Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bon après-midi, chers collègues. Nous sommes réunis pour poursuivre notre étude sur la défense nord-américaine.
Nous recevons aujourd'hui deux témoins du ministère de la Défense nationale. Le premier, qui témoignera jusqu'à 16 h 45 environ, est le brigadier-général Kelly Woiden, chef d'état-major, Réserve. Nous entendrons plus tard le colonel Moritsugu, commandant, Groupe des opérations d'information des Forces canadiennes, SFC Alert.
Général Woiden, je vous prierais de faire votre exposé.
Monsieur le président, mesdames et messieurs membres du comité, je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de m'adresser à vous dans le cadre de votre étude sur la défense de l'Amérique du Nord. Permettez-moi de commencer par quelques brèves observations.
Tout d'abord, je comparais aujourd'hui à titre de membre de l'équipe de la Défense, et je fais remarquer que bon nombre de dirigeants militaires et de fonctionnaires de la Défense se sont présentés devant vous ou se présenteront devant vous dans l'avenir pour aborder ce sujet à la fois vaste et important.
Je suis ici à votre demande pour discuter des Rangers canadiens, un élément essentiel de la posture générale de la Défense dans le Nord canadien dont je suis le responsable désigné au nom du commandant de l'Armée canadienne. Je serai donc heureux de répondre à toute question que vous pourriez avoir sur les Rangers canadiens du point de vue de la mise sur pied de la force.
Le brigadier-général Loos viendra la semaine prochaine pour discuter du point de vue opérationnel de l'emploi de la force impliquée dans les activités de maintien de la souveraineté du Canada dans le Nord. En mars, le contre-amiral Bennett parlera du rôle général que joue la Force de réserve partout au Canada.
Les Rangers canadiens constituent un sous-élément de la Réserve des Forces armées canadiennes. Ils sont répartis en groupes de patrouille afin d'assurer une présence militaire dans les régions peu peuplées du Nord canadien, le long des côtes et dans des endroits isolés qui ne peuvent être desservis adéquatement et de façon économique par d'autres éléments des Forces armées canadiennes. Les Rangers ne sont pas chargés d'effectuer des activités de défense traditionnelles, mais on compte sur eux pour signaler des activités inhabituelles, recueillir des données importantes pour les forces et mener, au besoin, des patrouilles de surveillance et de souveraineté. Ils aident également à la recherche et au sauvetage au sol, aux évacuations de la population, aux veilles d'inondation, à la surveillance d'incendie et aux cours de survie de notre équipe de défense.
De plus, les Rangers représentent un élément culturel précieux pour nos opérations, car ils servent de lien direct avec les communautés que nous visitons et les gens que nous rencontrons.
Nous avons fait passer notre effectif à 5 000 Rangers en 2013 et nous sommes sur le point de terminer le projet de modernisation de leur uniforme distinctif. Nous livrerons de nouvelles tentes au printemps et amorcerons, comme prévu, le projet de remplacement du fusil Lee Enfield au printemps 2015.
On a beaucoup parlé du projet de remplacement du fusil et j'aimerais préciser qu'il ne manque pas de pièces à l'heure actuelle, mais qu'à moyen terme, nous connaîtrons une pénurie; il s'agit là de la raison principale de ce projet. Le fusil Lee Enfield reste une arme solide et adéquate pour les Rangers qui s'en servent pour se protéger des prédateurs lorsqu'ils effectuent des patrouilles.
Les Rangers canadiens sont des militaires dévoués et avertis qui constituent des forces mobiles autosuffisantes légèrement équipées à l'appui des opérations militaires canadiennes nationales et de souveraineté afin de démontrer visiblement la souveraineté du Canada dans le Nord.
Monsieur le président, voilà qui conclut mon exposé. Je serai heureux de répondre aux questions des membres du comité.
Je vous poserai des questions sur les Rangers canadiens. La note d'information de la Bibliothèque indique ce qui suit:
Les Rangers canadiens sont « les yeux et les oreilles » militaires du Canada dans le Nord depuis 1947. Selon le ministère de la Défense nationale, ils « forment des patrouilles et mettent des détachements au service des missions de sécurité nationale et de protection civile le long des côtes et dans les régions isolées et peu peuplées du Nord du Canada qui ne peuvent être desservies adéquatement et de façon économique par d’autres éléments des FAC [Forces armées canadiennes] ». Ils mènent notamment des opérations de surveillance et de défense de la souveraineté dans l’Arctique. À l’heure actuelle, on dénombre près de 5 000 Rangers canadiens au sein de 179 patrouilles aux quatre coins du Canada.
Quelle importance les Rangers canadiens revêtent-ils pour la sécurité de l'Arctique canadien?
J'examine la question dans le contexte d'une grande menace russe dans l'Arctique, même si elle n'est pas encore perçue. La Russie a extrêmement bien renforcé ses régions nordiques et y est devenue plus agressive. Nous devons admettre que nous partageons une frontière avec elle là-bas. Dans ce contexte, comment les Rangers canadiens seront-ils nos yeux et nos oreilles?
De plus, quelle formation suivent-ils? J'ai déjà assisté à l'opération de Gjoa Haven sur l'île King William; je ne me souviens pas exactement quand, mais c'était en 2001 ou en 2002. J'ai constaté qu'il s'agissait d'excellentes personnes qui souhaitaient ardemment apprendre, mais leur matériel était désuet. Leurs fusils Lee Enfield datent probablement de la Première Guerre mondiale. En quoi consiste leur formation? Ils ont besoin d'une certaine formation. Quel type de formation offrez-vous à cet égard?
Monsieur, vous m'avez posé plusieurs questions, et je tenterai de formuler mes réponses en les mettant en contexte.
Tout d'abord, les Rangers font partie d'une équipe de la Défense plus vaste. Ils en sont un élément, comme vous l'avez souligné. Ils assurent une présence et effectuent des patrouilles afin de faire de l'observation et de démontrer la souveraineté non seulement dans l'Arctique, mais dans les régions isolées et du Nord de notre pays. Nos Rangers ne sont pas que dans l'Arctique. Comme je l'ai indiqué, ils se trouvent dans la plupart des régions nordiques des diverses provinces, sur les côtes et dans les régions isolées du pays également. Au sein de la grande équipe de la Défense, ils sont les yeux et les oreilles initiaux et habilitent ainsi l'équipe en lui facilitant les choses.
Nous allons apporter quelques éclaircissements. Premièrement, ils effectuent les inspections des installations du système d'alerte du Nord en se rendant dans les régions nordiques pour inspecter régulièrement l'extérieur des installations pour s'assurer que des prédateurs ou les conditions climatiques ne les ont pas endommagées et qu'elles sont intactes. Ils...
Ils examinent seulement l'élément extérieur. Je passerai à la formation pour expliquer ce que les Rangers sont capables ou non de faire et ce qu'on attend d'eux.
Tout d'abord, pour revenir aux tâches des Rangers, sachez que ce sont des membres très expérimentés de leur communauté. Nous considérons qu'ils sont formés quand ils entrent dans le programme des Rangers parce qu'ils sont capables d'exister et de fonctionner dans l'environnement local d'où ils viennent. Il serait probablement utile de faire une distinction: ils sont originaires de la région qu'ils patrouillent et ne sont pas nécessairement capables de fonctionner ailleurs en Amérique du Nord ou, certainement, au Canada. C'est un élément très important. Ils sont équipés du matériel léger dont ils se sont eux-mêmes dotés parce qu'ils possèdent l'expertise et les connaissances nécessaires pour le réparer et l'entretenir, que ce soit des bateaux, des motoneiges ou des VTT, une fois encore parce qu'ils disposent d'un ensemble de compétences que les membres des Forces canadiennes ne possèdent que dans une moindre mesure dans la plupart des cas.
Ce sont des membres exceptionnels de leurs communautés, qu'elles soient situées dans le Nord ou dans d'autres régions nordiques du pays. Plus succinctement, ils sont capables d'exploiter ces ensembles de compétences pour fonctionner, résister et exister dans la région où ils se trouvent. Ils apportent leur soutien aux Forces armées canadiennes quand elles se déploient. Que ce soit un groupe-compagnie qui intervient dans l'Arctique ou une unité d'intervention immédiate venant des unités régulières qui va s'entraîner dans le Nord, ils contribuent à faciliter cette formation et, surtout, nous aident à réduire les effets environnementaux et sociaux qui se font sentir quand on arrive dans certaines communautés.
Le dernier point, si vous voulez, monsieur, concerne la formation. Ils sont déjà formés. Nous considérons qu'ils possèdent les compétences et l'expérience pour mener leur mission première, qui consiste à observer, à effectuer des patrouilles normales et à faire des activités de souveraineté. Nous offrons ce que nous appelons la période de perfectionnement un et la période de perfectionnement deux dans le cadre de leurs 12 jours de formation continue annuelle, pour lesquels nous les rémunérons. Ce n'est pas beaucoup, mais dans bien des cas, la zone de responsabilité est si vaste que c'est à peine si nous pouvons nous rendre dans les communautés. L'instruction liée à la période de perfectionnement un vise principalement à leur montrer comment porter leur uniforme et agir en interaction avec les organismes militaires pour lesquels ils travaillent et d'autres organismes gouvernementaux.
La période de perfectionnement deux s'adresse à leurs chefs, qui sont élus au sein de leurs groupes pour devenir commandants de patrouille et faire un peu de planification et d'activités. L'une des choses qui sont probablement les plus importantes à retenir, c'est que chaque groupe de patrouille de Rangers canadiens compte un élément à temps plein au quartier général qui s'occupe de donner et de superviser la formation, et se charge en bonne partie de cette activité dans les opérations également.
Voilà qui fait brièvement le tour de la question. Les Rangers arrivent essentiellement déjà formés, et nous les utilisons et leur offrons de la formation supplémentaire pour faciliter leurs interactions avec les autres organismes.
Ce sont nos tentes de patrouille. Nous fournissons le matériel de patrouille. L'un des concepts fondamentaux de la viabilité des Rangers, c'est qu'ils viennent déjà équipés. Ils savent mieux quelle motoneige, quel matériel et quels manteaux leur conviennent. Il nous serait très difficile de fournir tout cela dans certaines communautés dont nous parlons. Nous les dédommageons pour l'utilisation de leur matériel, et dans bien des cas, ils sont en mesure de réinvestir au fil du temps. Mais ils sont en fait dédommagés pour l'utilisation de leur équipement.
Merci de vous joindre à nous, général. J'ai énormément de questions au sujet des réservistes en général et des Rangers en particulier. J'aimerais que nous disposions de plus de temps.
Je remarque que vous êtes un des réservistes les plus expérimentés et comptant l'un des plus longs états de service au sein de l'armée. Comme je vous l'ai fait remarquer plus tôt, vous connaissez probablement bien des retraités qui attendent encore de toucher leur pension après l'annonce faite en 2007. Cela ne relève pas de votre mandat d'une certaine manière. Mais voudriez-vous formuler un commentaire à ce sujet?
On a remarqué qu'un retard très important posait problème au chapitre des pensions et des indemnités de départ. Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'on connaît et admet le problème. Sans vouloir vous renvoyer à quelqu'un d'autre, je dirais que l'amiral Bennett, responsable des politiques, s'occupe de la question avec le vice-chef d'état-major de la Défense et le ministère pour résoudre le problème. Je pense que vous aurez l'occasion de discuter avec elle ultérieurement.
D'accord. Peut-être laisserons-nous quelqu'un d'autre répondre à cette question alors.
En ce qui concerne les Rangers, je sais qu'ils travaillent dans l'Arctique, mais aussi au Labrador et dans la Northern Peninsula, à Terre-Neuve, par exemple.
