
    J'ai vu des critiques concernant des terrains remis en état dans la région de Fort McMurray, parce qu'ils ne redeviennent pas du muskeg. Est-ce un problème? C'est une question stratégique.
    Une dernière question brève, monsieur Braid.
    Je m'attends simplement à une phrase comme réponse. Quelle est votre vision de l'extraction des sables bitumineux dans 10 ans?
    Je dirais qu'il n'y aurait plus de bassins de décantation. Ce serait ma vision. Si nous pouvions éliminer les bassins de décantation, cela transformerait complètement l'aspect exploitation minière de l'industrie. On verrait une activité beaucoup plus rapide entre l'exploitation minière et la remise en état, et une superficie très réduite des terres altérées en tout temps.
(0910)
    Monsieur Calkins.
    Merci, monsieur le président.
    J'apprécie beaucoup les exposés. Mes questions seront très rapides, directes et ciblées.
    Connaissez-vous les travaux réalisés actuellement par M. Gradek, de Gradek Energy, concernant les billes de biopolymère conçues pour attirer les hydrocarbures et éloigner l'eau? Connaissez-vous cette technologie ou ce qui en est maintenant?
    Je ne sais pas ce qui en est maintenant. J'en ai entendu parler, et je sais que vous lui parlerez demain.
    J'espérais simplement avoir un aperçu avant de le rencontrer.
    Évidemment, il y a les travaux que vous réalisez lors de recherches de haut niveau à l'université, et nous avons parlé de la prochaine étape, c'est-à-dire de la recherche appliquée, qui consiste à prendre les choses utiles que vous faites en laboratoire et à les appliquer sur le terrain.
    Dans combien de temps verrons-nous le prochain progrès important dans le domaine de la technologie?
    Si je regarde l'histoire de l'industrie, le cycle le plus court que j'ai constaté pour mettre en oeuvre une nouvelle technologie transformatrice est d'environ cinq ans, de la conception initiale jusqu'au début de la construction. On parle donc de sept ans ou plus à partir de l'idée initiale jusqu'à la mise sur pied d'une opération complète. C'est l'échéancier.
     Évidemment, le processus demandera beaucoup d'investissements et évidemment, il supposera que les décideurs prendront les bonnes décisions en ce qui concerne les approbations et les permis pour aller de l'avant avec ces nouvelles technologies, parce que chaque nouvelle technologie pose de nouveaux défis, et que de nouveaux éléments, attendus ou inattendus, apparaissent souvent.
    J'ai une question concernant l'utilisation de l'eau. L'eau qui provient de la rivière Athabasca est-elle traitée? S'agit-il d'eau brute qui entre simplement dans le procédé et qui est chauffée aux fins du processus d'extraction? Le savez-vous?
    Je ne crois pas qu'elle est traitée. Elle est utilisée à différentes fins. L'eau qui provient de la rivière Athabasca sert à l'extraction, mais elle est également utilisée à des fins industrielles ou d'exploitation minière.
    Si je comprends bien le procédé, aucun produit chimique n'est en réalité ajouté au procédé. Tout ce qui se retrouve dans les bassins de décantation, tous les métaux lourds, tout ce que nous voyons dans les bassins de décantation est présent à l'état naturel. Il a soit été pompé pendant le procédé... Il était présent à l'état naturel dans la rivière Athabasca ou il était présent à l'état naturel dans le sol.
    Est-ce vrai? Ajoute-t-on au procédé un solvant chimique, un diluant ou quelque chose de ce genre et dont nous devrions être informés?
    Toutes les technologies utilisent du solvant pour traiter le bitume à un moment donné du procédé. Tous les bassins de décantation contiennent donc des solvants. Par rapport aux acides naphténiques, les solvants sont facilement biodégradables. Ils représentent donc un enjeu environnemental à court terme, mais ils n'ont pas la même persistance dans l'environnement que les acides naphténiques.
    Pour ce qui est des autres produits chimiques qui sont ajoutés, certaines entreprises utilisent de l'hydroxyde de sodium ou soude caustique pour corriger le pH afin que l'eau soit moins acide, mais c'est un additif relativement sans danger. Une entreprise utilise un acide citrique qu'on trouve dans le jus d'orange. Il est donc facilement biodégradable.
    Certains additifs sont donc utilisés, mais en général, leurs effets sur l'environnement sont moins inquiétants que ceux des acides qui proviennent du bitume.
    Certains de ces composés, comme M. Gray l'a mentionné, sont biodégradables, mais leur biodégradation pose des défis intéressants dans les bassins de décantation. Nous pensons tous que ces bassins sont morts et qu'ils ne renferment rien, mais les micro-organismes existent partout, et ils existent dans ces bassins de décantation. On a remarqué qu'en ajoutant certains de ces composés, les micro-organismes présents dans ces bassins de décantation produisent des gaz pendant leur dégradation. Certains de ces gaz — comme le méthane, quand il commence à être produit dans les bassins de décantation — contribuent en réalité à la densification; les résidus se déposent donc plus rapidement. Cependant, certains bassins de décantation produisent du méthane et d'autres gaz.
    Nous devons passer à M. Watson, pour quatre minutes.
    Merci, monsieur le vice-président.
    Je remercie nos témoins de comparaître.
    J'ai peut-être manqué le chiffre parce que je prenais beaucoup de notes, mais j'aimerais revenir au nombre de barils d'eau par baril de bitume en production. Quel est le chiffre total encore et quel est le ratio d'eau douce par rapport à l'eau recyclée?
    La quantité totale d'eau est d'environ 12 ou 13 barils, comme l'indiquent certaines publications. De ce nombre, environ 80 à 90 p. 100 est de l'eau recyclée. Dans son dernier rapport sur la durabilité, Syncrude a indiqué que 88 p. 100 de l'eau utilisée était de l'eau recyclée.
    Alors si on prend les 12 ou 13 barils et qu'on recycle de 80 à 90 p. 100 de cette eau, on a encore besoin d'eau pour combler ce qui manque. Cette eau vient de la rivière Athabasca. Elle représente environ de 2 à 4 barils et demi.
(0915)
    Quatre et demi?
    Oui. Cela varie. L'écart actuel est grand. Si on examine certains des rapports de durabilité publiés récemment, on parle de 2, de 2,7 et de 3, mais le chiffre a atteint les 4,5 barils.
    D'accord. J'ai posé la question parce que j'essaie de faire coïncider l'idée du 90 p. 100 d'eau recyclée par baril avec l'idée qu'il faudrait compter jusqu'à 4 barils d'eau douce pour combler la différence. Je fais le calcul avec 1 000 barils, et ensuite 2 000 barils puis 3 000 barils, et je n'obtiens pas vraiment le même résultat. Je ne suis pas un grand mathématicien; je veux simplement savoir de quoi il en retourne.
    D'où proviennent ces chiffres, en passant? Parfois, on cite simplement des statistiques et après un bout de temps, elles représentent la vérité et les gens oublient d'où elles viennent.
    Elles viennent de l'Office national de l'énergie.
    Également, si vous revenez aux rapports de durabilité produits par chacun des promoteurs pétroliers, comme Shell, Syncrude et Suncor, vous pouvez calculer ce chiffre.
    Revenons à la remise en état pour quelques instants. Sommes-nous sur le point d'augmenter de manière significative le rythme de remise en état? Nous commençons à évaluer le premier projet d'envergure concernant la remise en état et le contenu du premier bassin de décantation est sur le point d'être récupéré. Pendant combien de décennies ce bassin a-t-il été utilisé avant que son contenu soit récupéré?
    Selon vous, à quoi ressemblera le rythme à l'avenir? Verrons-nous d'importants progrès en ce sens au cours des trois à cinq prochaines années? Combien d'années faut-il compter avant le début de la récupération du contenu d'un nouveau bassin de décantation? Sommes-nous sur le point d'améliorer ce rythme? D'après vous, est-ce que ce sera important ou s'il s'agira encore d'un processus à long terme?
    Le gouvernement de l'Alberta a récemment publié une directive pour tenter de donner une sorte d'impulsion réglementaire afin d'accélérer la récupération du contenu des bassins de décantation. À mon avis, il reste encore beaucoup de travail à accomplir du côté de la recherche à ce chapitre. Encore une fois, cela dépend de la façon dont nous voyons la remise en état des terrains. S'agit-il d'un lac de kettle? S'agit-il d'un retour à une forêt muskeg? À quoi ressemble cette remise en état?
    Le gouvernement de l'Alberta a donc donné une certaine impulsion réglementaire, mais je ne suis pas certaine de savoir comment cela se traduira.
    D'accord.
    Bien. Merci beaucoup, monsieur Watson.
    Je vous remercie beaucoup de vos exposés. C'était une excellente façon d'ouvrir nos audiences ici. Je crois que nous avons précisé beaucoup de choses dans nos esprits concernant les aspects technologiques.
    Je vous souhaite de connaître encore du succès dans vos travaux. Merci encore.

(0920)
    Nous sommes un peu pressés, alors je demande que nous reprenions maintenant.
    Pour la deuxième partie, nous accueillons Mary Griffiths, M. David Schindler, de l'Université de l'Alberta, et William Donahue, un chercheur indépendant en limnologie et biochimie.
    Chaque témoin aura 10 minutes pour faire son exposé et ensuite nous passerons aux questions, comme nous le faisons habituellement.
    Monsieur Donahue, on me dit que vous allez commencer. Sans plus tarder, je vous cède la parole.
    Je parlerai des modifications apportées à l'approvisionnement en eau de la rivière Athabasca, plus particulièrement dans le bassin au complet, et des répercussions générales sur l'aménagement des eaux.
    Je crois que je vais commencer par un résumé de base sur ce qu'est la science. Je ne sais pas si on vous a déjà parlé de ce qu'est la science, mais selon certains, la science consiste à formuler et à tester des hypothèses fondées sur des observations. En ce sens, les expériences sont importantes ou applicables, mais elles ont pour fonction de vérifier les observations et d'imposer des conditions contrôlées. Selon Richard Feynman, physicien récipiendaire d'un prix Nobel et écrivain à succès, de tous les sujets, la science seule renferme en elle-même la leçon du danger de croire à l'infaillibilité des plus grands professeurs de la génération précédente.
    D'ailleurs, je peux également définir la science d'une autre façon. La science est la croyance en l'ignorance des experts. Je qualifierais cela en disant que c'est la croyance des experts en l'ignorance des experts.
    Généralement, je dirais que la science est l'observation systématique de conditions et d'événements naturels dans le but de découvrir des faits les concernant et à partir desquels des explications sont formulées, et ensuite de poser des questions critiques dirigées, et de tenter d'y répondre, questions qui se fondent sur le désaccord évident entre le fait observé et les explications que nous avons formulées au préalable. Autrement dit, la science est un processus par lequel nous apprenons, et elle implique des essais continuels pour réfuter ce que nous croyons savoir, en posant des questions cruciales et en cherchant à y répondre de manière rationnelle.
    La prochaine diapositive s'intitule « Qu'est-ce qui n'est pas de la science? » Ce qui n'est pas de la science, c'est tout ce qui n'implique pas la collecte de données et la tentative de formuler des explications générales sur ces données ou l'examen subséquent de telles explications préalables au moyen d'autres observations et de la formulation d'hypothèses. Ou bien ce qui n'est pas de la science, c'est tout ce qui est incorrect du point de vue scientifique et qui est quand même présenté comme irréfutable. Je dirais que le deuxième aspect représente ce que nous voyons beaucoup dans nos échanges aujourd'hui sur le plan de la science de l'environnement.
    Je passe maintenant à d'autres sujets.
    Voici le tableau 1 du mémoire que je vous ai remis. Essentiellement, il montre les variations de température et de précipitations dans le Nord de l'Alberta. La plupart des informations figurent en partie dans un document que M. Schindler et moi-même avons publié en 2006. Le message général, c'est que dans la plupart des centres du Nord de l'Alberta, ainsi que dans bon nombre des provinces de l'Ouest, on a remarqué des augmentations de température assez importantes depuis 1970 environ. J'ai choisi 1970 pour plusieurs raisons, que j'explique dans le mémoire.
    En général, la tendance montre des augmentations importantes de température, des diminutions importantes des précipitations totales et généralement aucun changement ou des diminutions dans les chutes de pluie selon l'endroit où on se trouve. Si l'approvisionnement en eau vous intéresse, l'accroissement des températures et la diminution des précipitations sont fondamentales à ce chapitre.
    La prochaine diapositive montre les variations dans l'accumulation de neige en hiver dans le Nord de l'Alberta. Encore une fois, ces tendances sont les mêmes dans les Prairies. En Alberta, nous vivons dans l'ombre pluviométrique des Rocheuses, et au bout du compte, une grande quantité de notre approvisionnement en eau provient du manteau neigeux de printemps, dont nous dépendons grandement. Comme vous pouvez le voir ici, le rouge indique les changements dans le nombre de jours par année où il y a de la neige au sol et les changements dans la profondeur absolue du niveau maximum d'accumulation de neige. La tendance générale, je le répète, c'est que depuis 1970, la plupart des endroits ont connu une diminution importante de la période au cours de l'hiver où il y a de la neige au sol et la profondeur totale de l'accumulation de neige. Encore une fois, si vous misez sur l'accumulation de neige en hiver pour produire beaucoup d'eau à la suite de la fonte des neiges au printemps et tous les écoulements et processus écologiques qui se produisent dans une rivière lorsque les accumulations de neige diminuent, vous pouvez vous attendre à des effets écologiques assez importants dans les eaux de surface.
    Ce que je montre ici est le débit d'eau estival de la rivière Athabasca à Fort McMurray. C'est le graphique 1 du mémoire.
(0925)
    En général, comme vous pouvez le constater, il y a passablement de variations d'une année à l'autre, mais au bout du compte, la tendance depuis environ 1970 indique une diminution assez importante. Les Prairies ont connu une année humide en 1998. Essentiellement, d'une année à l'autre, on ne sait pas vraiment s'il y aura beaucoup d'eau ou très peu, mais comme je l'ai mentionné, la tendance est généralement à la baisse. Cette étude des tendances à long terme est probablement la première chose qu'on devrait essayer d'utiliser afin d'éclairer un certain plan qui s'appuie sur l'approvisionnement en eau.
    Mme Griffiths parlera de la région de Cold Lake et des eaux souterraines, mais j'ai simplement pensé que je glisserais ceci dans mon exposé; ce n'est pas dans mon mémoire. Il s'agit de la rivière Beaver près de Cold Lake. C'est la rivière la plus importante dans cette partie du monde et c'est un bassin qui est indépendant dans la région du centre-est de l'Alberta.
    Comme vous pouvez encore le constater, les variations du débit total de la rivière Beaver année après année sont importantes, mais essentiellement, au cours des 40 à 50 dernières années, la baisse a été très importante. Cela se voit beaucoup dans les lacs et les autres eaux de surface de la région. Beaucoup de lacs de la région ont un niveau considérablement bas.
    Un autre élément que j'ai présenté dans mon mémoire, c'est ce qui se passe dans le bassin de la rivière Athabasca au niveau des sous-bassins. Ce que j'ai fait, et je l'explique dans le mémoire, c'est de prendre une série de points de prélèvement sur la rivière Athabasca et d'examiner les changements dans le débit de l'eau entre ces points. Quels sont les ajouts? Quelles sont les différences dans le débit à un point en aval par rapport à un point en amont? Cela se fonde sur l'hypothèse que ce changement dans l'eau correspond à l'eau qui est ajoutée à partir du bassin entre ces deux points.
    Comme vous pouvez le voir, si on examine la rivière Sunwapta, l'affluent de la rivière Athabasca qui reçoit une certaine quantité d'eau s'écoulant des glaciers dans les Rocheuses, depuis le début des années 1970 jusqu'au milieu des années 1990, on constate en fait une augmentation de la quantité d'eau provenant du bassin hydrographique. Cela est causé par une augmentation de la fonte glacière.
    À mesure que l'on descend vers Jasper, le débit n'a pas vraiment changé. Plus on descend dans le bassin et plus on s'éloigne des montagnes, plus la baisse dans la quantité d'eau qui provient du bassin est importante. Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas vraiment la géographie du bassin de la rivière Athabasca, Hinton est situé à environ 80 kilomètres à l'est de Jasper, juste à l'extérieur des montagnes dans les contreforts du bassin de la rivière Athabasca. Le bassin situé en aval de Hinton comprend 94 p. 100 de la surface totale du bassin.
    Cette analyse montre que pour tous les points entre Hinton et Fort McMurray, la quantité d'eau provenant du bassin et qui se jette dans la rivière a diminué d'environ 50 p. 100 depuis le début des années 1970 jusqu'aux années 2001 à 2005.
    Je viens de brosser un tableau de la situation qui prévalait et de la façon dont elle a évolué quant au changement climatique et de l'approvisionnement en eau. Si on se tourne vers l'avenir, des projets sur le changement climatique sont en cours à l'Université de Victoria. L'université a créé l'un des principaux modèles de circulation mondiale qui prédisent les changements de température à venir dans la plupart des régions du Canada. Ce que j'ai fait ici, c'est résumer les résultats de 10 modèles régionaux pour les provinces de l'Ouest. Il indique l'ampleur des changements de température prévus en fonction de l'un de ces modèles. Comme vous pouvez le constater, on s'attend à ce qu'au XXIe siècle, la température dans les provinces de l'Ouest augmentera de 6,5 degrés en moyenne.
    Le graphique suivant montre ce que cela signifie sur le plan du changement climatique. Ça ressemble à peu près à la différence de climat entre Calgary et Fort Smith dans les Territoires du Nord-Ouest. Donc, si nous atteignons cette ampleur de changement de température, nous pouvons nous attendre à ce que le climat à Calgary se déplace vers le nord à Fort Smith.
    Qu'est-ce que cela signifie sur le plan de l'approvisionnement en eau? J'ai préparé certains modèles. Je n'ai pas inclus beaucoup de détails, mais j'ai créé certains modèles qui ont prédit le débit des rivières et l'apport en eau, en fonction uniquement des variables influant sur le climat, comme la température, l'accumulation de neige et l'évaporation. En ce sens, j'ai retranché beaucoup d'autres renseignements nécessaires à d'autres modélisateurs et qui sont beaucoup plus détaillés, simplement parce qu'il y a un manque lamentable de données dans ce domaine, en ce qui concerne les renseignements hydrogéologiques, les types de sédiments, la couverture végétale et les mesures détaillées de l'évaporation. Beaucoup des modèles sur l'eau qui existent sont produits à la suite de recherches intensives à très petite échelle sur des bassins hydrographiques dont la taille est de moins de un hectare. Donc, le fait d'essayer d'amplifier ces résultats à une superficie qui équivaut à des dizaines de milliers de kilomètres carrés est impossible pour l'instant.
(0930)
    À partir de mes modèles, j'ai examiné une série de bassins hydrographiques dans le Nord-Est de l'Alberta dont la superficie variait de 300 kilomètres carrés à 30 000 kilomètres carrés environ. Pour essayer de répliquer ce qui est arrivé dans le passé quant au débit d'eau, le modèle prévoit environ 75 p. 100 de la variation à partir de données historiques; il réplique donc de manière assez précise ce qui est arrivé dans le passé.
    J'ai ensuite modifié légèrement le modèle afin de créer des scénarios montrant des augmentations de trois et de six degrés Celsius et j'ai examiné les incidences qu'elles auraient sur l'approvisionnement en eau. En bleu, ce sont les changements qui sont prévus à la suite d'une augmentation de trois degrés Celsius et en rouge, ce sont les changements à la suite d'une augmentation de six degrés Celsius.
    En moyenne, avec une augmentation de trois degrés Celsius — et le résultat comprend toutes les années et tous les bassins hydrographiques —, le modèle laisse entrevoir une baisse prévue de 15 p. 100 dans la quantité d'eau provenant des bassins situés dans cette région du Nord-Est de l'Alberta entre avril et octobre.
    Dans le cas d'une augmentation de six degrés, la moyenne était de 39 p. 100. Les chiffres sous chacune des barres représentent le pire scénario, la pire année, parmi les données que j'ai utilisées pour chacun des bassins. Il y aura des années humides et des années sèches, comme il y en a eu dans le passé. Cependant, ce sont en réalité les années sèches qui inquiéteront probablement la plupart des gens. Les chiffres sous chacune des barres représentent le pire scénario pour les années sèches dans le cas des changements de trois et de six degrés Celsius.
    Comme vous pouvez le voir, les pourcentages varient d'un peu moins de 40 p. 100 à 70 p. 100 environ, selon le bassin, quant à l'augmentation de trois degrés. Dans le cas de l'augmentation de six degrés, au cours des années sèches la situation était très très critique, les diminutions se situant entre 50 et 100 p. 100 selon le bassin. Dans la plupart des cas, on parle d'une baisse de 60 à 70 p. 100.
    Si vous n'examinez pas les tendances évolutives du passé en ce qui concerne l'eau lorsque vous formulez vos plans de gestion, à savoir les éléments sur lesquels vous vous appuierez pour obtenir de l'eau et le genre de développement que vous ferez et qui dépendra considérablement sur l'eau, et que vous ne vous pencherez pas sur la possibilité future que le changement climatique aura des incidences sérieuses sur la quantité d'eau dans cette partie du monde, alors vous courez le risque de voir des effets assez catastrophiques sur le plan économique à la suite des répercussions potentiellement catastrophiques du changement climatique sur l'écologie.
    Je suis à la diapositive suivante. Dans mon exposé, j'ai parlé un peu du cadre de gestion du cours inférieur de la rivière Athabasca. Il y a trois stades: vert, jaune et rouge. Le message que je voulais transmettre, c'était que dans sa forme actuelle, le cadre n'est pas fondé sur une science de l'observation. Il ne tient pas compte des tendances du passé. Essentiellement, il classe tous les débits historiques du plus élevé au plus bas, et il examine ensuite les changements dans cette tendance. Il n'examine pas les changements sur une période donnée et il pose certaines hypothèses selon lesquelles si un changement considérable survient dans le débit classé, cela représente une répercussion écologique.
    Essentiellement, ils ont conçu un modèle qui tient compte de manière plus précise de la géométrie du lit de la rivière que toute autre chose. Le modèle ne tient pas compte des processus écologiques qui dépendent du débit, comme le renoyage périodique des terres humides suspendues dans le bassin, le transport des sédiments, l'affouillement, les répercussions sur les pêches, etc. Ils ont décidé au hasard que dans 90 p. 100 des cas, il n'y aura aucune répercussion écologique et qu'il ne sera pas nécessaire de limiter les extractions de l'eau; dans 5 p. 100 des cas environ, les limites d'extraction seront modérées; et dans 5 p. 100 des cas, historiquement, les limites d'extraction seront plus strictes sous les bonnes conditions.
    Je suis maintenant à la prochaine diapositive.
    Ces graphiques figurent dans mon rapport. Le graphique du haut montre essentiellement les tendances dans les débits de septembre de l'Athabasca. Il vise à illustrer où ils sont allés. Ça varie, mais depuis 1970 environ, la tendance est à la baisse, comme c'est indiqué. Sur la diapositive du bas, vous pouvez voir que je les ai tous classés. Conformément au cadre, il y aurait une conclusion arbitraire selon laquelle dans 5 p. 100 des cas, le débit est rouge, dans 5 p. 100 des cas, il est jaune, et le reste du temps il est vert. Le vert représente de bonnes conditions écologiques.
(0935)
    Cela ne tient pas compte du fait que dans 50 p. 100 des cas au cours des 10 dernières années, il aurait été jaune ou rouge. Si nous examinons l'évolution de l'approvisionnement futur en eau, si l'approvisionnement en eau diminue, la fréquence des débits en jaune et en rouge augmentera considérablement.
    Un article sous presse rédigé par l'Université de l'Alberta soutient que si le cadre de gestion de l'eau actuel avait été mis en place en 2000, les débits de la rivière Athabasca auraient été en jaune ou en rouge pendant 40 semaines tout au plus par année et en rouge pendant au moins 20 semaines par année.
    Si le changement climatique cause une diminution de 10 p. 100 dans le débit, cela se traduira par une augmentation importante des conditions contraignantes liées au débit pour l'industrie pétrolière. Selon moi, ces 10 p. 100 sont assez conservateurs et représentent un scénario optimiste, étant donné qu'on constate une baisse de 50 p. 100 provenant de l'aval du bassin au cours des 30 dernières années, et que la croissance prévue pour l'extraction de sables bitumineux devrait augmenter à 2,3 millions de barils par jour d'ici 2020. De trois choses l'une: l'industrie devra trouver un large entrepôt autre que le cours d'eau, ce qui représentera environ 15 p. 100 de l'approvisionnement annuel total en eau; elle devra réduire le volume d'eau qu'elle extrait de la rivière à environ 50 p. 100 au-dessous des niveaux actuellement autorisés; ou elle devra trouver une façon de réduire l'utilisation d'eau à moins de 0,2 m3 d'eau par baril de pétrole, ce qui est sensiblement moins que ce qu'elle utilise actuellement.
    Essentiellement, mon message c'est que nous sommes sur une ligne de collision entre la diminution de l'approvisionnement en eau et les demandes en eau qui augmentent rapidement. Dave Sauchyn et d'autres personnes à l'Université de Regina ont créé certains modèles de climat pour les provinces des Prairies. Dans la partie Nord-Est de l'Alberta, ils prévoient un changement de conditions humides semi-humides à sèches semi-humides ou même à semi-arides. La quantité de précipitations entre le Nord et le Sud de l'Alberta est maintenant approximativement la même et l'est depuis les 30 ou 40 dernières années. La différence, c'est que le climat du Sud est beaucoup plus chaud et que le solde net de l'eau signifie qu'il y a moins d'eau libre et que le climat est plus aride. Dans le triangle de Palliser au Sud-Est de l'Alberta et au Sud-Ouest de la Saskatchewan, si on augmente l'évaporation et la température dans le Nord, il y aura moins d'eau libre, et cela signifie beaucoup moins de superficie disponible à des fins écologiques et industrielles.
    C'est ce qui conclut mon exposé.
(0940)
    Merci, monsieur Donahue.
    Monsieur Schindler.
    Je vais vous montrer des photos et des cartes qui illustrent l'information qui figure dans le mémoire que vous avez. J'y explique la raison de notre étude.
    Ceci est un suintement naturel de sables bitumineux; on en trouve plusieurs le long de la rivière Athabasca. Évidemment, l'industrie est d'avis que tous les polluants présents dans la rivière proviennent de ces suintements naturels. Selon moi, en tant que personne dont le travail porte constamment sur les bassins versants et les eaux, il est inconcevable que le fait de passer d'une empreinte comme celle-ci en 1974 à une empreinte à la même échelle en 2008 n'entraînerait pas beaucoup de déversements de produits chimiques dans la rivière provenant du bassin versant. Nous avons entrepris d'étudier ce sujet.
    Dans mon mémoire, j'ai souligné les lacunes du Programme de surveillance aquatique régionale. Ce que nous avons fait plutôt, c'était de sélectionner 18 sites le long de la rivière Athabasca, partant en amont de Fort McMurray jusqu'au bout de la rivière, et ensuite quelques-uns, comme vous le constaterez, autour de Fort Chipewyan, et de les superposer sur une carte géologique. La zone en blanc au centre est la formation de McMurray, là où se concentre la grande partie de l'exploitation de sables bitumineux. Nous nous sommes également rendus à chacun des affluents importants le long de la rivière et nous avons prélevé des échantillons en amont de la formation de McMurray, dans la formation de McMurray, mais en amont de l'exploitation de sables bitumineux, et à l'embouchure de la rivière, en aval de l'activité d'exploitation. Nous avions quelques cours d'eau de référence et six cours d'eau qui coulent dans des régions où se trouvent des exploitations.
    Je vais simplement les passer en revue pour vous montrer une tendance générale. Ils sont dans le mémoire.
    Les barres noires représentent les débits hivernaux et les barres blanches, les débits estivaux. En général, sur cette diapositive et les suivantes, vous constaterez que les sables bitumineux n'ont pas vraiment beaucoup de répercussions au cours de l'hiver. Si on part de Fort McMurray au bas du diagramme jusqu'à Fort Chipewyan en haut, les petits panneaux latéraux représentent les divers affluents. Cependant, si on regarde les panneaux indiquant les données pour l'été, au cours de la période où il n'y a pas de glace sur la rivière, vous verrez des répercussions importantes, dans ce cas-ci, sur les hydrocarbures aromatiques polycycliques dissous dans la rivière. Nous avons choisi d'étudier ce groupe de composés parce qu'il renfermait plusieurs agents cancérogènes connus qui présentaient des taux élevés de bitume et dont les taux avaient aussi été élevés lors d'études antérieures, comme le déversement du Exxon Valdez et le tristement célèbre déversement du lac Wabamun. Je vais vous montrer ces graphiques rapidement, mais recherchez la régularité dans la tendance.
    L'aluminium n'est pas nécessairement un métal très toxique, mais comme l'indiquent les lignes rouges, les taux de la plupart des échantillons sont supérieurs à ceux figurant dans les lignes directrices du Conseil canadien des ministres de l'environnement. Encore une fois, vous remarquerez que les niveaux augmentent considérablement en aval, lorsqu'on arrive dans la région des sables bitumineux en été, et non en hiver.
    L'arsenic présente sensiblement la même tendance, avec encore un doublement en aval des exploitations au cours de l'été. Quant au plomb, encore une fois, plusieurs des valeurs pour l'été dépassaient celles figurant dans les lignes directrices du CCME. Pour ce qui est du mercure, il y en a très peu en hiver, mais remarquez l'augmentation à mesure qu'on approche des sables bitumineux et au-delà pendant l'été.
    L'uranium est un des métaux lourds qui suscite beaucoup d'inquiétudes. Dans ce cas, les sables bitumineux n'influent pas sur l'uranium en hiver ou en été. La tendance est assez régulière et indique que la source est en grande partie en amont.
    Il en va de même pour la cadmium. Il est à noter que les taux de cadmium, particulièrement l'été, sont de loin supérieurs aux taux figurant dans les lignes directrices du CCME, mais encore une fois, il n'y a aucune preuve manifeste ici d'une contribution des sables bitumineux.
(0945)
    Il y a une différence entre l'hiver et l'été parce que la glace recouvre la rivière pendant environ quatre mois — et cet hiver pendant pratiquement cinq mois — au cours de la saison hivernale. Les particules qui se déposent dans la rivière ont donc tendance à s'accumuler sur la glace.
    L'apport par voie aérienne a été très important, ce qui nous a surpris. Voici une couche de neige sur la rivière Muskeg. Ce n'est pas la pire que nous avons constatée, mais vous pouvez voir les couches noires et la surface noire sur la neige à la suite de la contamination atmosphérique.
    À chacun de ces sites, les mêmes sites qui figuraient sur une diapositive montrée plus tôt, nous avons pris un échantillon de l'accumulation totale de neige, nous l'avons fait fondre et nous avons ensuite filtré 900 millilitres de chacune des accumulations. Les filtres étaient tous blancs lorsque nous avons commencé. Ils sont très fins; leurs pores sont d'environ un demi-micromètre. Les chiffres en jaune représentent les distances entre les sites. Dans ce cas, Fort McMurray est à gauche, en se dirigeant en aval vers Fort Chipewyan à droite, et les petites barres sur le côté représentent les six affluents principaux. Vous pouvez donc constater, visuellement même, une quantité élevée de particules suspendues dans la neige dans la région sur une distance importante autour des usines d'exploitation de sables asphaltiques, mais il est à noter qu'elles diminuent de beaucoup en aval.
    Les prochains graphiques indiquent encore une fois l'HAP total. Dans ce cas, nous avons analysé l'hydrocarbure aromatique polycyclique présent dans les deux filtres, que vous avez vus, et dans les éléments filtrés, la partie dissoute. La partie dissoute est en rouge. Les particules présentes dans le filtre sont en noir. La concentration totale est indiquée à la fin de la barre. Encore une fois, vous pouvez constater la contribution importante de la contamination atmosphérique aux alentours des usines d'exploitation de sables asphaltiques et qui diminue en aval, avec Fort Chipewyan en haut, et évidemment presque rien en amont de Fort McMurray, en bas.
    Une fois de plus, la tendance est très similaire dans le cas de l'aluminium, sauf qu'il se retrouve surtout sous forme de particules.
    Dans le cas de l'arsenic, la tendance est la même. Il s'agit clairement d'une contribution par voie aérienne des usines d'exploitation de sables asphaltiques. La tendance pour le plomb est à peu près la même.
    Tous les diagrammes indiquent les quantités maximales selon les lignes directrice du CCME.
    Dans le cas du mercure, l'apport de mercure par voie aérienne est énorme, surtout dans la fraction des particules. Il est à noter que ces valeurs sont très basses. On les compte en partie par billions. Mais ce n'est pas là où le mercure pose un problème. Le mercure est bioaccumulable dans les chaînes alimentaires et ses concentrations peuvent être jusqu'à un million de fois plus grandes. Des concentrations aussi élevées se sont déjà traduites par de graves problèmes de contamination dans d'autres systèmes. Encore une fois, cela indique que du mercure vient de l'amont, mais l'apport le plus important vient de l'exploitation minière qui rejette des charges de mercure dans l'atmosphère, charges qui se retrouvent ensuite dans l'accumulation de neige.
    Le cadmium ne contribue pas à la contamination. La seule contribution se situe juste sous le point de rejet pour Fort McMurray, et elle est peut-être le résultat d'une certaine influence urbaine. Évidemment, le cadmium se retrouve dans diverses pièces automobiles, etc. Alors cela n'est pas trop surprenant. Encore une fois, il est à noter que la plupart de ces valeurs respectent les lignes directrices du CCME ou qu'elles sont supérieures pour ce qui est du cadmium en partie par milliards.
    Il y a de plus en plus de preuves selon lesquelles les concentrations d'hydrocarbures aromatiques polycycliques, particulièrement dans leurs formes alcaloïdes, qui sont très répandues dans cette rivière, entraînent des malformations chez les poissons. Je vous ai donné deux références. J'aurais pu vous en donner une douzaine. Les preuves sont claires: les oeufs et les embryons qui sont en contact, surtout, avec l'HAP sous forme de particules tout juste à la surface des sédiments présentent des malformations, ce qui correspond évidemment à l'endroit où les oeufs sont déposés. Il s'agit d'une étude gouvernementale dans le cadre de l'initiative sur l'écosystème des rivières du Nord, accompagnée de certaines photos des malformations.
(0950)
    L'étude indique également qu'il y avait des malformations dans la formation d'Athabasca en amont des exploitations, mais que les incidences augmentaient en aval des exploitations, ce qui indique que les particules provenant des exploitations ont une influence: elles sont responsables d'au plus 95 p. 100 des mortalités embryonnaires et de l'incidence élevée des malformations chez les embryons qui ont survécu. Le CCME en tient compte dans ses lignes directrices provisoires sur la qualité des sédiments. Toutefois, cette même étude indique que le Programme de surveillance aquatique régional et le Programme du delta des rivières de la Paix et Athabasca ont obtenu des incidences relativement élevées lors de la mesure de ces mêmes composés, incidences qui étaient supérieures à celles indiquées dans les lignes directrices provisoires du CCME sur la qualité des sédiments.
    Je suis certain que vous avez entendu parler hier de la grande inquiétude à Fort Chipewyan: certains des taux de cancer relevés dans la communauté sont attribuables à certains des composés, qui sont, du moins en partie, présents en raison des exploitations minières.
    Nous avons trouvé de grands brochets remplis de mercure. Je ne crois pas que l'eau devrait être le seul élément central de ce programme. Si on examine l'ensemble des problèmes associés aux sables bitumineux, il faut clairement accorder de l'importance à ce programme. Vous avez beaucoup entendu parler des pratiques in situ et je crois qu'elles ont de grandes répercussions sur l'eau. Elles ont déjà de grandes répercussions sur la faune. Le coin nord-ouest de Fort McMurray sera exploité par Opti-Nexen, et c'est le genre d'exploitation intense qui fera partie de ces pratiques in situ. La forte concentration de plateformes d'exploitation, de routes reliées entre elles et de pipelines est également très inhospitalière à la faune. Presque tout le corridor est altéré. Mais l'exploitation est aussi suffisamment vaste pour influer de manière importante sur l'approvisionnement en eau douce, tant en ce qui concerne les eaux de surface que les eaux souterraines.
    À mon avis, les faibles débits hivernaux dans l'Athabasca sont encore plus inquiétants que le débit moyen. L'industrie se fait un plaisir de dire qu'elle utilise seulement 2 p. 100 du débit moyen de l'Athabasca. Ce fait n'est pas pertinent. Nous savons que l'Athabasca contient de grandes quantités d'eau en été. En hiver, les débits sont très faibles et diminuent très rapidement, et c'est probablement l'aspect le plus sensible de la rivière. À ce moment-ci, l'industrie utilise 7 ou 8 p. 100 du débit de l'Athabasca. Les débits diminuent et l'industrie augmente. Vous pouvez voir où tout cela s'en va.
    C'est la fin de mon exposé.
    Merci, monsieur Schindler.
    Madame Mary Griffiths.
    Oui, c'est exact.
    Je vais commencer tout de suite. Je suis heureuse de l'occasion qui m'est donnée de parler devant le comité, et je suis ici aujourd'hui à titre personnel.
    J'aimerais commencer par mes messages clés. Vous savez que l'Athabasca doit produire beaucoup d'eau pour les sables bitumineux, mais je veux examiner non seulement l'Athabasca mais aussi l'influence de l'exploitation des sables bitumineux sur la quantité d'eau souterraine et sa qualité. Je crois que nous verrons beaucoup plus de répercussions à l'avenir en raison des effets cumulatifs de nombreux projets. Nous ne voyons pas encore vraiment les répercussions auxquelles nous pouvons nous attendre, alors mon vrai message c'est qu'il nous faut beaucoup plus d'informations et un processus afin d'appliquer une science éclairée pour faire en sorte que nous puissions exercer une gestion durable des ressources fournies par les eaux souterraines.
    Nous pouvons voir ce qui se produit dans la rivière. Nous recevons beaucoup d'avertissements. La rivière fait l'objet de nombreuses recherches, mais ce qui m'inquiète le plus, ce sont les eaux souterraines, qu'on ne voit pas, et qu'on a tendance à oublier.
    En guise de contexte, je crois qu'il est parfois utile d'avoir des chiffres absolus afin de savoir de quoi nous parlons. Nous savons que le volume d'eau autorisé provenant de la rivière Athabasca pour l'exploitation des sables bitumineux est de loin la quantité la plus importante: 550 millions de mètres cubes ont été autorisés à la fin de 2007. Les allocations dépassent déjà l'utilisation actuelle; bon nombre des projets ont reçu leurs allocations, mais ils ne sont pas encore en opération. Par conséquent, nous ne voyons pas encore les répercussions sur l'environnement. En 2007, le volume d'eau qui a été utilisé en réalité n'était seulement que d'environ 130 millions de mètres cubes, dont les trois-quarts environ provenaient de la rivière Athabasca, 20 p. 100 de l'écoulement des surfaces et 5 p. 100 des eaux souterraines non salines. Cette eau est destinée aux activités d'exploitation. Comme vous pouvez le constater, l'eau ne provient pas uniquement de la rivière Athabasca.
    Je crois qu'il est utile de se servir d'une comparaison pour se faire une idée de ce que représentent 129 millions de mètres cubes d'eau. La ville d'Edmonton, qui approvisionne une population d'environ un million de personnes, y compris les personnes à la périphérie de la ville, traite chaque année à peu près 130 millions de mètres cubes d'eau, ce qui correspond environ à la quantité utilisée en 2007 pour l'exploitation des sables bitumineux. Mais dans le cas de la ville, l'eau se rend à la station d'épuration des eaux usées et seulement environ 10 p. 100 ou moins de l'eau est en réalité consommée; le reste finit par retourner à la rivière. Évidemment, ce n'est pas le cas pour l'exploitation des sables bitumineux, parce que toute l'eau est consommée. L'eau consommée est en fait déposée dans un bassin de décantation; elle ne retourne pas à la rivière, alors cela a des répercussions sur le débit de la rivière.
    Passons maintenant à l'eau utilisée pour les activités in situ. David vient de montrer une diapositive qui donne une idée des énormes répercussions que cela aura à l'avenir, parce qu'on se rendra compte que 80 p. 100 du bitume proviendra des activités in situ, et non de l'exploitation minière. En fait, plus de 90 p. 100 de la zone où se trouve le bitume est trop profonde pour être exploitée, et nous obtiendrons une grande partie du bitume à l'avenir des activités in situ en particulier.
    En 2007, le volume total d'eau utilisé in situ était de loin inférieur à celui utilisé pour l'exploitation minière. Si vous vous souvenez, l'exploitation minière utilisait 129 millions de mètres cubes d'eau; les activités in situ en ont utilisé 31 millions et la moitié de cette eau était de l'eau souterraine saline. Vous pensez peut-être que nous n'avons pas à nous préoccuper autant de l'eau souterraine saline, mais évidemment elle ne se renouvelle pas aussi rapidement, alors je crois que les entreprises vont commencer à s'inquiéter beaucoup des quantités disponibles. Aux yeux du public, évidemment, c'est l'eau souterraine non saline peu profonde qui est davantage un sujet de préoccupation. En 2007, neuf millions de mètres cubes d'eau souterraine non saline étaient déjà utilisés pour les activités in situ. Pour mettre les choses en perspective, un plus grand volume d'eau souterraine était utilisé pour les activités in situ par rapport au volume utilisé pour l'exploitation des sables bitumineux, même en 2007, et même si nous n'en sommes qu'aux étapes préliminaires de la production de bitume. Plus tard, une quantité beaucoup plus importante de bitume proviendra des activités in situ, mais en 2007 seulement, 40 p. 100 du bitume provenaient des activités in situ et 60 p. 100 provenaient de l'exploitation minière.
    Quelles seront donc les répercussions de l'exploitation minière sur la quantité d'eau souterraine? Le rabattement des eaux souterraines dans le cadre des projets in situ se produit pendant tout le projet, voire plusieurs décennies. Il aura des répercussions sur les aquifères non salins peu profonds et les eaux salines plus profondes. Certains projets ont utilisé de l'eau saline, certains utilisent des eaux souterraines non salines, certains utilisent des eaux de surface et certains utilisent une combinaison, mais la recharge d'eau souterraine est très lente. L'eau souterraine peut se déplacer très lentement, peut-être de 1 à 35 mètres par année, ou peut-être jusqu'à 130 mètres par année dans un aquifère situé au fond de canaux enfouis, que nous verrons plus tard.
(0955)
    Le drainage des terres humides peut avoir un impact sur la recharge des eaux souterraines. C'est un phénomène que nous avons observé abondamment sur les sites d'exploitation à ciel ouvert. La recharge peut être influencée par l'utilisation et par le débit de l'eau de surface. Naturellement, il existe un lien très étroit entre l'eau souterraine et les cours d'eau. Toute réduction de la quantité d'eau souterraine peut avoir un impact sur le volume d'eau dans la rivière.
    Je crois que le principal problème réside dans l'effet cumulatif du grand nombre de projets qui se recoupent. Quand une entreprise procède à une évaluation des impacts environnementaux, elle se tourne vers ses voisines immédiates et observe les impacts de leurs propres activités sur les entreprises qui se trouvent dans leur voisinage immédiat. Mais il n'existe pas de modèle régional permettant de déterminer les impacts cumulatifs globaux d'une multiplicité d'activités de mise en valeur et il est possible que l'utilisation de l'eau dans une région ait un impact sur la recharge ailleurs. Et n'oublions pas que les changements climatiques auront également un impact sur les précipitations et sur la recharge d'eau souterraine.
    Nous avons donc besoin de beaucoup plus d'information sur les aquifères dans les zones de projets in situ comme base de données essentielles. Nous ne disposons pas d'un bon volume de données sur une longue période de temps. Nous avons besoin de plus de surveillance et de modèles de surveillance des eaux de surface et des eaux souterraines, du rapport entre les eaux de surface et les eaux souterraines. De plus, nous ne devons pas perdre de vue que, dans cette région, il n'y a pas que ce que j'appelle des aquifères horizontaux. Les aquifères sont entrecoupés de canaux enfouis et la géologie de la région est beaucoup plus complexe que la topographie de la surface pourrait nous laisser croire en raison de la présence de ces canaux d'eau de fonte de glacier comblés par du sable et recouverts par la moraine, qui ne sont pas évidents à la surface.
     La diapositive suivante donne un aperçu général de la région au nord de Fort McMurray. Fort McMurray se situe là où le bleu touche le fond, au centre. C'est une région d'environ 130 kilomètres sur environ 145 kilomètres. La région de Cold Lake, plus au sud, n'est pas visible. Mais même dans ce secteur, on trouve une vingtaine de canaux enfouis et l'Alberta Geological Survey, prévoit qu'on en trouvera encore davantage dans la région située plus au sud.
    Par souci de brièveté, je ne m'étendrai pas davantage sur le sujet pour le moment mais je serais heureuse de répondre à toute question s'y rapportant.
    Je voudrais simplement mentionner que les impacts sur la quantité d'eau souterraine ne sont pas la seule source de préoccupation; la qualité de l'eau souterraine a de quoi inspirer de grandes inquiétudes également. Nous savons déjà que des effluents s'échappent de certains sites d'exploitation des sables bitumineux, et il y a le risque, et la réalité, de fuites d'eau contaminée des bassins de décantation. Mais dans les projets d'extraction in situ, le réchauffement des aquifères a entraîné dans plusieurs cas des éruptions, des ruptures de tubage et des fuites de vapeur. Dans la région de Cold Lake, où l'on utilise non pas la technique SAGD mais le procédé d'injection cyclique de vapeur, les températures sont beaucoup plus élevées. L'arsenic naturellement présent dans la formation est libéré et il tend à former un panache qui s'éloigne de la zone chauffée. Il en résulte des impacts sur la qualité de l'eau souterraine.
    Naturellement, on peut se féliciter de ce qu'il se fasse beaucoup de recyclage d'eau afin de réduire l'utilisation d'eau douce. Si on utilise de l'eau saline que l'on veut convertir en vapeur, il faut d'abord la traiter; si on recycle l'eau, il faut aussi la traiter avant de pouvoir la réutiliser et il faut se débarrasser des déchets issus de cette opération en les transportant vers un site d'enfouissement, en les stockant dans un puits profond. La manipulation de ces déchets crée ainsi des problèmes supplémentaires.
    Enfin, par souci de brièveté, je vais récapituler en disant que nous nous attendons à une augmentation de l'ampleur des opérations d'extraction. D'après les plus récentes prévisions de l'Association canadienne des producteurs pétroliers, la production devrait éventuellement atteindre les trois millions de barils de bitume par jour d'ici à 2020. C'est plus de deux fois et demie la quantité qui a été produite l'an dernier. On observera une augmentation considérable des impacts cumulatifs dans les régions d'exploitation à ciel ouvert et des impacts encore plus importants à long terme dans les régions d'extraction in situ; les activités pourraient même en venir à s'étendre jusque dans la région d'Edmonton si on construit autant d'usines de valorisation que ce qui était prévu à l'origine. Il pourrait également y avoir une importante ponction d'eau dans la rivière Saskatchewan Nord, qui est la rivière qui approvisionne Edmonton en eau.
    Il faut donc réduire l'utilisation d'eau dans tous les sites d'exploitation des sables bitumineux. Il faut améliorer la surveillance tant de la quantité que de la qualité de l'eau et il faut intensifier la recherche afin d'en arriver à mieux comprendre les impacts cumulatifs, y compris les interactions entre les eaux de surface et les eaux souterraines. J'ai la ferme conviction que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à cet égard.
    Merci.
(1000)
    Merci beaucoup, madame Griffiths.
    J'aimerais maintenant passer aux questions de la série de sept minutes, en commençant par M. Trudeau.
    Merci. Je vais tout de suite entrer dans le vif du sujet.
    Monsieur Donahue, vous avez parlé du cadre de gestion de l'eau. Vous en avez d'abord dit qu'il ne traitait que de la géologie et de la géométrie des rivières et qu'il laissait beaucoup de choses de côté. Vous avez poursuivi en disant que même s'il ne permet guère de comprendre à cause de ses limites, il n'en reste pas moins que la situation est grave, avec tous les liens entre différents facteurs. Est-ce qu'il vaut la peine, alors, d'essayer d'améliorer le cadre pour mieux comprendre certaines des données que vous nous avez présentées, si c'est pour apprendre que la situation est encore plus grave que nous le pensions? Quelles seraient les prochaines étapes?
(1005)
    Mes commentaires concernaient ce sur quoi le cadre semblait être basé et, en fin de compte, sur les conséquences. Quand je disais que la situation était grave, je voulais inciter à en revenir à la nature de la science. L'hypothèse sur laquelle a été basée la mise sur pied du cadre de gestion de l'eau était que, dans une perspective historique, la quantité d'eau dans la rivière restait inchangée. On conjecturait également qu'elle ne changerait pas dans l'avenir. Cinq pour cent du temps en moyenne, on peut s'attendre à une limitation d'un type ou d'un autre. Ce que je veux dire, c'est qu'en se contentant d'indiquer les années où l'on a observé les débits les plus faibles, de dire ce qu'il en est actuellement et d'essayer de voir les tendances qui pourraient se dégager... Se contenter tout simplement de recenser les années où l'on a observé les débits les plus faibles et les plus élevés, de remettre en contexte ce classement des débits, met sérieusement en péril le cadre dans sa forme même.
    Ce que j'ai à reprocher, c'est que comme on n'a consacré ni temps ni argent à essayer de connaître l'état des ressources en eau dont nous dépendons entièrement pour cette activité, nous n'avons maintenant qu'une connaissance très restreinte de ce qui s'est passé, de ce qui arrivera et de ce que seront les conséquences.
    Essentiellement, le message que je veux faire passer, c'est que le cadre, dans sa forme actuelle, n'est guère utile. Il est très arbitraire. Quant à savoir ce qu'il convient de faire, il existe certainement un grand besoin d'obtenir une quantité suffisante d'information pour qu'il soit possible d'en arriver à ce que je considérerais comme un cadre de gestion de l'eau valide. Il n'est pas possible de gérer l'eau ou les activités de mise en valeur dans le bassin qui dépend de l'eau si nous n'avons aucune idée de ce que seront les conséquences.
    Je sais que le gouvernement de l'Alberta s'est doté d'une technique de conception d'un cadre pour la gestion de l'eau axé sur les besoins en débit d'entrée pour le sud de l'Alberta et le bassin de la rivière Saskatchewan Sud. Il comprend des éléments tels que l'échantillonnage détaillé, des études détaillées sur des aspects tels que les effets du débit sur les communautés ripariennes et sur les pêches. Mais en fin de compte, il s'agit surtout de déterminer où se situent les seuils écologiques. Avec la diminution du débit, il faut s'attendre tôt ou tard à un impact écologique, que ce soit sur les terres humides suspendues ou sur les lacs qui se trouvent dans le bassin. Les crues périodiques de la rivière permettent une recharge de ces systèmes qui préservent la santé de ces vastes terres humides. À quel moment en arrivera-t-on au point où la rivière ne quittera plus son lit suffisamment fréquemment pour avoir un impact sur ces aspects? À quel stade de la diminution du débit les pêcheries commenceront-elles à s'effondrer pour cause de perte d'habitat ou d'interruption de la reproduction, et ainsi de suite? À quel stade l'hydrodynamique de la rivière, c'est-à-dire les changements au niveau du régime de sédimentation, sera-t-elle touchée à un point qu'il y aura une interruption de la chenalisation et des autres phénomènes nécessaires au bon état écologique de la rivière?
    Dans sa forme actuelle, le cadre ne tient compte d'aucun de ces aspects simplement parce que l'information est manquante. Ce que je voulais dire, au fond, c'est que si nous voulons brosser un tableau de la situation de la rivière, il faut se baser sur une compréhension de ce qui s'y produit et de ses éléments les plus délicats, faute de quoi on ne saurait espérer gérer convenablement la rivière.
    L'un des présentateurs précédents a posé des questions qui portaient en gros sur les 120 milliards de dollars de développement prévus et des dizaines de millions de dollars versés par l'industrie à titre de contribution à la recherche; le montant versé à titre de contribution à ce que j'appellerais de la bonne recherche environnementale n'est rien en comparaison de ce qui est affecté à la recherche industrielle. Au niveau provincial, les sommes consacrées à l'échantillonnage des eaux des lacs de l'Alberta ont été réduites de 70 à 80 p. 100 il y a quelques semaines à peine. Si on veut savoir ce qu'il advient d'une ressource qui constitue la base d'une industrie d'une valeur de plus de 100 milliards de dollars, on a intérêt à se mettre sérieusement à réfléchir et à débloquer les sommes requises.
    Vous dites que cela a été fait dans les régions du sud, mais pas dans le secteur des sables bitumineux.
    Oui, et simplement, d'après moi, parce qu'on n'en voyait rien et qu'on n'y pensait pas. On se dit que le nord est une région riche en eau, que l'eau y abonde, alors faut-il vraiment s'en soucier?
(1010)
    Merci.
    Monsieur Schindler, hier après-midi, nous avons entendu les exposés d'un certain nombre de chefs et d'aînés de la région de Fort Chipewyan. Ils ont relaté un certain nombre d'anecdotes concernant des cas de malformation chez les poissons et ils ont exprimé leurs préoccupations à cet égard. Manifestement, vos graphiques qui font état de parties par milliard et de parties par billion sont révélateurs des impacts de l'amplification de ces effets le long de la chaîne alimentaire.
    Vous avez mentionné l'impact sur les larves de la contamination et du bitume. J'aimerais en savoir davantage sur la transition entre ce que la sagesse autochtone nous enseigne sous forme d'anecdotes au sujet des malformations chez les poissons et la situation concrète dans le lac Athabasca.
    Nous avons prélevé des échantillons de poisson dans le cadre de l'étude, et ils sont en cours d'analyse au moment où nous nous parlons. Je n'ai encore reçu aucun résultat, mais je sais que certains poissons présentent des concentrations extrêmement fortes de mercure, et nous cherchons à savoir si les concentrations ont augmenté par rapport à des études antérieures.
    Nous disposons d'échantillons de poisson conservés à long terme ainsi que d'analyses des concentrations de mercure qui remontent à près de 20 ans maintenant. D'ici deux ou trois mois, nous devrions en savoir davantage à ce sujet.
    Monsieur Ouellet, s'il vous plaît.
    Je rappelle aux personnes présentes qu'il y a des interprètes et que des appareils sont à leur disposition à l'arrière s'ils en ont besoin pour suivre les débats d'une langue à l'autre.
    Vous avez intérêt à les utiliser, parce que je serai sans pitié. Je vais parler français.

