INDU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY
COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 11 avril 2000
La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Je déclare maintenant la séance ouverte conformément à l'ordre de renvoi de la Chambre des communes du 29 février 2000, Budget des dépenses principal pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2001, Crédits sous la rubrique Industrie et Rapport sur le rendement -Industrie Canada pour la période terminée le 31 mars 1999.
Je suis très heureuse d'accueillir cet après-midi l'honorable Gilbert Normand, secrétaire d'État (Sciences, recherche et développement). Il est accompagné aujourd'hui de Paul Dufour, adjoint ministériel, Sciences, recherche et développement du ministère de l'Industrie.
Je suis aussi très heureuse de souhaiter la bienvenue au président du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, le Dr Tom Brzustowski ainsi que le Dr Marc Renaud, membre des Instituts canadiens de recherche en santé et président du Conseil de recherches en sciences humaines.
Je crois que vous avez une petite déclaration liminaire, monsieur Normand.
[Français]
L'hon. Gilbert Normand (secrétaire d'État (Sciences, Recherche et Développement) Lib.)): Merci beaucoup, madame la présidente. J'ai préparé une courte présentation. Puisque vous avez déjà bien présenté les gens qui m'entourent, je ne le ferai pas à nouveau. Ils seront heureux de répondre à vos questions par la suite.
À titre de secrétaire d'État (Sciences, Recherche et Développement), je tiens à remercier le comité pour son excellent travail, ainsi que pour son appui au renforcement du système d'innovation au Canada.
À l'avenir, le succès du Canada et son avantage comparatif dans le nouveau millénaire reposera sur deux ressources presque illimitées, à savoir les connaissances et les compétences. Le prochain siècle verra l'économie mondiale du savoir créer d'énormes possibilités qui accroîtront la prospérité et amélioreront la qualité de vie de tous les Canadiens et Canadiennes. Nous devons saisir ces possibilités et miser sur nos forces.
Je crois que le dernier discours du Trône a bien exprimé cette idée:
-
Dans l'économie mondiale du savoir, l'avantage
va aux pays qui sont innovateurs, qui ont des
niveaux de productivité élevés,...
Je pense avoir d'ailleurs déjà souligné cela à votre intention.
-
...qui adoptent rapidement les technologies les plus
récentes, qui investissent dans le perfectionnement des
compétences de leurs citoyens et qui recherchent de
nouveaux marchés dans le monde entier.
Le système d'innovation canadien, expression utilisée pour décrire nos institutions de sciences et technologie et les diverses liaisons existant entre elles, crée, diffuse et exploite les connaissances nécessaires pour alimenter une société et une économie progressives.
Afin de fonctionner efficacement, ce système dépend de la présence de forces complémentaires dans trois secteurs clés: le secteur privé, les universités et le gouvernement. Ces acteurs exécutent chacun un certain nombre de rôles et, dans le cadre d'une coopération et d'une collaboration, ils nous assurent que nos systèmes économiques et sociaux fonctionnent bien, qu'ils sont aptes à suivre le rythme des évolutions nationales et internationales dans le domaine des sciences et de la technologie, et que le gouvernement est bien en mesure de répondre aux attentes des Canadiens et Canadiennes.
Comme vous le savez, le gouvernement joue d'importants rôles à titre d'exécutant et de facilitateur dans le domaine des sciences et de la technologie. Il remplit ces rôles d'une part en exécutant des recherches au moyen de ses capacités et installations intramurales et, d'autre part, en finançant aussi la recherche à l'extérieur du gouvernement, ce qu'on pourrait appeler la recherche extramurale, et en favorisant les partenariats entre le gouvernement, l'industrie et les universités, comme je l'indiquais tout à l'heure.
• 1540
En 1999, le gouvernement fédéral a dépensé
6,3 milliards de dollars dans le domaine des sciences
et de la technologie. Cette somme représente 4,2 p.
100 du budget total. Il s'agit d'une croissance quand même
appréciable parce qu'en 1996, nous n'y investissions
que 3,5 p.
100 du budget total. En 1999, l'industrie a
entrepris 63 p. 100 des activités de recherche et
développement au Canada; le milieu universitaire, 24 p.
100; et le gouvernement, 11 p. 100.
Sur la scène internationale, nous demeurons encore au neuvième rang des pays de l'OCDE au chapitre des dépenses brutes en recherche et développement. Bien que nous devancions l'Italie, nous accusons un retard par rapport à la Suède, la Finlande et la Corée.
[Traduction]
C'est dans ce contexte que j'aimerais vous parler de la façon dont le gouvernement a rempli son rôle de facilitateur de la recherche universitaire.
L'intervention la plus visible et la plus directe du gouvernement sur les plans de la recherche, de l'innovation et de l'apprentissage se manifeste dans l'aide financière que les trois conseils subventionnaires—CRSNG, CRSH et CRM—accordent à la recherche universitaire et à la formation de personnes hautement qualifiées.
Les conseils subventionnaires fournissent ensemble un financement à plus de 17 000 chercheurs de toutes les parties du pays, en vertu d'un régime d'examen par les pairs. Ils encouragent ainsi la recherche fondamentale et appliquée en vue de repousser toujours plus loin les frontières du savoir et d'accroître ainsi notre compréhension du monde physique, biologique et social. Ces investissements favorisent aussi la formation des jeunes les plus talentueux du pays—nos futurs dirigeants—qui ont ainsi la chance d'acquérir d'importantes compétences applicables dans tous les secteurs de l'économie.
[Français]
Le gouvernement reconnaît le rôle stratégique de la recherche universitaire canadienne au chapitre du renforcement de la capacité innovatrice et du maintien de la productivité du Canada. C'est pourquoi les conseils subventionnaires ont été parmi les premiers à voir leur financement renouvelé aussitôt que le gouvernement a réussi à éliminer le déficit. Cela explique également un engagement continu face aux conseils subventionnaires à la recherche depuis ce temps-là.
Comme je l'ai dit plus tôt, les dépenses du fédéral ont dépassé 6 milliards de dollars en 1999, tandis que le financement fédéral des établissements d'enseignement supérieur a atteint un sommet sans précédent de 1,6 milliard de dollars.
Bien que je ne veuille pas revenir aux budgets de 1997, 1998 et 1999, je dois dire que le gouvernement fédéral a continué de renforcer son engagement face à la recherche universitaire dans son plus récent budget également. Il a en effet fait un investissement supplémentaire de 900 millions de dollars dans la Fondation canadienne pour l'innovation, portant son investissement total à 1,9 milliard de dollars.