Vous avez parlé de la formation payée qu'ils reçoivent. Je me demande si vous pourriez décrire la nature de la paie que recevrait un Ranger. Il me semble que vous avez là une très précieuse Force de réserve, qui est essentiellement en attente et dotée d'une capacité d'agir là où personne d'autre ne peut aller. Ne sont-ils rémunérés que pour leurs jours de formation ou le sont-ils lorsqu'ils sont disponibles et prêts à exécuter la tâche qui leur est confiée? Sont-ils rémunérés pour autre chose que leurs jours de formation? Je sais qu'en ville, les réservistes sont rémunérés pour les jeudis soirs ou pour leurs week-ends ou camps guerriers ou je ne sais quoi d'autre. Les Rangers me semblent dévoués et disponibles sur appel. Reçoivent-ils une rémunération supplémentaire pour cela?
Dès qu'ils participent à ce que nous appelons la formation de mise sur pied de la force, il est question de trois types de patrouilles. Les types un à trois sont un exercice d'entraînement de patrouilles de routine et un exercice d'entraînement multi-patrouilles. C'est ce que nous appelons la mise sur pied de la force. C'est l'entraînement normal, qui fait partie de la douzaine de jours de formation. Ce sont en moyenne les jours rémunérés par Ranger canadien. C'est notre financement de base.
Je vais maintenant traiter des trois autres types de formation, qui concernent l'emploi d'une force et font intervenir le Commandement des opérations interarmées du Canada, ou COIC.
Le COIC, par l'entremise des forces opérationnelles régionales et interarmées, peut demander aux Rangers d'apporter leur soutien dans le cadre d'autres activités, comme l'opération Nanook ou l'opération Nunalivut. Ils reçoivent une paie qui s'ajoute au financement de base fourni pour les 12 jours de formation.
Vous avez parlé des activités de patrouille. Y a-t-il une routine? Par exemple, si un groupe de Rangers se trouve dans une région donnée, effectuent-ils une patrouille de surveillance une fois par semaine, une fois par mois, une fois par année? Font-ils une véritable patrouille? Ils sont là pour assurer la surveillance. Sortent-ils surveiller la grande la région où ils vivent?
Selon le concept de base, quand un Ranger sort, pas même quand il est rémunéré, il reconnaît le fait qu'il fait de l'observation. Il démontre la souveraineté simplement en portant son manteau à capuchon et en parcourant les lieux à l'affût d'activités inhabituelles. C'est sur cette prémisse que le programme des Rangers se fonde depuis ses débuts.
S'ils détectent une activité suspecte, ils la signaleraient. L'information parviendrait au centre opérationnel concerné, et des mesures appropriées seraient prises.
Dans le cadre de la capacité opérationnelle du pays, ils peuvent, dans bien des cas, aider les autorités gouvernementales locales, comme la GRC ou un organisme de première intervention, et participer aux activités de recherche et de sauvetage au sol.
En raison de la nature même de certaines toutes petites communautés, un Ranger est très apparent et très connu. Dans certains cas, la police locale s'adressera à lui. Ils auront le pouvoir de mener des activités de recherche et de sauvetage au sol, le tout étant coordonné par le COIC.
Quand ils partent en mission, ils entrent alors dans la catégorie des services que nous appelons classe C et peuvent se prévaloir d'un plein salaire et de tous avantages sociaux quand ils participent aux recherches.
Les Rangers sont-ils habituellement des chefs ou sont-ils des citoyens ordinaires de la communauté qui acceptent ces responsabilités? Viennent-ils du groupe des dirigeants?
Dans bien des cas, ce sont en fait des leaders au sein des petites communautés, qui sont souvent très instruits. Surtout, ils possèdent une solide et très claire compréhension de la communauté locale et de leur environnement.
Nombre d'entre eux sont des membres importants de la communauté. Il peut s'agir d'aînés dans des tribus inuites ou d'autres tribus des Premières Nations du pays. Mais il peut également s'agir de citoyens ordinaires en raison de leur expérience et de leur savoir, comme le mécanicien local qui a bien réussi et qui est le meilleur.
Au Labrador, j'ai rencontré un Ranger qui m'a dit qu'une des fonctions de leur unité consistait à offrir des cours de survie à des nations alliées ou à d'autres pays qui veulent être capables de survivre dans le Nord.
Dans quelle mesure fait-on appel aux Rangers pour aider nos alliés?
Ce n'est pas tant pour les alliés. Dans ce cas particulier, il y a dans l'Arctique un camp de survie que les pays européens utilisent, et comme il se trouve que ce sont les Rangers qui possèdent l'expertise locale, ils font appel à eux pour fournir du soutien et donner des cours de survie. Ce n'est pas inhabituel. Ici encore, c'est pour que les gens soient capables de vivre de la terre qu'ils donnent une formation pour se sustenter sur place et acquérir des compétences de chasse et de survie.
Nous faisons la même chose quand nous recourons aux Rangers afin d'appuyer l'entraînement de survie dans l'Arctique donné aux forces aériennes à Resolute, par exemple. Nous y amenons les Rangers pour qu'ils montrent comment construire des abris d'hiver, vivre de la terre et pêcher dans un contexte de survie. Nous offrons cet entraînement à la plupart des soldats et nous saisissons cette occasion de formation quand nous les affectons à une opération dans le Nord.
Général, pourriez-vous nous donner plus de détails concernant strictement les tâches de surveillance qu'exécutent les Rangers et la manière dont ils contribuent à la défense de l'Amérique du Nord et, plus précisément, à la souveraineté du Canada dans le Nord? Peut-être pourriez-vous ajouter quelques commentaires sur le degré d'interaction et d'interopérabilité entre les réservistes des Forces armées canadiennes et les membres des forces régulières ou les réservistes de l'armée américaine afin d'expliquer comment cela contribue à la défense de l'Amérique du Nord.
La surveillance fait partie, ici encore, de la présence quotidienne. Je ne saurais trop insister sur le fait que c'est un des avantages que nous avons.
Quand ils parcourent les régions éloignées, s'ils voient quelque chose d'inhabituel... J'emploierai simplement l'exemple de l'écrasement d'un aéronef de First Air à Resolute. Parmi les premiers à arriver sur place, il y avait des Rangers. Comme ce sont des gens de la région, ils étaient à proximité et ont pu intervenir.
Ils ne sont pas là seulement pour l'activité qui concerne l'observation ou la souveraineté du pays, mais aussi pour la sécurité, comme quand il passe un bateau ou un aéronef inhabituel ou quand un périscope surgit hors de la glace, et ce genre de choses se passent. Cette surveillance passive permet de recueillir de l'information en temps réel et de la transmettre à la chaîne de commandement. Les Rangers considèrent tous qu'il s'agit d'une tâche s'inscrivant dans leurs responsabilités quotidiennes. À moins d'avoir reçu une tâche précise, ils doivent réaliser des patrouilles de souveraineté, une sorte précise de patrouille qu'ils font en collaboration avec le reste de l'équipe de la Défense. Mais c'est normalement une activité quotidienne que de parcourir la région isolée.
J'ai personnellement parlé au capitaine Rittwage, un des responsables dans le Nord de l'Ontario. Il est fort élogieux à l'endroit des personnes qu'il commande. Je pense que c'est dans le Nord de l'Ontario. Mais où serait-ce exactement? Est-ce dans la région de la baie James et de la baie d'Hudson?
Il y a des Rangers canadiens tout le long de la baie James, de la baie d'Hudson et de la côte Est jusqu'au cercle arctique, juste là où il rejoint le Québec.
C'est un peu une fausse appellation. Presque tout le monde croit que l'Arctique, ou la région isolée, ne couvre qu'Inuvik, les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon. Mais il englobe en fait une partie très isolée du Québec. De fait, je vais à Kuujjuaq et à Shefferville ce week-end pour participer à un exercice d'entraînement du 2e Groupe de patrouille des Rangers canadiens du Québec.
Les conditions y sont très rigoureuses. On n'a pas à aller bien loin, même au nord de Winnipeg, par exemple, pour se trouver dans une région isolée où règnent des conditions très difficiles. Le Nord de l'Ontario peut très rapidement devenir très rude à deux ou trois heures au nord de la frontière Canada-États-Unis.
J'ai posé une question sur l'interopérabilité avec nos alliés du Sud. Quelle sorte de formation ou d'activité ferait-on ensemble exactement pour contribuer à la défense de l'Amérique du Nord?
Il y a divers exercices. Je parlerai de ceux que je connais dans ma sphère de compétences, du point de vue de l'armée, et certainement de ce que font les Rangers canadiens et les réservistes.
Nous tenons des exercices conjoints où nous invitons les forces armées américaines à s'entraîner avec nous lors d'exercices comme l'opération Nunalivut et l'opération Nanook. Nous organisons des exercices d'entraînement dans le Nord. Toutes les activités qui ont lieu au nord du 55° sont considérées comme des exercices d'entraînement dans le Nord, ou EXNOR. Nous en avons fait à maintes reprises et nous continuons d'en faire, et les unités de réserve et l'Army National Guard des États-Unis y participent de plus en plus avec nous. Il y a quelques mois à peine, la 5e Division du Canada a participé à un exercice au Labrador.
Je remarque également qu'il y a eu un rôle pour une unité de réserve autre que les Rangers canadiens dans l'Arctique canadien, nommément la Compagnie Yellowknife. Je pense que cette unité relève de votre responsabilité également. Je me demande si vous pourriez nous expliquer quelles sont ses fonctions.
La Compagnie Yellowknife est une compagnie à effectif réduit mise sur pied vers 2009-2010, il me semble, afin d'élargir la présence militaire dans le Nord, principalement assurée par la réserve dans le cas présent.
C'est une compagnie du Loyal Edmonton Regiment et elle fait donc partie de cette unité organique. Son développement a été plutôt lent; il s'agit principalement d'une compagnie de carabiniers, pas nécessairement formée pour l'Arctique quand elle aura une capacité opérationnelle complète. Elle n'a pas atteint la COI. La compagnie comptera quelque135 membres.
Pardonnez-moi, cela veut dire « capacité opérationnelle initiale ».
Nous sommes en train de constituer le noyau de commandement, qui est l'élément essentiel. La compagnie comprend actuellement 38 membres et continue tranquillement de prendre l'expansion. Elle n'a toutefois pas de rôle précis dans l'entraînement dans le Nord, à part celui d'être responsable de la mise sur pied de la force pour tout ce qui concerne la 41e Brigade, dont elle relève.
Dans une entrevue donnée en juin 2012, vous avez indiqué que pendant la mission en Afghanistan, la réserve de l'Armée de terre a cessé d'être une force stratégique pour devenir une force opérationnalisée. Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par là pour que le citoyen moyen puisse comprendre ce que cela veut dire? Redeviendra-t-elle une force stratégique maintenant que les opérations de combat sont terminées?
Essentiellement, comme nos opérations se sont prolongées en Afghanistan, la réserve est devenue plus opérationnalisée. Ce que je veux dire par là, c'est que lorsque nous mettions sur pied les forces opérationnelles afin de les déployer tous les six mois, vers 2005-2006, nous nous sommes aperçus que près de 20 à 25 % de ces forces étaient constituées de réservistes. Mais comme ces forces opérationnelles étaient envoyées sur le terrain, en raison de cette composante, nous étions en train de mettre sur pied une composante opérationnelle. Le terme « opérationnalisation de la réserve » est donc le résultat de ce que nous appelons la ligne d'opération 3, qui constitue une opération plus prolongée et plus réfléchie dans le cadre de laquelle nous nous retrouverions à faire continuellement la mise sur pied d'une force du mode 4.
