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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 22 février 2000

• 1517

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément au mandat que confère au comité le paragraphe 108(2) du Règlement, étude relative à la productivité, à l'innovation et à la compétitivité.

Nous avons le plaisir d'accueillir des représentants du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes. Il s'agit de M. David Colville, vice-président, Télécommunications, de Mme Shirley Soehn, directrice exécutive, Télécommunications, et de M. Paul Godin, directeur, Relations avec les transporteurs indépendants.

Je suggère que M. Colville commence par faire son exposé liminaire, après quoi nous passerons aux questions.

M. David Colville (vice-président, Télécommunications, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes): Merci, madame la présidente.

Vous venez de mentionner le nom de Shirley Soehn, mais je tiens à vous la présenter de manière un peu plus détaillée car elle est notre nouvelle directrice exécutive aux télécommunications. Shirley est arrivée dans notre groupe avec un bagage particulièrement adapté puisqu'elle a travaillé pendant un certain temps pour SaskTel, puis dans l'industrie indépendante du téléphone dans le cadre de l'Ontario Telephone Association, puis de MetroNet, l'une des nouvelles compagnies sur le marché, et elle a fait aussi un court passage chez AT&T avant que nous réussissions à l'attirer au Conseil pour nous aider pendant quelques années. Nous espérons donc qu'elle pourra nous être d'une grande utilité à la direction des télécommunications.

Je voudrais aussi vous présenter Ursula Menke, qui est assise derrière moi, et qui est la nouvelle secrétaire générale du CRTC.

J'aimerais remercier les membres du comité de me donner l'occasion aujourd'hui de discuter avec vous de productivité et de concurrence.

Mme Bertrand m'a priée d'excuser son absence, puisqu'elle préside une audience publique à Vancouver. Vous savez peut-être que nous avons plusieurs candidats en lice pour obtenir une nouvelle licence de télévision pour la ville de Vancouver et la ville de Victoria.

Comme je vous l'ai dit, je suis accompagné de Shirley Soehn et de Paul Godin. Paul s'occupe plus particulièrement des rapports avec les compagnies de téléphone indépendantes. En prévision de vos éventuelles questions dans ce domaine, je l'ai invité à m'accompagner aujourd'hui.

• 1520

En 1997, dans le discours du Trône, le gouvernement canadien présentait son programme «Brancher le Canada» dont l'objectif était de faire du Canada, le pays le plus branché au monde d'ici l'an 2000 pour que nous soyons concurrentiels dans un contexte de mondialisation.

Dans l'environnement actuel, la technologie et la concurrence suivent la demande du consommateur désireux d'obtenir de nouveaux services, un meilleur service à la clientèle, des prix plus bas et un choix accru de fournisseurs. Selon le Conseil, la concurrence est le meilleur moyen pour stimuler l'innovation en matière de nouveaux produits, de nouveaux services et de meilleures offres de prix. Il n'y a pas mieux pour encourager la création de nouvelles entreprises de communication concurrentielles et de nouveaux emplois.

Notre rôle diffère de celui des autres agences. Nous avons un double mandat: veiller à ce que les forces du marché jouent plus librement et à ce que les consommateurs aient accès à des services abordables, de même qu'à un contenu et à des produits canadiens.

Au cours des dernières années, le Conseil a vigoureusement soutenu la concurrence des marchés, comme principal moyen d'élargir les choix proposés au consommateur, de stimuler l'innovation dans le développement de nouveaux services et de promouvoir de nouvelles options de tarification.

Pour éviter de perdre du temps, je vais sauter une partie du texte que je vous ai remis, notamment un certain nombre de questions de radiodiffusion dont il est question plus loin dans le texte. Je précise toutefois que je me ferai un plaisir de répondre à vos questions sur les passages que j'aurai lus ou sur les passages concernant la radiodiffusion que je ne vais pas lire. Je voudrais garder le plus de temps possible pour les questions et réponses et je vais donc abréger mon exposé.

Au fil des ans, conformément aux objectifs des deux Lois, le Conseil a mis en place les politiques qui favoriseront l'établissement d'une concurrence durable dans les secteurs des télécommunications et de la radiodiffusion, afin que le Canada puisse être concurrentiel sur le marché international. Ces politiques ont été conçues avec soin et sur mesure pour faciliter une saine transition d'un marché monopolistique à une économie de concurrence dont les consommateurs pourront tirer parti pendant de nombreuses années.

Dans l'ensemble, ces structures se sont traduites par l'ouverture à la concurrence des marchés internes et internationaux de l'interurbain, du marché des téléphones payants et des marchés de la téléphonie locale; par des solutions de rechange au câble, par exemple l'attribution de licences à des services de distribution par satellite de radiodiffusion directe et à des systèmes de distribution multipoint; par l'absence d'une réglementation d'Internet, en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, mais l'ouverture des infrastructures aux fournisseurs de services Internet, en vertu de la Loi sur les télécommunications; par une révision des politiques sur la télévision et la radio; par l'établissement d'un objectif de service de base pour tous les abonnés au téléphone, et plus récemment, par des critères régissant l'attribution de licences de services numériques de télévision payante et spécialisée.

[Français]

Le premier grand marché que nous avons ouvert à la concurrence a été celui de l'interurbain, en 1992. Aujourd'hui, nous bénéficions des taux d'interurbains parmi les moins chers au monde.

Par la suite, nous avons ouvert le marché de la téléphonie locale à la concurrence. Celle-ci commence à s'installer durablement dans le service local pour les abonnés d'affaires et elle prend graduellement son essor dans le marché des abonnés résidentiels.

[Traduction]

L'ampleur des investissements et des synergies nés de la concurrence est tout aussi importante, sans compter ce qu'elle apporte à la croissance économique du pays. Aujourd'hui, le secteur des télécommunications est en soi l'une des industries dont la croissance est la plus forte au Canada. De plus, les télécommunications sont un des outils qui contribuent à rendre presque toutes nos entreprises plus efficaces.

De l'ensemble de cette industrie, le marché des télécommunications sans fil est l'un des secteurs les plus concurrentiels. L'arrivée de nouveaux joueurs a stimulé l'innovation et la concurrence dans les prix sur le marché. Qui aurait cru, lors de l'apparition des téléphones cellulaires, que vous pourriez un jour avoir accès à Internet, au courriel, aux nouvelles en ligne, au monde des affaires, à la météo, aux sports et aux services financiers, tout cela à partir d'un téléphone cellulaire?

• 1525

Ici au Canada, nous pouvons être fiers. Nous détenons le taux de pénétration le plus élevé par un service téléphonique, soit de près de 99 p. 100 pour une population d'environ 30 millions d'habitants. C'est un des taux les plus élevés au monde. Comparez cela avec le Mexique, notre partenaire de l'ALENA, dont la population atteint presque les 100 millions de personnes mais où seuls 30 p. 100 ont accès à un service téléphonique, ou même à la situation des États-Unis, où le taux de pénétration est de 92 p. 100, alors que la densité de population est beaucoup plus grande qu'au Canada.

[Français]

Le Canada est réputé avoir l'un des meilleurs systèmes de télécommunications au monde en plus d'être un des pays les mieux branchés. Toutefois, nous ne voulons pas nous arrêter là.

[Traduction]

En octobre dernier, le Conseil établissait pour la première fois un objectif minimal en matière de service téléphonique de base. Désormais, les compagnies de téléphone doivent fournir un tel service là où il n'existe pas et elles doivent l'améliorer là où l'objectif n'est pas atteint. Ce service de base comprend, entre autres, l'accès au service Touch-Tone pour une ligne individuelle et l'accès local à Internet.

Cela assurera à tous les Canadiens un accès aux outils de base dans une économie du savoir. L'accès à Internet sera également une occasion pour les commerces situés dans les régions rurales de mieux se positionner et mieux promouvoir leurs services aux niveaux national et international.

N'oublions pas que nous devons être concurrentiels au-delà de nos frontières et c'est pourquoi, en 1998, le Conseil a établi un cadre réglementaire pour que s'instaure un nouveau marché concurrentiel au Canada dans les services de télécommunications internationales.

[Français]

La mise en place de ce régime permet au Canada de respecter les engagements pris lors des rencontres du GATT.

Parlons maintenant un peu d'Internet.

[Traduction]

En mai dernier, nous annoncions que nous ne réglementerions pas la radiodiffusion sur Internet; nous étions ainsi l'un des premiers régulateurs au monde à clarifier notre position par rapport à ce nouveau médium. Nous croyons que le Canada a et continuera d'avoir une solide présence sur Internet sans notre intervention, c'est-à-dire sans réglementation.

Bien que nous reconnaissions qu'une partie du contenu d'Internet tombe sous la Loi sur la radiodiffusion, nous avons conclu, pour l'instant du moins, que ce médium complète la radiodiffusion plus qu'il ne s'y substitue.

L'industrie des nouveaux médias au Canada est bien vivante, tout à fait concurrentielle et elle prospère très bien sans réglementation. Nous croyons que l'environnement ouvert dans lequel elle évolue attirera des investissements dans les industries de la radiodiffusion et des télécommunications et chez leurs partenaires des nouveaux médias.

Je vais sauter les passages sur la radiodiffusion, mais encore une fois, je me ferai un plaisir de répondre aux questions à ce sujet.

[Français]

De nos jours, la convergence est le nouveau modèle à suivre puisqu'il semble que tous veulent offrir la télévision par câble, le téléphone et Internet.

Au conseil, nous parlons de convergence depuis 1994. Nous en traitions alors dans notre rapport sur l'inforoute. Finalement, nous en sommes témoins dans plusieurs endroits au pays.

[Traduction]

Toutefois, nous sommes toujours en transition et nous croyons que le rôle du Conseil devient de plus en plus crucial. Dans un monde des communications en pleine évolution, le Conseil devra évaluer les outils qu'il a mis en place pour atteindre les objectifs des deux lois.

Le Conseil annoncera bientôt le plan d'action triennal qui le conduira jusqu'à l'an 2003. Voici quelques-unes des questions stratégiques que le plan abordera: veiller à ce que les Canadiens aient accès au plus grand choix possible de distributeurs et à Internet; défendre notre souveraineté culturelle; encourager une concurrence durable; suivre de près le dossier de la concentration de propriété; promouvoir une forte présence canadienne dans l'univers numérique; reconnaître l'importance des droits d'émissions comme l'a bien fait ressortir la cause récente de I-Crave; et à l'interne, réviser nos façons de faire pour être plus efficaces et mieux répondre aux besoins de nos clientèles.

Le Conseil n'a nullement l'intention de mousser la concurrence pour la concurrence en soi. Nous devons continuer à maintenir l'équilibre le plus juste possible entre l'atteinte des divers objectifs sociaux et culturels et les impératifs d'une industrie des communications économiquement forte et concurrentielle.

Je vous remercie de votre attention et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Colville.

Je vais voir si M. Jones a des questions pour commencer. Monsieur Jones.

• 1530

M. Jim Jones (Markham, PC): Au dernier paragraphe, vous nous dites que «le Conseil n'a nullement l'intention de mousser la concurrence». Qu'entendez-vous par là?

M. David Colville: Nous ne voulons pas provoquer de la concurrence pour le simple principe de la concurrence. Nous ne croyons pas à la concurrence pour la concurrence; ce qui importe, ce sont les avantages que nous pouvons retirer de la concurrence.

M. Jim Jones: Mais par exemple, I-Crave TV, ce n'est pas de la concurrence?

M. David Colville: Si, je pense que oui.

M. Jim Jones: Alors qu'est-ce que c'est que cette histoire où ils ne peuvent pas le faire?

M. David Colville: Dans le cas de I-Crave TV, dans la mesure où I-Crave peut faire de la radiodiffusion, comme nous l'avons dit dans notre décision de l'an dernier, nous avons l'intention d'exempter des activités de radiodiffusion du genre de I-Crave de la nécessité d'obtenir une licence de radiodiffusion.

M. Jim Jones: Quand allez-vous rendre votre décision là- dessus? Ils sont bloqués depuis 90 jours.

M. David Colville: Dans le cas de I-Crave TV, c'est un problème de droits d'auteur, dont le Conseil ne s'occupe pas. C'est une affaire qui est devant les tribunaux, la question étant de savoir s'ils ont ou non les droits de diffusion de ces programmes. Ce n'est donc pas une question qui relève du Conseil.

M. Jim Jones: Bon. Je n'ai rien d'autre pour l'instant.

La présidente: Merci, monsieur Jones.

Monsieur Murray.

M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Merci.

Monsieur Colville, je voudrais revenir à cette question de la déréglementation et de l'amélioration du secteur des télécommunications dont vous parliez.

Que peut faire le CRTC pour améliorer les télécommunications au Canada? Je ne plaisante pas; je vous demande quels sont les outils dont vous disposez. Vous avez par exemple dit que vous aviez une nouvelle définition du service téléphonique de base, qui inclurait le service Touch-Tone. Je crois qu'il y a encore des lignes à plusieurs abonnés au Canada.

M. David Colville: Oui.

M. Ian Murray: Il y en a même un nombre surprenant, à ce qu'il me semble, et j'aimerais savoir quand vous pensez que ce nouveau service sera en place. Pouvez-vous obliger les compagnies de téléphone à le mettre en place dans un délai donné? Est-ce que c'est dans votre mandat?

M. David Colville: Oui. Nous avons rendu notre décision l'an dernier à propos de ce que nous qualifions de zones à prix de revient élevé. On en parle généralement comme de notre décision sur le prix de revient élevé, et c'est une décision qui concerne en fait la fourniture d'un service téléphonique dans de nombreuses régions où les coûts de ce service sont très élevés. Dans cette décision, nous avons précisé que le service de base devait être un service de lignes individuelles avec accès local à Internet etc., et nous avons constaté à cette occasion qu'il restait encore un certain nombre de lignes à plusieurs abonnés, comme vous l'avez dit.

Nous avons demandé aux petites entreprises indépendantes de nous adresser avant le mois de mars de cette année, c'est-à-dire dans une semaine, leurs propositions de mise en place d'un service de ce niveau dans un délai raisonnable qui serait précisé dans leur demande. Nous examinerons alors ces demandes.

Selon l'entreprise et l'ampleur du problème, je pense qu'il faudra de un à quatre ans pour mener l'entreprise à bien. Dans certains cas, il faudra peut-être augmenter les tarifs pour couvrir les coûts de l'amélioration du service. C'est notre rôle de le faire, et nous avons donc demandé aux compagnies indépendantes de nous adresser leurs propositions cette année.

L'année prochaine, nous allons faire une révision du plan de plafonnement des prix que nous avons imposé aux grandes compagnies, celles que l'on appelait les compagnies Stentor—Bell Canada, Telus en Alberta, etc. Nous avons décidé de réexaminer cette question de l'amélioration du service avec ces compagnies en même temps que nous reverrons le plan de plafonnement des prix. Je dois dire que la plupart de ces entreprises se portent bien pour ce qui est du niveau de service. Ce sont les petites entreprises qui ont tendance à avoir plus de difficultés.

