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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 013 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 1er février 2021

[Énregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je vous remercie d'être parmi nous. Je m'excuse des difficultés techniques que nous avons éprouvées au début.
    Maintenant que tout le monde est là, je commencerai en disant que nous sommes ici pour effectuer notre étude préliminaire de l'objet du projet de loi C-10, qui en est actuellement à la Chambre des communes, où le débat en deuxième lecture vient de commencer. Notre comité se penchera sur tous les éléments contenus dans le projet de loi C-10 au cours de son étude. Nous tenons aujourd'hui la première séance à ce chapitre.
    Avant de commencer, je dois vous dire qu'il y a eu des problèmes d'interprétation simultanée dans d'autres comités la semaine dernière. Si vous éprouvez un problème, je vous prie de le signaler immédiatement en levant la main ou en disant que vous ne pouvez pas entendre l'interprétation. Je vous prie de ne pas crier dans votre microphone si vous n'entendez pas l'interprétation; ne faites que répéter les mots « excusez-moi » ou quelque chose du genre. Nous devons être sensibles à la réalité de nos interprètes. Comme vous pouvez bien l'imaginer, ils portent de gros écouteurs et bien sûr, le son peut être très fort quand vous criez dans votre microphone.
    Il y a une dernière chose que je dois vous dire quant à l'interprétation. Si vous n'avez pas de casque d'écoute doté d'un micro... Si par exemple, vous utilisez les petits écouteurs Apple, soit un fil sur lequel se trouve un microphone, je vous prie de bien placer le microphone près de votre bouche. De cette façon, les interprètes pourront bien vous entendre. Nous vous en remercions.
    Nous sommes un peu en retard, donc commençons sans plus tarder.
    Nous recevrons trois groupes au cours de la première heure sur l'objet du projet de loi C-10.
    Nous accueillons d'abord Hélène Messier, présidente-directrice générale de l'Association québécoise de la production médiatique; ainsi que Martin Théberge, président, et Marie-Christine Morin, directrice générale de la Fédération culturelle canadienne-française. Nous accueillons également Darius Bossé, avocat chez Power Law, Kenneth Hirsch, coprésident, et Eva Ludvig, membre du conseil d'administration du Quebec Community Groups Network, qui représentent tous trois le Conseil québécois de la production de langue anglaise.
    Je vous remercie tous et toutes.
    Nous commencerons par Mme Messier.

[Français]

    Madame Messier, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Monsieur le président et membres du Comité, l'Association québécoise de laproduction médiatique, ou AQPM, conseille, représente et accompagne plus de 160 entreprises québécoises de production indépendante qui travaillent en cinéma, en télévision et sur le Web. Je vous remercie de me recevoir pour inaugurer les travaux sur le projet de loi C-10.
    En 2018-2019, les entreprises de production indépendante du Québec ont généré un volume de 875 millions de dollars en production de longs métrages, d'émissions de télévision et de contenu Web, ce qui a ainsi créé l'équivalent de plus de 16 000 emplois à temps complet.
    Si, depuis plus de 50 ans, les producteurs indépendants du Québec peuvent offrir au public d'ici et d'ailleurs un contenu original en langue française et anglaise, c'est grâce à la détermination de quelques pionniers, comme messieurs Graham Spry et Alan Plaunt. Ils ont été les instigateurs de la commission Aird, dont le rapport de 1929 a mené à l'adoption de la première version de la Loi sur la radiodiffusion en 1932.
    Le gouvernement a alors reconnu qu'il était essentiel de renforcer l'identité nationale et d'affirmer la souveraineté culturelle du Canada en offrant une programmation locale aux Canadiens, alors envahis par les émissions de radio produites par les stations américaines. Voilà donc les principes qui ont mené à l'adoption de la première version de la Loi sur la radiodiffusion et qu'il me semble important de rappeler alors que s'amorce l'étude préliminaire du projet de loi C-10.
    Ce projet de loi constitue la première réforme majeure de la Loi sur la radiodiffusion depuis celle de 1991. Il vise l'intégration des services de diffusion en ligne canadiens et étrangers dans le cadre réglementaire, afin qu'ils participent au financement et à la mise en valeur du contenu national. Il veut également donner au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, ou CRTC, les pouvoirs nécessaires pour s'assurer du respect des règles par ces nouveaux acteurs. L'AQPM ne peut que se réjouir de cette avancée historique.
    Depuis la première loi de 1932, le paysage s'est beaucoup transformé en raison de l'avènement du diffuseur public, de la création d'institutions comme l'Office national du film du Canada, ou ONF, Téléfilm Canada, le Fonds des médias du Canada, ainsi que de la mise sur pied du CRTC et de l'adoption de mesures fiscales et financières pour soutenir l'industrie canadienne de l'audiovisuel. Cette industrie atteint maintenant un volume annuel de production dépassant les 9 milliards de dollars, un chiffre considérable qui semble démontrer que l'industrie se porte bien, mais qui cache une réalité inquiétante. En fait, 52 % du contenu audiovisuel produit au Canada n'est pas canadien, mais fabriqué au Canada par des entreprises étrangères.
    Le reste du volume de production se répartit entre la production interne des diffuseurs, qui en représente 13 % et qui comprend des émissions de sport, d'information ou d'actualité publique, et la production indépendante, qui totalise 35 % du total. Ainsi, le contenu canadien indépendant, qui assure à lui seul la diversité des émissions télévisuelles ou des longs métrages, ne représente qu'un peu plus du tiers du volume annuel de la production faite au Canada. Peut-on alors remettre en question la nécessité de mieux soutenir la création, la production, la distribution et la mise en valeur du contenu canadien?
    Pour l'AQPM, il est urgent d'agir. Les sources traditionnelles de financement déclinent, tout comme les budgets de production de contenu en langue originale française. Il faut s'assurer d'adapter l'écosystème pour permettre le développement des entreprises de production, le déploiement à plein rendement de nos ressources créatives et la pérennité de notre identité culturelle. De surcroît, les médias de masse comme le cinéma, la télévision et la musique sont essentiels pour protéger la langue française et les langues autochtones.
    Le projet de loi C-10 omet cependant des éléments fondamentaux, notamment en ce qui a trait à la protection adéquate du contenu de langue originale française, du talent canadien et de la propriété intellectuelle des entreprises de production canadiennes. Quand on parle de contenu canadien, il faut s'assurer que le projet de loi fait appel de façon prépondérante aux créateurs canadiens, que le contenu appartient à des entreprises canadiennes et que les contenus en langue originale française y occupent une place importante.
    Le projet de loi C-10 exclut des acteurs incontournables de la nouvelle réalité médiatique, comme les réseaux sociaux, les entreprises de distribution en ligne, de même que les entreprises qui fournissent des services Internet et des services de téléphonie mobile.
    L'application de la politique canadienne sur la radiodiffusion repose sur le CRTC. Il est donc le gardien des objectifs qui sont énumérés à l'article 3 de la Loi et de leur transposition dans les obligations imposées aux entreprises de radiodiffusion. Ce rôle fondamental doit s'accompagner d'un encadrement sérieux de la part du gouvernement, ce qui fait défaut dans le projet de loi actuel.
(1110)
     Le ministre du Patrimoine canadien souhaite que le projet de loi mette fin à l'asymétrie réglementaire entre les diffuseurs traditionnels et les entreprises en ligne. Le projet de loi C-10 prévoit un traitement juste et équitable pour les entreprises de radiodiffusion qui fournissent des services de nature semblable. L'AQPM craint que les diffuseurs traditionnels n'y voient une occasion de diminuer leurs obligations existantes.
    Si nous voulons que l'intégration de nouveaux acteurs dans l'écosystème de la radiodiffusion amène de nouvelles sources de revenus pour produire et mettre en valeur plus de contenu canadien en langue originale anglaise, française et autochtone, ainsi que des contenus mieux financés et de genres diversifiés, le gouvernement devrait rapidement affirmer ses intentions à cet égard.
    L'AQPM tient à préciser qu'elle est membre de la Coalition pour la diversité des expressions culturelles. Elle soutient donc les amendements proposés par la Coalition, mais elle produira son propre mémoire, qui sera acheminé aux membres du Comité dans les prochaines semaines.
    Je vous remercie de votre attention.
    Je vous remercie, madame Messier.
    Nous passons maintenant aux représentants de la Fédération culturelle canadienne-française.

[Traduction]

    Accueillons Martin Théberge et Marie-Christine Morin.

[Français]

    Madame Morin, pouvez-vous commencer?
    Je vous remercie.
    Monsieur Théberge, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Bonjour, monsieur le président et membres du Comité.
    Je m'appelle Martin Théberge. Je suis le président de la Fédération culturelle canadienne-française, ou FCCF, et je suis accompagné, comme on vient de le dire, de Mme Marie-Christine Morin, directrice générale.
    Le système canadien de la radiodiffusion se trouve à un moment charnière. Nous tenons à saluer le dépôt du projet de loi, qui constitue en soi une avancée essentielle pour la modernisation de la Loi sur la radiodiffusion du Canada. Celle-ci est cruciale pour le maintien de l'identité et de la souveraineté culturelles au pays.
    Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui devant votre comité afin de vous présenter l'essentiel de notre réflexion et nos principales demandes au sujet du projet de loi à l'étude relativement aux enjeux et aux besoins propres aux communautés de langue officielle en situation minoritaire.
    En plus d'être le porte-voix de l'écosystème des arts et de la culture de la francophonie canadienne et acadienne, la FCCF est fière de vous présenter des demandes qui font l'objet d'un large consensus. Nos efforts de collaboration horizontale ont porté des fruits. À l'instar de nos membres, nos partenaires de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, ou FCFA, et ceux du Conseil québécois de la production de langue anglaise, connu sous le sigle anglais QEPC, appuient notre position de manière formelle. Il est également important de noter que la Fédération culturelle canadienne-française s'est aussi ralliée à la Coalition pour la diversité des expressions culturelles, dont elle est membre. Finalement, sur la qualité de notre processus de travail interne, la FCCF est accompagnée par des services externes sur les plans juridique et institutionnel qui soutiennent sa position.
    Les modifications demandées par la FCCF visent quatre objectifs principaux. Premièrement, il s'agit de faire en sorte que la politique canadienne de radiodiffusion tienne compte de la situation particulière des communautés de langue officielle en situation minoritaire, ou CLOSM, ainsi que des défis et des enjeux propres au contexte linguistique minoritaire francophone, à même les objectifs actualisés du cadre législatif canadien en matière de radiodiffusion.
    Deuxièmement, elles visent à préciser la mission du CRTC pour tenir compte des besoins des CLOSM et de leurs réalités particulières.
    Troisièmement, il s'agit de renforcer les objectifs concernant le contenu original en langue française pour tenir compte de la situation particulière du français au pays.
    Quatrièmement, la FCCF veut assurer un encadrement des entreprises de distribution en ligne afin que le CRTC puisse délivrer des ordonnances de distribution obligatoire à leur égard et pour assurer une proportion équitable de contenu canadien. Il faut assurer une proportion importante d'émissions originales de langue française, en plus de garantir leur visibilité optimale.
    La FCCF mesure toute l'importance de ce qu'elle vous demande d'appuyer et de tout ce que cela représente pour le rayonnement de son écosystème artistique et culturel fragile. Les choix que l'on s'apprête à faire en matière de radiodiffusion seront déterminants pour la capacité de se voir, de s'entendre, de créer et de produire en français et, qui plus est, pour protéger la souveraineté culturelle du pays.
    La FCCF est catégorique sur la nécessité de rendre explicite l'intention du législateur à l'égard des communautés de langue officielle en situation minoritaire dans le projet de loi C-10. Notre expérience a démontré que seule une mention spécifique des CLOSM nous permettra de travailler en vue d'obtenir une participation pleine et entière de nos communautés au système canadien de radiodiffusion.
    En amont de notre comparution, la FCCF a fourni un exposé de position au greffier du Comité, qui propose le libellé précis des amendements que nous avançons, avec des explications détaillées à l'appui. Nous sommes convaincus que l'inclusion des points que nous soulevons pour modifier la mouture actuelle du projet de loi C-10 permettra une meilleure participation des communautés de langue officielle en situation minoritaire au système canadien de radiodiffusion, en plus de favoriser leur développement culturel durable.
    Je vous remercie de votre attention. C'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.
(1115)
    Je vous remercie, monsieur Théberge.

