Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Nous avons déjà un peu de retard parce que le comité précédent a légèrement dépassé l’heure prévue. Nous sommes cependant prêts à démarrer.
Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-311.
Nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui un groupe de témoins représentant l’industrie. Nous avons, de l’Association des produits forestiers du Canada, Avrim Lazar, président et chef de la direction. Il est accompagné de Catherine Cobden, vice-présidente à l’Environnement. Nous avons également, de la Fédération canadienne de l'agriculture, Don McCabe, président du Comité de l’environnement et des sciences, vice-président de la Fédération de l’agriculture de l’Ontario et président du Conseil canadien sur la conservation des sols.
Je souhaite la bienvenue aux représentants des deux organisations. Nous allons tout de suite aborder l’étape des déclarations préliminaires.
Monsieur Lazar, vous pouvez commencer. Nous vous serions reconnaissants de présenter votre exposé en moins de 10 minutes.
Certainement. Merci. Bonjour, tout le monde. Je voudrais vous remercier d’avoir pris le temps de vous entretenir avec nous.
Les changements climatiques inquiètent énormément l’industrie forestière canadienne. Comme vous le savez sans doute, le Canada est le plus important pays exportateur de produits forestiers du monde. Les répercussions de l’évolution du climat ainsi que les incidences des changements survenus sur les marchés à cause des changements climatiques sont pour nous une grande source de préoccupation.
L’évolution du climat dont nous avons été témoins, c’est-à-dire l’absence d’hivers froids, a eu des effets sur le secteur forestier. Le dendroctone du pin ponderosa, que des hivers froids auraient normalement détruit, s’est multiplié et étendu. Aujourd’hui, 25 000 familles canadiennes ont perdu leur gagne-pain. Elles ont dû quitter leurs collectivités parce qu’il n'y avait plus assez de bois pour alimenter l’industrie. Nous ne pensons pas aux changements climatiques comme à une menace future ou abstraite. C’est une menace immédiate qui risque d’empêcher les gens de gagner leur vie et de donner à manger à leur famille.
Cela nous a probablement sensibilisés à la nécessité de lutter contre les changements climatiques un peu plus tôt que dans d’autres industries. Dans nos usines, nous avons considérablement réduit l’utilisation des combustibles fossiles. Nous avons réduit nos émissions de gaz à effet de serre de 60 p. 100 par rapport à 1990, année de référence de Kyoto. En fonction de l’intensité, les chiffres sont encore plus favorables. Je crois que nous en sommes à 62 ou 63 p. 100. De quelque manière qu’on l’envisage, nous avons fait un virage remarquable sur le plan des émissions de gaz à effet de serre.
Nous l’avons fait grâce à un réoutillage étendu de nos procédés industriels et à la substitution aux combustibles fossiles de combustibles renouvelables à base de déchets. Ce qui allait auparavant dans les décharges contrôlées pour se transformer en méthane alimente aujourd’hui nos chaudières et crée de l’énergie verte. C’est un virage vraiment remarquable.
Nos clients nous demandent s’il est possible de leur livrer des produits à bilan de carbone neutre. Pour y parvenir, nous sommes allés au-delà de la vision réglementaire du monde pour examiner notre production sur la totalité du cycle de vie, du berceau à la tombe. Nous examinons ce que nous faisons dans la forêt. Il est important de comprendre les incidences de l’exploitation forestière sur le carbone stocké dans la forêt. De toute évidence, il faut aussi s’assurer que, pour chaque arbre récolté, le carbone qui est stocké est remplacé par un nouvel arbre en train de grandir. Nous avons également examiné toute la transition par la chaîne de valeurs jusqu’à la fin du cycle de vie pour veiller à ce que nos produits ne finissent pas dans des décharges contrôlées où ils se transforment en méthane.
Nous avons adopté l’approche du berceau à la tombe, ou plutôt l’approche du berceau au berceau, et avons pris l’engagement d’atteindre un bilan de carbone neutre d’ici 2015 sans acheter de crédits compensatoires à l’extérieur, ce qui constitue, à mon avis, une cible unique et particulièrement ambitieuse. Nous aimerions passer de 60 à 100 p. 100 de combustibles renouvelables. Nous croyons pouvoir y parvenir avant 2015, mais la situation économique a bien sûr ralenti le renouvellement de l’équipement.
Ce qui a commencé comme un enjeu environnemental se transforme rapidement en enjeu économique. L’industrie forestière est fondamentalement l’industrie du carbone. Un arbre, c’est du carbone en longues chaînes, qu’on transforme en pâtes et papiers en ajoutant de l’énergie.
Nos concurrents européens bénéficient depuis longtemps de politiques gouvernementales appuyant l’intégration de la bioénergie et des bioproduits dans l’industrie forestière. Aux États-Unis, il y a des subventions massives — peut-être moins liées à des politiques que ce n’est le cas en Europe — au secteur de la bioénergie. Nous voudrions suggérer au comité que le Canada a besoin, en sus d’une réglementation énergique visant la réduction des émissions de gaz à effet de serre, d’une solide politique cadre sur la production d’énergie verte et des régimes d’investissement forts pour la production d’énergie verte dans l’industrie forestière.
Nous avons récemment terminé une étude, de concert avec le ministère des Ressources naturelles et les provinces, sur la destination de cette énergie verte. Les conclusions sont intéressantes: dans une optique d’empreinte écologique, d’empreinte sociale et de rendement du capital, l’avenir de l’énergie provenant de la biomasse forestière réside dans son intégration dans l’infrastructure actuelle de l’industrie.
(1115)
Nous avons donc défini la voie à suivre pour avancer. Nous attendons les politiques et les investissements correspondants.
Je crois que je vais m’en tenir à cela en attendant vos questions.
Je m’appelle Don McCabe. Je suis en fait un agriculteur du sud-ouest de l’Ontario. J’ai l’occasion aujourd’hui de me faire ici le porte-parole du secteur agricole. Je crois que c’est le bon moment pour l’agriculture de se faire reconnaître adéquatement dans ces négociations portant sur les politiques et les mesures à prendre à l’avenir.
Je crois qu’il est très important d’examiner la définition d’agriculteur de la façon suivante. Aujourd’hui, les agriculteurs sont davantage des gestionnaires des cycles du carbone et de l’azote qui produisent de l’amidon, de l’huile, des combustibles, des fibres et des produits alimentaires de grande qualité pour les consommateurs du monde. Par conséquent, si vous comptez examiner les moyens d’agir sur les flux de carbone, vous devez vous rendre compte qu’il n’y a qu’un seul atome de carbone dans la table périodique, et il se trouve que j’en fais pousser des verts. Nous nous occupons de cycles biologiques, des cycles qui ne comportent pas de sources.
Je ne suis pas en mesure d’accepter d’autres règlements sur des polluants non ponctuels. Le secteur agricole se ressent de toutes les politiques qui sont adoptées. Nous achetons au détail, nous vendons en gros et nous payons le transport dans les deux sens. Il ne nous reste aucune marge de manœuvre. Par conséquent, toute hausse des prix de l’électricité, des produits chimiques, des combustibles, des engrais ou de la chaux aura sur nous des effets plus importants que dans n’importe quel autre secteur.
Par ailleurs, nous sommes très désireux de participer à cette initiative sur une base volontaire. Le secteur agricole peut trouver de nouvelles sources de revenu sous forme de biens et services environnementaux ou de crédits compensatoires.
D’après Environnement Canada et les derniers chiffres que j’ai eu l’occasion de voir, le secteur agricole canadien contribue au problème à environ 8,3 ou 8,6 p. 100, en fonction de l’inventaire national. Pour simplifier les choses, j’arrondis à 10 p. 100. Je peux déclarer aujourd’hui au comité que l’agriculture représentera à long terme 20 p. 100 de la solution pourvu qu’il y ait une réglementation adéquate. Nous pourrions même aller plus loin si la réglementation s’y prête.
Pour nous, les règles signifient que l’atténuation correspond à l’adaptation. Je sais que le projet de loi à l’étude envisage un cadre à long terme. Toutefois, pour l’agriculture, l’atténuation, c’est l’adaptation. En ce moment, j’essaie de m’adapter à un bon mois de septembre qui, après un été pourri, nous laissera un peu plus de temps pour récolter le soja. Le tableau est à peu près le même dans le reste du pays. Dans l’Ouest, nous avons encore des céréales et des oléagineux qui n’ont pas été récoltés et, dans l’Est, il y a aussi des problèmes. Voilà ce que donnent les changements climatiques.
À titre d’agriculteur, je suis disposé à prendre le risque et à faire mon travail. Je ne suis cependant pas disposé à accepter des politiques inutiles qui ne tiennent pas compte des besoins particuliers de l’agriculture, alors que nous pouvons vous offrir des occasions de progresser. Face à un système biologique, vous ne pouvez recourir qu’à deux outils pour gérer ces problèmes à l’avenir. Le premier est un système de plafonds et d’échanges avec compensation, que nous sommes disposés à envisager à partir de l’année de référence 1990. Le Conseil canadien sur la conservation des sols était disposé à participer à ce moment. Nous sommes très désireux de voir adopter un tel système.
Dans le secteur agricole, une taxe sur le carbone serait vouée à l’échec dès le départ. C’est encore une fois parce que nous n’avons aucune marge de manœuvre. La taxe sur le carbone appliquée en Colombie-Britannique a ajouté en moyenne quelque 10 000 $ aux frais d’un exploitant de serre de la province. La taxe signifie aussi que tous les grains de l’Ouest expédiés au port de Vancouver pour être exportés aux marchés mondiaux ont été frappés d’un supplément carburant imposé par CN et CP. Les agriculteurs de l’Ouest s’en ressentent parce que CN et CP ne puisent pas dans leurs bénéfices. Les frais supplémentaires qu’ils doivent assumer sont transmis aux agriculteurs dans le prix du transport.
Je le répète, pensez à un système de plafonds et d'échanges car l’atténuation, pour les agriculteurs, c’est l’adaptation. Nous avons été les premiers à reconnaître les puits agricoles. C’est une initiative qui aura des suites à Copenhague. Nous espérons que l’agriculture sera retenue comme solution importante. Le Canada doit veiller à ce que notre voix soit entendue, car c’est nous qui avons fait le travail préliminaire et nous sommes en mesure d’aller plus loin.
(1120)
Cela nous amène au principe de base de la recherche. C’est grâce à la recherche que nous avons atteint le stade actuel. Et c’est encore la recherche qui nous permettra de nous maintenir comme chefs de file dans ce domaine. À titre de producteur primaire, je profite aujourd’hui des recherches réalisées il y a 10 ans. Il faut donc que la recherche se poursuive et s’intensifie pour que le Canada garde sa position de leadership dans le secteur agricole.
Je le répète une fois de plus: en agriculture, l’atténuation est l’adaptation à long terme. L’agriculture pourra aider à mesure que nous progresserons. Nous pouvons agir à condition que de bonnes politiques soient mises en place. Je veux bien accepter le risque des conditions météorologiques. Je veux bien affronter mère nature, mais je ne veux pas prendre le risque d’avoir de mauvaises politiques qui ne reconnaissent pas les possibilités que je vous offre.
Je vous remercie. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
Je suis heureux de vous revoir, monsieur Lazar. Monsieur McCabe, c’est également un plaisir de vous voir. Je vous souhaite la bienvenue. Je ne sais pas si nous nous sommes déjà rencontrés, mais c’est possible.
Pour commencer, je voudrais vous demander, à tous deux, la même question que j’ai posée en premier à tous les témoins qui ont comparu au sujet du projet de loi C-311. Est-ce que l’Association des produits forestiers du Canada ou la Fédération canadienne de l’agriculture ont en main un plan canadien de lutte contre les changements climatiques qu’elles appliquent à l’égard des produits forestiers ou du secteur agricole?
