FEWO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
CANADA
Comité permanent de la condition féminine
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le vendredi 4 juin 2010
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je tiens à remercier les témoins d'être ici.
Notre comité est ici réuni, en vertu du paragraphe 108(2) du Règlement, pour étudier la question de la violence faite aux femmes autochtones.
Il s'agit de la violence dans toutes ses manifestations. Nous examinons tous les types de violence, et non pas simplement la violence physique ou la violence sexuelle. Il y a la violence émotionnelle, la violence systémique. Nous en recherchons les causes. Quelles sont les causes fondamentales qui font des femmes autochtones les victimes d'un tel degré de violence? C'est le sujet de notre examen, et, avec vous, nous essayons de trouver des solutions pratiques, qui feront bouger les choses, à l'intérieur du domaine de compétence fédérale, bien sûr.
D'aussi loin que je m'en souvienne et tout le temps que j'ai été députée, les Canadiens ont essayé de résoudre ce problème, sans grand résultat. Je sais que, forcément, le gouvernement et le Parlement ne peuvent pas tout faire à cet égard, mais nous pouvons assurément faciliter les choses, adopter des lois, instituer des mesures, faire tout en notre pouvoir pour commencer à chercher à changer quelque chose. C'est ce que nous espérons faire avec votre aide, avec vos idées, pour contribuer le plus efficacement possible au changement. Merci donc d'être venus.
Normalement, nous accordons à chaque témoin 10 minutes pour présenter son exposé. Je remarque quatre groupes chez nos premiers témoins. Je crains que si nous accordons ces 10 minutes à chacun, il ne reste plus de temps pour communiquer entre nous. J'aurais aimé atténuer le caractère quasi officiel de la réunion, tout en assurant l'enregistrement des interventions, des interventions sans cérémonie. Que chacune de vous, donc, se présente — vous disposerez d'environ trois minutes — puis résume sa pensée, ses sentiments, d'après ce que nous avons déjà discuté, d'après le mandat que j'ai décrit. Puis nous pourrons entreprendre une discussion plus proche du dialogue, avec échange de questions de part et d'autre, sans plus de façon.
Qu'en pensez-vous? Est-ce que l'idée vous plaît? Bien.
Alors, pourquoi ne pas commencer avec Tamara Polchies, du Fredericton Native Friendship Centre. Nous pourrons ensuite passer, dans l'ordre, au groupe suivant après quoi, quand nous en aurons terminé, chacune de nous, autour de la table, disposera d'une minute — et non trois — pour se présenter, parler de ses antécédents, de façon à mieux se faire connaître.
Merci. Bonjour. Je vous remercie de l'occasion que vous m'accordez de comparaître aujourd'hui devant vous.
Mon nom est Tamara Polchies. Je suis une Micmaque de la Première nation d'Eel Ground. Je vis maintenant dans la collectivité malécite de la Première nation de Kingsclear, près de Fredericton. Je suis directrice du Fredericton Friendship Centre depuis cinq ans. Tout ce temps, j'ai travaillé en partenariat avec la maison de transition Gignoo, à l'élaboration de la boîte à outils des Sentiers de la guérison. J'ai également été membre actif, depuis sa création, du comité consultatif provincial constitué pour mettre fin à la violence faite aux femmes autochtones du Nouveau-Brunswick. Je suis également membre actif du comité consultatif de la diversité culturelle de la ville de Fredericton et j'ai participé à l'élaboration d'un cours de formation sur la violence envers le partenaire intime pour la police municipale.
On m'a également choisie pour assister au Forum national sur la violence faite aux femmes autochtones d'Ottawa et au Sommet national des femmes autochtones de Yellowknife. Formée par le Centre pour les victimes d'agression sexuelle de Fredericton, je suis membre de son collectif. Je prends les appels de femmes de tout le Nouveau-Brunswick et, au besoin, j'accompagne les victimes à l'hôpital ou je les aide à quitter un milieu dangereux, 24 heures par jour.
C'est à Ottawa que j'ai débuté, avec l'Assemblée des Premières Nations, sur le dossier du traitement équitable entre les sexes. Mon apprentissage s'est fait sous la houlette de femmes autochtones très fortes. J'ai également eu l'occasion de travailler avec le Cercle national autochtone contre la violence familiale, ce qui m'a permis de m'instruire sur les maisons de transition et les problèmes qu'affrontent les femmes en situations de violence.
Chaque jour, mon centre d'amitié accueille des femmes autochtones qui viennent y trouver aide et appui. Parmi les services que nous offrons, il y a une banque alimentaire, une banque de vêtements, un service d'emploi, l'accès à Internet, le téléphone et le télécopieur, un atelier d'artisanat traditionnel et des repas légers. Nous faisons aussi de la sensibilisation.
L'histoire de la participation du centre d'amitié à des programmes particuliers pour les femmes autochtones a débuté avec un groupe de jeunes femmes appelé Little Sisters. Avec l'aide d'étudiants embauchés pour l'été, j'ai lancé ce programme. Nous avions observé que nos jeunes femmes se trouvaient mêlées à des situations et à des modes de vie adultes; que nos filles et jeunes femmes, précocement mûries, n'avaient pas profité de leur enfance. Nous voulions qu'elles aient la chance de vivre à leur propre rythme et, en égales, de s'appuyer mutuellement dans la collectivité. Nous avons commencé dans un groupe urbain appartenant à une communauté d'une Première nation. Nous avons consulté chaque groupe, en commençant par leur assurer un lieu sûr de rencontre, où elles pourraient se confier à des dirigeantes dignes de confiance et où on leur procurerait des aliments sains. Nous leur avons offert de l'information sur: la sécurité dans Internet; les façons de reconnaître les prédateurs; l'éducation sanitaire; l'estime de soi; l'autonomisation. Nous les avons aidées à se respecter mutuellement. Nous avons établi nos propres règles, pour chaque groupe, avec le concours des filles, et nous avons travaillé à former un groupe digne de confiance, où elles se sentiraient à l'aise pour s'exprimer et poser des questions.
La nourriture saine a été un important facteur d'attraction, vu la situation économique de la plupart des familles où elles vivaient. Fait intéressant, les filles et les jeunes femmes ont réclamé des fruits, des légumes et des produits laitiers bien avant de demander des boissons gazeuses, des croustilles ou des aliments transformés. Nous avons de la sorte attiré plus d'enfants.
Nous avons invité des conférenciers, organisé des soirées et nuits entre amies ainsi que des groupes de discussion et nous avons noué beaucoup de relations sérieuses qui, aujourd'hui, durent encore.
Ces dernières années, nous avons noué un partenariat avec Femmes Autochtones du Québec Inc. et obtenu du financement pour les femmes autochtones du Nouveau-Brunswick, ici, à Fredericton. Nous avons d'abord fait deux placements dans notre organisation et avons également aidé des femmes qui cherchaient du financement pour la formation. Nous avons offert des ateliers de formation à la mise à niveau des ordinateurs, de développement des capacités ainsi que d'estime de soi et d'autonomisation. La formation et les ateliers ont donné aux femmes une nouvelle perception du retour au travail après avoir élevé ses enfants ou quitté une situation de violence. La découverte de nouveaux objectifs et l'apprentissage de méthodes permettant de vaincre les obstacles ont permis aux femmes de se trouver de l'emploi. Elles parachèvent donc leur instruction et deviennent des modèles pour leurs propres enfants et leur famille dans leur communauté.
Mes collègues et moi avons discuté des nombreux facteurs qui expliquent pourquoi les femmes autochtones sont victimes de mauvais traitement et qui font que la société aide les femmes non autochtones d'une manière différente des femmes autochtones. Nous avons parlé de racisme, de définition de la violence et de la problématique homme-femme ainsi que du nombre de nos femmes qui sont disparues ou qui ont été assassinées. Entre nous toutes, le sentiment commun est que les mêmes études et les mêmes recherches sont faites, à répétition, sur les problèmes dont sont victimes les femmes autochtones. Nous comprenons donc les définitions, l'aide que nous recevons maintenant. Mais nous gaspillons notre temps, notre argent, notre courage et notre énergie, ce qui permet à nos bourreaux de continuer à maltraiter les femmes autochtones.
Actuellement, pendant que nous tenons des réunions, rencontrons d'autres groupes et poursuivons ce travail partout au pays, chaque jour, nous donnons à des victimes le temps d'être maltraitées. Nous n'arrêtons pas la violence; nous ne la prévenons pas; nous normalisons sa présence dans la collectivité. Pendant des années, les crimes commis contre les femmes autochtones sont restés non résolus, alors qu'ils le seraient déjà si les victimes avaient été un groupe de femmes non autochtones portées disparues. Comment cela se fait-il?
La plupart des femmes autochtones à qui j'ai parlé ou que j'ai aidées partagent la même opinion sur la raison pour laquelle nous connaissons toutes des femmes qui ont été victimes de violence une fois dans leur vie. Chaque femme à qui j'ai parlé sait que, dans sa collectivité, beaucoup de femmes — beaucoup d'autres femmes ou d'enfants qu'elles connaissent sont quotidiennement victimisés. Le temps est arrivé pour nous de collaborer ensemble pour réduire la violence, la prévenir et en protéger nos femmes autochtones.
Merci.
Merci beaucoup.
Accueillons maintenant Tanna Pirie-Wilson, de l'Alliance de la fonction publique du Canada.
Bonjour, monsieur Clarke.
Tan Kahk, nil toliwes Tanna Pirie-Wilson. Je suis d'abord une jeune et fière Malécite de la Première nation de Tobique, à deux heures au nord d'ici. Je suis également représentante féminine du Cercle national des personnes autochtones de l'Alliance de la fonction publique du Canada. Je suis ici pour vous parler des répercussions négatives de la violence systémique contre les femmes autochtones.
Les femmes de nos collectivités ont déjà été des citoyennes très bien considérées. Nous occupions des postes élevés dans nos organisations dirigeantes. Nous étions les gardiennes de nos collectivités, les conservatrices de notre culture et de notre langue. Nous donnions la vie, et nos hommes nous respectaient. Ils nous appuyaient même dans ces rôles. C'est l'influence de la colonisation européenne, à ses débuts, qui a appris à nos hommes et à nos femmes l'oppression et la répression. Il s'agissait de nous inculquer une mentalité différente.
Bon. On me dit que c'est une présentation de trois minutes.
Non, je ne prononcerai pas mon allocution.
C'est pourquoi, dans le Cercle national des personnes autochtones de l'Alliance de la fonction publique du Canada, nous sommes déterminés à mettre au premier plan la condition sociale. Nous sommes déterminés à changer la condition sociale des Autochtones grâce à l'action politique. C'est là où j'interviens.
Le Cercle a entrepris de nombreuses démarches. L'automne dernier, nous sommes allés à Ottawa passer une journée en campagne de pression qui a été couronnée d'un grand succès. Nous avons parrainé un certain nombre de campagnes épistolaires à l'appui de la campagne et de l'initiative Soeurs par l'esprit de l'Association des femmes autochtones du Canada. Nous avons également entrepris une campagne d'envoi de cartes postales, que certains d'entre vous ont peut-être vues. C'était une réponse directe aux abuseurs pour leur dire que parfois, les excuses ne suffisent pas. Cette campagne centrée sur l'affaire Sharon McIvor, visait la mise en application velléitaire de l'accord de Kelowna.
À la faveur de ces campagnes communautaires et nationales, nous avons été en mesure d'attirer l'attention sur la pauvreté des Autochtones et la qualité déplorable de notre eau de boisson; de parler d'une seule voix, pour des collectivités diverses — les membres des Premières nations, les Inuits et les Métis dans notre Alliance de la fonction publique. Nous nous sommes rassemblés pour accroître notre participation à tous les niveaux dans la communauté afin de nous autonomiser mutuellement et d'affirmer notre droit fondamental de vivre une vie sans violence faite aux femmes autochtones.
Je m'arrête ici, parce que j'en aurais encore beaucoup à dire. Mon rôle est de mieux éclairer des problèmes tels que la violence faite aux femmes autochtones.
Merci beaucoup Tanna. C'était un message très efficace.
Nous passons maintenant à Gail Nicholas, du New Brunswick Aboriginal Women's Council.
Bonjour. Je me nomme Gail Nicholas. Je suis Malécite de la Première nation de Tobique, une fière aînée de cette nation. Je suis vice-présidente du New Brunswick Aboriginal Women's Council. Je suis également directrice du Wabanaki Women's Council, et, deux fois par année, nous organisons des rassemblements de femmes abénaquises pour aider à autonomiser les femmes dans la population abénaquise.
Pendant une quinzaine d'années, j'ai travaillé pour les services de protection de l'enfance et comme spécialiste de l'adoption pour l'État du Nebraska. Je suis également spécialiste de l'Indian Child Welfare Act, la loi qui protège les enfants autochtones des États-Unis quand ils sont sous garde. En outre, je suis membre du New Brunswick Aboriginal Women's Council, qui, en septembre dernier, a déposé une résolution sur le bien-être des enfants amérindiens devant l'Association des femmes autochtones du Canada pour obtenir ce type de loi pour nos enfants, ici, au Canada, afin qu'ils soient confiés d'abord à des familles autochtones et aussi, pour former nos familles adoptives autochtones pour qu'elles puissent adopter des enfants de leur propre nation ou des enfants issus d'autres Premières nations.
J'ai quitté le Nebraska pour déménager à Bangor. Pendant trois ans, j'y ai été clinicienne pour la Wabanaki Mental Health Association. J'ai travaillé avec des adultes autochtones éprouvant des problèmes de santé mentale. Cette expérience a été très enrichissante. J'ai ensuite décidé de me rapprocher de ma région natale et j'ai dû m'arrêter à Holt, où j'ai été directrice linguistique pendant environ un an, jusqu'à ce que le financement soit épuisé. Puis je suis retournée à Tobique, ma localité natale, pour être avec ma famille.
J'ai ensuite enseigné quelques années, en études autochtones et en langue malécite. Ensuite, je me suis intéressée au poste de coordonnatrice des programmes pour le Mi'kmaq-Maliseet Healing Network Centre, qui était appelé à travailler avec les survivants des pensionnats. Auparavant, alors que j'étais clinicienne, j'avais assisté, certaines fins de semaine, à des réunions de ces survivants. Ils me demandaient mon aide. J'ai donc acquiescé, à titre de bénévole.
Je suis maintenant coordonnatrice de la « hutte d'enseignement abénaquise » et je travaille à des projets visant à réintroduire notre culture et notre langue dans notre communauté et dans d'autres communautés des Premières nations. Je fais également partie du New Brunswick Aboriginal Women's Council, où nous nous sommes occupés à essayer de travailler à une nouvelle planification stratégique visant à trouver les endroits où, dans notre province, il existe des besoins. C'est donc ce à quoi j'ai été occupé avec — avec Sarah; j'inclus Sarah dans ce travail.
Merci.
Merci.
Nous passons maintenant à la maison de transition Gignoo. Sarah Rose, vous êtes avec les deux organisations. Vous allez parler de...
Bonjour. Mon nom est Sarah Rose. Je suis de la Première nation de St. Mary's, de l'autre côté de la rivière. J'espère que vous aurez la chance de nous visiter avant votre départ. Bienvenue en territoire malécite.
Je suis mère de trois enfants, deux garçons de 9 ans et 3 ans et une fille de 2 ans. J'ai grandi à l'extérieur de la réserve, mais j'ai toujours été en contact avec la communauté, de sorte que je n'ai jamais senti l'existence de la frontière entre la réserve et l'extérieur. Je travaille actuellement pour l'Union of New Brunswick Indians. Je travaille dans le service de santé, avec les 15 bandes. Même si l'union n'en représente que 12, je travaille avec les 15. Je représente les communautés aux niveaux local, régional et national en ce qui concerne les questions de santé.
