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Je vais déclarer la séance ouverte.
J'ignore si Suzanne Chartrand est présente. Shannon Cormier, Val James et Leslie Spillett sont là.
Bonjour à tous. La séance est ouverte. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent de la condition féminine est composé de députés de tous les partis et comprend donc des membres venant des quatre partis politiques de la Chambre. Il s'agit d'un comité non partisan, comme il se doit pour un comité parlementaire, qui procède actuellement à l'examen de la violence faite aux femmes autochtones.
Vous allez rencontrer les divers membres du comité. Je vous présenterai quand ils commenceront à poser des questions. Je m'appelle Hedy Fry, députée de Vancouver-Centre et présidente du comité.
Le comité a décidé à l'unanimité d'entreprendre la présente étude, après avoir pris connaissance des statistiques recueillies à l'échelle nationale dans le cadre de l'initiative Soeurs par l'esprit. Ce que nous cherchons précisément et espérons découvrir grâce à vous, ce sont les causes fondamentales de ce qui semble être le degré extrême de violence dont sont victimes les femmes autochtones. Nous nous intéressons non seulement aux causes profondes de cette violence, mais également à sa nature, à son ampleur et ses manifestations. Nous espérons que vous pourrez nous aider en proposant quelques solutions, qu'il s'agisse de faire de la prévention, de prendre des mesures correctives ou d'aborder le problème de divers points de vue. Je crois que vous pouvez faire une analyse très juste du problème.
Nous allons procéder comme nous le faisons habituellement. Vous disposez toutes de cinq minutes pour faire votre exposé. Comme il n'y a que trois groupes qui prennent la parole, si vous me dites qui fera l'exposé, les trois témoins pourront parler pendant sept minutes. Je vous ferai signe quand il vous restera deux minutes, puis une minute pour parler afin de vous permettre de clore votre propos.
Après votre exposé, nous tiendrons une période de questions. Les députés vous poseront des questions, et vous pourrez leur répondre. Si les choses vont rondement, nous pourrons peut-être effectuer deux tours. Nous réussissons parfois à en faire trois.
J'aimerais commencer, mais comme j'ignore comment prononcer ce nom, j'aurais peut-être besoin d'aide: Ikwe Widdjiitiwin...
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C'est difficile d'être la première à intervenir, car je ne suis pas certaine de savoir ce que vous attendez.
Ikwe Widdjiitiwin est un refuge pour femmes autochtones, qui accueille surtout de jeunes femmes autochtones qui ont des enfants. Notre refuge s'adresse aux femmes victimes de violence conjugale. Quand elles nous arrivent, elles n'ont souvent que les vêtements qu'elles ont sur le dos: elles n'ont pas d'argent et parfois aucun papier d'identité.
L'ennui, c'est que certaines d'entre elles sont aux prises avec des problèmes de toxicomanie et de santé mentale, qui deviennent plus manifestes avec le temps. Il devient très difficile de travailler avec elles. En outre, de nombreux autres intervenants entrent en jeu, comme l'enfant et la famille, les tribunaux, le système de justice, etc.
Nous nous efforçons donc de travailler avec ces femmes — qui restent au refuge au moins 30 jours — et de leur offrir des programmes sur la violence conjugale, du soutien en matière de logement et de l'aide concernant les questions d'ordre juridique, si elles ont besoin d'ordonnance de protection, et médical, si elles doivent se présenter à l'hôpital, par exemple. Nous travaillons avec elles pendant au moins 30 jours. Ce n'est vraiment pas long pour remettre quelqu'un sur pied, mais nous espérons leur transmettre ce qu'il faut pour leur permettre de s'en sortir avec le temps.
De façon générale, un bon nombre de ces femmes reviennent plusieurs fois au refuge. Elles sont peut-être avec un autre partenaire, mais elles ont pris l'habitude de s'engager dans des relations violentes. Ces situations deviennent, ici encore, plus normales qu'elles ne le devraient. L'anormal devient normal. Elles sont pratiquement à la recherche de relations violentes.
Plusieurs femmes quittent leur réserve en avion ou en voiture, ou sont transférées chez nous. Certaines ont vraiment des histoires d'horreur à raconter sur ce qui se passe sur les réserves, où elles sont soumises à... Disons que si le chef et le conseil ont un lien de parenté avec le conjoint violent, elles n'obtiennent aucune aide. Au mieux, on leur conseille de quitter la réserve.
Voilà donc ce qu'il en est. Quand elles arrivent en ville, ce sont des proies faciles pour les revendeurs de drogue et d'autres personnages malintentionnés. Nous avons assisté au premier procès en matière de trafic des personnes en vertu de la nouvelle loi qui a été promulguée. Un grand nombre des jeunes femmes autochtones peuvent très facilement être victimes de ces activités.
La violence conjugale a de nombreux effets sur les enfants. Ces derniers éprouvent beaucoup de difficultés à gérer leur colère ou se réfugient à l'intérieur d'eux-mêmes. C'est là qu'un type de comportement peut s'installer si on n'intervient pas immédiatement.
Nous offrons également à ces jeunes femmes des programmes sur l'éducation des enfants, qui portent sur la nutrition, par exemple. Elles ignorent bien souvent les règles d'hygiène. Nous devons leur montrer comment faire la lessive et préparer des repas nutritifs pour elles et leurs enfants, comment gérer leur argent, etc.
Plusieurs de ces femmes craignent de quitter leur conjoint violent par peur de représailles. Il se peut également que des membres de leur famille les obligent à rester avec leur conjoint, et comme ce dernier est leur seul soutien, elles n'ont peut-être d'autre choix que d'obtempérer. Mais nous les encourageons à venir. Comme je l'ai indiqué, un bon nombre des femmes que nous accueillons ont déjà quitté un conjoint violent par le passé. Généralement, il leur faut environ sept à huit tentatives avant de réussir à échapper au cycle de violence.
Dieu merci, nous connaissons quelques belles réussites, grâce auxquelles nous saisissons toute l'importance que notre travail revêt pour celles qui ont réussi à rompre le cycle de violence et à se refaire une vie avec leurs enfants. Ce sont ces succès qui nous permettent de poursuivre nos efforts.
Des femmes plus âgées trouvent également refuge chez nous. Ici encore, elles sont nombreuses à avoir une dépendance quelconque à l'alcool ou aux médicaments sur ordonnance. C'est un autre gros problème. Sachez que bien souvent, les médecins que nos femmes consultent se contentent de les bourrer de pilules. Certaines d'entre elles consomment cinq ou six types de médicaments — des antipsychotiques, du Valium et j'en passe. Ces médecins leur prescrivent bien trop de médicaments, et elles développent une dépendance. Mais qu'arrive-t-il quand les médecins cessent de leur donner des médicaments?
Voilà certains des problèmes auxquels nous sommes confrontées au refuge. Nous voudrions toujours en faire davantage.
Comme notre refuge s'adresse aux femmes autochtones, nous tentons également d'organiser des programmes culturels. Nous demandons à nos aînées de venir pour participer à des séances individuelles dans les cercles de partage. Elles sont également autorisées à procéder à des rites de purification dans notre salle de guérison. Nous offrons aussi des services de conseils 24 heures sur 24; il y a donc toujours quelqu'un pour parler aux femmes.
Comme je l'ai indiqué, 30 jours, ce n'est pas très long pour travailler avec ces femmes, surtout quand elles doivent s'occuper de bien d'autres choses, comme trouver un logement et des meubles. Il leur faut du temps pour s'installer. Le personnel et le conseil sont là pour une raison: aider ces femmes à rompre le cycle de violence et faire de leur mieux.
Merci.
C'est Ka Ni Kanichihk, un mot cri qui signifie « ceux qui dirigent » ou « ceux qui vont de l'avant ».
Je tiens à souhaiter la bienvenue à toutes les personnes qui arrivent de l'extérieur du territoire visé par le Traité no 1 en ce beau, mais froid matin d'hiver à Winnipeg. Bien sûr, je souhaite également un bon retour au bercail aux députés du Manitoba, la province qui est également le berceau de la nation métisse, un fait qui mérite d'être souligné.
Ka Ni Kanichihk est une organisation offrant toute une gamme de services sociaux dans un quartier appelé Central and West Alexander, qui compte l'une des populations autochtones les plus importantes. Je considère que nous sommes une expression de notre droit à l'autodétermination et à notre propre souveraineté en nous attaquant tant aux causes profondes de la violence qu'à ses manifestations, le tout de manière holistique, adaptée à notre culture et extrêmement créative. Notre organisation est surtout dirigée par des femmes, mais nous comptons aussi des hommes dans nos rangs, car nous reconnaissons que tout le monde doit faire partie de notre cercle pour que nous puissions poursuivre notre voyage.
Il a été question du fait que le comité souhaite connaître les causes fondamentales de la violence et de leur prédominance chez les Autochtones en général et les femmes autochtones en particulier. Je crois fermement, de toutes les fibres de mon être, que ces causes tirent leurs origines de l'histoire et des relations coloniales qui perdurent dans notre culture générale. L'adage voulant que tout le monde sait mieux que nous ce que nous devons faire a eu non seulement un effet déshumanisant sur l'ensemble de notre culture, mais également un impact dévastateur sur le libre arbitre des Autochtones.
Nous avons appris, en raison des systèmes qui nous ont été imposés, à être dépendants. Ma consoeur a indiqué que les médecins prescrivent des médicaments quand les choses tournent mal. Or, nous constatons que les femmes autochtones font l'objet d'un degré élevé et constant de violence extrême. Cette violence ne vient pas seulement du conjoint, même si ce dernier fait partie de l'équation. La violence vient aussi d'étrangers et du système. Nous nous efforçons de faire notre modeste part pour effectuer une analyse juste du problème afin d'intervenir en conséquence.
Je n'utiliserai pas tout le temps qui m'est accordé. Je laisserai donc la parole à l'une des femmes qui participent à un programme financé par Condition féminine Canada par l'entremise de Ka Ni Kanichihk. Il s'agit de Suzanne Chartrand.
Souvent, les paroles de celles qui ont vécu ces situations s'envolent. Or, je crois qu'il est crucial qu'on les entende. Moon Voices vise avant tout à rendre la parole aux femmes et à renverser la tendance qu'a tout le monde de s'arroger le droit de parler au nom de nos femmes et de notre peuple.
Sur ce, je laisse la parole à Suzanne.
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Bonjour. C'est un honneur de témoigner.
Je tiens tout d'abord à vous remercier de nous avoir convoquées et, surtout, à remercier le programme Moon Voices de Ka Ni Kanichihk d'avoir pris le temps d'offrir cette formation qui est si importante pour les femmes autochtones.
Cette formation m'a notamment permis, depuis le temps que je suis dans le domaine, d'exprimer mon opinion quand je me trouve dans une autre culture, car c'est une lacune. Le fait de participer à Moon Voices m'a permis de me sentir en sécurité en tant que femme autochtone. Non seulement je me sens en sécurité, mais je ne crains plus de m'exprimer. Pourtant, cela a été le cas pendant longtemps. Même si je pouvais m'exprimer, je n'avais pas toute l'incidence voulue, car je me sentais toujours seule. Moon Voices nous a donné l'occasion de rencontrer plusieurs femmes de tête et nous a encouragées à parler des divers événements qui surviennent dans notre vie quotidienne.
Nous devons continuer d'éduquer les femmes autochtones et de les encourager à chercher les soeurs qui vivent dans notre communauté. Comme je l'ai indiqué, je reste à Winnipeg depuis 20 ans. Je considère que j'ai un endroit où aller si j'ai l'impression que personne ne m'écoute, et c'est un honneur de le faire.
Nous avons appris à nous exprimer, mais également à découvrir notre tradition, notre facette spirituelle, qui fait défaut à notre société. Les femmes autochtones du pays se trouvent encore au fond du baril. Nous avons une longue pente à remonter, et les écueils sont nombreux. Je constate que le titre compte. Nous avons réussi à rencontrer tous les intervenants, et les choses progressent de mon vivant.
Mais pour celles qui arrivent déjà à 50 ans, il reste peu de temps. Nous devons éduquer nos jeunes et leur dire comment nous nous efforçons de nous décoloniser. Nous devons nous faire entendre. Je crois qu'il nous incombe, en tant que mères et femmes, de continuer d'aider le cercle familial. Nos pères, nos frères, nos oncles et nos grands-pères n'ont pas encore réellement participé au système de guérison. Or, la guérison s'effectue au quotidien, en fréquentant nos semblables afin de diffuser le message. Et nous sommes aux premières lignes.
C'est terrifiant, et nous nous sentons seules quand nous apprenons le décès d'une autre femme autochtone. C'est triste, car il pourrait s'agir de notre fille ou de notre petite-fille. Malgré tout, je suis en paix quand je rencontre mes soeurs et procède aux rites de purification, priant pour que nous gardions espoir en dépit de ces événements. On a toujours agi ainsi, depuis des générations, et les Premières nations, les Métis et les Inuits commencent à être capables de trouver leur place. Je suis fière de pouvoir transmettre mon expérience à d'autres jeunes femmes et de fréquenter l'université.
Aux Autochtones fortes qui m'ont précédée et qui m'aident encore aujourd'hui, je peux dire merci. Je les remercierais, car je crois que les diverses cultures doivent constater que les temps changent et que nous devons pouvoir nous faire entendre. Il ne faut plus s'en remettre aux coutumes de la société, mais nous demander notre avis. Et nous pouvons vous dire qu'il y a bien trop de gens qui prétendent jouer au Sauveur. Ce n'est pas ainsi que les choses se passent quand on découvre le créateur dans les fondements de l'identité des femmes des Premières nations, métisses ou inuites. Je suis heureuse de pouvoir recourir aux produits médicinaux, aux prières et aux cérémonies qui nous ouvrent les yeux, et je peux conseiller ces méthodes aux autres femmes qui souffrent.
Il n'y a aucune raison, en 2011, pour que des femmes meurent aux mains de qui que ce soit.
J'aimerais enfin vous remercier et vous dire qu'il importe d'offrir des services éducatifs. Pour ce qui est du financement, si vous voulez que les choses changent, il faut commencer par ceux qui sont touchés par les problèmes dont il a été question: la pauvreté, l'éducation, les meurtres. La liste ne s'arrête pas là, et je suis convaincue que vous la connaissez.
Je vous dis donc ekosi et merci à toutes de m'avoir écoutée.
Bonjour. Je suis membre du conseil d'administration du Native Women's Transition Centre et je vous souhaite la bienvenue dans notre communauté.
Je crois que l'on peut dire que j'ai travaillé la plus grande partie de ma vie avec les organisations ici présentes, car c'est une passion et un intérêt que m'a transmis ma grand-mère: il faut, en effet, pouvoir parler des questions de la femme pour les générations futures également.
Parlons un peu du Native Women's Transition Centre. Cet organisme, qui existe depuis une trentaine d'années, a vraiment donné aux femmes autochtones une occasion de poursuivre leur cheminement vers la guérison. Une bonne partie de notre tâche consiste à aider les femmes à se remettre des conséquences de la violence conjugale.
Tout d'abord, nous leur offrons un lieu où elles peuvent parler de leur guérison, d'où elles viennent afin de comprendre les relations qu'elles entretiennent avec les personnes et les systèmes, et de leur parcours avec les autres organisations et au sein de nos communautés.
Le centre épouse les valeurs traditionnelles autochtones afin de panser les plaies que la colonisation et les pensionnats ont infligées aux diverses générations. Vous savez de quoi je parle, vous en avez entendu parler. Nous tentons d'offrir à ces femmes une occasion de discuter de leur identité avec les aînés, car c'est une notion qui s'est perdue. Sachez qu'à 50 ans, même moi, une Autochtone métisse, je cherche encore à comprendre qui je suis et d'où je viens. Le centre permet aux femmes de parler avec des familles, des personnes, des femmes et des enfants au sujet de leur place dans la société. Il s'agit vraiment d'un libre choix afin de comprendre les valeurs et les situations personnelles des Autochtones et de redécouvrir nos racines.
Nous leur offrons des programmes, mais je ne m'éterniserai pas sur la question, car je peux vous fournir de l'information sur nos réalisations. J'aimerais cependant parler de certains des obstacles auxquels nous nous heurtons et peut-être des nouveaux projets que nous envisageons.
Tout le monde ici a parlé des problèmes de financement. Il faut dire que c'est une source de préoccupation constante, avec les fonds qui ne cessent de diminuer. Il faut aussi penser aux problèmes de financement pour les initiatives offertes aux femmes et aux enfants. On adopte de nouvelles normes et de nouvelles lois, et il est plus difficile d'agir quand les politiques que l'on instaure nous empêchent d'accéder aux services. Je crois qu'une partie du problème vient, comme Sharon et d'autres témoins l'ont souligné, du risque de violence à l'intérieur et à l'extérieur des réserves. Quantité de femmes qui vivent sur les réserves décident de venir en ville, où elles se retrouvent sans ressources.
Nous pourrions parler du taux d'inoccupation des logements, qui est de 0,5 p. 100. Ce n'est peut-être pas le chiffre exact, mais nous savons que c'est dans ces eaux-là. En outre, les entreprises continuent de transformer les logements en condos; il est donc plus difficile pour les familles avec des enfants de se trouver un endroit pour rester.
On observe également une discrimination systémique. Certains jeunes éprouvent encore des difficultés à s'inscrire dans des établissements éducatifs ou à décrocher un emploi par manque de soutien. Qu'il s'agisse de discrimination ou de racisme, le problème est bien réel.
Pour ce qui est de la pauvreté, rien n'a changé, car le coût de la vie continue d'augmenter alors que l'aide financière reste la même. Il faut en parler et examiner les conséquences que cette situation a sur les familles qui se battent toutes les deux semaines ou chaque jour pour pouvoir manger.
N'oublions pas les répercussions que les pensionnats ont eu sur toute une génération. Nous pouvons en parler, car elles se font encore sentir. J'ignore combien de fois on me demande quand on va en revenir. Mais il s'agit d'un fait historique qui a des conséquences sur une génération entière. Je suis assise devant vous, dépouillée de ma langue, devant escalader des montagnes simplement pour en arriver où j'en suis aujourd'hui et témoigner devant un comité permanent. Ce n'est qu'une gouttelette dans l'océan, mais il faut tout de même en discuter. La colonisation a des effets considérables sur nos enfants.
