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AAND Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS AND NORTHERN DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES ET DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 20 novembre 1997

• 1117

[Français]

Le président (M. Guy Saint-Julien (Abitibi, Lib.)): Bonjour. Nous étudions le projet de loi C-6, Loi constituant certains offices en vue de la mise en place d'un système unifié de gestion des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie et modifiant certaines lois en conséquence.

Nous avons avec nous aujourd'hui les représentants du Gwich'in Tribal Council. Ce sont le président, M. Richard Nerysoo, le conseiller juridique, M. Brian Crane, et le coordonnateur de la mise en oeuvre, M. James Ross. Si vous avez une déclaration d'ouverture, monsieur le président, vous pouvez commencer.

Nous vous souhaitons la bienvenue chez nous, dans vos terres.

[Traduction]

M. Richard Nerysoo (président, Conseil tribal des Gwich'in): Merci, monsieur le président; merci, mesdames et messieurs les membres du comité de nous permettre de participer à la séance d'aujourd'hui.

Si vous me le permettez, je vais vous présenter les personnes qui m'entourent: James Ross, ancien chef et membre du Conseil gwich'in de Fort McPherson; et Brian Crane, qui a participé aux négociations, a été pendant longtemps conseiller juridique du Conseil tribal des Gwich'in, et a été auparavant conseiller juridique du Dene-Metis Negotiations Secretariat pour lequel il a travaillé à l'entente.

Je veux vous présenter brièvement Richard Nerysoo pour que vous sachiez qu'avant d'être élu président du Conseil tribal des Gwich'in, j'ai été membre de l'assemblée législative pendant 16 ans. J'ai été membre du cabinet, à titre de premier ministre ou de leader du gouvernement, et président du Comité permanent des affaires législatives et des finances. J'ai été président de l'Assemblée législative, ministre de la Justice, ministre des Ressources renouvelables, ministre de l'Énergie, des Mines et des Ressources, ministre de la Sécurité et ministre des Services publics; et j'ai assumé toutes sortes d'autres tâches que je ne veux pas vous énumérer car il me faudrait beaucoup de temps et ce serait pratiquement écrire un livre.

• 1120

J'ai également été vice-président de la Nation dénée et de la Fraternité des Indiens avant qu'elle ne devienne la Nation Dénée dans les années 70. James Ross et moi avons eu tous deux l'occasion de travailler pour cette organisation.

Je représente donc ici plusieurs optiques puisque j'ai participé au grand débat qui a entouré le pipeline de la vallée du Mackenzie, ainsi qu'aux discussions concernant l'octroi de responsabilités plus grandes à l'Assemblée des Territoires du Nord-Ouest au nom des peuples du Nord, et je suis revenu à mon rôle traditionnel de chef autochtone. Vous pourrez donc constater que mon expérience prouve que j'ai évolué dans toutes les sphères possibles, et j'ai essayé de présenter le point de vue du public de façon générale.

Voilà, je voulais simplement vous présenter brièvement Richard Nerysoo; vous dire ce qu'il a été et quelle expérience il a.

Monsieur le président, comme vous le savez, le Conseil tribal des Gwich'in a participé aux discussions relatives au projet de loi et à son élaboration, notamment à la partie qui prévoit un système intégré de gestion des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie. Nous avons décidé d'appuyer de façon définitive ce texte législatif et c'est ce que nous avons fait.

Monsieur le président, je crois qu'il est important que nous répondions à certaines des critiques politiques que nous avons entendues récemment concernant le projet de loi C-6, tant à la Chambre des communes que dans les Territoires du Nord-Ouest. Je tirerai ensuite quelques conclusions et j'inviterai les membres du comité à poser des questions.

Je crois qu'il est pour nous important de commencer par les obligations qu'il faut respecter en vertu des accords de revendication territoriale signés il y a cinq ans par le Conseil tribal des Gwich'in et le Canada. L'adoption du projet de loi C-6 permettra au gouvernement du Canada et au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest de se décharger des obligations contractées dans le cadre de l'Entente sur la revendication territoriale globale entre Sa Majesté la Reine et les Gwich'in. L'entente a été confirmée par voie législative en décembre 1992 et reconnue constitutionnellement comme un accord de revendication territoriale au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Comme je l'ai indiqué dans mon mémoire, jusqu'en 1992, date de la signature de leur accord de revendication, les Gwich'in n'étaient pas impliqués dans les décisions se rapportant à l'utilisation des terres et des eaux de leur région. Les valeurs que représentent pour nous des terres et des eaux sur lesquelles nous avons vécu et voyagé de temps immémorial, de même que nos opinions en la matière n'étaient ni respectées ni sollicitées par le gouvernement. Dans les années 70, nous nous sommes opposés à l'installation du pipeline de la vallée du Mackenzie, car nous savions que cela aurait des conséquences néfastes sur nos terres et nos modes de vie traditionnels et entraînerait peu de retombées économiques significatives pour le peuple gwich'in.

La Commission Berger créa un précédent important au niveau de l'orientation des évaluations environnementales et de la réglementation de l'utilisation des terres et des eaux dans le Nord canadien. Suite à l'enquête et à la reconnaissance des droits des Autochtones dans la Constitution, le Canada ne pouvait plus ignorer le droit à l'autodétermination des Autochtones habitant le Nord. Le projet de loi C-6 reconnaît l'implication directe des collectivités gwich'in et de celles du Sahtu dans la gestion des ressources et prévoit la protection environnementale des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie. Ce projet de loi mettra en oeuvre le régime de gestion conjointe décrit dans l'Entente finale des Gwich'in qui prévoit la mise en place d'un Office des terres et des eaux, d'un Office d'aménagement territorial et d'un Office régional d'examen des répercussions environnementales, ainsi que d'un Office régional des terres et des eaux. Ces offices joueront le rôle d'instances de gouvernement public, dans le cadre d'un système intégré de gestion des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie.

Le projet de loi C-6 a été élaboré ces dernières années en étroite collaboration avec le Sahtu Secretariat Inc. et le Conseil tribal des Gwich'in. Il s'appuie sur plusieurs hypothèses importantes en matière de sciences environnementales et de gestion des ressources. Il faut adopter la méthode des écosystèmes pour réglementer comme il se doit l'utilisation des terres et des eaux. L'environnement comprend des facteurs biophysiques, sociaux et économiques. Le développement peut avoir des répercussions cumulatives sur nos terres et nos eaux et il doit prendre en compte les utilisations futures. Les peuples autochtones, par le biais de leurs accords de revendication territoriale, ont le droit de participer à la gestion de l'utilisation des terres et des eaux par l'entremise des instances de gouvernement public.

• 1125

Avant que j'aborde certaines des inquiétudes exprimées par d'autres intéressés, j'aimerais féliciter les membres du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, et du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest; le personnel et les anciens dirigeants du Conseil tribal des Gwich'in, ainsi que la direction actuelle du Sahtu Secretariat qui ont participé à la rédaction de ce texte de loi.

L'effort commun de planification visant à faire participer les habitants du Nord à la rédaction du projet de loi a été couronné de succès et la loi a sans aucun doute été renforcée de ce fait. On nous fera sans doute des suggestions sur la façon de continuer à améliorer le texte pour répondre aux inquiétudes manifestées par des habitants et des organisations du Nord.

Le Conseil tribal des Gwich'in a pu suivre le débat à la Chambre des communes—et j'ai personnellement eu l'occasion de lire le hansard—surtout maintenant que nous pouvons le faire par le biais d'Internet. Nous avons trouvé le débat très intéressant et engageant. Et parce que nous avons pu le suivre, nous avons été à même de comprendre ce que le public exprime et ce que les députés fédéraux disent au sujet du projet de loi C-6.

J'aimerais maintenant faire quelques remarques sur les inquiétudes et les observations faites au Parlement et plus récemment à Yellowknife concernant la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie.

Pour avoir pris connaissance des discussions régionales et y avoir participé, nous savons que presque tous les groupes d'intéressés, qu'il s'agisse de groupes autochtones, de l'industrie, du gouvernement, d'organisations non gouvernementales, sont d'accord en principe avec la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Il y a cependant deux grands sujets de préoccupation que nous avons pu cerner à la suite de ces discussions.

Il s'agit premièrement des inquiétudes manifestées par les groupes autochtones du sud de la vallée du Mackenzie, particulièrement ceux visés par le traité 8, les Métis de South Slave, la section locale numéro 66 des Métis de Yellowknife, et la Première nation Deh Cho. Ces groupes s'inquiètent tout d'abord de la question du règlement des revendications territoriales et de l'effet que l'office proposé pour les terres et les eaux de la vallée du Mackenzie aura sur leur liberté de choix pour mettre au point un régime d'administration des terres et des eaux de leur région. Ils estiment que le gouvernement leur impose un système de gestion prévu à l'avance et tiré de l'entente des Dénés et des Métis et sur lequel s'appuient toujours les revendications des Gwich'in et du Sahtu.

La deuxième inquiétude a été exprimée avant tout par certains porte-parole de l'industrie et plus particulièrement de la NWT Chamber of Mines. Ils ont manifesté une certaine anxiété à l'égard du processus de cogestion, et plus particulièrement de la capacité technique des nouveaux offices, du processus de nomination aux offices, du conflit d'intérêts éventuel et de l'efficacité du système proposé pour la délivrance des permis.

En ce qui concerne la signature des accords de revendication territoriale du sud de la vallée du Mackenzie, j'aimerais indiquer clairement au comité aujourd'hui que bien que mes collègues et moi-même comprenions les inquiétudes exprimées par les groupes du sud de la vallée du Mackenzie au sujet du texte législatif, elles ne constituent pas une raison valable pour empêcher l'adoption du projet de loi C-6.

Nous estimons qu'il est impératif de procéder à la mise en place de ces offices pour que la réalisation des structures prévues dans l'accord de revendication territoriale continue et respecte raisonnablement le calendrier. Ce texte de loi, comme vous le savez, a déjà subi un retard de quatre ans, ce qui a eu des effets négatifs sur le calendrier de mise en oeuvre de notre accord de revendication territoriale.

De plus, et c'est sans doute plus important que la question de l'efficacité, le projet de loi C-6 prévoit un cadre moderne de gestion des terres et des eaux du Nord qui est unique dans le nord du Canada et d'ailleurs aussi dans le monde. C'est l'un des premiers exemples de régime de gestion des ressources fondé sur la cogestion des terres et des eaux dans le cadre d'un accord de revendication territoriale globale.

• 1130

Nous sommes fiers de faire partie de ce cadre structurel, et nous pensons que d'autres groupes, surtout ceux qui essaieront d'en tirer parti à l'avenir, devraient l'être aussi. Je presse donc ces groupes de bien étudier le texte législatif et ils constateront qu'il est à l'avantage de tous ceux qui vivent dans la vallée du Mackenzie.

Les groupes autochtones du sud de la vallée du Mackenzie doivent reconnaître les avantages à long terme qu'il y a à favoriser ce cadre. La non-adoption du projet de loi aura de toute évidence des conséquences graves pour la mise en oeuvre des accords de revendication territoriale des Gwich'in et du Sahtu et donnerait au gouvernement l'occasion de violer encore davantage ces ententes.

Je demanderais donc aux groupes du sud de la vallée du Mackenzie de s'attacher non pas aux défis actuels que la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie peut présenter, mais sur les avantages à long terme de l'adoption de cette loi qui prévoit un système intégré de gestion environnementale pour la vallée du Mackenzie.

Je demanderais également à ces groupes de se concentrer sur des mesures provisoires possibles en attendant le règlement de leurs revendications territoriales. Je dois dire que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a indiqué que le texte de loi serait modifié pour prendre en compte la spécificité de ces revendications le moment venu.

Les inquiétudes de l'industrie sont d'une autre nature puisqu'elles reposent avant tout sur la crainte que suscite un régime nouveau et innovateur de réglementation des terres et des eaux. Des questions concernant l'efficacité du système et la capacité technique des offices ont été soulevées et j'aimerais y répondre dans l'optique du Conseil tribal des Gwich'in.

Cela revient en fait à dire que le projet de loi C-6 va contraindre l'industrie à changer sa façon de traiter avec le public. En vertu du nouveau régime, le public, dont 50 p. 100 dans la région des Gwich'in seront des membres du public nommés par le Conseil tribal, aura directement son mot à dire pour veiller à ce que les terres, les eaux et la faune soient protégées contre le développement dont les répercussions sont irréversibles sur les écosystèmes du Nord.

Bien que l'industrie s'inquiète du nouveau système, comme le gouvernement l'a sans doute déjà indiqué en comparaissant devant vous, le nouveau régime sera rigoureux et offrira une grande certitude aux promoteurs qui essaieront d'obtenir des permis. Cette certitude réside dans le fait que la loi prévoit un guichet unique pour accéder à l'Office des terres et des eaux qui orientera le demandeur en lui offrant un système de poids et de contrepoids, après quoi un permis sera accordé, ou la demande sera soumise à une évaluation environnementale et éventuellement à une étude d'impact, si l'office y voit des répercussions négatives importantes ou une inquiétude du public. L'Office des terres et des eaux sera le bureau central pour tous les permis.

La Northwest Territories Chamber of Mines a exprimé des inquiétudes concernant les capacités techniques du nouvel office, tant pour ce qui est du personnel que des membres de l'office. Elle doute de la capacité de l'office et de son personnel de vérifier la conformité d'un projet par rapport au plan d'aménagement territorial, de procéder à un examen préliminaire et aux consultations voulues dans le délai de 45 jours. Elle doute de la capacité des membres du conseil de prendre des décisions en connaissance de cause, sans préjugés et sans conflits d'intérêts éventuels.