[Français]

    Est-ce que vous me suivez en français?
    En premier lieu, docteure Griffiths, j'aimerais vous demander une chose. À la fin de votre présentation, vous dites que le rôle du gouvernement fédéral est important...

[Traduction]

    Je n'avais pas l'intention de parler en détail du rôle du gouvernement fédéral parce que je sais que quelqu'un d'autre en parlera demain. Je pense qu'il a un rôle à jouer via l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Et, naturellement, il a son mot à dire sur la qualité de l'eau par l'intermédiaire du ministère des Pêches et des Océans. Il pourra parfois intervenir en matière de substances toxiques avec la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, et, naturellement, il y a le rôle du fédéral à l'égard des premières nations et en matière d'eaux transfrontalières.
    Il y a bien des façons pour le gouvernement fédéral de jouer un rôle. Ce qui m'intéresse le plus, c'est le travail qu'ont fait Ressources naturelles Canada et un certain M. Alfonso Rivera en ce qui concerne la surveillance des aquifères d'eau souterraine. Un certain nombre d'entre eux ont été soumis à une surveillance à différents endroits au Canada. On prévoit en surveiller une trentaine. On en a repéré un dans la région des sables bitumineux de l'Athabasca, mais la surveillance n'est pas encore commencée.
    J'espère que le gouvernement fédéral et l'Alberta Geological Survey auront l'occasion de travailler ensemble. Cet organisme fait lui aussi de l'excellent travail, mais ses ressources sont limitées. Il y a encore beaucoup de travail à faire. S'il était possible de réunir des ressources supplémentaires pour faire de la surveillance et en apprendre davantage sur nos aquifères d'eau souterraine dans la région des sables bitumineux — pas seulement dans la région de l'Athabasca mais également dans celles de la rivière de la Paix et du lac Cold —, ce serait vraiment très précieux.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Ça veut donc dire que, d'après vous, le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer au niveau de la recherche. Il doit déterminer la façon de se comporter par rapport à l'eau.

[Traduction]

    Je pense que la recherche nous aidera à prendre des décisions plus éclairées. Pour le moment, je ne crois pas que nous ayons suffisamment d'information sur les impacts cumulatifs. Le nombre des projets approuvés augmente mais nous n'en savons pas suffisamment sur l'impact cumulatif d'une telle multiplication des projets, en particulier sur l'eau souterraine. Certaines entreprises qui poursuivent des activités d'extraction in situ au sud de Fort McMurray prévoyaient mettre au point un modèle pour établir un lien entre l'eau de surface et l'eau souterraine, mais les ressources n'ont jamais été débloquées pour que ce projet puisse se réaliser. Ils ont fait la première chose à faire, c'est-à-dire saisir à quel point c'était important, mais le projet n'a jamais démarré. Je me félicite néanmoins de ce que l'industrie ait effectivement reconnu l'existence d'un besoin à cet égard.
    Même dans les évaluations des impacts environnementaux, ils n'examinent pas les conséquences globales à l'échelle du bassin versant ou d'une région. Pourtant, cela doit être fait.
(1015)

[Français]

    Merci. Ce que vous nous dites est important.
    Docteur Schindler, voyez-vous vous aussi un rôle précis que le gouvernement fédéral pourrait jouer dans vos recherches?

[Traduction]

    En fait, la surveillance de la rivière a très bien démarré avec le gouvernement fédéral mais, avec les années, le fédéral a graduellement confié cette activité à la province de l'Alberta, laquelle en a à son tour confié une bonne partie à l'industrie elle-même. Par conséquent, nous avons une base de données qui n'est pas accessible aux scientifiques indépendants et qui manque totalement de transparence publique.
    Je pense que le gouvernement fédéral a un rôle très clair à jouer ne serait-ce qu'en raison de la proximité des activités d'extraction avec les Territoires du Nord-Ouest, lesquelles relèvent clairement de la compétence fédérale. Les immenses bassins de décantation et, comme je l'ai montré, l'apport de polluants dans la rivière Athabasca qui sont ensuite transportés par elle représentent clairement une menace pour les territoires. Si le rôle du gouvernement n'est pas évident en Alberta, il l'est certainement dans les Territoires du Nord-Ouest.
    Cela dit, les meilleurs spécialistes au Canada en matière de composés tels que les hydrocarbures aromatiques polycycliques que j'ai montrés sont au ministère fédéral de l'Environnement et au ministère des Pêches et des Océans. Je trouve plutôt scandaleux que ces personnes ne soient pas appelées à jouer un rôle dans le domaine qui nous occupe. La raison de leur absence est qu'ils n'ont pas de budget suffisant pour pouvoir fonctionner.

[Français]

    Merci.
    Monsieur Donahue, puis-je vous poser la même question?

[Traduction]

    Je dirais que oui, le gouvernement fédéral a effectivement un rôle à jouer. Les données climatiques, notamment, que j'ai présentées à titre d'exemple, provenaient d'Environnement Canada. Pendant que j'examinais les données climatiques, j'ai remarqué que, à partir des années 1970 jusqu'au milieu des années 1990 ou avant, il y avait dans nombre de ces sites de surveillance des données qui remontent à près d'un siècle; mais à partir du milieu des années 1990, en raison des compressions budgétaires — je ne peux que le supposer —, les données ont commencé à présenter des lacunes de plus en plus importantes.
    Prenons le cas de l'accumulation de neige sur une bonne partie de la prairie. On remarque que les données historiques ont été prélevées régulièrement et systématiquement et elles forment une magnifique base de données. À compter du milieu des années 1990, les données provenant d'un nombre de plus en plus grand de stations commencent à manquer. Ironiquement, dans certains cas, il y avait des données estivales sur l'accumulation de neige mais pas de données hivernales. Il n'y avait donc aucune donnée pour l'hiver et toute une série de zéros pour l'été. Est-ce ça qu'on appelle un programme de surveillance? C'est peut-être le cas, mais il est impossible d'en arriver à des conclusions valables si on ne dispose pas des données requises.
    Les données sont la monnaie d'échange des scientifiques. La surveillance systématique du climat et du débit d'une rivière, par exemple, n'a rien d'excitant. Elle représente un coût constant, et je suppose qu'il y a dans certains bureaux des petits comptables qui se demandent si ce genre d'activité nous en donne pour notre argent, de sorte que, dans bien des cas, c'est le premier poste qui tombe sous le couperet.
    J'ai présenté les données sur le débit des rivières. Vous remarquerez que les données concernant la rivière Sunwapta commencent à manquer à partir des années 1995-1996. Là encore, la raison en est que la station a été fermée. C'était la seule station qui nous procurait une bonne quantité de données sur l'eau de fonte des glaciers des Rocheuses. Après 20 ou 30 ans de collecte de données, il devient possible de dégager des tendances, et les données prennent de plus en plus de valeur. Si on met fin à l'apport de données, c'est la disette à brève échéance. Cette station a été remise en service il y a deux ans, je crois.
    Il vient un moment où toutes ces données à long terme acquièrent une valeur considérable. Malheureusement, depuis 10 ou 15 ans, les ensembles de données se font de plus en plus épars. Ma recommandation à cet égard est des plus simples.
    En ce qui concerne le reste, la capacité de recherche sur l'eau douce au ministère des Pêches et des Océans et au ministère de l'Environnement a pratiquement été taillée en pièces. Et pourquoi cela? Je suppose que c'est une question de budget, mais je ne peux l'affirmer avec certitude.
(1020)
    Je vous remercie beaucoup. Je suis sûr qu'il y aura d'autres questions.
    Nous entendrons maintenant Mme Duncan, pendant sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous les trois du temps que vous nous consacrez. Je suis sûre que M. Schindler préférerait être sur le terrain. Nous vous savons gré d'avoir plutôt pris le temps de comparaître devant nous.
    Monsieur Schindler, sans vouloir blesser votre incroyable modestie, vous êtes un écologiste de réputation internationale. C'est un privilège d'avoir une personne comme vous à l'Université de l'Alberta.
    Nous avons entendu dire plus tôt, à l'occasion des exposés de la partie technique, que le centre d'innovation se voit accorder des dizaines de millions de dollars. Est-ce que vous et les scientifiques qui travaillent avec vous obtenez des sommes semblables du gouvernement fédéral et de l'industrie pour examiner les impacts écologiques de l'exploitation des sables bitumineux?
    Non. Depuis 20 ans, je n'ai pas vraiment demandé de financement de l'industrie. Elle finançait une partie de ma recherche il y a 30 ans, au début de la mise en valeur des sables bitumineux. Je ne souhaite pas m'adresser à elle pour obtenir des fonds. Je veux conserver mon indépendance de chercheur et la liberté de publier les travaux de recherche que j'estime nécessaire.
    Le gouvernement fédéral vous alloue-t-il des montants importants pour vos travaux scientifiques?
    Une petite partie des fonds vient du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie. J'ai obtenu la majeure partie du reste en m'adressant à des fondations telles que Canards Illimités et la Walter and Duncan Gordon Foundation.
    Est-ce qu'une recommandation de notre part voulant que l'on consacre des sommes importantes à ce volet du dossier contribuerait à l'avancement de la recherche, à l'amélioration de la surveillance et ainsi de suite?
    Sûrement, mais il y a aussi certains aspects du financement fédéral qui me déplaisent. Par exemple, pour tout montant supérieur à une simple subvention à la recherche, il faut présenter des lettres de garantie fournies par des clients tels que les entreprises qui exploitent les sables pétrolifères dans lesquels elles vantent la grande qualité de vos travaux. S'il vous arrive quatre ou cinq fois de mettre en évidence des aspects plus sombres de l'industrie, il devient difficile d'obtenir ce genre de lettres. Sans oublier qu'à mon âge, je veux faire de la recherche, pas faire de la basse flatterie pour obtenir des lettres d'appui.
    En ce qui concerne les fondations, il est habituellement possible d'obtenir les mêmes sommes au moyen d'une simple lettre dans laquelle on donne un aperçu des travaux que l'on veut faire, et j'ai plutôt choisi de m'adresser à elles.
    Hier, nous sommes allés voir les sables bitumineux en hélicoptère et cette visite a été très utile. Grâce à elle et après avoir lu vos exposés, j'ai été frappée par une chose à laquelle je n'avais pas pensé auparavant, à savoir l'impact de l'extraction à ciel ouvert et la perte de cours d'eau. Dans l'un de vos exposés, quelqu'un nous a montré la disparition, sur une période d'à peine quatre ou cinq ans, des cours d'eau qui alimentent la rivière. Je connais, grâce à mes propres travaux dans la région de Wabamun, l'impact de l'extraction à ciel ouvert sur le régime lacustre et sur la nappe phréatique.
    Je me demande si ces aspects sont eux aussi intégrés aux modèles de gestion des eaux, et pas simplement les changements climatiques et autres phénomènes. Ces facteurs ont-ils un impact sur l'écologie et, à terme, sur les niveaux d'eau de la rivière?
    Je suis sûr qu'ils en ont. Sur environ 50 p. 100 de cette région, le sous-sol est constitué de tourbières, y compris dans les zones boisées, probablement à une profondeur moyenne de trois ou quatre mètres. Il a fallu 3 000 ou 4 000 ans pour que ces tourbières se forment. Elles agissent à la manière d'une éponge géante qui absorbe le manteau neigeux et l'eau qui tombe sous forme d'orage et elles libèrent lentement l'humidité. Grâce aux travaux de recherche des nombreux consultants qu'elle a financés, l'industrie sait parfaitement qu'il est impossible de rétablir un écosystème de ce genre, à moins d'attendre de 3 000 à 4 000 ans. Il n'y a aucun espoir de reconstituer le régime hydrologique de ces systèmes, ni les aquifères, d'ailleurs, parce que les couches de sol sont ramassées à la pelle et mises en piles; aucune tentative n'est faite pour les replacer en strates qui permettraient de rétablir les aquifères.
    Il n'y aurait probablement pas de quoi s'inquiéter beaucoup s'il s'agissait d'une petite région, mais cette réalité n'est plus confinée à une petite région. Je vous prédis qu'on assistera à une perturbation de l'ensemble du régime hydrologique du bassin inférieur de l'Athabasca.
(1025)
    Il serait donc impossible de les rétablir pour qu'elles puissent remplir leur fonction dans le bassin versant.
    Je crois en effet que ce serait impossible et je pense également qu'il est tout à fait irréaliste de penser que le moment est venu de fixer de nouveaux objectifs de restauration. Dans notre pays, nous n'avons jamais été capables de mettre de côté suffisamment d'argent pour remettre les lieux en état une fois terminée l'exploitation d'une mine. Plusieurs cas ont été mentionnés dans le rapport de 2002 de la vérificatrice générale. Il s'agissait dans tous les cas d'exploitations modestes par comparaison avec la taille des activités d'extraction dont nous parlons.
    Le coût de la petite partie qui a été certifiée restaurée — le site de Buffalo de la Syncrude — représentait 10 fois le montant que l'on met de côté, et ce site était réputé facile à restaurer. J'ai bien peur qu'il reste encore d'immenses puits d'excavation à ciel ouvert dans cette région dans deux générations.
    Très bien, merci.
    Madame Griffiths, c'est un véritable plaisir de vous voir. Merci d'être sortie de votre retraite pour venir nous donner un coup de main. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Nous n'avons pas examiné le cas de la rivière Saskatchewan Nord et c'est très heureux que vous l'ayez mentionné. J'estime important que nous comprenions la dimension et l'étendue des impacts de l'exploitation des sables bitumineux. La région immédiate de Fort McMurray n'est pas la seule touchée. J'aimerais que vous nous en disiez davantage sur les conséquences pour les ressources en eau de la construction éventuelle d'usines de valorisation.
    La grande question est de savoir s'il s'en construira. Au moment où j'ai rédigé un rapport sur les usines de valorisation, Upgrader Alley, l'an dernier, on prévoyait qu'il s'en construirait à peu près huit dans la région d'Edmonton et que la consommation nette d'eau serait de l'ordre de 80 millions de mètres cubes; autrement dit, il faudrait pour les alimenter prélever dans la rivière environ huit fois le volume d'eau prélevé pour alimenter la ville d'Edmonton. J'avais de grandes inquiétudes au sujet des conséquences pour l'eau.
    Depuis, la détérioration de la situation économique a forcé la suspension ou la mise au rancart temporaire de plusieurs de ces projets et je n'ai aucune idée du nombre d'usines qui seront effectivement construites. Je répète qu'il nous faut continuer d'assurer une surveillance étroite et mettre en place un mécanisme qui fera qu'on n'utilisera que le minimum d'eau dans l'avenir, toujours dans la mesure où on procède effectivement à la construction de ces usines.
    Merci.
    Vous avez parlé également des eaux souterraines. Je crois comprendre qu'un important rapport sur les eaux souterraines, le premier du genre, a été publié hier. Connaissez-vous ce rapport? Pouvez-vous nous dire s'il y est également question des conséquences possibles de l'exploitation des sables bitumineux?
    Oui. J'ai fait partie du groupe de personnes qui ont examiné la première version du rapport. C'est un rapport du Conseil des académies canadiennes intitulé La gestion durable des eaux souterraines au Canada. Il a été publié hier et on y trouve une sous-section consacrée exclusivement aux sables bitumineux et aux préoccupations que soulèvent les impacts des sables bitumineux sur les eaux souterraines. Ce n'est pas très long: j'encourage tous les membres du comité à lire cette section du rapport, parce qu'elle fait très bien le tour de la question.
    C'est intéressant de savoir que vous avez participé à l'examen de ce document. Merci de nous en avoir informés.
    Monsieur Warawa, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence ici aujourd'hui.
    J'ai vu M. Schindler à l'arrière au moment où je m'exprimais pendant l'interrogatoire des témoins au cours de la première heure. Je pense que M. Schindler m'a entendu parler de la visite que nous avons faites il y a deux ou trois ans près de la rivière et du secteur des sables bitumineux. Au cours de la visite, nous avons fait halte sur la rive et j'ai pu voir le bitume s'infiltrer dans le sol. C'était probablement au mois de juin. Il ne faisait pas très chaud, mais suffisamment tout de même pour que le bitume puisse filtrer entre les roches de la rive.
    Dans la région de l'Athabasca, quelles sont les toxines naturellement présentes dans les terres humides boréales qui se déversent dans l'Athabasca? Quelles sont en fait les toxines naturellement présentes?
(1030)
    Je répondrais qu'on peut observer toutes les toxines que j'ai mentionnées. Il y a une vaste gamme d'hydrocarbures aromatiques polycycliques, dont plusieurs sont des cancérogènes connus; certains composés connexes dans lesquels le carbone est remplacé par du soufre et qu'on appelle des dibenzothiophènes; et il y a ensuite une succession de métaux-traces toxiques emprisonnés dans la matrice de bitume. On peut dire que toute eau qui traverse ces terres humides transporte de petites quantités de ces polluants.
    Cela dit, il arrive de temps en temps que la présence de végétation sus-jacente soit utile. Il est bien connu, par exemple, que les terres humides sur fond de tourbière ont la capacité de retenir très fortement le mercure. Mais à mon avis, il est également juste de dire que si on perturbe la géologie ou l'écosystème de ces régions, on expose de nouvelles surfaces à l'érosion causée par l'air et la pluie, de sorte que la quantité de ces substances qui est mobilisée et transportée par l'eau ou par l'air augmente. C'est ce que démontrent des études réalisées sur une quarantaine ou une cinquantaine d'années et on observe ce phénomène sur pratiquement toute l'Amérique du Nord et l'Europe.
    Donc, dans le cas qui nous occupe, il n'y a pas de quoi se surprendre que les substances emprisonnées dans le bitume soient mobilisées et il n'est pas surprenant non plus que certaines soient naturellement présentes également. Pour résumer, je dirais qu'il y a une certaine présence naturelle de ces substances, comme l'industrie et le ministère de l'Environnement de l'Alberta l'ont affirmé avec raison, mais il est certain que ces quantités sont gonflées par les travaux d'excavation qui sont effectués dans le bassin de l'Athabasca et de ses affluents.
    Est-ce que quelqu'un d'autre souhaite s'exprimer?
    Alors je vais poser une question complémentaire.
    L'histoire du développement de la région de l'Athabasca parle d'une mine d'uranium qui, si j'ai bien compris, n'est plus exploitée; il y a une usine de pâtes et papiers; Fort McMurray elle-même a été développée et on y trouve des secteurs résidentiels et des secteurs commerciaux. Quel rôle les autres activités de développement jouent-elles dans le tableau d'ensemble? On se préoccupe des sables bitumineux, mais quel rôle ont joué les autres activités de développement, présentes et passées, dans le tableau d'ensemble?
    Je suis probablement à même de répondre à cette question puisque j'ai fait des travaux sur cette question pendant 20 ans.
    Il y a effectivement plusieurs usines de pâtes et papiers sur l'Athabasca, en amont, mais elles ont vraiment assaini leurs effluents au cours des 20 dernières années. L'usine de Hinton, par exemple, déversait d'énormes quantités de dioxines et de furanes dans la rivière les premières années de son exploitation. Je pense que le changement s'est produit quand l'usine Alberta-Pacific, près d'Athabasca, à plusieurs centaines de kilomètres au-dessus de la région dont nous parlons, a, dans le contexte d'un différend dans lequel j'ai eu un rôle à jouer au début des années 1990, mis au point un processus permettant d'éliminer la dioxine des effluents. Depuis, il n'y a plus de dioxine dans les effluents des usines de pâtes et papiers. Il subsiste certains composés organiques et autres. Mais l'une des sources d'inquiétude, celle en fait qui a motivé l'étude des bassins hydrographiques du Nord dans les années 1990, a été éliminée.
    Je pense que le développement de Fort McMurray favorise probablement la présence de plusieurs métaux-traces toxiques. L'usure des sabots de frein, par exemple, libère du cuivre; d'autres parties de l'automobile libèrent du nickel, du cadmium et du mercure, et l'usure des pneus dégage du zinc. Dans beaucoup de collectivités, ces substances passent des rues aux effluents et se déversent dans le cours d'eau le plus proche. Je suis sûr que le développement de Fort McMurray entraînera une intensification de ce problème. Mais pour le moment, même avec une population de 80 000 personnes, je dirais que sa contribution à la contamination d'une rivière de la taille de l'Athabasca est plutôt modeste.
(1035)
    Au cours des années d'histoire du développement de la région, est-ce que les toxines et les contaminants transportés vers le nord ont pu se déposer dans le lac Athabasca et causer des problèmes des dizaines d'années plus tard aux personnes qui vivent à Fort Chipewyan?
    Cette possibilité a été examinée de façon un peu détaillée dans le cadre de l'étude sur les bassins hydrographiques du nord mais rien de tel n'a été observé. Le problème, c'est que les gros travaux d'exploitation des sables bitumineux ont commencé après l'étude des bassins hydrographiques du nord. À cette époque, il n'y avait que deux petites usines d'exploitation des sables bitumineux qui ne faisaient pas grand mal. Les gros travaux d'exploitation actuellement en cours n'ont vraiment commencé que vers 2003.
    Un débat est maintenant ouvert sur la question de savoir si les hydrocarbures aromatiques polycycliques et le mercure qui se sont déposés dans les sédiments près de l'embouchure de la rivière et du lac sont en augmentation. Là encore, je pense qu'on peut trouver certaines données issues du programme de surveillance aquatique régionale. Je n'ai pas vu les résultats d'études indépendantes, qui ont dans une large mesure été effectuées au cours de la dernière année, mais la question n'est toujours pas réglée actuellement.
    Ma dernière question porte sur le PSAR, le Programme de surveillance aquatique régional, dont vous venez de parler à l'instant. Avez-vous pris part à ce programme? C'est un programme de surveillance financé par l'industrie qui a commencé, je crois, à la fin des années 1990, en 1997, je pense.
    Lors de notre passage à Fort Chipewyan, hier, nous avons entendu les premières nations exprimer leurs préoccupations au sujet du processus de consultation ou de leur participation au programme PSAR. Ce programme est une source de préoccupations pour elles. Dans la mesure où il s'agit d'un programme de surveillance auquel l'industrie est tenue de participer, de concert avec des ONG et les premières nations cries, pourriez-vous nous parler du programme PSAR? Croyez-vous qu'il atteint ses objectifs ou faudrait-il y apporter des améliorations?
    Je dirais qu'il a été couronné de succès.
    J'ai eu un petit rôle à jouer dans le cadre de l'examen du programme en 2004. Il a été mené en grande partie par des scientifiques fédéraux du ministère des Pêches et du ministère de l'Environnement. Sur les 100 pages que comptait le rapport, environ 99 d'entre elles exprimaient des critiques à l'égard des changements apportés aux analyses chimiques, des changements de sites d'échantillonnages, des changements du moment de l'échantillonnage, de tout ce qui viole tous les principes élémentaires d'un programme de surveillance.
    D'après ce que j'ai entendu dire de la part de personnes qui y ont joué un rôle, je pense que les choses ne se sont guère améliorées. Un autre aspect du programme me semble déficient: il manque de transparence. Les données n'ont fait l'objet d'aucune analyse. Elles ne sont pas mises à la disposition de la communauté scientifique dans son ensemble pour qu'elle puisse les analyser et les constatations faites à la faveur du programme n'ont pas été rendues publiques. Il n'y aurait probablement pas grand-chose à faire connaître de toute façon, vu les déficiences de conception. Il est impossible de faire la démonstration de quelque effet que ce soit parce que l'étude a été trop mal conçue ou parce qu'il ne se passe rien; personnellement, je crois que la faute en revient à la mauvaise conception.
    Ce programme a vraiment besoin d'être remanié. Je préconiserais qu'un comité indépendant composé de scientifiques et de quelques représentants des premières nations assure la supervision du programme et que le programme doive donner lieu à un rapport tous les trois ans, peut-être, ainsi que d'un rapport public afin que les gens puissent comprendre ce qu'il advient de la rivière, le cas échéant.
    Merci, monsieur Schindler.
    Nous allons maintenant passer à la deuxième série de cinq minutes. Nous procéderons comme la dernière fois. Nous donnerons à tous ceux qui n'ont pas posé de question la possibilité de le faire et j'aimerais commencer par moi-même.
    Monsieur Schindler, j'ai été...
(1040)

[Français]

    Monsieur le président, il faut pouvoir poser une autre question.
    Oui, si on en a le temps.
    On va prendre le temps, monsieur le président. On va poser d'autres questions.
    On est censés terminer...
    Ce n'est pas normal qu'il puisse poser quatre questions et que lui et moi n'en posions qu'une seule.
    Je voudrais qu'on fasse un deuxième tour, tant pour M. Trudeau que pour moi.
    On pourra y revenir après le deuxième tour.
    Si on a le temps, on finira avec eux.
    Le greffier me dit que le comité a adopté une procédure. Le premier tour se fait par parti, et le deuxième est réservé à ceux qui n'ont pas posé de questions.
    On est seulement deux. Il y a lui et moi. Donc par parti, ça devrait revenir.

[Traduction]

    Oui, il est là. Mon copain est là. Je pose des questions en son nom.

[Français]

    Je vais poser ma question et prendre ainsi le tour du Parti libéral.

