FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 28 octobre 2002
¹ | 1540 |
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)) |
John Stewart (vice-président exécutif et directeur général, Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada) |
¹ | 1545 |
La présidente |
Mme Zonibel Woods (directrice, Relations gouvernementales, Action Canada pour la population et le développement) |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
La présidente |
Mme Susan Ziebarth (chef de la direction, Association canadienne des hygiénistes dentaires) |
º | 1600 |
La présidente |
M. Jose Kusugak (président, Inuit Tapiriit Kanatami of Canada) |
º | 1605 |
º | 1610 |
La présidente |
M. Jose Kusugak |
La présidente |
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Alliance canadienne) |
º | 1615 |
M. Murray Elston (président, Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada) |
M. Rahim Jaffer |
Mme Zonibel Woods |
º | 1620 |
La présidente |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
M. Jose Kusugak |
º | 1625 |
Mme Pauline Picard |
M. Jose Kusugak |
La présidente |
Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
º | 1630 |
Mme Zonibel Woods |
La présidente |
Mme Maria Minna |
º | 1635 |
La présidente |
M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.) |
Mme Susan Ziebarth |
M. Shawn Murphy |
Mme Susan Ziebarth |
º | 1640 |
La présidente |
M. Shawn Murphy |
M. Murray Elston |
La présidente |
M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.) |
º | 1645 |
M. Murray Elston |
Mr. Mauril Bélanger |
M. Murray Elston |
M. Mauril Bélanger |
M. Murray Elston |
º | 1650 |
M. Mauril Bélanger |
M. Murray Elston |
M. Mauril Bélanger |
M. Murray Elston |
M. Mauril Bélanger |
M. Murray Elston |
M. Mauril Bélanger |
La présidente |
M. Mauril Bélanger |
M. Murray Elston |
M. Mauril Bélanger |
La présidente |
La présidente |
» | 1700 |
M. Richard Paton (président-directeur général, Association canadienne des fabricants de produits chimiques) |
» | 1705 |
La présidente |
M. Richard Paton |
La présidente |
M. Alan Young (vice président, Computing Technology Industry Association of Canada (COMPTIA)) |
» | 1710 |
» | 1715 |
La présidente |
M. Al McDowell (directeur général, Innovations en technologie environnementale du Canada) |
» | 1720 |
M. Jack Pasternak (directeur général, Innovations en technologie environnementale du Canada |
M. Al McDowell |
M. Jack Pasternak |
» | 1725 |
La présidente |
Mme Norine Heselton (vice-présidente, Politiques, Association canadienne de la technologie de l'information) |
» | 1730 |
M. Graham Hoey (associé, Ernest & Young LLP; Association canadienne de la technologie de l'information) |
» | 1735 |
La présidente |
M. Andy Burton (Skeena, Alliance canadienne) |
M. Richard Paton |
M. Andy Burton |
M. Richard Paton |
» | 1740 |
M. Andy Burton |
M. Richard Paton |
M. Andy Burton |
La présidente |
M. Andy Burton |
La présidente |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
Mme Norine Heselton |
M. Roy Cullen |
Mme Norine Heselton |
M. Roy Cullen |
» | 1745 |
M. Graham Hoey |
M. Roy Cullen |
M. Al McDowell |
M. Roy Cullen |
M. Jack Pasternak |
M. Roy Cullen |
M. Jack Pasternak |
M. Al McDowell |
M. Jack Pasternak |
M. Roy Cullen |
La présidente |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
» | 1750 |
M. Richard Paton |
M. Bryon Wilfert |
M. Richard Paton |
M. Bryon Wilfert |
M. Alan Young |
» | 1755 |
M. Bryon Wilfert |
M. Alan Young |
M. Bryon Wilfert |
M. Alan Young |
M. Bryon Wilfert |
M. Richard Paton |
M. Bryon Wilfert |
La présidente |
Mme Maria Minna |
M. Alan Young |
Mme Maria Minna |
M. Alan Young |
¼ | 1800 |
Mme Maria Minna |
M. Alan Young |
Mme Maria Minna |
M. Al McDowell |
Mme Maria Minna |
M. Jack Pasternak |
Mme Maria Minna |
M. Jack Pasternak |
M. Al McDowell |
¼ | 1805 |
La présidente |
M. Andy Burton |
M. Richard Paton |
M. Andy Burton |
M. Richard Paton |
M. David Shearing (directeur principal, Développement économique, Association canadienne des fabricants de produits chimiques) |
M. Richard Paton |
M. Andy Burton |
M. Graham Hoey |
M. Andy Burton |
¼ | 1810 |
M. Richard Paton |
La présidente |
M. Roy Cullen |
M. Richard Paton |
¼ | 1815 |
M. Roy Cullen |
M. Alan Young |
M. Graham Hoey |
M. Roy Cullen |
M. Graham Hoey |
M. Roy Cullen |
La présidente |
M. Bryon Wilfert |
¼ | 1820 |
M. Richard Paton |
La présidente |
M. Alan Young |
La présidente |
Mme Norine Heselton |
M. Jack Pasternak |
M. Bryon Wilfert |
La présidente |
CANADA
Comité permanent des finances |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 28 octobre 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1540)
[Traduction]
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Conformément au paragraphe 83(1) du Règlement, nous poursuivons les discussions prébudgétaires. Nous aurons deux tables rondes.
Participent à la première table ronde cet après-midi, Mme Zonibel Woods et Mme Johanne Fillion d'Action Canada pour la population et le développement; des Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada, M. Murray Elston, président, et M. John Stewart; Mme Susan Ziebarth et Mme Judith Lux de l'Association canadienne des hygiénistes dentaires; et M. Jose Kusugak, des Inuit Tapiriit Kanatami du Canada.
Nous avons reçu vos mémoires que nous avons fait traduire et je vais maintenant donc vous demander de résumer vos mémoires ou de parler de ce que vous voudrez pendant sept minutes. Ensuite nous passerons aux questions lorsque tous les exposés seront terminés.
Nous allons commencer par M. Stewart, le vice-président exécutif et directeur général de Purdue Pharmaceuticals. Je vous en prie, présentez le point de vue des compagnies de recherche pharmaceutique du Canada.
John Stewart (vice-président exécutif et directeur général, Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada): Merci beaucoup, madame Barnes.
Je suis le nouveau président des Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada, association également connue sous le nom de Rx et D. Je suis accompagné de M. Murray Elston, président de l'Association. Nous sommes heureux d'être ici aujourd'hui pour présenter aux membres du comité nos recommandations en ce qui a trait au prochain budget fédéral.
Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada sont une association nationale représentant plus de 23 000 Canadiens et Canadiennes qui travaillent au sein des 62 compagnies de recherche pharmaceutique au pays. Plus de 9 500 chercheurs canadiens, dans le secteur de la recherche médicale, ont un emploi en raison des investissements en recherche et développement de nos compagnies membres. De ce nombre, environ 5 100 travaillent dans des universités, des hôpitaux et des centres de recherche, et 4 400 sont à l'emploi des compagnies membres de Rx et D. Les compagnies membres de Rx et D partagent un même objectif principal: découvrir de nouveaux médicaments pour améliorer la qualité des soins de santé offerts à tous les Canadiens et Canadiennes.
Ceci dit, j'aimerais aborder le travail du comité, soit les consultations qui mèneront au prochain budget fédéral. Dans le plus récent discours du Trône, le gouvernement a identifié la création d'un réseau de soins de santé pour le XXIe siècle comme l'une des priorités les plus importantes de ce pays. Bon nombre de Canadiens sont d'accord. Nous le sommes également. Dans le cadre de son programme d'innovation, le gouvernement s'est également donné comme objectif d'élever la Canada au rang des cinq meilleures économies mondiales d'ici 2010. Le discours du Trône contient également certaines mesures importantes dans ce secteur. De nos jours, notre industrie joue un rôle fort important dans les efforts déployés en vue d'atteindre ces deux objectifs. À notre avis, il existe un lien dynamique entre l'innovation et les soins de santé. C'est simple: les investissements dans la recherche mènent à la découverte de nouveaux médicaments, et les découvertes du monde médical vers des traitements plus efficaces qui amélioreront la santé des Canadiens et des Canadiennes.
En ce qui concerne le programme d'innovation, le bilan du gouvernement dans ce domaine mérite des éloges. Nous avons été ravis du financement de la Fondation canadienne pour l'innovation, des Instituts de recherche en santé du Canada et de Génome Canada, ainsi que des mesures du gouvernement en vue de couvrir les coûts indirects de la recherche et de ses efforts pour rendre le Canada extrêmement concurrentiel dans une économie axée sur le savoir. Nos compagnies membres encouragent le comité et le gouvernement à prendre des mesures concrètes dans le prochain budget qui transformeront ce solide engagement envers l'innovation, la recherche et le développement en résultats concrets pour tous les Canadiens. Cela signifie investir fortement dans la recherche et le développement dans le but de découvrir de nouveaux médicaments.
L'année dernière seulement, nos compagnies membres ont investi plus de 1,1 milliard de dollars dans la recherche et le développement médical, ce qui correspond à une augmentation de 1 000 p. 100 depuis 1987. Notre industrie est également prête à faire plus encore. Le 24 septembre dernier, les compagnies membres de Rx et D ont conclu une nouvelle entente de partenariat avec le gouvernement du Canada ayant la forme d'un programme en cinq volets pour améliorer la santé des Canadiens et favoriser l'innovation. À ce moment-là, nous avons affirmé que nous allions augmenter nos investissements si le gouvernement prenait les mesures pour améliorer la politique et la réglementation.
Le programme en cinq volets de Rx et D comporte les mesures suivantes: le gouvernement fédéral s'engage à encourager l'innovation dans tous les secteurs industriels; des normes mesurables du rendement en matière d'innovation; un comité public et privé qui se concentrerait sur les mesures prises par le gouvernement et les entreprises pour mettre en oeuvre la stratégie d'innovation du gouvernement; un rapport annuel sur les progrès en matière d'innovation présenté au Parlement; et des mesures par les gouvernements provinciaux et territoriaux pour améliorer l'accès des Canadiens et des Canadiennes aux médicaments innovateurs.
Quels outils permettraient aux compagnies membres de Rx et D de maximiser leur contribution au programme du Canada en matière d'innovation? Voici ce que nous avons suggéré.
Nous avons besoin que le gouvernement fédéral maintienne les mécanismes de protection par brevet et veille à ce qu'ils soient mis en application de manière efficace.
¹ (1545)
Contrairement à la croyance populaire, une protection par brevet de 20 ans ne signifie pas 20 ans de durée de vie sur les tablettes pour un nouveau médicament. En fait, nous estimons avoir beaucoup de chance lorsque cela correspond à la moitié de cette période puisque la protection commence bien avant qu'un médicament ne soit approuvé et ne soit offert aux patients.
Ensuite, le gouvernement pourrait réduire le délai qu'il faut pour approuver au palier fédéral un nouveau médicament. Il pourrait ensuite collaborer avec les provinces afin de réduire le temps requis avant qu'ils se trouvent sur les listes de médicaments des régimes provinciaux d'assurance-médicaments. À ce sujet, nos compagnies membres se réjouissent de l'appui du gouvernement dans le discours du Trône à une «réglementation intelligente» et de la reconnaissance que le Canada doit, et je cite, «réglementer de manière à créer un climat susceptible d'attirer l'investissement et de susciter la confiance des marchés». Les membres de Rx et D sont entièrement d'accord.
Bien sûr, nous sommes également heureux de l'engagement du gouvernement dans le discours du Trône à, et encore une fois je cite, «accélérera le processus réglementaire d'approbation des médicaments afin que les Canadiens puissent avoir accès plus rapidement aux médicaments sûrs dont ils ont besoin, créant un climat plus propice à la recherche dans ce domaine». C'est dans ce contexte que votre comité peut avoir une influence énorme et favorable sur l'innovation dans ce pays. Nous vous incitons à fortement recommander au gouvernement de consacrer toutes les ressources nécessaires pour respecter l'engagement prix dans le discours du Trône dès que possible. Il en résultera plus de recherches, d'innovation et un accès plus opportun à des médicaments sécuritaires pour les Canadiens.
Nos membres croient également que la définition de la recherche et du développement dans la Loi de l'impôt sur le revenu doit être élargie et harmonisée avec la définition de l'OCDE. Ceci créera des incitatifs additionnels pour investir dans la recherche au Canada, surtout dans le secteur de la biotechnologie.
Finalement, nous vous encourageons à continuer d'investir dans la recherche dans le but d'améliorer l'infrastructure de la recherche canadienne.
Il s'agit de quelques-unes des mesures du programme que nous avons proposé. Leur donner suite dès maintenant créera le climat dont nous avons besoin pour investir, innover et concurrencer.
Je vois que j'arrive à la fin des sept minutes qui m'ont été accordées. Je vais donc passer à la conclusion.
Comme vous pouvez le constater, je l'espère, par notre exposé, les compagnies membres de Rx et D croient tout simplement que les investissements dans la recherche mènent à la recherche de nouveaux médicaments et que les découvertes du monde médical permettent aux Canadiens et aux Canadiennes d'être en meilleure santé.
Nous voulons travailler avec le gouvernement de telle sorte que le Canada puisse être un chef de file mondial dans le développement de nouveaux médicaments qui améliorent la santé des personnes, nous aident à gérer notre réseau de soins de santé, suscitent l'innovation, créent des emplois et ont des effets positifs sur notre économie. Le travail de votre comité et ses conseils au gouvernement peuvent mener et, nous l'espérons, mèneront à des mesures précises dans le prochain budget fédéral. Ces avantages pourront alors devenir réalité.
Nous remercions le comité du temps qu'il nous a consacré aujourd'hui. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à la représentante d'Action Canada pour la population et le développement, Mme Zonibel Woods. Je vous en prie.
Mme Zonibel Woods (directrice, Relations gouvernementales, Action Canada pour la population et le développement): Merci, madame la présidente. Nous nous réjouissons d'avoir l'occasion de parler aux membres du comité.
En mars 2002, à la Conférence des Nations unies sur le financement du développement qui s'est tenue à Monterrey, au Mexique, le premier ministre, M. Chrétien, s'est engagé à accroître l'aide extérieure du Canada d'au moins 8 p. 100 pour chacune des années à venir, dans un avenir prévisible. Cette augmentation devrait doubler la valeur nominale actuelle de l'aide extérieure d'ici huit ou neuf ans.
Les intervenants en matière d'aide extérieure trouvent cette nouvelle encourageante. Depuis des années, ils exhortent le gouvernement à accroître l'aide extérieure canadienne et à s'engager publiquement à respecter un échéancier pour établir l'aide publique au développement ou APD du Canada. Le gouvernement a maintenant annoncé son intention de le faire. Il ne faut toutefois pas perdre de vue le fait que le gouvernement actuel a tellement réduit notre budget d'aide extérieure qu'en le doublant au cours des huit ou neufs prochaines années, il ne fera que le ramener à peu près à son niveau de 1985, en pourcentage de notre produit intérieur brut. C'est loin de l'engagement pris de consacrer 0,7 p. 100 de notre PIB à l'APD puisque cela ne représente que 0,33 p. 100.
L'APD du Canada est passée d'un maximum de 0,49 p. 100 du PIB au début des années 90 à 0,30 p. 100 en 1998, puis à 0,23 p. 100 en 2001. Il s'agit là du plus faible niveau enregistré depuis 1965.
La baisse des dépenses au titre de l'APD s'est produite bien que le Canada soit un chef de file économique et budgétaire parmi les pays de l'OCDE. Le Canada se classe actuellement au dix-huitième rang des 22 pays donateurs de l'OCDE.
L'aide extérieure a été frappée plus durement que tous les autres secteurs au cours de la dernière décennie. Le budget du Canada au titre de l'APD a enregistré une baisse réelle de 34 p. 100 entre 1991 et 2001. De nombreux domaines de programmes fédéraux du budget canadien ont fait l'objet de compressions dans les années 90, mais l'aide canadienne a été touchée de manière disproportionnée comparativement à d'autres domaines de programme. Le budget de la défense a été réduit de seulement 17 p. 100 et l'ensemble des dépenses des programmes fédéraux n'a accusé une baisse que de 9 p. 100 de 1991-1992 à 2000-2001.
La plupart des Canadiens estiment que nous devrions dépenser davantage pour l'aide extérieure. Depuis quatre ans, la proportion des Canadiens qui estiment que le Canada ne dépense pas suffisamment au chapitre de l'aide extérieure a augmenté considérablement. De plus en plus de gens pensent que le Canada ne fait pas assez pour aider les hommes, les femmes et les enfants du monde entier qui vivent dans la pauvreté, même si la plupart des Canadiens surestiment nettement les sommes que le Canada dépense pour l'aide extérieure. Lorsqu'ils apprennent que ces sommes ne représentent que 0,25 p. 100 de notre produit intérieur brut, ils sont encore plus nombreux à appuyer un accroissement des dépenses.
Les Canadiens de toutes les régions disent que les activités en matière de développement sont excellentes et que le Canada doit les mener à bien. Le Canada est l'un des pays les plus riches du monde, et les Canadiens estiment que nous devons faire plus pour aider les millions de personnes qui n'ont pas accès à de l'eau potable, à l'éducation et à des soins de santé, notamment à des services de santé génésique de base, et celles qui souffrent ou meurent de maladies traitables et évitables.
Le non-respect de nos promesses en matière d'APD a des répercussions dévastatrices pour ceux qui vivent dans la pauvreté partout dans le monde. L'échec du Canada à respecter ses engagements pris au Caire a aussi des répercussions profondes sur ceux qui vivent dans la pauvreté.
Ainsi, à la Conférence internationale sur la population et le développement qui a eu lieu en 1994 au Caire, le Canada a accepté, avec d'autres pays, de financer des programmes mondiaux soutenant la santé et les droits génésiques, la population et le développement durable. Le programme d'action du Caire est un élément important pour la réalisation de l'objectif consistant à enrayer la pauvreté. Permettre à des hommes et des femmes de prendre des décisions clés au sujet de leur existence, par exemple, décider d'avoir ou non des enfants, du moment où ils les auront et de la fréquence à laquelle ils les auront, est fondamental par rapport aux efforts visant à éradiquer la pauvreté.
Malgré les améliorations visant l'accès aux soins de santé, plus de 3 millions de décès surviennent chaque année à cause de problèmes liés à la santé génésique. Les conséquences d'une santé génésique laissant à désirer affectent les femmes et les hommes dans leurs années les plus productives, minant ainsi l'avenir économique de leur famille et de leur pays. Ces décès sont attribuables à un accès inadéquat à la planification familiale, aux soins durant la grossesse et au moment de la naissance de l'enfant ainsi qu'aux moyens de prévention du SIDA et d'autres maladies transmissibles sexuellement.
Au Caire, les participants ont établi que les coûts pour fournir des services de santé génésique de base à tous ceux qui en ont besoin dans les pays en développement s'élèveraient à environ 17 milliards de dollars en 2000 et à 18,5 milliards en 2005.
¹ (1550)
Sur la base de son PIB, la part du Canada est de 200 millions de dollars par an. Toutefois, le Canada dépense actuellement seulement le quart, soit environ 53 millions de dollars, des 200 millions de dollars promis aux programmes de planification familiale et de santé reproductive. Le fait que le Canada et d'autres pays donateurs ne respectent pas leur engagement du Caire signifient que des hommes et des femmes dans le monde ne reçoivent pas les services de santé reproductive nécessaires, et le fait de ne pas tenir cette promesse cause des millions de décès et de maladies entièrement évitables.
Le message d'ACPD est simple. Nous demandons au gouvernement du Canada de tenir ses promesses. Si le Canada fait ce qu'il a déjà promis de faire, il peut influencer profondément la vie des hommes, des femmes et des enfants dans le monde entier. Le Canada a été négligent quant à sa générosité depuis trop longtemps. Nous nous réjouissons du fait que le premier ministre a déclaré en public que le gouvernement envisage d'accroître considérablement l'aide au développement du Canada et qu'il s'engage dans le cadre d'un calendrier à rebâtir l'aide publique au développement. Le prochain budget doit tenir compte de cette promesse.