Il a également été question du manque de logements sécuritaires et abordables. Vous l'avez vu dans les médias. Les loyers augmentent, les familles s'élargissent. Même les punaises de lit se mettent de la partie. La situation a une incidence majeure sur la sécurité et le prix des logements. Qu'est-ce que nous considérons comme étant sécuritaire et abordable? Sachez que dans certains cas, des familles de cinq personnes vivent non pas dans un appartement avec une chambre, mais dans un studio.
Comme les Autochtones vivent selon le principe de la famille élargie, il arrive que des oncles et des tantes vivent dans un appartement doté d'une seule chambre. Voilà comment nous survivons et nous entraidons. Je crois cependant qu'il faut s'attaquer à la question et considérer que le logement constitue un gros problème où il faut combler des lacunes.
Quand on regarde la situation, on constate que certains croient qu'ils n'ont d'autre choix que de s'acoquiner à des gangs de rue en pensant à tort qu'ils peuvent les aider. Quand à ceux qui ont été exploités sexuellement dans leur jeunesse, ils se retrouvent dans l'industrie du sexe, parfois pour pouvoir mettre du pain sur la table.
Si cela ne donne rien...
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D'accord. Je ne peux pas parler tellement vite — je n'ai rien d'un encanteur —, alors je fais appel à votre patience.
Sachez tout d'abord que je m'appelle Jojo Sutherland et que je vais vous parler de ce que j'ai vécu. J'ai dû quitter ma réserve en raison de la violence familiale.
Dans les années 1970, la violence familiale était un phénomène quotidien. Une fois mariées, les femmes devaient rester avec leur conjoint.
La bande nous donne un logement, mais ce dernier appartient à l'homme et non à la femme. Si cette dernière veut partir, elle doit laisser la maison derrière elle.
C'est ce qui m'est arrivé. J'ai quitté la maison avec deux valises, l'une avec des vêtements et l'autre avec des photos de mes enfants. Ma fille avait 16 ans à l'époque.
Je me suis retrouvée dans le milieu de la drogue et de l'alcool parce que je n'avais pas d'autre endroit où aller. Je me suis prostituée pour assurer ma subsistance. Et au fond de moi...
Quant à l'homme, il garde la maison et tout le reste, et refait sa vie avec une autre famille. Voilà ce que les femmes autochtones doivent endurer. Je suis partie pour Calgary, où j'ai consommé de l'alcool et de la drogue, en plus de me prostituer. J'ai souvent été battue, comme je l'avais été à la maison.
Souvenez-vous que quand on est une femme, on n'a pas un mot à dire, et si votre conjoint a un lien de parenté avec le chef et des membres du conseil, ces derniers font la sourde oreille. On se retrouve muette, incapable de dénoncer la situation. Selon l'ancien chef, que je connaissais et qui était un ami de mon ex-conjoint, c'est de ma faute si je subissais des mauvais traitements.
Je suis donc partie en laissant tout derrière moi. J'ai tout perdu.
Voilà une petite partie de mon histoire.
Je suis désolée de ne pouvoir parler plus rapidement. La minute doit être écoulée maintenant.
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Merci, madame la présidente.
Permettez-moi de commencer en remerciant tous les témoins de comparaître aujourd'hui. Merci de nous faire part de votre vécu personnel et professionnel.
J'ai énormément de questions à poser, mais j'en ferai le tour brièvement en espérant que si le temps me manque, je pourrai vous rencontrer individuellement à un autre moment. Je demeure ici, alors nous pourrions poursuivre la discussion.
Hier, nous nous trouvions à Prince Albert, où nous avons visité une organisation. J'ai demandé au personnel comment il obtenait du financement pour réussir à poursuivre ses activités. La directrice générale nous a alors énuméré une vingtaine de subventions qui permettent à l'organisme d'assurer son financement. Je me suis alors exclamée qu'elle devait passer son temps à remplir des demandes de financement.
Je vous poserai quelques questions et vous laisserai répondre par la suite.
Nous représentons le gouvernement fédéral. Selon vous, qu'est-ce que ce dernier peut faire concrètement pour résoudre certains des problèmes auxquels vous êtes confrontées? Je suppose que je pense particulièrement au financement.
La question suivante s'adresse à Leslie. Leslie, on a dénoncé la colonisation et les conséquences qu'ont eu les pensionnats et diverses mesures. Un certain nombre d'initiatives ont été entreprises ces dernières années, mais apparemment, ce n'est pas suffisant. Avez-vous des solutions concrètes à proposer pour résoudre les problèmes engendrés par la colonisation?
Ma dernière question vous est également destinée. C'est la présidente qui a abordé le sujet hier, en fait. Il a beaucoup été question de la violence conjugale au cours des séances que nous avons tenues dans les diverses régions du pays. Comme il s'agit d'un problème répandu, je m'attends à ce qu'il domine le débat. Vous avez également évoqué d'autres formes de violence faite aux femmes. J'aimerais que vous nous en disiez davantage à ce sujet.
Je m'en tiendrai là. Si j'ai plus de temps, j'ai d'autres questions.
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La question du financement est d'une telle ampleur que j'aimerais demander à l'une de mes partenaires de vous répondre.
Pour ce qui est des manifestations historiques et contemporaines de la colonisation, je ferai référence à une étude réalisée par MM. Chandler et Lalonde, deux sociologues de l'Université de la Colombie-Britannique qui s'interrogeaient sur les taux de suicide des Autochtones dans les communautés des Premières nations de la province. Ils avaient remarqué que dans certaines communautés, les taux de suicide étaient 800 fois plus élevés que la moyenne nationale, un constat des plus désolant, alors que dans d'autres communautés, le suicide était pratiquement inconnu.
Ils ont donc entrepris une étude pour déterminer les facteurs et les éléments à l'origine de cet écart dans les taux de suicide et découvert ce qu'ils ont appelé la « continuité culturelle ». Essentiellement, c'est la maîtrise que les communautés avaient de leur destinée qui expliquait l'écart. Si elles étaient pleinement habilitées à prendre des décisions et étaient dirigées par des femmes — et c'est un autre facteur que je tiens à mentionner —, les communautés qui reconnaissaient le rôle des femmes et qui permettaient à ces dernières d'assumer un certain pouvoir étaient celles qui bénéficiaient des facteurs de protection leur permettant de vivre de manière saine et sécuritaire.
Mais quelles leçons pourrait-on tirer de cette étude pour les appliquer à la situation qui prévaut à Winnipeg? Si l'on examine comment on affecte le financement, on constate qu'il est principalement accordé à des organismes non autochtones pour leur permettre d'aider les Autochtones. C'est le genre de scénario que nous devons commencer à rectifier afin de nous assurer que quand on répartit les fonds, on ne les accorde pas à des organisations non autochtones qui viennent en aide aux femmes autochtones. Bien souvent, ces mêmes organismes m'appellent à l'aide parce qu'ils ne savent pas comment mettre en oeuvre leurs programmes, car les femmes n'y participent pas. J'ai carrément cessé de les aider.
Ce n'est pas que je refuse d'aider nos femmes; mais cette situation est le résultat inhérent de la manière dont on affecte les fonds. Tout le monde est capable de présenter des demandes de financement. Ce qu'il faut, c'est redistribuer l'argent de toutes sortes de façons.
Le gouvernement fédéral doit réaffecter les fonds aux communautés autochtones. Nous connaissons tous l'image stéréotypée des Autochtones qui roulent sur l'or. Nous savons également que cette image est on ne peut plus fausse. En fait, ce n'est qu'une infime partie des fonds affectés aux Autochtones qui se rendent vraiment jusqu'au communautés.
À mon avis, le premier principe de la décolonisation consisterait à chercher qui reçoit les fonds. Cela ne me semble pas bien difficile, mais peut-être suis-je naïve.
Pour ce qui est des actes violents commis par des étrangers, nous savons tous que des femmes se prostituent dans les rues de Winnipeg. Je crois qu'il fait partie de notre culture de fermer les yeux sur nos défauts et de refuser d'admettre que notre culture contribue à confiner ces jeunes à la rue. Nous préférons dire qu'ils sont responsables de leur malheur. Or, ces cas peuvent survenir dans n'importe quelle communauté où les gens sont exposés à une pauvreté économique, à une marginalisation politique et à une isolation sociale extrêmes.
Enfin, nous savons que dès que de nouveaux venus arrivent en territoire autochtone, ils repèrent les plus vulnérables. Malheureusement, ils exploitent nos enfants, nous le savons. Il y a une sorte de trait culturel, assez difficile à expliquer. Nous sommes... Ce trait nous colle littéralement à la peau. Ces gens détectent immédiatement ceux qui sont les plus marginalisés et ils en profitent. Certains enfants... Dernièrement encore, un jeune qui faisait partie d'un groupe d'hommes qui l'exploitaient pour le sexe et la drogue s'est enlevé la vie. Une autre jeune femme a été trouvée morte en périphérie de Winnipeg l'an dernier. Le corps d'une autre a été retrouvé dans une petite communité voisine l'hiver dernier.
Nous ne valons rien, nous sommes déshumanisées par la culture. Voilà pourquoi nous sommes victime de violence. Si l'on est tellement déshumanisé que l'on devient moins qu'un être humain, alors... Et il y a aussi...
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Premièrement, je veux vous remercier de nous accueillir et de nous permettre de vous rencontrer ce matin. C'est très important pour nous. Je vous remercie plus spécialement d'accepter que je parle ma langue. Comme vous le comprendrez, je veux la conserver et, par conséquent, il est important pour moi de continuer à la parler.
Je suis très touchée par tout ce que vous avez dit. Ce que nous faisons présentement dans diverses régions du Canada est très important.
Suzanne, vous avez dit plus tôt que vous arriviez à l'âge de 50 ans et qu'il fallait absolument transmettre aux plus jeunes le courage de continuer, de façon à transcender les effets de la colonisation. Je comprends, mais je me demande comment ça peut se faire, compte tenu du fait que le dommage a été imprégné dans les êtres humains que vous êtes il y a des centaines d'années déjà. À eux seuls, l'argent, le courage que vous avez toutes ou les idées ne peuvent pas tout régler. Alors, comment faut-il procéder?
Anita en a parlé. Pour ma part, j'ai rencontré des gens hier, et j'ai constaté qu'il y avait beaucoup d'ignorance chez les non-Autochtones par rapport à qui vous êtes. Hier, les gens nous ont dit que Prince Albert comptait 54 p. 100 d'Autochtones et donc que 20 p. 100 de la population payait pour tous les autres. Ils n'étaient pas au courant du fait que les Autochtones vivant à l'extérieur des communautés autochtones paient des taxes comme tout le monde.
Que faut-il faire pour que les gens comprennent qui vous êtes? Comment peut-on établir des ponts entre les non-Autochtones et les Autochtones, briser les tabous, faire disparaître les préjugés et le racisme? Êtes-vous également victimes de racisme ici, à Winnipeg, lorsque vous faites affaire avec les services sociaux et les services de police? Que faut-il faire pour arrêter cela?
Pour ma part, j'ai été touchée par une femme nommée Laurie Odjick, qui est la mère d'une jeune fille disparue à Gatineau. Elle a touché mon coeur. Nous sommes devenues amies. Depuis, je ne vois plus les choses de la même façon. Mais qui devez-vous toucher pour que les gens comprennent? Comment faire?
Le fédéral peut en effet octroyer de l'argent, mais c'est trop peu. Sur un dollar qu'il fournit, combien se retrouve vraiment dans vos poches? Combien? Leslie, pouvez-vous me dire si c'est 25 ¢, par exemple? Quand le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien décide d'allouer des fonds, combien d'argent est véritablement octroyé aux programmes? Le savez-vous?
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Je vais vous parler un peu du financement et peut-être que Leslie pourra aussi vous en parler ensuite.
Si vous nous donnez 50 000 $, par exemple, en ce qui concerne la répartition de ce montant, tout le monde ici sait que nous le répartissons entre peut-être 40 ou 50... Donc, nous parlons peut-être — et j'essaie d'être aussi généreuse que possible — de 25 à 50 cents par dollar. Il faut tenir compte du fait que la gestion de notre organisation est de plus en plus complexe. Nous avons perdu la capacité de considérer la communauté comme un atout sur le plan de l'accessibilité au financement. Cela devient donc de plus en plus ardu d'en obtenir. Tout le monde cherche à mettre la main sur les mêmes fonds, qui sont tout de même limités. De plus, les exigences changent; pour obtenir du financement, on doit devenir plus créatif au lieu de s'en tenir à quelque chose de sûr parce que cela fonctionne.
L'autre élément qui concerne le financement se rapporte à ce que le gouvernement considère comme une réussite. Qu'est-ce qu'une réussite? Est-ce le pourcentage de personnes qui font des progrès? Est-ce cette femme qui a fait des changements dans sa vie et qui ne subit plus de violence conjugale... ou ne vit plus dans la pauvreté? Que considère-t-on comme une réussite? Les chiffres qui indiquent que toutes les familles avec lesquelles vous travaillez vont s'en sortir?
Nous devons comprendre que les collectivités autochtones se servent de l'enseignement oral, ce qui n'entre pas dans les exigences de financement. Lorsque nous parlons avec des anciens ou des gens de la communauté de questions complexes de santé mentale, de toxicomanie, de violence, de commerce du sexe, quelle valeur monétaire peut-on donner à cela? Nous voyons plus loin que les fonds reçus. Ce qui est difficile, parfois, c'est de savoir si nous avons la bonne personne, car ce n'est pas simple de trouver et d'embaucher la personne qui convient pour travailler auprès de ces familles. Le financement a vraiment un impact en ce qui concerne la formation et parfois, la question ne se pose même pas. Souvent, nous ne pouvons obtenir des fonds que lorsqu'il nous faut un financement opérationnel. Nous devons envisager d'élaborer des stratégies pour déterminer ce qui fonctionne et pourquoi cela fonctionne, et de nous en servir comme d'un atout plutôt que d'essayer de modifier la politique parce que le gouvernement a changé son orientation.
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Je vais répondre brièvement.
Puisque vous nous avez demandé de proposer des solutions, je vous demande d'affecter des fonds à l'éducation. Pour ceux d'entre nous qui s'instruisent... Je suis arrivée ici il y a 20 ans avec 16 sacs à ordures et deux enfants, et grâce aux battantes qui m'ont aidée tout au long de mon cheminement, je suis ici pour aider mes soeurs, pour être un maillon de la chaîne. Lorsqu'on vous demande des fonds, assurez-vous de financer l'éducation. Si vous voulez que nous soyons autonomes, en santé et que nous payions des impôts, nous devons pouvoir nous instruire.
Le fait pour nous d'être invitées à d'autres endroits nous permet de continuer à répéter notre message jusqu'à ce qu'il soit transmis grâce à des femmes comme vous, nos soeurs, qui pouvez nous aider. Pour celles d'entre nous qui n'en sont pas encore là, comme je l'ai dit, avec Ka Ni Kanichihk, Moon Voices, il nous faut attirer encore plus de femmes afin d'être derrière elles et de les encourager à prendre la relève.
Je veux assurer à mes petits-enfants un mode de vie sain. Ma fille représente la troisième génération et moi, la deuxième génération d'une famille qui a subi les conséquences des pensionnats. Cela me touche vraiment. C'est surtout difficile parce que ce sont les personnes de race blanche qui véhiculent ces stéréotypes. Puisque mon père était un Canadien français et que ma mère est membre des Premières nations, cela me touche en tant que Métisse.
Je ressemble à une Autochtone, mais mon père est un francophone de Saint-Théophile, au Québec. Pourtant, je sais que s'il était vivant aujourd'hui, il serait ici pour m'appuyer.
Je crois qu'il nous faut comprendre que les écoles permettront aux Autochtones — à nos enfants, à nos petits-enfants, à mes petits-enfants — de récupérer leur langue et leur enseignement. Nous ne devrions pas être limités à un seul système d'enseignement. Si on permet aux francophones de parler français, nous devrions permettre aux autres cultures d'exister dans ce pays. Je sais qu'il y a beaucoup de cultures différentes, mais pour les Premières nations et les Métis, je dirais qu'il faut du financement.
Lorsque Ka Ni Kanichihk offre le programme Moon Voices, rappelez-vous que nous devons obtenir ce financement pour réussir, et qu'il y a bien des femmes et des enfants qui ne peuvent pas se faire entendre.
Le Native Women's Transition Centre, là où j'ai commencé mon cheminement, et Ikwe, là où j'ai passé une autre partie de ma vie, sont des ressources très importantes pour les femmes, mais elles sont insuffisantes.
Bon sang, on a mis sur pied une toute nouvelle société de protection des animaux, mais nous, nous sommes des citoyens de deuxième ordre parce que le financement est insuffisant. Ce qui arrive, c'est que les enfants sont pris en charge, des situations se produisent, et les mères aboutissent ensuite dans la rue. Nous en avons assez que des gens se fassent tuer.
Merci.
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Je siège au comité depuis peu. Je tiens à remercier les membres du comité d'être ici. Je suis désolée, je croyais que Mme Mathyssen prendrait la parole avant moi, mais je suis heureuse de m'adresser aux témoins aujourd'hui.
Tout d'abord, j'aimerais vous dire meegwetch. Je connais beaucoup d'entre vous grâce à mes différentes fonctions. Je suis fière que vous soyez ici aujourd'hui, vous qui êtes si courageuses, pour parler des façons dont nous pouvons changer cet horrible système que subissent nos femmes. Je dois reconnaître que vous avez tout à fait raison de dire que l'argent seul ne réglera pas les problèmes. Il faut qu'il y ait une collaboration et une coopération entre les gens et les organismes, y compris le gouvernement. Le gouvernement est ici aujourd'hui pour découvrir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
Leslie, vous avez dit que des organisations non autochtones vous ont demandé de l'aide; cela ne va pas. Les rapports que vous présentez, lorsque le financement est accordé et que vos projets sont terminés, sont très importants. Cette information, au bout du compte, devrait mener à d'autres décisions, n'est-ce pas?
Je vous demanderais — et je ne veux pas vous mettre sur la sellette ici aujourd'hui, Leslie, mais j'aimerais beaucoup que vous nous disiez, peut-être en présentant un mémoire au comité — comment c'est arrivé et de quelle organisation il s'agissait, car lorsque nous recevons des demandes de financement — et le gouvernement du Canada consacre plus d'argent à cette question que jamais auparavant dans l'histoire du pays —, c'est la réalité. Si 20 organisations demandent des fonds alors qu'il n'y en a que pour 18, les informations que vous venez de fournir sont très importantes. Je vous encourage donc à travailler avec nous afin que nous sachions exactement ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné. C'est là-dessus que j'aimerais me concentrer.