Nous considérons que nous formons maintenant une force plus intégrée; à mesure que nous poursuivons nos activités, il reste des capacités précises pour les lignes d'opérations 1 et 2, qui se déroulent toutes deux au pays. Nous avons une mission ou un rôle précis à confier aux réservistes pour la tâche 4: nos groupes-compagnies d'intervention dans l'Arctique ou nos groupes-bataillons territoriaux, que vous connaissez, je pense, puis la ligne d'opération 3, qui est, une fois encore, une mission prolongée. Si quelque chose se passe, on attendrait de nous que nous fournissions certaines capacités pour la tâche 4 dans le cadre d'un rôle intégré précis.
Je vais commencer par une question sur les Forces de réserves régulières dont vous êtes le chef d'état-major.
Je crois comprendre qu'au cours d'une séance précédente, les membres du comité ont eu vent d'un problème concernant les réservistes revenant d'Afghanistan ou d'opérations. Ils pouvaient rester en contact avec leur commandant pendant peut-être trois mois, puis ils retournaient à leur travail ou à la vie civile. Le problème, c'est que les maladies mentales n'étaient pas détectées comme elles le sont pour les membres de la Force régulière. Le comité a formulé quelques recommandations pour corriger la situation.
Pouvez-vous me dire si ces recommandations ont été mises en oeuvre ou comment on s'emploie à résoudre le problème des réservistes qui passent entre les mailles du système parce qu'on ne décèle pas chez eux les maladies mentales et le TSPT?
Dans ma réponse, je m'en tiendrai à ma responsabilité précise et à ma connaissance du problème.
Quand les membres revenaient de leurs affectations à des opérations, ils étaient, dans bien des cas, retournés à leur unité à temps partiel de classe A, s'ils étaient à temps partiel.
Le problème, c'est que si l'intéressé devenait indisponible et cessait de parader, les responsables ignoraient ce qu'il se passait et le libéraient. Dans la plupart des cas, l'intéressé décide de quitter la réserve pour toutes les bonnes raisons. C'est un petit nombre qui était touché. Nous nous sommes inquiétés du fait que certaines de ces personnes et des soldats puissent éprouver des problèmes et nous nous sommes demandé s'ils avaient accès au niveau de soins adéquat.
Le problème vient en partie du fait que s'ils demeuraient dans l'unité, nous pouvions les retrouver et leur fournir ce niveau de soins; mais à moins qu'ils ne se déclarent eux-mêmes malades, c'était quelque peu problématique. Peu de gens étaient concernés, mais le potentiel était là.
Je dois admettre que je ne me souviens pas exactement des recommandations que le comité a formulées. Il faudrait que je vous revienne à ce sujet.
Oui, c'est la situation à laquelle je faisais référence, mais ce que je voulais vraiment savoir, c'est ce qu'on fait pour résoudre le problème. Nous avions notamment recommandé que les chaînes de commandement restent régulièrement en contact avec les gestionnaires de cas des Services de santé des Forces canadiennes, qu'ils s'intéressent activement au programme de traitement des soldats et veillent à ce qu'on assure le suivi. La procédure a-t-elle changé? Nous avons écrit ces recommandations en 2009.
C'est exact. Oui, des modifications ont été apportées à l'unité interarmées de soutien du personnel et à la manière dont les gens et les réservistes pourraient entrer en interaction avec elle. Je faisais référence à ceux qui étaient libérés et ne faisaient plus partie du système militaire afin d'indiquer qu'il est très difficile pour l'unité d'assumer une responsabilité quelconque à leur égard, puisqu'ils ne font plus partie du système.
Actuellement — et je vous référerais probablement ici encore à Anciens combattants et aux autres aspects de l'UISP —, il est possible de s'adresser à Anciens combattants pour signaler un problème et obtenir du soutien offert par le système. Une fois qu'un soldat a quitté l'unité, il est très difficile pour le commandant ou la chaîne de commandement de garder contact avec lui.
Nous avions également recommandé que les Forces canadiennes informent et éduquent mieux les membres de l'armée et leurs familles au sujet de la nature des traumatismes liés au stress opérationnel et de leur traitement, mais en mettant davantage l'accent sur les commandants de la Force de réserve, particulièrement ceux...
Monsieur le président, je voudrais simplement rappeler à Mme Murray que nous venons de terminer une étude sur les malades et les blessés, et que nous nous occupons maintenant de la défense nord-américaine. Nous avons entendu le commandement de la Réserve quand nous étudiions les malades et les blessés. J'aimerais qu'elle traite de la défense nord-américaine, puisque c'est l'objet de notre étude.
De la protection en particulier... Et ce sont des gens; je parle donc de la manière dont on les traite et en prend soin.
La recommandation 21 portait particulièrement sur ceux qui résident à une certaine distance d'une installation militaire et du fait que les commandants doivent savoir ce qu'il advient du personnel et de leurs familles. Permettez-moi d'établir un lien avec les Rangers. Qu'est-ce qui est préoccupant au chapitre des ressources humaines, le cas échéant, avec l'effectif du service des Rangers? À quels défis est-on confronté à ce sujet?
Je pense que vous constaterez que les Rangers sont confrontés exactement aux mêmes défis que les autres membres de leurs communautés. Nous ne considérons pas que les Rangers ont des activités ou des problèmes qui diffèrent de ceux des membres ordinaires de la Première réserve, à moins qu'ils ou elles n'aient été affectés à des opérations. Cela ne concerne pas un incident ou quelque chose qui ferait en sorte qu'un Ranger aurait besoin de soutien ou d'aide supplémentaire. Je peux vous dire que si un Rangers est victime d'un incident ou d'une blessure alors qu'il est en service, il recevra les soins appropriés auxquels il a droit parce qu'il était en devoir au moment des faits.
Existe-il des protocoles particuliers que les chefs ou les commandants doivent suivre pour tenir compte du fait qu'ils sont isolés et peut-être à une certaine distance de l'armée, de leur famille ou d'installations?
Les visites que les instructeurs des Rangers effectuent permettent de résoudre en partie cette question. Nous tentons de faire au moins deux visites par patrouille. Comme vous pouvez l'imaginer, la zone de responsabilité est immense, particulièrement dans le Nord; pour nous rendre sur place, donc, nous nous efforçons d'effectuer au moins deux visites par année. L'instructeur des Rangers est en mesure d'évaluer où les problèmes se posent et de déterminer s'il y a des questions ou des difficultés particulières. Si c'est quelque chose que les organisations gouvernementales locales ne peuvent résoudre et que nous jugeons que le problème découle directement du service, nous pourrons déterminer qu'il s'agit d'un problème et voir les possibilités qui existent pour offrir des soins au Ranger canadien.
Oui, pourvu que la personne satisfasse aux exigences de service. Il existe des exigences de recrutement de base, qui sont des exigences en matière de condition physique et de scolarité. Toutes les exigences de recrutement de base applicables à la force régulière ou à la première réserve doivent être satisfaites.
En ce qui concerne les Rangers, j'aimerais préciser que selon les exigences de service, ils ne sont pas tenus d'être retraités. La seule restriction liée à l'âge est d'avoir au moins 18 ans lorsqu'ils s'engagent dans nos rangs. Il n'existe pas d'exigences physiques et médicales précises qui les empêchent de devenir membres ou qui entraînent leur libération. Cet élément découle du fait qu'il possède des compétences uniques. Tant qu'ils y jouent un rôle utile, ils peuvent demeurer membres de la patrouille des Rangers.
Donc, pour ce qui est d'un transfert à la première réserve ou à la force régulière, ils devront satisfaire aux exigences de recrutement de base.
Monsieur le président, je vais m'en tenir au sujet de l'étude, soit la défense de l'Amérique du Nord.
Ma première question est liée à la connectivité, aux capacités de communication des Rangers dans le Grand Nord. Quelles sont leurs capacités à cet égard? Doivent-ils utiliser des téléphones satellitaires? Ont-ils accès à Internet? Communiquent-ils par radiofréquence? Comment communiquent-ils?
Je vais vous donner des précisions. Lorsque nous sommes en patrouille, lorsqu'ils effectuent une patrouille, en fait, ils utilisent les téléphones satellites fournis par l'instructeur. Pour les communications au sein de la patrouille, ils utilisent des postes de radio Motorola portatifs. Beaucoup de patrouilleurs ont leur propre appareil en raison du lieu des opérations, de l'endroit où ils sont situés. Encore une fois, cela dépend de l'endroit où il se trouve au pays, mais habituellement, ils ont pour la plupart leur propre téléphone.
Cela dépend de l'endroit d'où ils viennent. Nous comptons parmi nos membres des Canadiens français, des gens de Terre-Neuve-et-Labrador qui parlent divers dialectes, et des Inuits. Nous avons des membres qui proviennent de toutes les régions du pays et dont la langue comporte des spécificités propres à ces régions. Permettez-moi de revenir à un commentaire antérieur. Ces gens représentent leur collectivité respective; ils communiquent donc dans leur langue. Même si nous utilisons surtout l'anglais pour communiquer avec eux, nous n'avons aucune exigence quant à la langue de communication.
On offre l'été un programme de Rangers, auquel participent des jeunes des Premières Nations. Parmi les participants, quel est le pourcentage — si vous tenez de telles statistiques — de jeunes qui deviennent membres des Rangers à long terme?
Depuis la création du programme, au début des années 2000, nous observons que le Programme des Rangers juniors canadiens a été un catalyseur extrêmement efficace au sein des collectivités.
Je ne sais pas si vous en savez beaucoup à ce sujet, et je ne suis pas un spécialiste du programme des RJC, mais les Rangers canadiens assurent la mise en oeuvre du programme pour le compte du chef-Réserves et cadets et du Programme des Rangers juniors canadiens. Nous fournissons des instructeurs, et les aînés et les membres de la collectivité de l'endroit parrainent le programme. Il s'agit en quelque sorte d'un comité parrainé par les parents ou la collectivité, et ce comité assure une bonne partie de la formation culturelle, notamment, qui est offerte aux groupes de patrouille de Rangers juniors canadiens.
Nous avons un centre d'instruction d'été où ces jeunes suivent leur premier camp d'été, habituellement d'une durée de deux semaines. Nous offrons parfois une formation en leadership d'une durée de trois semaines, qui s'adresse aux cinq groupes de patrouille de Rangers juniors canadiens du pays.
Habituellement, l'attrition n'est pas chose fréquente chez les Rangers. Les gens pourraient littéralement en être membres pendant... Il y avait en Colombie-Britannique un ranger âgé de 98 ans. Il s'appelait Alex Van Bibber. Il est décédé et a été porté en terre peu avant Noël. C'était un des membres fondateurs des Rangers.
Il n'y a aucune limite d'âge. Nous ne les libérons pas simplement parce qu'ils ne participent plus aux parades. Encore une fois, ils sont toujours là. Le taux d'attrition chez les femmes n'est pas élevé. Je tiens à dire que l'on compte beaucoup de femmes parmi les chefs de patrouille, et elles sont élues.
Excellent. Les activités de recherche et sauvetage font-elles partie de leurs fonctions et, le cas échéant, chaque membre du personnel est-il muni d'un transpondeur individuel?
Je vais d'abord répondre à votre question. Nous le faisons pour appuyer les premiers répondants à l'échelle locale. Si les premiers répondants chargés d'appuyer ces activités utilisent un transpondeur ou d'autres mécanismes de détection, c'est cette équipe qui les fournit. C'est en tout point comparable à ce que l'on voit chez les équipes bénévoles de recherche et sauvetage dans de nombreuses collectivités. Dans bien des cas, nos rangers sont aussi des bénévoles au sein des organismes locaux de recherche et sauvetage, mais ils n'appuient pas toujours un organisme responsable.
