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Oui, nous présumons qu'il n'y a pas de réunion mardi.
Il est donc entendu, je crois, que nous allons accueillir M. Hyer, en ayant tout au moins deux tours de questions, puis que nous allons discuter ensuite des futurs travaux du comité, si cela vous convient, monsieur Warawa. Cela devrait donner une heure, puis une autre heure.
Y a-t-il d'autres remarques sur ce point?
Comme personne ne prend la parole, je vais mettre la question aux voix.
(La motion est adoptée.)
Le président: Nous allons maintenant passer à la suite de notre réunion.
Nous accueillons M. George Dixon, vice-président, recherche universitaire, et professeur de biologie, Université de Waterloo; et M. James Barker, professeur au département des sciences de la terre et de l'environnement, Université de Waterloo également.
Bienvenue à tous les deux. Avec votre exposé, nous allons mettre un terme à notre discussion sur les sables bitumineux du Canada et les ressources en eau des régions où ils sont exploités.
Je vous prie de présenter une déclaration liminaire. Je vous saurais gré de le faire en moins de 10 minutes, chacun.
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Bonjour et merci beaucoup.
Cela me réjouit vraiment de pouvoir rencontrer les membres du comité ce matin. Je vais d'abord vous expliquer très brièvement le contexte dans lequel je travaille, puis je présenterai quatre recommandations que je formule dans le mémoire en m'inspirant des recherches que je fais sur les sables bitumineux depuis une quinzaine d'années. Ce sont, à mes yeux, les questions qu'il faut prendre en considération pour l'avenir.
Je crois comprendre que je dispose de plus ou moins huit minutes pour présenter mon exposé, et j'espère ne pas m'approcher même de cette limite pour traiter de certaines des questions qui sont en jeu ici. De fait, nous allons, Jim Barker et moi, vous résumer rapidement la question, puis nous mettre à votre disposition pour les questions que vous voudrez bien poser. D'après ce que nous avons pu voir, vous avez accueilli maints témoignages, et nous croyons que vous allez juger bon de nous demander des éclaircissements sur certains points.
Aux côtés d'un certain nombre de mes collègues, je fais des recherches sur les sables bitumineux depuis 1983, plus ou moins. Nous privilégions deux axes de recherche, dont, d'abord, ce que j'appelle les activités à l'intérieur des concessions, c'est-à-dire les recherches faites sur les terrains concédés aux pétrolières elles-mêmes — d'abord et avant tout Syncrude et Suncor, les deux seules sociétés en activité à l'époque où j'ai entamé ce genre de travail. Notre autre champ d'activité, c'est ce que j'appelle les activités à l'extérieur des concessions, qui visent à déterminer les effets de l'exploitation des sables bitumineux sur l'environnement, plus particulièrement sur la rivière Athabasca.
Le travail à l'intérieur des concessions porte principalement sur deux domaines. Il y a, premièrement, la toxicologie environnementale des substances chimiques présentes dans les eaux dont on se sert pour extraire le bitume des sables bitumineux. Ce sont principalement des acides naphthéniques — je soupçonne que vous en avez déjà entendu parler — et les hydrocarbures aromatiques polycycliques alkylés, classe de composés associés au pétrole sous toutes ses formes. Nous nous sommes aussi penchés sur la question de la salinité, en sodium et en sulfate. L'injection d'eau dans les sables bitumineux donne un mélange salin. Les sels se retrouvent dans les eaux traitées ayant servi à extraire le bitume.
Deux raisons nous motivent à faire ces recherches-là sur les lieux des concessions. Il y a le travail de toxicologie de base, d'abord, qui vise à déterminer les concentrations seuils des substances chimiques en question dont on attendrait un effet sur les organismes aquatiques. Une fois que vous avez à votre disposition un tel ensemble d'informations toxicologiques, vous pouvez commencer à fixer des normes concernant la qualité de l'eau; ce sont les PWQO, ou normes provinciales sur la qualité de l'eau, en Alberta; ou des normes fédérales sur la qualité de l'eau, par le truchement du CCME, le Conseil canadien des ministres de l'Environnement. Dans le cas des naphthénates, il n'y a pas de telles normes, étant donné que le travail toxicologique de base n'a jamais été fait.
Nous cherchons donc à comprendre les aspects toxicologiques de ces composés-là, pour le cas où il faudrait un jour établir des normes régissant le rejet des eaux dans le bassin de l'Athabasca.