Beaucoup d'entre vous ont dit que les droits des femmes autochtones n'ont pas été respectés dans les réserves ou à l'extérieur des réserves. Je comprends que le financement est important. Lorsque le Native Women's Transition Centre nous demande 72 650 $, c'est ce qu'il obtient, et nous nous attendons à ce que la totalité de cette somme soit consacrée au projet qu'il est censé soutenir. Mais que pouvons-nous faire de plus? Car c'est important. Vous avez tous parlé des droits. À l'heure actuelle, des projets de loi sont à l'étude à la Chambre. C'est ce que font en grande partie le gouvernement du Canada et tous les députés qui sont ici. Nous présentons des projets de loi à la Chambre afin de mieux diriger et de mieux protéger la population du Canada. L'un d'entre eux est le projet de loi sur les biens immobiliers matrimoniaux. Comme l'aînée Sutherland — et je veux lui rendre hommage aujourd'hui — et bien sûr Suzanne Chartrand l'ont dit, les femmes autochtones n'avaient aucun droit lorsqu'elles sortaient des réserves. Elles n'avaient pas le droit de conserver la maison familiale. Pourtant, toutes les autres femmes de ce pays, comme l'a indiqué Sharon Morgan, ont la possibilité de téléphoner à la police et d'obtenir une ordonnance de protection ou de prévention afin qu'elles et leurs enfants soient en sécurité en attendant que la violence se dissipe et que tout le monde se calme. Mais les femmes autochtones n'ont pas cette possibilité dans les réserves.
La Chambre est actuellement saisie d'une mesure législative qu'on appelle le projet de loi sur les biens immobiliers matrimoniaux. J'aimerais vous entendre sur cette question, madame Sutherland. Dans quelle mesure ce projet de loi pourrait-il aider ou nuire? Si nous avons le temps, j'aimerais entendre également Suzanne là-dessus, puisque vous avez toutes les deux souffert de ne disposer d'aucun droit dans la réserve.
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Quand je suis arrivée ici, il y a 20 ans, le plus important pour moi était qu'il y ait un endroit pour faciliter la transition. Les portes du Native Women's Transition Centre ont toujours été ouvertes. Je crois que nous devons montrer que nous appuyons ces endroits, que nous savons que les femmes peuvent s'y rendre lorsqu'elles essaient d'échapper à la violence conjugale.
Parfois, nous laissons tout derrière nous, nous n'apportons que ce que nous pouvons. Cependant, nous devons encourager ces jeunes femmes. Il nous faut des combattantes qui viendront leur parler et favoriser des changements. Lorsqu'elles sont dans cette situation, les femmes sont touchées par la pauvreté. Soit elles sombrent... J'ai choisi de ne pas passer entre les mailles du filet ni de rester dans l'ignorance.
Comme je l'ai dit, si nous pouvons trouver cela, s'il n'y a pas de maison de transition ni d'endroit où habiter pour les femmes des communautés, nous aurons le droit, si nous ne voulons pas vivre dans une réserve — car je ne vivais pas dans une réserve, mais dans une collectivité —, d'aller vivre où bon nous semble au pays et d'enseigner à nos femmes à dénoncer la violence conjugale.
Lorsqu'on discutera de ces projets de loi, nous saurons que c'est le bon moment d'être là, et quand viendront les élections, nous montrerons à nos femmes à voter et nous demanderons aux politiciens de répondre à nos attentes. Voilà comment les changements se produiront.
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Merci, madame la présidente.
Je vous remercie de votre accueil chaleureux sur le territoire du Traité no 1. C'est un privilège d'être ici. Je tiens à vous remercier de votre courage et d'avoir accepté de venir nous parler.
J'ai trois questions simples à vous poser, mais je ne crois pas que je pourrai poser les trois.
La première porte sur le financement. J'ai examiné les projets qui ont été financés par Condition féminine Canada à Winnipeg. Il y en a 13. De ce nombre, six ont été menés à terme. Ce qui me préoccupe, c'est que beaucoup de ces projets sont réalisés à très court terme. Compte tenu des situations auxquelles sont confrontées les femmes des Premières nations, une période de 16 ou de 18 mois est insuffisante ne serait-ce que pour aborder le problème et encore moins pour y trouver une solution. Je m'inquiète de la nature ponctuelle de ce financement, du fait qu'il soit si bref.
À Prince Albert, on nous a dit que bien souvent, les groupes communautaires doivent s'arranger pour offrir des programmes en fonction du financement plutôt que de la situation réelle, et c'est un problème. On fait beaucoup d'efforts pour obtenir ce financement.
Enfin, les groupes craignent que leur financement soit supprimé s'ils disent quelque chose d'inapproprié, s'ils contrarient les pouvoirs en place. Je vous assure que c'est une situation très difficile.
Ma deuxième question porte sur les jeunes femmes qui sortent des réserves. Elles sont vulnérables. À Prince Albert et ailleurs, on nous a dit que les autorités, les services sociaux et la police les jugent comme de mauvaises personnes et qu'ils n'ont aucune compréhension de ce qui leur est arrivé. Je me demande si les témoins pourraient nous expliquer comment cela arrive à une jeune fille. Comment se retrouve-t-elle dans cette situation épouvantable?
La troisième chose... Suzanne, vous avez fait allusion à l'appréhension des enfants. On nous a dit que c'est profondément destructeur pour la communauté, pour les femmes. J'aimerais que vous nous en parliez un peu.
Je sais que je vous demande beaucoup d'informations, mais si vous pouviez nous les fournir, je vous en serais très reconnaissante.
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J'ai lu le rapport dans lequel on indiquait que la majorité des enfants vivant dans les pensionnats étaient des enfants pris en charge; le Canada ne devrait-il pas avoir honte de cela? Il nous faut comprendre. Je le souligne encore une fois, car c'est la seule chose qui m'a permis d'arriver là où je suis. Nous devons y travailler. En ce qui concerne les programmes, je crois qu'au total, selon le répertoire autochtone, il y a plus de 100 organisations qui se disputent les fonds. Si vous voulez améliorer les choses, assurez-vous de savoir où va votre financement.
Souvent, lorsque quelque chose va bien pour les Autochtones et que nous commençons à améliorer notre situation, ces programmes sont abolis. À ce chapitre, nous devons attirer votre attention sur le fait que vous devez examiner chacun des programmes, comment nous sommes toutes liées dans notre lutte pour la même cause, mais aussi comment nous pouvons faire les choses un peu différemment, car nous sommes à des niveaux différents.
Je vis à une époque de décolonisation; on en parle beaucoup... Il y a peut-être sept ans, on ne savait pas ce que cela signifiait. Une enseignante anglophone m'a demandé ce qu'est la décolonisation, et j'ai pu lui répondre. Cela signifie réparer les erreurs qui ont été faites afin de veiller à ce qu'elles ne se produisent plus jamais dans les générations futures.
Je suis d'avis que les enfants devraient vivre à la maison avec leur famille. C'est mon objectif. Nous devons nous pencher là-dessus également. Nous ne réussissons pas à prendre soin de nos mères et de nos enfants. Il manque des joueurs à la table: les services sociaux et fiscaux. Je n'ai jamais discuté avec eux. Un ancien m'a dit que lorsque le gouvernement a intégré l'aide sociale au système, il a causé beaucoup de tort à notre population.
Nous voulons travailler. Nous le voulons vraiment. Je suis Métisse et je paie de l'impôt. J'apporte une contribution à la société. Les petits programmes ne sont pas suffisants. Il nous faut des diplômes. Nous devons avoir la possibilité d'aller à l'école à temps plein. Dans le passé, nous avons eu accès à des programmes de formation, mais ils n'ont duré que quelques semaines. Il nous faut des études plus longues.
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En ce qui a trait indirectement à l'ensemble du système de financement, ce qui est bien à propos des fonds qu'accorde Condition féminine Canada, c'est qu'il s'agit de financement pluriannuel. On peut donc mener à bien un projet dans un certain délai. Mais le financement fédéral n'est pas toujours pluriannuel. Je recommande donc une modification de la politique dans certains autres systèmes.
Par exemple, pour les programmes de financement de Patrimoine canadien, on doit présenter un projet chaque année. Même si on présente son projet à l'intérieur des délais prévus, bien souvent, les décisions concernant le financement ne sont pas connues avant six ou sept mois. On reste toujours en attente, en quelque sorte, puis on doit se dépêcher et ensuite, présenter un rapport. C'est un peu difficile de gérer ce genre de projet.
Maintenant, on nous dit bien souvent que la nourriture, si essentielle pour les gens qui viennent d'endroits où il existe de réels problèmes de sécurité alimentaire, ne peut plus être considérée comme faisant partie des fournitures que nous utilisons.
Il y a aussi l'administration. Aucun financement pour des projets ne permettra de payer le directeur exécutif, la structure de gestion. Le problème, c'est qu'on a besoin d'une structure de gestion pour gérer de façon efficace une organisation, mais les fonds accordés pour les projets ne le permettent pas.
Il y a beaucoup d'exigences en ce qui concerne les rapports. Nous devons présenter des rapports multiples, des rapports mensuels, et nous le faisons.
De plus, nous savons qu'il y a au Manitoba une division scolaire francophone. Les familles francophones peuvent aller à l'école en français. Ma situation ressemble un peu à celle de Suzanne, en ce sens que mes enfants sont des descendants de Métis, de membres des Premières nations et d'Irlandais. Ils étudient en français grâce au système d'immersion. Il n'y a pas de division scolaire autochtone ici, au Manitoba, ni hors réserve à Winnipeg. C'est à Winnipeg que vivent le plus grand nombre d'Autochtones au Manitoba. Il y a une division scolaire francophone, mais pas autochtone. C'est ce qui est prévu dans la loi du Manitoba de quelle que soit l'année. En plus, dans le système scolaire actuel, seulement 25 p. 100 de nos enfants, environ, obtiennent un diplôme.
Il y a donc des problèmes à régler, à notre avis. Encore une fois, peut-être que nous devrions réfléchir à un modèle différent d'enseignement. Nous croyons que lorsque les enfants ont acquis une identité culturelle solide, ils n'ont aucune difficulté à s'intégrer une fois adultes, peu importe le système. Au Manitoba, j'ai recommandé que nous nous efforcions courageusement, comme dans la communauté francophone, de faire respecter nos droits.
J'aimerais également ajouter...
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Nos fonds proviennent du Programme de prévention de la violence familiale qui est financé par le gouvernement du Manitoba. Nous ne recevons absolument aucuns fonds du fédéral.
Évidemment, une partie du problème c'est que, parfois, lorsque les femmes quittent la maison de refuge, elles n'ont nulle part où aller, sauf chez celui qui les a agressées. Nous aimerions travailler plus longtemps avec ces jeunes femmes, effectuer avec elles un travail continu et de longue haleine.
Deuxièmement, vous avez posé plus tôt une question à laquelle je voulais répondre au sujet des femmes non autochtones qui utilisent les maisons de refuge. Beaucoup d'immigrantes viennent chez nous, entre autres des femmes originaires d'Éthiopie, d'autres pays africains et des Philippines. Elles représentent, je dirais, 10 p. 100 de notre clientèle.
Pour revenir au travail que l'on pourrait faire avec ces jeunes femmes, nous offrons des programmes sur la violence familiale — comment déceler la tendance et comment la casser —, mais il y a tous ces autres facteurs qui entrent en ligne de compte et dont nous avons parlé aujourd'hui, notamment l'éducation, le logement et plus de travailleurs en santé mentale. Bon sang qu'il est difficile de trouver quelqu'un pour aider ces jeunes femmes qui ont un urgent besoin d'aide. Et la plupart d'entre elles, si elles réussissent à rencontrer un psychiatre, sont sous médication.
Donc, nous aimerions travailler davantage et plus longtemps avec ces femmes et, de façon générale, avec leur famille également. Si la victime vit dans une famille dysfonctionnelle, alors il y a aussi du travail à faire auprès de la famille.
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Merci, madame la présidente.
Nous disposons de trois minutes, alors je vais tenter d’être brève.
Il existe d'autres sources de financement. Leslie a mentionné Patrimoine Canada. Il y a aussi, bien sûr, celles de Condition féminine Canada à laquelle Mme Mathyssen a fait référence. Il y a Connexions culturelles pour la jeunesse autochtone, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et Santé Canada. Il y en a plusieurs.
Il y a beaucoup d’autres programmes offerts par la ville de Winnipeg, des programmes dont je suis assez fière, et qui sont financés par d'autres sources. Un de ces programmes est offert par le Native Women's Transition Centre et porte sur la planification de la relève communautaire pour les jeunes Autochtones.
J'entends beaucoup parler d'éducation et je me demande si c'est à ce genre de programmes que vous faites allusion. Est-ce le genre d’éducation dont vous voulez parler? Visez-vous les jeunes de la maternelle à la 12e année? Plus particulièrement, quand vous parlez d'éducation, parlez-vous d’apprendre aux femmes autochtones à se protéger et à se prendre en main pour fonder une famille, etc., ou parlez-vous des jeunes de la maternelle à la 12e année?
Peut-être que Mme Martin pourrait répondre d'abord, suivie peut-être de Leslie.
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Lorsqu’une jeune Autochtone se présente à la Maison-relais des femmes autochtones, nous pouvons lui offrir beaucoup de programmes et notre culture. Je suis l’aînée de la Maison-relais des femmes autochtones. J’apprends à ces jeunes filles leurs origines, et je leur apprends à s’identifier en tant qu’Autochtones et à être fières de qui elles sont.
J’apprends aussi aux jeunes enfants à se respecter eux-mêmes et à respecter leurs mères. C’est une chose que nous avions perdue avec les pensionnats indiens.
Il faut leur réapprendre ce qu’est l’amour, ce qu’est le respect. Il faut leur montrer les sept enseignements sacrés lorsqu’ils viennent nous voir.
J’écoutais plus tôt les discussions concernant la garde des enfants. Lorsque les femmes viennent à la Maison-relais des femmes autochtones, c'est pour guérir, pour guérir une partie d’elles-mêmes, celle qui touche l’enseignement, leurs origines. Nous leur redonnons leur identité. Aussi, ces femmes n’ayant pas accès à des services de garde pendant leurs études, elles sont nombreuses à abandonner l’école. Elles voudraient terminer leurs études, mais elles n’ont pas de place en garderie. Elles se cherchent un emploi et s’inscrivent à l’école, mais si elles sont acceptées, elles ne peuvent pas y aller, parce qu’elles n’ont personne pour prendre soin de leur enfant. On doit investir davantage dans les garderies pour aider les femmes autochtones.
On doit investir davantage dans la culture autochtone, afin d’aider les Autochtones à s’identifier. Lorsque nous aurons retrouvé nos origines, que nous aurons repris ce qui nous appartient, notre langue, notre culture — ces choses nous ont été prises, on nous les a volées —, vous verrez des femmes autochtones fières.
Tout comme moi, mes enfants sont fiers d’être Autochtones. Je ne laisserai jamais personne marcher devant moi ou me tasser comme lorsque j’étais au pensionnat. On me disait de me taire, parce que je n’étais qu’une Autochtone. Mais j’étais une personne. Depuis, je suis redevenue moi-même Ma culture, c’est ce que je contribue à la Maison-relais des femmes autochtones.
Il est important pour leur guérison d’écouter ces jeunes femmes, de pleurer, de rire et de jouer avec elles.
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Nous sommes prêts à reprendre les travaux.
Nous sommes le Comité permanent de la condition féminine. Le comité est composé de représentants des quatre partis politiques de la Chambre. Il ne s’agit donc pas d’un comité partisan. Nous sommes ici pour recueillir de l’information et pour écouter en vue de formuler des recommandations. Nous abordons aujourd’hui la violence faite aux femmes autochtones, les taux élevés de violence. Nous voulons connaître les causes profondes et l’étendue de cette violence, les différents actes de violence et la nature de cette violence.
Nous espérons trouver des solutions. Les membres du comité conviennent que beaucoup d’argent a été investi dans ce dossier et que toutes sortes de programmes ont été créés, mais sans grands résultats. Donc, nous aimerions trouver une solution efficace à ces problèmes.
Chaque témoin aura cinq minutes pour présenter son mémoire. Ensuite, nous aurons une période de questions et réponses. Afin d’avoir suffisamment de temps pour entendre le prochain groupe de témoins, je vais devoir être très stricte sur le temps accordé aux interventions.
Accueillons d’abord M. Bill Robinson, commissaire de la Gendarmerie royale du Canada. Monsieur le commissaire, vous avez cinq minutes.
Bonjour. J’aimerais vous remercier d’avoir invité la GRC à témoigner devant le comité ce matin. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Les membres de la Division D offrent des services de police à la plupart des communautés rurales et isolées du Manitoba, soit plus de 446 000 personnes, dont 59 collectivités des Premières nations et 48 collectivités métisses.
Nous travaillons depuis longtemps en étroite collaboration avec les collectivités autochtones afin de consolider la communication. Le Comité consultatif sur les Autochtones de la Division D est composé d'aînés et d'Autochtones dont les horizons et les opinions sont variés. De plus, nous jouissons de protocoles de sécurité publique solidement établis avec l'Assembly of Manitoba Chiefs (AMC), l'organisme représentant les chefs du Nord, soit le MKO, et les chefs du Sud.
Les Services de police autochtones de la Division D facilitent la communication sur les grandes questions de l'heure auprès des leaders et des collectivités autochtones. En effet, en août 2009, la Division D et l’AMC ont conclu un protocole d'entente qui prévoit l'affectation d'un membre régulier de la GRC, soit Mme Monique Cooper, ici derrière moi, au poste d'agent de liaison avec les communautés autochtones. Celle-ci travaille directement dans les bureaux de l'AMC.
En réponse aux recommandations du Conseil consultatif sur les Autochtones du commandant divisionnaire, en avril 2010 nous avons créé un nouveau poste, soit celui de coordonnateur à la sensibilisation aux gangs de rue, afin de mettre en oeuvre notre programme de prévention, d'information et de sensibilisation.