M. Ian Murray: Pensez-vous que certaines des petites entreprises risquent de ne pas réussir et d'être absorbées par une plus grosse compagnie? A-t-on envisagé une forme de subvention qui serait financée par les abonnés aux grandes compagnies de téléphone pour les aider à absorber ce coût?

M. David Colville: Je ne pense pas que ces petites entreprises devront nécessairement être absorbées. Nous avons mis en place un dispositif de subvention quand nous avons ouvert le marché de l'interurbain à la concurrence. Nous avons appelé cette subvention une «contribution». C'est la contribution ou le paiement que les fournisseurs d'interurbains versent aux entreprises locales pour subventionner la fourniture du service. C'est un montant de tant de cents par minute sur les appels interurbains que ces compagnies acheminent. Cette subvention est donc une forme d'aide à la fourniture du service local.

• 1535

Avec cette subvention et les tarifs locaux, nous pensons que toutes ces entreprises, à l'exception peut-être de NorthwesTel dans le Nord, comme nous le signalons dans cette décision... Étant donné le territoire immense que doit desservir cette compagnie et la population très clairsemée de cette région, il faudra peut-être qu'on lui donne une subvention supplémentaire, mais sinon, dans le Sud, nous pensons que cette contribution—cette subvention—est suffisante.

M. Ian Murray: Vous mentionnez un certain nombre de points dans les structures concurrentielles. Plusieurs de ces points ont déjà été réalisés. Je me demande si vous avez eu le temps de prendre du recul par rapport à ces décisions pour voir... Il s'agit de productivité. Je sais qu'on extrapole peut-être un peu beaucoup si l'on essaie de traduire tout cela en productivité accrue au Canada, mais je pense qu'on peut dire néanmoins que là où nous avons déréglementé dans le monde depuis une dizaine ou une quinzaine d'années, il y a vraiment eu une amélioration de la situation des consommateurs.

Est-ce que vous étudiez cela ou partez-vous simplement du principe que ce sont de bonnes initiatives? Je ne vous vois pas décider de reréglementer après être partis dans l'autre sens. Mais pensez-vous rétrospectivement que vous n'auriez pas dû peut-être aller aussi vite dans certains domaines quand vous avez déréglementé? Ou au contraire, est-ce que vous vous êtes contentés d'essayer de rattraper le marché et est-ce que toutes ces mesures n'ont pas été dictées plus ou moins par un fait accompli lorsque vous les avez mises en place?

M. David Colville: C'est une bonne question. En gros, ce que vous me demandez, c'est si je ferais les choses différemment si je devais les refaire maintenant.

M. Ian Murray: Je pense que j'aurais pu formuler ma question de façon beaucoup plus simple comme vous venez de le faire.

M. David Colville: Non, car toutes les nuances que vous avez exprimées sont importantes. Cela rejoint dans une certaine mesure la question que M. Jones a posée à propos de la concurrence, quand je lui ai dit que nous ne souhaitions pas avoir de la concurrence pour le simple principe de la concurrence. Ce que nous croyons, c'est que la concurrence est avantageuse pour le consommateur et qu'elle est avantageuse aussi pour l'entreprise dans la mesure où elle entraîne un gain de productivité. Les télécommunications et tout le secteur de l'information... Si vous avez une entreprise, de nos jours, l'information est probablement l'un des ingrédients les plus précieux de cette entreprise, avec les ressources humaines.

Si vous pouvez accéder à l'information rapidement et à moindre coût, vous allez accroître votre efficacité, et notre rôle est de permettre justement cela grâce à la mise en place de télécommunications à bon marché, en particulier sur Internet maintenant.

Peut-être en fait aurait-il fallu aller un peu plus vite et agir un peu plus tôt dans certains cas. Par exemple, quand nous avons ouvert le marché de l'interurbain à la concurrence, nous avions 10 ans de retard sur les Américains. Cela dit, nos prix ont baissé beaucoup plus vite qu'aux États-Unis au point que, quatre ou cinq ans après avoir ouvert ce marché à la concurrence, nous avions des prix qui étaient en fait inférieurs à ceux des Américains.

Vous pourriez dire qu'on aurait peut-être dû songer un peu plus tôt à ouvrir le marché local à la concurrence, mais nous devions régler au préalable une foule de problèmes dans ce secteur—problèmes techniques et administratifs.

J'ai donné une causerie l'autre soir où j'ai dit que la sagesse rétrospective nous aurait permis de régler un bon nombre de ces problèmes. Cette idée dont je viens de parler, cette subvention, cette contribution, qui permettrait d'obtenir un service abordable, particulièrement dans les régions plus rurales... Nous avons ouvert le marché de l'interurbain à la concurrence et imposé cette contribution selon le tarif minute du trafic interurbain. Si j'avais su à l'époque à quoi ressemblerait le marché aujourd'hui, nous aurions peut-être épousé une approche légèrement différente sur cette question de la contribution une fois que tout le marché aurait été ouvert à la concurrence.

Par exemple, alors que tout le marché est concurrentiel, est-il juste d'obliger seulement le fournisseur de service interurbain à payer la subvention? Dans le cas d'Internet, où il n'y a vraiment aucune différence entre un appel local et un appel interurbain, comment calculez-vous le trafic interurbain pour établir le montant de cette contribution?

Il y a des choses comme ça. En fait, nous examinons cette question en ce moment même pour voir s'il n'y aurait pas une meilleure approche pour régler ce genre de chose. Mais de manière générale, je crois que notre approche est bonne.

M. Ian Murray: Eh bien, peut-être que la technologie va finir par éliminer la nécessité de faire cela. Si vous prenez le sans-fil, etc., et tout ce qui viendra au cours des prochaines années... Nous avons vu à quelle vitesse les coûts des télécommunications ont chuté. Vous n'aurez peut-être pas à faire cela.

• 1540

M. David Colville: Je crois que oui, mais il faudra attendre longtemps avant que le marché local devienne concurrentiel au point où l'on pourra dire que oui, nous sommes satisfaits, et le régulateur peut se retirer.

Il y a toute une gamme de problèmes dont je n'ai vraiment pas parlé ici, et ces problèmes ont tous trait à l'accès: l'accès des fournisseurs de service de télécommunications aux rues et aux ruelles. Il se pose un gros problème à Vancouver en ce moment au niveau des entreprises qui veulent un accès à un taux raisonnable pour installer leur équipement sous les rues ou sur les poteaux ou ailleurs, et les concurrents ont des difficultés d'accès aux immeubles à logements multiples, qu'il s'agisse d'immeubles commerciaux ou d'immeubles résidentiels, etc. Il y a toute une série de problèmes que nous devons maîtriser et pour lesquels nous devons trouver des solutions; cela pose un tas de problèmes juridiques et administratifs.

La présidente: Merci, monsieur Murray.

[Français]

Monsieur Dubé, s'il vous plaît.

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): À la dernière page de votre plan d'action, vous parlez du deuxième objectif, qui est de défendre notre souveraineté culturelle. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que vous entendez faire de plus que ce que vous faites habituellement à cet égard?

[Traduction]

M. David Colville: Je ne l'ai pas lu parce que nous manquions de temps, mais nous venons d'arrêter une nouvelle politique pour la réglementation de la télévision. Bien sûr, vous êtes tous au courant de notre récente décision concernant Radio-Canada, qui a suscité une certaine controverse dans les médias. Il y a des problèmes comme celui-là. Nous allons maintenant renouveler les licences des grands télédiffuseurs dans le cadre de cette politique au cours des prochaines années. Nous allons assurer le maintien de notre souveraineté culturelle dans le cadre des objectifs de cette politique.

[Français]

M. Antoine Dubé: À la page suivante, vous nous présentez un tableau qui porte sur la Loi sur la radiodiffusion et la Loi sur les télécommunications, et vous y indiquez qu'il y a 105 stations de télévision privées. Est-ce que vous pourriez nous fournir le même genre de tableau, mais en y précisant le nombre de stations françaises, anglaises et peut-être d'autres langues? En connaissez-vous la proportion approximative?

[Traduction]

M. David Colville: Je ne peux pas vous citer ces chiffres au pied levé, mais je peux certainement vous les communiquer.

Bien sûr, il y a un certain nombre de stations de télévision et de radio de langue française au Québec, et Radio-Canada est présente partout au pays, mais nous avons aussi accordé des licences à un grand nombre de chaînes spécialisées de langue française, et nous venons tout juste d'accorder quatre licences supplémentaires, qui sont sur le point d'entrer en ondes au Québec. Nous pouvons sûrement vous fournir un tableau qui indiquera ce qu'il en est en ce moment.

[Français]

M. Antoine Dubé: Au Québec et au Canada? Oui.

Je ne suis pas inspecteur, mais j'aime bien écouter, particulièrement lorsque je suis en automobile, les stations de radio FM au Québec. Il me semble qu'on y diffuse de plus en plus de chansons américaines ou de langue anglaise. Est-ce que la proportion a changé récemment et que cela m'a échappé? Il me semble qu'une certaine station au Québec fait jouer une chanson de langue anglaise sur deux.

[Traduction]

M. David Colville: En fait, la proportion s'est inversée, dans la mesure où notre exigence relative au contenu canadien à la radio était autrefois de 30 p. 100. Nous l'avons haussée il y a deux ans à 35 p. 100. J'aurais donc espéré vous voir entendre davantage de chansons canadiennes que de chansons américaines; en fait, nous avons haussé la barre.

[Français]

M. Antoine Dubé: Est-ce qu'on a établi des exigences au niveau du nombre de chansons en français ou tout simplement au niveau du contenu canadien par rapport au contenu étranger?

[Traduction]

M. David Colville: Il y en a pour les stations de langue française, mais je ne peux pas vous citer ces chiffres au pied levé maintenant. Pardonnez-moi.

[Français]

M. Antoine Dubé: Deux importantes transactions ont eu lieu dernièrement dans des domaines différents; Rogers a fait l'acquisition de Vidéotron, tandis que dans le secteur des télécommunications, Bell a fait l'acquisition de Téléglobe. Est-ce que vous examinerez ces transactions et, si oui, quand cet examen aura-t-il lieu?

• 1545

[Traduction]

M. David Colville: La Loi sur les télécommunications ne nous oblige pas à donner notre approbation préalable aux fusions, nous n'allons donc pas examiner la fusion Téléglobe-Bell. Mais pour ce qui est de la fusion Vidéotron-Rogers, la Loi sur la radiodiffusion exige notre approbation. Nous nous attendons à ce que Rogers nous adresse une demande bientôt. Nous ne l'avons pas encore reçue. Comme vous, nous n'avons entendu parler de cette transaction qu'il y a une semaine environ; nous n'avons donc pas fixé d'audience pour l'étudier. Nous allons prévoir une audience publique une fois que nous aurons reçu la demande.

[Français]

M. Antoine Dubé: Merci, madame la présidente.

[Traduction]

La présidente: Merci, monsieur Dubé.

Monsieur Lastewka, s'il vous plaît.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Je vous remercie pour votre exposé, monsieur Colville. J'ai trois questions.

Premièrement, à la page 2, vous dites que vous allez rendre le milieu plus concurrentiel en accordant davantage de licences et ainsi de suite. Combien de systèmes de distribution multipoint y a-t-il au Canada en ce moment?

M. David Colville: Nous en avons accordé une licence au Manitoba. C'était la première du genre. En raison de la technologie, on ne peut accorder qu'une seule licence de ce genre sur chaque territoire. Il y en a donc une au Manitoba, une en Saskatchewan, une en Ontario et une au Québec. Je crois savoir que nous pourrions recevoir une demande pour la Colombie-Britannique.

M. Walt Lastewka: Vous procédez donc par région?

M. David Colville: Nous recevons les demandes par région, oui.

M. Walt Lastewka: Existe-t-il des régions ouvertes à l'heure actuelle?

M. David Colville: Je ne comprends pas ce que vous voulez dire par «régions ouvertes».

M. Walt Lastewka: Eh bien, vous avez dit que seul un territoire peut avoir...

M. David Colville: Nous n'avons pas de restriction concernant la région pour laquelle on peut demander une licence. Les requérants ont décidé de faire des demandes pour ces régions en particulier.

M. Walt Lastewka: D'accord.

À la page 5, vous dites comment vous avez ouvert la concurrence en permettant aux radiodiffuseurs de posséder plusieurs stations. Je trouve que c'est un peu contradictoire, peut-être pas dans les régions peuplées mais c'est le cas dans les régions plus petites et moins peuplées. Chez nous, dans le Niagara, une station de radiodiffusion a acheté les autres stations de radio. Nous sommes envahis par la radio de Toronto la fin de semaine, et je ne vois pas... Je pense qu'on est allé dans le sens contraire. Je ne comprends pas comment permettre à un monopole d'acquérir plusieurs stations rend le milieu plus concurrentiel ou améliore le choix pour les particuliers. Pouvez-vous m'expliquer cela?

M. David Colville: Je vais essayer.

Lorsque nous avons modifié la politique sur la radiodiffusion, la question des monopoles nous préoccupait beaucoup. Si nous avons voulu modifier la politique sur la radiodiffusion, c'est que l'industrie de la radio n'était pas en très bonne santé financière il y a quelques années, au Canada, et c'était le cas partout au pays. Il y avait quelques stations qui se débrouillaient assez bien et quelques groupes qui se débrouillaient bien, mais en règle générale, l'industrie de la radio n'allait pas très bien. Nous avons jugé qu'il serait indiqué d'aider l'industrie à se consolider sur le plan financier, et aussi en lui permettant de diversifier le choix pour les consommateurs dans un marché.

Ce qui se produisait dans un certain nombre de marchés, c'était qu'une station de radio en particulier détenait la formule dominante, si bien que tous ses concurrents voulaient l'imiter. Ce qu'on voyait alors sur plusieurs marchés, c'était que tout le monde faisait la même chose, alors que si un propriétaire exploitait plusieurs stations, il pouvait diffuser de la musique country sur l'une d'entre elles, par exemple, et du rock sur une autre, et ainsi ces stations de radio n'allaient pas se concurrencer elles-mêmes.

Quand nous avons mis en place ce nouveau cadre, nous étions conscients des monopoles et cela nous inquiétait. Nous avons donc permis aux exploitants de posséder deux radio MA et deux radio MF dans un marché donné, mais seulement si le marché offrait plus que huit stations, je crois. Personne ne peut en avoir davantage, à moins qu'il s'agisse d'un très petit marché. Si vous n'avez qu'une seule station dans un marché donné, alors bien sûr vous aurez un problème si vous n'avez que cette station-là, et j'imagine que l'on pourrait y voir un monopole. Mais dans les grands marchés, nous ne permettons pas à un seul propriétaire de posséder plus de la moitié des stations du marché.