En effet, étant donné la saine situation financière du Canada et le fait qu'il soit actuellement parmi les moins généreux au monde, nous demandons au Canada de faire plus de progrès que celui promis à Monterrey et plus récemment à Johannesburg pour respecter ses engagements dans le domaine de l'aide extérieure. La promesse du premier ministre à Monterrey est d'augmenter de 8 p. 100 par an les niveaux de contribution du Canada signifie que seulement 0,33 p. 100 serait consacré à l'aide d'ici 2006-2007. Dans le prochain budget, nous demandons au gouvernement de s'engager dans le cadre d'un calendrier public à atteindre l'engagement de 0,7 p. 100.
Consolider l'aide au développement outre-mer dans la mesure du possible doit constituer une priorité. Il est temps que le Canada passe de l'arrière du groupe des pays de l'OCDE et qu'il prenne des mesures afin de redevenir un donateur en tête de file. C'est ce qu'il convient de faire et c'est ce que les Canadiennes et Canadiens veulent.
¹ (1555)
La présidente: Merci.
Nous allons maintenant entendre les représentants de l'Association canadienne des hygiénistes dentaires. Madame Ziebarth, je vous laisse la parole.
Mme Susan Ziebarth (chef de la direction, Association canadienne des hygiénistes dentaires): Merci.
Bonjour. Nous vous remercions de nous donner cette occasion de paraître devant vous aujourd'hui. Permettez-moi de vous présenter ma collègue Judy Lux, responsable des politiques de santé à l'ACHD.
L'Association canadienne des hygiénistes dentaires est fière d'être la porte-parole des 14 000 hygiénistes dentaires du Canada. L'Association sert la population en élaborant des positions et des normes qui ont trait à la politique, à l'éducation, à la recherche et à la réglementation dans le domaine de l'hygiène dentaire. L'ACHD fait également la promotion de la santé bucco-dentaire auprès du public en collaborant avec le gouvernement, les organismes de santé, les groupes d'intérêt public et les autres professionnels de la santé. De plus, l'ACHD offre des services à ses membres, notamment, l'éducation permanente, le perfectionnement professionnel et une représentation auprès de divers organismes externes. Par ce travail, l'Association est en mesure de préparer ses membres à desservir plus efficacement le public canadien.
Nous croyons qu'un financement fédéral adéquat de la santé bucco-dentaire est la clé du mieux-être social, économique, physique et mental de la population canadienne. Nous avons élaboré un plan afin de créer le système public des soins de santé bucco-dentaire qui prend en compte la viabilité du système. Les aspects essentiels d'un système viable du point de vue financier comprennent la prévention des maladies buccales, le dépistage précoce de ces maladies et une promotion de la santé bucco-dentaire axée sur la collectivité. Pour maximiser la portée des dépenses publiques en matière de soins de santé buccale et pour minimiser les coûts futurs, le gouvernement doit investir dans la promotion de la santé et la prévention des maladies.
Si je suis ici aujourd'hui, c'est pour prier instamment le gouvernement fédéral d'augmenter sa contribution dans certains domaines de financement de la santé bucco-dentaire au Canada. Ces domaines comprennent le financement absolu de la santé bucco-dentaire pour les Canadiennes et les Canadiens qui en ont le plus besoin, un financement accru pour les collectivités autochtones, ainsi qu'un appui financier pour l'enseignement de l'hygiène dentaire et pour la recherche en santé bucco-dentaire. Voici les recommandations de l'ACHD concernant les engagements que devrait contenir le prochain budget fédéral en matière de financement de la santé buccale.
En premier lieu, nous devons subvenir aux besoins des Canadiennes et des Canadiens à faible revenu, des aînés et des Autochtones. L'ACHD exhorte le gouvernement fédéral à restaurer un programme de protection publique en matière d'hygiène dentaire pour toutes les Canadiennes et tous les Canadiens à faible revenu, particulièrement les enfants et les aînés, de façon à combler l'écart sans cesse grandissant chez les riches et les pauvres en matière de santé bucco-dentaire. Le gouvernement fédéral doit réviser ses barèmes de remboursement pour les services de soins de santé buccale publics, de façon à les baser sur le taux moyen du marché. Cette mesure améliorera l'accès des Canadiennes et des Canadiens qui en ont le plus besoin aux services de santé bucco-dentaire. En effet, certains dentistes hésitent à participer aux régimes publics dont les remboursements ne couvrent pas toujours leurs frais généraux, et refusent actuellement de traiter ces patients.
Afin de réduire l'écart en santé bucco-dentaire entre les Autochtones et les non-Autochtones, l'ACHD recommande au gouvernement fédéral d'augmenter son appui financier, à la fois pour le régime de santé communautaire et pour les services de santé non assurés, les SSNA, de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada, particulièrement pour les programmes de prévention en hygiène dentaire. Les taux de carie dentaire, qui sont de trois à cinq fois plus élevés chez les Autochtones que chez les non-Autochtones, montrent que le financement actuel de ces régimes et de ces programmes laisse douloureusement à désirer.
L'ACHD prie instamment le gouvernement fédéral de financer une initiative nationale globale de prévention pour s'attaquer aux maladies dentaires chez les jeunes enfants autochtones. Le régime actuel des SSNA gaspille de l'argent en ne mettant l'accent que sur un traitement restaurateur qui ne vise pas la santé bucco-dentaire à long terme. Nous recommandons une nouvelle initiative de prévention rentable qui réduira les dépenses pendant toute la vie d'une personne, en tenant compte du fait de ceux qui souffrent de maladies dentaires importantes pendant l'enfance en souffrent également à l'âge adulte.
L'ACHD recommande de plus un appui fédéral permanent pour l'initiative de lutte au tabagisme de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, et l'allocation spécifique d'une portion de ce financement pour permettre aux hygiénistes dentaires de mener des campagnes antitabac.
En second lieu, nous devons équilibrer l'investissement dans les programmes de prévention en hygiène dentaire et l'investissement consacré aux maladies dentaires et au traitement des caries. L'ACHD convie le gouvernement à devenir un chef de file en matière de programme de prévention dans les écoles et les résidences de soins de longue durée. Nous suggérons un changement majeur dans la façon dont les ressources sont affectées aux activités de santé buccale, en favorisant les activités de prévention économique, sans négliger le programme de protection qui traite les maladies actuelles. Ce déplacement des ressources démontrera au public canadien que le vieil adage «mieux vaut prévenir que guérir» correspond bien à la réalité.
º (1600)
En troisième lieu, nous devons améliorer l'enseignement donné aux hygiénistes dentaires, de sorte qu'ils et elles puissent plus efficacement dispenser des services de qualité au public canadien. L'ACHD presse le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux de travailler de concert pour améliorer la qualité des services d'hygiène dentaire au Canada en assumant le leadership et la direction nécessaire, et en accordant un appui financier aux établissements d'enseignement, alors que l'exigence minimale pour accéder à la profession d'hygiéniste dentaire passe du diplôme au baccalauréat. Cela permettra aux établissements d'enseignement de préparer les étudiants et les étudiantes à faire leur entrée dans un système de soins de santé en évolution, dans un contexte où la démographie et les types de maladie bucco-dentaire changent, ainsi qu'à faire face à un ensemble croissant de connaissances en hygiène dentaire et à une demande accrue du public pour des services de qualité.
En quatrième lieu, nous devons améliorer la recherche en hygiène dentaire, de sorte que cet ensemble de connaissances spécialisées soit élargi et la pratique des hygiénistes dentaires soit fondée sur la preuve afin de dispenser au public les meilleures services et programmes possibles.
L'ACHD presse le gouvernement fédéral de rédiger un rapport national sur l'état de la santé bucco-dentaire au Canada, analogue au rapport innovateur préparé par le chirurgien général des États-Unis, intitulé Oral Health in America. Nous comptons sur le gouvernement fédéral pour se tenir au fait des besoins de la nation, pour que nous puissions célébrer les progrès accomplis en matière de santé bucco-dentaire et informer la population canadienne des possibilités qui existent pour l'améliorer.
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, de la science et de la technologie recommande que le budget fédéral de recherche en matière de santé soit augmenté à 1 p. 100 des dépenses totales en santé. L'ACHD appuie cette augmentation, avec des fonds désignés pour une politique de soins de santé bucco-dentaire, les ressources humaines et la recherche sur les services.
Voici les principaux enjeux politiques auxquels on devra s'attaquer dans le prochain budget. L'investissement consacré à la santé bucco-dentaire des Canadiennes et des Canadiens est un investissement dans leur mieux-être social, économique, physique et mental. Il me fera plaisir de répondre aux questions que vous pourriez avoir suite à mon exposé.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant entendre notre dernier témoin pour ce groupe, M. Kusugak.
Je vous laisse la parole.
M. Jose Kusugak (président, Inuit Tapiriit Kanatami of Canada): Ullukut. Bonjour madame la présidente, honorables membres du comité. Merci de me donner cette occasion de témoigner devant vous.
Je m'appelle Jose Amaugaq Kusugak et je représente l'organisation inuite nationale du Canada.
Vous connaissiez notre organisation sous le nom de Inuit Tapirisat du Canada. Nous avons changé le nom de notre organisation il y a un an, et elle est devenue l'Inuit Tapiriit Kanatami. Nous avons choisi d'utiliser le nom que nous donnons au Canada pour démontrer que les Inuits embrassent le Canada, ses institutions et ses symboles. Nous avons également modifié notre logo national de façon à y intégrer les quatre régions distinctes de l'Arctique canadien: le Labrador, l'Arctique québécois, tout le Nunavut ainsi que l'Ouest des Territoires du Nord-Ouest.
À vrai dire, je me demande un peu quel genre de témoignage je devrais vous présenter. Je veux bien être positif et accommodant, car c'est généralement dans cet esprit que nous avons traité avec le gouvernement du Canada au cours des 30 dernières années. Par contre, les Inuits de tout le Canada et moi-même estimons que nous sommes de plus en plus laissés pour compte par le gouvernement du Canada et bon nombre de ses ministères.
Malheureusement, le récent discours du Trône est lui-même une des grandes sources de notre frustration actuelle envers le gouvernement du Canada. Ce discours a reçu énormément d'attention à l'échelle nationale à cause des promesses qu'il contient pour les peuples autochtones. Mais les attentes des Inuits ont été déçues. Certes, on y offre des programmes de formation afin que les Inuits puissent participer au grand projet de mise en valeur des ressources du Labrador et de l'Arctique de l'Ouest. Lorsque ces projets se concrétiseront, nous pourrons en bénéficier. Par contre, on a encore une fois laissé de côté dans une grande mesure nos préoccupations sociales actuelles. On a mis sur pied des programmes essentiels de soins de santé et de développement de petite enfance qui visent expressément les Indiens des Premières nations dans les réserves. Bref, le discours du Trône n'a tenu aucun compte de nos préoccupations, des préoccupations qui sont essentielles à la santé et au bien-être des Inuits du Canada. Ces préoccupations ne faisaient également pas partie du dernier budget et du discours du Trône précédent. Nous sommes bien déterminés à ne pas être laissés de nouveau pour compte.
Nous croyons que le gouvernement du Canada s'oriente vers une politique unique destinée aux Premières nations des réserves. De plus en plus, le gouvernement ne fait plus la distinction entre les termes «Premières nations» et «Autochtones» de son propre vocabulaire. Le discours du Trône nous a convaincu que nous devons constamment faire l'éducation du gouvernement et des cadres supérieurs de la fonction publique, leur expliquer qui nous sommes et quelle est notre place en ce pays. Nous nous demandons si le gouvernement reconnaît sa responsabilité quant à sa propre éducation et à celle de sa bureaucratie au sujet des Inuits.
Dans ce contexte, permettez-moi de prendre quelques instants pour vous rappeler les efforts que nous avons déployés et les réalisations que nous avons obtenues au cours des 30 dernières années.
Il est un point très important sur lequel je veux être clair: les Inuits sont des contribuables canadiens responsables et ils sont déterminés à faire leur part pour le pays. Pour nous, nous sommes plus que les premiers Canadiens, nous sommes également d'abord des Canadiens.
Nos 52 collectivités sont de petite taille. Elles ne comptent que quelques centaines ou quelques milliers d'habitants, mais elles sont éparpillées sur un territoire qui représente 40 p. 100 du Canada.
Il y a 30 ans, lorsque l'Inuit Tapirisat du Canada a été créé, nous sommes devenus un peuple colonisé. Nous avons été intégrés à un établissement permanent et il n'a pas fallu beaucoup de temps pour que notre culture, notre langue et surtout notre autonomie même soient menacées. En 1971, nous avons décidé de prendre notre avenir en main et nous nous sommes organisés en créant l'Inuit Tapirisat du Canada.
Nous avons remporté certaines victoires à Ottawa, entre autres la négociation et le règlement de revendications territoriales globales sur un territoire représentant 40 p. 100 de la masse terrestre du Canada. Les avantages financiers venant de cette revendication sont principalement investis dans nos régions et nos collectivités par le truchement de sociétés de développement responsables et démocratiques. Ces sociétés emploient plus de 15 000 Canadiens, Inuits et non-Inuits. Nos sociétés choisissent d'investir dans nos riches ressources naturelles, qui permettent de créer des emplois et de donner de la formation.
º (1605)
Les Inuits comptent également sur des investissements nationaux dans les équipements collectifs tels que les routes et la mise en valeur des ressources.
Tous les accords prennent en compte et renforcent notre objectif global: préserver notre identité tout en participant et en contribuant au développement de notre pays, le Canada. Ce que nous voulons pour notre peuple, surtout pour nos enfants, ne devrait pas être difficile à comprendre, nous voulons simplement qu'au plus tôt notre niveau et notre qualité de vie soient égaux à ceux des autres Canadiens.
Permettez-moi de vous dire que nous avons beaucoup de chemin à faire. Il suffit de lire les statistiques du gouvernement pour le comprendre. Les Inuits continuent à occuper le bas de l'échelle des indicateurs socio-économiques et sanitaires du Canada, les revenus les plus bas, les taux de chômage les plus élevés et les taux de coûts de la vie les plus élevés. Le taux de suicide chez nos jeunes est de 8 à 10 fois supérieur à la moyenne nationale et notre espérance de vie est inférieure de 10 ans à celle des Canadiens du Sud.
Les Inuits veulent absolument faire changer les choses et faire bouger ces statistiques pénibles. La solution que nous vous proposons est une sorte de partenariat avec le Canada sous forme d'un plan d'action inuit, plan qui nous fera progresser vers notre objectif d'autonomie, mais tant le discours du Trône que le dernier budget fédéral nous montrent que le gouvernement fédéral n'a pas l'intention de respecter ses obligations fiduciaires envers les Inuits en fait d'éducation, de santé et de logement. Ces responsabilités fiduciaires peuvent être honorées par de simples paiements de transfert aux provinces et aux territoires en espérant qu'ils répondent à nos attentes socio-économiques. Résultat, nos logements, notre éducation et nos services de santé sont inférieurs à la norme.
Ottawa semble chercher une politique étroite et unique applicable à tous les peuples autochtones. Cette approche est tout simplement irréaliste pour les mêmes raisons qu'une politique unique de pêche ne peut s'appliquer aux trois océans du Canada, aux Grands Lacs et à toutes nos rivières. Le Canada est trop grand, et notre population, y compris les peuples autochtones, est trop diversifiée pour une approche unique ou une solution unique.
S'il y a eu un thème constant dans nos rapports avec le gouvernement du Canada au cours des 30 dernières années, c'est le rétablissement d'une plus grande mesure d'autonomie pour notre peuple et nos collectivités. Les Inuits sont fiers d'être des contribuables canadiens. Nous sommes aussi les intendants des régions arctiques du Canada. C'est le point fort inhérent à toutes nos revendications territoriales, de nos négociations constitutionnelles et sur lequel repose notre avenir. Cependant, nous déplorons l'absence d'un véritable programme de relations de travail avec le gouvernement du Canada.
Il y a un an nous avons été encouragés par la constitution d'un comité spécial du Cabinet sur les questions autochtones. La semaine dernière, d'autres dirigeants autochtones nationaux et moi-même avons rencontré ce groupe pour seulement la deuxième fois. Nous avons tous exprimé notre déception devant l'absence d'une tribune permanente nous permettant de travailler directement avec le groupe de ministres et de rechercher en commun des solutions spécifiques et réalisables aux problèmes complexes des Canadiens autochtones.
Encore la semaine dernière, certains ministres ont dit que le discours du Trône n'était que l'enveloppe des orientations futures du gouvernement et que les détails suivraient dans le budget. C'est la raison de ma présence. Nous voulons que le gouvernement fédéral s'engage à entrer sérieusement dans un partenariat formel pour développer et appliquer des programmes destinés exclusivement aux Inuits concernant notre environnement, notre géographie, notre culture et nos ressources.
º (1610)
La présidente: Monsieur Kusugak, pourriez-vous passer à vos recommandations?
M. Jose Kusugak: Oui, nous sommes à la fin.
Nous n'aimons pas nous plaindre et nous ne voulons certainement pas être considérés anti-Indiens. Nous n'essayons pas de retirer le pain de la bouche des autres peuples autochtones. Nous suggérons soit de faire un plus gros pain bannock soit, encore mieux, de travailler avec nous pour trouver une nouvelle recette qui satisfera tous les peuples autochtones du Canada.
Madame la présidente, mesdames et messieurs, je vous demande simplement de transmettre notre message au gouvernement et à la bureaucratie: au Canada, il y a quatre groupes de peuples autochtones: les Métis, les Indiens des Premières nations en réserve, les Indiens des Premières nations dont les traités n'ont été ni ratifiés ni reconnus et le peuple que je représente, les Inuits. C'est une nation qui est fière de son multiculturalisme et qui a il y a déjà fort longtemps rejeté l'approche du creuset. La politique et l'approche de financement unique pour les peuples autochtones sous le pavillon des Premières nations revient à un creuset pour les peuples autochtones. Les Inuits sont déterminés à se battre contre un tel concept. J'espère que vous nous aiderez à veiller à ce que le prochain budget fédéral traite de manière équitable tous les peuples autochtones.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous passons à la ronde de six minutes en commençant par M. Jaffer.
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente et merci à tous nos témoins. Je les remercie de tous les renseignements qu'ils nous ont apportés. Malheureusement, nous n'avons pas suffisamment de temps pour vous poser toutes les questions qu'ils suscitent mais j'essaierai de faire de mon mieux dans les délais qui me sont imposés.
J'aimerais commencer par poser deux questions au groupe Rx et D. J'ai raté une partie de votre intervention, mais je connais certaines des questions que vous soulevez et si j'ai encore le temps, j'aurais une deuxième question à vous poser.
Dans votre mémoire, vous parlez des problèmes que posent les délais d'homologation des médicaments, mais j'aimerais surtout que vous me disiez comment la situation au Canada se compare avec celle dans les autres pays, si les délais sont plus longs et si cela nous désavantage énormément par rapport à certains autres pays qui, de toute évidence, veulent aussi attirer des capitaux pour la recherche et le développement. Il est difficile d'attirer certaines compagnies chez nous et, naturellement, de leur offrir l'environnement qui leur convient pour y travailler, tout particulièrement dans le contexte des délais d'homologation des médicaments.
Parallèlement, s'agissant du crédit d'impôt pour la recherche et le développement, d'aucuns prétendent que la position du Canada sur ce point est excellente et qu'elle encourage les investissements, surtout dans les domaines de la recherche et du développement, mais qu'en même temps, d'aucuns se plaignent également du nombre insuffisant de compagnies ou de groupes profitant de ce crédit d'impôt pour tout un tas d'autres raisons. Cela m'incite à croire que parallèlement à un régime dynamique de crédits d'impôt pour la recherche et le développement nous devrions nous attaquer au problème de l'impôt sur la plus-value et réduire d'une manière générale la fiscalité pour compléter ce qui est fait du côté des crédits d'impôt.