Il est important que le Conseil tribal des Gwich'in fasse quelques commentaires sur cette inquiétude soulevée par l'industrie. Nous pensons que les inquiétudes de l'industrie s'appuient sur la crainte du changement aussi bien que sur la crainte d'un régime qui donne davantage accès aux projets de développement à la population du Nord afin qu'elle les examine minutieusement. Il ne fait aucun doute que c'est un changement important par rapport à l'ancien régime offert par le MAINC. Nous pensons cependant que c'est un changement positif et qu'il ne ralentira pas mais au contraire uniformisera le processus de demande de développement, de délivrance de permis, et d'évaluation environnementale et d'étude d'impact dans la vallée du Mackenzie.

Quant aux conflits d'intérêts et aux décisions impartiales de la part des membres de l'office, il est essentiel d'affirmer que le Conseil tribal des Gwich'in nomme ses membres, tout comme le Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, en toute indépendance. Ces membres sont nommés parce qu'ils font partie de la population gwich'in et non parce qu'ils servent le Conseil tribal des Gwich'in.

• 1135

Dans le cas d'un conflit d'intérêts éventuel, il existe des mesures dans la loi—à la partie I, paragraphe 16(1)—pour réduire tout conflit et il revient au président de respecter cette disposition.

Lorsqu'on approfondit les inquiétudes de l'industrie, il semble que le message sous-jacent, celui qu'il faut lire entre les lignes, soit un manque de confiance dans la capacité du processus gouvernemental public des régions des revendications territoriales. Il va sans dire que certaines des personnes nommées aux offices auront des choses à apprendre.

Le temps de notre participation au gouvernement est venu avec la signature de notre accord de revendication territoriale et nous sommes prêts à relever ce défi. Notre office provisoire d'aménagement territorial tout autant que le groupe de travail sur la gestion des terres et des eaux se sont préparés pour l'adoption de ce projet de loi et tous les membres ont appris à connaître les rôles et responsabilités qu'implique le fait d'être membre d'un office public.

Nous voulons bien sûr nous assurer que nos ressources de mise en oeuvre nous permettent de former avec succès les nouveaux membres des offices qui auront besoin d'aide à l'avenir.

Les inquiétudes soulevées ne surprennent guère. Elles sont l'expression d'une réaction courante à un changement important. Il est en effet difficile aux personnes et aux organisations d'accepter le changement, qu'il soit considéré comme positif ou négatif. Cela ne devrait pas empêcher l'adoption de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie.

Cette loi est un document législatif unique qui va changer radicalement la réglementation des terres et des eaux dans la vallée du Mackenzie. Elle aidera, en temps et lieu, tous les groupes de la vallée du Mackenzie, y compris ceux qui n'ont pas encore conclu d'accord de revendication territoriale dans les régions sud, à participer aux décisions qui affectent l'utilisation des terres et des eaux, le développement économique de ces régions ainsi que la protection environnementale.

Voilà 23 ans que je participe à ces discussions, depuis la fin de mon adolescence, et je me souviens de tout ce qui a été dit dans le cas du pipeline de la vallée du Mackenzie. Les arguments avancés semblaient découler de l'idée que les peuples autochtones n'avaient pas leur mot à dire en matière de gestion des terres, de gestion des ressources, de gestion dans l'intérêt de leurs membres.

C'est précisément ce que fait ce texte de loi. Il n'est pas parfait—aucun document législatif ne l'est—mais c'est pour nous la première occasion collectivement, en tant que collectivité véritable, de prendre part au processus de gestion des terres, des eaux et des ressources dans l'intérêt de nos peuples.

Il est important de préciser que les Gwich'in et le Conseil tribal des Gwich'in croient que le nouveau régime permettra d'atteindre un équilibre entre la protection de l'environnement et le développement éventuel de la région. Les habitants du Nord reconnaissent que pour mettre en oeuvre avec succès les revendications territoriales, il faudra arriver à trouver cet équilibre. Les Gwich'in sont prêts à accepter les formes renouvelables et non renouvelables de développement économique qui sont durables, qui leur permettront de garder le mode de vie qu'ils suivent depuis des temps immémoriaux, mais qui ouvrent la porte vers l'avenir.

Nous commençons tout juste à étudier les premières versions du plan d'aménagement territorial préparé par l'office provisoire. Avec l'adoption du projet de loi C-6, l'office permanent demandera au Conseil tribal des Gwich'in d'accepter ce plan, après quoi, avec l'approbation du gouvernement, nous jouerons le rôle de gardiens de l'utilisation des terres et des eaux de la région désignée.

Le plan d'aménagement territorial permettra d'atteindre un équilibre entre la conservation et la croissance. En essayant de trouver cet équilibre, nous devrons faire en sorte que nos terres et notre culture soient protégées et que notre économie soit renforcée.

Je demande à tous les membres du comité d'appuyer ce projet de loi. Ce faisant, vous permettez au gouvernement du Canada et au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest de remplir leurs obligations en vertu de l'entente sur la revendication territoriale globale signée par le Canada et les Gwich'in. Ce faisant, vous reconnaissez en outre les droits des Autochtones, au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle, à participer à la gestion des terres et des eaux dans un système coordonné. C'est là un élément important de ce que nous essayons de faire, qui est défini dans notre entente finale et légitimé par le projet de loi.

• 1140

J'ai mentionné la cogestion. En tant que Gwich'in, nous pourrions toujours dire que nous n'avons aucun lien avec les gouvernements en place. Cela pourrait être notre position. Nous pourrions déclarer que nous avons le droit de gérer les ressources et les eaux de notre région uniquement dans l'intérêt des Gwich'in. Mais ce n'est pas très intelligent et en vérité, ce n'est pas une façon responsable de traiter de ces questions.

Nous pouvons prétendre avoir une certaine souveraineté sur ces terres que nous possédons, et c'est le cas à certains égards. Mais la réalité veut que nous soyons suffisamment responsables pour reconnaître qu'il y a d'autres Canadiens qui vivent sur nos terres, dans nos régions et qu'il y a des circonstances qui existent, par exemple l'exploitation des ressources qui se fait sur nos terres et dans notre région. Il nous faut nous montrer suffisamment responsables pour reconnaître que lorsque nous proposons un régime de gestion, il tienne compte du fait que nous avons non seulement à protéger les terres, les eaux et les ressources, mais aussi à prendre en compte la réalité économique non seulement de notre région, mais du pays tout entier.

Je lis avec un certain intérêt, monsieur le président, l'argument voulant que l'on encourage les investissements dans notre région et qu'en réalité ce texte de loi pourrait avoir l'effet contraire. Nous l'avons toujours su. Nous savons que nous devons créer des emplois pour notre peuple. Je crois vraiment qu'il est important qu'on comprenne que nous sommes tout aussi prêts à investir dans notre peuple que dans l'exploitation des ressources. Nous l'avons fait et nous avons réussi.

Nous reconnaissons aussi un autre facteur, à savoir que nous sommes la dernière région au bout de la vallée du Mackenzie, et que quoi qu'il arrive, nous devons comprendre que nous dépendons des décisions de l'aval. Dans tout le pays, nous voyons des exemples de gestion des ressources—rivières, étendues d'eau—où les répercussions ne sont pas toujours ressenties par les communautés de l'amont, mais sont toujours cumulatives pour les communautés de l'aval. Lorsque nous prenons en considération ce projet de loi, c'est en sachant que toutes les régions ont un effet cumulatif sur les autres et que l'instauration de ce régime de gestion de nos terres doit permettre de rassembler tout le monde pour que les décisions soient prises en commun dans l'intérêt de toutes les régions et de toutes les communautés.

Je comprends les inquiétudes soulevées par certaines régions et certains chefs autochtones, mais en réalité nous avons déjà discuté de la question il y a de nombreuses années, il y a presque 20 ans, lorsque nous avons présenté nos arguments devant la Commission Berger. Il était nécessaire que nous fassions partie du processus environnemental, de la prise de décisions, de façon collective. Nous ne pouvons pas, comme dans le cas que nous avons mentionné, balkaniser les régions de sorte qu'elles aient chacune leurs instances séparées sans relations entre elles; ça ne va pas marcher. Nous suggérons d'appuyer ce projet de loi parce qu'il nous semble devoir améliorer les situations et non pas enlever aux autres le droit de négocier leurs propres ententes.

Monsieur le président, je tiens à remercier les membres du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord ainsi que son personnel de nous avoir invités et de nous avoir écoutés. Je tiens à dire que je suis heureux d'être ici et que je suis prêt à répondre à toutes les questions éventuelles des membres du comité.

Merci, monsieur le président.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Nerysoo. C'est un honneur pour nous de vous recevoir ici avec votre équipe. Vos remarques sont très intéressantes et elles vont vont nous aider lors de notre étude du projet de loi C-6. Je tiens donc à vous dire merci pour ce que vous nous avez dit. Nous sommes impressionnés par votre expérience de plusieurs années.

• 1145

Il y a dix ans, j'ai passé deux jours à Inuvik. Si j'avais su que vous y étiez, je serais allé vous rencontrer chez vous.

Nous allons passer à la période de questions. Monsieur Konrad, vous avez cinq minutes.

[Traduction]

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Je vous remercie de cet excellent exposé. J'ai essayé de prendre en note tout ce que vous avez accompli dans les diverses instances gouvernementales où vous avez servi.

Il y a une question que je me suis posée et qui ne concerne pas le texte de loi. Vous êtes président. Y a-t-il un chef? Et dans ce cas, quel est le lien entre le chef et le président?

M. Richard Nerysoo: Je suis président. Dans notre situation particulière, les chefs existent dans chaque communauté. Nous sommes en train de discuter de remplacer le titre de président par celui de grand chef car il est à la tête de l'organisme qui représente les quatre communautés et les quatre chefs régionaux. C'est de cette façon que nous avons conçu notre structure. C'est ainsi que notre organisme fonctionne.

M. Derrek Konrad: Êtes-vous élu en tant que président?

M. Richard Nerysoo: Oui.

M. Derrek Konrad: Vous avez donc eu droit à la parole à l'Assemblée législative pendant de nombreuses années. Vous dites que les gouvernements supérieurs ont adopté des lois qui ont eu des effets négatifs sur les terres et que les populations concernées n'ont pas eu leur mot à dire. Pourriez-vous me dire pourquoi le fait d'avoir des membres des différentes régions du gouvernement territorial ne permettrait pas d'arriver aux mêmes fins qu'avec les structures prévues dans les ententes sur les revendications territoriales avec des offices et des formations régionales qui sont responsables dans les régions?

M. Richard Nerysoo: Je crois qu'il y a un principe sous-jacent que l'on a toujours défendu et qui est la participation directe des peuples autochtones à la prise de décisions. Cela pourrait se faire à l'Assemblée législative, mais le fait est que des droits précis ont été négociés soit dans le cadre des ententes sur les revendications territoriales soit dans le cadre des traités en vigueur. Ce sont des droits précis, garantis par la Constitution.

Rien de ce que nous entreprenons en l'occurrence ne laisse entendre que les assemblées législatives ou le Parlement du Canada n'ont pas le droit d'adopter des lois. C'est un pouvoir et un rôle qui leur appartiennent toujours. En fait, c'est une responsabilité qu'ils ont.

Ce qui est important dans ce cas particulier, c'est qu'un régime de gestion a été créé, et sera créé, par voie législative. Dans cela il y a un élément important, c'est la relation de travail entre le gouvernement et les peuples autochtones. C'est là la différence dans ce cas particulier. Nous ne proposons absolument pas de retirer le pouvoir législatif aux diverses assemblées législatives, ni même au Parlement du Canada. Cela est prévu jusque dans notre entente.

M. Derrek Konrad: Ainsi pour être membre de vos divers offices, il faut être membre de l'une des ententes sur les revendications territoriales qui ont été signées. Si vous faites partie du peuple gwich'in, vous pouvez être membre du Conseil tribal des Gwich'in qui a un certain pouvoir gouvernemental dans la région. Si un Déné ou un Métis du Sahtu venait s'installer dans cette région, il serait privé de son droit de regard sur la gestion des terres.

• 1150

M. Richard Nerysoo: Pas nécessairement car dans ce cas particulier, il y a des représentants de la région du Sahtu, des représentants des Dénés et des Métis du Sahtu.

Il faut comprendre que traditionnellement nous avons cinq régions dans la vallée du Mackenzie. Il y a des régions qui sont l'objet de revendications territoriales qui se subdivisent en un plus grand nombre de secteurs, mais à un moment donné, lorsque nous avons créé la Fraternité des Indiens, il y avait cinq régions. Il y avait la région gwich'in du delta du Mackenzie. Il y avait le Sahtu, qui est maintenant la région des Dénés et des Métis du Sahtu. Il y avait la région des Dogrib. Il y avait la région des Deh Cho. Il y avait la région South Slave. C'est avec cette structure que nous fonctionnions. Chaque région avait des représentants, même la Nation Dénée, et en réalité nous avons même maintenant la Nation des Métis. Il y a donc eu division.

Il en va donc autrement maintenant car vous avez des propositions de revendication territoriale qui proviennent d'origines différentes, de la région du traité 8, des Métis de la région North Slave, des Métis de la région South Slave. Ce sont des régions qui correspondent davantage aux propositions de revendication territoriale.

Voilà la différence entre la situation à l'origine et ce qui se produit maintenant.