L'autre raison pour laquelle nous essayons de mieux comprendre la toxicité des composés en question a trait à la stratégie dite du lac de kettle, qui consiste à déposer des résidus quelconques dans un secteur donné d'une mine épuisée, de les couvrir d'eau et d'espérer que, au fil du temps, cela donnera un système lacustre naturel. Si je dis « espérer », c'est qu'il y a eu plusieurs erreurs en ce sens, mais, le seul projet de lac de kettle aménagé à grande échelle n'a pas encore été lancé. Ce sera l'affaire de Syncrude Canada, qui a choisi pour cela son bassin de résidus de Base Mine Lake. Je crois comprendre que Suncor en est à planifier l'aménagement d'un premier lac de kettle d'ici, je pense, deux ou trois ans, probablement. À proprement parler, ce sont là des activités pilotes.
Les activités extérieures aux concessions représentent l'autre axe de recherche. Nous étudions les effets du matériel bitumineux qui se trouve dans le bassin versant de l'Athabasca. Parmi les travaux cités dans le mémoire, j'ai inclus des études concernant les effets du matériel bitumineux sur les larves de poisson et sur la reproduction des poissons sauvages dans la zone de drainage de l'Athabasca. Pour l'essentiel, ces travaux-là sont antérieurs à 2003. Ce que nous cherchons à démontrer, d'abord et avant tout, ce sont les effets du matériel bitumineux dans le bassin de l'Athabasca. Les effets en question peuvent provenir de l'érosion naturelle des dépôts de sable bitumineux dans la zone ou encore ils peuvent provenir de l'activité humaine — même si je dois dire, pour l'instant, que la présence naturelle des sables bitumineux est peut-être à l'origine de la majeure partie des effets que nous observons dans le milieu. Par contre, personne n'a vraiment approfondi cette question-là.
Voilà donc les deux axes de recherche.
Quelques grandes questions restent à examiner. À mes yeux, il existe quatre questions dont nous devons être conscients en tant que société en allant de l'avant avec l'exploitation des sables bitumineux. Comme je l'ai mentionné plus haut, certains rejets de substances chimiques dans les rivières se produisent de façon naturelle et d'autres découlent d'activités industrielles. Nous ne connaissons pas la part relative de chacune des sources en question. Nous ne savons pas si le système peut supporter la charge additionnelle découlant d'activités industrielles, au-delà des concentrations naturellement présentes. Nous n'avons pas vraiment de normes pour ce qui est des quantités qui pourraient être rejetées par le système. À certains égards, nous ne saisissons pas parfaitement les effets cumulatifs des diverses industries liées aux sables bitumineux ou des autres usages faits de l'eau sur le plan municipal, industriel et agricole dans le bassin en question.
Soit dit en passant, quand je parle d'effets dans le système, pour l'instant, je parle de l'idée de déterminer quels sont les effets que nous pouvons observer d'ores et déjà. Voilà une question. La deuxième question, une fois que vous avez établi qu'il y a des effets ou non, c'est de savoir ce qui cause les effets en question. Ils peuvent être d'origine naturelle, Ils peuvent découler aussi d'activités anthropiques. La première étape consiste à examiner le milieu d'une manière plus approfondie que nous l'avons fait jusqu'à maintenant.
L'autre point, c'est que, à mon avis, nous n'avons pas vraiment pour la zone de drainage de l'Athabasca une stratégie de gestion durable pleinement intégrée qui tient compte des eaux de surface, des eaux souterraines et de l'interaction entre les deux. Je laisserai à Jim le soin d'approfondir ce point-là.
Jusqu'à maintenant, en tant que société, nous n'avons pas consacré beaucoup de temps à étudier ce que j'appelle les effets sur les écosystèmes et la santé humaine des contaminants rejetés dans la zone de drainage de l'Athabasca à la suite de l'exploitation des sables bitumineux sur les concessions. Pour l'heure, il n'y a pas de rejet dans les eaux de surface. Vraisemblablement, il y a rejet dans les eaux souterraines de la rivière Athabasca à quelques endroits. Nous savons peu de choses de ce que j'appelle le transport et le dépôt atmosphériques des contaminants éventuels. Ce qu'il faut vraiment étudier, ce sont les effets éventuels de ce phénomène-là. Est-il possible de les quantifier? Est-il possible de définir des points de repère et des normes quantitatives?
N'oubliez pas: je vais revenir à cette première question. Pour l'instant, je ne me soucie pas particulièrement de trouver qui est responsable des effets en question. Déterminons d'abord s'il y a bel et bien des effets et, ensuite, nous pourrons nous demander d'où ils proviennent pour analyser les risques et instaurer un mécanisme de répartition.