M. Walt Lastewka: Votre explication me laisse perplexe parce que je crois que c'est le contraire qui s'est passé.

À propos d'un secteur en particulier, vous avez parlé du service téléphonique de base, et je crois que c'est M. Murray qui a parlé des régions où il existe encore des lignes communes. Je pense qu'il en reste environ 7 500 au Canada. Mais vous avez parlé d'un service de base qui comprendrait l'accès à la ligne individuelle, au service Touch-Tone, et ainsi de suite. Allez-vous appliquer la même norme au câble?

• 1550

Dans mes voyages, j'ai été témoin d'un certain nombre de situations partout au pays, où nous avons des compagnies de câble qui sont responsables de certaines régions, et dès que l'on entre un peu dans une région rurale, on n'a pas accès au câble. Tout comme vous le disiez plus tôt, si l'on veut une entreprise efficiente, il faut avoir accès aux communications, et il faut être en mesure d'avoir accès à Internet au plus vite et ainsi de suite. Encore là, nous pénalisons les gens qui ont des entreprises dans les régions rurales parce qu'ils n'ont pas accès au câble. Allez- vous appliquer au câble le même principe que vous avez appliqué au téléphone?

M. David Colville: Non, notre approche est un peu différente en ce qui concerne le câble, parce que le câble est en fait régulé à titre d'entreprise de radiodiffusion en vertu de la Loi sur la radiodiffusion. En vertu de la Loi sur la radiodiffusion, nous n'avons pas tout à fait les mêmes politiques ou exigences réglementaires pour le câble que nous avons pour le téléphone en vertu de la Loi sur les télécommunications. L'approche est quelque peu différente ici.

Nous avons accordé des licences pour deux services de satellite au foyer au Canada, qui peuvent offrir aux consommateurs des régions rurales un service multichaîne, du type radiodiffusion. Le câble est de plus en plus présent dans les campagnes. Le câble est offert à plus de 80 p. 100 des foyers canadiens partout au pays, et environ 80 p. 100 des foyers à qui on l'offre y sont abonnés. Il y a donc beaucoup de gens qui ont le câble, mais ce n'est pas le cas de tout le monde.

Au sujet de cette question de concurrence, nous avons déterminé récemment que le service de satellite au foyer va fournir le service voulu à ceux qui n'ont pas le câble. Nous savons aussi que ces deux entreprises qui fournissent des services de satellite au foyer comptent offrir bientôt un service d'accès à Internet aussi. Vous avez aussi mentionné le SDM qui fournit des services à plusieurs régions rurales.

Il se passe quelque chose d'inédit au Nouveau-Brunswick qui pourrait vous intéresser. NBTel vient de mettre au point un système qui lui permet d'offrir un service de télévision multichaîne sur le fil téléphonique. Ça ressemble à la télévision par câble, et NBTel en est maintenant à 120 chaînes. Ce service n'en est cependant qu'à ses débuts, et NBTel a obtenu une licence du CRTC pour offrir ce service au Nouveau-Brunswick. J'imagine que cela lui permettra aussi de concurrencer le câble, et d'étendre ce service subséquemment dans les régions plus rurales de la province un jour.

M. Walt Lastewka: Ce que je voulais dire essentiellement ici, c'est que trop souvent au Canada, on oublie nos régions rurales et les petites entreprises qu'on y trouve. Ces petites entreprises sont au coeur de la création des nouveaux emplois, et si nous ne trouvons pas le moyen de leur offrir des services plus vite, nous allons en fait handicaper notre croissance économique et notre productivité.

M. David Colville: Voilà pourquoi nous avons épousé cette approche dans ce domaine qui coûte très cher, et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons accordé des licences aux entreprises indépendantes plus petites qui s'occupent essentiellement de desservir les régions plus rurales. C'était surtout à ce niveau que se situait le problème des lignes communes et du manque d'accès à Internet, et voilà pourquoi nous leur avons demandé de nous adresser leur demande plus tôt. Comme je l'ai dit, nous leur avons demandé de nous faire parvenir leurs propositions pour le 1er mars.

M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Lastewka.

Monsieur Schmidt, s'il vous plaît.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Merci, madame la présidente.

Je vous remercie de votre témoignage. J'aimerais en fait vous poser plusieurs questions, et elles ont toutes trait à la technologie. Permettez-moi de citer votre texte, particulièrement ce que vous dites à la page 3:

    Ce service de base comprend, entre autres, l'accès au service Touch-Tone pour une ligne individuelle et l'accès local à Internet.

J'aimerais vous demander si c'est d'une ligne terrestre qu'il s'agit là.

M. David Colville: Dans le contexte de cette décision, c'est le cas, oui.

M. Werner Schmidt: Si tel est le cas, ne faites-vous pas obstacle aux avancées technologiques? Il en coûterait très cher, si l'on en venait a cela. Nous entrons très rapidement dans l'ère de la communication sans fil, et je doute sérieusement qu'il s'agisse là d'une initiative réalisable. La technologie du câble dépend aussi des lignes terrestres dans une large mesure, même s'il y a aussi certaines interfaces avec le sans-fil dans ce cas-là. Pourquoi tenez-vous tant à en faire un service de base, au lieu d'offrir l'accès au téléservice, qu'il s'agisse du numérique, du sans-fil ou d'une ligne terrestre? À quoi bon?

M. David Colville: Je devrais peut-être juste corriger un peu ce que j'ai dit lorsque j'ai dit: «essentiellement, oui».

• 1555

De notre point de vue, pour ce qui est de l'avenir de toute cette technologie, nous sommes en réalité neutres. Si le sans-fil peut faire le travail, ça va. Quand nous parlions de l'accès à Internet et du reste ici, nous faisions allusion de manière générale aux compagnies de téléphone qui pour la plupart, fournissent déjà l'accès gratuit à Internet partout au pays. S'il n'y a pas de fournisseur de service Internet dans une petite ville donnée, elles fourniront l'accès gratuit à la petite ville où il y en a un, ce qui ne revient pas à dire que les compagnies de téléphone...

Par exemple, nous tenons en ce moment des audiences pour examiner toute cette question que pose NorthwesTel, qui a d'énormes difficultés à fournir ces services, comme je l'ai dit plus tôt. Elle peut très bien se servir de la technologie radio pour fournir le service Internet à certaines des régions plus éloignées du Nord; nous ne voulons donc sûrement pas faire obstacle à l'évolution de la technologie.

Même dans le cas de la concurrence téléphonique locale, nous avons ouvert ce marché à la concurrence. Nous savons qu'il existe des compagnies de téléphone cellulaire ainsi que ces entreprises SCP numériques et sans fil. Un grand nombre de personnes privilégient maintenant ce genre de téléphone au lieu du téléphone à circuit à domicile. Et c'est très bien. Nous encourageons ce genre de chose.

M. Werner Schmidt: Mais ne devriez-vous pas examiner votre politique? Si votre service de base est l'accès au service Touch- Tone... Ce que je tiens à vous dire, c'est que vous devriez repenser votre politique. Ce qu'on veut vraiment, c'est l'accès au service téléphonique de base. Je pense que c'est l'essentiel ici. Si l'on veut le service Internet, je pense que c'est important d'avoir ça.

J'aimerais aussi savoir pourquoi le CRTC a décidé de ne pas contrôler Internet, ou de ne pas réguler Internet. J'imagine que c'est largement parce que vous ne pouvez pas le faire. C'est tout simplement impossible sur le plan technique. Mais ma question porte en fait sur la nouvelle technologie qui existe. C'est bien beau de dire que vous n'allez pas réguler la technologie et que vous êtes neutres sur ce plan. Je ne crois pas que vous puissiez rester neutres. Autrement, à quoi sert le CRTC?

M. David Colville: Eh bien, nous espérons que la concurrence permettra entre autres de créer et d'encourager de nouvelles technologies grâce auxquelles on pourra fournir ces divers services.

M. Werner Schmidt: Je l'espère aussi.

M. David Colville: Je suis parfaitement d'accord avec vous. Cela ne me pose aucune difficulté.

Lorsque nous avons rendu notre décision sur la concurrence locale, par exemple, nous n'avons pas fait état d'une technologie en particulier. Qu'il s'agisse d'un téléphone à circuit ou sans fil, d'une technologie à infrarouge ou peu importe, si elle peut fournir le service, c'est parfait, et nous l'encourageons.

Côté Internet, bon nombre de personnes ont dit comme vous que nous ne pouvions pas le réguler de toute manière. C'est peut-être le cas. Je ne sais pas ce que l'on peut dire à ce sujet. Prenez le cas de la technologie radio; il y a des ondes radio qui traversent la pièce où nous sommes en ce moment même. On aurait peut-être pu dire en 1900 qu'il était impossible de réguler ces ondes radio qui voyageaient dans l'espace, et pourtant, on a trouvé un moyen de régler ce genre de chose. Je ne sais donc pas si l'on pourra trouver un moyen d'en faire autant avec l'Internet. Notre approche, cependant, ne tient pas au fait que nous avons baissé les bras. Nous avons dit que nous n'interviendrons pas parce que nous ne jugeons pas nécessaire de le faire.

M. Werner Schmidt: Mais cela ne répond pas à ma prochaine question, et elle concerne l'accès au service Internet. Vous voulez en faire un service de base pour tous les Canadiens, n'est-ce pas?

M. David Colville: L'accès à Internet.

M. Werner Schmidt: Très bien, mais cela veut vraiment dire que les Canadiens doivent avoir accès à la technologie partout au Canada.

M. David Colville: Nous voulons que tous les Canadiens aient accès à Internet.

M. Werner Schmidt: D'accord et vous dites que vous voulez contrôler cela aussi, mais vous n'êtes pas tout à fait sûr de vouloir le faire. Est-ce bien ce que vous dites?

M. David Colville: Nous ne voulons pas contrôler et nous ne voulons pas réguler Internet conformément à la Loi sur la radiodiffusion, où l'on trouve les exigences relatives au contenu canadien comme celles que nous avons ici, et cela constitue une chose tout à fait différente. Voilà pourquoi j'ai bien pris soin de dire dans mon exposé que lorsque nous disons que nous n'allons pas réguler Internet, nous n'allons pas réguler Internet conformément à la Loi sur la radiodiffusion. Nous ne disons pas la même chose concernant la Loi sur les télécommunications. Pour ce qui est de cette loi, nous disons que nous voulons nous assurer que les entrepreneurs partout au pays aient accès à Internet parce que cela va devenir un outil précieux dans nos vies quotidiennes et dans l'exploitation des entreprises.

M. Werner Schmidt: Eh bien, ce n'est pas une question d'accès. Je suis tout à fait d'accord avec ça. Mais si vous ne contrôlez pas Internet conformément à la Loi sur la radiodiffusion, le contrôlez-vous conformément à la Loi sur les télécommunications?

M. David Colville: Nous en contrôlons l'accès en vertu de la Loi sur les télécommunications, c'est exact. Par exemple, j'aimerais rappeler le cas que l'on mentionnait il y a quelques instants au sujet du câble. Essentiellement, le câble est régulé en vertu de la Loi sur la radiodiffusion étant donné qu'il s'agit d'une entreprise de radiodiffusion. Mais dans la mesure où le câble se lance en fait dans une activité de télécommunications, nous le régulons en vertu de la Loi sur les télécommunications. En vertu de la Loi sur les télécommunications, nous avons obligé les entreprises de câblodiffusion à offrir l'accès aux multiples fournisseurs de service Internet par l'entremise du câble à grande vitesse de transmission, si bien que personne n'est captif des services Internet des entreprises de câblodiffusion.

• 1600

M. Werner Schmidt: Donc si un médium électronique n'est pas terrestre ou câblé, entre-t-il en concurrence avec ces entreprises de câblodiffusion?

M. David Colville: Les services de téléphonie cellulaire, les SCP, les services satellites sans fil, etc., entreraient en concurrence pour offrir divers services.

M. Werner Schmidt: Donc c'est le cas. Les régulez-vous aussi?

M. David Colville: Les entreprises SCP de téléphonie cellulaire relèvent de la Loi sur les télécommunications, et nous avons décidé de ne pas les réguler. La loi nous donne le pouvoir de décider si nous allons les réguler ou non, et dans leur cas, nous avons décidé de ne pas les réguler parce que nous croyons qu'il y a assez de concurrence, de telle sorte que la régulation n'est pas nécessaire.

M. Werner Schmidt: Cela veut donc vraiment dire que vous régulez partiellement, mais pas complètement, les autres concurrents. Cela fausse vraiment toute la concurrence.

M. David Colville: Nous régulons dans les domaines où nous jugeons qu'il n'y a pas assez de concurrence.

M. Werner Schmidt: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Schmidt.

Monsieur Pickard, s'il vous plaît.

M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Monsieur Colville, toutes mes excuses pour mon retard. J'ai raté votre exposé. Je pourrais vous remercier d'avoir fait votre exposé avant mon arrivée. J'ai pu ainsi lire en diagonale votre texte.

La principale préoccupation de ma région est celle de tout le Canada rural qui doit vivre avec divers problèmes et divers règlements. Je me contenterai de vous tracer un bref portrait d'une station de radio à Leamington, dans ma région. Cette station de radio s'est complètement départie de son personnel, de sa salle de nouvelles, de ses reporters, et elle ne fait aucune entrevue dans la région. Elle s'est rebaptisée station de musique country et western, elle joue ce rôle, et elle diffuse ce genre de musique. Son produit est différent de la plupart des autres stations de radio; elle jouit donc d'un certain créneau.

Ses lecteurs prennent le Windsor Star, un journal local qui se trouve à une trentaine de milles de là, et ils lisent les articles du Windsor Star dans leurs bulletins de nouvelles. Au lieu de recourir à des reporters et à des commentateurs de l'actualité, la station engage des jeunes gens qui peuvent lire ces textes.

À mon avis, c'est une grande perte. Même si nous respectons encore vos règles, nous respectons le règlement, et même si nous faisons ce qui doit être fait, je pense qu'il y a un vide dans le Canada rural. Et pas seulement dans ma circonscription; je crois que c'est ce qui arrive partout au pays. Ça arrive chez nous, et la concurrence est telle que les autres stations ne peuvent pas suivre. Elles ne peuvent pas réaliser de profits.

Je sais quels salaires on verse à ces gens et je sais à quoi fait face ce médium en milieu rural. Il se peut fort bien que la même situation existe dans les régions urbaines ici, mais je n'en suis pas certain. Qu'allons-nous faire? À quoi ressemblera l'avenir? Où allons-nous et comment allons-nous corriger certaines situations de ce genre? Le marché semble impuissant, et chose certaine, les coûts continuent d'augmenter pour ces stations indépendantes. Jour après jour, elles sont absorbées par divers grands radiodiffuseurs. Je pense que la station dont je parle a changé plusieurs fois de mains au cours des dix dernières années.

Qu'avez-vous à dire à ce sujet? Essentiellement, vous êtes là pour vous assurer que nous ayons un moyen suffisant et convenable de diffuser la culture, et je pense que nous l'avons perdu.