En décembre 1999, la fondation a investi plus de 450 millions dans l'infrastructure de recherche des universités, hôpitaux, collèges et autres établissements de recherche. Comme vous le savez, la fondation a élargi son financement afin d'inclure les collèges. En ajoutant cette somme aux fonds accordés par les partenaires, cela a donné lieu à une injection de plus de 1,1 milliard de dollars en investissement de capitaux. Je ne vous apprendrai rien en vous disant que le gouvernement a investi 900 millions de dollars pour créer les fameuses chaires universitaires.
Le CRSNG et le CRSH sont des sources importantes d'appui aux universités dans le domaine des sciences naturelles et des sciences humaines. Bien que cela n'ait pas été annoncé lors du discours sur le budget, je puis vous dire aujourd'hui que nous accroîtrons, au cours des cinq prochaines années, l'enveloppe budgétaire du CRSH de 10 millions de dollars par année. Cela représente donc une injection supplémentaire de 50 millions de dollars. Quoique cette somme ne permettra pas au CRSH de répondre à toutes les demandes, le conseil pourra répondre favorablement à un plus grand nombre d'elles. Nous reviendrons sur cette problématique un peu plus tard.
Je ne sais pas si ce sont des chiffres que vous connaissez, mais je porte à votre attention le fait qu'en 1998, le CRSNG a subventionné plus de 8 900 chercheurs universitaires, près de 13 000 étudiants universitaires au niveau postdoctoral et plus de 2 800 techniciens et chercheurs professionnels universitaires.
• 1545
Veuillez m'excuser si mes propos sont un peu décousus,
mais je n'ai pas voulu vous lire toutes ces notes
d'allocution, que je vous remettrai et dont vous
pourrez prendre connaissance un peu plus tard.
Cela nous permettra de disposer de plus de temps pour
la période des questions, qui est peut-être plus
intéressante pour vous.
Un défi qui se posera sous peu pour les universités sera la commercialisation des résultats de la recherche. C'est une question dont nous avons commencé à parler. Nous examinons les façon dont cette commercialisation pourrait se faire. Nous croyons que les universités pourront peut-être aller ainsi chercher un certain type de financement, sans que ce soit nécessairement le Pérou.
Je vais terminer en vous disant que les sciences, la recherche et le développement ont tous un même objet: la quête du savoir, c'est-à-dire la découverte de nouvelles données et l'acquisition d'une meilleure compréhension de la façon dont notre monde fonctionne.
La recherche touche toutes les facettes de notre vie. On n'a qu'à nommer les sciences de la santé, les sciences sociales, l'éducation, l'environnement, les affaires et l'économie. Le gouvernement va sûrement continuer à promouvoir la création, la diffusion et la commercialisation du savoir afin de créer des emplois et d'assurer la richesse du pays.
J'aimerais soulever en dernier lieu le fait que les universités et l'industrie sont très satisfaites de l'engagement du gouvernement au niveau de la recherche. Certaines inquiétudes se manifestent toutefois, entre autres au sujet des coûts indirects pour les universités. M. Renaud vous fera probablement la preuve qu'il a besoin de sommes d'argent plus élevées en raison des importantes demandes qui lui ont été soumises au niveau des ressources humaines.
Lors de nos discussions avec des représentants des universités au cours des derniers mois, nous avons entendu dire—ce n'est pas une invention de notre part—qu'une pénurie de chercheurs scientifiques menace le Canada parce que de moins en moins de jeunes choisissent une carrière scientifique. Il s'agit d'une constatation, et non d'une découverte qu'on a faite, dont nous ont fait part les dirigeants des universités et collèges.
Le Canada n'est pas le seul pays à vivre cette situation, puisqu'on la retrouve même dans un pays comme l'Allemagne qui, il y a trois semaines ou un mois, a décrété l'émission de 20 000 cartes vertes pour permettre à des chercheurs étrangers d'aller travailler en Allemagne pour une période de trois ans, avec la possibilité d'un prolongement de deux ans. Ici, au Canada, nous cherchons également à faciliter l'entrée de chercheurs étrangers. Mme Caplan a préparé un programme que nous avons examiné avec elle et qu'elle devrait être en mesure de déposer bientôt. D'autres pays sont en train de faire le même exercice.
De plus, on ne peut pas négliger le fait que les carrières en sciences humaines sont souvent plus prometteuses pour les jeunes que les carrières scientifiques et, on doit le dire, mieux rémunérées. Les carrières en sciences humaines sont peut-être celles qui ont permis à plus de femmes d'embrasser des carrières professionnelles.
J'ai envie de m'arrêter ici pour le moment. M. Renaud, M. Brzustowski et moi serons heureux de répondre à vos questions.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Normand.
Monsieur Penson, vous avez la parole.
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Merci.
J'aimerais remercier le secrétaire d'État et ses hauts fonctionnaires d'être venus nous rencontrer cet après-midi pour discuter de sciences, de recherche et de développement.
Monsieur le ministre, en votre qualité de secrétaire d'État, à combien s'élève votre budget?
M. Gilbert Normand: Mon ministère ne dispose pas directement d'un budget pour les conseils subventionnaires. Comme vous le savez, les conseils administrent eux-mêmes leurs budgets. Nous discutons souvent avec eux des différentes politiques, mais ils administrent leurs budgets en toute indépendance politique.
M. Charlie Penson: Il n'en reste pas moins que les différents conseils de recherche se partagent, je crois, environ un milliard de dollars au total. Vous conviendriez avec moi qu'il s'agit d'une priorité de votre gouvernement. À ce titre, il me semble qu'il faudrait soumettre le processus à une bonne évaluation afin de voir si les contribuables canadiens en ont pour leur argent.
J'ai deux questions à vous poser à cet égard. La première porte sur le Programme d'aide à la recherche industrielle, le PARI. J'ai lu récemment que seulement 15 p. 100 des décisions qui ont été prises en matière de financement dans le cadre de ce programme ont été en fait fondées sur les critères attribués à chaque projet. Ce qui est encore plus inquiétant, je suppose, c'est qu'aucune évaluation fondamentale du besoin réel des fonds attribués n'a vraiment été faite. En fait, d'après une enquête effectuée par le PARI, quelque 40 p. 100 des répondants estimaient avoir vraiment besoin de cet argent pour démarrer leur projet.
Étant donné qu'on ne peut se passer d'un processus d'évaluation crucial pour déterminer si nous en avons pour notre argent, j'aimerais que vous me fassiez part de votre point de vue à cet égard. Il s'agissait de ma première question. Je vais maintenant vous poser la deuxième après quoi, vous pourrez répondre.
La deuxième question porte sur le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie. Le conseil a annoncé récemment que leur programme d'appui aux professeurs universitaires, auparavant réservées aux candidates de sexe féminin, s'appliquera désormais aux femmes et aux hommes autochtones. Je me demande pourquoi ce programme ne serait pas offert à tout le monde. Pourquoi adoptons-nous des critères fondés sur le genre et la race. Pourquoi ne pas simplement donner la chance à tout le monde et décider en fonction de ceux qui présentent une demande?
