J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins qui sont venus jusqu'ici pour exprimer leurs points de vue et pour répondre aux questions.
Comme vous le savez, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le comité effectue une étude sur la santé maternelle et infantile. Le 12 avril 2010, le Comité permanent de la condition féminine a adopté à l'unanimité la motion suivante en vue d'entreprendre une étude sur la santé maternelle et infantile:
Que le Comité étudie la santé maternelle et la santé infantile, suite à l'annonce du gouvernement de faire de sa stratégie sur la santé maternelle et la santé infantile une priorité, lors de la tenue du G8 au mois de juin dont le Canada sera l'hôte, pourvu que ce soit terminé avant la fin de mai.
Alors le comité a très peu de temps pour recevoir des témoins.
Je veux maintenant souhaiter la bienvenue à tout le monde et vous présenter les témoins: Katherine McDonald, directrice générale d'Action Canada pour la population et le développement; Sharon Camp, présidente et chef des opérations du Guttmacher Institute; Robert Fox, directeur exécutif d'Oxfam Canada; et, bien sûr, Maureen McTeer, représentante canadienne de la White Ribbon Alliance for Safe Motherhood.
Puisque vous représentez quatre groupes distincts, je vais vous demander de prendre 10 minutes pour faire votre exposé. Vous pouvez prendre moins de temps si vous le voulez, mais vous devez vous limiter à 10 minutes. Je vais vous faire signe lorsqu'il vous restera deux minutes. Nous passerons ensuite aux questions et aux réponses.
Nous allons commencer par Sharon Camp, présidente et chef des opérations du Guttmacher Institute.
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Merci beaucoup de l'invitation à comparaître aujourd'hui. Laissez-moi entrer dans le vif du sujet tout de suite.
Si nous pouvions convaincre la communauté internationale — les gouvernements des pays donateurs ainsi que des pays en développement — de doubler les investissements actuels dans la planification familiale et la santé maternelle et néonatale, nous pourrions réduire les décès maternels de 70 p. 100, réduire les décès de nouveaux-nés de près de 50 p. 100 et obtenir une foule d'avantages relatifs au développement.
Le Guttmacher Institute, grâce à l'appui financier et technique du Fonds des Nations Unies pour la population, a évalué les coûts et les avantages de trois stratégies d'investissement pour réduire les décès maternels.
Dans le premier scénario, nous avons calculé le rapport coût-efficacité de l'augmentation des investissements uniquement dans la planification familiale, à un niveau permettant de répondre à 100 p. 100 des besoins des femmes en matière de contraceptifs modernes. Nous estimons qu'environ 215 millions de femmes dans le monde n'ont pas accès aux services dont elles ont besoin; c'est-à-dire qu'elles ne souhaitent pas devenir enceintes, mais n'utilisent pas de méthode contraceptive efficace.
Dans le deuxième scénario, nous avons calculé le rapport coût-efficacité de l'investissement de nouvelles sommes uniquement dans la santé maternelle et néonatale afin de fournir les soins maternels et néonatals de base recommandés par l'OMS à toutes les femmes et à tous les nouveaux-nés qui en ont besoin.
Dans le troisième scénario, nous avons déterminé le rapport coût-efficacité des investissements supplémentaires dans la planification familiale jumelés aux investissements dans les soins maternels et néonatals. Je vais vous présenter les résultats.
J'attire votre attention sur la série de graphiques en anglais et en français. La bande superposée à gauche montre les dépenses actuelles de 11,8 milliards de dollars américains pour les services de contraception — en rouge — et les soins maternels et néonatals, répartis entre les grossesses planifiées — en vert — et les grossesses non planifiées — en gris.
Les deux autres bandes comparent le rapport coût-efficacité des investissements supplémentaires uniquement dans la santé maternelle et néonatale, et des investissements supplémentaires dans la planification familiale ainsi que dans les soins maternels et néonatals. En investissant 3,6 milliards de dollars américains dans la planification familiale, nous réduisons les coûts annuels des soins pour les grossesses non désirées — que les femmes n'ont peut-être pas voulues et n'ont certainement pas prévues —, qui passent de 6,9 à 1,8 milliard de dollars américains par année. Cela représente une économie de plus de 5 milliards de dollars qui, à son tour, permet de réduire les coûts globaux de l'accès aux services universels de planification familiale et de soins maternels et néonatals d'environ 1,5 milliard de dollars américains par année.
Examinons maintenant l'incidence sur la santé maternelle.
J'aimerais remercier les deux personnes qui ont proposé leur aide. Il n'y a pas de chevalet, alors j'ai des chevalets vivants.
Sur ce graphique, la première bande représente la situation actuelle. En fonction des chiffres des Nations Unies pour 2005, nous avons évalué à 550 000 le nombre de décès maternels qui auraient pu en grande partie être évités en 2008. Bon nombre de ces décès sont le résultat de grossesses non planifiées qui se sont terminées, dans bien des cas, par des avortements pratiqués dans des conditions dangereuses. Le fait de répondre aux besoins non satisfaits uniquement en matière de planification familiale permettrait de sauver des vies, comme le montre la deuxième bande. Naturellement, la même chose est vraie pour l'investissement considérable requis afin d'offrir un accès universel aux services de base en matière de soins maternels et néonatals.
Mais jetons un coup d'oeil à ce qui arriverait si on combinait ces investissements: le taux de décès maternels serait réduit de 70 p. 100, passant de 550 000 à 160 000 en un an — c'est énorme. Le modèle du Guttmacher Institute permettrait de sauver la vie de 390 000 femmes, dont la majorité sont dans la fleur de l'âge et sont déjà mères de jeunes enfants. Et nous savons que le décès d'une mère compromet grandement la vie de ses jeunes enfants.
À l'Assemblée mondiale de la Santé de la semaine prochaine, l'OMS, la Banque mondiale, le Fonds des Nations Unies pour la population et l'UNICEF — que l'on appelle les H-4 — publieront les dernières estimations des Nations Unies sur les décès maternels en 2008. Nous prévoyons qu'elles seront inférieures aux estimations utilisées dans les calculs du Guttmacher Institute. Mais les résultats fondamentaux de l'analyse coûts-avantages ne changent pas, même si nous utilisons au départ des chiffres inférieurs relatifs aux décès maternels.