Ma dernière observation porte sur l'accessibilité de l'information et l'assimilation de toutes les données accessibles en rapport avec les sables bitumineux. L'intégration d'activités est une question très importante. Il y a cinq ou six ans à peine, c'est un nombre relativement limité de chercheurs qui se penchaient sur ces questions. À mesure que le nombre d'exploitants a augmenté, le nombre de programmes de surveillance a augmenté aussi. En ce moment, la lacune du travail global qui se fait, c'est qu'on n'arrive pas à intégrer toute l'information et à rassembler les données en vue d'aboutir à un exercice de type « cadre décisionnel ». Il y a des données qui proviennent de la Northern River Basins Study. Le Programme de recherche et de développement énergétiques, ou PRDE, permet de produire ces informations et de financer des recherches. La CEMA permet de faire des recherches. Le RAMP permet de faire des recherches. Le réseau CONRAD permet de faire des recherches. Il y a un certain chevauchement des activités de ces entreprises, mais, souvent, l'information qui est accessible à un groupe particulier serait d'une grande utilité aux autres. Par contre, il est relativement difficile pour l'instant de faire avancer cette idée-là et d'intégrer les données en question.
Je travaille sur le sujet depuis 15 ans en collaborant avec différentes personnes et, pourtant, j'ai de la difficulté à rassembler les données se rapportant à ces champs d'action différents, même si je sais quelles sont particulièrement les données que je cherche. Si vous n'avez pas mon expérience à moi et que vous ne connaissez pas personnellement la personne qu'il faut appeler pour obtenir tel ou tel renseignement, l'exercice devient beaucoup plus difficile.
Je vais m'arrêter ici et céder la parole à Jim Barker, qui traitera un peu des sables bitumineux, pour aborder ensuite certaines questions touchant la désintégration. Je ne sais pas si vous souhaitez que nous parlions d'abord tous les deux, pour ensuite répondre aux questions ou encore...
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Merci beaucoup. C'est un plaisir de pouvoir m'adresser à vous.
Comme M. Dixon l'a dit, je suis professeur en sciences de la terre et de l'environnement à l'Université de Waterloo. Mes recherches ont porté d'abord et avant tout sur les questions liées aux eaux souterraines dans le secteur des sables bitumineux et sur l'activité dans les zones d'extraction à proprement parler. Je collabore avec plusieurs chercheurs de l'Université de Waterloo, de l'Université de l'Alberta et de l'Université de la Colombie-Britannique. De même, je suis membre du Oil Sands Mine Development and Reclamatation Review Board; par contre, je ne représente ici ni Suncor ni le comité que je viens de mentionner. Cela m'expose tout de même aux problèmes qu'éprouve Suncor en rapport avec l'eau.
Je m'attache d'abord et avant tout aux questions liées aux eaux souterraines dans la zone d'extraction. J'admets que la question des eaux souterraines revêt peut-être une importance encore plus grande dans le cas de la production in situ, mais je n'ai pas d'expérience personnelle comme chercheur dans ce domaine-là.
Comme M. Dixon l'a dit, dans les zones d'extraction, la principale source de préoccupation est la possibilité que les eaux contaminées par les procédés infiltrent les écosystèmes aquatiques et terrestres. Mes recherches portent d'abord et avant tout sur ces questions-là; je m'attache aux eaux souterraines en tant que voie potentielle vers les récepteurs de surface. Mes recherches se limitent aux étapes opérationnelles du travail fait dans les installations; elles ne s'appliquent pas vraiment au contexte de la remise en état des lieux. Cependant, je crois que nos recherches débouchent sur les informations utiles qui commencent à être intégrées à la planification des projets et à la remise en état des sites.
Vous avez entendu des témoignages sur les infiltrations provenant d'installations de gestion de résidus. Mes recherches m'ont permis d'examiner la migration et le devenir des contaminants présents dans les eaux contaminées par les procédés qui se déplacent sous la surface. Ces eaux proviennent des installations de gestion des résidus. Selon nos recherches, par exemple, c'est une faible proportion des eaux d'infiltration en question qui peut échapper au système de captage en place. L'information est transmise aux exploitants, ce qui devrait conduire à un meilleur captage des eaux d'infiltration provenant des digues et à un meilleur entretien des digues en question. Or, il semblerait que ce serait les problèmes principaux concernant les eaux d'infiltration.
Vous avez vu la digue dite Tar Island Dike et l'étang 1 de Suncor. Il est toujours bien de visiter ce secteur-là. C'est un grand secteur. L'étang 1, le plus vieil étang de l'industrie, se trouve dans le secteur de Tar Island Dike. Nous venons de voir accepter pour publication un article qui présente une analyse hydrogéologique des eaux d'infiltration de ce système de bassin et de digue, et nos conclusions correspondent à celles que les consultants de Suncor ont transmises à la société au fil des ans. Nous n'avons donc pas donné beaucoup de renseignements nouveaux à la société, selon moi. Les eaux contaminées par les procédés de Tar Island Dike infiltrent les sédiments de la rivière Athabasca. Voilà donc un problème que j'expose pour M. Dixon.