[Traduction]

    Nous entendrons maintenant les représentants du Conseil québécois de la production de langue anglaise.
    Madame Ludvig, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité permanent du patrimoine canadien. Je m'appelle Eva Ludvig et je suis membre du conseil d'administration du Quebec Community Groups Network, le QCGN. Je suis accompagnée de Kenneth Hirsch, coprésident du Conseil québécois de la production de langue anglaise, le QEPC, ainsi que de notre avocat, Darius Bossé de Power Law. Nous représentons la communauté anglophone du Québec, qui compte plus d'un million de personnes, soit la moitié de tous les Canadiens faisant partie d'une communauté de langue officielle anglaise ou française en situation minoritaire.
    Comme tout le monde, nous avons besoin de savoir qui nous sommes. Cela signifie de nous voir quand nous regardons nos miroirs culturels, plutôt que de voir d'autres reflets. Comme pour tout le monde, notre langue est un aspect essentiel de notre identité, de notre histoire et, nous l'espérons, de notre avenir. La minorité anglophone du Québec est une communauté unique et non simplement un prolongement de la majorité anglophone du reste du Canada. Nous ne sommes pas plus des Américains que les Suisses, les Belges ou les Québécois ne sont des Français.
(1120)
    Au Québec, nous sommes une minorité de plus en plus vulnérable. Il y a de moins en moins de municipalités bilingues. Nos commissions scolaires sont attaquées de toutes parts, et nos écoles ferment. Notre population vieillit. Nos emplois quittent le Québec, et nos enfants les suivent.
    En l'espace d'une génération, la production cinématographique et télévisuelle en langue anglaise, au Québec, est passée de 25 % de toute la production de langue anglaise au Canada à seulement 7 %. Si la tendance se maintient, nous pouvons prévoir la fin de la production des communautés de langue officielle en situation minoritaire au Québec et des emplois qu'elles créent.
    Pire, la disparition de ces productions au Québec réduira radicalement l'aptitude des membres de notre communauté à raconter leurs histoires distinctes et diversifiées les uns aux autres et à tous les autres Canadiens et citoyens du monde.
    Notre système de communication, qui est le pilier de notre souveraineté culturelle, n'a jamais été autant attaqué par les services de diffusion étrangers qu'à l'heure actuelle. Il n'a jamais été si facile d'être un consommateur culturel, de diffuser autant de contenu et de payer une multitude de plateformes pour cela, soit de diffuser le contenu des autres sur les plateformes des autres.
    Le projet de loi C-10 dont vous commencez l'étude est le plus nécessaire de tous les projets de loi que le Parlement ait adoptés en matière de radiodiffusion depuis la création de la SRC en 1936.
    Pourtant, les minorités de langue officielle sont totalement absentes de cette mouture du projet de loi C-10. En dépit du mandat du Parlement de favoriser la vitalité des minorités de langue officielle en vertu de la Loi sur la radiodiffusion et de la Loi sur les langues officielles, le projet de loi à l'étude ne fait même pas mention de nous. Nous vous demandons de réviser cet état de fait et de rectifier cet oubli regrettable. Les politiques canadiennes en matière de radiodiffusion doivent tenir compte des besoins des minorités de langue officielle et nous aider à assurer notre avenir.
    Pour cela, les minorités anglophones et francophones partagent la même opinion sur le projet de loi C-10.

[Français]

     La Fédération culturelle canadienne-française,

[Traduction]

    comme vous l'avez entendu, il a dit dans sa lettre au ministre:

[Français]

En plus de ces alliances sur le plan francophone, nous sommes fiers de confirmer l'appui des organismes anglo-québécois [...] aux documents de positionnement de la FCCF et à l'ensemble des amendements qu'elle propose.

[Traduction]

    Le QEPC, l'ELAN (le English-Language Arts Network) et le QCGN avons écrit dans notre lettre au ministre:
...nous souhaitons souligner que nous appuyons les amendements au projet de loi C-10 proposés par la [FCCF] le 2 décembre... Ces amendements visent à faire en sorte que les politiques canadiennes en matière de radiodiffusion prennent en compte la situation particulière des [communautés de langue officielle en situation minoritaire]... un objectif que partagent également le QEPC, le QCGN et l'ELAN.
    Au moment du dépôt du projet de loi C-10, le ministre a affirmé ceci: « Avec la modernisation de la loi, les créatrices et créateurs francophones, anglophones, autochtones, en situation de handicap, issus de communautés racisées et LGBTQ2+ auront les moyens de raconter leurs propres histoires. »
    Ce n'est vraiment pas ce qui ressort du projet de loi tel qu'il est rédigé actuellement. Les créateurs et créatrices anglophones et francophones en situation minoritaire en sont exclus.
     Pour y être inclus, nous demandons respectueusement, premièrement, que la disposition d'interprétation de la Loi sur la radiodiffusion soit élargie pour inclure expressément les communautés francophones et anglophones en situation minoritaire; deuxièmement, que l'obligation du CRTC et de la SRC de prendre des mesures positives pour stimuler la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire et favoriser leur développement soit énoncée clairement dans la Loi sur la radiodiffusion; troisièmement, que l'obligation du gouvernement de consulter les membres des communautés minoritaires des deux langues officielles soit inscrite dans la Loi sur la radiodiffusion.
     Merci.
(1125)
    Merci, madame Ludvig.
    Passons directement aux questions. Je rappelle à mes collègues de préciser à qui votre question s'adresse.
     Nous commencerons par les conservateurs.

[Français]

    Monsieur Rayes, vous avez la parole pour six minutes.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être présents aujourd'hui et de nous consacrer du temps pour nous aider à déterminer comment nous pouvons améliorer le projet de loi C-10.
    J'ai eu l'occasion de rencontrer des représentants de plusieurs organismes partout au pays, dont certains sont ici aujourd'hui, et ils m'ont fait part de leurs préoccupations relativement au projet de loi C-10.
    De prime abord, je tiens à dire que tout le monde est d'accord pour dire qu'il était temps qu'on s'attelle à la tâche et qu'on modernise la Loi sur la radiodiffusion. Le ministre a fait le choix de diviser son projet de loi en trois parties. Naturellement, il ne s'attaque pas à tout, ce qui crée de l'insatisfaction.
    Au cours des différentes consultations que j'ai menées personnellement, on m'a fait part de préoccupations relatives à la production de contenu francophone. On veut s'assurer que le projet de loi en tiendra compte pour protéger les communautés de langue française en situation minoritaire partout au pays de même que les Québécois.
    Ma première question s'adresse aux représentants de la Fédération culturelle canadienne-française et à la représentante de l'Association québécoise de la production médiatique.
    D'après vous, quels éléments clés ou amendements devrait-on apporter au projet de loi afin de vraiment tenir compte du français, que ce soit au moyen de quotas ou pas? Je ne veux pas faire un débat au sujet des quotas, mais je voudrais savoir si vous avez des recommandations.
    Les représentants de la FCCF peuvent répondre en premier, puis ce sera au tour de la représentante de l'AQPM.
    Comme je l'ai dit dans mon discours d'ouverture, nous nous concentrons sur quatre éléments. Je ne les répéterai pas, mais je vais inviter ma collègue Mme Morin à les présenter plus en détail afin que tout le monde comprenne bien ces modifications.
    Les modifications que propose la FCCF concernant la valorisation du contenu francophone visent deux objectifs. D'abord, il s'agit de favoriser la production de contenu francophone, mais aussi d'obtenir des garanties pour ce qui est de la production de contenu de langue française des communautés de langue française en situation minoritaire pour s'assurer que notre écosystème, qui est particulièrement fragile et qui a besoin d'un coup de pouce, peut bénéficier d'une protection particulière. Nous proposons essentiellement trois amendements à cette fin, dont certains correspondent à ce qui est proposé par la Coalition pour la diversité des expressions culturelles.
    Il y a eu un beau travail de collaboration au sein de la francophonie au sens large, avec nos collègues du Québec et la francophonie canadienne. Nous proposons des amendements au projet de loi qui visent à modifier le libellé des articles 3 et 5. Ces dispositions concernent la reconnaissance de l'importance de la production et de la diffusion de contenus et d'émissions originales en langue française. La modification au libellé de l'article 5 touche la création et la production de contenus dans les deux langues officielles.
    Ce sont essentiellement les modifications que nous proposons. La FCCF propose aussi l'ajout d'une disposition particulière à l'article 9 pour assurer qu'on prenne en compte notre écosystème en situation minoritaire.
    Je vous remercie.
    Madame Messier, je vous adresse la même question.
    Dans le passé, le CRTC a trop souvent interprété la reconnaissance de la dualité linguistique comme étant la fourniture de contenu en français sans se soucier de savoir si ce contenu consistait en des émissions anglophones traduites, sous-titrées ou doublées. C'est pour cela que nous prônons la création de contenu original en langue française.
    Comme Mme Morin l'a souligné, nous voulons à tout prix que cette obligation soit remise dans le paragraphe 3(1). L'article 3 est le fondement de la Loi sur la radiodiffusion. Ce sont les objectifs de la Loi et c'est ce que le CRTC doit faire respecter. Nous considérons qu'il est important que cette obligation se retrouve dans cet article. Cela inclut évidemment la production de contenu original en langue française, qui provient autant du Québec que des communautés de langue française en situation minoritaire.
    Nous voulons que ce soit mis dans l'article 5 parce que c'est la mission du CRTC. Nous voulons aussi que cela figure au paragraphe 9(1), parce qu'il touche les éléments que le CRTC doit considérer, quand il établit des conditions d'ordonnance de service à l'ensemble des acteurs de l'industrie, que ce soit les diffuseurs traditionnels ou les acteurs numériques.
    Nous voulons nous assurer que le CRTC se souvient de cet élément et qu'il l'applique. Par le passé, il ne l'a pas fait, et nous avons dû interjeter appel des décisions du CRTC pour rappeler l'importance que ce soit du contenu original de langue française, et pas seulement du contenu en français. Étant donné que des fournisseurs de services en ligne comme Netflix offrent du contenu en 30 langues, c'est encore plus important de rappeler qu'il faut que ce soit du contenu original en français.
(1130)

[Traduction]

    Ma prochaine question s'adresse aux représentants du Conseil québécois de la production de langue anglaise. Madame Ludvig ou monsieur Hirsch, si vous ne pouviez améliorer qu'un élément du projet de loi C-10, quel serait-il?
    Je mentionnerai seulement que nous voulons être reconnus dans le projet de loi C-10 pour la simple raison que nous sommes une minorité désormais menacée, pour ce qui est de la quantité des productions, et que nous voulons protéger la vitalité de nos créateurs. Je laisserai maître Bossé vous dire précisément quel élément serait le plus essentiel pour nous.
    Maître Bossé, vous avez la parole.

[Français]

    Je vous remercie de la question, monsieur Rayes.
    De façon générale, les amendements au projet de loi C-10 proposés par le QEPC, l'ELAN et le Quebec Community Groups Network, ou QCGN, visent à assurer l'encadrement de l'exercice du pouvoir discrétionnaire prévu dans la Loi sur la radiodiffusion.
    On constate trop souvent que, même si le CRTC et CBC/Radio-Canada doivent se soumettre aux obligations énoncées dans la Loi sur les langues officielles...

[Traduction]

    Très rapidement, maître Bossé.

[Français]