Voilà mes questions.
[Français]
M. Gilbert Normand: Si vous me le permettez, je demanderai à mes partenaires de répondre à cette question. Les critères ont été établis. Monsieur Brzustowski.
[Traduction]
Vous pouvez commencer.
Dr Thomas Brzustowski (président, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada): Merci, monsieur le ministre et madame la présidente.
Laissez-moi répondre à la question portant sur le Programme d'appui aux professeurs universitaires. Ce programme, au départ, a été mis sur pied principalement pour essayer d'accélérer la vague, si vous me permettez l'expression, étant donné qu'au Canada—à l'instar des États-Unis—nous constatons une proportion beaucoup moindre de professeurs universitaires en sciences et en génie par rapport aux femmes qui détiennent un doctorat, un doctorat récent, en sciences et en génie. Le nombre de femmes détenant des doctorats récents est inférieur à celui des étudiants qui poursuivent en ce moment des études de doctorat. Il est moindre que celui des étudiants de maîtrise, qui est beaucoup moindre que le nombre d'étudiants du premier cycle. On espérait donc, en dépit de la lente progression de tous ces nombres, accélérer le processus en offrant des programmes d'appui aux candidates féminines qui répondaient aux critères d'excellence et faciliter ainsi leur accès à des postes dans les universités.
Dans le cadre de ce programme, l'université doit entre autres démontré qu'elle a besoin de représentation féminine dans cette discipline, dans ce domaine. C'est une autre raison de le faire.
En outre, pour ce qui est de rendre le programme accessible aux étudiants autochtones, pour l'instant nous ne nous attendons pas—parce qu'on nous l'a dit—à avoir de candidats. Mais en étendant ainsi le programme, nous offrons aux étudiants autochtones des perspectives qui les poussent à réfléchir. Nous n'avons encore reçu aucune demande. Il se pourrait très bien que le programme d'appui aux professeurs universitaires soit un jour accessible à tout le monde et nous espérons y parvenir, mais tant que nous ne disposerons pas des ressources nous le permettant, nous ne ménageons pas nos efforts pour offrir ces programmes aux personnes qui sont sous-représentées dans nos universités à l'heure actuelle.
M. Charlie Penson: Pouvez-vous me dire, s'il y avait quelque raison fondamentale d'empêcher ces personnes de se manifester? Quel était le problème selon vous?
Dr Thomas Brzustowski: Le problème a été signalé à notre attention par des gens qui se sont penché sur la question pendant un certain nombre d'années et qui ont repéré un certain nombre de problèmes. Par exemple, les politiques universitaires compliquaient la tâche des femmes qui, tout en voulant poursuivre une carrière devait l'interrompre pour avoir des enfants et y revenir par la suite. On avait simplement parfois l'impression que là où il y avait si peu de professeures universitaires, chaque nouvelle recrue ne trouverait pas l'université tellement accueillante, trouverait le milieu étrange.
Je crois qu'il s'agirait probablement des raisons principales. L'idée était d'essayer activement de créer un milieu attrayant pour les professeurs universitaires en sciences et en génie pour que le nombre croissant d'étudiants du premier cycle puissent y voir davantage de modèles de comportement qu'en salle de classe. C'était la raison principale, je crois.
M. Charlie Penson: J'ai une deuxième question en ce qui concerne le PARI.
M. Gilbert Normand: Nous avons fait l'objet d'une vérification de
[Français]
le vérificateur général. Nous examinons à l'heure actuelle les recommandations qu'il a formulées l'an dernier en vue de leur mise en oeuvre.
[Traduction]
M. Charlie Penson: Quand vous attendez-vous à ce que des recommandations soient mises de l'avant pour régler ce problème?
[Français]
M. Gilbert Normand: Il m'est difficile de vous donner une date précise. Je crois qu'au cours des prochaines semaines, nous devrions être en mesure d'en savoir plus. Je dois souligner le fait que les recommandations ne visaient pas des changements draconiens de notre mode de fonctionnement.
[Traduction]
M. Charlie Penson: Vous ne pensez pas qu'il s'agit d'un problème?
M. Gilbert Normand: Non.
La présidente: Merci.
Monsieur Murray, vous avez la parole.
M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Merci, madame la présidente.
Monsieur Normand, dans ce pays les conseils consultatifs des sciences existent depuis longtemps. Nous pouvons remonter au Conseil des sciences du Canada ou penser au Conseil consultatif des sciences et de la technologie qui est comptable au premier ministre. Vous présidez vous-même un conseil en sciences et en technologie qui a publié un rapport dans lequel il laisse entendre qu'il nous faut maintenir une solide capacité au sein du gouvernement dans les domaines de la science et de la technologie.
La plupart des conseils provenant de ces organismes ont tendance à—même s'ils publient des rapports, des réunions ont lieu avec les ministres, et je suis convaincu que des personnes extérieures au gouvernement, qui ont des compétences scientifiques, font valoir divers points de vue. J'aimerais que vous me disiez dans quelle mesure vous accordez de la valeur à ces organismes consultatifs. En êtes-vous venus à la conclusion qu'ils permettent vraiment d'apporter des changements à la législation? Est-ce que nous réagissons, en tant que gouvernement, aux conseils que ces organismes consultatifs vous donnent à vous, au premier ministre ou à qui sais-je encore?
M. Gilbert Normand: Je suis désolé, je ne comprends pas votre question.
M. Ian Murray: Je me demande dans quelle mesure ce système est efficace... Je vais revenir un peu en arrière. L'idée que la science et la technologie revêtent de l'importance pour le Canada n'est pas nouvelle et les gouvernements se sont tantôt prononcés en faveur de cette idée tantôt se sont montrés sincères et ont vraiment voulu régler le problème, le pourcentage de crédits consacrés à la R-D par rapport au PNB en étant normalement l'expression. D'après les données le Canada s'est toujours classé moins bien qu'il l'aurait probablement dû.
Je m'interroge au sujet de l'efficacité des organismes consultatifs. Croyez-vous que le gouvernement reçoit déjà la plupart de ses conseils à l'interne? Je me demande vraiment si ces organismes ne sont que de la poudre aux yeux, si je puis utiliser cette expression, ou si les conseils qu'ils prodiguent mènent à de véritables changements en matière de politique gouvernementale?
M. Gilbert Normand: Nous avons un comité consultatif. Ce comité fait rapport au Cabinet par mon entremise. Par la suite, le Cabinet peut rendre une décision au sujet du progrès ou des crédits qu'ils peuvent débloquer, pour les ressources humaines ou pour la fondation, par exemple, et là où des problèmes se posent.