M. Derrek Konrad: Vous avez parlé d'un gouvernement qui impose son régime à un autre gouvernement, or l'autre jour, nous avons entendu les Deh Cho qui sont tout à fait contre ce qui est proposé dans ce projet de loi. Que répondez-vous à cela?

M. Richard Nerysoo: Comme je l'ai dit plus tôt, il est important de reconnaître non pas le fait d'imposer quelque chose... Nous essayons de faire en sorte que la région soit représentée. Il en irait autrement si nous prenions des décisions sans envisager une représentation de la région ou en agissant à l'encontre de ses voeux. Nous essayons simplement de faire les choses collectivement et nous voulons garantir une représentation.

Par ailleurs, il y a une chose que nous n'avons pas faite. Nous n'avons jamais dit, en tant que Conseil tribal des Gwich'in ou que dirigeants des Gwich'in, que les Deh Cho, les South Slave, le traité 8 ou les Dogrib n'ont jamais eu le droit de négocier leurs propres ententes, et nous n'avons jamais dit que leurs ententes ne pourraient jamais changer la situation.

Je vais vous donner un bon exemple de la lutte que nous avons dû mener récemment pour obtenir la nomination à un office d'examen. Le projet le plus important était celui de BHP. Nous n'avions aucune garantie pour cet examen de l'office d'être représentés pour l'étude du projet en question. Il n'est indiqué dans aucune loi que les peuples autochtones doivent être représentés dans un processus quelconque.

Parlons des Deh Cho. Il est intéressant que le chef et quelques membres de la bande aient dû aller camper en face du point d'accès d'une compagnie minière dans la région, le plateau Horn, qu'ils estiment très important sur le plan des ressources renouvelables. Ils n'ont absolument pas eu leur mot à dire pour la délivrance des permis. Le processus actuel leur donne au moins l'espoir d'être consultés et d'avoir leur mot à dire dans le processus. Des lois en vigueur? Il n'y en a pas.

Il est important pour nous que vous reconnaissiez que si nous voulons cette loi, c'est parce qu'elle va nous donner une tribune, que ce genre de choses ne pourra pas se passer à l'avenir et qu'on sera consulté. C'est très, très important.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Nerysoo. Nous allons passer à M. Bachand.

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): J'ai bien apprécié votre présentation. Je dois vous en féliciter. Cependant, j'ai un peu les mêmes préoccupations que le collègue qui m'a précédé. On parle des Deh Cho, mais il y a d'autres nations dans le coin, comme les Chipewyan et les Métis. Vous disiez aussi, et je suis d'accord avec vous, que le gouvernement avait longtemps imposé aux autochtones toutes sortes de choses sans même les consulter.

C'est exactement ce que j'entends des gens qui n'ont pas encore signé d'entente de revendications territoriales globales. On est en train d'établir des commissions du côté de la vallée du Mackenzie, commissions sur lesquelles les gens ont dit ne pas être tout à fait d'accord au départ.

• 1155

Donc, ma préoccupation est que les gens disent qu'ils se font maintenant imposer quelque chose qui a été décidé par le gouvernement fédéral et quelques groupes autochtones. Monsieur Nerysoo, si c'était l'inverse, si on avait une entente avec les Dogribs et les Deh Cho, ceux des commissions de contrôle de la gestion des eaux et du territoire dans la vallée du Mackenzie, et qu'on vous l'imposait sans que vous ayez encore signé vos revendications territoriales globales, est-ce que vous réagiriez de la même façon?

[Traduction]

M. Richard Nerysoo: Je ne suis malheureusement pas en mesure de réagir de la même façon. Le fait est que nous avons une entente.

Tout ce que je peux vous dire, c'est que je parle par expérience, connaissant l'histoire des chefs autochtones, et je ne dis pas que ce que nous faisons est nécessairement parfait, car si nous recherchons la perfection, nous nous trompons de métier.

Ce qui importe ici, c'est que nous comprenions qu'il y a des principes de base importants à prendre en considération. Tout d'abord, lorsque nous parlons de revendications territoriales, le principe de base est que les peuples autochtones souhaitent défendre leurs intérêts en ce qui concerne les terres, les eaux et les ressources, et être sûrs de prendre part à la décision, quel que soit le moyen ou le résultat.

Dans la situation qui nous occupe, il est important que nous comprenions que les décisions concernant l'exploitation des ressources se prennent maintenant, et non dans deux ou cinq ans. Les décisions se prennent maintenant. Il y a eu l'étude pour la mine de diamant il y a deux ans et cela se passe maintenant. Et chaque fois que nous nous permettons en tant que peuples autochtones de ne pas participer à ces processus, nous perdons un levier très important dans la prise de décisions.

Si on laisse entendre qu'on impose une législation, l'important pour nous est de nous assurer que les peuples autochtones ont leur mot à dire dans le processus. Nous pouvons nous en aller et mettre au point notre propre processus, si c'est ce que vous voulez, mais ça n'est tout simplement pas raisonnable ni pratique. Les gouvernements sont élus pour prendre des décisions précisément. Le Parlement du Canada est élu pour défendre les intérêts des Canadiens. En tant qu'Autochtone, en tant que chef des Gwich'in, j'ai la responsabilité de défendre les intérêts des Gwich'in. C'est de cela qu'il retourne dans l'accord de revendication territoriale.

Je respecte la position adoptée par vos chefs. Ils défendent les intérêts de leur communauté. Mais en même temps, je pense qu'il est important que nous nous assurions que les chefs autochtones seront désormais représentés dans ces processus. C'est ce qui importe pour nous. Il ne s'agit pas de supprimer le droit de représentation. Si c'était le cas, il en irait autrement, mais ce n'est pas le cas. Nous essayons de faire en sorte que le Canada remplisse une obligation qui est de garantir la représentation. C'est ce qui se passe ici.

[Français]

M. Claude Bachand: En tant que président et peut-être chef du gouvernement des Gwich'in, vous avez toute ma confiance. Si j'étais assis à votre place, c'est probablement cela que je répondrais: je suis ici pour représenter les Gwich'in et je les défends bien. On a une entente et un projet de loi devant nous.

Maintenant, je poursuis un petit peu plus la réflexion dans la veine où je m'étais engagé plus tôt.

• 1200

Si un projet de loi, qui pourrait s'appeler le projet de loi C-6 modifié, créait les trois commissions qui figurent au projet de loi et que ces commissions-là s'appliquaient uniquement dans les régions qui ont une entente territoriale globale comme le Sahtu et chez les Gwich'in, est-ce qu'on atteindrait le même objectif? Je pense que ce serait une suite logique, et c'est d'ailleurs dans l'entente qui doit prendre effet au moyen d'un projet de loi. Donc, si le projet de loi s'appliquait aux Gwich'in et à la région du Sahtu, est-ce que cela vous satisferait autant?

[Traduction]

M. Richard Nerysoo: Il faut faire attention lorsqu'on parle de modifier simplement pour faire en sorte que certaines régions soient supprimées. Si vous suggérez de supprimer les régions pour qu'elles n'aient pas de représentation, je ne peux pas être d'accord avec cela. Je pense que ce n'est pas une bonne chose. Si vous suggérez que nous respections les intérêts et le droit des Premières nations autochtones de négocier leurs propres ententes de revendication, nous n'avons jamais contesté cela. C'est leur droit de négocier. C'est leur droit de veiller à ce que leurs intérêts soient en quelque sorte protégés dans une entente qui ressemble à notre propre entente ou à celle qui change les traités 11 et 8, et nous n'avons jamais contesté cela.

Mais il est aussi important de comprendre qu'on pourrait, si on le voulait, créer sept—et en choisissant ce chiffre je prends le nombre de groupes qui ont des revendications territoriales—régimes de gestion. Mais je ne pense pas que ce soit pratique. Je ne pense pas que ce soit raisonnable. Lorsque l'on parle de coûts—et je lis à nouveau cela dans la transcription des délibérations dans le hansard—, plus d'un guichet ou un guichet amélioré coûterait bien davantage aux contribuables. Ma foi, si vous voulez coûter davantage au système, il suffit de créer sept processus différents, parce que c'est exactement ce que vous feriez. Nous connaissons donc la question et nous sommes au courant des arguments qui ont été présentés sur les facteurs de coût.

Il y a autre chose qui est important. Nous sommes toujours favorables aux négociations, mais nous ne pouvons pas forcer les Deh Cho à venir à la table des négociations avec le gouvernement du Canada. Mais je m'inquiète aussi d'une démarche qui va décourager le développement ou les investissements dans notre région. C'est une erreur.

Et il n'y a rien dans ce que je dis qui enlève à cette région le droit de négocier. En fait, ce que nous essayons de faire comprendre, c'est que c'est le choix des Deh Cho, mais nous voulons être sûrs que s'ils décident de participer, ils auront une représentation garantie au processus; le Nord sera représenté et le gouvernement du Canada aussi.

Voilà donc la position que nous essayons de prendre. Ce n'est pas que nous soyons opposés à toute négociation, parce qu'eux ne se sont pas opposés à nos négociations et nous ne dirons jamais qu'ils n'ont pas le droit de négocier. C'est leur droit; nous voulons nous en assurer et le protéger.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): La question que j'allais poser a déjà été traitée en partie.

Je tiens à dire pour commencer que j'ai vraiment apprécié votre exposé. Ce que vous avez dit sur les ressources est tout à fait louable: vous ne les considérez pas comme quelque chose qu'un groupe de personnes pourrait revendiquer exclusivement, mais plutôt comme quelque chose à partager entre tous les Canadiens en cogestion.

L'inquiétude exprimée par le membre de notre parti qui siège normalement au comité, si j'ai bien compris, porte sur les Deh Cho. Ils se sont dits inquiets du fait que ce projet de loi semble leur enlever tout droit en tant que nation parce qu'ils n'ont pas négocié leur traité ni leurs revendications territoriales et que cela réduirait de beaucoup leur voix s'agissant de leurs terres et de leurs ressources. Ils ont dit souhaiter que le projet de loi soit modifié pour les exclure. Peut-être avez-vous déjà abordé la question, mais j'aimerais l'approfondir un peu.

Sera-t-il possible de modifier ce projet de loi pour n'exclure que cette Première nation autochtone-là et pour que l'on puisse tout de même réaliser l'objectif que vous souhaitez atteindre?

• 1205

M. Richard Nerysoo: Je ne sais trop comment cela pourrait se faire. Je vais vous donner un exemple. Les cours d'eau qui irriguent le plus l'Alberta et la Colombie-Britannique sont non seulement les rivières Slave et Peace, mais également la rivière Liard. On a proposé de construire d'importants barrages hydroélectriques sur la partie de la rivière Liard qui est située en C.-B.

Il me semble que si vous laissiez entendre que cela ne s'applique pas à la région des Deh Cho, les Gwich'in n'auraient jamais leur mot à dire sur les propositions de barrage sur la rivière Liard. Vous élimineriez pratiquement cette région.

Étant dans la région la plus en aval, qui pourrait donc subir les plus grandes conséquences du fait de la réduction du débit de la rivière, je crois pouvoir dire aux membres du comité que nous aurions de graves inquiétudes. Si on supprimait cette région, alors comment pourrions-nous nous faire entendre? Nous n'aurions pratiquement rien à dire. L'idée générale de ce que nous essayons de faire, c'est de nous assurer que les Deh Cho ont leur mot à dire sur l'exploitation des ressources de la région Dogrib-Rae. C'est pour avoir un mot à dire sur les pipelines qui seront construits dans la région du Sahtu. C'est là toute la question et il est important que ce ne soient pas uniquement les peuples autochtones, mais tous ceux qui résident dans le Nord, y compris ceux qui sont intéressés comme les gouvernements, qui aient leur mot à dire dans ces processus.

Nous essayons de favoriser un processus de coopération, de collaboration. Nous n'avons absolument pas l'intention de compromettre, comme je l'ai déjà dit, les droits et les intérêts des gens. Tout ce que nous essayons de faire, c'est de veiller à ce que ce peuple ait en fait une représentation garantie. Il est très rare que l'on adopte dans notre pays ce genre de texte législatif où l'on garantit une représentation à certains groupes autochtones.

Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de questions, mais je dis bien qu'il est important de comprendre que si nous l'avions voulu, nous aurions pu prétendre que puisque c'est une revendication Gwich'in-Sahtu, les Deh Cho n'ont pas leur mot à dire sur nos terres, les Dogrib non plus, les South Slave non plus. Ce n'est pas comme cela que les choses fonctionnent.

Je crois que le principe le plus important pour les peuples autochtones est toujours de considérer que l'approche collective est un facteur primordial et c'est ce que nous essayons de faire dans ce texte de loi.

Le président: Merci. Monsieur Keddy.

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Merci, monsieur le président.

Je vais tout d'abord vous remercier, messieurs, de vous être présentés aujourd'hui. J'estime très important que vous l'ayez fait. Il y a plusieurs questions sur la table et c'est une entente qui a une très grande portée et qui, j'espère, durera longtemps. Il me semble que le sentiment général est qu'il s'agit d'une bonne entente qui reçoit un appui assez large. Lorsque nous n'entendons pas les habitants qui vivent dans la région, il arrive que nous ayons une mauvaise compréhension, une compréhension limitée ou une optique étroite de ce qui se produit effectivement sur le terrain.

Il y a une chose que j'aimerais dire, et je voudrais être sûr que cette partie du programme vous donne satisfaction. Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous avez dit sur la nature collective de tout cela pour les facteurs de l'aval.