Aussi, nous travaillons activement à prévenir la traite de personnes et à sensibiliser la population à ce sujet. Les membres de la Division D participent au Comité de l'équipe provincial d'intervention sur la traite des personnes en collaboration avec des représentants du Service de police de Winnipeg, du ministère de la Justice du Manitoba, de l'Agence des services frontaliers du Canada, de l'Armée du Salut, du Conseil canadien pour les réfugiés, du conseil de la Situation de la femme du Manitoba, de la Direction des services aux victimes du Manitoba, de Ma Mawi, de l’AMC et bien d'autres.
La Division D continue à consacrer beaucoup d'efforts pour sensibiliser ses membres à l'émergence de la traite de personnes ainsi qu'au fléau des femmes assassinées ou disparues au Manitoba. Les services de police contractuels et autochtones de la Division D, en collaboration avec la Section des questions d'immigration et de passeport de la région du Nord-Ouest ainsi que le Centre national de coordination contre la traite de personnes, fournissent des services de formation et des outils de sensibilisation à nos membres. Les groupes et les agents du renseignement des districts Nord, Est et Ouest ainsi que les membres du service de la sécurité routière ont bénéficié de cette formation.
En plus des ateliers de formation sur la sensibilisation, le service de la formation de la Division D a aussi intégré la sensibilisation à la traite de personnes ainsi que la capsule vidéo Je ne suis pas à vendre à d'autres cours, dont le cours d’orientation pour les nouveaux enquêteurs ainsi que les cours sur la drogue, les renseignements criminels, la violence faite aux enfants et les entrevues judiciaires, et ceux offerts aux équipes de sécurité routière.
J'aimerais vous donner un aperçu des efforts entrepris à la Division D de la GRC dans le but de lutter contre la violence faite aux femmes autochtones, notamment le Projet des personnes disparues à risque élevé, le Project Disappear et le groupe de travail intégré pour les femmes disparues et assassinées du Manitoba
En 2003, avec l'aide des services de police municipaux du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta, la GRC s’est attaquée au problème des homicides non résolus et des personnes disparues en mettant sur pied le Projet des personnes disparues à risque élevé. Au Manitoba, les membres de la Division D et du Service de police de Winnipeg ont pris part à cet effort rassemblant plusieurs organismes et régions afin de repérer, de recueillir, d’évaluer et d’analyser tous les cas de personnes disparues à risque élevé et les cas d'homicides non résolus.
Les personnes dites à « risque élevé » sont celles dont le mode de vie, le comportement ou les circonstances font qu'elles sont plus à risque d'être victimes d'un crime violent. Les participants au Projet des personnes disparues à risque élevé ont effectué un bon nombre de découvertes importantes bien documentées qui ont nécessité une enquête et une analyse approfondies.
Project Disappear a été mis sur pied en 2007 sous la gouverne de la Manitoba Association of Chiefs of Police, qui représente les neuf services de police de la province. Quatre d'entre eux enquêtent sur des cas de personnes disparues. Le projet et le site Web (www.macp.mb.ca), gérés par le personnel du Groupe des affaires non résolues de la Division D, contiennent des renseignements sur les personnes disparues depuis six mois et plus.
Plus de 170 personnes disparues ou restes humains non identifiés au Manitoba sont répertoriés sur le site Web. Le cas le plus ancien remonte à 1939. Le travail des membres de Project Disappear comprend l'analyse des données et la normalisation des politiques, des méthodes, des approches et des outils provinciaux.
Le Groupe de travail intégré pour les femmes disparues et assassinées au Manitoba a été formé en août 2009. Il est composé de cinq membres de la GRC, dont deux analystes criminels et quatre membres du Service de police de Winnipeg. Leur mandat consiste à réviser les cas non résolus, à réexaminer les enquêtes sur les femmes disparues où un acte illicite est soupçonné, à analyser les renseignements obtenus afin d'établir des liens entre les dossiers, le cas échéant, et à déterminer les pistes légitimes afin de poursuivre l'enquête.
Situés au Quartier général de la Division D, les employés du groupe ont commencé leur travail en octobre 2009 et sont actuellement à l'étape de l'analyse. Ainsi, les employés recueillent et regroupent les renseignements et effectuent des analyses judiciaires et médicolégales pour tous les cas. En plus de revoir tous les cas déclarés de femmes disparues, les membres du Groupe de travail intégré élaborent aussi de meilleures pratiques en matière d'échange de renseignements, de gestion et de coordination des dossiers et de divulgation des renseignements. Ces pratiques peuvent ensuite être adoptées par d'autres groupes d'enquêtes ou mises en oeuvre dans d'autres projets semblables au pays.
Nous sommes déterminés à fournir réponses, réconfort et apaisement aux proches et aux membres des familles des victimes, tout en assurant et en respectant l'intégrité de l'enquête en cours. Je tiens à vous assurer que les membres de la GRC prennent les choses au sérieux et enquêtent sur tous les cas de disparition et de meurtre, peu importe le sexe, l'origine ethnique, les antécédents ou le mode de vie de la victime.
Merci beaucoup.
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Bonjour. J’aimerais dire
meegwetch pour m’avoir invité à témoigner aujourd’hui. Je suis la présidente bénévole de la Women's Memorial March of Manitoba.
Je vais vous donner un aperçu de notre travail. Il s’agit cette année de notre quatrième édition. Je suis une citoyenne ordinaire. Je m’implique au sein de la communauté depuis 20 ans, et je travaille sans relâche afin d’éliminer la violence contre toutes les femmes, pas seulement les femmes autochtones.
Notre marche rend hommage aux femmes portées disparues ou assassinées depuis aussi loin que 1968. La victime la plus âgée à qui nous avons rendu hommage avait 86 ans. Jusqu’à présent, notre liste contient les noms de 216 victimes, et comme je l’ai dit, il ne s’agit pas uniquement de femmes autochtones.
Dans ce mémoire, j’aimerais parler un peu de la source de la violence contre les femmes. À mon avis, cette source, c’est la pauvreté. La pauvreté se présente sous différentes formes. Même lorsque les femmes victimes de violence reçoivent des prestations d’un programme d’aide au revenu, celles-ci sont insuffisantes. Ces femmes habitent dans des logements à loyer modéré situés dans des secteurs à risques élevés. Elles ne vivent pas dans des endroits sécuritaires. C’est un gros problème. Elles ne reçoivent pas suffisamment d’aide financière.
Il est plus payant pour certaines mères de rester chez elle et de recevoir des prestations d’aide sociale que de travailler au salaire minimum, car au moins, elles peuvent s’occuper de leur famille. C’est donc un sérieux problème.
Aussi, parce qu’elles ont peu de revenus et qu’elles vivent dans la pauvreté, de nombreuses mères veulent trouver un moyen pour subvenir aux besoins de leur famille et de leurs enfants, et elles se tournent vers la prostitution. On ne devient pas prostituée par choix. Ils sont nombreux à dire le contraire, mais à mon avis, les prostituées ne font pas ce métier par choix. Lorsqu’elles étaient jeunes, elles ne disaient pas: « Quand je serai grande, je serai une prostituée. » Ça ne se passe pas comme ça. Elles font ce métier, parce qu’elles ont des problèmes financiers. Il est vrai que certaines femmes se prostituent pour nourrir une dépendance. C’est une partie du problème. Certains clients leur offrent de la drogue en échange de faveurs sexuelles. C’est un cercle vicieux.
Parmi les problèmes du système juridique qui touchent nos collectivités, il y a la présence du racisme. Puisque je suis très attentive à ce qui se passe dans la collectivité, bon nombre de personnes viennent me voir pour me raconter ce qui leur est arrivé, et ils ont été victimes de racisme. Ça n’arrive pas à tout le monde, bien sûr, mais ça existe encore.
Il y a aussi un problème de discrimination. Nous sommes victimes de discrimination, parce que nous sommes des femmes, et parce que nous sommes autochtones.
À Winnipeg, nous avons un groupe de travail, mais il y a tout de même des problèmes. L’objectif, c’est de peindre la clôture. Mais comment? Va-t-on peindre seulement certaines sections? Mon but, c’est de peindre toute la clôture de façon adéquate.
Il y a des problèmes à régler, principalement au chapitre de la communication. Il faut s’attaquer aux problèmes de compétences et de territoires.
Je vous donne un exemple. Un homme a cambriolé un 7-Eleven à St.Vital. La police de Winnipeg est sortie de la ville pour aller appréhender le criminel en question. Alors, si les policiers de Winnipeg peuvent sortir de la ville pour aller arrêter un criminel dans une autre municipalité, pourquoi sont-ils incapables de traverser la rue pour rechercher une femme portée disparue ou assassinée? Je me pose la question.
L’assistance offerte aux victimes est inégale. Bon nombre des membres de notre collectivité ignorent comment accéder à ces services. Ils ignorent quels sont les services offerts. Il est vrai que la police de Winnipeg dispose d’une direction des services aux victimes, mais les citoyens ignorent comment accéder aux services offerts.
La guérison de nos familles et de nos collectivités, ça commence par moi et ma famille. C’est ainsi que je fonctionne: d’abord ma famille, puis ma collectivité, et ensuite le pays tout entier. C’est comme ça que la guérison s’effectue.
En ce qui concerne l’éducation, il faut offrir du soutien à ceux qui quittent les réserves pour s’installer dans les régions urbaines.
L’autre problème que nous avons à Winnipeg, c’est que les programmes offerts ne conviennent pas à tout le monde. Par exemple, si je suis attaquée et que je veux me rendre dans une maison de refuge, je ne pourrais pas, car mes enfants sont âgés de plus de 18 ans. Je ne peux pas laisser mes enfants à la maison et les mettre en danger. Donc ça, c’est un problème.
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Merci beaucoup, et merci de m’avoir invitée à témoigner aujourd’hui.
Je suis ici aujourd’hui, parce que je m’intéresse aux enfants du Manitoba. De plus, je jouis de près de 40 ans d’expérience professionnelle dans le secteur public. Aujourd’hui, au sein du gouvernement provincial, je suis responsable de différents secteurs, dont la garde d’enfants, la protection de l’enfance, la prévention de la violence familiale, et la conciliation familiale, offerte aux familles qui vivent une séparation, un divorce ou qui sont aux prises avec des problèmes au chapitre de la garde des enfants créés par une séparation ou un divorce.
J’aimerais parler brièvement de chacun de ces secteurs, décrire certaines tendances que nous avons remarquées et quelques-uns des défis que nous devons surmonter, puis peut-être vous fournir des renseignements qui pourraient vous être utiles dans le cadre de vos délibérations futures.
D’abord, la garde d’enfants. Comme vous l’avez entendu, le programme de garde d’enfants du Manitoba ne répond pas aux besoins de toutes les familles. Au cours des dernières années, nous avons constamment travaillé à améliorer notre système. Aujourd’hui, nous sommes au milieu d'un autre plan quinquennal de mise en œuvre stratégique qui nous permettra d’augmenter le nombre de places en garderies et d’améliorer la qualité de soins offerts.
Il n’existe aucun plan national de garde d’enfants. Chaque province doit élaborer son propre cadre afin de définir les besoins de ses citoyens et de trouver des façons de créer un tel programme.
Aujourd’hui, au Manitoba, nous avons environ 1 100 arderies, dont la moitié, environ 600, sont situés dans des écoles et des installations communautaires. Les autres sont des garderies privées licenciées qui offrent un service à un nombre moins élevé d’enfants, mais elles sont tout de même licenciées.
Il est clair pour nous qu’il faut poursuivre la formation afin d’élargir le programme, car c’est grâce à la formation que nous pourrons offrir des programmes de qualité. Nous examinons également les problèmes liés aux capitaux, aux installations et aux infrastructures. Un des problèmes, c’est que les programmes de garde d’enfants ne jouissent pas d’une infrastructure comparable à celle de nombreux autres programmes bien établis, comme les systèmes scolaires.
Nous avons récemment ouvert le dialogue avec le gouvernement fédéral en raison des initiatives mises de l’avant en matière de garde d’enfants sur les réserves. Le gouvernement fédéral prévoit offrir des garderies licenciées sur les réserves d’ici 2015. Nous aurons donc l’occasion, encore une fois, de créer un programme équitable, qui offre les mêmes possibilités, tant dans les réserves que hors réserves.
Le Manitoba jouit d’une expérience de plusieurs dizaines d’années en matière de protection de l’enfance. Quelques événements marquants sont survenus avant 1991, dont la publication du rapport de l’Enquête publique sur l’administration de la justice et les peuples autochtones du Manitoba. Dix années se sont écoulées avant que l’on tienne compte de ce rapport et de ses recommandations. Aujourd’hui, le Manitoba dispose d’un système créé avec la collaboration de la collectivité autochtone, de la collectivité métisse et du gouvernement provincial afin de s’assurer que la protection de l’enfance dans la province est bien administrée.
Il s’agit d’un secteur très problématique, surtout pour les familles. Évidemment, les problèmes de dépendance et de logement, et la pauvreté sont les principales raisons pour lesquelles les enfants sont pris en main par le système de protection de l’enfance.
Nos travailleurs sociaux, ceux qui sont aux premières lignes pour assurer la sécurité de nos enfants, doivent faire face à de nombreuses difficultés qu’ils ne peuvent pas surmonter seuls. Notre travail récent avec le gouvernement fédéral a permis la création d’un modèle conjoint ou harmonisé de financement pour la protection de l’enfance. Le gouvernement fédéral a concrétisé nos efforts conjoints du mois de juillet en annonçant l’ampleur du financement qu’il va apporter afin que l’on puisse créer un modèle de protection de l’enfance qui permettrait de réduire le nombre d’enfants ayant besoin de soins en affectant des ressources et des fonds pour des services de protection et en améliorant les services aux familles offerts partout dans la province.
En ce qui concerne la prévention de la violence familiale, nous continuons d’offrir des ressources aux femmes qui sont victimes de ce type de violence. Ce secteur continue de nous inquiéter. Aussi, nous sommes impatients de travailler avec d’autres intervenants afin d’améliorer les services offerts dans les réserves.
J’aurais aimé disposer d’un peu plus de temps, mais malheureusement, mon temps est écoulé.
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J’aimerais d’abord remercier le Comité permanent de la condition féminine de nous avoir invités à témoigner sur la question de la violence faite aux femmes autochtones.
J’aimerais également féliciter les membres du comité pour leur intérêt particulier à vouloir comprendre les perspectives communautaires concernant le fait troublant selon lequel les femmes et les filles autochtones continuent d’être plus souvent victimes de violence que les autres femmes. Il est généralement reconnu que les femmes autochtones sont plus souvent victimes de crimes violents que les autres femmes du Canada et que ces crimes ont moins tendance à être résolus. Il est très inquiétant pour nous de voir que, au Canada, les jeunes femmes autochtones courent cinq fois plus de risque de mourir à la suite d’un acte de violence que les autres femmes.
Nous sommes ici aujourd’hui à titre de représentantes du Stop Violence Against Aboriginal Women Action Group. Il s’agit d’une initiative communautaire mise sur pied par des citoyens autochtones et non autochtones dont l’objectif est de créer et d’adopter des mesures tangibles ayant pour but de prévenir la violence faite aux femmes et aux filles autochtones à Winnipeg et ailleurs au pays. Même si les membres du comité ont entre les mains des documents sur les recherches actuelles et sur la prestation de services en matière de violence faite aux femmes autochtones, nous allons faire référence, dans notre mémoire, aux résultats d’une recherche communautaire menée à Winnipeg en mai 2010.
Afin de comprendre les problèmes qui existent, les besoins des femmes et des filles autochtones qui vivent des situations de violence, et les façons de prévenir d’autres actes de violence, Stop Violence Against Aboriginal Women Action Group a organisé un forum communautaire et un groupe de consultation qui ont permis à des hommes et des femmes autochtones et non autochtones de partout à Winnipeg de faire valoir leurs points de vue. En tout, 44 organismes de prestation de services sociaux, de recherche, d’éducation, de justice et de surveillance, ainsi que des groupes communautaires qui travaillent à la défense des droits de la personne, des femmes autochtones et des victimes.
Nous avons d’abord effectué un sondage auquel 28 organismes ont répondu. J’aimerais attirer votre attention sur deux des questions qui ont été posées. On a demandé aux organismes de nous dire si, selon eux, la prestation des programmes et des services répondait aux besoins des femmes et des filles vivant dans des situations de violence. La moitié des répondants ont dit que la prestation répondait un peu aux besoins de ces femmes. Le tiers des répondants ont dit que la prestation ne répondait pas aux besoins des femmes et des filles autochtones vivant en situation de violence ou qu’elle y répondait un peu.
Un des organismes a dit que les programmes actuels sont surutilisés et que les femmes demandent constamment un meilleur soutien, notamment dans les cas de violence familiale. Un autre a fait remarquer que le lieu où les services sont offerts et les types de services offerts ne répondent pas toujours aux besoins de la collectivité, par exemple, les maisons de confiance pour les jeunes exploités sexuellement. Un des répondants a fait référence à la source profonde et insidieuse de la violence, disant que, malgré les efforts déployés, les femmes autochtones font face à des problèmes insurmontables, dont le logement, la pauvreté, la dépendance, la maladie chronique, la prise en main par le système de protection de l’enfance, les quartiers violents, les possibilités d’emploi limitées, et les effets complexes et à long terme du trouble de stress post-traumatique sur la santé mentale, comme ceux qui découlent de la colonisation et des pensionnats indiens.
La deuxième question demandait aux organismes d’évaluer l’importance des 19 programmes et services différents offerts aux femmes et aux filles autochtones qui vivent une situation de violence. Parmi les cinq principales priorités, on trouve: un meilleur accès à des logements sécuritaires et abordables; une formation spécialisée pour les policiers et les travailleurs des services sociaux; des politiques et des initiatives pour réduire la pauvreté; de meilleurs services de traitement des dépendances; et une meilleure protection des femmes et des filles autochtones.
Les organismes participants ont convenu que le travail visant à éliminer la violence, notamment en ce qui a trait à la violence faite aux femmes et aux filles autochtones, doit commencer, se poursuivre ou être accru à différents chapitres, dont la prévention de la violence familiale envers les jeunes garçons et les jeunes hommes; les services offerts aux délinquants violents; les services de transition pour les anciens membres de gangs, ceux qui ont atteint l’âge de 18 ans et qui quittent l'environnement des services à l'enfance et à la famille et ceux qui quittent les réserves et les collectivités rurales pour s’installer dans une région urbaine; les services de soutien aux familles de femmes et de filles portées disparues ou assassinées; la formation sur la lutte contre le racisme et la sensibilisation du public et des médias au racisme; les réseaux d’information sur les ressources pour les femmes; les ressources pour les jeunes exploités sexuellement; et les services offerts à ceux qui doivent composer avec le système juridique. Les organismes s’entendent pour dire que les services doivent être adaptés à la culture autochtone, qu’ils doivent être offerts jour et nuit, et qu’ils doivent recevoir un appui financier de base de plusieurs années.