[Traduction]

    Monsieur Schindler, pourriez-vous m'expliquer de nouveau ce que révèlent les données que vous nous avez montrées? Elles révèlent qu'il y a dans la rivière plus de substances chimiques qu'il devrait y en avoir naturellement, surtout à proximité des sites d'extraction des sables bitumineux, après quoi, naturellement, les concentrations diminuent au fur et à mesure qu'on descend la rivière. Si j'ai bien compris vos propos, certaines de ces substances chimiques sont transportées dans les airs, d'autres viennent de la perturbation de l'écosystème naturel par certaines activités et d'autres encore arrivent par la voie des eaux. Avez-vous fait des hypothèses quant à la source des substances chimiques qui arrivent par la voie des eaux? Leur origine se trouverait-elle dans les bassins de décantation? Iriez-vous jusqu'à faire un tel lien ou est-ce encore prématuré de le faire?
    Je n'irais pas jusque-là pour le moment. Nous avons été surpris de l'indice élevé de concentration de substances aéroportées. Quoiqu'il ne faille peut-être pas trop se surprendre quand on pense aux vents forts qui soufflent sur les vastes étendues qui forment le paysage que vous avez vu hier. D'autre part, je ne sais pas si vous avez vu les énormes camions qui circulent à cet endroit. Souvent, tout ce qu'on voit, c'est un énorme nuage de poussière noire en mouvement qui est soulevé par ces camions et qui transportent eux aussi une bonne quantité de substances.
    Naturellement, la seule période pour laquelle on possède des indications, ce sont les quatre mois d'hiver. Nous ignorons toujours la quantité de substances qui sera entraînée dans la rivière ou ses affluents au moment de la fonte printanière du manteau neigeux; c'est ce que nous tenterons de déterminer l'an prochain. Nous avons été tout simplement incapables de recueillir l'argent nécessaire pour le faire cette année; c'est vraiment impossible en ce moment. Nous espérons que les empreintes nous permettront de distinguer entre les bassins de décantation et les piles comme mécanismes de mobilisation des matières superficielles, mais je suis incapable d'avancer un indice de probabilité à ce stade-ci de notre analyse.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Donahue.
    À propos du cadre qui a été élaboré avec l'aide du ministère des Pêches et des Océans et le gouvernement de l'Alberta, vous disiez qu'il n'était guère utile parce que la dimension scientifique en est à peu près absente. Mais essayons d'imaginer ce qu'ils en diraient. Quelle serait la conversation qui s'échangerait entre le MPO et le gouvernement de l'Alberta au sujet de l'élaboration de ce cadre? Les scientifiques rattachés au MPO sauraient sûrement que le cadre est inadéquat. Quelle serait leur réaction? Déplorer le manque de données, envisager de faire leur gros possible ou faire une partie de cartes? Naturellement, je blague. Si vous deviez écrire la scène, quel serait le dialogue entre les protagonistes?
    Eh bien, ce serait une scène comique.
    À vrai dire, je n'en sais rien. Je sais tout de même que l'une des premières versions du cadre a été examinée par des scientifiques du MPO qui ont conclu qu'il ne contenait rien qui assurerait la protection des pêcheries. En cours de route, le rôle du MPO a perdu de l'importance, je pense, et la dimension scientifique ainsi que les conclusions ont été retirées tandis qu'on approchait de la version définitive de la phase un du cadre.
    Quant à savoir ce qui vient ensuite, je dirais que les scientifiques ont été exclus du dialogue à un moment donné. À partir de là, je suppose qu'on a cherché à sauver les meubles ou à imaginer quelque chose qui pourrait fonctionner.
(1045)
    Très bien, merci beaucoup.
    Je donne la parole à M. Braid pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins pour leur participation à nos travaux ce matin et pour le temps qu'ils acceptent de passer ici.
    Je vais commencer par vous, monsieur Donahue. J'aimerais avoir une idée du travail que vous avez accompli dans le cadre de la recherche sur le débit de la rivière Athabasca. Permettez-moi de commencer par un question élémentaire: est-ce que le débit de la rivière et le niveau d'eau de la rivière sont une seule et même chose ou bien s'agit-il de deux choses différentes?
    Ce sont deux choses différentes. Le niveau d'eau est essentiellement fonction de la géométrie de la rivière. Si la rivière est plus profonde, il est probable qu'elle sera plus étroite. Si la profondeur est moindre dans certaines régions, c'est soit que la rivière est plus large soit que le débit est faible. La profondeur de l'eau est fonction de la géométrie, laquelle régit la quantité d'eau qui s'écoule.
    Alors si je peux me permettre une digression, à votre connaissance, est-ce que les niveaux d'eau dans la rivière changent?
    Je suis passablement sûr qu'il existe des données sur les niveaux d'eau. Je ne les ai pas vraiment examinées parce qu'elles sont appelées à changer. Toutes les rivières sont profondes par endroits et moins profondes ailleurs de sorte que le niveau variera constamment que vous remontiez la rivière et que vous la descendiez. On peut certainement dire que si le débit diminue à un endroit donné de la rivière, la profondeur sera moindre également.
    D'accord, parfait.
    Donc en ce qui concerne vos études sur les débits, en quelle année les études que vous abordez dans votre document ont-elles commencé? Était-ce en 1970?
    Dans le document que j'ai présenté, j'ai mis l'accent sur la période qui commence en 1970, pour certaines raisons. D'abord, les données recueillies avant 1970 n'étaient pas nécessairement disponibles, par exemple, dans le cas du cours supérieur de la rivière Sunwapta. C'est un exemple où on compare des pommes avec des pommes.
    J'ai examiné les données à long terme sur les débits, lorsqu'elles étaient disponibles.
    Votre document indique que les précipitations ont également diminué au cours de cette période.
    Je crois que dans quatre des stations, on a enregistré une diminution de 20 à 30 p. 100 des précipitations, et dans les autres stations on n'a enregistré aucun changement important au cours de cette période de 35 ans.
    J'essaie simplement de comprendre les causes fondamentales des changements de débit. Est-ce que les précipitations sont à la baisse, ou s'il y a des causes fondamentales qui expliquent cela?
    En fin de compte, la quantité d'eau qui coule dans une rivière sera liée dans une certaine mesure à l'équilibre entre les précipitations et l'évaporation dans son bassin. Alors selon l'écoulement souterrain, il peut y avoir des décalages.
    Je crois qu'en ce qui concerne les eaux d'amont provenant des montagnes Rocheuses couvertes de glace, il y aura un très court décalage entre, d'une part, la fonte des neiges ou les précipitations abondantes et, d'autre part, ce qui se produit dans la rivière. On peut constater cela dans les grands changements très périodiques du débit fluvial. En aval, dans la région de Fort McMurray, il peut y avoir un plus grand décalage car, comme l'a dit M. Schindler, on trouve ces vastes terres humides complexes qui agissent comme des éponges. Ces terres atténuent les fluctuations que l'on peut observer autrement au cours d'une courte période. À un certain moment, cela sera lié aux précipitations — la fonte des neiges, ou d'autres phénomènes du même genre.
    Alors selon vous, quel est le principal facteur qui a des répercussions sur le débit de la rivière Athabasca?
    C'est difficile à dire. Ce que j'ai présenté était surtout descriptif, ce qui est arrivé au débit, ce qui est arrivé aux précipitations, à l'accumulation annuelle de neige, et aux températures. Le modèle que j'ai élaboré, qui établit un lien entre les variables du climat et le débit, n'est pas ce que l'on décrirait comme étant un modèle mécaniste. Ce n'est pas un modèle qui permet de comprendre les interactions entre les diverses variables et le résultat. Il s'agit davantage d'un modèle de corrélation où j'ai rassemblé une série de variables et créé certaines formules, et d'un moyen de les rassembler qui permet de prévoir le résultat de façon assez précise. Mais pour ce qui est de déterminer le facteur le plus important, c'est difficile à dire.
(1050)
    J'aimerais poser une question à M. Schindler si j'ai le temps. Avez-vous comparé la rivière Athabasca à d'autres rivières?
    Certainement. M. Schindler et moi avons publié quelques documents au cours des dernières années qui portaient sur le débit fluvial dans toutes les Prairies.
    Dans l'ensemble des Prairies, le débit fluvial a enregistré une baisse énorme. Le débit fluvial à Saskatoon, dans le sud de la Saskatchewan, a diminué de 80 p. 100 depuis le début du XXe siècle.
    Monsieur Calkins.
    J'ai examiné le débit estival, en ce qui concerne le débit fluvial partout.
    Voulez-vous intervenir?
    Oui, monsieur le président. Merci.
    C'est un plaisir pour moi d'avoir l'occasion de vous avoir parmi nous ici afin que vous puissiez témoigner et recréer certains liens anciens.
    Monsieur Schindler, je regarde les diapositives ici. Lorsque j'examine les renseignements sur le cadmium et les eaux de surface par rapport à l'accumulation annuelle de neige, les sites Athabasca River 2 et Muskey River 2 semblent enregistrer des quantités très élevées de cadmium comparativement à l'accumulation annuelle de neige. En ce qui concerne les eaux de surface, des quantités élevées ont été enregistrées dans la rivière Beaver, dans la rivière Steepbank et fondamentalement dans tous les sites de test sur la rivière Athabasca.
    Je ne sais pas s'il est éliminé par filtration ou s'il se dépose, mais par exemple, si on examine la station AR17, qui se situe en aval de Fort McMurray, on enregistre un taux plus élevé de cadmium qu'à la station Athabasca River 3, qui affiche un taux beaucoup plus bas. Puis si nous examinons ce qui se passe à la station Athabasca River 12, le taux est de nouveau assez élevé. Pouvez-vous m'expliquer de quelle façon, en ce qui concerne ce débit, les taux de cadmium peuvent changer ou être modifiés de façon si importante, étant donné que les cycles et les techniques de test sont les mêmes?
    Que se passe-t-il avec le cadmium? Est-ce qu'il se dépose?
    Je crois que, comme vous avez pu le constater, la raison est qu'une grande partie de cela est liée à ces cas particuliers qui se régleront, mais également, de l'eau est ajoutée par les affluents en aval. Si les affluents en aval ne contiennent pas beaucoup de cadmium, ils dilueront les sources en amont.
    Je crois que la seule interprétation que je puisse faire de ce modèle dans son ensemble est qu'il existe une variation considérable dans les sources de cadmium. Dans certains de ces affluents, il doit y avoir de petits dépôts de terre à haute teneur en cadmium. Toutefois, une chose est évidente: il n'existe aucune relation claire avec l'industrie, comme c'est le cas pour certains autres métaux.
    Je crois que ces valeurs élevées, peu importe la source, soulèvent certaines préoccupations. Les niveaux atteints correspondent, par exemple, à une toxicité démontrée chez les invertébrés aquatiques.
    Votre exposé était assez structuré en ce qui concerne la réalité, à savoir que ce métal est surtout d'origine naturelle à cet endroit. Ce fait n'est pas vraiment contesté, mais les questions demeurent, dans quelle mesure le niveau actuel d'activité provoque des perturbations, l'élimination des morts-terrains, les déplacements de matériel, de quelle façon change-t-on les débits d'eau, et dans quelle mesure modifie-t-on l'habitat naturel qui est sur place depuis si longtemps?
    Pendant vos travaux, avez-vous pu constater quelque chose pour la région qui a fait l'objet d'une surveillance de la qualité de l'air? Lorsque nous examinons la situation, je prends pour acquis que compte tenu des activités minières, nous provoquerons certainement des remous. Nous verrons des camions monter vers la région. Nous avons pu le constater hier à partir des hélicoptères. Des panaches de poussière apparaissent derrière les camions. Nous verrons évidemment des particules fines en suspension dans l'air, tout simplement en raison de l'activité d'exploitation minière à ciel ouvert. Avez-vous pu établir un lien entre les données de surveillance de la qualité de l'air concernant toute particule fine et l'une ou l'autre de vos constatations dans les divers lieux où vous avez effectué des tests?
    Jusqu'à présent, non. Nous avons commencé à analyser les modèles régionaux des particules atmosphériques, mais nous avons reçu les résultats il y a seulement quelques semaines et nous commençons à peine ce travail. Il est évident qu'il y a quelques métaux qui ne semblent pas être liés du tout à l'activité industrielle — surtout l'uranium et le cadmium. Dans certains autres cas, par exemple le mercure, l'aluminium et l'arsenic, il est évident qu'il existe une contribution assez importante de l'industrie minière.
(1055)
    J'ai un grand intérêt pour les poissons. C'est un domaine que j'ai abordé lorsque j'étais à l'Université de l'Alberta; j'ai suivi la plupart des cours liés à la pêche et aux sciences aquatiques que je pouvais suivre. Ce que nous constatons me préoccupe. J'ai entendu une anecdote hier, lorsque j'ai parlé à un pêcheur commercial du lac Athabasca. Il m'a dit qu'il avait constaté des difformités, des maladies ou, peu importe le cas, touchant un poisson sur 100 attrapés sur place.
    Ce n'est pas rare. J'ai travaillé comme technicien en pêches pour l'organisation Alberta Fish and Wildlife pendant un certain nombre d'années, et en réalité ce n'est pas rare, lorsqu'on examine la région de Lakeland et d'autres parties de la province où j'ai travaillé, de trouver un nouveau poisson ayant des déformations ou diverses maladies. Surtout dans le cas du doré au printemps, on constatera diverses maladies et autres conditions qui disparaîtront tout simplement au cours de l'été.
    Je me demande si quelque chose a été fait à partir de votre étude. Servira-t-elle de base à des recherches supplémentaires? La pêche commerciale est importante sur le lac Athabasca. En réalité, je me sens assez préoccupé par ce que j'ai entendu jusqu'ici et par certains des problèmes que vous avez mentionnés ici.
    Nous ne faisons pas d'études de ce genre nous-mêmes, mais je sais qu'il existe des programmes pour lesquels on commence actuellement à recueillir certaines statistiques réelles sur les difformités des poissons, au lieu de simplement recueillir des anecdotes.
    Je dois mentionner quelque chose que vous savez peut-être déjà. Il y a déjà eu un déversement important provenant des usines de sables bitumineux dans la rivière Athabasca. Le déversement est survenu sous la glace au cours de l'hiver 1982. Il était suffisamment important pour mener à l'interruption de la pêche, du moins dans le secteur ouest du lac, pendant quelques années. Il y a eu beaucoup d'incidents avec au moins certaines conséquences liées aux activités industrielles. Le fait que ce déversement soit survenu sous la glace pendant l'hiver a rendu impossible tout nettoyage. Le déversement s'est écoulé dans la rivière sur une distance d'environ 250 kilomètres et a finalement atteint le lac. Je crois qu'il est juste de dire que ce type de scénario pourrait se répéter.
    La parole est maintenant à M. Watson.
    Merci, monsieur le vice-président.
    Je remercie les témoins pour leur participation aujourd'hui.
    Laissez-moi commencer avec M. Schindler.
    En ce qui concerne vos résultats se rapportant aux métaux lourds, par exemple, de quelle façon pouvons-nous les comparer avec d'autres types d'exploitations minières et de dépôts de résidus? Avez-vous effectué un travail comparatif, ou pouvez-vous nous nommer des travaux comparatifs entre, d'une part, ce qui se passe dans ce bassin hydrologique en particulier et, d'autre part, ce qui se passe dans d'autres bassins hydrologiques, ou dans diverses exploitations minières? Pouvez-vous nous donner des renseignements de nature qualitative ou quantitative à ce sujet? Est-ce que la situation est pire, meilleure ou la même que celle à laquelle vous vous attendiez en ce qui concerne les autres opérations minières? Pouvez-vous nous donner une certaine indication qualitative ou quantitative à ce sujet?
    Je dirais qu'en ce qui concerne les métaux à l'état de trace, la situation est probablement meilleure que dans le cas d'une mine de plomb et de zinc ou d'une mine d'or, parce que ce type d'exploitation a lieu dans des régions où les métaux sont concentrés. La situation est bien pire en ce qui concerne les composés aromatiques polycycliques et les autres composés organiques, car il y a bien plus de ces composés ici que dans une mine de métaux de base typique, par exemple. Bien entendu, c'est la raison pour laquelle il y a une activité minière à cet endroit, alors ce n'est vraiment pas une surprise.
    En ce qui concerne le transport des HAP dans l'atmosphère, quels sont les vents dominants? En général, est-ce qu'ils sont en direction de l'ouest? Cela dépend des régions, car il peut y avoir des microclimats ou d'autres phénomènes du genre.
    Je dirais les deux. Les vents dominants sont en direction du nord-ouest et du sud-ouest, mais lorsque j'ai été dans la région, j'ai remarqué qu'il y a souvent des panaches de fumée qui suivent la direction de la rivière Athabasca, que ce soit vers le nord ou vers le sud. Je pense donc que le microclimat dans la région de cette vallée escarpée a des répercussions sur une grande partie des modèles de cette région.
    D'accord.
    En ce qui concerne votre étude, vous attendez-vous à reprendre la surveillance à divers endroits, ou s'agit-il d'un contexte unique et vous espérez que d'autres intervenants, peut-être les gouvernements, prendront le relais et poursuivront la surveillance, c'est-à-dire que dans une certaine mesure, si je procède à un sondage politique ou à une étude du même genre, il donnera un portrait instantané d'un contexte particulier? Est-ce qu'une telle intention existe, ou est-ce que vous êtes en train de vous diriger vers des domaines d'études différents qui s'appuieront sur cela? Autrement dit, êtes-vous satisfaits de vos conclusions? Pouvez-vous me donner une idée de la direction que prennent vos travaux?
(1100)
    Nous l'avons conçu, à ce point, pour donner le portrait d'un contexte en particulier. Comme nous avons démontré que nous pouvons observer des effets clairs grâce à un programme de surveillance bien conçu, j'espère qu'un intervenant, que ce soit le gouvernement fédéral ou un gouvernement provincial, s'assurera que ce type de programme est maintenu.
    Un élément pour lequel j'aimerais faire davantage — et, de nouveau, il s'agira d'un portrait instantané — et l'apport en métaux causé par la fonte printanière de la couverture de neige après une accumulation de quatre mois; ces métaux pourraient se retrouver dans la rivière.
    J'aimerais aussi avoir l'avis de tous les membres du comité présents ici. C'est ma dernière question, et elle concerne le sujet de la restauration.
    C'était la première fois que j'avais la chance de voir les sables bitumineux. J'ai traversé la moitié du continent, j'ai même été à l'endroit le plus au sud du Canada sur le lac Érié, et il y a un certain nombre de choses que j'ai trouvé très intéressantes lorsque j'ai survolé la région. On m'a indiqué des endroits où une restauration avait lieu. Ce que j'ai également trouvé très intéressant, c'était la topographie naturelle telle qu'elle existe dans les régions où il n'y a pas encore eu d'extraction, mais où il y en aura.
    Pouvez-vous vous arrêter un peu sur les préoccupations concernant le changement de topographie, les interactions entre les eaux de surface et les eaux souterraines associées à la topographie en évolution, et ces types de situations? Il y a eu des discussions sur certains projets pour lesquels on a exprimé l'idée de créer des lacs de compensation ou des terres humides de compensation. Est-ce que ce mécanisme est satisfaisant?
    Je crois que ce que nous acceptons dans ce principe, si nous l'adoptons, c'est qu'il y aura des changements dans les habitats, le drainage et d'autres domaines associés. Je ne sais pas si cela changera les interrelations entre les eaux de surface et les eaux souterraines. Pouvez-vous faire part au comité de vos commentaires à cet égard?
    Je pourrais commencer.
    Un des facteurs majeurs qui entravera certaines des restaurations sera que la base, après la fin de l'exploitation minière, est très saline, et un grand nombre des espèces des terres humides qui vivent naturellement dans la région ne pourront pas s'y épanouir en raison de cette salinité.
    Un certain travail est effectué afin d'essayer de synthétiser les terres humides avec des plantes qui résistent à la salinité, comme celles qui se trouvent en Saskatchewan dans certains des lacs à bassin fermé, et d'en arriver à quelque chose qui permettra de réaliser certaines des mêmes fonctions que pourrait avoir un habitat des sauvagines.
    Il est évident que ce ne sera pas la même chose. Comme je l'ai mentionné brièvement plus tôt, les systèmes aquifères seront désorganisés. Il n'y aura plus la même relation entre les systèmes aquifères et les eaux de surface, qui forment en réalité un seul plan d'eau. Je crois bien que l'hydrologie deviendra beaucoup plus tape-à-l'oeil. La pluie et la neige fondue s'écouleront dans la rivière et arriveront en aval rapidement. Ce sera le genre de situation que nous voyons dans le bassin de la rivière Rouge au Manitoba chaque printemps en raison du changement d'utilisation des terres. Mais il ne s'agit que de prévisions.

[Français]

    Je serais prêt à déroger un peu des règles pour vous permettre de poser une brève question à la fin, mais j'ai besoin de l'assentiment du comité, en particulier des conservateurs.

[Traduction]

    Permettriez-vous à M. Ouellet de poser une question courte?
    Eh bien, monsieur le président, nous avons dépassé de cinq minutes le temps prévu pour ces témoins.
    Très bien, je devais simplement poser la question.
    Les représentants des premières nations attendent de faire leurs témoignages.

[Français]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Quand on est en séance normale, les libéraux ont trois questions, le Bloc a deux questions et eux ont cinq questions. Je ne suis pas contre le fait qu'ils posent cinq questions, mais je veux pouvoir poser deux questions.
    Le Parti libéral aurait eu une question de plus si un troisième membre avait été présent.
    Ce n'est pas une question de présence. Quand on est en séance normale, même si la personne n'est pas présente, il y a deux questions qui viennent...
    Selon le règlement, le deuxième tour n'est pas par parti mais par député. Donc, si une troisième personne de notre parti avait été présente, elle aurait pu poser une question. Si une deuxième personne de votre parti avait été présente, la même chose aurait valu.
    Quoi qu'il en soit, j'ai demandé l'assentiment du comité, mais malheureusement, on a terminé ce segment et il faut passer aux premières nations.
(1105)

[Traduction]

    Est-ce que je dois vous supplier? J'ai simplement une courte question que j'aimerais poser. Je vous en prie, s'il vous plaît. C'est une question courte.
    Non, je crois que nous devons avoir des spécialistes très éminents ici, et je ne veux vraiment pas entrer dans des questions de nature interne.
    Merci beaucoup d'être venus participer à nos travaux. C'était très instructif. Je crois que vous avez ouvert la voie à de nombreuses autres questions. Je crois que vous avez insufflé de l'oxygène dans cette étude. Merci encore pour votre disponibilité. Je l'apprécie vraiment.
    Nous prendrons une courte pause, puis nous passerons aux représentants des premières nations.

(1110)
    Bienvenue à tous nos témoins.
    Nous avons avec nous le chef Jim Boucher, de la première nation Fort McKay; le chef Allan Adam, de la première nation Athabasca Chipewyan; la chef Roxanne Marcel, de la première nation crie Mikisew; et le chef régional Bill Erasmus, de l'Assemblée des Premières Nations.
    M. Georges Poitras est également présent parmi nous. Merci pour votre aide tout au long du processus, monsieur Poitras.
    Nous avions pensé que chaque participant ferait un exposé de cinq minutes, puisque nous passerions aux questions des membres, si les participants sont d'accord. D'accord? Parfait.
    Qui aimerait commencer?
    Chef Boucher.
(1115)
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour. Bienvenue à Edmonton.
    J'aimerais faire un bref exposé. Je sais que nous n'avons que cinq minutes, alors j'ai fourni un document aux membres du comité concernant notre exposé, qui contient des détails sur les points que je vais aborder aujourd'hui.
    Fort McKay est une petite communauté des premières nations. Notre première nation est entourée de sites d'exploitation des sables bitumineux. Nous sommes situés au centre géographique d'une vaste zone industrielle. Nous sommes entourés de bassins de décantation et nous avons vécu avec l'exploitation des sables bitumineux au cours des 40 dernières années.
    Mes membres ont perdu environ 60 p. 100 de leur territoire de piégeage en raison de l'exploitation des sables bitumineux, et l'exploitation minière a eu lieu sur 57 p. 100 de nos terres dans un rayon de 20 kilomètres autour de nos communautés, où une approbation a été donnée pour une telle exploitation. Des concessions de sables bitumineux se trouvent sur presque tout notre territoire traditionnel et ont mis un terme dans les faits à l'application de nos droits garantis par traité pour chasser, pêcher, piéger et nous rassembler.
    Notre corporation des relations industrielles a participé activement aux consultations avec l'industrie, aux interventions auprès des organismes de réglementation et aux négociations avec le gouvernement. La corporation a préparé de la documentation à l'appui pour cet exposé et serait heureuse de fournir au comité tout autre rapport technique sur le sujet de mon exposé.
    Dans le cadre d'une économie mondialisée avec des préoccupations environnementales à l'échelle de la planète, les intérêts et les perceptions des consommateurs par rapport aux produits liés aux sables bitumineux sont importants. On considère de plus en plus que l'exploitation des sables bitumineux se fait en l'absence d'un plan cohérent de réglementation ou de développement durable, et que des dommages irréparables sont causés à l'environnement et aux communautés des premières nations. Le résultat, c'est que les produits pétroliers sont globalement perçus comme étant des produits pétroliers sales.
    Malheureusement, une grande partie de cette perception est exacte. Actuellement, il n'existe aucun cadre ou plan détaillé cohérent en ce qui concerne la réglementation, l'environnement ou l'économie à l'échelle fédérale ou provinciale pour aborder non seulement la question de la production durable liée aux sables bitumineux, mais aussi ses répercussions cumulatives et à long terme sur l'environnement en ce qui a trait à l'eau, à la terre, à l'air et aux droits des Autochtones.
    Jusqu'à maintenant, l'exploitation des sables bitumineux a eu lieu projet par projet, en respectant un cadre sur la fiscalité et la réglementation environnementale qui est très dépassé. Comme il manque un plan et une stratégie cohérents et globaux, il n'existe qu'une démarche isolée, inefficace et réactive par rapport aux questions environnementales, comme la gestion de l'eau, les effets cumulatifs et la planification de la restauration. Le manque de volonté politique et de collaboration fédérale-provinciale, les intérêts corporatifs concurrents et l'instabilité économique inhérente des industries fondée sur les ressources ont, chacun à sa façon, miné l'élaboration d'un plan détaillé durable et cohérent pour la deuxième principale ressource en hydrocarbures au monde, et le reste du monde en prend note.
    Tous les Canadiens ont intérêt à modifier les perceptions du monde par rapport aux sables bitumineux, mais les perceptions ne seront pas changées avant que le Canada, l'Alberta et l'industrie mettent en place des plans détaillés pour un environnement et une économie durables, ainsi que des régimes réglementaires efficaces pour l'exploitation des sables bitumineux et la restauration associée.
    Chaque année, l'industrie doit prélever dans la rivière Athabasca l'équivalent de l'eau nécessaire pour faire vivre deux millions de personnes afin de soutenir ses propres besoins. Malgré un certain recyclage, la majeure partie de cette eau ne retournera jamais à la rivière. Elle est plutôt pompée dans ce que l'on pourrait appeler la plus grande digue au monde construite par les hommes, qui contient des déchets toxiques.
    Le volume actuel autorisé de 550 millions de mètres cubes d'eau par année et la demande croissante n'est pas soutenable, surtout lorsqu'on tient compte des débits à la baisse de la rivière Athabasca. Le MPO a omis d'établir un niveau de débit minimum pour la rivière Athabasca. Les exploitants actuels des sables bitumineux continuent de prendre de l'eau, sans tenir compte du faible débit de la rivière. Le risque de causer des dommages irréparables aux pêcheries ou aux droits liés aux traités menace notre production de sables bitumineux.
(1120)
    Nous appuyons les conclusions suivantes tirées du rapport intitulé Running out of Steam? Oil Sands Development and Water Use in the Athabasca River Watershed: Science and Market-Based Solutions, préparé par l'Université de l'Alberta et le Centre Munk en 2007.
    Actuellement, l'eau constitue une ressource publique qui est fournie gratuitement à l'industrie de l'énergie. Un manque de cadre réglementaire a permis à certaines entreprises de s'appuyer sur des technologies d'extraction et de restauration qui dépendent de la fourniture gratuite et sans limites d'une ressource publique de plus en plus rare et précieuse. Par conséquent, cette ressource est sous-évaluée et utilisée de façon excessive, et les coûts réels économiques et environnementaux ne sont pas complètement pris en compte.
    Dans le cadre d'une stratégie de conservation de l'eau, nous recommandons que les gouvernements mettent en oeuvre un plan à long terme, ainsi que des normes de réglementation solides qui, avec le temps, établissent des quantités maximales et diminuent les volumes autorisés d'eau disponible pour chacun des producteurs de sables bitumineux. En sachant que ces fournitures d'eau seront réduites, l'industrie sera obligée d'investir dans la recherche et la technologie disponibles afin de créer des technologies d'extractions plus efficaces et moins préjudiciables en ce qui concerne l'eau douce.
    Je crois que l'établissement d'un volume maximal de prélèvement d'eau pour chacun des projets et pour l'industrie dans son ensemble doit être établi. Les droits limités, mais transférables d'usage de l'eau, c'est-à-dire un système « de plafonnement et d'échange », fournirait une justification économique pour les améliorations technologiques et généreraient des solutions rentables, ce qui protégerait clairement des besoins relatifs au débit de la rivière Athabasca.
    Au total, 90 p. 100 de l'eau prélevée aboutit dans des bassins de décantation. Ces bassins, qui représentent 70 p. 100 de l'eau, constituent la plus grande installation d'entreposage d'eaux usées au monde. D'ici 2025, les bassins de décantation contiendront un milliard de mètres cubes d'eau dégradée et traitée.
    En 1995, notre première nation a comparu devant la Commission chargée de l'économie des ressources énergétiques pour s'opposer à l'octroi d'un certificat de restauration pour le bassin de décantation Syncrude. Cette audience a donné lieu à un certain nombre de recommandations concernant la recherche et les mesures à prendre, mais il semble que depuis ce temps, peu de progrès a été enregistré en ce qui concerne l'élaboration de plans de restauration contenant des stratégies réalisables et acceptables pour l'industrie, les gouvernements ou les communautés avoisinantes. Après 40 années d'exploitation, il n'y a toujours pas de plan de restauration éprouvé et viable pour les anciens bassins de décantation.
    Récemment, en février 2009, la Commission chargée de l'économie des ressources énergétiques a émis sa première directive à l'intention de l'industrie en ce qui concerne le rendement de la restauration des bassins de décantation, qui est soutenue par la communauté de Fort McKay. Toutefois, le problème principal, entre autres, en ce qui concerne cette directive et ses objectifs est l'absence de technologie éprouvée pour traiter l'eau de façon adéquate dans le but d'éliminer les produits chimiques par décantation, afin de permettre le recyclage de manière à pouvoir retourner l'eau dans la rivière.
    Les gouvernements fédéral et provinciaux doivent participer activement à la création de normes réglementaires appropriées et d'incitatifs fiscaux pour les technologies de restauration transparentes et éprouvées. Ils doivent aussi s'assurer que les résultats de cette technologie et de cette recherche soutenue par des fonds publics pour le traitement des eaux et la production rentable de la décantation sèche sert l'intérêt de la population et n'est pas limité dans sa disponibilité ou utilisée au moyen des droits de propriété du promoteur.
    Le gouvernement fédéral a un champ de compétence étendu qui, s'il est mis en application, peut avoir des répercussions directes sur l'exploitation des sables bitumineux. La Loi sur les pêches, la Loi sur les Indiens, la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs et la Loi sur les espèces en péril sont des lois que le gouvernement fédéral a jusqu'à présent omis d'imposer convenablement en ce qui concerne les sables bitumineux. Plus particulièrement, le MPO surveille depuis des décennies la détérioration de la qualité de l'eau et de la quantité d'eau dans la rivière Athabasca, ses affluents, et les lacs en aval.
    Depuis des générations, notre communauté s'est appuyée sur l'exercice de nos droits garantis par traité en ce qui concerne la pêche et la fourniture d'aliments de qualité. Ces droits garantis par traités ont effectivement disparu dans notre région sans que le Canada ait procédé à des consultations, à des aménagements ou au versement d'une compensation. Fort McKay prendra bientôt des mesures pour s'assurer que l'échec du gouvernement fédéral à protéger nos droits garantis par traité et les importantes ressources naturelles liées à la qualité et à la quantité d'eau, y compris la pêche dont dépendent nos droits garantis par traité, ne se poursuive pas.
(1125)
    Chaque année, le gouvernement fédéral encaisse des milliards de dollars grâce aux sables bitumineux par l'entremise de taxes ou par d'autres façons. D'ici 2020...
    Chef Boucher, vous avez fait un excellent compte rendu, que nous intégrerons dans notre rapport. En tout respect, y-a-t-il deux ou trois points que vous aimeriez aborder avant que nous donnions la parole à un des autres chefs? Nous essayons de recueillir le plus de renseignements que nous pouvons pendant l'heure que nous disposons.
    Merci, monsieur le président. J'ai seulement deux autres points à soulever, et mon exposé sera terminé.
    Je voulais simplement souligner le fait que le gouvernement fédéral encaisse des milliards de dollars grâce aux taxes et aux redevances se rapportant aux sables bitumineux. D'ici 2020, on s'attend à ce que les revenus pour le gouvernement fédéral s'élèvent à 51 milliards de dollars par année. Les gouvernements fédéral et provinciaux accordent également à l'industrie des réductions des redevances et d'autres encouragements fiscaux, et le Canada doit utiliser ses leviers fiscaux avec l'industrie des sables bitumineux pour s'assurer que le fait d'omettre de se conformer aux normes fondées sur le rendement et surveillées par le public pour la protection de l'environnement, y compris la restauration des bassins de décantation, aura des conséquences fiscales significatives. Par exemple, la réduction des redevances ou un traitement fiscal favorable prendrait fin lorsque les industries ne respectent pas les normes de restauration ou les normes d'atténuation des effets négatifs sur l'environnement fondées sur le rendement.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, chef Boucher.
    Qui voudrait maintenant prendre la parole?
    Chef Marcel, allez-y, s'il vous plaît.
    Je vais demander à Georges d'y aller à ma place, car je ne crois pas que je pourrai le faire en cinq minutes.
    Laissez-moi simplement dire que nous avons également beaucoup apprécié votre exposé d'hier. Nous tiendrons compte des points que vous avez soulevés, je peux vous l'assurer.
    Allez-y, monsieur Poitras.
    La Première nation crie Mikisew a présenté à de nombreuses occasions aux gouvernements de l'Alberta et du Canada ses préoccupations concernant le rythme et la portée du développement des sables bitumineux. L'exploitation sans entrave des sables bitumineux en tenant peu ou pas compte des préoccupations et des réclamations de la nation crie Mikisew a amené la Première nation à conclure que les deux ordres de gouvernement avaient mis fin dans les faits aux droits garantis par traité de la Première nation crie Mikisew.
    Les Autochtones sont les populations les plus affectées par le développement, et ils soulèvent des préoccupations sur les répercussions à l'échelle régionale depuis le début des années 1960. La Première nation crie Mikisew a remis en question, et continuera de le faire, l'ampleur de ces répercussions sur les droits garantis par traité et les droits des Autochtones. En ce qui concerne le manque de réconciliation avec les droits des Autochtones et les violations actuelles et passées de ces droits, le caractère inconstitutionnel des politiques et des lignes directrices des consultations des premières nations du gouvernement de l'Alberta, les besoins relatifs aux eaux de ruissellement et le cadre de gestion des eaux — que nous avons suggéré de façon constante est totalement inadéquat et ne protège absolument pas la rivière Athabasca —, le processus réglementaire provincial, la Commission chargée de l'économie des ressources énergétiques de l'Alberta et son équivalent fédéral, l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, ou le cadre proposé pour l'utilisation des terres, il existe un besoin d'une plus grande reconnaissance et d'une intégration des réactions, des connaissances et des préoccupations des Autochtones dans la gestion des ressources pour cette région de l'Alberta.
    Depuis 2003, la Première nation crie Mikisew a participé à cinq audiences sur les sables bitumineux, y compris trois audiences en 2006 au cours de laquelle les droits Autochtones et les droits garantis par traité n'ont pas fait l'objet de discussion. La Première nation crie Mikisew n'a été consultée adéquatement par aucun gouvernement en ce qui concerne le développement des sables bitumineux, à l'exception de certaines approbations de permis concernant les eaux en 2004. La première nation considère que les droits Autochtones et les droits garantis par traité sont protégés par la constitution et que ces droits de chasser, de pêcher et de trapper correspondent aux fondements mêmes du patrimoine du style de vie traditionnel existant depuis longtemps chez les Cris Mikisew. Les gouvernements ne peuvent pas simplement éliminer ces droits pour permettre le développement des sables bitumineux. Les Cris Mikisew croient que c'est leur obligation sacrée d'agir en tant que protecteur de l'environnement en collaboration avec le gouvernement. Ce qui est en jeu, ce sont les précieux écosystèmes vivants, la survie de la culture crie Mikisew et le bien-être économique et physique des première nations.
    Plus de la moitié des terres traditionnelles des Cris Mikisew sont occupées par des concessions de sables bitumineux. L'ampleur de la dévastation écologique atteint des niveaux jamais vus en Amérique du Nord. Le développement des sables bitumineux, parallèlement aux effets du barrage W.A.C. Bennett et d'autres exigences concernant la rivière Athabasca réduiront de façon importante la capacité des Cris Mikisew de vivre comme nous l'avons fait dans le passé, et cette situation est due à la perte des terres. Nous ne sommes tout simplement pas prêts à accepter une transgression croissante de notre territoire, et nous ne sommes pas prêts non plus à accepter une approche « faites-nous confiance » du gouvernement et de l'industrie pendant que notre santé est compromise et que les taux de cancers continuent d'augmenter à Fort Chipewyan.
    Le gouvernement fédéral a les outils juridiques et l'obligation légale de protéger nos droits et notre santé. Nous avons déjà établi nos points de vue sur les possibilités de développements supplémentaires qui pourraient avoir des répercussions négatives et violer nos droits garantis par l'article 35. En outre, notre première nation est constamment préoccupée en ce qui concerne des répercussions négatives sur la santé découlant du développement des sables bitumineux.
    En tenant compte de ces préoccupations, nous demandons respectueusement l'établissement d'un moratoire sur tout nouveau développement à l'intérieur de notre territoire traditionnel jusqu'à ce que des études pertinentes aient été faites, y compris des études liées à la santé, afin d'évaluer suffisamment et de façon crédible de telles répercussions et jusqu'à la mise en place d'une utilisation convenable des terres et d'une autre planification. Plus particulièrement, nous demandons au gouvernement fédéral de s'abstenir d'octroyer plus de permis, de licences ou d'approbations en ce qui concerne les champs de compétence fédéraux dans notre territoire traditionnel, jusqu'à ce que de telles mesures aient été prises. Nous ne sommes pas contre toute forme de développement. Cependant, nous sommes contre tout empiètement continu de nos droits et contre les répercussions négatives sur notre santé qui découlent d'un tel développement des sables bitumineux. Nous considérons que l'idée de demander un moratoire jusqu'à ce que des études convenables aient été élaborées constitue une réponse raisonnable à un développement pratiquement débridé.
(1130)
    Pour terminer, il existe un précédent en ce qui concerne le type de moratoire que nous cherchons: une enquête publique complète. La Commission Berger a été créée en réponse aux préoccupations des premières nations au nord du 60e parallèle. La commission avait pour but d'étudier les répercussions éventuelles du développement sur ces premières nations, ainsi que sur les aspects social, économique et culturel et sur l'aspect de la santé en ce qui concerne le projet de gazoduc du MacKenzie.
    Finalement, si les répercussions négatives éventuelles d'un seul projet suffisait à mettre fin à l'exploitation pétrolière, en attendant une étude convenable, il est sûr qu'une demande semblable n'est pas déraisonnable compte tenu de la possibilité de répercussions négatives pendant des années.
    Merci.
    Merci, monsieur Poitras.
    Nous passons maintenant au chef Adam, s'il vous plaît. Heureux de vous revoir, chef Adam.
    Bonjour, monsieur le président.
    Un des sujets que nous voulons aborder, de notre point de vue, est lié aux questions relatives à la santé en relation avec l'ampleur du développement dans la région, en tenant compte du fait qu'il n'y a pas de système de réglementation en place en ce moment.
    La Première nation Athabasca Chipewyan regroupe de nombreuses réserves situées le long de la rivière Athabasca et sur les rives du lac Athabasca. Compte tenu de l'ampleur des activités dans la région et de l'ampleur des activités à venir, et compte tenu des problèmes liés à l'eau, nous savons pertinemment que les problèmes relatifs à la santé dans la communauté de Fort Chipewyan ont augmenté de façon importante au cours des années. Depuis le début des années 1970 et au cours des années 1980, 1990 et 2000, les taux de cancers, le lupus, l'asthme et les maladies de la peau ont connu une hausse dans la communauté de Fort Chipewyan. Non seulement les personnes âgées sont-elles malades, mais en plus, les jeunes le sont aussi.
    Nous ne savons pas ce qui cause ces effets dans la région, mais la communauté remet en question l'ampleur du développement dans la région, et tout le monde a une préoccupation commune: la question de l'eau.
    La communauté de Fort Chipewyan exerce toujours fortement nos droits garantis par traité et notre droit inhérent lié à la terre, et utilise les ressources hydriques qui nous entourent. Comme je vous l'ai dit hier à Fort Chipewyan, 78 p. 100 des membres de la communauté utilisent toujours des moyens traditionnels de vie en exploitant la terre. Nous récoltons de la nourriture de la terre et des eaux. Chaque jour, les animaux boivent dans la rivière Athabasca et dans d'autres étendues d'eau de la région. Notre peuple consomme toujours la nourriture, les animaux sauvages qui vivent à cet endroit, pour nourrir leurs familles.
    Nous habitons dans une communauté éloignée. Nous n'avons pas tous les produits luxueux qu'ont les gens du sud, qui peuvent tout simplement se rendre au magasin et acheter un grand contenant de lait pour un peu plus de trois dollars. Nous pouvons payer plus de 13 $ pour quatre litres de lait. Nos aînés et nos chefs de famille monoparentales, qui n'ont souvent pas d'emploi et vivent de revenus fixes, n'ont d'autre choix que de vivre sur la terre et sur ce qu'elle peut leur fournir.
    Compte tenu de tous les problèmes et des préoccupations en matière de santé dans la région, nous avons demandé l'élaboration d'un programme de surveillance communautaire. On continue de nous demander de fournir une solution pour régler ce problème, mais lorsque nous demandons des fonds pour un programme de surveillance communautaire, on nous les refuse en disant « nous ne voulons pas que vous fassiez en double ce que nous faisons déjà ».
    Nous ne pouvons pas fournir de solutions si vous ne nous fournissez pas les fonds dont nous avons besoin pour aller de l'avant et en arriver à nos propres constatations. C'est seulement à ce moment que nous serons en mesure de donner une solution, car si nous ne connaissons pas la cause du problème, nous ne pouvons pas proposer une solution.
(1135)
    J'ai répété ces paroles de nombreuses fois, et parfois, on m'a étiqueté comme étant le mauvais garçon parce que je m'étais exprimé ouvertement. Lorsqu'on parle de comportements radicaux, je suis profondément une personne radicale qui s'exprime ouvertement pour protéger la terre, l'environnement, l'air, les ressources hydriques et la santé humaine. Lorsqu'on s'aperçoit de l'ampleur de la destruction, avec l'industrie qui déchire la terre, pollue l'air et l'eau, et qui déplace les animaux, selon nous, il s'agit d'un comportement radical.
    Nous ne sommes pas opposés au développement. Comme je l'ai dit hier, le Canada sera probablement l'un des principaux pays du monde à être axé sur les besoins de l'industrie. Mais le Canada n'aura pas les industries des plus avancées au monde s'il ne tient pas compte de toutes les questions relatives aux premières nations, car les régions qui sont propices au développement sont situées dans les territoires traditionnels des premières nations.
    Lorsque le Dr O'Connor a tenu des propos alarmistes en indiquant que les questions relatives à la santé à Fort Chipewyan constituaient une cause d'inquiétude, il a été visé par quatre chefs d'accusation. Aujourd'hui, trois de ces chefs d'accusation ont été retirés, mais un autre reste en vigueur. Les habitants de Fort Chipewyan appuient le Dr O'Connor totalement pour avoir tiré la sonnette d'alarme. Santé Canada l'a envoyé représenter la communauté de Fort Chipewyan et prendre soin de notre santé. Il faisait son travail. Nous avons demandé au gouvernement du Canada et à Santé Canada de laisser tomber les derniers chefs d'accusation contre le Dr O'Connor et d'examiner les constatations de ce qui se passait dans la région.
    Pour terminer, je n'ai pas beaucoup de choses à dire parce qu'il reste peu de temps, mais je peux vous assurer, et j'avertis le gouvernement du Canada à cet égard, qu'en vertu de l'article 35 des Lois constitutionnelles, nos droits sont protégés si le Canada omet de respecter ses obligations en ce moment. Nous avons laissé ces terres en fiducie, et non en dévastation. Nous croyons que si rien n'est fait pour s'occuper des problèmes de la communauté de Fort Chipewyan — et je ne peux parler que pour Fort Chipewyan en ce moment, et encore plus pour la Première nation Athabasca Chipewyan, car j'en suis le chef — nous n'aurons d'autre choix que de prendre d'autres moyens, et de trouver des façons de régler ces problèmes en ayant recours au système judiciaire.
    J'ai dit cela hier, et je le redis aujourd'hui: nous ne prendrons pas les armes contre le Canada ou contre sa population dans le but de protéger nos territoires traditionnels. Il existe un système judiciaire mis en place pour tous les Canadiens. En tant que premières nations, nous faisons partie de la population canadienne. La seule chose qui nous différencie, c'est un traité que nous avons signé en 1899, et ce traité doit être respecté par le Canada pour protéger nos droits.
    Merci, monsieur le président.
(1140)
    En passant, j'aimerais dire à quel point nous avons été affectés par notre visite d'hier après-midi à Fort Chipewyan. Les membres en ont parlé pendant longtemps par la suite.
    En ce qui concerne les questions que vous avez soulevées aujourd'hui, y compris la question de la surveillance, si vous aviez été ici au cours des premières heures, vous auriez constaté que cette question a été un sujet important dans nos échanges avec MM. Schindler et Donahue. Alors merci d'avoir abordé cette question en particulier, entre autres.
    Chef Erasmus.
    Merci de me donner la possibilité de vous parler aujourd'hui.
    J'ai avec moi des copies de la résolution que nous, chefs, avons adoptée plus tôt cette année, et que j'aimerais distribuer aux membres du comité. Comme j'ai su à la dernière minute que j'allais venir ici, je remettrai une copie de ma présentation au greffier. Je pense bien pouvoir le faire dans les délais accordés.
    Mon nom est Bill Erasmus. Je suis le chef régional de l'Assemblée des Premières Nations des Territoires du Nord-Ouest, mais je suis aussi le chef national des Dénés. Nous comptons 30 communautés qui vivent en aval du projet de développement dans le nord de l'Alberta, lequel nous préoccupe énormément. Je suis aussi signataire du Traité 8, le même traité auquel tous les membres des premières nations ici présents souscrivent. Nous sommes la communauté qui est la plus au nord et la plus éloignée du Traité 8, ce qui veut dire que nous couvrons sensiblement le même territoire.
    Comme vous le savez, la mise en valeur des sables bitumineux se fait dans la région de Fort McMurray et de Fort McKay, comme l'a dit mon homologue tout à l'heure, c'est-à-dire en amont du bassin d'Athabasca.
    Les travaux actuels de développement des sables bitumineux a complètement changé le paysage du delta et du bassin hydrographique d'Athabasca. L'exploitation et la mise en valeur des sables bitumineux ont entraîné de graves conséquences, notamment la déforestation de la forêt boréale, l'exploitation de mines à ciel ouvert, l'assèchement de systèmes d'eau et de réseaux hydrographiques, la contamination par des produits chimiques, la perturbation de l'habitat et de la biodiversité, et la restriction des droits des Dénés, des Cris et des Métis en ce qui concerne la chasse et la trappe.
    Beaucoup de peuples de premières nations ne savent pas à quel point la nourriture sauvage traditionnelle que nous consommons est contaminée. Nous voudrions que le gouvernement procède régulièrement à l'analyse des aliments traditionnels pour s'assurer que le niveau de contaminants et de toxines ne dépasse pas les niveaux recommandés.
    Les nombreux effets de l'exploitation des sables bitumineux sur les eaux préoccupent beaucoup les communautés de premières nations. Par exemple, de grandes quantités d'eau sont utilisées pour l'exploitation des sables bitumineux, soit environ 349 millions de mètres cubes d'eau par année. Comme on l'a déjà dit, cela représente le double de la quantité d'eau utilisée par la ville de Calgary, sans parler du fait que 90 p. 100 de l'eau usée ne peut retourner au réseau hydrographique après usage.
    Les émissions de gaz à effet de serre attribuables à la production de sables bitumineux sont trois fois plus grandes que pour la production de pétrole et de gaz conventionnelle. On nous a informés que la production actuelle de sables bitumineux émet 27 mégatonnes par année, mais que la quantité d'émissions pourrait grimper entre 108 et 126 mégatonnes d'ici 2015. L'industrie des sables bitumineux est donc en voie de devenir le plus grand émetteur de gaz à effet de serre au Canada, ce qui ne ferait qu'augmenter la contribution du pays au réchauffement de la planète.
    Les communautés de premières nations qui vivent près des projets de sables bitumineux dans le nord de l'Alberta ont remarqué que les niveaux d'eau des lacs et des rivières avaient baissé à mesure que la production de pétrole augmentait.
    Les problèmes de santé chez les peuples de premières nations ont aussi atteint des niveaux alarmants compte tenu du fait que ces peuples dépendent étroitement des terres et des rivières. Le nombre de cas de cancers rares et étranges a augmenté, et il est devenu courant d'observer des anomalies chez des espèces sauvages. Malheureusement, le public et les gouvernements du Canada et de l'Alberta ne comprennent toujours pas que les communautés de premières nations sont les plus touchées et les plus affectées par la mise en valeur des sables bitumineux.
    Les terres ancestrales des premières nations de l'Alberta, de la Saskatchewan et des Territoires du Nord-Ouest sont détruites au profit de l'exploration et de l'extraction de sables bitumineux. Mais les premières nations ne sont pas consultées et ne reçoivent pas de compensation adéquate pour les terres perdues et détruites, les problèmes d'alimentation en eau, le non-respect des droits conférés par traité, et la perte de nourriture traditionnelle. Les nations dénée, crie et métisse vivent à proximité des gisements de sables bitumineux, principalement le long du bassin de la rivière Athabasca.
    Du 16 au 19 février 2009, la Nation dénée a convoqué les chefs à Yellowknife pour une rencontre visant à discuter des questions relatives aux Dénés. Au cours de cette rencontre, un certain nombre de résolutions ont été proposées concernant l'incidence de l'exploitation des sables bitumineux en Alberta — en particulier en ce qui concerne l'incidence sur l'eau. Nous vous remettons aujourd'hui une copie de la résolution qui a été adoptée.
(1145)
    Nous sommes déçus que les gouvernements de l'Alberta et du Canada ne soient pas à la hauteur de leurs responsabilités sur le plan financier, fiduciaire et moral afin de gérer les sables bitumineux de l'Alberta de façon responsable pour l'environnement. Nous sommes déçus que le gouvernement de l'Alberta ait encouragé l'expansion rapide des sables bitumineux de l'Alberta sans avoir d'abord mis en place les mesures de réglementation et de protection adéquates du point de vue environnemental afin de réduire l'impact de chacun des projets ou de l'ensemble des projets combinés. Nous sommes également déçus que le gouvernement de l'Alberta n'ait pas pris de mesures adéquates pour protéger l'eau, le poisson et les espèces migratoires.
    Cette mauvaise gestion ne concerne plus seulement les Albertains. Une menace imminente plane sur les communautés vivant en aval du bassin du fleuve Mackenzie, et plus imminent encore, au moment où on se parle, est le risque de contamination de l'eau provenant de fuites des bassins de décantation qui se trouvent sur la rivière Athabasca. Une grande brèche dans les bassins de décantation et un déversement important de substances toxiques dans les eaux de la rivière Athabasca et du bassin du fleuve Mackenzie auraient des conséquences catastrophiques impossibles à renverser.
    Par conséquent, il a été résolu que tous les membres de la Northwest Territories Association of Communities demandent au gouvernement de l'Alberta de cesser immédiatement l'expansion des projets de sables bitumineux jusqu'à ce que les mesures suivantes aient été mises en place: un, un plan d'urgence public advenant une brèche catastrophique des bassins de décantation des sables bitumineux; deux, un plan pour réparer les fuites existantes des bassins de décantation; trois, un plan de 10 ans visant la régénération des bassins de décantation n'étant pas impliqués dans le déversement d'effluents toxiques dans le système hydrographique; quatre, un engagement d'utiliser des technologies produisant des résidus secs pour tout développement futur de sables bitumineux; et cinq, un engagement de la tenue d'audiences environnementales approfondies — auxquelles participeraient les communautés des Territoires du Nord-Ouest — sur l'impact cumulatif des projets de sables bitumineux, y compris les plans prévoyant le retour des eaux des bassins de décantation dans la rivière Athabasca.
    Il a aussi été résolu que jusqu'à ce que ces conditions soient respectées, nous demanderons la collaboration de tous les gouvernements des Territoires du Nord-Ouest et de l'Amérique du Nord en vue de la mise en oeuvre d'une norme sur le combustible à faible teneur en carbone afin de réduire ou d'éliminer entièrement l'utilisation de sables bitumineux usagés.
    Parlons maintenant des recommandations. Pour revenir à la raison de notre présence ici aujourd'hui, monsieur le président, sachez que nous sommes heureux de pouvoir présenter notre point de vue au comité concernant l'incidence négative de l'exploitation des sables bitumineux sur les terres et les communautés de premières nations.
    Mises à part les demandes de consultation et d'accommodation, il faudrait attendre que les premières nations donnent leur consentement libre et éclairé avant de poursuivre les travaux relatifs aux sables bitumineux.
    La gouvernance des gouvernements fédéral et provincial doit tenir compte des connaissances exceptionnelles des premières nations dans son processus décisionnel, et ce, parce que ces connaissances leur viennent de la relation étroite qu'ils entretiennent depuis toujours avec les terres et les rivières.
    En conclusion, monsieur le président, il est essentiel que le gouvernement fédéral reconnaisse le pouvoir et l'autorité des premières nations. Le gouvernement ne peut continuer à faire cavalier seul, puisque les premières nations ont tant à offrir. Nous insistons pour que les gouvernements du Canada et de l'Alberta prennent leurs responsabilités pour s'assurer que les impacts cumulatifs et environnementaux de l'exploitation des sables bitumineux n'aient pas de conséquences irréparables pour la planète et les générations futures.
    Une fois de plus, monsieur le président, nous demandons au comité d'inclure nos recommandations et nos résolutions dans son rapport pour ce qui est de cesser toute expansion future des activités liées aux sables bitumineux jusqu'à ce que les mesures dont j'ai parlé concernant les bassins de décantation soient prises.
    Merci, monsieur le président.
(1150)
    Merci beaucoup, chef Erasmus.
    Nous avons le temps pour une période de questions de six minutes, en commençant par M. Trudeau.
    Merci beaucoup à vous tous pour vos exposés. Masi cho.
    Je commencerai par le chef Boucher, pour y aller dans l'ordre. Nous avons survolé Fort McKay hier matin, et on nous a dit que la plupart des citoyens vivant à Fort McKay travaillaient dans le cadre des projets d'exploitation et de développement des sables bitumineux. Est-ce vraiment le cas?
    Vous avez dit que vous aviez perdu 60 p. 100 de vos territoires de trappe en raison de l'établissement des mines, par exemple. Y a-t-il eu des changements dans le style de vie et le travail des habitants de Fort McKay?
    Oui, c'est exact. Quand les militants anti-fourrure ont obtenu gain de cause dans les années 1980, notre communauté a perdu le seul moyen économique de subsistance qu'elle avait. Les seules possibilités d'emploi qu'il nous restait étaient dans le secteur de l'extraction des ressources, si bien que nous nous sommes adaptés aux nouvelles possibilités économiques. Nous avons très bien réussi et avons trouvé des emplois pour nos peuples et obtenu des contrats pour nos entreprises. Nous sommes l'une des entités qui réussit le mieux dans la région, bien qu'il nous faille toujours concilier les intérêts économiques et les impacts environnementaux.
(1155)
    Merci.
    Vous avez aussi dit, dans votre exposé, que le cadre de gestion de l'eau n'était peut-être pas suivi — « le manque d'impact sur les grandes décisions relatives à la réglementation », c'est le langage que vous avez utilisé — pour ce qui a trait à la gestion de l'eau. Avez-vous l'impression ou en arrivez-vous à la conclusion que le cadre de gestion de l'eau actuellement en place n'est pas bien appliqué ou qu'il n'est pas suffisant?
    Je suppose que vous faites référence au débit minimal requis à cet égard. Nous avons été sollicités au début de l'année 2005, je crois — j'ai encore des lettres à ce sujet —, lorsque la décision a été prise par la Commission chargée de l'économie des ressources énergétiques concernant l'application par Shell Canada et CNRL. La recommandation qui en est ressortie était de laisser la CEMA fixer le débit minimal requis. Eh bien, la CEMA s'est lancée dans cet exercice mais le débit minimal requis qu'elle a fixé ne suffisait pas à protéger les pêches et l'écosystème du bassin de la rivière Athabasca.
    Le MPO s'est engagé à définir une norme si la CEMA n'arrivait pas à un chiffre viable avant la fin du délai établi. Après la date butoir, le MPO est arrivé avec une proposition, que nous avons d'abord appuyée — sans aucun fondement scientifique, mais au moins elle protégeait les intérêts du système hydrographique de la rivière Athabasca. Nous avons convenu que ce chiffre serait appliqué jusqu'à ce que des travaux scientifiques soient menés sur la rivière Athabasca.
    Le ministère de l'Environnement de l'Alberta a participé à l'exercice, ainsi que des représentants de l'industrie de Calgary. De ce que j'en sais, les représentants de l'industrie et du ministère de l'environnement de l'Alberta se sont rencontrés. Ils ont soulevé certaines préoccupations concernant la proposition du MPO. À la suite de cette réunion, les chiffres et les objectifs ont changé.
    Nous avons perdu confiance en la capacité du MPO d'établir les objectifs, soit le débit minimal requis afin de protéger la rivière Athabasca. Nous avons aussi demandé que d'autres travaux scientifiques soient menés sur le système hydrographique de la rivière Athabasca de manière à pouvoir protéger l'intégrité écologique de la rivière. Or, aucuns travaux n'ont été mis en branle avec notre communauté depuis.
    Merci.
    J'ai une question pour le chef Adam. Je passe à autre chose, car j'ai beaucoup trop de questions pour le temps qui nous est accordé. Celle-ci concerne le fait que vos aînés et vos peuples dépendent de la nourriture du pays.
    Nous en avons parlé hier. Quand vous allez sur vos terres, il est maintenant pratique courante d'amener avec vous des bouteilles ou des jarres d'eau, puisque vous ne pouvez plus vous abreuver dans les rivières et les cours d'eau durant votre voyage. Êtes-vous préoccupé par le fait de manger des animaux qui dépendent eux-mêmes des rivières et des cours d'eau auxquels vous ne vous abreuvez plus, et craignez-vous que cela n'entraîne des problèmes de santé chez vos peuples?
    C'est ce que nous pensons au moment où on se parle, que les problèmes de santé et les maladies rares qui surgissent dans notre communauté sont attribuables à la mauvaise qualité de l'eau dans ces régions, compte tenu des grandes étendues d'eau près desquelles nous vivons. Nous vivons toujours de la terre et de la cueillette.
    À la fin des années 1980, nous avons commencé à remarquer que les membres de la communauté avaient commencé à amener de l'eau de Fort Chipewyan dans la forêt parce qu'ils ne voulaient plus boire l'eau du lac Athabasca, ni des rivières, parce qu'il se passait quelque chose et qu'ils n'étaient pas certains de savoir de quoi il s'agissait. Depuis, ils ne font plus confiance du tout à l'eau.
    C'est toujours la question qui revient: l'eau. Quand vous demandez aux membres des communautés quelle est la source de tous ces problèmes, probablement que dix sur dix vous diront que tout est à cause de l'eau.
(1200)