Avec le projet de loi tel qu'il est actuellement libellé, estimez-vous que l'on s'occupe des effets qu'il pourrait y avoir à l'aval ou de la pollution vers l'aval de toute la région? Je ne veux pas seulement parler de l'aval du Mackenzie, mais aussi des zones qui vont au-delà. Estimez-vous que le système en place est suffisant pour tenir compte de tout cela si on devait ouvrir une mine? Parce que les limites de toutes ces régions ne correspondent pas aux bassins hydrographiques. Elles le font très grossièrement, mais de nombreux cours d'eau en dehors du fleuve Mackenzie traversent les frontières. Donc s'il y avait une mine dans une région donnée et qu'il y ait un problème de pollution—et j'espère que ce ne sera pas le cas—le problème pourrait en fait se poser dans une autre région. Le processus permet-il ce genre de négociations et permet-il une entente sur la façon de lutter contre ce genre de choses? Y a-t-il des possibilités d'arbitrage?

• 1210

M. Richard Nerysoo: Oui, il y a des possibilités d'arbitrage. Notre entente prévoit ce genre de situation... Et si on veut avoir un processus d'appel, ces questions sont du ressort des tribunaux.

Je dois dire que nous ne sommes pas absolument certains que tous les problèmes et inquiétudes que nous avons au sujet des terres et des eaux vont trouver leur solution dans la loi, et je ne m'attends pas à ce que ce soit le cas. Mais je m'attends à ce que l'on mette en place un système de gestion pour nous assurer de faire un meilleur travail que cela n'a été le cas jusqu'à maintenant et de pouvoir le faire de façon collective. C'est important.

L'autre problème est que l'on remet parfois en question la capacité technique des peuples autochtones. Voilà ce que je peux dire là-dessus: je ne dis pas toujours que les spécialistes sont les personnes les mieux indiquées pour faire partie d'un office. Ce n'est pas toujours ainsi que les choses fonctionnent. Les spécialistes peuvent fournir des conseils, mais en réalité les bonnes décisions sont une question de bon sens et de compréhension des facteurs en jeu, et non de savoir-faire technique.

De nombreuses questions et problèmes ont aussi été soulevés—et j'assistais à la séance qui a eu lieu à Yellowknife avec l'industrie—quant au calendrier. Indépendamment des 45 jours prévus pour les permis, il n'y a aucune garantie sur la durée des évaluations environnementales. Cela dépend de la nature du projet. Dans notre pays, nous avons vu toutes sortes de commissions et d'évaluations environnementales durer plus longtemps que prévu à l'origine. C'est l'expérience que nous avons faite. Rien n'est sûr.

Il y a encore une chose que j'aimerais ajouter au sujet de l'industrie, c'est que nous ne voyons aucun inconvénient à essayer de faire en sorte que le système fonctionne.

[Français]

Le président: Nous avons actuellement des problèmes de lignes téléphoniques. On est prêts à poursuivre les discussions, mais il va falloir le faire lentement. C'est selon votre goût. Moi, je ne fais que diriger la réunion. Dans quelques minutes, on va pouvoir continuer et faire un deuxième tour.

Avez-vous une petite question, monsieur Keddy? Allez-y.

[Traduction]

M. Gerald Keddy: J'aimerais revenir à ma première question. Je ne remettais pas en doute la capacité de quiconque de prendre des décisions. Plus précisément, ma question était la suivante: estimez-vous que le système qui est en place, tel que prévu dans le projet de loi, pourra arbitrer une fois que la loi sera entrée en vigueur et permettre la négociation des problèmes qui pourraient et qui vont certainement surgir à un moment ou à un autre? Il s'agit exactement de ce dont vous parliez à l'instant, et cela dépasse le fleuve Mackenzie, car il y a de nombreux cours d'eau dans la région. Et si la pollution va d'une région à l'autre, pensez-vous que le projet de loi permettra la négociation ou l'arbitrage pour ce genre de problème?

M. Richard Nerysoo: Oui, je crois...

M. Gerald Keddy: Bien.

M. Richard Nerysoo: ... que ça va fonctionner.

[Français]

Le président: M. Finlay et M. Bryden se partageront le temps. Monsieur Finlay.

[Traduction]

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

• 1215

Monsieur le président Nerysoo, je veux vous remercier d'être venu, comme mes collègues de l'autre côté de la table l'ont déjà fait. Voilà près de deux ans que je suis membre de ce comité, et je ne crois pas avoir entendu d'explications et d'exposés plus lucides, plus intelligents, de plus grande portée sur ce que nous essayons de faire au sujet des peuples autochtones et de la Constitution de notre pays. Je tiens vraiment à vous en remercier.

Si j'en ai l'occasion, je ferai appel à vous, et il se peut qu'un jour je prenne la parole à la Chambre pour répéter ce que vous avez dit. J'ai déjà cité à une ou deux reprises Elijah Harper et je crois que vos paroles pourraient être très utiles.

Mais j'ai une question. Le préambule du projet de loi indique qu'il est dans l'intention du gouvernement fédéral de procéder, en collaboration avec les Premières nations de la vallée du Mackenzie, à la révision des dispositions pertinentes de la présente loi dans le cadre des négociations relatives à leur autonomie gouvernementale. Le libellé du préambule vous pose-t-il des problèmes? Pensez-vous que cela va se faire? Voulez-vous citer particulièrement des dispositions de la loi qui seront pertinentes pour les négociations sur l'autonomie gouvernementale lorsqu'elles auront lieu?

M. Richard Nerysoo: Non, le seul article... Il y a une disposition qui traite de la reconnaissance des droits autochtones, il s'agit du paragraphe 5(2). La seule chose que l'on puisse envisager à ce sujet est la reconnaissance des droits issus des traités et les ententes d'autonomie gouvernementale devraient être prises en compte à ce titre. À mon avis, de façon générale, c'est une protection pour tous les aspects des accords de revendication ou des négociations sur l'autonomie gouvernementale qui pourraient se produire. À mon avis, cela pourrait inclure le problème qui pourrait se poser en matière d'autonomie gouvernementale également.

M. John Finlay: Merci beaucoup, monsieur le président. Je pense que c'est pour cette raison que le paragraphe 5(2) a été prévu. Je vous remercie de vos remarques.

J'ai une autre question. Le paragraphe 5(1) prévoit que les dispositions des ententes sur les revendications territoriales des Gwich'in et du Sahtu, des lois qui les mettent en vigueur et de la Loi sur les Indiens l'emporteraient sur les dispositions incompatibles de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Cela me pose un petit problème dans la mesure où je suis tout à fait d'accord avec la description que vous avez faite de l'écosystème et de l'effet totalement intégré de ce que l'on fait dans une région ou l'autre d'un cours d'eau, surtout dans l'Arctique, où l'écosystème est certainement plus délicat que dans toutes les autres parties du globe. Je ne voudrais pas que l'on invoque la Loi sur les Indiens dans dix ans et que cela puisse compromettre le développement ordonné et l'exercice de ces offices sur la base de l'écosystème uniquement. Avez-vous des remarques à faire là-dessus?

M. Richard Nerysoo: Puis-je demander à Brian Crane, notre conseiller juridique, de répondre à cette question précise dans le contexte juridique?

M. Brian Crane (conseiller juridique, Conseil tribal des Gwich'in): Il s'agit essentiellement d'une disposition technique. La revendication territoriale l'emporterait en vertu de la Constitution, mais ce projet de loi a été rédigé de façon à suivre le libellé de l'entente sur la revendication territoriale, il ne risque donc pas d'y avoir manque de concordance. Si par erreur ou à la suite de l'interprétation d'un tribunal dans quelques années, il y a un conflit, l'entente sur la revendication territoriale l'emporterait techniquement.

• 1220

Quant à votre question sur la Loi sur les Indiens, il n'y a qu'une réserve dans les Territoires du Nord-Ouest. En fait, il y en a deux. Il y a la réserve de Hay River et celle de Salt River, qui est au nord de Fort Smith et est assez petite puisqu'elle ne fait qu'un mille carré.

La Loi sur les Indiens comporte certainement des dispositions relatives aux réserves indiennes et à l'administration des terres à l'intérieur des réserves indiennes. Le projet de loi n'essaie pas du tout de changer cela. Mais ce sont les seuls secteurs où cette disposition serait pertinente.

Le président: Monsieur Bryden.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais attirer votre attention, celle du secrétaire parlementaire et de tous les autres membres du comité sur le fait que M. Nerysoo a je crois identifié une lacune très importante du projet de loi, lacune que l'on pourrait peut-être tenter de combler avec un amendement. J'aurais besoin de quelques minutes pour m'expliquer. Cela concerne le fait qu'à partir de l'article 9, relatif aux dispositions générales concernant les offices, lorsqu'on parcourt les articles suivants, il n'y en a pas qui indiquent précisément les responsabilités de ces offices.

M. Nerysoo a dit quelque chose qui va droit au coeur de tout Canadien qui se respecte. Il a soulevé la question de la responsabilité de gardiennage que nous avons en tant que Canadiens à l'égard de nos cultures et de nos régions. Qu'il s'agisse de la vallée du Mackenzie autour de Fort McPherson ou de Terre-Neuve, où il y a une culture très particulière à protéger et un environnement très particulier à protéger, ou encore au Québec, où il faut protéger la langue et la culture distincte, chacune de ces régions du Canada et chacun des sous-groupes qui vivent dans une région au milieu d'une culture ont la responsabilité de protéger, de s'occuper, dirons-nous, de la santé de cette culture et de cette région. C'est précisément de cela qu'il retourne dans le projet de loi: donner aux peuples qui vivent dans la vallée du Mackenzie le droit de donner leur avis sur la santé de la région; et je crois que nous sommes tous d'accord là-dessus.

Mais monsieur Nerysoo, vous avez poussé cela un peu plus loin, si vous ne voyez pas d'inconvénient à ce que j'analyse vos remarques. Vous avez dit que ce n'était pas uniquement une question d'intérêt pour les Gwich'in. Vous avez dit «parce que nous sommes un peuple de la région, nous allons nous occuper des ressources et des atouts de la région pour le bien de tous les Canadiens». Ce sont des mots magiques.

L'esprit de votre remarque se retrouve en fait au paragraphe 35a) de la loi qui concerne précisément les offices des peuples gwich'in. Nous lisons au paragraphe 35a) que:

      l'aménagement vise à protéger et favoriser le bien-être social, culturel et économique des habitants et des collectivités de la région, compte tenu des intérêts de l'ensemble des Canadiens.

Il me semble, chers collègues, que cela relève d'un domaine plus général de la législation. Je constate que cet esprit, qui est très canadien, n'est pas pris en compte dans le préambule. Le préambule dit tout ce que l'on veut d'autre, mais il ne dit pas que ce texte de loi est prévu pour le bien de tous les Canadiens. Mais je ne suis pas un fanatique des préambules car ils sont placés avant le texte législatif. Ce sont des passages inoffensifs de la législation, mais ils n'ont pas la force d'une véritable disposition législative.

Voilà donc ce que je souhaiterais dire maintenant à M. Nerysoo, je suggérerais que dans la ligne des responsabilités prévues pour les offices des Gwich'in, les responsabilités prévues à l'article 35, un nouvel article soit créé à la rubrique des dispositions générales concernant les offices, article qui imiterait ou reprendrait les responsabilités exprimées au paragraphe 35a).

Je ne pense pas devoir proposer un amendement pour l'instant, monsieur le président, car je suis sûr que nous souhaitons étudier le sujet plus longuement, mais je félicite M. Nerysoo pour avoir soulevé cette question afin que le comité puisse l'examiner.

• 1225

Je terminerai mes remarques en lui demandant—parce que je dois vraiment poser une question au témoin—s'il voit lui-même un problème à appliquer les principes de responsabilité exprimés au paragraphe 35a) à un principe général de responsabilité pour les offices qui pourraient être créés en vertu du projet de loi.

M. Richard Nerysoo: Je ne sais trop. Je ne suis pas député fédéral.

Des voix: Oh, oh!

M. John Bryden: Je suis sûr que vous avez plus d'expérience que moi.

M. Richard Nerysoo: Je dois dire cependant que l'article 35 découle également de notre entente et il m'est donc difficile de vous répondre par oui ou par non. Tout ce que je sais, c'est qu'il est très précis pour ce qui est des principes directeurs concernant l'aménagement territorial. L'aménagement territorial lui-même ne concerne pas uniquement la question de l'exploitation des ressources... mais, l'accès des Canadiens aux terres de notre région en particulier et du Nord en général. Il s'agit aussi de l'accès à ces ressources pour les entreprises et l'industrie.

Ainsi, lorsqu'on traite de l'aménagement territorial, il faut reconnaître que l'on a la responsabilité de permettre que ces terres soient utilisées par les autres Canadiens et leur soient accessibles dans l'intérêt du Canada, tout en reconnaissant les intérêts particuliers et les droits qui figurent dans l'entente sur les revendications territoriales et qu'il faut prendre en compte dans tout plan d'aménagement territorial. Voilà comment je vois cela.

Je ne sais trop comment répondre à votre question originale, c'est-à-dire au traitement à réserver à ce problème dans le texte de loi. Je vous laisse décider si c'est possible ou non. Mais en principe, je crois qu'il est clair que lorsque nous traitons de l'aménagement territorial, nous reconnaissons également qu'il nous faut aussi prendre en compte l'intérêt canadien.

M. John Bryden: Je vais m'arrêter là, monsieur le président, mais il me semble que ce principe relève d'un échelon législatif supérieur, si la chose est possible.