Vous avez tous deux demandé à plusieurs reprises que des mesures soient prises à l’égard d’un certain nombre d’éléments. Détenez-vous actuellement, 46 ou 47 mois après l’arrivée au pouvoir de ce nouveau gouvernement, qui n’est plus si neuf que cela, un plan dont vous vous servez de concert avec vos membres? Avez-vous un tel plan? Si oui, pouvez-vous nous le communiquer?
Les éléments du plan, s’ils s’inscrivent dans votre définition d’un plan, monsieur McGuinty, c’est le fait que l’agriculture représente 10 p. 100 du problème et 20 p. 100 de la solution ainsi que le fait que nous sommes très désireux d’avoir pour les agriculteurs canadiens un système de plafonds et d’échanges. C’est le plan de la Fédération canadienne de l’agriculture à ce stade. Nous voulons que ces principes soient reconnus et que des recherches améliorées soient menées à l’appui de ces principes.
Monsieur McCabe, je comprends les éléments que vous souhaitez voir dans un plan. Mais je voudrais savoir si la FCA et ses nombreux membres détiennent actuellement un plan canadien de lutte contre les changements climatiques.
De toute évidence, monsieur, je n’ai pas saisi les nuances de votre question. Je crois que chaque gestionnaire dans chaque exploitation agricole doit trouver l’occasion de dresser son propre plan à sa propre échelle. Par conséquent, je dirais que le Conseil canadien sur la conservation des sols collabore avec Agriculture et Agroalimentaire Canada pour la mise au point d’un logiciel permettant aux gens d’examiner le problème actuel.
Monsieur McCabe, j’en déduis que ni vous ni votre Fédération ne détenez un plan national établi par le gouvernement, surtout en prévision de Copenhague. Vous n’avez pas un plan. Disposez-vous d’un plan que vous a donné le gouvernement à l’intention de vos membres?
Monsieur Lazar, avez-vous un tel plan? Est-ce que l’Association des produits forestiers du Canada applique un plan fédéral de lutte contre les changements climatiques?
Nous n’avons sûrement vu aucun plan venant d’un gouvernement quelconque ces derniers temps. En toute franchise, nous n’avons pas attendu le gouvernement. Nous n’avons pas attendu des règlements. Nous avons simplement avancé. Nous avons déterminé les mesures à prendre et avons commencé à agir. Voilà où nous en sommes.
Monsieur Lazar, j’aimerais vous demander, pendant que nous y sommes, quelle devrait être à votre avis la cible du Canada après 2012, par rapport aux niveaux de 1990, pour ce qui est de la réduction des émissions de gaz à effet de serre? Quelle devrait être cette cible?
Nous en sommes déjà à 60 p. 100. Alors, quand nous voyons dans le projet de loi qu’il y a une cible de 80 p. 100 à atteindre dans un million d’années, notre secteur ne trouve pas cet objectif trop ambitieux.
Nous ne parlons pas au nom de toute la société canadienne ou de l’ensemble des industries du pays. Très franchement, je ne peux pas dire au gouvernement quels devraient être les chiffres pour tout le pays, car je ne représente pas toute l’économie. Je n’ai pas accès à des données de ce genre. Je peux seulement vous dire que, pour l’industrie forestière, les cibles de cet ordre sont réalisables. Je peux aussi ajouter que notre secteur, qui souffre déjà des répercussions des changements climatiques, aimerait voir des chiffres ambitieux et de sérieuses réductions.
J’ajouterai que les chiffres représentent parfois un symbole auquel les gens se raccrochent. Le plus important, c’est ce que les gens font. Il reste aussi à voir si les mesures prises auront des effets sur le climat. Atteindre des cibles ambitieuses qui entraînent parallèlement de grosses fuites, par exemple si les gaz à effet de serre viennent du secteur forestier indonésien au lieu de venir de l’industrie forestière canadienne, ne servirait évidemment pas à grand-chose. Par conséquent, les chiffres ne sont pas importants en soi. Ce sont les détails et la façon dont les choses sont faites qui ont de l’importance.
Cela est raisonnable. Je crois que vous avez présenté ces arguments à plusieurs reprises dans votre témoignage. Vous avez dit que nous avons besoin de règlements énergiques, d'une solide politique cadre et d'un bon régime d’investissement. Croyez-vous que nous ayons actuellement des règlements énergiques et de solides politiques et régimes d’investissement?
Ne devriez-vous pas être au courant? Comme vous représentez l’APFC qui doit suivre, par exemple, les résultats possibles venant de Copenhague et de Washington, ne devriez-vous pas, comme président de l’APFC, dont les membres génèrent des milliards de dollars d’activité économique, avoir été consulté, avoir eu des contacts avec le gouvernement, avoir été informé d'avance, avoir participé et joué un rôle? Comptez-vous vous limiter à appliquer les politiques, les cadres et les régimes d’investissement du gouvernement?
Pour être juste, je dirais que nous sommes en contact avec le gouvernement. Nous lui avons dit par exemple qu’il est très important de concevoir un système tenant compte de ce que font les États-Unis pour éviter que nous ayons des difficultés à la frontière. Il y a des avantages et des inconvénients. Les industries du Canada — je ne parle pas seulement de mon secteur — ont beaucoup critiqué le gouvernement quand des choses ont été faites sans consultations suffisantes. Nous nous sommes empressés de critiquer le fait que ni les gouvernements antérieurs ni le présent gouvernement n’ont établi un plan qui nous permette de prévoir l’avenir avec un certain degré de certitude. Par conséquent, nous ne tenons pas à critiquer ce qui a été fait. Nous préférons aller de l’avant et agir.
Je vais terminer par une question qui est vraiment importante pour vous, monsieur Lazar. Dans toutes les mesures législatives envisagées par les États-Unis, le prix du carbone en prévision de 2020 était censé atteindre un sommet de 30 $ la tonne. La semaine dernière, l’Institut Pembina, la Banque TD et d’autres qui ont financé le rapport nous ont dit que, même d’après le plan du gouvernement, nous aurons un prix minimal de 100 $ la tonne d’ici 2020, qui pourrait atteindre 200 $ si nous adoptons la cible des ONG environnementales, et non la cible du NPD. Quel effet cette différence de prix aurait-elle sur votre secteur? Comment vos membres pourraient-ils s’accommoder d’un tel écart?
Pouvez-vous aider les Canadiens à comprendre de quelle façon nous affronterons cette différence dans le prix du carbone? On nous a dit que c’est une cible nord-américaine, un plan nord-américain. Comment pouvons-nous réagir? Comment réagira votre secteur?
En un mot, je ne le sais pas. La question a trois aspects. Premièrement, le prix du carbone n’est pas influencé par un marché vide. Il dépend de la politique du gouvernement. Selon l’orientation de cette politique, le prix peut monter ou baisser. Si la politique du gouvernement est vraiment énergique, le prix montera. Autrement, il baissera. Si la politique du gouvernement vient assez tôt, le prix sera moindre parce qu’il y aura une marge de manœuvre. Si elle vient tard, le prix augmentera parce que les gens devront s’adapter plus rapidement.
Nous aurions évidemment préféré que le Canada sache où il s’en va et suive un plan, mais il est clair que le marché ne se limitera pas au Canada. Il est probable qu’il ne se limitera même pas à l’Amérique du Nord. Le marché sera vraisemblablement mondial.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie également nos témoins de leurs présentations.
Monsieur Lazar, vous avez dit clairement que votre secteur industriel a considérablement réduit ses émissions de gaz à effet de serre. Vous avez parlé d'une réduction de 60 p. 100 depuis l'année de référence 1990. D'ailleurs, la semaine dernière, le Conseil de l'industrie forestière du Québec comparaissait devant une commission parlementaire afin de déterminer les cibles. Le Québec rappelait justement que son secteur forestier avait considérablement réduit ses émissions de gaz à effet de serre. Dans le secteur des papetières, la réduction est de 41 p. 100, ce qui est assez considérable.
Vos industries utilisent toujours 1990 comme année de référence, ce qui n'est pas le cas du gouvernement fédéral qui, lui, souhaite utiliser 2006 comme année de référence.
Dans la mesure où le gouvernement décide d'utiliser 2006 comme année de référence et que vous avez considérablement réduit vos émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et aujourd'hui, ne trouvez-vous pas que c'est inéquitable comme approche? Qu'attendez-vous pour compenser cette détermination, par le gouvernement fédéral, de l'année 2006 comme année de référence?
C'est une bonne question. Nous avons toujours dit clairement que nous préférions une date de mise en oeuvre, une date de référence, le plus reculée possible parce que nous avons pris des actions plus tôt que les autres. La question de early actions devient très importante parce que si les politiques du gouvernement punissent ceux qui ont agi avant l'entrée en vigueur de la réglementation, cela envoie à tout le monde le message de ne rien faire, d'attendre la réglementation.
[Traduction]
Cela étant dit, nous pouvons nous accommoder de 2000. Nous préférons 1990. Il faudra voir si le régime réglementaire reconnaîtra l’action précoce.
Les gens demandent pourquoi cela est tellement important. Il y a deux raisons. Tout d'abord, c’est une question d’équité. Si j’ai calfeutré mes fenêtres, fermé mes portes et pris toutes les mesures faciles le plus tôt possible, et que quelqu’un me demande une amélioration de 20 p. 100, je vais devoir acheter une nouvelle chaudière ou refaire l’isolation de la maison. Par contre, si je n’ai rien fait au départ, je peux me limiter aux solutions peu coûteuses. Par conséquent, si on a agi tôt et que la réglementation n’en tienne pas compte, il faudra dépenser davantage. On est alors pénalisé pour avoir été vertueux. Nous ne voulons pas nous retrouver dans cette situation.
La seconde raison tient à la politique publique. Je suppose que les Canadiens souhaitent faire le maximum sans être forcés ou payés par le gouvernement. Mais si toutes les mesures volontaires entraînent des sanctions financières, les gens se diront qu’une attitude responsable donne des résultats défavorables.
Le gouvernement vous répondra que dans son plan déposé récemment, il y a cette reconnaissance des efforts passés. Je pense que le gouvernement reconnaît ces efforts jusqu'à un maximum de 15 mégatonnes. Donc, estimez-vous que ces 15 mégatonnes totalisent l'ensemble des efforts faits dans le passé, depuis 1990? Croyez-vous que c'est suffisant?
Je crois que le gouvernement reconsidère cette approche particulière. Je préfère donc ne pas faire de commentaires. La façon dont la cogénération sera traitée nous donnera une idée de ce que le gouvernement fera pour reconnaître l’action précoce. S’il agit convenablement dans le cas de la cogénération et de la biomasse, il trouvera des moyens de compenser les effets négatifs pour ceux qui ont été de bons citoyens au départ.
J'aimerais aborder un autre élément, soit la question des puits de carbone. On sait que le Canada possède environ 10 p. 100 de la superficie mondiale des forêts. Je lisais une de vos présentations toute récente, faite lors du Congrès forestier mondial en Argentine. Vous avez dit que si on s'applique à garder la forêt en bonne santé, elle piégera le carbone.
Je lisais aussi le plan révisé déposé en 2005 dans lequel on estimait qu'il serait possible, avant 2012, de réduire de 30 mégatonnes les émissions de gaz à effet de serre en modifiant les pratiques agricoles et forestières actuelles au Canada. Cela a été déposé en 2005, et 2012 approche. Est-on capable de faire un bilan? Est-on capable d'évaluer l'absorption en carbone du régime forestier et agricole au Canada? On croyait que d'ici 2012, on serait capable d'absorber 30 mégatonnes. Savez-vous où on en est rendu?
Je répondrai pour le secteur forestier, et Don McCabe le fera pour le secteur agricole.