À ma connaissance, à moins d'avoir l'appui de cet organisme, nous ne fournissons pas ce matériel parce que nos membres participent à ces activités en appui à l'organisme de recherche au sol qui en a la responsabilité.
Je tiens à remercier le brigadier-général Woiden de son témoignage.
Je veux d'abord parler de façon plus générale de la Force de réserve.
Depuis plusieurs mois, voire des années, nous nous attendons à voir une révision et une restructuration de la Force de réserve. Cela nous apparaissait comme une priorité pouvant au moins garantir l'efficacité de cette force. Aux dernières nouvelles, la révision de la structure de la réserve devait être terminée en mars 2014 et un nouveau modèle de financement devait être mis en oeuvre pour le 1er avril 2015.
Toutefois, nous avons appris tout récemment que la révision n'était pas encore terminée et que la date butoir du 1er avril ne serait pas respectée pour ce qui est de la restructuration du modèle de financement. Or il me semble que cela a des impacts importants sur la Force de réserve.
Avez-vous une idée du moment où la révision et le processus de restructuration seront terminés?
Ma réponse portera sur les aspects que je connais par rapport à ce point de vue précis. Je crois que l'activité à laquelle vous faites référence est l'examen approfondi qui a été lancé en 2013 par le VCEMD, le vice-chef d'état-major de la Défense. Ce document précis et cette activité ont été remplacés, ce qui signifie que les délais initiaux, notamment, ont été remplacés par un autre document dans lequel on indiquait clairement qu'il s'agissait d'une étude ou d'un examen de la Force de réserve à temps plein destinée à remplacer le document et l'examen antérieurs. Cela se poursuit actuellement.
Les délais initiaux ont été repoussés, et l'examen se poursuit. Comme on procède à une série d'analyses, il faudra au moins deux ans pour le terminer. Il porte principalement sur l'allocation du financement pour les réservistes à temps partiel et à temps plein. Ce n'est donc pas nécessairement un examen structurel, mais plutôt un examen du modèle de financement qui vise à remplacer l'examen approfondi précédent, qui est celui dont vous parliez, je crois.
Pas nécessairement. Selon mon point de vue et celui de la Réserve de l'Armée de terre, cela nous permet simplement de conserver les modèles de financement actuels et de maintenir nos activités actuelles.
L'examen était essentiellement un examen exhaustif de la Force de réserve en fonction de l'ECEPR initiale — l'Étude sur la capacité d'emploi de la Première réserve —, qui a été réalisée il y a deux ou trois ans et qui a été supplantée par le changement d'orientation, si vous voulez, par rapport à la structure d'attribution de la solde des réservistes à temps partiel et à temps plein.
Un peu plus tôt, mon collègue, M. Harris, a parlé des retards dans l'attribution des pensions destinées aux réservistes. Vous-mêmes avez mentionné les retards dans l'attribution des indemnités de départ. Il s'avère que les réservistes peuvent attendre jusqu'à 21 mois pour recevoir leurs indemnités de départ alors qu'on parle de 18 semaines pour les membres de la Force régulière. Il ne me semble pas acceptable que les réservistes aient à attendre aussi longtemps pour recevoir des sommes qui leur reviennent.
Avez-vous des suggestions à faire en vue d'améliorer la situation à ce sujet? Il faudrait tenter d'éliminer ces retards et s'assurer que la qualité et l'efficacité des services offerts à nos réservistes sont les mêmes que ceux qu'on retrouve pour les membres de la Force régulière.
Nous reconnaissons qu'il y a un problème. Nous savons que beaucoup de réservistes qui sortent de la Force de réserve attendent longtemps pour recevoir les sommes qui leur reviennent, comme l'a indiqué l'ombudsman il y a un an, je crois. Je sais que diverses mesures ont été prises pour essayer de régler ce problème. Je ne suis pas lié à ces questions; c'est davantage lié au régime de pension et aux indemnités de départ.
Je ne veux pas éviter la question, mais l'amiral Bennett pourrait être mieux placé pour vous expliquer ce qui a été fait pour régler ce problème précis, qui découle de paiements tenant lieu d'indemnité et d'autres mesures qui ont été prises. Cela dit, je ne connais pas très bien les autres initiatives qui sont en cours.
Oh, j'en ai probablement beaucoup, mais quant à savoir s'il convient ou non...
Des voix: Oh, oh!
Bgén Kelly Woiden: En fin de compte, il s'agit simplement d'avoir les ressources pour régler le problème. Je suis certain que la voie pour y parvenir comporte bien des difficultés.
Je tiens à remercier le général Woiden d'être venu nous parler des réservistes.
Comme je vous l'ai mentionné plus tôt, général, j'ai eu l'occasion, dimanche, de passer du temps avec les membres du 38e Groupe-brigade. Des unités des réservistes de Thunder Bay, du Manitoba et de la Saskatchewan participent à l'exercice Arctic Bison 2015 sur le lac Winnipeg; il s'agit d'une simulation d'un écrasement d'avion. Les réservistes passeront neuf jours sur la glace. Leur campement ne sera pas établi sur la terre ferme; ils passeront les nuits sur le lac. Ils travailleront avec un peloton du 2e Bataillon du PPCLI, basé à Shilo. Le 440e Escadron de Yellowknife a apporté un appareil Twin Otter et collabore avec la GRC et Transports Canada pour simuler un écrasement d'avion du côté du bassin nord. Des réservistes de l'armée américaine en provenance de l'Oklahoma participent aussi à la mission afin d'acquérir de l'expérience.
Pouvez-vous nous parler de l'importance de ce genre d'exercices? Je ne parle pas seulement du point de vue de la formation et du maintien des capacités des unités de la Réserve des Forces armées canadiennes. Je devrais aussi mentionner la participation de la 4e Compagnie des Rangers canadiens, qui est basée à Thompson, je crois. Dans le cas présent, il est question d'interopérabilité, de formation continue et de coordination de l'ensemble des éléments d'une approche pangouvernementale, et aussi d'un modèle du NORAD sur la souveraineté et la protection dans le Nord.
Je me demande si vous pourriez nous en parler un peu et nous dire en quoi c'est important.
Je pense que vous avez frappé juste en laissant entendre que cette approche concerne l'ensemble du secteur de la défense. Vous avez parlé de tous les éléments. Il y a eu une intensification des activités, tant par rapport à la formation... Et cela n'a pas seulement lieu l'hiver; des activités ont aussi lieu l'été, dans les régions inhospitalières et isolées du pays, tant dans le Grand Nord que dans le nord des provinces.
En ce qui concerne l'interopérabilité, nous avons parlé de la participation des Américains et — ce qui est plus important — de la capacité de fonctionner au sein de tous les autres ministères. De toute évidence, les possibilités sont immenses lorsque l'on augmente le nombre d'exercices dans le Nord. Habituellement, le GCIA, le Groupe-compagnie d'intervention dans l'Arctique, fait partie du niveau de formation prévu. Vous remarquerez que certains éléments de l'unité d'intervention immédiate du 2e Bataillon du PPCLI participent. Vous pouvez constater que la capacité d'intervention combinée — la Force régulière et la Force de réserve — est facilitée ou favorisée par les Rangers canadiens. Donc, avoir la capacité de mener des opérations, de se déplacer et d'assurer, du point de vue environnemental et social, dans les régions où ont lieu les opérations, dans des milieux très isolés... Cela permet à l'ensemble de l'entité d'aller sur le terrain et de mener des opérations dans des conditions très difficiles.
En fin de compte, il faut savoir que nous menons de plus en plus d'exercices dans le Nord. À raison d'un exercice par division par année d'instruction, habituellement. Nous participons aux opérations et une rotation est faite pour tous les exercices opérationnels, les exercices d'affirmation de la souveraineté dans le Nord, soit l'Opération Nunalivut et l'Opération Nanook. Une rotation des exercices est réalisée, par division. Donc, les groupes-compagnies d'intervention dans l'Arctique participent. Dans certains cas, les groupes-bataillons territoriaux — qui sont principalement une unité de réserve — participent aussi.
Donc, oui, nous augmentons le nombre d'activités d'instruction chaque année. À mesure que nous orientons nos activités de réserve vers les activités nationales — les lignes d'opérations 1 et 2 dont j'ai parlé —, je pense que vous verrez une présence régulière. Cela nous permet d'amener la formation de base à la guerre hivernale que nous offrons à un autre niveau d'instruction et d'opérations.
Les réservistes sont nos citoyens soldats. Ils vivent dans la population civile et occupent un emploi pendant la semaine.
Pouvez-vous parler de l'importance de leur rôle d'ambassadeurs au sein des collectivités et des liens entre les collectivités et les Forces armées canadiennes
Avec plaisir. Je pense qu'en tant que principaux réservistes, nos citoyens soldats — cela pourrait aussi être des membres de la Réserve navale ou de la Réserve aérienne, mais ce sont surtout des réservistes de l'armée — sont une présence dans la collectivité. Ils sont répartis dans 127 unités basées dans 117 collectivités au pays. Lorsque l'on regarde la capacité d'atteindre la population, et comme ils sont souvent les seuls à pouvoir intervenir, pas seulement en ce qui concerne une intervention sur la scène nationale, mais aussi par rapport à l'interaction quotidienne avec la collectivité et au fait d'assurer une présence militaire, si l'on veut...
Ce sont des citoyens soldats. Ils sont enseignants, avocats, médecins, ingénieurs, plombiers... Ils sont représentatifs de la collectivité. Et le plus important, à mon avis, c'est qu'ils sont en tous points semblables aux Rangers canadiens, qui sont issus de la collectivité. Le citoyen soldat, c'est une présence, un lien.
Brigadier-général Woiden, je vous remercie de votre témoignage.
Dans vos remarques d'introduction, vous avez dit que les Rangers sont chargés, entre autres, de recueillir des données importantes et, au besoin, de mener des patrouilles de surveillance. Au cours d'une réunion précédente de ce comité, on nous a présenté les avantages et les capacités des drones, en particulier de ceux de petite taille.
Afin d'améliorer la couverture faite par les Rangers, envisagez-vous d'utiliser des drones dans les zones difficilement accessibles?
Les opérations de surveillance et de protection de la souveraineté relèvent du Commandement des opérations interarmées du Canada. Je laisserais le général Coates répondre à la question, car je crois qu'il parlera de la surveillance et des opérations de recherche et sauvetage au sol.
Pour ce qui est de l'idée générale de donner des capacités opérationnelles aux Rangers, je reviendrais aux propos que j'ai tenus à ce sujet dans mon exposé. Ils sont déjà formés lorsqu'ils se joignent à nous. Toute formation supplémentaire plus poussée devrait être perçue comme une capacité supplémentaire, que nous devrions leur fournir, et qui servira à déterminer s'ils sont les mieux placés pour poursuivre ou mener ce genre d'opérations, qu'il s'agisse de drones ou d'autres systèmes qui leur auraient été fournis.
L'essentiel, c'est que cette question devrait être examinée sous l'angle de la demande et de la capacité. Je dirais que l'ensemble des Forces armées canadiennes déterminerait quelle ressource convient le mieux. Je ne crois pas que l'on considère nécessairement cela comme la responsabilité des Rangers.
Dans le même paragraphe de vos remarques d'introduction, vous dites en résumé que les Rangers aident également aux évacuations de la population et aux veilles d'inondation.
Je représente une circonscription qui, en 2011, a été fortement touchée par des inondations et où les Forces armées ont justement dû intervenir. Je parle ici de Saint-Jean-sur-Richelieu. Il y a eu une certaine hésitation au début en ce qui a trait à l'intervention. À mon avis, cela n'était pas attribuable au fait qu'il n'y avait pas de compétences pour intervenir. C'était davantage la décision politique qui n'était pas claire, à savoir si cela relevait du provincial ou du fédéral.