• 1600
Comme je l'ai dit plus tôt, nous n'avons pas ménagé nos
efforts l'an dernier, mais nous n'occupons pas pour l'instant le
premier rang dans le monde. Il nous reste beaucoup de chemin à
parcourir. De concert avec les conseils subventionnaires, les
universités et leurs centres de recherche, nous essayons de
continuer à faire progresser le savoir. Je suis convaincu que le
gouvernement devra délier davantage les cordons de la bourse dans
les années qui viennent.
Je le répète, certains effets secondaires ont commencé à se manifester, par exemple les coûts indirects pour les universités. Nous devrons rectifier le tir chaque année, au fur et à mesure que nous ferons progresser le savoir et que nous verrons les résultats de la recherche.
J'ai aussi parlé de commercialisation. C'est une autre question qu'il nous faudra résoudre à l'avenir.
M. Ian Murray: J'aimerais poser une question au sujet de la commercialisation et le Dr Brzustowski est peut-être le spécialiste à qui je devrais m'adresser. Mais je m'intéresse à la situation actuelle avec tant de ces... pas nécessairement les entreprises point com, mais un grand nombre d'entreprises de biotechnologie et d'autres domaines scientifiques.
Beaucoup de jeunes universitaires attrapent la fièvre des placements, si vous voulez. Ils cherchent tous à devenir millionnaires ou peut-être milliardaires. Je pense à ce qui s'est passé sur les marchés boursiers au cours de la dernière semaine environ, où comme vous l'avez constaté beaucoup de titres technologiques ont perdu, dans certains cas, beaucoup de valeur.
Ainsi, lorsque vous jetez un coup d'oeil à la commercialisation de la recherche dans les universités, y a-t-il eu une augmentation perceptible—par la seule influence du marché boursier—du nombre de jeunes gens qui ont essayé de s'occuper de commercialisation, peut-être même des professeurs et des chercheurs universitaires également?
Et je suppose que comme corollaire je peux aussi vous demander ce qui suit. Si l'activité sur les marchés boursiers connaît une période d'accalmie importante et que les prix ne rebondissent pas, croyez-vous que cela rendra la commercialisation plus difficile?
Dr Thomas Brzustowski: Merci de la question. C'est une question sur laquelle je m'étendrai beaucoup étant donné tout ce qu'elle soulève.
Ce que nous observons sur le marché boursier et l'influence que cela pourrait avoir une incidence bien sûr sur les entreprises seulement après le placement initial des titres. Le problème en ce qui a trait à la commercialisation des résultats de la recherche universitaire, ceux qui ont une chance de devenir un nouveau produit, un nouveau bien ou un nouveau service, se pose beaucoup plus tôt que cela. Cela se passe au tout début lorsqu'il s'agit de déterminer si les fruits de la recherche offrent des perspectives valables et de convaincre quelqu'un à investir afin de le mettre en marché.
Le rendement des capitaux investis pour le grand public est une question très intéressante. Je ne sais pas dans quelle mesure les gens se rendent compte—et c'est le cas d'un grand nombre de personnes à qui je parle—que l'investissement privé indispensable pour mettre en marché une invention, une découverte ou quelque innovation découlant du fruit d'une recherche et la commercialiser, est souvent beaucoup plus élevé que les dépenses d'investissement public qui avaient été consacrées au départ à cette recherche. Ce que le grand public retire vraiment de l'investissement public ce sont les emplois créés et les recettes fiscales générées par cet investissement privé. Cependant la commercialisation est tout aussi aléatoire que la recherche.
L'un des problèmes auquel nous faisons face au Canada—et le marché ne change pas cela—c'est que nous manquons d'une espèce de professionnels. Nous en avons trop peu alors que les Américains en ont beaucoup. Il s'agit de gens qui, dans les universités, connaissent les sciences, le marché, le milieu de l'investissement et qui sont au courant de ceux qui sont disponibles, à commencer par les bailleurs de fonds, de façon informelle, à la première étape et par la suite les investisseurs qui financent en début de croissance jusqu'aux personnes qui sont prêtes à investir du capital de risque. Ce sont des personnes qui connaissent le droit qu'il s'agisse de protection et de droits de licence en matière de propriété intellectuelle ou du démarrage de nouvelles entreprises et, qui plus est, sont assez bien disposés aux contraintes de temps qu'ils parviennent à faire avancer les dossiers. Nous avons trop peu de personnes de ce genre dans nos universités. Je crois que peu importe la direction que prendra le marché boursier à court terme, c'est la pénurie de gens de cette nature qui constituera l'entrave, l'obstacle.
La présidente: Ce sera votre dernière question, monsieur Murray.
M. Ian Murray: Trouve-t-on tout simplement ces personnes ou faut-il les former?
Dr Thomas Brzustowski: Nous les formons. Elles apprennent sur le tas et on m'a dit que, comme es universités ne sont souvent pas en mesure de leur offrir des salaires assez élevés, ces personnes sont attirées par le secteur privé canadien. Il y en a beaucoup aux États-Unis. Ces personnes quittent les universités en très grand nombre au profit du secteur privé canadien.
J'ose espérer que les écoles d'administration prendront la question très au sérieux et commenceront à contribuer à la formation d'un plus grand nombre de personnes de ce genre. C'est là où se situe vraiment le véritable obstacle.
M. Ian Murray: Merci.
La présidente: Merci.
Docteur Renaud.
Dr Marc Renaud (président, Conseil de recherches en sciences humaines; membre, Instituts canadiens de recherches en santé): Je voulais simplement répondre à votre première question parce qu'elle est très intéressante. Vous vous demandez si nous avons trop de ces conseils consultatifs en sciences et en technologie?
Je ne peux parler du passé. Je suis à Ottawa depuis deux ans. Je dois admettre que je suis impressionné par ce que je vois. Par exemple, 22 personnes sont membres du CRSH et qu'il en va de même pour le CRSNG. Ces gens siègent à ces conseils à titre bénévole. Nous leur remboursons leurs frais de déplacement pour assister aux réunions. Ils sont extrêmement utiles.
Nous bâtissons l'avenir. Nous savons que nous sommes en train de passer à une économie de savoir, mais qu'est-ce que cela veut dire exactement. Nous ne le savons pas. Il y a beaucoup d'incertitudes.
Pour ce qui est de mon conseil, et je suis convaincu qu'il en va de même pour le CRSNG, sans ces institutions, nous ne pourrions pas bien administrer.
Deuxièmement, il existe un organisme consultatif qui est comptable au premier ministre, le CCST, le Conseil consultatif des sciences et de la technologie. Je suis également impressionné par sa contribution. Le Conseil essaie d'être très concret et très précis. Il a publié ce rapport sur la commercialisation dont Tom vient tout juste de parler. Nous pouvons ne pas être d'accord avec les conclusions, mais il parvient à tout le moins à nous inciter à y réfléchir et à en discuter. Le conseil vient tout juste de publier un rapport sur les compétences dans lequel il fait ressortir que, au Canada, nous n'avons pas tant besoin de compétences techniques que de compétences humaines pour gérer ces compétences techniques. Ce rapport revêt une grande importance, je le répète, pour déterminer ce que sera notre avenir.