Les participants ont dit que pour prévenir la violence faite aux femmes et aux jeunes filles autochtones, nous pouvions profiter des pratiques actuelles de la communauté concernant la réappropriation du territoire, de la culture et de la spiritualité autochtones, à l’aide de services adaptés, des leçons des aînés, des cérémonies traditionnelles, de la sensibilisation à l’histoire coloniale, de la hausse du nombre d’enseignants autochtones et du temps consacré à l’enseignement de l’histoire autochtone. Il est également question de la participation respectueuse du gouvernement, de la consultation des groupes communautaires, de l’amélioration de la communication avec les institutions gouvernementales ainsi que de la cohésion et du réseautage des associations locales et des leaders qui donnent l’exemple. On parle aussi du counselling offert aux enfants victimes ou témoins d’actes de violence, des initiatives permettant aux femmes et aux jeunes filles d’être résilientes, indépendantes et maîtres de leur destinée, au lieu de se voir comme des victimes, de l’emploi d’un langage positif par les policiers et de projets s’adressant aux jeunes.
Les membres du groupe de réflexion s’intéressaient à la création d’un réseau entre les organisations représentées et d’autres pour se tenir informés des initiatives pertinentes, ainsi qu'à la cohésion stratégique, afin de prévenir la violence faite aux femmes et aux jeunes filles. On travaille actuellement sur un modèle de réseau en collaboration avec les femmes autochtones.
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Merci, madame la présidente. Je dispose de sept minutes, n’est-ce pas?
Merci à tous d’être ici. Je suis très heureuse d’entendre vos témoignages.
Je vais tenter de faire le lien entre certaines choses; j’espère ne pas me tromper.
Vous savez qu’hier, nous étions à Prince Albert. Entre autres grandes préoccupations dont on nous a fait part et qui m’ont été communiquées dans de petites localités, il y a les systèmes qui s'appliquent à la communauté, comme l'aide sociale, la justice — dont a parlé Lisa Michell — ou les services de police. Aujourd'hui, M. Robinson nous a expliqué comment procèdent les policiers, en particulier pour ce qui est des femmes autochtones disparues et assassinées. Néanmoins, il demeure que beaucoup de femmes autochtones ne se considèrent pas traitées de manière appropriée par ces systèmes. Dans une collectivité où je me suis rendue, on m’a même dit sans détour qu’on ne se sentait pas en sécurité et que les ressources pour se protéger étaient insuffisantes.
J’aimerais vous entendre à ce propos et savoir ce que nous devons recommander, selon vous, pour soutenir les organisations. Je pense que, dans une large mesure, nous sommes aux prises avec un problème de racisme et de discrimination.
Je ne me suis peut-être pas exprimée clairement, mais si vous m'avez bien comprise, je vous demanderais de me répondre.
Comme vous le savez, nous appliquons la loi dans la majorité des localités rurales et des communautés des Premières nations. Concernant notre travail et les partenariats, il importe beaucoup de mettre deux ou trois choses de l’avant. D’abord, il faut parler de la sensibilisation des policiers à la réalité des Autochtones. Chaque année, nous prenons des cours et nous formons le plus d’agents possible pour qu’ils comprennent les communautés concernées et leurs problèmes ainsi que la façon dont les Autochtones perçoivent les policiers. C’est sans contredit la première mesure à mettre en oeuvre.
Pour ce qui est de la sécurité dans le Nord du Manitoba, outre les patrouilles, nous protégeons de nombreuses communautés isolées à l’aide d’un détachement, qui doit parfois se rendre sur place par avion. Bien sûr, les gens ne se sentent pas toujours en sécurité, parce que nous ne sommes pas là-bas en permanence. Néanmoins, nous faisons au mieux de nos capacités pour protéger non seulement les femmes et les hommes autochtones de ces communautés, mais aussi les enfants, grâce à des visites dans les écoles et autres choses du genre.
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Je voyage beaucoup dans la province et je dis à tous les agents de traiter tous les Manitobains équitablement et d'être dignes, respectueux, professionnels et compatissants. Je sais aussi qu'on se passe le mot dans les divers services de police. Néanmoins, on ne dispose pas des mêmes ressources pour s'occuper d'un cas de violence familiale dans le Nord du Manitoba qu'à Winnipeg, à Brandon ou à Dauphin. En fait, la différence peut être très grande. Parfois, c'est extrêmement difficile de retirer le mari du foyer familial ou de trouver les services appropriés pour les enfants. Nous essayons de faire appel aux membres de la famille pour protéger les gens.
Ce que je veux dire, c'est qu'aucun organisme dans le Nord, ni même dans le Sud, ne suffit à la tâche. Il faut travailler en partenariat. Les représentants des Services à l'enfant et à la famille, de la GRC, d'Awasis et de tous les organismes doivent collaborer pour trouver des solutions.
À juste titre, beaucoup de témoins ont parlé ce matin de la toxicomanie et des situations de crise dans lesquelles se trouvent les communautés. Ce sont, à n'en pas douter, des problèmes très importants.
Concernant le racisme systémique, nous faisons...
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Merci, madame la présidente.
Bonjour, je vous remercie de votre présence ce matin.
Je trouve très intéressant ce groupe de témoins que nous recevons. Il est très différent des autres que nous avons reçus cette semaine, mais il est très intéressant.
Carolyn, je me demande une chose. Dans les autres provinces, il commence à y avoir des problèmes avec les enfants. Les services responsables de protéger les jeunes enfants commencent à les retirer des communautés autochtones quand il y a des problèmes avec les parents, avec les jeunes mères, etc. Ils les retirent de la communauté pour les amener à l'extérieur pendant une certaine période de temps. On retrouve donc le même problème qu'à l'époque des pensionnats. Même si on ne les envoie pas dans des écoles ou des pensionnats, on les envoie dans des foyers d'accueil ou dans des maisons où ils sont coupés de leur culture et de leur environnement.
Un peu plus tôt, vous avez dit vouloir tenter de faire quelque chose de différent et miser sur la prévention. Cela m'a souri énormément. On a vu hier qu'on fait la même chose en Saskatchewan qu'au Québec, et c'est une erreur. Je pense que dans 15 ou 20 ans, on va avoir les mêmes problèmes que ceux créés par les pensionnats.
Pourriez-vous m'expliquer davantage ce que vous tentez de faire ici, au Manitoba?
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Vous avez tout à fait raison de dire qu’emprisonner plus de personnes n’est pas la solution.
Un des principaux problèmes, c’est que, lorsqu’une mère ou un parent a le plus besoin de sa famille, on lui retire ses enfants. C’est ce qui est arrivé à une mère dont un enfant a été agressé; elle a perdu la garde de tous ses enfants, alors qu’elle avait le plus besoin d'eux.
De plus, il importe beaucoup de collaborer étroitement avec les grands-parents, les oncles, les tantes, les cousins, etc. Il faut se pencher sur la question.
Il y a 10 ou 15 ans, j'ai travaillé dans le système de protection de l'enfance. À l’époque, on disait qu’il était impossible de garder à la fois les parents adoptifs et les parents biologiques dans l’entourage de l’enfant.
Pourtant, il y a un an et demi, j’ai travaillé avec un organisme pour qui cela n’était pas une préoccupation et dont le programme ne visait que l'intérêt de l’enfant.
C’est ainsi qu’il faut envisager les choses. Il faut que les programmes soient axés uniquement sur l’enfant pour éviter que celui-ci ne soit retiré du milieu familial et placé dans un contexte différent. J’ai été victime de « la rafle des années 1960 », et je peux comprendre la situation. Quand on retire un enfant de sa communauté et qu’on coupe tout lien, comment cet enfant peut-il en apprendre sur sa culture et sur les siens?
À sept ans, je savais déjà qu’il me manquait quelque chose, mais j'ignorais quoi. C’est seulement lorsque j’ai rencontré mon père biologique que j’ai compris que ce qui me manquait, c’était la connaissance de ma culture. Malheureusement, je ne connais toujours pas la langue de mon peuple.
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Merci, madame la présidente.
Je vous souhaite également la bienvenue et je vous remercie du travail assidu que vous effectuez tous les jours dans les communautés.
Je tiens à dire aux policiers présents dans la salle que nous déplorons la perte du sergent Ryan Russell, décédé hier dans l’exercice de ses fonctions.
Je tiens également à souligner la nomination du surintendant principal Russ Mirastyi, le premier commandant sous-divisionnaire autochtone, qui s’occupera de la Division F. Je veux mettre l’accent sur les réussites des Autochtones, car on nous présente rarement le bon côté des choses. Je souhaite donner l’occasion au représentant de la GRC de commenter ce qui a été dit aujourd’hui. J’imagine que j’ai un certain parti pris, car même si j’ai pris congé, je suis quand même policière et j’entretiens des liens avec la GRC et d’autres services de police. C’est comme une famille. Il est donc dommage d’entendre que la communication fait parfois défaut.
Pouvez-vous nous dire comment les équipes intégrées peuvent surmonter les problèmes de compétence dont a parlé Mme Michell? Nous avons débloqué 10 millions de dollars pour qu’on s’occupe des femmes autochtones disparues et assassinées, et je crois qu’une partie des fonds pourraient servir à régler ces problèmes. Si vous le voulez bien, dites-moi à quoi pourrait servir l’argent et parlez-moi de votre expérience au Manitoba.
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Puis-je vous interrompre?
Je crois comprendre, surtout concernant le CIPC, que les mesures dont vous avez parlé sont mises en œuvre et permettent d’éviter les problèmes qui préoccupent Mme Demers. Il est intolérable que de telles choses se produisent, et cela me rassure de savoir que nous tentons de corriger le tir.
Je souhaite également revenir sur les propos de Mme Loeppky concernant certaines relations et les difficultés éprouvées par les travailleurs sociaux, qui ne peuvent pas fournir toute l’aide dont ont besoin les femmes autochtones. En revanche, j’ai servi dans le service de police de Winnipeg et je sais que des policiers étaient associés à des travailleurs sociaux dans l’unité de violence familiale. Nous avons transcendé le problème des compétences.
Au service de police de Winnipeg, on a déjà pris des mesures semblables dans l'unité de la moralité. Les agents et les travailleurs sociaux travaillent main dans la main pour aider les femmes autochtones vulnérables et victimes d'abus.
Prend-on des mesures semblables à la GRC?
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Merci, madame la présidente.
Merci aux témoins de leur présence. Je vous suis très reconnaissante de l'expertise dont vous nous faites profiter.
J'aimerais poser une question à chacun de vous, mais comme le temps est limité, je vais commencer par Lisa Forbes et Shawna.
Ma question porte sur l'enquête très intéressante dont vous avez parlé. Je souhaiterais en savoir plus, en particulier concernant ce qu'ont soulevé mes collègues et ce dont il a été question en Saskatchewan, le négativisme bien réel et les préjugés qui accablent les jeunes femmes et qui les empêchent parfois d'obtenir le soutien nécessaire auprès des travailleurs sociaux ou des policiers.
Vous avez également parlé du rôle que doivent jouer les journalistes pour combattre le racisme. Nous savons qu'on offre de la formation, mais je vous serais reconnaissante de donner des précisions sur cette enquête.
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Merci madame la présidente.
Je tiens à souligner que les maisons de refuge sont un élément important du problème auquel s'attaque le gouvernement du Canada en investissant 55,6 millions de dollars sur cinq ans dans les maisons de refuge. Un financement supplémentaire de 2,2 millions de dollars a été accordé récemment pour la construction de cinq nouvelles maisons de refuge, y compris une ici au Manitoba.
Donc, je rejoins vos propos, madame Forbes; il faut que des maisons de refuge soient disponibles pour aider ces femmes à avoir accès aux ressources dont elles ont besoin.
Mme Michell a mentionné plus tôt que des jeunes filles ne décident pas de se prostituer du jour au lendemain. Je soulève ce point, car le gouvernement du Canada reconnaît que ces femmes sont victimisées et qu'un certain nombre de mesures doivent être mises en place pour les protéger. La responsabilité du gouvernement est de trouver les moyens d'y arriver, notamment par la législation. Le projet de loi sur les biens immobiliers matrimoniaux a été déposé. Je crois que beaucoup de femmes qui ont disparu ou qui ont été tuées ont quitté des réserves parce qu'elles n'y avaient aucun droit, elles se sont installées dans des milieux urbain qui n'ont pas de maisons de transition, etc., et elles ont été exploitées en raison de leur vulnérabilité. Puis, elles ont disparu ou ont été tuées. Voilà pourquoi la collaboration entre la police et tous ces organismes est si importante. Nous allons donc aller de l'avant avec le projet de loi pour essayer de redonner leurs droits aux femmes autochtones qui vivent dans les réserves; les grand-mères représentent les femmes qui vont nous aider à veiller que ces droits soient redonnés.
Allons à l'autre extrême et parlons des enfants, des jeunes enfants, et de ce que nous faisons pour les appréhender, pour les protéger. Je suis tout à fait d'accord, les retirer de leur famille est une chose horrible, vraiment horrible, et c'est la raison pour laquelle j'aimerais que Mme Loeppky décrive l'approche fondée sur la prévention. C'est une nouvelle approche; je crois que 177 millions de dollars ont été investis ici au Manitoba pour mettre en place un système différent. Le système du service à l'enfance et à la famille n'était pas efficace avant de retirer les enfants de leur famille; par conséquent un nouveau système est mis en place.
Madame Loeppky, vous pourriez peut-être nous le décrire et nous dire pourquoi, à votre avis il pourrait éviter à ces jeunes filles de devenir aussi des victimes.
Le modèle de financement élaboré et accepté par les gouvernements fédéral et provinciaux permettra d'orienter les ressources vers la prévention et l'intervention précoce. C'est-à-dire que lorsqu'une famille jugée à risque faible se présente, il y aurait des façons pour les services sociaux de diriger cette famille vers les services dont elle a besoin et l'aider à en bénéficier.
Par conséquent, quelqu'un ne faisant pas partie de de la famille ne lui donnera pas des directives normatives du genre : « voici ce que vous devez faire premièrement, deuxièmement, troisièmement et quatrièmement. » Il s'agit de collaborer étroitement avec la famille, avec la mère, le père, la famille élargie, s'il y en a une, discuter des choses importantes que la famille estime nécessaires pour pouvoir prendre les mesures qu'elle veut prendre en ce qui concerne les enfants.
Il pourrait s'agir de choses aussi simples que le fait de ne pas pouvoir laver le linge parce qu'il n'y a pas de machine à laver à la maison et que la famille n'a pas accès à une laverie automatique. Ce pourrait être la volonté d'entrer dans le marché du travail. Pourrait-on les aider à suivre des études? Ce pourrait être l'évaluation des besoins essentiels dans la maison et qui empêchent la famille d'améliorer sa situation. Ce pourrait être l'envie de parler du rôle parental dans le cadre des relations conflictuelles parents-adolescents ou de l'éducation des jeunes enfants qui traversent une période difficile durant leur développement.
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Merci, madame la présidente.
Pratiquement à tous les endroits où nous sommes allés jusqu'à maintenant, les personnes que nous avons rencontrées ont insisté sur l'importance d'établir des lieux où on s'occuperait à la fois de l'auteur de mauvais traitements et des victimes. On nous a dit que si on ne s'employait pas à guérir l'ensemble de la famille, on se retrouverait toujours avec les mêmes problèmes. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, Lisa et Shawna, et peut-être même vous, madame Loeppky.
Au fait, Lisa, vous avez raison: les grands-mères sont les mieux placées pour s'occuper des enfants et déterminer ce qui est bon pour eux. Pour ma part, j'ai la garde de mon petit-fils depuis plusieurs années.
À plusieurs endroits, on nous a proposé l'établissement d'un centre familial de guérison. Qu'en pensez-vous?
Je tiens simplement à dire qu’en matière de guérison dans notre collectivité, on ne parle pas seulement de quelque chose d'abstrait; notre culture, c’est un mode de vie. C’est ainsi que nous vivons. Ce n’est pas seulement quelque chose que nous faisons à l’occasion. C’est notre manière de vivre et d’agir dans nos collectivités. Voilà à quoi sert la culture.
Je conviens également que sur le plan de la guérison, il faut inclure toute la cellule familiale. Il faut une collectivité entière pour élever un enfant. Et vous savez quoi? Je vais toujours demeurer l’enfant de quelqu’un; alors, j’ai parfois besoin de cela.
Par ailleurs, nos hommes ont besoin d’un énorme appui. La prison n’est pas la solution. L’incarcération ne fonctionne pas. Nous devons adopter une approche holistique, c’est-à-dire tout un mode de vie.
Parlez aux aînés parce que ce sont eux qui ont toutes les réponses. Quand je les entends parler du système d’aide à l’enfance ou de n’importe quel système — le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial —, une question se pose: dans quelle mesure a-t-on consulté nos aînés? Je dois poser cette question. Il y a là matière à réflexion.
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Pour le premier aspect — j’essaie de me rappeler les différents entretiens que nous avons eus avec les divers fournisseurs de services — comme vous l’avez dit, il y a des fonds pour les projets d’immobilisations, mais pas pour les services. Je me contenterais de dire que les fournisseurs de services sont frustrés de ne pas recevoir un financement pluriannuel afin de pouvoir lancer des programmes et les mener à bien.
Un problème récurrent, c’est de devoir sans cesse rédiger des demandes de financement selon la saveur du mois et selon le problème à régler. Il est difficile de maintenir en poste des employés qualifiés quand on doit leur dire: « Écoutez, le 31 mars approche à grands pas, et je ne sais pas si je vais pouvoir vous garder après le 1er avril. » C’est un problème constant auquel font face tous les intervenants du domaine de la prestation de services sociaux. C’est le premier aspect.
Pour ce qui est des refuges pour les jeunes exploités sexuellement, la Coalition contre l’exploitation sexuelle des enfants, ou la Coalition SEY, a fait du très bon travail au Manitoba. Elle regroupe plusieurs organismes de services sociaux; je crois que les services de police y participent aussi. Il y a toute une gamme d’organismes. D’après ce que j’ai entendu dire, c’est un bon modèle à suivre en ce qui concerne l’intégration des nombreux services sociaux dans l’ensemble des corps policiers et des organismes gouvernementaux. Cela semble bien fonctionner ici, au Manitoba.