[Français]

    On passe maintenant à M. Ouellet.

[Traduction]

    Merci.
    Je vais être bref, car je n'ai aucune question en particulier. Vous avez tous été très clairs ce matin. Je vous remercie d'être revenus; je crois que vos points étaient encore plus clairs qu'hier.
    Selon moi, ce qui compte le plus, c'est de se rappeler ce que vous avez dit et de ne pas perdre de vue que le traité a été conclu entre deux nations. Je vais faire tout ce qui est en mon pouvoir, parce que je crois que vous avez raison.
    Merci beaucoup d'être venus.
    Merci, monsieur Ouellet.
    Madame Duncan.
    Merci, monsieur le président.
    Merci encore pour vos exposés et pour le temps que vous avez pris pour nous rencontrer aujourd'hui. C'est très apprécié.
    Je me demandais si les chefs pourraient nous fournir des cartes montrant où se trouvent vos terres ancestrales et vos réserves, puisque la question a déjà été soulevée hier et qu'elle l'est encore aujourd'hui. Malheureusement, nous n'avons pas de cartes pour nous situer. Je crois que ça pourrait nous aider si nous pouvions voir...
    Oh, nous avons le Traité 8, mais ce serait important de voir où se trouvent les terres traditionnellement consacrées à la cueillette et l'endroit où se trouvent les réserves. Je crois que ça pourrait vraiment nous être utile.
    J'ai quelques questions pour vous.
    Je crois que vous, chef Adam — ou était-ce plutôt la Nation crie Mikisew? — avez soulevé la question du manque de surveillance dans la collectivité.
    Était-ce vous, chef Adam?
    Chef Allan Adam: Oui.
    Mme Linda Duncan: C'est un point très important, et je suis contente que vous le souleviez.
    Avant, je faisais partie du comité chargé de fournir un programme de formation destiné aux premières nations concernant la surveillance fondée sur la collectivité, mais on m'a fait voir à quel point cette pratique était inutile si les fonds nécessaires à l'exécution du programme de surveillance n'étaient pas débloqués. Pourriez-vous nous en dire davantage sur ce point?
    Pour perdre moins de temps, je vais vous poser tout de suite ma deuxième question car vous risquez de faire des liens entre les deux. Si j'ai bien compris, vous voulez lancer des mesures de surveillance fondée sur la collectivité. Je présume que ce que vous avez en tête, c'est la pêche, les animaux sauvages, la qualité de l'eau, et possiblement la qualité de l'air, mais peut-être également des études sur la santé. Je vais vous laisser nous en dire davantage.
    Mes autres questions, et je vais laisser à chacun des chefs le soin de répondre, concernent l'étude sur la santé. Ce que je ne comprends toujours pas, c'est que, je pensais que c'était Santé Canada qui était responsable de fournir du financement et du soutien concernant les services de santé dispensés aux peuples des premières nations, mais lorsque des problèmes ont été signalés, c'est l'Alberta Cancer Board qui a procédé à l'étude.
    Peut-être pourrez-vous m'expliquer pourquoi tout cela a été transféré à un organisme provincial. Mais ce que je veux surtout savoir, c'est si vous avez été consultés quant à la méthode, aux termes, et aux autres détails des études.
    Par ailleurs, comme l'a dit le Cancer Board, il faut mener des études de suivi sur certains taux de cancer. Avez-vous été consultés sur ces études de suivi, sur les méthodes à utiliser, le moment où elles seront menées, et ainsi de suite?
    Ça concerne le programme de gestion fondé sur les communautés. Nous avons parlé plusieurs fois de la surveillance fondée sur les communautés à différentes rencontres afin de soulever la question. Même si on oublie les questions de santé de Fort Chipewyan et le développement intensif de la région, il nous semblait simplement que nous avions besoin d'un programme de surveillance fondé sur les communautés à Fort Chipewyan quand toutes ces questions ont été soulevées.
    Comme je l'ai dit plus tôt, pour que nous puissions examiner les résultats et formuler des solutions aux problèmes, il nous faut pouvoir bien informer le public. Sans financement, nous ne pouvons y arriver. Nous voulons prélever des échantillons d'eau, de sédiments, de végétaux, d'air et de nourriture sauvage dans la région afin d'obtenir des résultats et de cibler une région où les problèmes pourraient survenir. Si nous arrivons à des résultats, nous pourrons alors nous pencher sur la méthodologie pour tenter de trouver une solution au problème. C'est pourquoi nous avons mis beaucoup de pression en ce sens.
    À un certain moment, les gens ont eu la mauvaise impression que nous tentions d'obtenir des résultats en vue d'entreprendre des poursuites en justice. Or, la seule raison qui pourrait nous pousser à intenter des poursuites, c'est que rien n'a été fait jusqu'à maintenant pour résoudre les problèmes. Quand rien n'est fait et qu'on se sent négligé, quel autre moyen pouvons-nous prendre? Il n'y a aucun autre moyen que de nous tourner vers les tribunaux.
    C'est pourquoi il nous faut un programme de surveillance fondé sur les communautés. Nous devons former nos gens pour qu'ils soient en mesure de surveiller certains secteurs. Et quand je parle de surveillance, je parle de choisir une région et de l'utiliser constamment pendant trois ans. Vous ne pouvez pas sélectionner une région, puis vous en éloigner pour en choisir une autre, parce que vous ne seriez alors pas en mesure de savoir ce qui se passerait année après année dans la première région. Des régions différentes donneront des résultats différents, et c'est pourquoi il vous faut y retourner. C'est la façon de mener une analyse, et c'est la façon dont les scientifiques mènent leurs analyses de nos jours.
    Nous avons choisi de fournir des renseignements généraux. Pas besoin d'être un génie pour établir des lignes directrices adéquates; tout ce qu'il vous faut, c'est du bon sens, et du bon sens, nous en avons tous. Quand on néglige le bon sens, les problèmes surgissent ici et là, puis partout. Par conséquent, je me permets de parler de surveillance fondée sur les communautés.
    Je crois que le chef Marcel, ou Georges, pourront élaborer un peu plus sur les questions de santé.
(1205)
    Merci beaucoup, chef Adam.
    Nous passerons maintenant à M. Warawa, si ça vous convient, puisque les six minutes de Mme Duncan sont écoulées.
    Monsieur Warawa.
    D'accord, merci, monsieur le président.
    Merci d'être venus devant ce comité.
    J'ai eu la chance de rencontrer plusieurs d'entre vous hier à Fort Chipewyan. Merci pour vos efforts et pour être venus devant le comité.
    À quel endroit les communautés que vous représentez puisent-elles leur eau potable, et de quelle façon est-elle testée? Qui effectue ces tests?
    Nous pouvons peut-être commencer par le chef Erasmus.
    Notre eau potable provient de la rivière Yellowknife, qui, heureusement, coule de l'autre sens; elle prend naissance dans la bande de Barren Lands, et nous vivons en aval. L'eau du bassin hydrographique du fleuve Mackenzie se jette dans le Grand lac des Esclaves, mais nous ne la buvons pas. Nous sommes donc chanceux de ne pas avoir à prendre notre eau dans le bassin dont il est question.
    Qui teste la qualité de votre eau?
    Il existe des systèmes fédéraux-territoriaux de surveillance. De ce que je sache, nous sommes aussi impliqués en tant que premières nations. Le système est très différent dans les Territoires du Nord-Ouest, comme vous le savez probablement.
    Donc, vous dites que c'est le gouvernement fédéral qui effectue les tests.
    Principalement, oui.
    Merci.
    C'est à vous, chef Adam.
    Notre eau potable provient du lac Athabasca. Notre valve d'alimentation se trouve tout près de Monument Hill. Elle provient de la rivière Athabasca et se jette dans le lac Athabasca, qui, à son tour, se jette plus bas, en passant par la communauté de Fort Chipewyan. Nous prenons notre eau potable directement du lac Athabasca.
    Les tests sont menés par la municipalité. C'est elle qui régit l'eau. Elle envoie des échantillons tous les jours dans certains laboratoires de la région, probablement à l'Université de l'Alberta ou dans d'autres labos. Ces tests permettent de vérifier la présence de contaminants communs comme E. coli ou d'autres trucs du genre, mais aucune analyse approfondie n'est faite à partir de la source, et c'est pourquoi la communauté soulève constamment la question qu'il serait peut-être temps de déplacer la valve d'alimentation du lac Athabasca vers un autre bassin ou un plan d'eau intérieur pour veiller à ce que la communauté ait une eau potable.
    Alors les gens se sentiront en sécurité, mais pour le moment, ils ne font pas confiance à l'eau. Nous n'avons pas le choix de boire l'eau du robinet. Une bouteille d'eau coûte 3 $. Et on parle seulement de 750 millilitres d'eau, même pas un litre, et nous devons quand même payer 3 $ pour ça.
(1210)
    Quels sont les résultats des tests menés par la municipalité concernant la qualité de l'eau? Selon elle, l'eau est-elle potable?
    Elle dit qu'elle est bonne à boire. Elle dit qu'elle est bonne et tout, mais il y a d'autres problèmes dans la région. Étant donné qu'elle ne vérifie pas la quantité de métaux lourds dans l'eau, nous sommes d'avis que les tests et les résultats ne sont pas adaptés à la région. C'est pourquoi la communauté veut que la valve d'alimentation soit déplacée ailleurs.
    Avez-vous demandé à la municipalité de dire à l'Université de l'Alberta de tester les métaux lourds?
    Nous avons clairement demandé, au cours de réunions, qu'ils commencent à vérifier ce genre de choses, mais étant donné que les tests coûtent très cher, ils ont refusé de le faire. C'est pourquoi ils ne font que le strict minimum. Ils ne font qu'une vérification sommaire.
    Elle ne réagit que lorsqu'il y a des problèmes et que Santé Canada s'en mêle, par exemple en interdisant de consommer l'eau des robinets et en demandant à la communauté de faire bouillir l'eau jusqu'à avis contraire. C'est arrivé à quelques reprises dans les dernières années.
    Reste-t-il du temps pour l'autre...?
    Oui, si vous le désirez.
    Allez-y, chef Boucher.
    Nous avons choisi de puiser notre eau potable dans la rivière Ells, qui naît dans les collines Birch et qui se jette dans la rivière Athabasca. La municipalité fait aussi fonctionner l'usine de traitement des eaux en vertu d'une entente que nous avons conclue avec elle il y a plusieurs années. Selon cette entente, elle doit aussi procéder aux prélèvements d'échantillons concernant la production d'eau.
    Comme preuve de nos efforts administratifs, nous prélevons aussi des échantillons ponctuels, tous les jours je crois, à différents points de la communauté. Nous le faisons tant dans les établissements que dans les foyers. Nous les envoyons aux fins d'analyse et c'est Santé Canada qui nous donne les résultats.
    Notre eau est sûre et respecte les normes canadiennes en matière d'eau potable.
    Merci.
    C'est à vous, chef Marcel.
    C'est la même chose que ce qu'a dit le chef Adam; nous prenons notre eau de la communauté.
    Sur la réserve, nous n'avons pas d'eau comme telle. Nous transportons l'eau de la communauté à la réserve, puis, la Nunee Health Authority prélève des échantillons deux fois par semaine et les envoie à Santé Canada, qui nous donne ensuite les résultats. Ils ne font aucun test de produits chimiques. Ils ne font que s'assurer que l'eau est sûre, et qu'elle ne contient aucun niveau trop élevé de produits chimiques, comme les produits de blanchiment, le fer, et ainsi de suite.
    Que voudriez-vous que le gouvernement fédéral fasse pour aider à la surveillance et veiller à ce que l'eau soit potable?
    Ce que je voudrais, c'est qu'il veille à ce que l'eau soit bonne à boire. Les gens des communautés la boivent toujours, même s'ils ne sont pas sûrs à 100 p. 100; ils ont toujours des doutes sur sa qualité. Il doit y avoir davantage de tests, pour s'assurer qu'aucun produit chimique, comme les PHA et d'autres produits du genre, ne s'y retrouvent pas en quantité élevée. Je ne connais pas le nom scientifique de tous ces produits chimiques, mais il faut que des tests soient menés pour en détecter la présence pour que nous puissions nous sentir en sécurité.
    Nous ne pouvons pas tous acheter de l'eau embouteillée dans les communautés. Certaines communautés font encore bouillir leur eau. Même si le gouvernement de l'Alberta dit que l'eau est bonne à boire, les gens la font toujours bouillir pour en être bien certains. Je suppose que c'est une façon pour eux d'assurer leur protection.
    Merci.
    Avons-nous le temps pour une dernière question au chef Erasmus?
    Votre temps est presque écoulé, mais allez-y.
    Dans la résolution que vous nous avez présentée aujourd'hui, vous avez souligné cinq points. Au point 2, vous parlez d'un « plan pour réparer les fuites existantes des bassins de décantation ». Au point 5, vous parlez « d'un engagement de la tenue d'audiences environnementales approfondies... y compris prévoyant le déversement des eaux des bassins de décantation dans la rivière Athabasca ».
    Ce que nous avons entendu dans les réponses à nos questions et les témoignages sur ces points, c'est qu'il n'y aucune fuite dans les bassins de décantation et aucune eau n'est rejetée des bassins de décantation dans la rivière Athabasca. Concernant ces deux points, avez-vous des preuves quelconques que vous pourriez fournir au comité concernant une fuite des bassins de décantation? Avez-vous des preuves permettant de démontrer que l'on planifie de rejeter les eaux des bassins de décantation dans la rivière Athabasca?
(1215)
    Votre question s'adresse-t-elle au chef Erasmus?
    Allez-y, chef Erasmus.
    Merci pour votre question.
    Avant de répondre, j'aimerais préciser que dans ma réponse précédente concernant l'approvisionnement en eau, je n'ai parlé que de ma communauté à Yellowknife, mais il y en a 30 autres le long de la rivière qui peuvent puiser leur eau dans le fleuve Mackenzie, par exemple. Il se peut qu'elles s'approvisionnement directement. Je tenais à le préciser.
    Pour ce qui est de savoir si nous avons des preuves de fuites, je ne les ai pas avec moi. Je peux certainement vérifier et faire parvenir au comité tout ce que j'ai concernant les bassins de décantation. Je peux vous fournir cette information.
    Merci, chef Erasmus.
    Cela conclut ce segment. Merci beaucoup à vous tous. Ça a été très agréable de vous avoir avec nous aujourd'hui.
    Nous suspendrons la séance jusqu'à 13 heures.
    Merci.

