Le projet de loi C-16 vise à renforcer le contrôle d'application des lois environnementales afin de responsabiliser davantage les pollueurs. Les peines imposées visent trois grands objectifs: la dissuasion des infractions environnementales, la dénonciation publique de ces infractions et la réparation des torts occasionnés par des activités illégales. Pour cela, il faut modifier le système d'amendes, les peines imposées et les outils d'application de la loi.
Le projet de loi modifie six lois administrées par Environnement Canada dont la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, la LCPE, et la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs. Il modifie aussi trois lois de Parcs Canada dont la Loi sur les parcs nationaux du Canada.
Le projet de loi édicte également une loi entièrement nouvelle, la Loi sur les pénalités administratives en matière d'environnement dont je vous parlerai vers la fin de mon exposé.
S'agissant des amendes, et afin de bien comprendre l'objet du projet de loi en question, il convient d'abord de résumer l'actuel système d'amendes en vertu de la loi qui va être modifiée par ce texte. À l'heure actuelle, tous les contrevenants sont susceptibles de se voir imposer une amende maximale ou une peine d'emprisonnement maximale aux termes de ces lois. Les amendes maximales actuellement les plus importantes sont prévues dans la LCPE, dans la Loi concernant la protection de l'environnement dans l'Antarctique et dans la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, soit 1 million de dollars pour les déclarations de culpabilité par mise en accusation et 300 000 $ pour les déclarations de culpabilité par procédure sommaire.
D'autres lois prévoient des amendes maximales inférieures, comme la Loi sur les ouvrages destinés à l'amélioration des cours d'eau internationaux dont le maximum actuel est de 500 $ pour les déclarations de culpabilité par procédure sommaire et de 5 000 $ pour les mises en accusation.
Les tribunaux ont tendance à imposer des amendes nettement inférieures aux maximums prévus. Ce projet de loi vise à corriger cette situation de différentes façon: en introduisant des amendes minimales pour des infractions graves, en augmentant les amendes maximales, en imposant des amendes plus élevées aux personnes morales qu'aux personnes physiques et en doublant les amendes pour les récidivistes.
Cette diapositive montre le nouveau système d'amendes qui est proposé. Pour les infractions les plus graves — nous entendons par là celles qui ont des conséquences directes sur l'environnement ou qui risquent d'en avoir, ou encore les cas d'entrave au travail des autorités — différents niveaux d'amendes maximales sont proposés selon qu'il s'agit de personnes physiques, de personnes morales à revenus modestes ou de personnes morales. Ces distinctions visent à refléter la capacité financière de chaque catégorie de contrevenant et à s'assurer que les amendes permettent de réaliser les objectifs de dissuasion et de dénonciation sans égard à la richesse de l'infracteur.
Le système proposé modifie également les amendes maximales qui passent de 1 million de dollars pour tous les contrevenants à 1 million de dollars pour les particuliers, 4 millions de dollars pour les personnes morales à revenus modestes et 6 millions de dollars pour les personnes morales. Enfin, il est question de doubler les amendes dans le cas d'infractions perpétrées par des récidivistes.
Il est important de noter que, dans le cas des récidivistes, ce projet de loi habilite les tribunaux à se pencher sur quasiment les mêmes infractions que celles prévues dans d'autres lois fédérales et provinciales de protection de l'environnement ou de la faune.
Une disposition, ajoutée dans chaque loi, prescrit le versement au Fonds pour dommages à l'environnement de tous les montants des amendes perçues, cela pour contribuer aux objectifs de remise en état de l'environnement. Pour l'instant, la plupart des sommes ainsi recueillies sont versées au Trésor et ne servent pas forcément à réparer les dégâts environnementaux dus à des infractions. Le Fonds pour dommages à l'environnement, qui a été créé en 1995, met les sommes reçues à la suite de jugements, de règlements ou de paiements volontaires à la disposition de projets de remise en état ou de réhabilitation. Dans la mesure du possible, l'argent du fonds doit servir à financer les projets entrepris dans la zone ayant subi des torts environnementaux. Cet argent peut également servir à financer la recherche et l'éducation relativement à la protection et à la restauration de l'environnement.