[Français]
Cela devient un peu plus compliqué à cause de l'impact du pine beetle et aussi de l'impact des feux. En réalité, les forêts du Canada — pas celles qui ne sont pas sous notre gestion, mais en général — deviennent pour la première fois
[Traduction]
des émetteurs nets à cause des ravages du dendroctone et des énormes incendies que nous avons eus.
Nous collaborons avec la communauté environnementale et les scientifiques de Ressources naturelles Canada pour déterminer de quelle façon nous pouvons nous assurer que l’exploitation forestière ne contribue pas au problème.
Donc, êtes-vous en train de nous dire que l'inaction des dernières années a fortement compromis les efforts en matière de réduction de gaz à effet de serre? Est-ce que c'est ce que je dois comprendre? Si on avait été plus actif sur le plan des changements climatiques, votre industrie ne subirait pas les conséquences naturelles du réchauffement climatique. Je suppose que c'est la même chose pour M. McCabe.
Monsieur McCabe, vous nous avez dit, et j'ai beaucoup de difficultés à comprendre...
Permettez-moi de répondre rapidement car vous m’avez attribué une conclusion. Aurions-nous préféré que toute la société canadienne, y compris le gouvernement et le monde des affaires, mène une lutte plus énergique contre les changements climatiques? Bien sûr. Pouvons-nous attribuer la responsabilité des ravages du dendroctone au fait que les gouvernements fédéraux et provinciaux successifs n’ont pas mis en place un plan de réglementation? Non. Nous devons admettre que l’évolution du climat est un phénomène mondial.
Monsieur McCabe, vous venez de nous dire que vous ne souhaitez pas qu'il y ait une réglementation rigoureuse, parce que cela risque d'entraîner des coûts pour votre secteur. Vous êtes donc prêt à vous adapter aux changements. Toutefois, la situation du secteur forestier n'indique-t-elle pas que, si on n'agit pas, il risque d'y avoir des coûts et un impact sur les terres agricoles? J'ai beaucoup de difficulté à comprendre. Vous nous dites qu'on doit avoir de l'argent pour s'adapter, mais en même temps, on n'a pas la garantie que cela donnera des résultats. N'est-il pas préférable d'agir maintenant et de changer les pratiques agricoles? Bien sûr, cela demandera des investissements dans votre secteur, mais au moins, cela peut nous assurer d'une contribution à la réduction des gaz à effet de serre, ce qui favorisera la pérennité des terres agricoles canadiennes.
Si je m’en souviens bien, les estimations d’Environnement Canada pour 1990 étaient, dans le cas de l’agriculture, de 7,3 mégatonnes de dioxyde de carbone. En 2000, le secteur avait un bilan négatif au chapitre des émissions de dioxyde de carbone. En tenant compte du méthane et de l’oxyde de diazote, nous nous maintenons depuis 1990, ce qui signifie que nous avons constamment réussi à trouver des moyens novateurs de fonctionner et à produire davantage avec moins d’intrants. Je vais donc le dire encore une fois: nous atténuons et nous adaptons simultanément.
Je soutiens par conséquent que le secteur agricole a fait plus que sa part sans être reconnu et sans être compensé par le gouvernement pour son l’action précoce. Tout cela s’inscrit dans la définition du statu quo qui nous vient de la bureaucratie.
Bref, nous avons fait notre part dans la lutte contre les changements climatiques. Nous avons besoin d’investissements dans la recherche pour continuer à faire notre part parce que nous avons l’intention de poursuivre notre adaptation.
Merci, messieurs et madame, de votre présence au comité.
C’est un plaisir de vous voir, monsieur Lazar. Nous avons assisté à beaucoup trop de ces réunions sans résultat.
J’ai beaucoup apprécié votre témoignage. J’ai trouvé vos observations très utiles.
Monsieur Lazar, M. McGuinty vous a demandé si vous avez été consulté. Vous avez probablement suivi les différents processus en cours, comme les travaux de la Commission nord-américaine de coopération environnementale. Je suis sûre que vous y avez participé de temps en temps. L’entente en vertu de laquelle la commission a été créée oblige le Canada à donner un préavis et à tenir des consultations avant d’adopter des politiques ou des mesures législatives.
Le dialogue Canada-États-Unis sur l’énergie propre est la dernière initiative en date. Dans ce cas aussi, le gouvernement du Canada s’est engagé à maintenir un contact direct avec les Canadiens — je suppose que cela comprend les industries canadiennes — au sujet de toute initiative envisagée de concert avec le gouvernement des États-Unis.
Vous avez dit que vous n’avez pas directement participé à l’élaboration de règlements, mais que vous avez été consulté au sujet de l’élaboration de la politique. Est-ce que cela signifie que vous aimeriez que votre secteur soit directement consulté sur tout régime réglementaire que le gouvernement voudrait mettre en place dans le cadre de son initiative touchant les changements climatiques?
Il est évident que nous voulons toujours être consultés, et nous l’avons été. Le ministre et les bureaucrates nous parlent. Vous nous parlez. Nos vues sont loin d’être secrètes. Nous les étalons dans les journaux. Nous en parlons à la télévision. Nous les avons présentées à Environnement Canada. Nos vues sont très claires: nous voulons que le Canada adopte un régime qui nous place en avant, qui soit suffisamment énergique pour que nous n’ayons pas de difficultés à la frontière américaine, qui empêche les fuites de production et d’emplois à l’étranger là où l’environnement n’est pas protégé, et qui tienne compte de la cogénération et de notre action précoce. Nous n’avons pas été timides en parlant de toutes ces choses.
En même temps, nous comprenons que le gouvernement ne conçoive pas toute sa politique dans le cadre de consultations parce qu’il y a d’énormes compromis à faire. Soyons très honnêtes à cet égard. À l’heure actuelle, l’économie mondiale dépend entièrement des émissions de gaz à effet de serre. Il s’agit pour nous de réoutiller toute notre économie. Nous sommes un pays exportateur. Il n’est pas simple de réduire la dépendance par rapport aux gaz à effet de serre quand on a des relations commerciales.
On nous a souvent demandé ce qui pourrait marcher, ce qui serait utile, ce qui réduirait les coûts. De notre côté, nous avons souvent pensé que si on nous demandait quelle réduction réaliser, nous dirions 60 p. 100 après 1990. Nous l’avons fait. Et qu’en est-il de 80 p. 100? Nous pouvons le faire, mais il faudrait voir les détails pour déterminer si ce qu’on nous demande est raisonnable ou non.
Quoi qu’il en soit, je tiens à reconnaître votre action précoce. C’est vraiment louable.
Je déduis également de votre témoignage que, comme j’ai pu le voir dans un certain nombre de rapports... Il y a quelques années, KPMG a fait une enquête auprès des dirigeants des grandes industries. Le régime de gestion des émissions atmosphériques des États du Nord-Est a aussi fait une enquête sur les polluants, sur ce qui influence les réductions et sur l’orientation des investissements. Dans tous les cas, il y avait un élément déclencheur dans la réglementation. Ai-je donc raison de croire que vous préconisez un régime clair qui garantisse l’équité et établisse un calendrier ferme?
Nous aimerions certainement avoir un régime. L’équité ne se réalisera que s'il est mondial. Si nous avons un régime strictement canadien — nous souhaitons en avoir un — et que nos concurrents ne sont soumis à aucun contrôle, nous aurons des difficultés.
Nous voulons un régime, mais le fait est que jusqu’ici, les changements ont été dictés davantage par le marché que par le gouvernement. Nous faisons la promotion de nos qualités environnementales. C’est en partie la raison pour laquelle nous avons agi.
Monsieur McCabe, je vous remercie d’être venu témoigner.
Nous avons entendu M. Sauchyn. Je ne sais pas si vous le connaissez. Il est professeur à l’Université de Regina. C’est l’un des principaux auteurs du rapport fédéral sur l’adaptation aux changements climatiques. Le rapport contient un gros chapitre sur l’agriculture, qui montre clairement que le secteur agricole s’inquiète déjà des effets de l’évolution du climat, qu’il est nécessaire de tenir compte de vos besoins et de s’interroger sur votre rôle.
Il y a en Alberta un programme de crédits compensatoires, y compris des crédits agricoles, depuis un certain temps déjà. D’après les observations d’un certain nombre d’agriculteurs participants, les bénéficiaires sont heureux de recevoir l’argent. Par exemple, un éleveur qui a un troupeau de 25 000 têtes et une exploitation agricole de 800 hectares a dit qu’il a reçu 100 000 $ en contrepartie d’une préparation limitée du sol. Il était bien content, mais il avait des doutes sérieux quant à la valeur de ce marché.
Que pense votre secteur de ces crédits compensatoires? Croyez-vous à leur efficacité? Pensez-vous qu’il faudrait remonter à un certain temps pour récompenser les agriculteurs qui ont réduit le travail du sol et pris depuis longtemps d’autres mesures de conservation?
Vous avez parlé des mesures déjà prises dans le secteur agricole. Pensez-vous que les autorités fédérales devraient envisager d’accorder des crédits aux agriculteurs qui ont pris des mesures pour réduire les effets sur l’environnement? À partir de quelle date faudrait-il le faire?
Le Conseil canadien sur la conservation des sols a officiellement adopté une résolution disant qu’il serait heureux que 1990 constitue l'année de référence. En reconnaissant ce que les pionniers ont fait, surtout en limitant le travail du sol, on récompenserait leur action et on encouragerait d’autres à agir de la même façon.
Pour ce qui est du système albertain, il a démarré vers le milieu de 2007, probablement en juillet. Jusqu’à la fin de 2008, les crédits compensatoires ont totalisé 5 millions de tonnes dans la province, dont 1,5 million sont attribuables à la préparation limitée du sol.
Sur la base d’un prix minimum de 6 $ la tonne — comme il s’agit bien sûr de contrats confidentiels, ce ne sont que des rumeurs, mais le prix se situe probablement entre 6 $ et 15 $ —, cela fait 9 millions de dollars. Disons 10 millions pour arrondir. Les agriculteurs ont donc reçu 10 millions de dollars, dont ils ont vraiment besoin puisqu’ils doivent faire face à la hausse des prix du carburant, de l’électricité et de tout le reste. Les émissions de gaz à effet de serre de ces industries réglementées seront donc transmises au secteur primaire.
Par conséquent, les crédits compensatoires nous aident à payer les frais supplémentaires que nous devons déjà assumer, sans parler des règlements futurs.
Je remercie les témoins de leur présence. Je suis heureux de revoir ceux d’entre vous que j’ai déjà eu occasion d’entendre.
Les Canadiens critiquent souvent le gouvernement libéral précédent, qui a été au pouvoir pendant 13 ans, de 1993 à 2006, sans rien faire pour l’environnement. Nous en voulons à ce gouvernement pour avoir créé un gâchis environnemental, mais M. Lazar nous a rappelé que l’évolution du climat est un phénomène mondial, et pas seulement canadien. Merci de nous l’avoir rappelé, monsieur Lazar.
Les ravages du dendroctone du pin ponderosa sont attribuables non seulement à l’inaction des libéraux, mais aussi au réchauffement de la planète. À ce sujet, nous avons entendu dire qu’il faudrait des températures très froides, qui viendraient très rapidement, pour détruire le dendroctone. J’ai attendu, en espérant que nous aurions un hiver très froid avec des chutes de température très brusques.
L’année dernière, la Colombie-Britannique et l’Alberta ont eu de grands froids qui sont survenus très rapidement et ont duré longtemps. Est-ce que cela a ralenti la progression du dendroctone?
Nous nous attendions à des effets plus marqués que ce que nous avons pu constater. Je ne suis pas entomologiste. Je ne prétends pas être un expert en biologie du dendroctone, mais il est clair que son énorme multiplication a modifié cette biologie. À cause du nombre, la capacité d’adaptation du dendroctone semble avoir augmenté. Par conséquent, le fléau est encore là.