Il y a ceci d'intéressant que la modélisation numérique qui vise à rassembler toutes les données accessibles laisse croire que la majeure partie des eaux d'infiltration provient de la digue, plutôt que du bassin lui-même. La distinction n'est pas vraiment importante, étant donné que la digue est faite de sable déposé par un flux de résidus d'eaux contaminées par les procédés. Ainsi, l'eau qui s'échappe de la digue ressemble beaucoup, d'un point de vue chimique, à l'eau d'infiltration qui provient des bassins. Comme les digues s'assèchent naturellement, les effets seront moins importants au fil du temps. Si les eaux d'infiltration provenaient uniquement du bassin et que le bassin n'était jamais remis en état, on pourrait imaginer que le phénomène se poursuivrait.
Bon nombre d'entre vous avez été témoins, je crois, des efforts initiaux déployés par Suncor pour mettre en état l'étang 1. J'étais dans le secteur la semaine dernière, et je crois que la société devrait avoir achevé d'enlever les résidus fins du secteur en respectant le délai fixé cette année. De fait, elle a commencé à déposer dans l'étang en question les matières utiles à sa remise en état. Le projet progresse donc très bien.
Des étudiants au cycle supérieur, des techniciens et des professeurs de l'Université de Waterloo ont étudié d'autres secteurs où les eaux contaminées par les procédés infiltraient les eaux souterraines. Encore une fois, nos recherches visent à déterminer ce qu'il advient des substances chimiques en question tandis qu'elles se déplacent dans les eaux souterraines. Nous nous sommes concentrés sur le cas des acides naphthéniques. Nous travaillons à partir des recherches effectuées en laboratoire à l'Université de l'Alberta, à l'Université de Waterloo et à l'Institut national de recherche sur les eaux de Saskatoon.
Ce qu'il faut savoir, en fin de compte, c'est qu'il n'y a pas d'atténuation importante des principales substances toxiques que renferment les acides naphténiques dans les eaux souterraines. Les processus dispersifs habituels, qui sont faibles, ne font que les diluer.
Élément intéressant de ces recherches-là: nous essayons de déterminer si les panaches d'eaux contaminées par les procédés lessivent des métaux toxiques provenant de l'aquifère. L'idée, c'est que dans la mesure où le lessivage de métaux naturels est attribuable au panache, le responsable du panache serait le responsable du problème des métaux. Jusqu'à maintenant, des métaux comme le fer et le manganèse ont été déplacés, mais les concentrations de métaux traces toxiques, par exemple l'arsenic, ne semblent pas l'être. Les recherches se poursuivent, mais, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas eu de problèmes importants dans ce contexte.
À mon avis, l'infiltration des eaux demeurera un problème pour ces installations aux étapes opérationnelles. Pour des raisons liées à la géographie, les plus récentes installations de gestion des résidus doivent être situées carrément sur des aquifères sablonneux ou encore à proximité. La possibilité que l'eau pénètre ces aquifères-là et soit transportée ailleurs est donc plus grande. Pour contrer les cas d'infiltration et les réduire au minimum, il faudra impérativement comprendre la relation hydrogéologique entre le bassin, la digue, les eaux souterraines et les eaux de surface à proximité.
Nous admettons maintenant que le risque de contamination locale des eaux souterraines est relativement élevé; les chercheurs envisagent donc des méthodes qui permettraient de corriger le tir. Une de ces méthodes consiste à pomper l'eau et à la traiter à la surface. Cela s'apparente à ce que les pétrolières projettent, à la suite de recherches, pour traiter éventuellement les eaux contaminées par les procédés qui se trouvent dans les bassins.
Étant hydrogéologues, nous aimons autant que possible nous mettre la tête dans le sable; cela fait que nous pouvons examiner des méthodes de remise en état sur place. Le travail de recherche en est encore à ses tout débuts, mais nous voulons savoir s'il serait utile d'ajouter des nutriments ou d'autres substances chimiques aux eaux souterraines en vue d'accroître le taux naturel de dégradation.
Ce qu'il faut vraiment faire, en fait, c'est offrir aux sociétés, aux exploitants, plusieurs solutions pour remédier aux problèmes qui surviennent. Nous préférons disposer de ces options-là avant que les problèmes se présentent.
Je crois que M. Dixon a bien résumé nos préoccupations du point de vue de la recherche, et j'aimerais m'attarder à la dernière question qu'il a soulevée, soit ce que j'appelle pour moi-même un catalogue des études et des auteurs. En tant que membre du Réseau canadien de l'eau, où M. Dixon est directeur de projet, et pour avoir parlé avec mes collègues par l'entremise du réseau CONRAD, notamment, je peux vous dire que je m'étonne toujours de constater le volume des recherches qui se font sur la question de l'eau et des sables bitumineux.