[Français]

Le président: Il faudra que ce soit très court, monsieur Patry, parce qu'on va avoir une urgence. Nous sommes prêts à passer à la vidéoconférence avec Inuvik. Nous avions des problèmes de lignes téléphoniques. On ajournera après votre question, monsieur Patry. Par la suite, on pourra faire un deuxième tour avec le groupe de M. Nerysoo et les gens d'Inuvik. Êtes-vous d'accord qu'on poursuive avec les gens d'Inuvik? Qu'en pensez-vous?

[Traduction]

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Si vous êtes prêts à passer à la téléconférence, je crois que c'est ce qu'il faudrait faire et on reviendra ensuite avec nos témoins pour ne pas embrouiller tout le monde, car c'est ce qui va arriver sinon.

J'aimerais juste dire quelque chose à mon collègue, M. Bryden. Il parlait des principes directeurs du projet de loi. Si vous lisez l'entente sur la revendication territoriale, au volume I, dans l'entente globale des Gwich'in, vous trouverez tous ces principes à l'alinéa 24(2)(ii). Je voulais juste lui faire savoir cela.

[Français]

Le président: On reste en attente. On va ajourner pour cinq minutes.

• 1229




• 1246

Le président: Nous allons maintenant entendre les représentants du Gwich'in Interim Land Use Planning Board et du Gwich'in Land and Water Working Group. Nous entendez-vous?

[Traduction]

Veuillez me donner les noms des membres de l'Office provisoire d'aménagement territorial des Gwich'in.

MM. Cruikshank, Snowshoe et Simpson, pourriez-vous commencer immédiatement à faire votre déclaration?

M. Ron Cruikshank (planificateur et coordonnateur, Office provisoire d'aménagement territorial des Gwich'in): Oui.

Le président: Très bien, allez-y.

M. Ron Cruikshank: Je m'appelle Ron Cruikshank. Je fais partie de l'Office provisoire d'aménagement territorial des Gwich'in.

Dans la salle, sont également présents Charlie Snowshoe, qui est la personne proposée par les Gwich'in; Brian Ferguson qui fait partie de l'Office gwich'in des terres et des eaux (il ne prend pas part à notre exposé, mais il est présent); et Shannon Ward qui fait partie du personnel du Conseil tribal des Gwich'in.

Le président: Merci.

M. Ron Cruikshank: Je remercie le comité permanent de nous avoir permis de faire notre exposé aujourd'hui. Le principal objectif de notre communication est de montrer au comité permanent ce que fait notre Office d'aménagement territorial.

L'office provisoire a été créé lorsque l'entente sur la revendication territoriale a été signée. Nous ne sommes pas l'office permanent; il faudra pour cela attendre que la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie entre en vigueur, mais l'essentiel du travail que nous avons fait ressemble beaucoup au travail que pourrait faire un office permanent et j'ai donc jugé bon de vous montrer une partie de ce travail.

Je vais vous donner un historique succinct des activités de l'office. Je crois que le plus important qu'un plan d'aménagement territorial puisse faire, pour cette région et pour les autres régions qui ont conclu des accords de revendication territoriale, c'est de spécifier à quoi les terres vont être utilisées. L'entente sur la revendication territoriale et la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie préciseront les questions de propriété et de gestion d'une zone terrestre. La revendication d'utilisation des terres peut répondre à la question des possibilités offertes par la région, des utilisations possibles. C'est une question que beaucoup de gens posent lorsqu'il y a un changement de propriétaire et un changement de gestion.

• 1250

Deuxièmement, je crois que l'Office d'aménagement territorial au niveau régional peut beaucoup mieux comprendre les ressources en terres et en eaux d'un secteur donné que cela n'était le cas dans le passé lorsque la planification était faite à Yellowknife ou à Ottawa. Au niveau régional, on connaît beaucoup mieux le secteur et on comprend les questions qui le concernent.

Nous avons commencé en 1993 par l'installation de notre bureau et le démarrage de notre office. Nous avons tout d'abord envoyé à chaque communauté du secteur sud un document sur les questions d'actualité. Nous avons demandé quelles questions concernant les terres et les eaux intéressaient les gens de la région.

Nous pensions utiliser le plan d'aménagement territorial du delta du Mackenzie et de la mer de Beaufort comme principe directeur, mais nous avons constaté au début des années 90 que ce plan avait été conçu à une période où il y avait beaucoup d'activités d'exploitation des hydrocarbures dans la région. À la fin des années 80, les entreprises en question sont parties et il y a eu d'importants changements de propriétaires et de gestion dans la région.

Nous en avons conclu qu'il nous fallait mettre au point un nouveau plan, et nous avons élaboré un plan stratégique dans lequel on donnait les grandes lignes de notre projet de conception d'un nouveau plan. Il s'agissait d'un plan pour notre plan. La mise au point de ce plan stratégique a sans doute été l'étape la plus importante que nous ayons pu franchir, car c'est celle qui a orienté les activités ultérieures.

On nous a demandé de choisir un système d'information géographique pour la région pour la mise en oeuvre du plan prévu dans l'entente sur la revendication territoriale. C'est ce que nous avons fait et nous sommes maintenant en train d'entrer l'information dans ce système. Nous nous sommes donc acquittés de cette obligation prévue dans le plan de mise en oeuvre de l'entente sur la revendication territoriale.

Nous avons produit un document comportant les options possibles pour le plan et dans lequel nous avons étudié jusqu'à un certain point les répercussions de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie sur le plan de la région. Ce document sur les options possibles pour le plan comportait également plusieurs orientations envisageables pour le plan d'aménagement territorial, et le gouvernement et l'industrie nous ont dit ce qu'ils en pensaient et quelles options ils préféraient.

Nous avons produit un rapport communautaire des zones protégées pour que les communautés commencent à réfléchir aux zones de la région sud qu'elles aimeraient voir protéger d'une façon ou d'une autre. Depuis que nous existons, nous sommes également un point central de collecte des données. Je vais maintenant vous raconter l'autre moitié de notre histoire.

Nous avons donc consacré beaucoup d'efforts...

[Français]

Le président: C'est un arrêt de l'arbitre. J'aimerais vous poser une question. Étant donné que le temps passe, est-ce qu'on peut terminer la présentation?

[Traduction]

Est-il possible de terminer pour 13 h 30, avant que ne commence la période des questions à la Chambre des communes?

M. Ron Cruikshank: Certainement.

Le président: Très bien.

M. Ron Cruikshank: Puis-je terminer mon exposé?

• 1255

Le président: Oui, allez-y.

M. Ron Cruikshank: J'avais pratiquement fini d'ailleurs.

Nous nous occupons actuellement de notre plan d'aménagement territorial. Nous pensons avoir une version préliminaire du plan d'ici Noël et espérons terminer le plan provisoire d'ici la fin de l'exercice financier. Un office provisoire ne peut pas aller plus loin dans l'élaboration du plan d'une région sans la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie...

[Note de la rédaction: Difficultés techniques]

[Français]

Le président: Votre intervention était très bien, madame.

Mme la greffière me disait que c'est à cause du changement de code régional. Tout sera réglé la semaine prochaine.

[Traduction]

Allez-y.

M. Ron Cruikshank: Pour conclure, nous avons presque terminé le plan d'aménagement territorial pour la région désignée et très bientôt nous allons avoir besoin de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie pour mener notre travail à son terme et l'intégrer au cadre de gestion des ressources de la région. Notre office fonctionne comme un office public et a fait le travail prévu pour lui dans l'entente sur la revendication territoriale; il pourrait également fonctionner comme office permanent lorsque la loi sera adoptée.

S'il y a des questions, nous sommes prêts à y répondre.

[Français]

Le président: Avez-vous une question? Monsieur Konrad.

[Traduction]

M. Derrek Konrad: Bonjour. Je suis très heureux de pouvoir m'adresser à vous.

Je suis géomètre et je m'intéresse aux systèmes d'information géographique. La discussion pourrait devenir très technique, mais j'imagine que ce n'est pas ce que l'on souhaite.

Il y a une question que j'aimerais poser aux membres du comité qui ont été nommés. J'aimerais savoir comment vous avez été nommés et deuxièmement quelles sont vos qualifications pour faire partie de cet office, simplement à titre d'information.

M. Ron Cruikshank: Voulez-vous savoir...?

[Note de la rédaction: Difficultés techniques]

[Français]

Le président: Allez-y, monsieur Konrad.

[Traduction]

M. Derrek Konrad: À simple titre d'information, je me demande si MM. Snowshoe et Simpson sont des techniciens en matière d'aménagement territorial, des professionnels ou des membres de la communauté qui examinent le plan.

[Note de la rédaction: Difficultés techniques]

M. Derrek Konrad: Encore! Je vais devoir renoncer.

• 1300

M. Grant McNally: Laissez-les répondre. Lorsque la communication reprendra, laissez-les répondre car je crois qu'ils ont compris les questions.

Le président: La réponse vient par télécopieur.

M. Derrek Konrad: S'ils arrivent à obtenir une ligne.

Des voix: Oh, oh!

M. Derrek Konrad: Nous pourrons recommencer un autre jour à moins que ce soit difficile d'obtenir la communication de façon générale?

[Français]

Le président: On va terminer la réunion, parce que si on passe tout l'après-midi...

[Traduction]

C'est notre dernière chance. Donnez-nous votre réponse.

M. Charlie Snowshoe (Office provisoire d'aménagement territorial des Gwich'in): Oui, très bien. Je vais commencer par vous saluer et vous dire ensuite que j'apprécie toute cette installation qui fonctionne par intermittence.

En ce qui concerne la façon dont nous avons été proposés et nommés, je faisais partie de l'Office d'aménagement territorial de la mer de Beaufort en 1988. Nous avons présenté un rapport et vous l'avez mis de côté parce que vous n'étiez pas d'accord. Je vais donc simplement vous dire ce qui se passe.

Pour répondre à votre question, c'est le Conseil tribal des Gwich'in qui a proposé mon nom pour l'Office provisoire d'aménagement territorial et j'ai ensuite été nommé par le gouvernement fédéral pour en faire partie. Je représente les Gwich'in et je suis vice-président de l'aménagement territorial... [Note de la rédaction: Difficultés techniques]... Bob Simpson représente les Gwich'in, a été proposé par le conseil tribal et nommé par le gouvernement fédéral.

Il y a deux représentants du gouvernement qui viennent du ministère. Je crois que vous les avez rencontrés à quelques reprises et que vous connaissez leurs qualifications.

Le président: Merci.

Y a-t-il des questions?

M. Derrek Konrad: Je passe.

Le président: Monsieur Earle.

M. Gordon Earle: Pas de question.

Le président: Monsieur Keddy.

M. Gerald Keddy: Non.

Le président: Monsieur Finlay.

M. John Finlay: Merci, monsieur le président. Oserais-je tenter une question?

Le président: Oui. Vous avez 20 secondes.

Des voix: Oh, oh!

M. John Finlay: Il y a dans le projet de loi C-6 des dispositions générales pour proposer des noms pour les offices et le ministre fédéral a toute discrétion pour la nomination du président au cas où l'office ne propose pas une personne que le ministre peut accepter dans un délai raisonnable. Pensez-vous qu'une telle situation risque de se produire ou est-ce simplement une garantie nécessaire pour permettre la poursuite du travail d'aménagement territorial?

M. Ron Cruikshank: Cela pourrait très bien se produire. Je ne crois pas que cela doive se passer très souvent, mais il est possible que le ministre doive nommer un président, que l'office ne puisse pas s'entendre sur le choix du président. Mais je ne pense pas que cela doive se produire très souvent.

M. John Finlay: Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Avez-vous des questions, monsieur McNally?

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Merci, monsieur le président.

Cela figure sans doute quelque part dans le document que je n'ai pas sous les yeux, mais quelle est la durée de votre mandat à l'office? Est-ce trois ans?

M. Richard Nerysoo: Oui.

M. Grant McNally: A-t-on jamais parlé d'une structure semblable à un conseil ou à une commission scolaire, à un groupe élu de représentants locaux, ou quelque chose de ce genre?

M. Ron Cruikshank: Pas que je sache.

M. Grant McNally: Que penseriez-vous d'une telle chose? Pensez-vous que cette solution présente des avantages ou des inconvénients?

• 1305

M. Ron Cruikshank: J'estime que l'office fonctionne bien avec sa structure actuelle, et je pense que ce que nous faisons maintenant va dans la bonne direction.

M. Grant McNally: Vous pensez qu'il fonctionne bien.

M. Ron Cruikshank: Oui.

Le président: Madame Lindell.

Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Merci.

D'après ce qu'a dit Richard Nerysoo dans son exposé, vous n'avez guère participé à l'examen de BHP. Auriez-vous eu la possibilité de participer davantage à l'examen environnemental de la mine BHP si le projet de loi avait été mis en place plus tôt? Quelle a été la participation de l'office à cet examen?

M. Brian Ferguson (directeur général intérimaire, Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux): Ici Brian Ferguson qui vous parle au nom de l'Office gwich'in des terres et des eaux. Cette question est sans doute davantage liée à mon exposé. Mais préférez-vous que j'y réponde maintenant?

Mme Nancy Karetak-Lindell: Mieux vaut que vous répondiez maintenant, car je ne sais pas combien de temps nous allons encore avoir la ligne.