Pourriez-vous répondre aussi brièvement que possible à ces deux questions pour nous laisser le temps de discuter d'autres incitatifs fiscaux auxquels notre comité devrait réfléchir?
º (1615)
M. Murray Elston (président, Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada): Deux choses. La première sur les délais d'homologation. La moyenne au Canada est d'environ 750 jours. Dans d'autres pays, comme aux États-Unis, c'est au moins 200 jours de moins et dans certains autres encore plus où l'homologation de médicaments importants se fait en procédure accélérée. En Europe, la procédure est également beaucoup plus efficace et prend même parfois beaucoup moins de temps qu'aux États-Unis. Nous sommes à la traîne.
Ce n'est pas simplement une question de compétition, d'attraction de dollars pour la recherche, bien que pour nous ce soit un élément important. Cela veut dire, qu'en moyenne, les Canadiens eux-mêmes doivent attendre ce temps supplémentaire pour avoir accès à des produits finalement mis sur le marché au Canada. Il nous arrive parfois d'avoir plus d'un an de retard, parfois plus de deux ans par rapport aux Américains ou aux Européens pour avoir accès à un nouveau produit.
Ces deux éléments sont d'une importance critique pour nous, pour la santé des Canadiens à cause de cet accès retardé et deuxièmement lorsque nous essayons d'attirer des capitaux pour la recherche, les investisseurs étudient la situation chez nous et se disent: «Cela va nous prendre plus longtemps, nous ferions mieux de chercher ailleurs où nous pouvons faire approuver nos produits plus rapidement. N'oubliez pas que l'horloge du brevet ne cesse de courir et tout retard nous fait perdre du temps au niveau de la commercialisation».
Je répéterai simplement un des propos de M. Stewart, à savoir qu'au cours des derniers mois un intérêt sincère a semblé être manifesté en faveur d'une tentative de réduction des délais d'homologation, mais ce qui nous intéresserait le plus c'est que le budget recommande des moyens de trouver les ressources nécessaires pour y arriver. Il est évident que c'est une des raisons de notre présence.
Le programme d'impôt sur la recherche et le développement a connu un succès relatif sous sa forme actuelle. Plusieurs personnes ont participé à des groupes de travail pour le rendre encore plus efficace. Par exemple, quand des chaires de recherche sont créées dans des universités canadiennes, tous les fonds du programme ne vont pas au crédit d'impôt en recherche et en développement. En conséquence, un réalignement de la définition de certaines de ces dépenses qui peuvent faire l'objet d'un crédit d'impôt pourrait nous permettre, peut-être, d'accroître nos investissements dans ce domaine. Certains hésitent à investir autant dans ces chaires alors qu'ils hésiteraient peut-être moins si cela pouvait se traduire en crédit d'impôt.
Il vous faut également comprendre que seules environ 38 de nos compagnies vendent directement les produits, mais pas les autres. Certaines d'entre elles font des recherches à contrat mais d'autres sont des compagnies dites biotechnologiques qui cherchent de nouveaux produits. Pour ces compagnies qui n'ont pas de revenus, un crédit d'impôt est loin d'être aussi utile que de pouvoir trouver le moyen de faire financer leur recherche et leur développement. De fait, avoir des capitaux pour la recherche est absolument indispensable. Donc, dans ce sens, même si ce crédit d'impôt est une bonne chose et particulièrement utile à certains égards, une définition élargie serait préférable pour les nouvelles compagnies qui cherchent des produits à mettre sur le marché et pour lesquelles il faut aller plus loin pour les aider à innover et à trouver de nouveaux médicaments.
M. Rahim Jaffer: Je n'ai pratiquement plus de temps, je finirai donc sur une toute petite question que j'adresse à Action Canada pour la population et le développement. Je conviens avec vous que les Canadiens d'une manière générale sont favorables à l'aide étrangère, mais ce qu'ils critiquent souvent c'est la manière dont cette aide est administrée par les gouvernements, surtout lorsqu'il s'agit de programmes d'aide de gouvernement à gouvernement, ou d'organismes qui ne sont pas très crédibles sur la scène internationale, notamment sur le terrain dans certains de ces pays. Que faites-vous pour vous assurer que cet argent, avec les groupes avec lesquels vous collaborez, va véritablement à ceux qui en ont le plus besoin? Peut-être plus dans le contexte des ONG que dans celui des programmes de gouvernement à gouvernement.
Mme Zonibel Woods: Un des problèmes quand on parle de l'efficacité de l'aide, c'est que généralement on parle de grands projets, de grands projets d'infrastructure que les gens considèrent comme des éléphants blancs, le genre de gros projet construit outre-mer et qui finit par ne plus avoir aucune utilité, etc. Ce qui est réellement efficace c'est le développement communautaire, l'investissement dans les communautés locales, dans la santé, l'adduction d'eau et les services sanitaires. Actuellement, la communauté du développement s'inquiète car depuis un an l'Agence canadienne de développement internationale examine l'efficacité de l'aide et consulte pour la renforcer. Un des problèmes à nos yeux est le manque de priorité donné au rôle des organisations de la société civile qui souvent sont celles qui travaillent avec les plus petits budgets mais qui obtiennent beaucoup de résultats en fait de développement social.
Nous aimerions une augmentation des investissements dans les organisations de développement social et les organisations communautaires. Bien entendu, l'aide au développement à l'étranger de gouvernement à gouvernement a sa place, mais nous aimerions qu'elle soit associée à des règles de bonne gouvernance.
º (1620)
[Français]
La présidente: Thank you.
Madame Picard, commencez, s'il vous plaît.
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Je m'excuse d'être en retard: j'étais prise à la Chambre. Alors, malheureusement, je n'ai pas pu entendre tous vos témoignages. Je pourrai lire les mémoires que vous nous avez laissés.
Je poserai une courte question au représentant des Inuits. Ce que vous nous avez dit tout à l'heure, j'ai l'impression de l'avoir entendu il y a 10 ans, quand je suis arrivée ici, au Parlement, en 1993-1994. À ce moment-là, j'étais le porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé, et on nous avait demandé de faire une étude sur la santé et le bien-être des enfants autochtones. Je me souviens que des représentants des premières nations et peut-être des Inuits étaient venus nous dire qu'ils étaient fatigués de voir qu'à chaque fois qu'il y avait un changement de gouvernement et de législature, on allait faire une étude sur leurs conditions sociales. On avait promis, à ce moment-là, que le rapport ne resterait pas lettre morte, qu'il ne dormirait pas sur les tablettes. Je suis surprise de constater que 10 ans après cette étude et aussi après une autre étude--il y a eu la commission d'enquête--, vous n'avez pas encore pu recevoir les programmes qui puissent vous donner les services dont vous avez besoin.
J'aimerais que vous élaboriez davantage là-dessus. On vous fait beaucoup de promesses, on vous promet beaucoup de programmes, mais les fonds ne se rendent pas ou il y a des difficultés à administrer ces différents programmes-là. Est-ce que c'est la situation actuellement?
[Traduction]
M. Jose Kusugak: C'est vrai. Je ne sais pas qui vous avez entendu il y a 10 ans. Notre problème c'est que nous voulions avoir des statistiques sur la tuberculose, sur les taux de suicide, sur les maladies contagieuses, etc. Les dernières statistiques que Santé Canada a pu nous fournir nous ont été très utiles et c'est grâce à elles que je peux vous présenter certains chiffres.
Notre plus gros problème actuellement est celui du logement. Même s'ils disent avoir transféré cette responsabilité au gouvernement du Nunavut, par exemple, le financement n'est absolument pas à la hauteur des besoins en logement dans toutes les régions où habitent les Inuits. Ils ne peuvent pas chasser les gens des maisons autrement ils gèleraient sur place. Je suis stupéfié de voir que des gens peuvent actuellement survivre dans la rue à Ottawa. Chez nous, c'est tout simplement impossible. Il arrive parfois que des familles se retrouvent avec des gens pas très désirables. Le personnel du gouvernement dans le Nord n'a certainement pas ce problème, mais les Inuits l'ont, eux. Les problèmes dans les logements sont liés à la surpopulation, aux maladies contagieuses, à la tuberculose. Les jeunes qui sont sexuellement agressés le sont parfois par ceux qui ne peuvent pas aller ailleurs et qui sont accueillis dans ces maisons parce qu'on n'a pas le choix, on ne peut pas les laisser dehors.
À mon avis, c'est notre plus gros problème. Dans les deux ou trois derniers budgets et deux ou trois derniers discours du Trône, chaque fois qu'ils parlaient de peuples autochtones, ils précisaient en ajoutant «Premières nations en réserve», ce qui exclut immédiatement les Inuits. Je suis heureux pour les Indiens parce qu'ils ont besoin de cette aide mais on dirait que pour les Canadiens, chaque fois qu'ils entendent le mot «Autochtone», ils pensent que cela inclut les Inuits et ce n'est pas vrai. C'est pour ça que je viens plaider notre cause.
Le Canada a une excellente politique de multiculturalisme et nous voulons simplement notre part. Vous avez tout à fait raison, il faudrait absolument faire quelque chose mais ils ont fait beaucoup pour les Premières nations en réserve, ce qui exclut définitivement les Inuits.
º (1625)
[Français]
Mme Pauline Picard: C'est vrai qu'on est porté à ne pas faire la différence entre les premières nations et les Inuits, mais je ne comprends pas comment il se fait que vous ayez un statut différent des premières nations. Comment se fait-il qu'au niveau du financement, on ne vous reconnaisse pas au ministère des Affaires indiennes? Est-ce parce que vous avez un statut particulier?
[Traduction]
M. Jose Kusugak: Non, nous n'avons en fait aucun statut. J'aimerais d'ailleurs que Affaires indiennes et du Nord Canada change de nom afin d'englober les autres peuples autochtones. Le ministère s'appelle Affaires indiennes et du Nord à cause des traités et du reste. Il est en effet responsable des Indiens et d'un budget central important. Quant à nous, nous recevons peut-être 8 p. 100 de notre budget d'Affaires indiennes et du Nord mais il nous faut aller trouver dans les journaux ce que recherche le gouvernement fédéral et ensuite rédiger des propositions. Environ 70 p. 100 du temps de notre personnel est consacré à la rédaction de propositions et tout repose sur ce que veut faire le gouvernement et non pas nécessairement sur ce que veulent faire les Inuits, mais c'est la seule façon que nous ayons d'avoir accès à certains fonds fédéraux.
C'est décourageant parce qu'on fait des choses très concrètes pour les Indiens alors que les Inuits ne sont pas reconnus, qu'ils ne sont pas reconnus de façon spéciale. Et, très souvent, on dit parce que l'on a réglé des revendications territoriales et parce que le Nunavut est devenu une réalité, on ne peut pas faire plus. Or, ceci n'est que le début d'un processus que nous essayons d'entreprendre pour redevenir capables de nous débrouiller tout seuls au Canada.
La présidente: Merci beaucoup.
Mme Minna, suivie de M. Murphy, puis de M. Bélanger.
Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci, madame la présidente.
Mes questions s'adressent à Mme Woods et à M. Elston, dans cet ordre, et j'essaierai d'être aussi brève que possible.
Tout d'abord, je voudrais contester ce qu'a dit M. Jaffer quant à l'argent qu'on gaspille quand l'aide va d'un gouvernement à l'autre. L'aide du Canada n'est pas versée aux gouvernements concernés. Nous avons des ententes avec les gouvernements, nous ne leur remettons pas d'argent. Il dit que cela devrait passer par les ONG et c'est justement ce qui se fait. Le Canada distribue son aide sur le terrain dans le cadre de partenariats avec le secteur privé et la société civile.
Madame Woods, vous avez parlé du nouveau rapport ou de la nouvelle directive sur le renforcement de l'efficacité de l'aide en disant que l'on n'insiste pas suffisamment sur la société civile. Je trouve cela intéressant parce que, comme vous le savez, j'ai eu ces consultations et j'ai écouté cela dans tout le pays et ce n'est pas du tout vrai. Si le rapport lui-même ne s'étend pas longuement sur la société civile, on y reconnaît très bien qu'à ce propos au Canada, les ONG internationales qui collaborent avec nous sont essentiellement la voie par laquelle nous passons pour apporter notre aide.
Je suis tout à fait d'accord avec vous quant aux niveaux d'aide, c'est tout à fait vrai. Par contre, j'aimerais vous demander ce que vous aimeriez voir changer quand vous dites que l'on n'attache pas assez d'importance à la société civile alors que la majorité des programmes passent en fait par les ONG. Voulez-vous dire que nous devrions arrêter de parler de gouvernance, de droits de la personne? De quels programmes voudriez-vous nous voir sortir?
º (1630)
Mme Zonibel Woods: En fait, dans ce document, il est très peu question--même si je conviens que la société civile a été consultée toute l'année dernière--du rôle important que joue la société civile. C'est ce que critique le Conseil canadien pour la coopération internationale, qui est une coalition de plus de 100 ONG et dont fait partie ACPD.
Ce que nous disons, c'est que, et je suis sûre que vous vous en souviendrez, nous étions très satisfaits lorsque vous avez présenté les priorités de développement social et avez augmenté le budget correspondant. C'était certainement un pas dans le bon sens.
Il ne s'agit pas de diminuer les budgets dans ces secteurs, comme les droits de l'homme, la bonne gouvernance, etc. Une des choses qui nous préoccupent est que dans les fonds qui ont été affectés pour le NPDA, par exemple, pour le nouveau partenariat pour l'Afrique, suite à l'initiative du Premier ministre, 25 p. 100 iront au développement du secteur privé et à la promotion d'investissement direct étranger. Nous estimons que c'est beaucoup trop et nous aimerions que cela aille vers les priorités de développement social plutôt que la promotion des investissements directs étrangers. C'est donc le genre de choses qui nous préoccupent pour le moment.
Comme vous le savez, le rôle des ONG est extrêmement important dans les pays où la société civile ne peut participer à la définition des priorités de développement social. Dans le pays d'où je viens, le Salvador, rien de ce que les ONG canadiennes ont pu faire ne se serait fait si le Canada n'avait soutenu le travail des ONG canadiennes dans ce pays. C'est donc extrêmement important et j'espère que ce sera maintenu.
Ce qui nous soucie, dans les nouveaux documents stratégiques sur la réduction de la pauvreté que la Banque mondiale défend et dans les nouvelles démarches sectorielles, c'est que beaucoup du travail innovateur qui se fait sur le terrain ne pourra se faire.
La présidente: Il ne vous reste que très peu de temps.
Mme Maria Minna: D'accord. Ça passe très vite.
Je ne vais donc pas pouvoir interroger M. Elston à ce tour.
Très brièvement, c'est là quelque chose de très complexe et il est trop difficile d'aller parler des CSLP dans une réunion de ce genre où l'on n'a vraiment pas le temps d'entrer dans un débat. Je vais simplement dire qu'il ne suffit pas de déclarer qu'il ne faut pas se lancer dans des plans de réduction de la pauvreté ou qu'il faut donner plus ici ou là. La réalité est qu'il s'agit d'un problème mondial et que nous devons travailler avec les pays concernés.
Je suis allée au Salvador et les ONG canadiennes ont une influence fantastique dans les pays en développement avec lesquels nous travaillons. Mais nous devons aussi encourager des ONG locales dans ces différents pays et commencer à travailler avec elles afin de délier l'aide directement. Si les plans de réduction de la pauvreté ne sont pas parfaits, je ne pense pas que l'on puisse en conclure que les opérations du gouvernement canadien, aujourd'hui ou demain, sont menées au mépris de la société civile ou qu'il n'y aura pas de consultation. Je crois qu'il était bien entendu, dans le rapport que j'ai lu, que la société civile participerait aux consultations et que nous n'approuverions les CSLP qu'après avoir mené les consultations que nous jugions nécessaires.
Mais, de toute façon, cette discussion serait trop longue et trop complexe pour la poursuivre maintenant.
Merci.
º (1635)
La présidente: Merci.
Monsieur Murphy, allez-y. Vous avez six minutes.
M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.
Ma première question s'adresse à Mme Ziebarth et porte sur toute la question de la santé bucco-dentaire au Canada.
J'ai lu votre rapport et il semble que vous essayez de pousser certaines de ces questions dans l'enveloppe de l'assurance-maladie et du financement autochtone. Premièrement, pensez-vous que ce soit vraiment là une question d'argent plutôt qu'une question d'information du public? Il est évident que si l'on veut davantage informer le public, il faut que les fonds viennent de quelque part. Deuxièmement, existe-t-il une pratique modèle internationale ou existe-t-il un pays dans le monde où le Canada pourrait aller examiner des pratiques exemplaires, des méthodologies exemplaires et trouver des résultats exemplaires dans tout ce secteur?
Mme Susan Ziebarth: Je suis désolée, monsieur Murphy. Je n'ai pas entendu votre première question.
M. Shawn Murphy: Est-ce que c'est réellement une question d'argent ou est-ce qu'il ne faudrait pas mieux informer le public? Je vous ai ensuite demandé s'il existait des pratiques exemplaires internationales.
Mme Susan Ziebarth: Pour ce qui est de l'information, je crois que c'est plus que simplement de l'information et pour ce qui est de l'argent, c'est une question de réaffectation. À l'heure actuelle, la santé bucco-dentaire échappe normalement au secteur de la santé si bien que la bouche est maintenant séparée du corps. Nous proposons de remettre la bouche dans le corps.
Il faut plus que de l'information. Il faut un engagement et il faut comprendre les comportements--prévention des maladies, compétences techniques et information--si l'on veut améliorer la santé bucco-dentaire. L'accent actuel est sur les soins et les traitements au fur et à mesure que les problèmes surgissent. On a fait énormément de recherches dans d'autres secteurs de la santé aussi, mais dans ce cas, il est tout à fait clair que si l'on peut prévenir les maladies bucco-dentaires, on peut ensuite continuer sur cette voie.
Pour certains des groupes pour lesquels j'ai dit que je m'inquiétais--comme les aînés--la situation n'était peut-être pas aussi difficile par le passé quand beaucoup des aînés se faisaient arracher toutes les dents. Il arrive maintenant que dans les foyers pour personnes âgées, par exemple, les gens aient bien des dents mais que le personnel soignant ne soit même pas au courant parce que leurs gencives sont tellement infectées qu'elles couvrent ces dents. C'est une situation bien triste et cela a des conséquences pour l'ensemble du corps puisque cela les empêche de manger, d'avaler, et que cela peut entraîner d'autres maladies. Cela pose aussi des problèmes de communication, des problèmes sociaux du fait d'une mauvaise haleine, par exemple.
Je dirais donc que c'est plus qu'un problème d'information. Il y a aussi un élément de compétences techniques car il faut pouvoir offrir une thérapie préventive.
Quant aux pratiques exemplaires, il existe une fédération internationale d'hygiène dentaire qui examine en fait ces pratiques. Bien qu'il n'existe pas de programmes nationaux d'hygiène dentaire, il y a des régions aux États-Unis, par exemple, qui ont d'excellents programmes et qui ciblent des groupes démographiques particuliers en ce qui concerne la santé bucco-dentaire.
La Californie est un excellent exemple. La population a directement accès à des soins d'hygiène dentaire, sans qu'il n'y ait de barrage. On peut consulter un hygiéniste dentaire et avoir accès à des mesures préventives.
º (1640)
La présidente: Monsieur Murphy.
M. Shawn Murphy: J'ai de nouveau une brève question à poser à M. Elston. Le prix des médicaments est une question dont on a discuté et sur laquelle les comités du Sénat et de la Chambre des communes se sont penchés, mais il s'agit d'une question générale sur les relations entre les sociétés pharmaceutiques et le public canadien--vous demandez un allégement de la réglementation. Le régime de limitation des prix nuit à l'innovation. Toutefois, quand nous en parlons avec le public dans la rue, dans les forums ou les tables rondes sur la santé, le prix des médicaments est l'un des principaux sujets de plaintes. Les prix augmentent énormément d'année en année. Les médicaments nous coûtent maintenant plus cher que les médecins.