Relativement aux espaces disponibles, cette question comporte, à ma connaissance, deux éléments. Premièrement, il n’y a pas assez d’espaces dans les foyers d'hébergement pour les jeunes exploités sexuellement. Deuxièmement — et cela peut paraître controversé —, on doit faire en sorte que le financement et les programmes répondent aux besoins de manière globale, au lieu de s’attaquer seulement à un problème selon la saveur du mois, par exemple en disant qu’on s’occupe des jeunes exploités sexuellement parce qu’on ne veut pas voir ces filles de 13 ans dans la rue.
En ce qui concerne les espaces disponibles, cette question comporte, à ma connaissance, deux éléments. Premièrement, il n’y a pas assez d’espaces dans les foyers d'hébergement pour les jeunes exploités sexuellement. Deuxièmement — et cela peut paraître controversé —, on doit faire en sorte que le financement et les programmes répondent aux besoins de manière globale, au lieu de s’attaquer seulement à un problème selon la saveur du mois, par exemple en disant qu’on s’occupe des jeunes exploités sexuellement parce qu’on ne veut pas voir ces filles de 13 ans dans la rue.
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Je peux ajouter quelques points aux observations de Lisa sur le financement provincial pour les services de prévention de la violence familiale. Chaque année, nous accordons un financement d’environ 12 millions de dollars à 32 programmes. Il s’agit d’un financement de base, c’est-à-dire des fonds pour le budget de fonctionnement, et nous avons conclu des ententes de trois ans à cet effet. Il ne s’agit pas de programmes qui, tous les ans… Ce ne sont pas des projets, avec un début et une fin, mais des programmes permanents. Voilà donc l’approche provinciale en matière de financement pour les programmes de prévention de la violence familiale.
Il nous reste encore des défis à relever dans ces programmes. Les maisons de seconde étape sont assurément un domaine croissant et un défi grandissant. Les femmes qui ont surmonté la première agression ou qui ont réussi à sortir de la violence ont besoin d’une telle transition, et je pense qu’on vous en a parlé plus tôt ce matin.
Par ailleurs, en ce qui concerne les enfants exploités sexuellement, sachez qu’au Manitoba, en 2002 et 2008, nous avons entrepris quelques initiatives pour examiner l’exploitation sexuelle et la traite de personnes. C’était dans le cadre du programme appelé Tracia's Trust, qui comporte quatre grands thèmes. Nous examinons les dispositions législatives et l’application de la loi, ainsi qu'une série de services, notamment l’intervention précoce et, parfois, comme Lisa l’a mentionné, la création de nouvelles ressources adaptées aux besoins cernés. À titre d’exemple, nos organismes ont pris certaines mesures, comme la construction d’un pavillon de ressourcement rural.
Rompre le silence — voilà un autre thème dont nous avons parlé. Cela concerne surtout les cas d’inceste et la réticence des gens à parler de problèmes d’exploitation sexuelle ou de mauvais traitements. Nous nous penchons également sur l’habilitation des enfants, des jeunes, des familles et des collectivités parce que nous croyons que cet élément constitue une des solutions fondamentales pour régler les questions d’exploitation sexuelle.
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Merci, madame Loeppky. Je pense que le temps est écoulé.
Avant de remercier les témoins de leur comparution, j’aimerais signaler qu’il nous reste cinq minutes. Comme je n’ai pas posé de question au dernier groupe, faute de temps, j’aimerais le faire maintenant. Je voudrais obtenir quelques précisions sur certaines des questions qui ont été soulevées par les membres du comité.
Un des messages que nous avons entendus, surtout en Saskatchewan, c’est que certaines femmes disent se retrouver dans une impasse. Elles arrivent en ville — comme nous sommes à Winnipeg, je parle des Autochtones hors réserve. On nous a dit que certains des problèmes dans les réserves peuvent être réglés dans les réserves. Or, quand les personnes s’installent en ville, elles font face à toute cette querelle de compétences, et c’est une sorte de zone grise.
On nous a dit que les femmes quittent leur collectivité et viennent en ville. Rendues là, elles ont peur et elles vont dans une maison de refuge, mais parfois elles ne sont pas acceptées ou elles le sont seulement de façon temporaire, auquel cas elles risquent de perdre la garde de leurs enfants. Pour pouvoir garder leurs enfants, elles ont besoin d’un endroit où vivre. Si elles bénéficient de l’aide sociale, il arrive très souvent que les prestations ne suffisent pas en ville pour louer un logement assez grand pour elles et leurs enfants; par conséquent, elles ne répondent même pas aux critères d’admissibilité. C’est une impasse, et on enlève ensuite leurs enfants. Alors, les femmes sont obligées de quitter ce qu’elles considèrent être leur chez-soi. Elles se retrouvent en ville, dans un endroit étranger. Elles ont non seulement perdu leurs liens familiaux, mais aussi leurs enfants. Quant aux enfants, ils sont, eux aussi, traumatisés d’avoir perdu leur famille et ils perdent maintenant une mère qui, à leurs yeux, ne semble pas vouloir prendre soin d’eux, parce qu’elle n’a pas d’endroit où les héberger.
C’est un cercle vicieux. Cela ne règle pas vraiment les problèmes — et nous savons que le logement constitue un des problèmes. J’aimerais connaître votre avis sur ce que nous pouvons faire.
La question de la violence faite aux femmes autochtones me préoccupe vraiment, parce que je crois que nous devons trouver une façon de mettre un terme au problème de partage des compétences. À mon avis, si le gouvernement fédéral a une responsabilité fiduciaire envers les Autochtones, cette responsabilité devrait être assumée, peu importe le lieu de résidence des Autochtones et peu importe les questions, que ce soit la santé, les enfants, la sécurité ou le logement. On doit régler ces questions, au lieu de les laisser dans le champ de compétence provincial. En réalité, c’est la province qui finit par payer la note pour bon nombre de ces services, et les femmes autochtones sont laissées pour compte. Voilà pourquoi ce genre de violence et de problème persiste.
Que proposez-vous? Je vous pose une question et j'aimerais que vous nous parliez très franchement. Cela ne signifie pas que vous allez le faire, mais j'aimerais que vous trouviez une réponse à cela, parce que c'est le noeud du problème.
Monsieur Robinson.
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Je suppose que, du point de vue des services de police, c’est un problème auquel la GRC et le Service de police de Winnipeg se heurtent constamment à cause, bien entendu, du va-et-vient des femmes et d’autres personnes entre les différentes administrations. Dans certains cas, des gens venus s’installer à Winnipeg finissent tout simplement par disparaître, d’où l’intervention des résidents de nos collectivités rurales pour essayer d’organiser des recherches et tout le reste.
À mon avis, le personnel que nous avons affecté à l’Assemblée des chefs du Manitoba et à la Fédération des Métis du Manitoba, ainsi que les programmes de diversité culturelle que nous avons mis en place dans nos collectivités musulmanes, et j’en passe, éliminent une partie de la confusion parce qu’une personne qui quitte sa collectivité pour s’installer à Winnipeg ne sait pas où s’adresser pour obtenir des conseils de la part de la police quand elle est aux prises avec un problème ou pour signaler des incidents, comme le fait d’avoir été victime dans la réserve ou la collectivité.
Je crois que d’autres facteurs ont également contribué à la collaboration entre le Service de police de Winnipeg et la GRC dans le cadre de divers programmes. Maintenant, est-ce parfait? Non, ça ne l’est pas. Selon moi, il faut probablement assurer une communication accrue afin de sensibiliser les gens dans les collectivités. Quand je m'entretiens avec les chefs d’un bout à l’autre du pays ou dans l’ensemble de la province, nous parlons toujours de ce chevauchement. C’est un sujet de préoccupation. À mon sens, grâce au chevauchement qui existe et à la représentation que nous avons au sein des collectivités des Premières nations, les gens ont au moins un endroit où s'adresser lorsqu'ils viennent ici. Mais, comme je l’ai dit, il y a lieu d’accroître les activités en matière de communication.
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Nous reprenons nos travaux.
Nous sommes rendus au troisième groupe de témoins. Il y aura quatre exposés.
Nous sommes un comité parlementaire. Comme je l'ai expliqué à tout le monde, un comité parlementaire est un organe du Parlement. Nous rendons des comptes au Parlement. Le comité est constitué de députés de toutes les allégeances politiques; il n'est donc pas partial. Nous sommes ici pour vous écouter et pour traiter d'un enjeu précis, à savoir le problème de la violence faite aux femmes autochtones.
Nous étudions les causes profondes de cette violence. Nous examinons sa nature — c'est-à-dire les types de violence et la forme qu'elle prend. Nous abordons bien entendu l'étendue de cette violence, et nous aimerions aussi trouver des pistes de solutions. Nous parcourons le pays pour recueillir les témoignages des groupes et des représentants des collectivités. Nous avons déjà tenu des séances à Ottawa et nous y avons entendu les témoignages des représentants de nombreux organismes nationaux.
Je vous souhaite la bienvenue. Pour commencer, chaque groupe aura cinq minutes pour faire son exposé. Il y a quatre groupes; il y aura donc quatre déclarations. Vous devrez décider qui parlera au nom de votre groupe.
J'aimerais maintenant passer aux exposés de cinq minutes. Je vous ferai signe lorsqu'il vous restera une minute pour vous laisser savoir qu'il est temps de conclure. Notre horaire est assez serré — nous avons une visite de prévue plus tard. Par conséquent, j'aimerais vraiment que tout le monde essaie de respecter son temps de parole.
Nous commencerons par Kelly Gorkoff. Elle est professeure de justice criminelle à l'Université de Winnipeg. Elle est ici à titre personnel.
Kelly, voudriez-vous bien commencer?
Premièrement, je vous remercie du travail important que vous accomplissez, ainsi que de m'avoir invitée et de me laisser présenter un exposé. La majorité des renseignements de mon exposé sont tirés des travaux que j'ai effectués en tant qu'associée de recherche auprès du centre de recherche sur la violence faite aux femmes, où j'ai étudié pendant huit ans, et des recherches que j'ai menées après la tuerie de Montréal.
Mon travail portait, entre autres, sur divers sujets de recherches et diverses évaluations de programmes en lien avec la violence faite aux femmes autochtones. Je ne peux pas entrer dans les détails, mais j'ai mené une étude de trois années sur la prostitution dans les provinces des Prairies. J'ai raconté certaines expériences, j'ai recueilli certains renseignements démographiques et j'ai parlé des programmes pour redresser la situation. Je ne travaille pas actuellement dans le domaine de la violence familiale; je travaille plutôt aux programmes de justice pénale, à l'évaluation de nouveaux programmes judiciaires novateurs et de la politique en matière de justice pénale relative au présent dossier.
Aujourd'hui, au lieu de parler des projets que j'ai évalués, j'ai décidé de vous faire un résumé des éléments des formules de justice alternative dont l'importance a été prouvée ou qui sont prometteurs, de même que des éléments qui ne le sont pas. De plus, j'aborderai le fait qu'il est difficile d'inclure ces éléments et ces programmes dans le présent climat de répression de la criminalité, qui est à bien des égards antithétique à certains de ces éléments.
J'aimerais d'abord nous situer dans le contexte, et je suis certaine que c'est le contexte dans lequel le comité travaille. Il faut reconnaître que le système de justice pénale, dans toutes ses réponses, fonctionne comme un ensemble d'institutions colonisatrices ou un ensemble d'institutions opposées aux peuples autochtones.
Je cite la déclaration d’ouverture d’Ovide Mercredi lors de l’Enquête publique sur l'administration de la justice et les peuples autochtones: « Dans la justice, aux termes des lois et dans leur application, le Canada a imposé un système colonial de gouvernement et de justice à notre peuple sans égard à notre traité et à nos droits ancestraux. » C’est dans le cadre de ce contexte que j’aimerais poursuivre mon exposé.
Nous devons considérer l'utilisation du système et des instruments de justice pénale canadiens pour aborder la question des droits ancestraux des femmes autochtones victimes de crimes comme étant intrinsèquement coloniale et symboliquement limitée. Cela se manifeste dans divers programmes, de l’attention inadéquate des autorités policières aux préjugés, aux politiques et aux lois qui poussent les femmes autochtones dans des situations non sécuritaires, où elles sont généralement vulnérables aux mauvais traitements. Donc, il faut trouver de quelle manière, à quels endroits et dans le cadre de quelles pratiques, politiques et lois ces pratiques coloniales se manifestent.
Dans cette optique, j’aimerais séparer mes cinq très brèves minutes en deux thèmes: d'abord, les causes de la criminalité et les réactions à la criminalité, et ensuite, les endroits de vulnérabilité pour les femmes autochtones.
Pour ce qui est des causes de la criminalité et des réactions à la criminalité, beaucoup de criminologues affirment que la criminalité, qui comprend la violence, est causée par la rupture des relations interpersonnelles dans les collectivités ou y est associée. Si c’est vrai, les sociétés étant généralement plus fragmentées, à mesure que les gens se détachent de leur collectivité, s'éloignent de ce qui leur tient à coeur et rompent les liens qui les unissent, la criminalité augmentera.
Cela nous force donc à trouver des solutions à la violence faite aux femmes en développant des liens au sein des collectivités: renouer les liens qui unissent les gens sera sans aucun doute plus productif que de mettre l’accent uniquement sur le délinquant en tant que responsable de ses gestes. Souvent, les approches traditionnelles du système de justice pénale, comme l’emprisonnement, contribuent à l’érosion des liens, qui est en fait la cause du comportement. C’est un cercle vicieux.
Nos solutions incluent des éléments de la justice réparatrice, qui a tendance à responsabiliser davantage les délinquants que le système juridique occidental. Les réponses incluraient le renforcement des programmes communautaires, la mise en place de programmes contre la violence fondés sur les collectivités autochtones et le recours aux cultures autochtones pour rejeter la violence. Ces solutions pourraient avoir des applications polyvalentes, autant avant que les crimes ne soient commis — certains parlent alors de prévention — qu'après qu'ils l'ont été. Ces éléments sont souvent difficiles à mettre de nouveau en place de nos jours, compte tenu de l'idéologie selon laquelle on reçoit ce qu'on mérite et le retour aux sanctions.
Le deuxième élément concerne la diminution de la vulnérabilité dans les institutions. Parmi les conclusions de mon étude sur la prostitution au Canada, j'ai noté que les gens qui cherchaient de l'aide avaient tendance à éviter les programmes gouvernementaux financés par l'État. Ils se dirigeaient plutôt vers les programmes dont le financement était moins garanti, mais qui offraient une meilleure réduction des préjudices et qui inspiraient moins de crainte, parce que ces programmes n'ont pas de liens avec le système de justice pénale ou la loi sur la protection de l'enfance. Les gens voulaient aussi tout simplement éviter certains services gouvernementaux.
J'aimerais peut-être également lancer un sujet de discussion, à savoir la façon dont la loi, surtout en ce qui a trait à la prostitution, tend à placer les femmes dans une position vulnérable où, afin de faire leur travail, elles ont beaucoup plus tendance à se soustraire à la loi, à se cacher des services de police et à se placer dans des situations très dangereuses qui les rendent vulnérables à la violence. Les lois contribuent à l'accroissement des préjugés et de la violence et nuisent à la santé et à la sécurité des femmes de la rue.
Je vais m'arrêter ici.
Je vous remercie de nous accueillir. C'est un enjeu vraiment important, et je suis heureuse de voir qu'enfin, autant de gens s'en préoccupent.
Je m'appelle Melanie Nimmo. Je suis professeure adjointe de justice criminelle à l'Université de Winnipeg et j'ai des connaissances sur les gangs de rue. Je suis membre du conseil de la John Howard Society, et je vous parle au nom de notre directeur exécutif, John Hutton. Il ne peut pas se présenter ici aujourd'hui. Toutefois, je suis accompagnée de Kate Kehler, qui sera elle aussi en mesure de répondre à toutes les questions du comité.
Malheureusement, je devrai partir à midi et je m'en excuse à l'avance. J'enseigne aujourd'hui, et c'est tout le temps dont je dispose. Je suis vraiment désolée de devoir partir tôt.
Cela étant dit, je veux également vous remercier de l'occasion que j'ai de vous parler du travail important que nous accomplissons à la John Howard Society. Comme nous travaillons surtout auprès d'hommes qui ont des démêlés avec la justice, beaucoup de gens se demandent ce que nous pouvons offrir en ce qui a trait aux femmes autochtones, à la violence contre les femmes autochtones et à la question de la disparition de femmes autochtones. Cependant, ces questions entrent en jeu, car l'approche que nous adoptons en matière de criminalité est très globale et multidimensionnelle — à savoir, la justice réparatrice, qui est axée sur la notion traditionnelle chez les Premières nations de guérison communautaire et la façon de s'occuper des contrevenants et de réparer les torts causés dans la collectivité.
Tout d'abord, je vais parler un peu de la John Howard Society du Manitoba, et par la suite, de la notion de justice réparatrice, et surtout de notre programme « Restorative Resolutions », solutions réparatrices. Je terminerai en parlant de deux programmes qui, à notre avis, s'attaquent très bien à la violence contre les femmes autochtones exercée par des hommes, et pas seulement des Autochtones, mais également des blancs.
La John Howard Society est une coalition nationale. Il y a 65 sections au Canada. Nous sommes les porte-étendards d'un système efficace, juste et humain. Au Manitoba, la John Howard Society a été créée à Winnipeg en 1957. Peu de temps après, nous avons également constaté qu'il y avait un besoin à Brandon, qui a été intégré à la John Howard Society en 1965. Nous essayons actuellement d'accroître nos services pour aider les réserves et les collectivités du Nord, qui ont aussi grandement besoin d'aide en matière d'alcoolisme et de violence. Nous essayons de les aider à cet égard.
Je vais maintenant parler brièvement de la justice réparatrice. Je sais que bien des gens connaissent bien la notion. Elle a une longue histoire. Grosso modo, la justice réparatrice consiste à tenter de réparer les torts. Parallèlement, il s'agit d'inculquer la responsabilisation au contrevenant. Nous remarquons que bien des victimes...