Les scientifiques s’entendent sur trois choses. Une partie de la solution du problème du dendroctone réside dans la suppression par le feu. S’il n’y avait pas eu autant de forêts saines, il ne se serait pas étendu à ce point, mais personne ne souhaite voir d’énormes incendies.
On sait que, d’habitude, un temps très froid au début de l’automne tue le dendroctone, mais la plupart des scientifiques disent qu’il n’a pas réagi de la façon attendue.
Je vous remercie. C’était de la simple curiosité de ma part.
Je voudrais maintenant parler de l’orientation prise par le Canada dans la lutte contre les changements climatiques.
Nous avons engagé le dialogue sur l’énergie propre après l’arrivée du nouveau gouvernement Obama aux États-Unis. Nous avons travaillé fort en vue de la conclusion d’un nouvel accord international à Copenhague. Le Canada parle constamment d’une cible de 20 p. 100 de réduction d’ici 2020. Nous avons également dit qu’il est important que tous les grands émetteurs participent à la solution du problème et signent le nouvel accord. Il faut veiller à ce que la Chine, les États-Unis et l’Inde, qui sont tous de grands émetteurs, fassent partie des signataires. Les États-Unis sont sur le point de prendre des engagements. Les négociations se poursuivent en prévision de Copenhague.
Ma question porte sur l’importance d’une approche nord-américaine. Vous avez dit que nous aurons une nouvelle économie mondiale, mais tandis que le Canada s’engage dans les négociations, serait-il préférable pour nous, afin de protéger l’économie canadienne qui est très liée à l’économie américaine, d’adopter une approche nord-américaine, par opposition à une approche indépendante et à l’acceptation des cibles européennes?
Nous avons entendu des scientifiques à notre dernière réunion, dont M. John Drexhage. J’avais mentionné aux témoins que je rentrais de Copenhague où j’avais pu constater que l’essence se vendait 2,50 $ le litre, que les véhicules neufs étaient frappés d’une taxe de 180 p. 100 et que les prix de l’électricité étaient de six fois supérieurs aux nôtres. J’avais demandé à M. Drexhage si nous devions prendre la même orientation et accepter le même genre de mode de vie. Fallait-il agir comme le Danemark et la Suède? Il a répondu que nous devions le faire dans une grande mesure.
Quels en seraient les effets sur l’économie canadienne? Qu’adviendrait-il de notre industrie si nous adoptions une approche indépendante, si nous nous écartions des États-Unis et acceptions les cibles danoises et suédoises ainsi que des hausses massives d'impôts? Est-ce que cela désavantagerait l’industrie canadienne? Les produits forestiers canadiens peuvent difficilement être isolés du contexte mondial. Si l’économie prospère, votre industrie s’épanouit. Qu’adviendrait-il de notre économie si nous cessions de négocier avec les États-Unis?
La question est presque aussi longue que certaines de mes réponses.
La question de savoir si nous devons agir en toute indépendance, suivre la tendance mondiale ou la politique américaine est en quelque sorte une fausse dichotomie. Il est évident que notre politique doit tenir compte du fait que les États-Unis sont notre principal client. Ce serait une grande erreur de faire des choses qui pourraient leur servir de prétexte pour élever des barrières protectionnistes en invoquant les changements climatiques. Nous devons donc nous méfier de la menace protectionniste américaine, mais aussi tenir compte du fait que nous avons affaire à un marché nord-américain, surtout dans le domaine des produits forestiers. Par conséquent, les systèmes de plafond et d’échanges et les autres mesures devraient être coordonnées dans la mesure du possible.
En même temps, nous ne devons pas être naïfs. La plupart des pays considèrent cela à la fois comme une nécessité réglementaire et environnementale et comme une occasion économique à saisir tout en s’adaptant aux changements climatiques. Je vais vous donner un exemple. La Finlande, qui est à sa façon un pays très brillant, est un chef de file mondial aussi bien pour les produits forestiers que pour les téléphones Nokia. L’approche finlandaise actuelle consiste à avoir une stratégie complète de bioénergie et de bioproduits forestiers afin de faire du pays l’un des premiers producteurs mondiaux de ce nouveau secteur. Les Finlandais ont la politique qu’il faut et aussi le financement nécessaire. Partout en Europe, d’énormes capitaux sont consacrés à l’énergie verte, qui fait maintenant son apparition aux États-Unis avec le U.S. Farm Bill.
Bref, nous ne devons pas perdre de vue que nous sommes dans un marché nord-américain. Nous devons concevoir nos systèmes dans ce contexte. En même temps, il faut se souvenir que nous évoluons aussi dans un marché mondial et que nous devons mettre en place des mesures frontalières ou autres pour éviter de perdre des emplois sans pour autant réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Nous devons en outre veiller à nos propres intérêts et nous demander s’il nous faut une politique destinée à renforcer notre avantage concurrentiel en matière de bioénergie puisque nous avons d’énormes capacités dans ce domaine. Ne serait-ce que dans nos scieries, nous produisons suffisamment de bioénergie pour remplacer trois réacteurs nucléaires. Nous sommes d’énormes producteurs, et nous pouvons en faire davantage. Pour cela, il nous faudrait un peu de créativité européenne pour définir une bonne politique, car nous ne voulons pas simplement l’acheter, une part de sens commercial américain pour trouver les investissements considérables qu’il faudra et une bonne dose d’esprit d’organisation canadien combinant l’intelligence stratégique à un financement par emprunt.
Merci, messieurs, d’avoir comparu devant le comité.
Je voudrais commencer par faire une mise au point en rappelant à tout le monde qu’entre 2002 et 2006, le Canada avait engagé avec les États-Unis un dialogue nord-américain sur l’énergie, auquel les conservateurs ont immédiatement mis fin dès leur arrivée au pouvoir. Ne l’oublions pas.
N’oublions pas non plus les efforts que nous avons déployés pendant 13 ans pour convaincre l’opinion publique et l’opinion mondiale de la réalité du réchauffement de la planète. N’oublions pas le Projet vert et tous les règlements que nous avons adoptés en 2005 et que le présent gouvernement a complètement démantelés à son arrivée.
Cela étant dit, j’ai une observation à formuler. Monsieur Lazar, vous avez parlé de crédits compensatoires. J’aimerais savoir si vous connaissez la position du gouvernement sur les crédits internationaux. Si j’ai bien compris, le gouvernement estime pouvoir atteindre ses cibles sans recourir à des crédits internationaux, contrairement à ce qu’ont dit la semaine dernière la Fondation David Suzuki, l’Institut Pembina et la Banque TD. Pouvez-vous nous dire ce que vous savez à ce sujet?
Monsieur McCabe et madame Cobden, si vous souhaitez nous faire part de votre point de vue, nous en serions très heureux.
La dernière fois que j’en ai entendu parler, le gouvernement donnait l’impression d’envisager le recours aux crédits internationaux. Je crois que vous devriez poser la question au ministre de l’Environnement plutôt qu’aux représentants de l’industrie forestière.
Pour ce qui est du rôle des crédits internationaux, il vaut la peine de noter que 20 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre sont attribuables à la déforestation. L’une des brillantes idées envisagées en prévision de Copenhague consiste à établir un système dans lequel les régions déforestées ou susceptibles de reforestation obtiendraient des crédits des pays industrialisés pour stocker du carbone. Si elle est vraiment envisagée, cette initiative serait à notre avis très avantageuse.
J’ai une chose à ajouter. Nous pourrions faire au Canada une chose qui aurait des incidences internationales. Environ un dixième de l’offre mondiale de bois et de papier vient de sources illicites. À notre connaissance, ceux qui font de l’exploitation forestière illégale ne reviennent pas la nuit pour replanter des arbres. Cela fait de l’exploitation illégale une importante cause de déforestation, qui réduit le rendement économique pour les intervenants responsables du monde. Si nous avions au Canada une politique plus énergique permettant de relier toutes les fibres à des sources légales, nous pourrions contribuer à la compensation de ce qui se produit à l’échelle internationale.
Vous avez parlé de l’engagement du président Obama à financer les efforts américains. Je me demande si vous avez examiné la situation et fait des comparaisons afin de déterminer si le gouvernement a prévu des fonds suffisants pour la lutte contre les changements climatiques.
Il est difficile de comparer parce que le financement américain est très éparpillé. Les Américains vont construire un pont avec du maïs, ils ont inclus certaines mesures dans le Farm Bill, et ainsi de suite. Nous attendons de voir ce qui se passera.
Je crois qu’il est juste de dire, sans trop craindre de se tromper, que le Canada n’a pas choisi de financer la conversion à l’énergie verte aussi vigoureusement que d’autres pays industrialisés. Les efforts déployés dans ce domaine en Europe et aux États-Unis sont sensiblement plus importants. Compte tenu de toutes les difficultés que nous connaissons dans l’industrie forestière — nous avons dit clairement que le gouvernement ne peut pas nous épargner ces difficultés si elles sont attribuables aux marchés —, un financement plus important et plus judicieux permettant d’intégrer la bioénergie et les bioproduits dans l’industrie pourrait changer les caractéristiques économiques de la situation.
Quand on scie du bois, la sciure et les copeaux peuvent servir à produire de la pâte, de l’énergie ou des produits chimiques. Si on dispose de bioraffineries pouvant utiliser ces déchets de l’une de ces trois façons, on peut stabiliser dans une grande mesure le rendement économique. Il est cependant impossible d’y parvenir sans financement parce que l’Europe et les États-Unis sont en concurrence dans ce domaine. Je dirais en fait que nous sommes passés d’une ère de concurrence mondiale à une ère de concurrence entre pays. Dans l’industrie forestière et le secteur de la bioénergie, nous avons davantage affaire à une concurrence entre pays qu’entre sociétés à cause de l’importance des interventions gouvernementales.
Puisque M. Valeriote a commencé par une mise au point, je vais le faire aussi en rappelant que sous l’ancien gouvernement libéral, les émissions canadiennes de carbone ont augmenté de 35 p. 100 au-dessus des cibles de Kyoto. M. Valeriote aurait bien voulu que les libéraux restent plus longtemps au pouvoir pour redresser la situation. Malheureusement, l’histoire a suivi un cours différent.
Je vais aussi faire la même chose que M. McGuinty en demandant à chacun des témoins s’ils connaissent le plan du gouvernement intitulé Prendre le virage, qui vise à réduire les émissions canadiennes de 20 p. 100 d’ici 2020 par rapport aux niveaux de 2006. Connaissez-vous ce plan, monsieur Lazar et monsieur McCabe?
Monsieur McCabe, j’aimerais que vous nous parliez un peu des crédits compensatoires. Je vais commencer par vous demander si vous avez fait des recherches ou si vous connaissez les propositions américaines relatives aux crédits et subventions dont l’agriculture des États-Unis pourrait profiter.
Je suis au courant des discussions concernant le projet de loi Waxman-Markey et la Western Climate Initiative, qui regroupe sept États de l’Ouest et qui tient compte des crédits agricoles. La Colombie-Britannique, l’Ontario, le Québec et le Manitoba participent également aux discussions qui ont lieu dans le cadre de cette initiative.
D’accord. Pouvez-vous me dire quelles seraient les conséquences si les crédits compensatoires prévus dans le plan américain étaient plus généreux pour l’agriculture américaine que les crédits auxquels nous pourrions aboutir au Canada?