Pensez-vous que cette tendance va se poursuivre? Le public estime que les compagnies pharmaceutiques devraient être encore plus réglementées. Je sais ce que sera votre réponse--et c'est encore une fois une question de communication--à savoir que la durée des hospitalisations a diminué énormément grâce aux compagnies pharmaceutiques, et que grâce à elles nous avons également une espérance de vie plus longue. Tous ces facteurs sont à considérer. Je ne pense pas que l'on fasse vraiment comprendre aux gens ce rapport entre les compagnies pharmaceutiques...
Ce qu'on nous dit c'est : «Je prenais un médicament. Mon médecin m'en a prescrit un autre, mais je dois débourser 80 $ pour 10 pilules. Je n'ai pas les moyens de payer». Voilà où est le problème. Je sais qu'on va en discuter avec la Commission Romanow et que Michael Kirby a proposé un plan pour les coûts catastrophiques, mais tel est le problème auquel la classe politique se trouve confrontée.
Auriez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet?
M. Murray Elston: J'aurais juste deux observations à formuler très rapidement. D'abord, nous ne demandons pas nécessairement un allégement de la réglementation; nous voulons plutôt une réglementation efficace. Nous n'avons jamais dit que nos produits ne devraient pas être réglementés. Nous comprenons la nécessité d'assurer la sécurité et l'efficacité des médicaments.
L'un des facteurs qui entrent dans le coût de la mise au point de nos produits est l'obligation de se soumettre à une réglementation de plus en plus complexe. Les essais cliniques s'étendent sur plusieurs années, mais les premiers essais cliniques ont eu lieu il y a seulement 40 ans, dans les années 50. Par conséquent, nous ne demandons pas qu'il y ait moins de réglementation.
Pour ce qui est des prix, il est assez évident que les principaux progrès réalisés récemment sont le résultat d'un investissement très intensif et très important dans la découverte de nouveaux produits. Par exemple, nous n'employons pas seulement des biologistes, des chimistes ou des physiciens, mais aussi des spécialistes du secteur de la TI qui travaillent avec du matériel électronique et des logiciels très perfectionnés. En fait, nous sommes des centres de recherche qui utilisent énormément de ressources.
Je peux donc vous dire que nous devrons sans doute continuer à investir des sommes d'argent de plus en plus importantes. En fait, il n'y a pas si longtemps, la découverte d'un nouveau produit coûtait en moyenne environ 500 millions de dollars US. Selon une étude récente de l'Université Tufts, il faut maintenant débourser environ 800 millions de dollars pour trouver un nouveau médicament. De plus en plus, il s'agit non seulement de mettre au point des thérapies génétiques qui pourront vaincre des maladies, mais encore de se lancer dans la recherche sur les protéines. Plus nous progressons, plus nous devrons investir de ressources.
D'un autre côté, en devenant capables d'appliquer nos produits avec plus de précision, nous finirons par pouvoir dire, par exemple, que tel médicament ne sera pas profitable pour tel patient mais plutôt pour tel autre et peut-être qu'on pourra mettre spécialement un produit au point pour moi ou pour ceux qui sont porteurs d'un gène particulier.
Les applications de nos thérapies médicamenteuses vont donc devenir plus efficaces. Nous chercherons toujours à trouver des moyens de promouvoir le genre de programmes dont vous parlez, soit la réduction de la durée de l'hospitalisation, l'amélioration des soins à domicile qui semblent présenter beaucoup d'intérêt pour certaines personnes, non seulement le sénateur Kirby, mais également le commissaire Romanow. En fin de compte, même si cela peut nous coûter plus cher, je pense que nous serons plus productifs, plus efficients et que nous économiserons de l'argent dans d'autres secteurs du système de santé pour compenser ces coûts.
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Bélanger.
[Français]
M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Merci, madame la présidente.
Mon premier commentaire s'adresse à Mme Woods. Ce n'est pas une question. Je veux simplement lui dire que l'occasion que j'ai eue, cette année, de visiter à deux reprises des projets en Afrique m'amène à conclure comme elle que ce sont les plus petits projets qui semblent générer les plus grands avantages.
Par exemple, j'avais participé à l'inauguration d'un puits d'eau dans un village, et on avait eu l'occasion de discuter avec les gens du village. De toute évidence, la somme d'environ 25 000 $ qu'on avait dépensée pour ce projet avait amené un avantage tangible à un village d'environ 1 100 personnes, et cela à plus d'un point de vue. Donc, je crois qu'on aurait intérêt à se concentrer davantage sur les plus petits projets.
Je suis également d'accord avec madame qu'il faut augmenter notre aide internationale, mais je suis aussi d'accord sur les intentions du gouvernement telles qu'énoncées dans le discours du Trône: au cours des prochaines années, on augmentera notre aide à raison de 8 p. 100 par année. Cela nous mènera peut-être à un peu plus de 0,33 p. 100. Nous sommes présentement à 0,23 p. 100 et notre objectif est de 0,7 p. 100. Je crois qu'en augmentant cette aide de 8 p. 100 par année, dans une décennie, nous serons plus près de 0,5 p. 100 que de 0,33 p. 100, comme elle le dit. Mais c'est une question de chiffres, et on pourrait en discuter longuement. Dans la réalité, si on se rend compte, dans deux, trois ou quatre ans, que la conjoncture économique nous permet d'augmenter davantage notre aide, nous pourrons peut-être le faire, mais dans une conjoncture économique qui s'annonce assez difficile pour les deux prochaines années, je crois que cette augmentation de 8 p. 100 constitue quand même un gain très appréciable.
Voilà pour ce témoin.
[Traduction]
J'ai quelques questions à poser à M. Elston. Pourriez-vous me dire, monsieur, en fonction de quels critères les sociétés de votre industrie mesurent le résultat pour pouvoir montrer à leurs actionnaires qu'elles ont bien géré leurs actifs? Quelles mesures utilisent-elles?
º (1645)
M. Murray Elston: Il y en a plusieurs. Bien entendu, comme la plupart de nos sociétés sont commerciales, elles doivent faire rapport du rendement sur l'investissement. Dans certains cas, surtout récemment, comme nos projets de recherche font appel à davantage de ressources, les rapports aux actionnaires et aux autres investisseurs concernent les produits en voie de commercialisation. Les perspectives d'aboutissement des recherches revêtent énormément d'importance pour eux. Bien entendu, tout notre avenir est en jeu. Si nos recherches et nos partenariats avec les universités, les hôpitaux et les instituts ne semblent pas vouloir aboutir, cela veut dire que la société a mal à cibler l'utilisation de ses ressources.
À l'opposé de la dimension commerciale, si je puis dire, nous mesurons à quel point nous avons pu soulager les patients. La capacité de soigner les gens témoigne du succès des médicaments. Je dirais que le degré d'acceptation d'un produit sur le marché mesure le succès avec lequel une entreprise pharmaceutique a fait des recherches pour guérir une maladie ou gérer une maladie chronique.
Mr. Mauril Bélanger: Merci. Je dois vous interrompre, car vous avez pris beaucoup plus de temps pour répondre à ces questions que je n'en ai à ma disposition.
M. Murray Elston: C'est une question difficile.
M. Mauril Bélanger: M. Stewart a dit dans son discours que l'ensemble de l'industrie pharmaceutique avait consacré 1,1 milliard de dollars à la recherche-développement—pourriez-vous préciser combien pour la recherche et combien pour le développement—ce qui représente une augmentation de 1 000 % depuis 1987. Il a beaucoup insisté là-dessus. Très bien, mais pourriez-vous me dire comment ce chiffre de 1,1 milliard se compare aux objectifs que l'industrie a acceptés pour ces investissements au Canada suite aux changements à la Loi sur les brevets?
M. Murray Elston: Tout d'abord, il s'agit de 1,1 milliard de dollars par année.
M. Mauril Bélanger: Oui.
M. Murray Elston: C'est le montant que nous avons atteint. En fait, c'est un peu plus que les 10 p. 100 que nous nous étions engagés à atteindre, mais c'est à cause d'une définition très limitée que prévoit la Loi de l'impôt sur le revenu. Vous nous l'avez sans doute déjà entendu dire, monsieur Bélanger, mais les pays de l'OCDE ont une définition beaucoup plus large de la recherche et nous sommes donc très désavantagés, au Canada, lorsqu'on fait des comparaisons. En fin de compte, notre investissement est plus important. À une certaine époque, nous en étions à 12 p. 100, nous sommes maintenant légèrement en-dessous, mais c'est seulement pour les sociétés pharmaceutiques qui font rapport au Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés. Les membres de notre organisation qui ne vendent pas de produits n'ont pas à faire de rapport, ils font seulement de la recherche. Il y a donc d'autres investissements considérables qui, normalement, nous placeraient à un niveau supérieur.
º (1650)
M. Mauril Bélanger: Je veux seulement être certain d'avoir bien compris. Il s'agit de 110 p. 100 de l'objectif fixé depuis 1987 et non pas de 1 000 p. 100...
M. Murray Elston: Non, c'est 1 000 p. 100 par rapport à l'investissement de 1987, mais nous nous étions engagés à investir 10 p. 100 en moyenne de notre chiffre d'affaires. Non seulement nous avons atteint ce niveau, mais nous l'avons dépassé pendant plusieurs années, si bien que nous dépassons toujours l'objectif d'investissement annuel de 10 p. 100 du chiffre d'affaires.
M. Mauril Bélanger: Les ventes ont donc énormément augmenté.
M. Murray Elston: Les ventes ont augmenté parce qu'il y a eu une augmentation du nombre de nouveaux produits découverts.
M. Mauril Bélanger: Très bien, c'est ce que j'essayais de savoir. Vos entreprises ne sont pas en difficulté.
M. Murray Elston: Non, mais l'investissement dans la recherche coûte de plus en plus cher. Il devient de plus en plus difficile de découvrir de nouveaux produits. Cela exige énormément d'investissements et beaucoup de temps.
M. Mauril Bélanger: Puis-je poser une dernière question, madame la présidente?
La présidente: Oui, et ce sera la dernière question pour ce groupe de témoins.
M. Mauril Bélanger: À quel point pourrait-on raccourcir le processus d'homologation sans compromettre la sécurité?
M. Murray Elston: Nous pourrions faire la même chose que l'Union européenne, par exemple. Ses résultats sont meilleurs que les nôtres sur le plan de la sécurité. Le processus pourrait être aussi court que celui de la FDA, où il est également moins long que chez nous. Nous pourrions réduire énormément la période nécessaire pour examiner nos dossiers. En fait, nous avons exhorté Santé Canada et les autres responsables que nous avons rencontrés d'examiner le modèle européen et celui de la FDA. Santé Canada a accepté, de temps à autre, de discuter avec les Européens et les États-Unis d'un partage des rôles éventuels pour l'homologation des médicaments. Nous pensons que les examens chimiques de base pourraient être les mêmes ici qu'aux États-Unis ou en Europe, par exemple.
La question de la sécurité pourrait être très facilement réglée s'il y avait davantage de coopération au niveau international, mais aussi une façon plus efficace de procéder aux examens. Même l'étude que KPMG a réalisée pour le compte de Santé Canada révélait que le principal problème était que les dossiers tardaient trop à être étudiés. Autrement dit, il y a un important arriéré.
Il serait donc possible d'améliorer énormément les choses sans compromettre la sécurité. J'avoue que nos sociétés pharmaceutiques ne voudraient pas que les tests d'innocuité et d'efficacité soient compromis au Canada.
M. Mauril Bélanger: Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous remercions tous les témoins pour les mémoires qu'ils nous ont présentés et aussi pour avoir pris la peine de comparaître pour répondre aux questions des membres du comité. Nous l'apprécions et nous allons maintenant vous laisser partir.
Nous suspendons la séance une minute seulement afin de nous préparer pour notre deuxième groupe de témoins.
º (1654)
º (1659)
La présidente: Nous reprenons nos discussions pré-budgétaires.
Nous souhaitons la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins de l'après-midi qui sont Richard Paton et David Shearing, de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques; Alan Young, de Computing Technology Industry Association of Canada; Jack Pasternak est directeur général et Al McDowell, également directeur général de Environmental Technology Innovations Canada, et Norine Heselton, vice-présidente, Politiques, de l'Association canadienne de la technologie de l'information; ainsi que Graham Hoey, de Ernst & Young.
Nous avons reçu vos mémoires, qui ont été traduits et nous les avons lus si bien que vous disposez de sept minutes pour nous en présenter le contenu afin que nous ayons le temps de vous poser des questions avant la fin de notre réunion.
Nous allons commencer dans l'ordre de votre arrivée.
Monsieur Paton, de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques, la parole est à vous.
» (1700)
[Français]
M. Richard Paton (président-directeur général, Association canadienne des fabricants de produits chimiques): Merci beaucoup, madame la présidente.
Merci de me donner l'occasion de faire une présentation au sujet du budget fédéral. Je représente 72 compagnies qui produisent des produits chimiques essentiels pour les diverses industries.
[Traduction]
Je suis accompagné de David Shearing, notre directeur principal du Développement économique. Je crois que David a fait distribuer ce que nous appelons nos résultats auxquels je ferai plusieurs fois allusion.
Comme nous sommes une industrie mondiale au chiffre d'affaires de 16 milliards de dollars qui comprend 70 entreprises et que nous concurrençons les investissements réalisés à bien d'autres endroits, nous revoyons régulièrement nos activités en nous basant sur notre analyse des facteurs qui se répercutent sur notre compétitivité et que nous jugeons positifs, neutres ou négatifs pour la croissance et l'investissement. Cela nous permet de voir où nous en sommes par rapport aux principaux facteurs dont notre croissance et notre innovation dépendent. Je vais faire plusieurs fois allusion à ces résultats.
Tout d'abord, je me réjouis beaucoup d'être de nouveau devant vous cette année. Par le passé, j'ai félicité le comité pour l'excellent travail qu'il a réalisé en ce qui concerne le budget. Je vais recommencer cette année. Notre association lit vos rapports très attentivement. Bien entendu, nous cherchons les passages où il est question de nous, mais tout le monde le fait. Nous avons remarqué toutefois que vous faites clairement valoir le genre de changements dont le Canada a besoin pour maintenir sa forte croissance, les investissements dans notre économie et l'innovation tout en abordant les dimensions budgétaires des questions sociales et environnementales.
Nous sommes d'accord avec bon nombre de recommandations que le comité a formulées l'an dernier au sujet de l'impôt sur le capital, du recouvrement des coûts et de la gestion de la dette. À bien des égards, on fait ce que malheureusement—et ce sera le thème de mon exposé—la politique gouvernementale n'a pas fait en proposant une politique cohérente et logique qui soutient l'innovation.
Au lieu de parler des questions que notre association voudrait aborder, comme le comité désire se pencher sur le programme politique en général et ses répercussions sur l'économie et l'innovation, je vais parler des messages contradictoires qui caractérisent la politique canadienne.
Nous avons choisi ce thème parce qu'en tant qu'industrie mondiale qui doit quotidiennement affronter la concurrence pour obtenir sa part de l'investissement, on a parfois l'impression que la bataille est perdue d'avance. Dans certains domaines de la politique, nous constatons que le gouvernement fédéral fait des progrès tandis que dans d'autres, ses politiques nuisent à l'investissement et à l'innovation.
Le problème le plus grave que nous ayons constaté ces dernières années est que le gouvernement semble souvent incapable de reconnaître que ses politiques se contredisent mutuellement. Il n'en est pas conscient et il est évidemment incapable d'examiner réellement les diverses options.
Le Canada est une économie ouverte très réduite qui doit concurrencer directement les meilleures économies mondiales. Plus de 78 p. 100 de notre production, par exemple, est exportée. Environ 85 p. 100 de ces exportations vont vers les États-Unis et nous représentons moins de 2 p. 100 du marché mondial. Notre situation est très semblable à celle de beaucoup d'autres industries dont vous entendrez parler en ce sens que nous sommes une entreprise qui n'a qu'un petit marché et qui exporte ses produits à très grande échelle.
En l'absence de marché national, nous devons être concurrentiels pour survivre et prendre de l'expansion et nous devons exporter pour être compétitifs. Sans croissance, notre industrie n'a aucun avenir et attirera de moins en moins l'investissement étranger.
Si vous examinez nos résultats, vous pouvez voir qu'il y a un certain nombre de plus, de zéros et de moins. Le Canada a un actif important, ce qui nous permettra d'attirer l'investissement, et c'est pourquoi la valeur de notre industrie est passée d'environ 12 milliards de dollars en 1990 à 16 milliards de dollars. Nous avons accès à des matières de base comme le gaz naturel, à une main-d'oeuvre qualifiée, une excellente gestion, un bon crédit d'impôt pour R-D, ce qui intéresse un certain nombre des autres témoins qui sont ici aujourd'hui et notre pays a certainement fait des progrès du côté de la gestion des finances publiques. Nous sommes les voisins de l'économie la plus grande et la plus dynamique au monde, les États-Unis.
Nous croyons donc que notre industrie présente un potentiel considérable pour notre pays. Nous pourrions même doubler de taille au cours des dix à 20 prochaines années si les politiques voulues étaient mises en place. Toutefois, pour arriver à ces résultats dans un pays qui n'a qu'un petit marché et qui dépend énormément des exportations, il faut que les politiques du gouvernement fédéral renforcent l'innovation et l'investissement et c'est vrai tant pour la politique financière que la politique économique, la politique environnementale, la législation du travail et les autres politiques.
» (1705)
Ce que nous constatons, c'est que le Canada envoie des messages contradictoires dans bon nombre de ces domaines. En fait, cela semble aggraver le conflit entre ces politiques qui parfois ne devraient sans doute même pas exister. Je vais vous donner quelques exemples de ces conflits au niveau des politiques dont vous pourriez peut-être tenir compte lors de la préparation du budget cette année.
Le gouvernement fédéral n'a pas réglé la question du niveau d'impôt des sociétés pour le secteur manufacturier qui est toujours de 21 p. 100 Dans notre mémoire, nous donnons une liste des membres d'une coalition qui appuient une réduction générale de 17 p. 100 de l'impôt fédéral sur les sociétés.
Le fait est—et c'est là un exemple de conflit au niveau de la politique—que le Canada veut davantage d'investissement. On sait que l'investissement est essentiel à la productivité et à la croissance. Mais puisque 85 p. 100 de nos exportations vont vers les États-Unis, nous faisons essentiellement concurrence aux États américains pour cet investissement et par conséquent notre structure fiscale est en concurrence avec celle des États-Unis pour cet investissement. Donc, à notre avis, notre industrie et bon nombre d'autres secteurs au Canada ont besoin d'un avantage fiscal canadien. Des règles du jeu équitables ne suffisent pas pour une part du marché d'un secteur qui ne représente que 2 p. 100 de l'économie mondiale. Nous n'obtenons pas le niveau d'investissement que nous devrions avoir en Amérique du Nord. Même si nous sommes très productifs et plus productifs que bon nombre de nos homologues américains, nous ne réussissons pas à obtenir cet investissement au Canada en raison de la petite taille de notre marché intérieur et de notre industrie mondiale.
Un autre exemple de contradiction au niveau de la politique, c'est que le gouvernement parle de productivité alors qu'il maintient pourtant l'impôt sur le capital. L'impôt sur le capital décourage l'investissement même qui est essentiel à la productivité. À cela s'ajoute un certain nombre de mesures réglementaires qui ajoutent de plus en plus des coûts inutiles et réduisent cette productivité.
Comme votre comité l'a écrit dans deux de ses rapports, le gouvernement fédéral maintient une politique de recouvrement des coûts et la coalition sur le recouvrement des coûts a clairement démontré que cette politique nuit à l'investissement et à l'innovation au Canada. Pourtant, cette coalition ne semble pas être en mesure de proposer une politique qui permet de trouver un juste équilibre entre le besoin d'innovation et de compétitivité et le recouvrement des coûts. Votre comité l'a reconnu, et nous attendons toujours une politique du Conseil du Trésor qui le reconnaisse.