Soit dit en passant, 41 p. 100 des programmes qui relèvent de la justice réparatrice concernent les infractions avec violence. Peu de gens le savent. Ils ne concernent pas seulement les infractions contre les biens. Nous constatons que c'est une expérience très enrichissante pour les victimes. Elles sont capables de décrire les dommages qu'elles ont subis. La victime, le contrevenant et la collectivité collaborent ensemble pour faire de la médiation, faire amende honorable et réparer les torts. À notre avis, c'est très important pour que toutes les personnes qui participent à la démarche puissent se prendre en charge.
À titre d'exemple, en 1993, nous avons commencé à mettre en oeuvre le programme « Restorative Resolutions » dans le but d'inciter les hommes à assumer la responsabilité de leur conduite, y compris de leur comportement violent envers les femmes et les enfants, et à faire amende honorable.
Il y a des statistiques que je trouve vraiment intéressantes: 95 p. 100 des plans que nous avons proposés ont été acceptés par les tribunaux et 89 p. 100 de nos clients ont rempli les conditions sans récidiver. Cela représente 51 000 heures de travaux communautaires effectués dans nos collectivités. De plus, 450 clients ont présenté des lettres d'excuses à leurs victimes. Encore une fois, nous parlons de faire amende honorable et de réparer les torts causés. Enfin, en ce qui a trait à la compensation financière pour des actes de violence et des dommages aux biens, on a remboursé plus d'un million de dollars directement aux victimes.
Nous nous efforçons de nous attaquer aux causes profondes des infractions. À cet égard, nous nous occupons de l'alphabétisation. Nous nous occupons de l'employabilité et nous aidons les contrevenants à se réinsérer dans la collectivité. Nous savons que c'est vraiment la seule façon de régler des problèmes qui amènent une personne à commettre des infractions en premier lieu.
Je veux maintenant parler de deux programmes qui ont directement trait aux actes de violence, aux comportements violents.
L'un des programmes, c'est notre cours sur le rôle parental. Il offre aux hommes une conception de leur rôle en tant que pères, en tant que pères tendres, respectueux, qui imposent une discipline adéquate.
De plus, et c'est significatif, nous offrons également un cours sur la gestion de la colère trois ou quatre fois par année. Nous avons toujours une liste d'attente pour ce cours. Nous aimerions pouvoir l'offrir à temps plein. Malheureusement, ce n'est pas possible.
Pour terminer, j'aimerais vous remercier énormément de l'occasion que vous m'avez donnée. Nous croyons vraiment en une solution multidimensionnelle et globale.
Merci.
Je suis ici à titre de représentante de Ndinawe et du programme de soins aux enfants et aux adolescents du Red River College. Puisque j'aimerais vous parler de deux programmes, je représente aussi le programme White Wolf Speaking, qui fait partie du programme d'initiatives communautaires autochtone, du Sexuality Education Resource Centre.
Permettez-moi de vous parler tout d'abord du programme de certificat de soins aux enfants et aux adolescents de Ndinawe et du Red River College.
Avant que le programme ne soit mis en oeuvre, quelques groupes qui aidaient des femmes et des femmes transgenres de la collectivité dans leur guérison — la plupart étaient des Autochtones qui avaient quitté le commerce du sexe — ont constaté qu'on offrait peu de services aux femmes une fois qu'elles étaient passées par le processus de guérison, et ainsi de suite. Bon nombre d'entre elles, qui savaient en quoi consiste l'exploitation sexuelle et le commerce du sexe, voulaient faire quelque chose pour leur collectivité. Par ailleurs, elles voulaient quitter les programmes d'aide sociale, faire des études de plus haut niveau et mener une meilleure vie en dehors du commerce du sexe.
Le programme a donc été créé à la fin de 2006. On a confirmé le financement destiné au programme pilote de formation conjoint entre Ndinawe et le Red River College pour recruter d'anciennes travailleuses de l'industrie du sexe et les former dans le domaine des soins aux enfants et aux adolescents dans un milieu stimulant axé sur la collectivité. Le programme a été créé comme modèle communautaire offrant de la formation accréditée qui cadre avec le programme principal de soins aux enfants et aux adolescents au Red River College. On y offre un programme menant à un diplôme.
Ce programme d'un an, qui a été créé par Ndinawe et le Red River College, est un programme de certificat qui peut conduire au programme menant à un diplôme du niveau collégial. Comme tout le contenu du programme d'enseignement est exactement le même que celui du Red River College, il n'y a pas de différence entre ce qu'offrent les deux programmes; la différence se situe dans le soutien et le modèle communautaire.
Comme je l'ai dit, le programme a été conçu pour aider les femmes qui se sont fait exploiter par le commerce du sexe au cours de leur enfance et de leur adolescence. Environ 75 p. 100 des gens qui participent au programme sont des Autochtones. Jusqu'à maintenant, des femmes transgenres autochtones et aussi un homme autochtone ont reçu leur diplôme.
Le programme est établi dans la partie nord de Winnipeg. Nous avons un coordonnateur de programme, un assistant à l'enseignement, un conseiller et deux chargés de cours du Red River College. Nous administrons le programme depuis janvier 2007.
Le programme permet d'acquérir des compétences dans les domaines culturels et sociaux et fournit un soutien académique, et il est conçu pour favoriser le succès et faire disparaître les obstacles que beaucoup de femmes doivent affronter de manière à ce qu'elles puissent terminer le programme avec succès et obtenir un emploi intéressant. L'objectif principal du programme est d'aider les femmes à poursuivre leurs études une fois qu'elles ne travaillent plus dans le commerce du sexe. Lorsque les participantes s'inscrivent au programme, elles vivent toutes de l'aide sociale.
À notre connaissance, il n'existe aucun autre programme comme celui-là au Canada. Ce qui le rend unique, c'est que les personnes qui y participent amènent des connaissances tirées de leur expérience qui sont très spécialisées et très importantes pour le domaine des soins aux enfants et aux adolescents. Ce sont des connaissances qu'on ne peut pas acquérir; il faut avoir vécu des expériences. Ces personnes sont les spécialistes du domaine; elles savent ce qu'il faut reconnaître, ce qu'il faut chercher, et elles savent quelle est la meilleure façon d'aider les enfants qui risquent de se faire exploiter. Dans le cadre de bon nombre de stages auxquels on les fait participer, elles sont capables de reconnaître les enfants qui risquent de se faire exploiter. Elles sont capables de prendre des mesures à cet égard et de travailler avec eux.
La plupart des femmes qui prennent part au programme le considèrent comme une façon de s'informer et de travailler à l'élimination de l'exploitation sexuelle et de la traite des femmes et des enfants. Nous savons que le nombre d'enfants autochtones qui sont pris en charge est élevé.
Jusqu'à maintenant, 28 personnes ont obtenu leur diplôme. La plupart travaillent à temps plein et ne dépendent plus du tout de l'aide sociale. Nous avons aussi actuellement une classe de 12 personnes qui, nous l'espérons, obtiendront leur diplôme en juin.
Le programme a un excellent...
Est-ce que mon temps est écoulé?
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Je m'appelle Betsy Kennedy et je suis la chef de la Première nation de War Lake. La chef Francine Meeches, de la Première nation de Swan Lake, m'accompagne.
Je constate que nous avons de nombreuses notes et beaucoup d'information, mais nous aimerions parler des programmes de prévention de la violence familiale, des femmes disparues et assassinées, et aussi de l'exploitation sexuelle des filles et des femmes dans nos collectivités.
Je vais vous parler un peu du comité des femmes de l'Assemblée des chefs du Manitoba, auquel les chefs participent. L'objectif de ce comité est d'améliorer la situation des femmes des Premières nations et de faire en sorte que les Premières nations du Manitoba participent aux processus décisionnels. Il est composé de chefs et de conseillers qui jouent un rôle de premier plan dans leur collectivité.
Nous sommes particulièrement préoccupés par la question de la violence familiale et des interventions possibles; bon nombre de nos initiatives y sont consacrées. Le projet de loi doit se pencher sur la question, mais je pense qu'une certaine partie se rapporte aussi à ce qui se passe dans les collectivités et à l'exploitation des femmes qui y vivent.
Le projet de loi traite des biens matrimoniaux et réels. Lorsque les femmes doivent quitter la collectivité parce qu'elles ne pourront simplement pas rester dans leur réserve, elles vont dans les villes, et c'est là qu'un bon nombre d'entre elles sont victimes d'exploitation. Je le mentionne, car je crois que vous vouliez entendre parler de ce qui arrive ici.
Il y a aussi l'article 37, que nous aimerions voir se concrétiser. Je sais que le dossier passera par la Chambre. Cet article concerne les femmes disparues et assassinées du Manitoba et du Canada. Sous les directives de l'Assemblée des chefs du Manitoba, les membres du comité continuent de se pencher sur les questions liées aux femmes disparues et assassinées, étant donné qu'un nombre inquiétant de femmes ont disparu et n'ont jamais été retrouvées. La plupart d'entre elles sont autochtones. Selon l'Association des femmes autochtones du Canada, environ 580 femmes autochtones ont disparu au Canada et n'ont pas été retrouvées; 84 d'entre elles viennent du Manitoba. L'Assemblée des chefs du Manitoba a demandé au gouvernement fédéral de mener une enquête publique à propos du nombre de femmes disparues et assassinées. Le gouvernement fédéral a aussi annoncé qu'un montant de 10 millions de dollars sera dépensé d'ici 2 ans.
Aussi, en 2009, le grand chef Evans a conclu un accord avec la GRC afin qu'une agente de liaison communautaire pour les collectivités des Premières nations, l'agente de police Monique Cooper, soit postée dans le bureau de l'Assemblée des chefs du Manitoba à Winnipeg. Cet arrangement a été pris après que les parents, les mères de ces femmes disparues et assassinées sont venus nous consulter. Nous collaborions déjà avec la GRC et maintenant, une femme travaille exclusivement au bureau de l'Assemblée des chefs du Manitoba. Nous aimerions le souligner, car c'est déjà commencé. Jusqu'à maintenant, que ce soit dans le Sud ou dans le Nord du Manitoba, les parents de ces femmes n'ont encore rien su à propos de... ou jusqu'où cela allait. L'Assemblée des chefs du Manitoba continue à travailler étroitement avec les familles de ces femmes disparues et assassinées et à travailler aussi avec la GRC et l'unité des personnes disparues du Service de police de Winnipeg.
Mais il y aussi la question de la traite de personnes. Depuis 2009, l'Assemblée des chefs du Manitoba s'est occupée activement de ce dossier. Le grand chef et le comité des femmes ne cessent de soulever la question pour qu'on en parle au cours des réunions des chefs.
Je veux souligner que les questions concernant les femmes sont à l'avant-plan lors de notre assemblée annuelle, et que nous avons l'appui de tous nos chefs. Nous sommes très fiers de pouvoir dire qu'ils sont vraiment conscients du travail que nous avons accompli. Les discussions sensibilisent notre population jusque dans les foyers.
La partie suivante traitera de la violence familiale. Nous faisons partie d'un comité sur la violence familiale et...
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Le programme sur la violence familiale existe depuis 1998. Vous trouverez de l'information dans votre trousse. Nous avons commencé à siéger à un comité composé des femmes chefs du Manitoba, et l'un des premiers sujets sur lequel nous voulions nous pencher était la violence familiale.
Quelques aînés et quelques membres de la collectivité font aussi partie de ce comité. Nous avons distribué des livrets dans les collectivités et nous les avons envoyés à toutes les Premières nations du Manitoba.
Les causes de la violence familiale... il existe de nombreux problèmes. À mon avis, je pense que tout a commencé avec les pensionnats indiens. Si vous fréquentiez ces écoles, à l'époque, vous ne viviez pas avec votre famille ou vos parents; vous ne pouviez donc pas forger de relation avec eux et le lien se rompait. Lorsque nous revenions à la maison — et je dis « nous » parce que j'y suis allée... Vous ne pouvez plus parler votre langue et les gens se moquent de vous. Même votre propre famille, vos frères et vos soeurs se moquent de vous parce que vous ne parlez plus votre langue. Je pense que c'est l'une des raisons qui expliquent l'apparition de la violence; elle débute avec les moqueries.
Elle commence aussi quand vous fréquentez l'école. Beaucoup d'entre nous n'ont même pas commencé à fréquenter l'école pour y suivre des cours avant l'âge de 30 ans. J'ai commencé à y aller à 30 ans et j'ai terminé la formation que je désirais à l'âge de 40 ans. Mais la plupart d'entre nous ne profitent pas de cet appui. Ce sont mes grands-parents qui m'ont le plus aidée dans mon cheminement.
Il existe, dans les collectivités, un isolement et parfois un sentiment de désespoir. Vous voulez acheter quelque chose pour vos enfants, et vous ne le pouvez tout simplement pas, alors vous trouvez d'autres moyens pour y arriver. Les femmes et les enfants sont ceux qui souffrent le plus de la situation.
Je pense qu'une approche globale, orientée sur la culture, doit être envisagée.
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J'aimerais parler de ce que nous accomplissons dans notre collectivité. J'aimerais préciser qu'elle vient d'une collectivité du Nord et que je viens du Sud, ce qui fait que nous avons une représentante du Nord et une du Sud.
Comment intervenons-nous au sujet de la violence familiale... Tout le monde n'en est pas conscient dans nos collectivités. C'est un fait caché. Personne ne veut reconnaître la présence de quelque violence familiale que ce soit dans son foyer. Lorsque nous sommes en présence d'enfants qui assument le rôle de parents, il y a décidément un problème. Ce genre de situation se produit.
Nous collaborons étroitement avec un refuge situé dans une collectivité voisine... je pense qu'il s'agit de Winkler ou de Morden, ou de quelque part dans les environs. Nous travaillons étroitement avec ce refuge. La dame qui s'en occupe collabore de façon remarquable avec notre centre de santé. Ce genre de relation de travail avec les collectivités voisines est profitable pour notre peuple.
Nous avons constaté que nos collectivités avaient grand besoin de services de counselling. Il faudra des années avant d'atteindre notre objectif, car le counselling est un aspect important de la question. Pour l'instant, nous sommes au point où les gens ont besoin de counselling dans tellement de domaines que nous n'avons même pas suffisamment d'argent pour le payer. Nous ne pouvons pas obtenir des fonds de la DGSPNI à AINC pour nous aider à en couvrir les frais. Vous nous en fournissez un certain montant; nous l'avons déjà dépensé, mais nous essayons d'aider...
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vous remercie beaucoup d'être ici ce matin.
Je trouve cela un peu difficile. En effet, on a reçu trois groupes de témoins ce matin, et chaque fois j'ai entendu des choses différentes. Par exemple, le commissaire adjoint M. Bill Robinson, qui est commandant divisionnaire de la Division D de la GRC, était ici un peu plus tôt. Il a dépeint la relation qui existe entre les communautés autochtones et la GRC, au chapitre des personnes disparues. Il en a peint une image très différente de celle que vous peignez, chef Kennedy. Vous nous dites qu'il n'y a pas eu un mot aux familles à ce jour, alors qu'il a dépeint une image vraiment très détaillée de tout ce qui est fait pour informer les familles de ce qui se passe relativement aux personnes disparues ou tuées. Pour ma part, je vous crois. Je ne veux pas dire que je ne le crois pas, mais je vous crois.
Par ailleurs, madame Kehler, vous avez parlé de justice alternative. Vous avez parlé aussi de réduction des risques. Cela aussi m'intéresse énormément.
Melanie, vous avez parlé de programmes et de sources de financement. J'aimerais en savoir plus à ce sujet.
Cathy, vous avez parlé du programme de formation pour les femmes qui se prostituaient afin de s'occuper de leurs enfants. C'est un programme extraordinaire et j'aimerais en savoir plus. J'aimerais que ce programme puisse être exporté ailleurs, qu'on l'utilise aussi dans d'autres lieux où il pourrait très bien servir.
Ce sont là plusieurs questions.
En ce qui concerne les renseignements fournis aux familles, je pense que la GRC fait tout ce qui est en son pouvoir, mais il est difficile de communiquer avec toutes les familles des femmes tuées ou portées disparues. Je sais que dans le Nord les gens demandent constamment ce qui advient de ces dossiers. Ils ont besoin de connaître les derniers développements. Il serait peut-être nécessaire que la GRC joue un plus grand rôle dans les collectivités ou noue des liens plus étroits avec elles, en particulier… parce que je sais que de nombreux efforts sont déployés ici, dans la ville de Winnipeg.
En ce qui concerne l’exploitation des femmes, nous avons apporté des renseignements à ce sujet. De plus, nous transmettons des renseignements à Monique, qui siège à notre comité, et nous assistons à certains de ses entretiens. Elle nous informe de toutes les mesures qu’elle prend. Elle a un bureau ici, à l’Assemblée des chefs du Manitoba, où les femmes se rendent si elles ont besoin de parler de quoi que ce soit ayant trait à l’exploitation des femmes. C’est l’une des façons dont nous pouvons apporter notre soutien.
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Lorsque nous parlons de réduire les risques… Je vais parler de l’étude que j’ai réalisée. J’ai utilisé un échantillon assez restreint d’environ 60 femmes des provinces des Prairies qui se prostituent. Nous avons également mené une enquête auprès de 173 fournisseurs de services mandatés par l’État ou non gouvernementaux qui offrent des services surtout aux jeunes prostitués. Nous avons visité 43 sites. Les fournisseurs de services s’efforçaient d’élaborer quelques modèles fondés sur des pratiques exemplaires.
Les femmes qui participaient au commerce du sexe ont évoqué trois motifs qui les avaient poussées à se prostituer. D’abord et avant tout, il y avait l’argent. C’était un moyen facile d’en gagner. Cela se rattache à la question de la sécurité du revenu des particuliers qui est un facteur de risque. Nous savons que la pauvreté est liée à ces cas précis.
La sous-culture à laquelle toutes les femmes ont fait allusion avait trait, dans bien des cas, au fait qu’elles avaient manqué d’amour pendant leur jeunesse et qu’elles recherchaient une relation amoureuse dans la rue. Ce qui est intéressant, c’est que 70 p. 100 des femmes auxquelles nous avons parlé ont indiqué que c’était des tantes ou des amies qui les avaient encouragées dans cette voie. Nous n’avons donc pas observé le terrible problème du proxénétisme, mais ce résultat pourrait être imputable à l’échantillon utilisé.
La sous-culture suppose également un risque, ce qui nous oriente certainement vers les aspects liés au développement communautaire que comportent tous les programmes dont ont parlé tous les témoins ici présents.