    L'objectif est de réitérer les engagements et les obligations du CRTC ainsi que de les renforcer dans la Loi sur la radiodiffusion pour tenir compte des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
    Madame Bessette, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Ma première question s'adresse à M. Théberge et à Mme Morin, de la Fédération culturelle canadienne-française.
    Comparativement aux producteurs anglophones, le secteur culturel francophone à l'extérieur du Québec doit faire face à des défis particuliers. Vous en avez déjà parlé.
    Pouvez-vous nous dire plus précisément quels sont ces défis et les mesures qui doivent être prises pour faire valoir le contenu issu des communautés de langue officielle en situation minoritaire?
    Les défis sont multiples. Sur le plan de la production, il faut que des engagements très précis soient pris pour stimuler la production et la création de contenu francophone issu de milieux minoritaires. Nous avons un écosystème d'artistes, d'artisans et de producteurs qui peuvent effectivement produire et créer ces contenus. Il faut encourager de façon particulière cette industrie, qui évolue au milieu d'une mer anglophone et qui est en concurrence avec des marchés également anglophones.
    Par ailleurs, la découvrabilité et la mise en valeur des contenus sont également un défi. Certains amendements que nous souhaitons voir apporter à ce projet de loi touchent la stimulation de la production et la mise en valeur de ces talents, plus particulièrement en langue française. Très peu de contenu original en langue française est offert. Nous voulons nous assurer que tout ce qui est offert peut être vu.
    Ces amendements concernent notamment la distribution obligatoire. Nous voulons nous assurer que l'offre de ces contenus est maintenue pour que cette culture francophone demeure accessible d'un bout à l'autre du pays.
    Je vous remercie beaucoup, madame Morin.
    Votre organisme souhaite depuis longtemps une meilleure réglementation des géants du Web afin que des règles du jeu plus égales soient établies. C'est là un objectif que la nouvelle loi pourrait satisfaire.
    Quels changements cette nouvelle réglementation représenterait-elle pour les intervenants du milieu culturel francophone?
(1135)
    Je pourrai laisser Mme Morin compléter mes propos, mais je serais tenté de dire que la réponse, dans ce cas-ci, est pratiquement la même que la réponse à la question précédente. Il y a la découvrabilité, à laquelle on pourrait ajouter la distribution. Nous n'écoutons plus la télévision comme nous le faisions par le passé. Il faut donc trouver une façon de rendre ces contenus accessibles.
    Vous évoquez évidemment toutes les adaptations fiscales qui doivent être faites dans le cas de ces acteurs. Il faut s'assurer que les règles du jeu sont les mêmes.
    Le projet de loi ne règle pas toutes ces questions, bien qu'elles aient été soulevées dans le rapport Yale. Je pense qu'on veut en régler certaines dans le cadre d'autres projets de loi en cours.
     Je vous remercie beaucoup.
    J'ai une dernière question à vous poser.
    Cette mise à jour de la Loi sur la radiodiffusion apporterait justement plusieurs changements positifs pour l'industrie culturelle canadienne. Selon ce que vous avez constaté, comment les intervenants du secteur culturel francophone hors Québec accueillent-ils cette nouvelle loi?
    Comme je l'ai mentionné dans mon allocution d'ouverture, nous avons effectué un travail très important auprès de partenaires anglo-québécois et anglo-canadiens, et nous avons ratissé large. Rien ne nous indique la présence d'animosité ou de commentaires contre ce que nous avançons.
    Nous reconnaissons qu'il y a des particularités, des réalités propres à certains acteurs comme les nôtres. À cet égard, il ne semble pas y avoir de problème. Il semble plutôt y avoir un consensus et une collaboration très forte.
    Permettez-moi d'ajouter rapidement deux éléments de réponse.
    Premièrement, il y a la préoccupation ayant trait au fait que nous ne soyons pas nommés de façon précise dans le projet de loi. Comme le disait M. Théberge, un très beau travail de collaboration a été fait justement pour obtenir un consensus sur cette question. De toute évidence, cela doit être réglé, parce qu'il y a une préoccupation particulière à ce sujet.
    D'après ce que nous entendons sur le terrain dans le secteur des arts et de la culture de la francophonie au Canada, il y a une réalisation de l'importance que revêt cette loi pour la souveraineté culturelle et pour l'accès à la culture en français partout au pays. Ce que vous vous apprêtez à faire dans le cadre de cette modernisation de la Loi est crucial pour la pérennité de la langue française et celle de nos écosystèmes artistique et culturel.
    Je vous remercie beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse aux représentants du Conseil québécois de la production de langue anglaise.
    La production anglophone est une partie importante de l'industrie audiovisuelle québécoise, mais nous savons que ce secteur connait une baisse de financement depuis plusieurs années.
    Selon vous, quelles étapes sont nécessaires à long terme afin d'aider la production de langue anglaise du Québec à être plus compétitive par rapport aux grands acteurs de l'industrie?
    Je vous demanderais de répondre de façon brève.

[Traduction]

    Monsieur Hirsch, vous avez la parole.
    J'ai quitté l'Office national du film il y a une vingtaine d'années pour me lancer dans le secteur privé. À l'époque, la production anglophone du Québec représentait environ le quart de toute la production anglophone au pays. Elle ne représente plus que moins de 7 % du contenu anglophone produit au Canada. Faute de réglementation, les radiodiffuseurs, qui sont pour la plupart à Toronto, ne pensent tout simplement pas à nous. Nous formons une communauté diversifiée et distincte, mais si nous voulons assurer la vitalité de nos créateurs, nous devons faire en sorte qu'ils soient reconnus dans le projet de loi C-10.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, madame Bessette.
    Monsieur Champoux, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous.
    Madame Morin et monsieur Théberge, c'est toujours un plaisir de vous voir.
    Je vais commencer par vous, madame Messier. Nous avons parlé tantôt des géants du Web, qui devront aussi contribuer à la production de contenu un jour ou l'autre.
    J'aimerais que nous parlions de la façon de procéder et du modèle que vous préconiseriez pour la distribution des sommes supplémentaires qui seront prélevées chez les géants du Web pour la production.
    Avez-vous un modèle en tête? Avez-vous une idée de la façon dont ces sommes pourraient être redistribuées de manière équitable?
    C'est difficile de répondre à cette question, parce que c'est le CRTC qui se prononcera sur les modalités de distribution de ces sommes. J'espère évidemment que la production de langue française recevra une part équitable.
    Le financement du secteur de la musique francophone représente 40 % des fonds canadiens. Généralement, les institutions comme Téléfilm Canada ou le Fonds des médias du Canada doivent se contenter du tiers des fonds. Je ne vois pas pourquoi cela devrait demeurer ainsi.
    Cela dépendra certainement du type de plateforme. S'il s'agit de plateformes qui s'adressent davantage à un marché francophone, j'imagine que les obligations seront plus importantes. Pour ce qui est des diffuseurs traditionnels, on demande que 75 % de la production soit francophone.
    Pour les géants du Web, par exemple, j'aimerais bien que les obligations représentent au minimum 40 % ou même 50 % des sommes ou des dépenses qu'on exigera d'eux. C'est vrai que la production francophone en milieu minoritaire est dans une situation particulière, mais toute la production francophone réalisée dans l'écosystème où il y a des géants du Web est dans une situation difficile.
    La production québécoise l'est aussi. Par exemple, les budgets de production actuels pour une série dramatique sont de moins de 500 000 $ l'heure, alors que la production de langue anglaise s'appuie sur un budget qui frôle facilement les 2 millions de dollars en moyenne.
    Il y a déjà une iniquité. Compte tenu de nos budgets actuels, il nous est déjà difficile de prendre notre place et d'attirer l'attention du public. Il est donc important que la production originale de langue française soit financée de façon adéquate.
(1140)
     Bien sûr, c'est le CRTC qui doit réglementer cela, mais ne pensez-vous pas que l'on devrait inclure dans la Loi des dispositions qui guideraient davantage le CRTC vers ces critères que nous voulons voir imposer, de façon à ce que ces derniers ne puissent pas être revus à la baisse ou à la hausse, selon l'humeur du moment, dans les prochaines années?
    J'ai étudié les lois adoptées en France, en Espagne et en Australie. J'ai examiné à peu près tous les modèles. Ce qui est très difficile quant à la Loi sur la radiodiffusion du Canada, c'est la disparité des acteurs. Il y a des acteurs traditionnels et il y en a des nouveaux. Parmi les nouvelles plateformes, certaines sont canadiennes et d'autres sont étrangères. Certaines d'entre elles s'adressent à un marché plutôt francophone et d'autres, à un marché plutôt anglophone. C'est donc assez difficile d'établir des quotas directement dans cette loi, comme on l'a fait en France. Bien sûr, ce serait rassurant, parce qu'on laisse beaucoup de pouvoir au CRTC. C'est pour cela que nous croyons qu'il est obligatoire de rappeler au CRTC, par le truchement des objectifs de la Loi, l'importance du contenu original de langue française. Cela permettrait de s'assurer que le CRTC attribue une part importante au contenu original de langue française et qu'il adapte cela au style de service.
    Ce dont vous parlez serait possible, mais cela exigerait, à mon avis, de retravailler complètement le projet de loi pour créer des catégories extrêmement précises d'acteurs en fonction du marché, de l'importance des revenus, et ainsi de suite. Ce serait un exercice complexe et inédit. C'est un système qu'on n'a pas choisi de mettre en place sur le plan législatif, laissant plutôt au CRTC la possibilité d'adapter sa réglementation en fonction des acteurs du marché.
    Pensez-vous qu'un système de gratification pour les meilleurs acteurs du milieu — les meilleurs élèves — pourrait être efficace?
    Dans quel sens?
    Qui seraient les meilleurs élèves? Parlez-vous de mesures incitatives à l'intention des diffuseurs?
    Oui, c'est tout à fait cela. Ceux qui en produisent davantage verraient leur part bonifiée en fonction du surplus qu'ils produisent.
    Je ne le sais pas. Il faudrait voir comment cela s'articulerait dans la Loi. Comme je l'ai dit, pour les nouveaux acteurs, il serait possible de dessiner quelque chose de très précis qui imposerait des obligations un peu plus contraignantes que ce qui existe déjà. Ce serait une nouvelle façon de penser pour le législateur canadien.
    Je vous remercie.
    Je vais m'adresser brièvement aux représentants de la FCCF.
    Selon vous, monsieur Théberge ou madame Morin, comment pourrait-on établir la juste proportion de la représentativité en matière linguistique dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire?
    Avez-vous une idée du type de modèle que l'on pourrait utiliser pour s'en assurer, en inscrivant des critères directement dans la Loi?
    J'abonderais dans le même sens que ma collègue. Ce serait effectivement un peu difficile d'inclure des quotas dans la Loi. En tout cas, ce serait peut-être un peu trop rigide, car il s'agit d'une loi qu'on ne modifie pas souvent.
    À notre avis, l'intention du législateur en matière de représentation du contenu francophone émanant aussi des communautés de langue officielle en situation minoritaire aurait avantage à être très claire. Les critères établis par le CRTC pourraient ensuite en faire état. Ce serait difficile de vous répondre en vous donnant des critères très précis.
(1145)
    Je vous remercie, madame Morin.

[Traduction]

    Je donnerai la parole à Mme McPherson pour six minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie tous nos témoins d'être parmi nous aujourd'hui. C'est très intéressant.
    Comme tous mes collègues, j'en suis certaine, j'ai participé à de nombreuses réunions sur le projet de loi C-10, et je suis emballée que nous commencions enfin à l'examiner.
    Je représente la circonscription d'Edmonton Strathcona. Vous êtes peut-être nombreux à ne pas le savoir, mais on y trouve l'une des communautés francophones les plus fortes, l'une des communautés de langue officielle en situation minoritaire les plus fortes de l'Alberta, et celle-ci constitue une partie très importante de ma circonscription.
    J'aimerais poser quelques questions aux gens de la FCCF, soit à M. Théberge et à Mme Morin. Je sais que nous en avons déjà parlé, mais j'aimerais vous fournir l'occasion d'approfondir un peu. Vous avez parlé de l'importance du projet de loi, selon vous, pour que les radiodiffuseurs, en ligne ou ailleurs, fassent la promotion du contenu original francophone, particulièrement dans nos communautés linguistiques minoritaires.
    Pouvez-vous nous parler un peu de la forme que cela pourrait prendre?
    Madame Morin, vous avez la parole.

[Français]

    L'un des éléments que nous recommandons, c'est une mention explicite des communautés linguistiques en situation minoritaire à l'article 3, où sont énumérés les objectifs de la Loi. Notre proposition découle directement de la recommandation 53 du rapport Yale, qui vise à actualiser la série d'objectifs découlant de la Loi et à faire une mention explicite des CLOSM. Si je dis « mention explicite », c'est parce qu'il y a un principe assez simple selon lequel, si on n'est pas nommé, on n'existe pas vraiment.
    Il est donc important que l'intention du législateur en la matière soit précisée, et c'est la raison pour laquelle nous allons proposer un amendement très clair qui nous mentionne, afin qu'on ne se cache pas derrière les termes « antécédents ethnoculturels » qui sont actuellement dans le projet de loi. Il s'agit vraiment de donner une considération particulière aux communautés linguistiques.
    Comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, c'est une loi importante pour nous, parce qu'elle permet la souveraineté culturelle et le rayonnement de la culture en français partout au pays. Cela revêt quelque chose de particulièrement important pour nos groupes. C'est une loi majeure pour la survie de la langue et l'identité culturelle d'un bout à l'autre du pays.
    Je me permettrais d'ajouter très rapidement qu'il ne faut pas oublier que la révision de cette loi aura des répercussions sur plusieurs autres révisions législatives et bon nombre de décisions qui seront prises dans l'avenir. Il est donc important de montrer l'exemple, d'être clair sur la visée et de nommer, comme l'a dit ma collègue Mme Morin, les CLOSM comme étant des parties prenantes de l'écosystème.

[Traduction]

    C'est fantastique.
    Puis-je présumer, alors, que nos représentants du Conseil québécois de la production de langue anglaise seraient eux aussi d'accord pour le nommer explicitement dans la loi?
    À 100 %.
    Je me disais aussi que ce serait clair.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Messier.
    Nous comprenons tous que pour toutes les personnes ici présentes, il est essentiel que tous les grands acteurs de l'écosystème culturel canadien soient inclus dans le projet de loi et qu'ils participent financièrement à la production de contenu original canadien. Je sais que vous en avez déjà parlé un peu avec mes collègues, mais pouvez-vous nous expliquer un peu plus pourquoi, selon vous, les fournisseurs de services Internet ont été mis de côté? Devraient-ils eux aussi être appelés à contribuer aux programmes comme celui du Fonds des médias du Canada, compte tenu du rôle important qu'ils jouent afin d'offrir au public le contenu dont nous sommes en train de parler?
(1150)

[Français]

    Effectivement, je pense qu'il y a des exclusions majeures dans le projet de loi. On a parlé des médias sociaux, comme YouTube et Facebook, qui diffusent beaucoup de musique professionnelle et de contenu audiovisuel. On a parlé de la distribution numérique, qui permettrait de protéger, par exemple, la diffusion de TV5 et d'Unis TV sur les plateformes numériques, ce qui aiderait notamment les CLOSM.
    Il y a aussi les services de fournisseurs Internet et de téléphonie mobile. On sait que les gens consomment maintenant beaucoup de contenu audiovisuel sur leur téléphone ou encore sur leur ordinateur. Ils utilisent donc beaucoup de bande passante. Les câblodistributeurs contribuent déjà au financement des émissions. On sait qu'il y a de plus en plus de phénomènes de

[Traduction]

    débranchement.