Je suis également présidente de la maison de transition Gignoo et de Under One Sky, un service de bon départ situé hors réserve, ici, à Frédéric. Je fais partie du conseil d'administration du New Brunswick Aboriginal Women's Council. Je fais également partie du Conseil des jeunes de l'Association des femmes autochtones du Canada.
Dans ma propre collectivité, il y a un programme de développement du leadership chez les jeunes de St. Mary's, grâce auquel, par le mentorat, nous amenons les jeunes, filles et garçons, à jouer ce rôle de leadership, parce que nous avons besoin de reconnaître les qualités de nos propres enfants. Je suis mentor pour ce programme, tout en exerçant un emploi et en étant mère à plein temps. Bref, c'est moi. Nous nous parlerons plus tard.
J'ai également eu l'occasion de représenter mon peuple au niveau international. En effet, je suis allée en Colombie, parler de notre culture et de notre histoire. Nous nous occupons de ce genre de dossiers également. Plus tard, au cours de l'été, j'irai en Irlande, faire la même chose, à l'université.
Voilà qui je suis. Merci.
La maison de transition Gignoo est la seule maison de transition autochtone du Nouveau-Brunswick. Nous desservons l'ensemble des 15 Premières nations. Nous sommes sur le territoire malécite. Je suis moi-même Malécite, de la Première nation Woodstock, à une heure d'ici. Je viens tous les jours à Fredericton. Notre maison de transition, toutefois, est en dehors de la réserve. Elle dessert les femmes malécites et mi'kmaq. Alors, il n'y a pas de lutte de pouvoirs, parce que nous avons notre conseil d'administration.
Je suis aussi la trésorière du Cercle national autochtone contre la violence familiale, dont Gignoo est l'un des membres fondateurs. Quatre d'entre nous ont joué un rôle déterminant dans la création de l'organisme, et j'y suis toujours active.
Norma Dubé, de la Direction des questions féminines du Nouveau-Brunswick, et moi sommes coprésidentes du Comité consultatif sur la violence faite aux femmes autochtones. Sarah vous a remis notre cadre stratégique, qui prendrait plus de huit minutes à expliquer. Nous l'avons apporté pour que vous puissiez le lire à tête reposée.
Je sillonne le Canada pour présenter notre trousse Les sentiers de la guérison, que je n'ai pas avec moi. C'est une initiative du Nouveau-Brunswick pour aider les fournisseurs de service qui oeuvrent dans le domaine de la violence familiale à fournir un soutien aux femmes qui font appel à eux. Notre organisme est à Fredericton et s'occupe aussi des localités rurales. Cette initiative, lancée au Nouveau-Brunswick, a pris de l'ampleur et est maintenant une initiative pancanadienne. J'ai eu fort à faire pour aller dans les provinces dotées de refuges financés par AINC pour en faire la promotion.
Je suis heureuse d'être ici et vous remercie de m'avoir invitée. Nous discuterons plus longuement quand mon tour viendra.
Je vous remercie.
Merci.
Avant d'aller plus loin — nous procéderons dans cet ordre pour permettre à tout le monde de se présenter —, je tiens à remercier les nations malécites de nous avoir admis sur leur territoire et permis de travailler ici. Merci.
Vous avez la parole, Kelly.
Merci, madame la présidente.
Je suis Kelly Block, députée de Saskatoon—Rosetown—Biggar. Je ne suis pas un membre régulier du Comité de la condition féminine — je siège à deux autres comités parlementaires, le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique et le Comité des finances —, mais je suis très honorée d'être ici aujourd'hui et d'avoir participé à l'étude toute cette semaine. L'expérience a été des plus instructives; j'ai beaucoup appris.
Je vais vous situer le contexte de ma circonscription et notre province. Notre ville est divisée en quatre quadrants et c'est probablement dans ma circonscription que se trouve la plus forte densité de Premières nations et de Métis, dans le secteur urbain de la ville. J'ai établi des relations avec un grand nombre d'organisations, relativement aux problèmes que la vie en milieu urbain pose aux Premières nations et aux Métis. Il y a 74 Premières nations en Saskatchewan, alors il ne manque pas d'occasions de travailler avec elles et d'alimenter nos rapports.
Je suis très heureuse de vous voir et je suis impatiente de poursuivre notre discussion.
En fait, leur tâche consiste à rédiger le rapport à la fin de la journée. Elles ont un rôle très important.
Je suis Hedy Fry, présidente du comité et députée de Vancouver-Centre. J'ai été ministre de la Condition féminine pendant plus de six ans sous le gouvernement Chrétien, et aussi ministre responsable du multiculturalisme. Je m'intéresse depuis très longtemps aux questions autochtones. À Santiago notamment, nous dirigions la délégation du Canada et nous avions signalé que les Autochtones étaient des personnes à part entière, pas seulement des données démographiques. Nous l'avons fait comprendre lors de la Conférence régionale des Amériques, et l'avons maintenu par la suite. Ce fut la source d'une grande partie du travail qui a mené à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, une initiative lancée et dirigée par le Canada avec l'appui d'un grand nombre d'universitaires indigènes canadiens, comme Willie Littlechild, qui ont contribué à exprimer les droits des peuples indigènes du monde entier.
Nous avons aussi une greffière. Allez-y.
Je m'appelle Rob Clarke, et je suis membre d'une Première nation. Je crois bien avoir vu certains d'entre vous au comité des affaires autochtones, auquel je siège de fait, ou je vous ai peut-être rencontrés à mon bureau.
Je ne suis par un membre régulier du comité, mais c'est pour moi un grand honneur que de pouvoir assister à ce débat sur les questions qui touchent les femmes autochtones.
Je suis originaire de la réserve de Muskeg Lake, en plein coeur de la Saskatchewan. Ma circonscription, qui couvre les deux tiers de la Saskatchewan, comporte un segment intéressant au nord de la province, où environ 72 p. 100 de la population est autochtone. C'est là que mon passé m'est utile. J'ai été dans la GRC pendant 18 ans, dont la plus grande partie auprès des non-Autochtones, des Métis et des Premières nations du Nord et des régions éloignées de la Saskatchewan. J'ai été témoin du meilleur et du pire dont sont capables les humains. Je sais ce qu'ils peuvent se faire entre eux, et faire aux femmes et aux hommes autochtones. C'est un cycle et nous devons trouver le moyen de rompre ce cycle pour mettre un terme à ces situations, à tous les égards.
Bon nombre d'entre vous ont parcouru de grandes distances et donné de votre temps et probablement payé de votre poche pour venir témoigner — je vous suis très reconnaissant d'être venus nous faire vos récits afin que les membres réguliers du comité puissent les transmettre et les intégrer au rapport qu'ils présenteront à la Chambre des communes.
Je vous remercie encore infiniment.
Je suis Nicole Demers, députée de Laval, au Québec. Je ne savais rien des peuples autochtones, à part ce qu'on nous avait appris à l'école sur les cow-boys et les Indiens — je vivais en milieu urbain — jusqu'à ma rencontre avec Ellen Gabriel il y a six ans. Nous travaillons en très étroite collaboration depuis. Elle m'a fait voir tout le travail que vous faites, et j'en ai été éblouie. J'admire votre immense générosité. Je suis stupéfaite par tout ce que vous pouvez faire avec si peu, et c'est en toute humilité que je viens vous rencontrer aujourd'hui. Nous sommes ici pour apprendre. Nous ne voulons pas faire les choses à votre place, nous voulons que vous nous disiez ce que nous pouvons faire avec vous.
J'accorde une grande importance à ce que nous changions la manière dont les choses se font depuis si longtemps, et que nous abandonnions notre attitude paternaliste à l'égard des peuples autochtones, que nous comprenions enfin que c'est un partage. Nous partageons un territoire, et aussi ses richesses, ce qui devrait aller de soi. Nous devrions tout partager.
Je suis très heureuse de faire votre connaissance.
Merci.
Merci, Nicole.
Certains d'entre vous se sont présentés sachant seulement que nous voulons examiner les causes fondamentales, l'ampleur et la gravité de la situation, et savoir ce que vous nous proposez de faire, ou d'essayer de faire pour vous aider, ou pour atténuer le problème dans la mesure des moyens du gouvernement fédéral.
Je vous invite, en commençant par Natalie, à nous dire ce que vous pensez des enjeux, du problème, et comment, selon vous, nous pouvons contribuer à le résoudre.
D'accord. Je n'ai pas préparé de notes, mais il y a cinq questions importantes dont j'aimerais parler. Sarah pourra venir à ma rescousse si je me trompe.
La première chose qu'il faudrait, ce sont des logements abordables. En ce moment, les femmes qui viennent à la maison de transition, surtout quand elles doivent quitter leur collectivité pour venir en région urbaine — la plupart des femmes vivent dans des collectivités rurales —, finissent par se retrouver dans la même situation, dans la même collectivité, parce qu'elles ne trouvent pas de logement abordable. Le seul complexe de logements autochtones que nous ayons ici à Fredericton est celui de Skigin-Elnoog, et il n'a jamais assez de places.
Ceci m'amène aux raisons du besoin de services d'hébergement de deuxième étape ici, dans la région. Nous envoyons des femmes qui veulent s'extraire de leur situation, qui ont besoin d'aide, là où personne ne peut travailler avec elles ni continuer de les aider. Nous constatons que lorsque nous envoyons nos femmes à des services de deuxième étape non autochtones, c'est peine perdue. Elles n'y trouvent pas leur place, parce que les gens ne comprennent pas la réalité d'une femme autochtone qui vit dans une réserve. Il faut absolument penser à créer des logements abordables et des services de deuxième étape au Nouveau-Brunswick.
Ensuite, nous avons besoin de notre propre travailleur d'approche. Vous ne le savez peut-être pas, mais depuis un an et demi, le Nouveau-Brunswick, ayant dressé son propre plan d'action, a embauché des travailleurs d'approche, mais aucun n'est autochtone. Ils ne travaillent pas avec les femmes autochtones. Je pense qu'un partenariat entre les gouvernements fédéral et provincial, les chefs et le conseil favoriserait une réflexion sur les changements à apporter et un éventuel partage des coûts de l'embauche de travailleurs d'approche pour chacune des 15 Premières nations du Nouveau-Brunswick. On ne devrait pas compter sur le personnel des maisons de transition pour conseiller les femmes et les aider à s'extraire de leur situation. Je pense que si nous avions notre propre travailleur d'approche, quelqu'un qui comprend les enjeux autochtones, qui est rattaché peut-être au centre de santé et de bien-être des Premières nations, aux services à l'enfance et à la famille — simplement quelqu'un qui a eu une formation et qui est en mesure de nous aider à prévenir la violence familiale —, cette personne pourrait soutenir notre lutte contre la violence dans les fréquentations entre adolescents, à prévenir les disparitions de femmes autochtones. Nous n'avons actuellement personne pour cela, et c'est sur nous qu'on compte. Je pense que le Nouveau-Brunswick est trop rural pour que ce soit la tâche d'une seule personne.
Parlons maintenant des partenariats. Je pense que notre plus grand problème, ici, au Nouveau-Brunswick, c'est le conflit des compétences. On me dit toujours que c'est la responsabilité du gouvernement fédéral, de la province, du chef ou du conseil. Je pense qu'il est grand temps — nous sommes en 2010 — de régler ces questions ensemble. Nous ne devrions pas chercher à trouver de faute à tel ou tel fonctionnaire. Je pense que ce qu'il faut, c'est un partenariat axé sur les femmes, parce que c'est elles qui ont besoin d'aide; en fin de compte, nous voulons aider les femmes victimes de violence dans les familles autochtones. Ce ne devrait pas être une question de responsabilité du gouvernement fédéral, de la province, des chefs et du conseil: l'intervention devrait être axée sur les femmes, centrée sur elles, et nous devrions travailler ensemble, plutôt que chacun de notre côté.
C'est pourquoi il importe que vous lisiez notre Cadre stratégique pour mettre fin à la violence faite aux femmes abénaquises au Nouveau-Brunswick. Il y a ici des membres de ce comité, dont j'assume la coprésidence avec la province. C'est le premier pas d'une stratégie de lutte contre la violence faite aux femmes abénaquises du Nouveau-Brunswick. Le document compte 49 recommandations portant sur divers aspects pour lutter contre la violence faite aux femmes abénaquises.
Le Comité consultatif sur la violence envers les femmes autochtones a recensé trois domaines d'action — le renforcement des capacités, la prévention et l'éducation, et la prestation de services. La province participe à nos discussions actuellement, de même que des membres de collectivités de partout au Nouveau-Brunswick; des chefs offrent leur soutien. Il ne manque plus que le gouvernement fédéral. Il est grand temps de former une entité homogène pour aider nos femmes. Les conflits de compétences n'ont pas place ici. Nous devons songer aux femmes, parce que c'est pour elles que nous sommes tous ici. C'est ce qui fait que les statistiques sont tellement élevées — nous travaillons les uns contre les autres plutôt qu'ensemble.
Merci beaucoup.
Vous vous en êtes très bien sortie, sans le moindre feuillet à la main. Vous avez de toute évidence l'esprit très cartésien.
Merci, Natalie.
Sarah.
Puis-je ajouter quelque chose?
Au sujet de l'hébergement de deuxième étape, cette année, pour la première fois, Gignoo a obtenu trois unités. Ce sont des unités d'hébergement de deuxième étape, mais elles sont toutes neuves. Les gouvernements fédéral et provincial ont contribué financièrement à leur construction, mais n'ont prévu aucun fonds pour leur entretien et leur exploitation. Nous ne pouvions donc pas agir seuls et il a fallu conclure un partenariat avec Skigin-Elnoog Housing Corporation, une organisation autochtone d'hébergement hors réserve. Elle a reçu des fonds pour construire les logements. Elle en assure l'entretien, mais c'est nous qui en trouvons les occupants.
Maintenant, nous avons des problèmes parce que nous ne sommes pas des spécialistes de la relation entre locataires et propriétaires. Nous essayons de trouver des logements de deuxième étape pour les femmes, puis de préparer ces femmes pour les étapes suivantes, mais nous n'avons pas de travailleurs pour tout cela. Alors, c'est un peu problématique pour nous.
En ce qui concerne le logement abordable, nous comptons sur Skigin-Elnoog Housing, mais ils n'ont pas de nouvelles unités, et pas d'argent pour en construire. La majorité de leurs logements datent des années 1970, et prennent donc de l'âge. Au lieu de les réparer, l'organisation les élimine du programme — mais sans les remplacer par de nouveaux logements.
Il y a peu de logements abordables. Nous pouvons en demander, mais on nous envoie ici. Skigin-Elnoog Housing nous donne la priorité, mais pas la province.
Donc, il y a ce problème, en ce qui concerne le logement.
Je vous interromps ici pour demander si quelqu'un souhaite intervenir, avant de laisser la parole à Gail, Tamara et Tanna.
Y a-t-il quelque chose sur quoi on veut des précisions, ou faire des commentaires?
Rob.
Tamara, vous parlez de centres d'amitié nationaux. Je suis curieux de connaître, selon la perspective régionale, la relation que peuvent entretenir les centres d'amitié régionaux et fédéraux, et les rouages du mécanisme de financement.
J'en entends parler depuis longtemps, mais je ne saisis pas tout à fait. Il me semble qu'il y a deux ou trois mois, un problème de financement s'est posé entre les centres d'amitié nationaux et les centres régionaux. J'aimerais savoir en quoi cela vous a touchés. Est-ce que votre organisation ou centre d'amitié a dû procéder à des mises à pied?
L'Association nationale des centres d'amitié est financée par le programme des centres d'amitié autochtone de Patrimoine Canada. Une part de ces fonds est versée à l'association nationale, qui a des associations provinciales et territoriales partout au Canada.