(1300)
    J'inviterais les témoins à prendre place pour que nous puissions reprendre.
    Nous avons trois témoins: M. Tom Unka, M. Sam Gargan, et le chef Mercredi.
    J'aimerais faire remarquer aux membres que le chef Mercredi a conduit 12 heures pour venir ici. Nous l'apprécions beaucoup.
    Nous entendrons les exposés de cinq minutes, suivis par une période de questions. Nous serons très libéraux — un petit « L » à libéraux.
    Chef mercredi, voulez-vous commencer?
    Mon nom est Albert Mercredi. Je suis chef de la Première nation du Fond du Lac. Je suis membre de l'une des communautés qui vivent en aval du projet de développement des sables bitumineux.
    Pour vous situer durant mon exposé, j'ai demandé aux organisateurs de vous fournir le système cartographique d'où nous vivons, dans la région de l'Athabasca. Le processus de planification concernant l'utilisation des terres de l'Athabasca vous sera aussi présenté à titre de référence.
    Sur ce, bon après-midi aux représentants élus, aux aînés, aux membres, et à vous, mesdames et messieurs. Merci. C'est pour moi un honneur d'être ici pour représenter ma communauté, le peuple denesuline, et de pouvoir vous parler de ces questions importantes.
    Je vais parler pour mon peuple, les Denesulines d'Athabasca, qui vit dans la région située au nord et au sud du 60e parallèle. En langue dénée, cette terre s'appelle Dene Nene. Ça signifie « la terre » en français.
    Nous remarquons que la durabilité de l'environnement et la prospérité des économies occidentales est un sujet d'importance au programme. Ce qui compte pour notre peuple, c'est que les terres et les eaux d'Athabasca ont assuré la survie de notre peuple pendant des milliers d'années, et que le peuple déné a assuré la survie des terres et des eaux.
    Nos aînés nous ont enseigné, et nous y croyons, que si nous prenons soin des terres et des rivières, elles prendront soin de nous en retour. C'est pourquoi le peuple déné considère que sa principale richesse est l'air pur, l'eau claire et les terres propres sur lesquelles il peut chasser et trapper pour assurer sa subsistance. La prospérité est secondaire pour nous.
    De nos jours, nos terres, nos rivières et nos ressources nous sont enlevées par des entreprises nationales et internationales désirant exploiter ces ressources. Elles envahissent la terre à un rythme effarant. Cet empressement a alarmé la population, sans parler des rapports faisant état de la dégradation de l'environnement et du peuple déné.
    L'industrie énergétique a envahi les terres et les rivières, la plupart du temps sans consulter ni respecter notre peuple; néanmoins, la plus grande menace pour nous est l'envahissement de l'industrie pétrolière et gazière sur notre territoire et les activités menées dans la région de Fort McMurray, du côté de l'Alberta. Récemment, on a annoncé la coupe de milliers de kilomètres de forêt dans la région où se trouve Oilsands Quest, en Saskatchewan, et la construction de routes sur notre territoire, dans l'intention d'entamer la production d'ici un an ou deux.
    Le peuple déné d'Athabasca est très préoccupé par les rapports récemment déposés par l'Alberta et mettant au jour la nature toxique des sables bitumineux d'Athabasca exploités dans la région de Fort McMurray, ce qui constitue aussi une préoccupation sur la scène internationale. Le peuple déné a été alarmé en apprenant les souffrances de nos parents et amis de la Première nation Denesuline de Fort Chip — qui a connu le plus grand nombre de morts dans la communauté denesuline — en raison de cancers et de maladies qui seraient causés par la présence de substances toxiques dans l'eau en raison de la production de sables bitumineux à Fort McMurray.
    Le peuple déné s'inquiète de savoir si les eaux coulant vers le nord dans la rivière Athabasca transportent des substances toxiques dans notre lac Athabasca et à nos portes, du côté de la Saskatchewan. De plus, les rapports de l'Alberta et de la Saskatchewan ont révélé une hausse des niveaux de pluies acides attribuable aux sables bitumineux de Fort McMurray. Le peuple déné est victime des effets nocifs de ces projets toxiques sur les poissons et les animaux sauvages, qui sont à la base de notre survie et qui contribuent à l'économie denesuline.
(1305)
    Tant le projet de sables bitumineux de Fort McMurray que celui d'Oilsands Quest de Saskatchewan ont été mis en oeuvre sans la consultation ni la participation du peuple denesuline d'Athabasca. Dans une lettre qui m'a été adressée, une des entreprises indique que selon elle, elle n'a aucune obligation de consulter notre peuple et que la décision revient exclusivement aux provinces.
    Nos aînés denesulines en parlaient depuis des années et nous ont mis en garde contre la destruction de l'environnement si nous ne prenions pas soin des terres, des rivières, et des animaux sauvages, et si nous ne prenions pas nos responsabilités en tant qu'habitants de la terre. À une époque où le monde et la nation du Canada sont en crise et cherchent désespérément des sources d'énergie propres, les provinces de l'Alberta et de la Saskatchewan et toutes les provinces de l'Ouest doivent montrer l'exemple et garder nos terres et nos eaux en parfait état. La province de l'Alberta devrait se concentrer à nettoyer le gâchis environnemental dont elle est responsable, et la province de la Saskatchewan devrait se préoccuper des dommages et de la destruction causés par la promotion et la mise en oeuvre de projets similaires.
    Nous sommes conscients que la région d'Athabasca est l'une des plus attirantes du monde pour l'exploration de ressources énergétiques et l'extraction de ressources compte tenu de la demande pour l'énergie produite à partir d'hydrocarbures et d'uranium. Toutefois, les activités liées à l'industrie pétrolière et gazière et à l'industrie nucléaire sont une menace pour le mode de vie traditionnel, la culture et les valeurs de mon peuple. Quand nous allons sur nos terres, nous sommes souvent surpris de tomber sur de nouveaux camps d'exploration ayant reçu l'autorisation des provinces de se rendre sur les terres et les rivières denesulines sans avis ni consultation, et sans avoir d'abord obtenu le consentement du gouvernement de la première nation.
    Depuis beaucoup d'années, notre peuple n'a pas eu les chances qu'il aurait dû avoir de se développer, de parfaire son éducation, d'améliorer sa formation, et de faire croître ses entreprises, ni de tirer profit des occasions que représente l'industrie énergétique. Ces entreprises étrangères, avec leurs travailleurs canadiens, en ont bénéficié beaucoup plus que notre peuple au fil des ans. Nous reconnaissons que l'industrie énergétique profite à notre peuple d'une certaine façon, mais les entreprises qui exploitent l'énergie et l'économie des provinces en ont bénéficié beaucoup plus que nous, si l'on compare.
    C'est pourquoi notre peuple de première nation a décidé d'adopter une approche proactive en deux volets afin de préserver les intérêts des Denesulines d'Athabasca aujourd'hui, et pour les générations futures.
    Premièrement, nous avons créé notre propre société de développement régional afin d'essayer de contrôler le développement de manière à ce que le peuple déné d'Athabasca puisse en profiter et, surtout, de permettre à nos chefs d'avoir leur mot à dire, du point de vue industriel, sur la façon dont les terres seront exploitées. Cela nous a permis de bénéficier de certains avantages, notamment en ce qui concerne l'éducation, la formation, l'emploi et le développement des entreprises.
    Deuxièmement, nous prenons des mesures proactives afin de faire respecter nos droits et exigeons que les provinces et les entreprises d'énergie suivent un processus qui les force à fournir de l'information aux dirigeants denesulines concernant l'exploration de l'entreprise, ce qui veut dire de rencontrer notre gouvernement de première nation aussi souvent que nécessaire avant que les permis ne soient octroyés.
    Troisièmement, nous avons établi un plan concernant l'utilisation des terres d'Athabasca, lequel a été approuvé par tous les chefs denesulines d'Athabasca et les communautés dénées voisines. Vous l'avez dans la pièce ici. Le plan d'utilisation des terres d'Athabasca a toutefois été ignoré par les provinces, si bien que l'accès au territoire a été accordé à des étrangers pour des périodes beaucoup trop longues.
    Quatrièmement, nous avons établi un protocole afin de définir un cadre concernant le devoir de l'État en matière de consultation et d'accommodation, ce qui comprend un processus d'examen et d'approbation des projets de développement des ressources. Ce protocole a été établi en réponse directe à l'absence de processus officiel jusqu'à maintenant, absence qui semble refléter le manque de volonté politique de la part du Canada et des provinces, qui refusent d'exercer leur leadership. Dans le cas des Denesulines d'Athabasca, l'État semble vouloir déléguer sa responsabilité de son devoir de consultation à l'industrie énergétique. C'est inacceptable, et c'est le peuple denesuline d'Athabasca qui se retrouve à devoir assumer les conséquences de la politique de l'État.
(1310)
    Les dirigeants des Denesulines Athabasca doivent agir pour éviter que des projets néfastes et destructeurs se concrétisent, dans un contexte provincial où notre peuple ne serait pas pris en considération, et où aucun processus officiel de consultation et d'accommodement n'assure sa participation.
    Nous devons donc travailler à faire respecter nos droits, nos intérêts et nos titres face au Canada, aux provinces et aux entreprises qui ne nous consultent pas. Nous ferons ce qu'il faut pour participer à la négociation des conditions qui permettraient l'accès à nos terres et à nos eaux, et faire face aux conséquences éventuelles. L'obligation de consulter doit inclure nos communautés dans la région de l'Athabasca, et il est important d'accommoder leurs intérêts.
    L'Athabasca ne peut plus attendre. C'est le temps de prendre position, car nous risquons de tout perdre. Le peuple denesuline n'a pas le choix.
    C'est le point de vue des communautés de l'Athabasca. Dans cette région, que je représente, il y a des activités minières depuis plus de 67 ans, trois sites miniers abandonnés et 39 sites d'exploration satellites qui n'ont jamais été nettoyés. Nous venons d'une région riche en uranium, qui se développera encore dans les années à venir, et voilà qu'Oilsands Quest se met de la partie.
    Je vous remercie de m'avoir écouté, mesdames et messieurs. Merci beaucoup.
(1315)
    Merci, chef Mercredi.
    Passons maintenant à M. Paulette, ou à un autre témoin qui voudrait prendre la parole.
    Nous vous écoutons.
    Voici ce que je voudrais dire au comité.
    Dans notre langue, quand nous disons « Tu degiha », ça veut dire « L'eau est sacrée »; « Tubeta tsina », « L'eau est la vie »; « Tu nere dela tulahta », « L'eau est comme notre sang qui circule dans la Terre-Mère ».
    Ce dont nous parlons aujourd'hui, ce qui est l'objet de cette audience, c'est l'eau, par opposition au pétrole. Comme les chefs l'ont déjà dit, les traités nous confèrent des droits sur l'eau. La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui a été adoptée aux Nations Unies, fait référence à l'eau et aux droits sur l'eau.
    Comme vous le savez, le printemps amène la vie. Il amène la vie, mais cette substance toxique, empoisonnée, qui est versée dans la terre — et vous l'avez vu, vous avez survolé le secteur... La vie arrive au printemps, comme une femme qui donne la vie, mais si vous injectez des substances toxiques à une femme enceinte, vous allez la tuer, et tuer aussi l'enfant. C'est comme ça que les Dénés perçoivent ce qui se produit.
    J'ai participé à l'enquête Berger dans les années 1970. Je voudrais parler de deux façons de voir le monde. La première est la colonisation. Les colonisateurs croient que les Autochtones doivent être assimilés et intégrés à une économie basée sur les salaires. C'est une mentalité très coloniale, qui perdure. Ça veut dire que cette économie doit prospérer aux dépens de notre « Dene chanie », notre culture. Si on traduit littéralement, ça signifie « le chemin que nous suivons ». Ça veut dire que notre mode de vie, notre perception du monde, est rétrograde. Nous menons une vie simple, donc nous devons être colonisés.
    Notre peuple fait maintenant des efforts pour se décoloniser, carrément. L'enquête Berger a joué un rôle important dans cette histoire, et c'est ce qui se produit encore ici, mais de façon beaucoup plus limitée. Pour se décoloniser, il faut simplifier, et prendre en main notre mode de vie, pour que notre culture, notre Dene chanie, survive, comme les cultures d'autres peuples qui ont préservé et protégé leur mode de vie, et l'ont entretenu. Je veux juste dire que nos investisseurs nous demandent de ne pas détruire cette culture, et ne permettront pas que nous le fassions. C'est aussi simple que ça.
(1320)
     Je vis près de la frontière des Territoires du Nord-Ouest. Je vous ai fourni des cartes de la rivière des Esclaves. On nous appelle les Dénés Phabettie, ce qui signifie « début des rapides ». L'histoire de ces rapides est fascinante. Notre existence et notre survie dépendent entièrement de ce secteur. Nous sommes à côté du parc national Wood Buffalo. Le gouvernement de l'Alberta a désigné ce corridor comme site patrimonial.
    Nous polluons la rivière. Et maintenant, ATCO et TransCanada PipeLines proposent de construire un ouvrage à partir du réservoir pour bloquer la rivière, afin de produire de 1 000 à 1 500 mégawatts d'électricité. Ça n'a pas de bon sens. L'eau est polluée. C'est comme si on bouchait le réseau d'égouts de la ville. Tout le réseau sera pollué, et ça ne sera pas long. Mais c'est ce qu'ATCO et TransCanada proposent. Alors la rivière va mourir — nos poissons, les autres animaux, etc. Les sables bitumineux détériorent le beau territoire dont je proviens. C'est la réalité.
    J'habite près de la rivière, à 180 ou 200 milles des sables bitumineux. Il y a deux ans, je m'étais rendu à la rivière, mais j'avais oublié d'apporter de l'eau à boire, et j'ai été malade pendant trois jours parce que l'eau de la rivière est polluée. Comment est l'eau? Comment vont les poissons? Les poissons sont en péril dans cette rivière, dans cette eau. Nous avons vu des boues brutes dans l'eau. Lorsque les gens vont pêcher, ils trouvent des algues vertes dans leurs filets. Ça ne s'était jamais vu. Il y a de la mousse à la surface de l'eau, et ça ne s'était jamais vu non plus. Le seul système de contrôle de la rivière est celui qui a été installé où j'habite, à Fort Fitzgerald. Tout ce qu'il mesure, c'est le débit et la profondeur de l'eau. C'est tout ce qu'il fait.
    D'après l'institut Pembina, la rivière a baissé de 35 p. 100 depuis 1971. Je vis au bord de la rivière. J'emprunte la rivière pour me rendre à Fort Chipewyan. Je dirais que l'automne dernier, elle avait diminué de 40 p. 100... Ce n'est pas rien.
(1325)
    Cet hiver, j'ai participé à la préparation d'un plan stratégique pour l'eau des Territoires du Nord-Ouest. Notre rôle était de consulter les dirigeants et les chefs de la vallée du Mackenzie. Les chefs et les aînés se préoccupent beaucoup du réseau hydrographique dans le Nord. Ils s'inquiètent des poissons, de la faune. Ils disent que les poissons ne sont pas normaux; quand on les ouvre ou qu'on les mange, on voit que leur chair est plus épaisse.
    Les aînés se préoccupent aussi grandement de la santé, parce qu'il y a beaucoup de cas de cancer le long de la rivière. Il y en a autant qu'à Fort Chipewyan. Là-bas, il y a probablement plus de cas que dans d'autres secteurs de la vallée du Mackenzie. Ce qui les dérange surtout, c'est qu'il n'existe absolument aucune donnée sur ce qui se produit par rapport à l'eau, aux rivières ou aux lacs. Dans mon secteur, il n'y a aucun contrôle. Il n'y a pas de données, sauf sur le débit et la profondeur de l'eau.
    Est-ce que j'ai déjà vu des représentants du gouvernement provincial dans ma communauté? Jamais. Est-ce que j'ai déjà vu un fonctionnaire fédéral venir examiner l'eau? Jamais.
    Le parc national Wood Buffalo, qui n'est pas loin d'où j'habite, ne dispose pas non plus d'un système de surveillance de l'eau. Je crois qu'avant qu'on en sache plus, il ne devrait pas y avoir de nouveaux projets. Il devrait y avoir un moratoire sur les projets.
    Je sais que mon temps est écoulé. Je suis habitué à faire... non pas de longs exposés, mais je vais résumer...
    Non, non, votre exposé est fascinant. Je crois que les membres auront de bonnes questions à vous poser, étant donné le rôle clé que vous avez joué dans l'histoire de la région, et par rapport au pipeline de la vallée du Mackenzie. Je veux seulement m'assurer qu'il reste suffisamment de temps à la fin pour qu'on puisse vous poser des questions, à vous et aux autres témoins.
(1330)
    Merci.
    J'aimerais vous présenter ceci. C'est Tubeta Tsina. C'est un documentaire d'une heure et quart. Il vaudrait vraiment la peine que vous le regardiez. Ce sont des témoins. Ce sont les gens avec qui j'ai parlé du problème de l'eau.
    Merci beaucoup d'avoir pris le temps de m'écouter.
    Il est certain que nous aurons des questions à vous poser.
    Monsieur Gargan, allez-y.
    Merci, monsieur le président. Bonjour à tout le comité.
    Que notre idéologie soit occidentale, européenne, orientale, noire, autochtone, peu importe notre situation, nous avons tous besoins les uns des autres, nous avons tous des principes et des croyances qui guident nos vies quotidiennes.
    C'est grâce au bon vouloir de notre Terre-Mère que nous sommes ici aujourd'hui. Pourtant, nous continuons de créer de nouveaux subterfuges pour ne pas voir ce qui saute aux yeux, laisser entendre qu'il y a erreur, jouer à la roulette russe, traiter la nature avec négligence et abuser de sa générosité. Nous devons honorer les éléments sacrés que sont l'eau, l'air, la terre et le feu. Si l'un d'entre eux venait à disparaître, la race humaine telle que nous la connaissons disparaîtrait aussi.
    Les peuples autochtones des Amériques ont beaucoup à offrir, dont une vaste connaissance de ce qui était bien, de ce qui s'est détraqué et de ce qui pourrait être récupéré dans notre relation avec l'environnement au sens large.
    Avant de connaître l'homme blanc, les Dénés du Deh cho vivaient de la terre et avec la terre, assurant ainsi la subsistance, la croissance et le développement de leurs sociétés. Les relations étaient organisées de sorte que les Dénés et tous les êtres vivants pouvaient continuer de prospérer et de s'épanouir. Cela exigeait l'instauration de systèmes de savoir traditionnel qui étaient précis et structurés, au sens « matériel » ou « scientifique » d'aujourd'hui, en matière de protection, de renouvellement et de régénération des ressources.
    Au siècle où nous vivons, notre environnement a été détruit jusqu'au point de non-retour. La terre que nous foulons, l'eau que nous buvons et l'air que nous respirons ont tous le potentiel de nous rendre malades, plutôt qu'être sources de santé et de bien-être. Les Dénés du Deh cho ont beaucoup à offrir sur ce plan.
    Le savoir traditionnel est au coeur de la gestion de notre environnement. Le plan d'aménagement du territoire de 2006 en est un exemple patent. Ce document essentiel qui crée de l'harmonie entre les gouvernements, l'industrie et les premières nations a perdu sa pertinence à force de jouer avec ce que nous considérons comme des mécanismes de survie. L'industrie et le gouvernement semblent passer à côté de l'essence de ce document.
    Monsieur le président, le plan d'aménagement du territoire Deh cho est un modèle que l'industrie devrait utiliser pour planifier son développement. C'est un bon document de travail et d'orientation pour l'industrie. Ce document parfaitement raisonnable est en voie d'être modifié au nom de la conformité. Or, ces exigences de conformité n'ont aucun sens pour ceux et celles qui utilisent la terre et l'eau depuis des temps immémoriaux. Les zones de conservation ont été remplacées par des zones de développement spécial par des gens qui n'ont jamais mis les pieds sur notre territoire.
    Dans un pays moderne et développé comme le Canada, les politiques débattent souvent des idées de manière abstraite. L'aliénation idéologique des individus conduit souvent à une lutte pour défendre une théorie de gouvernance au détriment d'une autre, chacun prétendant que sa façon est meilleure que celle du voisin et même la seule acceptable. Les politiques ont tendance à se croiser les bras, adoptant une attitude défensive, plus soucieux d'avoir raison que de faire ce que la raison commande. Les Dénés voient le gouvernement comme un ensemble de relations dynamiques et en constante évolution entre les gens, qui doit être prêt à s'adapter à l'évolution des conditions et des situations. La manière de gouverner des Dénés, comme tous les modes de gouvernement d'ailleurs, n'est pas nécessairement parfaite, mais nous avons une très importante contribution à apporter aux débats actuels sur la façon de gouverner, de prendre soin les uns des autres et de vivre en harmonie.
    Les Dénés du Deh cho peuvent transmettre leur savoir traditionnel en matière de commerce, de paix, d'ordre et de bonne gouvernance par l'exploration des modes de gouvernement des premières nations et des relations entre peuples et groupes ethniques différents. Nous aussi vivons dans un monde qui change rapidement. Nous traversons actuellement une récession. Les systèmes de gestion sont tous vulnérables et ont tous des points forts et des points faibles. Les valeurs et principes autochtones ont été largement rejetés et remplacés par un gouvernement administratif qui carbure à l'économie.
(1335)
    Le Canada a relégué aux oubliettes les valeurs et les principes du passé des Dénés et déclaré que leur système de gouvernement ne convenait pas à la réalité d'aujourd'hui. Faire abstraction du savoir et des manières ancestrales qui régissaient la vie des Dénés du Deh cho depuis des milliers d'années a été une erreur monumentale et une perte immense dont notre peuple continue de souffrir, tout comme la terre, le ciel et l'eau.
    Pour récupérer les pertes et ouvrir les yeux et les esprits des peuples de la terre à cette tragédie historique, il faudra plus que des remords et des regrets. Il faudra d'abord faire amende honorable, puis agir avec respect. Le gouvernement devra prendre des décisions courageuses et les appliquer avec détermination.
    Nous avons des droits acquis. Comme gardiens, nous avons le devoir de protéger ce que nous avons; pourtant, pour l'instant, nous dépendons de gouvernements qui n'en ont que pour l'économie. La récession nous donne du temps pour réfléchir, évaluer et repenser notre raison d'être sur cette planète. C'est le bon moment. Nous avons la possibilité d'agir, tout de suite.
    Monsieur le président, nous sommes des gardiens de l'eau maintenant. Cette expression n'est pas nouvelle, car depuis des temps immémoriaux nous partageons notre savoir, nos contes et nos légendes sur le territoire et l'eau. La nature nous a enseigné l'art de la survie. Depuis une génération, nous avons aussi appris à connaître le développement industriel et les mesures de dévastation et de destruction qu'il préconise au nom du progrès.
    Grâce à leur réseau de communication particulier, les premières nations du continent sont devenues une force collective à la défense de notre ressource la plus précieuse de toutes, l'eau. Cet enjeu humanitaire qui a pris naissance dans le Nord se répand maintenant dans tout le pays, tout le continent et toute la planète. Un réseau collectif constitué des « Keepers of the Water », les gardiens de l'eau, du réseau autochtone de l'eau, de la stratégie de l'eau et de forums environnementaux mène une lutte efficace pour protéger notre Terre-Mère et ses éléments sacrés. Comme gardiens, nous devons toujours privilégier l'évolution humaine plutôt que la richesse matérielle, protéger la ressource qu'est l'eau, son utilisation culturelle et sa valeur traditionnelle. Nos pratiques de conservation devraient nous assurer que les prochaines générations ne seront pas privées de ces éléments qui nous maintiennent en vie aujourd'hui.
    Nous ne sommes pas à côté de la plaque; même si nous convenons qu'un peu d'argent en poche ne fait pas de tort, nous pensons qu'il faut s'élever au-dessus de ces considérations si nous voulons que la race humaine telle que nous la connaissons puisse survivre. Il faut avoir le courage de remettre le statu quo en question. Il faut être vigilant et ouvrir les yeux. Nous n'avons pas survécu sur ce continent en confisquant aux autres leurs moyens de survivre. Nous avons tous des droits acquis. Notre survivance ne dépendra pas des gouvernements. Les décisions stupides qui mettent notre survie en péril ne passeront pas sans contestation.
    Depuis que le réchauffement de la planète est devenu un enjeu, on a lancé mollement certaines initiatives pour se donner bonne conscience. On fait semblant de s'inquiéter tout en croisant les doigts dans l'espoir que la situation se redressera toute seule.
    Monsieur Gargan, pourriez-vous conclure, pour que nous puissions passer aux questions?
    Oui, je vais sauter par-dessus quelques points.
    Il y en a qui sont morts, et il y en a qui sont malades ou qui vivent en aval du cours d'eau. Ceux qui dépendent de la faune pour manger, que fait-on pour eux? Mesdames et messieurs, nous avons désespérément besoin de votre force et de votre clairvoyance; vous devez voir que la survie de l'espèce humaine est en jeu. Les demi-mesures ne suffiront plus, il faut saisir la balle au bond et agir, vite.
    Je vous remercie, monsieur le président. J'espère que vos délibérations seront fructueuses.
(1340)
    Merci, monsieur Gargan.
    Nous commencerons la première série de questions de sept minutes par M. Trudeau.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie pour vos exposés.
    Nous passons beaucoup de temps à discuter de la situation en Alberta et de l'exploitation des sables bitumineux, mais j'aimerais vous demander, chef Mercredi, de nous parler un peu du gouvernement de la Saskatchewan. Est-ce que les rapports peuvent se comparer à ce que nous avons entendu sur le comportement du gouvernement, et le partenariat avec le gouvernement fédéral et celui de l'Alberta?
    Si je me fie à ma dernière visite dans votre région, il y a encore beaucoup de mines d'uranium. Est-ce qu'actuellement on explore des sables bitumineux en amont de Stony Rapids, par exemple, ailleurs qu'en amont de l'Athabasca?
    À gauche, on peut voir la zone d'aménagement du territoire de l'Athabasca; au coin sud-ouest, dans le secteur de Axe Lake, nous bordons les dunes de sable de l'Athabasca, qui font partie des sept plus beaux paysages au monde. Il y a du pétrole dans ce secteur.
    En ce qui concerne nos relations avec le gouvernement actuel de la Saskatchewan, aucun protocole n'a été mis en place par ce gouvernement au sujet des pouvoirs confiés par le gouvernement fédéral lors de l'entente sur les transferts miniers qui a été signée au cours des années 1930. À ce jour, il n'y a eu aucune obligation en matière de consultation et d'accommodement. Par conséquent, nous avons mis en place notre propre protocole, que nous avons présenté à la CCSN la semaine dernière lors d'une audience publique à Ottawa. C'est notre version du protocole; c'est ainsi que nous voulons procéder et que le processus de consultation devrait fonctionner.
    Le 1er juin 2009, la province de la Saskatchewan présentera son protocole sur le devoir de consultation et d'accommodement. Des activités ont eu lieu pendant des années sans qu'il n'y ait aucune politique de la part de l'industrie, ni de la Saskatchewan, pour prendre en compte les besoins des premières nations de la région qu'ils développent. Dans notre région, il y a cinq mines d'uranium juste au sud-ouest de Fond du Lac, et on trouve actuellement des gisements qui pourraient durer une trentaine ou une quarantaine d'années.
    Merci.
    La désignation de la zone d'aménagement du territoire en Saskatchewan n'a pas été faite en partenariat avec le gouvernement de la Saskatchewan; c'est votre propre désignation. Est-ce exact?
    Elle a été présentée au gouvernement de la Saskatchewan. Le gouvernement a participé à la première étape. Mon coordonnateur est présent ici avec moi, et il pourrait répondre à un grand nombre de questions au sujet de ces termes techniques. Oui, nous l'avons présentée, mais à ce jour, rien n'a été fait par le gouvernement pour nous appuyer dans la région de l'Athabasca.
    Nous avons apporté la carte qui montre le bassin hydrologique pour une raison. Par rapport aux sables bitumineux qui entrent dans le lac Athabasca, nous sommes une des dernières communautés riveraines de Fond du Lac et de ses environs. La communauté voisine est située à Fort Chipewyan, en Alberta, et la Nation crie Mikisew est située sur la rive ouest du lac Athabasca.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à François. Vous avez énormément d'expérience concernant les questions environnementales et la participation des groupes autochtones et des divers paliers de gouvernement à des discussions, que ce soit dans le cadre de contestations judiciaires ou de négociations. À votre avis, à quels résultats doit-on s'attendre? Quelle direction ces conversations devraient-elles prendre? Comment entrevoyez-vous l'avenir relativement à la relation sur laquelle nous travaillons?
(1345)
    Merci.
    De mon point de vue, le point de vue de ma communauté dénée, quand je regarde ce qui se passe à l'extérieur, je sais que ceux qui contrôlent le gouvernement sont les bien nantis. Nous devons embarquer ceux qui investissent dans les sables bitumineux dans cette discussion et ce forum public. Nous devons nous adresser à ceux qui pensent surtout à l'argent mais qui n'ont aucun lien avec la terre. Nous devons parler à ces personnes.
    Le gouvernement ici, ses représentants, sont élus par ceux qui ont de l'argent. Vous devez avoir la couenne aussi dure que la mienne si vous devez prendre des décisions difficiles. C'est ce que j'attends. Je vous encourage à prendre à coeur ces discussions si vous croyez sincèrement en la survie des investisseurs dont je parle — la terre, l'eau, l'air, le poisson, les orignaux, toutes les créatures. Je ne crois pas que ce débat parlementaire doive s'arrêter ici. Il doit se poursuivre.
    J'aimerais soulever un point. On a pompé 129 milliards de litres d'eau en 2007. Actuellement, une bouteille d'eau coûte environ 2 $ par litre — c'est très peu. Si on demandait de payer pour chaque litre pompé, on pourrait recevoir 258 milliards de dollars par année pour les 129 milliards de litres qui ont été puisés dans la rivière. On est prêt à payer 2 $ pour un litre — je suis prêt à payer ce montant, je le paie déjà —, mais nous sous-estimons l'origine naturelle de l'environnement. Pourquoi ne paie-t-on pas l'eau utilisée pour extraire les sables bitumineux, comme je paie l'eau que je consomme?
    Merci, monsieur Paulette. Nous devons continuer.
    Monsieur Ouellet, vous avez sept minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Je vais parler en français.
    Avant de poser mes questions, je dois dire que j'ai bien apprécié votre exposé, monsieur Paulette.
    Je voudrais seulement faire une remarque, sans amoindrir toutefois ce que vous avez dit sur la vie qui est en train d'être détruite dans les réserves. J'ai l'impression que l'ensemble du monde « développé » est en train de détruire toute la planète, de toute façon. Avec les gaz à effet de serre, on est en train de se mettre dans une situation où il n'y aura peut-être plus d'humanité, très bientôt. On partage le même point de vue à ce sujet.
    Vous avez parlé de cette carte. Vous étiez à une distance de 150 à 200 milles de Fort McMurray. Y a-t-il des rapides tout le long de cette distance?
(1350)
    Oui.
    Les rapides ne nettoient-ils pas l'eau, normalement?
    J'ai fait beaucoup de canot quand j'étais jeune. On disait que quand une eau coule sur une distance de 3 milles en rapides — on comptait en milles à l'époque —, elle est pure lorsqu'elle arrive en bas, quelle que fut sa condition antérieure.
    Avez-vous remarqué un changement dans la qualité de l'eau après son passage dans les rapides?

[Traduction]

    Il y a des rapides là où je vis à Fort Fitzgerald, quatre grandes séries de rapides. Peut-être que les rapides avaient une capacité de filtration d'eau il y a environ 100 ans, mais pas aujourd'hui, parce que le niveau de l'eau est trop bas. Un énorme débit est nécessaire, et nous ne l'avons pas aujourd'hui. Vendredi dernier, à 13 h 15 précises, j'ai assisté à la débâcle. Le niveau de l'eau est très bas. La glace est partie et le niveau de l'eau a chuté en environ une demi-heure. Il y avait toujours de la glace sur les rives, et c'est très inhabituel. Les phénomènes naturels habituels ne se produisent pas.

[Français]

    Monsieur Paulette, vous dites que récemment vous avez vu de la glace. Par contre, pendant l'été, l'eau n'est-elle pas plus chaude qu'elle ne l'était auparavant? Avez-vous pris la température de l'eau? Il me semble que cela peut être l'une des raisons pour lesquelles le poisson est de moins bonne qualité. S'il y a moins d'eau, la température de l'eau pourrait être plus élevée?

[Traduction]

    Pas au cours du dernier hiver. Mais l'hiver précédent, les eaux de la rivière n'ont pas gelé avant le 31 janvier. De l'endroit où j'habite à Fitzgerald jusqu'à environ 14 milles en amont, il n'y avait pas de couvert de glace. Normalement, on pouvait traverser la rivière à la marche dès novembre. Les gens n'ont pas pu installer leurs pièges, ils n'ont pas pu chasser, ni pêcher. C'est à mon avis un signe que l'eau se réchauffe.

[Français]

    Monsieur le président, me reste-t-il encore du temps?
     Si les compagnies ne faisaient que de l'exploitation in situ, qu'elles ne faisaient plus de prélèvements de terre, qu'elles se doivent de nettoyer par la suite, pensez-vous que la rivière pourrait être propre à nouveau?

[Traduction]

    Non, je crois que c'est irréparable.
(1355)

[Français]

    D'après vous, tout le lit de la rivière serait pollué. C'est pour cela que, même si on arrêtait de polluer à Fort McMurray, la rivière continuerait à être polluée. Est-ce ce que vous pensez?

[Traduction]

    Il y a d'autres facteurs. Si on arrêtait ce qui se produit à McMurray, il y aurait toujours cet énorme étang. Il y a de la pollution là-bas, et elle s'écoule toujours sous terre. Il y a d'autres facteurs, comme les usines de pâte en amont. Elles sont là, on doit vivre avec, mais faire remonter le niveau de l'eau à ce qu'il était par le passé, non, cela ne se produira pas.

[Français]

    Peut-être M. Mercredi pourrait-il aussi répondre à ma question. Y a-t-il des mines d'uranium dans la réserve?

[Traduction]

    Il n'y a pas de mine d'uranium sur la réserve de Fond du Lac, mais on y fait de l'exploration, grâce à un partenariat auquel nous nous sommes joints pour l'exploration minière à l'intérieur de la réserve.

[Français]

    Je suppose que le temps qui m'est alloué est écoulé.
    En fait, oui, il l'est.
    Ms. Duncan.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous pour vos exposés. Ils sont très importants.
    Je reconnais volontiers que chacun d'entre vous représente sa propre nation et que vous avez des ordres de gouvernement similaires aux gouvernements fédéral et provinciaux. Est-ce que votre nation a été consultée directement par le gouvernement fédéral lorsqu'il a examiné chacune des exploitations de sables bitumineux? Est-ce que le gouvernement fédéral vous a consulté directement lorsqu'il a examiné les études d'impacts environnementaux, pour connaître vos craintes et les questions que vous vouliez qu'il aborde?
    Chef Mercredi, à vous la parole.
    Je vous remercie pour votre question. Fond du Lac écrit une page d'histoire aujourd'hui en prenant part à cette audience sur le développement des sables bitumineux.
    Pour répondre à votre question, non, en aval de l'Athabasca, nous n'avons jamais été consultés sur les impacts et la dévastation qui y est associée, et nous n'avons jamais fait partie du processus d'évaluation environnementale.
    Non. Je suis en aval du secteur de François Paulette, la région Deh cho, et nous n'avons jamais été consultés ou avisés du développement qui est en cours.
    Eelna, dans ma langue, veut dire non.
    Aujourd'hui, par pure coïncidence, le commissaire fédéral au développement durable a présenté son rapport. Il travaille au bureau de la vérificatrice générale du Canada. Parmi les rapports qu'il a présentés aujourd'hui, on en trouve un sur l'eau et les sables bitumineux, et il y a de l'information sur la protection de l'habitat du poisson par le gouvernement fédéral et sur la protection contre les toxines.
    Dans son rapport, il indique que le gouvernement de l'Alberta et le gouvernement fédéral se sont entendus relativement à la gestion des rejets toxiques dans l'eau. Cette entente inclut la zone des sables bitumineux. Il est préoccupé du fait que le comité n'a pas siégé en deux ans ainsi que du fait que, pendant longtemps, le gouvernement fédéral s'est fié uniquement sur le gouvernement provincial pour la surveillance des répercussions sur les sables bitumineux.
    Je me demandais si l'un ou l'autre de vos gouvernements avait déjà été approché par le gouvernement fédéral pour faire partie de ces ententes administratives de gestion des cours d'eau.
(1400)
    Non.
    Lorsque le niveau de l'eau est bas — il est actuellement à 35 ou à 40 p. 100 —, toutes les petites rivières qui se déversent dans la rivière des Esclaves sont asséchées et les poissons ne peuvent pas y frayer. Ils ne peuvent pas se sauver de cette eau polluée; ils en sont prisonniers. J'imagine donc que la santé de ces poissons empirerait.
    Chef Mercredi.
    Premièrement, du point de vue du gouvernement de l'Athabasca, nous avons mis un système en place pour définir ce que constituent selon nous un protocole ainsi que l'obligation de consultation et d'accommodement. Le gouvernement de la Saskatchewan a adopté des lois qui n'existaient pas auparavant concernant nos terres, en ne respectant pas son devoir de consulter et de tenir compte de nos besoins. L'Alberta a fait de même. Nous avons instauré ces lois en établissant un protocole ainsi qu'un cadre d'action pour protéger les intérêts de la terre, particulièrement les espèces indigènes et l'environnement, ainsi que tout ce qui y est associé, y compris l'eau potable.
    Vous avez soulevé un point au sujet de l'entente. Nous n'avons jamais été approchés — que ce soit par l'Alberta, la Saskatchewan, ou le Canada.
    Pourriez-vous vous présenter en donnant votre nom pour le compte rendu, s'il vous plaît?
    Je suis Diane McDonald, du Grand conseil de Prince Albert, représentant la région de l'Athabasca.
    Nous sommes en discussion avec le gouvernement territorial, et nous collaborons aussi avec Keepers of the Water afin d'attirer l'attention des gouvernements, de l'industrie, et de la communauté internationale sur ces questions.
    Nous sommes du côté de l'Alberta, mais le ministère des Ressources naturelles qui prépare ce plan stratégique sur les eaux a visité notre communauté. Ils viennent des territoires. Nous n'avons vu aucun représentant des gouvernements fédéral et provincial. Les gens de l'autre côté sont venus nous visiter.
    Vous avez été consultés, chef Paulette, par le gouvernement territorial, mais pas par celui de l'Alberta ou le gouvernement fédéral? Entendu.
    Vous avez fait mention du projet de barrage hydroélectrique sur la rivière des Esclaves. Je vous ai rencontré il y a 25 ans lorsque le premier projet a été présenté. Avez-vous des craintes concernant l'accumulation des toxines en amont du barrage projeté? Avez-vous une idée de l'endroit où le barrage pourrait être érigé, et quelles seraient les incidences en amont sur le lac Athabasca et la région de l'Athabasca?
    Si vous jetez un coup d'oeil sur la carte, il y a des rapides à Fort Smith. À la fin des années 1970 et au début des années 1980, le gouvernement de l'Alberta prévoyait faire un barrage tout au long de la rivière, pour produire 2 000 mégawatts.
    Je crois que c'est dans le journal de vendredi qu'on pouvait lire que Nancy Southern, de ATCO, avait dit qu'ils allaient produire de 1 000 à 1 500 mégawatts au fil de l'eau. Ils ne peuvent pas faire ça, c'est impossible. Je crois que ses consultants, ses ingénieurs, lui donnent de mauvais renseignements. Nous avons embauché un consultant indépendant pour jeter un coup d'oeil sur cette situation. Si vous regardez ce qu'ils proposent, les installations au fil de l'eau commenceraient à Dog River à l'est et s'étireraient jusqu'à Fort Smith. C'est le cours de la rivière.
     Cette méthode ne produirait que 500 mégawatts tout au plus. Pour produire 1 500 ou 1 000 mégawatts à Mountain Rapids, pour ce qu'ils appelleraient au fil d'un réservoir, il faudrait bloquer toute la rivière. Cela signifierait que notre territoire en entier, tous nos cimetières et sites archéologiques, seraient submergés. Il n'y aurait plus de chasse, de trappe ou de pêche. On tuerait la rivière. Imaginez si on bouchait le réseau d'égouts ici à Edmonton. La ville serait rapidement envahie par une odeur. C'est ce qui va se produire ici.
(1405)
    Je remercie les témoins d'être présents aujourd'hui.
    Chef Mercredi, où vos communautés prennent-elles leur eau potable? Est-ce qu'elle est testée? Quels sont les résultats de ces tests?
    Notre communauté pompe l'eau potable du système d'eau souterraine adjacent au lac.
    Toute la journée, j'ai écouté vos questions sur l'eau potable, et votre question me donne l'impression que l'autre enjeu dans cette consultation, c'est la sûreté de l'eau potable. En fait, les pluies acides et les décharges ne font pas partie de la question, mais elles constituent un problème, particulièrement à l'égard de l'habitat des poissons, etc.
    Comme tout le monde, nous devons respecter les règlements si nous voulons un système d'eau potable sûr, mais nous ne disposons pas des usines modernes de traitement d'eau qui pourraient être nécessaires s'il y avait contamination.
    Votre eau potable vient de sources souterraines, vous utilisez donc des puits. Quelle est leur profondeur?
    C'est un système souterrain qui utilise des pompes le long des rives du lac Athabasca.
    Quelle est la profondeur de vos puits?
    Le plus profond, je crois, est à un niveau équivalent au niveau de l'eau dans le lac Athabasca, mais en raison de la fluctuation des niveaux d'eau au cours de la dernière année, nous avons connu quelques difficultés.
    Je suis surpris que cette question ait été posée au sujet du système d'aqueduc. Nous avons eu des difficultés lorsque nos pompes n'étaient plus capables de puiser l'eau, et je crois que cela était lié à l'eau qui entrait par la rivière de la Paix dans le lac Athabasca et qui a fait changer le niveau d'eau, ce qui nous a créé certains problèmes.
    Est-ce que les tests sont faits par la municipalité?
(1410)
    Non, c'est une exigence fédérale, des normes fédérales.
    Les tests sont faits par le fédéral. Quels sont les résultats de ces tests sur l'eau? Est-ce qu'ils sont faits quotidiennement ou à toutes les semaines?
    Nous avons des techniciens qui s'en occupent. Si nous ne respectons pas les limites, on nous le dirait, mais on ne vérifie que pour certains aspects.
    Pour répondre à votre question technique, je n'ai pas les documents avec moi, j'aurais donc du mal à répondre.
    Vous dites que l'eau est testée par le gouvernement fédéral. Quels sont les résultats de ces tests? Est-ce que l'eau est sécuritaire ou non?
    Notre eau est actuellement assez bonne pour être bue du robinet.
    Merci.
    Chef Gargan.
    La rivière Athabasca, la rivière de la Paix, la rivière au Foin et la rivière des Esclaves se déversent toutes dans le fleuve Mackenzie. Comme l'a dit François, il y a de la mousse sur la rivière, ainsi que de l'écume. Lorsque nous faisons bouillir l'eau de la rivière pour faire du thé, il y a de l'écume dans nos tasses. Mais la rivière est surveillée, et nous buvons toujours l'eau de cette rivière.
    Qui est chargé de la surveillance?
    Ce sont les municipalités, et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
    Est-ce que leur surveillance leur permet de déterminer que l'eau est propre à la consommation?
    Lorsqu'il y a des craintes, les communautés sont mises au courant.
    Bien, merci.
    Chef Paulette.
    Au cours des trois dernières années, environ, notre eau potable était transportée par camion de Fort Smith. Avant ça... Voyez-vous cette belle rivière là-bas qui s'appelle la rivière Dog? C'était là que nous prenions notre eau. L'eau provenait du Bouclier canadien. En ce moment, nous n'avons pas de puits ou de système de pompage de l'eau potable sur notre territoire, nous devons donc faire venir l'eau par camion de Fort Smith.
    Je voudrais revenir sur cette question. On a besoin de trois litres d'eau pour faire un litre de pétrole. Si nous demandions de l'argent à ces gens pour chaque litre d'eau pompé, on pourrait dépenser 258 milliards pour donner à toutes les réserves un système d'aqueduc où l'eau potable se rendrait dans toutes les maisons.
    En ce moment, où je vis, on ne peut pas trouver d'eau potable. Nous devons aller à Fort Smith.
    Chef Paulette, vous avez mentionné un certain nombre d'industries et d'utilisateurs présents sur les rives de la rivière Athabasca. Vous avez parlé des usines de pâtes et papier. Je ne sais pas si vous avez parlé de l'ancienne mine d'uranium et des communautés le long de la rivière Athabasca. Fort McMurray a connu une croissance extrêmement rapide.
    Vous sembliez dire qu'il restait des polluants dans les sédiments du lac Athabasca. Je crois que M. Ouellet vous a demandé si faire l'extraction in situ plutôt qu'à ciel ouvert pourrait régler le problème. Vous aviez répondu non, qu'il était trop tard. Je crois que vous avez alors parlé de résidus toxiques qui demeuraient dans la couche sédimentaire du lac Athabasca. Croyez-vous que la situation s'est détériorée au cours des années? Est-ce que le lac est fini? Est-ce qu'il est toxique au point d'être inutilisable?
    La question qu'il posait concernait la rivière. Je ne connais pas très bien le lac Athabasca. Il est environ à 90 milles de chez moi. Mais je connais très bien la rivière.
    Merci.
    J'aimerais remercier nos témoins d'avoir exposé le point de vue des Territoires du Nord-Ouest et de la Saskatchewan à nos audiences. C'était très utile. Merci d'être venus d'aussi loin.
(1415)
    J'ai regardé les cartes du réseau hydrographique et de l'Athabasca. S'il y a de nouveaux développements, nous aimerions être contactés et participer au processus. Nous aimerions même visiter la communauté.
    Les cartes sont importantes pour nous. Elles nous permettent de voir clairement.
    Je suis heureux d'avoir fait votre connaissance, ancien grand chef Paulette.
    Le prochain témoin sera l'honorable Michael Miltenberger, vice-premier ministre et ministre de l'Environnement et des Ressources naturelles du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
    Je voudrais vous remercier de m'avoir donné l'occasion de témoigner devant le comité. Pour votre information, je m'appelle Michael Miltenberger et je suis ministre de l'Environnement et des Ressources naturelles. Je suis aussi vice-premier ministre, ainsi que ministre des Finances.
    Je veux vous parler du bassin du fleuve Mackenzie, des Territoires du Nord-Ouest, ainsi que des questions de l'eau et des répercussions cumulatives. J'aimerais parler du contexte dans lequel nous vivons, de certaines menaces auxquelles nous faisons face en ce qui concerne l'eau. J'aimerais discuter de quelques-uns des défis que nous relevons ainsi que des mesures que nous avons prises grâce à notre stratégie sur l'eau, et j'aimerais faire quelques recommandations aux membres du comité, particulièrement en ce qui a trait au gouvernement fédéral.
    Les Territoires du Nord-Ouest ont une superficie de 1,2 million de kilomètres carrés, ce qui représente environ 12 p. 100 du territoire du Canada. On y trouve 33 communautés, toutes près d'un plan d'eau du bassin du fleuve Mackenzie. Les territoires comptent 42 000 personnes, et la moitié d'entre elles sont de descendance autochtone. Pour les gens des Territoires du Nord-Ouest, l'eau est une préoccupation commune; il faut la protéger, du point de vue de la quantité et de la qualité. Les Territoires du Nord-Ouest sont situés presque entièrement à l'intérieur du bassin du fleuve Mackenzie. Nous sommes le plus grand territoire en aval du bassin. Dans les Territoires du Nord-Ouest, on trouve deux deltas importants: le delta de l'Esclave, et le delta du bassin du Mackenzie.
    Nous sommes très préoccupés par ce qui se passe dans le bassin du fleuve Mackenzie. J'aimerais rappeler l'entente transfrontalière signée en 1997. Le gouvernement fédéral a joué un rôle d'initiateur, et il a lié les signataires dans une entente commune. Ces signataires sont la Saskatchewan, l'Alberta, la Colombie-Britannique, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. Les Autochtones sont représentés. Cependant, cette entente est sous-utilisée.
    Nous sommes très intéressés par le règlement de la question des ententes transfrontalières. Je dirais que lorsqu'il est question de l'eau, aucun gouvernement n'est une île, si je peux paraphraser John Donne. Nous avons tous des intérêts communs. La question nous tient à coeur et d'ailleurs, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, lors de sa quinzième et dernière assemblée, a adopté une motion unanime décrétant l'eau comme étant un droit humain fondamental. Je crois que nous sommes le seul gouvernement dans ce pays à l'avoir fait. Tandis que le gouvernement fédéral a le mandat juridique de gérer l'eau dans les Territoires du Nord-Ouest au nom des gens du Nord, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest exerce, avec les gouvernements autochtones, ce qui constitue à notre avis notre autorité politique et morale, la responsabilité de traiter des questions qui nous touchent profondément et personnellement — des questions qui ne peuvent attendre le gouvernement fédéral pour être résolues.
    Nous reconnaissons également la relation avec les gouvernements autochtones. Comme vous l'avez entendu de la part de quelques-uns des témoins précédents, la question des droits issus de traités sera tôt ou tard soumise aux tribunaux, lorsque les droits fondamentaux se trouvant dans ces ententes seront contestés. Nous reconnaissons ces gouvernements et travaillons avec eux. Je parlerai brièvement de la question des connaissances traditionnelles et de ce que nous décrivons comme le capital naturel.
    L'une des menaces que nous voyons pour notre réseau hydrographique, en plus des enjeux qui concernent les Territoires du Nord-Ouest, est le développement en amont. J'aimerais parler des répercussions cumulatives. Vous avez parlé aujourd'hui des sables bitumineux. Il y a également les usines de pâtes, il y a plus d'un million de têtes de bétail, il y a des communautés, il y a un projet de réacteur nucléaire au lac Cardinal, du côté de la rivière de la Paix. Il y a le projet du barrage Bennett, sans compter toutes ces choses dont nous ne sommes pas au courant et qui se produisent dans le cours supérieur des rivières, du côté de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, dans les rivières de la Paix et Athabasca, à mesure que les glaciers fondent et que la couverture de neige diminue en raison du réchauffement climatique. De plus, notre manque de connaissances est substantiel.
(1420)
    Nous sommes également très préoccupés par les substances qui se trouvent dans l'air et qui retombent sur nos territoires. Vous avez entendu parler aujourd'hui des acides naphthéniques, des hydrocarbures aromatiques polycycliques, du bitume, du mercure, et des métaux lourds. Une grande partie de ces substances se trouve dans l'air. Vous pouvez lire la littérature. L'Arctique en est couverte.
    Nous avons également nos propres problèmes dans les Territoires du Nord-Ouest. Nous tentons d'améliorer notre façon de procéder avec le développement, que ce soit des pipelines ou des mines en général. Il y a une énorme mine désaffectée au bord du Grand lac des Esclaves, où on trouve 230 000 tonnes métriques de trioxyde d'arsenic entreposées dans les puits sous le niveau de l'eau du lac — le nettoyage que nous devrons faire nous coûtera un milliard de dollars. Les répercussions des changements climatiques sur le pergélisol sont une autre menace. Les saisons des feux de forêt sont de plus en plus longues. La couche de glace s'amincit. Le niveau d'eau baisse partout sur le territoire. Dans chaque communauté, on vous dira que la terre et l'eau ont changé.
    Nous faisons face à certains de ces défis parce qu'il n'existe pas de stratégie nationale sur l'eau qui permettrait au gouvernement fédéral de jouer un rôle clair comme leader dans un dossier qui touche toutes les instances, sans exception. Ce sont des défis qui concernent toutes les communautés, tous les Canadiens.
    Nous soutenons le travail et les efforts faits par les ministres de l'environnement et le gouvernement fédéral pour mettre en oeuvre cette stratégie nationale sur l'eau. La dernière fois qu'on a travaillé sérieusement dans ce dossier, c'était en 1987, et il s'est passé peu de choses depuis. Il y a eu un comité du Sénat qui a fait un examen, et ce comité était dirigé par Tommy Banks, un sénateur de l'Alberta. Il a cerné tous les problèmes: le manque de ressources, la réduction des programmes, et l'incapacité du gouvernement fédéral de faire le travail nécessaire en ce qui concerne l'eau de surface et l'eau souterraine.
    En même temps, nous avons connu ce qui était, jusqu'à la présente récession, un développement sans retenue, qui se déroulait à un rythme souvent plus rapide que le processus d'évaluation. Sur notre territoire, nous avons un régime réglementaire plutôt confus. Le gouvernement fédéral s'en est mêlé et a instauré un processus souvent très difficile et frustrant pour toutes les parties concernées.
    Un autre défi consiste à tisser des liens entre les connaissances traditionnelles et la science européenne, tandis que nous avançons dans tous les secteurs des Territoires du Nord-Ouest où les gouvernements autochtones font partie des principaux propriétaires terriens. Aucun partenariat de recherche exhaustif n'a été établi pour faire une bonne partie du travail nécessaire.
    Nous avons une entente-cadre sur les eaux transfrontalières du bassin du Mackenzie qui ne sert à presque rien et dont le financement n'a pas été majoré depuis 1997. On fonctionne avec un budget de 250 000 $ par année. Les ministres ne se sont toujours pas réunis. À notre avis, c'est un mécanisme qui a un potentiel énorme s'il est revitalisé, si les parties, dirigées par le gouvernement fédéral, viennent à la table pour discuter de la gestion de l'eau dans une approche intégrée de gestion du bassin hydrographique du Mackenzie. Cela ne s'est toujours pas produit.
    Tous les témoins que vous avez entendus aujourd'hui vous ont fait part de toutes ces inquiétudes parce qu'il n'y a pas de mécanisme qui permette aux gens d'en discuter. L'Alberta veille sur les intérêts de l'Alberta. À moins que le gouvernement fédéral n'utilise les lois qu'il a déjà à sa disposition, les chances d'obtenir la participation des autres instances sont très minces. L'une des communautés des Territoires du Nord-Ouest, Fort Resolution, a tenté de participer à l'une des audiences sur le développement de Fort McMurray, et il a été très difficile pour cette communauté d'avoir une oreille attentive. Cela montre à quel point notre gouvernement doit travailler avec les gouvernements autochtones afin d'établir un plan et des politiques qui nous permettront de régler cette question.
    J'ai parlé très brièvement du manque de suivi de la recherche. C'est un enjeu pour les Territoires du Nord-Ouest, mais c'en est aussi un pour le bassin du Mackenzie, de son cours supérieur jusqu'à l'océan Arctique. La santé de l'écosystème aquatique fait également partie des enjeux. La plupart des signataires de l'entente-cadre du bassin du Mackenzie sont muets en ce qui concerne l'eau souterraine, mais ce rapport publié hier, qui a été mentionné par Mme Griffiths, indique très clairement que l'eau souterraine est une partie essentielle du cycle hydrologique.
(1425)
    Les changements climatiques causent de très graves problèmes. Certains secteurs connaissent des problèmes d'approvisionnement. Nous devons tous travailler ensemble afin de surveiller et gérer ces problèmes. Nous devons utiliser les connaissances traditionnelles à bon escient. Les gens qui ont habité le bassin depuis des milliers d'années nous parlent de changements, et ces changements ne vont pas en s'améliorant.
    Nous travaillons ensemble afin d'élaborer pour les Territoires du Nord-Ouest une stratégie sur l'eau intitulée « Northern Voices, Northern Waters ». Notre point de vue, au nord, doit être entendu. Nous reconnaissons que si nous voulons être efficaces dans un territoire peuplé par 42 000 personnes, nous devons travailler avec les gouvernements autochtones pour élaborer un plan qui nous permettra d'examiner plus clairement le développement des ressources, dans le cadre de la négociation d'ententes avec l'Alberta, la Saskatchewan, la Colombie-Britannique, le Yukon et le gouvernement du Canada.
    Il faudra établir clairement ce qui devra être négocié dans une entente, qui s'annonce très complexe. Ce n'est pas qu'une question de débit et de qualité de l'eau. Il y a bien d'autres problèmes. Ce n'est pas qu'une question d'eau de surface. Nous voulons être prêts à faire face à toute éventualité. Nous voyons un lien très clair avec le capital naturel, qui est devenu un des sujets de discussion ici. Nous reconnaissons que les écosystèmes intacts ont de la valeur. Ça ne se limite pas à dénuder le sol pour obtenir du pétrole, des diamants, de l'or et d'autres minéraux. Les Autochtones, qui se fient à leurs connaissances traditionnelles, nous l'ont répété pendant des dizaines d'années. Nous avons dû reconnaître qu'ils avaient raison. Il ne s'agit pas seulement d'une valeur spirituelle, culturelle et sociale; on peut maintenant y attribuer une valeur sur le plan économique, dans une langue que tout le monde comprend, y compris le monde des affaires. C'est ce que nous tentons d'intégrer à notre approche.
    Nous recommandons de revitaliser et de renforcer les mécanismes transfrontaliers qui se trouvent dans l'entente-cadre sur les eaux transfrontalières du bassin du Mackenzie. On y parle d'une approche de gestion intégrée du bassin hydrologique, ce que nous appuyons. Nous appuyons la participation du gouvernement fédéral et nous lui demandons de jouer un rôle de leader. Cette question ne touche pas que les Territoires du Nord-Ouest ou les autres régions; elle doit être réglée à l'échelle nationale. C'est dans l'intérêt de tous.
    Nous devons trouver des moyens de faire participer plus efficacement les régions en aval. Par exemple, il ne suffit pas de limiter le champ des consultations à 12 kilomètres sous le site C. Nous avons besoin d'être avertis rapidement et clairement lorsqu'il y a des problèmes, ce qui est inévitable. La plupart du temps, nous apprenons ces choses dans les journaux ou à la radio de la CBC.
    Nous désirons recommander à ce comité qu'il demande et appuie une stratégie nationale sur l'eau dans laquelle le gouvernement fédéral jouera un rôle de leader afin que les différents gouvernements discutent ensemble. Nous croyons qu'il y a une place pour les connaissances traditionnelles aux côtés de la science occidentale, dans nos travaux concernant les bassins hydrologiques sur l'ensemble du territoire; nous parlons à des gens qui ont des milliers d'années d'expérience que nous n'avons pas.
    On doit affecter plus d'argent à la recherche. Nous ne pouvons pas prendre de décisions éclairées sans nous appuyer sur des recherches. Sinon, nous devons nous en tenir au principe de précaution, ce qui signifie que nous devons utiliser la meilleure information que nous avons. Cette situation cause toujours des problèmes; cependant, nous devons nous engager. Je suis allé dernièrement à une conférence à Canmore où étaient présents tous les spécialistes et les scientifiques qui mesurent l'eau et la couche de glace des glaciers. Ils ont dit qu'il y avait des lacunes importantes dans nos systèmes.
    L'eau souterraine, l'eau de surface, ces défis nous concernent tous, non seulement dans les Territoires du Nord-Ouest mais à la grandeur du bassin du Mackenzie. En tant que résidants du Nord, des Territoires du Nord-Ouest, nous voyons ce qui se produit en amont, et nous espérons que des décisions judicieuses seront prises à l'égard du bassin.
    Merci.
(1430)
    Merci. C'était un exposé exhaustif concernant l'eau d'un point de vue des Territoires du Nord-Ouest.
    Monsieur Trudeau.
    Merci, monsieur le vice-premier ministre.
    Quel genre de réponse avez-vous eu de la part des différents paliers de gouvernement lorsque vous les avez approchés au sujet de cette stratégie?
    Nous avons obtenu un appui significatif de la part des gouvernements autochtones. Dans les Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement fédéral, par l'entremise du ministère des Affaires indiennes, nous a donné le soutien et les ressources nécessaires pour que le dossier progresse.
    Est-ce que des partenaires potentiels, tels que le gouvernement de l'Alberta ou de la Saskatchewan, ont participé à cette discussion?
    Notre relation avec les provinces et le Yukon s'appuie principalement sur l'entente-cadre du bassin transfrontalier du Mackenzie. Nous devons négocier des accords bilatéraux dans le cadre de cette entente. Elle a été signée en 1997, et les accords bilatéraux devaient être négociés par la suite. Cependant, après 11 ans, un seul accord a été signé entre les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon.
    Nous faisons face à des défis importants. Les gens sont de plus en plus sensibilisés à la complexité de la gestion du bassin hydrologique. Cette question ne pourra pas être réglée avec une simple entente. Ces ententes devront être plus complexes que celles que nous avons négociées avec la Saskatchewan et le Yukon. Il y a eu d'importantes avancées dans la science et la compréhension, et nos relations les plus étroites sont avec les provinces et les territoires.
    Retournons au gouvernement fédéral. Vous avez mentionné un certain degré de collaboration de la part du ministère des Affaires indiennes et du Nord. Est-ce qu'on peut sentir que dans son ensemble, le gouvernement fédéral s'intéresse politiquement à participer à ces ententes sur la gestion du bassin hydrologique?
    Lors de la dernière réunion des ministres de l'environnement, nous avons inclus le besoin d'envisager des principes nationaux applicables à l'eau. Je crois que cet enjeu prend de l'ampleur à mesure que les gens se rendent compte de ce qui se passe.
    À ce point, je ne peux pas dire que l'appui est total, mais je crois qu'à la table fédérale-provinciale-territoriale, on sent de plus en plus l'urgence de progresser dans ce dossier, non seulement au sein du Canada; nous avons un certain nombre d'autres ententes transfrontalières, par exemple avec les États-Unis. L'entente que nous avons signée concernant le bassin de la Columbia n'était pas, à mon avis, la meilleure possible.
    Si on parle des autres partenaires, de l'implication de l'industrie, de la participation de certaines ONG et ONGE, quelles sont vos relations avec ces différents groupes d'intervenants?
    Dans la plupart des cas, ces organisations nous appuient grandement. L'Initiative boréale canadienne nous a offert du financement. ATCO a montré un certain intérêt, mais voulait surtout voir ce qui serait proposé, parce qu'ils font partie des soumissionnaires du projet de barrage de la rivière des Esclaves. Mais les ONG, sans exception, considèrent que c'est un grand pas en avant.
(1435)
    Est-ce que l'industrie collabore?
    En ce moment, je crois qu'ils attendent de voir ce qui va se produire. Les gens d'ATCO, comme je l'ai dit, ont demandé une copie de notre ébauche pour voir ce qui était proposé, et ils ont formulé certains commentaires. Mais je crois que la plupart des gens de l'industrie attendent de voir le résultat de nos démarches.
    Concernant la structure, vous inspirez-vous de certains modèles internationaux ou autres de gestion du bassin hydrologique?
    Nous travaillons avec M. Bob Sandford, qui est le président de la Décennie proclamée par l'ONU sur le thème « L'eau, source de vie » au Canada. Il nous a donné un grand coup de main.
    Nous avons été mis en contact avec la fondation Rosenberg, un organisme international qui traite de questions relatives à l'eau. Elle travaille avec nous dans les Territoires du Nord-Ouest sur notre stratégie et sur le modèle que nous envisageons. J'ai aussi fait quelques lectures sur les tentatives et les péripéties des gens du bassin du Nil et des divers pays qui se sont démenés pendant 150 ans pour régler la question. Je crois que nous pourrions tirer plusieurs leçons d'erreurs que nous ne voulons pas reproduire.
    Merci.
    Monsieur Ouellet.