[Français]

    À l'heure actuelle, les gens consomment ce contenu par l'intermédiaire des services Internet ou de leur téléphone, et nous pensons que ces fournisseurs devraient apporter leur contribution. Le rapport Yale disait qu'on devait les exclure. Nous ne sommes pas d'accord là-dessus. Nous pensons qu'ils doivent être inclus, même si le CRTC décidait, par exemple, pour quelques années seulement, de prendre de l'information, de leur imposer des obligations en matière de reddition de comptes ou de leur imposer des obligations minimales un peu plus tard.
    Je pense que la Loi doit ratisser large. Elle doit aussi prévoir l'avenir et encadrer tous les acteurs du milieu pour avoir l'information adéquate et, ultimement, réglementer les activités de ces derniers.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous manquerons un peu de temps au second tour, donc je devrai dépasser le temps prévu de quelques minutes. Je serai assez strict pendant la série de questions de cinq minutes.
    Monsieur Aitchison, la parole est à vous pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je n'ai pas vraiment de questions sur la présentation en tant que telle. Je pense qu'elle était très claire et que vos recommandations sont sans équivoque. Pendant que je vous écoutais, toutefois, je pensais de plus en plus à l'ère numérique et à ce qu'elle signifie pour les Canadiens et les choix qu'ils font. Je ne sais pas trop lequel de nos témoins voudra me répondre, mais j'aimerais vous donner l'occasion de mentionner quelques éléments que vous n'avez peut-être pas encore mentionnés.
    Les Québécois en général sont-ils portés à choisir moins de productions francophones originales dans les médias qu'ils consomment? Y a-t-il une tendance générale qui se dégage, pouvez-vous nous décrire un peu la situation?

[Français]

    Les Québécois écoutent encore beaucoup la télévision linéaire et suivent leurs émissions de façon assidue. En raison de la pandémie, on a battu des records importants en matière d'auditoire. On a tendance à penser que la télévision est morte et que tout va se passer désormais sur les plateformes numériques. Pour ma part, je ne suis pas de cette école.
     Le président-directeur général de Netflix a dit que ses concurrents étaient les jeux vidéos, les médias sociaux et la télévision linéaire. Le diffuseur Netflix a même créé en France une chaîne de télévision en direct parce qu'il avait de la difficulté à attirer le public francophone. Je trouve très intéressant qu'on se concentre sur les plateformes, qui sont effectivement des acteurs importants du milieu, mais je pense qu'il ne faut pas abandonner la télévision. Les Québécois consomment encore beaucoup de leurs productions nationales.

[Traduction]

    Allez-y, madame Morin.

[Français]

    En ce qui a trait à la francophonie au Canada, beaucoup de gens visionnent des contenus par l'intermédiaire de la télévision traditionnelle, surtout parce que la large bande n'est pas accessible partout. Pendant la pandémie, toutes ces lacunes ont fait les manchettes. Le fait de ne pas pouvoir accéder à la large bande pour visionner ces contenus en ligne est une réalité que vivent certaines communautés en situation minoritaire.

[Traduction]

    C'est un très bon élément que vous mentionnez, madame Morin. Pouvez-vous nous en parler un peu plus? À un moment où l'on essaie d'élargir rapidement l'accès à Internet par la large bande au Canada rural, ce problème semble-t-il exacerbé? Le projet de loi C-10 va-t-il assez loin pour rectifier le tir?
(1155)

[Français]

    Les investissements visant la large bande sont certainement les bienvenus. Je pense que nous allons voir cette situation s'améliorer au fil des ans. Il est clair que les gens souhaitent consommer du contenu en ligne. Nous observons cela chez la jeune clientèle. Les jeunes de la francophonie au Canada ne font pas exception à la règle. Ils participent aussi à cette tendance lourde.
    Pour qu'il y ait un déplacement et que les contenus numériques soient accessibles partout au pays, les investissements visant la large bande sont une condition sine qua non.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur le président, je n'ai pas vraiment d'autres questions à poser. Je suis très heureux d'avoir pu prendre la parole. Je vous ai peut-être économisé un peu de temps dans votre horaire.
    Vous êtes bien aimable, monsieur, parce qu'effectivement, le temps me manque.
    Monsieur Housefather, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les personnes qui témoignent devant nous aujourd'hui au nom des trois groupes invités.
    Vous représentez ce qui est au cœur du Canada, soit la dualité linguistique et l'importance de produire du contenu original en français au Canada, au Québec et, un peu plus particulièrement, à l'extérieur du Québec.

[Traduction]

    De même, il importe de produire du contenu original en langue anglaise au Québec, aussi, puisqu'il y a deux minorités de langue officielle dans ce pays; on l'oublie trop souvent par les temps qui courent.
    Je veux d'abord souligner aux trois groupes que j'appuie un grand nombre des amendements que vous avez proposés et que je compte les proposer moi-même lorsque viendra le temps de proposer des amendements.
    J'ai quelques questions à vous poser.
    Dans son mémoire, le Conseil québécois de la production de langue anglaise mentionne les décisions du CRTC, qui ont très souvent des effets très négatifs sur les communautés anglophones du Québec, une tendance qui semble empirer avec le temps.
    Pouvez-vous nous toucher quelques mots de cette réalité?

[Français]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Je suis désolé d'interrompre M. Housefather, mais il n'y a pas d'interprétation. Je crois qu'il y a un problème concernant l'équipement.

[Traduction]

    Effectivement, il semble y avoir des petits problèmes. Attendez une seconde.
    Je demanderai simplement aux interprètes d'interpréter ce que je dis pendant que je parle. Je présume que c'est l'interprétation française qu'on n'entend pas, ou peut-être les deux, mais il n'y pas d'interprétation en français, en tout cas, parce que la conversation précédente avait lieu en anglais.
    Est-ce rétabli?

[Français]

    Monsieur le président, selon ce que j'entendais de l'interprète, il s'agirait d'un problème lié à l'équipement.

[Traduction]

    Je n'entends pas l'interprétation en ce moment.

[Français]

    Attendez un instant, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Mes excuses à tous.
    Il semble que la qualité du son n'était pas assez bonne pour bien entendre M. Housefather.
    Nos interprètes entendent actuellement un son très aigu, donc nous ne pouvons pas continuer avec le micro que vous utilisez. Notre technicien va vous appeler.
(1200)
    D'ici là, comme le temps nous manque toujours, je demanderai à M. Champoux de prendre le relais jusqu'à ce qu'on puisse vous redonner la parole si nous pouvons trouver une solution.

[Français]

    Monsieur Champoux, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je suis désolé pour tout cela.
    Madame Morin, je pense que c'est vous qui avez parlé de la question de la découvrabilité tout à l'heure. J'aimerais que vous nous donniez un peu plus de détails là-dessus. Pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire un peu partout au pays, je pense effectivement que c'est un sujet délicat et criant.
    Quel serait l'effet que de meilleures règles en matière de découvrabilité pourraient avoir, tant sur les diffuseurs en ligne que sur les diffuseurs traditionnels?
    Je dirais que la découvrabilité et la mise en valeur des contenus sont liées à la possibilité de trouver ces contenus sur les plateformes. Les grandes plateformes en ligne font des efforts, mais je pense qu'on doit accorder une attention particulière aux émissions originales en langue française qui sont offertes ici, si l'on veut les valoriser. On doit aussi faire des efforts supplémentaires pour les mettre en valeur et permettre aux gens non seulement de les découvrir, mais d'y accéder de façon plus directe.
    Les amendements que nous proposons visent à ajouter une mention dans la Loi qui fait allusion à cette sensibilité dont on doit tenir compte dans les conditions de licence des diffuseurs. Il doit y avoir une place pour ces contenus qui soit facilement repérable et représentative de ce qui se passe dans l'écosystème. Ce sera important, parce que cela nous permettra d'accéder à ces contenus de façon pleine et entière. On doit donc absolument en tenir compte. Cela fait partie du nouveau paysage dans lequel nous vivons. En d'autres mots, il faut produire ce contenu, mais il faut aussi offrir la possibilité de le trouver.
    Avez-vous l'impression que la spécificité culturelle des communautés de langue française en situation minoritaire au Canada n'est pas bien représentée?
    Est-ce aussi cela que vous voulez montrer à l'ensemble des Canadiens?
    C'est certainement une préoccupation sur le plan de la diversité des contenus.
    Je vous remercie, madame Morin.

[Traduction]

    Mes excuses. Je dois donner la parole à Mme McPherson pour deux minutes et demie maintenant.
    Merci, monsieur le président. Je remercie encore nos témoins.
    J'aimerais peut-être simplement demander à Mme Morin de poursuivre sa réponse à cette question, puisqu'elle a dû être interrompue, malheureusement.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, madame McPherson.
    Il faut effectivement une diversité de contenus. Quand on dit que l'on veut se voir et s'entendre, c'est justement l'une des choses qui est au cœur de la radiodiffusion. Il faut s'assurer qu'il y a une production originale en français qui met en valeur des talents issus des communautés de langue française en situation minoritaire. Il faut aussi que l'on fasse découvrir cette production aux Canadiens et aux Canadiennes. C'est nécessairement l'aboutissement du rêve.
(1205)
    Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter un commentaire.
    Toute la question de la distribution se rattache à cela. Il y a effectivement une question de production et de mise en valeur, mais Unis TV, par exemple, doit être inclus dans le forfait de base de tous les câblodistributeurs, alors que les diffuseurs en ligne — notamment EBOX et Apple TV — n'ont aucune obligation pour ce qui est de diffuser cette chaîne ou le contenu de celle-ci. Il faut donc légiférer également à ce sujet.

[Traduction]

    Oui.
    J'ai tellement de questions à poser sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire, parce qu'elles sont tellement importantes pour ma communauté. Comme je sais que nous n'avons pas beaucoup de temps, madame Messier, voudriez-vous ajouter quelque chose pour clore ces témoignages?

[Français]

    Nous n'avons pas beaucoup parlé de l'encadrement du CRTC. Nous trouvons cela important. Le CRTC a beaucoup de pouvoirs; il faut donc redonner la possibilité d'appeler des décisions du CRTC au gouverneur en conseil. On a aboli cette possibilité dans le projet de loi actuel concernant les conditions relatives aux ordonnances qui seront délivrées aux entreprises de programmation, qu'elles soient en ligne ou traditionnelles.
    Pour nous, il est important que le milieu politique ait le dernier mot afin de s'assurer que les objectifs de la Loi sont bien respectés par le CRTC. C'est l'un des points que je voulais soulever.
    Je vous remercie de la question, madame McPherson.
    Je vous remercie, madame Messier.