Je ne pense pas qu'il y a trop de conseils. Il y en a peut-être déjà eu trop, mais on a beaucoup rationalisé maintenant.
La présidente: Merci.
Merci beaucoup monsieur Murray.
[Français]
Monsieur Brien, s'il vous plaît.
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Bonjour, monsieur Normand. J'aimerais savoir où vous en êtes quant à l'établissement des chaires de recherche qui ont été annoncées lors du dernier budget. Entendez-vous appliquer des règles particulières afin de vous assurer que toutes les universités, qu'il s'agisse de petites universités en région ou de grandes universités, puissent aller chercher leur part? Quelle sera votre approche?
M. Gilbert Normand: On a formé un comité chargé d'administrer les chaires d'excellence en recherche, auquel siègent les présidents des conseils. Vous semblez craindre que les petites universités en région n'aient pas la possibilité d'obtenir des subventions dans le cadre de ce programme. Je voudrais vous rassurer en vous disant qu'un certain pourcentage de l'enveloppe budgétaire a justement été réservé officiellement aux petites universités. J'ai entre autres visité Rouyn-Noranda où on fait de la recherche sur le sommeil. À Chicoutimi, la fondation a annoncé l'autre jour qu'on ferait de la recherche sur le dégivrage. Je puis vous assurer qu'il y a une volonté de faire en sorte qu'on puisse faire de la recherche en région quand on n'a pas besoin d'une grosse masse critique et quand les recherches sont applicables aux besoins propres de la région.
M. Pierre Brien: Vous savez qu'on s'inquiète à l'heure actuelle de la possibilité que des chaires soient mises sur pied plus rapidement dans les universités les plus organisées, lesquelles auront pu aller recruter des chercheurs plus rapidement que les petites universités. Avez-vous pris des mesures afin que dans des régions comme la mienne, on ne perde pas des gens qu'une autre université sera venue chercher pour travailler dans sa chaire, alors que la nôtre n'aura pas encore été acceptée dans ce même domaine, ou encore dans un autre domaine?
M. Gilbert Normand: Marc me corrigera si je fais erreur, mais je crois que le déséquilibre ne risque pas de se produire nécessairement entre les grandes et les petites universités, mais plutôt entre le domaine des ressources humaines et le domaine scientifique comme tel. Si ma mémoire m'est fidèle, on a réservé au domaine des ressources humaines 20 p. 100 des chaires. Dans certaines universités, on donne beaucoup plus de formation en sciences humaines qu'en génie, par exemple. C'est surtout à ce niveau que pourrait se produire un déséquilibre. Mais il n'y a rien qu'on ne pourra pas corriger au fur et à mesure qu'on avancera. Je ne crois pas que nous devions craindre ce déséquilibre entre les grandes et les petites universités. Le danger se situe beaucoup plus au niveau de la vocation des universités.
La présidente: Je ne sais pas si M. Renaud ou quelqu'un d'autre veut répondre à cette question mais, quand le ministre Manley a comparu devant nous jeudi dernier, il a expliqué qu'il allait...
[Français]
M. Pierre Brien: Je suis au courant de ce qu'il a répondu la semaine passée.
[Traduction]
La présidente: D'accord. Je voulais simplement m'assurer que vous étiez au courant de la réponse donnée jeudi.
[Français]
M. Marc Renaud: Les gens sont très nerveux face à ces chaires d'excellence en recherche. J'ai rencontré des recteurs et vice-recteurs de toutes les régions: de l'Ouest, de l'Est et du Québec. Les gens sont très heureux que nous nous soyons engagés à faire ces investissements. Ils se demandent toutefois ce qui va se passer, ce qui est normal. Encore une fois, on crée l'avenir. Il y a un risque que des universités viennent recruter les meilleurs chercheurs des autres universités, mais il ne faut pas oublier que, de toute façon, 30 p. 100 du corps professoral des universités canadiennes sera en renouvellement au cours des cinq prochaines années. En d'autres mots, qu'on le veuille ou non, on entre dans une période de l'histoire où les universités se mèneront une compétition assez féroce au niveau des ressources.
Cela dit, je suis d'accord avec M. Gilbert Normand. Je ne crois pas que les petites institutions seront nécessairement perdantes. Si elles jouent bien leurs cartes, elles vont très rapidement stabiliser leurs meilleurs chercheurs dans des chaires, faisant en sorte que ces chercheurs ne soient pas attirés par d'autres universités qui voudraient venir les recruter.
À mon avis, il ne fait pas de doute qu'il y aura un mouvement de marché, mais ce mouvement se serait produit même en l'absence de ce programme de chaires. Je crois que la formule que nous annoncerons fera en sorte qu'il y en aura assez pour tout le monde et que tout le monde sortira gagnant. Cela n'élimine toutefois pas les risques de compétition.
M. Pierre Brien: Rien n'a été annoncé officiellement. De quelle information les universités disposent-elles?
M. Gilbert Normand: Une annonce est imminente. Ce sera fait d'ici une ou deux semaines.
M. Pierre Brien: Quand les chaires seront-elles opérationnelles? Quel objectif avez-vous fixé en termes de temps?
M. Gilbert Normand: Je souhaite que ce soit fait le plus rapidement possible. Nous avons dit vouloir mettre en oeuvre 1 200 chaires d'ici trois ans, dont 400 au cours de l'exercice financier courant.
M. Pierre Brien: D'accord.
[Traduction]
La présidente: Merci.
Merci monsieur Brien.
Monsieur Lastewka.
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci madame la présidente.
J'ai quelques questions à poser. J'en ai une sur le PARI et le transfert de technologie. Comme la recherche et l'innovation sont de plus en plus importantes dans les universités, voici ce qui m'inquiète: les grandes entreprises qui sont au courant des recherches faites dans les universités ou qui y participent peuvent souvent s'y associer, tandis que les petites entreprises du Canada doivent attendre qu'il y ait transfert de technologie aux petites entreprises. Le PARI est un excellent programme pour rétablir l'équilibre. Faisons-nous quelque chose de nouveau pour aider les petites entreprises à adopter rapidement les nouvelles technologies?
M. Gilbert Normand: Actuellement, nous n'avons pas de programme spécial à ce sujet mais, dans le cadre de la commercialisation de la recherche universitaire, beaucoup d'entreprises travaillent en étroite collaboration avec des universités et peuvent conserver une certaine propriété intellectuelle liée à la recherche, comme certains centres de recherche du gouvernement. Il y a, par exemple, le programme de frais partagés d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Dans ce contexte, l'industrie travaille en collaboration avec le gouvernement.