Vous avez fait remarquer que la Force de réserve est passée d'une force stratégique à une force opérationnelle. Quelle est votre vision à cet égard? Ce changement de responsabilité de la Force de réserve peut-il avoir des conséquences sur le côté opérationnel et sur la rapidité d'intervention lorsqu'on demande à l'armée d'intervenir dans des opérations comme des évacuations de la population et des veilles d'inondation?
Je sais que votre témoignage se concentre sur les Rangers, mais il peut probablement s'appliquer plus largement à d'autres unités de la Force de réserve qui sont appelées à fournir une aide supplémentaire dans des cas extrêmes tels que des catastrophes naturelles.
En ce qui concerne le rôle général d'une présence fédérale dans une communauté, et, dans ce cas, de la présence d'une réserve ou même celle de Rangers, le commandant d'une unité de réserve ou des Rangers peut fournir de l'aide en cas de danger de mort ou de blessures s'il en a la capacité. Immédiatement après qu'il a commencé à la donner, il doit faire suivre une demande officielle de soutien et de l'autorisation de continuer à fournir cette aide.
Il peut le faire. Cela vaut aussi pour tout réserviste. Nous l'avons vu dans le nord de l'Alberta, pendant les inondations, en Saskatchewan et partout au pays, notamment à Terre-Neuve, il n'y a pas longtemps.
Cette intervention peut être immédiate. Le commandant d'une patrouille de Rangers ou même d'une unité de réserve dans une région isolée peut accorder cette aide dans une situation présentant un danger de mort ou de blessures, mais, pour la poursuivre, il doit en obtenir l'autorisation.
Y a-t-il un modèle d'organisation qui est plus efficace, à savoir entre la séparation de la Force de réserve et de la Force régulière ou l'intégration?
Les réserves font partie de l'Équipe de la Défense et de la capacité fédérale d'intervention, pas de celles d'une province. Il y a plusieurs niveaux de capacité.
Il y a souvent l'unité d'intervention fédérale immédiate de la force régulière, le Groupe-compagnie d'intervention en opérations arctiques de la Réserve ou le groupe-bataillon territorial qui offrent un niveau mesuré d'intervention. Normalement, ce sont les premiers intervenants locaux, suivis des intervenants municipaux, provinciaux puis fédéraux.
À ce que je sache, on n'a pas proposé d'y changer quelque chose.
Général, je vous remercie d'être ici. Votre témoignage est extrêmement instructif.
Un témoin antérieur a proposé qu'on autorise les Rangers canadiens à faire voler des véhicules aériens sans pilote pour améliorer la surveillance du Nord.
Je ne suis pas en mesure de juger des mérites de la proposition; cela ferait partie de ce que nous voulons vraiment que les Rangers fassent.
Je reviens à mon observation selon laquelle nous les considérons comme déjà formés et capables de réaliser ces vols. La raison d'être fondamentale du ranger canadien est d'observer et d'assurer une présence générale. Pour ce que je considère comme des tâches plus complexes, il faudrait que l'ensemble du gouvernement et, surtout, toute l'Équipe de la Défense déterminent si c'est le meilleur moyen de les faire.
Je ne peux pas me prononcer ni pour ni contre; je n'ai pas étudié cette question.
Ce groupe assure ce que nous appelons la capacité de maintien en puissance à l'unité d'intervention immédiate, ce qui est une tâche de la Force régulière attribuée à chacune de nos forces opérationnelles interarmées, partout au pays, les forces opérationnelles régionales. Normalement, par exemple, il y a toujours un bataillon prêt en permanence à intervenir dans le pays, dans chacun de nos emplacements régionaux.
Pour le Nord et l'Arctique, particulièrement, le groupe-compagnie d'intervention dans l'Arctique est en mesure d'atteindre sa capacité opérationnelle totale, et, à 15 jours de préavis, le gros de la troupe viendrait appuyer ou relever l'unité d'intervention immédiate déjà sur place. Son arrivée suit le déploiement de l'unité d'intervention immédiate.
Absolument. Comme je l'ai dit, nous allons très rarement dans le Nord ou dans des régions isolées pour l'entraînement ou la conduite d'opérations sans être accompagnés des Rangers.
Nous n'avons pas recours aux Rangers dans un scénario tactique. Nous faisons appel à l'approche d'ensemble pour l'Équipe de la Défense, qui assure effectivement la capacité tactique. Ils n'ont pas l'entraînement ni l'équipement voulus. Leurs fusils ne sont pas censés servir d'armes tactiques; ils servent à la lutte contre les prédateurs et à l'autoprotection.
J'entrevois que nous les utiliserons peut-être de manière plus continue, comme maintenant, pour aider à l'Équipe actuelle de Défense à aller dans le Nord.
Ces trois à cinq dernières années, nous avons continué à augmenter notre présence. Comme je l'ai dit, nous n'allons pas ordinairement dans des régions isolées sans les Rangers, parce qu'ils sont de la communauté. Je souligne ce fait. Ils connaissent la communauté, le milieu, et ils comprennent les conséquences d'une présence militaire dans cette communauté.
Peut-on dire avec certitude que leurs patrouilles font partie intégrante du système de sécurité de l'Arctique canadien, qu'eux sont, pour ainsi dire, nos yeux et nos oreilles sur place?
Vous avez parlé du Labrador, bien sûr. Y a-t-il des Rangers dans les Maritimes? Je soupçonne qu'il n'y en a probablement pas au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse ni dans l'Île-du-Prince-Édouard.
Actuellement, ils sont dotés du fusil Enfield de calibre .303, d'abord pour la lutte contre les prédateurs qu'ils assurent chaque fois que d'autres membres de l'Équipe de la Défense, Armée canadienne, Force aérienne, peu importe, se trouvent sur place.
Je suis désolé si vous avez déjà répondu à cette question, mais avez-vous dit que c'est eux qui fournissent cet équipement ou leur est-il fourni par...
Chers collègues, pour faire vite, je présente notre deuxième témoin de l'après-midi, le colonel Moritsugu, commandant du Groupe des opérations d'information des Forces canadiennes à la station d'Alert.
Merci beaucoup, colonel, d'être ici. Nous vous écoutons.
En ma qualité de commandant du Groupe des opérations d'information des Forces canadiennes, je suis chargé du programme du renseignement sur les signaux électromagnétiques étrangers des Forces armées canadiennes.
Un peu de contexte pour vous aider à vous situer.
Le renseignement sur les signaux électromagnétiques comprend le renseignement technique ou l'information que nous tirons de systèmes de communication, de systèmes informatiques, de réseaux et des données qui s'y trouvent. Il comprend le renseignement électronique tiré d'émissions électromagnétiques qui ne relèvent pas des communications, par exemple celles des radars et ce que nous appelons le renseignement sur les instruments et signaux étrangers obtenus de communications entre machines, comme la télémétrie d'un missile à sa station au sol ou d'un drone à celui qui le dirige.
Pourquoi est-ce important? La Station des Forces armées canadiennes Alert est située à l'extrémité nord-est de l'île d'Ellesmere, au Nunavut, à 82o 30' de latitude nord et 62o 19' de longitude ouest, soit à seulement 817 kilomètres du pôle Nord. Pour vous donner une autre idée des distances, d'ici à Alert, 4 151 kilomètres, c'est deux fois la distance d'ici à Iqaluit, à seulement 2 090 kilomètres. Alert est donc très éloigné dans le Nord.
Nous y captons des signaux étrangers intéressants pour le soutien des opérations militaires canadiennes.
Depuis plus de 40 ans, depuis 1956, plus précisément, nous y avons du personnel qui recueille, traite et exploite ces signaux et les diffuse aux Forces canadiennes.
Il est encore nécessaire de prélever ces signaux étrangers à Alert, en raison de sa position stratégique exceptionnelle, mais, grâce aux améliorations survenues dans les techniques de traitement et de communication des signaux électroniques, nous pouvons envoyer les signaux bruts dans le sud du Canada pour leur traitement et leur analyse.
C'est ainsi que, en 1997, nous avons réduit les effectifs du personnel permanent chargé du renseignement sur les signaux étrangers de la station Alert, qui sont passés de 250 à maintenant moins de 10 techniciens. Puisque la majorité des tâches à Alert relève du soutien logistique, l'Aviation royale canadienne, dont je pense qu'un témoin comparaîtra ici dans quelques semaines, a pris le commandement de la station en 2009.
La capacité en matière de renseignement électromagnétique que nous procure la position stratégique exceptionnelle d'Alert contribue à la défense de l'Amérique du Nord puisqu'elle permet de fournir des renseignements importants aux Forces armées canadiennes et à notre Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord, le NORAD, un organisme binational.
Nos systèmes de renseignement sur les signaux électromagnétiques à Alert et nos installations similaires de Gander et de Masset, en Colombie-Britannique, peuvent également contribuer à la recherche et au sauvetage ainsi qu'à d'autres opérations d'envergure nationale, en dirigeant leur regard vers l'intérieur du Canada pour trouver les signaux radio de navires ou d'aéronefs en détresse.
Les trois stations peuvent alors chercher les signaux radio à haute fréquence émis par le type d'équipement dont sont munis les aéronefs et les navires pour les communications à grande distance et déterminer la direction de leur point d'origine. L'intersection des lignes de direction déterminées par les trois stations donne une idée générale de l'emplacement de la radio recherchée.
Les trois rôles de la station Alert sont: le renseignement électromagnétique; la souveraineté, parce que nous sommes là-bas; et la science, parce que Environnement Canada se trouve là-bas. Nous appuyons aussi des expériences scientifiques. Ces rôles sont complémentaires et, grâce à la bonne volonté et à l'esprit de coopération de toutes les parties intéressées, ils s'appuient mutuellement.
Du point de vue du renseignement électromagnétique, de mon propre point de vue, la Station des Forces canadiennes Alert est une ressource d'une importance fondamentale et elle continuera de l'être pendant encore longtemps.
Chers collègues, avant de commencer les questions, je vous préviens que le colonel est incapable de répondre à des questions détaillées concernant le renseignement sur des signaux particuliers recueillis à Alert, l'équipement utilisé pour le renseignement ou les répercussions opérationnelles du renseignement obtenu à la station Alert.
Notre premier intervenant est M. Chisu, qui dispose de sept minutes.
Merci beaucoup, colonel, pour votre exposé très intéressant.
Vous avez mentionné trois secteurs fondamentaux d'activité pour le renseignement sur les signaux électromagnétiques.
Vous avez parlé de renseignement sur les communications. Cela se passe d'explications.
Quand vous avez parlé de renseignement sur les signaux électroniques obtenus d'émissions de signaux électromagnétiques qui ne relèvent pas des communications, je pense que vous faisiez allusion aux radars et à d'autres systèmes aussi, comme les radars à balayage latéral, ceux à antenne synthétique et aussi, probablement, les radars infrarouges.
Bien sûr, vous n'êtes pas libre de tout dire, mais je vous questionne sur la couverture de l'espace aérien au Canada.
Comme vous le savez, il y a les radars à longue, à courte et à moyenne portée. Vous avez probablement un rôle important concernant ces appareils.
Pouvez-vous nous en dire plus à leur sujet, dans la mesure où vous êtes libre de le faire, sans divulguer de secret?
Vous nous demandez de décrire la couverture que nous pouvons fournir. À Alert, nous utilisons les renseignements électromagnétiques plutôt que les radars. Les radars sont la responsabilité de la force aérienne. En ce qui concerne les renseignements électromagnétiques, une fois que vous envoyez un message, il voyage librement dans l'atmosphère, n'est-ce pas? Nous tentons donc d'intercepter des transmissions qui pourraient se trouver même au-delà de nos frontières nationales.