[Français]

    Merci, monsieur le vice-premier ministre, d'être venu nous rencontrer. Je crois que c'est important, tout particulièrement quand il s'agit de l'eau. Vous avez mentionné à plusieurs reprises la nécessité d'une politique nationale de l'eau. Vous n'êtes pas sans savoir qu'au Québec, on va se battre contre une politique nationale de l'eau pour tout le Canada parce que le Québec en possède déjà une. Ne pensez-vous pas qu'il serait plus intéressant, étant donné que le Canada est tellement diversifié, d'avoir des politiques par bassin versant? Que pensez-vous de cette solution?
    Le fédéral a certainement un rôle à jouer par rapport à l'eau et un même rôle à jouer face aux États-Unis. Il y a la question des bassins limitrophes relevant de compétences différentes. Si on procédait par bassin versant, cela voudrait dire qu'on pourrait regrouper les populations. Cela pourrait être des Américains, dans le cas présent, ou peut-être des gens de l'Alberta, des Territoires, de la Saskatchewan et aussi de la Colombie-Britannique qui établiraient une politique par bassin versant. Que pensez-vous de cela?

[Traduction]

    Je crois que nous devons faire les deux. Par exemple, nous ne connaissons pas très bien la cartographie des eaux souterraines et les nappes aquifères. Aux États-Unis, la nappe aquifère Ogallala s'étend sur quatre ou cinq états. Je dirais que nous avons la même situation ici au Canada. Une fois que nos eaux souterraines auront été cartographiées, nous connaîtrons l'importance de la situation. La cartographie de ces eaux doit effectivement être faite dans le bassin de la rivière Mackenzie et au Québec. Partout où il y a un bassin versant ou hydrologique, nous devons être en mesure de le gérer.
    Mais nous avons également besoin d'établir des normes communes. Lorsque nous traitons de questions provinciales transfrontalières, il est nécessaire que le gouvernement fédéral joue un rôle de leader pour regrouper les secteurs de compétence concernés. Lorsque nous traitons de questions transfrontalières avec les États-Unis — et l'eau devient un enjeu de plus en plus important pour les deux pays — alors nous avons besoin d'une présence nationale.
    Je reconnais la préoccupation du Québec, mais lorsque nous parlons de l'eau, aucun secteur de compétence n'est une île en soit. L'eau se déplace. L'eau ne connaît aucune frontière politique. Elle tombe du ciel. Elle vient d'une source en amont. Elle vient des eaux souterraines. Nous devons trouver des façons de gérer cette ressource en tant que pays.
(1440)

[Français]

    Vous avez souvent mentionné, durant votre exposé, les changements climatiques et l'approvisionnement en eau, ainsi que les changements importants qui en découleront. Effectivement, c'est le cas, particulièrement en ce qui concerne les pluies. Les pluies seront abondantes dans certaines régions du Canada et laisseront d'autres espaces complètement désertiques.
    Envisagez-vous une structure afin d'être capable de gérer les changements climatiques qui auront des effets à court terme aussi importants que ceux des sables bitumineux?

[Traduction]

    Nous devons réfléchir à la façon de réagir. Nous devons nous adapter aux phénomènes qui se produisent. Nous devons également prendre les mesures rigoureuses nécessaires pour atténuer les causes à l'origine des changements climatiques.
    Dans notre secteur de compétence, les changements que nous connaissons aujourd'hui n'ont pas débuté dans les Territoires du Nord-Ouest; ils ont leur source ailleurs. En tant que Canadiens, nous devons faire notre part dans le contexte mondial afin de gérer les conséquences des changements climatiques. En effet, des phénomènes naturels comme les précipitations, les sécheresses et les tempêtes de neige changent. La pluie nous tombe dessus comme un déluge puis repart aussi vite. Nous sommes aux prises avec des espèces envahissantes venant du Nord. D'ailleurs, la Colombie-Britannique a déjà livré une lutte acharnée au dendoctrone du pin.
    Il y a tout un éventail de problèmes qui exigent que nous réfléchissions à des solutions, à la fois comme pays et comme secteur de compétence. Les premiers ministres de l'Ouest l'ont d'ailleurs constaté. En effet, les provinces et les états ont reconnu cette situation lorsqu'ils ont constitué leurs propres groupes de réflexion pour examiner les changements climatiques. C'est collectivement que nous devrons aborder cette question.

[Français]

    La structure que vous proposez serait-elle régionale et inclurait-elle les premières nations, sur un pied d'égalité avec les autres gouvernements?

[Traduction]

    Nous aurons besoin de diverses structures, autant communautaires que nationales et internationales; des structures réunissant des responsables des divers niveaux liés tant sur le plan vertical que global. Il faut vraiment reconnaître le rôle des gouvernements autochtones. D'ailleurs, dans les Territoires du Nord-Ouest, ils sont l'un des plus grands propriétaires fonciers. Ils ont conclu des ententes uniques et sont reconnus comme tels dans la constitution canadienne. Nous devons faire de la place pour tout le monde autour de la table.

[Français]

    Merci, monsieur.

[Traduction]

    J'aimerais remercier le vice-premier ministre d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer en Alberta.
    Je crois que nous vous devons des excuses. Nous aurions dû nous rendre dans les Territoires du Nord-Ouest afin de vous entendre vous et votre administration. Certains gouvernements des premières nations ont participé à nos délibérations, mais je sais qu'il y en a beaucoup d'autres tout le long du fleuve qui souhaiteraient être entendues.
    J'ai bien aimé vous entendre parler de l'entente concernant le delta des rivières de la Paix et Athabasca ainsi que celle du bassin du fleuve Mackenzie. Ces ententes remontent à presque un quart de siècle. Croyez-vous qu'il soit nécessaire d'examiner et de réviser de fond en comble ces ententes ou ne devrions-nous pas plutôt nous concentrer à enfin mettre en oeuvre les projets visés par ces ententes?
    Si vous remettez cette entente à l'étude et que toutes les parties concernées s'entendent pour la rouvrir, je crois qu'elle sera considérablement remaniée une fois le processus terminé. À mon avis, aucun gouvernement autochtone ne serait heureux de voir les Territoires du Nord-Ouest ou l'Alberta... Je crois que nous avons un représentant des Autochtones dans chaque secteur de compétence.
    Pour ce qui est des questions comme celle des eaux souterraines, je crois que nous devons regarder ce qui se passe dans le monde. Prenons par exemple le cas du Nil où, après environ 100 ans de guerres, de luttes, d'inondations et de boycottage du trafic maritime, on a constaté que les ententes bilatérales n'étaient pas efficaces pour gérer un bassin hydrologique et vous voulez vous pencher sur des ententes multilatérales.
    Cependant, l'entente à laquelle vous faites référence est un point de départ. Elle n'a pas été intégralement mise en oeuvre et j'ai déjà suggéré de s'appuyer sur cette entente pour débuter et voir de quelle façon nous pouvons la renouveler.
(1445)
    Est-ce que le gouvernement fédéral a consulté directement votre gouvernement dans le cadre des examens des processus d'approbation et d'examen de projet concernant les sables bitumineux?
    Pas à ma connaissance. Pour le moment, nous nous employons à déterminer les processus d'examen concernant le pipeline relevant de notre secteur de compétence.
    C'est également la raison pour laquelle nous sommes ici. Lorsque cette administration a entrepris ses activités, soit au cours de la 16e législature il y a de cela près d'un an et demi, nous avons reconnu qu'il s'agissait d'une question d'importance cruciale et que nous devions nous concerter et agir. Nous ne pouvons tout simplement pas rester là à attendre. Il faut faire avancer le dossier de la gestion des bassins hydrologiques visés par l'entente du projet du bassin du fleuve Mackenzie et insister sur le besoin de mettre en oeuvre les accords bilatéraux dès maintenant.
    Monsieur le vice-premier ministre, croyez-vous que c'est simplement parce que le gouvernement fédéral a abandonné aux mains du gouvernement de l'Alberta trop de responsabilités au fil des ans que nous avons perdu de vue le fait que l'exploitation des sables bitumineux peut avoir des répercussions sur de nombreux secteurs de compétence en amont et que nous pourrions être obligés de revoir la répartition des responsabilités pour ce qui est de ce genre de projets à l'avenir?
    Le gouvernement fédéral doit assumer certaines responsabilités précises dans notre secteur de compétence lorsqu'il s'agit d'enjeux comme l'eau et j'ai précisé les responsabilités légales à cet égard.
    On revient donc à la stratégie nationale sur l'eau et à la nécessité pour le gouvernement fédéral de jouer un rôle de leader pour assurer le respect des processus convenus, le règlement efficace, juste et rapide des ententes transfrontalières et une collaboration entre les divers secteurs de compétence concernés aux fins de mise en place de ces processus. Nous avons une occasion unique et un rôle unique à jouer pour faire beaucoup mieux que nos prédécesseurs.
    Le gouvernement fédéral s'est engagé à enfin promulguer, d'ici la fin du présent exercice je crois, la législation promise pour protéger la salubrité de l'eau potable, mais si je comprends bien, cette législation vise simplement le traitement de l'eau et sa distribution. Compte tenu des questions qui ont été soulevées dans le cadre de cette étude et dans ce que vous avez présenté, plus particulièrement les enjeux concernant l'approvisionnement en eau potable saine pour les communautés des premières nations et autres, croyez-vous que nous devrions élargir notre étude afin de déterminer si nos protégeons adéquatement les sources d'approvisionnement en eau qui seront réglementées par cette loi?
    Je crois que nous devons encore une fois revoir tout l'ensemble.
    Par exemple, il y a quelques mois, nous étions réunis à Whitehorse pour signer une entente fédérale sur les eaux usées. La plupart des administrations ont signé cette entente. Évidemment, sa mise en oeuvre relève du défi. Notre secteur de compétence ne compte que deux petites réserves. En tant qu'administration publique, nous assurons des services à toutes les communautés et nous collaborons avec le gouvernement fédéral en ce qui a trait aux analyses. Nous exerçons une surveillance à partir du tout début, soit le contrôle environnemental exercé par le gouvernement fédéral, jusqu'au robinet. De cette façon, nous avons évité certains événements malheureux qui se sont produits dans certaines réserves fédérales.
    Évidemment, si l'eau est un droit fondamental des Autochtones, comme nous l'avons affirmé, nous devons tous nous efforcer de mieux faire notre travail.
    Dans sa déclaration, ce matin, M. Schindler a dit que ses constatations laissaient entendre que le problème de contamination des cours d'eau peut être dû aux émissions en suspension dans l'air. Est-ce que le gouvernement fédéral ou territorial, ou quelqu'un d'autre, a mis de l'avant une initiative pour commencer à surveiller les lichens et les chutes de neige dans les Territoires du Nord-Ouest?
    Pas à ce jour. Cette stratégie a mobilisé une grande partie de nos ressources. Nous sommes une petite administration. Bien que nous soyons conscients des matières polluantes dans l'air — produites entre autres par l'industrie, les centrales thermiques au charbon, les grandes tempêtes de poussière — il s'agit simplement d'un autre problème sur notre liste. Nous nous efforçons de régler toutes ces questions dans l'ordre et nous nous concentrons d'abord à clarifier notre réflexion stratégique afin d'aller de l'avant.
    Est-ce que vous recommandez une participation accrue de la part du gouvernement fédéral tant au niveau de la stratégie que de la surveillance?
(1450)
    J'ai participé à une conférence à Canmore qui portait sur toutes ces questions. Les activités de surveillance hydrologique ont permis de relever d'énormes lacunes dans tout le pays, soit directement en amont des rivières qui coulent dans chaque direction à partir du point hydrologique le plus élevé du Canada situé quelque part à l'extérieur de Canmore. Il y a également des lacunes importantes au niveau de nos connaissances au sujet des eaux en amont, de tout le débit en aval et de nos eaux souterraines. En tant que pays, nous avons un énorme défi à relever pour régler ce problème et certains secteurs de compétence auront à vivre une situation difficile, probablement plus tôt qu'ils ne le pensent.
    Merci monsieur le vice-premier ministre de vous être déplacé à Edmonton aujourd'hui pour participer à notre séance.
    Quelles sont les sources à l'origine des incidences sur le réseau hydrographique des Territoires du Nord-Ouest?
    Environ 70 p. 100 de l'eau qui se verse dans le bassin du fleuve Mackenzie prend sa source dans la rivière des Esclaves, laquelle est alimentée principalement par les rivières Athabasca et de la Paix. Environ 30 p. 100 vient de la rivière Athabasca et environ 70 p. 100, de la rivière de la Paix. Nos préoccupations portent directement sur les eaux en amont, celles qui s'écoulent des montagnes, jusqu'au débit réel. Nous nous inquiétons des effets cumulatifs de l'exploitation du bassin du fleuve Mackenzie, des changements climatiques qui multiplient certains des effets de cette exploitation, et de la gestion adéquate de ce type de projet.
    Je suis d'accord avec François Paulette lorsqu'il dit que, dans les Territoires du Nord-Ouest, et selon ce que j'ai compris, en Alberta aussi, nous sous-estimons l'eau que nous fournissons à des fins industrielles. Nous fournissons des millions de gallons d'eau pour le prix d'un permis d'exploitation. Si nous ne déterminons pas la valeur de l'eau, les gens croiront qu'elle est sans valeur, que c'est une ressource sans limite que l'on peut utiliser de n'importe quelle façon. Nous devons nous pencher également sur des choses aussi simples que cela.
    Existe-t-il des rapports ou des sources d'information qui montrent les tendances ou l'évolution des effets sur les réseaux hydrographiques dans les Territoires du Nord-Ouest? J'apprécie le fait que les Autochtones perçoivent ces effets grâce à leurs connaissances traditionnelles, mais disposons-nous de renseignements scientifiques?
    Nous devons reconnaître qu'il y a d'importantes lacunes à ce niveau. Le gouvernement fédéral dispose de quelques stations de surveillance qui procèdent à des mesures très élémentaires. De plus, depuis les eaux en amont jusqu'au fleuve Mackenzie puis vers l'océan Arctique, il y a très peu d'activité de surveillance, qu'il s'agisse des eaux de surface ou des eaux souterraines environnantes. Voilà un des défis auxquels nous faisons face. En fait, nous avons toutes sortes de rapports anecdotiques. Dans la communauté où François et moi vivons, il y a deux ans, le niveau de la rivière a baissé d'environ 10 pieds. M. Schindler a signalé que dans les provinces des Prairies, le débit des cours d'eau avait diminué. Le débit de l'eau qui coule des rivières de la Paix et Athabasca vers la rivière des Esclaves et enfin dans le fleuve Mackenzie a diminué de 30 à 80 p. 100.
    Nous savons que lors de la construction du barrage Bennett, le delta des rivières de la Paix et Athabasca, qui était alors l'un des plus grands deltas au monde, a été presque asséché. Le seul moment où le delta a repris vie fut lorsqu'il a fallu creuser des trous dans le barrage Bennett. En permettant ainsi à l'eau de s'écouler pendant quelques années, on a revitalisé le delta. Nous ne disposons pas de beaucoup de renseignements scientifiques, alors nous devons nous fier à ce que nous voyons et entendons ainsi que sur le peu d'information diffusée. C'est l'un de nos défis collectifs les plus importants.
    Pour terminer, en ce qui a trait à la stratégie nationale de gestion sur l'eau, que faut-il pour lancer ce processus, passer à l'étape suivante puis le mettre en oeuvre?
(1455)
    J'ai déjà soulevé la question. J'ai été ministre de l'Environnement et des Ressources naturelles pendant quelque temps au cours de la dernière législature. Strictement sur le plan politique, cette question doit être soulevée devant ce comité. Il y a actuellement une certaine ouverture sur le sujet. L'autre chose qui permettra de faire avancer le dossier est d'amener les gens à faire pression sur leurs représentants et leur dire qu'ils doivent intervenir sur le sujet dans chaque administration. La population doit s'adresser aux représentants élus, tout d'abord au niveau de la communauté puis à d'autres niveaux afin que l'on commence à prendre des mesures étant donné que rien ne doit être pris pour acquis.
    Dans de nombreux cas, nous l'avons tous appris à la dure.
    Merci beaucoup.
    Nous avons le temps pour une deuxième ronde. Monsieur le vice-premier ministre, j'ai quelques questions à vous poser.
    J'ai vraiment apprécié votre témoignage. Outre le bassin du fleuve Mackenzie, combien y a-t-il de bassins situés dans les Territoires du Nord-Ouest?
    Dans le bassin du fleuve Mackenzie, je crois qu'il y a environ six sous-bassins: les rivières de la Paix, Athabasca et Peel, le Grand lac des Esclaves, le Grand lac de l'Ours et la rivière Liard.
    Mais, mis à part le bassin du fleuve Mackenzie, n'y en a-t-il pas d'autres? Est-ce que le bassin du fleuve Mackenzie les alimente tous? Qu'en est-il de la baie d'Hudson?
    Le bassin du fleuve Mackenzie est une grande région où l'eau s'écoule. Dans cette région, nous retrouvons des sous-bassins. Juste à côté, à l'est de notre territoire, se situe la baie d'Hudson.
    Cela étant dit, quelle est l'étendue des travaux de cartographie des nappes aquifères effectués dans les Territoires du Nord-Ouest?
    Aucune cartographie à ma connaissance. En fait, ce point a été soulevé et un rapport a été diffusé hier; je l'ai justement lu hier sur l'avion. Il y a des lacunes énormes au niveau de la cartographie des eaux souterraines et de nombreux secteurs de compétence sont visés. L'entente sur les eaux transfrontalières ne vise pas le bassin du fleuve Mackenzie. En fait, on ne veut même pas en parler, sauf s'il est question des accords bilatéraux.
    Je n'ai pas bien saisi ce point. Qui ne veut pas en parler?
    L'entente sur les eaux transfrontalières du bassin du fleuve Mackenzie, signée en 1997, passe sous silence la question des eaux souterraines. En fait, la seule référence qu'on y trouve est que les eaux souterraines peuvent faire l'objet de discussions si l'on consent à aborder le sujet au niveau bilatéral, soit entre les provinces ou les territoires, à titre individuel.
    Lorsque nous examinons leurs stratégies, la plupart des secteurs de compétence font abstraction des eaux souterraines.
    Cependant, les nappes aquifères s'étendent au-delà des frontières provinciales.
    Tout à fait.
    Ce qui m'amène à parler de l'Entente-cadre sur les eaux transfrontalières du bassin du Mackenzie.
    Vous dites qu'il faudrait la renouveler et je suis d'accord. Je me demande seulement comment nous pouvons y arriver alors que certaines parties à cette entente ne veulent même pas discuter des nappes aquifères communes. Comment pouvons-nous renouveler cette entente? Quel rôle le gouvernement fédéral peut-il jouer pour renouveler cette entente alors que les provinces et les territoires protègent si jalousement leurs secteurs de compétence.
    Quel était l'objectif de l'Entente-cadre sur les eaux transfrontalières du bassin du Mackenzie? Je ne veux pas vous paraître cynique ou moqueur, mais est-ce qu'au départ, cette entente comportait des mesures exécutoires ou était simplement une façade devant la presse pour montrer que le gouvernement s'intéressait aux dossiers relatifs à l'eau? Ne pourrait-on pas simplement mettre en vigueur certaines dispositions ou devons-nous vraiment rouvrir cette entente et la renégocier? Que pouvons-nous faire pour que les mesures qu'elle contient soient exécutoires?
    Quel rôle de leadership le gouvernement fédéral peut-il jouer soit pour renouveler l'entente qui existe ou en créer une nouvelle?
    Je crois que cette question pourrait être formulée de la façon suivante: Comment le gouvernement fédéral pourrait s'abstenir de jouer un rôle? Plusieurs paliers de compétence sont en cause, certains ayant des intérêts concurrentiels et des programmes conflictuels. Le gouvernement fédéral a joué un rôle dans cette entente lorsqu'elle a été signée en 1997. En fait, il a fallu de nombreuses années d'efforts avant qu'elle soit signée. Elle traite directement du problème discuté ici. Ce ne sera pas facile. L'eau est un enjeu très difficile. On a vu naître et mourir des civilisations pour une question d'eau. Des guerres ont été menées pour une question d'eau. Le gouvernement fédéral a la capacité et je crois, la responsabilité, de tous nous ramener à la table de discussion.
    Nous avons organisé une rencontre en juillet dernier, ici, à Edmonton. Nous avons écrit aux signataires de l'entente, soit l'Alberta, la Colombie-Britannique et les territoires du Nord-Ouest, afin de réunir les ministres responsables autour de la table. C'était la toute première fois qu'une telle rencontre était organisée depuis 1997. J'ai fait valoir au ministre de l'Environnement ainsi qu'au ministre des Affaires indiennes qu'il était nécessaire de réunir tous les intervenants et de mettre cette entente à l'étude. Parlons de ce document. Dépoussiérons ce dossier et discutons de la façon d'aller de l'avant.
    C'est une époque différente et un endroit différent. Des événements importants se sont produits au cours des 12 dernières années. Les gens vont porter une grande attention à ce document. Nous devons reconnaître, collectivement, que nous avons tout intérêt à faire avancer ce dossier et que notre avenir et notre destinée sont inextricablement liés au bassin du fleuve Mackenzie. Quant à la responsabilité du gouvernement fédéral dans ce dossier, elle est encore plus grande parce que l'entente vise le nord du pays où s'étend une grande partie de son champ de compétence.
    Alors j'ai fait une pression auprès des ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux, et je suis convaincu que nous tiendrons au cours des six prochains mois notre toute première rencontre des signataires de l'Entente-cadre sur les eaux frontalières du bassin du Mackenzie.
(1500)
    Qui s'occupe de la surveillance de l'eau dans les Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement fédéral ou le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest au nom du gouvernement fédéral? Vous semblez dire qu'il y a très peu de stations de surveillance.
    Effectivement, les stations de surveillance sont peu nombreuses. Nous procédons à l'analyse de l'eau que nous prélevons dans les cours d'eau aux fins d'utilisation municipale et communautaire. Les autres activités de surveillance sont menées par le gouvernement fédéral.
    Le Conseil du bassin du Mackenzie a également tenté de procéder à certaines évaluations des écosystèmes aquatiques et ont produit des rapports, mais avec un budget d'un quart de million de dollars, dont la majorité est consacrée aux trois membres du personnel, il est très difficile d'effectuer ce genre de travail. Dans son rapport, le sénateur Banks signale qu'il y a eu une réduction importante des fonds fédéraux affectés aux ministères fédéraux concernés pour effectuer ce travail et si nous consultons les rapports de recherche sur la surveillance des eaux de surface et/ou des eaux souterraines, nous constatons d'énormes lacunes; de tels rapports sont désuets voire inexistants.
    Soit dit en passant, je sais que lorsque l'on questionne le gouvernement fédéral au sujet de la surveillance de l'eau, on nous répond que les provinces le font en son nom et qu'elles font bien ce travail. Il y a tout juste quelques semaines, on a mentionné dans les médias que le gouvernement de l'Alberta avait annoncé d'éventuelles réductions dans le domaine de la surveillance de l'eau. Il semble donc que nous soyons en présence d'un transfert graduel des responsabilités.
    J'ai déjà dépassé le temps qui m'était alloué, alors poursuivons.
    Monsieur Calkins, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    J'apprécie vraiment les présentations d'aujourd'hui.
    En passant en revue cette entente-cadre je remarque que les paragraphes a) à s) de la rubrique « Fonctions du Conseil » font état des activités du Conseil. Si vous regardez à la rubrique « Partage des coûts », pour tous les éléments énumérés aux paragraphes a) à s), on note un montant de 280 000 $ consacré à l'exécution de toutes ces responsabilités.
    Croyez-vous qu'au moment où l'entente a été conclue, en 1997, on avait vraiment l'intention de mener à terme l'un de ces objectifs? Que faut-il faire maintenant pour y parvenir ou pour apporter des modifications en vue d'améliorer l'entente? Cela me semble être un bon départ pour traiter certains des enjeux, particulièrement lorsque l'on parle de surveillance des eaux en aval, des effets en aval pour les diverses parties concernées et plus particulièrement en ce qui a trait au développement économique et à l'exploration.
    Ce budget n'a pas été modifié depuis qu'on a signé l'entente. Alors, si nous tenons compte de l'inflation et de l'augmentation des salaires et d'autres éléments, il y a peu d'argent disponible pour autre chose que le paiement des salaires et des locaux. On a bien sûr obtenu officieusement d'une autre aide financière pour mener certaines activités. Toutefois, une des choses que nous, dans les Territoires du Nord-Ouest, n'avons cessé de réclamer est, à tout le moins, d'obtenir que les divers secteurs de compétence s'entendent pour au moins doubler ce budget, étant donné qu'il n'y a eu aucune augmentation depuis 12 ans.
    Je crois que cette entente a été signée avec la meilleure intention du monde. Mais si vous vous rappelez, il y a environ 12 ans, la question de l'eau ne faisait pas partie des priorités de chacun des intervenants. Il y avait, à ce moment-là d'autres problèmes auxquels il fallait s'attaquer. Mais, elle est devenue un enjeu majeur. Dorénavant, le Conseil du bassin du Mackenzie est à l'avant-scène politique et tous les projecteurs sont tournés sur ce dossier politique de l'heure. Collectivement, nous avons du travail à faire et nous insistons pour qu'il débute.
(1505)
    Merci. J'apprécie ce que vous venez de dire.
    J'ai passé en revue votre document de présentation et j'ai pris connaissance de la recommandation sur l'instauration de mécanismes frontaliers où il est question de revitaliser cette entente-cadre et d'adopter une approche axée sur l'écosystème, puis d'une deuxième recommandation où vous parlez d'établir une stratégie nationale sur l'eau et, enfin, de la troisième recommandation qui porte sur les sciences et la technologie, où vous énumérez un certain nombre de sous-éléments.
    Toutefois, lorsqu'il est question de la stratégie nationale sur l'eau, il n'y a aucun sous-élément, alors je me demande si vous pouvez m'expliquer certains sous-éléments ou me donner un peu plus de détails sur la façon dont vous ou le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest percevez ces éléments, autrement dit quelle est la démarche exacte menant à l'établissement d'une stratégie nationale sur l'eau et quelle est la position du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest pour aller de l'avant et contribuer à cette stratégie.
    Je proposerais quelque chose de très semblable à ce que nous proposons concernant l'entente sur les eaux transfrontalières du Mackenzie, à savoir qu'à titre de gouvernement du territoire, nous avons un rôle de leadership à jouer. Et si nous regardons l'ensemble du paysage canadien, nous constatons un chevauchement des questions relatives à l'eau, des questions relatives aux changements climatiques, elles-mêmes liées à l'exploitation des ressources. En fait, l'eau traverse tous les secteurs de compétence. Elle ne s'arrête pas aux frontières politiques.
    Au moins, actuellement le ministre de l'Environnement envisage de réfléchir à la façon dont nous pouvons coordonner nos efforts. Nous avons tout de même progressé sur certains fronts, notamment la gestion des eaux usées. Nous nous efforçons maintenant de mettre au point des normes nationales.
    Toutefois, pour ce qui est d'établir des liens et de réunir les parties concernées, comme dans le cas de l'entente sur le bassin du fleuve Mackenzie, de réunir tout le monde autour de la table afin de parler de la façon dont le monde a changé depuis la signature de l'entente, de la façon d'aller de l'avant pour gérer des questions très complexes, en disposant souvent de très peu d'information et enfin, de l'engagement à collaborer avec les divers secteurs de compétence afin d'établir une banque de données nationales pour nous aider à prendre les bonnes décisions, nous devons d'abord régler certains problèmes liés à d'autres ententes conclues avec d'autres pays comme les États-Unis.
    Cartographier tout ce qui se produit sur l'ensemble du territoire, tant au niveau des débits que des cours d'eau et de la baisse de l'accumulation de neige, de la réduction des glaciers, en fait tout ce qui alimente le réseau hydrographique, est un énorme défi. Soixante pour cent de l'eau qui coule au pays vient du Nord. Quatre-vingt pour cent de la population vit sous le 60e parallèle. Voilà des enjeux nationaux d'envergure. Si nous ne tenons pas une table ronde nationale pour en discuter, alors tout le monde restera dans son coin à chercher tout seul des solutions. Aucun secteur de compétence ne constitue une île en soi lorsqu'il est question de l'eau.
    Et si nous parlons du barrage Bennett et d'autres barrages — je l'ai d'ailleurs soulevé hier devant ce comité — les représentants de la Nation des Cris de Chisasibi, qui vivent sur la rive est de la baie James, ont souligné devant le comité sur les pêches, dont je suis également membre, la disparition de l'habitat, de la zostère marine et du poisson. Lorsqu'il n'y a plus de zostère marine, les oiseaux migrateurs s'en vont. Nous avons également entendu des représentants du ministère dire que la rive ouest n'est pas touchée. Il y a toujours une zostère marine et les oiseaux migrateurs ont tout simplement changé leur itinéraire et vont maintenant sur cette rive de la baie James. On a signalé de nombreux problèmes possibles, mais ce qui a vraiment changé sur la rive est de la baie James, ce sont les dérivations massives des rivières à la suite du projet hydroélectrique de la baie James.
    Hier, lors de notre visite à Fort Chipewyan, on nous a parlé de la baisse importante du niveau d'eau du lac Athabasca. En prenant connaissance de certaines photographies en couleur nous avons pu constater la marque laissée par la ligne des hautes eaux sur les rochers de la rive. La réalité, c'est que cette rivière allait habituellement dans les deux sens, selon le débit de la rivière de la Paix. Je ne peux que supposer que cela aura aidé à remplir le lac Athabasca. À la lumière des témoignages que j'ai entendus, c'est à peu près au moment où les barrages hydroélectriques ou la série de barrages sur la rivière de la Paix ont été construits qu'on a commencé à remarquer une baisse graduelle du niveau du lac Athabasca. Je présume que ce niveau est maintenant stabilisé, étant donné que la plupart des lacs se stabilisent éventuellement lorsqu'ils sont alimentés par plusieurs rivières et qu'ils n'ont qu'un endroit où s'écouler.
    Quelles sont vos réflexions au sujet de toute proposition ultérieure de construction de barrages hydroélectriques compte tenu du fait que nous avons si peu d'eau comme vous nous l'avez si judicieusement signalé? Une certaine pression a été exercée par divers groupes d'intérêt afin de retenir l'eau, de l'utiliser pour une technologie supposément plus propre que celle de l'exploitation des sables bitumineux. Cependant, peu importe le point de vue, il semble qu'il y ait autant de préoccupations et de dommages causés à l'environnement.
    Pouvez-vous éclairer un peu plus les membres de ce comité au sujet des problèmes d'hydroélectricité et de construction de barrages sur l'un ou l'autre de ces cours d'eau? Quelle est la position des Territoires du Nord-Ouest concernant tout projet ultérieur compte tenu du fait que nous disposons d'une entente multilatérale et que les discussions et négociations devront se faire avec tous les intervenants en aval?
(1510)
    Il faudra procéder à de nombreuses études techniques, environnementales et scientifiques afin de prendre une décision éclairée.
    De plus, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest envisage également la réalisation de quelques projets hydroélectriques. En fait, nous avons un petit projet de développement en vue, mais pour nous, il est important; il pourrait nous permettre de produire jusqu'à 120 mégawatts. Nous travaillons activement à créer de mini-centrales hydroélectriques dans un certain nombre de communautés.
    Toutefois, si l'on parle de rivières importantes, comme la rivière des Esclaves, les préoccupations se situent au niveau des effets cumulatifs; j'entends par là le barrage Bennett, le site C et la formation de Dunvegan, et tout ce qui se produit dans les montagnes. Pour moi, le problème se situe toujours au niveau des eaux en amont et des phénomènes qui se produisent dans les montagnes, soit à la source de l'eau, auxquels il faut ajouter le réchauffement de la planète et la fonte des glaciers. De plus, il y a les effets cumulatifs en aval, notamment les activités d'extraction et la retenue de l'eau découlant des différentes activités de l'homme, l'évaporation accrue, la hausse des températures, la réduction du niveau d'accumulation de neige et la baisse des précipitations.
    Je continue de dire aux gens qu'il y a du travail à faire afin qu'ils puissent prendre des décisions éclairées. S'ils décident d'aller de l'avant, le coût de la construction du barrage sur la rivière des Esclaves pourrait se situer autour de 5 milliards de dollars et plus. C'est un montant appréciable. La dernière fois que le gouvernement de l'Alberta a étudié le projet, c'était dans les années 1980. À ce moment-là, après l'avoir étudié, les responsables l'ont abandonné. Le ministre d'alors était M. Bob Bogle. Il avait dit que ce projet pourrait être repris et nous en sommes là. Maintenant, nous devons peser le pour et le contre. L'environnement a changé. On dispose des nombreuses données de base recueillies dans les années 1980, mais il reste beaucoup de travail à faire pour combler les lacunes.
    Vous aurez également devant vous des personnes comme François, de la Première nation de Smith's Landing, qui s'y opposeront passionnément et vigoureusement pour protéger leurs terres ancestrales. Ce sera un processus très compliqué et très long. Nous devons tenir compte de l'important site du patrimoine mondial qu'est le Parc national Wood Buffalo, des pélicans et de bon nombre d'aspects connexes. Les gens qui habitent le territoire qui s'étend jusqu'à l'océan Arctique voudront savoir ce qui se passe. En fait, ça ne se passera pas comme la dernière fois, alors qu'ils considéraient la chose comme un enjeu régional. Les gens savent très bien à quoi s'en tenir, surtout après le projet du barrage Bennett; ils savent qu'ils vont tous être touchés par de tels projets.
    Nous avons le temps pour une dernière question. Monsieur Warawa.
    Merci.
    Monsieur le vice-premier ministre, je tiens également à vous remercier de vous être déplacé pour être parmi nous aujourd'hui et pour votre témoignage très enrichissant.
    J'aimerais que nous nous concentrions de nouveau sur les sables bitumineux et les incidences directes que l'exploitation de ces sables peut avoir sur l'eau.
    Un certain nombre de personnes ont témoigné au sujet d'éventuelles incidences sur la santé et je crois que ces commentaires faisaient état de préoccupations selon lesquelles la principale source de pollution vient des sables bitumineux. Nous avons entendu un témoignage qui parlait des contaminants naturels que dégage le bitume et du fait que leur nombre a augmenté de façon importante en raison, selon ces personnes, de l'exploitation des sables bitumineux.
    Une question a été soulevée au cours de la dernière séance: si l'on procédait à l'exploitation in situ des sables bitumineux au lieu d'une exploitation à ciel ouvert, nous n'aurions pas le problème des bassins de décantation. Un témoin a estimé que passer à l'exploitation in situ ne permettrait pas de régler le problème. Évidemment, ce type d'exploitation viserait environ 80 p. 100 de la ressource tandis qu'environ 20 p. 100 de la ressource seraient exploités à ciel ouvert. La plus grande partie de cette ressource serait donc exploitée selon une technologie différente.
    Comme on semble vouloir adopter une technologie in situ différente, est-ce que les Territoires du Nord-Ouest disposent de renseignements à cet égard? Est-ce que les Territoires du Nord-Ouest ont participé au programme régional de surveillance du milieu aquatique, un programme de surveillance qui fait appel aux divers paliers d'administration, aux ONG, aux Autochtones, à tous les renseignements disponibles et à l'industrie, évidemment?
    J'aimerais que vous me parliez du rôle que les sables bitumineux jouent au niveau de la pollution. Nous avons une pollution transfrontalière qui se déplace à l'échelle de la planète et les conséquences sont assez sérieuses dans la partie Nord du globe, du moins lorsque nous parlons du mercure. Quelles sont les sources principales de cette pollution et quel est, selon vous, le rôle des sables bitumineux dans tout cela?
    Merci.
(1515)
    Jusqu'à présent, notre contribution s'est limitée à la rédaction de lettres dans lesquelles nous faisons état de nos préoccupations aux échelons bureaucratiques supérieurs. Lorsque des activités d'exploitation sont proposées ou franchissent rapidement le processus d'approbation en Alberta, les citoyens des gouvernements autochtones que vous avez entendus et la population sont très préoccupés de ce qui peut arriver à Fort McMurray.
    Nous convenons, et c'est la raison pour laquelle nous travaillons à une stratégie sur l'eau, que nous devons être en mesure de nous présenter à la table de discussion comme groupe, afin qu'une voix du Nord puisse se faire entendre sur les questions de consultation, de notification préalable et de systèmes mis en place à l'extérieur de nos frontières, comme c'est le cas de l'Alberta, où il revient au gouvernement fédéral d'y donner suite grâce à sa propre législation. Nous devons profiter de l'occasion pour faire part de ces préoccupations.
    Actuellement, parmi les grandes préoccupations signalées figurent les immenses bassins de décantation. En raison des vents dominants, la pollution voyage de l'ouest vers l'est, ce qui nous favorise souvent, mais il arrive que les vents soufflent vers le Nord et nous ne sommes pas très loin. Les cheminées sont relativement hautes, alors il y a toutes les questions liées aux contaminants atmosphériques ainsi qu'aux particules fines.
    Un autre des problèmes importants qui nous inquiète est ce qui se produit en amont, et nous essayons de prendre des dispositions pour y faire face de la façon la plus constructive possible grâce à notre stratégie. Ainsi, nous pourrons négocier des accords bilatéraux de façon très claire et efficace, amener le gouvernement fédéral à s'engager et examiner la façon de procéder étant donné que nous sommes voisins de l'Alberta. Nos liens sont importants. L'Alberta est l'un de nos plus grands partenaires commerciaux.
    Ces liens historiques remontent à des centaines d'années, voire des milliers d'années si on tient compte des liens entre les peuples autochtones. Nous parlons ici d'une voie commerciale commune. Nous ne sommes pas ennemis; c'est simplement que nous vivons des situations très difficiles lorsqu'il faut trouver un équilibre entre le besoin d'exploiter les ressources et la protection de l'environnement. Nous voulons nous assurer d'être prêts, dans le Nord, que notre réflexion soit claire et que nous puissions défendre notre position.
    Bien que nous soyons voisins et amis, cela ne nous empêchera pas de négocier serré. Nous cherchons à protéger ce que nous croyons être des valeurs essentielles, et c'est là un des aspects qui nous inquiète.
    Monsieur le vice-premier ministre, nous apprécions vraiment votre témoignage. Il semble que les ressources hydriques soient un enjeu qui vous préoccupe beaucoup et auquel vous consacrez beaucoup d'efforts. Nous apprécions vraiment votre point de vue. Merci d'être venu nous rencontrer.
    Bien, nous avons une pause de cinq minutes puis nous poursuivrons avec la partie sur la technologie.