Le fait de doubler les investissements dans la planification familiale ainsi que dans la santé maternelle et néonatale, c'est-à-dire de les faire passer de moins de 12 milliards de dollars américains par année à près de 24,6 milliards, permettrait de réduire les décès maternels d'au moins 70 p. 100 et les décès néonatals de 44 p. 100. La stratégie d'investissement combinée permettrait de sauver plus de vies. Elle coûterait aussi 1,5 milliard de dollars de moins par année que la stratégie d'investissement visant uniquement la santé maternelle et néonatale.
C'est également la stratégie qui offre le plus d'avantages en matière de développement en dehors du domaine de la santé, notamment des niveaux de scolarité plus élevés, particulièrement chez les femmes; un accroissement de la productivité de la main-d'oeuvre, y compris une plus grande participation des femmes sur le marché du travail; une augmentation des revenus des ménages, d'où une diminution de la pauvreté; une diminution des taux de croissance de la population, ce qui réduit les pressions liées aux ressources naturelles renouvelables. Si vous connaissez les Objectifs du Millénaire pour le développement, cela représente sept objectifs sur huit, je crois.
C'est ce qu'on appelle, à mon avis, une façon judicieuse de gouverner.
Merci beaucoup de votre attention.
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Merci, mesdames et messieurs, de votre leadership et de votre travail à l'égard de cette question, et merci de l'invitation à comparaître devant vous aujourd'hui.
Je sais que tous les quatre nous présenterons beaucoup de statistiques, et certaines sont très significatives. Vous trouverez dans la liasse un mémoire d'Oxfam Canada qui fournit, selon nous, des motifs très convaincants justifiant que le Canada démontre son leadership à l'échelle mondiale à l'égard de cette question, et qui explique à quel point cela est essentiel pour les femmes de partout dans le monde et pour les femmes qui vivent dans une pauvreté extrême.
Je ne veux pas commencer par les statistiques. Je veux vous ramener aux personnes dont nous parlons lorsque nous discutons de ces initiatives à l'échelle mondiale. J'ai la possibilité et le privilège de rencontrer beaucoup de ces femmes et de ces jeunes filles puisque je voyage partout dans le monde. Comme je l'ai dit, je crois qu'il est important, lorsque nous examinons ce que nous pouvons faire avec des milliards de dollars pour le bénéfice de centaines de millions de personnes, que nous sachions de qui nous parlons.
Les jeunes filles qui subviennent aux besoins de leur famille travaillent dans les maquiladoras à Managua. Elles ont 16 ans et elles ont deux enfants. Elles travaillent dans des conditions difficiles, gagnent des salaires peu élevés et doivent souvent faire face à des dangers importants en matière de santé et de sécurité au travail. Et, malgré tout, elles veulent absolument élever leur famille, contribuer à la collectivité et à l'économie et travailler en vue d'un avenir meilleur. Mais elles reconnaissent que pour pouvoir y arriver, elles doivent obtenir du soutien. Elles ont besoin d'un accès à toute une gamme de services de santé communautaires afin que leurs droits en matière de sexualité et de contraception soient respectés et qu'elles puissent avoir les moyens de se prévaloir des services dont elles ont besoin.
Nous rencontrons des femmes en Afrique australe et dans des collectivités en Namibie, où les taux d'infection par VIH sont parmi les plus élevés du monde. Ces femmes, qui vivent dans des taudis de carton ou de plastique et qui ont plusieurs enfants, ont eu très peu de possibilités d'éducation. Elles n'ont pratiquement aucun moyen d'avoir accès à l'information, mais, plus important encore, elles ont peu de chance de disposer du pouvoir dont elles ont besoin pour être maîtresses de leur destinée et créer un environnement où leurs enfants ont des chances de vivre une vie meilleure que la leur.
J'ai passé quelques temps au Darfour, où j'ai rencontré pas moins de milliers de femmes et de jeunes filles, qui sont terrorisées et traumatisées par la violence qui règne là-bas. Des centaines de milliers d'entre elles ont été violées dans le cadre d'une stratégie de guerre. Elles sont confrontées aux répercussions cruelles et destructrices de ces actes sur elles-mêmes, leur famille, leur collectivité et leur avenir: un grand nombre d'enfants nés dans la violence.
Alors lorsque vous devez faire face à ces différentes circonstances et que vous voyez à quel point c'est difficile pour ces gens, vous ne pouvez que reconnaître l'urgence et l'énormité de la situation, et il vous est impossible de nier que nous devrions faire beaucoup plus à ce sujet.
Nous devons comprendre que dans ce dossier, il n'y a pas de solution expéditive. On ne parle pas de petites mesures par-ci par-là. Il faut une stratégie globale et intégrée permettant d'offrir l'éventail complet de services de soins de santé et liés à la personne nécessaires afin que les femmes puissent faire respecter leurs droits en matière de sexualité et de contraception. Une telle stratégie permettra aussi d'examiner la question dans un contexte plus vaste. Nous reconnaissons que le facteur qui a la plus grande incidence sur le nombre d'enfants qu'une femme aura est son niveau de scolarité. Au final, c'est grâce à un système de soins de santé uniforme à l'échelle nationale, dont l'accès est gratuit et exempt d'obstacle, qu'une femme pourra profiter des services de santé offerts.
Nous devons aborder ces questions au niveau des personnes, en nous penchant sur les comportements et les attitudes, et à l'échelle de la collectivité, en nous penchant sur les normes culturelles et les valeurs sociétales. Nous devons aussi examiner ces questions de manière systématique, en ce qui a trait aux services fournis dans tous les pays, et reconnaître que c'est dans l'intimité, dans les résidences, dans les marchés, dans les rues, au Parlement et au tribunal que se jouent l'avenir de ces femmes et leurs chances de vivre une vie saine et d'élever des enfants qui ne font pas seulement survivre, mais qui se développent bien. C'est de tout cela dont il s'agit ici.
Nous avons une idée très claire de ce qu'il faut faire. Ce qu'il manque en l'occurrence, c'est la volonté politique et la résolution de le faire.
Il y a deux semaines, j'ai été invité à parler des Objectifs du Millénaire pour le développement devant l'Assemblée générale des Nations Unies. À cette occasion, j'ai abordé le sujet des sommes que le monde a consenties pour venir à la rescousse des banques et remettre à flot les économies du Nord.
L'ambassadeur des États-Unis aux Nations Unies a pris ombrage de mes propos parce qu'il y voyait une critique des montants qui avaient été consentis pour revivifier, restaurer et revitaliser nos économies.