Je dirais que nous vivons déjà ce rêve, ou plutôt ce cauchemar, de ce côté-ci de la frontière parce que le système de crédits compensatoires dont nous avons besoin au Canada devrait tenir compte de l’action précoce et de ce qui se passe actuellement. J’ai déjà parlé dans mon témoignage de ce qui se passe en Alberta. Je peux donc établir tout de suite un parallèle entre le soutien dont bénéficie en ce moment l’agriculteur américain de la part de son gouvernement et l’insuffisance criante des programmes de soutien que nous avons actuellement au Canada.
Je sais que nous ne nous orientons pas nécessairement dans cette direction en matière de crédits compensatoires, mais il n’y a pas de doute que j’opterais pour la Chambre de commerce de Chicago, comme tous les agriculteurs canadiens. On peut bien passer par Winnipeg, mais tout revient à Chicago. Nous ne pouvons pas nous permettre de continuer à faire abstraction du secteur primaire qui donne à manger à tout le monde.
En d’autres termes, puis-je dire que nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir un système de crédits compensatoires qui ne soit pas hautement harmonisé avec celui des États-Unis, au moins dans le cas de l’agriculture?
Permettez-moi de dire les choses clairement, monsieur. Les Américains ont peut-être des subventions, mais au Canada, c’est du soutien. Si vous soutenez un agriculteur canadien, il appuiera à son tour l’économie locale et vous récupérerez très rapidement tout ce que vous aurez déboursé.
Ainsi, si le plan américain de lutte contre les changements climatiques comprend des subventions ou des compensations massives qui profitent à l’agriculture américaine, et que le plan canadien ne contient rien de comparable, ne risquons-nous pas d’avoir de sérieux problèmes dans le secteur agricole canadien?
Permettez-moi d’être clair. Le 6 octobre 2009, je crois, le ministre Prentice a prononcé un discours devant le Conseil canadien des chefs d’entreprise. Il a dit alors que l’intégration économique nord-américaine imposait l’harmonisation, que le Canada établirait son propre marché de plafonds et d’échanges et que son gouvernement prendrait progressivement des mesures alignées sur le développement du système envisagé aux États-Unis. C’est pour cette raison que le Conseil canadien sur la conservation des sols est membre du groupe provincial des crédits compensatoires et collabore avec des entreprises telles que TransAlta, Shell, etc. Nous participons actuellement à un appel de conférence. Nous examinons la proposition d’un groupe de travail nord-américain parce que le 49e parallèle n’a vraiment de l’importance que pour les cartographes, qui ont besoin de savoir où le tracer. Les glaciers, eux, n’en tiennent pas compte.
Je remercie nos deux témoins de comparaître aujourd'hui. Je crois important de parler des forêts et de l'agriculture.
Monsieur McCabe, au Québec, l'agriculture est responsable de 9 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre, et j'imagine que le pourcentage est à peu près le même en Ontario. Les gaz à effet de serre causés par l'agriculture représentent donc un gros morceau. Si vous aviez l'appui voulu... On s'entend pour dire que cet appui créerait de nouveaux emplois. Si vous aviez plus de digesteurs, et une meilleure gérance des fumiers et de la biomasse qui produit les gaz à effet de serre sur les terres, vous pourriez le faire.
Avec un appui adéquat, pourriez-vous atteindre les objectifs du projet de loi C-311 actuellement sur la table? Selon ce projet de loi, les réductions devraient atteindre 25 p. 100 en 2020 et 80 p. 100 en 2050, en prenant 1990 pour année de référence.
Pour être parfaitement clair, monsieur, je dirais que ma définition d’un appui adéquat comprendrait d’abord et avant tout une politique appropriée, qui me permette de savoir à partir de quels points de référence je peux travailler. Cette politique donnera lieu à d’autres initiatives sur lesquelles nous nous appuierons pour atteindre les cibles que vous proposez dans ce projet de loi. Pour réaliser ces cibles dans le secteur agricole, il faut que le secteur reste non réglementé à cause de sa nature biologique.
Si vous voulez vraiment atteindre ces cibles, commencez par reconnaître ce que nous avons déjà fait au nom de la population du Canada et du monde dans les secteurs de l’agriculture et des forêts, car nous sommes depuis longtemps des pionniers dans ce domaine. Nous disposons de processus qui nous permettent d’aller plus loin. Dans ce contexte, nous devons considérer la question des crédits cumulables. Si je réduis le carbone en le stockant dans le sol, je peux vous offrir deux plus grands avantages environnementaux plus tard. En utilisant un digesteur anaérobie, je détruis du méthane, mais je réduis aussi les effets du combustible qu’il aurait fallu utiliser pour débarrasser les champs des déchets animaux. J’ai donc transformé des déchets en matières premières. C’est la base de ce que l’agriculture peut faire dans le cadre de cette initiative pour contribuer à atteindre les cibles.
Mais nous ne pouvons plus tolérer davantage de règlements. Nous avons juste besoin d’orientations claires qui nous récompensent pour ce que nous avons fait dans le passé et pour ce que nous ferons à l’avenir.
Par le passé, l'absence de réglementation a considérablement appauvri les agriculteurs; tout le monde le sait. M. Lazar a une idée très claire des réductions de gaz à effet de serre dans le secteur de la foresterie. Depuis 1990, de quel ordre sont les réductions de gaz à effet de serre dans le secteur canadien de l'agriculture?
Je crois qu’une vérification de l’inventaire national d’Environnement Canada montrera que nous nous sommes plus ou moins maintenus au chapitre des émissions un peu partout dans le pays. Je vous ferai cependant remarquer que nous avons produit davantage en gardant le même niveau d’émissions. Il s’agit donc d’une cible d’intensité qui, je le sais, est sujette à controverse. Il n’en reste pas moins que l’agriculture, une fois de plus, a été à l’avant-garde de la recherche de moyens de réduire les émissions. Toutefois, à défaut d’un appui adéquat, nous courrons le risque de perdre une partie de ces gains parce que nous aurons des sols moins préparés qu’il faudra peut-être travailler davantage à l’avenir pour les fertiliser. Comme nous avons subi des hausses rapides des coûts dans certains domaines, les agriculteurs vont peut-être devoir faire des choses qu’ils n’avaient jamais envisagées auparavant.
D'après une source ici, entre 1990 et 2004, il y a eu une augmentation des GES dans le domaine de l'agriculture dans l'ensemble du Canada, ce qui inclut une augmentation de l'usage d'engrais de 23 p. 100.
Monsieur Lazar, j'aimerais vous poser une question qui me vient du Conseil canadien des chefs d'entreprise, dont vous faites partie puisque vous produisez beaucoup de bois. Je cite:
Même si des cibles d’intensité constituent un moyen sensé d’encourager les entreprises canadiennes à améliorer leur efficacité énergétique sans être pénalisées pour leur croissance, la finalité doit être de produire une réduction absolue d’importance des émissions de GES au Canada [...].
Êtes-vous d'accord que les cibles d'intensité ne peuvent pas répondre à une aussi grande structure que celle du bois et que des cibles absolues sont nécessaires?
En principe, nous pouvons arriver à nos fins aussi bien avec des cibles d’intensité qu’avec des cibles absolues. Cela dépend de leur importance. Ainsi, si nous avons une cible d’intensité très contraignante, nous réaliserons des réductions absolues. Bien sûr, si nous avons une cible absolue, nous aurons une réduction absolue. La différence est dans les effets: les cibles d’intensité laissent plus de marge de manœuvre aux secteurs en croissance, tandis que les cibles absolues en laissent davantage aux secteurs qui ne croissent pas. Les deux peuvent nous permettre d’atteindre le même but si elles sont correctement appliquées. On peut donc réaliser des réductions absolues si on a une intensité suffisante. En principe, il n’y a pas de différence. Les effets sur ceux qui paient le changement sont différents, mais nous pouvons accepter les unes ou les autres. Nos réductions sont assez proches qu’on parle d’intensité ou de chiffres absolus. Elles sont peut-être un peu plus importantes en fonction de cibles intensité.
Je remercie les témoins d’être venus au comité aujourd’hui.
Monsieur McCabe, vous avez dit dans votre déclaration préliminaire que, d’une façon générale, le secteur agricole s’est plus ou moins maintenu depuis 1990 au chapitre des émissions de gaz à effet de serre. Pouvez-vous nous dire ce que cela signifie exactement en vous servant de 1990 comme année de référence? Le secteur est-il resté au même niveau? Est-il allé au-delà ou en deçà du niveau de 1990? Vous avez parlé d’action précoce et de ce que vous avez fait dans le passé. J’aimerais savoir où exactement vous situez votre secteur en ce moment.
Le comité peut se reporter à l’inventaire national pour trouver les chiffres absolus parce que je ne les ai pas devant moi aujourd’hui.
Personnellement, j’ai l’impression que nous nous sommes maintenus. Contrairement à ce que vient de dire un membre du comité, qui a parlé d’une augmentation de 23 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2004, je soutiens que cela n’est possible que si on considère strictement les émissions d’oxyde de diazote. Toutefois, si on examine l’ensemble du dioxyde de carbone séquestré dans les sols et les réductions du méthane provenant du bétail, cela pourrait expliquer une éventuelle augmentation de l’oxyde de diazote. Quoi qu’il en soit, en considérant le tableau d’ensemble, je dirais que l’agriculture se maintient ou qu’elle est en baisse.
J’aimerais avoir l’occasion de contribuer à la réalisation de l’objectif, une fois qu’il aura été définitivement fixé, c’est-à-dire clairement défini, de façon à permettre à l’agriculture d’offrir des crédits compensatoires. Nous pourrons alors mettre en place un mécanisme de marché permettant d’atteindre la cible et de mettre des fonds entre les mains des producteurs. L’Alberta est un parfait exemple de projet pilote.
Excusez-moi, monsieur McCabe, mais nous tenons des audiences au sujet d’un projet de loi prescrivant une cible précise de 25 p. 100 en deçà des niveaux de 1990 d’ici 2020.
Vous avez dit que vous voulez une bonne politique. Est-ce un bon point de départ pour une telle politique? Est-ce que votre secteur veut aller à 25 p. 100 en deçà de 1990 ou bien souhaite-t-il avoir une cible différente?
Si je ne suis pas réglementé et que cette cible n’a donc pas d’incidences directes sur moi, il m’est très facile de faire ce genre d’affirmation.
Toutefois, je vous dirai directement que si vous réglementez les autres secteurs, je vais m’en ressentir. Par conséquent, si vous m’offrez une politique qui reconnaisse ce que j’ai fait, je vais certainement pouvoir réaliser des réductions quel que soit le niveau de départ.
Je ne peux pas vous répondre directement par un oui ou un non, monsieur, parce que je n’ai pas suffisamment de connaissances pour le faire. Je crois par ailleurs qu’il existe de nombreux modèles informatiques avec lesquels on peut jouer, puis inviter quelqu’un qui n’a aucun lien avec la société naturelle dans laquelle je travaille et qui pourra pondre un article sur le sujet pour Radio-Canada ou un autre média.
Permettez-moi, pour conclure, de résumer le point de vue du secteur agricole: Vous avez l’impression d’être trop réglementés et de ne pas avoir été adéquatement indemnisés pour tous les changements qu’on a demandé au secteur de faire par voie réglementaire ces dernières années. C’est bien cela?
C’est un énoncé qui s’applique probablement d’une façon très générale, et pas nécessairement dans le cadre de la question particulière que nous examinons. Pour le moment, nous avons juste besoin de règles du jeu raisonnables pour qu’il nous soit possible de savoir vers qui nous tourner pour offrir aux Canadiens ce que nous pouvons faire.
Monsieur Lazar, je crois que M. Warawa a mentionné le témoignage antérieur de M. Drexhage, qui avait parlé des changements à faire lorsqu’on lui a demandé si le Canada devait suivre l’exemple de la Suède ou du Danemark.