M. David Colville: Je ne peux pas me prononcer sur cette station en particulier.

M. Jerry Pickard: Non, non, je ne mentionnais cet exemple que pour vous donner une idée générale de la situation.

M. David Colville: Je comprends ce que vous dites, et c'est une bonne observation. Je vois bien la situation dont vous parlez, et justement, elle nous préoccupe. C'est une chose que de parler du contenu canadien qui passe de 30 à 35 p. 100. J'oublie à quel niveau se situe la musique vocale française, mais nous nous en préoccupons aussi. Pour ce qui est du problème fondamental que vous soulevez, on tâtonne souvent. Comment allons-nous régler tout le problème de l'expression locale?

• 1605

Certains d'entre vous savent que je suis de la Nouvelle-Écosse, qui est une région où l'on trouve surtout des petites villes comparativement au reste du pays, même si je suis de Halifax qui est une ville de taille moyenne. Je parle à plusieurs radiodiffuseurs de la province, et ceux qui réussissent sont ceux qui fournissent une programmation locale de bonne qualité. Ils semblent maintenir leur réussite sur leur propre marché. Les stations qui attirent des auditeurs sont celles qui leur fournissent le service local auquel ils peuvent s'identifier et qu'ils peuvent comprendre.

Il est difficile de dire comment nous allons gérer la situation de chaque station de radio au pays. Le jeu libre des forces du marché et l'intervention du régulateur fait toujours l'objet d'un équilibre délicat. À quel moment faut-il intervenir parce que le marché a «échoué», si vous voulez, et dans quelle mesure laisse-t-on jouer librement les forces du marché?

Quand je répondais à la question de M. Lastewka, l'une de ses préoccupations avait trait à la concentration de la propriété. Nous avons pensé que nous aiderions à renforcer certaines stations plus petites si on leur permettait de devenir la propriété d'un groupe plus grand, ce qui ne veut pas dire que nous tenons à ce que tout le personnel soit coupé et que la station de radio ne devienne que l'écho des journaux. Nous espérons ainsi les consolider, de telle sorte qu'elles pourront offrir une programmation locale qui répondra aux besoins des gens de l'endroit. C'est une préoccupation pour nous, tant pour la radio que pour la télévision.

M. Jerry Pickard: Je peux imaginer des regroupements où deux stations de radio traitent la même nouvelle. L'une traite la nouvelle; elle peut faire des entrevues et le reste. L'une est une station MA et l'autre une station MF. Elles ont des fréquences différentes, offrent divers types de musique, occupent des créneaux différents. Ça marche. J'admets tout à fait ce que vous dites, mais je me demande qui a la responsabilité de soutenir cette culture.

Je ne veux pas voir de nouvelles torontoises à la télévision dans ma région. Nous sommes inondés par les stations de Toronto chez nous. Qu'il s'agisse de la télévision matinale, ou du reste. On n'y parle que de Toronto, et cela n'a rien à voir avec notre région. Tout cela est diffusé chez nous. Ce sont des stations qui ont des licences pour tout l'Ontario, j'imagine, parce qu'elles sont ici à Ottawa, à Windsor, partout.

On perd la saveur locale en faveur des grands marchés. Il n'y a pas moyen de s'en sortir, je ne vois tout simplement pas comment une petite station du Canada rural peut demeurer concurrentielle dans ces circonstances. Elles doivent se conformer à tous les mêmes règlements. Si le gouvernement fait de la réclame, les stations des grands marchés accaparent le gros de cette réclame. Ce ne sont pas les petits radiodiffuseurs qui en profitent.

Ne devriez-vous pas mieux défendre notre culture dans ce que vous faites? N'est-ce pas votre responsabilité d'y voir?

M. David Colville: Nous croyons que oui, et nous essayons de trouver remède à ce genre de problèmes. Il y a un compromis intéressant à faire ici, quand vous parlez du poids de la réglementation qui devient une dépense pour les stations de radio. Nous nous efforçons d'alléger notre réglementation et, particulièrement pour la radio depuis quelques années, nous avons supprimé un grand nombre de nos règlements.

La règle essentielle maintenant, c'est le contenu canadien à 35 p. 100 à la radio. Nous ne régulons pas les formules. Les stations sont libres de passer d'une formule à l'autre; si elles jugent que le rock-and-roll a perdu de sa popularité et qu'elles veulent passer à la musique country, elles sont libres de le faire. Nous nous sommes efforcés de leur donner la souplesse voulue pour qu'elles puissent tenir leur marché.

Nous nous débattons avec ce problème que pose la quantité du contenu local, des nouvelles locales et du reste, mais on en vient à un point où il est difficile de dire, du point de vue du régulateur, voici ce qui constitue un contenu local et voici ce que vous devez faire.

M. Jerry Pickard: Ce n'est pas ce que je veux. Ce que j'essaie de dire, c'est que je vois un point sur la grande carte du Canada. Je ne vois pas ce qui se passe partout au pays; je vois seulement ce qui se passe chez moi. Le problème que je décris se pose-t-il partout au pays? Si tel est le cas, que pouvons-nous faire?

M. David Colville: Je ne crois pas qu'il se pose partout au pays. Vous allez trouver de petites stations de radio qui ont des difficultés. Il y a un exploitant, Elmer Hildebrand, qui possède un certain nombre de petites stations de radio dans les Prairies. Il excelle à prendre de petites stations de radio qui dépérissaient et à en faire des présences tangibles dans leur région et en faire de grands succès.

J'imagine que si vous êtes dans le sud de l'Ontario, il est difficile de ne pas être envahi par Toronto. Je ne sais pas si c'est un problème propre à votre région. Je sais qu'il y a plusieurs petites stations de radio qui réussissent fort bien dans le Canada rural.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Pickard.

Monsieur Jones.

• 1610

M. Jim Jones: Merci, madame la présidente.

Jerry parlait d'une programmation et d'une culture viables. J'aimerais parler encore une fois de concurrence convergente et viable.

Je crois qu'aujourd'hui, si l'on regarde l'état de la technologie, le câble présente certaines limites, et le téléphone en présentait certaines, tout comme la téléphonie cellulaire, les fréquences radio et les satellites, mais un bon nombre de ces limites commencent à s'effacer. La technologie s'est beaucoup améliorée. Par exemple, je sais que Nortel a une fibre qui offre une vitesse de 10 gigabits, et elle peut être multiplexée en 160 chaînes, ce qui donne une largeur de bande considérable. J'imagine que le câble pourrait être utilisé par les entreprises de câblodiffusion et qu'il peut être également utilisé par les compagnies de téléphone. Je ne suis pas au courant de toutes les technologies, mais j'imagine même qu'un jour, avec le satellite, je pourrai avoir ma connexion Internet, je pourrai me servir de mon téléphone, et j'aurai toute la programmation que je veux.

Est-ce que vous encouragez ou régulez... Aujourd'hui, les compagnies de téléphone vont vouloir se lancer dans la câblodiffusion. Elles vont vouloir entrer dans le domaine de la télévision. Elles sont déjà dans Internet. Elles seront dans tous les types d'entreprise. Les entreprises de câblodiffusion vont vouloir en faire autant en se servant de leurs infrastructures. Est-ce que vous entendez par concurrence viable que chacun sorte de son créneau traditionnel et prenne pied dans tous ces autres secteurs afin que le câble puisse concurrencer le téléphone, et le téléphone, les entreprises de satellites?

M. David Colville: C'est ce que nous entendons lorsque nous utilisons les deux termes suivants. Le premier, c'est la convergence, ce qui veut généralement dire d'un point de vue technologique que l'entreprise de câblodiffusion peut se lancer dans la téléphonie, et l'entreprise de téléphonie dans la câblodistribution, et les entreprises de satellites dans les deux, ce genre de chose. C'est ça, la convergence. Et nous espérons que chacun prenne pied dans un domaine différent d'une manière concurrentielle de telle sorte que chacun puisse soutenir la concurrence et que nous puissions tous en profiter. Nous croyons et nous espérons que lorsque nous atteindrons ce stade, nous aurons une concurrence viable, mais nous n'y sommes pas encore. La technologie qui permettra cet état de choses commence à prendre forme.

Le régulateur doit s'assurer que chacun de ces éléments soit bien interconnecté, de telle sorte que nous aurons un réseau uniforme de réseaux, parce que si une entreprise qui contrôle un élément essentiel de ce réseau dit à une autre entreprise qui possède le même tube de fibre: «C'est très bien, vous l'avez, mais je ne vous permettrai pas de vous relier à mon tube de fibre pour que vous ayez ainsi accès à mes abonnés», personne ne profitera alors la concurrence. Et nous devons intervenir au niveau de ce type de fibre pour nous assurer que toutes ces interconnexions sont faites afin de donner naissance à une concurrence viable.

M. Jim Jones: Mais la technologie n'en est-elle pas au point où presque toutes les usines sont désuètes? Par exemple, je vois venir un jour pas très lointain où je n'aurai qu'à me brancher sur un paquet de satellites dans le ciel pour offrir tous ces services à tout le monde.

M. David Colville: Observation intéressante. J'ai lu il y a quelques années à peine que le tube de fibre allait rendre tous les satellites désuets parce qu'on aurait tellement de tubes de fibre souterrains, avec des vitesses de gigabit et de térabit telles, que plus personne ne voudrait faire passer le trafic par satellite. Pourtant, les satellites réussissent encore très bien.

Il y a quelques années, les gens disaient que les compagnies de téléphone en seraient bientôt réduites à liquider tout leur cuivre parce que plus personne ne voudrait l'utiliser. Et voici qu'apparaît NBTel, qui collabore avec cette entreprise qui est financée par Newbridge, je crois, iMagicTV, qui est maintenant en mesure d'offrir 120 chaînes avec ses vieux fils de cuivre. Et voici qu'apparaissent les entreprises de câblodiffusion avec leur câble coaxial: vous n'avez qu'à mettre un dispositif de compression numérique sur ça, et hop, vous avez entre 200 et 300 chaînes qui sortent de ce vieux câble qui, il y a quelques années, ne pouvait en offrir que 35.

Donc, au moment où apparaissent de nouvelles technologies, on trouve de meilleurs moyens d'utiliser les vieilles technologies.

La présidente: Merci, monsieur Jones.

Monsieur Malhi, très rapidement, s'il vous plaît.

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Merci, madame la présidente.

Même si nous avons le meilleur système de communication au monde, la qualité et les normes faiblissent de jour en jour. Je le vois surtout chez les gens qui réalisent les émissions de radio et de télévision ethniques. Il y a trop de réclames publicitaires dans ces émissions. Il y a aussi la façon dont ils parlent à la radio et à la télévision lorsque les gens téléphonent... Je crois qu'ils n'ont pas besoin de licence. Alors qu'un chauffeur de taxi a besoin d'un permis, les gens qui animent ces émissions de radio ou de télévision n'ont pas besoin de licence, et ils ne savent pas comment communiquer avec les gens ou comment parler, et ils se contentent d'augmenter le nombre de messages publicitaires. Avez- vous un remède à proposer?

• 1615

M. David Colville: Nous limitons le temps publicitaire que les stations commerciales ou communautaires ou ethniques peuvent avoir, si bien que la quantité de temps publicitaire est régulée pour les diverses stations. Ce qui est intéressant au niveau de la publicité, c'est qu'on s'est souvent demandé au fil des ans si l'on pouvait supprimer ces limites au temps publicitaire, mais en fait, la plupart des radiodiffuseurs eux-mêmes y tiennent encore.

Pour ce qui est de la qualité générale des émissions, si elle devient inacceptable, chose certaine, on peut porter plainte auprès du conseil ou de la station, ou auprès du Conseil canadien des normes de la radiotélévision, et nous y verrons. Mais encore là, nous sommes prudents dans nos interventions, nous ne voulons pas devenir des censeurs, ce n'est pas nécessairement notre rôle, et nous tenons à la liberté d'expression à la radio.

M. Gurbax Singh Malhi: Mais mes électeurs se plaignent souvent. Lorsqu'ils écrivent au propriétaire d'une station de radio, personne ne leur répond. Et après ça, s'ils intentent des poursuites, ça coûte trop cher. S'ils poursuivent l'animateur de l'émission de radio ou de télévision, ça coûte trop cher.

M. David Colville: J'ignore la nature de ce problème, mais chose certaine, vous pouvez porter plainte auprès du CRTC.

M. Gurbax Singh Malhi: Il y a plus de publicité. Ils font passer peut-être une chanson et 15 fois la même publicité après—sans même avoir fait jouer une seule chanson jusqu'au bout.

M. David Colville: Pour ce qui est de la longueur du temps publicitaire, la perception peut parfois dépasser la réalité, je crois. Chose certaine, nous réglementons le temps publicitaire dans les stations de radio.

La présidente: Merci, monsieur Malhi.

Monsieur Colville, nous manquons de temps. J'ai quelques questions que je vais vous poser et auxquelles vous pourrez répondre plus tard par écrit.

Je veux savoir si vous avez des statistiques sur le coût des télécommunications à titre de pourcentage de l'ensemble des coûts d'affaires, et si cela joue un rôle important dans la compétitivité. Et quelle est l'incidence sur la productivité des entreprises, particulièrement les petites et moyennes entreprises?

De même, si l'accès à Internet est important pour la vitalité d'une entreprise, particulièrement les PME, à l'avenir, pouvez-vous nous dire quel effet pourrait avoir votre décision sur les services à prix de revient.

En outre, les entreprises rurales auront-elles accès à Internet au même titre que les entreprises des régions métropolitaines? Et les régions rurales seront-elles plus ou moins compétitives dans les régions métropolitaines avec la nouvelle gamme des services de télécommunications, surtout Internet?

Nous vous laisserons le soin de répondre à ces questions.

M. David Colville: D'accord.

La présidente: Nous tenons à vous remercier. Veuillez nous excuser d'avoir manqué de temps, nous sommes obligés de passer à notre prochain groupe de témoins, mais nous tenons à vous remercier de votre présence ici aujourd'hui.

M. David Colville: Merci. Vous avez posé de bonnes questions. J'ai aimé la discussion.

La présidente: Merci.

M. David Colville: Merci beaucoup.

La présidente: Nous allons suspendre nos travaux 60 secondes, le temps de permettre à nos nouveaux témoins de s'avancer.

• 1618




• 1621

La présidente: Nous reprenons.

J'ai le grand plaisir de souhaiter la bienvenue à notre prochain groupe de témoins. Nous sommes très heureux de recevoir, de l'Association canadienne de la technologie de l'information, Le Dr Gaylen Duncan, président et chef de la direction; et de Bell Canada, M. Bill Garbarino, vice-président responsable des services électroniques.

Ce que je propose, c'est que chacun donne son exposé, après quoi nous passerons aux questions ensemble. Si la question s'adresse à l'un ou l'autre d'entre vous mais que vous voulez intervenir, faites-nous-le savoir. Il se peut que certaines questions s'adressent à vous deux.

Je propose que nous procédions dans l'ordre mentionné, à moins que vous vous soyez entendus autrement.