M. Brian Ferguson: En ce qui concerne l'examen de BHP, je crois que nous y reviendrons un peu plus en détail pendant mon exposé, mais la capacité de l'office des terres et des eaux de participer à cet examen est renforcée par le fait qu'il s'agit davantage d'une participation communautaire aux décisions concernant l'utilisation des terres et des eaux. Bien évidemment, cet examen est passé à l'époque par le processus fédéral PEEE. Après l'adoption du projet de loi, il faudrait qu'il passe par le processus d'évaluation environnementale de l'OEREVM. La demande initiale devrait donc être présentée à l'office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie. Elle serait examinée et un projet de cette envergure devrait subir une évaluation environnementale et une étude d'impact qui seraient effectuées par l'Office d'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie, lequel va comparaître devant vous, me semble-t-il, la semaine prochaine.

Dans ce sens donc, oui, nous aurions eu... [Note de la rédaction: Inaudible]

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Ferguson, avez-vous une déclaration préliminaire?

M. Brian Ferguson: Oui.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je m'appelle Brian Ferguson et je suis directeur général intérimaire du Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux. Je suis venu aujourd'hui vous faire part de l'objectif du groupe de travail et des activités qu'il a entreprises jusqu'ici afin d'en discuter. Je transmets cette information au comité permanent afin d'être sûr qu'il comprend bien le cadre, la structure et le travail de base qui a été effectué par le groupe de travail jusqu'ici. Cela pourra aider le comité permanent dans ses délibérations sur le projet de loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Je vais commencer par donner au comité permanent un bref historique du groupe de travail, de certaines de ses activités de développement, du cadre intégré de gestion des ressources auquel nous nous attelons, de la mise au point du système d'information géographique, du travail technique sur les terres et les eaux, de l'orientation de l'éducation et de la formation, des communications, de la coordination, et de l'élaboration des politiques et des procédures.

Le Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux a été créé en novembre 1995. Il devait faire un travail préparatoire pour faciliter la transition entre le moment où le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien délivrait des permis d'utilisation des terres et où l'Office des eaux des Territoires du Nord-Ouest délivrait des permis d'utilisation des eaux et celui où l'Office gwich'in des terres et des eaux va traiter ces demandes et donner son approbation. La principale fonction de l'Office gwich'in des terres et des eaux consiste à examiner les activités de développement proposées ainsi que la délivrance de permis d'utilisation des terres et des eaux pour la région désignée des Gwich'in.

Afin de s'acquitter au mieux de cette fonction, le Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux a adopté la méthode de la gestion intégrée des ressources en eaux. Elle permettra de comprendre, en tenant compte de l'ensemble de l'écosystème, les activités liées aux divers types de développement et d'exploitation et les répercussions possibles de ces activités sur les ressources en terres et en eaux. Comprenant cela, l'office et les organismes et organisations connexes consultés pourront fournir des renseignements optimaux afin de permettre à l'office d'atténuer les répercussions négatives du développement ou de l'exploitation.

• 1310

Le groupe de travail a commencé par engager du personnel et installer un bureau pour lancer le travail de base et pour faire les travaux de recherche nécessaires demandés par le futur office. Le groupe de travail m'a embauché en avril 1996 et le reste du personnel est arrivé petit à petit tout au long de l'année. Les postes qui sont actuellement à pourvoir ou qui le seront bientôt au sein du groupe de travail sont ceux de directeur général, de secrétaire de direction, d'agent des finances, de gestionnaire des ressources, de spécialiste des systèmes d'information géographique, de technicien des terres et des eaux et de technicien stagiaire des terres et des eaux.

Le bureau de l'office est situé dans l'édifice Chief Jim Koe à Inuvik. Nous partageons actuellement les bureaux avec l'Office provisoire d'aménagement territorial des Gwich'in.

L'organigramme du bureau se remplit rapidement. C'est nécessaire car une grande partie du travail à faire dépend d'un classement clair et précis, de la circulation rapide de l'information et de la transparence du processus. Des systèmes de classement ont été mis au point. Les systèmes de stockage, de recherche et de transfert de l'information par ordinateur sont en bonne voie. Un point d'accueil a été prévu dans les bureaux pour recevoir le public et recevoir les demandeurs. Les systèmes de gestion financière ont été mis au point pour garantir un financement régulier, exact et vérifiable.

Sur cette base et avec cette structure, le personnel de l'Office gwich'in des terres et des eaux devrait être prêt à faire face aux défis liés à la délivrance de permis d'utilisation des terres et des eaux.

L'entente sur la revendication territoriale globale des Gwich'in prévoit une nouvelle gestion et un nouveau système de réglementation pour ce que l'on appelle maintenant la région désignée des Gwich'in. En plus de préciser les objectifs généraux de la revendication, elle comprend un certain nombre de principes à respecter en matière de planification et de gestion.

L'idée d'intégration et de coordination est mentionnée à plusieurs reprises dans la revendication ainsi que dans le projet de loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Plusieurs articles parlent précisément de gestion intégrée ou unifiée des ressources et de coordination des divers organismes participant à la planification et à la gestion. Cela porte également sur la gestion de la faune et de la flore, et sur la gestion et la réglementation des terres et des eaux. La revendication territoriale prévoit tous les offices de cogestion et leur mandat respectif, ainsi que l'ossature qui va leur permettre de travailler ensemble comme il se doit. Le contexte plus général est fourni par la législation et les politiques en vigueur relatives aux questions de compétence.

Pour que le futur office soit tenu au courant de toutes les questions liées à un développement ordonné, le groupe de travail a jugé utile d'adopter une méthode unifiée de gestion des ressources pour la prise de décisions. À l'échelle locale, c'est ce que l'on appelle une façon de travailler ensemble pour prendre soin des terres. La gestion intégrée des ressources concerne la gestion de l'ensemble de l'écosystème ou de l'environnement, y compris le sol, les eaux, les arbres et les autres plantes ainsi que les animaux, pour répondre à un certain nombre de besoins. Elle devrait prendre en compte les ressources tant renouvelables que non renouvelables. Elle consiste à mettre en commun et à coordonner les valeurs et les interventions des divers organismes, publics et autres groupes intéressés lorsqu'on envisage, conçoit et met en oeuvre des politiques, des programmes et des projets.

Idéalement, l'information tant écologique que socio-économique devrait constituer la base des stratégies de planification et de gestion des terres et des ressources. En définitive, gestion intégrée des ressources signifie gestion des actes humains pour que la santé de l'environnement soit préservée et que les ressources soient disponibles pour les générations actuelles aussi bien que futures.

Une méthode unifiée permet une interaction avec tous les groupes pour obtenir l'information pertinente, les valeurs communes et en définitive, les interventions qui sont réalisables et acceptables. Il nous faudra tenir compte de l'environnement tant organisationnel qu'extérieur et faire de la planification un processus permanent.

Il existe en gros quatre types d'intégration que nous devons prendre en compte dans le cadre de notre gestion intégrée des ressources: l'intégration des éléments qui composent l'écosystème, ce qui signifie la gestion des ressources dans l'optique de l'écosystème; l'intégration et la coordination des divers groupes et organismes concernés, ce qui signifie faire en sorte que chaque groupe comprend son rôle et voit de quelle façon il s'intègre dans l'ensemble avec tous les autres groupes; l'intégration des sciences occidentales avec les connaissances locales ou traditionnelles dans le cadre de la prise de décisions et de la gestion; et l'intégration de l'ensemble des valeurs, opinions et usages. Nous devons faire en sorte que le point de vue de tout le monde soit entendu et que l'on puisse permettre tout un éventail d'utilisations de l'environnement.

Les offices de cogestion ont commencé le processus en tâchant d'élaborer un système intégré en avril 1996, date à laquelle les différents offices ont accepté de travailler ensemble à un cadre intégré de gestion des ressources.

Plusieurs démarches importantes ont été entreprises: l'élaboration du matériel de référence, y compris des documents de travail; un certain nombre d'ateliers ont été organisés avec les divers organismes, offices de cogestion, organisations gwich'in, groupes communautaires, ministères fédéraux et territoriaux, et l'industrie.

Il y a eu toute une série de produits et de projets de gestion intégrée des ressources. Des rôles et des responsabilités ont été attribués. Le Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux s'est chargé d'organiser une réunion des présidents et directeurs généraux des offices de cogestion pour discuter des rôles et élaborer des descriptions d'emploi pour les membres des offices.

• 1315

On a mis au point un manuel de participation et de communication communautaires. Il existe un annuaire téléphonique gwich'in dans lequel les membres de la communauté peuvent trouver des renseignements concernant l'office à contacter dans les différents cas, et qui contient également une mise à jour sur les activités à l'intention du public.

Une partie du travail de gestion de l'information a été faite. On a mis au point une méta-base de données pour savoir où se trouve toute l'information à l'intérieur de la région désignée des Gwich'in afin de permettre aux gens de prendre des décisions en connaissance de cause. Une base de données de contact a été mise au point. On est en train d'élaborer une politique des connaissances traditionnelles de façon générale avec le Gwich'in Social and Cultural Institute.

Les autres questions importantes sur lesquelles il nous faudra travailler sont l'évaluation des effets cumulatifs; l'office des terres et des eaux travaille aussi avec l'office d'aménagement territorial pour mettre au point un plan d'aménagement territorial; l'office des terres et des eaux travaille avec l'administration des terres des Gwich'in pour mettre au point des règles de contrôle territorial, qui s'intègrent avec bonheur au système de réglementation prévu dans la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. On doit continuer à examiner et surveiller les activités politiques et législatives. Il faut qu'il y ait un processus d'examen des demandes de permis d'utilisation des terres et des eaux. Et cela se fait depuis un an et demi environ.

Nous sommes également en train de mettre au point un système d'information géographique. Ce SIG qu'est en train de mettre au point le Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux est un outil essentiel pour le stockage et le transfert des données pertinentes sur le plan géographique. Une fois qu'il sera en place, ce système offrira à l'office l'information la plus récente et la plus concise sur les types de ressources et leur emplacement dans la région désignée des Gwich'in. Cette information permettra aux membres de l'office de prendre des décisions éclairées sur les ressources qui pourraient être touchées par un projet de développement. Cette information sera également accessible aux communautés de sorte qu'elles puissent informer l'office de toute question ou de tout problème qu'elles pourraient avoir au sujet d'une proposition de développement donnée.

Ce travail sera également mis à la disposition de l'industrie et des organismes gouvernementaux pour que l'information circule dans les deux sens. Le travail effectué jusqu'ici à ce chapitre comprend l'élaboration d'une cartographie numérique; le regroupement des données provenant des autres sources, qu'il s'agisse des gouvernements, des universités ou des organisations gwich'in; le transfert des données à partir des cartes provisoires d'utilisation des terres faite dans la communauté pour les informatiser, comme Ron l'a dit plus tôt; et le travail avec le Gwich'in Social and Cultural Institute pour inclure l'ensemble des données toponymiques traditionnelles.

Comme on peut le voir étant donné les activités que j'ai mentionnées jusqu'ici, la plupart des démarches nécessaires pour garantir une information générale, exacte et complète qui permette à l'office des terres et des eaux de prendre des décisions éclairées dépendent de la collaboration étroite, de la coordination et de l'intégration de nombreuses organisations.

Le bureau du technicien des terres et des eaux a participé à des activités très variées, notamment à l'élaboration d'un calendrier de formation pour le technicien stagiaire des terres et des eaux; à l'instauration de relations de travail avec les offices gouvernementaux extérieurs; à la production d'une base de données de référence concernant les mesures correctives et d'atténuation utilisées par les organismes de réglementation des terres et des eaux; et à l'examen des demandes de permis d'utilisation des terres et des eaux transmises au bureau de l'office par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Nous avons décidé, à titre de mesure provisoire du bureau local, de faire circuler ces demandes dans la région désignée des Gwich'in à titre d'essai pour voir comment le réseau d'information et de communication fonctionne dans les deux sens. Jusqu'ici tout a très bien été. Nous compilons ensuite ces remarques et nous les renvoyons au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour la délivrance du permis d'utilisation des terres.

Nous contribuons à l'élaboration d'un système pour les demandes d'utilisation des terres, nous aidons le personnel des autres offices dans leurs projets et leurs ateliers, et nous mettons au point des procédures de fonctionnement pour l'utilisation du matériel de travail sur le terrain et pour les feuilles d'activité sur le terrain. Ce travail mettra certainement l'office dans une très bonne position pour assumer ses fonctions une fois que le projet de loi à l'étude sera entré en vigueur.

Le Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux s'est chargé de l'éducation et de la formation des Gwich'in embauchés. Les programmes de formation permettront aux Gwich'in d'assumer certains postes au sein de l'office gwich'in des terres et des eaux. La formation et le perfectionnement des Gwich'in choisis est un élément clé pour permettre aux bénéficiaires de la revendication territoriale d'assumer des responsabilités dans la mise en oeuvre de la revendication et dans la prise de décisions liées à l'autonomie gouvernementale, à la responsabilisation et à la direction future de la région désignée des Gwich'in.

Lorsqu'on garde cela à l'esprit, toute l'idée de l'éducation et de la formation prend plus d'importance et devient une responsabilité plus grande que la simple capacité de fonctionner de l'office. Cette activité est beaucoup plus importante que le temps et le financement qui lui ont été consacrés jusqu'ici.

• 1320

Pour assumer les responsabilités des postes réservés à un personnel professionnel qui sont liés aux fonctions de l'office, le titulaire doit avoir reçu un minimum d'éducation occidentale, et ce minimum varie selon le poste, mais aussi comprendre de façon intrinsèque la région, ceux qui la peuplent et leurs valeurs. Les diplômes d'éducation occidentale peuvent aller du diplôme collégial à celui de premier ou de deuxième cycle universitaire pour la gestion des ressources ou les domaines connexes. Ces niveaux d'instruction devraient permettre au titulaire d'avoir les aptitudes de rédaction et de communication voulues pour effectuer les tâches et réaliser les programmes prévus pour son emploi sans être gêné par le manque de formation nécessaire.