Le projet de loi comporte une déclaration d'objet relativement à la détermination de la peine qui précise l'objectif premier de la peine, soit dissuader, dénoncer et rétablir les torts occasionnés à l'environnement. Ce projet de loi insiste aussi sur la nécessité de tenir compte des circonstances aggravantes dans la détermination de la sanction appropriée. Il ajoute à chaque loi modifiée le principe selon lequel le montant de l'amende doit être augmenté en fonction de chaque facteur aggravant de l'infraction et de la gravité de chacun de ces facteurs. Une liste de ces circonstances aggravantes a ainsi été ajoutée. Elle comprend notamment le fait que l'infraction a pu causer un dommage à l'environnement.
Grâce à ce projet de loi, dans leur analyse de la gravité des circonstances aggravantes, comme les dommages occasionnés à l'environnement, les tribunaux sont invités à déterminer si le dommage comprend la perte des valeurs d'usage et de non-usage de la ressource. Ces deux expressions appartiennent au domaine de l'économie environnementale. On les retrouve dans ce projet de loi pour s'assurer que le juge des peines tient pleinement compte de la valeur de la ressource dans la détermination de la sanction à imposer.
La valeur d'usage inclut l'utilisation directe de la ressource, comme la consommation d'eau potable, de même que la valeur découlant d'une utilisation indirecte, comme la pêche récréative pratiquée dans un cours d'eau non pollué. Elle comprend aussi l'option valeur qui est la valeur de la ressource associée à son utilisation future.
La valeur de non-usage s'entend de la valeur en existence, soit celle reçue du fait de savoir qu'une ressource, un produit ou un service existe, et la valeur de transmission qui est la valeur reçue du fait de s'assurer qu'une ressource, un produit ou un service est disponible pour les générations à venir.
Le projet de loi contribue à la réalisation de l'objectif de dissuasion en favorisant l'accès aux informations relatives aux condamnations. Désormais, en vertu de chaque loi concernée, le ministre devra publier dans un registre accessible au public des renseignements concernant les déclarations de culpabilité des personnes morales. Ce registre pourra être consulté sur le site Web de l'application de la loi d'Environnement Canada.
Le projet de loi ajoute une disposition prévoyant que chaque loi modifiée oblige les tribunaux à ordonner aux personnes morales contrevenantes de divulguer à leurs actionnaires les renseignements relatifs à leur condamnation ainsi que les détails de la peine imposée. Cette obligation est nouvelle dans chacune des lois. Auparavant, les tribunaux étaient autorisés en vertu de certaines lois à adjoindre les contrevenants à publier les détails de leur condamnation. Le projet de loi maintient ce pouvoir discrétionnaire, mais il ajoute la production d'une ordonnance de divulgation obligatoire. L'obligation en question reconnaît les effets dissuasifs que la divulgation publique a sur le comportement des personnes morales. Toute contravention à ce genre d'ordonnance sera considérée comme une infraction pour laquelle le contrevenant sera assujetti aux amendes les plus élevées.
Le projet de loi propose aussi d'ajouter une disposition dans chaque loi pour obliger les tribunaux à ordonner aux contrevenants qu'ils acquittent une amende supplémentaire équivalant à la valeur estimée des avantages pécuniaires ou matériels tirés de la perpétration de l'infraction. Il autorise aussi les tribunaux à ordonner la suspension ou l'annulation des licences ou permis délivrés en vertu de la loi à laquelle on a contrevenu et il permet d'interdire aux contrevenants de présenter une nouvelle demande de licence ou de permis pendant une certaine période.