M. Gaylen Duncan (président et chef de la direction, Association canadienne de la technologie de l'information): Je ne sais pas dans quel ordre nous sommes nommés.

La présidente: Docteur Duncan, nous allons commencer par vous, semble-t-il.

M. Gaylen Duncan: Je vais effectivement commencer. De grâce, on ne m'appelle généralement pas docteur.

La présidente: D'accord.

M. Gaylen Duncan: Bonjour mesdames et messieurs. C'est avec plaisir que je me joins à vous cet après-midi pour vous faire part du point de vue de l'ACTI envers cet important examen de la productivité et de la compétitivité du secteur d'affaires canadien.

Vous nous avez demandé de faire porter notre présentation sur les éléments clés de la productivité dans le secteur des affaires. Je vais m'arrêter à un seul élément: la technologie de l'information.

Vous ne serez probablement pas surpris que le chef de la direction de l'ACTI vous dise que la technologie de l'information est essentielle à notre quête en matière de productivité et de compétitivité. Après tout, les solutions informatiques sont ce que vendent les entreprises qui paiement mon salaire. Ne me croyez donc pas sur parole. Écoutez ce que le président de la Réserve fédérale, Alan Greenspan, a dit récemment au Economic Club de New York. Je crois que le texte est dans la pochette que je vous ai remises avec le discours. Ces derniers temps, M. Greenspan se trouve dans la position enviable de devoir expliquer la plus longue croissance économique de l'histoire des États-Unis. Il a dit:

    [...] c'est la technologie de l'information qui définit cette période particulière. C'est parce que l'innovation informatique est à la source de la productivité et de la croissance économique. Sa plus importante contribution est de réduire le nombre d'heures de travail requises pour générer le produit national.

Il a ensuit expliqué comment s'effectuait cette réduction:

    Avant la présente révolution en matière de disponibilité de l'information, la plupart des prises de décisions commerciales du XXe siècle étaient entravées par une vaste incertitude [...] La poussée soudaine quant à la disponibilité d'information pertinente a permis aux gestionnaires d'enrayer une importante partie des stocks de sécurité et de l'excédent de personnel.

Il fournit un examen réfléchi de cette évolution. Il s'agit d'un discours important, et parce qu'il satisfait directement aux besoins de vos recherches, nous l'avons inclus dans le matériel que nous vous avons apporté.

Parmi l'information que nous avons rassemblée se trouve aussi une validation—provenant d'une source canadienne—de l'impact mobilisateur de la technologie de l'information. En juin 1997, nous avons travaillé de concert avec le Conference Board du Canada à une étude intitulée Les emplois dan une économie fondée sur le savoir. Cette étude rassemble des données au sujet de l'impact de l'investissement en informatique sur l'économie entre 1986 et 1995.

Cette étude a démontré que les entreprises à fort contenu informatique avaient enregistré un important essor commercial et une hausse en matière d'emploi, alors que les entreprises à moindre contenu informatique avaient, en fait, connu une chute en matière d'emploi.

• 1625

Elle renferme aussi deux études de cas et, puisque vous avez demandé une telle approche, j'ai pensé qu'il vaudrait la peine de résumer l'impact de la technologie de l'information sur la Banque Canadienne Impériale de Commerce (la CIBC).

On peut dire que la CIBC, comme toute banque canadienne, est une entreprise à fort contenu informatique. Son investissement en technologie de l'information a augmenté de 86 p. 100 entre 1988 et 1995, pour passer de 129 millions de dollars à 239 millions de dollars. Une grande partie de cet argent a été investie dans les guichets automatiques. En dix ans, soit entre 1987 et 1996, le nombre de guichets automatiques a augmenté de 310 p. 100.

Les guichets automatiques n'ont pas eu d'impact sur le nombre de succursales de la CIBC jusqu'en 1991. Au cours des cinq années suivantes, le nombre de succursales traditionnelles a chuté de 9 p. 100. Bien que la banque ait connu une diminution de l'emploi au début des années 90, elle a joui d'une reprise en 1996, attribuable en grande partie à la création d'environ 1 000 emplois dans deux nouveaux centres d'opérations bancaires par téléphone.

La technologie de l'information a modifié la dynamique du travail qui s'effectue en succursale. Au lieu d'attendre en ligne pendant les heures d'ouverture, pour donner au caissier l'information nécessaire à la transaction, les guichets automatiques permettent aux clients d'effectuer leurs transactions eux-mêmes et ce, à toute heure du jour ou de la nuit.

Les banques ont fait leur propre analyse de productivité. Elles ont établi qu'une transaction au comptoir coûtait 3 $. Elles ont beaucoup investi dans la technologie afin de mettre au point de nouveaux canaux de distribution. Les services bancaires par téléphone ont non seulement permis d'embaucher 1 000 nouveaux employés, mais ils ont réduit les frais de transaction à 1,50 $. Les services bancaires par ordinateur personnel ont porté les frais à 0,50 $. Et les services bancaires par Internet ont ouvert la voie à une époque où les transactions pourraient coûter aussi peu que 0,15 $ chaque. Il n'est pas étonnant que le secteur bancaire du Canada soit un meneur international en matière d'investissement en informatique.

Ailleurs dans notre communauté bancaire, la technologie de l'information a permis d'accroître non seulement la productivité, mais aussi l'accès à de nouveaux marchés et à de nouveaux débouchés. Lorsque la Citizen'S Bank of Canada a été mise sur pied en 1997, son intention était de devenir une banque pas comme les autres. À une époque où les grandes banques du Canada étaient vivement critiquées pour leurs projets de fusion et leurs profits, la Citizens Bank a choisi d'offrir aux clients une option socialement acceptable.

La banque a été établie en tant que filiale de VanCity, une caisse populaire fructueuse basée en Colombie-Britannique avec plus de 50 ans de service dans la région de Vancouver. La Citizen's Bank était le moyen pour VanCity d'étendre partout au pays son mandat en matière de responsabilité d'entreprise et sa philosophie de caisse populaire.

Par contre, les coûts associés à une expansion «physique» étaient hors de question. Il en coûte environ un million de dollars, sans exagération, pour ouvrir une nouvelle succursale. La technologie de l'information a mis à la portée de la Citizens Bank une nouvelle stratégie d'expansion et a permis à cet établissement local de Vancouver d'accéder au marché bancaire national et international.

La Citizens Bank a commencé avec des services bancaires par ordinateur personnel et a ensuite introduit CitizenNet, une option de service par Internet. Par l'intermédiaire de ces canaux, la banque offre une gamme complète de services financiers personnels: des dépôts au règlement des factures. La Citizens Bank a aussi été le premier établissement bancaire au Canada à offrir des demandes de prêts hypothécaires en ligne.

Même si personne ne se fait d'illusions sur le fait que la technologie de l'information a uniformisé les règles du jeu pour les nouveaux venus sur le marché financier électronique, il est évident qu'elle leur permet d'entrer dans la partie. Et l'industrie toute entière bénéficie de la nouvelle situation concurrentielle entraînée par les nouveaux venus comme la Citizens Bank.

Ce concept d'accès aux marchés a des répercussions qui s'étendent à la situation compétitive du Canada en général. Si la Citizens Bank peut utiliser la technologie de l'information comme tremplin pour faire concurrence aux grandes banques nationales du Canada, pourquoi ne serait-il pas possible pour une librairie de Victoria de se mesurer à Barnes and Noble?

C'est ce que fait la librairie ABE books. Elle fournit un centre de distribution en ligne pour des livres rares, des livres usagés et des livres épuisés. La librairie ABE Books a non seulement la distinction de concurrencer efficacement à l'extérieur du Canada, mais elle est aussi actuellement le seul détaillant en ligne à réaliser des bénéfices.

Si la librairie ABE y est parvenue, pourquoi ne serait-il pas possible à un groupe de femmes de North of Superior de faire concurrence à des fabricants de CD-ROM, comme Microsoft, dans le domaine de la distribution de CD autodidactiques tels NFL Football Made E-Z? C'est exactement ce que font Kim Sartor et son équipe chez Angel Lake Multimedia.

Et si Kim Sartor y est parvenue, pourquoi ne serait-il pas possible à un trio de professionnels de Toronto de se mesurer aux fabricants Arrow—Brooks Brothers et Hathaway—et d'offrir des vêtements professionnels essentiels d'excellente qualité et à prix abordable, tels que des chemises blanches et des bas noirs? Allez visiter leur site Web au www.justwhiteshirts.com. C'est ce qu'ils s'affairent à réaliser en ce moment même.

• 1630

Après avoir entendu les questions posées à mon vieil ami David Colville, j'ai décidé d'ajouter deux autres exemples.

Vesey Seeds, de l'Île-du-Prince-Édouard, offre maintenant son service en ligne. L'entreprise reçoit maintenant une bonne part de ses commandes de personnes qui ne savaient même pas qu'elle existait, et ses clients proviennent de toute l'Amérique du Nord.

Manitoulin Transport, entreprise de l'île Manitoulin, a fait venir Internet dans l'île pour ses propres besoins commerciaux, et elle se trouve maintenant à fournir un service Internet à tous les habitants de l'île. Internet est ainsi accessible à la population locale.

L'économie américaine a embrassé la technologie de l'information avec enthousiasme et ne montre aucun signe de ralentissement. Bien que le Canada puisse se vanter d'être l'un des pays les plus branchés au monde, nous ne sommes pas à la hauteur des États-Unis quant à l'adoption des outils informatiques pour le commerce. Le rythme avec lequel les États-Unis adoptent ces outils, et toute la puissance de l'économie point.com, pourraient avoir un impact négatif sur notre productivité et notre compétitivité à long terme. Même aujourd'hui, bon nombre des meilleures et des plus brillantes innovations et entreprises canadiennes sont attirées par les États-Unis et par l'attrait d'un financement accessible, de marchés importants, et d'alliés potentiels qui ont de l'argent plein les poches. Pour maintenir nos avantages, nous devons non seulement être à la hauteur des États-Unis, mais les surpasser.

La Table ronde du commerce électronique coprésidée par David Pecaut, du Boston Consulting Group, et John Roth, de Nortel, a fait six recommandations clés à cet effet: premièrement, établir la marque du Canada en matière de commerce électronique à l'échelle nationale et internationale; deuxièmement, accélérer la conversion des entreprises existantes au Canada; troisièmement, encourager la création et la croissance du commerce électronique; quatrièmement, développer le bassin de talents au Canada en matière de commerce électronique; cinquièmement, s'assurer que les services gouvernementaux en ligne soient notre grande priorité; et sixièmement, bâtir le leadership du Canada en matière de mise au point de politiques Internet internationales.

Le présent comité peut influencer l'adoption de ces recommandations. Mais je crois que votre priorité doit être d'accélérer la conversion des entreprises canadiennes existantes. Que vous habitiez au coeur du secteur industriel canadien ou dans une région dominée par nos ressources naturelles, vous pouvez utiliser votre influence pour encourager l'adoption d'outils informatiques pour venir en aide à la productivité et à la compétitivité.

Je ne prétends que la technologie de l'information est une solution magique. Elle ne réparera pas les dommages causés par une mauvaise gestion, mais elle ne fera que les exacerber. Je me hasarderais à dire qu'il n'existe aucune entreprise solide au Canada qui ne puisse améliorer sa productivité et sa compétitivité en se posant la question suivante: Est-ce qu'il existe quelque chose dans mon mode de fonctionnement qui puisse être remplacé ou amélioré par le déploiement d'une stratégie informatique solide? Si vous pouvez utiliser votre leadership de façon à accélérer cette exploration, vous ferez progresser de façon tangible la productivité et la compétitivité du Canada.

Je vous remercie.

La présidente: Merci, monsieur Duncan.

Nous passons maintenant à M. Bill Garbarino, de Bell Canada.

M. Bill Garbarino (vice-président, Services électroniques, Bell Canada): Merci beaucoup.

Mesdames et messieurs, je vous remercie de me donner l'occasion de parler à votre comité du sujet du commerce électronique, sujet critique dans l'effort de Bell Canada pour passer du domaine des télécommunications à celui de l'information.

Nous croyons qu'Internet est la pierre angulaire de la nouvelle mission que nous voulons nous donner comme entreprise, pour que nous puisions offrir à nos clients du Canada tout entier des services d'information, de communication et de divertissement et nous assurer une présence sur le marché américain et le marché international au moyen de partenariats.

Nous sommes d'avis que le commerce électronique sur Internet change de manière fondamentale les règles de l'activité des fournisseurs de biens et de services et des clients de ces biens et services. Du point de vue de notre entreprise, le commerce électronique nous offre la possibilité de transformer du tout au tout les rapports que nous avons avec nos clients existants. Nous pouvons leur offrir un service économique et très personnalisé 24 heures sur 24, et leur assurer l'accès à l'information en temps réel et les outils dont ils ont besoin pour effectuer leurs opérations. Cette combinaison de services que nous pouvons leur offrir grâce essentiellement au commerce électronique réduit nos frais de distribution de 50 à 80 p. 100 et nous permettra de personnaliser encore davantage les services que nous offrons à nos clients. Il s'agit là d'un virage fondamental pour une entreprise très traditionnelle comme la nôtre.

Bell se servira du commerce électronique pour mettre ses produits et services en marché plus rapidement, tout en les présentant à ses clients de façon plus intégrée. Dans la mesure où elles réussissent à exploiter la faculté d'intuition du Web dans leurs activités de commerce électronique, toutes les entreprises, nouvelles ou existantes, peuvent offrir à leurs clients uniquement les services dont ils ont besoin.

• 1635

Le commerce électronique permet également à Bell de pénétrer de nouveaux marchés sans avoir à ériger une infrastructure de distribution traditionnelle. Les clients continueront, à mon avis, à se laisser volontiers emporter par la vague du commerce électronique à un rythme étonnant, parce qu'ils ont l'impression d'avoir ainsi une plus grande liberté d'action et de pouvoir faire leurs affaires à des conditions qui leur conviennent à eux plutôt qu'à nous. Ils peuvent faire des recherches sur des produits, explorer divers scénarios de configuration et de prix et ils peuvent passer des commandes, tout cela depuis leur foyer, leur lieu d'affaires, voire n'importe où entre les deux. Les clients peuvent établir eux-mêmes leur profil, demander des communications électroniques destinées au groupe cible dont ils font partie et créer aussi leur propre espace Web pour leurs interactions quotidiennes avec leurs fournisseurs de service.

En 1999, les clients de Bell ont fait plus de 16 millions d'opérations libre-service par nos voies de communication électroniques. Ces voies de communication comprennent notamment notre site Web, notre système intégré de messagerie vocale, nos combinés SCP sans fil ainsi que les 800 000 et quelque appareils téléphoniques à écran que nous comptons dans notre empreinte.