Certes, il se peut que j'aie ergoté un peu — il se peut que j'aie laissé entendre qu'une analyse comparative plus poussée entre les sexes aurait pu avoir une incidence sur la façon dont les sommes en cause ont été dépensées, ou qu'on aurait pu se soucier davantage des considérations environnementales dans la façon dont les sommes ont été dépensées —, toujours est-il que j'ai affirmé que je ne me souciais d'aucune manière des sommes d'argent que le monde avait consacrées à la remise à flot des économies du Nord. Mais il est très important de comprendre que nous savons dorénavant à quelle hauteur la barre a été placée, et que nous avons donc un moyen de déterminer dans quelle mesure nous répondons globalement aux besoins du milliard et plus de personnes sur cette planète qui vivent dans une extrême pauvreté.
S'agissant de cette initiative concernant la santé maternelle et l'aide à la capacité de survie des enfants, il faut avoir une vision claire des sommes d'argent en cause. C'est un montant dérisoire par comparaison avec les billions qui ont été mobilisés. Et tout montant inférieur aux sommes requises pour faire en sorte que les femmes puissent voir consolider leurs droits en matière de sexualité et de procréation, qu'une gamme complète de services de santé soit assurée aux citoyens de cette planète, que nous ayons les ressources éducatives et des ressources pour assainir l'eau et donner accès à des installations sanitaires, et que soient mis en place tous les autres éléments indispensables non seulement à la prospérité mais aussi à l'égalité sur cette planète, est signe que nous nous déchargeons de notre responsabilité de citoyens et d'êtres humains.
En tant que leaders et personnalités respectées dans ce pays, vous occupez une position privilégiée pour transmettre au gouvernement un message très clair l'invitant à appuyer cette initiative; pour indiquer qu'il faut y consacrer des sommes conséquentes; et pour indiquer que les attentes des Canadiens et des Canadiennes pour ce qui est de leurs obligations à l'égard de leurs valeurs, de leurs traditions et de leur compréhension de leur rôle au Canada eu égard à cette question, exigent que nous placions la barre haut, que nous élevions le niveau de nos ambitions et que nous nous engagions sérieusement à consacrer ressources et énergie à la poursuite de cet objectif.
Merci.
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Merci, madame la présidente.
Et merci à vous, messieurs et mesdames les députés, qui avez pris le temps de venir ici discuter, mais aussi réfléchir sérieusement sur certains des enjeux que Robert a placés en contexte.
J'ai occupé une position privilégiée; nous occupons tous une position privilégiée, mais la mienne m'a donné la possibilité de me rendre dans différents pays du monde avec mon conjoint à l'époque où il était ministre des Affaires étrangères. Comme j'avais la profonde conviction que la dernière chose dont j'avais besoin était d'assister à un dîner de plus, j'ai toujours mis un point d'honneur à visiter les projets poursuivis par l'ACDI. Je visitais des cliniques, des maternités et des hôpitaux et je m'entretenais avec les ministres responsables de la condition féminine et avec ceux qui étaient responsables des femmes et des enfants pour me faire une idée de la nature de leurs besoins. C'était il y a quelque temps déjà. Et si cela se trouve, leurs besoins sont encore plus criants et pressants qu'ils l'étaient à la fin des années 1980 et au début des années 1990. Tel est le sujet de nos discussions dans cette enceinte.
Nous avons tous été extrêmement enthousiasmés et ravis quand le a déclaré qu'il donnerait suite au travail accompli en Italie par le G8 en vue de faire de la santé maternelle et de la santé des femmes en matière de sexualité et de procréation, qui est une composante essentielle de la santé maternelle, un élément clé des préoccupations du G8; et qu'il serait notre champion, si vous voulez.
J'espère que c'est dans ce contexte que les discussions auront lieu et que l'orientation indiquée saura rappeler à tous, tant au gouvernement qu'au Parlement dans son ensemble, que ce sont là des enjeux qui tournent autour de la volonté de sauver des vies de femmes. Il est essentiel que nous nous penchions sur eux et que nous les examinions dans ce contexte si nous voulons faire des progrès.
J'ai présenté un peu d'information au sujet de la White Ribbon Alliance, que vous êtes tous censés avoir. Pour plus de renseignements, vous pouvez consulter le site Web de l'Alliance au www.whiteribbonalliance.org.
Beaucoup d'entre nous sont soit... Et bien, au Canada, on est la « troisième dame », mais il est trop difficile d'expliquer comment on en est venu à être la troisième dame, de sorte qu'on appelle chacune « première dame », catégorie dans laquelle beaucoup d'entre nous se retrouvent. Il y a des reines et des vedettes du cinéma et des modèles et toutes sortes de gens... y compris des pauvres sans revenus, mais qui s'intéressent à ces questions. Nous regroupons des gens de toutes les tranches de la population dans plus de 148 pays, dont le Canada, et nous sommes enthousiasmés par le travail qui s'accomplit.
Mais j'apprécie l'occasion qui m'est donnée de venir discuter avec vous de ce qu'on peut faire pour contribuer à sauver des vies de femmes.
[Français]
L'Association du ruban blanc vient en aide aux organisations communautaires, comme vous le savez, partout dans le monde, pour exiger que les gouvernements fournissent aux femmes les soins médicaux dont elles ont besoin, au long du continuum des soins relatifs à la maternité, y compris les soins vitaux de santé sexuelle et génésique.
Nous allons sans doute répéter quelque chose que vous avez entendu plusieurs fois cette semaine déjà, mais nous savons que les investissements dans les soins de santé donnent des résultats. Quatre-vingt pour cent des décès maternels sont évitables si les soins de base sont prodigués. Pourtant, l'absence actuelle des services dans les pays en développement coûte 15 milliards de dollars en productivité perdue par l'économie mondiale, et ce, au-delà de toute question de santé, de démotion de familles et de communautés.
Le principe du partenariat est au coeur de la vision et de la mission de l'Association du ruban blanc. Nous avons établi de solides coalitions avec des groupes qui sont ici aujourd'hui et d'autres groupes qui ont déjà témoigné devant vous. Nous avons vraiment pour mission de nous assurer que la capacité des soins pour les femmes est accrue et que les ressources sont mises à profit pour réduire la mortalité et la morbidité chez les femmes, les nouveau-nés et les enfants.