Comme M. Dixon, j'ai de la difficulté à me rappeler qui fait quoi ou même à découvrir qui fait quoi. Par exemple, nous avons assisté à un exposé il y a quelques semaines. Quelqu'un de l'Alberta Research Council nous parlait de trois projets que l'organisme a entrepris depuis un an, mais je n'en connaissais qu'un, et je parle ici de collègues au Réseau canadien de l'eau. Il est difficile pour nous de déterminer quels travaux se font.
En tant que chercheur, je suis favorable au recours à des méthodes différentes. Selon moi, nous ne voulons pas d'un organisme qui nous dirait quoi faire, qui dirait qui est censé faire quoi. Par exemple, une solution universelle ne permettra pas de répondre aux besoins différents des divers intervenants. Ce que je préconise, en vérité, c'est l'adoption de mesures qui permettront de réunir les informations et de stimuler la communication entre les chercheurs. Cela nous permettra de travailler avec une plus grande efficience.
J'imagine que je pourrais dire que ma deuxième préoccupation découle de la première. Y a-t-il une tribune où il est possible de discuter des recherches? Il existe plusieurs tribunes. M. Dixon organise souvent une séance d'information là-dessus dans le contexte d'une réunion générale sur la toxicologie. Le réseau CONRAD organise une réunion. Souvent, une séance spéciale est organisée par un des divers organismes du domaine, mais, selon la tendance, les rencontres en question portent sur un sujet clairement délimité et attirent un nombre limité de personnes.
Ce qui nous paraîtrait intéressant, mais il semble qu'il soit presque impossible d'y arriver, c'est de concevoir une tribune où il serait possible pour les chercheurs de discuter et pour les intervenants de participer au processus. En tant que membre du Réseau canadien de l'eau, je dirais que notre réseau pourrait être utile en ce sens.
Je cherche donc, d'abord et avant tout, à répertorier les travaux en cours et à trouver une tribune où il sera possible de discuter ouvertement et librement des travaux en question.
Merci beaucoup du temps que vous m'avez accordé. Je suis à vous.
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Deux ou trois fois, on a essayé de centraliser les données d'une manière ou d'une autre, mais ça s'est soldé par un échec, faute de ressources humaines et de ressources financières suffisantes.
Je voudrais faire une observation à propos du RAMP. Le RAMP s'applique, depuis, je ne sais plus, 15, 20 ans. Au départ, je crois, c'était un programme de surveillance du gouvernement fédéral. Puis, la province l'a pris en charge. Je crois que c'est la province qui s'en charge encore, mais c'est un programme qui repose pour une bonne part sur les ressources financières de l'industrie, et le travail est confié à des consultants. Je n'y vois pas de problème. Je voulais simplement énoncer ce fait.
Les gens cherchent à se renseigner sur les lieux où il pourrait y avoir un effet. Ils appliquent donc une démarche ciblée. Ils peuvent examiner un secteur pendant deux ou trois ans, puis s'en aller ailleurs. Ils changent constamment d'endroits. De même, ils modifient les paramètres d'étude en fonction des exigences particulières qui se présentent. Ils changent de sites de référence au fil du temps. Si vous essayez donc de décider ce qu'il convient de faire en vous reportant à une période de 10 ans, vous allez devoir étudier un ensemble de données établi pour trois ans, ici, puis passer à un autre ensemble de données applicable à un endroit, valable, lui, pour quatre ans. On change sans cesse les méthodes d'analyse chimique. C'est donc assez difficile de mettre tout ça ensemble.
Il faut se rappeler que, au début, il y avait deux entreprises seulement et un nombre relativement faible de secteurs où on pouvait s'attendre à constater un effet. Aujourd'hui, il y a six ou sept concessions où les sociétés sont actives. On a élargi le champ d'action, et on déplace sans cesse les éléments pour des raisons liées aux ressources. C'est tout simplement mal conçu, selon moi. Voilà le problème principal. Les gens agissent de bonne foi, mais c'est comme essayer d'atteindre une cible mouvante.
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Peut-être puis-je commenter cette question-là moi aussi.
Là où il est question de financer quoi que ce soit dans le secteur des sables bitumineux ou n'importe où ailleurs, il faut savoir que les groupes qui disposent des ressources nécessaires se trouvent dans l'industrie. Par contre, pour garder mon indépendance face à l'industrie, j'ai toujours eu pour stratégie d'accepter une certaine somme d'argent de l'industrie en trouvant une somme égale auprès du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie dans le cadre des programmes de recherche et de développement coopératifs, comme on les appelle. De ce fait, la demande elle-même est assujettie à un examen par les pairs.