Le Nouveau-Brunswick n'a pas d'association provinciale ou territoriale. Le Fredericton Native Friendship Centre est le seul de la province. À l'est, il y a Halifax, mais il n'y a pas d'association provinciale ou territoriale à St. John et Happy Valley. C'est pourquoi nous avons dû attendre nos fonds encore plus longtemps.
Quand ils négociaient pour augmenter leur financement et nous cherchions à augmenter le nôtre — qui n'a pas changé depuis 1996, donc notre centre tourne avec le même budget depuis ce temps —, nous avons dû serrer les cordons de la bourse autant que possible et changer ce qu'il était possible de changer au centre pour réduire nos frais d'exploitation en attendant ces fonds. Nous n'avons pas eu à faire de mises à pied, mais nous avons réduit nos services pendant environ trois mois. Tout cela parce que des négociations étaient en cours, qu'aucune entente n'avait encore été signée et que les modifications faisaient le va-et-vient entre les parties. Alors nous avons été très, très limités.
Nous avons le bonheur et la chance d'avoir de bons rapports avec notre banque, qui a pu repousser un peu des échéances, ce qui nous a permis de garder nos portes ouvertes.
[Français]
Merci, madame la présidente.
[Traduction]
Natalie, vous parliez de trousse de guérison. Vous serait-il possible de nous en faire parvenir une pour que nous voyions de quoi il s'agit?
Bien entendu. Elle est d'ailleurs dans les deux langues officielles. En fait, je pourrais probablement demander à quelqu'un de l'apporter, puisque mon bureau est tout près, sur Hanwell Road. Alors on vous l'apportera.
Gail, vous parliez de la Loi sur les services à la famille. Je sais qu'il y a eu des problèmes, dernièrement, au Québec. Ils retirent les enfants de la collectivité et les emmènent parfois très loin, et la mère ne peut garder le contact avec son enfant. Est-ce qu'il y a ce genre de problèmes ici?
Oui, absolument. C'est pareil ici. Je pense que les membres de la collectivité qui travaillent pour les services à l'enfance font tout en leur pouvoir pour garder les familles unies dans les réserves. Mais il ne semble pas exister de programme pour inciter les Autochtones à s'offrir comme foyers d'accueil. Je crois que c'est ce qu'il faudrait essayer de faire, offrir une formation pour cela.
Comme c'est du ressort de la province, il doit être très difficile d'y changer quoi que ce soit. Comme vous l'avez dit, il y a toujours cette rivalité des compétences fédérales et provinciales.
C'est pour moi une source de grande frustration. Aux États-Unis, une loi fédérale impose de respecter la Indian Child Welfare Act, pour les placements. Nous n'avons rien de tel au Canada.
Oui. Comme je l'ai déjà dit, l'Association des femmes autochtones a adopté une motion, dont j'ai copie, pour présenter cette résolution. C'était en septembre dernier, et elle est à l'étude. Un fait qui ressort de cette étude, c'est qu'actuellement, il y a plus d'enfants autochtones américains dans des foyers d'accueil qu'il n'y en a jamais eu dans des pensionnats. Ils sont donc encore hors de nos collectivités. Nos enfants ne sont toujours pas dans nos collectivités.
Merci beaucoup.
Étant aînée et aussi enseignante de la culture ancestrale, ce doit vous être très difficile. La connaissance de sa culture et de ses ancêtres peut être une source de force pour un enfant. Ces connaissances ne peuvent être inculquées hors de la collectivité. C'est impossible.
Tamara, vous avez dit quelque chose de très blessant. Vous avez dit que ces réunions sont une perte de temps, d'argent et de bonne volonté. Je pense que c'est vrai, mais c'est tout de même nécessaire.
Que proposez-vous? Qu'est-ce qui réussit, et de quoi avez-vous besoin pour le mettre en oeuvre?
De l'argent, des programmes. Au Nouveau-Brunswick en particulier, il y a un problème de financement hors réserve, dans les réserves... pour avoir des travailleurs. Maintenant, ces programmes essaient de travailler avec un syndicat... ou avec moi, pour que notre organisation collabore avec les collectivités. Notre organisation accueille les femmes qui quittent la réserve, qui viennent travailler en ville, mais voilà que l'aide que nous offrons hors des réserves n'est pas reconnue. C'est pourquoi nous essayons d'obtenir plus d'argent, d'avoir plus de gens pour aider les femmes et les enfants qui ont besoin d'aide maintenant.
Je sais que c'est blessant de se faire dire qu'on fait peine aux esprits. Mais c'est exactement ce que nous faisons. Nous laissons la voie libre aux auteurs d'abus.
Il est évident qu'il faut de la recherche. Au rythme où vont les choses, nous en savons assez maintenant pour savoir ce qui est à faire. Nous réinventons la roue chaque fois que sont diffusés un document, des conclusions de recherches, un livre. Nos étagères croulent sous les définitions de la violence et des moyens de lutter contre elle. Maintenant, il nous faut avancer et nous fonder sur ces recommandations, ces études, pour réellement investir les fonds publics dans les gens qui feront une différence.
Oui. Je crois que nous avons travaillé près de six ans sur notre cadre de travail pour la province. Avec les efforts investis, les femmes qui ont participé aux travaux de notre comité... les changements de gouvernement à la suite d'élections, il faut repartir à zéro et former encore de nouveaux gens. Alors d'autres comités permanents sont créés. Et il faut faire plus de pressions.
Au bout du compte, cela finit par être frustrant. On n'en finit plus de tourner en rond. Et on laisse le cycle de violence se perpétuer. On n'arrête pas pour investir dans les programmes, dans des gens qui peuvent aider les enfants.
Je pense que Natalie serait mieux en mesure de vous répondre. Nous n'avons pas dit qu'il nous faut huit millions de dollars pour parachever notre cadre de travail. Nous essayons de cerner ce qui est à faire. Je dis huit millions, et ce serait bien de les obtenir, mais nos chances sont minces. Nous attendons de voir. Nous n'avons pas de montant exact.
C'est un problème, et il est très frustrant de ne pas connaître le coût de quelque chose. Il est bon, je pense, de savoir à quoi s'attendre. Il est plus facile de soutenir une demande de financement quand on sait à quoi l'argent servira. Si on ne le sait pas, quelqu'un d'autre saura quoi faire pou l'avoir.
Pour l'instant, nous pouvons informer notre comité de ce que tout cela coûtera, de ce que nous recherchons exactement et de la nature de nos besoins, pour faire concorder nos priorités avec un montant quelconque que nous pouvons essayer d'obtenir. Je trouve votre question très positive. Nous ne disons pas précisément ce que nous recherchons. Nous sommes prêts à prendre tout ce qu'on voudra bien nous donner. C'est probablement là où nous en sommes en ce moment, parce que c'est ce à quoi nous sommes habitués. Ils nous disent de prendre les 12 millions de dollars pour le logement et de le faire partout au Canada, de les répartir de telle manière, mais maintenant, il va falloir plus.
Alors c'est une excellente idée, de lier un budget à ce que nous faisons.
Nous pouvons comprendre que le budget soit serré, quoi qu'en dise le gouvernement. Nous avons travaillé sur ce cadre stratégique pendant probablement six ans, parce qu'il a changé. Mais voilà qu'en septembre, il y aura d'autres élections au Nouveau-Brunswick. Je pense que ce qui est à retenir de ce cadre stratégique, c'est qu'il nous faut des partenaires. Nous avons besoin de l'aide de plus qu'un gouvernement provincial. Tout coûte de l'argent, mais comme 49 recommandations ont été faites pour aider les femmes autochtones qui sont dans une situation de violence familiale, c'est notre priorité. Il nous faut dialoguer non seulement avec le gouvernement fédéral et la province, mais aussi avec le chef du conseil pour faire accepter ces recommandations à tout le monde. Cela vient de la collectivité. C'est là-dessus que nous travaillons. C'est ce que nous avons constaté au Nouveau-Brunswick, et c'est ce qu'il faut faire.
Je ne pense pas que nous en soyons au point de déterminer le coût, parce que 49 recommandations, ce sera sûrement cher. Je pense que si nous procédions par petites étapes et travaillions en partenariat, avec les deux gouvernements à nos côtés, et déterminions lesquelles de ces recommandations sont prioritaires, ce serait un bon début. Pour l'instant, nous ne pouvons pas donner de chiffres, ce serait impossible.
Cependant, à bien regarder les recommandations, certaines ne coûtent rien. J'ai 34 ans. Après le secondaire et l'université, je me suis rangée et alors que je fondais une famille je me suis rendu compte que je voulais travailler pour mon peuple. C'est donc ce que je fais depuis quatre ans.
Cela a un prix. Les rapports entre la province et les Autochtones, qu'ils vivent dans les réserves ou en dehors, sont très tendus. Ils sont quasi inexistants, en fait, mais je dois admettre que c'est en train de changer. Il y a eu d'infimes progrès, mais le problème, c'est que nous n'avons pas de relation de travail avec notre province. On en crée tout doucement. Alors certaines recommandations visent seulement une ouverture, la collaboration avec nos gens. Cela ne coûte rien. Il s'agit de travailler avec nous, de bien vouloir collaborer avec nos gens, et de cesser de nous renvoyer d'une compétence à l'autre. C'est ce que nous demandons depuis très longtemps. Nous sommes très reconnaissants, mais il faut faire plus.
Nous sommes en train de faire un recensement, à l'invitation de l'Alliance de la fonction publique. Une étude vient d'être publiée sur l'équité en matière d'emploi au sein de la fonction publique. Selon les chiffres, l'effectif de la fonction publique compte, je crois, 4,3 p. 100 de femmes autochtones. Je ne suis pas absolument sûre du chiffre, mais en tout cas c'est très peu. Pour ce qui est de celles qui sont membres de l'alliance, notre cercle a été chargé de déterminer où sont ces femmes, la nature de leurs tâches et de leurs emplois.
C'est ce que nous sommes en train de faire, et nous constatons que la plupart des femmes autochtones employées dans la fonction publique fédérale sont de niveau CR-4, un échelon très bas dans la fonction publique, en réalité. C'est pourquoi on nous a demandé de compiler ces statistiques, pour avoir des chiffres exacts à présenter au gouvernement, aux employeurs, à nos collectivités, en vue d'obtenir un soutien pour faire plus.
Ma dernière question concerne l'affaire Sharon McIvor. À votre avis, que devrions-nous faire? C'est très difficile, parce qu'il y a aussi un élément pécuniaire. C'est une chose que d'écouter notre coeur, mais c'est autre chose quand la raison s'en mêle.
Je disais à une collègue que nous devons d'abord observer ce qui se passe dans nos propres collectivités. Sharon McIvor visait en fait à éliminer la discrimination dans la Loi sur les Indiens. Pour ce qui est de la suite des événements, même nos organisations nationales autochtones se sont abstenues de prendre position, à cause des divergences d'opinions, même au sein de nos peuples, sur l'orientation à prendre.
Je pense que ce qu'il faut, et que j'ai demandé à mes collaborateurs de faire, c'est aller dans les collectivités, observer nos enfants, nos gens qui vivent dans les réserves et en dehors, et penser aux sept prochaines générations. Nous devons réfléchir aux 70 prochaines années, parce que les 70 dernières années, on a fait peu de cas de nous.
Très franchement, je ne saurais dire quelle voie prendre. C'est une position neutre personnelle, parce que d'un côté je suis heureuse de ce que fait le projet de loi, mais de l'autre ce n'est pas exactement ce que souhaitait Mme McIvor. Je suis sûre que vous avez lu vos notes d'information, dans le cahier blanc, sur le sujet. Elle a d'ailleurs écrit récemment aux députés pour leur exposer son point de vue. Alors je ne parlerai pas du cas de Sharon McIvor, mais personnellement, ma position sur le sujet est neutre. Je demande seulement que nos collectivités tournent leur regard vers les générations à venir, vers les 70 prochaines années.
Je vous remercie.
Le problème quand on passe en dernier, c'est qu'on entend des choses dont on voudrait parler, mais on a autre chose en tête. Alors je vais essayer de revenir aux questions que j'avais compté poser.
Nous étions à Iqaluit mardi, et à Labrador City mercredi. D'après ce que je sais de ma propre province, les problèmes avec les collectivités isolées et rurales sont similaires, quand on essaie de fournir le même genre de services qui sont généralement offerts en milieu urbain.
Pouvez-vous me dire combien il y a d'habitants au Nouveau-Brunswick, et le pourcentage d'Autochtones?
Il y en a 22 000, si vous parlez des Indiens inscrits, donc cela ne comprend pas ceux qui ne sont pas inscrits. Je ne connais pas le chiffre de la population du Nouveau-Brunswick.
Vous avez dit qu'il n'y a qu'une maison de transition autochtone au Nouveau-Brunswick qui fournit des services à tous les Autochtones qui vivent dans les réserves et en dehors. Combien y a-t-il de Premières nations?
Il y a 15 Premières nations au Nouveau-Brunswick.
J'ai été contente d'entendre ma collègue, Nicole, exprimer une volonté d'appuyer les Autochtones, de les habiliter, de déterminer comment le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, toutes les organisations qui ont été formées dans une province, et aussi les Premières nations, peuvent collaborer. Bien entendu, étant députée fédérale, je suis au courant des conflits entres compétences; je le reconnais. Nous avons tous un rôle particulier à jouer, et j'estime qu'il faut parvenir à cerner les enjeux et à trouver les solutions. Je trouve important de respecter les compétences des organisations de la province.
Donc, vous avez dit que les rapports sont très ténus entre les Premières nations, vos organisations, et le gouvernement provincial. Est-ce exact?
Oui. Nous ne sommes pas consultés quand ils modifient les politiques, et si nous sommes consultés, c'est après le fait.
Il n'y a qu'à regarder le plan d'action pour la santé du Nouveau-Brunswick, et vous verrez que les peuples autochtones ont été complètement exclus de ce processus. Ce n'est qu'après le fait, alors que le plan était sur le point d'être publié, que nous avons pu signaler au gouvernement qu'il y a dans la province 15 Premières nations, et qu'elles n'avaient pas été consultées. Nous avons ensuite passé l'été, huit semaines, à courir à droite et à gauche et à consulter, pour pouvoir joindre une annexe au plan d'action pour la santé de la province. Comment peut-on nous exclure? Nous existons.
Il n'y a qu'a voir les problèmes de santé auxquels nous sommes confrontés dans nos collectivités; c'est une épidémie de diabète. Il n'y a pas d'autre terme pour décrire cela. Comment la province peut-elle avoir un plan d'action pour les cinq prochaines années sans y inclure les Premières nations?
J'ai justement une question à ce propos. Nous avons dans notre province la Federation of Saskatchewan Indian Nations, qui rassemble toutes nos Premières nations de manière à ce qu'elles puissent s'exprimer d'une seule voix, dans le dialogue avec le gouvernement provincial. Avez-vous ce genre d'organisation, qui représente les peuples autochtones ou les Premières nations de votre province?
Nous avons une association pour les provinces de l'Atlantique. Il n'y a pas d'association représentant les quinze bandes de la province. Elles sont regroupées dans deux organismes, l'un comprenant douze bandes et l'autre, trois bandes. Il s'agit de l'Union des Indiens du Nouveau-Brunswick et du Mawiw Tribal Council. Alors, le gouvernement a deux interlocuteurs, et non un seul qui représenterait les quinze groupes. Encore une fois, on divise pour régner.
L'association de l'Atlantique existe, mais la Nouvelle-Écosse semble en tirer davantage que le Nouveau-Brunswick. Elle véhicule la perspective de la région de l'Atlantique, et non une perspective néo-brunswickoise. Nous réclamons une voix pour le Nouveau-Brunswick.