La commercialisation de la recherche universitaire ne s'applique pas seulement aux résultats précis de la recherche. Au cours des travaux de recherche, on fait parfois d'autres découvertes secondaires qui peuvent être très intéressantes pour le marché. Des universités ont commencé à former des équipes pour cela, mais le gouvernement n'a pas de programme spécial à ce sujet pour l'instant.
Mais je pense que le CRSNG fait quelque chose de son côté.
Dr Thomas Brzustowski: Puis-je poursuivre à ce sujet?
M. Walt Lastewka: Oui, allez-y.
Dr Thomas Brzustowski: Nous n'avons pas de programme spécial, mais beaucoup de petites entreprises participent à nos programmes de partenariat actuels. Il y a de très petites entreprises qui ont été mises sur pied pour profiter de travaux de recherche avec l'aide de ceux qui ont participé à ces travaux; ce sont des petites entreprises associées de près au transfert de technologie. Et elles sont nombreuses.
• 1615
Le CRSNG a, au cours des ans, établi des partenariats avec
plus de 1 000 sociétés de toutes les tailles, dans tous les
secteurs et toutes les régions du pays. Chaque année, elles sont
près de 500 et, sur ce nombre, il y en a peut-être 100 nouvelles
dont de très petites entreprises. Il y a en a quelques grandes,
mais il y en a aussi de très petites.
M. Walt Lastewka: Nous avons déjà discuté de la commercialisation de la recherche effectuée dans les laboratoires du gouvernement ou des universités, mais il me semble qu'il n'y a toujours pas de bons bureaux de commercialisation dans les universités, comme il y en a aux États-Unis peut-être. Pouvez-vous nous en parler?
Dr Thomas Brzustowski: Avec plaisir.
La question a été portée à l'attention du groupe d'experts sur la commercialisation, comme le fait qu'il n'y a pas, dans notre secteur de capital de risque, autant d'entrepreneurs qu'aux États-Unis spécialisés dans une technologie en particulier et capables de prendre des décisions et de fournir des fonds rapidement.
Ce sont les faiblesses de notre système. Elles découlent peut-être en partie du fait que nous nous lançons un peu tard dans la course, et elles sont sûrement attribuables à notre taille. Comme vous le savez, il faut avoir un bassin assez important d'entreprises de technologies pour trouver des investisseurs en capital de risque spécialisés dans une technologie ou dans un domaine bien particulier d'un secteur.
Nous connaissons bien nos lacunes, tout comme le milieu des affaires. Les universités en sont aussi conscientes et, comme je l'ai déjà dit, j'espère vraiment que les écoles commerciales prendront des mesures à ce sujet.
M. Walt Lastewka: Merci madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup monsieur Lastewka.
Monsieur Riis.
M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson et Highland Valleys, NPD): Merci beaucoup madame la présidente.
Notre discussion est très intéressante et très instructive aujourd'hui. Je ne peux m'empêcher de croire que le gouvernement du Canada fait beaucoup pour accéder à l'économie du savoir et qu'il prend beaucoup d'initiatives. Vous avez parlé du conseil d'experts qui évidemment remplit un rôle très utile.
D'après ce que nous a dit l'autre semaine le Conseil canadien des chefs d'entreprises au sujet de ce qu'il faut faire pour que nous soyons plus concurrentiels, et d'après les recommandations plutôt simplistes qu'il a formulées, je me demande si vous ne devriez pas former une équipe gouvernementale pour conseiller cet organisme sur ce que le secteur privé pourrait envisager de faire pour suppléer le travail du gouvernement.
Cela dit, je partage l'inquiétude que mon collègue a exprimée au nom de ceux d'entre nous qui représentent les régions au sujet des chaires de recherche. Je sais que c'est une question délicate mais, à mon avis, le gouvernement a pour rôle d'assurer l'égalité des chances de tous les Canadiens peu importe où ils vivent. Pour les gens qui vivent dans des localités plus petites, reculées ou rurales, si les chaires de recherche sont établies à grande échelle dans les centres urbains, les centres de recherche, on se demande si on ne va pas accroître l'écart qui existe entre l'économie de la technologie de l'information, concentrée dans les centres urbains, et l'économie des ressources naturelle qui reste celle des régions rurales.
J'abonde dans le même sens que mon collègue pour lancer un signal d'alarme et je suis heureux, monsieur le ministre, que vous ayez indiqué être conscient de la situation.
Les nombreux recteurs d'université rencontrés au cours des dernières semaines m'ont dit croire qu'une crise semblait s'annoncer, ce que confirme ce que vous venez de nous dire, à mon avis. Je pense à l'Allemagne et à ses 20 000 cartes vertes visant à attirer des chercheurs de l'extérieur—et d'autres pays font la même chose.
Ils sont inquiets du vieillissement des professeurs d'université. Ils ont produit des chiffres—et je ne peux croire qu'ils sont exacts, mais ils le sont probablement—indiquant qu'il y aura bientôt une grave pénurie de chargés de cours et de chercheurs dans les universités.
Les universités vont devoir entreprendre de vastes campagnes de recrutement auprès des titulaires de doctorat pour répondre à la pénurie qui s'ajoute à leurs besoins habituels. Est-on bien au courant du problème démographique auquel nous serons très bientôt confrontés dans le domaine de l'innovation?
M. Gilbert Normand: La compétition sera féroce entre les pays pour recruter des professeurs et des chercheurs, pas seulement au Canada mais dans tous les pays occidentaux. Comme Tom l'a indiqué, dans trois à cinq ans, certaines universités auront beaucoup de mal à avoir d'éminents professeurs. Je ne sais pas si quelqu'un veut ajouter quelque chose à cela, mais nous connaîtrons une crise très bientôt.
M. Nelson Riis: Je sais que la crise est imminente, mais est-on suffisamment au courant et prend-on des mesures pour répondre à la crise?
Dr Marc Renaud: Nous sommes au courant. Comme je l'ai dit plus tôt en français, nous savons que 30 p. 100 des professeurs d'université prendront leur retraite au cours des cinq prochaines années. C'est beaucoup. Sans compter que les universités vont prendre de l'expansion parce que le nombre d'inscriptions augmente. Il est certain qu'un problème nous attend.
Par contre, une génération a été perdue. Il y a une génération de jeunes qui n'a pas fréquenté l'université au cours des dix dernières années parce que les universités réduisaient leurs effectifs. Nous devons faire quelque chose pour cette génération. Autant que je sache, rien n'a été prévu à ce sujet.
Ainsi, le programme des chaires, surtout les plus petites, devrait prévoir l'injection massive de fonds pour la plus jeune génération. La moitié des chaires s'adresseront aux jeunes chercheurs et aux jeunes professeurs, ce qui devra entraîner de grands bouleversements dans le milieu universitaire.