Le groupe de travail a lancé quelques initiatives pour aider à la formation et au perfectionnement des Gwich'in choisis. Le groupe de travail a engagé deux étudiants pour l'été 1997 afin qu'ils effectuent un certain nombre de tâches internes et reçoivent une formation sur place. Ces tâches consistaient notamment à mettre au point des bases de données, à rédiger des documents de travail et à numériser le SIG. Ce type de programme est partiellement limité du fait qu'il exige du temps de la part du personnel permanent pour qu'il assure la formation. Mais c'est du temps bien employé. Toutefois, il faut savoir que lorsque le personnel assure une formation, il ne peut pas effectuer d'autres tâches. Ce sera un problème permanent et on s'attend à ce que les mêmes étudiants employés pour l'été reviennent chaque année.

On a également offert une certaine formation aux permanents. Le personnel chargé de la gestion financière, l'agent de gestion financière est allé suivre des cours de formation en tenue de livres et comptabilité et doit revenir bientôt. Il a fait de très gros progrès dans ces domaines. Pour les autres permanents engagés, étant donné qu'il s'agit d'une toute nouvelle orientation, il faudra également qu'ils reçoivent une formation supplémentaire.

Le groupe de travail a engagé un technicien des terres et des eaux chargé de la formation et un technicien stagiaire des terres et des eaux. Le stagiaire suit actuellement un enseignement coopératif en gestion des terres au collège Aurora d'Inuvik et travaille à l'office pour ses stages. Ce type de mentorat pour la formation d'un stagiaire semble être la méthode la plus logique de transfert d'information et de formation. Bien que ce soit à titre d'essai pour l'instant, les premiers indicateurs sont positifs. Le poste occupé par le stagiaire lui a donné un certain sens d'appartenance et la fierté de réaliser quelque chose, ce qui va certainement l'inciter à terminer ses études.

Le succès de ces programmes dépend beaucoup de la volonté de l'office de mettre à la disposition du stagiaire les outils, le temps et l'aide financière nécessaires pour qu'il termine son calendrier de formation. Le stagiaire doit faire preuve d'une volonté tout aussi grande d'apprendre et d'appliquer les aptitudes voulues pour assumer ses fonctions à l'office. Ce programme a été lancé au niveau technique, et nous envisageons de créer des postes comme ceux de technicien en SIG et de technicien en terres et en eaux pour commencer.

Les membres de l'office ont également subi une formation. Il s'est agi pour l'essentiel d'une formation conjointe avec l'Office d'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie, ainsi que d'une formation dans le cadre d'une association avec l'Office des ressources renouvelables des Gwich'in. Cela devrait être très utile aux membres de l'office et leur permettre de faire face à leurs responsabilités lorsque la loi sera adoptée.

Pour les communications, nous avons mis au point un système de communication interne avec la région désignée à l'intention des communautés et des autres organisations de ladite région. Mais le Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux a également aidé directement le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien dans ses activités de communication plus générales, ce qui permettra d'atteindre les ministères fédéraux et territoriaux...

[Note de la rédaction: Difficultés techniques]

[Français]

Le président: Monsieur Patry.

M. Bernard Patry: Est-ce qu'on leur dit combien de minutes ils doivent prendre quand on leur envoie des notes?

Le président: Oui.

[Traduction]

Monsieur Ferguson.

M. Brian Ferguson: Oui.

Le président: Combien de temps vous faut-il pour terminer votre déclaration? Avez-vous une conclusion?

M. Brian Ferguson: Je vais conclure immédiatement.

• 1325

Le président: Très bien, merci beaucoup. J'ai un problème de vidéo. Allez-y.

M. Brian Ferguson: Sur le plan coordination, le groupe de travail a participé activement à d'autres groupes de travail et à d'autres organismes fédéraux et territoriaux responsables de la réglementation pour l'ensemble de la vallée du Mackenzie.

Le travail fait dans notre organisme relève d'une uniformité d'approche lorsqu'il s'agit de questions plus générales comme par exemple l'examen préalable, la surveillance des effets cumulatifs, ainsi que le fait que les permis d'utilisation des eaux que nous allons devoir étudier portent généralement sur une région transfrontalière.

Si cette interaction a lieu au départ, nous espérons pouvoir nous doter d'une méthode plus uniforme pour ce qui est de la délivrance des permis, ainsi que pour l'évaluation environnementale et l'étude d'impact.

Le groupe de travail a eu de nombreuses réunions et téléconférences depuis sa création. En plus d'approuver et de surveiller les programmes du personnel, on a bien progressé dans l'élaboration des procédures et des politiques de fonctionnement de cet office nouvellement constitué.

Le document provisoire couvre la vision de l'office et la responsabilité législative jusque dans le moindre détail des opérations du bureau et de la politique relative au personnel. Ce document provisoire a été adopté par le groupe de travail et constitue la base de ses opérations futures.

C'est un document qui devra bien sûr être retravaillé. Mais il est considéré comme un document en devenir. Étant donné l'immaturité de l'office, il est tout à fait compréhensible que des révisions ultérieures s'avèrent nécessaires lorsque l'office entrera en fonction.

C'est ce que je voulais dire pour conclure mon exposé à l'intention du comité permanent. Je serais maintenant heureux de répondre aux questions que les membres du comité permanent pourraient avoir à poser au groupe de travail des terres et des eaux.

[Français]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Ferguson. Les membres du comité ont bien apprécié votre déclaration.

Nous passons maintenant aux questions. Monsieur Konrad.

[Traduction]

M. Derrek Konrad: Merci, monsieur Ferguson. Comme je vous l'ai déjà dit, je suis géomètre. Je me suis occupé de systèmes d'information géographique, je pourrais donc discuter du sujet pendant tout le reste de l'après-midi.

La question que j'ai à vous poser porte davantage sur le projet de loi qui permet la mise en commun des installations pour ces offices de planification. J'aimerais savoir si c'est une possibilité chez vous. Pensez-vous que vous auriez davantage de ressources disponibles pour la formation et pour la production effective de vos documents de planification stratégique et autres? Qu'en pensez-vous?

M. Brian Ferguson: Comme je l'ai dit dans mon exposé, c'est une phase dans laquelle nous entrons actuellement avec l'office provisoire d'aménagement territorial. Nous avons deux postes en commun. Il s'agit d'une part d'un poste de secrétariat et de l'autre d'un poste de finances et d'administration. Nous essayons de respecter certaines limites budgétaires en mettant en commun ces ressources.

M. Derrek Konrad: Merci. Ma question portait davantage sur les autres régions des Territoires du Nord-Ouest, comme le fait de travailler avec le Sahtu à la planification et à la préparation effectives des documents.

M. Brian Ferguson: Les distances géographiques constituent, j'imagine, en l'occurrence un problème. D'autre part, la revendication du Sahtu est assortie d'une structure un peu différente, davantage communautaire. Pour la constitution de l'office, il y a actuellement l'office des ressources du Sahtu qui est à Norman Wells alors que l'Office des terres et des eaux du Sahtu est à Fort Good Hope. Quant à l'Office d'aménagement territorial, on ne sait pas encore où il va être situé.

Nous avons donc fait tous les efforts possibles à l'intérieur de la région désignée des Gwich'in pour garder une certaine uniformité ou la capacité de partager des bureaux dans un même édifice, mais je ne vois pas vraiment cela se produire en dehors de la région désignée.

M. Derrek Konrad: Merci beaucoup. Je vais laisser à quelqu'un d'autre le soin de poser une question.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Konrad. Monsieur Earle.

[Traduction]

M. Gordon Earle: Non, merci.

[Français]

Le président: Pas d'autres questions?

[Traduction]

Merci beaucoup, monsieur Ferguson. Je vous remercie de votre déclaration et de vos réponses.

[Français]

Nous allons terminer avec M. Nerysoo.

[Traduction]

Monsieur McNally, vous avez une question?

M. Grant McNally: Oui, monsieur le président, je vous remercie.

• 1330

Monsieur Nerysoo, pour revenir à ce que vous disiez plus tôt de la balkanisation—je crois que c'est le mot que vous avez utilisé—des différentes régions si elles travaillaient indépendamment les unes des autres, j'ai quelques inquiétudes très réelles, que d'autres personnes ont également mentionnées, au sujet des Deh Cho et des problèmes qu'ils nous ont présentés dans leur exposé l'autre jour. Je sais que vous avez dit qu'ils seraient représentés et qu'ils pourraient procéder à des consultations au sein de ces offices, mais je crois qu'ils estiment que la consultation ne veut pas dire approbation dans leur région. C'était l'une de leurs principales préoccupations. Le problème qu'ils ont indiqué, et qu'il nous faut vraiment prendre en compte, est qu'ils ont le sentiment de ne pas pouvoir accepter cela.

Ce sont vos voisins. J'ai l'impression, d'après ce qu'ils disent, qu'ils seraient contraints de participer à cette entente. Je sais que vous y avez fait allusion plus tôt, mais je me demande quel genre de relations vous avez avec les Deh Cho et si ce sera une situation acceptable étant donné leur point de vue. Après avoir entendu leur exposé, l'autre jour, je me demande comment cela pourrait fonctionner.

M. Richard Nerysoo: Je vais vous répondre de la façon suivante. Je n'ai pas entendu tous les problèmes qui ont été soulevés par les Deh Cho. Personnellement, je n'ai jamais eu de problèmes à travailler avec les dirigeants des Deh Cho. Leur point de vue quant à leurs droits est évidemment très différent de l'attitude que nous avons prise à la table des négociations, si différent même qu'à un moment, au cours des négociations, il a fallu faire des concessions et des compromis. Leur point de vue est très clair; ils estiment être un groupe tout à fait souverain de Premières nations. Nous disons aussi la même chose au sujet de nos Premières nations.

Mais le fait est que nous vivons dans un pays où nous devons établir des relations de travail avec d'autres peuples qui ont immigré chez nous. Nous devons accepter la présence de cet autre groupe de personnes. Il faut donc traiter de la question de la souveraineté dans ce contexte. Si vous estimez que vous avez compétence absolue sans prendre en compte les autres personnes, il va vous falloir accepter cet argument.

Je ne crois pas d'ailleurs que cet argument soit acceptable pour un député fédéral.

M. Grant McNally: Il me semble que ce n'était pas non plus l'argument qu'ils avançaient.

M. Richard Nerysoo: Oui, mais il vous faut vous rappeler de leur point de vue de départ. Il vous faut comprendre la position qu'ils ont indiquée à la table. Je crois que c'est ce qui était entendu entre nous. Cela ne veut pas dire qu'ils ne sont pas prêts à négocier. Cela nous l'avons dit très clairement.

Ils ont également dit estimer que nous ne devions pas avoir notre mot à dire au sujet de leurs affaires s'ils n'avaient pas leur mot à dire sur ce qui se passait en Colombie-Britannique ou même en Alberta. Le fait est que la loi nous permet de faire partie d'un processus d'examen conjoint. Pour l'instant, il n'y a pas de système qui nous permette de faire ce genre de choses.

Il y a une longue histoire derrière tout cela. Il faut voir cela dans le contexte des décisions des usines de pâtes et papiers de l'Alberta, de la construction du barrage sur la rivière Peace. Tout cela a eu des conséquences et des effets cumulatifs sur les bassins hydrographiques. Nous le comprenons tous. Mais je dois dire que notre intention est très claire. Nous ne pouvons pas autoriser un système d'examen et de gestion des terres et des eaux sans notre participation, sans la participation des Autochtones.

• 1335

Si on négocie pour finir une entente qui change cette relation particulière, c'est à eux de prendre cette décision; mais je ne crois pas qu'il soit juste de notre part de suggérer qu'ils ne doivent pas participer. C'est tout ce que je dis.

Ce texte de loi permet la participation. S'ils décident de négocier quelque chose d'autre qui modifie ce texte de loi, très bien. Mais s'ils changent le système, vous pouvez être sûr qu'il vous faudra revenir à la table des négociations avec les Gwich'in car cela change les relations constitutionnelles entre les Gwich'in, le peuple canadien et le gouvernement du Canada. C'est un élément très important à prendre en compte.

M. Gordon Earle: J'aimerais revenir au processus de consultation. Je crois que l'article 6 exige que le ministre fédéral consulte les Premières nations gwich'in et sahtu pour modifier la loi et il y a à l'article 3 du projet de loi une définition du terme «consultation». À votre avis, cette définition permettrait-elle une participation suffisante du Conseil tribal des Gwich'in pour toute modification de la loi étudiée?

M. Richard Nerysoo: Il me semble que oui et c'est pourquoi nous avons accepté cet article dans le texte de loi proposé. Nous pensons actuellement qu'elle répond à nos inquiétudes.

M. Gordon Earle: Bien que le projet de loi ait des effets sur toute la vallée du Mackenzie, l'obligation qu'a le ministre fédéral de procéder à des consultations ne concerne pas le gouvernement territorial ni les autres Premières nations de la région. Qu'en pensez-vous?

M. Richard Nerysoo: Il s'agit évidemment encore une fois de savoir si les consultations les intéressent. Nous ne voyons aucun problème à ce que le gouvernement du Canada soit obligé de consulter les Premières nations si cela est exigé. Nous n'avons jamais contesté ce genre de choses. Je crois que c'est un principe important et qu'il faudrait toujours garder la méthode consultative.