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, avant de clore la séance, j'aurais une minute et demie à donner à M. Housefather.
    Monsieur Housefather, êtes-vous là? Voulez-vous essayer une dernière fois?
    Oui, je vais réessayer à partir du casque d'écoute duquel je ne peux pas vous entendre.
    Je crois qu'ils pourront peut-être mieux m'entendre avec le casque d'écoute que la Chambre des communes souhaite me voir utiliser.
    Vous avez une minute et demie, monsieur. Allez-y.
    Je ne pense pas avoir utilisé trois minutes et demie, mais merci.
    J'adresse ma question à M. Hirsch. Pouvez-vous me donner un exemple dans lequel le CRTC a rendu une décision qui a eu des conséquences négatives sur la communauté anglophone du Québec?
    Je demanderai encore une fois à Me Bossé de vous répondre sur cette question juridique, étant donné que je ne suis pas avocat.
    De manière générale, je sais que ce n'est pas nécessairement explicite dans le projet de loi C-10, mais les quotas sont très utiles pour favoriser la production de notre communauté, donc nous demanderions que la SRC dépense au moins 10 % de son budget pour appuyer la production de contenu en langue anglaise au Québec.
    Nous demanderions la même chose aux grands diffuseurs qui vendent du contenu au Canada, soit 12 % de leur budget de développement, mais je laisserai Me Bossé vous répondre plus en détail sur les décisions du CRTC qui nous nuisent.
    J'ajouterai rapidement que c'est là l'objectif même de cette disposition, des modifications qui sont proposées. On veut régir l'exercice du pouvoir discrétionnaire du CRTC, par exemple, en énonçant explicitement dans la loi que les radiodiffuseurs doivent favoriser la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. C'est pourquoi le QEPC, l'ELAN et le QCGN proposent également d'imposer un devoir de consultation quand une décision risque d'avoir des conséquences négatives sur ces communautés. Ce faisant, nous essayons proactivement d'éviter des dommages, plutôt que de devoir nous battre après coup.
    Monsieur Housefather, vous êtes avocat vous-même, donc vous savez comment cela fonctionne. Quand on peut éviter les dommages, on évite les litiges, point final.
    Je suis d'accord.
    L'autre question que je souhaite vous poser, et qui me semble très importante, concerne ce devoir de consultation. Vous demandez que les communautés de langue officielle en situation minoritaire soient consultées sur toute question touchant le CRTC, mais aussi sur toute question touchant la SRC qui soit susceptible d'avoir des conséquences sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
    Je sais que quand vous avez mentionné la Loi sur la radiodiffusion la première fois, vous avez souligné qu'il y avait une disposition similaire dans la Loi sur l'immigration, qui nous oblige à tenir compte de la dualité linguistique au Canada.
    Maître Bossé, pouvez-vous nous donner d'autres exemples de dispositions similaires dans la législation?
    Le devoir de consulter relève de la jurisprudence. Il a indéniablement un fondement juridique, mais il faut le dégager de la jurisprudence. Vous devriez, par exemple, lire l'arrêt DesRochers ou l'arrêt de la Nation Haida rendus par la Cour suprême du Canada.
    Cette modification a été rédigée de manière à tenir compte de ce que la Cour suprême du Canada a expliqué dans ces décisions. Nous n'avons rien inventé. Il y a un fondement juridique et constitutionnel à cela, même si cela semble nouveau, en ce sens qu'il n'y a pas de modification de ce type ailleurs.
(1210)
    Merci aux témoins qui ont été des nôtres aujourd’hui. Nous avons pu apprendre beaucoup de choses.
    Nous allons interrompre nos travaux très brièvement avant d’accueillir le prochain groupe.
    Bonne chance à tous.
(1210)