La deuxième mesure de protection que je conçois... Si vous jetez un coup d'oeil au mémoire que j'ai présenté, vous verrez que tous les articles cités sont des thèses soumises à un examen par les pairs par l'entremise d'un département d'université et que, dans la grande majorité des cas, ils ont été publiés dans des revues scientifiques approuvées par des collègues. C'est un deuxième élément pour confirmer.
L'autre chose qu'il faut savoir à propos des 60 substances principales comme les acides naphthéniques, les hydrocarbures aromatiques polycycliques alkylés et les dibenzylthiophènes, c'est qu'on ne peut se les procurer dans le commerce. La seule source des composés en question sous la forme dont il est question, dans l'environnement de l'Alberta, c'est les déchets d'une entreprise. Au départ, vous ne pouvez faire de recherche là-dessus si vous n'avez pas accès aux déchets en question, grâce à une collaboration quelconque avec l'entreprise. Je vais être tout à fait franc avec vous. J'ai passé la majeure partie de ma carrière à essayer de préserver mon indépendance face à cela et, pour être franc, j'ai très bien réussi jusqu'à maintenant.
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Je pourrais essayer de répondre à cela. Le bassin de l'Athabasca est relativement vaste. Pour ce qui est des renseignements de base, ils sont de deux types. Dans un cas, ils renvoient aux lacs et rivières qui se trouvent à l'état naturel dans le milieu, sans sables bitumineux au-dessous. Ils sont là, mais il n'y a pas de sables bitumineux dans les dépôts situés sous les lacs et rivières en question.
Deuxième type de renseignements de base: les systèmes à l'état naturel où il y a des sables bitumineux au-dessous. Il y aura certaines concentrations d'acides naphthéniques et d'hydrocarbures aromatiques polycycliques à l'état naturel; ces substances-là sont présentes dans ces systèmes-là. Elles se trouvent en concentrations inférieures là où il n'y a pas de sables bitumineux sous le sol. Elles se trouvent en concentrations supérieures là où il y en a, puis il y a la question des concessions, où elles sont directement tributaires des eaux utilisées dans le cadre du procédé d'extraction; à ce moment-là, elles sont très élevées.
Pour être tout à fait honnête, votre question me ramène en partie à la raison pour laquelle j'essayais de mettre la main sur les vieilles données du RAMP, ce que j'ai réussi à faire, pour essayer de voir ce qu'il y a là. Nous pourrons quand même obtenir ces renseignements en nous éloignant suffisamment des zones associées à l'extraction du bitume, en regardant des eaux souterraines ou des eaux de surface, et nous pouvons choisir une direction de vent qui ferait qu'il n'y aurait probablement pas de transport atmosphérique et de dépôt subséquents.
Idéalement, il aurait fallu commencer il y a 40 ans à accumuler les renseignements de base. L'essentiel de mon travail touche l'extraction des métaux de base — le cuivre, le plomb, le cadmium et le zinc. C'est après avoir fait d'amples recherches dans ce domaine-là que je me suis engagé dans celui des sables bitumineux. En 30 années passées à travailler dans ce domaine-là et aussi à m'occuper de litiges en matière de recherche et d'environnement, je n'ai jamais disposé de ce qui pourrait être qualifié de données de base suffisantes. Si c'est donc ce que vous cherchez, il faut savoir que c'est presque toujours inaccessible.
Je me contenterais de données valables pour quatre ans — quatre années consécutives.
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Le lac de kettle fait partie du processus de remise en état. Si vous jetez un coup d'oeil aux concessions, vous verrez que les exploitants doivent remettre à la province les terres concédées dans l'état préalable à l'installation de la mine — je crois qu'on parle de capacité biotique équivalente. Bon, je vous prie de ne pas me demander de définir ce qu'est une capacité biotique équivalente, étant donné que la plupart des gens essaient encore de savoir de quoi il s'agit.
Si on se penche sur l'activité qu'il y a là, on constate qu'il y a des options dites de terres sèches, c'est-à-dire des terres non submergées qui feront l'objet d'une biorestauration et d'un reboisement. Il y a aussi les activités associées aux zones humides, où il y a par exemple des lacs de kettle et, quand je dis lac, je parle de ce qui a probablement au moins cinq mètres d'eau. Il y aura également des marécages — c'est censé faire partie du plan —, puis des cours d'eau pour lier tous ces éléments-là. Lorsque la province convient du fait que la biorestauration est à la hauteur — le bassin en revient à l'état normal de l'Athabasca —... je n'ai aucune façon de savoir à quel moment précis cela se ferait.
