Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-10 , maintenant à l'étape de l'étude en comité après un vote en deuxième lecture. Nous reprenons nos travaux.
J'aimerais faire une précision. Durant la ronde de questions et réponses, veuillez signaler à qui vous posez votre question. Cela facilitera beaucoup le déroulement des échanges.
Je m'adresse maintenant à nos invités. Si vous voulez intervenir sur un sujet soulevé, vous pouvez utiliser la fonction « lever la main », si vous le souhaitez, ou faire un signe de la main. Le président, en l'occurrence moi, n'interrompra pas la discussion pour vous donner la parole. Vous devez attirer l'attention de la personne qui pose la question.
Nous allons maintenant commencer par les déclarations préliminaires de cinq minutes.
Nous accueillons M. Richard Stursberg. De Corus Entertainment, nous entendrons Troy Reeb. Nous accueillons également Geneviève Côté et Martin Lavallée, de la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique.
Nous allons d'abord entendre M. Stursberg.
Monsieur, vous avez cinq minutes.
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Bonjour à tous et merci de m'avoir invité. Je suis ravi d'être ici.
Je m'appelle Richard Stursberg. Je suis l'auteur, avec Stephen Armstrong, de The Tangled Garden: A Canadian Cultural Manifesto for the Digital Age. Nous avons eu l'honneur que notre livre soit sélectionné pour le prix Donner, qui est décerné au meilleur livre de politique publique écrite par un Canadien. Le livre traite de bon nombre de questions dont vous êtes saisis dans le cadre de votre étude du projet de loi C-10.
J'ai travaillé dans le domaine de la radiodiffusion pendant de nombreuses années. Au cours de ma carrière, j'ai été chef des services anglais à CBC/Radio-Canada, président du Fonds canadien de télévision, directeur général de Téléfilm Canada, président de Shaw Direct et chef de la direction de l'Association canadienne de télévision par câble. Je suis maintenant à la retraite et je ne représente personne d'autre que moi-même.
Dans un passé plus lointain, j'ai été sous-ministre adjoint en matière de culture et de radiodiffusion. En 1990, j'ai été l'un des architectes de l'actuelle Loi sur la radiodiffusion. C'est donc un plaisir d'avoir l'occasion de m'entretenir avec vous de la nouvelle loi.
Je commence en posant une simple prémisse. La raison d'être de la Loi sur la radiodiffusion, des règlements connexes du CRTC, des crédits d'impôt et du Fonds des médias du Canada est de promouvoir la culture canadienne. Nous dépensons tout cet argent et toute cette énergie pour faire en sorte que les Canadiens puissent se reconnaître et voir leurs histoires à la télévision. Les objectifs du système sont culturels et non industriels ou économiques.
Dans le cadre de l'étude du projet de loi C-10 aujourd'hui, il ne retenir que les principes fondamentaux de la future politique de radiodiffusion doivent être le soutien à la culture canadienne et l'équité de traitement. Ce dernier principe exige que les obligations imposées aux radiodiffuseurs canadiens, comme CTV et Global, doivent également s'appliquer aux diffuseurs étrangers comme Netflix et Amazon. Parallèlement, les avantages dont jouissent les radiodiffuseurs canadiens, quels qu'ils soient, doivent être étendus aux diffuseurs étrangers qui exercent leurs activités dans notre pays.
Aujourd'hui, j'aimerais décrire les quatre piliers de la télévision canadienne: la propriété canadienne, l'obligation de dépenses, le système de subventions et la définition du contenu canadien.
Premièrement, en vertu de la loi actuelle, les sociétés de radiodiffusion qui exercent leurs activités au Canada doivent être la propriété et sous le contrôle de Canadiens. On s'est beaucoup demandé si le projet de loi C-10 supprimait cette exigence. L'enjeu juridique est largement théorique, puisque cette obligation a été abandonnée il y a quelques années. Au cours de la dernière décennie, des diffuseurs étrangers comme Netflix et Amazon n'ont cessé d'offrir des émissions de télévision aux Canadiens, même si ces entreprises n'appartiennent pas à des intérêts canadiens. Il n'y a aucune chance qu'elles soient un jour forcées de devenir canadiennes.
Par souci d'équité, vous devriez peut-être placer les diffuseurs canadiens et étrangers sur un pied d'égalité, en amendant le projet de loi C-10 de manière à supprimer officiellement l'exigence relative à la propriété canadienne. Ne pas le faire reviendrait à désavantager les radiodiffuseurs canadiens dans leur propre marché.
Deuxièmement, les radiodiffuseurs canadiens doivent consacrer un certain pourcentage de leurs recettes brutes à la production et la commande d'émissions de télévision canadiennes. Le projet de loi C-10 étend, avec raison, cette obligation aux diffuseurs étrangers, tout en laissant le CRTC déterminer le pourcentage approprié. Si le Conseil fixe le taux à 30 % pour CTV et Global, comme c'est actuellement le cas, il devrait alors imposer le même taux à Netflix. Si le taux est fixé à 20 % pour Netflix, il devrait être le même pour les radiodiffuseurs canadiens. L'équité est essentielle. Vous devez vous assurer que le principe d'équité sous-tend clairement le projet de loi C-10.
Troisièmement, le système de subventions pour la production d'émissions canadiennes est coûteux et complexe. Il comprend le Fonds des médias du Canada, des crédits d'impôt fédéraux et Téléfilm Canada. L'an dernier, ces subventions ont coûté aux contribuables canadiens plus de 1,2 milliard de dollars. Elles sont uniquement offertes pour la production d'émissions canadiennes, c'est-à-dire produites par des sociétés de production appartenant à des Canadiens et employant des Canadiens dans les postes clés de création. Si nous obligeons les diffuseurs étrangers à dépenser 20 à 30 % de leurs revenus bruts pour l'achat d'émissions canadiennes, ils devraient alors avoir accès aux subventions. Là encore, le principe d'équité doit prévaloir.
Le système de subventions en soi est terriblement complexe et coûteux à administrer. Une blague circule depuis longtemps à savoir que les producteurs canadiens ne sont pas des experts de la production d'émissions, mais qu'ils n'ont pas leur pareil pour naviguer dans le système. Pour régler ce problème, il a été question de fusionner Téléfilm Canada et le Fonds des médias du Canada en une seule organisation. Ce n'est pas meilleure solution. Il serait de beaucoup préférable de liquider les deux entités et de transférer leurs ressources financières dans un crédit d'impôt bonifié. On aurait ainsi un système beaucoup plus simple, plus prévisible, mieux adapté aux fluctuations du marché et beaucoup moins coûteux à administrer. Dans notre livre The Tangled Garden, nous estimons que cette approche permettrait d'économiser 60 millions de dollars par année en frais administratifs.
Vous pourriez envisager d'amender le projet de loi C-10 à cette fin.