Le gouvernement fédéral fait la promotion de l'innovation mais, par exemple, il maintient la réglementation sur l'introduction de nouveaux produits chimiques, ce que nous appelons les directives pour la déclaration de substances nouvelles. Cela représente pour nous un désavantage sur le plan concurrentiel par rapport aux États-Unis et cela limite l'introduction de nouveaux produits chimiques qui sont non seulement essentiels pour divers secteurs—par exemple les couleurs de peinture ou les additifs qui entrent dans la fabrication de divers produits pharmaceutiques... Non seulement l'importation de ces produits chimiques au Canada est limitée, mais bon nombre d'entre eux sont plus écologiques que les produits chimiques que nous avons ici. Pourtant, nous avons un régime de réglementation qui cause essentiellement de nombreux coûts et impose des limites à l'introduction de ces produits chimiques.
La présidente: Monsieur Paton, vous pourriez peut-être conclure car vous avez dépassé le temps qui vous était alloué.
M. Richard Paton: Oui, c'est ce que je suis en train de faire.
Enfin, l'exemple le plus frappant de contradiction au niveau de la politique, c'est que le gouvernement continue de promouvoir la croissance et l'innovation tout en prétendant que le protocole de Kyoto peut être ratifié avec un plan qui exige une réduction de 30 p. 100 de la consommation d'énergie et qui ne reconnaît ni les investissements ni la productivité et le rendement environnemental de bon nombre de sociétés dans mon secteur.
En conclusion, notre association est d'avis que des secteurs de l'industrie comme le nôtre peuvent travailler avec le gouvernement afin de trouver de meilleures solutions au niveau de la politique à mener. Nous croyons qu'il est possible d'améliorer considérablement le rendement environnemental tout en augmentant la croissance économique et l'investissement. Nous croyons qu'il est possible d'améliorer considérablement les politiques fiscales, les politiques relatives au recouvrement des coûts et les politiques relatives à la réglementation. Cependant, nous sommes tout particulièrement déçus du fait que le gouvernement fédéral ne semble pas être en mesure d'élaborer un cadre stratégique qui appuie en fait l'innovation.
Je vous remercie.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant donner la parole à M. Young de la Computing Technology Industry Association.
M. Alan Young (vice président, Computing Technology Industry Association of Canada (COMPTIA)): Madame la présidente, honorables membres du comité, je vous remercie d'avoir invité le Canadian Public Policy Committee de la Computing Technology Industry Association, ou CompTIA, à comparaître devant vous cet après-midi. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de vous présenter notre point de vue pendant que vous poursuivez vos consultations prébudgétaires auprès des Canadiens et Canadiennes. Je tiens pour acquis que vous avez tous reçu une copie de notre mémoire que nous avons fait parvenir au greffier en septembre.
CompTIA est une association industrielle transnationale à but non lucratif qui représente plus de 600 membres canadiens. L'éventail des membres comprend des fabricants multinationaux de matériel informatique et de logiciels ainsi que de petites entreprises spécialisées dans le service et la réparation d'ordinateurs et de matériel de communication. Les membres de CompTIA sont également des fournisseurs de solutions, des détaillants et des organismes de formation. Totalisant plus de 13 000 membres répartis dans 89 pays, CompTIA est le plus important certificateur des compétences en technologie tous fournisseurs au monde.
Le Canadian Public Policy Committee de CompTIA, qui compte des membres de la côte Est à la côte Ouest, et dans divers points entre les deux, estime que le Canada dispose de bases solides pour favoriser la croissance économique, enrichir les perspectives et rendre les Canadiens et Canadiennes plus prospères. Nous avons réalisé d'importants progrès en réduisant les taux d'imposition du revenu des particuliers et des sociétés, en contrôlant l'inflation et en enregistrant pendant cinq années consécutives des excédents budgétaires au palier fédéral.
En dépit de cette santé économique, nous ne pouvons pas nous endormir sur nos lauriers et oublier les défis futurs. Un de ces défis consiste à améliorer la tenue de la productivité au Canada. Mais il ne s'agit pas d'un objectif en soi. Le véritable but est l'amélioration du niveau de vie des Canadiens et Canadiennes qui est directement lié à la productivité.
Les initiatives proposées dans le mémoire de CompTIA visent à améliorer la feuille de route canadienne en matière de productivité. Il faut des investissements stratégiques dans les ressources humaines, les équipements et les politiques par lesquels on pourra faire du Canada un lieu plus attrayant pour les investisseurs et les entrepreneurs. Je n'aborderai pas ces initiatives en détail cet après-midi puisqu'elles sont toutes décrites dans notre mémoire. Je me bornerai à vous en faire un bref résumé en quelques minutes.
Il est clair que des mesures doivent être prises en vue d'assurer aux compagnies canadiennes un nombre suffisant d'employés qualifiés en TI pour répondre à la demande. On doit sérieusement songer à instaurer un crédit d'impôt à la formation comme moyen d'aider à répondre à la demande. Un régime de crédit d'impôt à la formation pourrait être spécialement dirigé vers les besoins de formation dans les TI; il existe un lien direct entre l'utilisation de la technologie de l'information et des communications et l'augmentation de la productivité.
Un investissement dans les TI pourrait prendre la forme d'un crédit d'impôt par le biais de la Loi de l'impôt sur le revenu. Ou bien, des coûts de formation pourraient être compensés par des réductions des primes d'assurance-emploi. Comme première étape, le gouvernement pourrait implanter des projets pilotes pour mesurer l'efficacité d'un crédit d'impôt à la formation avant d'étendre le régime à tout le Canada.
Il faudrait prendre en compte ce qui se passe à l'étranger dans le domaine du crédit d'impôt à la formation lorsque nous envisageons ce qui pourrait être fait. L'État de l'Arizona a instauré un crédit-impôt formation en TI en 2001. Un projet de loi sur le crédit-impôt formation est sur le point d'être voté à la Chambre des représentants et au Sénat des États-Unis. Le Royaume-Uni est aussi en train d'examiner le crédit-impôt formation comme moyen de mettre à jour les compétences de ceux qui sont déjà sur le marché du travail.
L'amélioration de la formation des Canadiens en technologie de l'information est un pas en avant dans la voie menant à une main-d'oeuvre encore plus qualifiée et plus adaptable. Une deuxième étape consisterait à mettre en oeuvre un nouveau type de programme d'apprentissage au Canada - un apprentissage en TI. Un tel programme s'articulerait autour des nouveaux venus sur le marché du travail et de ceux qui sont en situation de recyclage, et constituerait ainsi un outil pour combattre la pénurie de travailleurs qualifiés en TI.
CompTIA a reçu une subvention du ministère américain du Travail, le DOL, pour mettre sur pied un programme d'apprentissage en TI pour les États-Unis. CompTIA a formé un comité de bénévoles pour élaborer la structure de ce programme d'apprentissage, y compris l'enseignement en salle de cours, la formation en milieu de travail et l'accréditation. Cette structure est évaluée actuellement dans quatre projets pilotes. À la fin de ces essais pilotes, CompTIA présentera ses recommandations au DOL afin d'obtenir l'agrément.
CompTIA explore actuellement des programmes d'apprentissage avec la province de l'Ontario. Nous serions heureux de travailler en association avec le gouvernement du Canada et d'autres partenaires intéressés à mettre à l'essai un programme d'apprentissage pilote en TI pour le Canada et à travailler à le mettre en oeuvre dans tout le pays.
Il ne suffit pas d'investir dans l'éducation et les compétences de la population, il faut que les Canadiens disposent du matériel et de la machinerie nécessaires afin d'être innovateurs et productifs. Selon la Loi de l'impôt sur le revenu, la déduction pour amortissement pour les ordinateurs, le matériel de fabrication et de traitement est de 15 p. 100 la première année et de 30 p. 100 les années subséquentes. Seule une fraction de 10 p. 100 est non amortie après sept ans environ. La technologie de l'information est généralement remplacée tous les deux ou trois ans et a une vite utile de trois ans et demi tout au plus. Le rythme auquel la DPA peut être appliquée sur le matériel de technologie de l'information devrait, par conséquent, être accéléré pour refléter la vraie dépréciation du matériel pendant qu'il est en usage productif.
L'an dernier, le présent comité a recommandé que «le gouvernement entreprenne la recherche nécessaire pour une réforme complète des taux de la déduction pour amortissement pour refléter l'allure des changements technologiques et la vie économique de plus en plus courte de la machinerie moderne et du matériel». Malheureusement, le gouvernement n'était pas en mesure l'an dernier d'accepter la recommandation du comité. Par conséquent, elle demeure une question importante.
» (1710)
La Loi de l'impôt sur le revenu exige actuellement l'inclusion du revenu tiré de services rémunérés qui seront rendus dans une période future. Tant pour les contrats d'entretien de logiciels que ceux d'équipement informatique, lorsque les services sont payés pour toute une année vers la fin de l'exercice, le fournisseur doit inclure la totalité de ce montant dans ses revenus. À cette période, ces contrats n'auront engagé que des coûts ou des dépenses relativement peu élevés, et l'impôt devra être versé en fonction de la totalité des sommes perçues sans possibilité de déduction des coûts ou dépenses reliés à la prestation de ces services. Les vendeurs de ces services essentiels ne devraient pas être pénalisés par des règles d'inclusion dans le revenu qui ne reflètent pas le travail effectivement exécuté au cours d'un exercice donné. Une répartition proportionnelle de ces frais et l'inclusion dans le revenu uniquement de la partie des frais qui concerne l'exercice courant devraient résoudre ce problème.
Madame la présidente, notre dernière proposition concerne directement une question que le Comité des finances a fort bien abordée l'an dernier. Dans son rapport prébudgétaire de 2001, le Comité des finances de la Chambre a dit des impôts sur le capital qu'ils découragent l'investissement, réduisent la productivité et ont des répercussions disproportionnées sur les industries à forte utilisation de capital. De plus, dans son rapport de l'an dernier, il a fait remarquer que ces mêmes impôts viennent grever les capitaux servant au financement de la majeure partie du nouvel outillage. C'est pourquoi ce comité a recommandé d'éliminer cette imposition du capital. Nous avons appuyé cette proposition l'an dernier et nous espérons que le comité sera disposé une fois de plus à recommander une telle suppression ou, à tout le moins, une élimination progressive sur une courte période.
En bref, votre comité constitue un porte-parole important dans les dossiers de politique publique qui aideront le gouvernement à atteindre ses objectifs en matière d'innovation et de productivité et feront du Canada un meilleur endroit où vivre et exploiter une entreprise. Nous serions heureux de collaborer avec vous et les autres décideurs au cours des prochains mois afin de transformer des idées créatives en mesures novatrices.
Je vous remercie.
» (1715)
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Young.
Je vais maintenant donner la parole à M. Pasternak et à M. McDowell de Innovations en technologie environnementale du Canada.
Qui fera l'exposé? Ou est-ce que vous prendrez la parole l'un après l'autre?
M. Al McDowell (directeur général, Innovations en technologie environnementale du Canada): Bonjour, madame la présidente et mesdames et messieurs.
Nous sommes ici pour solliciter votre appui à notre proposition concrète de financement de contrepartie pour la recherche dans les domaines de la préservation de l'environnement et du développement durable.
ITEC a été constitué en société pour succéder à l'ESTAC, un consortium réunissant des entreprises de pointe, des universités et le gouvernement et voué à une recherche de classe mondiale pertinente au point de vue commercial dans les domaines de la préservation de l'environnement et du développement durable. Le consortium a été créé en 1985, mais il a mis fin à ses activités en 2001. Initialement, il s'agissait de trois sociétés et d'une université, et à la fin, il réunissait 26 sociétés canadiennes et 25 universités. Entre autres sociétés, on peut citer Syncrude Canada, Trojan Technologies et Dow Chemical. Pour les universités, on peut citer McMaster, Alberta, Trent, Laval et le Nouveau-Brunswick—en gros, des universités d'à peu près partout au pays.
L'ESTAC était un consortium dans le cadre duquel les sociétés, des universités et le gouvernement fédéral avaient pour mission de mener des travaux de recherche novateurs et de pointe. Le consortium se fondait sur les priorités arrêtées par ses membres. Il transmettait ces dernières aux professeurs d'université, qui soumettaient eux-mêmes des propositions en vue de satisfaire ces besoins. Je peux vous donner des exemples des recherches accomplies au fil des ans.
Nous avons une stratégie novatrice de traitement des sols pour l'élimination des déchets organiques industriels. L'étude a porté sur les propriétés physiques et chimiques des sols, le prétraitement des sols, le prétraitement des déchets organiques et la sélection microbienne. L'application des résultats obtenus en laboratoire a permis d'accroître l'efficacité des procédés, d'accélérer la dégradation et d'avoir une application à plus grande échelle. L'un de nos membres commercialise ce procédé depuis sept ans avec des retombées financières considérables. Il y a aussi une réduction du CO2, car nous n'incinérons pas et nous ne transportons pas de matériaux.
L'Université de Guelph a un projet sur les géraniums odorants qui repoussent de petits animaux comme les écureuils et les lapins, mais on propage surtout ces plantes parce qu'elles absorbent les métaux lourds toxiques des sols contaminés. Une fois ces métaux lourds absorbés par les plantes, on peut récolter celles-ci et les incinérer pour en tirer des cendres. C'est un procédé brevetable à retombées considérables.
Notre étude écologique sur la remise en état des sables bitumineux est un autre exemple de projets faisant intervenir de nombreuses sociétés et universités. Les chercheurs et professeurs de l'Université de la Saskatchewan, de l'Université de Windsor, de l'Université Simon Fraser et de l'Université de Waterloo travaillent tous avec les quatre sociétés de traitement de sables bitumineux en profitant aussi de l'apport de trois compagnies de potasse de l'Ouest. En gros, les compagnies d'exploitation de sables bitumineux sont déterminées à remettre les zones exploitées dans l'état où elles se trouvaient auparavant, c'est-à-dire à un mélange de forêts et de zones humides. Quand on a reconstitué les premières zones humides artificielles, on a constaté une réapparition rapide de la faune dans ces zones, et cela a incité les sociétés à discuter avec les universités d'études sur la santé des insectes et des animaux qui repeuplent ces régions. Des études sont actuellement en cours dans ces zones humides artificielles et dans des zones humides intactes. Des équipes de chercheurs d'universités canadiennes étudient toute la chaîne alimentaire, des moustiques et mouches noires jusqu'aux grenouilles, hirondelles, canards et crécerelles d'Amérique. Nous examinons actuellement toute une série de générations pour voir s'il y a des répercussions sur leur santé.
Le dernier projet dont j'aimerais vous parler concerne l'Université de Toronto où un chercheur a mis au point un nouveau capteur optique laser qui réussit à déterminer en direct les concentrations de gaz dans les émissions des fours à 1700 degrés Celsius, ce qui permet de contrôler l'alimentation, d'améliorer l'efficacité des fours et de réduire la quantité de CO2 dégagé par unité de chaleur produite.
» (1720)
M. Jack Pasternak (directeur général, Innovations en technologie environnementale du Canada): Au cours de ses 16 années d'existence, l'ESTAC a financé 192 de ces projets, ce qui représente un montant total de 27 millions de dollars. De plus, 800 documents scientifiques ont été publiés, 700 étudiants de deuxième et troisième cycles ont été financés et il y a eu un réseautage entre les entreprises membres, les professeurs d'université et leurs étudiants, ce qui s'est traduit par des possibilités d'emploi pour ces derniers.
Le gouvernement s'est retiré de l'ESTAC en 1999 lorsqu'il a mis un terme au programme de mise en valeur de la technologie d'Industrie Canada. Les fonctionnaires appuyaient à l'unanimité la poursuite de la collaboration avec l'ESTAC, mais il n'existait pas de véhicule permettant de faciliter la participation suivie du gouvernement. S'il en est ainsi, c'est qu'il n'existe pas de programmes gouvernementaux permettant d'appuyer des consortiums axés sur l'étape transitoire du continuum de la R-D. C'est pourtant à ce stade qu'une collaboration intensive entre les professeurs d'université et le personnel de l'industrie permet de faire le lien entre les travaux scientifiques pratiques et la réalité des sociétés en vue d'obtenir de nouveaux procédés et de nouveaux produits.
Pour être plus précis, dans le continuum de la R-D, où la science fondamentale est transformée en technologie commercialisable, les programmes comme ceux du CRSNG et de la FCI—la Fondation canadienne pour l'innovation—de même que les programmes pour la mise en place de nouvelles institutions visent à financer la recherche et l'infrastructure de base dans les universités, qui se situent au premier stade de la recherche tandis que des programmes comme PTC ou Partenariat technologique Canada, le PARI du CNRC, le programme d'aide à la recherche industrielle, ainsi que le FATDD, le Fonds d'appui technologique au développement durable, ont pour objet de financer des projets de démonstration—développement à un stade ultérieur qui se rapproche davantage de la réalité commerciale. De plus, des programmes comme le PTC et le FATDD ne prévoient pas la participation du gouvernement aux étapes intermédiaires du continuum de R-D. Ils lui permettent de conclure des partenariats avec le secteur privé, mais ces programmes servent seulement à financer des propositions précises et, par définition, ils empêchent la création de véritables consortiums pour de grandes initiatives de recherche et de développement.
M. Al McDowell: Pour passer à la dernière étape qui réclame d'élargir le consortium à une cinquantaine d'entreprises, ITEC demande au gouvernement fédéral une dernière subvention globale de 10 millions de dollars sur une période de cinq ans. Ce montant permettra de recueillir 10 millions de dollars supplémentaires auprès du secteur privé pour que cette recherche environnementale et industrielle importante puisse se poursuivre dans les universités des quatre coins du pays. Cela permettra de continuer la recherche au stade intermédiaire du continuum de R-D et de produire ainsi de nouvelles idées prêtes à être commercialisées. Le gouvernement fédéral doit financer la recherche réalisée par les universités pour que les idées novatrices continuent d'être commercialisées.
M. Jack Pasternak: Pour résumer, une dernière subvention fédérale est nécessaire pour établir la viabilité du modèle du consortium entre les universités et l'industrie canadienne dont l'ESTAC a été le chef de file, pour favoriser la poursuite de la recherche aux étapes intermédiaires du continuum de R-D, pour stimuler la coopération dans les domaines des mines, de la sidérurgie, du charbon, des pâtes et papiers, de l'industrie forestière, des secteurs qui partagent les mêmes problèmes que ceux du pétrole, de la pétrochimie, des sables bitumineux, de la potasse et de leur environnement en ce qui concerne la technologie environnementale.
Dans son budget de 2001, le gouvernement s'était engagé «à favoriser la commercialisation de la recherche par l'entremise de consortiums et de partenariats entre les universités et le secteur privé». Pendant 16 ans, l'ESTAC a poursuivi ces objectifs avec des résultats intéressants sur le plan commercial. Le gouvernement se trouve donc devant deux choix, celui de verser une dernière contribution au consortium d'ETIC pour continuer à développer cette phase importante de la R-D au Canada ou abandonner les consortiums pour toujours.
Nous vous remercions de votre attention.
» (1725)
La présidente: Merci pour votre exposé.
Nous allons maintenant passer au dernier témoin de ce soir, Norine Heselton, de l'Association canadienne de la technologie de l'information. Allez-y.
Mme Norine Heselton (vice-présidente, Politiques, Association canadienne de la technologie de l'information): Je vous remercie. Nous travaillons également en relais.
Merci beaucoup, madame la présidente, membres du comité, d'accorder à l'ACTI l'occasion de venir ici aujourd'hui vous réitérer son appui pour le programme d'innovation du Canada.