La majorité des lois modifiées par le projet de loi habilite déjà les tribunaux à rendre un certain nombre d'ordonnances au moment de l'imposition de la peine. Cela va de l'obligation de prendre des mesures de rétablissement à l'indemnisation du gouvernement pour les travaux de remise en état. Comme ces dispositions n'ont pas toutes été adoptées en même temps, ce projet de loi vise à normaliser les pouvoirs actuels dans l'ensemble des lois.
Le projet de loi C-16 modifie aussi les outils d'exécution de la loi prévus dans les lois modifiées. Il confère désormais aux agents de l'autorité le pouvoir d'émettre des ordres d'exécution en vertu de plusieurs lois. Ces ordres sont déjà prévus dans la LCPE. Grâce à eux, les agents d'application de la loi peuvent ordonner à une personne de prendre des mesures pour mettre fin à la perpétration de l'infraction sans qu'il soit nécessaire de réclamer une injonction ou d'entamer des poursuites. Les procédures judiciaires officielles exigent l'application de mesures particulières et prennent du temps avant que les correctifs puissent être mis en place. Cela étant, elles sont loin d'être idéales dans le cas d'une infraction qui occasionne ou va occasionner des torts immédiats à l'environnement. L'ordre d'exécution, lui, peut être émis sans délai. Les personnes qu'il vise peuvent en demander la révision au réviseur-chef, qui est une fonction de décision administrative créée en vertu de la LCPE. Cela garantit une certaine équité tout en permettant aux agents de l'autorité de disposer d'un outil rapide pour remédier aux situations où une action immédiate semble s'imposer.
En outre, le projet de loi C-16 renforce les outils d'application de la loi en autorisant le ministre à désigner des analystes en vertu de différentes lois. Ces analystes sont des scientifiques ou des experts techniques qui peuvent accompagner les agents pour effectuer des activités d'inspection particulières, y compris la prise d'échantillons. Cela se fait déjà en vertu de certaines lois, notamment de la LCPE, et cette disposition s'est avérée très utile. De plus, le projet de loi modifie le délai de prescription applicable à une déclaration de culpabilité par procédure sommaire en le portant de deux à cinq ans et modifie la date de début de cette période, celle-ci passant du moment où le ministre est informé de l'infraction au moment où l'infraction se produit.
Enfin, le projet de loi confère aux agents de sécurité et aux analystes régis par chacune des lois modifiées le même niveau d'immunité personnelle que dans le cas des agents de la sécurité maritime, des agents d'intervention environnementale et des inspecteurs visés par la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada. Ce faisant, les agents et analystes pourront s'acquitter de leur tâche en toute bonne foi et sans avoir à craindre de poursuites au civil.
Comme je le disais au début de mon exposé, ce projet de loi édicte une nouvelle loi appelée Loi sur les pénalités administratives en matière d'environnement. Celle-ci fixe le cadre nécessaire pour instaurer un système de sanctions administratives pécuniaires applicables aux autres lois. Les sanctions administratives pécuniaires sont de modestes sanctions financières d'un maximum de 5 000 $ pour les personnes physiques et de 25 000 $ pour les personnes morales, et elles se veulent un mode d'intervention rapide et plus efficace que les poursuites en justice dans le cas des infractions les moins graves.
Les sanctions administratives pécuniaires peuvent être imposées à des personnes ou à des navires par tout agent de l'autorité ayant des motifs raisonnables de croire que cette personne ou ce navire a commis une infraction. Les personnes ou les navires visés par une sanction administrative pécuniaire peuvent payer l'amende sur-le-champ ou la contester par la voie administrative. Le projet de loi autorise le réviseur-chef nommé en vertu de la LCPE à entendre les appels relatifs aux sanctions administratives pécuniaires.
Voilà qui met un terme à mon exposé, mais je tiens à attirer l'attention des membres du comité sur deux autres documents que nous vous avons fournis. Le premier est un aperçu général du projet de loi qui indique la nature des modifications, les lois visées par ces modifications ainsi que les pages et les dispositions concernées. Le second document est un tableau qui résume toutes les modifications proposées, qui précise là où elles sont faites et qui rappelle ce qui existe déjà dans les lois.