M. Nelson Riis: Monsieur Renaud, vous nous avez dit qu'une étude indiquait que les besoins que nous connaîtrons dans un avenir assez rapproché se feront sentir, non pas tellement dans les domaines techniques, mais dans ceux des ressources humaines. Ce n'est pas quelque chose dont on entend beaucoup parler. C'est ce que vous nous dites, et de rares personnes vont en parler mais, dans la très vaste majorité des cas, on parle des besoins dans des domaines plus techniques, plus scientifiques. C'est un point de vue intéressant, mais pensez-vous qu'on en tient compte, par exemple, dans la façon d'envisager les transformations qui s'en viennent dans le domaine de la recherche?
Dr Marc Renaud: Je pense qu'on n'en parle pas suffisamment. Je suis tout à fait d'accord avec vous.
J'ai été très surpris, l'autre jour, de la réaction des chefs d'entreprise qui ont dénoncé les attaques contre les arts libéraux. Après tout, trop, c'est trop...
M. Nelson Riis: Oui.
Dr Marc Renaud: ...et nous devons appeler un chat un chat. Il faut savoir que beaucoup de chefs d'entreprise ont en fait une formation en sciences humaines et sociales.
M. Nelson Riis: Oui.
Dr Marc Renaud: Nous avons tendance à l'oublier. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Nous devons le dire plus fort—et pas seulement nous. Quand j'en parle, on ne me croit pas; on dit que je prêche pour ma paroisse. Il faut que ce soit des gens du secteur privé et du secteur des bénévoles qui revendiquent ces cours.
Il y a quelques heures, nous avons reçu une excellente nouvelle. Un groupe d'experts mondial a approuvé à l'unanimité la demande que Montréal a faite pour accueillir l'Institut de l'UNESCO pour les statistiques. C'est arrivé grâce au Conseil de recherches en sciences humaines et à Statistiques Canada qui ont attiré l'attention des chercheurs sur les statistiques sociales. Cette nouvelle va permettre la création de 100 emplois de premier plan à Montréal. C'est la Banque mondiale qui va financer le projet. Cela va vraiment changer les choses.
Nous n'en parlons pas assez. Les initiatives de ce genre vont entraîner des débouchés commerciaux et toutes sortes de retombées.
M. Nelson Riis: J'ai peut-être une suggestion à faire pour que la situation progresse un peu plus. Ma question s'adresse au ministre.
L'excellente discussion que nous avons aujourd'hui nous rappelle que l'innovation... Vous avez parlé du rapport du comité, dont nous sommes très fiers. Pour souligner le fait que le Canada veut que nous perdions notre réputation de bûcherons et de porteurs d'eau—autant ici qu'à l'étranger—, on pourrait créer un comité parlementaire permanent qui aurait un mandat lié aux sciences et à la technologie. On enverrait ici un message clair à beaucoup de gens, y compris à nous parlementaires.
Mais nous ne le faisons pas. C'est ce que fait remarquer Marc. Nous pouvons en parler mais, quand il s'agit d'agir, bien... Il faut reconnaître que le gouvernement établit des chaires de recherche et prévoit des fonds supplémentaires pour l'innovation mais, sur le plan politique, ce serait un geste concret très utile.
Pouvez-vous nous dire quand vous pourriez être en mesure de faire cela, monsieur le ministre?
M. Gilbert Normand: Je ne sais pas quoi vous répondre parce que nous ne voulons effrayer personne au sujet de la situation du milieu scientifique au Canada. Le gouvernement a mis en place de nombreux programmes pour améliorer la situation. Je pense que nous devons sensibiliser non seulement le gouvernement mais aussi la population.
• 1625
J'ai parlé à des étudiants et je leur ai dit qu'ils devront
faire des choix pour leur avenir professionnel. Quand nous parlons
de commercialisation aujourd'hui, c'est intéressant de voir que de
jeunes scientifiques deviennent des vedettes, comme dans les sports
ou au cinéma. Chaque semaine, on entend dire que des jeunes sont
devenus millionnaires au début de leur carrière.
Mais il faut aussi mettre en place une base très solide, ce que nous sommes en train de faire actuellement.
M. Nelson Riis: Puis-je poser une question précise, monsieur le ministre? Ce sera ma dernière question, je pense.
Nous avons un comité permanent sur l'agriculture, par exemple. Quel est le pourcentage des Canadiens qui travaillent dans le domaine de l'agriculture—2, 5, 6 p. 100 à peu près? Très bien. C'est important. Nous avons un comité permanent pour tel domaine et un autre pour tel autre, mais nous n'avons pas de comité permanent pour un domaine qui est considéré par tous, je pense, comme déterminant pour notre avenir.
Après tout, c'est dans ce domaine que les choses vont bouger. C'est le domaine d'avenir de l'enseignement. C'est le domaine vers lequel nous devons orienter les programmes. C'est dans ce domaine que nous devons attirer le secteur privé. Les possibilités sont énormes.
Ma question est la suivante monsieur le ministre: que pouvez-vous faire pour contribuer à la création d'un comité parlementaire permanent sur la recherche, le développement, la science, la technologie, et tout le reste?
M. Gilbert Normand: Avant de vous répondre, comme vous le savez, le gouvernement canadien a un ministère qui s'occupe précisément des sciences, de la recherche et du développement. Beaucoup de provinces en ont un et, actuellement, il n'y a pas de réunions fédérales-provinciales officielles dans ce domaine.
M. Nelson Riis: C'est étrange n'est-ce pas?
M. Gilbert Normand: Le conseil a des comités. Ce n'est pas la même chose, mais si nous pouvions avoir un...
La présidente: Monsieur Brzustowski, vous voulez ajouter quelque chose?
Dr Thomas Brzustowski: Madame la présidente, je peux sûrement ajouter quelque chose à ce que le ministre vient de dire, mais j'aimerais plutôt compléter la réponse donnée à une autre question posée précédemment par M. Riis. Je suis tout à fait d'accord avec mon collègue Marc Renaud pour dire qu'il est inutile de s'en prendre aux sciences humaines ou sociales.
Je tiens cependant à préciser que, dans l'ensemble des pays de l'OCDE, le Canada compte déjà la plus importante proportion de diplômés universitaires de premier cycle dans les domaines des sciences humaines et sociales et la plus petite proportion de diplômés dans les domaines du génie, des mathématiques et des sciences. Il faut aussi le dire.
Il faut aussi faire remarquer que beaucoup de chefs d'entreprise ont dit qu'ils ne pouvaient pas engager des technologues étroits d'esprit. Ils doivent s'entourer de gens qui ont des compétences techniques, mais qui savent aussi réfléchir, écrire, communiquer, discuter, et que sais-je encore. C'est très important. Ces spécialistes doivent avoir une formation générale.