Je pense qu'il faut inclure les Autochtones vivant hors des réserves. Un très grand nombre de personnes ne répondent pas au questionnaire du recensement et un très grand nombre doivent quitter leur milieu pour travailler ou étudier. Leur adresse permanente demeure au même endroit, mais elles doivent obtenir des services hors des réserves. Dans certains cas, elles peuvent aussi avoir besoin de services hors des réserves pour des raisons de confidentialité. Alors, il faut tenir compte de ces facteurs et ne pas oublier les Autochtones vivant hors des réserves lorsqu'il est question des associations autochtones. Il faut inclure les Autochtones vivant hors des réserves.
Je ne dois pas oublier qu'il nous reste seulement 15 minutes à consacrer à ce groupe, quoiqu'il serait possible de continuer un peu plus longtemps.
Je voulais dire quelque chose, mais permettez-moi de vous communiquer les chiffres qu'on vient de me remettre très gentiment. Sarah a dit qu'il y avait environ 22 000 membres des Premières nations au Nouveau-Brunswick. Or, la population totale de cette province est de 751 904 habitants. Donc, le pourcentage est assez important.
Monsieur Clark.
Je suis désolé si j'ai dû m'absenter une seconde.
Je fais partie du Comité des affaires autochtones, et nous avons entendu le témoignage de Sharon McIvor, alors je connais assez bien les problèmes associés à la décision McIvor. Je sais que, pour la Colombie-Britannique, il a fallu ajouter 45 000 personnes de plus au registre. Puis, tout à coup, avec la série d'amendements, on est sorti du cadre prévu de l'étude. Nous espérons pouvoir reprendre l'étude comme il se doit au Comité des affaires autochtones.
Par ailleurs, on ne reconnaît pas la contribution des centres d'amitié à sa juste valeur. Je reviens à vous, Tamara. Lorsque je me suis rendu dans les centres d'amitié de ma circonscription du Nord de la Saskatchewan, j'ai pu constater que tout le monde se plaignait des règles concernant les sommes excédentaires à la fin de l'année. Je me trompe peut-être, mais il me semble que les centres d'amitié qui, à la fin de l'année, ont encore un peu d'argent issu du financement reçu doivent remettre cet argent au ministère du Patrimoine canadien ou à l'État. Est-ce bien exact?
Je ne connais aucun centre n'ayant pas tout dépensé son argent à la fin de l'année. La question ne semble donc pas se poser.
Compte tenu des dernières modifications apportées à notre contrat avec le ministère du Patrimoine canadien et l'Association nationale des centres d'amitié, l'argent ne nous est plus remis de la même manière. Il y a des centres qui ont conclu des accords différents, selon lesquels ils ne reçoivent pas tout l'argent en un seul versement. Désormais, nous devons produire un rapport avant de recevoir l'argent. Lorsqu'on n'a ni personnel possédant la formation nécessaire, ni directeur capable de rassembler l'information et de produire un rapport, il est certain qu'on risque de manquer à cette obligation.
Selon les règles actuelles, 50 p. 100 du financement est versé en avril ou au moment où les accords sont signés, soit il y a deux ou trois semaines dans le cas de la présente année. Puis, un autre versement correspondant à 45 p. 100 du total est fait à Noël ou à l'automne. Enfin, la dernière tranche, de 5 p. 100, est versée à la réception du rapport final. Il y a de nouvelles exigences de production de données en septembre pour les statistiques, alors les centres d'amitié peuvent négocier un financement accru de la part du gouvernement fédéral.
Donc, la situation varie d'un cas à l'autre, mais je ne connais aucun centre qui doit rembourser de l'argent parce que le moindre sou est utilisé. On essaie de tirer le maximum de l'argent qu'on reçoit. Nous n'avons aucun coussin financier et nous aurions besoin de recevoir davantage d'argent.
Non, mais je tiens à préciser qu'en Saskatchewan, deux ou trois centres d'amitié n'avaient pas dépensé tout leur argent à la fin de l'année.
En fait, il y a des centres que l'on considère en difficulté, ce qui signifie qu'ils sont fermés, n'ont pas fourni un rapport de vérification comptable ou n'ont pas répondu à certaines exigences financières dans leur rapport.
Actuellement, il y a 125 centres d'amitié au Canada. Je crois qu'il y en a deux qui ont dû fermer leurs portes en Saskatchewan. Il revient à l'association provinciale de décider si les sommes qui devaient leur être accordées seront partagées. Si ces centres ont dû rembourser de l'argent, il revient à l'association saskatchewanaise de décider si d'autres centres mériteraient de recevoir une partie de cet argent. Mais l'argent ne sera pas renvoyé à l'État fédéral.
Merci, Rob.
J'ai quelques questions. Les centres d'amitié ne reçoivent-ils plus un financement pluriannuel?
Il vous est difficile de planifier, n'est-ce pas?
Le bon sens voudrait qu'on vous accorde un financement pluriannuel.
Oui, une année à la fois. Nous nous heurtons au refus du ministère des Affaires indiennes de changer cette façon de procéder, ce qui nous pose le même problème. Il nous reste parfois de l'argent à la fin de l'année parce que nous ne savons pas quand nous recevrons le financement, ce qui nous oblige à prévoir une marge de manoeuvre. Or, lorsqu'il nous reste de l'argent, nous devons le rembourser. C'est pourquoi nous devons faire preuve de créativité, n'est-ce pas?
Alors, nous avons le même problème concernant le financement. Du reste, le financement n'est jamais augmenté. Nous ne bénéficions jamais d'une augmentation de 2 ou 2,5 p. 100 pour le coût de la vie. Jamais. Il n'y a aucune négociation avec le ministère des Affaires indiennes concernant le financement des maisons de transition.
C'est le problème que nous avons actuellement. Des décisions nous échappent. Le bail est signé directement par la bénéficiaire avec Skigin Elnoog Housing. Alors, techniquement, ce ne sont pas vraiment des unités de deuxième étape parce qu'une locataire peut en être expulsée sans que nous puissions l'empêcher. Mes unités de deuxième étape devraient être attribuées pour deux ans de manière à permettre à la bénéficiaire de trouver un mode de vie sain. Actuellement, nous sommes nerveux parce qu'il y a une plainte contre une bénéficiaire à cause du bruit. Le propriétaire lui a servi son dernier avertissement et compte l'expulser si la chose se reproduit une autre fois. Je n'ai aucune prise sur cette situation. Elle est censée être dans une unité de deuxième étape. Alors, nous collaborons avec la province et avec le propriétaire pour trouver un terrain d'entente, de manière à ce que ce soit Gignoo Transition House qui signe le bail avec lui. Si c'était le cas, nous placerions des femmes dans ces unités de concert avec la province. Mais ça ne fonctionne pas. C'est tout ce que je peux dire sans entrer sur le terrain politique. Nous avons commencé nos activités en janvier seulement, alors nous débutons.
Nous avons une maison de transition pour femmes autochtones et un centre pour les femmes sans abri non autochtones, qui est ouvert. Nous avons aussi un refuge pour les hommes. C'est tout.
Ma question s'adresse à celle qui voudra répondre entre vous deux. Pourriez-vous me dire quelle est la différence entre, d'une part, les femmes autochtones qui quittent les réserves et viennent vivre en ville et, d'autre part... Je voudrais savoir si le même phénomène existe dans votre province que dans l'Ouest, où un très grand nombre d'Autochtones, soit presque 50 p. 100, vivent dans les villes sans que nous sachions quelles sont les autorités compétentes pour s'occuper d'eux. La Ville de Vancouver doit tout de même en subir les lourdes conséquences. Les Autochtones sont perdus pendant que les autorités se renvoient la balle. Bien entendu, il y a aussi les femmes qui vivent dans les réserves.
Y a-t-il une situation pareille dans votre province? Y a-t-il un grand nombre de femmes autochtones vivant dans les villes du Nouveau-Brunswick? Dans l'affirmative, qui prend soin d'elles et leur fournit des services? Y a-t-il quelqu'un qui s'en charge?
Comme vous le dites, les Autochtones sont perdus pendant que les gens se renvoient la balle. Si une femme se retrouve dans une maison de transition à cause d'un problème de violence conjugale, nous devons l'aider à obtenir les services de la province pour le logement. Nous essayons de lui trouver un logement parce qu'elle ne jouit pas d'un traitement prioritaire. Nous essayons de l'aider à obtenir des prestations d'aide sociale. C'est parfois difficile parce que nous devons retourner voir la Première nation. La femme doit obtenir une lettre attestant qu'elle ne reçoit pas d'aide de sa Première nation. Parfois, les femmes ne sont pas capables d'obtenir cette attestation parce que c'est difficile et parce qu'elles ne savent pas avec qui elles doivent communiquer. Alors, elles sont dans les limbes. Elles ne savent pas où aller. Elles peuvent aller dans un centre d'amitié et risquent de se retrouver dans la rue.
Sur la première ligne, je me retrouve avec des urgences et des situations des plus critiques, où, par exemple, une femme n'a nulle part où aller et n'a pas mangé depuis deux jours. Nous sommes la dernière étape avant qu'elle soit obligée de dormir à la belle étoile, de manger à la soupe populaire et de ne plus pouvoir prendre une douche normalement. Nous offrons aux femmes de telles choses, c'est-à-dire de pouvoir se préparer un bol de soupe, un repas ou autre chose. Elles peuvent obtenir des vêtements propres pour leurs enfants.
À Fredericton arrivent des Autochtones en provenance des réserves de toute la province ou de divers autres milieux ruraux. Ils peuvent venir de Moncton, de Big Cove, de Woodstock ou d'ailleurs. Mais la province ne reconnaît pas vraiment ce que nous faisons pour aider les gens, qu'ils retournent ou non vivre dans leur milieu. C'est pourquoi notre groupe national se plaint. Nous aidons les sans-abri, ceux qui risquent de le devenir et les jeunes. Nous observons actuellement une augmentation du nombre d'hommes sans domicile fixe, alors nous sommes en train de mettre en oeuvre un important programme pour les hommes.
Mais la glace est mince. Nous manquons de ressources pour offrir nos vingt programmes. Nous avons un personnel peu nombreux. Nous brûlons la chandelle par les deux bouts. Nous ne savons plus à quel saint nous vouer maintenant. Il nous faut davantage d'argent. Les sans-abri sont nombreux, et les autorités ne reconnaissent pas l'apport du centre d'amitié pour les gens de Fredericton. Nous sommes livrés à nous-mêmes.
Je viens d'une collectivité rurale des Premières nations. La maison de transition la plus proche se trouve à Woodstock et n'est pas destinée aux Autochtones. C'est à une heure de chez nous. Un peu plus loin, il y en a une autre, à Edmundston. C'est à deux heures de route au nord. Cette autre maison sert essentiellement la population francophone du Nord du Nouveau-Brunswick. Alors, nos soeurs des régions rurales ont, elles aussi, un gros problème lorsqu'elles ont besoin d'une maison de transition.
Gignoo fait un travail formidable, mais nous devons nous rendre à deux heures de chez nous pour pouvoir bénéficier du merveilleux travail qu'on y fait pour les femmes qui en ont besoin. Je suis venue vous présenter la perspective rurale, parce que nous avons un accès inadéquat aux services. Nous souffrons même d'une connaissance inadéquate des services offerts aux populations rurales. Gail fait un travail formidable en milieu rural, mais beaucoup de gens ne sont pas au courant de ce travail. Il y a donc un problème de méconnaissance des services. Nous essayons d'y remédier au sein des populations rurales.
Mais il y a aussi un manque de ressources et de financement. En venant témoigner aujourd'hui, nous nous employons à recueillir les appuis dont nous avons besoin pour améliorer la situation. Comme Natalie l'a dit, nous voulons pouvoir avancer ensemble. Nous voulons être mis sur un pied d'égalité. Souvent, lorsque le gouvernement distribue de l'argent, nous sommes forcés de choisir entre les services en milieu rural ou en milieu urbain. On nous donne un très petit montant pour répondre aux besoins, ce qui nous oblige à choisir ceux que nous allons aider. Tamara fait des merveilles avec pratiquement rien.
Certaines pratiques exemplaires mériteraient d'être diffusées. J'espère que, pour la suite de votre étude, nous aurons l'occasion d'échanger, à l'échelle nationale, sinon internationale, sur les problèmes rencontrés par les populations rurales, dont on met les intérêts en opposition avec ceux de nos soeurs autochtones des milieux urbains.
Sarah aimerait dire quelque chose, mais avant de lui céder la parole, je voudrais vous signaler que, selon la Cour suprême, il est clair qu'un Autochtone demeure un Autochtone, peu importe qu'il habite dans une réserve ou ailleurs. Il a donc toujours droit à l'aide de l'État fédéral, qui a encore des responsabilités de fiduciaire envers les Autochtones au pays.
Je sais que, selon l'accord de Kelowna, certaines responsabilités en matière de santé, de logement et d'éducation devaient être transférées aux Autochtones. Si cet accord avait été appliqué, cela vous aurait-il aidé? Un tel mécanisme serait-il utile? Serait-ce plutôt encore une fois un mécanisme épouvantablement inefficace qui ne ferait qu'ajouter une quatrième couche bureaucratique?
Il me semble que nous sommes coincés parce que nous n'avons ni un tel mécanisme, ni un autre moyen pour les Autochtones d'obtenir ce dont ils ont besoin. Le rôle du gouvernement fédéral, en ce qui me concerne, est de s'acquitter de ses responsabilités de fiduciaire envers les Autochtones. Alors, je ne vois vraiment pas comment le gouvernement peut se permettre de rester les bras croisés devant le flot d'Autochtones qui se déverse dans les villes et de dire à la province qu'elle est censée s'en occuper.
Au Nunavut, le problème était totalement différent, parce que, là-bas, les Autochtones étaient responsables de leur sort. Mais nous avons entendu dire à Labrador City qu'il y avait un désaccord sur les champs de compétence qui était en train de dégénérer. Les grands oubliés dans tout cela sont toujours les Autochtones, dont les besoins sont négligés.
Alors, donnez-moi un mécanisme qui nous permettra d'entreprendre des changements.
Le gouvernement fédéral vient de se délester de l'aide à l'enfance, dont il a décidé de laisser la province s'occuper, alors qu'elle n'en a pas les moyens.
Plusieurs rapports ont en fait été préparés conjointement par l'Association des femmes autochtones du Canada et Amnistie Internationale. Cinq recommandations clés y ont été formulées en vue de mettre fin à cette forme de discrimination et de régler le problème du partage des responsabilités. Au lieu de se chicaner pour savoir si l'argent doit être provincial ou fédéral, on pourrait accorder le financement qui était prévu dans l'accord de Kelowna, ce qui mettrait fin aux inégalités dans les domaines de la santé, du logement, de l'éducation et des autres services fournis aux Autochtones. Ce sont cinq recommandations primordiales.
De plus, un autre rapport a été préparé. Il vient de l'ONU, je pense bien, plus précisément du Comité sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Ce comité a examiné la situation au Canada pour déterminer dans quelle mesure on y respecte la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.
Alors, des recommandations ont été formulées. Je ne suis pas certaine de ce qu'on en a fait, mais je sais qu'il n'en est sorti rien de concret sur le terrain. C'est l'un de mes chevaux de bataille. Les documents d'orientation ne font que s'empiler.
Nous avons montré quels mécanismes pouvaient être mis en oeuvre, quoique sans fournir les données budgétaires parce que nous n'en sommes pas encore là. Mais nous nous sommes fait entendre. Beaucoup d'organisations autochtones, à l'échelle nationale, provinciale et même locale, ont proposé des mécanismes et ont fait des recommandations au gouvernement. Mais, lorsqu'on procède à des compressions budgétaires affectant un programme important comme la Fondation autochtone de guérison, qui faisait un travail merveilleux avec les survivants et qui s'attaquait à la racine même du cycle de la violence, lorsqu'on fait disparaître le financement d'un tel organisme et qu'on retire aux Autochtones l'accès à de tels projets, nous nous retrouvons perdants sur le terrain, à l'échelle locale.