Vous avez mentionné la Finlande en parlant de votre secteur. Dans quelle mesure l’économie finlandaise est-elle semblable à la nôtre, d’une façon très générale, parce qu’il est évident que nous devons aller au-delà de votre secteur particulier? La comparaison est-elle raisonnable? Je crois que M. Warawa voulait savoir si nous devons suivre davantage l’exemple du Danemark ou de la Suède. Je ne crois pas que nos économies soient semblables au départ. Il s’agit donc de savoir où nous voulons arriver et quel chemin nous devons suivre à cette fin.
Ai-je bien compris que dans le processus de détermination du but que doit viser le Canada, vous avez tendance à considérer que votre secteur doit peut-être se situer au-dessus d’autres secteurs? Je crois qu’il est raisonnable de poser cette question. Vous demandez au gouvernement de prendre certaines décisions stratégiques. Ces décisions feront des gagnants et des perdants. Pour atteindre le but visé, il faut commencer par comprendre la nature exacte de l’économie.
Je ne sais pas si je me suis expliqué assez clairement, mais j’aimerais savoir ce que vous en pensez.
Nous ne nous attendons pas à ce que notre secteur s’en sorte mieux que les autres. Nous voulons juste essayer de garder les emplois que nous avons dans le Canada rural. Si vous voulez parler des compromis entre, mettons, le secteur du pétrole et du gaz et le secteur forestier, nous ne voulons pas être désavantagés au profit du secteur pétrolier. Nous voulons être sûrs que les mesures prises tiendront compte de notre position.
Lorsque j’ai parlé de la Finlande, je ne voulais pas dire que nous devrions restructurer notre économie sur le même modèle. Nous ne pouvons pas le faire et ne le ferons pas, mais nous aurions intérêt à tirer des leçons de l’expérience des joueurs intelligents. Nous ne devrions pas nous engager dans cette aventure comme des intervenants naïfs. Veillons plutôt à nos propres intérêts comme pays. Réduisons nos émissions de gaz à effet de serre, et faisons-le d’une manière responsable et énergique. En même temps, reconnaissons que cela crée un marché mondial dirigé par des politiques ayant d’énormes répercussions sur les emplois des Canadiens. À part le régime réglementaire, nous voulons voir une politique tenant compte des secteurs où se trouvent les emplois et intégrant l’emploi futur dans la planification envisagée. Nous croyons que la Finlande a fait ce qu’il faut à cet égard.
Monsieur Lazar, penchons-nous sur la réalité de l'industrie des pâtes et papier. Comme vous le savez, il y a quelques usines dans ma circonscription, même si, en fin de compte, il n'en reste que deux. On a perdu une usine de Bowater dans la région de Dalhousie. Chez nous, Papiers Fraser est bon un exemple de compagnie qui a fait des modifications sur le plan environnemental en ayant recours à de l'énergie verte. Il y a donc une tendance à regarder vers l'avenir, vers l'énergie renouvelable.
Croyez-vous que le gouvernement devrait axer davantage son aide financière directe aux usines qui sont prêtes à avoir recours à la bioénergie ou à une cogénératrice alimentée par des résidus de la forêt? En effet, on peut utiliser du bois et en faire des copeaux pour les brûler, mais on peut aussi prendre des résidus, qui ne sont pas utilisés, directement dans la forêt.
Votre industrie tente-t-elle d'aller dans cette direction et de prendre un tournant vert, mais en collaboration avec le gouvernement?
Il est absolument essentiel que le gouvernement travaille avec nous pour effectuer ces changements, ces transformations. Nous préférerions qu'il existe un marché global où seules les entreprises privées se feraient concurrence. Or c'est un rêve, cela n'existe pas. En Europe comme aux États-Unis, le gouvernement s'implique toujours dans ces transformations. Si on veut sauvegarder des emplois ici, si on veut faire partie du match, on a besoin de l'aide du gouvernement. Une chose est très intéressante: nous avons fait une étude qui démontre que le futur de la bioénergie au Canada impliquera les entreprises, les infrastructures et les usines actuelles.
(1225)
[Traduction]
On ne peut pas construire une usine de bioénergie utilisant les déchets forestiers comme matière première et espérer en tirer un bénéfice si elle est indépendante. Elle doit être intégrée. Il y aura sept fois plus d’emplois si elle est intégrée dans le monde existant du bois, des pâtes et papiers et des produits forestiers que si elle est indépendante. De plus, son empreinte écologique est bien plus petite si elle est intégrée.
[Français]
Il existe véritablement une voie pour sauvegarder les postes ici et améliorer notre rendement environnemental. Cela dépend d'un investissement du gouvernement dans ce domaine qui, au moins, corresponde à ce que les autres gouvernements font.
Je suis content, monsieur Lazar, de votre commentaire. Parfois, on dit que le gouvernement américain n'est pas proactif, mais à cet égard, sur certains éléments, il l'a été beaucoup plus que le gouvernement canadien. Prenons simplement l'exemple de la liqueur noire et de la liqueur rouge, les résidus. Le gouvernement américain a établi que les compagnies pouvaient recevoir une subvention directe pour être en mesure de baisser un peu leurs coûts de production. Le problème pour nous, au Canada, est que nos propres usines n'étaient pas en mesure de faire concurrence aux autres usines, d'égales à égales .
Le gouvernement crée un programme pour fournir de l'argent, mais à certaines conditions. Au bout du compte, la condition ultime est qu'il faut que les papetières puissent avoir des sous pour faire leurs rénovations ou faire des améliorations environnementales. On dirait que c'est toujours la responsabilité de l'industrie de faire les modifications. Si elle a les moyens de le faire, le gouvernement l'aidera peut-être. Il devrait plutôt être proactif et demander comment il pourrait faire pour aider l'industrie, pour s'assurer qu'elle soit plus verte, pour s'assurer qu'on puisse conserver ces emplois et que cela devienne les emplois de demain, les emplois d'une économie plus verte, tout en produisant dans un secteur traditionnel, même si ce sont les pâtes et papier, même si c'est l'industrie forestière. C'est une industrie traditionnelle, mais on se dirige vers une industrie verte.
Oui, le fameux black liquor subsidy aux États-Unis est la réponse du gouvernement, réponse dont nous sommes bien reconnaissants.
[Traduction]
Nous avions besoin de ce milliard. Nous aimerions bien que des montagnes d’argent sont livrées à notre porte, mais avoir des fonds à investir dans nos installations est vraiment très utile. Je ne peux pas le nier. Bref, s’il faut continuellement attendre pour voir ce que les États-Unis feront, puis réagir au moyen d’un programme un peu moins généreux ou un peu...
[Français]
Ce dont nous avons besoin, c'est une politique canadienne pour la transformation de notre industrie.
[Traduction]
Pas de l’industrie de la pâte, mais de l’industrie de la pâte, de l’énergie et des bioproduits.
[Français]
Nous avons des politiques, mais il faut aussi le funding to get it done.
Je remercie nos deux témoins de leur présence cet après-midi, de leurs exposés et de leur témoignage.
Monsieur Lazar, j’ai quelques questions à vous poser.
Il est clair que vous avez réalisé des progrès remarquables dans votre industrie sur le plan du traitement, de la réduction de votre empreinte écologique et de vos émissions de gaz à effet de serre. Dans une perspective de pratiques exemplaires, je suis curieux de savoir si vous avez envisagé de faire en sorte que d’autres secteurs de l’économie suivent votre exemple. Avez-vous eu des discussions? Avez-vous des propositions à présenter?
Il n’y a pas de doute qu’on examine partout dans l’économie la possibilité d’utiliser des biocarburants à base de déchets. Une grande partie de l’industrie des biocarburants a souffert un peu de l’absence d’une comptabilité détaillée de la production de gaz à effet de serre. Si vous plantez des céréales, les récoltez, les portez à une entreprise de transformation pour produire de l’éthanol et ne comptez pas les gaz à effet de serre découlant de toutes ces opérations — cela est permis dans le Protocole de Kyoto et je ne critique donc personne —, l’empreinte écologique globale n’est pas aussi positive.
Nos biocarburants sont en fait à base de déchets. La production de gaz à effet de serre est très petite. Vous verrez, par exemple, que la combustion du méthane capturé dans le secteur agricole relève exactement du même concept. Il s’agit d’utiliser une chose qui constitue un déchet au départ, sans compter que le méthane est 27 fois plus nocif que le dioxyde de carbone. Et ce déchet est substitué à des combustibles fossiles.
Pour être juste — et cela s’applique à toute l’économie —, je dirai que c’est difficile. Je ne prétends pas du tout qu’il suffit d’appuyer sur un bouton pour que tout devienne vert. On ne peut pas simplement prêter le serment des scouts pour être en mesure de transformer une économie qui dépend des gaz à effet de serre en une économie exempte d’émissions. Nous tâtonnons tous. Nous essayons tous de trouver des moyens de le faire. Dans un débat, il est facile d’affirmer soit que la tâche est très facile soit qu’elle est impossible. En réalité, tous les secteurs cherchent des moyens. Parfois, c’est facile et parfois, c’est difficile.
Je suis curieux de connaître votre réponse à cette question. Pour dire les choses simplement, la déforestation contribue aux changements climatiques et augmente les émissions de gaz à effet de serre. Vos procédés sont très respectueux de l’environnement et très durables. Comment pouvez-vous les étendre au problème de la déforestation? Quelles sortes de pratiques durables de reforestation employez-vous? Comment faites-vous pour longer le bord de ce précipice?
Nous ne longeons pas du tout le bord. Nous restons en plein milieu du sentier. La déforestation contribue énormément aux émissions de gaz à effet de serre.
Je dois reconnaître que le plus gros de la déforestation résulte de l’exploitation de la terre et non des forêts. Les gens déboisent pour cultiver la terre et donner à manger à leur famille dans les pays en développement. Cela étant dit, au Canada, nous remplaçons chaque arbre que nous abattons. Les Nations Unies ont récemment réalisé une étude qui a conclu que la déforestation résultant de l’activité du secteur forestier canadien a une valeur nette nulle. Je crois que ce n’est pas tout à fait exact. Nous avons un peu de déforestation parce que les routes ne sont pas toujours construites aussi rapidement qu’elles le devraient, mais ce n’est en pratique qu’une erreur attribuable à l’arrondissage des chiffres.
Les régimes canadiens sont avantagés, du moins en partie, par le fait qu’ils relèvent des gouvernements provinciaux et que la loi nous impose la reforestation. Nous avons obtenu d’excellents résultats jusqu’ici. Il y a lieu de rappeler que nous avons encore au Canada 91 p. 100 de nos forêts d’origine après des siècles d’exploitation forestière. Nous ne récoltons chaque année que moins de 0,25 p. 100 de nos forêts.
D’une certaine façon, on peut dire que la reforestation n’est qu’un strict minimum. Nous sommes actuellement tenus responsables non seulement de la régénération des forêts, mais aussi de l’intégrité de l’écosystème forestier, une fois qu’il s’est rétabli. Y a-t-il eu de l’érosion? Y a-t-il des effets sur des espèces menacées? L’écosystème forestier maintient-il suffisamment son intégrité, non seulement comme lieu de stockage du carbone, mais aussi comme siège de la biodiversité? Les exigences qui nous sont imposées vont très sensiblement plus loin que la simple régénération de la forêt.
Monsieur McCabe, je vais peut-être vous poser ma dernière question. Vous avez dit très clairement que vous aimeriez voir le secteur agricole participer à un régime de plafonds et d’échanges en fournissant ou en vendant des crédits compensatoires. Si j’ai bien compris, vous avez parlé d’un modèle ou d’un exemple en Alberta. Pouvez-vous nous en dire davantage sur ce modèle ou cet exemple?
Permettez-moi d’abord de réfuter une chose que vient de dire mon excellent collègue du secteur forestier. En agriculture, nous n’avons pas de déchets. Nous avons seulement des occasions sous-utilisées et trop peu payées. Il en est de même dans son secteur.