Nous avons également constaté que près de 20 p. 100 de nos clients ont commencé à se servir régulièrement de nos voies de communication électroniques, si bien que le taux d'adoption est phénoménal. Ces clients indiquent ainsi de manière certaine qu'ils préfèrent en fait traiter avec l'entreprise au moyen des voies électroniques libre-service. Cette préférence s'explique par notre capacité à leur offrir un service de grande qualité grâce à une multitude de portes électroniques.

L'accès sans fil et par satellite engendre une pléthore de nouveaux dispositifs d'accès électronique qui permettent aux clients d'avoir accès à des applications de commerce électronique à partir de n'importe où ou presque. La portabilité du commerce électronique se trouve donc accrue.

Les gens occupés ont besoin de flexibilité, et je suis persuadé que le Web répond à cette attente. Quand on pense à l'ubiquité et la rapidité des communications, à l'accessibilité de l'information, à tout ce qu'offre ce nouveau mode de prestations qu'est le Web, le commerce électronique, il n'est pas étonnant que les possibilités semblent presque illimitées.

BCE et Bell souscrivent d'emblée au commerce électronique parce que nous sommes vraiment convaincus qu'il accroît à bien des égards les possibilités de notre nouveau modèle d'entreprise. Dans les 24 derniers mois, la société BCE Emergis, que Bell Canada a mise sur pied est devenue un des plus grands fournisseurs de solutions de commerce électronique entre entreprises de toute l'Amérique du Nord. Nous avons construit et élargi rapidement un réseau national à large bande de services d'accès par l'intermédiaire de notre division Bell Nexxia. La décision d'acheter Téléglobe nous permettra d'étendre ce réseau de services d'accès à l'échelle internationale.

Bell Sympatico est le plus grand fournisseur de service Internet au Canada et continuera à occuper le premier rang de l'espace canadien grâce au partenariat que nous avons conclu avec Lycos. Grâce à Sympatico et aux sites portails que nous avons créés pour diverses villes, comme Toronto.com et Montréal.plus.ca, nous offrirons aux Canadiens un marché virtuel à partir duquel faire leurs achats en ligne.

Pour compléter ce marché virtuel, nous avons créé sur notre site Bell.ca la boutique virtuelle Bell World, la seule boutique intégrée de communication en ligne qui offre une gamme complète de produits et services depuis les services de télécommunication traditionnels jusqu'aux services sans fil, en passant par les produits Internet, les périphériques et même les services de divertissement.

Nous sommes aussi en voie de conclure des partenariats avec les gouvernements et diverses entreprises canadiennes afin d'étendre le commerce électronique à leurs domaines respectifs au moyen de divers services: acquisitions électroniques, affichage électronique et applications partagées.

Comme vous pouvez le constater, Bell Canada souscrit entièrement aux avantages du commerce électronique. Nous croyons qu'il est essentiel à notre croissance et à notre réussite futures.

L'infrastructure de cyberaffaires et cybercommerces dans laquelle nous investissons depuis deux ans nous rapporte déjà des dividendes appréciables. Nous nous attendons à ce que les dividendes soient de 5 à 10 fois plus élevés d'ici cinq ans.

Tout le monde en sort gagnant à notre avis, car nous croyons que le cybercommerce est essentiellement bon pour les Canadiens aussi. Il leur assure une liberté d'action qu'ils n'ont jamais connue auparavant.

Nombreux sont ceux qui disent que le commerce électronique est un nouveau médium et qu'il se heurtera donc à une réticence naturelle. Je suis sûr que c'est ce qu'on a dit aussi des premiers téléphones qui ont fait leur apparition il y a des dizaines d'années. Il faut une masse critique pour qu'on assiste à une explosion de nouvelles applications et de nouveaux services.

• 1640

Étant donné la petite taille du marché canadien, cette masse critique ne peut être réalisée sans une participation active du gouvernement, qui doit prendre l'initiative et devenir un utilisateur modèle de ces nouvelles technologies cyberaffaires et cybercommerce. À notre avis, il est essentiel que le gouvernement mette sur pied une infrastructure d'information à l'échelle du gouvernement tout entier. Ce réseau d'accès Internet, semblable à celui que je dirige chez Bell, est une étape critique dans la réalisation des objectifs énoncés dans le discours du Trône qui visait à ce qu'en 2004, les citoyens canadiens soient les citoyens les mieux reliés à leur gouvernement. L'infrastructure sous- jacente, appelée voie sécurisée, est d'une importance vitale.

Bell Canada appuie les efforts du gouvernement canadien en vue de mettre en oeuvre ce nouveau cadre novateur de solutions axées sur les communications. Nous attendons avec impatience que le gouvernement fasse bientôt un appel d'offres ouvert pour inviter le secteur privé à l'aider à bâtir cette infrastructure.

Nous savons que nous devons continuer à établir des partenariats avec l'industrie et le gouvernement pour faire en sorte que la croissance du commerce électronique se fasse selon des principes commerciaux cohérents et conformément à une réglementation publique équilibrée destinée à protéger la vie privée, la sécurité et l'intégrité des Canadiens.

Bell Canada a pris des mesures très énergiques pour assurer à ses clients la protection qu'ils souhaitent et qu'ils méritent sur le plan de la vie privée et de la sécurité. La garantie de confiance que nous affichons sur notre site Web Bell.ca atteste notre souci de protéger tous nos clients. Nous ferons en sorte que toutes nos pratiques commerciales en matière de commerce électronique soient conformes au projet de loi C-6.

De concert avec le gouvernement et nos partenaires, BCE et Bell façonneront un avenir passionnant pour le Canada dans le monde du commerce électronique. Nous sommes persuadés que les Canadiens pourront être fiers de nous.

Merci.

La présidente: Merci, monsieur Garbarino.

Nous allons maintenant passer à M. Schmidt.

M. Werner Schmidt: Merci beaucoup, messieurs, de votre présence ici aujourd'hui. Vos propos sont sans doute ce que j'ai entendu de plus passionnant depuis longtemps. J'attendais avec impatience que vous veniez témoigner devant nous.

Vous avez fait allusion justement à la question par laquelle je voudrais commencer, celle de la voie sécurisée. Il s'agit là à mon avis d'une question d'importance capitale. Elle comporte un grand nombre d'éléments, mais je voudrais commencer par vous interroger au sujet du rôle du gouvernement et des sociétés d'État dans l'établissement de cette voie sécurisée.

Vous savez sans doute que Postes Canada vient tout juste de créer son infrastructure de poste électronique, qui est essentiellement un bureau de poste électronique. La Société a entrepris des démarches auprès des fournisseurs ou soumissionnaires éventuels qui pourraient être appelés à travailler à cette voie sécurisée. Je me demande quelle est la relation qui existe entre les industries de l'ACTI ou les BCE et Bell Canada et des entreprises comme Postes Canada.

M. Gaylen Duncan: Je dois être prudent puisque les partenaires de la poste électronique sont membres de notre association et que Bell en fait aussi partie, mais j'ai fait deux ou trois déclarations publiques sur le sujet. La première était que nous sommes très heureux du processus qui avait l'appui énergique de l'industrie et qui a conduit au cours des 18 derniers mois à la préparation de cette demande de proposition (DP). Les consultations ont été exhaustives. Le processus a été ouvert et transparent. Il n'y a pas eu de parti pris en faveur d'une technologie en particulier. Nous avons été heureux du processus.

Comme dernière étape, la Société devait compiler les résultats des consultations pour rédiger et émettre la Demande de proposition. Elle a déjà cinq mois de retard à ce chapitre. En termes d'Internet, c'est plus d'une année Internet, plus d'une année-net. Le programme au complet s'étend sur 16 années-net, pour que l'échéance de 2004 fixée par le gouvernement puisse être respectée. Vous avez maintenant un an et demi de retard. Il sera impossible de respecter l'échéance finale.

Nous sommes inquiets parce qu'il semble y avoir quelque chose qui a fait dérailler le processus. Nous croyons savoir qu'il s'agit du rôle que devrait jouer Postes Canada. Vous devriez vous en remettre au secteur privé. Vous devriez émettre la Demande de proposition et y inclure comme facteur de pondération une clause concernant le rôle qu'il convient d'attribuer à Postes Canada et accorder à ce facteur cinq points—je ne sais pas quel devrait être le pointage exact—par rapport à tous les autres critères qui seront pris en compte pour évaluer les propositions. Laissez le secteur privé trouver une solution.

Si vous décidez d'émettre la DP en ayant déjà fait le choix du principal entrepreneur, je vous recommanderais d'aller revoir cette émission de télévision où le président et le vice-président font venir les représentants de l'industrie et où le vice-président dit que le gouvernement va construire l'Internet. À la fin de l'émission, ils finissent par dire: «Nous n'allons pas construire l'Internet. Nous comprenons maintenant que ce n'est pas au gouvernement de le faire.»

• 1645

M. Bill Garbarino: Je suis tout à fait d'accord avec Gaylen. Nous pensions vraiment être sur la bonne voie. J'ai été appelé à jouer un rôle consultatif auprès de groupes gouvernementaux, étant donné que l'exemple de Bell pouvait servir d'étude de cas, puisque nous essayons de transformer la façon dont nous traitons avec plus de huit millions de Canadiens, que nous essayons de passer d'un modèle d'entreprises traditionnel à un modèle dit «briques-et-clics» afin de mieux servir nos clients. J'ai essayé d'aider ces groupes à choisir la bonne orientation de base.

Naturellement, Bell Canada pensait avoir beaucoup à offrir en raison de son expérience comme fournisseur de service de commerce électronique, de son expérience de la technologie de réseau et de son expérience comme exploitant d'une des plus grandes infrastructures de distribution électronique de l'espace canadien. Tout avançait très bien, puis nous semblons avoir frappé un noeud.

Je suis d'accord avec Gaylen: je pense qu'il faut s'en remettre au secteur privé, en lui prescrivant certaines conditions, et lui laisser le soin de respecter ces conditions. Si la poste électronique est essentielle à ce que veut faire le gouvernement pour avancer dans ce domaine, c'est très bien. S'aventurer toutefois dans une autre voie nuirait à l'objectif global que le gouvernement a en tête. Gaylen a signalé qu'on perd un temps précieux et qu'il faut s'entendre sur la bonne trajectoire pour pouvoir accomplir ce que le gouvernement souhaite accomplir.

M. Werner Schmidt: J'ai une question complémentaire. Étant donné que cette voie sécurisée sera sans doute la plus importante infrastructure de ce genre au Canada, existe-t-il des installations semblables dans d'autres pays?

M. Gaylen Duncan: Oui, il y en a une à Singapour, mais je ne m'y connais pas tellement dans cette région du monde. Il n'en existe pas, en dehors du contexte militaire, aux États-Unis. Là-bas, on avance dans cette voie, mais chacun selon sa trajectoire. Certains ministères et certains gouvernements prennent des mesures pour mettre au point et établir des voies sécurisées, mais il n'existe aucun effort à l'échelle du secteur public tout entier. Il est bien plus difficile d'en arriver à une approche concertée aux États-Unis.

La présidente: Monsieur Garbarino.

M. Bill Garbarino: C'est pour cette raison que je trouvais que la démarche qu'avait entreprise le gouvernement relativement à la mise en place d'une voie sécurisée témoignait d'un véritable leadership, parce qu'il voulait y inclure essentiellement les divers éléments du secteur public de même que l'ensemble des Canadiens, dans leur rôle de clients du secteur public. C'est aussi la démarche que nous avons retenue à Bell Canada. Nous tentons essentiellement de nous servir d'Internet, du cybercommerce et des cyberaffaires pour commencer à traiter avec nos clients d'une façon bien plus intégrée, afin de leur permettre d'obtenir toute la gamme des services dont ils ont besoin selon le mode qu'ils choisissent pour leurs opérations ou leurs interactions.

C'est la démarche que je croyais que nous voulions prendre relativement à la voie sécurisée. Je ne pense pas qu'il existe encore de modèle qui corresponde exactement à ce que nous voulons établir.

M. Gaylen Duncan: Si nous étions les premiers à le faire, nous aurions un produit et une compétence exportables.

M. Werner Schmidt: Cela ne fait aucun doute, et je trouve très louable que ce soit là où on essaie d'en venir. J'ai toutefois un problème. Je sais que le projet a été retardé pour diverses raisons, quelles qu'elles soient. Certaines d'entre elles me paraissent suspectes, mais croyez-vous néanmoins qu'il existe un conflit d'intérêts du fait qu'une société d'État soit presque dans une situation privilégiée par rapport aux entreprises privées qui font partie de votre association?

M. Gaylen Duncan: Si vous entendez par là qu'elle profite de des relations politiques, la réponse est oui. Si toutefois la société d'État doit sa position privilégiée, non pas parce qu'elle a des fonds illimités, mais parce qu'elle travaille de concert avec des entreprises privées, ce qui est censé être le cas pour la poste électronique—plusieurs entreprises canadiennes participent à la solution de la poste électronique—, alors il s'agit simplement d'une alliance comme celle qui devra être formée pour répondre à cet appel d'offres. Aucune entreprise canadienne ne peut à elle seule faire une proposition qui puisse être retenue. La proposition qui sera retenue devra venir d'au moins une, sinon deux alliances complètes.

M. Bill Garbarino: En nous préparant nous-mêmes en vue de cette Demande de proposition, nous avions entrepris de former un consortium qui aurait réuni les divers éléments nécessaires pour fournir le service de bout en bout que recherche le gouvernement.

M. Gaylen Duncan: Et il n'y a pas de mal à ce que Postes Canada fasse partie d'un consortium comme celui-là, si c'est ce que veut le secteur privé.

M. Werner Schmidt: Oui, mais il y a des questions très simples, et vous savez, messieurs... En fait, les questions ne sont pas simples, loin delà.

La présidente: Dernière question.

• 1650

M. Werner Schmidt: Merci, madame la présidente. S'ils peuvent répondre à cette question-ci, ce sera vraiment très bien.

L'important ici, selon moi, est de savoir si Postes Canada agit en tant que mandataire de l'État ou si la Société agit comme société d'État indépendante—non pas comme mandataire de l'État, mais comme soumissionnaire indépendant.

Vous avez eu l'occasion, messieurs, de travailler avec Bell. Vous avez eu plus d'une expérience de ce genre.

Je ne crois pas me tromper non plus en disant que vous aussi, monsieur Duncan, vous avez eu plus d'une expérience dans ce domaine.

Comment pouvons-nous éviter ce problème? Faut-il établir au préalable que Postes Canada ne peut pas agir comme mandataire de l'État?

La présidente: Quelqu'un a une idée?

M. Bill Garbarino: Je crois qu'il serait sage d'évaluer la capacité de Postes Canada à fournir les services nécessaires à la mise en place de la voie sécurisée et d'éviter qu'elle ne soit là simplement que comme mandataire du gouvernement.

M. Werner Schmidt: Est-ce oui ou non?

M. Gaylen Duncan: Cela veut dire que la société fonctionne de façon indépendante.

M. Bill Garbarino: Oui.

M. Gaylen Duncan: La SCHL est une société d'État; elle achète et vend des propriétés. Elle peut agir, mais elle doit agir de façon indépendante.