Je vous remercie.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à souligner à M. Ouellet que je n'ai pas invoqué le Règlement, mais j'apprécie votre patience.
Merci beaucoup à nos témoins.
Je vais aborder toute cette question sous l'angle des sanctions administratives pécuniaires prévues dans la loi.
J'ai passé plusieurs années à faire appliquer la loi dans le domaine de la conservation, puisque j'ai été garde dans un parc national. Quand je travaillais pour le fédéral et que je tombais sur quelqu'un qui pêchait illégalement — ou sur un autre cas de figure —, sur quelqu'un qui n'avait pas son permis, je n'avais d'autre choix que de lui émettre un bref d'assignation et d'enclencher les procédures judiciaires.
J'ai aussi été agent de la conservation pour la province de l'Alberta et je pouvais alors choisir entre un bref d'assignation et une contravention, selon la situation. Si la personne décidait de régler l'amende, la procédure judiciaire était interrompue, mais si elle décidait de plaider non coupable, elle devait alors comparaître devant un juge. Nous pouvions donc régler un grand nombre d'infractions en appliquant une procédure davantage administrative. La différence, c'est que si la personne accusée décidait de contester la contravention, elle se retrouvait en cour.
Pourriez-vous, à l'intention du comité, nous expliquer la différence dans le cas de la loi qui est proposée? Par exemple, de quels pouvoirs dispose le réviseur-chef? À quoi ressemblera la procédure judiciaire et quelles options s'offriront à la personne devant acquitter des sanctions administratives pécuniaires pour que celle-ci ai la certitude qu'elle bénéficie pleinement des droits que lui confère la loi?
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Ça va. Je pensais que vous auriez pu répondre à cette question.
Nous commençons à manquer de temps et nous devons passer à d'autres sujets.
J'apprécie que nos témoins se soient déplacés. Afin que les gens d'Environnement Canada et de Parcs Canada soient au courant, sachez que le comité juge important — et nous en avons discuté au sous-comité, mardi — d'accueillir également des agents de l'autorité. Comme les membres du comité vous l'ont fait comprendre, nous avons quelques préoccupations au sujet de la sécurité en ce qui a trait à l'application de cette loi. Mardi, nous espérons accueillir du personnel des régions et du personnel d'exécution.
Vous avez dit que vous nous feriez parvenir vos réponses à certaines questions et je vous demande, madame Wright, d'adresser au comité les réponses à certaines des questions posées, ce matin, par M. Trudeau et par d'autres députés.
Encore une fois, merci beaucoup. J'apprécie que vous vous soyez déplacés.
J'invite les membres du comité à demeurer assis, parce que nous allons parler de notre étude sur les sables bitumineux et les ressources hydriques ainsi que de notre déplacement en Alberta.
Nous avons chiffré tout cela et avons examiné un certain nombre d'options. Personnellement, je recommande que nous utilisions nos points de déplacement pour économiser l'argent des comités. Cela améliorerait aussi nos chances d'obtenir la bénédiction des whips. De plus, je recommande que nous fassions le déplacement à 12 membres avec le personnel nécessaire.
La motion vous a été distribuée. Je vous la lis:
Que le Comité approuve le budget de déplacement de 92 038 $ afin que douze membres et le personnel nécessaire se rendent à Fort McMurray, Fort Chipewyan, Edmonton et Calgary (en Alberta) du 10 au 13 mai 2009, afin de tenir des audiences et d’effectuer des visites sur place dans le cadre de l’étude du Comité sur les sables bitumineux et les ressources hydriques du Canada; et
Que les membres utilisent leurs points de déplacement pour se rendre à Edmonton et revenir de Calgary.
À titre d'information, sachez que le fait de se déplacer à douze plutôt qu'à huit ne représente qu'un coût supplémentaire de 5 000 à 6 000 $.
Monsieur Trudeau.