Pour revenir à l’Alberta, je crois que la province a adopté des mesures législatives par réaction afin d’avancer. Ces mesures sont entrées en vigueur le 1er juillet 2007 pour les entreprises dont les émissions annuelles dépassent 100 000 tonnes de gaz à effet de serre. Le système permet de se conformer en réalisant des réductions internes, en effectuant des paiements de 15 $ la tonne à un fonds technologique et en recourant à des crédits compensatoires. Dans ce dernier domaine en particulier, l’Alberta a, comme je l’ai déjà mentionné, accumulé 7 millions de tonnes de crédits dans le cadre de protocoles reconnus dans le système provincial.
Heureusement, l’agriculture a pu faire reconnaître assez rapidement le travail limité des sols. D’autres examens sont actuellement en cours en vue d’établir un protocole de réduction de l’oxyde de diazote. Il y aura des protocoles relatifs à l’alimentation des bovins, aux digesteurs anaérobies et ainsi de suite. Ce sont là les initiatives prises en Alberta. La province a en fait copié du travail qui avait été fait à l’échelle nationale. Maintenant, c’est le système fédéral qui essaie de copier ce que fait l’Alberta dans le domaine des protocoles en discussion dans le cadre des documents d’orientation sur les crédits compensatoires. Des consultations viennent de se terminer récemment avec le gouvernement fédéral. Nous sommes impatients de voir où cela nous mènera.
Je vous remercie. La discussion a été très, très intéressante jusqu’ici.
Je voudrais parler en particulier des difficultés particulières du Canada.
Monsieur Lazar, vous avez dit qu’il est difficile de réduire les émissions de gaz à effet de serre parce que le Canada est un pays exportateur. L’aspect particulier du Canada, c’est que notre population croît, par opposition à l’Europe où la croissance démographique est moindre. Notre population augmente rapidement, surtout à cause de l’immigration, ce qui fait que nous avons chaque année plus de monde dans le pays. De plus, nous exportons beaucoup, surtout aux États-Unis, et nous essayons de diversifier en signant de nouveaux accords commerciaux.
Quelles sont les difficultés particulières qui nous distinguent de l’Europe? L’Europe doit fixer des cibles avec une population relativement stable et sans exporter, tandis que le Canada exporte et a une population croissante, n’est-ce pas? Est-ce que cela fait partie des caractéristiques particulières du Canada qui font qu’il lui est difficile d’accepter les cibles européennes?
Je ne vais pas parler des cibles européennes. Parlons plutôt des risques, car il y en a des deux côtés.
Supposons que le Canada adopte un régime très rigoureux qui n’est pas institué ailleurs. Le résultat, c’est que nous exporterons nos emplois sans agir sur les changements climatiques. Ce n’est pas bon. Il serait donc utile qu’à titre de pays exportateur, nous tenions compte de ce facteur. En même temps, si nous ne faisons rien tandis que nos clients agissent, ils n’accepteront plus nos produits. Je dirais qu’il serait très risqué pour nous de ne pas prendre de mesures adéquates au sujet des émissions de gaz à effet de serre. L’Europe et les États-Unis nous imposeraient des barrières à l’importation parce qu’ils ne voudront pas que leurs emplois disparaissent par suite de leur action en faveur de l’environnement. Par conséquent, je crois que tout pays qui tient compte des conséquences économiques en agissant tôt et fort se sentira obligé de prendre des mesures pour éviter que ses travailleurs n’en paient le prix parce que les autres pays n’agissent pas d’une manière aussi responsable.
Je vais vous interrompre là. Vous avez pris deux exemples pour illustrer les deux extrêmes: d’une part, prendre des mesures très dangereuses pour l’économie canadienne et perdre des emplois en faisant des choix extrêmes — c’est le cas du projet de loi C-311, je crois — et, d’autre part, ne rien faire du tout. En fait, le Canada, en participant au dialogue sur l’énergie propre, progresse vers une approche harmonisée. Nous avons fixé une cible de 20 p. 100 d’ici 2020. Les États-Unis adoptent des cibles très semblables. Dans cet exemple, nous ne perdrions pas d’emplois en faveur des États-Unis et, comme il s’agirait d’une approche harmonisée, la lutte contre les changements climatiques se ferait au moyen d’une cible nord-américaine.
Nous serions certainement très heureux d’une harmonisation des cibles en Amérique du Nord. Toutefois, nous ne pouvons pas nous occuper uniquement des États-Unis. Il y a aussi l’Europe et les pays qui ne figurent pas à l’Annexe I.
Ne prétendons pas que c’est une simple question de politique. Il est facile de fixer une cible, mais c’est en fait les mesures de mise en œuvre qui font toute la différence tant sur le plan des effets réels sur le climat que sur le plan économique.
J’ai une dernière petite question à poser. Savez-vous que le Canada s’est engagé à ce que 90 p. 100 de son électricité vienne de sources renouvelables propres d’ici 2020?
Avant de passer au dernier tour, j’ai moi-même quelques questions à poser.
Je suis heureux d’entendre des témoins de deux organisations qui représentent le secteur primaire de l’économie canadienne. Vous avez évoqué une nouvelle source de revenus provenant des biocarburants ou de l’utilisation de la biomasse pour remplacer peut-être le charbon dans des centrales thermiques. Vous avez aussi abordé le domaine des puits de carbone.
On a beaucoup parlé de plafonds et d’échanges avec compensation et d’une taxe sur le carbone. Un rapport conjoint de l’Institut Pembina et de la Fondation David Suzuki mentionne les deux possibilités. J’ai cru comprendre que vos organisations préfèrent un système de plafonds et d’échanges avec compensation à une taxe directe sur le carbone. Est-ce exact?
Non. À notre avis, si on se limite à un système de plafonds et d’échanges, on manquera d’innombrables émissions. Permettez-moi de vous donner un exemple tiré de l’industrie forestière. Dans un système de plafonds et d’échanges, le seul endroit où vous puissiez nous toucher serait dans les scieries. Cela voudrait dire que vous feriez abstraction des émissions de nos camions, de nos décharges contrôlées, de nos produits, etc. Nous croyons au système de plafonds et d’échanges, mais nous croyons aussi qu’il faut une taxe sur le carbone pour tenir compte des sources non ponctuelles.
Est-ce que nous accepterions un système de plafonds et d’échanges et une taxe sur le carbone? La réponse est oui, si c’est fait intelligemment et que les détails sont bien conçus. Il y a des systèmes de plafonds et d’échanges que nous trouverions totalement inacceptable et d’autres que nous pourrions juger acceptables. Il en va de même pour la taxe sur le carbone. Toutes ces alternatives ne sont pas très simples.
Dans ces conditions, lequel des deux systèmes aurait les effets les plus importants sur le prix des intrants dans vos secteurs? En agriculture, et même en foresterie, la récolte coûte très cher. Les prix du carburant monteront, et peut-être aussi les prix de l’électricité, très certainement le prix des engrais, surtout en ce qui concerne l’azote. Par conséquent, lequel des deux systèmes a les plus grands effets?
Cela dépend de la façon dont c’est fait. J’aurais bien voulu pouvoir vous répondre. Vous pourriez appliquer un système de plafonds et d’échanges tellement rigoureux que nous ne pourrions plus exporter. Vous pourriez imposer une taxe sur le carbone tellement élevée que nous n’aurions plus la possibilité de rien vendre. Vous pourriez aussi avoir une combinaison des deux systèmes qui permette l’adaptation économique.
Vous n’avez pas décidé si le prix du carbone devrait s’établir à 50 $ ou à 100 $ la tonne. Où se situe le point d’équilibre? C’est l’une des questions que je me pose.
Le montant de la taxe sur le carbone doit être fixé par le gouvernement. Souhaitons-nous payer cette taxe? Non. Souhaitons-nous avoir des plafonds? Non. Souhaitons-nous que chacun fasse quelque chose pour lutter contre les changements climatiques? Oui.
Ensuite, quand on en vient aux détails, une petite chose par ci et une autre par là peuvent tout changer. On parle de plafonds et d'échanges. D’accord, mais si 2010 est l’année de référence, nous ne serons pas heureux. Si c’est 1990, nous sommes prêts à prendre le départ. Les détails sont tellement importants qu’il est difficile de juger. C’est un peu comme si vous me demandiez si un tournevis est meilleur qu’un marteau. Cela dépend où et à quelle fin.
Nous savons par ailleurs qu’un système de plafonds et d’échanges s’appliquant aux émissions ponctuelles place tout le fardeau sur une partie de l’économie, tandis qu’une taxe sur le carbone répartit mieux les effets. Il m’est difficile de voir comment nous pouvons réussir sans recourir dans une certaine mesure aux deux systèmes.
Monsieur McCabe, vous avez parlé de crédits compensatoires et de la nécessité d’en avoir parallèlement à un système de plafonds et d’échanges. Ces crédits seraient-ils générés par des sources gouvernementales ou viendraient-ils du marché dans le cadre d’échanges de carbone?
Je crois que nous pouvons prendre l’exemple de l’Alberta où les crédits compensatoires ont été produits par le secteur privé par suite de l’adoption d’un règlement imposant des réductions à certaines industries. Le gouvernement étant à la recherche de crédits, le secteur privé a répondu à la demande.
Le Groupe d’expert intergouvernemental sur l’évolution du climat a dit dans ses dernières études que si le prix américain des émissions de dioxyde de carbone s’élevait à 20 $ la tonne, les secteurs agricole et forestier pourraient assurer une atténuation totale de 21 p. 100. À 100 $ la tonne, prix que je trouve vraiment excessif, l’atténuation pourrait atteindre 45 p. 100.
Cela nous ramène à ce qu’a dit mon collègue. Nous avons besoin de connaître beaucoup de détails pour être en mesure de donner une réponse complète à votre question directe. En principe, cependant, je souhaiterais pour l’agriculture un système de plafonds et d’échanges avec compensation. Je sais en effet que l’agriculture aura à faire face à des hausses si le gouvernement réglemente les sources ponctuelles déjà définies dans les plans fédéraux antérieurs depuis la signature du Protocole de Kyoto. Nous ne sommes pas en mesure de supporter des hausses. Nous avons besoin d’un système de crédits compensatoires pour pouvoir faire volontairement notre part. Une taxe sur le carbone serait très simple à administrer et à percevoir. Toutefois, elle réduirait les perspectives de l’agriculture parce que nous n’avons pas suffisamment de marge de manœuvre pour la transmettre à nos clients.
C’était l’objet de ma question suivante. À titre de producteur primaire, vous n’avez pas la possibilité de faire payer la taxe à vos clients parce que c’est le marché qui fixe le prix de vos produits.
Nous nous apprêtons à aller à Copenhague. Beaucoup de gens disent du C-311 que c'est le projet de loi de Copenhague. Nous avons entendu quelques membres du comité parler de la nécessité d’harmoniser notre action avec celle des États-Unis, mais M. Lazar a précisé que nous avons affaire à un problème mondial qui nécessite une politique mondiale. Certains disent que les pays en développement n’ont pas à accepter tout de suite les mêmes normes que le monde industrialisé.
Si le Canada, les États-Unis et l’Europe adoptent des politiques sur le carbone et réduisent leurs émissions tandis que des pays comme la Chine et l’Inde ne font rien, qu’arrivera-t-il à la production alimentaire et aux fournisseurs d’aliments du Canada si nous n’avons pas des règles du jeu équitables dans nos relations avec ces pays?
Le Canada est essentiellement un pays exportateur de produits alimentaires et d’autres biens. Ce que je ne peux pas supporter, ce sont de nouvelles hausses de mes coûts sans contrepartie possible. Quant à ce que la Chine et l’Inde choisiront de faire au niveau politique, la conférence de Copenhague répondra à cette question.