[Traduction]
Le principe du partenariat est au coeur de la mission de la White Ribbon Alliance. Nous avons établi de solides coalitions dans de nombreux pays pour qu'existe une capacité de soins, que cette capacité soit accrue et que des ressources soient mises à profit pour réduire la mortalité et la morbidité chez les femmes, les nouveau-nés et les enfants.
Pour atteindre ces objectifs, nous préconisons plusieurs mesures.
Premièrement, nous préconisons un financement accru et ciblé pour garantir l'existence des systèmes de santé et les renforcer, en particulier dans les pays et les régions où il y a peu de ressources. Voilà un point que j'ai été ravie d'entendre la ministre du développement mentionner récemment.
Nous préconisons la prestation de services de planification familiale dans toutes leurs manifestations.
Nous préconisons la prestation de services de soins médicaux aux femmes dans le besoin, y compris des avortements dans les pays où cette pratique est légale.
Nous préconisons la formation de sage-femmes qualifiées, en particulier celles qui sont appelées à prodiguer des soins aux femmes dans leurs propres collectivités.
Nous préconisons la prestation de services obstétricaux d'urgence et de soins post-nataux aux femmes. Vous avez sûrement entendu clairement le message que le Dr. André Lalonde, de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, a livré hier. Dans un autre secteur de mes activités bénévoles, je suis représentante du public auprès de la Société et j'en ai appris beaucoup au sujet de la médecine et constaté combien je la connais peu, bien que je prétende l'enseigner à l'école de droit.
Et sixièmement, nous préconisons la prestation de services éducatifs et de documentation pour préparer les femmes à se faire elles-mêmes, à long terme, les défenseurs de leurs droits à des soins maternels, de la mise en place de politiques appropriées en matière de santé, de même que de l'accès en temps opportun à des services de santé sexuelle et génésique. C'est ce rôle de défenseur et de promoteur de mesures en matière de santé maternelle, d'options en matière de santé sexuelle et génésique et d'accès à ces services qui est au coeur des efforts que nous poursuivrons jusqu'à la réunion du G8 ici, au mois de juin, jusqu'à celle du Secrétariat général des Nations-Unies qui se tiendra à New York à la fin septembre, et jusqu'au sommet du G20 à Séoul, au début de novembre.
[Français]
Vous avez sans doute beaucoup entendu parler, pendant vos audiences, de ce que nous devons et pouvons faire pour sauver la vie des femmes et celle de leurs enfants. Les difficultés sociales, économiques, médicales et celles liées aux droits de la personne sont complexes et très importantes. La bonne nouvelle, cependant, selon moi, est qu'on s'entend généralement sur la nature des problèmes de santé maternelle et infantile et encore plus sur les solutions à cette tragédie qui tue de 340 000 à près d'un million de femmes.
Les mesures que nous attendons des gouvernements qui se sont engagés à respecter les conventions internationales sur les droits de la femme, comme le nôtre, sont claires et font partie de notre mission.
[Traduction]
Vous verrez ce que je recommande que votre comité fasse et à quel point j'espère que vous jouerez effectivement ce rôle, mais j'aimerais terminer sur une note personnelle, entre autres pour la raison que cet angle a parfois davantage d'impact.
Au cours de la dernière année, l'activité de la White Ribbon Alliance a consisté entre autres à financer un envoi effectué par un merveilleux groupe de Saskatoon appelé Save the Hungry. Ce groupe envoyait de l'équipement et des fournitures pour une valeur d'un million de dollars, mais il lui fallait recueillir les sommes nécessaires pour payer le conteneur servant au transport vers le Ghana. Nous avons fourni les fonds, le colis a été envoyé et nous avons rééquipé la maternité d'un important hôpital où les trois salles d'opération étaient hors d'état de fonctionner jusque-là. Pour nous remercier, le médecin qui avait reçu le colis nous a dit, d'un ton détaché aussi surprenant pour moi que l'histoire, qu'il était vraiment content de recevoir le colis et de pouvoir rouvrir les salles d'opération parce qu'ainsi, il ne serait plus forcé de se rendre aux urgences le matin et de choisir, parmi les femmes ayant besoin d'une césarienne, celles qui vivraient et celles qui mourraient.
Quand on entend des histoires de ce genre, nous nous voyons rappeler, comme l'ont fait les anecdotes de Robert, que ces enjeux ont un visage humain. Nous sommes riches et influents. Vous êtes encore plus influents. L'occasion vous est maintenant donnée de faire un geste qui compte et il me tarde de vous voir à l'oeuvre.
:
Merci, madame la présidente, et merci de me donner l'occasion de m'adresser au comité.
Au cours de la dernière année, la question de la mortalité maternelle considérée tant comme une question de santé qu'une question de droits de la personne a bénéficié dans le monde entier d'une attention sans précédent. Tandis que, au Canada, le risque qu'une femme meure des suites de complications survenant pendant la grossesse et à la naissance est d'un cas sur 11 000, au Niger, des complications reliées à la grossesse tueront une femme sur sept. Cette injustice met en évidence la gravité de ces atteintes aux droits à la personne. Voilà pourquoi les pays industrialisés comme le nôtre doivent faire davantage.
Commençons d'abord par parler de ce que ces pays industrialisés ont déjà convenu de faire. Les Objectifs du Millénaire pour le développement, les OMD, comportaient la promesse globale de réduire la mortalité maternelle des trois quarts à l'horizon 2015 et d'instaurer un accès universel à la santé en matière de procréation pour la même année. Malheureusement, comme l'a souligné M. Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations Unies, c'est l'objectif sur lequel les gouvernements ont accompli le moins de progrès et il est donc improbable qu'il soit atteint. Nous avons entendu dire qu'en septembre, les leaders du monde se réuniront pour examiner les progrès accomplis dans la réalisation des OMD. Les niveaux globaux de mortalité maternelle n'ont guère changé au cours des 20 dernières années, bien que, au vu des nouvelles données récemment rendues publiques et des nouvelles estimations des Nations Unies, il soit à prévoir qu'on observe quelques signes de progrès, ce qui serait encourageant.