La stratégie d'innovation établit clairement que le gouvernement cherche à positionner le Canada parmi les chefs de file de la nouvelle économie mondiale fondée sur le savoir. L'industrie de l'information et des communications est à l'avant-garde de la transition canadienne vers une économie dominée par l'innovation et fondée sur le savoir. L'industrie génère des revenus annuels de 132 milliards de dollars. Le ralentissement qu'a connu récemment notre industrie est très médiatisé, mais ce dont on parle moins c'est de l'immense contribution que nous avons apportée et que nous continuons d'apporter à la croissance de l'économie du Canada. Même en tenant compte de ce ralentissement, les TIC représentent aujourd'hui une part plus importante de l'économie qu'à la fin de 1996, alors qu'elles représentaient 4 p. 100 de l'activité économique. À la fin de l'an 2000, notre pourcentage du PIB avait grimpé à 7 p. 100, tandis que l'industrie représentait encore 6 p. 100 du PIB à la fin de 2001. Nous employons plus d'un demi-million de Canadiens, et s'il est vrai que nous en employons moins aujourd'hui qu'en 2000, nous avons connu, depuis 1996, une croissance globale de 156 000 emplois. Nous sommes, de loin, l'investisseur le plus important dans le domaine de la R-D du secteur privé, avec des investissements de plus de 5 milliards de dollars par année.
Nous comprenons l'importance capitale de l'innovation dans le savoir, nous jouissons d'une expérience considérable dans la transformation du savoir en richesse et notre industrie est mondiale. L'industrie des TIC génère 44 milliards de dollars d'exportations par année. À tous les jours, nous faisons face à la concurrence établie et à des nouveaux concurrents avec succès. Notre réussite fait en sorte que les innovations canadiennes occupent une place importante parmi les choix qui s'offrent aux clients du monde entier.
Compte tenu de notre feuille de route, mon collègue Graham et moi vous soumettons respectueusement nos suggestions visant à aider le Canada à réaliser ses aspirations de rehausser son statut en tant que pays novateur et créateur de savoir.
J'aimerais d'abord parler du programme de crédit d'impôt à la recherche scientifique et au développement expérimental. Ce crédit d'impôt n'est remboursable que pour les entreprises privées sous contrôle canadien. Le programme est très efficace pour certaines entreprises appartenant à des intérêts canadiens, parce que ces sociétés relativement petites ont droit au remboursement, peu importe leur bilan. Toutefois, pour les grandes entreprises renommées, le crédit d'impôt non remboursable peut être utilisé pour réduire son taux d'imposition réel seulement si l'entreprise génère des bénéfices et des impôts exigibles. En période de ralentissement économique, ces crédits d'impôt non remboursables sont peu efficaces comme incitatif à la R-D au Canada.
Le remboursement universel et l'uniformité des règles s'appliquant à tous, peu importe la taille de l'entreprise, qu'elle soit ou non sous contrôle canadien ou cotée en bourse, aideront à maintenir les programmes de RS-DE concurrentiels; il ne s'agit pas de modifier le montant total du crédit mais seulement le moment où il est accordé. Le crédit d'impôt créera ainsi un plus grand incitatif et l'économie canadienne retirera des avantages beaucoup plus importants des mêmes montants de crédit d'impôt.
Dans son mémoire pour les consultations prébudgétaires, l'ACTI propose également de câbler la frontière canado-américaine au moyen d'un réseau de fibre optique qui relierait les 113 points de passage frontaliers. Grâce à un tel réseau, tous les postes frontaliers seraient bien équipés pour assurer la gestion de nouvelles technologies à haut débit d'information, telles que la biométrie et les programmes de prédédouanement; les douanes seraient également en mesure de répondre aux demandes de renseignements qui sont essentielles à la sécurité de notre pays et de celle de notre voisin du Sud. Un réseau de fibre optique rehausserait la sécurité et ferait la preuve du leadership canadien dans ce dossier. Cela permettrait aussi d'accélérer les échanges commerciaux légitimes et aiderait dans la répression des activités illicites.
Mais il y a d'autres avantages encore. Le réseau de fibre optique produira des retombées économiques énormes pour les collectivités voisines des postes frontières en raison de l'infrastructure haute vitesse elle-même et de l'élan qu'une telle infrastructure pourrait imprimer au commerce, aux soins de santé, à l'éducation, aux services gouvernementaux, autant de secteurs qui pourraient bénéficier d'une connectivité à large bande. En outre, et sans vergogne, l'ACTI souligne qu'un tel projet stimulerait l'industrie canadienne des TIC.
» (1730)
L'ACTI demande également que soit mis sur pied un programme de bourse reconnu à l'échelle internationale afin d'attirer les universitaires les plus doués des quatre coins du monde dans les domaines des sciences naturelles, des mathématiques, de l'informatique et du génie.
Les industries des technologies de pointe ont tenté de sonner l'alarme par rapport à la pénurie de personnes hautement qualifiées qui sévit déjà depuis quelque temps, mais le problème ne fait que s'aggraver d'année en année. Aux taux de diplomation actuels, les universités canadiennes produiront moins du tiers des spécialistes nécessaires pour alimenter la croissance de l'industrie, malgré l'objectif du gouvernement de stimuler l'investissement dans la R-D. Dans le même temps, les facultés qui forment ces spécialistes voient leurs rangs diminuer.
Manifestement, une intervention majeure s'impose pour pallier cette pénurie tout en favorisant davantage une culture de la science et de la technologie au Canada.
Et maintenant, je cède la parole à mon collègue, Graham Hoey.
M. Graham Hoey (associé, Ernest & Young LLP; Association canadienne de la technologie de l'information): Bonjour, mesdames et messieurs.
Des trois ou quatre sujets que je voulais aborder, Alan Young en a en fait déjà abordé deux fort bien; je raccourcirai donc mes propos pour ces deux volets.
L'ACTI recommande que le gouvernement ajuste son régime actuel de déduction pour amortissement de façon à ce qu'il corresponde mieux à la vitesse réelle de dépréciation de l'équipement des TIC. Alan parlait justement de cela un peu plus tôt. Il est clair que le régime ne traduit pas fidèlement le cycle de dépréciation de l'équipement de TIC. Des études indiquent que la durée de vie utile d'un ordinateur personnel est d'environ deux ans et demi. Après deux ans et demi, environ 60 p. 100 du coût de l'ordinateur est encore inscrit au poste d'équipement non amorti.
L'ACTI recommande que, en guise de modification du régime, les éléments d'actif valant jusqu'à 5 000 $ canadiens soient pleinement déductibles pendant l'année de leur acquisition. Cela couvrirait bien sûr les ordinateurs portatifs, les ordinateurs personnels et d'autres types d'équipement. Nous croyons que les achats de plus de 5 000 $ devraient faire partie d'un nouvel ensemble faisant l'objet d'un taux de déduction pour amortissement de 50 p. 100, ce qui permettrait de les radier en deux ans; en comptant la demi-année et l'année d'acquisition, cela ferait trois ans en tout. Ce taux de déduction pour amortissement soulignerait le fait que l'investissement dans de l'équipement des TIC est une force vive pour tous les secteurs de l'économie canadienne, et nous tirerons de grands avantages si nous en favorisons l'utilisation.
De plus, l'ACTI renouvelle sa demande pour l'établissement de nouvelles règles régissant l'acquisition d'actions par les employés de façon à permettre à plus de Canadiens d'avoir un intérêt direct dans le succès de leur employeur et d'offrir des méthodes de rémunération plus modernes. Le gouvernement a agi à ce chapitre en modifiant le traitement fiscal des options d'achat d'actions pour les employés dans le cadre du budget de février 2000, qui permet à certains contribuables de retarder le paiement des impôts jusqu'à la vente des actions plutôt qu'au moment de l'exercice de l'option. Malheureusement, le calcul du revenu d'emploi est encore effectué à la date de l'exercice de l'option par opposition à la date de vente des actions. Certaines sociétés par actions très en vue ont bien sûr ressenti une énorme différence.
Lorsque l'actionnaire lève son option et garde ses actions, et que celles-ci perdent par la suite de leur valeur, cela occasionne des problèmes d'impôt au fédéral. En vertu des règles actuelles, les avantages sociaux sont fixés au moment de la levée de l'option, et il s'agit essentiellement de 50 p 100 de la différence entre la juste valeur marchande au moment de l'exercice de l'option et le prix de levée. Si les titres perdent de leur valeur, cela représente une perte en capital, et cette perte peut être utilisée en déduction du revenu d'emploi.
Bien sûr, les employés qui revendent leurs actions immédiatement après avoir exercé leur option n'éprouvent pas de problème. Toutefois, beaucoup d'employés ne sont pas autorisés à vendre leurs actions en raison de dispositions qui peuvent figurer dans les conditions de leur option. Nous comprenons qu'il est facile de dire aux employés qu'ils devraient tout simplement vendre leurs actions au moment de lever leur option mais, comme je l'ai dit, dans bien des cas, ils ne sont pas autorisés à le faire.
Nous croyons donc qu'il y a un besoin important de redresser la situation de ces personnes par voie législative. Le régime fiscal devrait prendre en compte les difficultés économiques subies lorsque aucun gain ne résulte de l'exercice de l'option et de la vente subséquente des actions. L'ACTI réitère sa demande que le gouvernement se penche sur cette question des conséquences inopinées. Et par souci d'équité, il conviendrait de nous permettre d'utiliser les pertes découlant de tels arrangements.
J'aborde maintenant la question des paiements liés aux contrats d'entretien. Encore une fois, Alan a bien couvert le sujet, alors je me contenterai de répéter que beaucoup de sociétés de logiciels qui assurent les contrats d'entretien doivent inclure ces derniers dans leur revenu et n'on pas droit à une réserve parce qu'il n'y a pas de mise à niveau, de mise à jour ou de remplacement des codes prévus. Cet entretien s'effectue au besoin et il y a donc non-correspondance entre le revenu et les dépenses et le paiement anticipé d'impôt découlant de l'inclusion de la somme complète dans le revenu.
L'ACTI appuie également la demande faite par de nombreux groupes d'entreprises visant l'élimination de certains impôts sur le capital comme l'impôt sur les grandes sociétés. Le Canada a fait de grands progrès en matière de réduction des taux d'imposition fédéraux et bon nombre de provinces lui ont emboîté le pas, mais l'impôt sur les grandes sociétés continue à décourager l'investissement au Canada. Le Canada a la distinction peu enviable d'être le seul pays industrialisé prélevant des impôts sur le capital à des taux élevés sur les investissements commerciaux. Ces impôts découragent l'investissement dans les infrastructures et les biens d'équipement. Nous croyons que l'élimination de ces mesures stimulerait considérablement notre compétitivité à l'échelle mondiale.
» (1735)
Voilà qui conclut nos remarques. Nous vous invitons toutefois à lire notre mémoire en entier, ce que vous avez sans doute déjà fait. Nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.
La présidente: Et merci beaucoup de nous avoir fait parvenir vos textes à temps. Cela nous a permis de les faire traduire et de les fournir assez tôt aux députés pour qu'ils les lisent avant votre participation à la réunion d'aujourd'hui.
Nous allons ouvrir la période des questions avec intervention de six minutes, en accordant la parole d'abord à M. Burton puis à MM. Cullen et Wilfert, et également à Mme Minna.
M. Andy Burton (Skeena, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.
Je suis heureux d'être ici, même si je n'y serai que pour peu de temps. Je vais m'efforcer de bien saisir de quoi il en retourne ici. Si vous permettez, j'aimerais aussi poser quelques questions aux représentants des industries chimiques.
Peut-être pourriez-vous nous expliquer un peu dans quelle mesure l'industrie est touchée par la loi actuelle, et surtout, quels seraient les effets sur elle de ce ballon d'essai qu'est le protocole de Kyoto. Comment votre industrie risque-t-elle d'en être affectée? Cela exigera peut-être une réponse assez longue et complexe, mais je vous serais quand même reconnaissant de me renseigner sur le sujet.
M. Richard Paton: Merci beaucoup de votre question.
En nous servant de nos divers modèles d'investissement, nous avons effectué des analyses poussées des effets éventuels des propositions du gouvernement fédéral relatives aux principales sources d'émissions. Nous avons adopté des hypothèses de 10 $ la tonne ou de 50 $ la tonne de carbone, et avons effectué les calculs en fonction des coûts que notre industrie serait forcée d'assumer.
Vous n'ignorez sans doute pas que l'ébauche du plan fédéral exige beaucoup des grandes industries. Je ne pense pas exagérer en affirmant qu'il nous impose un fardeau beaucoup trop lourd par rapport à celui des consommateurs, des transports et d'autres secteurs où, pour des raisons politiques, il serait plus difficile d'en exiger davantage.
Pour vous donner un exemple réel, une de nos compagnies vient de construire une immense usine à Joffre en Alberta; elle est ultra moderne, sa technologie est à l'avant-garde de tout ce qui se fait à l'échelle internationale, elle vaut 1 milliard de dollars et elle créerait énormément d'emplois. Or, selon les normes figurant dans l'ébauche du plan fédéral, quelle que soit la qualité de la technologie utilisée, il faudra qu'elle paie 15 p. 100 de... Une fois qu'on a soustrait les émissions totales, la compagnie est obligée d'en combler 15 p. 100, et ce, je le répète, quelle que soit la qualité de la technologie utilisée. Sur 20 ans, l'entreprise en question devra donc débourser de 100 à 200 millions $ dans une industrie où la concurrence avec les États-Unis se joue au prix à la livre.
Si vous vous mettez à la place de l'entreprise, vous comprendrez sans peine qu'elle se demande pourquoi elle devrait investir au Canada?
Notre exposé soulignait les contradictions qu'on peut déceler dans les politiques actuelles. En voici un exemple. Selon le gouvernement fédéral, il faut que nous croissions, et nous avons donc besoin d'investissement ainsi que de technologie de pointe. Toutefois, il nous dit aussi que dans le cas où nous réussirions à croître, à investir et à produire des technologies d'avant-garde, il nous punirait en nous imposant des coûts et en entravant nos efforts pour devenir concurrentiels.
Par conséquent, dans l'ensemble de notre industrie, si nos coûts sont plus chers par tonne de carbone, il n'y aura tout simplement plus d'investissement dans l'industrie pétrochimique au Canada, il se déplacera vers le Mexique, la Chine, le Moyen-Orient et tous les autres pays qui ne sont pas assujettis aux exigences de Kyoto. Ce n'est pas ce que nous voulons faire, mais c'est ainsi que les choses se passeront.
M. Andy Burton: Pour développer un peu plus cette idée, bien que j'aborde là autre chose que votre industrie propre, d'après vous, comment tout cela affectera-t-il les autres industries au Canada? Pensez-vous par exemple que l'industrie de l'automobile de l'Ontario, que celle des sables bitumineux en Alberta, et que d'autres en Colombie-Britannique seront affectées de la même façon que la vôtre...
M. Richard Paton: Je collabore avec 25 autres associations industrielles, qui représentent l'industrie de l'automobile, de l'acier, du pétrole et tous les autres groupes. Or, elles ont toutes de sérieuses difficultés avec cette exigence problématique de 15 p. 100. Bien entendu, chacune des industries a ses difficultés propres, mais elles estiment toutes que le plan fédéral compromettrait sérieusement leurs investissements.
La plupart des gens ne sont probablement pas au courant de cela, mais bon nombre de ces industries perdent déjà des investissements. Déjà dans l'industrie de l'automobile, on assiste à des déplacements, même si on s'efforce vigoureusement de maintenir le niveau actuel. Dans l'acier, il y a eu des problèmes de dumping des importations et de graves problèmes de prix. Dans d'autres industries encore, les coûts de production sont plus faibles, en raison des diverses formes de soutien accordés par les gouvernements. On peut donc dire que de nombreuses industries connaîtraient les mêmes problèmes que nous.
» (1740)
M. Andy Burton: Pouvez-vous nous donner une idée des pertes que l'économie canadienne a peut-être déjà subies en raison de l'incertitude entourant le protocole de Kyoto?
M. Richard Paton: Non, je ne suis pas en mesure de le faire. Cela dit, il ne fait aucun doute que les investisseurs y pensent maintenant à deux fois avant de placer leur argent. Pour les pipelines et les grandes usines, il faut investir sur 25 ans et les gens tiennent compte des coûts totaux. Mais lorsqu'on nous dit que la première étape de Kyoto ne représentera que telle et telle chose... Eh bien, on sait qu'il faudra y faire face... et que les autorités réfléchissent déjà aux deuxième et troisième étapes. Les entreprises ont besoin d'un minimum de certitude pour convaincre leurs investisseurs, qui veulent tirer des bénéfices de leurs placements à long terme.
M. Andy Burton: Combien de temps me reste-t-il encore, madame la présidente?
La présidente: Il vous reste au total 15 secondes pour la question et la réponse. Nous vous serions très reconnaissants de pouvoir respecter cela, monsieur Burton.
M. Andy Burton: Je pensais que vous aviez dit 50 secondes. Bien, je vais renoncer. Merci.
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Cullen, la parole est à vous pour six minutes.
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, madame la présidente, et merci, mesdames et messieurs, de vos exposés.
J'aimerais adresser mes questions à Mme Heselton et à M. Hoey. Dans votre exposé, vous parlez du besoin d'examiner le remboursement. Certains appellent cela le «déchiquetage», expression assez intéressante, à mon avis. Je sais fort bien que le gouvernement fait l'essai de tous ses modèles au ministère des Finances. Il ne s'agit pas vraiment d'une perte pour dépenses fiscales mais plutôt d'un report. Cette conception a d'ailleurs déjà été soulevée par d'autres groupes, et elle me paraît juste. Quoi qu'il en soit, avez-vous une idée des coûts que cela représenterait sur le plan de la trésorerie ou à d'autres égards?
Mme Norine Heselton: En ce moment, le ministère des Finances examine les chiffres, ce qui n'a rien d'étonnant, mais selon nos estimations, rendre les crédits remboursables coûterait entre 300 millions et 1 milliard de dollars. Encore une fois cependant, le moment du crédit d'impôt s'en trouverait changé.
M. Roy Cullen: Bien, de 300 millions à 1 milliard de dollars, mais est-ce que cela est étalé sur un certain nombre d'années?
Mme Norine Heselton: Nous discutons également avec le ministère des diverses façons d'administrer des modifications de ce genre, et il y en a quelques-unes déjà à l'ordre du jour.
M. Roy Cullen: Monsieur Hoey, vous avez affirmé qu'il serait souhaitable de permettre aux employés d'acquérir des actions de leur propre entreprise. À cet égard, je suis au courant des problèmes auxquels se heurtent les employés, et je pense que le ministère des Finances les a aussi examinés. Je crois savoir cependant qu'il n'a pas réussi à régler le problème. Pourtant, pour avoir étudié cette question de l'acquisition d'actions par les employés, au sens le plus large d'une participation à la propriété de l'entreprise, je sais à quel point cela peut favoriser l'accroissement de la productivité.
Êtes-vous favorable à des mesures fiscales semblables à celles en vigueur aux États-Unis et au Royaume-Uni, qui encouragent les régimes d'actionnariat des employés?
» (1745)
M. Graham Hoey: Tout à fait. Au Canada, les entreprises ont tendance à offrir l'achat d'actions par les employés parce que cela représente un incitatif fiscal, mais les régimes d'actionnariat des employés eux n'en représentent pas. Ce serait donc une bonne chose que d'accorder les mêmes avantages à ces régimes RADE.
M. Roy Cullen: Bien, je vous remercie.
MM. Pasternak et McDowell, je partage votre souci de nous voir disposer du capital de risque dont nous avons besoin pour soutenir la croissance de la nouvelle économie, si on me passe cette expression. J'aimerais cependant que vous me disiez où son besoin est le plus grand.
Bon nombre d'universités ont déjà mis sur pied des sociétés en noms collectifs qui leur servent d'intermédiaires avec le secteur des affaires. Quelques-uns de leurs noms m'échappent, mais je me souviens quand même d'avoir travaillé sur la question. Il existe donc des sociétés d'investissement en capital de risque, mais notre examen a révélé des carences, précisées aux dollars près, et qui tenaient au fait qu'il fallait soumettre la technologie ou l'idée à une certaine catégorie de banques d'affaires.
Où est-ce que votre proposition se situerait sur cette gamme d'établissement?
M. Al McDowell: À peu près au milieu, entre la recherche fondamentale et le développement. Si on se reporte aux genres de sociétés mises sur pied par les universités, on se rend compte qu'en général elles portent sur des projets de recherche lancés par les universitaires puis mis de l'avant par leurs organisations. Ensuite, ces organisations ont cherché des débouchés pour la vente de ces produits.