M. John Finlay: J'aimerais passer à l'évaluation environnementale et à l'étude d'impact.

Le processus prévu dans le projet de loi C-6 diffère du régime établi par la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale à plusieurs égards. Cette dernière exige par exemple explicitement davantage d'occasions de participation du public à l'évaluation que ne le prévoit le projet de loi C-6. Elle prévoit également un financement par les participants pour la phase de l'évaluation environnementale qui suit l'examen préalable afin de permettre une participation utile du public.

Pourriez-vous nous dire ce que vous pensez des modifications du système actuel d'évaluation environnementale qu'entraînerait le projet de loi C-6 pour la vallée du Mackenzie? Par ailleurs, existe-t-il dans le projet de loi C-6 une disposition prévoyant le financement des participants, et dans la négative, pourquoi cela n'a-t-il pas été jugé nécessaire?

M. Richard Nerysoo: Je vais répondre à la première question concernant les modifications. Comme vous l'avez dit, il y a modification.

Je vais demander à M. Crane de répondre à la question concernant le financement.

M. Brian Crane: Je ne crois pas qu'il y ait de disposition dans le projet de loi qui garantisse le financement par les participants. Ce n'est pas quelque chose qui a été beaucoup débattu lors des discussions de consultation. Ce que voulaient les Gwich'in dans ce débat avec le gouvernement fédéral, c'était de s'assurer que tout ce qui figure dans l'entente sur la revendication territoriale figure également dans le projet de loi. Le financement par les participants n'a pas été mentionné dans l'entente sur la revendication territoriale, il n'y a donc rien à ce sujet dans le document législatif. Nous n'avons pas pris position là-dessus. Ce n'est pas dans l'entente.

Cela n'empêche bien sûr pas le comité de faire une recommandation à ce sujet s'il estime que c'est souhaitable.

• 1340

Pour ce qui est de la cohérence avec la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, le projet de loi prévoit bien sûr un processus d'évaluation pour le Nord. Cette décision a été prise délibérément. Et on essaie d'éviter tout chevauchement entre les deux processus. On a tout de même cherché à rendre le processus prévu pour le Nord aussi compatible que possible avec celui de la loi. Et l'intention était très certainement que le public devait pouvoir participer pleinement au processus d'évaluation. Il était clair, lors des audiences publiques, au moment de l'examen par la commission, que l'intention était que le public ait la possibilité de participer à égalité, comme pour le processus prévu dans la loi.

Pour ce qui est de l'évaluation, le terme «évaluation» tel qu'il est utilisé dans la loi et dans le projet de loi relatif à la vallée du Mackenzie ne concorde pas tout à fait car la loi en fait une description légèrement différente. Mais l'intention était, je crois, de rendre ces processus totalement compatibles. Rien dans le projet de loi ne pourrait empêcher une participation pleine et entière du public au processus d'évaluation.

M. John Finlay: Vous dites donc que les deux processus sont suffisamment semblables pour que, si l'on effectue le processus prévu dans le projet de loi C-6, personne ne vienne protester en disant qu'on aurait dû effectuer celui qui est prévu dans la loi et vice versa.

M. Brian Crane: Oui.

Le président: Madame Lindell.

M. John Finlay: Je crois que M. Nerysoo va répondre à ma première question.

M. Richard Nerysoo: Oui, pour préciser davantage la question, plusieurs inquiétudes ont été soulevées quant à l'approche provisoire, quant à la législation en vigueur en matière d'évaluation environnementale et quant aux processus utilisés; l'industrie participait déjà en fait au processus prévu par la loi.

Le Conseil tribal des Gwich'in, lui, ne voit pas de problèmes à ce que ces entreprises continuent à le faire en vertu de cette loi, parce qu'elles participent déjà au processus. Autrement dit, elles utilisent le processus de la loi. J'estime que nous devrions les laisser terminer le processus selon ces règles pour que l'approche provisoire soit possible plutôt que de demander à ces compagnies d'intégrer le nouveau système et de tout recommencer. J'estime qu'on devrait les laisser passer par le système en place et leur accorder des droits acquis, si vous voulez, dans ce processus pour qu'elles n'aient pas à renégocier le processus auquel elles participent.

On a également manifesté des inquiétudes à l'égard des permis qui ont déjà été délivrés car on se demande s'il va falloir les accorder à nouveau. Là encore, nous pensons que ce n'est pas un problème que de considérer ces permis comme un droit acquis pour qu'il ne soit pas nécessaire de recommencer le processus en vertu du projet de loi C-6. Ces permis ont été délivrés, ils existent, et les règles devraient rester en vigueur. C'est une discussion que nous avons d'ailleurs tenue.

Le président: Merci beaucoup.

Madame Lindell.

Mme Nancy Karetak-Lindell: Le sujet que je vais aborder est totalement différent de celui de M. Finlay. Ce n'est pas une question qui s'adresse particulièrement au groupe, mais j'ai eu quelques inquiétudes lorsque M. Konrad a fait des remarques sur les qualifications des personnes qui sont nommées à ces offices.

• 1345

J'aimerais que l'on sache que j'estime qu'on ne devrait pas remettre en question les qualifications des membres des offices s'ils n'ont pas de diplôme en ceci ou en cela, ou remettre en question le fait qu'il s'agit de techniciens ou non, car je crois que tous les Autochtones ne sont pas pris en compte pour les connaissances qu'ils ont de la terre, des poissons et des autres animaux. Ce n'est pas parce qu'ils n'ont pas de diplôme universitaire qu'ils ne sont pas qualifiés pour être membres de ces offices. Lorsque les différents groupes qui participent au processus acceptent une recommandation, cela veut dire que, dans le cas des Gwich'in, par exemple, ils ont été proposés avec l'assentiment du conseil.

Je ne sais plus trop quelle était la question, mais je crois que les connaissances que ces gens apportent sont l'équivalent de celles que véhiculent ceux qui ont étudié les pêches, la gestion des terres ou la biologie. Je voulais simplement que cette déclaration figure au procès-verbal.

[Français]

Le président: Merci, madame Lindell. On va maintenant donner la parole à M. Konrad.

[Traduction]

M. Derrek Konrad: Je tiens à revenir sur ce que vous avez dit, à savoir que les qualifications d'une personne ne comptent absolument pas. Si quelqu'un se présente comme un pêcheur et vous dit qu'il a pêché dans le moindre recoin de la vallée du fleuve Mackenzie, qu'il n'est pas allé à l'école un seul jour de sa vie, cela ne veut pas dire qu'il n'a pas droit à la parole.

Nous sommes venus ici ce matin. Je constate que Richard Nerysoo est président du conseil. J'apprends qu'il a été ministre et leader du gouvernement dans les Territoires du Nord-Ouest. On nous l'a dit à titre d'information. Brian Crane est avocat. James Ross est ce que l'on appelle un coordonnateur de la mise en oeuvre. C'est un ancien chef.

Se renseigner sur les qualifications d'une personne est tout à fait dans l'ordre des choses pour le comité et ne devrait jamais être refusé. Personne ne devrait laisser entendre que parce qu'une question a été posée, elle constitue une remarque désobligeante à l'égard de quelqu'un. Je suis tout à fait contre cela. Je tiens notamment à vous dire que j'ai du sang autochtone.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Konrad. Monsieur Nerysoo, je constate que vous voulez intervenir.

[Traduction]

M. Richard Nerysoo: Je ne sais si je dois jouer le médiateur ou...

Je tiens à préciser que la question des qualifications, quelle que soit l'optique que vous lui donnez, est importante, quelles que soient les connaissances que vous apportez à la table. Je vais vous donner un bon exemple. Récemment, l'Office des ressources renouvelables des Gwich'in a reçu un prix pour avoir publié un document, un livre sur les connaissances traditionnelles. En fait, il est actuellement en lice en Espagne pour un prix international. Nous vous apportons donc ces connaissances. Tous ceux qui viennent à la table peuvent s'en servir, le technicien par exemple; il s'agit de savoir que cela existe et que c'est disponible.

Il y a une chose dans laquelle je crois vraiment et je l'ai dit non seulement au cours de nos propres discussions au sein de notre organisation, mais à nos chefs. La question importante en ce qui concerne ces offices est l'intégrité et l'indépendance du processus. Ces gens doivent prendre des décisions en fonction des renseignements qui leur sont fournis. Il faut qu'on les voie comme indépendants. Rien n'est parfait en matière d'indépendance, mais il faut qu'on les voie comme coupés du processus purement politique et comme prenant des décisions en fonction des informations dont ils disposent.

Je pense vraiment que c'est un principe important, que vous soyez ou nom membre du conseil tribal, député ou ministre. Vous devez faire en sorte qu'il y ait cette intégrité, cette indépendance totale. Sans cela, on pourra toujours poser des questions sur la nature des décisions et sur le processus de prise de décisions.

Lorsque je propose un nom au ministre, la personne en question ne représente pas le conseil tribal; cette personne représente le peuple de la région mais elle apporte le point de vue gwich'in.

M. Derrek Konrad: C'est plus qu'un nom que vous avez soumis lorsque vous avez demandé qu'on nomme cette personne.

M. Richard Nerysoo: Tout à fait.

M. Derrek Konrad: C'est bien ce que je veux dire.

M. Richard Nerysoo: Cela ne fait aucun doute.

• 1350

Et il y a un autre élément important. La question a été soulevée... et je lis à nouveau quelque chose au sujet des antécédents judiciaires; on a parlé d'intégrité et on a demandé si oui ou non on avait posé ce genre de questions. Je laisse au système de sécurité le soin de vérifier ce genre de choses. Je ne crains pas d'entendre le ministre me dire que la personne que j'ai proposée, que les dirigeants de la tribu ont proposée ou que la communauté a proposée ne correspond pas aux règles normalement acceptables dans notre pays. Il nous faut respecter cela. C'est donc une chose à prendre en compte.

Le président: Merci, monsieur Konrad.

[Français]

Merci, monsieur Nerysoo. Le temps avance vite. Nous allons terminer avec M. Keddy, Mme Lindell et M. Patry. Il nous reste quatre minutes. Monsieur Keddy, vous avez deux minutes.

[Traduction]

M. Gerald Keddy: Ce n'est pas un problème. Deux minutes, c'est très bien, c'est amplement suffisant. Je serai très bref et j'irai droit au but.

J'aimerais rappeler très brièvement au comité les raisons de notre présence ici. Nous ne sommes pas ici pour analyser le règlement de la revendication territoriale des Gwich'in; cela a déjà été fait—c'est du passé—ni la façon dont les offices sont constitués et qui peut en faire partie. Ce n'est pas du tout pour cela que nous sommes ici.

On a soulevé une question. Étant donné que cela ne touchait pas les représentants qui étaient ici aujourd'hui, je ne l'ai pas abordée, mais elle le sera à d'autres moments. Étant donné que vous l'avez fait, je crois qu'il est bon que nous y réfléchissions. Il s'agit de donner le statut de droits acquis aux ententes existantes. Cela existe peut-être dans le cas qui nous occupe, mais on se demande si cette possibilité existe dans d'autres cas. Si nous envisageons l'entrée en vigueur générale du projet de loi et si nous voulons que son application donne des résultats, il faut le considérer comme une première étape et il se peut que dans dix ans nous le réexaminions et que nous constations qu'il a besoin d'être peaufiné. Mais pour le domaine qui nous intéresse, le fait de considérer comme acquis les permis déjà délivrés est quelque chose que le comité doit envisager et étudier. Je voulais simplement le signaler.

Mme Nancy Karetak-Lindell: Je ne voulais pas insulter M. Konrad, mais je voulais simplement préciser la chose car, en lisant la transcription, je ne voudrais pas que l'industrie trouve de bons arguments car je sais qu'elle s'inquiète de la qualification de certaines personnes qui font partie de l'office.

Quant à M. Snowshoe, je ne sais s'il a répondu à la question concernant ses qualifications. Je voulais simplement m'assurer que cela ne deviendrait pas un problème, car je suis tout à fait conscience de l'utilité des connaissances des personnes qui font partie des offices.

M. Bernard Patry: J'aimerais conclure.

Tout d'abord, je veux remercier nos invités d'Inuvik, de l'Office provisoire d'aménagement territorial des Gwich'in, du Groupe de travail gwich'in des terres et des eaux et du Conseil tribal des Gwich'in dont le président est le chef Richard Nerysoo.

Monsieur Nerysoo, votre exposé était très pertinent, très pragmatique et grâce à lui et aussi grâce aux réponses que vous avez données, nous pouvons voir combien votre expérience est vaste. Je comprends aujourd'hui un peu mieux vos inquiétudes et vos problèmes et j'espère que le comité, avec l'aide de tous mes collègues, pourra résoudre quelque peu certains de vos problèmes.

Merci beaucoup d'être venu aujourd'hui.

[Français]

Le président: En terminant, monsieur Nerysoo, nous tenons tous à vous remercier pour votre témoignage d'aujourd'hui. Je sais que votre visite à Ottawa sera remarquée par tous les députés canadiens et par les autres nations autochtones du Canada.

Nous allons surtout retenir un point qui est vraiment essentiel dans votre grande collectivité. Vous respectez toutes les autres collectivités de votre grande région. Merci, messieurs Ross et Crane. Je vous souhaite un bon retour. À bientôt.

Je tiens également à remercier nos interprètes pour le travail remarquable qu'ils ont accompli aujourd'hui, compte tenu des problèmes que nous avions. Nous tenons aussi à remercier toute l'équipe de soutien et l'équipe de vidéo.

N'oubliez pas qu'à 15 h 30, cet après-midi, nous rencontrons le Dogrib Treaty 11 Council.

La séance est levée.