Mais les OMD n'avaient rien de nouveau. En 1994, lors de la Conférence internationale sur la population et le développement, qui se tenait au Caire, 179 gouvernements, dont celui du Canada, se sont engagés à fournir, à l'horizon 2015, un accès universel à la santé en matière de procréation, à une gamme complète de moyens de planification familiale sécuritaires et fiables et aux services connexes de santé en matière de procréation qui ne contreviennent pas à la loi. Ces engagements ont encore été enrichis par l'apport de spécialistes internationaux des droits de la personne. Ces dernières années, le droit de survivre à la grossesse et à l'accouchement s'est de plus en plus imposé comme droit fondamental de la personne humaine. Selon les spécialistes des droits de la personne, la mortalité maternelle évitable constitue une violation des droits des femmes à la vie, à la santé, à l'égalité et à la non-discrimination.
Plusieurs organismes de surveillance des traités des Nations Unies ont conclu à des violations de traités protégeant des droits fondamentaux de la personne de la part d'États qui ont omis de prendre des mesures pour prévenir la mortalité maternelle. En 2006, tous les leaders africains sans exception ont adopté le plan d'action de Maputo en matière de santé et de droits sexuels et génésiques, lequel, entre autres stratégies, confie au système de santé la mission d'offrir des services sécuritaires d'avortement dans les limites permises par la loi. Bien que ce ne soit pas largement connu, il est de fait que tous les États africains autorisent l'avortement dans certaines circonstances. Ainsi, l'Union africaine a tenu, du 19 au 21 avril de cette année, une conférence continentale pour célébrer les progrès accomplis en matière de santé maternelle et infantile.
Le Canada s'est également engagé à fournir son aide internationale conformément à la Loi sur la responsabilité en matière d'aide au développement officielle. Cette loi exige que tous les aspects de l'aide fournie par le Canada soient axés sur la réduction de la pauvreté et requiert que les perspectives et les préoccupations des pauvres soient prises en compte dans la fourniture de cette aide. L'aide fournie par le Canada et tout le processus décisionnel qui la régit doivent être conformes à six principes: les valeurs canadiennes, la politique étrangère, le développement durable, l'efficacité de l'aide, la promotion de la démocratie et la promotion de normes internationales en matière de droits de la personne.
Quelles sont les normes internationales en matière de droits de la personne eu égard à la mortalité et à la morbidité maternelles? Les experts en droits de la personne qui sont membres des comités de surveillance des traités donnent de leurs traités internationaux respectifs une interprétation voulant que les États soient tenus de se conformer à un ensemble d'obligations. Il s'agit notamment de la prestation de services abordables et complets de soins de santé en matière de procréation, y compris des services de planification familiale; de la mise sur pied de programmes axés sur l'accroissement des connaissances en matière de moyens de contraception et de la prestation de services sécuritaires d'avortement qui sont conformes aux lois locales; de la diffusion d'information sur la santé en matière de procréation et sur la planification familiale; de l'accès garanti à des soins obstétricaux d'urgence; de faire en sorte que l'accouchement se fasse sous la supervision de personnel dûment formé et que des soins de santé de qualité soient disponibles en cas de complications attribuables à des avortements pratiqués dans des conditions dangereuses. Ces experts en matière de droits de la personne ont établi un rapport entre les décès et la mauvaise santé des mères et le défaut d'offrir les services en question. En d'autres termes, s'ils omettent d'assurer les services, les États concernés se rendent coupables d'une violation des droits de la personne.
En juin 2009, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies a adopté une résolution historique suivant laquelle la mortalité et la morbidité maternelles constituaient des sujets de préoccupation pressants en matière de droits de la personne. Par cette résolution, à laquelle le Canada s'est associé, les États membres reconnaissent que la question de la santé maternelle doit figurer parmi les défis à relever en matière de droits de la personne et qu'il faut d'urgence intensifier et élargir les efforts visant à porter un coup d'arrêt aux taux globaux inacceptablement élevés de mortalité et de morbidité maternelles évitables. C'est la première fois que des gouvernements reconnaissent que la mortalité maternelle est une problématique ressortissant aux droits de la personne.
Moins d'un mois plus tard, en juillet 2009, lors de la réunion du G8 en Italie, les chefs de gouvernement des pays du G8 ont reconnu que la santé maternelle et infantile figurait parmi les problèmes de santé globale les plus pressants du monde. Ils se sont engagés à accélérer les progrès en matière de santé maternelle, notamment au moyen de la prestation de soins et de services en santé sexuelle et génésique et par la planification familiale volontaire. Ils ont également annoncé leur soutien à l'édification d'un consensus planétaire à l'égard de la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants dans une démarche visant à accélérer les progrès dans la poursuite des Objectifs du Millénaire pour le développement tant à l'égard de la santé maternelle que de la santé infantile.
Il est encourageant de voir que, après des années de négligence, les gouvernements dénoncent de plus en plus cette tragédie, mais la question demeure: comment transformer ces paroles en actes? Bien sûr, au mois de juin, les leaders des pays du G8 se réuniront à Huntsville pour tenir leur 36e sommet annuel. Et, bien sûr, un sommet des pays du G8 et des pays du G20, dont la Corée du Sud est l'hôte conjoint, aura lieu en même temps.
Le sommet de Muskoka survient à un moment critique. Les chefs d'État les plus puissants du monde devront examiner la question du développement international tandis qu'on s'engage dans le dernier droit de la réalisation des OMD. Le sommet suivra un moment d'attention internationale sans précédent à l'égard de la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. Le moment est idéal pour accélérer les progrès dans ce domaine d'une importance capitale.
Voyons un peu ce que nous pourrions attendre que fassent notre gouvernement et les autres chefs d'État à l'occasion de ce sommet du G8. Premièrement, nous voulons que les gouvernements respectent leurs engagements passés et s'en servent comme tremplin pour aller plus loin. Parmi les engagements passés figurent les efforts consentis par le G8 l'an passé pour accélérer le processus de réalisation des OMD; nous voulons que les gouvernements se conforment aux engagements qu'ils ont pris au Caire en 1994 et par suite des examens ultérieurs des Nations Unies; nous voulons faire en sorte que l'initiative en matière de santé maternelle et infantile soit à la hauteur des promesses faites dans le contexte de la Loi sur la responsabilité en matière d'aide au développement officielle et repose sur des indications de ce qui fonctionne et de ce qui est efficace; nous voulons nous assurer qu'il y ait suffisamment d'argent pour réaliser tout cela; et je crois que nous devrions inviter notre gouvernement à se doter d'une stratégie pour atteindre le seuil de 0,7 p. 100 du revenu national brut consacré à l'aide publique au développement.
Merci.