Le quatrième et dernier point, c'est que tous ces arrangements reposent sur la définition de ce qui constitue un « contenu canadien ». Durant des décennies, le contenu canadien a été défini selon une échelle en 10 points, où des points sont attribués au talent créatif intervenant dans la production de l'émission. Le problème, c'est que tant que des Canadiens y travaillent, l'émission pouvait être tout à fait étrangère sur le plan culturel. Elle pouvait être campée dans un autre pays, avec des personnages étrangers et une histoire étrangère. Il y a eu beaucoup de cas dans le passé. Toronto peut devenir Chicago dans une émission où des personnages américains se battent pour éviter de perdre leur assurance-maladie.
Les producteurs canadiens ont toujours subi de fortes pressions pour camoufler le côté canadien de leurs émissions afin que celles-ci puissent se vendre aux États-Unis, ce qui les rend plus rentables et plus faciles à financer.
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Je vous remercie, monsieur le président.
[Français]
Je souhaite un bon après-midi aux membres du Comité.
[Traduction]
Je m'appelle Troy Reeb. Je suis premier vice-président des réseaux de radiodiffusion de Corus Entertainment.
Au nom de nos 3 500 employés de partout au pays, je tiens à vous remercier de nous avoir invités à discuter du projet de loi C-10, que nous exhortons le Parlement à adopter sans délai.
Avant d'en venir au projet de loi, je vais vous donner un aperçu de notre société. Nous sommes très fiers d'être le fer de lance du Canada dans le domaine des médias et du contenu. Nous possédons Corus Studios, une entreprise de pointe de production et de distribution d'émissions canadiennes sur le mode de vie; Nelvana, un studio d'animation de haut calibre; Kids Can Press, le plus important éditeur indépendant de livres jeunesse du Canada.
[Français]
Enfin, Toon Boom, notre division basée à Montréal, crée des logiciels pour les studios internationaux.
[Traduction]
Au total, notre contenu canadien est exporté dans 160 pays, mais les émissions diffusées ici au Canada constituent notre principale source de revenus. Nous exploitons 15 stations de télévision, 39 stations de radio et 33 chaînes spécialisées, en anglais comme en français, notamment YTV, Séries Plus et Food Network Canada. Nous sommes fiers d'être le siège de Global News, l'un des plus importants organes de presse du Canada, qui diffuse des milliers d'heures de nouvelles locales, régionales et nationales chaque année.
C'est donc dire que Corus est donc une entreprise exclusive de médias et de divertissement. Nous n'avons aucun actif de câblodistribution ou de télécommunications pour nous financer. Nous sommes une société indépendante cotée en bourse qui doit soutenir la concurrence dans un marché mondial du divertissement de plusieurs billions de dollars. Nous pensons avoir la vision, l'équipe et l'expertise nécessaire pour bâtir une puissance médiatique internationale ici même au Canada, mais les meilleurs cerveaux et les meilleures idées ne peuvent rien faire contre une réglementation désuète. C'est pourquoi le travail que vous faites aujourd'hui est si important.
Vous avez déjà entendu de nombreux témoins au sujet du projet de loi C-10 et nul doute que chacun d'entre eux a un intérêt particulier dans le système de radiodiffusion canadien, mais nous ne devons pas oublier que la Loi sur la radiodiffusion énonce en fait un ensemble de règles qui s'appliquent aux radiodiffuseurs qui exercent leurs activités au Canada. Cette loi autorise l'application d'un ensemble de règles, de politiques, de conditions et de codes touchant tous les aspects de nos activités et qui nous dictent combien nous devons dépenser sur certains types de spectacles, à quel moment ces spectacles peuvent être diffusés, quels types de chansons nous pouvons diffuser dans nos stations de radio, combien d'espaces publicitaires nous pouvons vendre aux annonceurs et de qui nous pouvons acheter nos émissions. Et je pourrais continuer encore et encore.
La plupart de ces règles ont été conçues pour une industrie qui n'existe plus, dans laquelle les radiodiffuseurs autorisés avaient un accès privilégié aux auditoires canadiens. Ce n'est plus le cas. Nous faisons notre possible pour nous adapter et soutenir la concurrence, mais trop souvent, les règles désuètes en matière de radiodiffusion nous empêche de le faire. Après plus de 10 années d'escalade de la concurrence étrangère non réglementée, cinq années de consultations et une pandémie désastreuse, nous ne pouvons plus attendre.
Le projet de loi C-10 n'est pas parfait, mais il corrige une grosse lacune en appliquant la réglementation aux diffuseurs numériques étrangers, un premier pas pour donner des chances égales aux médias canadiens. Pour nous, c'est une raison suffisante pour appuyer le projet de loi.
Je veux être clair. Les nouveaux joueurs ne devraient pas être tenus de se plier aux anciennes règles. Le niveau de réglementation actuellement appliqué aux radiodiffuseurs canadiens est tout simplement intenable dans un marché de libre concurrence. Dorénavant, tous les joueurs, qu'ils soient étrangers ou canadiens, numériques ou traditionnels, doivent respecter un ensemble d'obligations plus flexibles et moins coûteuses que celles actuellement imposées aux radiodiffuseurs canadiens. Tous les joueurs devraient pouvoir contribuer au système de diverses façons favorables à leurs auditoires et à leurs entreprises.
Pour Corus, les émissions d'information sont un bon exemple. Nous sommes très fiers de notre travail à Global News, et nous sommes les seuls à offrir des nouvelles par le biais de stations locales partout au Canada que les services étrangers de diffusion en continu ne peuvent reproduire, mais la diffusion de nouvelles locales est une entreprise difficile et coûteuse. Malgré leur popularité sur toutes les plateformes, ces émissions sont entièrement tributaires des revenus publicitaires qui sont de plus en plus siphonnés par les géants étrangers du Web.
Depuis de nombreuses années, nous compensons nos pertes liées aux émissions d'information par interfinancement interne à partir des revenus générés par des émissions de divertissement plus rentables, mais notre capacité de le faire s'effrite très rapidement. Les diffuseurs numériques étrangers siphonnent ces auditoires rentables, sans obligation de leur part de soutenir, en contrepartie, le contenu canadien ou les communautés canadiennes. Si cela continue, nous serons bientôt obligés de faire des choix difficiles, comme d'autres diffuseurs canadiens l'ont déjà fait.
Dorénavant, les émissions d'information devraient plus être une obligation parmi les nombreuses autres que nous avons, mais elles devraient être reconnues comme notre principale contribution au service public. En élargissant notre marge de manoeuvre pour être concurrentiels dans d'autres secteurs de notre entreprise, nous aurions un moyen plus durable d'interfinancer les émissions d'information à l'avenir.
Comme je l'ai dit, ce projet de loi n'est pas parfait. Dans notre mémoire, nous proposons des amendements pour l'améliorer.