Les décideurs ont vu les recommandations. Je crois que certains mécanismes donnent de bons résultats. J'espère que, dans le cadre de votre étude, vous allez reprendre ces recommandations qui ont déjà été formulées et qui, aux endroits où elles ont été appliquées, parmi nos populations, ont donné de bons résultats. Peut-être que nous ne faisons pas toujours connaître ces résultats autant que nous le devrions. C'est un autre problème sur lequel nous devrions nous pencher. Il faut que les gens soient au courant de ce qui se fait de bien. Pendant trop longtemps, nous avons mis l'accent uniquement sur les conséquences du colonialisme pour nous.
Comme Tamara l'a dit, nous connaissons déjà la définition de la violence. Nous en connaissons trop bien les conséquences dans nos milieux de vie. Je pense que c'est ce que le comité nous demande: comment pouvons-nous améliorer le sort de toutes nos soeurs, en tant que mères, conjointes, filles et amies? Comment pouvons-nous améliorer le sort de nos frères? Nous savons ce qu'est la violence. Nous avons oublié les enseignements et la sagesse traditionnelle. Nous avons oublié nos traditions. Il s'y trouve pourtant les fondements du mécanisme que vous cherchez probablement. Je crois que vous allez trouver toutes les réponses dont vous avez besoin en discutant avec des soeurs aussi magnifiques que celles-ci.
Compte tenu des statistiques que nous devons produire pour la maison de transition, je sais que nous devons indiquer combien de bénéficiaires viennent des réserves et de l'extérieur des réserves. Nous devons indiquer combien sont des Indiennes inscrites et combien ne le sont pas. En tant qu'Autochtone, je me demande pourquoi nous devons faire ces distinctions. Je crois que, si nous parvenions à nous débarrasser de cette vieille école de pensée, nous pourrions faire davantage de progrès.
Merci beaucoup.
Comme nous devons entendre un autre groupe de témoins, nous allons devoir mettre fin à cette partie de nos audiences. C'est le genre de sujet dont vous pourriez nous parler encore longtemps.
Je pense, Tanna, que vous avez fait valoir un bon argument. Vous vous souvenez de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones? On avait prévu du financement, ce qui est synonyme de volonté politique. Mais, les décideurs ont tendance à se réfugier derrière l'excuse pratique des champs de compétence. C'est toujours à l'autre d'agir, à ce qu'on entend. Mais, au bout de compte, si nous voulons régler les problèmes, nous allons devoir aborder la question de la volonté politique.
Je voudrais toutes vous remercier d'être venues et de nous avoir présenté votre point de vue.
Oui, tout à fait. Vous pouvez certainement nous laisser votre mémoire pour que nous le lisions. Je croyais que vous vouliez nous le présenter maintenant.
N'oubliez pas que, lorsque des personnes doivent quitter leur milieu de vie et se rendre en ville parce qu'elles sont victimes de violence, elles perdent des repères culturels importants.
Je travaille avec de jeunes familles en milieu urbain. Lorsqu'elles sont hors des réserves, elles cherchent à nourrir culturellement leurs enfants. Nous n'avons qu'un seul programme à leur offrir dans ce but, et il s'agit du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones. Nous enrichissons le vécu culturel d'enfants âgés de deux à cinq ans et nous faisons de même pour les parents. Nous leur enseignons leur langue autochtone. Nous leur montrons la vannerie et le perlage. Nous leur donnons des cours de cuisine traditionnelle parce qu'ils en ont été séparés. Il vous faut comprendre que nous devons leur permettre de renouer avec leur culture également.
Notre culture disparaît, et personne ne semble vouloir la ranimer. Il est impératif, pour mettre fin à la violence, d'éduquer la population de façon à ce qu'elle comprenne qui nous sommes. Si nous redonnons à notre culture ses lettres de noblesse, le problème de la violence ne sera plus l'objet de constantes discussions parce qu'on comprendra qui sont les Autochtones et quel est leur apport à la société canadienne.
Merci beaucoup, Sarah.
Je dois suspendre la séance. Si vous laissez à la greffière les données que vous avez apportées, nous pourrons les distribuer.
Bonjour, et merci d'être venues.
Nous apprécions vraiment que vous soyez venues nous fournir certains éléments d'information que nous recherchons. Notre comité étudie actuellement le problème de la violence contre les femmes autochtones. Quoique nous connaissions bien ce problème, nous nous rendons compte qu'il s'aggrave, avec des répercussions bien tangibles sur les vies des gens.
Nous nous penchons sur la nature et l'étendue de la violence contre les femmes autochtones au Canada. Nous cherchons à voir comment ce problème diffère d'une région à l'autre. Nous cherchons aussi à en cerner les causes profondes. Nous nous sommes fait dire que ces causes étaient connues, mais nous voudrions comprendre comment il se fait, dans ce cas, qu'on n'arrive pas à inverser la tendance. Nous espérons déterminer pourquoi la violence contre les femmes autochtones semble continuer d'augmenter au pays. Vous pourrez peut-être nous indiquer quels moyens seraient susceptibles de produire de bons résultats à l'échelle nationale ou locale. Quelles mesures devraient être prises, selon vous?
Normalement, dans une réunion comme celle d'aujourd'hui, nous vous donnerions chacune 10 minutes pour nous faire un exposé, puis les membres du comité se verraient chacun accorder une courte période pour vous poser des questions. Cependant, nous nous sommes aperçus que, lorsque nous nous déplaçons dans les régions pour entendre des témoignages, il vaut mieux permettre un maximum d'échanges entre toutes les personnes présentes. Donc, nous voudrions que vous ne nous fassiez qu'un résumé de trois ou quatre minutes de ce dont vous voulez nous parler, de manière à ce que nous ayons davantage de temps pour les échanges. Qu'en pensez-vous?
Une voix: Cela nous convient.
La présidente: Cela vous convient. Bien.
Nous allons commencer par donner la parole à Melissa Cooke, de la Première nation de Lennox Island.
Bonjour, madame la présidente et chers membres du comité.
Je travaille dans un refuge pour femmes de la Première nation de Lennox Island, refuge qui s'appelle Chief Mary Bernard Memorial Women's Shelter et qui comprend cinq pièces et environ 12 lits.
Nous enseignons aux femmes comment se préparer un budget et nous les aidons à développer leurs aptitudes à la vie quotidienne, de manière à les rendre autonomes. Les femmes autochtones ont le droit de demeurer dans notre refuge jusqu'à un an. Elles ont ainsi le temps d'acquérir de meilleures compétences parentales, par exemple, et de trouver un nouveau logement.
Nous faisons entre autres de l'éducation, et je sais qu'il faut continuellement en faire. Certaines femmes ne connaissent pas, à leur arrivée au refuge, les effets de la violence verbale et des traumatismes affectifs qu'elles ont subis. Elles prétendent souvent s'être fabriqué une solide carapace, alors il faut continuellement éduquer les femmes.
Sur le terrain, les gens pointent souvent du doigt, en tant que causes profondes, l'alcoolisme, les difficultés financières, la banalisation de la violence et la violence dont l'agresseur a pu lui-même être victime.
Une aînée à laquelle j'ai parlé m'a dit qu'il fallait retourner aux sources et favoriser davantage la guérison des gens. Je vous cite ses propres paroles:
Nous devons éduquer nos familles pour leur montrer comment vivre sainement. La population doit avoir l'aide dont elle a besoin pour que chacun puisse vivre en sécurité de son milieu. Les femmes autochtones s'entraident. Nous donnons la vie et nous élevons les enfants. Nous nous comprenons entre nous. Actuellement, il y a un besoin, mais les programmes, les services et le financement sont si limités que nous ne sommes pas capables d'aider nos femmes à s'en sortir vraiment pour franchir ce cap dans leur vie. Elles revivent les mêmes problèmes.
Lorsqu'on écoute vraiment les femmes, on comprend entre autres que les solutions doivent venir des populations elles-mêmes, qui doivent être responsabilisées.
Compte tenu de mon expérience de travail à l'île Lennox, je peux vous dire que nous devrions y améliorer les services-conseils. Il n'y a qu'une seule psychologue, et elle n'est présente qu'une fois par semaine. Nous devrions pouvoir compter sur davantage de services et davantage d'aide pour les femmes.
Voilà donc en gros ce que j'avais à dire.
Merci.
Je cède maintenant la parole à Mme Roseanne Sark, directrice du programme de santé de la Mi'kmaq Confederacy of Prince Edward Island.
Merci pour l'invitation à prendre la parole aujourd'hui. J'ai préparé un sommaire des points que je voudrais soulever aujourd'hui. J'aimerais vous entretenir un peu du travail que je fais au sein de l'association des femmes autochtones.
Je suis une membre active de l'association des femmes autochtones de l'Île-du-Prince-Édouard. J'ai présenté quelques fois des ateliers sur la violence conjugale subie par les femmes dans leur milieu.
J'ai oeuvré en tant que spécialiste de la prévention dans le cadre du programme de la Première nation de Lennox Island contre la violence conjugale. Il s'agissait de promouvoir la tolérance zéro à l'égard de la violence conjugale.
J'ai collaboré étroitement avec la population locale pour mettre en oeuvre diverses activités de prévention. C'était au début des années 1990. À l'époque, la population ne parlait pas du problème de la violence conjugale. J'avais comme rôle de briser cette loi du silence pour que les gens hésitent moins à parler du problème.
Nous avons entre autres mis en oeuvre des activités de promotion de la culture et d'une vie familiale saine. Nous avons aussi donné aux gens des cours de compétences parentales.
Depuis cinq ans, je me consacre au programme de santé. Il a fallu beaucoup travailler pour élaborer ce programme, mais nous y avons toujours rattaché toutes les dimensions de la santé. Nous cherchons à outiller les femmes, nous mettons sur pied divers programmes et nous établissons des partenariats.
À mes yeux, notre partenariat avec l'association des femmes autochtones est important parce que c'est un organisme qui a fait de grands progrès. À une certaine époque, l'association n'était pas aussi active qu'elle l'est aujourd'hui, où elle accomplit sur le terrain des choses formidables qui méritent d'être valorisées non seulement par le gouvernement, mais aussi par la population autochtone elle-même. Il y a beaucoup de participation dans les collectivités autochtones, et c'est formidable parce que les femmes et les filles autochtones peuvent constater les progrès, ne serait-ce que sur le plan de la solidarité, qui se manifestent particulièrement dans la campagne des Soeurs par l'esprit, où elles constituent un front commun dans une perspective avantageuse. Il s'agit de favoriser l'unité des femmes pour qu'elles puissent défendre leurs droits. Elles doivent se faire respecter en tant que femmes, et plus particulièrement en tant que femmes autochtones. C'est très bien.
Je suis fière d'être une Micmaque de l'Île-du-Prince-Édouard. Il faut encourager les femmes autochtones à être fières de ce qu'elles sont. C'est une question d'identité. Nous sommes des Autochtones, et c'est ainsi que nous devons nous voir dans ce pays.
Il est formidable de pouvoir constater qu'il y a des progrès. En tant que directrice de la santé, si je peux aider l'association des femmes autochtones, je le ferai comme je l'ai toujours fait.
J'aimerais aussi vous parler du travail que nous faisons actuellement, dans le cadre de notre programme, quant aux répercussions prévisibles des règlements qui seront versés aux survivants des pensionnats autochtones. Ces règlements sont une très bonne chose, mais, une fois qu'on aura commencé à les verser, il en découlera une série de conséquences. Compte tenu de ce que nous avons pu observer dans le passé, lorsque des gens ont reçu de tels paiements, nous savons que les conséquences ne sont pas toutes très bonnes. Certaines histoires se passent de commentaires.
Je cultive l'optimisme dans mon travail et j'essaie de ne pas m'appesantir sur le côté plutôt sombre des choses, mais les survivants font partie de notre réalité actuelle. Nous devons songer à les protéger. Ils ont des besoins qui varient d'une personne à l'autre, tout comme les femmes. Je voudrais que l'on cherche à répondre aux besoins des femmes selon l'étape où elles se trouvent dans leur vie. Chaque personne a des besoins différents.
Nous avons toutes des besoins différents. Il y en a qui cherchent à se trouver un emploi et d'autres qui voudraient mettre fin à la violence dont elles sont victimes. D'autres encore voudraient améliorer leurs perspectives de carrière, et certaines voudraient simplement découvrir leur identité autochtone. Je pense qu'il est important que envisagions les choses sous cet angle. Comment pouvons-nous agir concrètement dans cette optique?
Les différences concrètes ne doivent pas seulement se traduire par du financement, mais aussi par une volonté de collaborer et de puiser dans cette collaboration la capacité d'obtenir des résultats tangibles.
Je suis vraiment fière de dire que je viens de l'île Lennox, où l'on cherche avec dynamisme à améliorer le sort des femmes. Le refuge pour femmes dont on s'est doté là-bas est une belle réalisation, et il n'est pas uniquement au service des femmes autochtones. Il vient en aide à d'autres femmes, et j'en suis fière.
Sur ce, je vais laisser d'autres personnes prendre la parole.
Merci.
Je cède maintenant la parole à la président du réseau Newfoundland Aboriginal Women's Network, Sheila Robinson. Sheila, vous pouvez commencer.
Premièrement, je tiens à vous remercier, moi aussi, de nous donner l'occasion de vous adresser la parole. Je suis venue vous parler du bon travail réalisé par le Newfoundland Aboriginal Women's Network, dans le cadre de son programme de prévention de la violence, au cours des dernières années.
Notre organisme est relativement jeune. Il a été constitué en personne morale en 2005. La plupart de nos membres sont des femmes autochtones ne figurant pas parmi les Indiennes inscrites. Certaines sont néanmoins des Indiennes inscrites et habitent parfois dans les réserves, parfois ailleurs. Notre travail de prévention de la violence a commencé en 2007, lorsque nous avons tenu des cercles de discussion au sein des collectivités autochtones pour que les femmes s'y trouvant puissent nous parler des problèmes qu'elles vivaient. Elles nous ont dit qu'elles se sentaient isolées, qu'elles voulaient avoir leur mot à dire dans la recherche des solutions aux problèmes ayant une incidence sur leur vie et qu'elles devaient participer à la transmission de la culture. De nombreuses femmes ont peur de se plaindre des mauvais traitements qu'elles subissent, comme cela se produit régulièrement dans les collectivités autochtones. Elles sont d'avis que tant les femmes que les hommes doivent être éduqués pour comprendre que la violence n'est jamais la solution.
Par conséquent, nous nous sommes approprié ce message puissant et nous avons mis en oeuvre un projet en trois phases intitulé « Aboriginal Women on the Verge of Rising: Breaking Barriers, Building Strong Minds ». Nous nous sommes employés à outiller les femmes dans leur milieu de vie. Nous avons examiné quelques trousses déjà produites, et nous en avons acheté une à l'Association des femmes autochtones du Canada. De plus, nous avons obtenu gratuitement une trousse produite ici, à Fredericton, et intitulée « Les sentiers de la guérison: Prévention de la violence familiale dans les collectivités autochtones ».
Nous avons rassemblé des femmes qui étaient volontaires pour participer à un atelier de formation des formatrices. Pendant 14 mois, 53 femmes en provenance de 18 collectivités se sont déplacées, parfois en plein hiver, pour prendre part à cet atelier, qui portait sur la violence et la prévention de la violence, notamment les agressions sexuelles, les agressions commises par des connaissances, l'intimidation, les mauvais traitements d'ordre psychologique et affectif, la sensibilisation au suicide parmi les jeunes et la prévention de ces suicides. Certaines participantes étaient enceintes et d'autres assistaient aux ateliers avec leur nouveau-né. Les femmes ainsi formées sont retournées dans leur collectivité pour y donner les mêmes ateliers. Jusqu'à maintenant, 36 ateliers sur la prévention de la violence et 18 ateliers sur le suicide parmi les jeunes ont eu lieu. Il y a eu au total plus de 800 participants.