D'abord, je pense qu'il doit y avoir du financement. Robert l'a mentionné. Je pense que nous en avons tous parlé. Cette dimension fait partie des sujets qui devaient être abordés à cette réunion du G8. Ce n'était pas tant une question de savoir ce qu'est la santé maternelle, mais de savoir comment la financer.
Elle doit également être intégrée. Il est vraiment important que nous ne partions pas tous sur différentes tangentes. Les micronutriments et la nutrition, par exemple. Le Canada est connu pour être un leader mondial. Cela nous convient bien de jouer un rôle de leadership. Mais c'est une dimension additionnelle. Elle s'ajoute à quelque chose.
D'une certaine manière, nous parlons de deux ensembles différents de phénomènes. Il y a la santé maternelle, qui est essentiellement une problématique de soins médicaux. Et il y a la formation des personnes, ce qui, comme la ministre du développement l'a mentionné, figurera parmi les priorités. Cette dimension ne doit pas être escamotée. Nous devons nous doter de systèmes à l'intérieur desquels tout cela pourra prendre place.
Il faut favoriser l'accès à la planification familiale dans toutes ses manifestations. Nous devons reconnaître, je crois, et respecter l'entièreté de l'histoire et les lieux historiques qui nous ont amenés là où nous en sommes en matière de santé sexuelle et génésique. Comme l'a dit clairement Mme Clinton, il n'est pas possible de parler de la vie sexuelle et génésique des femmes sans être également conscient qu'il y aura des moments où l'avortement sera nécessaire.
Nous savons qu'il tue des femmes. Nous savons qu'il prête à controverse. Nous savons que beaucoup de groupes religieux s'y opposent résolument. Mais tout bien considéré, j'espérerais que cette dimension soit incluse.
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Je dirais que ce que nous attendons de cette réunion, c'est qu'elle permette d'aller de l'avant. Il doit y avoir un engagement sérieux à l'égard du financement et il doit être clair qu'il s'agira d'un engagement de financement important pour plusieurs années.
La réalité est que, pour traiter cet enjeu d'un point de vue systémique, il nous faut mettre sur pied des systèmes de soins de santé. Former des professionnels et des travailleurs de la santé et leur procurer le soutien dont ils ont besoin dans leur travail requièrent un investissement à long terme.
Une seule année de financement, dans ce genre de conférences où des gens se réunissent, prennent un quelconque engagement, signent un chèque puis, l'année suivante, passent à la problématique suivante, ce serait fatal. Ce serait irresponsable et inacceptable. N'est-ce pas? Il doit donc y avoir un engagement de financement important à long terme pour traiter ce problème de façon systémique et soutenue.
Nous avons résolument besoin d'une approche intégrée. Nous devons nous attaquer à la réalité de la vie des gens. Des avortements seront immanquablement pratiqués, mais là n'est pas la question. La question, c'est de savoir s'ils seront pratiqués dans des hôpitaux ou sous supervision médicale pour les femmes qui ne sont pas riches. Nous devons veiller à ce que le système comprenne qu'il s'agit là d'un élément particulier faisant partie intégrante d'une approche plus vaste et, dans la mesure où nous nous y attaquerons de façon appropriée, nous parviendrons à limiter le nombre de fois où ils seront pratiqués et pourrons agir sur le moment où ils seront pratiqués. Et nous veillerons à ce que, quand ils seront pratiqués, le résultat soit le plus positif possible pour tous ceux qui sont concernés.
Comme je disais, il y a beaucoup d'éléments en cause, mais j'insisterais surtout sur l'ampleur, la durée dans le temps et le caractère intégré de cette initiative.
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Merci, madame la présidente.
Merci beaucoup de témoigner aujourd'hui devant nous et de partager votre expérience. C'est très important. Vous êtes sur le terrain, vous voyez dans quelles conditions vivent les femmes africaines. Elles sont aux prises avec de graves problèmes et laissées à elles-mêmes.
Vous avez tous et toutes dit qu'il était nécessaire pour les pays donateurs de doubler leur aide financière. Vous dites aussi qu'il est impératif d'avoir une vision globale pour atteindre des objectifs réalistes, tangibles, concrets. Si on y met tous les efforts nécessaires, on pourrait atteindre les objectifs dont vous nous faites part, notamment celui de réduire le taux de mortalité maternelle de près de 70 p. 100.
Vous savez, un très grand débat est en cours parce qu'on veut écarter l'avortement de cet enjeu. Sauf erreur, vous nous dites aujourd'hui que si on ne l'y inclut pas, on rate complètement la cible. L'argent sera gaspillé parce qu'on n'atteindra pas les objectifs et on ne réduira pas suffisamment la mortalité maternelle.
Au terme de la rencontre de la semaine dernière à Halifax, un communiqué nous apprenait que les pays qui s'y étaient réunis étaient arrivés à un consensus. La nous a dit que chacun allait travailler à partir de ses priorités. Bref, il n'y a pas de consensus en vue de travailler ensemble. On n'a pas l'impression que les efforts seront coordonnés. On est pratiquement en train de vivre un échec avant même la rencontre du G8, en juin prochain.
Je n'ai pas vraiment de question. Je suis dépassée par les événements. On est en train de monnayer la condition de vie des femmes. C'est devenu une question politique. On oublie le coeur du problème; on oublie qu'on veut sauver des vies et que, pour y arriver, il faut que tout soit inclus dans ces initiatives, y compris l'avortement.
Je ne comprends pas qu'un pays comme le Canada, où ce droit est donné aux femmes, exclue l'avortement des mesures que l'on veut offrir à d'autres femmes de la planète aux prises avec de graves problèmes.
Comment voulez-vous que le Canada fasse preuve de leadership quand — reprenez-moi si je me trompe — il contrevient à ses propres engagements?
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Merci beaucoup et merci à nos témoins d'être des nôtres aujourd'hui. J'ai trouvé vos exposés très intéressants.
Madame Camp, vous avez parlé d'un élément clé dans une de vos dernières réponses, à savoir les terrains d'entente. J'estime que cette question revêt beaucoup d'importance aux fins du présent débat étant donné qu'il est question de la vie des femmes. Je suis allée au Bangladesh. Je suis allée en Afrique. J'ai vu la situation là-bas et je comprends que les femmes y vivent dans des conditions catastrophiques. Mon coeur s'emplit de compassion lorsque je vois ces femmes, ces bébés et ces enfants quêter dans les rues du Bangladesh. Personne ne peut rester insensible à ces images.