Nous exhortons également le Comité de ne pas modifier le projet de loi pour conférer au CRTC le pouvoir de réglementer les transactions privées entre diffuseurs et producteurs. Une telle mesure profiterait davantage aux producteurs qui font actuellement des profits inégalés aux dépens des diffuseurs canadiens qui, eux, subissent des baisses inégalées. Il y a six ans, le CRTC a rejeté cette approche et il n'y a aucune raison impérieuse de faire marche arrière maintenant.
En conclusion, la politique canadienne de radiodiffusion a toujours pu compter sur de solides radiodiffuseurs canadiens. Nous voulons continuer à créer des emplois au Canada et à servir les collectivités canadiennes, mais nous ne pouvons tout simplement pas le faire dans un environnement réglementaire qui autorise les joueurs étrangers à engranger des profits à l'extérieur du Canada, pendant que nous, Canadiens, nous sommes liés par toutes ces obligations.
En faisant de l'équité entre les acteurs étrangers et nationaux une priorité et en envoyant le message que les obligations doivent être adaptées aux circonstances individuelles, nous croyons que le projet de loi C-10 peut nous aider à entreprendre la difficile tâche de bâtir un système de radiodiffusion plus équitable et plus durable, et nous vous exhortons à aller de l'avant.
Je vous remercie.
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Bonjour. Nous nous adressons à vous aujourd'hui au nom de la SOCAN. Nous représentons les droits sur les œuvres musicales de 160 000 membres, auteurs-compositeurs, compositeurs de musique à l'image et éditeurs musicaux. En bref, nous accordons des licences et percevons les droits découlant de celles-ci auprès, notamment, des diffuseurs traditionnels, les radios et les télévisions, et des plateformes numériques audio et audiovisuelles pour l'utilisation de la musique dans le cadre de leurs affaires.
Nous voyons donc les deux perspectives de la valeur économique de la musique, soit la valeur pour les titulaires de droits et la valeur pour les utilisateurs de musique. Il nous semblait important de venir témoigner devant vous pour faire valoir quelques points d'éclairage.
D'entrée de jeu, disons que, comme plusieurs acteurs de l'écosystème musical, nous recevons positivement le projet de loi . Nous croyons que soumettre les plateformes numériques aux mêmes conditions législatives et réglementaires que celles applicables à tous les diffuseurs canadiens met fin à la distinction que le milieu de la musique décrie depuis des années.
[Traduction]
Lorsque nous avons comparé les répartitions faites aux titulaires de droits musicaux canadiens à ce qui a été distribué aux auteurs étrangers, en ce qui concerne l'utilisation dans les médias, nous en sommes arrivés à une conclusion dévastatrice. Dans les médias numériques, les redevances versées aux créateurs canadiens étaient trois fois inférieures à celles liées aux utilisations dans les médias traditionnels. Le pourcentage moyen pour le traditionnel était de 33,9 % au cours des six dernières années...
Lorsque nous avons comparé les répartitions faites aux titulaires de droits musicaux canadiens à ce qui a été distribué aux auteurs étrangers, en ce qui concerne l'utilisation dans les médias, nous en sommes arrivés à une conclusion dévastatrice. Dans les médias numériques, les redevances versées aux créateurs canadiens étaient trois fois inférieures à celles liées aux utilisations dans les médias traditionnels. Le pourcentage moyen pour le traditionnel était de 33,9 % au cours des six dernières années, tandis que dans le domaine numérique, cette moyenne n'a pas atteint 10 %. Plus alarmant encore, lorsque nous nous sommes concentrés uniquement sur les médias audiovisuels, le pourcentage moyen de redevances versées aux auteurs canadiens pour des utilisations dans des médias traditionnels est demeuré supérieur à 30 %, mais il dégringole à un maigre 6,8 % sur les plateformes numériques. C'est presque cinq fois moins.
À la lumière de ces chiffres, nous ne pouvons qu'encourager le gouvernement canadien et le Parlement à poursuivre dans sa volonté d'inclure les géants du Web dans la sphère d'application de la Loi sur la radiodiffusion pour que ceux-ci aient des obligations de découvrabilité et de promotion du contenu canadien et qu'ils participent, comme le font leurs équivalents traditionnels, au soutien financier des programmes et fonds qui appuient la création de musique canadienne.
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La SOCAN s'occupe principalement de questions de droit d'auteur, c'est pourquoi nous portons une attention particulière à toute modification de la Loi sur le droit d'auteur qui affecterait les droits de nos membres ou jouerait un rôle perturbateur dans nos négociations avec les utilisateurs. Par conséquent, les modifications que propose le projet de loi C-10 d'introduire dans la Loi sur le droit d'auteur en ce qui concerne les enregistrements éphémères, qui ajouteraient les entreprises en ligne à cette exception, sont inacceptables et vont à l'encontre de l'intention de ce projet de loi.
Un enregistrement éphémère est une copie d'un programme réalisée par un diffuseur de télévision, par exemple, pour lui permettre de diffuser le même programme à la même heure de la journée dans différents fuseaux horaires. L'amendement proposé vise à étendre cette exception aux entreprises en ligne, ce qui, d'après notre expérience, ne devrait pas être le cas. Dans le domaine numérique, vous pouvez toujours choisir ce que vous regardez au moment de votre choix. Ainsi, cela élargit le champ de ce qui était généralement compris et applicable à ce jour. À notre connaissance, ni les entreprises en ligne ni les télédiffuseurs ne se sont prévalus de cette exception et ne l'ont jamais évoquée lors d'une négociation.
Comme nous l'avons vu, lorsqu'une pléthore d'exceptions a été introduite dans la loi en 2012, ces exceptions ont déclenché ce que nous avions prévu: la législation par voie de litige. Nous dépensons beaucoup d'argent et de temps pour défendre toute interprétation trop large de ces exceptions. Également, les géants de la technologie ont résisté à nos efforts pour leur faire payer la juste valeur pour nos droits, puisqu'ils prétendaient que telle ou telle exception pouvait être interprétée en leur faveur.
L'histoire ne doit donc pas se répéter dans le cadre de ce projet de loi qui vise justement à fournir un outil aux créateurs pour générer des revenus. La modification proposée à la Loi sur le droit d'auteur est tout sauf un statu quo. Pour être vraiment dans le statu quo, l'exception éphémère doit absolument rester telle quelle, limitée à la radio et à la télévision, ou préciser clairement que ces dispositions n'incluent pas les entreprises en ligne.
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Ce qui est essentiel, d'après moi, c’est que le cœur du projet de loi — qui exigera des diffuseurs étrangers comme Netflix, Amazon et Disney+ une contribution similaire à celle des diffuseurs canadiens actuels — améliorera considérablement l’arrosage du jardin.
Par exemple, Netflix empoche actuellement — si l'on simplifie les calculs — un peu plus d’un milliard de dollars par an au Canada. Si l'entreprise devait dépenser, pour des émissions canadiennes, le même montant que Global, soit 30 % de son revenu brut, elle devrait injecter 300 millions de dollars dans la production d’émissions.
Et ce n’est qu’une des multinationales de la diffusion. Si on les regroupe, comme le ministre du Patrimoine l’a fait en indiquant combien d’argent en plus serait injecté dans le système — et il a tout à fait raison —, la somme sera très importante. Toutefois, si on ne le fait pas, le problème sera exactement comme je le disais. La situation financière des grands diffuseurs au Canada est extrêmement difficile, et ils dépenseront inévitablement de moins en moins pour la programmation canadienne.
Nous allons assister à un grand changement dans le système. La production canadienne sera de plus en plus financée par les diffuseurs étrangers au Canada, et de moins en moins par les diffuseurs canadiens traditionnels.
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Eh bien, je ne pense pas que ce projet de loi réduit le choix; il l'augmente plutôt. Ce qui se passera, c’est que lorsque les diffuseurs Internet seront obligés de payer de la même façon que Global et Corus sont obligés de le faire pour le développement de contenu canadien, il y aura plus de contenu canadien et plus de choix d'émissions canadiennes, pas moins. Franchement, je ne comprends pas l’argument. Je pense que ce que nous voulons, c’est un plus grand choix d'émissions canadiennes.
Je vais peut-être reprendre une petite chose que Troy vient de dire. La programmation est également traitée différemment sur le plan des subventions accordées aux émissions de télévision. Les subventions les plus généreuses vont aux documentaires et aux dramatiques, mais pour les nouvelles, il n'y a aucune subvention alors que, comme Troy l’a dit et comme tout le monde le sait, elles subissent d’énormes pressions, surtout les nouvelles locales, et que des stations de télévision ferment partout au pays.
Nous nous trouvons dans un système de subventions extrêmement particulier, qui favorise la comédie mais pas les nouvelles, qui en fait, sont absolument fondamentales pour notre démocratie. L’ironie, c’est qu'on a décidé d'accorder des subventions aux journaux, mais pas aux services de nouvelles télévisées. À l’heure actuelle, toutes les stations de nouvelles locales sont en train de se noyer.
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Je vous remercie de votre question, monsieur Champoux.
Je vais y répondre en anglais.
[Traduction]
J'estime que nous pouvons être concurrentiels sur le marché international. Nous pouvons créer des vedettes québécoises et des vedettes canadiennes. Je crois que sur le marché québécois, il est possible d’avoir des incitatifs et une certaine réglementation pour exiger une solide programmation originale en français.
Pour ce faire, nous devons avoir des règles du jeu équitables. Il ne suffit pas de taxer les diffuseurs Internet étrangers ou de leur imposer des exigences en matière de programmation équivalentes aux nôtres; il faut aussi éliminer les règlements anticoncurrentiels qui s’appliquent actuellement aux entreprises canadiennes, et dont certains nous lient les mains en ce qui concerne le genre d'émissions que nous pouvons faire et la façon dont nous pouvons les vendre dans le monde entier.
Nous devons non seulement avoir des règles du jeu équitables en ce qui concerne le montant que nous devons investir dans la programmation canadienne, mais aussi pour ce qui est du genre d'émissions dans lesquelles nous voulons investir afin d'attirer le meilleur auditoire au pays et le meilleur acheteur à l’étranger.
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Oui c'est ça. Ce genre de production ne raconte pas nos histoires et ne montre pas nos gens. Il en est ainsi depuis toujours: lorsque des Canadiens font des émissions, ils déguisent souvent Toronto en Chicago ou en une autre ville.
Même si vous prenez une série comme Schitt’s Creek, qui est une comédie très réussie et brillamment réalisée, vous ne pourriez pas vous douter qu'elle est canadienne. Il n'y a pas moyen de le savoir. Il n'y a aucune allusion au fait que les gens sont Canadiens et que l'histoire se déroule au Canada. Comme de plus en plus de fonds destinés à financer les émissions canadiennes proviennent essentiellement de grands diffuseurs étrangers, le danger que cela se produise de plus en plus, à mon avis, augmente.
Je pense que nous devrions utiliser le système de points du Royaume-Uni. Ce système ne s'appuie pas sur l'emploi, mais sur la culture. Très brièvement, c'est un système de 35 points, qu'on appelle le « critère de contenu culturel ». Des points sont attribués si l'histoire se passe au Royaume-Uni, si les personnages sont Britanniques, si le sujet, la créativité, le patrimoine, etc. sont britanniques. Sur les 35 points, seulement huit sont réservés à l'équipe créative.
Un tel système garantit que lorsque des fonds publics sont dépensés — qu'il s'agisse de crédits d'impôt, du Fonds des médias du Canada ou de l'argent qu'un diffuseur est tenu de dépenser —, on obtient des émissions qui nous concernent réellement, de la même manière que le système britannique garantit que les émissions réalisées avec l'argent des contribuables britanniques sont réellement britanniques.
Ce qui est intéressant, c’est que le système britannique n’a aucunement réduit l’attrait des émissions britanniques. En fait, les Britanniques exportent maintenant plus de produits culturels qu’avant la mise en place du système, et ils exportent six fois plus de produits culturels par habitant que nous au Canada.
L’une des choses que Netflix a faites, et je pense que c’est vraiment intéressant, c’est de montrer qu’il y a un marché pour les émissions qui sont culturellement distinctes, de sorte que même avec les grandes émissions qui sont maintenant sur Netflix, comme Lupin ou Dix pour cent, qui sont entièrement en français, on sait exactement où on se trouve. On est à Paris. Même les vedettes sont françaises. Ces émissions ont du succès.
Je pense qu'il est très important de veiller — parce qu'en fin de compte, l'objectif est culturel — à modifier le système de points d'une manière qui garantisse que, lorsque les diffuseurs étrangers seront les principaux bailleurs de fonds du contenu canadien, nous aurons des émissions véritablement canadiennes.
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Merci, monsieur le président, de cet avertissement. J’en comprends la nécessité.
En tant qu’anarchiste réformé, je ne sais pas... Quand nous voyons le gouvernement fédéral consacrer 80 % de son budget de publicité à des plateformes sociales étrangères, cela signifie qu’il ne sait pas où dépenser son argent. À titre d’exemple, Statistique Canada a émis des communiqués de presse et souhaitait que les médias les reprennent dans leurs reportages, sans payer la publicité. Je pense que nous avons un problème, qui est d’abord celui du gouvernement fédéral, en ceci que nous ne savons quels soutiens apporter aux médias canadiens.
Ensuite, il y a eu le rapport Yale, et quiconque était assis autour de la table avec moi sait que je n’en suis pas partisan. On y fait grand usage d’adjectifs alarmants. Et puis, quand j’examine le projet de loi, l’ajout de règlements et l’accroissement des pouvoirs du CRTC qu’il prévoit, je m’inquiète vraiment.
Je pense que le témoin de Corus a effleuré la question, mais sans vouloir vraiment donner d’exemples de paperasse, de lourdeur bureaucratique et réglementaire. Comme je l’ai dit, en tant qu’anarchiste réformé, je n’aime ni les règlements ni les règles. Je m’alarme de voir que le projet de loi accorderait plus de pouvoirs au CRTC et qu’il s’inspire du rapport Yale. Cela pose problème à mes yeux.
J’invite le porte-parole de Corus à réagir à mes propos.
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Certainement, monsieur Shields.
Je pense que vous soulevez une préoccupation valable, à savoir que le CRTC pourrait devenir un monstre bureaucratique, ce que personne ne souhaite. Le projet de loi pourrait présenter un tel risque du fait qu’il élargirait les pouvoirs décisionnels du CRTC dans bien des domaines.
Nous pensons que le simple fait qu’il amorcerait le processus d’uniformisation des règles du jeu et réduirait l’écart concurrentiel insoutenable entre radiodiffuseurs canadiens et étrangers est une raison suffisante pour appuyer le projet de loi. Une fois la loi entrée en vigueur, le CRTC ne deviendra pas forcément une bureaucratie dévorante. Certes, il aura de nouveaux pouvoirs de réglementation, mais l’exercice de ces nouveaux pouvoirs ne devrait pas représenter un poids très lourd pour les entreprises étrangères, tandis qu’il constituerait en fait un allégement pour les radiodiffuseurs canadiens.
Comme nous l’avons déjà dit, dans une situation où vous avez des radiodiffuseurs canadiens qui ont des dépenses incontournables de 30 % et des radiodiffuseurs étrangers qui n’ont aucune dépense de cette nature, rien n’empêche de les mettre sur le même pied sans avoir à augmenter le niveau global de réglementation dans le système. En tant qu’exploitant, nous constatons que le niveau actuel de réglementation réduit notre compétitivité, non seulement au pays, mais aussi à l’étranger.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d’être ici. Je ferai tout mon possible pour que chacun ait l’occasion de s’exprimer, et je vais donc y aller rondement.
Je m’adresserai d’abord à Mme Côté, de la SOCAN.
Nous savons tous que l’avenir de la musique est la diffusion en continu. C’est tout simplement trop commode pour les auditeurs et trop rentable pour certains pour que l’on puisse songer à un retour en arrière. Les gains réels sur les œuvres enregistrées sont en recul, et vous nous avez donné des chiffres qui montrent bien l’importance de ce recul.
À l’heure actuelle, tout ce qu’il reste à beaucoup de ces artistes, outre la diffusion en continu, ce sont des spectacles en direct et des licences d’utilisation de leur musique pour des publicités, des films et des émissions de télévision. Nous savons tous qu’il n’y a plus de spectacles en direct pour le moment. Les scènes de spectacle sont fermées partout dans le monde, si bien que les pertes de revenu des créateurs dans ce domaine sont dévastatrices.
Les discussions, pour l’essentiel, portent sur les plateformes. Les plateformes changent. Elles sont en train de changer et continueront de changer, et il faut donc que notre loi puisse suivre cette évolution et tout ce qui viendra par la suite.
Je sais que les diffuseurs étrangers sur Internet augmentent leurs revenus grâce aux abonnements et à la publicité, mais la fraction des redevances que touchent ces créateurs ne se rend même pas jusqu’aux artistes — on parle de fractions de cent —, et nous le savons tous.
Qu’y a-t-il dans le projet de loi , ou que pourrions-nous y ajouter, pour soutenir les créateurs, qui semblent toucher une part sans cesse décroissante des redevances à mesure que celles-ci sont réparties?
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Merci, monsieur le président.
À chaque réunion du Comité, je suis la dernière à interroger nos témoins et je veux donc donner à chacun l’occasion de répondre très brièvement et, je suppose, d’y aller du mot de la fin.
Pour citer certains de nos témoins, ce projet de loi est attendu depuis 10 ans et rien n’a été fait au cours des 10 dernières années. Je comprends donc que les témoins veulent que ce projet de loi soit adopté de toute urgence, mais je pense qu’il est vraiment important, étant donné tout le temps que cela a pris tellement pour en arriver ici, que nous fassions les choses correctement.
J’aimerais que tous les témoins, si possible, me disent quel est la principale modification qu’ils aimeraient voir apporter au projet de loi.
Je vais commencer par Mme Côté et Me Lavallée.
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Merci, monsieur Stursberg.
Nous nous arrêterons là-dessus. Vous avez eu, en effet, le mot de la fin.
Je tiens à remercier nos invités qui ont témoigné au cours de cette première heure, soit Geneviève Côté et Martin Lavallée, de la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, aussi connue sous le sigle de SOCAN, Troy Reeb, de Corus Entertainment Inc., et Richard Stursberg, président d’Aljess.
Je vous remercie infiniment.
Chers collègues, nous allons faire une pause avant d’accueillir le prochain groupe de témoins.
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Merci à tous de vous être joints à nous pour cette deuxième heure. Nous poursuivons notre examen du projet de loi , en vue de procéder à l’étude article par article.
J’aimerais maintenant présenter nos invités. Nous accueillons Amélie Hinse, directrice générale, Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec, qui est accompagnée de Catherine Edwards. Nous entendrons également les représentants de Netflix, Stéphane Cardin, directeur, Politiques publiques, et de Rogers Communications Inc., Pam Dinsmore, vice-présidente, Câble réglementaire, et Susan Wheeler, vice-présidente, Médias réglementaires.
Comme nous l’avons mentionné, vous disposez de cinq minutes pour vos exposés. Je vais être quelque peu sévère quant au respect du temps parce que je voudrais que nous puissions faire quelques tours avant de passer aux questions.
Commençons par la Fédération. Vous avez la parole pour au plus cinq minutes.
Je crois que c’est vous, madame Hinse, qui allez commencer.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui. Nous sommes très heureux de témoigner devant les membres du Comité permanent du patrimoine canadien. C'est la première fois que nous y comparaissons, et nous sommes très contents de cette percée.
Je vais vous présenter les télévisions communautaires au pays. Elles sont établies dans tout le pays depuis plus de 50 ans. Au Québec, en particulier, il y a plus de 40 télévisions communautaires autonomes réparties dans 14 des 17 régions administratives de la province. Il y en a 30 de plus dans le reste du Canada, ce qui est très peu comparativement ce qu'il y a au Québec. Il y en avait plus de 300, dans les années 1990, mais le manque de spécificité et de lignes directrices relativement à la télévision communautaire autonome a fait qu'elles ont disparu peu à peu au fil des modifications apportées à la Loi sur le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, entre autres.
Nos télévisions produisent en moyenne six heures de programmation originale par semaine, dont le tiers est consacré à l'information, ce qui est quand même énorme. Ce sont 200 emplois à temps plein, 70 emplois contractuels à temps partiel et plus de 1 500 bénévoles qui se concentrent sur la production locale. Les télévisions ont, en général, un budget qui varie entre 45 000 $ et 500 000 $ par année — il s'agit d'un très grand éventail. Au Québec, nous avons la chance d'être financés par le ministère de la Culture et des Communications, en plus de recevoir une partie des investissements qui sont faits dans les publicités gouvernementales. Cela n’existe ni au fédéral ni dans les autres provinces.
L'élément communautaire est essentiel au système de radiodiffusion canadien. L'élément communautaire est l'un des trois piliers du système canadien, avec les secteurs privé et public. Aujourd'hui, plus que jamais, on a besoin d'un robuste système de radiodiffusion communautaire. Depuis plusieurs années, on voit les salles de presse fermer, alors que les modèles d'affaires commerciaux ont du mal à s'adapter à la concurrence du numérique, entre autres. Les communautés situées à l'extérieur des grands centres sont abandonnées, et elles deviennent des déserts médiatiques assez rapidement.
Les études démontrent clairement que le manque de représentation locale compromet la démocratie canadienne. Les radiodiffuseurs communautaires sont des organismes locaux à but non lucratif créés par et pour les citoyens. Nous nous assurons que les minorités et les populations locales ont accès aux plateformes d'expression traditionnelles et numériques, ce qui est très important.
L'avantage des médias communautaires, c'est qu'ils font partie de la communauté. Ils y sont implantés à long terme. Ils collaborent et offrent une visibilité aux entreprises, aux organismes communautaires et sportifs, aux artisans et aux artistes locaux, aux établissements d'enseignement, ainsi qu'aux différents paliers de gouvernement, du municipal au fédéral, et aux élus qui n'auraient pas de voix dans les médias traditionnels nationaux ou régionaux.
Le modèle communautaire est efficace, efficient et durable. Il permet de faire des productions pour beaucoup moins cher que ce qui se fait dans les compagnies privées.
Nous répondons à un besoin de programmation locale de la médiasphère canadienne. Nous sommes très inclusifs. Nous nous assurons que les communautés locales ont une représentation. L'éducation et la formation font partie des missions principales de la télévision communautaire. Pour réaliser cette mission, nous avons besoin de plus de reconnaissance et de spécificité en ce qui concerne notre rôle.
C'est dans cette optique que nous avons fait les différentes demandes de modifications à la loi que nous vous avons présentées.
Je vous remercie.
:
Monsieur le président, membres du Comité, je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
[Traduction]
En septembre dernier, nous avons célébré le 10e anniversaire de Netflix au Canada. Nous sommes reconnaissants qu’en une décennie, environ 7 millions de Canadiennes et de Canadiens nous aient ouvert la porte de leur foyer.
C’est en 2012 que nous avons tourné notre première série au Canada et depuis, nos activités n’ont cessé d’augmenter. En 2017, nous avons signé une entente avec le gouvernement en vue de mettre sur pied Netflix Canada. L’entente, régie par la Loi sur Investissement Canada, nous a donné la possibilité d’embaucher des Canadiens directement. En échange, nous avons pris des engagements importants, notamment celui d’investir au moins 500 millions de dollars sur cinq ans en activités de production au Canada. Le Canada est l’un des principaux pays de production de Netflix dans le monde. Depuis 2017, nous avons investi plus de 2,5 milliards de dollars ici. Le Canada est l’un de nos principaux pays producteurs et, depuis 2017, nous avons investi plus de 2,5 milliards de dollars dans ce pays.
[Français]
Cette activité de production comprend nos séries et films originaux et nos collaborations avec des producteurs indépendants et des télédiffuseurs de langue française et de langue anglaise. De plus, nous continuons à acquérir des séries et des films, le plus récent étant Le guide de la famille parfaite.
Netflix contribue aussi à la vitalité et à la compétitivité de l'industrie audiovisuelle canadienne en louant à long terme des plateaux de tournage, en collaborant avec des studios d'animation et d'effets visuels qui sont des chefs de file dans leur domaine et en travaillant avec des centaines de fournisseurs partout au pays.
[Traduction]
Et au début du mois, nous avons annoncé que nous planifions d’ouvrir un bureau et d’embaucher une ressource dédiée au contenu au Canada. Nous sommes enthousiastes de renforcer nos liens avec le milieu créatif canadien, d’amplifier notre travail sur le terrain et de renforcer encore davantage nos partenariats.
Notre feuille de route au cours des 10 dernières années est sans équivoque: Netflix s’est investi au Canada. Et le message que nous souhaitons vous transmettre est également sans équivoque: Netflix continuera de soutenir les créateurs canadiens, établis et émergents, et de faire rayonner leurs histoires dans le monde entier.
Nous comprenons que les décideurs sont tenus de considérer les contributions de tous les intervenants de l’écosystème du divertissement du Canada. Dans la mesure où vise à créer un cadre flexible qui permettra au CRTC d’adapter les conditions de service appliquées aux entreprises en ligne et de tenir compte des multiples contributions des services numériques, nous estimons que cette approche est judicieuse.
Au contraire, l’imposition des mêmes obligations réglementaires qui s’appliquent aux télédiffuseurs canadiens titulaires d’une licence, aux services de divertissement en ligne ne serait pas la bonne approche pour s’assurer des contributions de la part de ce secteur autrement très vivant. Les services comme Netflix ne jouent pas le même rôle que les télédiffuseurs traditionnels, et nos stratégies de contenu sont différentes.
[Français]
Nous aurons l'occasion de discuter davantage de ces questions au cours des audiences publiques du CRTC au moment opportun. Toutefois, nous tenons à vous faire part des préoccupations que susciterait chez nous l'obligation de dépenser en programmation canadienne l'équivalent de 30 % des revenus canadiens des services de divertissement de vidéo en ligne.
Une telle démarche ne créerait pas un terrain de jeu uniforme et ne serait ni juste ni équitable. Netflix ne souhaite pas obtenir d'avantages réglementaires. Cependant, nous n'offrons pas d'émissions de nouvelles ni de sports en direct, soit les catégories qui permettent aux groupes de diffusion canadiens de respecter la majorité de leurs obligations de dépenses.
[Traduction]
Les consommateurs canadiens ont plus d’options de divertissement que jamais auparavant. Un cadre réglementaire trop contraignant ferait diminuer les choix pour la population canadienne. Il est possible que certains nouveaux services qui seront lancés dans le monde entier décident de ne pas investir le marché canadien. De même, il n’est pas exclu que d’autres contournent la réglementation en offrant leur contenu par le truchement d’un intermédiaire canadien, sans s’installer ici.
[Français]
Le gouvernement a indiqué son but de créer un secteur des communications de classe mondiale et a souligné l'importance de favoriser et de promouvoir la culture canadienne, de contribuer à la croissance économique et de protéger les intérêts des consommateurs canadiens.
[Traduction]
Pour concrétiser cette ambition et établir un modèle équilibré, résilient et ouvert sur l’avenir, permettons à chacun des participants au système de mettre ses forces à profit afin de faire rayonner nos histoires, travailler nos artisans et satisfaire nos consommateurs de contenu.
Merci, monsieur le président. Je serai ravi de répondre à vos questions.
:
Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de nous avoir invitées à discuter du projet de loi . Je m’appelle Pam Dinsmore et je suis vice-présidente, Câble réglementaire, et je suis accompagnée de Susan Wheeler, vice-présidente, Services interentreprises et Médias réglementaires, chez Rogers Sports and Media.
Chez Rogers, nous sommes déterminés à être chef de file de notre industrie sur les chemins de l’innovation en radiodiffusion, ainsi qu’à célébrer et à renforcer la culture et l’identité du Canada. Nous offrons des plateformes favorisant la diversité des voix et un contenu local riche qui attire les Canadiens partout au pays. Grâce à nos 54 stations de radio, sept stations locales CityTV, de cinq stations OMNI de télévision multiculturelle et en langue étrangère et de notre service régional OMNI, nous divertissons et informons les citoyens canadiens de Medicine Hat à Waterloo, de Gander à Victoria.
L’ensemble de notre réseau de câblodistribution en Ontario, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve compte 30 chaînes de télévision communautaire qui offrent aux Canadiens une couverture des événements locaux et des enjeux communautaires dans les deux langues officielles. Grâce à ces médias locaux et nos canaux Sportsnet, notre transmission d’événements communautaires et sportifs rassemble les Canadiens, quelles que soient les différences de sexe, d’âge et d’origine ethnique.
Nous accueillons favorablement les réformes proposées dans le projet de loi et nous exhortons tous les partis à s’employer à le faire adopter rapidement, malgré les modifications qui pourraient s’avérer nécessaires. Nous croyons également qu’il faudrait en faire davantage, et sans tarder, pour répondre à l’immense transformation qui est survenue dans le secteur des médias canadiens et qui a jeté les radiodiffuseurs privés du Canada dans une situation structurelle nettement désavantageuse. Cela est particulièrement vrai pour ce qui est de la production d’émissions de nouvelles nationales et locales, dont l’importance ne cesse de croître dans les démocraties à mesure que les salles de presse dépérissent et que la désinformation prolifère sur de multiples plateformes.
Avant tout, nous aimerions vous faire comprendre à quel point notre modèle d’affaires a profondément changé depuis l’adoption de la Loi sur la radiodiffusion il y a 30 ans. Au cours de la dernière décennie, l’Internet a complètement bouleversé les conditions économiques du secteur de la radiodiffusion. La présence, sans contrôle ni réglementation, de concurrents numériques étrangers sur le marché canadien a eu pour effet de faire chuter nos revenus, de fragmenter les auditoires et de faire grimper nos coûts d’exploitation. Les cadres légaux et réglementaires qui régissent la radiodiffusion au Canada n’ont pas suivi ces changements. En fait, ils ont désavantagé les entreprises de radiodiffusion canadiennes qui sont en concurrence avec les services étrangers de diffusion en continu, lesquels n’ont aucune obligation réglementaire.
Pour régler... [Difficultés techniques]
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Nous formulons cinq recommandations pour améliorer le projet de loi et l’orientation stratégique que le gouvernement imprimera au CRTC après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi.
Premièrement, il faut inclure une disposition qui assurera l’équité réglementaire entre les entreprises canadiennes et les services étrangers de diffusion en continu. Le projet de loi devrait ordonner au CRTC d’imposer des obligations comparables à tous les joueurs dans le secteur médiatique qui tirent des revenus du système canadien de radiodiffusion. Il est essentiel que les entreprises de radiodiffusion canadiennes n’aient pas des obligations plus lourdes que les géants technologiques américains.
Deuxièmement, il faut éliminer le cloisonnement réglementaire. Alors que les services de diffusion en continu aux États-Unis sont considérés comme des entités uniques en dépit de leur double rôle de créateurs et de distributeurs de contenu, ce n’est pas le cas des services de radiodiffusion et de distribution de Rogers, chacun desquels est assujetti à un ensemble différent d’obligations réglementaires qui empêchent l’évolution de nos modèles d’affaires et n’offrent aucune incitation à investir dans la création de contenu. Rogers aimerait que la loi donne au CRTC la souplesse nécessaire pour réglementer nos deux divisions, radiodiffusion et distribution, en tant qu’entité unique. Cela pourrait prendre la forme de conditions de service, comme l’a indiqué le CRTC dans son rapport « Emboîter le pas au changement ».
Troisièmement, les nouvelles et l’information locales doivent être une priorité énoncée dans la loi. La loi devrait permettre aux radiodiffuseurs canadiens de donner priorité à la production d’émissions d’information avant toute autre programmation.
Quatrièmement, les droits de licence prévus à la partie II de la Loi sur la radiodiffusion doivent être supprimés. Ces droits ne sont pas directement liés à la radiodiffusion, et les services étrangers de diffusion en continu n’ont pas à les payer. Dans sa version actuelle, le projet de loi maintiendrait ces droits pour les radiodiffuseurs canadiens tout en laissant les diffuseurs en continu américains y échapper. Nous pensons que c’est tout simplement injuste.
Cinquièmement, il faut renforcer les mesures de protection contre le vol de contenu en ligne. Si des mesures ne sont pas prises pour lutter contre la diffusion en continu illégale en ligne, les objectifs visés le projet de loi et le débat l’entourant deviendront sans objet, car l’écosystème qui sous-tend le contenu canadien s’effondrera.
Le texte détaillé des modifications que nous proposons pour mettre en œuvre ces recommandations figurera dans notre mémoire au Comité.
Nous vous remercions de votre temps. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
Mes premières questions s'adresseront à M. Cardin, de Netflix.
Monsieur Cardin, j'aimerais que vous nous parliez davantage de la volonté du gouvernement d'imposer des réinvestissements de l'ordre de 25 à 45 %, soit 30 % en moyenne, dans du contenu canadien. J'aimerais également que vous fassiez un lien avec votre position, parce que je suis convaincu que vous avez parlé avec des intervenants haut placés au sein du gouvernement pour essayer de comprendre cette somme de 800 millions de dollars qui serait réinvestie en contenu canadien.
D'où provient ce calcul? On n'arrive malheureusement pas, malgré de multiples demandes, à avoir accès à cette information.
Que pensez-vous de tout cela?
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Je vous remercie de votre question, monsieur Rayes.
Comme nous l'avons dit dans notre présentation, nous appuyons le cadre flexible qui était proposé par le projet de loi C-10, tel qu'il a été déposé, le 3 novembre dernier.
Toutefois, au moment du dépôt du projet de loi, lors de certaines discussions que le ministère a eues, on a évoqué la possibilité que des obligations de dépenses canadiennes semblables à celles qui s'appliquent en ce moment aux télédiffuseurs canadiens — on parlait de 25 à 45 % — puissent être imposées sur les services de divertissement en ligne.
Je le répète, nous voulons contribuer et en faire davantage, mais de façon juste et équitable. Compte tenu des services que nous offrons, qui sont essentiellement des séries, des films, des documentaires de longue durée et des émissions pour la famille, et que nous n'offrons pas d'information ni de sport, nous considérons tout simplement que les pourcentages évoqués ne sont pas appropriés. Ils ne sont pas justes et équitables.
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Comme Mme Hinse vient de le dire, et comme on peut le lire dans nos deux mémoires, le Québec et le Canada sont sur la même longueur d’onde. Nous aimerions y voir une définition. Dans la loi précédente et dans le projet de loi actuel, il a un long article sur la SRC. Mise à part une mention indiquant que la télévision communautaire est l’un des trois composants du système, il n’y a rien qui la définit. Nous aimerions y voir une définition qui la reconnaîtrait comme activité à but non lucratif.
Deuxièmement, nous aimerions que son rôle soit défini. Il y avait autrefois un article sur les médias alternatifs, qui n’a jamais vraiment été invoqué ni été susceptible d’application concrète, et qui décrivait presque exactement ce que nous faisons. Nous desservons des groupes créneaux et des minorités qui ne sont pas desservis par les médias grand public.
Troisièmement, dans tous ces différents rapports qui ont été publiés, comme le Cadre stratégique du Canada créatif et le rapport Yale... Il n’en est même pas question dans le rapport Yale, qui fait pourtant 235 pages, si ce n’est que pour proposer d’enlever de l’argent à la télévision communautaire pour le donner aux radiodiffuseurs privés. Nous sommes dans un vide.
Nous avons proposé d’ajouter des passages à certains articles très forts de la loi pour expliquer ce que nous faisons. Par exemple, la loi actuelle a renforcé l’inclusion des besoins en matière de médias autochtones, ce que nous appuyons sans réserve, mais de façon réaliste, la façon d’obtenir la présence de médias dans la plupart des communautés autochtones et une programmation dans les langues autochtones, c’est par l’entremise des médias communautaires. Nous pouvons obtenir ce résultat pour un dixième du coût. Nous formons des groupes pour qu’ils produisent leur propre contenu.
Nous avons ajouté dans notre mémoire des phrases complémentaires pour préciser où nous devons tâcher de relever certains des défis auxquels est confronté le système de radiodiffusion canadien, principalement en ce qui concerne l’inclusivité et le contenu local.
:
Madame McPherson, pouvons-nous commencer par la première motion?
Étant donné que nous traitons de deux motions, puis-je m'aventurer jusqu'à remercier nos invités de leur présence ici aujourd'hui? Il semble que nous allons dépasser le temps prévu.
Je remercie Amélie Hinse, de la Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec. Je tiens également à remercier Pam Dinsmore et Susan Wheeler de Rogers Communications, ainsi que Stéphane Cardin, de Netflix. Bonne chance pour la remise des prix de dimanche; apparemment, les choses devraient bien aller pour vous, selon les rumeurs, alors je vous souhaite la meilleure des chances.
Je remercie nos invités de leur contribution, de leurs suggestions d'amendements et ainsi de suite.
Madame McPherson, pouvons-nous commencer par la première motion que vous avez mentionnée, celle concernant le gouverneur en conseil?
Y a-t-il des commentaires à ce sujet?
Madame Dabrusin, allez-y.
[Français]
J'ai distribué, par écrit et dans les deux langues officielles, la motion amendée, à laquelle j'ai travaillé avec Mme McPherson.
[Traduction]
Tout le monde devrait avoir reçu une version écrite par courriel.
Je pense qu'un amendement approprié consisterait à proposer que les mots après « Que le Comité » dans la première motion soient supprimés et remplacés par le libellé de notre motion révisée.
La motion révisée est la suivante:
Que le Comité invite Facebook, Inc. à une réunion de suivi concernant les sujets soulevés lors de son témoignage devant le Comité le 29 janvier 2021 et également pour aborder les récentes actions de Facebook en Australie liées à l'examen et à l'adoption par le gouvernement australien du Code de négociation des médias d'information.
Que le Comité demande que Mark Zuckerberg, PDG, et M. Kevin Chan, directeur mondial et chef de la politique publique du Canada, témoignent au nom de Facebook Inc.
Qu'il soit demandé au président de trouver un moment dans une semaine de mars sans séance pour cette réunion, en fonction de la disponibilité de Facebook.
[Français]
Il y a deux différences entre les deux propositions. Premièrement, nous demandons au Comité de convoquer M. Zuckerberg ainsi que M. Chan, parce que la décision en Australie a sûrement été prise au siège social de Facebook et non au Canada. Deuxièmement, nous voulons trouver une date au mois de mars où le Comité ne reçoit pas déjà des témoins pour faire ce travail, selon la disponibilité de Facebook.
Ce sont les deux grands changements à la motion. J'espère que le Comité pourra accepter cet amendement et la proposition initiale.
Merci, monsieur le président.
:
Eh bien, occupons-nous de votre choc et de votre effroi pendant un instant. Permettez-moi d'examiner ce que vous venez de proposer.
Quelqu'un d'autre a-t-il des choses à dire à ce sujet? Il s'agissait d'une première réaction à ce qui m'a été soumis. Je vais prendre la question en délibéré et je vais relire la motion. Comme vous le savez, j'ai reçu cela pendant les audiences du Comité. À moins que quelqu'un d'autre n'ait un commentaire, je vais prendre quelques instants pour relire le tout. Merci.
Monsieur Housefather, voici où nous en sommes. La motion présentée par Mme McPherson a été modifiée. Si vous regardez la motion originale, après la mention du « 29 janvier 2021 », elle prend une forme complètement différente. À première vue, je constate qu'il y a eu des changements substantiels et qu'il faut obtenir le consentement unanime.
Je comprends ce que vous dites au sujet de la mention des noms des invités et de la date. À mon avis, il ne s'agit pas de questions de fond. Je suis certain de cela.
Monsieur Rayes, vous avez la parole.