M. Werner Schmidt: Oui, mais tout est là. C'est une relation différente. Nous avons fait assez de recherche pour découvrir que les relations entre Postes Canada et le gouvernement sont différentes des relations entre la SCHL et le gouvernement. Les deux sont des sociétés d'État, mais les exigences entourant les relations avec le gouvernement sont différentes pour la SCHL et pour Postes Canada. Je suis sûr, messieurs, que vous connaissez parfaitement cette différence, parce que vous ne seriez pas ici aujourd'hui si vous ne le saviez pas. C'est un point fondamental.

Je vous repose donc la question. Pouvez-vous y répondre?

M. Gaylen Duncan: Il me semble que nous avons dit qu'elle doit agir de façon indépendante.

M. Werner Schmidt: Très bien.

La présidente: Merci, monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Merci, madame la présidente.

La présidente: Monsieur Cannis, vous avez la parole.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je tiens moi aussi à remercier les témoins.

Monsieur Duncan, je consulte les six points que vous avez mentionnés. Je pense que vous vous rappelez très bien qu'en septembre, sauf erreur, nous nous sommes rencontrés à la Conférence GBDE sur le commerce électronique à Paris. Dans votre dernier point, vous dites qu'il faut «consolider le leadership du Canada dans le développement de la politique internationale sur l'Internet». J'ai eu le sentiment pendant cette conférence, et c'est peut-être aussi votre cas et vous pouvez peut-être nous en parler, que le Canada était effectivement considéré là-bas comme un leader.

Mais j'ai l'impression, et vous pouvez peut-être éclairer ma lanterne là-dessus, que lorsque nous rentrons à la maison et que nous rencontrons les divers professionnels de ce domaine comme vous et bien d'autres, il y a quelque chose qui manque. J'ignore ce que c'est. Quand je parle aux gens, on n'arrête pas de me dire: «Écoutez, nous devons absolument saisir l'occasion. Nous sommes en train de la rater.» Mon information est parcellaire.

J'ai le sentiment que nous faisons preuve de leadership. Vous avez évoqué le projet de loi C-6 que vous appuyez. C'est un point de départ. Je n'arrive pas à mettre le doigt dessus, mais j'en ai parlé à une dizaine de personnes et il me semble qu'il y a un élément du casse-tête qui manque. Peut-être pourriez-vous nous donner votre point de vue là-dessus.

M. Garbarino a dit que le commerce électronique est avantageux pour les Canadiens. Je suis d'accord là-dessus, mais là encore, il y a quelque chose qui cloche. Pourriez-vous m'expliquer pourquoi les Canadiens n'ont pas adopté cette technologie autant qu'ils auraient dû le faire, d'après ce que nous croyons, d'après ce que nous savons, puisque tout semble pointer dans cette direction? Il y a quelque chose qui ne va pas. Le projet de loi C-6 va-t-il contribuer à atténuer les problèmes de respect de la vie privée et de sécurité, que vous avez évoqués, etc.? Comment mettre les gens à l'aise? Qui peut aider à diffuser le message?

Je pense, madame la présidente, que j'ai déjà pris assez de temps et je vais donc m'arrêter là.

La présidente: Nous devons partir à 17 h 15, alors...

M. Gaylen Duncan: Parlons d'abord du rôle du Canada sur la scène internationale.

Nous sommes en train de nous bâtir très rapidement une réputation: nos positions et notre politique sont considérées bien réfléchies, se situant quelque part entre les extrêmes de la Commission européenne et la peur du gouvernement des Américains. On s'aperçoit par exemple que pour ce qui est du respect de la vie privée, le gouvernement américain commence à dire que le Canada a raison et qu'eux se sont trompés. Nous faisons donc des progrès immenses sur le front de la politique et c'est reconnu sur la scène internationale. Nous ne sommes généralement pas aussi bien perçus chez nous, mais ce n'est pas inhabituel, comme en témoigne la musique rock canadienne.

Pour ce qui est des applications, il y a un certain nombre d'aspects qui ne vont pas bien. Nous dépensons moins par habitant pour les produits et services des technologies de l'information—beaucoup moins—que les États-Unis, juste au sud de la frontière. Si nous dépensons moins, c'est probablement que nous utilisons moins ces technologies. La réalité est que nous avons le même taux de pénétration dans les foyers, nous utilisons un plus grand nombre d'heures par jour et un pourcentage plus élevé de notre population a accès au réseau en comparaison des États-Unis, mais il n'en demeure pas moins que nous dépensons moins par habitant. C'est donc un problème et nous essayons d'aller au fond des choses pour comprendre le pourquoi.

• 1655

Il y a des Canadiens qui sont très conservateurs, mais je crois qu'on a pu constater un début d'effervescence autour de Noël. Les chiffres commencent à nous donner raison: la croissance se faisait à un certain niveau, mais elle augmente maintenant de façon exponentielle.

M. Bill Garbarino: En réponse à votre deuxième question, ce n'est qu'au cours des 12 derniers mois que nous avons commencé à élaborer du contenu canadien dans le domaine du commerce électronique. Voyez par exemple la saison des achats de Noël en 1998; les Canadiens achetaient en ligne et faisaient du rattrapage, se rapprochant rapidement des consommateurs américains, mais 63 p. 100 de leurs achats étaient faits sur des sites américains. En 1999, les Canadiens ont fait 55 p. 100 de leurs achats à partir de sites canadiens. On le constate dans le domaine des communications et Bell joue évidemment un rôle là-dedans, de même que Chapters.ca, etc. On commence donc enfin à voir un peu de contenu de commerce électronique canadien qui apparaît et qui rivalise avec les États- Unis.

La difficulté est évidemment que nous devons faire du rattrapage, quand on voit ce qui a été fait en 1997 et 1998 par des groupes comme Amazon.com et la capacité de commercialisation créée par AOL, à titre d'exemple. Cela leur donne une avance mesurable et évidente. Nous devons continuer à nous démener pour que les fournisseurs de services canadiens nous donnent cette capacité en ligne.

Je suis convaincu que les Canadiens ont aussi hâte de faire leurs achats en ligne que les Américains ou les Européens ou les Asiatiques. C'est perceptible dans les statistiques. Il est regrettable que dans le passé, les gens aient fait la plus grande partie de leurs achats en ligne à partir de sites non canadiens. Je pense que ça va changer.

Il est certain qu'il y a encore un obstacle du côté de la quantité de capital de risque disponible au Canada pour les compagnies canadiennes, qu'il s'agisse de détaillants établis comme Bell ou de petites compagnies émergentes.

Il est intéressant de noter que la semaine dernière, une annonce a justement été faite par une compagnie appelée Vengold Inc., qui est en fait dirigée maintenant par un ancien président de Bell, de notre ancienne division Bell Emergis, Jim Tobin. L'objectif de Jim est de stimuler le capital de risque disponible au Canada pour le commerce électronique et aussi de stimuler ou plutôt de réduire l'exode de professionnels hautement qualifiés dans le domaine du commerce électronique et de l'informatique qui quittent le Canada, principalement en direction des États-Unis. C'est une belle occasion pour Jim, mais cela montre aussi l'un des principaux problèmes qui se posent actuellement dans l'espace canadien.

M. John Cannis: Madame la présidente, je cède le reste de mon temps de parole aux autres intervenants.

La présidente: Monsieur Jones.

M. Jim Jones: Merci.

C'est bien beau d'être les plus branchés, et la vitesse n'est certainement plus un problème; nous avons une bonne largeur de bande. Quel pourcentage des transactions internes de Bell avec sa clientèle se font maintenant par commerce électronique, c'est-à- dire électroniquement, par opposition aux méthodes traditionnelles?

M. Bill Garbarino: Nous avons maintenant quelque 25 p. 100 de nos ventes et de nos transactions de service qui se font par un accès électronique libre-service, c'est-à-dire...

M. Jim Jones: Voulez-vous dire 25 p. 100 de votre revenu ou 25 p. 100 de vos transactions?

M. Bill Garbarino: Je dis 25 p. 100 de nos transactions.

Il faut dire que notre modèle de fonctionnement est fondé sur un apport constant de revenus, de sorte qu'environ 75 p. 100 de nos interactions avec nos clients ne sont pas des ventes. Une fois que les clients sont branchés sur notre système, nous leur fournissons des services.

Quant au commerce électronique à strictement parlé, actuellement, seulement 6 p. 100 de nos transactions de vente, environ, se font par commerce électronique. Pour l'an 2000, nous concentrons nos efforts principalement sur les transactions entreprises-clients et interentreprises. Nous voulons atteindre à la fin de l'année courante un taux de 12 à 15 p. 100 de nos transactions de vente effectuées par commerce électronique.

M. Jim Jones: Pour chaque point de pourcentage de commerce électronique, combien pouvez-vous économiser? Vous ne pourrez probablement jamais faire la totalité de vos affaires de cette façon.

M. Bill Garbarino: Ce ne sera jamais la totalité, non, mais si l'on examine différents secteurs, nous avons environ 1,5 milliard de dollars par année qui ont stimulé de nouveaux revenus axés davantage sur la demande interne. Nous envoyons quelque chose et cela stimule une réaction de nos clients qui accroît la demande de nos produits. Nous escomptons recueillir au moins 150 millions à 200 millions de dollars de cette demande au cours de l'an 2000 au moyen du commerce électronique. Ensuite, si l'on tient compte de nos recettes ordinaires, qui représentent une autre tranche de 8 à 10 milliards de dollars, nous voulons pouvoir faire à peu près la moitié de ces transactions en ligne, ce qui est considérable. Et nous sommes actuellement bien placés pour y parvenir puisqu'en décembre 1999, 32 p. 100 de nos transactions de service ont été faites au moyen de l'Internet et d'autres mécanismes électroniques.

• 1700

M. Jim Jones: Gaylen, quel retard le Canada a-t-il par rapport aux États-Unis pour ce qui est de l'adoption du commerce électronique?

M. Gaylen Duncan: Les chiffres les plus précis qu'on puisse obtenir nous sont communiqués par International Data Corporation, et cette compagnie estime que nous avons actuellement entre 12 et 18 mois de retard sur les États-Unis.

M. Jim Jones: L'année dernière, c'était entre 18 et 30 mois.

M. Gaylen Duncan: L'année dernière, c'était entre 18 et 24 mois, et il y a donc eu un certain progrès. J'ignore si c'est un changement profond ou si nous avons simplement eu une très bonne année. Je n'aime pas tirer de conclusion de données sur un an seulement, mais il est vrai que nous sommes passés de 18 à 24 mois de retard à 12 à 18 mois.

M. Bill Garbarino: Dans le secteur des communications, nous sommes en fait le modèle dont les États-Unis s'inspirent. Nous ne représentons qu'un seul secteur industriel au Canada, mais je pense que nous avons clairement l'occasion de continuer à gruger sur cette avance.

M. Jim Jones: Je ne comprends rien à ce que vous dites. Qui est le modèle?

M. Bill Garbarino: Bell Canada. Je pars demain pour Dallas pour participer au sommet du commerce électronique, qui regroupe les six principaux fournisseurs américains de communications Bell Canada. Nous sommes donc considérés l'égal des très grands fournisseurs et nous avons en fait réalisé de plus grands progrès que nos homologues américains dans la mise en oeuvre du modèle transactionnel dans le secteur des communications. Il y aura à cette table SBC et Bell Atlantic, U.S. West, Bell South, GTE, qui sont de très grandes compagnies qui contrôlent essentiellement...

M. Jim Jones: Quand vous dites que Bell fait du commerce électronique, vous voulez dire que vous mettez au point des mémoires à accès direct pour que d'autres intervenants puissent faire du commerce électronique ou des transactions sur Internet? C'est bien cela?

M. Bill Garbarino: Oui, mais nous fournissons aussi directement le service à nos clients. Nous faisons à peu près 65 millions de transactions par année avec nos huit millions de clients et nous en transférons une fraction importante sur une plate-forme de commerce électronique et d'affaires électroniques.

M. Jim Jones: Est-ce que Chapters.ca dessert l'ensemble de l'Amérique du Nord, ou seulement Chapters Canada?

M. Bill Garbarino: Ce groupe vise essentiellement le marché canadien, mais ce qui est fantastique avec l'Internet, c'est que n'importe qui peut y avoir accès. Nous constatons d'ailleurs dans nos magasins virtuels un achalandage croissant en provenance des États-Unis et de l'Europe, la plupart des clients achetant des biens de consommation que l'on peut expédier à destination.

M. Jim Jones: Y a-t-il au Canada des compagnies comme Dell Computers? Je pense que cette compagnie fait une proportion importante de ses affaires sur Internet. En fait, c'est presque la totalité. Y a-t-il des compagnies semblables qui émergent au Canada?

M. Bill Garbarino: Il y a évidemment Dell Canada, qui est une filiale de Dell et dont environ 55 p. 100 des affaires sont maintenant traitées en ligne; c'est donc un excellent exemple de leader dans ce secteur. Nous essayons d'en faire autant dans les communications. Nous constatons que des groupes comme Chapters.ca et futureshop.ca progressent aussi rapidement dans la vente au détail en ligne.

M. Gaylen Duncan: Si vous consultez le site Web itac.ca, vous verrez que nous sommes en train d'établir toute une série d'études de cas. Elles ont seulement une ou deux pages de long et ce sont toutes des compagnies canadiennes qui mettent sur pied des entreprises Internet. On y trouve Vesey Seed, Manitoulin Transport, Angel Lake... elles sont toutes dans notre base de données. Vous avez itac.ca à la sous-rubrique commerce électronique. Bref, oui, il y a une foule de compagnies canadiennes, dont beaucoup sont petites, mais des compagnies canadiennes qui sont en train de prendre de l'importance et qui comptent sur l'Internet pour y parvenir.

M. Jim Jones: Quand vous avez dit que nous avons 12 à 18 mois de retard sur les États-Unis, est-ce globalement, parce que peut- être que dans le secteur de la petite entreprise nous avons beaucoup plus que 12 à 18 mois de retard?

M. Gaylen Duncan: Nous avons du retard dans tous les secteurs de notre économie. Nous revenons tout juste d'une réunion d'information de dirigeants d'associations destinée à environ 120 associations d'industries verticales et le principal message que l'on nous a transmis est qu'il y a seulement une ou deux associations verticales qui se lancent vraiment dans le commerce électronique. Il y a une certaine crainte, mais aussi un intérêt extraordinaire et un appétit vorace pour des études de cas ou des personnes ressources. Par exemple, dans le secteur du camionnage, nous leur disons simplement d'appeler chez Manitoulin et de leur demander d'envoyer un représentant prendre la parole devant l'association sectorielle. Ils font un exposé et expliquent comment cela a complètement changé leur façon de gérer une compagnie de camionnage.