Pour ce qui est de l’utilisation des programmes, toutes les femmes ont déclaré qu’elles éviteraient les services axés sur l’État. Dans leur jeunesse, ces femmes avaient beaucoup hésité à être prises en charge par les organismes d’aide à l’enfance et avaient eu de mauvaises expériences lorsqu’elles l’avaient été, alors elles avaient tendance à être attirées par les programmes qui visent à réduire les préjudices. Elles pouvaient avoir recours à ces programmes pour obtenir des condoms et des aiguilles stérilisées ou pour parler à quelqu’un. Ces programmes n’avaient pas nécessairement un caractère officiel, mais leur porte était toujours ouverte, et les femmes pouvaient s’en prévaloir ou non à leur guise. Ces programmes étaient ceux dont le financement était le moins garanti.
Lorsque nous avons finalement terminé notre étude, 20 des 43 programmes avaient perdu leur financement. C’étaient les programmes utilisés le plus fréquemment, alors que les services d’aide à l’enfance… Ce qui est intéressant, c’est que, dans cet intervalle, la Protection of Children Involved in Prostitution Act est entrée en vigueur en Alberta et le programme de lutte contre l’exploitation sexuelle de l’Ontario a atteint l’étape de la dernière lecture. Je sais que, pour élaborer son programme Enfants en santé, le Manitoba a adopté une approche très différente du modèle albertain.
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C’est exact. Je vais m’efforcer de vous aider, car, quand nous aurons tout terminé, j’aimerais avoir une conversation avec vous…
Le chef Francine Meeches: Bien sûr.
Mme Shelly Glover: … parce qu’on a ajouté 199 millions de dollars aux cinq milliards de dollars affectés aux victimes des pensionnats indiens afin que cette aide puisse être apportée. On a créé des centres de guérison, alors réunissons-nous, s’il vous plaît, après la séance...
Le chef Francine Meeches: D’accord.
Mme Shelly Glover: … et je tenterai de vous aider à cet égard.
Je veux revenir à Cathy, parce qu’elle n’avait pas fini d’exposer ce dont elle parlait, et je sais que ce programme est extraordinaire. Il souligne également ce que Melanie disait. Je pense que c’est Melanie qui a déclaré que lorsqu’on possédait certaines expériences et qu’on pouvait les mettre en commun, c’était souvent ce qui avait le plus d’influence.
Lorsque je suis devenue une représentante élue, un voleur d’automobiles m’a appelée de sa prison. Maintenant, il est incarcéré pour meurtre. Désolée, en fait, il ne m’a pas appelée, mais il m’a fait parvenir une carte qui disait « Veuillez poursuivre ce que vous faites. J’aurais mieux fait de vous écouter lorsque vous étiez agente de police. J’aurais dû le faire. Je suis passé du vol d’automobiles au trafic de drogues et, maintenant, me voilà incarcéré pour meurtre. »
Je suis allée le visiter, et je lui ai posé la question suivante: « Compte tenu de votre expérience, seriez-vous prêt à vous entretenir avec d’autres personnes? » Il semblerait que certains jeunes et certaines personnes qui ont des démêlés avec le système de justice pénale n’écoutent pas leur maman, leur papa ou les autres; ils écoutent leurs pairs et les gens qui sont passés par là.
Je veux donc vous poser la question suivante. C’est exactement ce qu’accomplit votre programme qui est financé par le gouvernement du Canada — ce dont je suis fière. Comment votre programme évite-t-il à d’autres femmes d’être victimes d’actes de violence? En quoi est-il utile? Devrions-nous le poursuivre et, comme Mme Demers l’a indiqué, le reproduire partout?
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C’est certainement un de nos rêves de voir… Je pense que le programme pourrait servir de modèle pour les autres endroits, et qu’il pourrait être modifié pour répondre aux besoins d’autres collectivités où l’exploitation a lieu.
Mais permettez-moi de parler un peu du programme Sacred Lives qui vient d’être financé en octobre à la suite du programme de soins aux enfants et aux adolescents. Le programme Sacred Lives emploiera les anciens du programme de soins aux enfants et aux adolescents pour donner, dans les écoles, des ateliers préventifs sur l’exploitation aux adolescents âgés de 10 à 17 ans.
Les travailleurs en soins aux enfants et aux adolescents qui ont fait l’expérience de l’exploitation expliqueront aux jeunes la façon de se faire respecter et de repérer les dangers potentiels. Tout cela découle également des enseignements de Miikiwaap. Par conséquent, tous les travailleurs ont reçu une formation, et les enseignements culturels sont également intégrés dans les ateliers offerts aux jeunes. Nous sommes très heureux d’élaborer ce programme à l’heure actuelle, et nous espérons commencer à offrir les ateliers dans les écoles le mois prochain.
Oui, comme je l’ai dit auparavant, nous faisons appel aux voix des gens qui sont passés par là, qui ont vécu cette expérience. Ils sont les mieux placés pour savoir comment aborder les enfants et leur parler afin qu’ils ne s’engagent pas dans cette voie.
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Ceci est mon opinion; ce n’est pas celle de qui que ce soit d’autre.
Lorsque nous étudions la question des biens immobiliers matrimoniaux, particulièrement dans notre collectivité, nous devons regarder les deux côtés de la médaille, et c’est ce dont nous nous occupons. Si nous nous retrouvons dans une situation où l’homme vient de notre collectivité et que la femme n’en est pas membre… ce genre de circonstances, où la conjointe peut garder la maison, ne correspond tout simplement pas aux moeurs de notre collectivité. Ce n’est pas ainsi que cela fonctionne. Pour avoir droit à une maison dans notre collectivité, il faut en être membre. C’est ainsi, et ce serait probablement la façon de faire dans n’importe quelle collectivité.
Donc, quand on parle des biens immobiliers matrimoniaux et des droits de la femme si l’homme quitte la maison, le fait est qu’elle n’a aucun droit. Soit elle retourne dans sa collectivité d’origine, ou, si elle n’est pas en règle, elle n’a pas le droit d’y habiter. C’est ainsi.
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Merci, madame la présidente.
Merci de votre chaleureux accueil sur le territoire visé par le Traité no 1.
J’ai un certain nombre de questions. Je tâcherai d’être concise.
La première s’adresse à Kelly. Vous avez parlé de la réduction des préjudices. Avec la décision Himel, en Ontario, une des réalités que nous devons affronter est la tentative de décriminalisation de la sollicitation, des maisons de débauche, des clients. Le gouvernement fédéral a interjeté appel, mais ma plus grande crainte est que cela devienne un jugement de valeur, qu’au lieu de voir ces femmes qui, comme vous l’avez dit, ont été poussées dans le rôle de travailleuses du sexe, nous n’aurons pas la discussion sensée que nous présente cette occasion. Vous avez parlé de seringues propres et de discussions, mais il me semble que lorsque les femmes sont prêtes pour cette transition, les ressources ne sont pas disponibles. Je me demande si vous pourriez faire un commentaire à ce sujet.
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Je crois que tout ce que je dirai, c'est que je suis tout à fait d'accord avec vous. Je crois qu’il y a eu, pour une raison quelconque, et je ne sais pas très bien pour quelle raison, s’il s’agit d’une sorte de stigmatisation morale, ou d’une sorte de… Je pourrais émettre des hypothèses jusqu'à ce que les poules aient des dents sur les raisons qui expliquent pourquoi nous n’avons pas de programmes de sortie. C’est peut-être par manque de pérennité des programmes. Je crois que nous avons vu beaucoup de programmes être créés puis disparaître, puis ressurgir et disparaître à nouveau. Nous en avons eus. À Winnipeg, le programme POWER était essentiel. Prostitutes and Other Women for Equal Rights était un programme essentiel qui, encore une fois, a perdu son financement. Donc, il y a eu six ou sept versions, dont celle actuellement en place à Sage House.
Donc, je ne suis pas vraiment certaine que les programmes ont cessé d’exister. Je pense qu’on a été obligé de les réinventer. Cependant, je crois qu’il s’agit d’un processus plus complexe que de se contenter de programmes qui s’adressent précisément aux prostituées qui veulent quitter le milieu, parce que cela s’accompagne d’une certaine stigmatisation.
Les femmes auxquelles nous avons parlé — la moitié d’entre elles ont quitté le milieu et l’autre moitié y sont toujours — avaient de la difficulté à trouver un logement. Donc, le logement pose problème. Elles avaient de la difficulté à trouver un emploi durable. Elles ont parlé de bonnes conditions de vie, du programme national de garderies. Pour quelqu’un qui tente de se lancer dans un changement de vie, toutes ces questions sont reliées.
Des programmes précis sont sans doute nécessaires, mais puisque les problèmes sont beaucoup plus larges, je pense que différents ministères ont la responsabilité d’apporter leur aide.
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Eh bien, je ne pense pas que notre programme soit encore connu à la grandeur du Canada. Seulement pour ce qui est de la recherche, ou pas pour la recherche, mais... Il n'est tout simplement pas connu partout au Canada; nous sommes si occupés à mettre en place le programme que nous ne sommes pas allés sur le terrain ou nous n'avons pas été en mesure d'en faire la promotion.
Ce dont nous avons besoin, c'est d'une évaluation très exhaustive du programme. Évidemment, nous n'avons pas l'argent nécessaire pour le faire. Notre financement provient d'environ huit différentes sources, tant du gouvernement fédéral que du gouvernement provincial; nous avons juste ce qu'il nous faut pour gérer le programme. À mon avis, nous avons besoin d'une évaluation très complète afin de pouvoir créer un modèle de premier plan qui peut être utilisé dans toutes les provinces et partout au pays. Pour ce faire, nous avons besoin du financement, du financement de base. Nous sommes continuellement aux prises avec ce problème. Chaque année, nous rédigeons une proposition après l'autre et essayons de maintenir les cinq postes que nous avons afin de poursuivre la prestation du programme. Ce sont des obstacles.
Nous avons deux ou trois autres barrières liées au programme. Premièrement, il y a les programmes de transition vers l'éducation. Ce n'est pas aussi simple que de voir les femmes sortir de la rue, abandonner le commerce du sexe et se retrouver soudainement avec toute la formation dont elles ont besoin pour être admises dans un programme collégial. Il faut plus de mesures de transition. Elles commencent d'abord par un travail de guérison, et c'est alors qu'intervient le volet de transition. À leur sortie du programme, après avoir été pendant un certain temps dans un programme très centré sur leurs besoins, où on les comprend et où l'on prend soin d'elles assez bien de façon à ce qu'elles puissent réussir leurs études et obtenir un emploi, elles ont tout de même besoin de ce soutien.
Donc, le programme a encore des défauts, mais en fin de compte, en ce qui concerne ce que nous avons mis en oeuvre, si on prend 40 diplômées et que chacune d'entre elles va dans la rue et prévient l’exploitation d'un enfant, cela représente pour le gouvernement — sur le plan générationnel — une économie de coûts qui s'élève à des milliards de dollars.
Mais aussi, ils tiennent les cordons de la bourse, pour ainsi dire. Je suis aussi une grande amatrice des messages d'intérêt public et des trousses d'information. Dans le cadre de certaines initiatives antigang auxquelles je participe, nous trouvons que, pour ce qui est d'obtenir la participation de la collectivité grâce à des pratiques exemplaires réelles et réalisables, ces méthodes fonctionnent vraiment. Cela permet de sensibiliser davantage les gens parce que la collectivité doit connaître les ressources qui lui sont offertes. Nous trouvons que c'est un problème. Donc, je pense que tendre la main et offrir cette possibilité à la collectivité est important.
Je ne connais pas de statistiques précises. Peut-être Mme Kehler pourra-t-elle s'en occuper, ou ma collègue Kelly Gorkoff. Relativement aux enfants qui sont dans les foyers d'accueil et à ce que nous observons, rendons-nous à l'évidence: si un enfant est placé en foyer d'accueil, il ne vit pas dans des conditions de vie idéales. Il est fort probable que ces enfants vivent dans une situation où il y a de la toxicomanie, de la négligence et de la violence. Nous constatons un certain nombre de problèmes dans les cellules familiales éclatées.
Pour ce qui est de ce qui se passe dans le réseau des foyers d'accueil, ce n'est pas comme si ces enfants étaient placés dans un environnement sain où l'on prend soin d'eux. Ils se font ballotter d'un... Le nombre de placements que vivent ces jeunes filles qui ont été exploitées sexuellement est effarant. En l'occurrence, penser qu'elles peuvent avoir un certain sentiment de valeur personnelle et d'estime de soi, compte tenu des conditions dans lesquelles elles vivent à la maison et dans la rue... C'est vraiment déconcertant.
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Je n'ai vu aucune statistique qui prouve que la violence a diminué, mais la campagne de sensibilisation de l'AMC... Lorsque j'ai rejoint les rangs de ce comité il y a plus d'un an, je n'avais vraiment pas conscience de tout cela. J'en avais entendu parler des années plus tôt, mais je n'étais simplement pas au courant.
En tant que chefs, nous essayons de faire comprendre l'importance de cette campagne lors des assemblées. Certains hommes désapprouvent en quelque sorte ce genre de discussion. Au sein de nos collectivités, c'est un peu ainsi. Nous essayons de leur faire prendre conscience de l'importance du problème et de les convaincre d'en parler aux membres de leur collectivité.
Dans notre collectivité, le personnel de l'AMC s'est manifesté et a présenté un exposé. Bon nombre de nos citoyens ont dit: « Vous savez quoi? Je n'ai jamais entendu parler de cela. Je n'étais pas au courant que cela avait lieu. » C'est donc très important. Si un tel programme se poursuit et que cette campagne est continuelle...
J'ai participé à la marche organisée ici, dans la ville. Un nombre incroyable de gens se sont déplacés pour l'occasion. Ce genre de sensibilisation permet au moins d'éduquer les gens, surtout les jeunes. Ce sont eux qu'il faut vraiment cibler. En retour, ils éduqueront un peu leurs parents et grands-parents.
Selon moi, c'est génial que l'AMC coordonne le tout, puisqu'on touche ainsi l'ensemble des 63 Premières nations du Manitoba.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vous remercie de me permettre de parler ma langue, le français.
J'aimerais continuer dans la même veine que Mme Shelly Glover, qui a parlé de modèles de rôles. C'est à mon avis une question très importante. Je pense aussi que les femmes autochtones ont un rôle très important à jouer pour ce qui est de mettre un terme à la violence qui leur est faite. Vous, qui êtes des femmes fortes et déjà accomplies, avez démontré de la force et du courage. Vous avez réussi à devenir chefs dans vos communautés. Vous nous démontrez à quel point les femmes autochtones d'aujourd'hui, comme c'était le cas auparavant, lorsque les communautés autochtones suivaient un modèle matriarcal, ont beaucoup à apporter, à montrer et à démontrer.
Je me demande à quel point il est possible de faire du mentorat en faisant appel aux femmes autochtones qui réussissent, et de transmettre ce pouvoir aux femmes de façon à ce qu'elles l'utilisent, à bon escient, pour se sortir de la grande pauvreté dans laquelle elles se trouvent encore aujourd'hui. Personne ne devrait vivre une telle pauvreté. Ce n'est pas normal, à plus forte raison pour les femmes autochtones.
Chef Meeches et chef Kennedy, j'aimerais que vous me donniez votre avis.
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Je pensais justement à cela ce matin en chemin vers Winnipeg. Nous devons vraiment donner du pouvoir à nos femmes. C'est vraiment important.
J'ai discuté avec le chef Kennedy plus tôt au restaurant. Nous disions combien nous devons être des personnes fortes, en particulier la femme de la famille, car c'est elle qui se soucie constamment de sa famille. L'homme n'a pas à s'en faire pour ses enfants, car vous allez vous en occuper, n'est-ce pas? C'est simplement ainsi que les choses se passent. Nous devons être fortes, quelle que soit la situation. C'est nous qui devons essuyer les larmes des enfants et les envoyer à l'école.
Il y a aussi des hommes qui le font; j'ai vraiment beaucoup de respect pour les hommes qui s'occupent de leurs enfants et pour les hommes monoparentaux. C'est important. Un enfant a absolument besoin d'au moins un parent. Si les deux parents ne peuvent être présents, cette personne doit être là.
Toutefois, je pense qu'il manque de programmes et de services pour aider nos femmes à devenir plus fortes. J'essaie de parler à celles de ma collectivité, mes cousines et mes nièces. J'essaie de les amener avec moi quand je vais quelque part, comme à une assemblée, pour qu'elles voient ce qui se passe vraiment. Elles en ont besoin.
Il arrive que nous nous enfermions à l'intérieur des limites de nos collectivités. Bon nombre de gens y sont tellement bien qu'ils ne voient pas ce qui se passe ailleurs. Ils sont heureux d'être chez eux. Ils sont tellement heureux de rentrer chez eux et de se réveiller dans leur propre maison qu'ils n'accordent pas autant d'importance à ce qui se passe ailleurs. Or, ils ont besoin d'être au courant.
J'ai eu l'occasion de quitter la réserve. Cela n'a pas été facile, à vrai dire. Il m'a fallu du temps pour m'adapter. Même enfant, je pensais que je ne quitterais jamais la réserve; je croyais que j'allais toujours vivre là-bas. C'était mon rêve. Mais lorsque je suis enfin partie, je me suis finalement rendu compte qu'il y avait bien plus ailleurs.
C'est ce qu'il faut faire au sein de nos collectivités. Il faut montrer aux gens qu'il y a plus ailleurs, et qu'ils pourront ensuite revenir chez eux pour mettre à profit leurs expériences et leur éducation au sein de leur collectivité. J'ai toujours vu les choses de cet oeil.
Merci.
Je crois que c'est ce qui termine la séance.
J'aimerais simplement vous présenter Michelle Simson, membre libérale du comité, qui ira demain à Sioux Lookout et à Thunder Bay.
Bienvenue, Michelle.
Merci beaucoup d'être venus. Vos présentations étaient très intéressantes et différentes. Nous aimerions avoir les nombreuses statistiques dont il a été question, et nous aimerions beaucoup aussi que le comité puisse examiner toutes les meilleures pratiques.
Madame Denby, il a été très intéressant de découvrir votre programme unique. Je crois qu'il vaudrait la peine que nous en connaissions le fonctionnement et peut-être certains résultats.
Merci d'avoir pris le temps de venir. Vous nous avez beaucoup appris, comme toujours. Merci beaucoup.
Quelqu'un peut-il proposer de lever la séance?
Une voix: La motion est proposée.
La présidente: La séance est levée.