Le lac de kettle renvoie à une stratégie qui consiste à prévoir un élément humide dans cette activité de remise en état des lieux. Essentiellement, on prend une mine épuisée, on dépose des résidus quelconques au fond, habituellement des résidus fins mûrs, puis on aménage une colonne d'eau au-dessus et on l'essaie — et ça peut se faire en procédant à un engraissement ou en plantant simplement — on essaie de faire en sorte qu'il y ait un film biologique entre l'eau et le sédiment. C'est ce qu'on appelle le benthos. La plupart des naphténates et des hydrocarbures aromatiques polycycliques subissent une dégradation biologique; ils se décomposent au fil du temps dans une colonne d'eau. Il y a une partie de mes travaux qui montre ce qui se passe alors et notamment la façon dont la toxicité change dans un tel cas. On a alors un lac qui comporte de l'eau dans sa partie supérieure et un film biologique d'origine naturelle au-dessus du matériel. Avec le temps, cela devrait devenir un lac naturel qui s'inscrit dans la stratégie de remise en état. La stratégie du lac de kettle, de fait, est un outil relativement courant pour remettre en état les mines de charbon à ciel ouvert aux États-Unis. La différence, dans ce cas, c'est qu'on ne dépose pas de résidus. C'est cela qui permettra vraiment de déterminer si la méthode est viable ou non. Dans le secteur des métaux de base, on emploie les lacs de kettle, mais c'est un usage qui est tout à fait différent. Ça s'inscrit dans la stratégie de remise en état.
Les bassins de résidus que vous pouvez apercevoir dans les concessions en ce moment n'y seront plus une fois le travail achevé; c'est ce que je crois comprendre. Je ne suis pas ingénieur. Je ne sais vraiment pas comment ils vont procéder pour y arriver. J'essaie seulement de déterminer la toxicité des matières en question pour donner une idée de la viabilité de ces systèmes-là.
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Monsieur Barker, pendant votre témoignage, vous avez affirmé que les chercheurs de l'Université de l'Alberta et du Conseil de recherche de l'Alberta se penchent actuellement sur quelques-unes des plus récentes recherches menées sur la question du suintement. Pourriez-vous nous indiquer le nom de certains de ces chercheurs?
Si j'estime que le n'a pas fait une enquête tout à fait exhaustive, c'est notamment parce que nous n'avons reçu aucun témoin du secteur de la remise en état, aucun véritable expert en cette matière.
À cet égard, l'un de vous deux a-t-il des noms à suggérer? Je suis certain que vous avez consulté les procès-verbaux de nos réunions et que vous avez déjà une idée des personnes qui se sont présentées devant nous. Je ne vous demande pas de me répondre sur-le-champ, mais je vous demande d'y réfléchir et, éventuellement, de transmettre votre réponse au comité. J'aimerais vraiment entendre un témoin de ce secteur.
Monsieur Dixon, à propos des poissons, après votre déclaration préliminaire, vous avez cité beaucoup d'études traitant de Perca flavescens, à savoir la perchaude. Normalement, cette espèce ne se retrouve pas dans les rivières. Je présume que les perchaudes en question se retrouvaient dans certains de ces étangs expérimentaux où des études de la sorte sont menées en milieu confiné.
M. D. Georges Dixon: Oui.
M. Blaine Calkins: À Fort Chip, nous avons rencontré des pêcheurs et des gens de la région qui nous ont fourni des informations empiriques. Je leur ai posé quelques questions à propos des maladies et d'autres choses du genre.
Vous avez déjà entendu parler des maladies lymphocytaires.
M. D. George Dixon: Oui.
M. Blaine Calkins: Vous connaissez le sarcome dermique.
M. D. George Dixon: Oui.
M. Blaine Calkins: Il s'agit d'une maladie assez répandue dans les populations de Stizostedion vitreum, ou doré jaune et dans d'autres populations de poissons.
Est-ce que l'un ou l'autre de ces maladies ou parasites entraîne des malformations ou des anomalies chez les poissons?
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En fait, en un certain sens, je ne connais pas la réponse à cette question. Mon malaise concerne non pas la nature proprement dite du travail qui est mené, mais le fait que la communauté universitaire canadienne ne dispose pas, à l'heure actuelle, des ressources humaines nécessaires pour examiner tous les autres aspects, pour ainsi dire, qui devraient, je le sais, être explorés.