(1220)
    Nous devons procéder très rapidement, car le temps nous presse énormément. Nous allons dépasser quelque peu l’heure prévue, soit 13 heures, heure de l’Est, mais je vais m’assurer que nous ne terminions pas trop tard.
    Nous avons éprouvé encore une fois certains problèmes avec l’interprétation simultanée. Si cela vous arrive, je vous prierais de lever la main ou de nous l’indiquer. Dans ce dernier cas, je vous demanderais de ne pas parler trop fort, car cela peut être très pénible pour nos interprètes.
    Nous recevons maintenant trois témoins. Je vais les présenter à tour de rôle avant de laisser à chacun cinq minutes pour ses observations préliminaires. Je vais être très rigoureux pour ce qui est du temps, et je vous prie à l’avance de bien vouloir m’excuser si je dois vous interrompre.
    Nous accueillons d’abord M. Ryan McAdams, éditeur de groupe pour l’Alberta Newspaper Group.
    Monsieur McAdams, vous avez cinq minutes.
    Je tiens à remercier tous les membres du Comité de m’avoir invité à prendre la parole aujourd’hui. Il s’agit selon moi d’un enjeu important auquel nous sommes tous confrontés. À la lumière de mes 35 années de travail comme intervenant et consultant dans le monde médiatique, je suis vivement préoccupé par la situation actuelle mais, surtout, par la perception qu’a maintenant le public à l’endroit des médias. Ce qui fut pour les générations passées un pilier respecté que l’on jugeait bien documenté n’est plus guère maintenant qu’un simple sujet de blague dans la culture populaire. À titre d’exemple, voici celle que j’ai entendue pas plus tard qu’hier: « Je suis maintenant assez vieux pour me souvenir d’une époque où les seules fausses nouvelles venaient du National Enquirer. »
    Je me présente devant vous aujourd’hui pour essayer très respectueusement de faire appel au bon sens des membres de ce comité dans le cadre de mes efforts pour freiner cette glissade vers une sphère médiatique qui serait encore davantage hors de contrôle. Je veux surtout vous parler en fait de la pénurie de journalisme local, un secteur où l’on a perdu beaucoup de terrain au fil des ans. Cette érosion s’est bien sûr accélérée au cours des 12 derniers mois en raison de la pandémie. Nous avons vu un grand nombre de journaux, de radiodiffuseurs et de stations de radio devoir fermer leurs portes au cours des dernières années. C’est un phénomène d’autant plus préoccupant qu’il crée de véritables déserts d’information dans certaines régions. On trouve ainsi des zones de plus en plus vastes qui sont totalement privées de nouvelles locales, sans compter que nous perdons du même coup la possibilité de communiquer avec nos différentes collectivités. Il est donc essentiel à mon avis que nous puissions compter sur l’efficacité de la Loi sur la radiodiffusion et du CRTC afin d’exercer un contrôle sur ce qui est en train de remplacer ce qu’on appelait autrefois les nouvelles.
    Nous vivons dans un environnement médiatique en transformation au sein duquel la production de nouvelles locales est, comme je l’indiquais, en perte de vitesse à cause de l’érosion des revenus publicitaires. Nous pouvons constater l’impact qu’ont les géants de la technologie et la façon dont ils siphonnent les revenus de publicité locaux et nationaux. Il suffit de considérer les fonds que le gouvernement fédéral consacrait autrefois à la publicité dans les journaux, à la télévision et à la radio. Ces sommes vont désormais en grande partie à des campagnes numériques et médiatiques sur Internet.
    Le problème, c’est que tous ces géants de la technologie et de l’Internet sont établis aux États-Unis. Ce sont donc des fonds qui quittent le pays. Ils ne sont pas réinvestis au Canada. Ils ne permettent pas de créer de l’emploi pour la main-d'oeuvre locale ou même pour les Canadiens en général, et ce sont autant de deniers publics qui s’envolent.
    Cette disparition progressive des communications et des reportages fondés sur des faits s’est amorcée avec la fermeture de nos stations locales et de nos journaux en format papier. Il faut notamment bien comprendre que le journalisme local est majoritairement le fruit du travail de sources communautaires, plutôt que des médias nationaux. Notre nation et nos concitoyens méritent mieux que cela. Les collectivités des différentes régions du Canada aussi bien que vos commettants et commettantes veulent qu’on leur garantisse l’accès à du contenu canadien et que les acteurs de l’industrie numérique soient tenus de contribuer à la création d’un tel contenu.
    Des décisions récemment rendues en France et en Australie nous mettent sur la voie d’une réglementation assortie de sanctions et de droits à payer pour faire en sorte que les géants de la technologie aient des comptes à rendre. Il est important pour notre industrie journalistique de savoir que la Loi sur la radiodiffusion tient les géants des médias sociaux et de l’Internet responsables de ce qu’ils produisent et de ce qu’ils diffusent. Je sais que certaines avancées sont visées dans la loi pour ce qui est de l’Internet, mais je constate moi également qu’aucune mesure proactive ne semble être proposée concernant les médias sociaux. Ces derniers jouent pourtant un rôle de plus en plus grand dans la transmission de l’information. À mes yeux, c’est extrêmement préoccupant étant donné tous les gens qui se tournent vers ces médias pour trouver ce qu’ils appellent de l’information. L’absence de surveillance véritable des médias sociaux est un aspect qui me préoccupe au plus haut point.
    Je crois que c’est tout le temps que j’avais, mais je vous prie de noter que j’ai joint quelques documents susceptibles d’intéresser les membres du Comité.
(1225)
    Merci, monsieur McAdams.
    Nous allons maintenant entendre M. John Petrie, radiodiffuseur à la retraite.
    Monsieur Petrie, vous avez cinq minutes. Merci d'être des nôtres aujourd'hui.
    Bonjour à tous. Je m'appelle John Petrie et j'ai travaillé pendant plus de 40 ans dans des stations de radio locale. Je vais donc vous parler principalement de la radio et de la réglementation qui guidera sa transition vers de nouvelles plateformes.
    Je suis bien placé pour connaître toute l'importance que revêtent la radio locale et ses liens avec la communauté lorsque vient le temps de diffuser des informations d'intérêt local, de suivre les équipes sportives de la région en faisant la description de leurs matchs et, surtout, de transmettre des renseignements cruciaux sur des choses comme la fermeture des routes et des écoles lors d'événements comme les tempêtes hivernales. Il en va de même en été avec les alertes de tornade ou d'orage violent.
    Bien qu'il soit possible d'obtenir bon nombre de ces renseignements sur son téléphone, les gens continuent de se tourner vers les médias traditionnels qui leur offrent une certaine garantie de crédibilité. Je sais à quel point la radio et les médias locaux sont importants pour les entreprises et les organismes sans but lucratif d'une collectivité qui doivent annoncer leurs services et faire passer leur message. J'aimerais vous citer quelques exemples de l'apport des radios locales. En décembre dernier, la station de radio ici même à Brooks a recueilli 36 000 $ en une seule journée pour la banque alimentaire locale. Depuis 30 ans, cette même station tient un radiothon d'une journée pour le club Rotary de Brooks qui a permis d'accumuler 300 000 $.
    La radio locale nous procure un sentiment de communauté. Je parle ici de communauté, non pas dans le sens des gens qui la forment, mais davantage dans un esprit de partage des mêmes intérêts, objectifs et mécanismes d'entraide. C'est un sentiment qui peut également s'exprimer à la grandeur d'une province et d'un pays.
    Le contrôle exercé par le CRTC à l'égard des licences des stations de radio a contribué à restreindre l'offre. Ce sont malheureusement les grandes entreprises qui ont pu obtenir les licences encore disponibles. Il est possible que l'on ait droit ainsi à un produit de meilleure qualité, mais cela s'est fait dans la plupart des cas au moyen de réductions dans la programmation et les emplois à l'échelle locale.
    La radiodiffusion est en voie de transition vers différents nouveaux formats, dont Internet. J'écoute encore beaucoup la radio traditionnelle, mais je le fais d'une nouvelle manière, que ce soit au moyen de mon téléphone ou via Bluetooth. Soit dit en passant, la Norvège, une nation comptant cinq millions d'habitants, est devenue le premier pays au monde à éliminer progressivement le recours aux signaux analogiques pour passer à la radiodiffusion numérique, ce qui sonne le glas des signaux FM et AM. La Suisse et la Grande-Bretagne envisagent elles aussi de passer à des réseaux numériques. La Norvège soutient que cette transition permettra des économies que les radiodiffuseurs pourront réinvestir dans la programmation tout en pouvant compter sur un réseau offrant une clarté et une fiabilité accrues.
    On y arrivera un jour également au Canada. Nous ne savons pas à quel moment exactement, mais c'est inévitable. Qu'adviendra-t-il de nos stations de radio traditionnelles qui diffusent au moyen d'émetteurs, surtout dans un monde où les véhicules ne seront plus équipés d'une radio AM-FM? Est-ce que n'importe qui pourra ouvrir une station de radio Internet sans avoir à se préoccuper d'obtenir un émetteur, des lettres d'appel ou une fréquence? Faudra-t-il une licence ou pourra-t-on simplement le faire à sa guise?
    Comme vous le savez, les stations de radio traditionnelles doivent suivre certaines règles. Elles doivent ainsi notamment diffuser 35 % de contenu canadien, payer des droits à la SOCAN, respecter les normes canadiennes en matière de radiodiffusion et faire jouer uniquement la musique prévue dans leur licence. Elles doivent bien évidemment tenir un registre où l'on consigne tout ce qui est diffusé pendant une période de 30 jours pour le cas où il y aurait des vérifications ou des poursuites.
    Les stations de radio font donc la transition vers Internet en utilisant dans la plupart des cas une application comme Radioplayer Canada, mais quelles sont les règles applicables à cette diffusion Internet? Seront-elles encore tenues de diffuser 35 % de contenu canadien? Est-ce que Spotify, Apple Play ou Google Music diffusent 35 % de contenu canadien?
    Qu'en est-il des normes pour les annonceurs ou les animateurs d'émissions-débats? Avec la radio traditionnelle, ils ont des règles à suivre, mais une diffusion via Internet n'est assujettie à aucune règle et à très peu de règlements. Sur Internet, vous pouvez parfois entendre des balados où un langage offensant est utilisé sans aucune restriction. Qui va assurer une surveillance à cet égard et qui va exercer un contrôle? Est-ce même nécessaire de le faire?
    Les gouvernements aiment à penser qu'ils sont les arbitres suprêmes de la réglementation, mais nous avons vu lors des élections aux États-Unis de grandes entreprises comme Twitter, Facebook et YouTube dicter elles-mêmes les règles en décidant du contenu qu'elles allaient rendre accessible. En outre, lorsqu'un rival de Twitter s'est manifesté, les grandes entreprises technologiques ne lui ont pas permis d'utiliser leurs plateformes. Alors, qui décide des sujets qui peuvent être abordés ou de la musique qui peut être diffusée sur la radio Internet? Faut-il que nous imposions des contrôles ou devons-nous laisser les gens décider eux-mêmes de ce qu'ils veulent entendre et écouter?
    Si vous avez une station de radio en ligne, vous devez l'exploiter par l'entremise d'un fournisseur comme Rogers ou Bell. Si jamais vous lui livrez une concurrence trop vive, ce fournisseur pourra-t-il vous couper l'accès en réduisant votre diffusion à large bande ou en augmentant vos tarifs? Quelles seront les règles applicables si j'exploite une station radio en ligne via une plateforme comme Facebook ou YouTube? À qui appartiendront les données diffusées de cette manière et quelles seront les règles en matière de propriété étrangère? Qu'en est-il des paiements à effectuer au Fonds des médias du Canada? Y aura-t-il des exigences quant au nombre d'emplois à créer au Canada ou est-ce que ces entreprises pourront être exploitées à partir de l'étranger?
(1230)
    En fin de compte, il s'agit de se poser la question suivante: qu'est-ce que les Canadiens vont chercher auprès des médias? Ils veulent être informés. Ils veulent être divertis. Ils veulent avoir la liberté de choisir qui va les informer et les divertir. Si toutefois vous payez pour un tel service en vous y abonnant, est-ce que des règles devraient être imposées. Si vous...
    Merci, monsieur Petrie. Je suis désolé de devoir vous interrompre ainsi. Vous pourrez sans doute nous transmettre le reste de vos commentaires en répondant aux questions qui viendront.
    Nous allons maintenant passer au représentant du Global Village Centre.
    Monsieur Ahmed Kassem, vous avez cinq minutes.
    Un grand merci au Comité de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui. Je suis entièrement d'accord avec les deux témoins qui m'ont précédé.
    Je m'appelle Ahmed Kassem. J'ai produit et animé des émissions culturelles à la télévision communautaire pendant une bonne partie de la dernière décennie. De plus, j'anime une émission de radio communautaire locale mettant en lumière les relations interculturelles dans les collectivités rurales. Nous cherchons toujours à favoriser une plus grande prise de conscience et une meilleure compréhension des nombreuses communautés culturelles et linguistiques que l'on retrouve dans la région de Brooks, à informer les nouveaux arrivants de leurs droits et responsabilités au Canada, et à leur faire mieux connaître la communauté dans laquelle ils ont choisi de s'établir au moyen d'entrevues avec les principaux chefs de file et fournisseurs de services locaux.
    Le projet de loi C-10 permettra d'améliorer les choses si, de pair avec la Loi canadienne sur la radiodiffusion, [Difficultés techniques] la radiodiffusion. Il faut par ailleurs tenir compte [Inaudible] du monde numérique. Il est plus difficile qu'auparavant de réunir une famille devant le même écran de téléviseur; chacun peut regarder la même émission en utilisant différents appareils. La diffusion en ligne devrait être assujettie à des règles aussi strictes que celles prévues dans la Loi sur la radiodiffusion. Ainsi, le contenu ne devrait pas pouvoir être produit par quelqu'un à partir de son domicile, une façon de faire qui permet à des individus et à des groupes de répandre de fausses informations, ce qui peut être dommageable et parfois même dangereux.
    Le projet de loi permet également aux membres des minorités visibles de faire leur place dans le monde de la radiodiffusion étant donné qu'il est important de pouvoir entendre la voix de tous les Canadiens, sans égard à leurs origines. On pourrait dire que le projet de loi vise à établir en quelque sorte les mêmes règles pour la diffusion des différents contenus dans toutes les régions du Canada. En vertu de ce qui est proposé, tous seront assujettis aux mêmes modalités de fonctionnement.
    J'estime primordial que les mesures législatives adoptées n'entraînent pas un exode des services actuellement offerts au Canada. Les lignes directrices plus rigoureuses qui sont proposées quant aux exigences à suivre pourraient inciter des fournisseurs à quitter le Canada, ce qui réduirait d'autant la gamme des médias et des contenus accessibles au pays.
(1235)
    Je suis en faveur de ce projet de loi, sous réserve de la mise en garde que je viens de vous servir. Si tous les fournisseurs de services médiatiques au Canada doivent suivre les mêmes règles, les diffuseurs de plus petite taille pourront offrir leurs émissions dans un contexte plus équitable. On assure également ainsi [Inaudible] de même que l'accès à du contenu canadien partout au pays, ce qui nous rapproche de nos racines. Nous pourrons aussi éviter la diffusion de contenu préjudiciable en assurant la protection et le soutien des radiodiffuseurs et des journaux locaux qui desservent notamment nos collectivités rurales partout au Canada.
    Les discussions à ce sujet soulèvent pour moi quatre questions principales. Premièrement, comment exactement cela permettra-il de protéger le contenu canadien? Deuxièmement, comment le contenu sera-t-il approuvé? Troisièmement, d'où proviendra ce contenu? Quatrièmement, est-ce que cela créera des possibilités d'emploi au Canada?
    Merci, monsieur Kassem.
    Je suis désolé pour les difficultés techniques.
    Nous allons maintenant passer directement aux questions. Nous allons débuter le tour à six minutes du côté des conservateurs.
    Monsieur Shields, c'est vous qui allez commencer.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux remercier nos trois témoins.
    Monsieur Petrie, vous étiez sur le point de nous en dire davantage lorsqu'on a dû vous interrompre. Voudriez-vous terminer vos observations?
    Oui. Merci, monsieur Shields.
    Je vais conclure rapidement. Lorsque nous établissons des règles, il faut qu'elles soient les mêmes pour tous. Je veux dire par là que les mesures qui sont prises pour les médias en ligne doivent s'appliquer également aux médias traditionnels tant et aussi longtemps qu'ils vont exister.
    Si on commence à octroyer des licences pour les stations de radio Internet, je pense qu'il serait bon qu'elles soient accordées à des Canadiens et qu'aucune limite ne s'applique. Prenez l'exemple de notre communauté. Une centaine de voix différentes s'y font entendre. Dans les villes de plus grande taille, on pourrait avoir une station radio pour une communauté ethnique. Il pourrait y avoir plusieurs stations semblables à Toronto ou à Vancouver.
    Je voudrais parler en terminant des règles régissant le contenu. Qui décide du contenu? Si l'on impose des règles à ce sujet, est-ce que cela va étouffer complètement la créativité?
    Il faut en fin de compte que les services de diffusion en continu paient des taxes comme toutes les autres entreprises. Je pense que nous en convenons tous. Ce sont des géants provenant des États-Unis qui utilisent nos infrastructures. Nous payons pour leurs services et eux-mêmes s'en tirent à trop bon compte, si bien que nous conviendrons tous qu'il nous faut trouver une manière de leur faire payer les taxes applicables.
    Monsieur Kassem, comme il est question dans ce projet de loi des antécédents ethnoculturels, pouvez-vous nous indiquer dans quelle mesure vous jugez essentiels les messages que vous communiquez à un large éventail de groupes ethniques dans votre région ainsi que dans le Canada rural?
    C'est absolument essentiel.
    Brooks est la « ville des 100 bonjours » et on y trouve un nombre important de groupes ethniques provenant d'un peu partout sur la planète.
    Dans bien des cas, la transmission des messages devient difficile dans ce contexte. On a pu le constater avec la pandémie de COVID-19, véritable cauchemar sanitaire. Il y a en outre les difficultés associées aux conflits raciaux, à l'antisémitisme, au racisme et à l'islamophobie.
    Comme M. Petrie vient de l'indiquer, la diffusion de nos balados nous permet de rejoindre toutes les communautés dans leur propre langue en respectant les caractéristiques culturelles de chacune. On favorise ainsi le maintien des gens et de leurs familles en milieu rural où ils peuvent travailler et s'intégrer à la communauté.
    Il est vraiment essentiel d'offrir cette voix aux nouveaux arrivants qui apportent une valeur ajoutée au développement économique du Canada d'une manière générale et dans l'ensemble de ses régions rurales. Il est primordial que les petits organismes de services puissent transmettre leurs messages. Il est très important que tous les Canadiens puissent avoir vraiment voix au chapitre.
    J'encouragerais le Comité à explorer la piste de la radio communautaire ou de tout autre mécanisme pouvant permettre d'optimiser la prise en compte de tous les points de vue dans le contexte canadien.
(1240)
    Monsieur Petrie, si vous deviez choisir une recommandation qui serait plus importante que toutes les autres, quelle serait-elle?
    Je ne le sais pas vraiment, mais je vais m'éloigner un peu de sujet.
    J'ai écouté la première partie de la réunion, et personne n'a parlé de la collecte de données. Lorsque Facebook et Google ou... Les données deviennent tellement importantes pour les annonceurs. À qui appartiennent-elles? À qui appartiennent les renseignements à mon sujet?
    Je pense que notre pays doit examiner la question, car à l'heure actuelle, Google et Facebook possèdent ces données, ce qui est important pour leurs annonceurs. Ils peuvent cibler leurs annonceurs à Brooks, à Chicoutimi ou à Saint John.
    Je pense que nous devons nous pencher sur la question. Je ne sais pas où cela s'inscrit, mais je pense que c'est un aspect important également.
    Vous soulevez un bon point. Merci.
    Je vais poser une question au représentant de l'association des journaux.
     Vous vous êtes tourné vers les médias locaux, et vous avez parlé des médias les plus près, qui se basent probablement le plus sur des faits, dans un sens, parce qu'ils doivent être locaux. Comment allons-nous le faire en région rurale?
    Excusez-moi. Il y a eu une interruption, monsieur Shields.
    Vous avez parlé de la précision de l'information fournie par la radio et les journaux ruraux, de leur importance en région rurale et de la précision. Comment allons-nous maintenir cela?
    Comme vous le savez, car votre circonscription en est un exemple, nous avons des zones de plus en plus vastes qui sont privées d'information. Nous ne pourrons le faire qu'avec du soutien et une plus grande coordination pour critiquer les géants de la technologie quant à la façon dont ils créent et, si je peux dire, « grappillent le contenu » de sites locaux. S'ils ne participent pas dans une certaine mesure, les reportages locaux disparaîtront de plus en plus.
    Merci. Je vous remercie de vos réponses.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Shields.
    Monsieur Louis, vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence. C'est une occasion formidable. Comme j'espère pouvoir discuter avec chacun d'entre vous, je vais plonger immédiatement.
    Monsieur Kassem, j'aimerais vraiment en savoir plus. Je constate que plus les communautés du Canada sont petites, plus il est difficile de promouvoir la diversité et l'inclusion. Il semble que vous faites un travail extraordinaire. Je me suis renseigné sur votre organisation — les idées, les conseils, la promotion d'activités communautaires, la sensibilisation à la diversité, l'autonomisation des nouveaux arrivants —, et vous faites de l'excellent travail et je vous en remercie.
    Je sais que l'une des dispositions du projet de loi énonce, à l'article 3 de la Loi sur la radiodiffusion, que le système canadien de radiodiffusion devrait « répondre aux besoins et aux intérêts de l’ensemble des Canadiens — notamment des Canadiens qui sont issus des communautés racisées ou qui représentent la diversité de par leurs antécédents ethnoculturels, leur statut socio-économique, leurs capacités et handicaps, leur orientation sexuelle, leur identité ou expression de genre et leur âge ».
    Je me demande si vous pouvez en dire plus. C'est toujours formidable d'entendre parler d'exemples de réussite — de l'une des histoires locales dont on entend parler à votre émission mettant en valeur des gens qui se sentent à l'aise dans une petite communauté.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur.
    Nous travaillons très fort pour que les nouveaux arrivants s'intègrent aux régions rurales dans le cadre des politiques sur l'immigration rurale des gouvernements fédéral et provinciaux depuis de nombreuses années.
    Lorsqu'une personne vient de l'étranger, elle arrive dans un pays où elle n'a aucun lien. Elle fuit les problèmes ou elle vient de son propre chef. Il est toujours difficile de quitter son réseau social ou familial et d'arriver dans une nouvelle culture et un environnement différent et d'apprendre une nouvelle langue. Ce seul fait est une source de stress pour de nombreux nouveaux arrivants et immigrants.
    À notre émission, nous soulignons les réussites d'immigrants qui apportent une bonne contribution et qui ont une entreprise au pays. À leur arrivée au Canada — nous appelons tous ce pays « un paradis » et nous aimons vraiment y vivre —, ils sont vraiment ravis d'être ici. Certains d'entre eux réussissent grâce à leurs efforts. La plupart d'entre eux sont habiles en affaires.
    Nous invitons ces entrepreneurs à l'émission afin que le reste des gens voient que le travail acharné et le dévouement portent fruit à long terme. Nous essayons toujours de ne pas tomber dans la victimisation ou de ne pas blâmer les autres pour les problèmes. C'est de cette manière qu'on peut permettre de favoriser l'autonomisation des gens.
     Il faut les informer et leur donner les outils qu'il faut pour réussir plutôt que de les laisser être dépendants. Nous les aidons en leur donnant les outils pour réussir au Canada et se créer une nouvelle vie, mais ils doivent travailler fort et être honnêtes, dévoués et prêts à contribuer à la société dans laquelle ils vivent.
    L'émission se concentre surtout sur les nouveaux arrivants et les immigrants qui ont une entreprise et qui sont des professionnels. La plupart d'entre eux viennent de l'Afrique du Sud. La plupart sont des médecins de l'Afrique du Sud. Nous les invitons à parler de leurs réussites, des difficultés auxquelles ils ont fait face à leur arrivée au Canada et des défis qu'ils ont dû relever. Les auditeurs verront dans quelle mesure les choses ont a été difficiles pour eux, mais aussi comment ils ont réussi malgré les difficultés. Il y a toujours une lumière au bout du tunnel.
    Toutes ces histoires sont racontées sur notre site Web. Tout le monde peut y accéder et voir ces belles histoires.
(1245)
    Je l'ai fait. Merci. On ressent cette impression que « le succès engendre le succès »... et pour les gens qui regardent, « si l'on peut le voir, on peut le devenir ». Je vous remercie.
    Je vais continuer.
    Monsieur Petrie, je sais que la radio locale est importante. J'ai moi-même été animateur d'une station de radio locale. Je me suis porté volontaire et j'ai servi pendant sept ans à la radio locale. Je comprends qu'à l'heure actuelle, il faut trouver un équilibre quand on pense à la façon dont les technologies numériques ont changé et à la façon dont nous pouvons protéger notre environnement culturel, promouvoir nos artistes dans le monde entier tout en protégeant notre identité ici.
    Vous travaillez également avec Stingray Musique.
     Oui, à un moment donné, mais je suis maintenant à la retraite.
    D'accord. Je vois.
    Nous parlons de 40 millions d'auditeurs dans environ 50 États. Nous voulons promouvoir la musique et les histoires canadiennes à l'étranger, mais nous voulons protéger nos histoires locales. Pouvez-vous me dire par quel moyen il est possible de trouver cet équilibre, à votre avis?
    Vous parlez de la réglementation sur le contenu canadien, alors, n'est-ce pas?
    Oui, tout à fait.
    Concernant le contenu canadien, c'est difficile, parce que je crois fermement au contenu canadien et à la promotion des artistes locaux, et je pense qu'on peut le faire. Bon nombre de nos stations de radio ont été limitées — je pense que quelqu'un d'autre l'a déjà soulevé — par la programmation de Toronto. S'il y a un type qui joue une belle chanson près de Brooks, ici, et qu'elle ne plaît pas à Toronto, je n'ai plus beaucoup de marge de manœuvre pour que cette musique soit diffusée ici. Nous devons ouvrir cette voie aussi.
    L'autre chose que je mentionnerais au sujet du contenu canadien, c'est que je pense que c'est dans les années 1970 — vous ou quelqu'un d'autre pourriez me corriger — que les exigences relatives au contenu canadien sont apparues, et c'est à cet égard que nous devons nous interroger. Quelle est l'importance de l'obligation de diffuser 35 % de contenu canadien? Justin Bieber aurait-il réussi sans cela? Drake aurait-il réussi? The Weeknd aurait-il réussi?
     Est-ce que Céline Dion et tous ces artistes auraient réussi sans l'obligation de diffuser au moins 35 % de contenu canadien? Je l'ignore, mais je pense que nous voulons tous faire la promotion de notre musique locale. Nous voulons que nos vedettes réussissent, car elles nous représentent sur la scène mondiale. Nous sommes fiers du fait que The Weeknd participe au spectacle du Super Bowl. C'est un artiste canadien. Nous en sommes fiers et nous devons en faire la promotion.
    Merci beaucoup à chacun de vous.