Chez nous, les choses ont fonctionné assez différemment. Les représentants de l'industrie ont présenté une liste des problèmes réels que connaissaient leurs entreprises au Canada; dans la plupart des cas, il s'agissait de situations se posant avant la concurrence et de problèmes d'environnement. Puis, les universitaires ayant des intérêts en commun avec les entreprises disaient en quoi leur technologie pourrait servir à résoudre les problèmes.
J'ignore si je réponds vraiment à votre question. Il est assez difficile de vous dire où nous nous situons en ce qui a trait au capital de risque.
M. Roy Cullen: Monsieur Pasternak.
M. Jack Pasternak: Permettez-moi de développer quelque peu la question.
Nous avons toujours demandé à nos entreprises membres de nous dire quels étaient leurs problèmes les plus pressants qui nécessitaient des pistes de solutions. Une fois la liste des problèmes dressés, nous la fournissions à toutes les universités du Canada. Les professeurs étudiaient ensuite les documents et communiquaient avec nous pour nous dire en quoi leur savoir-faire et leurs idées pourraient être utiles. Ainsi par exemple, si nous acceptions de les subventionner, en échange, les universités s'engageaient à fournir une solution précise à un problème précis. C'est très différent de partir d'une idée abstraite qu'on essaie de faire accepter par l'industrie. Dans notre cas, lorsque nous faisons le choix du travail à faire effectuer, nous envoyons aussi un représentant de l'industrie pour qu'il serve de consultant auprès de l'universitaire. Cela signifie que le travail fondamental s'applique directement à la solution d'un problème qu'on doit régler.
M. Roy Cullen: Cela ressemble à une analyse de cas ou de rendement. Est-ce bien cela?
M. Jack Pasternak: On pourrait dire cela. Ainsi par exemple, la compagnie nous dira peut-être qu'elle souhaite fabriquer un prototype mais qu'elle ne dispose pas de suffisamment de données ni d'idées neuves dans le domaine concerné, et elle nous demande alors ce que nous pouvons faire pour l'aider. Nous nous tournons donc vers les universités pour demander si on y trouve quelqu'un qui a proposé l'idée dont on aurait besoin pour résoudre le problème que nous a communiqué l'entreprise.
M. Al McDowell: Ce que nous n'avons pas mentionné ici—mais je pense que c'est dans la brochure—c'est que toute la propriété intellectuelle appartient aux chercheurs et à l'université, selon la façon dont ils fonctionnent. Ce qui se passe, c'est que si l'on doit avoir une série de brevets, ils passeront par l'administration de la recherche de l'université et par certaines de ces sociétés dont vous avez parlé. Nos membres auraient alors un droit de premier refus, c'est-à-dire qu'ils seraient en mesure de soumissionner à côté d'autres personnes.
M. Jack Pasternak: Et si nos membres n'étaient pas preneurs, on passerait à ce moment-là à quelqu'un d'autre.
M. Roy Cullen: Merci.
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Wilfert, vous avez six minutes.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Madame la présidente, je remercie toutes les personnes qui sont venues nous rencontrer. Je dois dire qu'à mon avis l'élaboration d'une solide stratégie d'innovation est ce qu'il y a de plus important pour nous. Le ministre de l'Industrie l'a évidemment bien montré avec la stratégie qu'il a annoncée en février.
J'aimerais parler de plusieurs choses, madame la présidente. Tout d'abord, le rapport de l'OCDE—celui qui est sorti au début du mois avec les sept indices—accorde une note très élevée au Canada pour l'économie. Le secteur dans lequel nous demeurons toujours faibles, c'est celui de la recherche et du développement, et vous y avez fait allusion. C'est évidement un domaine dans lequel le ministre a dit que nous devons faire mieux, que nous devons doubler nos investissements pour parvenir au rang des cinq premiers pays au monde pour la R et D.
Monsieur Paton, j'ai été frappé par ce que vous avez dit à propos du cadre de politique pour l'innovation, quand vous avez parlé en fait de notre absence dans ce domaine. Est-ce que cela veut dire que vous n'êtes pas d'accord avec ce qui a été annoncé en février? Quelles sont les initiatives ou les mesures que vous suggéreriez pour améliorer cette stratégie? J'aimerais aussi revenir à une remarque qui a été faite à propos de la formation, qui permettrait d'obtenir des crédits fiscaux dans le cadre de l'assurance-emploi ou de l'impôt sur le revenu. Je trouve que c'est une démarche très intéressante que nous devrions examiner de près.
Je suis personnellement convaincu qu'il faut nous assurer que les structures fiscales qui s'appliquent aux sociétés créent des conditions favorables, notamment quand nous nous comparons à nos concurrents du G-7. Il y a aussi le problème—et je ne m'y attarderai pas aujourd'hui, mais c'est un de mes dadas—de la propriété étrangère au Canada et le fait qu'il y a beaucoup de contrôle étranger... Je ne parle pas de l'investissement étranger. Je suis entièrement favorable aux investissements étrangers. Mais quand ce ne sont pas des Canadiens qui sont propriétaires des sociétés, une bonne partie de la recherche et du développement se fait au sud ou ailleurs, et cela a des répercussions.
J'aimerais bien entendre très rapidement vos commentaires sur ces divers points.
» (1750)
M. Richard Paton: Je vais commencer.
Tout d'abord, nous sommes tout à fait favorables à la stratégie d'innovation. Il est très important d'axer notre pays sur l'innovation et nous avons rédigé un document sur cette stratégie.
J'aimerais revenir à l'un des postulats de la stratégie d'innovation qui consiste à dire que si l'on fait de la R-D, cela entraînera une croissance de l'entreprise, et que c'est une sorte de processus linéaire. Or, quand nous avons discuté avec nos entreprises, leurs représentants nous ont dit que s'ils réussissaient sur le plan économique, ils feraient de la R-D. C'est très intéressant. Ce n'est pas tout à fait la même façon de voir les choses.
Par conséquent, certaines des questions de politique que j'ai évoquées s'inscrivent dans le contexte du succès économique. Il y a notamment la réglementation. S'il faut plus de temps pour commercialiser un produit au Canada qu'ailleurs, si cela coûte plus cher—et pour ce qui est du recouvrement des coûts, M. Cullen a un excellent projet de loi—s'il y a plus d'obstacles à la commercialisation de cette technologie et si l'on ne bénéficie pas des stimulants fiscaux, des exonérations et de l'amortissement dont on a parlé ici, on est un peu en position d'infériorité dans un pays où le marché est assez limité, où le marché intérieur est restreint et où une bonne partie des activités des sièges sociaux se déroule à l'étranger. Or, il est clair que c'est la réalité à laquelle sont confrontées nos entreprises.
Pour contrer ce handicap, je crois qu'il faut prendre tout un ensemble de mesures pour que notre pays devienne non seulement un pays avantageux pour faire de la R-D, grâce au crédit d'impôt pour R-D, ce qui est un avantage, mais aussi pour lier cette recherche et ce développement à la commercialisation et à la mise au point des produits. Je crois que nous sommes très faibles sur cet autre plan.
Dans le cas de la notification de nouvelles substances, franchement, quand on explique aux autorités d'Environnement Canada que c'est un obstacle à l'innovation, elles s'en moquent: «Cela ne nous regarde pas, ce n'est pas notre problème. C'est au ministère de l'Industrie de s'en occuper. Nous, nous nous préoccupons de la protection». Nous sommes d'accord pour avoir les deux, mais cela veut dire que la stratégie d'innovation ne doit pas être une stratégie d'Industrie Canada. Il faut que ce soit une stratégie dans laquelle le gouvernement lui-même soit partie prenante en adaptant l'ensemble de ses politiques à cette stratégie.
M. Bryon Wilfert: Monsieur Paton, vous voulez dire qu'il faudrait une démarche pluriministérielle plus poussée?
M. Richard Paton: Absolument, et j'ai constaté avec plaisir qu'il en était légèrement question dans le discours du Trône. Mais j'ai dirigé dans le passé la réforme de la réglementation au gouvernement fédéral et je sais à quel point c'es difficile. C'est très difficile. Il faudrait que le gouvernement fasse un effort colossal pour véritablement améliorer ce contexte réglementaire.
M. Bryon Wilfert: Bien, merci.
Madame la présidente, je crois que M. Young a soulevé la question de la formation et des régimes de crédit d'impôt.
M. Alan Young: Oui, COMPTIA a aussi soumis au gouvernement un texte sur la stratégie d'innovation, mais certaines des questions qui ont été abordées au comité aujourd'hui étaient aussi mentionnées dans notre exposé sur l'innovation. Nous pensons qu'elles ont été bien accueillies mais nous souhaitons passer ces idées auprès de divers publics.
En ce qui concerne le crédit d'impôt pour formation, c'est une notion que d'autres gouvernements ont déjà examinée. À notre avis, nous pourrions trouver une formule typiquement canadienne. Nous essayons en fait de semer l'idée que ce serait quelque chose d'intéressant à expérimenter, qu'il faudrait essayer d'accroître la formation ici. Nous essayons de montrer qu'il y a une façon de le faire. Regardons ce que font les autres et élaborons notre propre formule. On pourrait intégrer toutes sortes de variables dans un régime de crédit d'impôt pour formation, par exemple le nombre d'employés qui seraient couverts et le montant total qui serait consacré à cette entreprise. On pourrait tenir compte de toutes sortes d'autres variables.
Nous pensons donc que cela mérite d'être essayé, et nous serions heureux que le comité manifeste un intérêt pour l'idée de cette notion de crédit d'impôt pour la formation et pour une collaboration avec d'autres gouvernements pour la mettre en oeuvre.
» (1755)
M. Bryon Wilfert: J'y reviendrai lors d'un autre tour.
Très rapidement, je m'interrogeais sur quelque chose à propos de quoi vous avez certainement des informations. Vous avez parlé du Sénat américain et de la Chambre des représentants. Je suis d'accord avec votre idée d'une démarche typiquement canadienne. Vous avez une idée de ce que cela coûterait?
M. Alan Young: Encore une fois, tout dépend des variables, du montant du crédit et du nombre de personnes auxquelles cela s'appliquerait. Sans nécessairement proposer cette solution, je vous dirais que l'Arizona, qui a un crédit d'impôt actuellement, a plafonné le montant consacré à ce crédit. C'est une stratégie qu'on pourrait adopter.
M. Bryon Wilfert: Avez-vous dit que vous nous aviez communiqué cette information ou que vous alliez le faire?
M. Alan Young: Nous l'avons communiqué dans l'exposé détaillé que nous avons remis au comité.
M. Bryon Wilfert: Il faudra que j'examine cela.
À propos des approbations, très rapidement, l'un des problèmes—et l'industrie pharmaceutique est un parfait exemple—est que les provinces donnent leur approbation et que le gouvernement fédéral doit aussi donner son approbation, et que tout cela en fin de compte nous coûte des milliards de dollars de plus. On fait intervenir trop de gouvernements. Il faut donc supprimer cela. Je constate que les premiers ministres ont convenu avec le gouvernement fédéral de n'avoir qu'une seule approbation, en théorie du moins. Pourquoi avons-nous des formules d'approbation différentes? La procédure prend plus longtemps en Ontario, où la situation est la pire, comparée à la Colombie-Britannique. Pourquoi avons-nous cela? Si Ottawa donne son approbation, cela devrait suffire. Il devrait y avoir une seule formule d'approbation des médicaments au Canada, sinon...
Donc je crois que c'est un élément du problème que vous soulevez. En tant qu'ancien responsable de la réglementation, je vous demanderais...
M. Richard Paton: ...[Note de la rédaction: Inaudible]... comparativement à d'autres pays?
M. Bryon Wilfert: Oui, tout à fait. Les gens qui nous regardent de l'extérieur doivent se dire que c'est un régime complètement absurde.
Merci.
La présidente: Mme Minna, puis M. Burton de nouveau.
Mme Maria Minna: Merci.
J'aimerais revenir à la question de la productivité et aussi de la formation. Dans votre exposé, vous liez la productivité au problème de l'imposition du capital et à d'autres régimes de réglementation, mais si je ne me trompe, la productivité est aussi affectée par le manque de souplesse de la main-d'oeuvre, le roulement et la difficulté d'utiliser la main-d'oeuvre de façon plus globale. Monsieur Young, vous avez parlé de l'assurance-emploi et du crédit d'impôt dont nous venons de discuter. Vous dites qu'on pourrait défalquer le coût de l'assurance-emploi: comment feriez-vous? Un autre groupe en a parlé précédemment, mais d'une manière un peu différente.
M. Alan Young: Nous avons suggéré plusieurs options de financement des coûts du crédit d'impôt pour formation. On pourrait se servir de la Loi de l'impôt sur le revenu pour proposer un crédit d'impôt direct. Une formule plus originale consisterait à partir des primes d'assurance-emploi que paient les employeurs et à encourager ces employeurs à inciter leurs employés à suivre une formation, moyennant quoi l'employeur pourrait défalquer le coût de cette formation de ses primes d'assurance-emploi. Cela pourrait être une formule de financement du coût de la formation.
Mme Maria Minna: Des représentants syndicaux qui sont venus ici récemment ont aussi suggéré qu'au lieu de réduire les cotisations d'assurance-emploi, on les laisse à leur niveau actuel et qu'on réserve le montant de la différence pour financer la formation et l'apprentissage, ce genre de chose. Mais ce n'est pas de cela que vous parlez, n'est-ce pas?
M. Alan Young: Pas exactement. Comme je l'ai déjà dit, nous avons proposé quelques idées différentes Nous essayons simplement de semer cette réflexion pour convaincre les gens que cela mérite d'être approfondi, afin qu'ils travaillent ensuite avec vous et d'autres groupes à mettre au point les détails de ce projet.
¼ (1800)
Mme Maria Minna: Quel est le rôle des entreprises à cet égard, quelle est leur responsabilité en matière d'apprentissage et de formation de leurs employés, dans quelle mesure doivent-elles s'occuper de recycler, d'améliorer, de former leurs employés, etc., mais aussi s'occuper des nouveaux programmes d'apprentissage pour les autres employés dont elles ont besoin? Quand j'étais au Comité permanent de l'immigration, nous avions un problème—et mon collègue M. Bélanger s'en souvient aussi—avec les entreprises de technologies de l'information. Nous voulions essayer d'accroître le nombre de nouveaux venus dans cette industrie, de faciliter l'entrée au Canada de personnes spécialisées et formées. Mais quand j'en ai discuté avec l'association des travailleurs de l'infotechnologie, ils m'ont laissé entendre qu'ils n'avaient pas de formation, que cela n'intéressait pas les entreprises, qu'ils n'étaient pas tellement bien payés comparativement aux travailleurs d'autres pays. Alors quelle est la responsabilité des entreprises de ce secteur à cet égard?
M. Alan Young: Les employeurs ont manifestement une part de responsabilité et ils doivent encourager leurs employés à se former. Je crois que l'idée d'un programme d'apprentissage de l'infotechnologie que nous avons proposé est nouvelle pour le Canada, mais qu'elle est déjà à l'étude aux États-Unis. Je ne vous propose pas d'adopter les yeux fermés tout ce qui se fait aux États-Unis ou dans d'autres pays, mais je crois que nous avons tout intérêt à nous tenir au courant des nouveautés intéressantes dans les autres pays. Évidemment, les États-Unis étant notre voisin immédiat et le pays de destination d'une grande partie de nos exportations, nous devons être bien au courant de leurs stratégies. Je crois que le crédit d'impôt pour formation et les stages d'apprentissage de l'infotechnologie sont des formules que nous devrions envisager.
Mme Maria Minna: Comprenez-moi bien, je suis pour l'apprentissage et je pense que nous devons aller beaucoup plus loin à cet égard au Canada dans différents domaines et pas seulement dans celui-ci. Je pense que nous n'avons pas assez de programmes de ce genre, que nous n'avons pas suffisamment d'objectifs nationaux en matière d'apprentissage. Je pense qu'il faudrait nous pencher sur cette question.
Monsieur McDowell, dans le cas de l'ESTAC, j'ai l'impression que le partenariat que vous aviez avec l'industrie et le gouvernement fonctionnait très bien, mais que s'est-il passé exactement, pourquoi est-ce tombé à l'eau? J'ai l'impression que vous êtes à une croisée des chemins.
M. Al McDowell: À mon avis, à la fin de 1999, c'est-à-dire au moment où les rallonges du gouvernement fédéral se sont terminées, nos membres ont continué à affirmer leur intérêt, de même que certains organismes gouvernementaux, comme Industrie Canada, et le fait qu'il y avait encore une certaine activité, a laissé croire à tous qu'on pouvait s'attendre à recevoir des fonds supplémentaires. De plus, au fil de l'an 2000 et de l'an 2001, nous avons cherché à intéresser à nos activités des PME, petites et moyennes pour qu'elles deviennent nos membres. Or, au moment où l'économie s'est mise à ralentir, ces entreprises ont commencé à avoir des difficultés financières et se sont retirées de l'ESTAC, laissant ainsi sans commanditaires toute une série de nos projets. Celles de nos entreprises membres qui étaient parmi les plus importantes ont même songé à fermer boutique afin de rentabiliser de leur mieux les projets restants, car, d'après elles, la situation ne pouvait qu' empirer et ce serait au dernier survivant à ramasser la note.
J'ai peut-être oublié de mentionner que nous ne subventionnons que des étudiants, de deuxième et de troisième cycle, et que tout l'argent sert à payer leurs cours, leur équipement et leurs frais de voyage. Étant donné que nous engageons d'habitude nos fonds sur deux ou trois ans, il était important pour nous de bien réfléchir à la façon de terminer les projets de manière à ne laisser aucun d'entre eux en rade.
Ai-je répondu à votre question? Voilà, au fond, pourquoi cela s'est terminé.
Mme Maria Minna: Mais en 1999 la reprise économique s'amorçait. C'est le moment que vous avez choisi pour le faire qui m'a semblé bizarre.
M. Jack Pasternak: Pas du point de vue de certaines de nos petites entreprises membres. Elles ont dû déclarer forfait, même si elles nous avaient promis... Je vous explique comment nous fonctionnons : tous nos membres nous avaient promis de demeurer à bord pendant au moins deux ans, puisque nos projets s'étalaient sur une durée de un à trois ans, c'est-à-dire en moyenne sur deux ans. Autrement dit, tout se passait bien si toutes les entreprises restaient à bord pendant deux ans, comme elles l'avaient promis. La difficulté, c'est qu'elles ont déclaré forfait avant.
Mme Maria Minna: Il me semble que, une fois que le protocole de Kyoto aura été ratifié, votre contribution sera d'autant plus importante et que le type de travaux de recherche dans lesquels vous vous spécialisez aura toute son importance, surtout dans la technologie de pointe.
M. Jack Pasternak: C'est justement la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui. Si vous pouvez nous aider de quelque façon que ce soit, nous vous en serions extrêmement reconnaissants.
M. Al McDowell: Il y a beaucoup de nos projets dont nous n'avons pas encore parlé. J'ai déjà expliqué que nous subventionnions plus de 200 projets, dont plusieurs portent sur une croissance accrue des arbres au moment du reboisement, de façon que les nodules fixent l'azote dans le sol. Ce sont des projets qui réussissent bien avec les aulnes rugueux, notamment.
Nous avons certains projets qui portent sur les membranes, sur des façons améliorées de retirer le dioxyde de carbone des gaz effluents, etc. On parle beaucoup ces temps-ci de la possibilité de retirer le dioxyde de carbone et de l'enfouir sous terre, mais cela nécessite beaucoup de recherches dans ce domaine. Nous avons également des gens qui travaillent sur le perfectionnement de la distillation qui permet foncièrement de faire monter un gaz le long d'une cheminée et de le faire redescendre, mais qui exige beaucoup d'énergie. Environ 10 p. 100 de l'énergie utilisée dans l'industrie chimique sert à la distillation et toute amélioration apportée à ce système pourra aller dans le sens du protocole de Kyoto.