J’ai fini de planter mon soja le 24 mai, puis j’ai pris l’avion pour Copenhague le 25 mai pour participer à des négociations avec d’autres pays et savoir où nous en sommes. En fin de compte, tous les agriculteurs du monde font la même chose: nous sommes des gestionnaires de carbone et d’azote. Nous voulons des politiques claires car, quand je rentrerai chez moi, il sera égal à mon soja que le dioxyde de carbone qu’il absorbe vienne de ma Chevrolet ou d’une mine de charbon à Shanghai.
En définitive, les cibles seront définies. Le Canada est bien placé pour offrir tout de suite des technologies et des capacités. Nous devons bien nous préparer pour montrer au monde ce que nous savons faire. Nous ne pouvons pas nous permettre de manquer cette occasion parce que le secteur primaire perd toujours plus s’il ne peut pas se prévaloir d’une politique adéquate.
Merci, monsieur le président. Je vous remercie aussi pour avoir ouvert le sujet de Copenhague, quoique je conteste certaines de vos affirmations qui me rappellent un peu trop celles du Parti républicain des États-Unis. En fait, le premier ministre a répété ces affirmations pendant 10 ans avant de découvrir que la science du changement climatique a abouti à des conclusions plutôt effrayantes.
Messieurs McCabe et Lazar, maintenant que nous avons ouvert la porte sur Copenhague, je voudrais vous poser quelques questions pointues. Que dit actuellement le Canada au sujet de l’utilisation de crédits internationaux à Copenhague et ailleurs dans le monde?
Monsieur McCabe, vous étiez là. Pouvez-vous nous renseigner très rapidement? Que disons-nous en sujet de l’utilisation de crédits internationaux?
À ma connaissance, le Canada limiterait la quantité de crédits internationaux qui serait permise à des fins de conformité dans le cadre d’un système intérieur. Pour le moment, je suis d’accord sur le principe de la recherche de moyens intérieurs. Par exemple, si j’étais à la place de Shell, de TransAlta ou d’une autre société, je chercherais d’abord des solutions dans ma propre cour. C’est là que j’aurais le maximum d’influence.
Ce que je dis, c’est que nous avons besoin en premier d’une reconnaissance à Copenhague du rôle de l’agriculture dans la création de crédits. Nous n’en sommes pas encore là.
Monsieur Lazar, pouvez-vous nous aider à comprendre? M. Woodworth continue à invoquer le fantôme d’un plan qui n’est plus. Vous réussirez peut-être à nous aider à comprendre. Dans ce plan qui s’est évaporé, on nous avait promis des règlements il y a trois ans. On nous les a promis encore cet automne. Maintenant, le ministre a reporté la date sine die et a annoncé d’avance l’échec de Copenhague. Pouvez-vous nous aider à déterminer ce que sera le prix du carbone? Avez-vous vu des chiffres quelconques, des calculs, des analyses semblables à ce que nous ont présenté la semaine dernière deux ONG financées par la Banque TD? Quel sera le prix de l’énergie en fonction du soi-disant plan de M. Woodworth? Quels en seront les effets sur les prix de l’électricité et de l’énergie, non seulement dans votre secteur, mais pour l’ensemble des Canadiens? Avez-vous vu un plan?
Vous m’avez déjà posé cette question. Je vais plutôt donner une réponse au sujet des crédits internationaux qui vous intéressent aussi, je le sais. Vous vous souvenez certainement de ma dernière réponse à la question de savoir si j’ai vu un plan. C’était non.
Quant aux crédits internationaux, nous avons clairement besoin d’y avoir accès si nous voulons agir à l’échelle mondiale. En effet, cela encourage les pays en développement à participer à la réduction...
Je ne sais pas ce que le Canada dit à Copenhague. Je ne suis pas à Copenhague. Toutefois, il est extrêmement avantageux pour l’économie canadienne que nous fassions le maximum chez nous. Le simple fait d’acheter des crédits à l’étranger ne nous permet pas de réoutiller notre économie. Si nous devons apprendre une chose, c’est que plus tôt nous réoutillerons l’économie pour qu’elle dépende moins des gaz à effet de serre, mieux nous nous porterons.
Monsieur le président, j'aimerais partir d'une prémisse de M. Warawa, qui n'a pas tout à fait tort. Je m'adresse surtout aux représentants du secteur agricole.
Notre population augmente considérablement et notre consommation augmente d'autant, de sorte qu'il y a une croissance des élevages au Canada et une plus grande utilisation d'engrais. C'est probablement ce qui explique que 53 p. 100 des émissions de gaz à effet serre dans le secteur canadien de l'agriculture proviennent de la production animale. Il faudra donc changer nos pratiques. Deux outils sont à notre disposition: la réglementation et la fiscalité. On peut agir sur la fiscalité.
Je sais que je m'aventure en terrain glissant, mais j'aimerais vous entendre parler du principe de l'écoconditionnalité en agriculture, c'est-à-dire soutenir le monde agricole et les agriculteurs dans la mesure où il y a de bonnes pratiques agricoles. Par exemple, si l'on décidait d'utiliser le fumier solide plutôt que le fumier liquide, cela permettrait de réduire nos émissions de méthane. On pourrait avoir des mesures pour traiter le fumier et valoriser de façon énergétique la biomasse en milieu agricole.
Seriez-vous favorable à une fiscalité qui tiendrait compte du principe d'écoconditionnalité en termes de financement dans le secteur de l'agriculture?
Permettez-moi de prendre le cas de l’Ontario où vient tout juste d’être déposé un projet de loi sur l’énergie verte qui met en place des tarifs de rachat garantis à différents niveaux, qu’il s’agisse de biomasse, de biogaz, d’énergie éolienne ou solaire ou encore de branchements hydroélectriques. Je souligne que ce n’est pas une forme de taxation. Je dirais plutôt que c’est une occasion offerte à des gens qui connaissent maintenant les règles et peuvent choisir de s’y conformer ou non.
La fiscalité est un marteau-pilon à n’utiliser que s’il est nécessaire de faire des perceptions en masse à l’égard de sources non ponctuelles impossibles à contrôler. Je crois que c’est la raison pour laquelle la Colombie-Britannique a adopté une taxe sur le carbone: il s’agissait des émissions d’un très grand nombre de véhicules, parce que les autorités ne voulaient pas s’en prendre à des sources ponctuelles particulières. En Alberta, le gouvernement a reconnu le problème des sources ponctuelles et a collaboré avec l’industrie pour établir un système pouvant profiter à l’agriculture grâce à des crédits compensatoires.
En fin de compte, si on emprunte la voie de la fiscalité, il faut s’assurer de prévoir des recherches qui permettront de travailler toujours davantage. Sans les recherches réalisées dans le secteur agricole, nous n’aurions pas eu, par exemple, les rendements de maïs et de canola que nous avons actuellement. Des recherches de ce genre nous permettront d’en faire toujours plus avec moins de terre, pour donner à manger à la population croissante du pays et du monde. Je ne me souviens pas des chiffres exacts des Nations Unies, mais d’ici 2050, nous aurons quelques milliards de bouches supplémentaires à nourrir. Par conséquent, je ne suis pas disposé à appuyer la fiscalité comme moyen de fermer une industrie.
Ma question est très générale. J’en ai juste une seule à poser à chacun d’entre vous. J’espère que vos réponses seront concises et plus simples que la question, car nous n’avons pas beaucoup de temps.
Ma question à vous deux est la suivante: Quel est la mesure la plus importante que vous aimeriez voir le gouvernement actuel et les gouvernements futurs prendre? Et quelle est la mesure la plus importante que vous souhaitez que le gouvernement ne prenne pas? Quelle est la meilleure et la pire chose que le gouvernement pourrait faire à court et à long terme pour aider votre secteur à s’épanouir et à croître tout en réduisant ses émissions de gaz à effet de serre?
Nous aimerions voir une politique cadre énergique et à long terme pour l’intégration de la bioénergie et des bioproduits dans notre secteur, ainsi qu’un programme d’investissement destiné à accélérer la transformation et à nous donner de l’avance sur nos concurrents.
Je ne veux pas que le gouvernement réagisse impulsivement à ce qui se passe ailleurs, ni qu’il attende trop longtemps pour agir ou qu’il tente de tout faire en recourant strictement à des règlements. Cette approche fragmentaire et ponctuelle ne nous mènera nulle part à un moment où l’économie mondiale se transforme pour devenir plus verte. Nous avons besoin d’une stratégie globale, réfléchie et intelligente.
Permettez-moi de dire que je suis tout à fait d’accord avec mon collègue. J’ajouterai que nous avons besoin d’une politique adéquate qui reconnaisse le secteur primaire et son rôle dans la maîtrise du carbone dans le pays en vue de s’attaquer au problème dans le monde.
Monsieur Lazar, vous avez dit des choses que j’ai trouvées très sensées. L’une d’entre elles, c’est qu’il y a autant de risques à adopter une approche trop rigoureuse qu’à adopter une approche qui ne l’est pas assez. À mon avis, le projet de loi C-311 — que nous ne semblons pas aborder très souvent au comité — est à ranger du côté trop rigoureux puisqu’il fixe une cible de 25 p. 100 de réduction par rapport aux niveaux de 1990. Partagez-vous ce point de vue?
Je ne peux parler qu’au nom de mon secteur. Franchement, nous avons déjà dépassé cet objectif. Vous devriez peut-être poser la question à d’autres secteurs. Le secteur forestier se prête mal à une évaluation de ce qu’il est possible de faire dans une certaine période. Je peux vous dire que nous avons atteint bien plus que cette cible et que nous avons l’intention d’en faire davantage.
Cela dépend de ce projet de loi, qui a quelque chose en commun avec la cible de réduction du gouvernement: les deux ne sont assortis d’aucun plan de mise en œuvre.
Nous avons passé des heures et des heures à discuter de cibles sans aborder les mesures de mise en œuvre. Convenez-vous avec moi que nous aurions mieux utilisé notre temps si nous avions parlé des moyens de mise en œuvre?
En fait, nous avons passé l’essentiel de notre temps à parler de moyens de mise en œuvre. Je dois reconnaître la contribution de l’opposition qui a déposé ce projet de loi afin de nous rappeler que nous devons nous mettre à l’œuvre. J’ai hâte de commencer à travailler avec le gouvernement sur les mesures à prendre.
Vous avez formulé tout à l’heure une observation que je n’ai pas bien comprise. Cela avait à voir avec de l’argent qui irait en Indonésie, ce qui ne nous aiderait pas. Est-ce que j’ai bien entendu? Je sais que vous parliez en général, mais pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
Si la production totale de pâtes et papiers continue à augmenter mais qu’à cause de contraintes chez nous, la production se déplace vers des endroits qui n’ont pas les mêmes contraintes, non seulement nous perdrons des emplois, mais les émissions de gaz à effet de serre augmenteront. Par conséquent, nous devons agir dans le cadre d’un régime aussi bien national que mondial qui tienne compte de la réalité des fuites et qui comporte des mesures pour y remédier. Il y a des moyens de le faire. Par exemple, si nous adoptions un programme d’investissement visant l’écologisation, nous pourrions devenir plus efficaces que l’Indonésie et arriver à gagner au jeu de la concurrence tout en réduisant nos émissions de gaz à effet de serre.
Le temps est écoulé. Il est 13 heures. Je sais que certains d’entre vous sont attendus ailleurs.
Je voudrais remercier M. Lazar, M. McCabe et Mme Cobden de leur présence au comité aujourd’hui et de l’aide qu’ils nous ont donnée dans notre étude du projet de loi C-311.
Je suis maintenant prêt à recevoir une motion d’ajournement.