Grâce à ce travail, les femmes de quelques collectivités nous ont signalé des cas de mauvais traitements subis par des aînés. Elles nous ont demandé de l'information à ce sujet. Au cours des ateliers, nous avons ajouté une dimension culturelle et des enseignements traditionnels à la matière théorique. Donc, en plus d'informer les participants sur le suicide parmi les jeunes ou sur les mauvais traitements d'ordre psychologique et affectif, nous avons appris aux participants ce que sont les cercles de guérison, les cérémonies de la suerie, les cérémonies du calumet et les cérémonies de purification. En raison de la situation unique de Terre-Neuve lors de son entrée dans l'union fédérale en 1949, Joey Smallwood a pu faire disparaître d'un seul trait de plume tous les Indiens de l'île.
Puis, nous avons parlé du mythe du massacre qui nous a été enseigné dans nos écoles. Les Micmacs auraient été prétendument amenés à Terre-Neuve pour y tuer les Beothuks. Nous avons souffert une énorme perte culturelle, linguistique et identitaire en tant que peuple autochtone. Le lien que nous avons fait entre l'élément culturel et ce que j'appelle la matière théorique, si vous me permettez l'expression, a donné de très bons résultats dans nos collectivités.
De plus, comme je l'ai indiqué, certaines femmes ont demandé que soit intégrée à la matière la question des mauvais traitements subis par les aînés, en utilisant le même modèle culturel. Alors, nous avons obtenu plus d'argent et nous avons organisé des ateliers ce sujet. Nous prévoyions au départ les donner à 72 participants, mais nous en avons eu jusqu'à maintenant 94.
Les choses ont beaucoup évolué. Nous allons continuer d'oeuvrer dans nos collectivités au cours des deux prochaines années. Nous allons continuer d'y offrir ces ateliers au cours de la prochaine année et nous allons tâcher d'augmenter la participation des hommes. Des jeunes hommes ont assisté à nos ateliers même si ceux-ci étaient destinés aux femmes. Ils y ont parlé avec beaucoup d'ouverture des mauvais traitements qu'ils ont subis et de la guérison qui leur a été possible, sur le plan culturel, après avoir assisté aux ateliers et avoir ainsi renoué avec leur culture.
Si je pouvais résumer le travail que nous faisons en une seule phrase, je dirais que, pour obtenir de bons résultats, pour qu'il y ait guérison et pour que le cycle de la violence prenne fin, il faut agir à la base, dans les collectivités. Les hommes et les femmes doivent participer, et la réappropriation de la culture doit constituer une partie importante de la guérison.
Merci.
Merci beaucoup.
J'aimerais que les membres du comité se présentent très brièvement, puis nous pourrons amorcer la discussion sur le sujet.
Kelly, voudriez-vous commencer, s'il vous plaît?
Oui.
Bonjour, je m'appelle Kelly Block. Je suis la députée conservatrice de la circonscription de Saskatoon—Rosetown—Biggar.
Il s'agit d'un grand privilège d'être ici avec vous ce matin. Je ne siège pas normalement au comité, mais je suis reconnaissante de tout ce que j'ai pu y apprendre. Merci.
Bonjour. Je m'appelle Sandra Gruescu. Je travaille à la Bibliothèque du Parlement et je suis responsable de la rédaction du rapport final et des recommandations. Je suis au service du comité.
Je m'appelle Hedy Fry. Je suis la présidente du comité. Je suis la députée libérale de la circonscription de Vancouver-Centre, de la lointaine Colombie-Britannique, à l'autre bout du pays.
J'ai été ministre de la Condition féminine durant six ans et demi sous l'administration Chrétien. Ces enjeux semblent être récurrents. Rien ne semble s'améliorer. Tout semble être au même point; en fait, la situation s'aggrave. J'éprouve donc un profond sentiment de frustration.
Je crois que vous avez visé juste en disant que l'activisme communautaire semble être la seule et la meilleure option, lorsque c'est fait d'une façon respectueuse des différentes cultures.
Je m'appelle Angela Crandall, et je suis la greffière du comité. Je fournis des conseils procéduraux et j'offre un soutien administratif au comité.
Je m'appelle Rob Clarke. Je suis du Nord de la Saskatchewan, de la circonscription de Desnethé—Missinippi—Churchill River. Je suis le seul député autochtone à la Chambre des communes. Je crois que la population de ma circonscription est composée à environ 72 p. 100 d'Autochtones.
Je siège également au Comité des affaires autochtones et je crois que vous avez témoigné lors d'une des séances de ce comité. Je ne parviens pas à me rappeler du sujet.
Kelly et moi agissons à titre de membres remplaçants. Ce que vous allez dire ici me sera probablement aussi utile au Comité des affaires autochtones. On dirait que beaucoup d'enjeux se répètent d'un comité à l'autre. J'espère qu'une partie de votre témoignage d'aujourd'hui pourra également être utilisé par nos comités réguliers.
Bonjour. Je m'appelle Nicole Demers. Je suis la députée bloquiste de la circonscription de Laval, au Québec. Je suis très heureuse d'être ici. Merci.
Voulez-vous commencer la période de questions? Y a-t-il un sujet par lequel vous voudriez commencer? Qui veut lancer la discussion?
D'accord.
Comme je l'ai mentionné, je ne siège pas normalement au comité, mais j'ai eu l'occasion cette semaine de voyager avec le comité pour étudier la question. Nous étions à Iqaliut et à Labrador City plus tôt cette semaine.
Nous avons remarqué beaucoup d'enjeux semblables dans les différentes régions où nous nous trouvions. Nous avons des éléments similaires en Saskatchewan: un grand territoire et des Premières nations dans nos collectivités. Rob n'a pas mentionné que sa circonscription de Desnethé—Missinippi—Churchill River couvre les deux tiers de la province. La majorité des Autochtones de la province y vivent. Toutefois, il y a aussi beaucoup d'Autochtones qui vivent dans les villes de ma circonscription.
J'ai énormément entendu parler de la nécessité de régler la question de la compétence, à savoir qui est responsable d'offrir des services et de s'assurer qu'il y a un financement adéquat pour corriger les problèmes que vous et d'autres avez soulevés cette semaine.
Je crois sincèrement qu'il revient au gouvernement fédéral d'établir une vision pour tous les Canadiens sur la santé, sur l'aide sociale, sur le bien-être et sur la qualité de vie que nous avons au Canada, qui tient compte du fait que nous avons une population très diversifiée et que les nations au sein de notre nation ont des valeurs et des cultures qui doivent être respectées.
Je crois aussi que nous devons travailler de concert avec les provinces et les territoires pour décider des principes directeurs qui nous aideront à mettre en place le partenariat nécessaire pour répondre aux enjeux et aux besoins qui ont été recensés dans les localités. C'est là que les organismes comme les vôtres entrent en jeu. Vous êtes sur la ligne de front. Vous vous occupez de la population et lui fournissez des services. Vous êtes nos yeux et nos oreilles sur le terrain, pour ainsi dire. Nous comptons donc vraiment sur les discussions avec vos organismes pour nous aider, à un niveau qui semble parfois vraiment très élevé, à traiter de ces questions.
Il a été question durant le témoignage du précédent groupe d'une approche atlantique, dans une certaine mesure, pour traiter des enjeux au sein des collectivités autochtones. Elle a peut-être même été confirmée ce matin, étant donné que nous avons des représentants de l'Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve ici, au Nouveau-Brunswick.
Pouvez-vous m'en parler? Dans votre travail et dans vos types de partenariats avec les organismes des autres provinces, y a-t-il davantage une approche atlantique ou une approche provinciale?
J'ai toujours pensé qu'il était préférable de collaborer avec d'autres organismes, parce que je crois qu'ensemble, on avance plus vite.
À une certaine époque, parce que j'avais de l'expérience dans le domaine de la prévention de la violence familiale, j'ai eu l'occasion de travailler avec le Centre Muriel McQueen Fergusson pour la recherche sur la violence familiale. J'ai notamment été amenée à participer à leurs travaux en assistant à l'un de leurs ateliers. Les responsables de l'atelier parlaient des recherches du centre sur la violence envers les femmes dans les régions rurales et isolées. Ils faisaient des recherches, et je leur ai parlé des femmes autochtones et de leur approche, parce qu'ils étudiaient la question sous divers angles. Ils allaient utiliser un modèle qui permettait d'étudier la question de la violence sous différents angles. Vous pouvez sans doute trouver de l'information à ce sujet sur le site du centre.
L'une des choses dont j'ai parlé, c'était que les femmes autochtones ont grandi au sein d'une culture qui leur était propre, d'une société qu'elles connaissaient très bien. Au cours de la colonisation, les choses ont changé pour les femmes, et elles ont été capables de s'adapter facilement, parce que c'est tout simplement dans leur nature d'accepter une autre société. J'ai donc parlé un peu de la façon de voir les choses des femmes autochtones, de leur cheminement, de ces points de vue, c'est-à-dire du fait de vivre en communion avec la terre et au rythme des saisons. Aujourd'hui, cela se retrouve toujours en elles et dans leur manière de penser.
Aujourd'hui, leur vie et leur monde sont bouleversés. Ces choses qui allaient si bien pour elles par le passé, leur vie harmonieuse, ne sont plus harmonieuses, parce que leur société matriarcale est devenue une société patriarcale, et qu'elles doivent vivre selon cette nouvelle réalité.
Elles ne sont pas nécessairement obligées. Elles ont le choix de s'accepter en tant que femmes autochtones. Elles peuvent accepter leur identité. Il existe encore aujourd'hui des enseignements qui leur permettent de le faire, et je crois que ce genre d'enseignement culturel doit continuer pour qu'elles puissent trouver un équilibre.
L'équilibre ne se trouve pas seulement au sein de leur culture. C'est une question d'adaptation. Nous nous sommes adaptés à notre nouvelle réalité. Nous nous adaptons aux choses que nous acceptons, ces choses formidables qui sont offertes à nos collectivités et qui sont fondées sur le travail de longue haleine des organismes.
J'ai participé à cette recherche. J'ai été en mesure d'apporter un nouveau regard et j'ai expliqué de quelle manière nous pouvions évaluer, du point de vue autochtone, les programmes offerts au sein de la communauté. Lorsqu'on regarde les programmes offerts, répondent-ils à nos besoins? Répondent-ils aux besoins des Autochtones? Lorsqu'ils sont conçus, peu importe par qui, a-t-on à l'esprit la perspective de la communauté autochtone?
Nous examinons différents aspects de la sécurité des femmes, ainsi que la composition de nos collectivités. Les éléments qui faisaient partie de la composition de nos collectivités sont: la culture, la communauté, l'école et tous les aspects qui composent une collectivité. Le projet auquel j'ai participé était vraiment intéressant.
Pour ce qui est des autres approches en Atlantique, du côté de la santé, nous regardons tous les aspects. Je collabore avec le Conseil de santé atlantique des Micmacs et des Malécites, et ce conseil de santé traite tous les aspects de la santé. La santé mentale est l'une des priorités. Nous avons examiné la question dans ce domaine et les initiatives couvrent l'Atlantique. Un certain nombre d'entre elles. Toutefois, il est aussi difficile de réussir à rejoindre tout le monde, parce que Terre-Neuve-et-Labrador est souvent oubliée. Je peux aussi mentionner l'Île-du-Prince-Édouard comme exemple, parce que ce qui est pensé au niveau national ne prend pas toujours en considération l'opinion de l'Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve. Je crois que cela doit être examiné.
L'un de nos professionnels de la santé — et je donne cela comme exemple — se rend à l'APN, ou à d'autres organismes qui discutent des cadres nationaux, pour représenter l'Île-du-Prince-Édouard. La question que je me pose est la suivante: cette personne connaît-elle vraiment la réalité de la province? Qui est mieux placé pour parler au nom de la province que la province elle-même? Je crois qu'on devrait songer à cela, parce que les gens de la province comprennent davantage les préoccupations de la population et les enjeux de leur territoire.
Donc, pour ce qui est de l'Association des femmes autochtones, il n'y a aucun problème, parce que nous avons l'Association des femmes autochtones de l'Île-du-Prince-Édouard, mais nous nous attardons aussi aux autres aspects du mieux-être. La santé constitue une partie importante du mieux-être. Donc, nous parlons toujours de la santé. Elle fait partie d'une vie équilibrée. La santé est très importante.
Dans mon travail, je regarde toujours les situations de façon globale et je préconise énormément la roue médicinale. Le mieux-être est le but de la roue médicinale. Elle se compose de l'équilibre individuel, de l'équilibre familial, de l'équilibre social et de la collectivité en général, et la manière dont ces éléments communiquent entre eux dépend de notre capacité à travailler ensemble.
Je crois qu'une saine collaboration devrait être encouragée entre les provinces. Je crois que c'est efficace.
Nous devons poursuivre. Merci.
Melissa et Sheila, avez-vous quelque chose à ajouter au commentaire de Roseanne?
En ce qui concerne une approche atlantique, notre refuge a ouvert ses portes assez récemment. Nous sommes en activité depuis trois ans. Au début du projet, nous avons visité des refuges au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse pour voir leurs politiques et leurs procédures. Certains éléments ne fonctionneront peut-être pas dans notre collectivité, mais nous devons les évaluer et prendre des décisions.
De plus, nous avons accueilli des femmes qui venaient du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse pour des raisons de sécurité. Elles sont venues à l'Île-du-Prince-Édouard pour travailler sur elles-mêmes et elles ont décidé qu'elles voulaient retourner dans leur réserve. Des partenariats sont donc en place.
Je trouve intéressant que vous parliez d'une « approche atlantique », parce que nous sommes très isolés à Terre-Neuve. Je parle de Terre-Neuve et non du Labrador. L'un des aspects de l'enjeu, c'est que nous n'avons toujours pas le statut légal, nous ne sommes pas considérés comme des Indiens inscrits, et nous sommes rendus à un point où les femmes ont compris qu'elles n'ont pas besoin de traîner leur acte de naissance pour savoir qu'elles sont vivantes, qu'elles n'ont pas besoin d'une carte d'appartenance pour savoir qu'elles sont autochtones. C'est quelque chose de nouveau pour nous.
Il y a un organisme, l'Association des femmes autochtones de Terre-Neuve, qui est associé à l'AFAC, mais nous trouvions qu'il n'allait pas vers les collectivités. J'ai moi-même écrit deux lettres à cet organisme pour m'y joindre, mais je n'ai pas reçu de réponse. Il y a beaucoup d'histoires semblables. Sans vouloir faire trop de politique, nous avons décidé de créer notre propre organisme.
Nous voulons aider le plus possible. Je crois que ce que nous allons probablement faire, c'est d'aller au Labrador. Patty Pottle, la ministre des Affaires autochtones, connaît bien ce que notre organisme accomplit et elle nous a demandé personnellement si nous pouvions y aller. Nous recevons un soutien financier énorme du gouvernement provincial. Dans le présent budget, le gouvernement nous a accordé 100 000 $ en fonds d'exploitation, ce qui est du jamais vu, parce que ce ne sont pas des fonds alloués à des projets précis; c'est de l'argent que nous pouvons utiliser pour financer nos activités.
Nous collaborons dans notre province avec les centres pour femmes, la GRC, les centres de ressources familiales, etc. Nous collaborons avec Conne River, la seule réserve sur l'île qui fait partie de la province. Tout fonctionne, mais nous avons encore du chemin à faire avant de collaborer avec nos collègues des autres provinces. Nous attendons cela avec intérêt.
Oui.