[Français]

     Monsieur Champoux, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais poser d'autres questions à M. Petrie.
    Monsieur Petrie, je suis unancien animateur de radio. Je dois vous dire que, lorsque vous parlez de vieilles technologies inconnues des jeunes d'aujourd'hui, c'est une douce musique à mes oreilles. Je pense notamment aux lettres d'appel et à l'indexation numérique.
    Récemment, je parlais de puissance avec un jeune animateur qui avait commencé sa carrière il y avait quelques années à peine. Je parlais de puissance d'antenne FM de 50 000 watts par comparaison avec les antennes de 150 000 ou 200 000 watts. J'avais l'impression de parler un langage qui lui était absolument inconnu.
    Vous disiez avoir 40 ans d'expérience en radio. J'en ai près d'une trentaine, et, si nous ajoutons celles de M. Kevin Waugh à nos expériences respectives, il y a certainement 150 ou 160 ans d'expérience autour de la table aujourd'hui. Je dis cela en tout respect, monsieur Waugh.
    Je voulais surtout parler de la rapidité avec laquelle cette industrie change, et cela est particulièrement marquant depuis quelques années. Au cours de votre carrière, aviez-vous l'impression qu'on soulevait des préoccupations comme celles dont nous discutons aujourd'hui? Je ne parle plus de technologie, mais de protection du contenu et de protection de l'identité culturelle. Il est beaucoup question de la culture québécoise et francophone, mais il s'agit aussi de la culture canadienne en général.
(1250)

[Traduction]

    J'ai toujours été un fier Canadien, et lorsqu'une émission comme Corner Gas ou Schitt's Creek, ou peu importe, est diffusée, je me fais toujours un devoir de la regarder. J'ai probablement été l'une des premières personnes à regarder Corner Gas ou Schitt's Creek.
    J'aime beaucoup l'émission Schitt's Creek, et je l'aimais bien avant qu'elle ne devienne aussi populaire. Ai-je vu les choses aller et évoluer de cette façon? Je pense que nous avons toujours été influencés par les Américains. Leurs maisons de production sont si grandes. Je pense à l'époque où l'on a commencé à voir des productions sortir du Canada. Nous ne les avons pas rendues canadiennes. Lorsqu'on tournait quelque chose à Toronto, on essayait de faire en sorte que cela ressemble à Los Angeles ou à New York.
    Je pense que nous devons promouvoir plus d'émissions comme Corner Gas ou Schitt's Creek. Les Canadiens les regarderont, les Américains aussi, et le reste du monde aussi s'il s'agit d'une bonne production.

[Français]

    Si nous ne renforçons pas la réglementation, avez-vous l'impression que nous risquons de voir la situation nous échapper?

[Traduction]

    Dans un certain sens, oui, mais comment y arriver? Nous pouvons produire plus de contenu local, mais le problème, c'est de savoir comment nous pouvons en faire la promotion dans le monde. Je pourrais produire une émission ici, et je pense que M. McAdams... Bien des gens lanceront une entreprise et un site Web en pensant que tout le monde visitera le site Web. Le problème, c'est qu'il existe trois milliards de sites Web dans le monde.
     La question est de savoir comment en faire la promotion. Les géants le font. Netflix a la capacité de faire beaucoup de promotions, alors que si je produis un film ici, je n'ai pas ce qu'il faut pour le promouvoir. Nous pouvons produire ici, mais la promotion est l'autre volet auquel nous devons travailler.

[Français]

    Selon les tenants d'une école de pensée qui a cours actuellement, nous devrions alléger les responsabilités et les exigences en ce qui touche les radiodiffuseurs traditionnels plutôt que d'imposer les mêmes contraintes et les mêmes règles aux nouvelles technologies.
    Qu'en pensez-vous? Devrions-nous maintenir la réglementation actuelle et l'imposer aux nouveaux acteurs du milieu ou faudrait-il alléger le fardeau?

[Traduction]

     Je pense que nous devons alléger le fardeau. Comme je l'ai déjà dit, si les diffuseurs traditionnels sont obligés de diffuser 35 % de contenu canadien, les stations de radio en ligne doivent-elles diffuser 35 % de contenu canadien? Je pense que nous devons alléger le fardeau, car cela ouvre la voie. Nous ne savons pas où cela va nous mener. Beaucoup de choses se sont passées assez rapidement depuis presque cinq ans.
    Il y a ici d'anciens annonceurs radio. J'ai vu, même dans cette province, une situation où un diffuseur a perdu l'emploi qu'il occupait dans une station de radio. Il travaille maintenant sur YouTube, fait de la diffusion en continu et attire de nombreux auditeurs. Il ne passe par aucun autre canal.
    Beaucoup de gens peuvent le faire.

[Français]

    Nous avons vu la mise en vigueur de la réglementation de 1991. Trente ans plus tard, nous travaillons à une réforme de la Loi sur la radiodiffusion.
    Vous admettrez que l'évolution de cette industrie se fait à une vitesse beaucoup plus grande ces dernières années que dans les années 1960, 1970 et 1980.
    À votre avis, devrions-nous réviser la Loi sur la radiodiffusion et imposer de fréquentes révisions? À quelle fréquence serait-il sage d'effectuer cette révision?

[Traduction]