C'est sur plan des transactions entre entreprises que nous avons vraiment du retard. Le commerce électronique entre les entreprises et les consommateurs se développe rapidement et c'est le côté séduisant dont tout le monde parle. Ce qui va améliorer la productivité ce sont les transactions d'entreprise à entreprise.

• 1705

La présidente: Monsieur Murray, s'il vous plaît.

M. Ian Murray: Merci.

Monsieur Duncan, pour ce qui est des transactions d'entreprise à entreprise, vous avez mentionné que vous mettriez l'accent sur l'utilisation de la technologie de l'information pour améliorer la productivité du milieu des affaires. Je voudrais donc en parler avec vous, car la direction de nombreuses entreprises semble avoir de la difficulté sur ce plan. Nous avons également entendu dire que l'adaptation était plus lente dans les petites et moyennes entreprises.

J'examinais le rapport de la table ronde et ses cinq objectifs. L'un d'eux consistait à «inciter les entreprises canadiennes à faire de l'exploitation d'Internet une priorité» tandis que le dernier était de «persuader les gouvernements et les organismes de réglementation du Canada que le développement du commerce électronique devrait constituer une priorité». Peut-être pourriez-vous inverser ces recommandations. Peut-être n'est-ce pas seulement vos membres que vous devez convaincre étant donné que le problème ne se pose sans doute pas de ce côté-là. Il ne sera pas non plus trop difficile de persuader le gouvernement, mais il semble plutôt qu'au Canada le problème se situe du côté de la haute direction des entreprises.

Je voudrais savoir si, à votre avis, nous pouvons faire quelque chose—peut-être pouvons-nous inspirer les autres nous- mêmes. Mais le thème qui revient souvent, semble-t-il, est que les compétences des gestionnaires canadiens ne sont pas à la hauteur de celles des gestionnaires américains, d'un grand nombre de sociétés des États-Unis.

M. Gaylen Duncan: Je ne suis pas d'accord. Nous avons quelques mauvais gestionnaires, mais nous en avons également qui possèdent des compétences exceptionnelles. C'est la raison pour laquelle nous perdons un grand nombre de cadres supérieurs et intermédiaires au profit des États-Unis. Si vous pouvez vendre et être rentable dans un pays qui mesure 4 000 ou 5 000 milles de largeur sur 100 milles de profondeur, vous pouvez vendre dans la région de Chicago, en Californie et... Ne m'entraînez pas dans ce sujet.

Nous avons un problème, c'est vrai. Le libellé de cette recommandation est assez précis. Pour ce qui est d'inciter l'entreprise à agir, je ne pense pas que les belles paroles du gouvernement puissent être très efficaces. Le secteur privé... ce thème sera celui de John Wetmore, le PDG d'IBM Canada, avec tout un groupe de gens, tous bénévoles, qui iront dire un peu partout: «Tels sont les faits, voici ce que vous devriez faire, tels sont les gens que vous pouvez contacter et qui viendront vous aider.»

Ce que le gouvernement peut faire, et voilà pourquoi il est question de «persuader», ce qui nous ramène à certaines des questions précédentes—c'est brancher rapidement le gouvernement sur Internet. Cela aura plusieurs effets. C'est une façon de donner l'exemple. Cela veut dire que nous avons des solutions uniques au monde. Si nous sommes les premiers, nous trouvons les solutions et nous pouvons les vendre dans le reste du monde. Si nous sommes les derniers, nous achetons les solutions de quelqu'un d'autre. C'est donc une façon de stimuler l'industrie et de donner le bon exemple. D'autres entreprises diront que si le gouvernement est capable de le faire, elles aussi. Et le fait est que cet objectif est énoncé dans le discours du Trône. Nous avons voulu croire cette déclaration et la réponse du premier ministre, mais vous n'avez pas respecté votre première échéance.

Nous avons donc pris un peu de recul car nous en sommes encore au stade des belles paroles. Voilà pourquoi il est question ici de persuader les entreprises.

M. Ian Murray: En effet, je l'accepte.

Nous savons tous que c'est le commerce électronique entre les entreprises qui présente les possibilités les plus énormes, peut- être plus que le commerce de détail. Je me demande s'il est trop tôt pour présenter aux entreprises canadiennes une série d'études de cas pour leur montrer ce qui s'est passé ou ce qui pourrait se produire. Si elles ont besoin d'inspiration, cela peut sembler évident pour un grand nombre d'entre nous, mais peut-être pas pour beaucoup de gens. Voulez-vous dire que le groupe IBM va essayer de faire ce genre de choses?

M. Gaylen Duncan: Notre association est en train de réunir ces études de cas pour pouvoir transmettre le message. Je m'en sers lorsque je fais des discours. Mes membres en font autant. C'est une façon d'y arriver. Vous pouvez également prévoir des incitatifs. Si le secteur privé comprenait que le gouvernement veut qu'il fasse des affaires d'entreprise à entreprise par Internet, quels incitatifs fiscaux pourriez-vous fournir? Les dispositions prises pour le bogue de l'an 2000 étaient formidables. Vous vous êtes contentés de différer le paiement de l'impôt et d'autoriser un amortissement plus rapide. Nous avons fini par récupérer cet argent, mais les entreprises ont disposé de liquidités pendant l'année de transition. Je peux vous dire que cela a eu d'énormes répercussions dans le marché.

• 1710

M. Ian Murray: Je crois que M. Garbarino désire dire quelque chose.

M. Bill Garbarino: J'espère que le gouvernement et le secteur privé vont voir les marchés publics dans une nouvelle perspective. Si vous amenez surtout les PME à commencer à traiter avec le gouvernement de cette façon, et ensuite avec les autres entreprises du secteur privé, grandes et petites, vous habituerez les petites et moyennes entreprises à faire du commerce électronique. Et c'est le plus gros défi que doit relever une grande société comme Bell: il s'agit de familiariser avec Internet une entreprise qui, jusqu'ici, a procédé de façon très traditionnelle sur le plan des produits, des services et de la distribution.

Je pense qu'il est en fait plus facile et plus rapide d'amener les petites entreprises à se lancer dans cette voie.

Un autre aspect fondamental est qu'il revient à chacune des grandes compagnies du secteur des services de fournir des trousses de démarrage aux PME. C'est ce que nous envisageons de faire actuellement chez Bell. Nous songeons à regrouper divers éléments du commerce électronique, du centre serveur du Web à la construction d'un site web en passant par certaines applications et capacités de transition en vue de fournir le tout prêt à utiliser aux petites et moyennes entreprises, car elles ont peur de se lancer.

M. Ian Murray: Oui. Ce qui m'a frappé c'est que c'est comme pour quiconque se sert du courriel ou de l'Internet pour la première fois. Quand on constate à quel point c'est facile, on se demande pourquoi on a attendu aussi longtemps.

Le gouvernement pourrait peut-être donc offrir quelque chose de très convivial pour attirer ces petites entreprises afin qu'une fois qu'elles se seront lancées, elles se rendront compte qu'elles auraient dû le faire beaucoup plus tôt...

M. Bill Garbarino: Exactement.

M. Ian Murray: Très bien, merci.

La présidente: La sonnerie va retentir dans quelques secondes. Je voudrais seulement poser une brève question.

Vous avez mentionné tout à l'heure que le Canada avait un bon modèle, contrairement aux États-Unis, mais que ce pays est en avance sur nous. Je ne comprends pas très bien. Comment peut-il être en avance sur nous si nous avons le bon modèle?

M. Bill Garbarino: En général, les Canadiens ont le bon modèle. Ce qui s'est passé aux États—Unis c'est que le secteur privé a saisi l'occasion beaucoup plus tôt que le secteur privé ne l'a fait chez nous, ce qui lui a permis de s'implanter sur le terrain dès les premières années. Le gouvernement canadien a toutefois la possibilité d'offrir un système uniforme pour le commerce électronique alors que le gouvernement américain n'a pas cherché à le faire jusqu'ici.

M. Gaylen Duncan: En fait, il ne le peut pas.

La présidente: Le gouvernement américain ne peut pas le faire?

M. Gaylen Duncan: Il ne peut pas mettre en place un système unique étant donné qu'il y a tellement d'éléments indépendants au gouvernement et dans les États. Nous avons cette possibilité au Canada. C'est grâce à la coopération. Nous n'avons que dix provinces, trois territoires et un gouvernement fédéral. Pour réunir tous les grands patrons des services d'information de tous les gouvernements du pays, il suffit de regrouper quatorze personnes autour d'une table.

Le modèle dont j'ai parlé portait sur la protection de la vie privée. Le modèle européen est en fait une directive interventionniste très lourde à cet égard. Les Américains ont dit au gouvernement de ne pas s'en mêler, que l'industrie établirait ses propres normes pour la protection des renseignements personnels et qu'elle s'autoréglementerait. Le Canada a plutôt suggéré une législation qui ne serait pas trop lourde et une autoréglementation, non pas avec un commissaire interventionniste, mais quelqu'un qui superviserait les choses et qui pourrait écouter les plaintes et formuler son opinion. Vous ne pouvez pas imposer des changements.

Sous l'influence de la Ligue des droits et libertés, les Américains commencent à dire: «Nous ne faisons pas confiance à l'industrie. Nous voulons une législation fédérale qui ne soit pas trop restrictive et nous laisserons l'industrie s'autoréglementer en assurant une certaine supervision.»

C'est donc le modèle d'action dont je parlais. Mais c'était aussi le modèle du gouvernement tel qu'il était lorsque les consultations ont été achevées à la fin septembre. C'est le bon modèle qui était alors proposé. J'ignore à quoi il ressemble aujourd'hui.

La présidente: Quel est donc, selon vous, le plus gros problème ou défi que doit relever le gouvernement pour redresser la situation?

M. Bill Garbarino: C'est la question qui a été soulevée tout à l'heure au sujet du rôle de la poste électronique. C'est une question qu'il va falloir examiner à fond. Vous devrez décider si la poste électronique sera le prolongement de la société d'État ou si c'est un élément du secteur privé qui s'en chargera.

La présidente: Et c'est ce qui nous retient?

M. Bill Garbarino: Je crois que oui. Vous êtes sans doute mieux en mesure que moi de répondre à cette question, mais c'est ce que nous pouvons voir de l'extérieur.

M. Werner Schmidt: Puis-je poser une question?

La présidente: Monsieur Schmidt, vous pouvez poser une brève question. La sonnerie n'a pas encore commencé.

M. Werner Schmidt: Ma question porte sur la rapidité avec laquelle cette nouvelle idée sera acceptée. On a laissé entendre que le degré d'acceptation suivrait la courbe en S traditionnelle. Je ne pense pas que ce soit le cas.

• 1715

M. Gaylen Duncan: Je n'étais pas du tout d'accord.

M. Werner Schmidt: En fait, les consommateurs semblent presque impatients de commencer. S'il y a une résistance, c'est un manque de confiance dans la capacité du système à nous satisfaire et dans sa sécurité. Je crois que ce sont les deux principaux facteurs. Il ne s'agit pas du tout des facteurs de résistance traditionnels. C'est un monde entièrement nouveau qui s'ouvre à nous.

M. Bill Garbarino: Je suis entièrement d'accord. La seule chose qui fait hésiter les clients avec qui nous traitons quotidiennement par Internet est qu'ils veulent que ce soit pour eux une expérience qu'ils pourront répéter sans difficulté. Ce n'est pas qu'ils ne sont pas prêts à le faire ou qu'il ne s'agit pas d'une transformation importante dans leur interaction avec nous.

La présidente: M. Jones a quelque chose à dire à ce sujet.

M. Jim Jones: Je me risquerais à dire que si ce n'est pas vraiment mis en oeuvre à grande échelle, c'est parce que vous n'offrez pas aux consommateurs de dispositif simple pour aller sur Internet. N'est-ce-pas?

M. Werner Schmidt: Pour montrer qu'il n'y a rien de sorcier.

M. Jim Jones: Il vous faut un dispositif simple, presque aussi simple et aussi peu coûteux que le téléphone, pour y aller. Ce n'est pas encore chose faite. Dès que nous l'aurons, vous devriez le savoir, vous êtes Bell...

M. Bill Garbarino: Je suis d'accord pour dire qu'il y a encore quelques obstacles. Le plus gros est en fait ce que nous appelons «la facilité d'emploi pour le client». Il s'agit de rendre une application suffisamment intuitive pour qu'il soit très facile aux clients de procéder de la même façon qu'ils le faisaient lors d'une intervention en direct. C'est ce que nous apprenons tous à faire dans l'industrie et il nous faudra plusieurs années avant de nous approcher de la perfection.

Pour ce qui est de l'accès aux terminaux qui conviennent le mieux...

M. Jim Jones: J'ai dit qu'il fallait que ce soit bon marché.

M. Gaylen Duncan: C'est une excuse facile, Jim.

M. Jim Jones: Non, vous devez...

M. Gaylen Duncan: Le marché des États-Unis offre le produit au même prix que nous.

M. Jim Jones: J'ai parlé de système universel.

M. Gaylen Duncan: Aux États-Unis, l'accès au réseau est plus coûteux que chez nous, il est plus difficile d'accéder aux sites que ce n'est le cas au Canada et pourtant les Américains sont en avance sur nous. Quelle est la différence?

M. Jim Jones: Il faudrait examiner leur politique fiscale.

M. Gaylen Duncan: Je suis d'accord pour dire que si nous pouvions...

M. Jim Jones: Il faut voir comment ils considèrent la chose du point de vue commercial—ils peuvent faire valoir que cela leur permettra de gagner beaucoup plus d'argent... et qu'ils vont régner sur le monde.

M. Gaylen Duncan: Avec la baisse des prix... Et ils ont baissé. Chaque fois que je remplace un ordinateur, je suis étonné de voir que j'achète beaucoup plus de puissance pour beaucoup moins cher. Et c'est de plus en plus facile à utiliser.

La technologie continue de s'améliorer. En réalité, nous sommes dans le marché nord-américain, il n'y a pratiquement pas de différence entre nous, mais les Américains sont en avance sur nous. Et nous devons les rattraper.

Telle est ma position. Nous devons tirer la couverture à nous et faire mieux que les États-Unis. Nous aurons alors une économie viable qui pourra financer les programmes sociaux. Et ce ne serait pas un mauvais résultat.

M. Jim Jones: Regarder la réalité en face, Gaylen. Vous devez nous donner un dispositif que je pourrai utiliser sans avoir à charger quatre gigaoctets de logiciel.

M. Gaylen Duncan: Pouvons-nous construire un ordinateur qui va s'ouvrir instantanément?

M. Jim Jones: Ce devrait être possible.

M. Gaylen Duncan: Non. Nous devons le regarder faire pendant cinq minutes.

La présidente: Très bien, monsieur Jones, merci.

Je tiens à remercier M. Duncan et M. Garbarino d'être venus ici cet après-midi. Je voudrais également les remercier d'être venus plus tôt pour que nous puissions aller voter. Vos observations et cette discussion nous seront utiles.

Nous espérons pouvoir aider le Canada à relever ce défi.

La séance est levée.