(1530)
    Nous sommes prêts à poursuivre avec la dernière partie de la journée, soit l'aspect technologie.
    Nous avons parmi nous M. Hassan Hamza, de Ressources naturelles Canada; M. Thomas Gradek, président de Gradek Energy Inc. et, évidemment, Mme Kim Kasperski, que nous avons rencontrée à Ottawa il y a un mois ou deux.
    Bienvenue.
    Comme vous le savez, nous accordons généralement 10 minutes pour les présentations.
    Monsieur Hamza.
    Tout d'abord, je voudrais m'excuser pour la qualité de ma voix. Je suis aux prises avec un rhume dont je ne peux me débarrasser. Non je ne la partage pas et non, ce n'est pas la grippe porcine. Lorsque vous retournerez à Ottawa, ne dites pas que c'est ma faute.
    Avec votre permission, monsieur le président, j'ai ici une présentation que je vais tout simplement feuilleter pour laisser plus de temps pour les questions. En fait, cela ne prendra pas plus de cinq minutes. Je veux aborder les enjeux de l'exploitation des sables bitumineux.
    Ainsi, à la page deux de la présentation, nous voyons pourquoi les sables bitumineux sont très importants pour l'économie de l'Alberta et du Canada. Cette exploitation est très importante pour les citoyens d'un point de vue économique ainsi que pour la prospérité des générations futures. Comme vous en avez sûrement entendu parler beaucoup ces derniers temps, je ne vais pas répéter ce qui a été dit. Cependant, si vous regardez les chiffres présentés à la page deux, vous pouvez voir que cette activité génère un très grand nombre d'emplois directs et indirects ainsi que des recettes pour le gouvernement.
    Il y a deux méthodes d'extraction pour les sables bitumineux. L'une d'elles est l'exploitation in situ et l'autre, l'exploitation de surface. Chacune d'elles comporte des défis qui leur sont propres. Ces deux méthodes ont des incidences sur le terrain, sur l'air et sur l'eau. Ces incidents varient selon la méthode d'extraction, mais elles sont importantes et nous devons nous y attaquer.
    Le graphique de la page quatre montre l'utilisation de l'eau dans l'extraction et le traitement des sables bitumineux dans le cadre de l'exploitation de surface. La page cinq illustre l'utilisation de l'eau pour l'exploitation in situ. Dans le graphique de l'exploitation de surface, nous utiliserons disons 100 unités — vous pouvez choisir le nombre d'unités que vous voulez. De ces 100 unités, 74 unités sont recyclées et 26 s'en vont dans des bassins, ce qui rend très difficile la tâche de s'en débarrasser dans des circonstances normales. Donc, nous récupérons 74 unités, alors nous devons obtenir 26 unités d'autres sources. Il y a de l'eau qui vient du minerai, ce qui représente quatre unités, et là où il est écrit « Rivières », c'est une fausse appellation dans ce cas-ci; en réalité, ce devrait être de l'eau fraîche venant de la rivière qui, après avoir été traitée, constituerait les 22 autres unités. On doit compter une évaporation d'environ quatre unités alors que les précipitations sont à peu près correspondantes, soit quatre unités. Les deux s'annulent. Les 26 unités équivalent entre trois et quatre barils d'eau par baril de bitume.
    J'essaie d'être très concis afin qu'au moins nous puissions parler des mêmes enjeux.
    Pour ce qui est de l'exploitation in situ, nous avons choisi le procédé SAGD qui, ainsi que vous le savez peut-être, signifie drainage par gravité au moyen de la vapeur. Encore une fois, nous commençons le traitement avec la même quantité de vapeur, soit 100 unités, et celle-ci va dans le réservoir. Dix unités sont retenues et 90 unités sont recyclées. Il arrive que l'eau ait besoin d'être traitée pour cette opération. Donc, nous devons nous procurer 10 unités d'eau fraîche. Il s'agit d'un mélange de 27,6 unités d'eau fraîche et d'eau salée... [Note de la rédaction: Inaudible]... pour procéder au traitement et/ou en perd environ 17,6 unités. Il reste donc 10 unités.
    Ces 10 unités correspondent à environ 0,7 baril d'eau par baril de bitume, et selon de nombreuses estimations, cela correspond à environ un baril pour l'exploitation in situ.
(1535)
    Je vous renvoie à la page 6.
    Nous pensons que les technologies sont le seul moyen de résoudre certaines de ces difficultés. Nous devons disposer de technologies qui nous permettront de régler les problèmes liés à l'eau dans l'exploitation à ciel ouvert. Nous devons débarrasser les résidus de l'eau qu'ils contiennent, et lorsque cette eau en est extraite, il arrive parfois qu'elle n'est pas dans un état idéal. Il faut donc la traiter et il sera important d'améliorer le traitement de l'eau.
    L'exploitation in situ contourne le problème de l'eau en en consommant moins grâce à l'utilisation de technologies qui utilisent cette eau, notamment dans le cas de la méthode SAGD avec solvants ou encore l'injection d'air et la combustion, etc. Cette méthode requiert, elle aussi, un traitement de l'eau.
    Les bassins de résidus font les manchettes depuis très longtemps, par leur vaste étendue, et à cause d'autres événements récents qui ont encore mis les bassins de décantation sous les projecteurs.
    Rappelons qu'au début du processus d'extraction les bassins de résidus n'étaient pas censés être aussi importants qu'ils le sont maintenant, parce qu'on s'était fondé sur le nombre de fines, c'est-à-dire sur le nombre de très fines particules, et personne à l'époque ne s'était soucié de la nature de ces particules. Les particules fines immobilisent l'eau autour d'elles si bien qu'une grande quantité d'eau est ainsi immobilisée, en raison non seulement de la taille des particules, mais en raison de la nature des argiles et d'autres facteurs également.
    Comprendre toutes ces choses nous aidera beaucoup. Et ce sera encore mieux, si nous y accordons plus d'attention.
    Nous avons mis sur pied un consortium de recherche à la fin des années 1980. Presque tous les membres de ce consortium étaient des chercheurs du gouvernement provincial ou du gouvernement fédéral, ou encore d'universités. Ils ont travaillé pendant cinq ans, à l'aide d'un budget de 25 millions de dollars, et les résultats qu'ils ont obtenus ont été appliqués, dans une large mesure, sur le terrain.
    J'ai en main un résumé de ces résultats. L'industrie a parlé de solution miracle. Elle en a parlé beaucoup, et je dirais qu'elle cible l'information qui pouvait être utile ici. Il y avait là les compagnies, RNCan et le gouvernement de l'Alberta. Nous y avons tous contribué, ainsi que deux universités.
    C'est ainsi que les choses ont commencé. Je crois qu'il y a encore beaucoup à faire et que nous devrions nous intéresser à diverses technologies.
    J'aimerais aussi aborder une autre question qui a retenu un peu plus l'attention dernièrement, à savoir les composés organiques volatils que libèrent les résidus, ainsi que la mine en exploitation. Je dirais que ces composés affectent à la fois la santé et l'environnement. Ces composés génèrent aussi des GES. Ici encore, un certain travail a été fait dans différents endroits afin de comprendre la nature ou la teneur de ces composés afin de les caractériser et de comprendre leur incidence sur l'environnement.
    Pour résumer, les sables bitumineux sont très importants. On ne saurait les abandonner. Des améliorations se font mais il ne faut pas oublier que si l'on parvient à réaliser des améliorations dans un domaine, il ne faut pas perdre de vue l'incidence, positive ou négative, que ces améliorations peuvent avoir dans d'autres domaines. Nous devons donc examiner la situation dans son ensemble, plutôt que comme un problème particulier. C'est très important, et nous sommes résolus à travailler à la recherche d'une solution qui permettra une exploitation responsable de la ressource.
    Merci.
(1540)
    Merci beaucoup. Nous passons maintenant à M. Gradek.
    Avant de commencer, monsieur le président, j'ai apporté avec moi des échantillons afin de montrer à quoi ressemble notre technologie, pour que tous puissent bien voir de quoi il s'agit. Essentiellement, notre technologie est fondée sur ces granules de polymère organique, qui ont pour propriété d'absorber les hydrocarbures. Vous voyez ici le sable résiduel, après application de notre procédé.
    Dans ces pots... Nous en avons un ici qui n'a pas été agité, montrant essentiellement ce que l'on obtient, après traitement, lorsque le bitume est absorbé par les granules, et vous pouvez voir de l'eau claire et les résidus solides qui se sont déposés au fond. Dans celui-ci, que je vous propose de tourner à l'envers, nous pouvons voir la rapidité du processus de stabilisation. Vous verrez que les solides qui se sont déposés dans une colonne d'eau deviennent quelque peu traficables. Ils se déposent et se compactent. Ils ne sont pas mobiles.
    C'est en gros la solution que nous proposons. Elle est fondée sur les lois de la nature, dont je vais vous parler maintenant et que je décris ici dans ma documentation.
    Monsieur le président et distingués membres du comité, je m'appelle Thomas Gradek. Je suis l'inventeur et le développeur d'une technologie canadienne de pointe. Ma petite compagnie, Energie Gradek Inc., est établie à Montréal et son siège opérationnel est à Calgary. Energie Gradek propose d'éliminer les résidus provenant de l'exploitation des sables bitumineux et, avec le temps, d'éliminer les bassins de décantation existants, sans aucun coût pour les compagnies d'exploitation de sables bitumineux. Notre objectif est de faire en sorte que le pétrole extrait des sables bitumineux devienne un pétrole propre de qualité pipeline. La clé réside dans la technologie RHS.
    Energie Gradek est à développer une technologie d'extraction d'hydrocarbures appelée RHST, en vue de son application à n'importe quel médium. L'efficacité de la RHST a été démontrée au terme d'essais approfondis en laboratoire, et Energie Gradek conçoit actuellement un projet pilote avec la participation d'exploitants de sables bitumineux, afin d'en prouver l'efficacité à éliminer les hydrocarbures et les effluents de résidus qui contribuent à la multiplication des bassins de décantation.
    La technologie actuelle d'aéroflottation est plus ou moins efficace à transformer l'eau en boue en raison de la présence de particules fines et de minéraux dissous. Du fait de cette inefficacité, du bitume reste attaché aux particules fines et celles-ci restent en suspension dans l'eau, d'où la nécessité d'aménager des bassins de décantation, pour permettre, sur une longue période, que ces particules fines se déposent.
    L'industrie des sables bitumineux a investi des milliards dans l'aménagement de ses installations actuelles de production, et ce, sur des décennies. C'est par nécessité que l'industrie se concentre sur la production. Le modèle d'affaires proposé par Energie Gradek libérerait en quelque sorte l'industrie du fardeau des résidus, et consisterait à construire et exploiter les canalisations et les étangs de résidus, dans une usine de traitement, le tout hors circuit, et de financer par ses propres moyens une entreprise profitable et viable, sans risques pour les activités existantes.
    Quelle est cette technologie? Ces granules recouverts de bitume dans de l'eau claire et les solides déposés représentent le résultat que l'on peut obtenir à l'aide de notre technologie. Comme vous pouvez le voir, d'après les échantillons que j'ai apportés ici aujourd'hui, les particules fines débarrassées du bitume se déposent facilement.
    Comment ça fonctionne? Les granules sont, fondamentalement, des bulles d'air améliorées qui permettent d'extraire le bitume plus efficacement. Il s'agit d'une nanotechnologie appliquée, qui fait appel aux lois de la nature, pour réaliser la capture sélective des hydrocarbures. L'équilibre est atteint lorsque l'hydrocarbure se pose à la surface du granule, et dès lors, le bitume se trouve à son niveau d'énergie libre minimal. Par la suite, le bitume est séparé du granule par lavage à l'aide d'un solvant, pour produire un bitume dilué de qualité.
    Cette diapositive montre le processus d'extraction du bitume et illustre l'utilisation de résidus frais mélangés à de la boue provenant de bassins de décantation, de façon à obtenir notre température optimale, soit 40 degrés Celsius environ. Ce mélange de boue est introduit dans le mélangeur avec les granules RHS, pour mettre en contact les particules enduites de bitume avec les granules. Le bitume migre vers les granules. La boue est ensuite acheminée dans un deuxième compartiment, dont on retire l'eau claire et les solides, et les granules chargés de bitume sont acheminés dans une unité de lavage à l'aide de solvants, pour produire du bitume dilué. Les granules sont ensuite récupérés, séchés et peuvent être réutilisés.
    Le projet RHST est un programme pilote qui prévoit deux étapes. Nous en sommes à la phase de conception de la première étape du programme. La première étape du projet démontrera la faisabilité d'un processus en flux continu. La deuxième étape aura pour objet de démontrer la faisabilité du processus à une échelle commerciale.
(1545)
    Cette diapositive montre que la démonstration et la validation de la technologie ont mis à contribution divers établissements et installations. Les tests menés au cours des étapes de développement ont été nombreux et ont produit d'excellents résultats.
    Les avantages de la technologie RHS qui sont décrits dans les diapositives 12 à 16, se résument ainsi:
    Performance environnementale: la technologie RHST pourrait réduire l'impact environnemental de l'exploitation des sables bitumineux dans son ensemble.
    Performance sociale: elle pourrait contribuer à un environnement plus sain par la réduction des effets des effluents et de leurs émissions.
    Performance économique: elle pourrait contribuer à l'amélioration d'ensemble des coûts d'exploitation, par l'élimination des dépenses de gestion des résidus, et des risques futurs qui s'y rattachent.
    Enjeux technologiques: la technologie RHST pourrait permettre aux exploitants de se conformer à leurs obligations d'efficacité en matière de récupération du bitume, imposées par la CERE.
    Enjeux politiques: la technologie RHST pourrait faciliter la conformité à la réglementation américaine et aux politiques des États-Unis sur les carburants utilisés dans le transport.
    Une fois mise en oeuvre, la technologie RHST permettrait de s'attaquer à la prolifération des bassins de décantation, grâce à la récupération du bitume résiduel fixé aux particules fines, notamment les argiles et les oxydes. La RHST est une solution à coût nul pour l'industrie. Elle permettrait de récupérer une eau que l'on peut directement traiter et recycler, de la terre traficable pouvant servir aux travaux de remise en état des sites.
    Ce procédé permettrait en outre de se conformer directement et complètement à la réglementation américaine. De manière générale, la réduction de l'intensité des émissions de carbone serait conforme à la législation américaine en cette matière, les émissions de gaz à effet de serre seraient éliminées des bassins de décantation, en conformité avec la législation sur les changements climatiques et la valeur RIN du combustible résiduel serait conforme à la loi américaine concernant les sources d'énergie renouvelable.
    Les sables bitumineux représentent des perspectives économiques considérables pour le Canada, qui sont toutefois limitées par l'impasse actuelle du côté environnemental. La mise en oeuvre de la technologie RHS permettrait au gouvernement du Canada et à l'industrie de trouver un équilibre entre ces intérêts conflictuels. Le financement de sources gouvernementales est essentiel à l'accélération des étapes de ce projet pilote. Tout le pays bénéficierait de l'activité économique que générerait la solution que nous proposons. Sa mise en oeuvre réduira et pourrait à la limite éliminer les bassins de décantation et la technologie RHS est prometteuse, en termes d'expansion et de diversification des possibilités d'exportation.
    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir permis de prendre la parole, et je suis disposé à répondre aux questions du comité.
    Merci, monsieur Gradek.
    Madame Kasperski, avez-vous des commentaires?
    D'accord. Alors nous pourrions passer à la première ronde de questions.
    Monsieur Trudeau.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Hamza.
    Les chiffres que vous citez, 14 milliards de dollars jusqu'à présent pour les gouvernements, 120 000 emplois... Manifestement, nous parlons d'une industrie d'une taille considérable et d'une grande importante pour notre économie et pour l'emploi au Canada. Savez-vous combien d'argent a été investi dans la science et la recherche dans ce domaine, globalement?
(1550)
    En fait, je n'ai pas de chiffre exact. Cependant, nous parrainons actuellement une étude visant à déterminer, en premier lieu, combien d'argent est dépensé, toutes sources confondues, dans la recherche sur les sables bitumineux. Un deuxième volet porterait sur les résultats de cette recherche, à un certain nombre d'égards — le nombre de personnes qui ont été formées, le nombre d'ingénieurs. Et un troisième volet porterait sur les retombées, c'est-à-dire dans quelle mesure cette recherche a-t-elle été utile.
    Je devrais obtenir les résultats préliminaires de cette étude en juin. Je serai très heureux de vous en faire part. En fait, nous partageons cette étude avec le gouvernement de l'Alberta, qui partage avec nous certains de ses résultats dans le même domaine, mais pas dans tous les aspects de la recherche en cours. Nous en faisons autant avec eux. Nous voulons nous assurer que les sommes dépensées produisent quelque chose, au bout du compte. Nous ne faisons pas que créer des emplois dans la recherche. Il y a une motivation derrière tout cela.
    C'est excellent, donc. Je vois que nous consacrons beaucoup d'argent à la recherche-développement, aux sciences, et je constate les retombées de l'exploitation des sables bitumineux pour l'économie du savoir.
    Êtes-vous en mesure de dire si cette étude aura des suites en recherche et en sciences, si elle examinera l'impact du développement des sables bitumineux pour les communautés, les particuliers, les écosystèmes, et les perspectives d'avenir — et si elle permettra d'examiner la situation de l'industrie comme telle? Ces aspects sont-ils également abordés dans votre étude?
    Cela fait partie de l'étude — en marge de celle-ci, je dirais. La remarque est très pertinente. Soyez assuré que je ferai en sorte d'obtenir des données fiables sur la question. Si je ne trouve rien, nous pourrons revenir et proposer d'élargir l'étude; je suis très heureux que vous posiez ces questions.
    Alors, serait-il juste de dire que l'importance de l'aspect scientifique porte beaucoup plus sur la recherche technologique et la recherche avancée concernant le volet industriel, plutôt que sur la surveillance des répercussions? Si je me fie à votre réponse...
    Je dirais que c'est ce qu'on attendait de cette étude. Je n'ai pas encore vu l'ébauche. L'étude porterait davantage sur le volet scientifique, mais même pour ce qui est du volet social, vous devez avoir certains faits scientifiques. Vous pouvez vous fonder sur des anecdotes et vous pourrez vous baser sur les impressions de quelqu'un, mais vous avez besoin des faits pour être en mesure d'exprimer les résultats en des chiffres réels auxquels on puisse se fier.
    Même si l'étude ne porte pas sur ce type de transposition entre les résultats que nous avons — par exemple, s'il se fait du travail sur l'eau et qu'on dit que l'apport en eau, les eaux résiduelles, etc. — et les chiffres et les sommes qui ont été consacrés à la surveillance de l'eau — il y a un impact social. On peut supposer qu'il y aurait un impact social. Comme je l'ai dit, je ne peux rien affirmer avec certitude, mais je saurai ce qu'il en est en juin. Nous ne pouvons que faire des déductions. Il se pourrait que nous devions pousser un peu plus loin, pour nous assurer d'avoir un volet là-dessus.
    Nous devrons peut-être élargir quelque peu l'étude pour obtenir plus de chiffres, mais les fais sont très importants. Beaucoup d'information circule. Pour ce qui est de savoir s'il s'agit de faits, fondés sur les bons chiffres, votre interprétation vaudrait la mienne.
    Et précisément, nous souhaitons éviter les suppositions. Nous sommes ici précisément pour cela, pour tirer les faits au clair, et éliminer les suppositions, les mythes et la désinformation, pour déterminer d'où vient l'information, quelle est l'ampleur des études qui se font et l'ampleur des efforts scientifiques dans le but de mesurer les répercussions de l'industrie, et non seulement pour améliorer la performance de l'industrie elle-même. L'expansion de l'industrie serait un élément qu'il serait bien important d'intégrer à cette étude ou à une étude ultérieure.
    Merci.
    Absolument. Cela fait partie de notre mandat à RNCan.
(1555)
    Un peu plus tôt aujourd'hui, M. Schindler nous a beaucoup parlé des dépôts atmosphériques. Avez-vous examiné cette question? Vous parlez des composés organiques volatils et d'autres éléments de ce genre. Examinez-vous principalement les répercussions directes, ou examinez-vous aussi les répercussions des rejets dans l'atmosphère?
    Je pense que Mme Kasperski peut répondre à cette question.
    Nous examinons principalement ce qui explique que telle quantité de COV est émise, et cherchons des moyens de réduire ces émissions. Nous n'examinons pas spécifiquement les répercussions de l'émission de COV sur l'environnement. Nous examinons les technologies, les concepts scientifiques à l'aide desquels ces émissions pourraient être réduites et les technologies pour le faire.
    Autrement dit, à l'aide de la science et de la technologie, nous examinons ce qui sort des cheminées, et ce qui est émis sous d'autres formes aussi.
    Nous nous attachons de façon particulière et principalement aux questions d'extraction à ciel ouvert et aux émissions de COV qui en résultent, sans oublier les bassins de décantation, ainsi qu'à l'utilisation des solvants et à d'autres questions encore.
    Nous parlons de solvants...
    Pendant le processus d'extraction, des solvants sont ajoutés qui sont assez volatils. On s'efforce d'en récupérer la plus grande quantité possible pendant le processus mais une partie se perd dans les effluents acheminés vers les bassins. Nous cherchons à savoir pourquoi il n'est pas possible d'en récupérer plus, et ensuite, nous nous demandons quelles technologies permettraient d'améliorer la récupération.
    Un peu plus tôt dans votre témoignage, on a dit que les solvants deviennent un aliment pour les microorganismes présents dans les bassins de décantation, qui rejettent ces solvants sous forme de méthane.
    Cette observation a été faite dans les étangs de la Syncrude, mais pas dans ceux de la Suncor. Pourquoi y a-t-il des populations différentes de microbes dans l'un, par rapport à l'autre? Je ne suis pas biologiste; je ne peux répondre à cette question.
    Cela faire ressortir encore la nécessité d'accroître la recherche scientifique et les investissements dans les sciences.
    Merci. J'aimerais utiliser le temps qu'il me reste pour m'adresser à M. Gradek.
    D'abord, monsieur Gradek, que veut dire RHS?
    Reusable hydrocarbon sorbent (Sorbant d'hydrocarbures réutilisable).
    Qu'est-ce qui vous amène ici?
    Nous avons consacré beaucoup de temps à chercher et à développer, avec l'industrie des sables bitumineux, une solution très simple au problème que posent leurs bassins de décantation. Les hydrocarbures qui se perdent dans les résidus sont une source de...
    Pardonnez-moi, je ne veux pas vous interrompre...
    Votre temps est écoulé, monsieur Trudeau.
    Monsieur Ouellet, vous disposez de sept minutes.

[Français]

    Oui, merci.
    Tout d'abord, monsieur Hamza, j'aimerais vous poser la question au sujet des 120 000 emplois directs et indirects générés par l'exploitation des sables bitumineux. C'est important, et 45 p. 100 de ces emplois sont à l'extérieur de l'Alberta. Chez CANMET, avez-vous fait des études pour savoir combien d'emplois auraient été créés si on avait dépensé la même somme d'argent depuis 1913 — le gouvernement fédéral dépense depuis cette date — dans le secteur des énergies renouvelables? Combien aurait-on créé d'emplois, des emplois décentralisés dans l'ensemble du Canada, de Terre-Neuve-et-Labrador à la Colombie-Britannique? Combien d'emplois auraient été créés dans chaque province et territoire? Avez-vous fait cette étude, chez CANMET?

[Traduction]

    Pas dans mon domaine. Je ne suis vraiment pas en mesure de répondre à cette question. Je crois que c'est une question très pertinente, et elle est fondée sur des scénarios que certains économistes seraient en mesure de creuser pour obtenir l'information.

[Français]

    Est-ce que Mme Kasperski le sait?
    Vous me posez la même question?
    Y a-t-il eu des études afin de savoir combien d'emplois auraient été créés dans la production d'énergie verte si on avait dépensé le même montant d'argent, auquel s'additionnent les coûts en matière d'environnement?

[Traduction]

    Je suis désolée. Je n'ai aucune idée de ce que ce serait.

[Français]

    Monsieur Gradek, c'est très joli, mais je ne comprends pas. Au bout du processus, extrayez-vous du bitume ou des billes?
    On récupère du bitume, des granules. Les billes sont réutilisables, propres et le cycle au complet est de cinq minutes. En moins de cinq minutes, on a récupéré le bitume sur les billes et on les utilise de nouveau.
(1600)
    Quand avez-vous avez fait cette découverte?
    Nous travaillons depuis 14 ans au développement de cette technologie. Nous avons fait des tests de validation chez CANMET en 2002, 2003 et 2004, avec SNC Lavalin, l'Université de l'Alberta, etc., et les résultats étaient concluants. Cela nous a encouragés à poursuivre, à obtenir la participation des exploitants des sables bitumineux à un projet-pilote afin de franchir une nouvelle étape. C'est là où nous en sommes aujourd'hui.
    Vous en êtes à élaborer un projet-pilote?
    Exactement. Nous avons conclu une entente avec un opérateur. Nous allons élaborer un projet et ils vont participer à un protocole de test cet automne.
    Donc, à partir de cet automne, on pourra savoir si votre méthode fonctionne réellement bien?
    On pourra savoir si l'ingénierie a été bien conçue par des gens comme ceux de SNC Lavalin.
    Oui, d'accord. Vous dites que vous réduisez la quantité de méthane, mais de combien?
    La source de méthane dans les étangs de rejets est constituée d'organiques. On parle du bitume et du naphta, qui sont perdus au cours des procédés. Si on enlève les organiques, dans ce cas-ci les hydrocarbures, il n'y a rien à digérer, aucune biodégradation ne se fait, c'est comparable à un pit de sable.
    Utilisez-vous de l'eau?
    On n'ajoute pas d'eau, on utilise le produit à traiter. On prend le produit, on ajoute des billes. C'est une technologie qui s'appuie sur les lois de la nature, c'est incontournable. La migration se fait des hydrocarbures sur les granules. Ils demeurent là et il n'y a aucune [Note de la rédaction: inaudible]. Ils peuvent rester là des mois, des années, aucune [Note de la rédaction: inaudible] ne se fait. Ils sont traitables. C'est une affaire de gestion, par la suite.
    Et le sable tombe?
    Le sable tombe et il est propre.
    Il tombe.
    Oui.
    C'est génial.
    Dans une heure, le bocal qui était un peu gris sera clair. La solution est simple. Il ne faut pas se casser la tête. Si on applique les lois de la nature à notre convenance et pour notre bien, on peut tout réussir. La technologie existe. Il faut simplement avoir l'intérêt de le faire.
    Est-ce une technologie qui coûte cher? C'est peut-être pour ça qu'on ne l'a pas utilisée.
    Nous avons indiqué que cette technologie finit par ne rien coûter, no cost.
    On fait des travaux miniers...
    C'est leur opération primaire. Les volumes à traiter sont énormes. C'est de l'ingénierie qui devient maintenant ce qu'on appelle le material handling, la gestion du sable, de l'eau et tout le reste. Il faut prouver qu'on a un procédé vraiment fiable et robuste afin de gérer tous ces produits, ces composantes.
    À la fin, est-ce du sweet crude que vous faites?
    Non, c'est du bitume. Il s'agit simplement d'un site d'attraction. Les billes, en termes simples, sont comme un gros Velcro qui adhère à l'hydrocarbure à son contact et le retient.
    Le but est de séparer le sable du bitume. Donc, à ce moment-là, le bitume pourrait être transporté par pipeline. Le bitume est fait, vous n'avez pas besoin de faire autre chose.
    Exactement.
    Ça ne change pas l'extraction mais la façon d'extraire le sable du...
    Après l'opération, les déchets sont propres. C'est ça, l'objectif.
    Il n'y a pas d'eau?
    L'eau et le sable sont propres et le bitume est extrait. On tire parti au maximum de toutes les ressources: on a augmenté l'extraction du bitume et on a amélioré la qualité de l'eau. Ainsi, on leur permet de réclamer le site immédiatement parce que le sol est propre et peut servir pour la végétation. C'est un habitat qui est propre. Par exemple, la sablière de Pointe-Calumet est devenue un parc aquatique. La seule différence entre les deux endroits, c'est le bitume.
(1605)

[Traduction]