    Les gens parlent, entre autres, de la loi de Moore — la croissance exponentielle de la technologie. Nous devons réviser la Loi sur la radiodiffusion presque tous les trois ans, parce que si l'on prend la dernière année, ce que nous faisons aujourd'hui n'existait probablement pas il y a 18 mois, avant la pandémie. Compte tenu de la façon dont nous communiquons, par Zoom et ce type de technologie, on constate que la croissance est phénoménale. Je pense qu'il faudrait réviser la loi plus souvent.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    Avant que nous passions à la dernière intervention de cette série de questions, je veux dire qu'il semble que nous pouvons prolonger la réunion de 10 minutes, compte tenu des problèmes que nous avons eus plus tôt, ce qui nous amène à 13 h 10, heure de l'Est.
    Je vais céder la parole à Mme McPherson, mais auparavant, je veux dire que les règles relatives au contenu canadien ont été mises en place le 18 janvier 1971.
    Madame McPherson.
    Monsieur le président, je vous remercie beaucoup de votre connaissance approfondie du sujet et des dates.
    C'est grâce à Google, madame.
(1255)
    Vous n'avez pas à l'admettre.
    Il est agréable de voir tant de gens de l'Alberta. Je ne suis pas une ancienne animatrice à la radio et je n'ai donc pas cette expertise, mais l'importance vitale des médias locaux et la désintégration des médias locaux à laquelle nous assistons sont des questions qui m'intéressent énormément.
    Je pourrais poser les mêmes questions à plusieurs d'entre vous, mais je vais commencer par M. McAdams.
    Vous avez beaucoup parlé des médias locaux et de ce que nous risquons de perdre. L'une des choses qu'on m'a dites à maintes reprises lors de mes rencontres avec des intervenants, c'est que souvent, ce sont dans les médias locaux que nos journalistes commencent leur carrière. C'est souvent une école.
    Pourriez-vous parler des répercussions sur le parcours des journalistes et de la situation au Canada, compte tenu des coups que subissent les médias locaux?
    C'est une question intéressante. C'est l'un des aspects pour lesquels nous avons plus de difficultés que nous ne voulons le reconnaître dans notre propre industrie.
    Concernant le recrutement de nouveaux journalistes, nous en sommes au point où ils ne postulent pas. Nous en cherchons continuellement. Nous sommes toujours en contact avec des écoles de journalisme, des journaux et des stations de radio locales, en fait. Le nombre de journalistes que nous avons maintenant, par rapport à il y a même cinq ans, est inférieur d'environ un tiers à la moitié.
    Lorsque des gens présentent leurs candidatures, nous leur demandons ce qu'ils recherchent d'autre ou ce qui les a attirés. Il est rare qu'ils disent se passionner pour les journaux ou les médias locaux. La jeune génération est à la recherche d'environnements numériques pour faire carrière. Ils ne considèrent pas cela comme un secteur à envisager.
    Ils n'ont pas la possibilité de s'épanouir dans ce secteur.
    Il n'y a pas de possibilités et il y a aussi l'idée que travailler pour les journaux et les médias locaux n'est pas aussi « cool » que de travailler dans le monde numérique. C'est la réalité.
     Oui, bien sûr. Je pense qu'en effet, nous avons également constaté une réduction du contenu local, même dans nos grandes publications. Par exemple, dans l'Edmonton Journal il y a beaucoup moins de contenu local.
    Entre autres choses, vous avez également parlé, monsieur McAdams, du déséquilibre des revenus. Comme nous l'avons vu, certains de nos médias locaux ont subi des réductions de revenus draconiennes. Les programmes actuels fonctionnent-ils? À votre avis, que devrait-on inclure dans la loi pour corriger une partie de ce déséquilibre des revenus?
    L'une des choses que nous avons constatées au cours de la dernière décennie, c'est la quasi-disparition de la publicité gouvernementale, avec les changements autorisés, ou avec la Municipal Government Act de l'Alberta, qui permet aux administrations municipales d'annoncer des modifications aux règlements sur leurs plateformes numériques ou leurs propres sites Web, et je me demande si le message est vu par la majorité de la population comme c'était le cas autrefois. Même lorsqu'il s'agit de politiques provinciales et fédérales, c'est la même chose. La prolifération de publicité, autrefois dans les médias traditionnels, que ce soit dans la presse écrite, à la radio ou à la télévision, se voit maintenant dans le monde numérique et, comme je l'ai mentionné dans mon exposé, ces fonds, qui vont dans le numérique, quittent en grande partie le Canada et ne permettent donc pas de créer des emplois et ce sont là des deniers publics qui disparaissent également.
    Monsieur Petrie, pourriez-vous aussi formuler des commentaires sur le sujet? Avez-vous quelque chose à ajouter sur la question des revenus et du déséquilibre des revenus que nous observons chez les médias locaux?
    Oui, je suis d'accord avec M. McAdams. Nous devons trouver une façon de ramener ces revenus dans notre pays. On peut citer l'exemple de Netflix. Où est M. Google, dans ce cas-ci? Je pense que l'entreprise compte environ huit millions d'abonnés au Canada. Même au faible prix de 10 $ — et il a maintenant augmenté à 16 $ —, l'entreprise gagne 80 millions de dollars par mois. Vous pouvez faire le calcul pour une année. Mais combien de revenus fiscaux retirons-nous de Netflix? La TPS est un cas légèrement différent, mais nous devons trouver une façon de récupérer cet argent.
    Je vais vous donner un autre exemple dans lequel je parlerai de Martin Shields, l'ancien maire de Brooks. Amazon livre des colis dans notre collectivité tous les jours. Nous avons également SkipTheDishes et toutes les autres entreprises du même acabit. Ces entreprises obtiennent énormément d'argent de notre collectivité. Nous payons pour l'infrastructure et tout le reste, mais nous ne recevons rien en retour.
    Il y a donc, par exemple, SkipTheDishes, Amazon, Netflix, Facebook, Google ou d'autres entreprises semblables. Nous devons trouver une façon de récupérer ces revenus.
(1300)
    Oui, certainement. Je vous remercie.
    Ma dernière question s'adresse à M. Kassem. Je sais que mon temps sera bientôt écoulé.
    Je vous remercie de tout ce que vous avez fait et de tous les renseignements que vous nous avez fournis au sujet de la diaspora et du contenu communautaire et culturel.
    Vous avez notamment parlé de l'exactitude du contenu. Pourriez-vous nous préciser ce que vous aimeriez voir dans le projet de loi C-10 pour veiller à ce qu'un contenu exact soit diffusé aux auditoires, surtout en ligne?
    Je pense que nous avons perdu M. Kassem. S'il revient, et si j'ai une deuxième chance de prendre la parole, je tenterai d'obtenir une réponse à ce moment-là.
    Je vous remercie.
    On estime que 7,9 millions de Canadiens sont abonnés à Netflix.
    À titre d'ancien radiodiffuseur, je suis heureux de donner la parole à un autre radiodiffuseur, à savoir M. Waugh.
    Je suis heureux de revoir tout le monde.
    Le milieu de la radiodiffusion a changé. Je viens de lire The Tangled Garden. C'est un livre fascinant. Je pense que tous les membres du Comité devraient le lire. La Loi sur la radiodiffusion ne s'applique pas aux journaux d'aujourd'hui, et M. McAdams a donc raison. Les gouvernements du monde entier retirent leurs annonces des journaux, et cela ne se passe donc pas seulement au Canada. J'ai PressReader et je lis de nombreux journaux du monde entier. Les gouvernements ne subventionneront plus les journaux. Je le vois bien. C'est tout simplement la nouvelle réalité. C'est un grand changement qui a commencé avec le gouvernement Harper, en 2010, et qui se poursuit depuis ce temps. Je ne dis pas que c'est juste, mais si vous êtes d'avis, comme vous l'avez dit au Comité, que les gouvernements du monde entier devraient investir plus d'argent dans les journaux, je dois vous dire que cela ne se produira pas.
    La transition a été amorcée et elle ne s'arrêtera pas. Je ne sais pas où vous pourrez trouver vos revenus. Nous avons posé la question aux représentants de Facebook qui ont comparu vendredi dernier, car cette entreprise s'approprie une grande partie du contenu des journaux de notre pays, et ce, sans dépenser un sou. Elle ne veut pas payer pour ce contenu, comme nous l'a dit haut et fort M. Chan. Votre groupe de journaux devrait donc commencer par exercer des pressions sur des géants comme Facebook et tenter de voir si vous pouvez obtenir quelque chose de ces entreprises, car le gouvernement ne subventionnera plus les journaux.
    Si vous consultez les pièces jointes à mes notes d'allocution, vous constaterez qu'une série de campagnes a été lancée par l'industrie. Ces campagnes sont toujours actives — en fait, nous lançons une nouvelle campagne cette semaine — et elles visent les géants de la technologie. Les défis que nous devons relever, pendant que ces entreprises volent du contenu et que nous tentons d'obtenir un appui coordonné du gouvernement — et nous nous rendons compte que le gouvernement n'accordera pas les subventions d'autrefois, monsieur Waugh —, c'est de trouver des façons de réglementer les géants de la technologie, un peu comme l'ont fait l'Australie et la France.
    Eh bien, la France a réussi à conclure une entente avec ces entreprises, mais pas l'Australie.
    M. Ryan McAdams: Pour le moment.
    M. Kevin Waugh: C'est ce que je retiens, car je pense que si l'Australie pouvait conclure une entente, le Canada lui emboîterait rapidement le pas. Mais pour le moment, selon ce que nous avons entendu vendredi dernier, je pense que Facebook reste sur ses positions.
    Monsieur Petrie, je suis heureux de vous revoir.
    C'est intéressant. Vous avez parlé de CJYM, la radio de Rosetown. Tout comme les stations de Brooks, les stations de Rosetown et de Kindersley appartiennent à Stingray. Je peux vous dire que les radios de Humboldt, de Moose Jaw, d'Estevan et de Weyburn n'appartiennent plus à des intérêts locaux. En effet,Golden West, un radiodiffuseur de l'extérieur du Manitoba, est propriétaire de toutes ces stations de radio rurales, et il ne fait aucun doute que cela crée parfois une rupture dans les communications. De plus, on ne peut plus rencontrer les propriétaires d'une station de radio, car ils n'habitent plus dans la collectivité. C'est ainsi maintenant.
    Malheureusement, les radios... Parfois, elles sont responsables de leur malheur. Je suis d'accord avec vous, monsieur Petrie, car elles ont effectivement besoin d'aide. Toutefois, les grands conglomérats comme Jim Pattison ont acheté tous les radiodiffuseurs de la province. Stingray a fait la même chose dans votre collectivité, et ce n'est pas une bonne chose, n'est-ce pas?
(1305)
    On peut contourner ce problème en assouplissant les licences, car si les géants ne font pas de programmation locale, peut-être que quelqu'un d'autre mettra sur pied un petit…
    On a essentiellement décidé d'accorder des licences parce que les coûts des immobilisations liés à l'ouverture d'une station de radio étaient très élevés et que l'on voulait assurer une certaine longévité dans ce milieu.
    Ainsi, de nos jours, les coûts d'immobilisations nécessaires pour ouvrir une radio communautaire sont minimes pour vous, M. Kassem ou moi-même. Comme je l'ai dit, dans la plupart des cas, un ordinateur portable à 1 200 $ suffit pour démarrer une station de radio dans son sous-sol. Si on assouplit les licences à cet égard, la programmation locale reviendra peut-être en force.
    Je ne demande pas l'aide du gouvernement, car je n'ai jamais vraiment préconisé cela. Toutefois, je crois que si vous avez un bon produit et que les annonceurs sont à l'écoute ou si vous avez un auditoire auquel vous pouvez diffuser des publicités, cela paiera pour le contenu.
    Oui, c'est vrai.
    Monsieur Kassem, j'ai consulté votre site web. Vous utilisez les balados, et je pense qu'ils représentent la voie de l'avenir.
    Comment fonctionnent-ils pour votre organisme?
    Je suis désolé, monsieur, mais pouvez-vous répéter votre question?
    Je vois sur votre site web que vous réalisez plusieurs balados. Comment cela fonctionne-t-il pour votre communauté, car les balados semblent représenter la voie de l'avenir?
    Cela fonctionne très bien, surtout en période de pandémie. Pendant le conflit racial, les balados ont été très efficaces pour communiquer avec les nouveaux arrivants, car nous les avons diffusés dans différentes langues.
    Toutefois, ils sont surtout en anglais. Nous parlons en anglais avec nos invités, car nous voulons aider les gens à comprendre la langue et…
    Monsieur Kassem, je suis désolé, mais je dois vous interrompre, car le temps est écoulé. Encore une fois, je suis désolé.
    Je dois donner la parole à M. Ien, un autre ancien radiodiffuseur.
    Monsieur Ien, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais également remercier les témoins qui comparaissent aujourd'hui. Nous vous sommes très reconnaissants de nous communiquer votre point de vue.
    Monsieur McAdams, j'aimerais vous poser une brève question. Vous êtes-vous penché davantage sur vos préoccupations liées à la perception des médias, ainsi que sur la question de savoir ce que sont les nouvelles et le vrai journalisme?
    Lorsque nous nous penchons sur la question, nous entendons de nombreux habitants de la collectivité et lecteurs affirmer que la qualité des nouvelles qu'ils reçoivent maintenant a visiblement diminué. Ils jugent que les nouvelles sont moins pertinentes et qu'elles contiennent moins de renseignements exacts et c'est également le cas des nouvelles qui proviennent des médias sociaux.
    C'est là que l'inexactitude ou la divergence entre une histoire et une autre… Notre organisme de nouvelles prend le temps de vérifier les faits, et nous constatons que les flux concurrents présentent des histoires dont le contenu est très différent. C'est dans ces cas que nous percevons une divergence entre les différents types de nouvelles qui sont diffusées.
    Nous passons plus de temps à effectuer une vérification factuelle du contenu, de sorte que nous avons moins de nouvelles à diffuser.
    Étant donné la situation actuelle et les nombreux défis qui se posent, comment pouvons-nous attirer davantage les jeunes talents?
    L'un des programmes que nous avons exécutés pendant la pandémie est une initiative en matière de journalisme local qui nous a permis d'obtenir un apport de sang neuf dans nos salles de presse. C'est enrichissant non seulement de voir les différentes façons dont ces jeunes abordent les nouvelles et les consomment… Mais ils nous ont aussi montré de nouvelles façons d'aborder et de diffuser les nouvelles.
    Monsieur Kassem, nous savons que l'isolement et la santé mentale représentent des éléments extrêmement importants dans le cadre de la pandémie actuelle.
    Pouvez-vous nous parler du rôle que peut jouer la radio pour créer des liens dans une communauté de nouveaux Canadiens, et en particulier chez les personnes que vous servez? Pouvez-vous aussi nous décrire comment la radio peut servir de bouée de sauvetage?
    Ces temps-ci, nous utilisons la radiodiffusion plus souvent. La pandémie a non seulement eu des effets sur de nombreux Canadiens, mais elle a aussi eu un impact énorme, en raison de nombreux facteurs liés à la situation économique, sur les nouveaux arrivants, les personnes de couleur et les minorités.
    L'isolement est un facteur extrêmement important. Dans notre émission, une psychologue parle de l'importance de prendre du temps pour soi. Il y a une lumière au bout du tunnel.
    L'un des principaux défis auxquels nous faisons face est la vaccination. En effet, si un vaccin était offert, la plupart des gens refuseraient de se faire vacciner, autant chez les nouveaux arrivants que dans la population locale. C'est le défi auquel nous faisons face actuellement. Nous espérons trouver une solution cette semaine ou la semaine prochaine.
    JBS Canada est l'une des plus grandes usines de transformation du bœuf au Canada. Elle emploie environ 3 000 personnes, dont 90 % sont des immigrants ou des nouveaux arrivants. Les dirigeants de l'usine ont du mal à convaincre les employés de se faire vacciner. Par l'entremise de la radio ou d'une vidéo, nous espérons donc encourager ces gens à se faire vacciner.
    Il faut également préciser que la question de la santé mentale est extrêmement importante lorsqu'il s'agit des nouveaux arrivants. En effet, ils ont des souvenirs récurrents de leur lieu d'origine ou de l'endroit d'où ils se sont enfuis et des problèmes auxquels ils faisaient face là-bas. On observe donc une augmentation de l'isolement, de l'anxiété et de la dépression, ce qui a ensuite un impact sur la violence familiale. La violence familiale est actuellement à la hausse dans notre région, ainsi qu'à l'échelle du Canada. Si les gens restent tout le temps chez eux, cela aura également des répercussions sur leur santé mentale et leur bien-être.
(1310)
    Je suis désolé, mais le temps est écoulé. Toutes mes excuses à mes collègues du Bloc et du NPD qui n'ont pas pu avoir une deuxième série de questions. Nous pourrons peut-être trouver une solution plus tard.
    J'aimerais remercier nos témoins, à savoir M. Kassem, M. McAdams et M. Petrie, de nous avoir communiqué leurs observations et leur expérience. C'était très bien. Je ne savais pas que la Norvège était entièrement numérique, par exemple. Nous apprenons quelque chose tous les jours.
    La séance est levée.
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