Nous cherchons des renseignements électromagnétiques étrangers qui sont bien au-delà de la portée de nos radars, étant donné que la surface de la Terre est courbée et que nos signaux radars voyagent en ligne droite à partir du sol. Nous tentons de détecter des transmissions avant les radars, si possible, afin d'être avertis le plus tôt possible.
Lorsque vous parliez de communications machine à machine, vous avez dit que vous aviez la capacité d'intercepter des transmissions entre deux communications.
Pourriez-vous nous en dire un peu plus à cet égard, du moins autant que possible?
Je tentais de vous donner une idée de nos travaux relatifs aux renseignements électromagnétiques en vous donnant trois exemples, car ce type de renseignement semble tout droit sorti d'un roman de science-fiction. Dans l'exemple des communications machine à machine, lorsqu'un autre pays lance une roquette, il dispose souvent d'un réseau de transmission à une autre machine au sol, et ce ne sont donc pas des êtres humains qui se parlent. C'est donc un type de transmission. De plus, si vous contrôlez un drone d'observation, il y a des transmissions entre votre contrôleur et ce drone.
Ce sont les types de transmissions que nous cherchons manifestement à intercepter pour ensuite peut-être les analyser.
Veuillez répondre à la prochaine question dans les limites de ce que vous pouvez nous dire. Si vous détectez, par exemple, une intention d'un pays étranger, en particulier la Russie, à quelle vitesse ce renseignement peut-il être transmis et dans quelle mesure peut-on réagir rapidement à l'intrusion?
Vous n'avez pas besoin de tout nous dire, mais avez-vous un mécanisme en place? Pourriez-vous nous en parler dans les limites de ce que vous pouvez nous dire?
Ce que nous tentons d'accomplir avec les renseignements généraux, qu'il s'agisse de renseignements électromagnétiques ou d'un autre type, c'est manifestement de découvrir les intentions, les capacités stratégiques et les mesures concrètes prises par les gens qui nous préoccupent et qui nous intéressent beaucoup.
Comme vous l'avez dit, si on nous attaquait, nous serions manifestement préoccupés. Dans ces cas-là, les communications sont aussi rapides que la vitesse de la lumière. Cela revient au temps nécessaire pour qu'un humain les examine et interprète leur signification.
Cela revient donc réellement à la vitesse à laquelle nos analystes peuvent déterminer ce qui se passe à partir de la série de transmissions qu'ils reçoivent et leur signification. En ce qui concerne le temps de réaction, je crois que les représentants de la force aérienne sont mieux en mesure de répondre, mais jusqu'ici, nous avons détecté tous ceux qui ont approché nos frontières.
J'ai posé une question sur la synchronisation. Par exemple, vous détectez qu'on approche nos frontières et vous êtes certain que cet objet ou cet avion ennemi s'introduira dans notre espace aérien ou qu'il a l'intention de le faire. Vous obtenez ce renseignement, vous l'envoyez au centre opérationnel dans le Sud pour qu'il soit analysé, et il est ensuite envoyé à la force aérienne pour qu'on organise le déploiement.
Malheureusement, nous n'avons pas de système de missiles qui verrouille une cible, mais d'autres possèdent un tel système, et c'est donc une question de synchronisation. Vous n'avez pas besoin de nous parler de la synchronisation, mais y a-t-il un système de réaction en place?
Absolument. Il y a bien un système de réaction en place. Le commandant adjoint du NORAD serait le mieux placé pour parler de son fonctionnement. Même si cela sonne un peu brusque, j'ai fait ma part lorsque je leur ai dit ce qui allait se passer. Il revient ensuite aux responsables de la force aérienne de s'occuper de la situation.
J'aimerais vous poser une question sur l'importance d'Alert. C'est l'un des endroits habités les plus au nord dans le monde. Quel est le rôle d'Alert dans la défense de l'Amérique du Nord?
De mon point de vue, la mission principale d'Alert, c'est la cueillette de renseignements électromagnétiques. Comme je l'ai dit, cette station est essentielle en raison de son emplacement. Elle nous donne un avantage géographique unique. La liaison n'a toujours pas été faite très loin et très au nord, et cet endroit continuera donc de jouer un rôle essentiel.
D'après ce que je comprends de l'emplacement des stations de renseignements électromagnétiques — une à Gander sur la côte Est, une en Colombie-Britannique et une dans le Nord —, on essaie de tout couvrir ce que nous pouvons analyser.
Vous avez dit que la force aérienne a pris le contrôle des activités à Alert. Qui avait le contrôle avant cela?
Vous vous occupiez de l'approvisionnement et des travaux.
Comment cela diffère-t-il du CST, le Centre de la sécurité des télécommunications? Ce centre travaille également sur les renseignements étrangers, mais pas sur les renseignements électromagnétiques. Est-ce la différence?
Je crois que si vous consultez son site Web, monsieur, vous constaterez que le CST s'occupe des renseignements électromagnétiques, mais je m'occupe des renseignements électromagnétiques militaires.
Les objets militaires étrangers. D'accord. C'est bien.
Je n'ai pas eu la chance de consulter votre site Web avant votre comparution. J'en ai entendu parler plus tôt aujourd'hui.
Pour l'essentiel, utilisez-vous des satellites pour recueillir des renseignements ou s'agit-il tout simplement d'un moyen de communication avec le Sud, comme vous l'avez souligné?
Nous utilisons les satellites pour communiquer avec le Sud, mais nous ne pouvons pas le faire à partir d'Alert, car Alert est trop au nord. En effet, la station est située à un point de la courbure de la Terre où ne passe aucun satellite géospatial, et nous avons donc une série de pylônes radio à micro-ondes qui suivent la dorsale de l'île d'Ellesmere jusqu'à Eureka, où nous pouvons à peine voir les satellites géostationnaires.
Je crois que certaines régions du Groenland sont plus au nord, et lorsque vous survolez à quelques centaines de pieds, en avion, vous pouvez voir le Groenland à l'est. C'est très bien. Il y a des falaises là-bas. C'est très près. Alert est l'endroit le plus au nord qui est habité en permanence ou à l'année.
Oui, monsieur. Il y a plusieurs employés de soutien qui entrent dans le calcul de la force aérienne, mais je ne les compte pas. Le colonel Lowthian devrait être en mesure de vous en parler dans quelques semaines, mais il y a de 50 à 100 personnes au total.
Les renseignements électromagnétiques pourraient être n'importe quel type de transmission. Il pourrait s'agir de communications vocales, de communications électroniques, de transmissions électromagnétiques ou de communications électromagnétiques de n'importe quel type.
D'accord. Je ne sais pas où aller maintenant, monsieur, mais j'aimerais dire que nous sommes heureux que vous soyez là pour exercer une surveillance. Il s'agit manifestement d'une partie très importante du système, surtout lorsque, comme vous le dites, nous ne pouvons pas communiquer avec des satellites. Les satellites ne peuvent pas vraiment voir ce qui se passe non plus.
En ce qui concerne la technologie, à part réduire le nombre de personnes de 200 à 10, comment l'émergence de la nouvelle technologie vous permet-elle d'accomplir un travail plus exhaustif?
En 1956, lorsqu'on envoyait ces choses dans l'espace, nous devions faire tous les travaux à l'avance, car il était impossible de renvoyer les transmissions. La capacité n'existait pas à ce moment-là. Le nombre de personnes que vous pouviez consulter était plus restreint, car il y avait 250 personnes, et c'était tout. Maintenant, nous menons ce type d'activité ici, et nous pouvons consulter tous les membres de la communauté du renseignement des Forces canadiennes. Consulter les personnes face à face, ce n'est pas la même chose que leur parler au téléphone, et on a une meilleure capacité d'analyse.
Dans les années 1950, la technologie était composée de valves et de tubes à vide, etc., et on l'a manifestement améliorée considérablement depuis ce temps. Notre capacité de recueillir et d'analyser des transmissions et de déterminer leur nature est beaucoup plus évoluée.
Inversement, la capacité d'une cible de cacher ses transmissions et de les rendre difficiles à comprendre est également beaucoup plus avancée, et c'est donc toujours... La technologie de l'information sur les communications progresse à pas de géant, et cela entraîne des avantages et des inconvénients des deux côtés.
La technologie électronique de pointe est très sensible aux grands froids. Comment surmontez-vous les défis liés à cette nouvelle technologie en ce qui concerne la température et l'accès à l'électricité?
Étant donné que la station Alert est permanente, on a construit les bâtiments nécessaires sur le site. Nous avons donc manifestement de l'électricité — elle n'est pas fournie par Hydro Ontario, mais par des générateurs locaux, etc. — et une source d'électricité de secours, et une source de secours pour la source de secours, car si nous manquons d'électricité, nous sommes très loin dans le Nord et à plusieurs heures des secours les plus près. Nous devons donc avoir un système permanent, et c'est ce que nous avons. Certains de nos systèmes doivent être climatisés, même si la température extérieure peut descendre à moins 50.
En ce qui concerne le partage des renseignements, la connectivité, et le flux continu des intrants, dans quelle mesure partageons-nous un certain type de système de communication avec nos voisins du Nord?
La raison principale pour laquelle nous avons la station est la défense du Canada, la défense de notre patrie et la défense de l'Amérique du Nord.
Nous partageons surtout les renseignements avec le NORAD. En ce qui me concerne, nous déterminons ce qui se passe. Nous produisons ces renseignements. Quant au processus par lequel notre commandement national peut ensuite décider de partager ces renseignements ou d'autres sources de renseignements avec d'autres parties, parce que nous avons un problème commun à régler, au cas par cas, il se trouve plusieurs échelons au-dessus de moi. Je confie les renseignements à mes supérieurs, et quelqu'un d'autre décide si mes renseignements ou d'autres éléments de renseignements doivent être partagés avec d'autres parties, à part celles avec qui nous les partageons régulièrement, c'est-à-dire nous-mêmes et le NORAD.
Si un autre pays avait des renseignements électromagnétiques, il ne les enverrait pas à votre station. Par exemple, supposons que les Danois ou les Suédois aient un certain type de renseignements. Au lieu de vous les envoyer, ils les enverraient directement à notre centre de commandement ou au NORAD.
Oui. Les renseignements traités seraient envoyés directement à notre quartier général à Ottawa. Ensuite, il nous reviendrait de décider comment les utiliser.
L'une des raisons pour lesquelles on agit ainsi, c'est qu'on veut dire aux gens ce qui se passe, mais on ne veut pas nécessairement leur dire à quel point notre équipement est sophistiqué, et c'est ce qu'on ferait si on leur fournissait des renseignements exacts non traités.
Les satellites ne peuvent pas vous brosser le portrait global de la situation en tout temps. Serait-il logique qu'au cours de vos activités, vous soyez en communication avec des actifs d'autres pays alliés dans cette région?
Je ne crois pas qu'il serait nécessairement souhaitable de connecter nos moyens de communication à ceux d'autres alliés, et certainement pas d'en faire notre moyen principal. Nous avons notre propre moyen de communication principal.
Si on m'accordait un voeu, j'aimerais disposer d'au moins un autre moyen complètement canadien d'obtenir des renseignements en cas de problème avec ce moyen de communication principal. Toutefois, il est peu probable que nous dépendions d'un allié, même d'un allié proche, pour les renseignements de ce type et de cette nature délicate.
Y a-t-il quelque chose, que ce soit un type de technologie ou un type d'aide supplémentaire, dont votre organisme a besoin et que le gouvernement pourrait envisager de lui fournir?