Je pense que le Canada assume un leadership de plus en plus important. Notre pays est reconnu sur la scène internationale, d'abord et avant tout pour la sûreté et la sécurité de ses institutions financières, et cette situation n'a fait que nous conférer davantage de crédibilité dans de nombreux autres domaines. Nous pouvons prendre position et le faire fièrement. Je suis fière d'être Canadienne et de savoir que nous sommes reconnus pour ces choses dans le monde entier. Je pense que ce contexte nous a permis d'accroître notre leadership dans d'autres domaines.
Vous connaissez le genre de leadership qui a été exercé dans le dossier de la santé maternelle et infantile. Ce sont les objectifs du millénaire pour le développement qui ont reçu le moins d'attention. Personne ne voulait toucher à ce dossier. Aucun financement n'y a été affecté ou presque. Or, en cette période où de nombreux pays restreignent leur aide étrangère, le Canada a augmenté son budget. Cinq cents millions de dollars seront consacrés à l'aide étrangère. C'est une somme considérable compte tenu de la conjoncture actuelle. Nous avons opté pour un éventail d'initiatives dans des domaines où le Canada se spécialise.
Dans les objectifs du millénaire pour le développement de l'UNICEF, il est écrit: « L'Accès à des soins spécialisés pendant la grossesse, l'accouchement et le mois qui suit la naissance sont essentiels pour sauver la vie de ces femmes — et celle de leurs enfants. » C'est-à-dire que... vous savez, la majorité des décès et des handicaps pourraient être évités et sont principalement dûs à l'insuffisance des soins pendant la grossesse et l'accouchement.
J'ai également épluché le rapport de l'Organisation mondiale de la Santé, où on dit que l'accès à des sages-femmes formées et qualifiées, capables de prévenir, de détecter et de gérer des complications obstétricales tout en fournissant du matériel, des médicaments et d'autres fournitures, représente le facteur le plus important dans la prévention des décès maternels. Le Canada a donc pris la décision d'investir cet argent dans un éventail d'initiatives, comme l'a fait l'UE, et a fait valoir son expertise dans les domaines de l'hygiène et de l'accès à l'eau potable; voilà les domaines où nous estimons pouvoir faire une véritable différence dans le monde.
Il ne me reste probablement plus de temps. Je vais laisser Mme McLeod poser les questions.
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La situation varie d'un pays à l'autre. Nous oublions parfois que nous sommes en mesure d'assumer un rôle de leadership notamment parce que notre géographie ressemble à celle de beaucoup de ces pays. Nous avons entre autres développé des technologies en télémédecine et nos rapports avec les collectivités rurales ou du Nord nous ont permis d'acquérir l'expérience requise pour venir en aide à d'autres pays.
Votre question est très pertinente car, en plus du reste, l'infrastructure routière est quasi inexistante. La réalité exige de pouvoir compter sur des aides compétentes dans la collectivité, qui sont en mesure de prendre les décisions qui s'imposent lorsqu'elles anticipent qu'une femme aura des problèmes à l'accouchement, notamment d'envoyer ces femmes accoucher ailleurs si la ville ou le village, où sont rassemblées la plupart des femmes, ne dispose pas des installations voulues. En soi, cela ne pose pas de problème, sauf si les femmes sont tenues de payer à leur arrivée; elles n'iront pas si elles sont obligées de payer. L'éventualité d'un enterrement est également un facteur susceptible d'influer sur leurs décisions...
Nous parlons d'intégration parce que les enjeux sont si vastes mais parce que nous savons toutefois comment faire les choses à l'échelle locale. Je ne sais pas pour vous mais selon moi, il est impératif de comprendre que chaque pays est différent. Dans certains pays, on se sert des lacs pour transporter les gens, tandis qu'ailleurs, des femmes en plein travail feront 50 kilomètres assises à l'arrière d'un vélo pour tenter de se rendre quelque part. Il est souvent trop tard.
Pourquoi ne s'y rendent-elles pas plus tôt? Peut-être parce qu'elles n'ont pas d'argent ou qu'elles n'ont personne pour veiller sur leurs enfants. Peut-être que leur mari leur dit des choses comme « non, je t'interdis de quitter le village » ou « je refuse de payer » ou « je refuse de me départir de ma meilleure vache » ou encore « je vais épouser quelqu'un d'autre ».
Tous ces éléments sont pris en compte dans leurs décisions. De là l'importance de l'approche intégrée, par opposition à l'approche ponctuelle.
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Je ne veux pas vous interrompre, mais j'ai beaucoup de questions. Mais merci quand même. Donc ça tient toujours.
Nous avons parlé du Congo. Il me semble que mettre un terme à la guerre, puis instaurer un gouvernement démocratique et améliorer les soins de santé, l'économie, l'agriculture et la sécurité alimentaire devraient être des objectifs tout aussi importants les uns que les autres. Et si l'avortement était le seul moyen de résoudre tous les problèmes du monde à cet égard, les recommandations du Groupe de pilotage pour la réalisation des OMD en Afrique seraient peut-être différentes.
Je remarque que le groupe mentionne dans son rapport... je vais citer quelques-uns des éléments dont il parle. Il parle de stratégies peu coûteuses et de technologies pour la révolution verte, qui permettraient de doubler, dans un court laps de temps, le rendement par hectare des petites exploitations. C'est précisément de l'Afrique dont on parle. Le groupe mentionne aussi la nécessité d'améliorer la gestion des récoltes et du cheptel et de gérer les sols et les ressources en eau dans la perspective du développement durable. Il fait état d'un enjeu particulier, qui est la nécessité de réduire le cloisonnement des donateurs et de canaliser l'aide financière de façon plus efficace. Il explique que la hausse des cours des denrées alimentaires est une occasion pour les pays africains de se lancer dans l'exportation de certains de leurs produits agricoles et ainsi de favoriser leur croissance économique. Il mentionne à quel point il est important que les pays en développement puissent conquérir des marchés et que d'autres pays, particulièrement en Occident, saisissent ces occasions de commercer avec eux.
Nous savons que notre Parlement poursuit le débat sur l'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie, qui nous permettrait de faire des échanges commerciaux avec un pays moins développé et d'aider ses agriculteurs dans le besoin. Cet accord a été contesté par un des partis.