À maintes occasions, j'ai indiqué à des personnes de l'Alberta quels étaient, selon moi, les besoins en recherche sur les sables bitumineux. Il y a deux semaines, j'ai présenté une conférence d'une heure et demie à des collègues d'Environnement Canada pour tenter de les encourager à s'engager davantage dans les activités liées aux sables bitumineux. Dans environ deux semaines, je présenterai une conférence par Internet à des collègues du ministère des Pêches et des Océans pour présenter une vue d'ensemble de ce qui constitue, selon moi, quelques-uns des enjeux.
Cela concerne en grande partie ce que j'ai dit plus tôt, à savoir que, jusqu'à il y a deux ou trois semaines, le niveau d'intérêt n'était pas aussi élevé qu'aujourd'hui. Ainsi, en toute franchise, j'ai souvent entrepris d'inciter des collègues à se joindre à moi pour travailler sur diverses questions pertinentes liées aux sables bitumineux.
Un consortium de recherche a été mis sur pied. Il est important de souligner que certaines des études dont j'ai parlé plus tôt ont été menées en collaboration avec des collègues d'Environnement Canada. Des gens de l'Université de Guelph, de l'Université de Windsor, de l'Université de la Saskatchewan et de l'Université de l'Alberta ont également participé à l'une ou l'autre de ces études.
Cela dit, ai-je mené une campagne dans les médias en ce qui a trait à la nécessité de subventionner davantage les travaux relatifs aux sables bitumineux? La réponse est non. En toute franchise, en ma qualité de chercheur scientifique, j'estime qu'il s'agit d'une façon particulièrement inefficace de tenter de convaincre les gens de vous fournir des ressources supplémentaires. J'ai plutôt l'impression qu'il est probablement plus fécond de disposer d'une tribune comme celle-ci ou de s'adresser directement aux personnes responsables du versement de subventions pour la recherche.
Bref, mon malaise tient non pas aux recherches scientifiques en tant que telles qui sont menées dans la majorité des cas, particulièrement celles qui sont examinées par les pairs, mais au fait que les questions qui doivent être examinées sont probablement plus nombreuses que celles sur lesquelles nous portons toute notre attention en ce moment.
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Merci, monsieur le président.
S'il me reste du temps à la fin de mon intervention, je permettrai à M. Calkins de l'utiliser.
Je souhaite la bienvenue aux témoins. En ce moment, nous étudions la question des sables bitumineux et de leurs répercussions sur les ressources hydriques.
Aujourd'hui, nous avons beaucoup parlé de la qualité de l'eau. En revanche, nous avons peu parlé des changements topographiques. Les membres du comité ont été invités à faire un survol de la région, et ceux d'entre nous qui étaient présents ont pu voir quelques-uns des travaux de remise en état qui ont été entrepris. On nous a indiqué que les travaux de remise en état allaient prendre une ampleur accrue à court terme, sans nous fournir de chiffres précis à cet égard.
Toutefois, malgré la remise en état des terres et des bassins de résidus, par exemple, la topographie change. Les terres humides ne se trouvent pas aux mêmes endroits qu'avant. Avec ces bassins de résidus et l'empilement des résidus, vous modifiez la géographie physique.
Quelles sont les répercussions des changements topographiques sur le mouvement de l'eau du bassin?
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Merci, monsieur le président.
Les témoins ont déjà répondu à un certain nombre de questions que j'avais prévu poser.
Je tiens à vous remercier d'être ici. Vos commentaires ont été très instructifs. Comme il a été mentionné, nous avons fait le voyage. Au fil des ans, j'ai appris que l'expérience sur le terrain était véritablement édifiante. Elle nous aide à comprendre les choses. Je suis heureux d'avoir appris que vous vous êtes vous-même rendu sur notre terrain à maintes reprises.
Dans le passé, j'ai fait partie d'un conseil municipal pendant 14 ans environ. Nous nous rendions souvent sur le site pour voir ce qui se passait. D'énormes monticules de gravier avaient été déplacés, et le site avait été remis en état. Au bout du compte, le site était en meilleur état qu'il ne l'était auparavant. À l'heure actuelle, on y trouve des terres agricoles très fertiles, alors que, auparavant, il y avait de gigantesques monticules de gravier. Comme vous l'avez avancé, des possibilités d'amélioration s'offrent à nous.
À l'échelon municipal, nous avons composé avec une entreprise qui aurait pu compromettre cette ressource. Les mesures de sécurité qui ont été prises pour s'assurer de la qualité de la remise en état étaient insuffisantes.
Ma première question concerne principalement la remise à l'état. Monsieur Barker, je crois que vous avez mentionné qu'il est possible que la province refuse de reprendre possession du terrain si sa remise en état n'a pas été conçue ou effectuée de façon appropriée. Qu'est-ce qui nous garantit que le travail sera mené à bien et que des mesures de sécurité seront prises pour veiller à ce qu'il soit effectué convenablement et dans le respect des normes provinciales?