    Merci, monsieur Ouellet.
    Madame Duncan, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président par intérim. Vous faites de l'excellent travail.
    J'ai une question qui s'adresse à M. Kasperski ou à M. Hamza.
    J'ai trouvé vos exposés très intéressants. Vous me corrigerez si j'ai tort, mais si je comprends bien, en particulier à la lumière du document que vous avez distribué, page sept, vous dites que la raison pour laquelle nous avons le système que nous avons pour le traitement des résidus et les bassins de décantation que c'est en raison des efforts scientifiques déployés par le consortium et que c'est la façon dont ils ont décidé de procéder.
    Depuis combien de temps des technologies meilleures existent-elles sans que les compagnies soient obligées de s'en servir?
    En premier lieu, ce qui a été dit, si je puis me permettre de le redire, c'est que le manque de données scientifiques des débuts explique le fait qu'il y a eu sous-estimation de la superficie des bassins de décantation qui allait être nécessaire. Lorsque vous mettez les résidus dans des bassins de décantation, les résidus fluides doivent rester très longtemps dans le bassin, avant de se compacter. C'est pourquoi il a fallu toujours plus de bassins de décantation.
    Je ne me suis peut-être pas très bien exprimé ici, mais c'est l'absence de recherche ou de données scientifiques au début qui auraient permis de comprendre ce qu'il en est des argiles, plutôt que des particules fines, qui explique la situation.
    Ma question était de savoir depuis combien de temps le savons-nous?
    Je vais y venir. Je suis désolé, mais je souhaitais simplement tirer les choses au clair, en premier lieu.
    Nous travaillons dans ce domaine depuis plus de 10 ans maintenant. Vous êtes allée voir les sables bitumineux et vous avez constaté qu'il s'agit d'une entreprise considérable. Il est très difficile de déplacer ces énormes machines. Alors, nous avons travaillé avec l'industrie, depuis cette époque, afin de la convaincre d'essayer des technologies nouvelles. L'industrie a commencé, en mettant sur pied ce consortium. Elle a entrepris de consolider les résidus, en y ajoutant du gypse et d'autres produits, pour les rendre plus traficables, et pour en extraire l'eau rapidement. Suncor a commencé à utiliser le procédé, dans une ou deux applications. Il a fallu y consacrer quelques années avant de pouvoir évaluer les résultats et voir si la méthode fonctionnait ou non. En fait, dans ce cas particulier, la méthode fonctionne très bien. Il y a eu quelques problèmes, mais on y a travaillé. Syncrude avait aussi commencé à faire la même chose. Donc, c'était une des technologies utilisées.
    Mais depuis cette époque il existe deux ou trois technologies nouvelles, et je pense pouvoir dire que l'une d'elles est en voie de commercialisation. Elle est à l'essai sur le terrain, en ce moment même. Il s'agit des résidus secs empilables. Mais on ne peut pas vraiment parler de résidus secs. Ils ne le sont pas réellement; ils renferment encore environ 15 p. 100 d'eau. Mais il est tout de même possible d'y circuler avec un tracteur à chenilles et des machines de ce genre, ce qui est le critère pour ce genre de travail.
    Alors, nous travaillons depuis un certain temps déjà avec eux. Nous publions des choses depuis un certain temps déjà, ce qui vous indique l'influence que nous exerçons. Nous sommes en mesure d'influer sur le cours des choses, en publiant dans le domaine général...
    Pardonnez-moi, je me dois d'intervenir ici, parce que c'est un peu long et que je n'ai pas beaucoup de temps.
    J'essaie de voir où se situe la limite. Il semble que vous travaillez déjà depuis pas mal de temps à concevoir de meilleures technologies. Mais ces technologies nouvelles en viennent-elles à être utilisées seulement parce que vous réussissez à convaincre les compagnies de le faire, ou est-ce le gouvernement qui intervient pour dire que les compagnies doivent désormais les utiliser? C'est ce que j'essaie de savoir.
    Deux principaux facteurs entrent en ligne de compte. D'un côté, il y a le gouvernement qui émet des directives nouvelles disant que vous devez faire ceci ou cela, que les compagnies doivent capturer telle quantité de particules fines d'ici telle année, afin de produire tel genre de solide traficable. Le gouvernement de l'Alberta l'a fait. Il y a aussi les compagnies qui cherchent par elles-mêmes à trouver des solutions, parce qu'elles manquent d'espace où mettre tous ces résidus. Donc, elles ont leurs raisons bien à elles de vouloir réduire la taille de ces bassins, parce que les compagnies n'ont plus de place où mettre les résidus.
    Il y a aussi le facteur économique, c'est-à-dire leur propre intérêt, et il y a la directive provinciale qui dit qu'ils doivent se conformer à certaines exigences, en particulier en ce qui concerne la capture des fines particules liquides dans les résidus.
(1610)
    Est-ce que je comprends bien si je dis que c'est du pareil au même, qu'il s'agisse des étangs de refroidissement des centrales au charbon ou des bassins de décantation? Les compagnies manquent d'espace; alors on les autorise à empiler les résidus parce qu'elles ne peuvent plus les étaler. En somme, les compagnies ne font qu'empiler les résidus plus haut; nous ne réduisons pas la quantité de résidus.
    Lorsqu'on parle de résidus secs, cela signifie que l'on n'a plus à les confiner. Ça veut dire qu'on peut les empiler n'importe où; ils ne s'écouleront pas. Vous pouvez ensuite remettre le site en état, à condition d'avoir une surface solide. C'est ce qui différencie les résidus empilables des bassins de décantation, où il faut confiner les résidus. Par définition, les résidus secs empilables ne requièrent pas de système de confinement.
    Vous avez parlé des matériaux qui s'amoncellent, et pour cela, il faut du sable, et souvent cela pose problème. Les compagnies n'ont tout simplement pas assez de sable pour ériger des digues toujours plus hautes. C'est une question de quantité. Le système qu'elles ont à gérer est très complexe. Et il y a le sable dont ils ont besoin en quantité pour édifier les digues. Or, il n'y en a pas assez. Et elles manquent d'espace. Elles ont donc besoin d'une autre méthode, d'où la recherche de technologies qui...
    J'ajouterai une chose. Les résidus secs empilables ne referment que 15 p. 100 d'eau. Les autres types de résidus en contiennent beaucoup plus. Les résidus dans les bassins de décantation renferment 75 p. 100 d'eau. Alors c'est très bien qu'il n'y ait que 15 p. 100 d'eau dans les résidus.
    J'ai une dernière question, si j'en ai le temps.
    J'ai lu quelques-uns de vos documents, et je crois que certains d'entre eux sont de vous, écrits en collaboration, monsieur Kasperski. J'ai reçu un certain nombre de documents du gouvernement de l'Alberta. Selon ce que j'en comprends, il y a une dichotomie, dans la mesure où on semble hésiter entre retirer l'eau et retirer davantage de bitume des résidus. Ai-je raison? On semble hésiter entre des technologies améliorées de remise en état, et des technologies améliorées qui permettraient d'extraire davantage de bitume des résidus.
    Est-ce que je comprends mal?
    Pas vraiment. C'est quelque chose dont M. Hamza a parlé précédemment. Tout ce que l'on fait avec les résidus vise à améliorer la récupération d'eau — et l'une des méthodes appliquées commercialement consistait à ajouter du sulfate de calcium au système, afin d'améliorer la récupération d'eau et, au bout du compte, la remise en état des sites. Malheureusement, l'ajout de sulfate de calcium pouvait nuire à la récupération; il fallait donc s'assurer d'ajouter la bonne quantité, que l'eau recyclée ne nuisait à la récupération ou n'engorgeait pas le processus de traitement au point de le freiner complètement.
    Alors il y a toujours ce problème de savoir ce que vous devez faire pour traiter les résidus, de manière à récupérer le plus d'eau possible. Vous voulez éviter de produire des effets délétères sur la récupération de bitume. C'est pourquoi on examine diverses méthodes.
    Merci, madame Duncan.
    Pour la première ronde de questions par les conservateurs, la parole va à M. Warawa.
    Je vous remercie pour l'excellent travail que vous faites, monsieur le président, concernant l'environnement et pour nous avoir suggéré d'inviter les très intéressants témoins présents aujourd'hui. Voilà, j'ai vanté sans retenue votre bon travail, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins de leur présence parmi nous.
    Je commencerai avec M. Gradek. J'essaie de comprendre cette technologie. Elle paraît si simple que j'ai du mal à comprendre pourquoi elle n'a pas encore été commercialisée. Vous avez dit que vous y travaillez depuis 14 ans, que vous avez collaboré avec l'Université de l'Alberta. Nous avons accueilli M. Murray Gray devant nous ce matin, Mme Selma Guigard, et M. Schindler. Avez-vous travaillé avec ces personnes? Je crois que lorsque j'ai interrogé M. Gray et Mme Guigard au sujet des technologies émergentes, cela n'a pas été précisé. Avez-vous travaillé dans le passé avec l'une ou l'autre des compagnies d'exploitation de sables bitumineux? Pourriez-vous préciser?
    À la page 8 du document que vous nous avez remis, il y a un article décrivant le procédé. Selon ce que je comprends, et ce qui a été dit dans d'autres témoignages, le problème qui se pose est celui d'extraire l'argile de l'eau. Vous pouvez extraire le bitume, mais l'argile restera suspendue dans l'eau résiduelle pendant des années, peut-être pendant 30 ou 40 ans, d'où la difficulté. Dans votre démonstration, vous dites que les granules attirent le bitume et l'argile, parce que quand ces deux éléments sont traités selon le procédé, je crois comprendre que l'argile et les autres particules fines sont séparées des granules chargés de bitume.
    Est-ce que l'argile est également extraite de l'eau, si bien qu'en bout de ligne, on se retrouve avec de l'eau propre?
(1615)
    Les pots que j'ai apportés représentent probablement la meilleure explication visuelle que l'on puisse obtenir, pour montrer que les argiles et le sable n'adhéreront pas à la couche de bitume, en raison du niveau minimal d'énergie libre qu'affiche le bitume sur le granule. Il n'y a pas assez d'énergie dans la couche d'hydrocarbure pour que celui-ci adhère aux particules de terre. Vous avez un facteur de tension de surface interfaciale d'environ 33 dynes au centimètre entre sable et bitume, ou entre argile et bitume. Ce facteur est de 13 dynes au centimètre dans le cas du bitume qui se pose sur notre granule. Cet écart de 20 dynes au centimètre est l'énergie qui a été libérée par l'hydrocarbure dans le système. Alors, à 13, rien ne peut adhérer à la couche d'hydrocarbure présente sur le granule.
    Maintenant, l'eau qui était dans l'un des pots qui a été brassé redevient assez claire, en l'espace d'une heure de décantation naturelle, ce qui représente une période de 50 ans dans le bassin de décantation de Mildred Lake. Nous voyons que la différence est énorme. Si vous retirez tous les hydrocarbures, vous modifiez le potentiel zêta sur les particules d'argile. Les particules peuvent alors s'agglomérer et se déposer. Vous n'avez pas à ajouter de matières chimiques, et pas de flocs du tout.
    Ce qui fait réellement problème dans les résidus, c'est l'élément hydrocarbure. Si vous le retirez, vous vous retrouvez avec quelque chose qui devient beaucoup plus facile à traiter, un peu comme dans le cas d'une usine de traitement d'eaux usées. Les gens savent ce qu'il faut faire pour traiter l'eau qui renferme des agrégats, de l'argile et du sable. La technique pour le faire est connue.
    Monsieur le président, j'imagine aisément que ces granules pourraient servir dans le cas de déversements. C'est le même principe.
    Les déversements de pétrole, oui exactement.
    Si vous travaillez là-dessus depuis 14 ans, pourquoi cette technique n'est-elle pas encore utilisée? Nous avons entendu parler qu'on pouvait ajouter du gypse à l'eau, afin d'aider les argiles à se déposer. Si l'industrie a essayé toutes ces choses différentes au fil des dernières années, pourquoi n'est-il jamais question d'utiliser vos granules?
    L'industrie commence à examiner sérieusement des technologies externes, qu'elle ne développe pas elle-même, dans sa structure corporative. L'industrie aime bien détenir les technologies qu'elle utilise.
    Deuxièmement, il y a toujours un cheminement qui se fait. Lorsque vous prenez une technologie depuis le stade de l'incubation pour la mener au stade du déploiement commercial, vous devez alors être en mesure de gérer des volumes considérables. Vous entrez alors dans le domaine de la manutention de matériaux, et dans les questions de conception technique. Il y a toutes ces étapes à franchir. C'est la façon habituelle de procéder, et il est très difficile d'en faire fi et de dire: « J'ai ce qu'il faut dans cette éprouvette. Et je vous dis que cela va fonctionner dans un pipeline de 48 pouces de diamètre ». Un tas de choses pourraient mal fonctionner.
    Voilà pour les raisons. C'est une procédure qui met du temps à aboutir. Vous devez en faire la démonstration, en prouver l'efficacité, voir jusqu'à quel point le procédé tient la route, car plus l'échelle est grande, plus il risque d'y avoir de difficultés.
    Lorsque nous avons fait notre survol, nous avons vu les bassins de décantation et un peu de vapeur s'échappait de ceux-ci. C'était l'entrée d'eau où l'eau tiède était déversée dans les bassins.
    Est-ce que vous traitez tout cela avant que l'eau soit versée dans les bassins de décantation pour qu'elle puisse prendre part au processus et ainsi récupérer la chaleur qui s'en dégage?
    Oui. Ce que nous voulons faire c'est établir une installation hors circuit sur le bord du flux de résidus, au bout de la conduite, entre l'usine et les bassins de décantation, qui servira à absorber ces résidus. C'est très chaud. Il varie entre 75 °C et 80 °C. Certains de ces flux atteignent entre 50 °C et 60 °C. Il y a beaucoup de chaleur à cet endroit dont nous n'avons pas besoin.
    Lorsque nous tentons de décontaminer les bassins de décantation qui existent, nous devons augmenter la température. Donc, pourquoi ne pas utiliser cet excès de chaleur du flux de résidus et le mélanger à la boue des bassins de décantation pour obtenir la température désirée et ainsi ne pas ajouter d'énergie dans le système. De cette façon, nous ne brûlerons aucun carburant et ne générerons aucune émission de CO2, etc. Nous pouvons alors commencer le processus à 40 °C. Lorsque l'eau sort de ce processus elle a une température d'environ 38 °C, elle est alors assez tiède et peut être réinjectée au début du procédé d'extraction.
(1620)
    Ceci aura comme résultat d'utiliser moins d'énergie pour réchauffer l'eau nécessaire à l'extraction.
    C'est exact.
    À la fin donc, quel type d'économie en termes d'efficacité pouvons-nous espérer?
    Nous serions en mesure d'économiser à l'industrie environ 8 p. 100 d'intensité de carbone sur l'ensemble de la production.
    Est-ce que ce serait immédiat?
    Merci, monsieur Warawa.
    Normalement à cette étape-ci nous procéderions à la deuxième série de questions qui devrait commencer par M. Scarpaleggia, mais étant donné qu'il n'est pas ici, je crois que nous devrions attendre son retour. Il y a d'autres personnes qui aimeraient avoir la chance de poser d'autres questions.
    Nous allons commencer avec une série de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président suppléant.
    J'invoque le Règlement monsieur le président, la procédure normale veut que personne n'ait droit à une deuxième question avant que tous aient eu droit à leur première question.
    Je crois que c'est le processus qui a été établi préalablement.
    M. Scarpaleggia est de retour.
    Francis, aimeriez-vous laisser quelqu'un d'autre poser une question pendant que vous rassemblez vos idées? Nous en sommes arrivés à votre série de questions.
    Monsieur Braid, vous pouvez procéder et alors M. Scarpaleggia aura la charge de la présidence.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Gradek, je vous remercie beaucoup d'être ici aujourd'hui ainsi que pour tout le travail que vous avez investi dans cette technologie excitante et très prometteuse. J'aimerais continuer dans la même lignée que les questions de mon collègue en ce qui a trait au schéma du suivi des progrès, simplement pour comprendre un peu mieux le processus final.
    Je jette un oeil à l'étape où les billes sont nettoyées du bitume qui les couvre. Qu'est-ce que l'on fait avec le dilbit ou bitume dilué? Où est-il acheminé après cette étape?
    Le dilbit est acheminé par le pipeline jusqu'à l'entreprise de valorisation. Tous nos tests, en collaboration avec les partenaires de l'industrie des sables bitumineux, ont été... Ce qu'ils veulent de nous c'est que nous arrivions avec un processus qui peut être facilement intégré à leurs opérations actuelles. Nous leur donnons un flux d'arrivée, qui sont nos résidus, ils les traitent, ils savent que nous voulons d'eux un produit qui possède les mêmes spécificités et que nous pouvons directement introduire dans nos pipelines qui vont vers l'entreprise de valorisation.
    C'est pourquoi nous sommes obligés d'utiliser du dilbit ainsi qu'un processus de nettoyage avec naphte. Nous avons élaboré ce processus afin de nous conformer aux demandes de l'industrie des sables bitumineux.
    D'accord. Est-ce que le dilbit est un matériau utilisable alors?
    C'est un dilbit de qualité qui va à l'entreprise de valorisation.
    D'accord. Il est ensuite transformé en...?
    En pétrole brut synthétique, en diesel, etc.
    D'accord. Donc il retourne directement dans le processus. C'est fantastique.
    Le naphte qui est utilisé pour nettoyer les billes magiques, si vous voulez, est manifestement un produit chimique. Comment l'environnement est-il protégé contre les impacts négatifs de l'utilisation du naphte?
    C'est un système complètement fermé. Tout est sous purge à l'azote et complètement fermé. Le système est fermé, il est composé d'acier inoxydable, point à la ligne.
    D'accord. C'est en fait une excellente introduction. Aidez-moi à visualiser tout ce processus sur une grande échelle opérationnelle globale.
    D'accord.
    Notre mélangeur à la base est tout à fait commun. Il a été inventé en 1876. Il est robuste, il a fait ses preuves et il fait le travail extrêmement bien avec une efficacité de mélange de  100 p. 100 qui est obtenue en moins de 60 secondes. L'entreprise qui le fabrique, l'OEM, a plus de 485 ans et connaît donc bien son produit.
    Nous l'avons testé sur notre unité et il produit essentiellement un mélange très homogène en provoquant de nombreux contacts entre les billes et les particules d'argile ou les particules qui sont enrobées de bitume afin que ce bitume migre sur les billes.
    Après l'étape du mélangeur, le tout est transféré dans un compartiment de décantation. Les billes ont une très grande flottabilité et donc elles remontent à la surface du compartiment de décantation. Le tout est envoyé dans les réservoirs d'élimination des résidus pour ensuite être revalorisé. L'eau peut ensuite être recyclée vers le secteur d'extraction primaire.
    Les billes sont transportées dans ce que l'on appelle un laveur de billes. La machine à laver est essentiellement composée d'un bain qui contient du dilbit sur le dessus qui est ensuite transféré dans un tambour perforé rotatif, comme un trommel. Il y a une pomme de douche qui arrose de naphte et tout est lavé. Les billes reviennent à la surface avec une fine couche de naphte, qui est un hydrocarbure, qui a dissout tout le bitume. Ensuite, tout va dans une machine à sécher qui est sous vide partiel. Le point d'ébullition du naphte se situe entre 40° et 65° Celsius dans une atmosphère. Lorsqu'elle est partiellement sous vide, la température est plus basse et utilise ainsi moins d'énergie.
    On récupère et on recycle le naphte qui se trouvait sur les billes et on obtient des billes qui ont retrouvé leur surface naturelle. L'énergétique des surfaces des billes reste inchangée et les billes peuvent être réutilisées dans un autre cycle.
(1625)
    Très bien.
    Plus loin dans votre exposé, vous avez indiqué que ce processus, cette technologie, permet de réduire et peut-être d'éliminer complètement la nécessité des bassins de décantation. Pourquoi est-ce un processus progressif?
    Les bassins de décantation sont une accumulation d'à peu près 30 années d'activités. Nous devons avoir de très gros volumes pour réussir à égaler ce niveau de capacité de traitement. Étant donné que l'on veut mélanger les rejets à la fin du pipeline et les refroidir avec la boue des bassins de décantation, il faut évaluer les deux écoulements et ensuite augmenter le débit. Puis, on doit tenter de couvrir tous les rejets de la conduite et les faire correspondre à l'inventaire des rejets.
    Finalement, avez-vous discuté avec des entreprises pétrolières au sujet de cette technologie et peut-être d'un partenariat? Mais rien n'a été conclu?
    Comme je vous l'ai dit, à cette étape-ci nous entreprenons un projet pilote avec un exploitant de sables bitumineux.
    Bien. Et quand cela aura-t-il lieu?
    Cet automne.
    Excellent.
    Merci, monsieur Braid. J'aimerais continuer dans la même lignée. Peut-être avez-vous couvert le sujet pendant ma courte absence.
    Est-ce que ce projet pilote se fait avec Syncrude?
    Syncrude.
    Est-ce que cela nécessitera la construction d'une petite usine près des bassins de décantation?
    Nous avons choisi d'installer une usine pilote au nord d'Edmonton, un site de Fort Saskatchewan qui convient bien, où on aura accès aux ressources pour l'usinage, où on sera en mesure de faire des changements rapides et de corriger des problèmes qui peuvent subvenir au cours du pilote. Le pilote est régi par Recherche et Développement.
    Pour cela, nous devons d'abord étudier la conception technique et voir si elle est adéquate. Essayer de repérer les erreurs qui auraient pu être commises. Pour ce qui est des billes, cette partie de la technologie est sans faille parce que les billes fonctionnent peu importe la façon dont on les utilise.
    Mais alors quoi? Vous devez importer le...
    Par camion.
    Vous transportez par camions l'effluent des résidus.
    Oui. Nous le traitons et ensuite toutes les données sont analysées; le dilbit est analysé.
    Selon vous, combien de temps cela va-t-il prendre avant d'avoir des résultats positifs et que Syncrude et les autres exploitants de sables bitumineux décident que votre processus intégrera de façon permanente leurs activités?
    Nous pourrions fonder de grands espoirs. Nous ne savons pas.
    J'imagine que vous vous attendez à...
(1630)
    De trois à six mois.
    De trois à six mois. Et vous travaillez sur cette technologie depuis combien de temps?
    Quatorze ans.
    Quatorze ans. Et quand avez-vous commencé à discuter avec le gouvernement ou avec les producteurs de sables bitumineux concernant votre technologie?
    Au départ nous avons misé sur l'aspect environnemental du processus comme par exemple pour les déversements de pétrole. Nous avons travaillé avec la Garde côtière Canada, avec Environnement Canada, mais uniquement pour les déversements de pétrole.
    Il y a eu un changement radical dans les politiques du Canada concernant les déversements de pétrole et la Garde côtière canadienne a commencé à impartir le travail. Ils ne sont plus des intervenants, ils ne sont que des observateurs. Ils ne participent pas. Tout cela est allé à l'industrie privée. Donc, pour avoir un modèle de gestion fonctionnel, nous devions nous tourner vers un secteur où les déversements étaient quotidiens. L'industrie des sables bitumineux nous a invité à considérer leurs résidus.
    Il y a combien de temps de cela?
    Tout cela a commencé en 1996.
    Cela a pris 12 ans pour arriver au point où nous en sommes. Est-ce que les choses ont été rondement? Y-a-t-il eu des problèmes de financement? Avez-vous approché le gouvernement? Êtes-vous entré en contact avec RNCan? Je sais qu'ils font beaucoup de travaux sur l'eau et les bassins de décantation.
    Nous avons procédé à la vérification du traitement par lots en collaboration avec RNCan. Un protocole a été établi avec SNC Lavalin, et tous les tests ont été effectués dans les installations de RNCan à CANMET, Devon, avec l'aide du docteur Hamza. Nous avons également travaillé avec le docteur Jacob Masliyah à l'Université de l'Alberta, qui a été deux fois président du CRSNG pour les sables bitumineux. Ils ont procédé à une validation croisée de toutes les données.
    L'industrie des sables bitumineux a participé à tous ces tests. Les résultats positifs nous ont fait conclure que cette technologie avait du potentiel. Nous devions donc l'amener à une nouvelle étape. Nous avons décidé de passer à la conception technique préliminaire pour que le processus soit continu.
    De là, nous avons testé chaque composante chez le fabricant, OEM, pour voir quelles seraient les réactions dans ce contexte.
    Nous avons donc tout préparé. Toutes les composantes sont taillées adéquatement, enlignées adéquatement et nous pouvons aller de l'avant et procéder au projet pilote qui produira de bons résultats.
    Vous dites que tout cela va éliminer les bassins de décantation. Est-ce que cela veut dire qu'à un certain moment l'eau du processus de séparation va tout simplement être renvoyée directement dans votre usine et qu'il ne sera plus nécessaire de stocker les effluents de résidus? Ils n'auront qu'à passer par l'usine et plus besoin de...
    Aucun bassin de décantation comme nous voyons aujourd'hui.
    Aucun bassin de décantation?
    Non, aucun.
    Combien de temps faudra-t-il pour en arriver là, d'après vous?
    Tout dépend du financement et si nous pouvons aller de l'avant.
    Vous avez besoin d'argent du gouvernement fédéral et de l'industrie.
    C'est exact.
    Et pourquoi est-ce que l'industrie ne couvrirait pas 100 p. 100 des coûts? C'est une excellente idée.
    Ils ont engrangé des milliards de dollars l'année dernière et cette année, ils réduisent leurs budgets.
    Et quels sont les effets sur la recherche que vous et RNCan effectuez — vous l'avez mentionné — pour développer de nouvelles technologies dans le but de maximiser la récupération de l'eau des résidus? Est-ce que vous vous dites, nous avons la solution magique maintenant, cessons tous les autres projets, ou s'il s'agit d'une technologie complémentaire à ce que vous faites?
    Je peux répondre à cela.
    Parmi nos activités, nous étudions différentes technologies, et nous le faisons également pour les petites entreprises comme celle de M. Gradek. Nous faisons aussi des études pour les entreprises beaucoup plus grandes qui sont intéressées par certaines technologies. Nous évaluons donc une grande part de ces technologies. La question n'est pas aussi simple qu'elle en a l'air. Il y a beaucoup de facteurs qui entrent en ligne de compte.
    Si l'on parle de récupérer le bitume ou le pétrole des bassins de décantation ou d'autres technologies qui se servent de surfaces hydrophobes ou oléophiles, il y en a à peu près trois ou quatre qui sont semblables et qui ont été commencées dans les années 80 par une personne appelée Kryer. Il s'agit du processus Kryer, il travaillait à l'ARC. C'est lui qui a élaboré cette sorte de passoire dans laquelle vous faites couler le pétrole...
(1635)
    Donc, il y a des technologies similaires qui sont en compétition et qui vont dans la même voie.
    Elles ont des principes semblables, mais l'application est toute différente.
    Il existe une autre entreprise appelée Minminer qui est à peu près au même stade que M. Gradek et qui travaille en ce moment avec Suncor. Ils travaillent tous très fort pour convaincre l'industrie que ces technologies fonctionnent.
    Nous avons étudié celle-ci ainsi que plusieurs autres. Par exemple, nous avons une ou deux technologies, et je ne peux mentionner le nom de l'entreprise, qui mettent tous les sables bitumineux ensemble et, en les réchauffant, récupèrent les fractions légères. Elles récupèrent alors ce qui se rapproche d'un pétrole très léger qui peut être utilisé dans les raffineries et autres. Nous avons deux technologies que nous évaluons en ce moment avec le gouvernement de l'Alberta dans notre usine pilote. Il y a une autre façon de regarder les technologies.
    Est-ce qu'il y aura assez de place pour toutes ces technologies sur le marché ou si une va prendre le dessus?
    Je crois que l'une d'elles va se développer plus rapidement que les autres, tout cela dépend de l'accueil que l'industrie pétrolière lui fait.
    Demander que le gouvernement investisse est un sérieux coup de pouce, mais ultimement, peu importe l'argent que vous dépensez pour appuyer la technologie, si l'industrie n'accepte pas cette technologie, cela n'ira nulle part.
    D'accord. J'ai fini avec mes questions.
    Monsieur Calkins, avez-vous une question?
    Bien sûr, très certainement. Merci, monsieur le président. Cela a été tout un honneur pour moi de prendre votre place pendant quelques minutes et j'apprécie la confiance que vous avez eu en moi.
    J'ai quelques questions pour le Dr Hamza et le Dr Kasperski.
    Ma compréhension des sables bitumineux est... Le pétrole conventionnel est là, à des milliers de pieds sous des formations géologiques. Dans des conditions d'anaérobiose.
    Lorsque l'on s'attarde aux sables bitumineux de l'Alberta, on présume que le pétrole est passé à travers les formations géologiques et qu'il a fait surface dans les dépôts de sables bitumineux, que le bitume est différent parce qu'il a été exposé à un processus aérobie.
    Est-ce que je comprends bien? C'est pourquoi le bitume est épais. Il n'est pas aussi propre que, disons, le brut non corrosif. Est-ce que je saisis bien les fondements?
    Oui. Ce n'est pas mon domaine d'expertise, mais c'est ce que j'ai compris. Les géologues ont dit qu'il avait subi une dégradation par les bactéries pendant des temps géologiques, ce qui avait brisé les fractions légères et laissé les molécules lourdes et le pétrole lourd.
    Ce que je comprends c'est qu'il y a eu une exposition à un certain niveau d'oxygène également. Est-ce que ça été un processus anaérobie complet ou est-ce qu'un processus anaérobie fait partie du tout?
    Je ne sais pas, je suis désolée.
    Là où je veux en venir, c'est que nous avons un certain nombre de sites contaminés au Canada. Un de ceux-là sont les Étangs de goudron de Sydney, où du pétrole brut a été exposé dans des bassins de pétrole pendant une certaine période. Nous avons ce type de site contaminé partout au pays, dans des sites d'explorations ou de déversements. Je me demande si le même processus pourrait être appliqué, où l'on pourrait chauffer disons le mélange de boue des sols contaminés. Nous ferions fondre le pétrole et il y aurait une sorte de processus de décontamination environnementale. Le tout pourrait être suivi de la technologie que M. Gradek propose avec ce processus. Est-ce que c'est quelque chose que l'on pourrait faire?
    D'un point de vue technique, tout ce que les entreprises pétrolières font c'est nettoyer le pétrole du sable et remettre le sable dans les bassins pendant qu'il sédimente. Ce que je comprends de la technologie de M. Gradek, c'est qu'il va finalement se débarrasser des restes de bitume ou de pétrole qui font interférence avec la sédimentation. De votre point de vue, est-ce qu'il existe des applications de cette technologie que nous n'avons pas envisagées à ce moment-ci?
    En principe tout ce que vous avez à faire est de retirer le pétrole du sable ou du sol auquel il est lié, de quelque façon que ce soit. La façon dont ils procédaient à l'époque avec les sables bitumineux était le même principe qu'une machine à laver. Ils mettaient tout le pétrole dans un tambour avec un peu de détergent, brassaient le tout pendant que le pétrole se détachait du sable. Ceci peut être appliqué.
(1640)
    Le même concept peut être utilisé sur toute la ligne.
    Absolument.
    Je crois que M. Warawa en a parlé et que vous y avez fait allusion également. En ce qui a trait à la capacité de décontamination, je crois que c'est de là que l'idée originale de cette technologie est venue, en voulant réparer les déversements de pétrole. Nous avons eu un accident en Alberta il y a quelques années où un wagon porte-rail a déversé un tas de pétrole dans le lac Wabamun. Nous avons été témoins de quelques autres incidents de la sorte où il y a eu décharge, accidentelle ou intentionnelle, sur les lignes de côte. Et nous savons comment cela a affecté la faune.
    Est-ce qu'on pourrait dire que l'on peut littéralement prendre un gros tas de billes, les lancer sur les surfaces des bassins de décantation et qu'elles recueilleraient le bitume qui flotte sur le dessus? Et tout ce qu'il suffirait de faire ensuite c'est de ramasser les billes de la surface des bassins de décantation?
    Effectivement.
    Avez-vous fait quelques recherches avec cette nouvelle technologie? Nous parlons de la force qui lie le bitume et les billes. Est-ce qu'on pourrait dire que cela prend énormément d'énergie pour briser cette liaison, et c'est pourquoi vous devez les laver avec du naphte dans une installation fermée?
    Est-ce qu'on peut également dire que si une bille enveloppée de bitume flotte à la surface d'un bassin de décantation et qu'une sauvagine par exemple entre en contact avec ces billes, qu'elle réussirait à briser la liaison qui unit le bitume et la bille?
    Tant qu'il y a de l'eau, non. Si la bille flotte à la surface de l'eau, non.
    Il resterait collé à la bille.
    Oui. À titre de référence, monsieur Calkins, en ce qui a trait aux déversements de pétrole, nous avons fait des tests avec notre technologie sur du sable de plage des côtes de la Normandie, suite au déversement du Prestige. Il s'agissait de pétrole brut altéré dont la viscosité était de 10 000 centipoises. En 60 secondes, tout le pétrole a été retiré. On avait réduit le niveau à un seuil indétectable. Si vous mettez le sable dans un sac zip-lock, trois mois plus tard lorsque vous ouvrez le sac, vous avez une odeur d'eau salée et non de pétrole.
    La dernière question que je veux poser est basée sur le processus que vous nous avez démontré. Le naphte est à la base le catalyseur qui brise la liaison. C'est votre diluant ou votre solvant.
    Il ne brise pas la liaison, il la déplace. Il dissout le bitume, qui est une composante avec un niveau de viscosité très élevé, et le déplace ou le remplace, et se répand sur la surface des billes.
    Est-ce que vous iriez jusqu'à valoriser le naphte et l'enlever du pétrole avant de renvoyer le tout vers l'usine, afin de réutiliser le naphte dans votre installation fermée? Ou si vous préférez l'envoyer là-bas pour qu'il soit renvoyé en tant que diluant plus tard?
    On opterait pour le deuxième choix. Il serait utilisé pour les pipelines. Nous devons avoir les mêmes spécifications pour le produit que les pipelines des entreprises pétrolières à qui nous le livrons, et ainsi être en mesure de verser le produit dans leurs pipelines qui vont vers des entreprises de valorisation. S'il s'agit de 50 p. 100 de diluant et de 50 p. 100 de bitume, je dois satisfaire à ces mêmes spécifications.
    Ces billes, une fois qu'elles ont formé cette liaison avec...?
    Les hydrocarbures.
    Est-ce qu'elles flottent à la surface du...?
    Indéfiniment.
    Indéfiniment.
    Indéfiniment. Sans dissolution. Elles peuvent geler. Vous les mettez au congélateur sur de la glace et six mois plus tard vous pouvez les ressortir et les faires dégeler. Vous aurez toujours votre pétrole.
    Je crois que votre temps est écoulé.
    Est-ce qu'il y a d'autres questions?
    Oui, monsieur Watson, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Blaine avait beaucoup trop de plaisir ici. Je me sens presque comme si je lui volais son temps. S'il m'en reste un peu je vous le concéderai. Qu'en pensez-vous?
    Je veux commencer avec M. Hamza. J'ai une petite question au sujet de votre jeu d'acétates. Vous avez parlé de l'importance économique des sables bitumineux, 120 000 emplois directs et indirects. Quarante-et-un pour cent de ces emplois sont à l'extérieur de l'Alberta. Quelles sont les répercussions sur les emplois ou sur les investissements, si vous voulez, pour la province de l'Ontario?
    En fait, je n'ai pas les chiffres avec moi, mais il s'agit surtout d'industries secondaires et manufacturières. Les activités en matière d'équipement, de contrôle et de haute technologie. Ces chiffres sont disponibles, en fait, le CERI a publié un rapport il y a de cela peut-être trois ans qui contient tous les chiffres ventilés, de Statistique Canada et d'autres, pour tout le pays.
(1645)
    On m'a dit que c'était dans les environs de 500 millions de dollars pour la province de l'Ontario, en termes d'activités.
    J'aimerais passer à M. Gradek. J'ai quelques questions pour vous.
    Vous avez dit qu'à la fin du processus, l'eau peut être réintroduite au début pour les opérations d'extraction. Quel genre d'impact est-ce que cela va avoir en termes de retrait d'eau fraîche, en termes de nouvelles quantités d'eau introduite...
    Avec la quantité de bassins de décantation que nous avons actuellement, il n'y aura aucun besoin de nouvelles quantités d'eau ni de reprise d'eau fraîche.
    Okay.
    Si nous réussissons à éliminer complètement l'utilisation des bassins de décantation comme vous l'avez suggéré, ainsi que la consommation d'eau fraîche, est-ce que cela encouragera de nouvelles exploitations minières contrairement à un retour à la situation initiale?
    Je crois que les opérations minières sont limitées par les coûts de l'enlèvement des morts-terrains. Par conséquent, il faut bien parler de « limites ». Si je me souviens bien, les estimations prévoyaient une augmentation des opérations minières à un niveau de production de 2 125 000 barils par jour d'ici l'année 2025. C'est ce que l'AERCB ou EUB avait estimé en 2007.
    Monsieur Hamza, vous avez suggéré qu'une des raisons pourquoi l'industrie n'avait pas amené cette technologie à une échelle plus large est probablement parce que d'autres technologies qui touchent le traitement des eaux en fin de processus existent également. Est-ce qu'on peut dire que l'industrie regarde peut-être au-delà de cela, et cherche comment réduire la consommation d'eau au départ?
    Peut-être aimeriez-vous faire quelques observations à ce sujet, monsieur Gradek?
    En fait, j'aimerais faire une correction. J'ai tenté d'éviter...
    Vous avez tenté d'éviter la question.
    De laisser entendre quoi que ce soit. J'ai dit qu'il y avait d'autres technologies. Il y en a plusieurs, et l'industrie les regarde toutes et choisira celle qui servira le mieux ses intérêts. C'est toujours le cas avec l'industrie.
    Il existe de nombreuses technologies. L'industrie a participé au développement de certaines d'entre elles et il y a également des technologies qui sont développées par des concepteurs de tous les secteurs. Les appliquer ou pas est une question que l'industrie doit déterminer elle-même.
    Il n'y avait pas réellement de lien de cause à effet. Je faisais uniquement une déclaration d'ordre général.
    Il vous reste environ 30 secondes.
    J'ai une question au sujet de la technologie des billes. Nous avons étudié les possibles applications pouvant être faites à d'autres déversements. Est-ce que la température de l'eau est une variable qui affecte son efficacité? En d'autres mots, est-ce que cette technologie pourrait être utilisée disons pour un déversement dans l'Arctique?
    Définitivement. Tout dépend de la viscosité du pétrole. Plus vous augmentez la température, plus la viscosité diminue. Chaque 10 degrés équivaut à un niveau de grandeur. Par exemple, le brut altéré est de 10 000 centipoises à 20 °C. Le bitume lui est de un million centipoises à 20 °C. Afin d'atteindre le même niveau de viscosité, vous devez augmenter la température du bitume à 40 °C alors que le brut altéré reste à 20 °C.
    La raison pourquoi le degré de viscosité entre en ligne de compte est à cause du transport physique des particules de sol sur les billes. Cela dépend de la viscosité. Décoller une gomme à mâcher d'un trottoir chaud n'est pas la même chose que de le décoller d'un trottoir à -30 °. C'est à peu près la même propriété.
    Merci beaucoup. C'était un témoignage très intéressant.
    Cela met fin à notre journée d'audience.
    J'invoque le Règlement, ne sommes-nous pas supposé terminer à 17 h 30? C'est ce que l'agenda indique. J'ai encore quelques questions et je crois que nous avons le temps pour tout une troisième série de questions.
    Monsieur le président, vous, le greffier, ainsi que moi-même avons discuté de l'heure qui était inscrite. Cela ne nous laisse pas assez de temps pour conclure. Il a été suggéré, et j'y ai acquiescé, que l'on terminerait à 17 heures. Cela nous donne 10 minutes. Je crois qu'en 10 minutes, avec trois ou quatre minutes par parti, cela pourrait me convenir.
(1650)
    Aimeriez-vous quelques minutes? Allez-y.
    Trois ou quatre minutes me vont très bien, merci.
    Monsieur Hamza, dans votre rôle de scientifique qui travaille à différentes propositions technologiques, vous avez manifestement été témoin de plusieurs propositions de même nature ou de nature différente que celle de M. Gradek. Quelles sont vos inquiétudes face au processus en tant que tel? Quels sont les points faibles éventuels de cette proposition, d'après votre opinion professionnelle?
    C'est une question très difficile à laquelle, avec la permission du président, j'aimerais ne pas répondre. Nous étudions toutes les technologies et nous avons bien sûr des opinions à leur sujet. Nous produisons des rapports pour M. Gradek et d'autres personnes. S'il le veut, il peut faire état des rapports et des conclusions qui sont disponibles. Vous pourrez alors juger par vous-même.
    Nous sommes en ce moment, pour la majorité, des profanes et des non-scientifiques, à l'exception de certains secteurs d'expertise. Et nous tentons d'évaluer une technologie. Au départ ma question est, pourquoi êtes-vous ici? Il semble que c'est trop beau pour être vrai. Cette technologie traite de l'élimination des bassins de décantage. M. Schindler a parlé d'un objectif à long terme d'environ 10 ans. Et le tout traite très facilement de toutes sortes d'efficacités énergétiques.
    Ce qui m'inquiète avec cela... Qu'est-ce que c'est?
    C'est à Montréal.
    C'est à Montréal? Encore mieux. Si cela peut aller dans ma circonscription, ce serait parfait.
    C'est une excellente question, mais je me range du côté de M. Hamza. Je ne sais pas jusqu'à quel point nous pouvons comparer les technologies...
    Peut-être de façon plus générale alors. De toutes les différentes technologies qui sont présentées comme des solutions miracles, quels sont les facteurs qui déterminent si elles sont choisies ou non? Est-ce que cela dépend uniquement des politiques de l'industrie, d'une volonté de garder le secret? Est-ce que c'est une question d'argent, de capitaux et de capitaux à risque investis dans ces technologies?
    Je vais vous donner une réponse plus générale. L'industrie des sables bitumineux traite de très grosses quantités de matériaux qui doivent être déplacés rapidement et d'une certaine façon. Elle va donc principalement se servir de technologies qui peuvent gérer ces énormes quantités de matériaux. Elle ne veut pas que des problèmes surviennent pendant les opérations qui pourraient les retarder. Parfois, l'industrie est très pointilleuse quant aux nouvelles technologies qu'elle applique. Celles-ci doivent s'intégrer facilement au principe général de traiter des centaines de millions de tonnes qui se déplacent dans toutes les directions. C'est mon opinion.
    Monsieur Gradek, de combien d'argent avez-vous besoin?
    C'est une question assez vaste. Je veux dire, pour faire quoi?
    Pour que le projet pilote aille de l'avant.
    À cette étape-ci, le projet pilote pour les deux phases s'élève à environ 50 millions de dollars.
    Et vous n'avez pas cet argent encore?
    Nous n'avons pas cet argent encore.
    Merci. C'était une excellente série de questions.
    Est-ce qu'il y a d'autres questions?

[Français]

    Il a posé la question. Je voulais savoir si ça coûtait aussi cher que d'enfouir le CO2 dans la terre. Il semble que non.

[Traduction]

    J'ai l'impression qu'on commence à ressembler à cette émission de télévision à CBC, Dragons' Den, « Combien d'argent voulez-vous? »
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Madame Duncan, avez-vous des questions?
    Bien sûr, monsieur le président, mes questions vont dans une toute autre direction par contre. J'invoque le Règlement, et je trouve très particulier que nous ayons passé presque une heure à débattre d'une technologie alors que nous ne sommes pas un comité d'étude technologique. Nous avions l'occasion de nous pencher sur des milliers d'autres technologies que franchement, M. Hamza et Mme Kasperski auraient pu nous détailler. Mais, je n'ai plus le temps de poser des questions à ce sujet maintenant.
    Je crois que ma question à Mme Kasperski et à M. Hamza est la suivante, combien de technologies sont à l'étude en ce moment? Est-ce qu'il y a des obstacles pour les chercheurs à cause du manque de financement? Quels sont selon vous les principaux obstacles qui pourraient entraver l'utilisation de sables bitumineux moins dommageables pour l'environnement? En vous fondant sur les développements technologiques qui sont mis de l'avant, est-ce que vous croyez que cela sera possible dans un avenir rapproché?
    Je suis particulièrement intéressée, parce qu'au moment où l'on parle, de plus en plus de nouveaux projets et de demandes de permis pour une extension sont approuvés. En Alberta, les projets bénéficient souvent d'une clause de droit acquis. Nous avons entendu d'après d'autres témoignages que rien ne sera fait au sujet des projets qui existent et de ceux qui sont approuvés.
    J'aimerais savoir si nous avons quelque chance que ce soit d'un jour voir ces nouvelles technologies ou ces nouvelles approches être appliquées véritablement dans un avenir proche et qui vont permettre à l'industrie d'avoir des répercussions moins dommageables?
(1655)
    C'est une excellente question en fait.
    Je suis très optimiste au sujet de tout ce que je vois. La technologie que nous étudions en ce moment fera partie d'un avenir très rapproché. L'industrie opère également un changement de vitesse dans ses tentatives d'expérimenter avec nous différentes nouvelles technologies. Je crois donc que c'est très proche.
    En fait, ce qui est arrivé plus tard est la directive 74 du gouvernement de l'Alberta qui ciblait précisément la récupération de fines provenant de nouvelles opérations, ainsi que leur stockage dans des bassins séparés et la volonté de les conserver à un certain niveau de compacité pour que l'on puisse travailler par exemple sur une période très courte. Tout cela est en train de s'aligner. Je crois que dans très peu de temps — je dirais même dans un futur immédiat ou à moyen terme — nous aurons une excellente résolution.
    Monsieur Hamza, nous avons demandé à Alberta Environment de venir témoigner et ils ont refusé notre invitation. J'ai donc une question d'intérêt immédiat.
    Je crois comprendre que Alberta Environment va commencer à exiger un plus grand retour d'eau dans les rivières. Mais si les technologies ne sont pas encore éprouvées pour faire cela de façon sécuritaire, comment est-ce que les industries vont être en mesure de se plier à la nouvelle directive?
    Je n'ai jamais entendu parler de cette exigence. En ce moment, nous ne retournons pas l'eau dans les rivières. Pour ce qui est des opérations actuelles, il y a une nouvelle directive qui demande l'augmentation de l'eau recyclée, mais il n'y a aucune mention du retour de l'eau dans les rivières. En ce qui a trait aux exploitations à ciel ouvert, je n'ai pas non plus entendu parler de cette directive. Je ne connais pas la référence dont vous parlez.
    Peut-être ai-je mal compris. J'ai cru comprendre qu'à cause des préoccupations que provoquait la baisse du niveau de l'Athabasca, le gouvernement avait dit qu'il fallait aller de l'avant et retourner de l'eau dans la rivière.
    Mais il semble que vous ne savez pas... Vous ne pouvez pas parler en leur nom.
    C'est peut-être le cas, mais je n'en ai pas entendu parler.
    Faisons suite au point que vous avez soulevé concernant le gouvernement de l'Alberta. Il est vrai que lorsque notre étude a été publiée ou lorsqu'elle a refait surface il y a à peu près un mois, je crois que le sous-ministre — et même peut-être le ministre de l'énergie ou le ministre de l'Environnement, je ne me souviens pas — a dit qu'ils avaient hâte de rendre publique leur version. Ils avaient d'excellentes nouvelles à annoncer, cependant quelque chose a dû arriver entre-temps parce qu'ils ont décidé qu'il serait mieux de ne pas témoigner. Il aurait été bon de les entendre.
    Je tenais à le préciser.
    Monsieur Calkins.
    J'ai une dernière petite question.
    Allez-y.
    Monsieur Gradek, l'acétate à la page 8 de votre exposé montre 180 kilogrammes de Ti02... Qu'est-ce que c'est?
    Du dioxyde de titane, de l'oxyde d'aluminium et du dioxyde de zirconium.
    D'après l'étude entreprise par le gouvernement de l'Alberta, ce sont des sous-produits qui existent dans les dépôts de sables bitumineux et qui se concentrent dans les flux de résidus de fines. Ils sont oléophiliques, ce qui veut dire qu'ils adhèrent à la couche de bitume sur les billes. Donc, lorsque les billes sont lavées, ils sédimentent.
    La question que j'aimerais vous poser avant que tout ne soit trop beau... M. Schindler a témoigné aujourd'hui au sujet de la présence non seulement de ce composé mais aussi d'autres choses comme le cadmium, l'arsenic et autres métaux lourds qui sont présents naturellement. Où se trouveraient ces métaux-là? Est-ce qu'ils se retrouveraient dans l'eau? Ou si ce sont des sous-produits que vous n'avez tout simplement pas montrés sur votre acétate?
    Pourriez-vous nous donner quelques indications concernant la pureté de l'eau après qu'elle soit séparée des billes?
(1700)
    Certains des métaux lourds dont vous avez parlés demeurent dans les premiers résidus. Ils ne se retrouvent pas dans la mousse de bitume parce qu'ils ne sont pas oléophiles. Ils restent là et leur concentration n'est jamais augmentée. Ils retournent dans le sable.
    Dans les résidus secs empilables ou peu importe le produit d'arrivée...
    Dans les constructions de digue, etc.
    D'accord.
    Ma dernière question est la suivante. En ce qui concerne le processus en général que vous avez proposé sur cette acétate, pourriez-vous dire au comité si vous savez quel sera le bilan carbone de cette technologie? Il faut obtenir 80 °C à la fin de la conduite. Il existe certains processus où nous devons chauffer les rejets de bitume, etc. Pourriez-vous dire au comité...?
    Le bilan carbone?
    L'intensité du carbone d'un baril de bitume qui sera extrait et traité par ce processus à une échelle commerciale est prévue être de moins 828 mégajoules par baril, ce qui est une intensité de carbone nette négative. C'est le carburant le plus vert de la planète. Ce n'est pas du pétrole sale. C'est le pétrole le plus propre.
    Merci beaucoup à tous pour votre présence. Je crois que nous en avons appris beaucoup d'un point de vue technologique entre autres.
    J'aimerais dire à tous les membres que le greffier vient de m'avertir que l'autobus est stationné devant Starbucks. Nous devons partir pour l'aéroport maintenant et nous prévoyons une bonne journée de séances à Calgary demain.
    Merci beaucoup. La séance est levée.
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