Mme Maria Minna: Merci.
¼ (1805)
La présidente: Merci beaucoup.
Commençons le deuxième tour par M. Burton; vous avez six minutes.
M. Andy Burton: Pour en terminer avec M. Paton, et pour revenir aux répercussions du protocole de Kyoto et aux préoccupations qu'il soulève, j'imagine qu'on peut dire que toutes les industries du Canada s'inquiètent réellement de ce que le protocole peut avoir comme conséquence pour elles, n'est-ce pas?
M. Richard Paton: Oui.
M. Andy Burton: Merci.
Je m'adresse maintenant à tous les témoins. On a beaucoup parlé de taxation, de provisions pour amortissement, d'impôt sur le capital, etc. Prenons l'Irlande par exemple et regardons un peu ce qui s'est passé et la façon dont le gouvernement a réduit les taxes de même que la paperasse, ce qui a eu pour effet de stimuler l'économie du pays. À votre avis, cette méthode pourrait-elle servir au Canada? Dans l'affirmative, comment suggérez-vous que nous nous y prenions? Et ce n'est qu'un exemple.
M. Richard Paton: Je suis revenu il y a environ trois semaines d'Irlande où j'ai rencontré nos homologues de l'industrie chimique. Je ne proposerais pas cette façon de faire pour le Canada, car ce serait impensable. Là-bas, le taux d'imposition des sociétés est de 10 %, mais sans imposer de taxe fédérale ni de taxe provinciale. De plus, le gouvernement a fait beaucoup de travail sur sa réglementation. Quelles en ont été les conséquences?
Avant, nous étions ceux qui exportaient le plus aux États-Unis. Je pourrais demander à mon collègue David Shearing de vous expliquer quelles ont été les conséquences sur les exportations.
M. David Shearing (directeur principal, Développement économique, Association canadienne des fabricants de produits chimiques): Le Canada était de tous les pays du monde celui qui exportait le plus de produits chimiques vers les États-Unis. Mais aujourd'hui, c'est l'Irlande qui monétairement occupe cette position, et ce revirement s'est produit au cours des dernières années.
M. Richard Paton: C'est l'exemple de ce que peut faire tout un train de mesures politiques. Les Irlandais se sont concentrés sur ce qu'il leur en coûtait de faire des affaires et ils ont remanié leur cadre de réglementation, ce qui leur a permis de positionner avec beaucoup de soin leur industrie. L'Irlande, n'a pas de très grandes réserves d'énergie, de sorte que l'on n'a pas choisi une industrie qui exigeait beaucoup de moyens énergétiques ou beaucoup de chauffage pour produire. On a choisi l'industrie pharmacochimique, laquelle est liée à la fabrication des médicaments et est beaucoup moins énergivore.
Ce pays n'occupait aucune place dans l'exportation en 1970, mais 25 ans plus tard, il est devenu le plus grand exportateur de produits chimiques aux États-Unis. Ce secteur représente la partie de l'économie irlandaise qui croît le plus rapidement et sa plus grande source d'emplois.
M. Andy Burton: Si les autres témoins ont des remarques à faire, madame la présidente, j'aimerais les entendre.
M. Graham Hoey: J'ajouterais aussi que l'Irlande a instauré toute une série d'incitatifs. Ainsi, elle a opté pour un taux d'imposition de 10 p. 100 applicable à différents types d'industries. Par exemple, dans la région de Shannon, on impose un taux d'encouragement de 10 p. 100. De plus, on a choisi d'imposer un taux d'encouragement pour l'utilisation de la propriété intellectuelle. L'Irlande a dû hausser ses taux d'imposition considérablement en raison des pressions qu'exerçait sur elle l'Union européenne afin qu'elle se conforme davantage à ce qui se faisait dans les pays de l'UE. Toutefois, l'Irlande a choisi de maintenir des taux d'encouragement pour certaines industries, notamment ce secteur de l'industrie chimique et la propriété intellectuelle. C'est un système sélectif, mais qui est couronné de succès.
M. Andy Burton: Monsieur Paton, croyez-vous qu'un système sélectif de ce genre pourrait réussir au Canada, ou plus simplement encore, une diminution beaucoup plus générale des taxes réussirait-elle?
¼ (1810)
M. Richard Paton: Je ne vous encouragerais pas à opter pour un système sélectif, car il entraînerait des distorsions dans l'économie. Je prônerais plutôt une baisse généralisée du taux d'imposition à 17 p. 100, comme l'a réclamé notre coalition, et puis je laisserais les industries se débrouiller. Je crois que vous constateriez que tout le monde en profiterait : le secteur des services, celui de la technologie de l'information, et l'industrie manufacturière.
Pour revenir à l'Irlande, il faut savoir qu'il ne se faisait pas de R-D avant l'expansion de cette industrie. C'est tout récemment que l'on a commencé à faire des travaux de R-D avec les universités. On a d'abord instauré les incitatifs pour créer de la croissance, et maintenant que la croissance existe et que l'on a fait de l'argent, on s'associe maintenant aux universités.
La présidente: Il vous reste une minute, si vous voulez.
M. Andy Burton: Non merci, madame la présidente.
La présidente: Merci.
M. Cullen, suivi de M. Wilfert.
M. Roy Cullen: Merci, madame la présidente.
Monsieur Paton, je vous remercie d'avoir appuyé mon projet de loi d'initiative parlementaire qui vient d'être tiré.
M. Richard Paton: C'est ce que j'ai entendu dire.
M. Roy Cullen: Maintenant, il s'agit de le faire mettre aux voix.
Lorsque j'étais dans ma circonscription, il y a de cela une ou deux semaines, j'ai rencontré les représentants de BASF Canada dont la maison mère se trouve dans ma circonscription. Ils m'ont longuement parlé de la nouvelle procédure de notification des substances. Ils devaient d'ailleurs m'envoyer quelque chose là-dessus, et j'espère le recevoir sous peu. Cela fait déjà plusieurs mois que je m'intéresse à la question. Les choses ont bougé quelque peu, mais on a l'impression que cela pose toujours des problèmes. On a l'impression qu'on se fait avoir deux fois. Vous pourriez peut-être nous expliquer pourquoi cette nouvelle procédure de notification des substances vous cause des difficultés.
M. Richard Paton: Bien sûr, et nous avons déjà adressé à Industrie Canada nos commentaires précisément sur cette question évoquée dans le document sur l'innovation.
Toute nouvelle substance chimique utilisée au Canada doit être examinée et approuvée avant d'être inscrite sur une liste, et l'examen se fait en plusieurs étapes. Il est intéressant de noter que ces étapes font l'objet d'un recouvrement des coûts, ce qui est très différent de ce qui se passe aux États-Unis, là où l'industrie fait les tests sans qu'il y ait recouvrement des coûts auprès du gouvernement.
Ce qu'il est important de noter au sujet de cette nouvelle notification des substances en matière de recouvrement des coûts, c'est que dès lors que le produit chimique est homologué, n'importe qui peut le produire. C'est bien différent de ce qui se passe avec les médicaments, pour lesquels il faut une licence ou un brevet, peu importe, avant d'avoir le droit de les utiliser ou même de les vendre. Pour la totalité de la procédure d'examen en vue de l'homologation, cela peut coûter jusqu'à 200 000 $ ou 300 000 $.
Imaginons-nous que la compagnie A veuille utiliser un produit chimique donné; si la compagnie B veut l'utiliser elle aussi, elle n'a qu'à attendre que la compagnie A fasse les démarches en vue de l'homologation, ce qui lui permettra d'attendre les résultats les bras croisés avec 300 000 $ dans sa poche. Il faut savoir que beaucoup de ces produits chimiques sont ajoutés à des produits pour les assouplir, en changer la couleur, leur donner une texture différente, peu importe. Comme le marché est très restreint, vous comprenez que 300 000 $ peut représenter votre taux de rendement pendant quatre ans! Voilà pourquoi les compagnies intéressées se demandent à juste titre s'il vaut vraiment la peine qu'elles fabriquent le produit au Canada, alors qu'il leur suffit de le fabriquer aux États-Unis, de l'ajouter au produit initial et de le ramener au Canada.
De plus, et cela est particulièrement le cas dans les industries de type pharmaceutique, le temps, c'est de l'argent. Toute cette démarche peut prendre de un à deux ans, ce qui les empêche de conclure des transactions avec des tiers et de leur promettre qu'elles auront en main le produit en question et qu'elles pourront l'ajouter à leurs propres produits. Ceux avec qui elles font affaires peuvent bien décider de s'en passer et de faire affaires avec quelqu'un d'autre.
Vous voyez que cette démarche exige beaucoup et qu'on ne peut parler ici de grande valeur ajoutée. C'est ce qui explique qu'on pourrait vouloir, comme solution, accepter tout bonnement l'évaluation des États-Unis. Une autre solution, ce serait de permettre le recouvrement des coûts, ce qui résoudrait peut-être le problème. Une troisième solution, ce serait d'avoir un double système : d'un côté, on aurait les produits qui semblent les plus dangereux et qui doivent être réévalués plus souvent, et de l'autre, on aurait ceux qui semblent assez simples et dont l'approbation peut être accélérée.
Il doit bien y avoir des façons de résoudre le problème. Dans le cas de la BASF, je ne sais pas exactement de combien de produits il s'agit, mais cela doit être quelque chose comme 30 000, ce qui est énorme, et un grand nombre d'entre eux pourraient déjà être inscrits dans la procédure à tout moment, ce qui entraînerait toutes sortes de difficultés et de retards.
¼ (1815)
M. Roy Cullen: Merci.
J'ai une brève question.
Monsieur Young, vous avez mentionné l'entretien pré-payé. Je veux bien qu'il arrive que les règles de fiscalité et les règles de comptabilité diffèrent parfois; mais lorsque vous demandez que ces paiements soient inscrits dans le revenu pour des fins de taxation dans l'année au cours de laquelle ils ont été reçus, même s'ils doivent servir à un exercice futur, cela me semble aller à l'encontre des principes de comptabilité généralement reconnus. Si l'on regarde ce qui s'est passé chez Xerox ou WorldCom, on constate que ces deux entreprises ont commencé à avoir des problèmes parce qu'elles inscrivaient dans leurs revenus certains postes plus rapidement que nécessaire, ce qui allait à l'encontre des principes conventionnels de comptabilité.
Pourquoi, en matière de fiscalité, faut-il que si on touche un revenu, il doive être inscrit dans l'année d'imposition au cours de laquelle il a été reçu, même s'il doit servir dans un exercice futur? Je ne comprends pas.
M. Alan Young: Mon collègue Graham Hoey pourra peut-être vous expliquer plus en détail, car je ne comprends pas non plus...
Des voix: Oh, oh!
M. Alan Young: Nous sommes donc sur la même longueur d'onde.
M. Graham Hoey: C'est simple : la Loi de l'impôt sur le revenu comporte une disposition spécifique portant que ces sommes doivent être inscrites au revenu. Normalement, toute somme reçue par une entreprise doit être inscrite au revenu, mais il est aussi possible de l'inscrire comme revenu de réserve en prévision de certaines activités futures. Ainsi, si vous avez une garantie et une charge pour garantie, vous pouvez inscrire une réserve qui compense pour le revenu inscrit.
La difficulté, dans le cas de l'entreprise de logiciels, c'est qu'elle n'a pas d'échéancier précis qui l'oblige à faire certaines choses dans un délai prescrit. Il y aura bien des mises à jour plus tard, mais on ne sait pas quand ces mises à jour se produiront. Il y aura bien sûr des changements de code, mais on ne sait pas exactement quand ils seront nécessaires, et vous n'avez donc aucune façon de calculer cette réserve, ce qui vous empêche par conséquent de la réclamer comme déduction.
En bref, la Loi de l'impôt sur le revenu comporte une disposition spécifique qui vous permet la déduction. Cette disposition existe déjà depuis de nombreuses années. Elle n'a pas été incluse pour s'appliquer spécifiquement à l'industrie de la technologie de l'information, mais plutôt pour s'appliquer aux industries manufacturières ou aux autres industries qui peuvent offrir des garanties, notamment.
M. Roy Cullen: Savez-vous s'il existe des dispositions semblables ou différentes aux États-Unis?
M. Graham Hoey: Je n'en sais rien.
M. Roy Cullen: Bien, merci.
La présidente: Merci.
Pouvons-nous passer maintenant à M. Wilfert?
M. Bryon Wilfert: Le ministre des Finances dit que le Canada est un tigre du Nord et il veut s'assurer que nous continuerons de l'être. De toute évidence, certains éléments clés valent la peine d'être cités: cinq budgets équilibrés ou mieux; nous sommes le seul des pays du G-7 qui rembourse sa dette nationale, soit un autre montant de 8,9 milliards de dollars; notre performance au niveau des emplois est meilleure que celle des États-Unis à l'heure actuelle; et l'écart ne cesse de s'améliorer au niveau des questions fiscales aux États-Unis, surtout dans certains des domaines clés quoiqu'au niveau des impôts sur le revenu des particuliers, nous nous situons à peu près dans la moyenne des pays du G-7. Il y a des signes très positifs et à mon avis qui est aussi celui du ministre, je le sais, nous ne retomberons pas dans une situation déficitaire.
Tous les exposés qu'on nous faits au Comité des finances sont valables, j'en suis sûr, et valent tous la peine qu'on les financent, évidemment, ou méritent de l'aide grâce à une mesure fiscale quelconque. C'est évidemment pour cela que notre comité doit faire tellement de recommandations,mais le ministre ne peut pas toutes les retenir.
Il est évident que j'appuie beaucoup des mesures proposées aujourd'hui, y compris les mesures étapistes qui, à mon avis, sont importantes. Nous devrons envoyer un certain signal. Nous n'atteindrons donc peut-être pas les 17.% demain matin, mais si nous pouvons envoyer le bon signal et que nous continuons dans la bonne direction, je crois que c'est important.
À mon avis, il ne faudrait pas seulement nous tourner du côté des pays du G-7 mais aussi vers la Corée et le Japon pour ce qui est des questions de R-D. Comment nous comparons-nous à eux, ou même à Tawaïn sur ce plan là, compte tenu de leurs entrées de fonds.
À votre avis, laquelle des questions que vous avez soulevée devrait être placée en tête de liste, si nous ne pouvions faire qu'une recommandation... Par exemple, j'en reviens à M. Paton qui a proposé certaines choses très importantes et j'ai des préjugés favorables envers un bon nombre des questions qui ont été soulevées. Cependant, reste la question suivante: Peut-être pourrions-nous n'en recommander qu'une seule parce que nous ne voulons pas nous retrouver dans une situation déficitaire ni dans une situation où... Nous voulons pouvoir continuer de livrer la marchandise parce que je crois très fermement qu'il nous faut entretenir un climat favorable à l'investissement et à l'expansion des entreprises tout en envoyant les signaux appropriés aux consommateurs pour ramener le rapport dette-PIB à un niveau encore plus bas. Il se situe à moins de 50 p. 100 et continue de diminuer.
En résumé, qu'aimeriez-vous que l'on fasse, tout en n'oubliant pas les paramètres dont j'ai fait état, pour s'attaquer plus particulièrement aux questions de R-D et de productivité?
¼ (1820)
M. Richard Paton: Je me lance le premier. Tout d'abord, j'ai passé une bonne partie de ma carrière au sein du gouvernement fédéral à me débarrasser de ce fameux déficit alors je n'aimerais surtout pas le voir ressurgir. Je suis tout à fait d'accord avec le ministre des Finances et vous-même là-dessus. J'irais même jusqu'à dire que tout budget devrait prévoir un poste et un montant d'argent consacrés à la diminution de la dette. Alors, je suis entièrement d'accord à ce sujet.
Heureusement, nombre des propositions que j'ai faites ici aujourd'hui ne coûtent rien. Il s'agit surtout de réforme de la réglementation, de recouvrement des frais, d'un plan réaliste pour Kyoto et ainsi de suite. Cependant, s'il me fallait définir une seule priorité, je crois bien que je pencherais du côté de l'impôt sur le capital et je vais rapidement vous expliquer pourquoi. À mon avis, nous, c'est-à-dire notre pays, devrions choisir ces domaines qui encourageront probablement la croissance du revenu et de l'investissement. Donc, ce faisant, nous obtiendrons une augmentation de nos recettes. Cela ne constitue pas un coût direct pour notre économie et cela répond aux objectifs de productivité et d'innovation.
Voilà quelle serait ma priorité absolue, suivie d'une diminution au niveau du taux d'imposition des sociétés.
La présidente: Monsieur Young, allez-y.
M. Alan Young: Nous serions heureux si le comité pouvait donner suite au premier choix de M. Paton. À notre avis, une main-d'oeuvre talentueuse, qualifiée et souple est essentielle à l'innovation au Canada. Je n'ai pas vraiment fait de sondages, mais je sais que les membres de notre association pensent qu'il est important d'investir dans la main-d'oeuvre pour accroître la productivité.
La présidente: Madame Heselton.
Mme Norine Heselton: L'ACTI et ses membres sont entièrement en faveur de la réduction de la dette. Il faut avoir de l'argent pour pouvoir engager des dépenses au chapitre des programmes. Ça ne peut pas être tout ou rien. Mais s'il s'agit d'établir des priorités, je voterais pour les activités de recherche scientifique et de développement expérimental parce qu'il ne s'agit pas d'une dépense comptant; il s'agit d'un crédit d'impôt.
Il y a quelques années, une étude a été faite par le ministère des Finances, et ensuite par Revenu Canada, qui, en utilisant des chiffres très conservateurs, a démontré que pour chaque dollar de moins en impôt, on générait 1,38 $ en activités de recherche scientifique et de développement expérimental pour le pays. Si nous voulons que le Canada passe du 15e au 5e rang, il nous faut ce genre d'incitatifs.
M. Jack Pasternak: ...[Note de la rédaction: Inaudible]... la priorité à l'innovation en technologie environnementale du Canada. C'est tout à fait juste. C'est une priorité à faible coût qui nous aide à commercialiser nos nouvelles innovations tout en nous permettant de croître et de devenir autonomes. Nous étions bien lancés lorsque... Tout le monde pensait que ITEC pourrait reporter les fonds de la fin de 1999 à l'an 2000. Mais lorsque nous avons été saisis des détails du programme, nous avons constaté qu'aucun mécanismes n'existait pour le faire, et nous nous sommes retrouvés dans une impasse.
M. Bryon Wilfert: Je vous remercie tous pour vos commentaires.
Bien sûr, 10 millions de dollars est une somme relative. C'est peu comparé à ceux qui demandent 100 millions de dollars ou 1 milliard de dollars. Mais tout est relatif lorsqu'on parle de 10 millions de dollars contre 10 000 $.
Nous voulons plutôt nous concentrer sur les résultats. Quels sont les objectifs escomptés? Quels sont les résultats souhaitables? J'étais enseignant, alors croyez-moi, lorsqu'on parle d'objectifs, il faut être précis, avoir des cibles désirables, ainsi que les outils pour les atteindre.
Je suis du même avis que vous à propos de la dette. Si nous économisons 3 milliards de dollars par an en intérêt, qu'est-ce que cela représente? On peut l'utiliser pour financer des programmes sociaux ou d'autres mesures incitatives, sans toutefois oublier les soins de santé et Kyoto. Mais vous n'êtes pas obligés d'en parler aujourd'hui.
Merci beaucoup.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Wilfert.
Au nom de tous les membres du comité, je voudrais vous remercier, à titre de présidente, d'avoir consacré du temps à la préparation de vos mémoires et d'être venus aujourd'hui. Je sais que vous ne pouvez pas aborder chacune des questions soulevées dans vos mémoires, mais soyez assurés que tous ces mémoires sont distribués à tous les membres du comité. Il serait merveilleux s'il était facile de choisir les priorités, mais lorsque nous préparerons notre rapport, il sera très important d'avoir entendu vos idées sur la façon d'aider notre économie à devenir plus productrice et innovatrice.
Donc, je vous remercie tous.
Chers collègues, la séance est levée jusqu'à 9 h 30 demain matin.