Pour poursuivre sur ce que vous avez dit, je crois que c'était une sage décision de venir au Canada atlantique pour discuter des problèmes auxquels vous faites face et des solutions, car il me semble que vous devez trouver que certaines stratégies fonctionnent très bien auprès des plus petites populations. Je suis ravie que vous ayez parlé de certains de vos partenariats, Sheila.
Je me demande si vous pourriez donner des exemples de réussite au Canada atlantique, de personnes ou de groupes dont nous pourrions apprendre des choses. Y a-t-il des modèles de réussite que nous pouvons utiliser dans le reste du Canada?
Je vais commencer.
Je crois que le travail que nous effectuons au Newfoundland Aboriginal Women's Network dans le cadre de notre initiative de prévention, grâce à l'approche « former les formateurs », est un exemple de réussite. Les femmes nous disent qu'elles se découvrent. Beaucoup de femmes qui sont venues et qui ont accepté de devenir formatrices n'avaient pas fait d'études. Elles n'avaient jamais été animatrices. Bon nombre de ces femmes étaient elles-mêmes victimes de violence et l'ont été toute leur vie. En 14 mois, nous avons vu ces femmes s'épanouir comme des plantes au soleil. Elles sont devenues de meilleures communicatrices et de meilleures leaders. Elles étaient prêtes à retourner dans leurs collectivités et à leur communiquer ce qu'elles avaient appris.
L'une de ces personnes vient de participer à un atelier sur le démarrage d'une entreprise qui s'est tenu en Nouvelle-Écosse. Plusieurs d'entre elles sont retournées aux études, ont terminé avec succès une formation régulière et travaillent maintenant à temps plein. Elles ont trouvé leur voie.
Un peu plus tôt ce matin, pendant que je rentrais discrètement dans la salle, on faisait allusion à la grande importance de la revitalisation de la culture. C'est effectivement très important. Il y a des femmes qui n'ont jamais entendu le son d'un tambour ou qui n'ont jamais joué de cet instrument, qui n'ont jamais participé à une cérémonie du foin d'odeur, et tout à coup, elles se réunissent et forment un cercle. Grâce au travail que nous effectuons, des écoles nous appellent et nous demandent de venir les rencontrer. Des centres pour personnes âgées et des groupes communautaires font la même chose. Nous pouvons maintenant être fiers de notre culture. Nous nous tournons vers elle. Nous nous demandons toujours ce que notre culture nous dit et ce que nous devrions faire. Nous consultons nos aînés plutôt que de tenter de trouver des réponses à nos questions en fouillant dans un dictionnaire ou en faisant une recherche sur Google. Nous demandons à nos aînés comment faire. Nous nous assoyons en cercle. S'il y a un problème, nous nous assoyons en cercle et en discutons, et cela fonctionne.
Je suis très fière de dire que selon moi, nous avons une solution modèle.
L'un des exemples ressemblait beaucoup à notre groupe de soutien pour les femmes victimes de violence. Il a eu un vif succès et je crois que c'est parce qu'il y avait une aînée dans le groupe. Les femmes étaient très intéressées par le volet culturel et les enseignements.
L'une des choses qui a bien fonctionné dans mon cas, c'est l'établissement de bonnes relations pour le travail que nous effectuons dans le cadre du programme pour les survivants des pensionnats. Nous avons assisté à une conférence sur les intervenants de première ligne. Elle était destinée aux intervenants de première ligne qui travaillent auprès des survivants des pensionnats indiens. Comme un certain nombre de personnes parmi nous venaient de l'Île-du-Prince-Édouard, nous avons décidé ce que nous allions faire à l'Île-du-Prince-Édouard.
L'idée que nous avons eue, c'est de former un groupe de travail pour examiner bon nombre de répercussions auxquelles les survivants seront confrontés, en tenant compte de leurs différents besoins. Certains pourraient avoir des problèmes de violence, des problèmes financiers. Il y a différentes choses à examiner.
Nous avons la participation de la police — pas seulement de la GRC, mais des policiers municipaux également, en raison de la population urbaine. Parmi les participants, il y a l'Association des femmes autochtones, le Conseil des Indiens, et notre organisation également. Comme nous avons un programme et nous nous occupons de la gestion du comité, nous élaborons souvent un plan de travail ensemble, car nous avons différents points de vue, n'est-ce pas?
Cela fonctionne. Nous travaillons encore ensemble. Nous faisons des progrès. Nous sommes en train d'élaborer un guide de ressources destiné aux intervenants de première ligne qui l'utiliseront comme guide pour aider les survivants qui auront recours à leurs services. Et je crois qu'on peut utiliser ce moyen dans d'autres domaines — la violence contre les femmes autochtones et tout autre domaine. Il s'agit d'établir de bonnes relations, d'examiner les lacunes du système. Nous pouvons avoir une discussion franche avec les agents de la GRC et leur dire ce qui se passe dans notre collectivité. Que pouvez-vous faire pour nous, ou que pouvons-nous faire ensemble?
Donc, nous avons travaillé à certains projets. Nous avons donné un cours de sensibilisation à la culture aux agents de la GRC. Nous l'avons conçu pour qu'ils puissent comprendre les problèmes auxquels font face les Autochtones dans la collectivité. À notre avis, cela fonctionne très bien. Les progrès sont parfois lents, mais nous arrivons à accomplir certaines choses.
C'est un groupe proactif ouvert à différents groupes. Je pense que c'est l'un des aspects d'un modèle efficace.
Madame la présidente, merci.
Merci beaucoup de votre présence.
J'ai écouté très attentivement tout ce que vous avez dit et j'ai retenu trois choses: il nous faut travailler ensemble, les hommes et les femmes doivent travailler ensemble, et il faut retourner à la base et écouter les aînés.
Nous avons constaté des changements, plus à l'Ouest du pays par contre; des femmes sont élues chefs de leur collectivité et je me demandais si la même chose se produisait dans l'Est du Canada. Mme Archambault a été élue chef des Malécites à Rivière-du-Loup. Croyez-vous que cela changerait des choses si un plus grand nombre de chefs élus étaient des femmes.
Sheila, j'ai été scandalisée de vous entendre dire que selon les dires de M. Smallwook, il n'y avait pas du tout d'Amérindiens à Terre-Neuve en 1949 lorsqu'on a signé la Constitution. Combien d'Autochtones vivaient sur l'île à l'époque?
Je ne peux pas vous dire combien y vivaient à l'époque, mais je peux vous dire que la Fédération des Indiens de Terre-Neuve est en train de former la bande de la Première nation Qalipu Mi'kmaq et il se peut que cela se concrétise cette année. Il semble que cette nouvelle bande comptera plus de 30 000 membres lorsqu'elle sera formée.
Donc, elle comptera 30 000 membres. C'est très intéressant d'entendre ce genre de choses et de savoir que quelqu'un...
Pourriez-vous nous dire également ce que vous pensez de ce que j'ai dit à propos des femmes chefs etc., s'il vous plaît?
Comme nous n'avons pas encore de bande officielle pour nous représenter, nous n'avons pas encore tenu d'élection. Dans les bandes non inscrites, il y a des femmes chefs. Peu importe qu'il s'agisse d'un homme, d'une femme, d'un enfant, ou d'un aîné, si cette personne a du courage, qu'elle a à coeur les intérêts des gens et qu'elle consulte le peuple, alors elle sera un bon chef. Le fait d'être une femme ou un homme ne constitue qu'un élément et ce n'est pas nécessairement le plus important. Ce qui est important, c'est que le chef ait les qualités qui comptent. C'est ce que je crois personnellement.
Nous avons une femme chef, et des élections se tiendront bientôt et l'autre candidat est une femme. Je crois donc qu'il est vrai que le fait d'être un homme ou une femme n'a pas d'importance. Mais les femmes sont sensibles à la question. Elles peuvent même avoir été touchées par des problèmes de violence au cours de leur vie. En se sortant de ces problèmes, on montre sa volonté, et on montre qu'on peut se prendre en main, tourner la page, et défendre sa collectivité. On montre ses qualités de chef et de guide. C'est ainsi que je le vois.
D'accord.
Vous avez dit avoir reçu 100 000 $ de Terre-Neuve et que c'est comme un cadeau tombé du ciel. Quel montant d'argent faudrait-il que le gouvernement fédéral vous donne pour vous permettre de faire ce que vous voulez dans votre collectivité? S'agit-il d'un gros montant? S'agit-il d'un petit montant? Faut-il nous inquiéter lorsque vous dites que vous avez besoin de plus de services, etc.? Comment devons-nous plaider votre cause devant le gouvernement pour lui faire comprendre les besoins que vous avez et tout ce qu'on peut réaliser avec cet argent?
Pour le projet en trois étapes que nous avons entrepris, Aboriginal Women on the Verge of Rising, nous avons reçu 156 000 $ de Condition féminine Canada, et des fonds en partenariat de 122 800 $ de Patrimoine canadien et du gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador. Par la suite, lorsqu'on nous a demandé d'animer des ateliers sur la violence et la négligence à l'égard des aînés dans nos collectivités, nous avons reçu 25 000 $ additionnels, je crois.
Voulez-vous dire que c'est tout ce que vous a coûté votre premier programme, Aboriginal Women on the Verge of Rising, pour les 43 femmes qui ont participé pendant 14 mois? Vous déplaciez-vous d'un endroit à l'autre?
Nous l'avons étiré, encore et encore. Ce qui veut dire que les femmes enceintes ont dû voyager cinq heures en plein hiver pour se rendre à la péninsule Northern, mais cela leur tenait tellement à coeur, qu'elles l'ont fait.
Lorsque les femmes sont allées dans leur collectivité pour animer des ateliers, les honoraires qu'elles touchaient étaient très bas: 75 $ pour un atelier d'une demi-journée, et 150 $ pour animer un atelier d'une journée complète. Soit dit en passant, nous avons découvert après le fait que ces femmes redonnaient leurs honoraires aux organismes de femmes de leur région.
Diriez-vous qu'on pourrait faire la même chose dans d'autres collectivités et remporter le même succès avec ce programme?
Nous pensons que oui. Le Labrador est intéressé, et nous souhaitons nous y rendre. La culture est différente là-bas, mais on peut utiliser le même modèle. D'après ce que je crois comprendre des outils que nous avons achetés de l'AFAC, l'Association des femmes autochtones du Canada, c'est que de toutes les personnes qui avaient été formées pour utiliser ces outils, c'est probablement nous qui avons poussé le plus loin leur utilisation.
Il y a donc des ressources.
Oui, j'ai avec moi quelques copies de certains éléments.
Le financement opérationnel est l'autre aspect. On peut obtenir du financement de projet, ce qui veut dire qu'on peut faire telle ou telle chose, mais cela signifie qu'on n'a pas d'argent pour tenir une réunion du conseil d'administration pour la supervision du projet. On n'a pas d'argent pour faire un appel téléphonique, ni pour faire une vérification, si l'on découvre qu'il fallait en faire une. Où prendrait-on les 800 $ nécessaires?
Donc, même si nous avons la chance d'avoir du financement de projet, obtenir un montant de 100 000 $ de financement opérationnel nous permet de payer les factures d'électricité de notre bureau. C'est du financement de base.
Merci beaucoup, madame la présidente.
Roseanne, vous avez parlé de la GRC. Ironiquement, avant de devenir député, je travaillais à la GRC. Vous avez mentionné les réunions et les consultations que vous tenez, probablement avec le conseil de gestion du service de police et le conseil des services de police communautaires. Je crois que vous avez parlé un peu du mandat ou de ce que les conseils des services de police communautaires font en ce qui concerne la violence familiale.
Je siège également au Comité permanent des affaires autochtones, et l'une des choses qui m'intéressent, c'est que nous nous penchons sur la violence familiale dans les réserves. Dans le passé, l'une des situations familiales auxquelles j'ai dû faire face, c'est que, dans bien des cas, ce sont les enfants qui sont les plus touchés par les allégations, qu'elles soient faites par la femme ou l'homme, et la position de la famille. J'ai dû arrêter des enfants et ainsi de suite.
Devoir faire sortir la mère de la maison parce qu'elle n'est pas propriétaire engendre vraiment beaucoup de problèmes, car il faut que nous sortions la mère et les enfants de la maison alors que le père y reste.
Maintenant que je siège au Comité permanent des affaires autochtones, je me demande quelle est votre position sur le projet de loi sur les biens immobiliers matrimoniaux qui a été présenté de nouveau?
C'est un sujet de discussion intéressant, puisque les droits sur les biens matrimoniaux devraient légitimement être accordés à la femme si elle est victime de violence à la maison, car qui est le transgresseur s'il s'agit de violence subie par elle et ses enfants? Par contre, sur le plan de la sécurité, le fait que la femme reste à la maison pose problème. Quelles mesures sont prises pour assurer sa sécurité? Appartient-il au service de police d'assurer sa sécurité? Est-on certain que la femme et les enfants seront en sécurité?
Beaucoup de discussions ont eu lieu, même au sein de notre organisme, et c'est l'une des questions qui pose problème. Pourquoi devrait-elle quitter sa maison? Il y a donc eu de longues discussions, et je crois qu'il nous faut vraiment examiner de plus près la question des moyens d'assurer la sécurité.
Je comprends que c'est une position assez délicate. Dans mes antécédents, la plus grande partie de ma carrière s'est déroulée dans les collectivités autochtones. Traiter avec la violence familiale a toujours été une priorité, aller dans les foyers des victimes. Je peux comprendre que lorsque les policiers doivent intervenir, nous devons tenir compte de la sécurité des victimes et prendre des mesures.
J'ai dit auparavant, dans une réunion du comité, que la GRC, ou même les policiers, sont des gardiens de la paix. Ils doivent maintenir la paix. Nous prenons toutes les mesures nécessaires. Il y a des engagements de ne pas troubler l'ordre public, où la femme peut donner de l'information pour tenir le délinquant éloigné. Si cela dégénère en violence familiale, en abus physique, en voies de fait graves ou n'importe quel type de violence, il incombe à la police de faire en sorte que le délinquant ne revienne pas dans cette maison. Il incombe également aux tribunaux d'imposer des sanctions de manière que le délinquant ne revienne pas.
Mais la difficulté que j'ai constatée et certains des problèmes qui apparaissent maintenant, avec cette loi qui parle de biens immobiliers, c'est qu'il y a un peu d'hésitation de la part des collectivités des Premières nations. Premièrement, elles ne savent pas comment adapter les résolutions adoptées par leur conseil de bande pour répondre aux exigences de cette loi. Mais de mon point de vue et compte tenu de ce que j'ai vu, je pense que c'est probablement une bonne loi pour protéger les femmes.
Cela dépend de l'entente sur les services de police que le conseil de bande a signée avec la GRC — ou le conseil tribal, selon le cas. À l'Île-du-Prince-Édouard, il y a des ententes sur les services de police avec la GRC. Je pense que c'est la responsabilité des autorités compétentes de s'assurer que la GRC est éduquée dans ce domaine de manière qu'elle comprenne ce que signifie « biens immobiliers matrimoniaux », si elle va adhérer à ce texte législatif.
Merci, Rob.
Nous semblons parler beaucoup de violence familiale qui, à mon avis, est un élément d'une très grande importance. Nous avons entendu au Nunavut et à Labrador City que la violence familiale peut avoir des dimensions différentes en fonction de l'environnement.
Sur les réserves, beaucoup de femmes ne veulent pas signaler la violence familiale, s'il y en a. Beaucoup de femmes ne veulent pas que leur conjoint soit expulsé de la maison. Il y a un problème dans les réserves mêmes lorsqu'il s'agit de pointer la personne qui vous fait violence, surtout si cette personne est votre conjoint ou votre partenaire. Alors, il y a ce problème. Où peut-on aller pour assurer sa sécurité dans une réserve lorsque vous êtes dans une région isolée? La femme ne peut pas quitter le foyer. Où peut-elle aller? L'homme, s'il doit quitter le foyer, où peut-il aller? Et ensuite, lorsqu'on appelle la GRC et qu'elle doit penser à porter des accusations, cela crée un autre obstacle, parce que la femme ne veut pas que son conjoint ou son partenaire soit accusé; elle veut simplement qu'il cesse de la battre. Alors, voilà le premier élément.