Le groupe parle aussi de l'importance des semences génétiquement modifiées qui peuvent résister à la sécheresse, ce qui aiderait les agriculteurs dans ces pays à améliorer l'agriculture et à accroître les récoltes, et ainsi à...
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J'aimerais répondre à sa deuxième question, si vous le permettez, ou faire un commentaire à ce sujet.
Nous sommes dans une position où nous ne savons pas encore clairement quelles seront les conséquences de la décision du gouvernement de faire de la santé maternelle et infantile une priorité sur les autres secteurs de l'aide humanitaire. Nous accueillons favorablement cette priorité et nous la jugeons tout à fait légitime, et nous avons la ferme conviction que le gouvernement a le droit de fixer des priorités quant à l'aide humanitaire fournie par le Canada.
Mais en cette période où nous ne savons pas exactement si le budget consacré à l'aide humanitaire sera augmenté — on nous a dit, au contraire, qu'il serait gelé —, nous ne savons pas encore ce qui sera écarté pour faire place à cette priorité. Ainsi, bien que cette priorité soit tout à fait légitime et que nous y souscrivions, nous ne savons pas encore quels pourraient en être les effets sur d'autres initiatives importantes, telles que les initiatives liées à la santé, à la sécurité alimentaire, à la scolarisation des enfants, à l'eau potable et à l'assainissement, lesquelles font partie intégrante de la réussite de cette initiative et d'une aide efficace dans l'ensemble. N'est-ce pas?
Si les montants alloués à l'aide humanitaire augmentaient considérablement, on pourrait avoir l'assurance que ce nouvel investissement dans la santé maternelle n'aurait pas l'effet pervers de nous faire négliger d'autres éléments qui font partie des projets et des engagements de ce pays. La question reste ouverte pour nous en ce moment, et nous savons qu'au cours des semaines et des mois à venir, le gouvernement clarifiera les montants accordés et les conséquences qui en découleront pour les autres domaines de notre programme d'aide actuel.
Ce serait évidemment catastrophique si nous retirions des fonds à des programmes tels que celui de l'OMS sur la polio en vue d'en accorder davantage à des sages-femmes. On avancerait d'un côté mais on reculerait de l'autre. Nous devons veiller à ne pas déshabiller Pierre pour habiller Paul dans cette situation. Nous espérons donc qu'il s'agit de nouveaux fonds qui viendront s'ajouter.
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Je vous remercie d'être venus.
J'aimerais attirer votre attention sur le fait que tous les ministres et hauts fonctionnaires responsables de l'aide au développement qui font partie du G8 se sont réunis à Halifax dernièrement, soit les 27 et 28 avril. Ils ont alors défini les questions de développement qui seront abordées au sommet du G8. Le ministre de la Santé du Mali, de même que des représentants principaux de l'Organisation de coopération et de développement économiques, ou OCDE, des Nations Unies et d'autres organismes étaient également présents.
Si je fais cette énumération, c'est pour insister sur le fait que dans leurs délibérations, ils ont soulevé des points dont nous parlons actuellement, c'est-à-dire la façon de sauver la vie des mères et des enfants. L'un des aspects qu'ils ont mentionnés, c'est la reddition de comptes et l'efficacité de l'aide internationale. Nous insistons toujours sur le fait qu'il faut injecter plus d'argent, mais en même temps, les ministres du G8 s'entendent pour dire qu'il faut prendre des mesures politiques plus ciblées pour donner suite aux engagements actuels sur l'efficacité de l'aide apportée, ce qui implique une meilleure prévision et une plus grande transparence de l'aide, une réduction des coûts de transaction et une diminution de la fragmentation de l'aide. Ils ont également mis l'accent sur l'importance de la reddition de comptes.
C'était mon premier point. Je n'en ai que deux à soulever.
Mon deuxième point, c'est qu'au cours des discussions de la journée, il semble que personne n'ait mentionné la situation des enfants. Personne n'a évoqué l'importance de la nutrition des enfants. Je viens d'une famille très modeste de Hong Kong, et je suis née à l'époque où ce territoire recevait encore de l'aide internationale. Ma famille a alors été en mesure de bien me nourrir. Autrement, je n'aurais pas survécu et je ne serais pas ici pour en parler. Ma mère a également réussi à bien se nourrir pour pouvoir donner naissance au seul garçon de la famille. Pour ma famille, l'alimentation, la nutrition et l'eau saine ont été des facteurs de survie très importants. Je suis donc très déçue que personne n'ait mentionné cette question.
La ministre a donc insisté sur l'importance de prendre des mesures pour agir sur les facteurs qui contribuent à améliorer la santé des femmes et des enfants, comme l'accès à l'eau potable, l'hygiène et l'égalité entre les sexes. J'aimerais que le comité se penche sur ces questions qui n'ont pas encore été abordées aujourd'hui.
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Je pense que Mme McDonald l'a dit il y a quelques minutes: il faut absolument qu'on donne suite à l'engagement pris l'année dernière en Italie. C'est le début, c'est vraiment le point de départ, c'est absolument essentiel.
Il faut qu'on soit tous sur la même longueur d'ondes. Si le gouvernement veut effectuer tout un changement de priorités au chapitre du développement international, de la santé en général et de la santé maternelle et infantile en particulier, au point de refuser certains soins aux femmes pour des raisons de religion ou d'idéologie, alors il faut en débattre. Il faut voir où les discussions nous mèneront. C'est vous, les parlementaires, qui serez en position de changer ces choses. Quoi qu'il en soit, il faut prendre comme point de départ notre position actuelle, celle adoptée l'année dernière, en Italie.
Il faut aussi considérer des ajouts. Un témoin a mentionné l'agriculture, la nutrition, l'eau potable, etc. À tout le moins, il faut absolument qu'on suive le chemin déjà tracé. Lorsqu'il est question de santé maternelle, ça devrait être comparable à la perception d'un cancer. Tout le monde considère que le cancer est une maladie grave. Personne ne devrait penser qu'un individu atteint d'un cancer ne souffre en fait que d'une simple douleur à la jambe.
Les définitions existent déjà. C'est vraiment le point de départ. On ne peut pas jouer avec la vie des femmes de cette manière. Si le gouvernement veut absolument discuter de son refus d'allouer des fonds publics à ce type de procédure qui est sain, alors parfait, nous aurons cette discussion. Dans un sens, cela n'a rien à faire avec notre point de départ.