Je crois qu'il s'agit de définir ce qui représente un besoin et ce qui représente un souhait, n'est-ce pas? Je peux affirmer que j'ai besoin de quelque chose, mais mon supérieur pourrait dire que c'est ce que je souhaite obtenir.
La réalité, c'est que les technologies de renseignement et de communication progressent très rapidement. Par exemple, il y a 10 ans, les iPad n'existaient pas. C'est pourquoi nous devons continuellement mettre notre équipement à jour. Les Forces ont un processus bien défini pour présenter nos demandes, et elles doivent ensuite être comparées à toutes les autres demandes formulées dans les forces armées. C'est donc la première chose: il faut tout simplement continuer à mettre l'équipement à jour.
La deuxième, comme je l'ai dit plus tôt, c'est que nous dépendons d'un lien de communication très solide. Tous les systèmes nécessaires sont en place, mais dans un monde idéal, j'aurais deux systèmes différents et ils seraient tous les deux canadiens.
J'aimerais obtenir quelques éclaircissements. Vous êtes le commandant du Groupe des opérations d'information des Forces canadiennes. Cela comprend les centres de renseignements électromagnétiques de la côte Est et Masset. Y a-t-il également un centre à Winnipeg?
En ce qui concerne les centres de cueillette de renseignements similaires à Alert, il y en a seulement trois au Canada. La majorité de mon personnel, toutefois, est situé juste à l'extérieur d'Ottawa.
Quelle est la différence entre la façon dont Masset répond aux besoins en renseignements électromagnétiques et la façon dont Alert répond à ces besoins?
Physiquement, ces deux centres sont identiques, mais le fait qu'ils sont situés dans deux endroits différents leur permet de détecter différentes transmissions, car les transmissions se propagent dans l'atmosphère, et celles qui viennent de l'Ouest sont plus fortes dans l'Ouest que dans l'Est. De plus, si plus d'une station les détecte, et nous espérons que ce sera le cas, cela nous donne la possibilité de déterminer exactement d'où elles proviennent. C'est-à-dire que je sais de quelle direction elles proviennent à partir de mon emplacement, et vous savez de quelle direction elles proviennent à partir de votre emplacement, et elles se croisent à un certain point.
... mais il y a encore un petit groupe pour entretenir l'installation, etc.
Quels effets ont eu sur votre budget les mesures de réduction du déficit et les gels budgétaires? Je sais que le budget du CST a été augmenté. Est-ce que le vôtre a diminué, est demeuré le même ou a augmenté depuis 2010, c'est-à-dire depuis que ces gels et ces compressions ont commencé à avoir des répercussions sur les Forces armées canadiennes?
Le budget alloué aux activités dont je m'occupe dans le domaine des renseignements électromagnétiques est demeuré sensiblement le même, à ma connaissance — je suis à la tête de cette organisation depuis seulement un an — car nos tâches n'ont pas beaucoup changé.
Non, mais puisque les membres de ce groupe ne travaillent plus à Alert, Masset et Gander, mais plutôt à Ottawa, nous n'avons pas à leur verser une prime d'éloignement. Il y a toute une série d'économies qui peuvent se traduire par...
En réponse à la question de M. Harris, vous avez dit que vous vous occupez du renseignement militaire étranger et que le CST s'occupe du renseignement civil étranger. Est-ce que le CST utilise les mêmes installations de collecte ou est-ce que vous lui transmettez les signaux pour qu'il fasse l'analyse du renseignement civil étranger et votre groupe s'occupe d'analyser le renseignement militaire? Ou bien est-ce que vous vous occupez de toute l'analyse puis transmettez au CST le genre d'information dont il a besoin et conservez pour le commandement central les renseignements dont vous avez besoin?
C'est une question à laquelle il est difficile de répondre. Je dirais que lorsque nous recevons l'information brute, elle n'est pas vraiment utile pour quiconque. Il faut l'analyser. Seules les personnes qui en font l'analyse sont en mesure de déterminer quels renseignements sont nécessaires pour brosser un tableau complet de ce qui les intéresse. Dans un monde parfait, nous transmettrions l'information brute et nous laisserions les analystes en tirer les renseignements dont ils ont besoin. Deux personnes peuvent examiner une information et tirer des conclusions différentes parce qu'elles ne cherchent pas la même chose.
Les médias ont fait état de la préoccupation des Canadiens en ce qui concerne la surveillance des téléchargements gratuits d'applications. Est-ce que l'équipement utilisé à Alert et Masset peut permettre d'effectuer une telle surveillance, par exemple pour savoir qui fait quoi et dans quels sites Web?
Non. Comme Masset et Alert sont des endroits très éloignés, nous sommes les seules personnes à y être, alors nous nous concentrons beaucoup sur les signaux transmis par voie aérienne, comme les signaux radio et les radiofréquences. Dans ces trois endroits, on ne s'occupe pas du tout de surveiller ce qui se passe dans Internet.
Y a-t-il des services de soutien spéciaux pour les gens qui vivent dans des endroits aussi éloignés qu'Alert? Est-ce qu'ils sont efficaces? Est-ce que ces personnes vivent un niveau de stress différent des personnes qui habitent ailleurs?
Être posté à Alert est considéré comme être posté — quoique ce ne soit pas tout à fait pareil — en Afghanistan, au Koweït ou un endroit du genre. La rotation du personnel là-bas se fait non pas tous les trois ans, mais bien tous les trois ou six mois, en fonction du poste occupé. Pendant que les gens sont là-bas, nous essayons de leur fournir les mêmes services de communication personnelle dont ils bénéficieraient s'ils étaient déployés à l'étranger. Il s'agit d'un déploiement, mais au sein de notre propre pays, car ils se trouvent aussi loin que s'ils étaient en Europe, en fait plus loin.
Ce qui comporte le plus grand risque, c'est que tout soutien autre que celui qui existe sur place se trouve loin. S'il y a une urgence ici à Ottawa, je peux appeler le 911 et les secours arriveront dans les minutes qui suivent. Si j'appelle à Alert un service équivalant au 911, il faut des heures, voire une demi-journée, avant que les secours les plus proches arrivent, à cause de la distance. Il faut parcourir 4 000 kilomètres en avion à partir d'ici pour se rendre là-bas. Tout le soutien offert à la station est assuré par le groupe de moins de 10 personnes qui se trouve là. C'est comme un mini village qui assure toutes les fonctions et tout est fourni par l'aviation.
Le Groupe des opérations d'information, qui s'occupe notamment de l'exécution du programme des renseignements électromagnétiques, compte environ 900 personnes.
Je vous remercie, colonel. C'est très intéressant. J'ai bien aimé les deux exposés. Vos remarques liminaires ont constitué une bonne introduction pour nous tous, je crois. Elles allaient droit au but. Je vais seulement formuler une brève observation. Nous avions prévu visiter Alert, mais nous n'avons pas pu obtenir l'entière collaboration de tous les partis politiques. Je pense que nous aurions obtenu une réponse à certaines des questions que nous posons aujourd'hui si nous nous étions rendus là-bas afin de mieux comprendre ce que vous faites et d'avoir une meilleure idée des conditions de vie des hommes et des femmes qui sont postés dans le Nord.
Vous avez parlé à deux reprises des communications primaires. Je ne sais pas si vous pouvez en dire plus. Vous avez expliqué que vous avez une seule voie de communication et que vous aimeriez en avoir une seconde dans un monde idéal. Pouvez-vous nous en dire un peu plus long à ce sujet? J'ai remarqué que vous avez mentionné cela à deux reprises. C'est un enjeu à nos yeux.
Nous avons une voie de communication qui va de Alert à l'île d'Ellesmere, qui est couverte de glaciers. C'est un bel endroit, mais il s'agit d'une contrée sauvage, et en plus, les glaciers se déplacent. Plusieurs modes de communication utilisent cette seule voie. Les communications sont relayées par des tours installées sur la cime des montagnes jusqu'à Eureka, et ensuite elles sont captées par plus d'un satellite. Nous avons plusieurs modes de communication, mais une seule voie. En tant que spécialiste des transmissions, je peux dire que différentes voies de communication donnent une redondance et une souplesse plus grandes que celles qu'offrent plusieurs modes de communication utilisant une seule voie, mais c'est très onéreux. Installer des tours à Alert près de l'île d'Ellesmere n'est pas ce qu'il y a de plus facile à faire et assurer leur entretien est également très compliqué. Il n'y a pas d'autres endroits où les installer parce que nous sommes très loin dans le Nord.
Dans un monde parfait, où les ressources ne sont pas limitées, je préconiserais l'établissement d'une voie physique distincte, mais nous avons des voies redondantes.
Étant donné le volume de données que vous recueillez, je présume que vous disposez d'une certaine capacité de transport par voie aérienne à Alert. Est-ce que la station est ouverte à l'année longue ou y a-t-il des périodes durant l'année où il est pratiquement impossible de s'y rendre ou de quitter la station?
Des vols sont prévus toute l'année. Encore une fois, l'aviation pourrait vous en parler, mais je sais qu'il y a certains jours où il est impossible de s'y rendre.
Si les communications primaires sont coupées, nous pourrions essentiellement envoyer là-bas 250 personnes qui s'occuperaient du traitement des données, mais nous ne pourrions pas envoyer ici autant d'information qu'à l'habitude.
Pour revenir aux questions de Mme Murray, elle demande habituellement aux témoins si leur budget a été réduit, et elle est déçue s'il n'a pas été augmenté. Quand vous avez parlé des changements sur le plan opérationnel, vous sembliez dire que les fonds sont dépensés différemment. Vous n'avez pas à commenter ce point, mais c'est ce que j'ai cru comprendre. Il y a eu une réorganisation au sein de votre groupe afin de réaliser des économies. Je suis heureux de constater que le NPD se soucie occasionnellement des finances. Arrive-t-il souvent...
Une voix: Toujours.
M. John Williamson: Toujours, en effet, sauf lorsque vous hurlez à la Chambre des communes.
Il semble qu'il y ait eu un changement opérationnel afin de regrouper des activités dans le sud pour accroître sans doute la rentabilité et rapatrier certaines ressources, tout en faisant un meilleur usage de la technologie, en particulier des technologies de l'information.
Monsieur le président, en plus d'accroître la rentabilité, cela facilite la vie des gens. Si vous pouvez rentrer chez vous tous les soirs, c'est une bonne chose.
Je veux d'abord remercier le colonel Moritsugu de sa présentation.
Je dois mentionner que les renseignements électromagnétiques sont un domaine que je ne connais pas particulièrement. Pourriez-vous me dire plus précisément ce que vous entendez par des renseignements électroniques obtenus par des émissions électromagnétiques qui ne relèvent pas de communications?
Nous interceptons des signaux afin d'en tirer toutes les informations que nous pouvons. Habituellement, les gens envoient principalement des signaux afin de communiquer. Quand je parle de signaux, je parle d'ondes radioélectriques. Si quelqu'un envoie une transmission radio, il le fait généralement pour communiquer avec quelqu'un d'autre. À cause de l'emplacement d'Alert, il est souvent possible de recevoir ce même signal et d'espérer en retirer quelque chose d'utile, car c'est ça notre travail.
En fait, ce n'était pas exactement le sens de ma question. Je veux savoir ce qu'on entend par des émissions électromagnétiques qui ne sont pas des communications.
Une transmission non liée aux communications est un signal envoyé par quelqu'un, mais qui ne constitue pas un message. Le meilleur exemple serait une émission radar, comme un avion pourrait envoyer. Il ne s'agit pas d'un message; il s'agit simplement de l'envoi d'un signal qui est retourné.
Merci beaucoup. C'est exactement ce que je cherchais à savoir.
Par ailleurs, vous avez parlé brièvement des contraintes physiques de votre environnement de travail. Elles sont certainement assez impressionnantes.