Dans les régions urbaines, évidemment, cette violence familiale est différente, parce que les femmes vivent dans une collectivité plus grande et qu'elles peuvent aller dans un refuge. Elles peuvent aller dans une maison de transition s'il en existe une et elles peuvent aller dans des maisons de deuxième étape.
Voilà pour la violence familiale, mais je n'entends pas beaucoup parler de violence systémique, qui est une question dont nous discutons également: la toxicomanie, la prostitution, les stigmates liés au fait d'être une femme autochtone, point final; le fait que lorsque les femmes autochtones sont tuées ou violées, il ne semble pas y avoir la même réponse de la part de la société que lorsqu'une femme non autochtone est tuée, violée ou disparaît. Alors, nous avons tout ce contexte plus large dont j'aimerais entendre parler.
Enfin, il y a la question de la discrimination systémique, tout court, toute cette honte liée au fait d'être une personne autochtone, la règle des deux poids deux mesures appliquée aux femmes autochtones comparativement aux autres femmes. En d'autres mots, les femmes autochtones ne semblent pas compter autant et elles sont toujours censées être des prostituées et des toxicomanes, que c'est dans la nature des femmes autochtones.
Il y a ce genre de discrimination liée aux attitudes. J'aimerais entendre parler de la façon dont nous faisons face à ces problèmes, parce que lorsque vous parlez de violence familiale, trouver une façon de trouver un refuge pour une femme, trouver une façon de la sortir de la collectivité, trouver une façon de la sortir, elle et ses enfants, de cette situation est une chose. C'est un élément. Mais que dire de la situation d'ensemble? Nous devons parler de la situation d'ensemble. Comment corriger cela? Comment changer cela?
Roseanne, vous avez parlé d'éduquer la police, la police municipale et la GRC, une éducation culturelle, pour comprendre les réalités autochtones, etc. Ce n'est là qu'un élément. Que faites-vous au sujet du fait que la société semble avoir une attitude qui, en soi, est violente à l'égard des hommes et des femmes autochtones?
Je veux simplement avoir certaines réponses à ces questions, parce que je n'en ai pas entendu parler ici ce matin.
Au Nunavut, on nous a dit que les hommes étaient en colère. Les hommes autochtones sont en colère parce qu'on leur a enlevé les rôles traditionnels qu'ils jouaient dans les familles. Ils étaient le chasseur, le pêcheur, celui qui allait dans la nature pour ramener la nourriture, etc. Les femmes avaient un rôle pour ce qui est de garder les collectivités ensemble et faisaient toutes ces choses.
Parce que les hommes autochtones doivent maintenant vivre dans ce monde non autochtone dans lequel ils doivent trouver un emploi dans un endroit où, d'abord et avant tout, ils font l'objet d'une discrimination en matière d'emploi, ils ont un sentiment de désespoir. Ils ne peuvent trouver de travail, ils ont quitté l'école, toutes ces choses qui leur font perdre leur identité et le sentiment de contrôler leur destinée, alors, ils doivent s'en prendre à quelqu'un. Eux-mêmes se sont tournés vers la toxicomanie et, de toute évidence, vers la violence, pour se défouler de l'impuissance qu'ils ressentent.
Nous avons entendu parler de ces choses et ce sont des questions très importantes. Quels sont les moyens pratiques de traiter ce problème?
De toute évidence, quelqu'un doit examiner la culture autochtone elle-même, mais nous ne pouvons revenir au jour où l'homme était celui qui allait chasser et tuer pour manger, parce que ce monde a disparu. Comment cette transition se fait-elle pour un homme autochtone pour être en mesure d'avoir de l'estime de soi et un sentiment de pouvoir faire quelque chose au sein de cette cellule familiale et au sein de cette collectivité, et au sein de la société en général, pour être perçu comme quelqu'un qui a une valeur, quelqu'un qui est productif, quelqu'un qui a du pouvoir, comme un être humain digne?
Où allons-nous? C'est comme essayer d'avaler un cheval, tellement c'est gros. Comment faisons-nous face à cela? J'aimerais vraiment avoir une discussion là-dessus, parce que c'est une partie importante de ce dont nous parlons, et pas simplement la violence familiale.
Alors, qui veut parler en premier? Roseanne?
Oui, je peux parler en premier.
Je suis d'accord avec vous pour ce qui est de la différence entre ce qui se passe dans les réserves et à l'extérieur des réserves. Sur les réserves, les femmes autochtones peuvent vivre de la violence, mais elles ne veulent pas nécessairement perdre leur mari, leur famille, tout ce qui compte pour elles.
La question, c'est que la femme est victime de violence et veut que cela cesse. La raison pour laquelle beaucoup de femmes sont très réticentes même à appeler la police, c'est parce qu'elles ne veulent pas déraciner leur famille. Elles ne veulent pas perdre tout cela — le sens de la communauté, d'une part, et le sens de la famille. Toute leur famille vit dans la collectivité et cela pourrait causer un malaise dans la communauté à cause de la famille du mari. Cela a vraiment des répercussions sur la collectivité tout entière et non seulement sur la famille.
Oui, ce sont des êtres humains. Ce sont des hommes qui ont le désir d'avoir une famille. Ils ont le désir d'être heureux. Une des choses avec lesquelles ils ont de la difficulté, c'est de s'assurer qu'ils sont parvenus à être équilibrés.
Tout le monde a besoin que ses besoins soient comblés. Il arrive tout simplement que l'une des façons qu'un homme, en fait, n'importe qui — peu importe si c'est un homme ou une femme — peut atteindre cet équilibre, c'est le pouvoir. Lorsqu'une femme a le sentiment de pouvoir contrôler sa destinée, c'est très bien, mais la façon de réaliser cette prise en charge peut être négative ou positive. Vous pouvez le faire d'une manière négative.
Si un homme revient à la maison après une dure journée de travail et qu'il a des problèmes au travail, il est frustré. Gérer la colère pourrait ne pas être la même chose que d'aller à la maison pour méditer. Il arrive à la maison et c'est là qu'il estime trouver un exutoire, avec les gens qu'il aime le plus. Il se trouve que son exutoire, c'est sa femme et ses enfants. Alors, il dit: « Disparaissez ». Même si cet homme peut aimer sa famille, c'est ce qu'il a appris. Ou bien il l'a appris ou bien il éclate... et peut-être que c'est cette fois-là; souvent, c'est une fois de temps en temps.
Peut-être qu'ils n'ont pas l'emploi qu'ils voudraient ou peut-être que ce n'est pas la carrière qu'ils envisageaient. Si tout ce qui les préoccupe, c'est d'apporter de la nourriture — et apporter de la nourriture peut signifier nettoyer un fossé, s'assurer qu'ils font leur travail juste pour obtenir un peu d'argent —, où est l'équilibre? Est-ce que cette prise en charge de soi se fait au bon endroit?
Je pense que c'est là où l'on doit reconnaître que ce sont des êtres humains. Ils ne veulent pas...
Que faites-vous à ce sujet? Comment faites-vous face à cela? Est-ce que quelqu'un a une réponse, une suggestion? Comment aidez-vous à retrouver ce sentiment de prise en charge de soi, ce sentiment de contrôler sa destinée?
Vous ne séparez pas le travail que nous faisons avec les femmes; vous devez inclure les hommes. La cellule familiale n'est pas fondée sur la femme et l'enfant. La cellule familiale est fondée sur l'homme, la femme et l'enfant. Inclure des programmes et des services pour les hommes autochtones, ou trouver les moyens qui peuvent aider à les orienter pour qu'ils obtiennent l'aide dont ils ont besoin...
Existe-t-il de tels services? Y a-t-il un besoin pour ces derniers? Y a-t-il de tels services pour les hommes? Nous n'avons pas suffisamment de services pour les femmes. Y a-t-il même des services pour les hommes?
Sheila, voulez vous ajouter quelque chose? Melissa?
Je pensais simplement à une ou deux choses. Le travail que nous avons l'intention de faire l'an prochain, c'est de renforcer l'autonomie des hommes pour qu'ils fassent partie de la solution, pour qu'ils soient des modèles, pour qu'ils aillent dans les collectivités pour dénoncer la violence.
Si vous avez vu les publicités qui sont diffusées à la télévision dans notre province en ce moment, elles sont très simples. Certaines ont un thème autochtone et certaines concernent des personnes ordinaires, faute d'un meilleur terme. C'est assez simple. Vous voyez un père et un enfant et on dit: « Vous lui montrez à aller à bicyclette, à attacher ses souliers. Montrez-lui que toutes les formes de violence faite aux femmes sont inacceptables ».
Ce sont des publicités merveilleuses. Elles sont très simples et très percutantes. Elles devraient être diffusées à la grandeur du pays.
Cela nous ramène à ce dont nous avons parlé. Quel est le rôle du gouvernement fédéral, être coordonnateur, faire valoir les pratiques exemplaires dans ce domaine et ce genre de choses?
Est-ce que quelqu'un parmi vous peut parler de la question de la violence systémique à l'extérieur de la collectivité et de la discrimination — la façon dont la société traite les Autochtones et de la violence systémique à l'endroit des femmes autochtones comme quelque chose qui ne nous préoccupe pas parce que ce sont simplement des femmes autochtones; elles sont habituées à cela; c'est la nature de la bête, vous savez? C'est quelque chose qui est un élément très important dont nous entendons parler également.
Vous semblez faire de l'excellent travail, Sheila, en termes de formation des formateurs, parce que vous faites de petites choses pratiques qui donnent de la formation, de l'enseignement et qui essaient de donner ce renforcement de l'autonomie aux femmes dans la collectivité. Vous dites que vous travaillez également à renforcer l'autonomie des hommes. Y a-t-il autre chose, autre que ces choses très pratiques, que l'on peut faire pour traiter de toute cette question? Je sais que la discrimination à l'égard des Autochtones sévit dans notre société et dans toutes les Amériques. Avez-vous des suggestions concernant ce qui peut être fait?
Je veux dire, la prévention et l'éducation constituent tout un exploit, alors, devrait-il y avoir un programme d'éducation, à votre avis, pour les personnes non autochtones pour leur apprendre à accorder une place différente aux Autochtones, autres que les stigmates qui sont rattachés au fait d'être une personne autochtone, cette idée préconçue des femmes autochtones — les stigmates — que vous n'avez pas à vous inquiéter à leur sujet, car elles n'en valent tout simplement pas la peine?
Voyez-vous la nécessité d'une forme quelconque de...?
La sensibilité culturelle, l'éducation, les publicités sont une chose, mais les publicités portent essentiellement sur la violence des hommes à l'égard des femmes, en soi. Lorsque je suis allée en Australie à titre de ministre, ils avaient commencé cela, parce qu'en Australie, il y a une société très macho qui aime le sport. Les hommes australiens aiment le sport — pas nécessairement les hommes autochtones, juste les hommes. Alors, ils ont ces publicités, comme vous le dites, avec des grandes vedettes du football ou du rugby. Tous ces hommes viennent maintenant à la radio pour dire: « Je sais que vous vous fâchez, mais n'allez pas à la maison et battre la femme » ou quelque chose d'autre, la nana. Ils font ce genre de choses qui ressemblent exactement à cela. Vous devez gérer votre colère d'une manière différente, autrement qu'en battant les femmes.
C'est quelque chose de général. Je parle de sensibilité à l'égard de ce que sont les personnes autochtones. Plus tôt, Nicole a dit que lorsqu'elle était jeune, à l'école, on lui a enseigné une histoire des peuples autochtones qui était fondée sur l'idée que les Autochtones étaient mauvais et que nous devions tous les tuer pour arriver là où nous voulions aller en tant que colonisateurs. Il y avait les cow-boys et les Indiens. Les Indiens étaient les mauvais et les cow-boys étaient les bons — ce genre de choses simplistes. Je sais que nous devons aller au-delà de cela. Comment faisons-nous cela? Y a-t-il quelque chose de pratique et de concret?
Sheila, vous êtes la femme terre à terre ici. Y a-t-il quelque chose de pratique et de concret que nous puissions faire, à votre avis?
Je pense simplement à un exemple. Je suis consciente que nous sommes enregistrés.
Avec l'arrivée des Olympiques au Canada, il y a eu un problème avec la chorale de Conne River, la Se't A'newey Choir. Il y a eu de la confusion quant à savoir si elle avait été invitée ou non pour faire partie de la cérémonie d'ouverture. On en a parlé dans les nouvelles nationales.
Une bonne partie de la rétroaction venant de personnes à l'extérieur des collectivités, de la province et, en fait, du pays disait que l'invitation n'avait pas été faite par écrit. Eh bien, en tant que femme autochtone, je sais que votre parole est beaucoup plus forte qu'un contrat, alors, je n'ai pas du tout de mal à comprendre que ces gens croyaient qu'ils y allaient. S'il y a un exemple concret démontrant à quel point la sensibilité culturelle est importante, c'est peut-être celui-là. Si vous comprenez le point de vue autochtone, vous savez que vous acceptez la parole des gens, et que cela est bien plus précieux.
Bien qu'il me répugne d'utiliser cela comme exemple, c'est quelque chose que j'ai en tête.
Simplement la suite de ce qui vient à l'esprit, les Soeurs par l'esprit. Nous venons juste d'avoir notre première marche à l'Î.-P.-É, alors, être incluses dans les initiatives nationales comme celles-là est important.
Pour parler de l'initiative nationale sur les Soeurs par l'esprit en octobre, une de mes soeurs était une des coordinatrices de l'événement. Elle a écrit une chanson en l'honneur d'une femme qui a disparu et qui a été assassinée. Elle l'a remise à la famille de Shirley Ann Duguay. Elle a chanté cette chanson. Shirley Ann Duguay n'était pas Autochtone; elle est disparue et on l'a retrouvée plus tard. Dans l'île, nous vivons avec ce souvenir.
Je pense que notre apparition à l'échelle nationale, debout ensemble à titre de femmes, en dit long sur la façon dont nous pouvons promouvoir la beauté des femmes dans notre société. La beauté des femmes autochtones doit ressortir, parce que nous sommes des femmes, mais nous sommes des femmes qui ont été victimes de discrimination, de mauvais traitements et qui sont considérées comme des membres inférieurs de la société. Encourager les groupes à inclure davantage les femmes encouragera la société plus large à accueillir sans faire de discrimination, à ne pas considérer les femmes autochtones comme des membres inférieurs de la société.
Nous avons de la beauté dans nos cultures et il y a des choses très intéressantes qui arrivent. Même aux Olympiques, les collectivités autochtones étaient bien en vue, dans l'entrée principale, à l'ouverture, et c'était quelque chose de très beau. Pour moi, cela est un témoignage très éloquent pour le pays.
Merci beaucoup, Roseanne.
Mme Roseanne Sark: Il y a une autre chose.
La présidente: Nous devons partir dans une minute. Nous sommes en retard.
Très bien.
Concernant Condition féminine Canada, la présence de femmes autochtones au sein du conseil contribuera également à sensibiliser d'autres femmes autochtones au pays.
Merci beaucoup.
Je veux vous remercier d'être venues et d'avoir pris le temps de discuter avec nous. C'est très utile. Comme je l'ai dit, nous voulons vraiment être en mesure de faire une différence dans ce rapport, plutôt que ce soit simplement un autre rapport que l'on peut jeter dans un coin quelque part.
Merci beaucoup.
Nous allons suspendre nos travaux.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication