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Merci, monsieur le président.
Je voudrais dire un mot rapidement avant que nous nous penchions sur l'amendement CPC‑9.2. Mon objectif n'est pas de retarder le processus, mais de vous faire part de mon réel mécontentement au sujet de ce qui se passe actuellement. Certains pourraient laisser croire qu'il en est ainsi à cause de tout ce qui est survenu lors des derniers jours, mais je tiens à souligner que nous sommes tous des êtres humains. Nous travaillons au Parlement, mais nous avons aussi une famille. Les employés qui travaillent avec nous et qui essaient de faire leur travail de façon professionnelle ont aussi une vie personnelle.
Lundi dernier, vous nous avez indiqué que la prochaine rencontre serait vendredi. Aujourd'hui, nous sommes mercredi, alors la Chambre commence ses travaux à 14 heures. J'ai donc quitté mon appartement pour me rendre à la Chambre, où j'étais de garde. C'est ma responsabilité, cela fait partie de mon rôle de parlementaire dans un Parlement hybride. Or, à une heure de préavis, j'ai reçu l'avis de convocation de la présente réunion. Je n'avais pas accès à mes documents, car je les avais laissés à mon appartement. Ces documents m'aident à faire mon travail. Notre travail exige que nous fassions tous beaucoup de recherches.
Je trouve que c'est faire preuve de mépris envers le travail des députés que de nous donner un préavis d'une heure pour une question aussi importante. Nous disposons de peu de temps. De plus, on nous a imposé un bâillon, ce qui ne s'est jamais produit au cours des 20 dernières années. Le Parlement n'est pas censé s'ingérer dans le travail des comités; le travail des comités est censé être indépendant.
D'après ce que je comprends, même vous, monsieur le président, n'étiez pas au courant. La décision d'organiser une rencontre surprise a été prise par différents whips. Or, cela entraîne des conséquences sur nous tous.
Ce soir, après ma journée de garde à la Chambre, j'avais prévu aller chercher ma fille à Montréal. Je ne l'ai pas vue depuis trois semaines. Maintenant, on retarde tout le processus. Je suis en train de changer tout mon horaire. Certains diront que ce n'est pas grave et qu'on a le droit de dire ce qu'on veut sur les politiciens. Cependant, les politiciens ont aussi une vie personnelle. En général, nous avons des rencontres de prévues et nous avons un travail à accomplir.
Il est vrai que, dans certains cas, les procédures sont ralenties délibérément. Dans d'autres comités, les libéraux sont des professionnels en la matière. Nous l'avons fait aussi dans certains cas, mais toujours dans les règles de l'art de la procédure en comité et par les moyens dont nous disposons lorsque nous sommes mécontents ou que nous avons un message à communiquer.
Présentement, cette réunion requiert la présence d'employés, d'interprètes et de la greffière du Comité, notamment. De plus, des réunions d'autres comités ont dû être annulées. Certains de mes collègues sont frustrés, car ils avaient du travail à réaliser dans ces autres réunions de comité. Les séances prévues du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration et du Comité permanent des pêches et des océans ont été annulées à la dernière minute, afin de libérer cette plage horaire pour tenir la présente réunion, que les whips du Parti libéral, du NPD et du Bloc québécois ont organisée entre eux sans même en aviser le président de notre comité, d'après les informations que j'ai reçues. C'est inadmissible.
Je trouve cela incroyable, ce travail-là, dans le contexte de l'étude de ce projet de loi qui, nous le dénonçons depuis si longtemps, s'attaque aux fondements mêmes de la Charte canadienne des droits et libertés. Cela n'a rien à voir avec une attaque contre la culture, même si certains voudraient essayer de nous faire dire que c'est le cas.
Bref, je voulais prendre trois minutes pour vous faire part de tout cela. Vous savez tous que je suis en forme et que je m'entraîne. Au moyen de mon GPS, j'ai calculé tous les allers-retours que j'ai dû faire entre la Chambre, où je suis de garde, et cette salle de comité, afin de remplir toutes mes responsabilités.
La situation que nous vivons est inconcevable. C'est la goutte qui fait déborder le vase, en fin de session parlementaire. Ce n'est pas la première fois qu'une situation semblable se produit, d'ailleurs.
Y aurait-il moyen de faire une déclaration quelconque en vue de soutenir votre travail de président, d'avoir un décorum et de nous assurer que les parlementaires de tous les partis peuvent travailler en partenariat et avec collégialité? Nous voulons tous être de bonne humeur, pouvoir rigoler ensemble et essayer de détendre l'atmosphère, mais la situation actuelle demeure inconcevable.
Pour ma part, je vis des frustrations aujourd’hui, parce que je vais devoir appeler ma fille pour lui dire que je ne serai pas à Montréal avant presque 23 heures, ce soir. Après, je devrai encore conduire pendant deux heures et demie pour aller dans ma circonscription, ce qui aura des répercussions sur ma journée de demain. De plus, je viens de recevoir un avis indiquant que nous aurons une autre rencontre demain. Tout cela va s'ajouter au reste de mon horaire.
Je voulais souligner que nous sommes des êtres humains, nous aussi, même si nous sommes des politiciens, même si les gens pensent qu'ils ont le droit de nous attaquer autant qu'ils le veulent et de dire tout ce qu'ils veulent sur nous. Nous devons encaisser les coups les uns après les autres. Je trouve malheureux de constater que des whips se sont entendus au sujet de notre travail sans même nous en avoir informés.
Merci, monsieur le président.
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Je vous remercie, monsieur le président, et je vous remercie également de m'accueillir au sein du Comité du patrimoine.
Je suis le cheminement de ce projet de loi à travers les différentes étapes depuis un certain temps déjà et je suis préoccupée par l'étendue de son champ d'application et par les graves préoccupations que de nombreux conseillers bien placés ont soulevées. Je pourrais en parler longuement. Je commencerai par parler de l'amendement que mon collègue a présenté.
Je ne comprends tout simplement pas pourquoi le gouvernement et les membres de ce comité ne sont pas favorables à l'imposition de certaines restrictions et limitations quant aux personnes visées par ce projet de loi. Encore une fois, certains des amendements qui ont été rejetés par le comité permettraient, je pense, de dissiper en partie les craintes des Canadiens qui se demandent, à juste titre, ce que cela signifie pour eux.
Certains d'entre nous servent depuis plus longtemps que d'autres ici à la Chambre et au Parlement, alors je vais simplement parler de mon expérience. Lorsque j'ai fait mon entrée dans le service public, les médias sociaux commençaient à peine à transformer notre façon de consommer l'information, mais aujourd'hui, le fait est que la radiodiffusion traditionnelle et les méthodes traditionnelles de création de contenu canadien ont été perturbées, un peu comme Uber a perturbé l'industrie du taxi.
Je pense que nous avons, en tant que parlementaires, la responsabilité de nous demander si la mise en place de certains règlements gouvernementaux est bénéfique pour le pays et les créateurs au fur et à mesure que cette perturbation se produit, ou si elle entrave plutôt l'émergence de nouvelles voix, de nouveaux contenus, et la participation des Canadiens à des activités culturelles.
Je suis convaincue que l'amendement proposé par mon collègue profiterait à de nombreux Canadiens et je voudrais vous expliquer pourquoi.
Ma collègue Mme McPherson a soulevé la question de la consultation des influenceurs culturels du Québec. Je peux en nommer une sans hésiter: Cynthia Dulude. Elle a plus de 600 000 abonnés sur YouTube. Je suis sûre qu'elle a réussi à monétiser son compte. C'est une voix qui ne serait pas nécessairement admissible à la démarche que nous avons actuellement. Plutôt que de la soutenir, ce projet de loi permettrait au CRTC, à bien des égards, de la considérer essentiellement comme un radiodiffuseur. C'est pourquoi je pense que des amendements comme celui‑ci sont favorables à la consécration des droits des femmes en particulier, car les femmes sont typiquement exclues à cause de notre façon de longue date de faire les choses au Canada.
Lorsque vous regardez la progression des textes législatifs et réglementaires au fil des ans, je soutiens pleinement les avancées qui ont été faites pour assurer la promotion de la culture, du contenu et du patrimoine canadiens, mais ce projet de loi ne fonctionne pas avec les perturbations qui ont été créées dans l'industrie. Il cherche simplement à consacrer une ancienne façon de faire les choses, et ce faisant, il marginalise les voix canadiennes lorsque nous regardons où sera le football dans 10 ou 20 ans.
À bien des égards, les perturbations engendrées par les médias sociaux ont vraiment démocratisé la création de contenu canadien. C'est une chose vraiment excitante. Des voix qui n'avaient jamais eu de plateforme auparavant ont maintenant une plateforme et n'ont pas à passer par des gardiens. Je pense que c'est une chose très positive pour le Canada, et non le contraire.
Je comprends pourquoi les gardiens veulent le faire. Je comprends pourquoi les gardiens, les entreprises de télécommunications en place, ceux qui ont intérêt à faire de l'argent avec des subventions et des contributions sans vraiment promouvoir l'avancement des activités axées sur le patrimoine, veulent protéger le statu quo: ils en profitent. Pourquoi ne pouvons-nous pas faire les deux?
Les amendements que mes collègues ont suggérés nous permettraient de soutenir et de protéger les influenceurs et ceux qui ont trouvé des plateformes sur les médias sociaux, mais ils permettraient aussi de préserver les activités actuelles.
Je présume que c'est peut-être une façon différente d'envisager les choses. Je suis heureuse que nous ayons ce débat, mais je ne pense pas que le gouvernement devrait exister pour éliminer, à l'aide de règlements, les influences perturbatrices qui existent sur le marché et qui profitent en réalité aux Canadiens.
C'est une situation qui se produit assez souvent. Lorsque j'étais vice-présidente du Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie, j'ai fait des déclarations assez audacieuses selon lesquelles nous devrions potentiellement envisager de perturber la façon dont Internet est fourni au Canada, afin de résoudre les problèmes liés à la large bande en milieu rural, et même à l'accès dans les centres urbains.
Les titulaires qui profitent de la structure monopolistique que le gouvernement protège s'opposeront à cela, car leur modèle d'affaires en dépend. Encore une fois, j'ai presque l'impression d'être dans un univers parallèle, car la gauche préconise le maintien d'une structure monopolistique qui ne profite en aucune façon à la population. Je pense qu'elle profite seulement aux grandes entreprises qui, selon moi, ne semblent pas faire de leur mieux pour promouvoir le contenu et la culture du Canada.
Nous avons l'occasion, ici au Parlement, de repenser la façon dont le gouvernement interagit avec les créateurs de contenu. Au lieu de cela, nous avons ce projet de loi qui vise à enchâsser le statu quo dans la loi. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas envisager de prendre les meilleurs éléments du statu quo, comme le soutien à… Mme McPherson a soulevé la question des créateurs de contenu québécois. Je ne comprends pas pourquoi nous ne pouvons pas envisager d'adopter des règlements et des lois qui soutiennent ces créateurs de contenu, tout en reconnaissant que des perturbations ont eu lieu et en veillant à protéger ces nouvelles voix et ces nouvelles façons de faire les choses. Je pense réellement que c'est ce qui est au cœur de l'amendement qui a été proposé aujourd'hui.
On a affirmé que cet amendement n'avait fait l'objet d'aucune recherche. Je sais que c'est faux, car des documents de travail à ce sujet ont été rédigés dans le monde entier. Je pense à l'un d'entre eux en particulier. Je ne me souviens pas de la référence, car tout comme mon collègue, M. Rayes, je participe à cette réunion à court préavis, mais il est important pour moi d'être ici au nom de mes électeurs. Je sais qu'un document de travail a été produit en Australie pour examiner certains seuils à la suite de la perturbation qui s'était produite sur le marché national là‑bas, car on souhaitait protéger ces voix.
Le compte québécois que j'ai mentionné… Ce n'est pas un radiodiffuseur, mais un créateur de vidéos qui a une voix et une perspective uniques sur certaines questions. Lorsque le gouvernement tente d'intervenir et d'utiliser un... Franchement, nous pourrions avoir une tout autre discussion sur le fait que le CRTC est une institution dépassée qui a désespérément besoin de faire l'objet d'une réforme. Cependant, cet amendement limiterait la portée de ce que pourrait faire cette institution dépassée et aiderait donc les voix intersectionnelles qui ont soudainement une plateforme au Canada.
Je pense réellement que si nous n'adoptons pas ce type d'amendement, dans 10 ans, avec le recul… Je pense que les Canadiens se pencheront sur ce débat entre parlementaires et sur ce type d'amendements, ainsi que sur les parlementaires qui ne les ont pas appuyés, et qu'ils se demanderont pourquoi ces parlementaires préféraient plutôt l'ancienne façon de faire les choses, pourquoi ils n'ont pas soutenu leurs voix et pourquoi ils ont réglementé le droit de parole.
Pourquoi le CRTC devrait‑il avoir son mot à dire sur les comptes YouTube individuels? Pourquoi ne pas préciser les choses dans ce domaine? Si le gouvernement dit vrai lorsqu'il affirme qu'il n'a pas l'intention de réglementer les comptes individuels sur les médias sociaux, pourquoi ne pas prévoir les mesures de protection appropriées?
Il ne s'agit pas du Code criminel, mais d'une politique qui influence la façon dont certaines activités seront menées. Il s'agit du droit à la liberté d'expression.
Je vais citer un autre exemple qui me met profondément mal à l'aise, car il s'agit des subventions accordées à la presse écrite au Canada. Je crois qu'il est très important que notre pays profite d'une culture journalistique forte qui nous oblige tous à rendre des comptes, quelle que soit notre allégeance politique. Toutefois, lorsque le gouvernement met en place un fonds pour soutenir les médias et qu'il choisit ensuite les bénéficiaires de ce fonds, il y a un lien direct. Un parti pris direct est créé et il n'y a plus d'indépendance journalistique. C'est une mauvaise chose. Nous pouvons siéger ici et manifester vigoureusement notre désaccord sur des questions de politique, mais nous devrions nous entendre sur le fait que nous avons besoin de médias indépendants. Il faut établir une distinction — une démarcation claire — entre les médias, les moyens d'expression des Canadiens et le gouvernement.
On a beaucoup discuté de la façon dont le gouvernement devrait réglementer les discours haineux. Il s'agit d'un autre sujet épineux, car il y a beaucoup de haine, même aujourd'hui. En effet, à titre de parlementaire, j'ai reçu beaucoup de commentaires haineux au cours des dernières 24 heures en raison de déclarations que j'ai faites et auxquelles je crois fermement. Cela ne signifie pas que je devrais retirer aux gens le droit de faire ces déclarations, à moins qu'elles ne soient visées par des dispositions du Code criminel relatives à la diffamation ou aux discours haineux. Nous avons déjà le Code criminel pour ces types de cas.
Si on applique cette notion au projet de loi , on peut se demander pourquoi un organisme de réglementation chercherait à limiter les activités des différentes voix et des Canadiens. C'est la raison pour laquelle je pense que le projet de loi est une mesure législative défectueuse. Je ne l'appuie pas en général, mais au moins, les amendements proposés par mes collègues visent à séparer cette notion.
Honnêtement, le message que je tiens à communiquer aux membres du Comité au nom de mes électeurs, c'est que traditionnellement, notre pays et notre gouvernement ont toujours tenté de promouvoir le contenu canadien. Toutefois, la façon dont ce contenu est produit et consommé a connu de tels bouleversements récemment que l'application de l'ancienne méthode de soutien à la création de contenu à un modèle qui connaît des perturbations ouvre la voie aux abus du gouvernement en matière de liberté d'expression.
C'est la raison pour laquelle il est très important que nous adoptions ces amendements. Il faut améliorer la structure en place. Il faut préciser davantage les choses. Même pour les comptes d'utilisateurs qui… Prenez l'exemple du compte québécois que j'ai mentionné plus tôt. Je suis certaine que la propriétaire de ce compte réussit bien. Je suis sûre qu'elle génère des revenus. Tant mieux pour elle. C'est génial et c'est fantastique. Pourquoi le gouvernement chercherait‑il à limiter sa voix?
Ces amendements permettent d'éclaircir et de préciser un nouveau secteur d'activités auquel la plupart des Canadiens commencent tout juste à s'intéresser. Pour nous, il s'agit de comprendre qu'on peut maintenant inscrire que l'on est « influenceur » sur un curriculum vitae. En effet, le secteur de l'influence est bien réel et permet de générer des profits. C'est une nouvelle façon de faire de la publicité. Pourtant, j'ai l'impression qu'à titre de législateurs, nous examinons ce domaine avec des méthodes qui datent de 30 ans. C'est un énorme problème.
Je comprends qu'il y a des politiques fondamentales qu'on a l'habitude d'appliquer automatiquement. On pourrait même pratiquer une certaine polarisation pour réaliser des gains politiques rapides dans un sens ou dans l'autre. Cependant, j'encourage du fond du cœur mes collègues qui participent à cet appel à dépasser tout cela et à se demander ce qui sert véritablement les intérêts de notre pays. Nous devrions nous efforcer de soutenir la création de contenu canadien, tout en veillant certainement à soutenir aussi la création de contenu en français. Nous devrions soutenir toute la création de contenu, y compris les voix marginalisées qui n'ont habituellement pas de plateforme à cause des personnes qui en limitent l'accès. Nous devrions chercher à accomplir cela tout en veillant à tenir compte du fait que la structure encadrant la création de contenu a fondamentalement changé.
L'amendement à l'étude qui a été proposé par mon collègue encadre et structure clairement l'intention. Quelle que soit l'intention du gouvernement, cet amendement est logique, comme l'était celui qui a été rejeté par le Comité. J'étais tellement déçue. Je pensais honnêtement que le gouvernement allait clore ce débat en proposant l'amendement qui a été rejeté plus tôt et dont les médias ont parlé. J'ai été très surprise. Mes collègues ici présents qui me connaissent depuis un certain temps, toutes tendances politiques confondues, savent qu'il en faut beaucoup pour me surprendre. Et j'ai été profondément surprise.
Encore une fois, le projet de loi fait des gagnants et des perdants. Pourquoi ferions-nous cela? Pourquoi choisirions-nous des gagnants et des perdants? Pourquoi favoriserions-nous certaines voix comparativement à d'autres?
Ce qui m'inquiète, c'est que les groupes qui cherchent à promouvoir le statu quo ont un lobby très bien financé. Je sais qu'ils ont comparu devant bon nombre d'entre vous. Ils cherchent des réunions auxquelles participer pour faire valoir leur position.
Les personnes qui émergent dans cette perturbation du marché — les voix comme celle du compte que j'ai mentionné — n'ont pas de lobby. Elles n'ont pas de groupe bien financé dont les membres viennent expliquer comment ils influenceront les électeurs dans nos circonscriptions. C'est la raison pour laquelle je comparais aujourd'hui devant le Comité permanent du patrimoine canadien. J'essaie d'aller au‑delà des fanfaronnades politiques pour essayer de dire, sincèrement et logiquement, qu'il faut s'imaginer la situation dans 10 ans et comprendre que si nous mettons en œuvre ce projet de loi sans certaines définitions…
Ces créateurs ne viennent pas parler des sondages en fonction de la popularité d'une question tendancieuse dans nos circonscriptions. Ils font seulement leur travail. Ce sont de nouveaux créateurs de contenu. Ils n'ont pas accès à un lobby, mais cela ne signifie pas que nous n'avons pas l'obligation de les protéger.
Les amendements qui sont proposés ici sont conçus pour protéger ces personnes. Ce sont des gens qui n'ont pas eu voix au chapitre dans nos itérations précédentes sur la création de contenu culturel, et ils n'ont pas plus voix au chapitre maintenant face aux grands groupes de pression. Pourquoi ne les protégerions-nous pas? Pourquoi ne pas ajouter cette protection? Ce serait tellement logique.
Je pense réellement que nous devrions retourner à l'étape de la conception. Je comprends que les partis ont déjà pris position. Cependant, si nous ne faisons pas les choses correctement, je pense réellement que nous exposerons les influenceurs canadiens à une forme de restriction de la liberté d'expression. Je pense que c'est certainement possible. En effet, nous n'avons pas fait notre travail de législateurs qui consiste à dire aux responsables de la réglementation ce qu'ils peuvent et ne peuvent pas faire. Nous n'avons pas entrepris la réforme systémique de l'organisme de réglementation qui s'impose. C'est également un problème. Nous n'avons pas non plus… Nous essayons d'imposer la structure réglementaire d'un système qui a été mis en place avant l'existence des téléphones cellulaires à un système de création de contenu qui a subi des perturbations. C'est la raison pour laquelle ces amendements sont proposés.
J'aimerais simplement dire à mes collègues que s'ils n'aiment pas les amendements, s'ils n'aiment pas les limites relatives aux abonnés ou à la publicité, ils peuvent proposer un sous-amendement. Ils peuvent présenter d'autres recherches. Mais le projet de loi, dans sa forme actuelle, ne convient pas du tout. Il doit être corrigé. Il ne peut pas être adopté sans être modifié.
Par l'entremise de la couverture médiatique de cet enjeu, je constate que tous les partis souhaitent s'assurer que du contenu canadien est créé, financé et soutenu, surtout la création de contenu en français, qui doit être diffusé à l'échelle du pays.
Je pense que tout le monde ici souhaite… J'espère aussi que tout le monde comprend que nous ne devrions pas précipiter la mise en œuvre de systèmes qui pourraient par inadvertance limiter notre liberté d'expression.
J'aimerais donc répéter ce que j'ai déjà dit ailleurs. À ceux d'entre vous qui ont siégé au Parlement sous le premier ministre Stephen Harper et qui l'ont violemment critiqué, si vous n'étiez pas à l'aise avec le fait que Stephen Harper aurait eu le pouvoir de réglementer le contenu individuel des médias sociaux, vous devriez aussi être profondément mal à l'aise avec le fait que Justin Trudeau puisse le faire. Personne — et cela comprend le gouvernement — ne devrait avoir le droit de réglementer la liberté d'expression de la manière dont ce projet de loi permet de le faire.
En même temps, nous devrions aussi comprendre que les créateurs de contenu ont le droit de poursuivre leurs activités malgré les perturbations actuelles. Le Canada a traversé une période très instable de trois ou quatre ans lorsque l'entreprise Uber a perturbé le marché.
Il est vrai qu'il y a eu beaucoup de discussions à l'échelon municipal au sujet des règlements qui devraient être mis en œuvre pour réglementer Uber et sur la façon dont les chauffeurs de taxi ont été touchés par cette perturbation, mais à aucun moment au cours de ces débats des questions de plus haut niveau comme la liberté d'expression n'ont été menacées. Mais c'est exactement ce qui se passe ici dans le cadre de ce projet de loi.
J'implore donc mes collègues ici présents de penser à adopter des amendements intelligents. Encore une fois, s'il y a un problème avec l'amendement, veuillez proposer un sous-amendement plutôt que de le rejeter d'emblée.
Je comprends que des personnes comme Michael Geist et l'ancien commissaire du CRTC puissent être des sources d'irritation pour le gouvernement en ce moment, mais je connais ces personnes. Ce ne sont pas des partisans, loin de là. Ce sont des gens informés qui travaillent dans ce domaine depuis longtemps et qui s'intéressent sincèrement aux lacunes de ce projet de loi, car leur formation leur permet de déterminer qu'il est profondément défectueux, au point de nuire au pays. Ils ne font pas de la partisanerie ou de la politicaillerie; ils sont véritablement préoccupés. Dans le cadre de nos fonctions de législateurs, nous avons le devoir d'écouter leurs préoccupations à ce moment‑ci.
Je sais que mon collègue, M. Arnold, souhaite intervenir. Je rumine cette tirade depuis un certain temps. Il est essentiel que nous fassions les choses correctement.
J'aimerais que cela soit ajouté au compte rendu. Chers collègues, je suis sûre qu'un grand nombre d'entre vous ont suivi les audiences du comité du Sénat américain qui ont eu lieu il y a quelques années maintenant, lorsque Mark Zuckerberg a comparu devant un comité sénatorial et qu'on lui a posé des questions tellement pointilleuses. On pouvait le voir tenter d'expliquer aux législateurs ce qu'est un courriel. Je blague un peu, mais je n'exagère pas vraiment.
J'ai simplement l'impression que le débat que nous avons actuellement est compromis par un manque de compréhension du domaine en question, alors que nous devrions plutôt réfléchir au rôle du gouvernement dans les discussions élargies sur la perturbation qui touche les médias et la façon dont nous consommons et créons l'information. Je vous en conjure, plutôt que d'importer une structure réglementaire conçue il y a 40 ans et de l'appliquer à une nouvelle et belle façon de faire les choses, d'une manière qui pourrait sérieusement compromettre ce domaine et réduire au silence les voix de Canadiens qui ont enfin trouvé une plateforme…
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Champoux, j'avais dit que j'allais conclure, mais j'ai maintenant l'impression que je dois expliquer quelques autres choses, malheureusement. Si vous m'aviez donné 10 secondes de plus, j'aurais conclu. J'en étais à la grande finale, mais peut-être que je vais prendre quelques minutes de plus pour discuter de la motion à l'étude.
Encore une fois, pour mes collègues qui examinent l'amendement, il se lit comme suit:
9.2 (1) La présente loi ne s'applique pas aux entreprises en ligne qui comptent moins de 500 000 abonnés au Canada ou qui touchent moins de quatre-vingts millions de dollars par année en revenus de publicité, d'inscription, d'utilisation ou d'abonnement au Canada pour la transmission ou la retransmission d'émissions par Internet.
(2) Tous les deux ans suivant la date d'entrée en vigueur du paragraphe (1), le Conseil, avec l'approbation du gouverneur en conseil, examine les seuils relatifs aux abonnés et aux revenus et peut, par règlement, les augmenter au besoin.
C'est intelligent, car en fait, on met en place la forme et le fond dans un projet de loi, là où il n'y en avait pas. Cet amendement porte sur ce qu'est le principe de l'importance relative par rapport à l'organisme de réglementation, ce qui n'a été décrit nulle part ailleurs dans cette mesure législative. Encore une fois, des connaissances ont été acquises et des travaux ont été entrepris, je pense, pour soutenir cela comme point de départ.
Ce que j'aime dans la structure de cet amendement, c'est qu'il dit qu'il s'agit d'un point de départ, mais que le Conseil doit examiner tous les deux ans si c'est adéquat par rapport à la croissance réelle des créateurs de contenu canadien. Ce processus d'examen y est intégré, et c'est pourquoi il est élégant.
Je sais que certains collègues se sont demandé — je crois que c'était Mme McPherson — comment il est arrivé à ce seuil. Je crois que mon collègue s'est appuyé sur des livres blancs qui ont été produits partout dans le monde. Il a également intégré le mécanisme ici pour indiquer que nous aurons un processus d'examen afin de nous assurer que cela convient pendant une certaine période.
Je ne vais pas proposer de sous-amendement, mais si je devais apporter une modification, je pense que dans le processus d'examen, on devrait tenir compte également de l'effet qu'ont les titulaires et le système actuels. Pourquoi devrions-nous leur donner un passe-droit ici aussi? Pourquoi ne devrions-nous pas parler de leur auditoire? L'éléphant dans la pièce dont personne ne veut parler, c'est le nombre de téléspectateurs que CBC News compte le soir, ou le nombre de téléspectateurs que CTV News compte le soir, et pourtant, nous faisons tout pour les protéger, monsieur le président.
Peut-être s'agit‑il d'un sujet dont le Comité pourrait discuter également. Comment mettre en place des freins et des contrepoids pour les titulaires qui profiteraient du maintien du statu quo? Je pense que le processus d'examen qui est intégré ici est élégant — c'est bien — et on tient compte du fait qu'il s'agit d'un nouveau domaine de réglementation.
En intégrant un processus d'examen prévu dans l'amendement, on tient compte du fait que le projet de loi est arrivé presque brutalement, comme un chien dans un jeu de quilles, pour faire adopter à toute vapeur un processus réglementaire qui ne reflète pas vraiment la réalité de la création de nouveau contenu.
Encore une fois, je sais que mes collègues proposeront d'autres amendements pour essayer de faire ce dont nous parlons, c'est‑à‑dire souligner que nous ne devrions pas entraver la liberté d'expression et imposer un fardeau indu à une nouvelle source de revenus économiques pour les Canadiens, mais cet amendement est excellent.
J'espère que mes collègues examineront nos amendements, non pas d'un point de vue partisan, mais plutôt dans l'optique de bien faire les choses au nom des Canadiens — des femmes canadiennes, des Autochtones, des Noirs, des personnes de couleur et des membres de la communauté LGBTQ+, qui n'avaient guère de voix et qui ont maintenant des voix et des plateformes. Mettez en place des amendements pour les protéger et soyez clair sur le rôle de l'organisme de réglementation.
Je veux dire quelque chose à mon collègue, M. Rayes. C'est du bon travail. C'est excellent. Bravo. Vous avez bien servi vos concitoyens.
J'implore mes collègues qui siègent à ce comité de bien y réfléchir afin que, dans 10 ans, lorsque nous repenserons à ces audiences en comité, qui seront sans aucun doute évoquées dans de nombreuses contestations, nous soyons du bon côté par rapport à l'histoire et à la perturbation qui s'est produite.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Ce ne sera pas tellement long. Je pense qu'il n'y a plus de questions sur l'amendement que j'ai proposé, mais je veux prendre un dernier petit moment pour rappeler à tous les membres du Comité que l'objectif ultime est de fixer des balises. Nous considérons que les pouvoirs du CRTC doivent être encadrés. Nous savons tous à quel point la suppression de l'article 4.1 initialement proposé dans le projet de loi ainsi que les changements apportés à ce projet de loi tout au long du processus ont causé de la frustration.
J'invite les membres du Comité à tenir compte de cette demande, qui, je le répète, est tout à fait raisonnable, selon moi. Les seuils que nous proposons sont en deçà de ceux recommandés par l'Australie. Ils offriraient un minimum de protection aux utilisateurs et aux petits joueurs des réseaux sociaux, afin qu'ils ne soient pas contrôlés et ne se voient pas imposer de réglementation et de paperasse supplémentaires. Ces gens ne demandent rien d'autre que la liberté d'exprimer leur art, et pas juste chez nous, mais dans le monde entier.
Je pense que, comme Québécois et comme Canadiens, nous sommes fiers de voir des artistes réussir à l'extérieur. Au Québec, nous avons le Cirque du Soleil, que tout le monde connaît et qui s'est produit partout dans le monde. S'il avait été limité au Canada parce que d'autres pays l'avaient empêché d'aller faire des spectacles sur leur territoire, je ne suis pas certain qu'il aurait eu l'occasion de vivre le succès qu'il connaît.
L'idée est de ne pas nous refermer sur nous-mêmes. Nous devons plutôt montrer que nous sommes fiers et forts et qu'il y a du talent chez nous. Nous devrions être fiers de voir le talent de chez nous être exporté partout dans le monde et laisser la créativité de tout un chacun s'exprimer sur les réseaux sociaux.
La donne a changé. Des joueurs numériques comme Netflix et Disney+ sont venus s'ajouter au système de radiodiffusion que l'on dit fermé. Il y a aussi le système ouvert, dans lequel les radiodiffuseurs ont recours à certains algorithmes et laissent aux utilisateurs le choix du contenu qu'ils veulent télécharger.
Dans notre rôle de législateur, nous avons la responsabilité de protéger les utilisateurs et le contenu qu'ils diffusent. L'amendement proposé, qui vise à ajouter l'article 9.2 à la Loi sur la radiodiffusion, ne modifie pas le projet de loi de façon parfaite, j'en conviens. Personnellement, j'aurais aimé qu'il n'y ait aucune norme. Au moins, cet amendement permet de protéger un certain nombre d'utilisateurs.
Par ailleurs, comme vous le savez, en vertu des paragraphes 9.2(2) et 9.2(3) proposés, le CRTC aura l'occasion de revoir ces seuils tous les deux ans, si je ne me trompe pas. Je parle de mémoire, étant donné que le court préavis que nous avons eu pour cette rencontre ne m'a pas donné la chance d'aller chercher mes notes chez moi.
J'implore les membres du Comité de tenir compte de cela dans leur réflexion avant de voter. Je leur demande également de s'élever au-dessus des directives qu'ils ont reçues de leurs stratèges. Nous savons maintenant que ces derniers ont une espèce de mainmise sur le Comité. Il n'y a qu'à regarder ce qu'ils ont fait: le bâillon nous a été imposé puis, à la suite de discussions de corridor entre les whips, cette rencontre a été organisée sans que nous en soyons tous informés.
Je vous demande de nous permettre de faire notre travail et de nous assurer de protéger tous les Canadiens et les Québécois qui utilisent les réseaux sociaux pour diffuser du contenu. On ne parle pas juste de vidéos de chiens et de chats, comme certains le laissent croire pour essayer de simplifier la situation. On parle aussi d'artistes qui produisent du contenu de qualité, du contenu visant à informer les gens, par exemple des documentaires. Ils créent ce contenu sans budget, à l'aide d'outils simples et par des moyens technologiques démocratisés. Maintenant, les gens arrivent à créer des choses de grande qualité uniquement à partir de leurs téléphones, grâce à quelques applications vendues à très bas prix. Ces outils numériques permettent de démocratiser l'information et de créer du contenu.
Merci, monsieur le président.
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Comme le disait Orwell, parler de liberté n'a de sens qu'à condition que ce soit la liberté de dire aux gens ce qu'ils n'ont pas envie d'entendre. De toute évidence, les députés du parti ministériel au sein de ce comité ne veulent pas entendre ce que j'ai à dire, mais j'ai tout de même le droit de le dire. Les autorités réglementaires n'ont pas envie d'entendre ce que les Canadiens ont à dire. Ceux‑ci ont tout de même le droit de le dire.
Si les conservateurs doivent être les seuls à lutter pour la liberté d'expression, c'est ce que nous allons faire. Nous allons nous tenir debout pour défendre le droit des gens de dire ce qu'ils veulent et de s'exprimer librement sans ingérence ni coercition de la part de l'État. C'est la raison pour laquelle nous intervenons ici avec une telle conviction. C'est aussi pour cela que nous livrons bataille avec autant d'ardeur sur le parquet de la Chambre des communes et que nous sommes très fiers d'être le seul parti à s'être engagé à abroger le projet de loi et à rétablir la liberté d'expression en ligne pour tous les Canadiens.
De nombreux ministres de premier plan, y compris le lui-même, ont indiqué voir la pandémie comme une occasion pour eux d'étendre l'ampleur et l'amplitude des pouvoirs de l'État — et de conférer par le fait même une plus grande influence à leurs semblables. C'est dans cette optique qu'ils ont agi sur différents tableaux pour tenter de s'approprier de larges pans de l'économie, faire grimper en flèche les dépenses gouvernementales, restreindre la liberté de choix des parents quant à la façon dont ils veulent élever leurs enfants, et maintenant censurer ce que les gens disent en ligne.
Si les députés du parti ministériel croient que nous allons demeurer les bras croisés en permettant que de telles choses puissent se produire, c'est qu'ils ne tiennent aucunement compte de 800 années d'histoire parlementaire qui ont vu des représentants du peuple se lever sans relâche pour défendre leur liberté dans le cadre de ce régime dont nous avons hérité de toutes ces générations de nos prédécesseurs.
[Français]
Je ne suis pas étonné d'apprendre que les libéraux veulent que le gouvernement fédéral ait plus de pouvoirs et que les fonctionnaires fédéraux contrôlent les discours des gens. Par contre, je suis étonné d'apprendre que le Bloc québécois, qui prétend vouloir se séparer du Canada, et donc de l'autorité de l'État canadien, appuie un projet de loi donnant aux fonctionnaires fédéraux le pouvoir de contrôler les discours et les dires des Québécois. Le Bloc québécois devrait plutôt s'appeler le Bloc centralisateur, puisqu'il veut maintenant donner au gouvernement fédéral, à Ottawa, le pouvoir de contrôler ce que disent les citoyens et les citoyennes du Québec. En quoi cela est-il cohérent avec l'indépendance de la nation québécoise?
Nous, les conservateurs, sommes le seul parti qui défend la liberté d'expression des Québécois. Apparemment, nous sommes le seul parti à comprendre que le contenu des discours et les dires des gens ne relèvent ni de la compétence fédérale ni de la compétence provinciale, mais bien de la compétence individuelle. Chacun et chacune a la liberté de s'exprimer sans ingérence de l'État. Nous croyons que tous les Québécois devraient pouvoir décider quoi dire, quand le dire et comment le dire.
Je suis étonné de voir qu'un parti souverainiste donne à l'État canadien le pouvoir de contrôler l'expression des Québécois. C'est ironique. La plupart des Québécois seraient vraiment étonnés d'entendre que ce parti, supposément le Bloc québécois, est en faveur de donner beaucoup plus de pouvoirs au gouvernement fédéral dans ce dossier.
Nous, les conservateurs, sommes fiers de défendre l'autonomie des Québécois. Tous sont libres de dire ce qu'ils veulent et de choisir la manière dont ils s'expriment sur Internet et ailleurs. Même si les conservateurs semblent être les seuls à vouloir protéger ces libertés, j'en suis fier. En même temps, je dois avouer qu'il est décevant et étonnant qu'aucun autre parti ne soit prêt à en faire autant.
De ce que je vois, le Bloc québécois et les libéraux écoutent les lobbyistes, les fonctionnaires et les politiciens à Ottawa, qui veulent simplement protéger leurs intérêts en excluant les gens et en contrôlant le contenu. Ce que font les libéraux et les bloquistes constitue une attaque contre les artistes québécois et québécoises. Ces artistes auront l'occasion de choisir le seul parti qui est en faveur de la liberté d'expression, soit le Parti conservateur.
Voilà la nature du débat que nous tenons. Par contre, il reste encore du temps. Le Bloc québécois aurait encore l'occasion de constater que les Québécois ne veulent pas que le fédéral décide pour eux, et de comprendre que tout le monde, y compris les Québécois, doit avoir la liberté de s'exprimer.
[Traduction]
C'est vraiment le choix qui s'offre aux Canadiens. Tous les autres partis souhaitent conférer plus de pouvoir aux bureaucrates, aux lobbyistes et aux politiciens, alors qu'un seul souhaite redonner ce pouvoir au peuple, et c'est le Parti conservateur. Nous sommes les seuls à nous tenir debout pour défendre le principe suivant lequel les gens devraient pouvoir s'exprimer même s'ils sont en désaccord avec le gouvernement et la classe politique qui gravite autour. Je dois vous dire très franchement que je suis fier de nous voir adopter cette position de principe en exprimant nos points de vue et en défendant les millions de Canadiens qui vont être réduits au silence si ce projet de loi est adopté.
Nous avons pu constater chez les autres partis une volonté d'augmenter considérablement le pouvoir de l'État au détriment du peuple. Plus un État devient puissant, plus son peuple s'en trouve affaibli et diminué. C'est bien sûr le résultat visé avec ce projet de loi ainsi qu'avec de nombreux autres coups de force dont nous avons été témoins au cours de la dernière année.
Rappelez-vous de la première chose que le a faite au début de cette pandémie. Il a tenté de faire adopter une loi lui donnant le pouvoir de lever tous les impôts qu'il juge nécessaires pour quelque raison que ce soit, sans même à avoir à tenir un vote, et ce, pour une période de deux ans. Il souhaitait disposer de ce pouvoir jusqu'en 2022. Il lui aurait suffi d'émettre un décret pour instaurer une nouvelle ponction fiscale. C'est sans précédent au sein de notre système parlementaire. Suivant le principe de base voulant qu'il n'y ait pas de taxation sans représentation, le gouvernement ne peut pas prendre de mesures fiscales sans l'approbation du Parlement. Il a essayé de retirer ce pouvoir au Parlement dans le but d'imposer des taxes plus élevées au peuple canadien.
Mais, nous avons résisté et, grâce à l'appui des Canadiens qui ont joint leurs récriminations aux nôtres, nous avons fait reculer le premier ministre. Nous espérons qu'il reculera encore avant que ce projet de loi de censure soit adopté. Comme vous le savez tous, ce projet de loi n'a pas manqué de susciter un tollé. Nous l'avons entendu. Votre chef l'a aussi entendu. Malheureusement, au lieu de reconnaître qu'il y avait de l'opposition, le s'est plutôt senti menacé par celle‑ci. Il a indiqué que la dernière chose dont notre pays a besoin, c'est d'une intensification des manifestations de dissidence et d'un débat qui se prolongerait, parce qu'il ne veut pas entendre les gens qui ne sont pas d'accord avec lui. Il doit donc adopter une loi pour les faire taire, les réduire au silence et les empêcher de s'exprimer à l'avenir. C'est exactement ce que permet ce projet de loi.
Le projet de loi doit être abrogé dans sa totalité; pas un traître mot ne doit subsister. Il est aussi intéressant de noter que les doutes que j'avais au départ au sujet de ce projet de loi se sont révélés fondés. L'an dernier, alors que le projet de loi ne retenait pas encore beaucoup l'attention, j'ai affirmé sur le parquet de la Chambre des communes qu'il allait mener à une censure d'Internet. Le gouvernement avait cependant inclus un article prévoyant une exemption pour le contenu généré par les utilisateurs, c'est‑à‑dire celui qui est affiché jour après jour par de nombreux Canadiens. Le gouvernement s'est, pendant un temps, servi de cet article pour masquer ses véritables intentions de censure, mais les masques sont tombés il y a environ un mois et demi lorsque le gouvernement, avec l'appui des autres partis d'opposition, a supprimé cette mesure de protection qui était censée permettre à tous les Canadiens de continuer d'afficher ce qu'ils voulaient en ligne.
Ils l'ont tout simplement éliminé, et ce, même si la propre analyse du ministère au regard de la Charte a montré que le projet de loi s'appuyait sur cette protection pour rester constitutionnellement viable. Ils ont dit: « Ne vous inquiétez pas, ce projet de loi ne touchera pas à la liberté d'expression — il y a cette exclusion névralgique. » Puis ils ont supprimé cette exclusion, et nous voilà avec un projet de loi qui contrôlera le contenu en ligne et qui permettra au gouvernement de dicter ce que les gens voient et disent en ligne.
Nous allons continuer à nous battre contre ce projet de loi à toutes les étapes du processus dans le cadre de nos efforts pour le faire échouer. Je pense que le est dans une course effrénée pour le faire adopter, car il veut qu'il soit en place et bien en place avant les prochaines élections. Il pense peut-être que certains des éléments de censure contenus dans le projet de loi l'aideront à remporter les élections en lui permettant de supprimer les critiques à son égard lorsqu'il sera en campagne. Il croit qu'il pourra faire en sorte d'empêcher les gens de dénoncer la corruption de son gouvernement, sa mauvaise gestion de la pandémie et ses horribles échecs aux premiers stades de l'épidémie. Toutes ces choses pourront être supprimées en bloquant la route à ce que les gens disent en ligne.
Nous serons alors coincés, bien sûr, avec cette dynamique d'un très petit groupe de libéraux dans la tribune de la presse qui dictera sa version des choses et qui fera campagne pour le , sans que les Canadiens aient la possibilité de s'exprimer, de diffuser des renseignements et de faire circuler leurs propres réflexions en ligne. Je pense que c'est le scénario avec lequel le premier ministre se sent le plus à l'aise: 30 ou 40 journalistes libéraux de la tribune de la presse diffusant son message et attaquant ses ennemis, sans que personne ne soit autorisé à dire le contraire en raison d'une réglementation gouvernementale les empêchant de se faire entendre.
Je pense que beaucoup de libéraux ont été déconcertés par ce nouvel environnement des médias sociaux qu'ils ne peuvent pas contrôler. Pendant si longtemps, bien sûr, ils ont eu une telle emprise sur le discours, quand un petit oligopole d'entreprises médiatiques pouvait dominer la couverture de la presse quant à la chose politique. Dans cet environnement, les libéraux prospèrent, car un petit groupe d'élites dit à tout le monde ce qu'il faut penser, et ceux qui ne sont pas d'accord sont laissés en plan. Les libéraux veulent ramener ce modèle — un modèle que menacent la liberté de parole, la libre expression et la circulation des idées.
On ne peut pas maintenir un petit oligopole de voix médiatiques lorsqu'on a un marché libre et que les gens ordinaires peuvent lui faire concurrence. doit abolir le marché libre des idées et favoriser le retour d'un petit groupe de flagorneurs des médias à qui il donnera la capacité exclusive de dominer le discours. Ensuite, lorsqu'il sera revenu à cette situation d'avant, personne ne pourra le contredire ou contredire la ligne générale du parti.
Soyez assurés qu'en tant que conservateurs, nous nous battrons contre cela, et qu'en fin de compte, c'est nous qui allons gagner. Nous gagnerons ce débat. Nous renverserons ce projet de loi. Que nous le fassions avant ou après les élections, ce projet de loi sera rejeté et la liberté d'expression sera restaurée.
Merci beaucoup, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président. Je souhaite encore une fois la bienvenue à tous au Comité.
Je tiens à remercier le député de et la députée de , car ils sont tous les deux très suivis sur Facebook. C'est la préoccupation que nous avons au Comité. Lorsque vous atteignez plus de 500 000 abonnés, le gouvernement ou le CRTC commence à examiner vos activités.
Nous avons été précipités dans cette réunion du Comité aujourd'hui. Je pense que le président a dûment fait part de sa déception à ce sujet, car nous devions nous réunir vendredi matin. Je vois maintenant que nous allons également nous réunir demain matin, c'est‑à‑dire jeudi matin, de 11 à 13 heures. Comme nous le savons tous, nous sommes en train d'adopter ce projet de loi à la hâte. Il est imparfait, et nous en parlons déjà depuis un bon bout de temps.
J'ai déjà parlé de l'amendement de M. Rayes, et je l'aime bien — que cela ne s'applique pas aux entreprises en ligne « qui comptent moins de 500 000 abonnés au Canada ou qui touchent moins de quatre-vingts millions de dollars par année en revenus de publicité ». Nous avons utilisé ces chiffres, car ils correspondent plus ou moins à ce qui existe en Australie. Lorsque M. Rayes a présenté cet amendement, la chose avait été mûrement réfléchie. Nous avions des informations en provenance de l'Australie dont il s'est assurément inspiré.
C'est pourquoi nous avons proposé cet amendement. C'est un très bon amendement.
Je vais lire le deuxième paragraphe qu'il propose:
(2) Tous les deux ans suivant la date d'entrée en vigueur du paragraphe (1), le Conseil, avec l'approbation du gouverneur en conseil, examine les seuils relatifs aux abonnés et aux revenus et peut, par règlement, les augmenter au besoin.
Nous en avons même parlé plus tôt, monsieur le président, parce que le Conseil pourrait vouloir les diminuer au besoin, selon les règlements du CRTC.
Je pense que le député de a soulevé un très bon point. Nous n'avions pas beaucoup entendu parler du CRTC avant de recevoir son président ici. Nous savons tous que ce projet de loi aura d'importantes ramifications au CRTC. Vous m'avez écouté pendant des mois vous faire part de mes préoccupations concernant le CRTC. Je comprends, avec les récents changements apportés à l'octroi des licences, que certains souhaitent des licences d'une durée de sept ans parce que cela leur permettra de garder tout le monde sous contrôle. D'autres ne le souhaitent pas parce que, pour être tout à fait honnête, lorsque ce projet de loi sera adopté, pour peu qu'il le soit, nous imposerons des contraintes de temps très strictes au CRTC, à son président, Ian Scott, ainsi qu'aux membres. Nous savons tous, assis autour de cette table, que nous sommes préoccupés par le rôle du CRTC à l'égard de ce projet de loi.
Je l'ai vu en tant que radiodiffuseur conventionnel. Je l'ai vu pendant quatre décennies. Ils remettent la licence, puis ils ne reviennent pas là‑dessus avant six ans et demi, alors que les radiodiffuseurs conventionnels de ce pays ont violé leur accord avec le CRTC dès la première semaine du contrat de sept ans ou presque. Si vous avez l'intention d'accorder une trêve aux radiodiffuseurs conventionnels et que vous dites que vous allez supprimer le contrat de sept ans pour une licence, cela ouvre une autre boîte de Pandore. Je pense qu'au Canada, nous avons tous des préoccupations à ce sujet.
Le National Post a une base considérable au pays. Il est intéressant de noter qu'en première page du National Post d'aujourd'hui — et du Windsor Star, du Saskatoon Star Phoenix, tous les journaux que le Post possède à l'échelle du pays —, on trouve un message au . Les Canadiens sont moins nombreux qu'avant à s'abonner à nos journaux. Nous connaissons tous cette histoire, mais il était intéressant de voir l'éditeur du National Post signaler que l'entreprise était en difficulté. Comme le reste d'entre nous, ses propriétaires s'inquiètent de Google et de Facebook.
Je m'interroge vraiment sur le moment choisi pour publier l'article qui est paru à la une du National Post d'aujourd'hui. Sachant que nous avons moins de cinq heures pour examiner le projet de loi , l'ancien diffuseur que je suis se demande vraiment pourquoi cela s'est fait aujourd'hui. Pourquoi le 9 juin? Vous avez un éditorial d'une page entière dans tous les journaux que le National Post possède au pays — dans beaucoup d'entre eux — pour dire au premier ministre de s'occuper de Facebook, de Google et de tous les autres médias sociaux.
Le moment choisi était singulier. Je lis entre les lignes. Comme nous le savons, ils avaient la main tendue. Ils sont visés par les 600 millions de dollars déjà garantis à beaucoup d'intervenants de l'industrie canadienne de la presse, par cette somme que les libéraux ont donnée à de nombreux propriétaires de journaux. Pourtant, aujourd'hui, le mercredi 9 juin, deux jours avant la fin du débat et l'imposition du bâillon pour le projet de loi , nous avons un éditorial d'une page entière dans tous les journaux du pays qui appartiennent au National Post.
Je suis d'accord avec l'amendement. C'était intéressant aujourd'hui... et je suis heureux que les députés de et de aient été présents, car ils vont être ciblés. Ils auront facilement 500 000 abonnés. Ils tomberont sans problème dans la mire du CRTC — ils seront étiquetés. Ils n'auront peut-être pas les 80 millions de dollars par an en publicité, mais ils auront des millions d'adeptes sur Facebook. Selon moi, ils seront étiquetés.
Monsieur le président, je comprends très bien que les deux membres soient venus si tard devant le Comité, car ils sont inquiets. Ils se préoccupent de la liberté d'expression — de leur liberté d'expression —, car nous ne savons pas vraiment ce qui va se passer une fois que ce projet de loi aura été adopté.
Dans quelle mesure le CRTC interviendra‑t‑il? Je pense qu'il s'engagera de façon soutenue à l'égard des médias sociaux, plus qu'en ce qui concerne la télévision conventionnelle, la radio conventionnelle, dont on n'a pas vraiment beaucoup parlé dans ce projet de loi. J'ai rencontré de nombreux propriétaires de radio dans ce pays qui sont préoccupés par le fait que le projet de loi a déraillé. Nous essayions de sauver les stations de radio et de télévision du pays, puis, grâce à l'article 4.1 proposé, nous avons bifurqué sur les médias sociaux. En discutant avec de nombreux propriétaires de stations de radio et de télévision, j'ai pu constater qu'ils s'inquiètent de voir que ce projet de loi ne fait rien pour eux, mais tout pour les médias sociaux.
Maintenant, le CRTC dirige toute son attention sur Google, Facebook et sur tous les autres — Netflix, Disney, etc. Les gens à qui j'ai parlé sont très préoccupés par le fait qu'à l'avenir, si ce projet de loi est adopté avant la fin de la session, et aussi au Sénat, leurs préoccupations... Leurs préoccupations ont été débattues il y a longtemps. Nous avons tous eu des lobbyistes qui ont frappé à notre porte lorsque nous sommes revenus à l'automne et que nous avons commencé à examiner ce projet de loi. Il semble qu'il y a longtemps que nous avons ouvert les portes aux stations de radio de tout le pays, aux réseaux conventionnels, à gauche et à droite. Selon moi, ces intervenants sont maintenant tombés dans l'oubli.
Nous nous souvenons à peine de ceux qui sont venus au Comité en leur nom pour nous faire part de leurs préoccupations, car nous avons été absorbés par le débat sur la liberté d'expression auquel le projet de loi a donné lieu.
Le paragraphe 9.2(3) proposé de l'amendement est intéressant, car il dit ceci:
Le ministre établit un rapport portant sur l'examen du Conseil et le présente au comité permanent de chaque chambre du Parlement habituellement chargé des questions concernant la radiodiffusion.
En conclusion, monsieur le président, je tiens à vous remercier de vos propos lorsque nous nous sommes réunis aujourd'hui, un mercredi au lieu d'un vendredi. Vos commentaires sont bien observés d'un océan à l'autre, comme je le constate sur les médias sociaux. Moi aussi, j'ai été surpris qu'on nous rappelle plus tôt. Je pense que nous avions tous convenu de faire les cinq heures prévues — c'est‑à‑dire deux ce vendredi, deux lundi prochain et peut-être une de plus la semaine prochaine — et que certaines réunions risquaient d'être prolongées.
Cela dit, j'aime cet amendement. J'aime ce que M. Rayes a proposé à l'article 9.2, paragraphes (1), (2) et (3).
À mesure que nous avançons dans ce dossier, n'oublions pas les stations de télévision conventionnelles, n'oublions pas les réseaux. Ce que je redoute avec ce projet de loi, c'est que nous assistions à un nouveau carnage dans le secteur de la télévision et de la radio s'il est adopté.
Nous en avons vu assez au cours des deux dernières années, mais je crains maintenant que nous ayons oublié ceux dont nous devions nous occuper en priorité avec ce projet de loi. Si ce projet de loi est adopté, le carnage des mises à pied risque d'être énorme lorsqu'arrivera l'automne.
Merci beaucoup, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président, de me permettre de présenter l'amendement CPC‑9.3.
Je vous prie de m'excuser pour tantôt. En plus de voter, j'ai fait un signe. Comme vous le savez tous, les lumières dans la salle de comité sont automatiques. Notre rencontre est longue, les lumières se sont éteintes d'un coup, et je suis légèrement claustrophobe.
Cela dit, je vous présente tout de suite l'amendement CPC‑9.3. Il propose que le projet de loi , à l’article 7, soit modifié par adjonction, après la ligne 14, page 8, de ce qui suit:
9.2 L’entreprise en ligne offrant un service de média social est réputée ne pas exercer un contrôle de la programmation sur les émissions téléversées par tout utilisateur du service de média social qui n’est pas le fournisseur du service ou son affilié, ou l’agent ou le mandataire de l’un d’eux.
C'est donc un nouvel article que nous proposons d'ajouter à la Loi sur la radiodiffusion.
J'aimerais exercer mon droit d'expliquer cet amendement, étant donné que nous n'avons peut-être pas tous eu la chance d'en jaser. Il correspond un peu à ce que nous tentons de faire, c'est-à-dire améliorer le projet de loi à la suite de la suppression de l'article 4.1 initialement proposé dans le projet de loi et du refus d'y réintégrer des dispositions semblables par l'entremise de notre amendement CPC‑9.1.
Tantôt, il était question de protéger les utilisateurs ou les petits joueurs qui sont sur les réseaux sociaux et qui ne font pas partie du système de radiodiffusion dit fermé. À la base, l'objectif de ce projet de loi était de réglementer les entreprises de radiodiffusion comme Netflix et Disney+. Cependant, comme nous le savons tous, celui-ci a pris une direction complètement différente depuis le début de ce débat. Nous voyons donc une lacune à cet égard.
Selon la définition proposée dans le projet de loi, le « contrôle de la programmation » signifie le contrôle de la sélection des programmes à transmettre, mais n'inclut pas le contrôle de la sélection des services de programmation à des fins de retransmission. Nous pensons que le CRTC ne devrait pas considérer que les sites de médias sociaux doivent exercer un contrôle de la programmation pour ce qui est du contenu téléversé par les utilisateurs. Le CRTC se trouverait à faire de la réglementation excessive, ce qui rendrait la situation extrêmement difficile pour ces utilisateurs. Cela augmenterait la bureaucratie et causerait un certain stress à ces gens qui utilisent les réseaux sociaux de façon tout à fait libre.
Ce n'est pas tout le monde qui perçoit cela, mais je répète qu'il y a vraiment une différence, comparativement à un radiodiffuseur dans le système qu'on dit fermé. Les gens ont tous déjà utilisé Netflix. Lorsqu'on se connecte à Netflix, on voit une programmation. Sur le plan de la découvrabilité, on peut s'imaginer qu'il doit être assez simple d'aller voir, parmi toutes les émissions qui sont offertes, la programmation dite canadienne, ou plus particulièrement des émissions francophones ou québécoises.
Quand on pense à Netflix, on pense à une émission dans un cadre précis. Je pense à la série française Lupin, dont nous attendons tous la deuxième saison, qui va sortir le 11 juin. Ce sera dans la programmation, c'est réglé, c'est clair pour tout le monde. Cette programmation ne peut pas changer à tout bout de champ. Quand une saison est terminée, on attend la sortie de la deuxième saison, qui prend un certain temps pour être produite. Tant mieux si c'est fait avec des artistes qui proviennent de notre pays, qu'ils soient québécois, canadiens, francophones, anglophones, autochtones ou autres.
Par ailleurs, il y a les radiodiffuseurs du système qu'on dit ouvert, ce qui comprend les réseaux sociaux dans certains cas. Le cas échéant, cela peut toucher tous les utilisateurs. Moi, je ne suis pas une entreprise comme Netflix, mais je peux publier des choses sur les réseaux sociaux. Mon collègue M. Poilievre, qui s'est exprimé sur la question tout à l'heure, a beaucoup plus d'abonnés que moi. Je suis convaincu qu'il ne veut surtout pas qu'un organisme fédéral ait son mot à dire sur le contenu qu'il veut publier.
Dans une décision rendue récemment, un juge a ramené à l'ordre CBC/Radio‑Canada, qui reprochait au Parti conservateur d'avoir publié une vidéo comportant des extraits d'émissions publiques. On ne veut surtout pas que des utilisateurs, qu'il s'agisse de politiciens, de citoyens ou d'artistes, soient réglementés de cette façon.
L'objectif de l'amendement est de supprimer la notion selon laquelle les sites de médias sociaux exercent un contrôle sur la programmation. L'approche que nous proposons aujourd'hui, sur le plan des pratiques, est en conformité avec celle de l'Union européenne dans sa directive sur les services de médias audiovisuels. Donc, nous n'inventons rien, c'est important de le dire. Cela nous permettrait de nous conformer aux pratiques internationales de pays qui tentent de trouver une façon juste et équitable d'inclure les réseaux sociaux. Ce que je propose dans l'amendement CPC‑9.3 n'est pas farfelu. C'est parfaitement aligné sur les pratiques en cours dans l'Union européenne.
L'Union européenne utilise le concept de responsabilité éditoriale, ce qui correspond approximativement à notre concept de contrôle de la programmation, pour différencier les services comme YouTube des autres joueurs du système de radiodiffusion dit fermé et des plateformes comme Netflix ou Disney+. L'Union européenne fait une distinction à ce sujet, ce que ne font pas le gouvernement libéral actuel et le ministre . C'est peut-être pour cela que ce dernier était si mêlé lors des différentes entrevues qu'il a données. Non seulement les conservateurs et les partis de l'opposition, mais tous les Canadiens, les experts et les analystes politiques ont pu constater son manque de compréhension de cet enjeu, qui est extrêmement complexe. C'est quelque chose de nouveau; tout cela n'existait pas il y a 30 ou 40 ans. Par notre proposition, nous tentons de trouver un juste équilibre, ou du moins d'améliorer le projet de loi qui a été présenté.
Je disais donc que l'idée était de différencier les services comme YouTube des autres joueurs du système de radiodiffusion dit fermé et des autres plateformes.
Selon la directive de l'Union européenne, la responsabilité éditoriale de la programmation signifie l'exercice d'un contrôle effectif à la fois sur la sélection des programmes et sur leur organisation, par exemple dans une grille chronologique.
Comme je l'expliquais tantôt, sur Netflix, il y a une grille chronologique établie. Il n'y a pas un va-et-vient de la programmation ni d'algorithmes qui font que tout le contenu peut changer en temps réel, ce qui rend tout simplement impossible l'application de mesures pour contrôler la découvrabilité sans pénaliser certains artistes et certains citoyens canadiens et québécois qui utilisent les réseaux sociaux pour se faire entendre.
On parle donc ici d'un contrôle sur l'organisation des émissions de télévision dans une grille chronologique ou, dans le cas des médias audiovisuels à la demande, dans un catalogue. C'est une prestation de services.
Nous pensons qu'il est nécessaire de faire une distinction pour inclure les services de partage de vidéos.
L'Union européenne a expressément reconnu qu'une plateforme de partage de vidéos qui utilise des algorithmes et des moyens automatiques pour organiser le contenu n'en a pas nécessairement la responsabilité éditoriale. C'est quelque chose d'extrêmement important. J'aimerais que tout le monde comprenne bien ce que je dis. Ce n'est pas nous qui disons cela, mais bien l'Union européenne. Si ces plateformes n'ont pas la responsabilité éditoriale des contenus, comment peut-on les contraindre à assurer cette découvrabilité?
Dans le cas de YouTube, il est important de préciser que quelque 500 heures de vidéos sont téléversées chaque minute dans le monde. Je le répète: sur YouTube, 500 heures de vidéos sont téléversées chaque minute. On prend souvent l'exemple de YouTube parce que c'est un des plus gros joueurs, mais il y a toutes les autres plateformes que nous ne saurions nommer. Nous, politiciens, fonctionnaires ou autres personnes, sommes parfois dans une bulle et nous ne connaissons même pas toutes les autres plateformes que les jeunes utilisent en ce moment, ni toutes celles qui seront créées dans l'avenir et utilisées par les générations qui nous suivront. Les technologies évoluent tellement vite. Il y a cinq ans, personne ne connaissait TikTok. Aujourd'hui, même les politiciens subissent de la pression pour utiliser cette plateforme et y mettre des vidéos où on les voit danser ou chanter. Certains le font; personnellement, je ne suis pas rendu là.
Le modèle de YouTube présente des vidéos aux utilisateurs en fonction de leurs critères de recherche. Ce n'est pas YouTube qui décide du contenu à suggérer, mais cela s'effectue en fonction des requêtes des utilisateurs. Si je veux voir du contenu canadien ou un artiste canadien, si j'ai envie d'écouter une chanson de Céline Dion et de l'envoyer à quelqu'un par la suite, c'est moi qui fais ma propre recherche. Si je veux voir du contenu canadien, je vais taper « chanteur canadien » dans Google et, croyez-moi, la réponse va apparaître. Les gens savent comment programmer des mots clés pour qu'on les découvre. Nous n'avons pas besoin de demander à YouTube de le faire à notre place. Nous sommes tous capables de le faire. Je suis capable, les membres du Comité sont capables, tous les citoyens et toutes les citoyennes sont capables de le faire.
Donc, les gens vont faire eux-mêmes leurs requêtes selon leurs préférences. Effectivement, dans certains cas, YouTube va recommander du contenu en fonction de l'historique de recherche des utilisateurs ou du contenu qu'ils ont déjà écouté, entre autres.
Pour ma part, je suis abonné à Spotify. J'ai toujours cinq listes qui me sont offertes en fonction du type de musique que j'écoute. Donc, quand je suis tanné d'écouter la liste de musique que mes enfants m'ont préparée, parce que je ne suis pas capable d'en créer une moi-même, je peux en choisir une autre parmi les cinq qui me sont suggérées. Le contenu proposé varie. Cela me permet d'écouter des nouveautés.
En raison du type de musique que j'écoute, particulièrement de la musique du Québec, j'ai découvert un jeune artiste de la relève. Je ne sais pas si vous allez me croire, mais c'est le fils d'une des meilleures amies de ma femme. Cette amie demeure à trois heures de route de chez nous. Par hasard, Spotify m'a fait découvrir ce jeune artiste au moyen de ma liste de musique, alors que je ne savais même pas qu'il était sur cette plateforme. J'étais très fier de l'appeler pour lui dire que Spotify me l'avait fait découvrir et que mes enfants l'écoutaient à leur tour, grâce à mes listes de musique, et ainsi de suite. C'est un jeune artiste qui est en train de faire sa marque. Sa musique est maintenant entendue par des gens dans toute la francophonie, et non seulement par des gens du Québec et du Canada. Vous pouvez donc imaginer l'élan que cela peut donner à sa carrière qui commence.
Donc, un média social dont l'offre de contenu est presque infinie ne peut pas être traité de la même manière qu'une plateforme qui commande et acquiert un contenu précis comme Netflix. Il est impossible, voire utopique d'imaginer que, par l'entremise du projet de loi , nous pouvons demander au CRTC de gérer de la même façon les joueurs du système de radiodiffusion fermé, les plateformes comme Netflix et Disney+, ainsi que les réseaux sociaux.
Le CRTC n'a même pas été capable d'établir des règles claires entre les grands et les petits joueurs du domaine des télécommunications concernant les tarifs concurrentiels. Nous le savons tous, nous en parlons à la Chambre des communes présentement. Le CRTC trouvait cela trop complexe de trouver un équilibre entre les grands joueurs et les petites entreprises, lesquelles font baisser les prix pour l'ensemble des consommateurs.
Nous leur demandons maintenant de trouver une façon d'aller jouer dans les algorithmes de plateformes sur lesquelles 500 heures de vidéos sont téléversées chaque minute.
Imposer des normes et des obligations à ceux qui contrôlent le contenu est logique lorsque ce contenu est commandé et que les contrôles peuvent être exercés efficacement. Je tiens à le dire aux gens qui nous écoutent.
Les services fournissant des fonctions s'apparentant à celles d'un moteur de recherche, qui aident les utilisateurs à trouver du contenu, ne peuvent pas être considérés comme ayant un contenu organisé. C'est tout simplement impossible. On ne peut pas considérer non plus qu'ils ont sélectionné du contenu pour leurs utilisateurs.
L'Union européenne a reconnu cette différence, dans leur nature même, entre les plateformes ouvertes et les plateformes fermées. Comment se fait-il que l'Union européenne soit capable de comprendre cela, mais pas le gouvernement libéral et son ? Les bras m'en tombent quand je vois cela.
Si nous décidions d'aller de l'avant, si le Canada appliquait les mêmes normes et obligations de diffusion au contenu généré par les utilisateurs, qu'il s'agisse d'une plateforme ouverte comme YouTube ou encore d'une plateforme comme Disney+, nous serions le seul pays au monde à le faire. Je répète: nous serions le seul pays au monde à le faire.
Après avoir entendu les explications données par le lors de ses différentes entrevues, je suis inquiet que nous soyons le seul pays au monde à mettre en application une telle réglementation, surtout lorsque nous n'avons pas une bonne compréhension des détails techniques dont nous discutons. Pour notre part, nous ne sommes pas des experts; ce sont des experts qui sont venus nous en parler.
Je n'ai pas parlé de liberté d'expression ni de découvrabilité de manière approfondie. J'ai parlé d'une situation qui est problématique en ce moment. Donc, nous devons absolument trouver une façon d'améliorer ce projet de loi imparfait, malgré le fait qu'on nous a imposé un bâillon. De toute façon, les libéraux pourront agir comme ils l'entendront, avec l'aide du Bloc québécois et du NPD. Même si le NPD avait déchiré sa chemise pour dire à quel point le fait d'imposer le bâillon n'avait pas de bon sens, il a pris part aux discussions pour organiser en douce notre rencontre d'aujourd'hui, à laquelle nous avons été convoqués sans préavis.
Or, quand le projet de loi va arriver au Sénat, pensez-vous que les sénateurs n'essaieront pas d'en combler les lacunes? Ils sont intelligents, eux aussi. En plus, nous n'aurons même pas fini de traiter tous les amendements que nous devions traiter. Les sénateurs ne voudront certainement pas voter sans avoir fait ce travail rigoureux, sans avoir étudié tous ces amendements.
Il va nous rester une semaine et demie avant la fin des travaux à la Chambre des communes. Nous savons déjà que le gouvernement libéral fait son recrutement en vue des élections qui devraient être déclenchées dès le retour des vacances d'été. Autrement dit, on met la charrue avant les bœufs, car on va inévitablement se heurter à un obstacle lorsque le projet de loi sera rendu au Sénat. Même si, au moyen de diverses manœuvres, les libéraux réussissent à accélérer le processus, il va y avoir une contestation.
Certains pensent peut-être que l'adoption de ce projet de loi nous permettra d'offrir du soutien aux infrastructures culturelles du Canada dès demain matin. Le ministre essaie de faire croire à tout le monde qu'en ce moment, nous perdons chaque mois 70 millions de dollars qui pourraient être réinvestis dans la culture. De toute façon, quand vient le temps de débloquer des fonds, les libéraux n'ont aucun problème: ils en impriment, de l'argent. Pour eux, l'argent tombe du ciel. S'il y a une urgence et qu'il faut offrir du soutien, ils n'ont aucune difficulté à trouver de l'argent. Ils trouvent des façons indirectes de le faire.
Ce que je propose aujourd'hui, par l'amendement CPC‑9.3, c'est une autre tentative. Plus tôt, l'amendement CPC‑9.2 a été rejeté. Pourtant, nous proposions des seuils qui étaient en deçà de ceux de l'Australie, qui est censée être le modèle actuel en la matière. J'ai choisi des seuils inférieurs en me disant que j'allais peut-être convaincre ainsi mes collègues du Bloc québécois, du NPD et du Parti libéral qu'il fallait absolument des balises de base, qu'on ne pouvait pas laisser cela complètement entre les mains du CRTC sans tracer de lignes. Nous avons vu ce qu'il en était, dans le cas du contenu francophone.
Je pense à mon collègue Martin Champoux. Il sait à quel point je l'aime.
En passant, monsieur Champoux, j'ai des muffins pour vous, dans mon auto. Je pensais vous voir. Cependant, comme je pars après la réunion pour aller chercher ma fille à Montréal, je ne pourrai pas vous les remettre aujourd'hui. J'espère cependant vous revoir avant le 23 juin.
Je n'arrive pas à comprendre que les gens du Bloc québécois acceptent de donner plus de pouvoirs à un organisme canadien qui a de la difficulté à gérer cela, alors même qu'ils voudraient que la priorité soit accordée à la culture francophone et québécoise. Ce qui se passe actuellement va contre toute logique.
On dit qu'il faut soutenir le contenu. Nous allons le faire. Nous voulons que la Loi s'applique aux radiodiffuseurs numériques d'une façon équitable, comparativement aux radiodiffuseurs traditionnels. Or, nous sommes maintenant dans un tout autre univers, depuis qu'il est question de tous les médias sociaux.
Les lettres ouvertes que nous voyons partout prônent le partage des revenus publicitaires comme moyen d'aider nos médias écrits. Ce projet de loi ne prévoit aucune mesure d'aide. Ce n'est pas pour rien que tous ces éditeurs disent haut et fort que le gouvernement n'a rien fait. Il n'a rien fait, dans le cadre de ce projet de loi, pour réglementer le rôle de CBC/Radio‑Canada. Il n'a rien fait non plus pour les auteurs, qui protestent en disant qu'on n'a rien fait pour eux.
D’anciens commissaires et hauts dirigeants du CRTC représentant maintenant plusieurs groupes, notamment Timothy Denton, Konrad von Finckenstein, Peter Menzies, Michel Morin et Philip Palmer, qui a été conseiller juridique au ministère de la Justice et, si je ne me trompe pas, chef du contentieux au ministère des Communications. Tous ces gens, qui connaissent la structure du CRTC pour y avoir travaillé, disent qu'il faut absolument arrêter cela, que c'est tout simplement insensé.
Cela s'ajoute aux propos de tous ces professeurs de droit. Il n'y a pas que Michael Geist; il y en a plein d'autres qui se sont levés. Ces gens savent que ce projet de loi, advenant son adoption, sera immédiatement contesté.
Présentement, nous ne pouvons pas jouer du tout notre rôle de législateur afin d'aider le milieu culturel, car on a imposé le bâillon aux parlementaires qui tentent de travailler en vue de corriger et d'améliorer le projet de loi actuel.
Je vais m'arrêter ici, pour le moment. J'aurai peut-être d'autres commentaires à faire plus tard, car je suis convaincu que certains vont poser des questions aux fonctionnaires sur les répercussions que nos propositions pourraient avoir.
Je tiens juste à rappeler aux gens que, dans leur réflexion sur ce projet de loi, ils devraient tenir compte de la différence qu'il existe entre les médias ou les radiodiffuseurs numériques qui génèrent du contenu dans une structure définie, d'une part, et les réseaux sociaux, d'autre part, qui sont des plateformes qui génèrent du contenu dit ouvert. Ce sont deux choses complètement différentes. On ne peut pas considérer Netflix au même titre qu'un réseau social. Le citoyen ne peut pas aller mettre du contenu sur Netflix, mais il peut aller en mettre sur YouTube. Cette plateforme peut servir de tremplin aux artistes pour se faire découvrir par d'autres utilisateurs dans le monde. Par la suite, les Netflix de ce monde ou les radiodiffuseurs traditionnels peuvent donner de la visibilité à ces artistes par l'entremise de documentaires ou de nouvelles émissions. Tout cela contribue à augmenter le nombre d'histoires de réussite ainsi que la découvrabilité de nos artistes québécois, canadiens, francophones, anglophones, autochtones ou de quelque origine que ce soit.
J'espère que vous allez tenir compte de cette recommandation que je vous fais par l'entremise de l'amendement CPC‑9.3.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président, merci, monsieur Genuis.
J'aurai quelques questions à poser à M. Ripley, mais avant d'en arriver là — parce que nous avons couvert beaucoup de terrain lié au projet de loi et allant au‑delà de celui‑ci —, je tenais juste à vous rappeler peut-être deux ou trois choses, à vous et surtout à M. Rayes, ce que j'ai constaté pendant je l'écoutais.
L'une d'entre elles, c'est que nous avons adopté l'article 2 beaucoup plus tôt au cours de cette étude de la mesure législative, et que cet article a, en fait, créé une exclusion concernant le contenu téléchargé par les utilisateurs.
En outre, si M. Rayes jette un coup d'œil aux modifications que nous avons apportées au moyen de l'amendement G‑11.1, il constatera que la règle de la possibilité de découvrir le dommage qui s'applique aux entreprises de médias sociaux est différente. Je dois préciser qu'elle vise les « entreprises de médias sociaux », et non les personnes qui téléchargent leur contenu. Je tenais simplement à clarifier ce point, car nous avons couvert beaucoup de terrain, et il est parfois difficile de se rappeler exactement ce que nous avons fait.
Nous avons eu de nombreuses discussions concernant nos artistes et l'objectif du projet de loi. Je pense qu'il a toujours été clair que l'objectif du projet de loi est d'obtenir que les géants du Web qui gagnent de l'argent ici, au Canada versent une partie des revenus qu'ils réalisent dans notre pays à nos artistes canadiens. La décision des conservateurs de bloquer le projet de loi remonte en fait à la période précédant même le moment où il a été renvoyé au Comité. Elle remonte à l'époque où la question a été débattue pour la première fois à la Chambre. Je le précise simplement pour remettre un peu les choses en contexte pendant que nous avons cette conversation.
Je crois que l'une des questions soulevées tout à l'heure par un intervenant portait sur l'identité des artistes qui souhaitent bénéficier de ce soutien. Je suppose que je peux comprendre d'où vient cette question, compte tenu des déclarations faites par la députée conservatrice de qui a souvent assisté aux séances de notre comité. Elle a déclaré que le projet de loi visait à soutenir les artistes qui « sont incapables de gagner leur vie avec ce qu'ils produisent... [et] ont besoin de subventions versées par le gouvernement ». Elle a également déclaré que les artistes peuvent « demander cet argent afin de pouvoir continuer de créer du contenu que les Canadiens ne veulent pas regarder ».
Au cours de certaines des déclarations qui ont été faites aujourd'hui, des intervenants se sont demandé qui étaient ces artistes, parce que de nombreuses allusions à des groupes de pression ont été faites. Des artistes comme Yannick Bisson, qui est la vedette et le réalisateur de l'émission Les Enquêtes de Murdoch, laquelle est très populaire ici, au Canada, et dans le monde entier, ont exprimé leur appui à cet égard. Il y a Jean Yoon qui joue dans l'émission Kim's Convenience, laquelle est également populaire ici, au Canada, et dans le monde entier. Il y a aussi le réalisateur, je crois, de l'émission Corner Gas.
Si l'on examine les artistes qui ont reçu des fonds de FACTOR — et que, selon la députée de , nous ne voulons pas regarder —, il y a des gens comme Jessie Reyez, qui a reçu une nomination aux prix Grammy, Gord Downie, les Arkells et des émissions comme Schitt's Creek.
Je le précise simplement pour remettre un peu les choses en contexte parce que nous avons eu de nombreuses conversations aujourd'hui au sujet du projet de loi. Je pense qu'il est important d'ancrer ces conversations sur ce que nous essayons de faire en adoptant ce projet de loi, sur les artistes que nous essayons de soutenir, sur les artistes qui se sont exprimés individuellement pour montrer leur soutien, ou qui — si nous passons en revue les systèmes de subvention — ont reçu un soutien afin de pouvoir créer les grandes œuvres d'art que nous aimons au Canada et qui sont aimées dans le monde entier.
À ce propos, lorsque j'ai examiné cet amendement particulier, j'ai essayé de comprendre ce qu'il ajoute à l'article 2.1.
Puis‑je demander à M. Ripley comment cet article est lié à cet ajout au projet de loi?
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Merci, monsieur le président.
C'est un plaisir de voir les membres du Comité. Je crois que c'est la première fois que j'assiste à une séance du Comité du patrimoine canadien, mais de loin, j'ai suivi de très près vos délibérations en raison du grand intérêt que je manifeste à l'égard de la teneur du projet de loi en général.
De plus, j'ai un amendement particulier à proposer, dont vous êtes au courant, je crois, et qui traite des questions de diffusion ayant trait aux abus des droits de la personne. D'un point de vue réaliste, compte tenu des importantes questions de liberté d'expression qui doivent être discutées, il est malheureusement probable que nous n'aurons même pas l'occasion d'étudier cet amendement en comité. Néanmoins, je me réjouis de l'occasion d'être parmi vous.
Je suis favorable à l'amendement de M. Rayes, qui, selon moi, fait progresser la liberté d'expression et la protège. Il ne la protège pas entièrement, évidemment, car il y a encore des préoccupations concernant la structure du projet de loi, mais c'est un pas important dans la bonne direction.
Je suis frappé par deux questions que Mme Dabrusin a soulevées à propos des commentaires que M. Rayes a formulés au sujet de la nature du projet de loi ou de ces objectifs. Cela témoigne, je suppose, d'une frustration plus générale à l'égard des types d'arguments qui sont souvent avancés par le gouvernement pour défendre les positions qu'il adopte.
L'une d'elles consiste à s'appuyer très fortement sur l'intention du projet de loi, en affirmant que « l'intention du projet de loi est de », « nous avons l'intention de » ou « nous avons l'intention de faire ceci ». Une affirmation d'intention n'est tout simplement pas rassurante lorsque des experts — d'anciens commissaires du CRTC, des universitaires et d'autres personnes — qui ont examiné le libellé du projet de loi déclarent que « c'est ce qu'il fait » et que « c'est ce qu'il indique ». Les bonnes intentions ne suffisent pas. Surtout en ce qui concerne les législateurs, ce qui compte, c'est ce que renferme le projet de loi. Je pense que nous devrions examiner le projet de loi et l'amendement dont nous discutons, et je crois que nous devrions élaborer notre approche en fonction de la formulation de l'amendement lui-même et de la formulation du projet de loi lui-même, et non en fonction d'une quelconque affirmation à propos de leurs intentions.
L'autre erreur logique qui sous-tend, je suppose, une grande partie du raisonnement du gouvernement à l'égard du projet de loi — et, franchement, à l'égard d'autres projets de loi, je crois —, c'est la création de faux choix, le sentiment que nous devons choisir une solution ou une autre, alors que nous ne sommes pas réellement forcés de choisir. Lorsque nous envisageons d'adopter un projet de loi complexe sur la réforme de la radiodiffusion, je pense que nous devrions distinguer non pas un ou deux objectifs, mais un large éventail d'objectifs, et qu'ensuite, nous devrions entreprendre l'élaboration d'un cadre qui permet d'atteindre tous ces objectifs.
Les membres du gouvernement ont déclaré qu'ils essayaient de soutenir les artistes et de s'en prendre aux géants du Web et que, par conséquent, voilà les mesures qu'ils prenaient. Les conservateurs ont déclaré que la protection de la liberté d'expression était importante et que, dans sa forme actuelle, le projet de loi soulève des questions sur la liberté d'expression — des experts l'ont indiqué —, et je pense que l'amendement dont nous discutons actuellement franchit certainement une étape vers la réponse à ces préoccupations relatives à la liberté d'expression, en offrant une plus grande protection aux utilisateurs et au contenu généré par les utilisateurs.
Je dirais simplement que, d'une manière générale, il n'y a aucune raison de devoir choisir entre le soutien aux artistes et la protection de la liberté d'expression. En tant que personne qui n'est pas un membre régulier du Comité et qui n'est pas non plus un grand expert en matière de politique de radiodiffusion — bien que je m'y intéresse de plus en plus —, il me semble qu'il ne devrait pas être difficile d'établir un cadre qui soutient les artistes, qui impose aux grandes entreprises en ligne ce que les législateurs considèrent comme un taux de rendement équitable et qui protège également la liberté d'expression. Il y aurait une variété de cadres différents qui permettraient de faire cela. L'un d'entre eux consisterait à utiliser simplement des taxes et des subventions.
Le dernier argument que le avance pour défendre le projet de loi, c'est que des fonds doivent être versés aux artistes et qu'en retardant le projet de loi, on retardera le versement de cet argent aux artistes. Eh bien, le gouvernement pourrait mettre au point de nombreux mécanismes différents pour faire parvenir l'argent aux artistes, et il n'a pas besoin du projet de loi pour le faire. Un éventail de cadres différents sont disponibles.
Je pense qu'il incombe aux gouvernements de ne pas tenter de mettre en place de faux choix. Nous ne sommes pas forcés de choisir entre un engagement envers les artistes, le désir de voir le contenu se développer au Canada et la liberté d'expression. Nous pouvons et devons chercher à protéger ces deux objectifs.
Certains des amendements que nous avons proposés n'enlèvent rien à l'objectif de soutien aux artistes. En outre, avant les amendements proposés par le Comité, lorsque le projet de loi était en deuxième lecture, le gouvernement a fait valoir qu'il s'agissait d'un cadre pour soutenir les artistes. C'était avant que le gouvernement n'apporte les changements qui ont tant retenu l'attention du grand public — certainement dans ma circonscription — en raison de leurs répercussions sur la liberté d'expression.
Monsieur le président, je tiens également à souligner ce point, car je pense qu'il s'applique particulièrement bien à l'amendement, étant donné qu'il concerne la découvrabilité sur les médias sociaux et ce qui sera exigé des utilisateurs, etc. Je pense que nous devons comprendre en profondeur ce qu'est la liberté d'expression et pourquoi elle est importante. La liberté d'expression n'est pas seulement le droit de dire quelque chose. Il ne s'agit pas d'une sorte d'affirmation abstraite dans le vide voulant que les gens devraient pouvoir dire ce qu'ils veulent. Elle part de la reconnaissance que le fait pour les gens de parler et d'être entendus permet un échange d'idées; cela permet l'échange d'information et de concepts par l'entremise de la parole conventionnelle, ainsi que par des moyens artistiques et d'autres formes; cela permet la présentation de ces idées; cela permet l'écoute de ces idées par un public plus large et l'évaluation de ces idées; puis cela permet la création de combinaisons et de synthèses qui, dans un certain sens, font avancer notre société.
La liberté d'expression est appréciée parce qu'elle permet aux gens d'entendre, d'évaluer et de comparer différentes options, de décider ce qu'ils aiment et ce qu'ils n'aiment pas, de décider ce qui, selon eux, transmet des messages vrais ou faux dans certains contextes, de comparer ces messages et d'en tirer des conclusions. C'est pourquoi la liberté d'expression est importante. C'est l'argument central et, à mon avis, l'argument le plus influent en faveur de la liberté d'expression que John Stuart Mill avance dans son ouvrage intitulé De la liberté, à savoir que les libertés permettent la présentation d'idées et d'expériences de vie qui donnent l'occasion aux gens d'écouter et de tirer des conclusions.
Ce que fait ce projet de loi, je pense, et ce que fait la défense de ce projet de loi par le gouvernement, c'est d'essayer de séparer le concept du droit de parole de celui du droit d'être entendu. Il dit que vous pouvez afficher ce que vous voulez en ligne, mais que nous allons permettre au CRTC d'intervenir et d'établir des règlements sur la découvrabilité qui détermineront si oui ou non les choses que vous dites en ligne seront entendues. Il tente en quelque sorte d'extraire de cet élément du droit de parole la question du droit d'être entendu.
Je dirais simplement que pour que la liberté de parole, la liberté d'expression et la liberté en général aient un sens, elles doivent inclure non seulement le droit de s'exprimer en quelque sorte dans le vide, mais aussi une certaine capacité à ne pas laisser l'État interférer et limiter votre capacité à être entendu.
Les pouvoirs que je vois ce projet de loi — non amendé et dans sa forme actuelle — donner au CRTC au nom de la découvrabilité permettent à un organisme gouvernemental d'établir des règlements en ce qui concerne non pas, dans ce contexte, ce que vous pouvez dire, mais si vous pouvez être entendu ou non. Cela peut sembler deux éléments distincts, mais si nous essayons de séparer ces deux éléments — le droit de parler et le droit d'être entendu —, je pense que nous enlevons au concept de liberté d'expression son sens véritable.
Ce qu'on dit aux utilisateurs avec cet amendement, c'est qu'ils auront la liberté de ne pas être entravés par le CRTC quant à la mesure dans laquelle leur contenu sera entendu sur les plateformes de médias sociaux. Encore une fois, il s'agit d'un effort important que nous déployons pour protéger le concept de liberté d'expression et pour le protéger de manière significative, de manière substantielle, et d'une manière qui va au‑delà de la simple idée formelle du droit de parole et qui s'inspire de la signification réelle de ce que signifie avoir le droit de parole. C'est pourquoi notre Charte et les documents constitutionnels préexistants ont souligné l'idée et l'importance de la liberté d'expression.
Je pense vraiment que si cet amendement est important, c'est aussi parce qu'il aborde la question de la réglementation des algorithmes, une question qui n'a pas reçu de réponse. La question a été posée directement au ministre à de multiples occasions. Elle a été posée, je pense, par un membre du Comité. Ce projet de loi vise‑t‑il à permettre la réglementation des algorithmes? Je pense qu'il le fait très clairement. Ce projet de loi cherche‑t‑il à permettre la réglementation des algorithmes? Si ce n'est pas le cas, le gouvernement est peut-être prêt à accepter des amendements qui éliminent le risque de réglementation des algorithmes par le CRTC.
Le ministre a été aussi clair que de la boue lorsqu'on lui a posé la question au Comité. Il a dit que ce n'était pas un oui et pas un non. J'ai posé la même question au ministre sur la réglementation des algorithmes lors du débat de clôture à la Chambre. Il a répondu quelque chose comme: « Laissez-moi utiliser une analogie avec un véhicule. Si nous avons une voiture, j'espère qu'elle est électrique, mais si nous avons une voiture, c'est... ». Je vais sans doute me tromper. Il a dit quelque chose comme: « On ne s'intéresse pas à ce qu'il y a sous le capot, on s'intéresse à la direction qu'elle prend ». J'ai peut-être confondu le tout. En tout cas, il a utilisé cette analogie de véhicule que je n'ai tout simplement pas comprise. Je n'ai pas compris ce qu'il voulait dire. J'ai posé la question à nouveau, et il a dit qu'il avait répondu à la question et que le député n'avait probablement pas compris.
Je devrais sans doute poser la question aux fonctionnaires. Je ne sais pas si je veux les mettre dans l'embarras en leur demandant de répondre à une question à laquelle le ministre a été incapable de répondre, mais il s'agit d'une question technique à laquelle je pense qu'ils peuvent fournir une réponse technique.
Le projet de loi, tel qu'il est rédigé sans cet amendement, permet‑il la réglementation des algorithmes? Si l'amendement est ajouté, quelle est son incidence possible sur la capacité du CRTC à réglementer les algorithmes?
Monsieur le président, puis‑je poser cette question à M. Ripley dans le cadre de mon temps de parole?