Avez-vous constaté que des impacts liés aux changements climatiques pouvaient rendre votre travail un peu plus difficile? Est-ce que des changements dans votre façon de travailler dans l'environnement arctique pourraient être dus aux changements climatiques?
En ce qui concerne les changements climatiques, Alert est tellement éloigné dans le nord que nous n'avons pas encore observé... Les changements au niveau de la paroi de la banquise, par exemple, n'ont eu aucun effet.
J'imagine que, dans votre cas, on peut dire que vous avez de la chance.
Dans votre présentation, vous avez parlé brièvement des contributions directes de votre organisation au NORAD. Pourriez-vous nous donner un peu plus de détails à ce sujet?
Il est difficile pour moi d'être plus précis, mais je peux dire que ce que nous essayons de faire, c'est de signaler les intentions d'autres personnes et leurs capacités.
Si on peut le résumer de cette façon, c'est donc principalement un rôle de partage d'informations.
Vous avez mentionné que vous participiez parfois aux opérations de recherche et sauvetage à l'intérieur du pays. J'ai compris qu'il s'agissait en grande partie d'essayer de trouver des signaux liés à la triangulation, mais j'aimerais savoir de quelle façon et à quel moment on fait appel à vos services.
D'autres services ou le centre conjoint de coordination de sauvetage font appel à nous lorsqu'il n'y a plus de contact avec un navire ou un avion et qu'on le croit perdu. Notre rôle consiste à repérer son signal radio et à essayer de le trianguler pour avoir une idée de l'endroit où il se trouve. Parfois, comme nous sommes équipés de très bons récepteurs, il est possible pour nous d'entendre des signaux que d'autres ne peuvent pas entendre. Par exemple, une station de base ou un aéroport peut avoir perdu le contact avec un avion ou un navire. Les gens là-bas continuent de parler, mais personne ne les entend. Ils nous demandent alors d'écouter, et nous arrivons souvent à capter les signaux, puis nous constatons que l'avion ou le navire n'est pas perdu, c'est tout simplement qu'il ne peut plus transmettre de communications.
En 2014, par exemple, on a demandé notre aide à cinq reprises seulement. Dans trois de ces cas, il n'y avait pas d'urgence, mais on a pu déterminer qu'une personne parlait, mais qu'il n'y avait pas de réponse à l'autre bout parce que les gens ne pouvaient pas l'entendre. Nous avons pu entendre ces gens et constater qu'il n'y avait pas d'urgence. À deux reprises, nous avons réussi à comprendre qu'il y avait une urgence et à déterminer où se trouvaient les personnes approximativement, ce qui a facilité la tâche de l'équipe de recherche et sauvetage.
Comme vous disposez de plusieurs stations, pouvez-vous participer à des opérations sur le territoire canadien dans son ensemble?
Sur le terrain, interagissez-vous avec les intervenants locaux qui dirigent les opérations de recherche et sauvetage ou avec d'autres services des Forces canadiennes?
C'est exact. Les demandes et nos réponses passent par le centre conjoint de coordination de sauvetage des Forces canadiennes, alors nous ne travaillons pas directement avec les gens sur le terrain.
Est-ce que vous veillez à ce qu'ils aient tout ce qu'il faut pour garder le moral, pour communiquer avec leur famille et pour diminuer leur stress dans toute la mesure possible, surtout lorsqu'ils sont postés à Alert ou des endroits semblables?
Comme la Station Alert est très grande, que l'effectif y a été réduit et qu'elle existe depuis plus de 50 ans, elle est assez bien équipée. On y trouve encore des disques, qui remontent à une certaine époque, mais il est possible de capter une station de radio et il y a également des téléviseurs. On peut même avoir accès à Internet. Il est aussi possible de communiquer avec sa famille. Puisque le personnel a été réduit, tout le monde possède maintenant sa propre chambre, ce qui est important lorsqu'on est déployé.
Les gens peuvent ainsi fonctionner normalement, et vous pouvez garantir aux Canadiens qu'ils sont en bonne santé autant sur le plan physique que psychologique et que, par conséquent, ils sont tout à fait aptes à exercer leurs fonctions.
En fait, monsieur, j'ai deux raisons pour me soucier de mon personnel: premièrement, parce que je suis un être humain, je me préoccupe de leur sort, et deuxièmement, parce que, comme vous l'avez dit, j'ai besoin qu'ils soient tout à fait aptes à exercer leurs fonctions.
Je voulais seulement faire des liens, car il y a eu beaucoup de digressions. Il y a certaines raisons pour lesquelles nous devons savoir ces choses.
Quelqu'un comme moi qui ne connaît rien à propos de l'électronique, mais qui regarde beaucoup d'émissions de science-fiction se demande... Tout cela coûte très cher. J'espère que le Canadien moyen ne trouvera pas notre étude trop ennuyante, car elle lui montre que tout le monde ici présent se préoccupe de la défense non seulement de notre pays, mais aussi du continent... Établissons-nous des partenariats avec, par exemple, le NORAD? Nous sommes tellement liés au NORAD. Savez-vous si, pour certaines communications — puisque vous oeuvrez dans ce milieu —, nous mettons en commun des ressources et si nous envisageons d'utiliser des satellites qui tournent autour de la Terre dans ce sens-ci plutôt que dans ce sens-là ou qui restent stationnaires au-dessus de la Terre? Est-ce que cette option existe?
Il n'est pas possible qu'un satellite soit stationnaire au-dessus de la Terre. Il existe maintenant des satellites circumpolaires. Dans le cas des satellites GPS, par exemple, la constellation est circumpolaire. Je ne suis pas un expert, mais je crois que les Forces canadiennes et le gouvernement du Canada souhaitent dans l'avenir nous doter de ce genre de satellite.
On a aussi posé une question qui est liée... Ai-je raison de dire que vous seriez les premiers, quand il s'agit de défendre l'Amérique du Nord, à découvrir qu'une personne cherche à commettre un acte au-dessus de la calotte glacière qui pourrait menacer le Canada? Seriez-vous les premiers à le découvrir?
Je pense que si la personne en parle par radio, nous voudrions être les premiers à l'entendre. Il existe d'autres moyens, mais je le répète, je ne suis pas un expert là-dessus.
Autrement dit, si des personnes lancent un missile et qu'elles envoient des signaux, vous capteriez quelque chose qui vous dit qu'il se passe une chose qui n'est pas normale ni habituelle.
En ce qui concerne les aéronefs, je sais qu'on parle de remplacer notre flotte. Pour ce qui est de la communication à bord des appareils, savez-vous s'ils ont la capacité de communiquer avec vous?
Nous avons entendu des représentants de différentes compagnies qui sont prêtes à fabriquer des chasseurs à réaction nous parler de la capacité des appareils de communiquer entre eux et de communiquer instantanément avec des installations qui reçoivent des signaux. C'est pourquoi je vous ai posé cette question.
En tant que membres du comité, nous avons acquis un peu de connaissances sur beaucoup de choses, mais il n'y a aucun domaine que nous connaissons à fond. Dans le contexte du NORAD, pouvez-vous me dire quels rapports nous entretenons avec le nord des États-Unis, par exemple l'Alaska? Je crois savoir qu'il existe là-bas des stations similaires à Alert. Existe-t-il une interopérabilité entre vous et elles?
Il existe certes une interopérabilité parce que nous collaborons pour défendre le continent. Toutefois, il n'y a pas d'interopérabilité entre l'Alaska et Alert. Il y en a une entre nos organisations centrales.
Puisqu'il est question d'information électronique, je me demande notamment si vous avez constamment accès à cette information. Est-ce que les conditions atmosphériques ont un effet sur la constance ou la qualité des signaux? Par exemple, est-ce que les aurores boréales vous empêcheraient de capter quoi que ce soit?
Oui, monsieur. Les hautes fréquences, les signaux radio de longue portée des radios amateurs, sont considérablement perturbées par les conditions atmosphériques. Un grand nombre des signaux se répercutent sur l'atmosphère, et la couche sur laquelle ils se répercutent varie en fonction notamment des éruptions solaires. Tout le monde, pas seulement nous, est touché par cela, et c'est ce qui explique que parfois nous pouvons capter un signal, particulièrement sur la radio AM, qui provient du centre des États-Unis tandis que nous conduisons en direction de Toronto. De même, il arrive que nous ayons de la difficulté à capter une station de Kingston lorsque nous passons par là. Le même principe s'applique pour nous, sauf qu'on parle de distances plus grandes.
Comme vous guettez les signaux étrangers, vous ne surveillez pas le Canada, mais plutôt le monde. Vous avez indiqué qu'il n'y avait aucune coopération avec nos alliés, ce qui veut dire que l'OTAN ne participe pas à ces activités et ne peut prendre connaissance de vos signaux ou de l'information...
Pour compléter la question de ma collègue, Mme Michaud, dans les renseignements électroniques qui ne relèvent pas des communications, incluez-vous aussi toutes les opérations de brouillage et de warfare que pourrait mener un ennemi? Cela entre-t-il dans ce que vous excluez des communications s'il s'agit juste de brouillage?
L'embrouillage ou le chiffrement des communications militaires est monnaie courante parce que toutes les armées, quel que soit le pays, souhaite cacher leurs activités des autres qui, comme nous, aimeraient bien les connaître. Donc...
Incluez-vous, dans les émissions électromagnétiques qui ne relèvent pas des communications, le brouillage nocif provenant de sources extérieures sur des installations canadiennes? Je pense que ma question n'est pas claire.
Oui, monsieur. Le brouillage ferait partie de nos renseignements électroniques. Si nous nous y intéressions, c'est parce que ce serait très important et aurait un sens à nos yeux.
M. Tarik Brahmi: Et ce serait défini comme étant une non-communication.
Oui. Avant que la séance ne soit levée, j'aimerais poser une dernière question au colonel.
Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir, surtout compte tenu du peu de préavis, et de nous avoir donné le contexte qui nous sera utile lorsque nous prendrons position dans notre rapport sur la défense de l'Amérique du Nord.
Vous avez parlé de vos responsabilités au Canada et de nos rapports avec le NORAD, ainsi que la relation bilatérale que nous entretenons avec les États-Unis. Vous avez parlé de trois bases, une à Alert, une à Gander, à Terre-Neuve, et une dernière à Massett, en Colombie-Britannique. Avons-nous la capacité de surveiller toutes les ondes et de capter les signaux, ou comptons-nous sur les Américains pour nous donner un coup de main en Alaska?
Nos sites situés sur notre territoire nous permettent de couvrir nos frontières ainsi que les zones d'approche vers l'Amérique du Nord. Dans l'ensemble, je vous dirais que ces trois sites nous suffisent bien.
Il est donc possible de recueillir tout ce que vous recherchez à partir de ces trois grandes zones.
Je sais que vous ne pouvez pas vous prononcer sur certains sujets, mais s'il y a des sous-marins sous la glace, le seul moment qu'on peut réellement les entrevoir ou les entendre c'est lorsqu'ils tentent de communiquer avec leur base.
Merci beaucoup, colonel, pour votre présence aujourd'hui et pour votre travail, qui est soumis à des contraintes que nous connaissons bien.
Chers collègues, j'aimerais vous prévenir qu'on m'a demandé de nommer les témoins qui comparaîtront la semaine prochaine.
Lundi, nous entendrons le major-général Coates, commandant adjoint des opérations continentales du COIC, et le brigadier-général Loos, commandant de la Force opérationnelle interarmées du Nord.
Mercredi, nous entendrons le contre-amiral Newton, commandant de la Force opérationnelle interarmées de l'Atlantique et commandant des Forces maritimes de l'Atlantique.