J'aimerais aussi fournir des chiffres sur la crise dont vous avez parlé. Dans l'ensemble des universités du Canada, toutes disciplines confondues, le corps professoral compte environ 34 000 membres. Les 2 000 chaires regrouperaient environ 6 p. 100 d'entre eux. On dit que, pour des raisons démographiques, il faudra remplacer environ 30 p. 100 de ceux qui ont été embauchés à la fin des années 60 et au début des années 70. Les chaires ne seront pas la seule solution au problème.
Il est encourageant de savoir que nous avons déjà résolu des problèmes semblables avec beaucoup de succès, même si c'est plus par chance que grâce à la planification. À la fin des années 60, nous avons recruté des gens très compétents, venant de l'Inde en grand nombre, des diplômés primés, en partie parce que le Canada est un pays attrayant et qu'il est difficile d'entrer aux États-Unis. C'est ce qui nous a aidé à bâtir nos universités. Nous avons accueilli un autre contingent d'Égypte environ 10 ans plus tard, et ainsi de suite.
Il faudra faire consciemment l'effort d'attirer les meilleurs des pays étrangers pour aider à résoudre ce problème
M. Nelson Riis: Aux dépens de ces pays étrangers, toutefois.
Dr Thomas Brzustowski: Peut-être que oui, peut-être que non. En fait, bien des expatriés n'oublient pas leur pays; ils en font la promotion et jouent un rôle actif.
Ce n'est pas une question simple.
La présidente: Merci beaucoup.
J'aimerais vous remercier, monsieur le ministre, d'être venu avec vos fonctionnaires. Nous allons maintenant vous laisser respirer et demander à un de vos collègues de se joindre à nous.
M. Nelson Riis: J'ai un rappel au Règlement; le ministre a indiqué que sa déclaration liminaire, qui est beaucoup plus longue que ce qu'il a lu, serait mise à la disposition du comité.
La présidente: Oui, nous allons nous en assurer.
M. Nelson Riis: D'accord.
La présidente: Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes, pour donner le temps aux ministres de changer de place.
La présidente: La séance reprend.
Nous sommes très heureux d'accueillir cet après-midi l'honorable George Baker, responsable de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique.
Nous avons également le plaisir de recevoir, de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, Michael Horgan, président; Paul LeBlanc, vice-président, Politiques et programme; Steve Merrill, vice-président par intérim, Finances et services corporatifs; Craig Rowsell, directeur général, Défense des intérêts et retombées industrielles.
Je suppose, monsieur le ministre, que vous avez une déclaration liminaire, n'est-ce pas?
L'honorable George S. Baker (Secrétaire d'État (Agence de promotion économique du Canada atlantique)): Eh bien non, je n'en ai pas, simplement parce que je crois que la sonnerie d'appel va retentir vers 17 h 15 et je suis sûr que le comité préférerait passer directement aux questions et, espérons-le, aux réponses.
La présidente: D'accord, nous pouvons procéder de la sorte.
Monsieur Penson, êtes-vous prêt à passer aux questions?
M. Charlie Penson: Certainement, merci, madame la présidente.
J'aimerais souhaiter la bienvenue au ministre et aux fonctionnaires de l'Agence.
Monsieur le ministre, je vois dans le budget des dépenses une augmentation de près de 35 millions de dollars pour cette année. Pouvez-vous en expliquer la raison?
M. George Baker: Monsieur Horgan.
M. Michael Horgan (président, Agence de promotion économique du Canada atlantique): Cette augmentation s'explique principalement par le fait qu'un montant important de ces fonds qui était affecté à l'ajustement au Cap-Breton par suite de la fermeture des mines DEVCO est maintenant inclus dans notre budget de cette année.
Aucune décision n'a été prise au sujet de l'affectation de ces fonds, mais pour l'instant, ils sont mis de côté et inscrits dans les services votés de l'APECA, puisqu'ils doivent être affectés à un ministère. Il n'y a rien de nouveau au plan des augmentations mis à part ce qui a déjà été annoncé par le gouvernement.
M. Charlie Penson: D'accord.
J'imagine que les dépenses, mis à part celles liées à l'administration, apparaissent à titre d'investissements pour l'APECA, n'est-ce pas?
M. George Baker: Près d'un tiers des dépenses de l'APECA vise les investissements dans les entreprises. Il s'agit de prêts, comme vous le savez. À un moment donné, l'APECA avait un régime de subventions et de contributions et aucune limite n'était imposée quant à la quantité d'argent qui pouvait être donnée, si je me souviens bien. Toutefois, en 1995, sur les conseils du vérificateur général, le gouvernement de l'époque—ce gouvernement—a décidé de s'écarter de la formule des subventions et contributions pour adopter la pratique des prêts uniquement. Une limite a été placée sur le montant de chaque prêt, une entreprise ne pouvant obtenir plus d'un million de dollars.
En outre, un système élaboré de contrôle a été mis en place pour s'assurer du remboursement de tous les prêts accordés.
M. Charlie Penson: D'accord. Par conséquent, pour procéder à une évaluation de ces prêts, vous dites que près d'un tiers du total, soit 100 millions de dollars, sont affectés aux prêts depuis 1995. Quel genre de processus d'évaluation avez-vous mis en place?
M. George Baker: Notre processus d'évaluation est formidable et je vais demander au président de le décrire.
M. Michael Horgan: En fait, je vais peut-être demander au vice-président de le décrire, car c'est lui qui en est responsable.
M. Charlie Penson: Il devient de plus en plus formidable au fur et à mesure que vous vous renvoyez la balle.
Des voix: Oh, oh!
Une voix: Qui a la balle?
M. Charlie Penson: N'oubliez pas que je ne dispose que de dix minutes au maximum.
M. Paul LeBlanc (vice-président, Politiques et programmes, Agence de promotion économique du Canada atlantique): Je vais vous parler de deux des mesures qui sont prises. Nous évaluons l'efficacité du programme à l'aide d'indicateurs généraux, pour voir le genre d'impact que le programme a sur l'économie du Canada atlantique dans son ensemble. Nous mesurons des éléments comme le taux de croissance des petites entreprises au Canada atlantique par suite du prêt de ces capitaux, le taux de démarrage des petites entreprises et leur taux de croissance par rapport à d'autres régions du Canada atlantique. Nous faisons le suivi de leur capacité de survie, de leur capacité d'exporter, d'innover, d'adopter de nouvelles technologies. J'ai vu que certaines personnes ici présentes s'intéressent à la technologie et à l'innovation. Tous ces genres d'indicateurs clés sont utilisés pour évaluer la situation du Canada atlantique dans son ensemble.
Cela permet de s'assurer que l'investissement global est sain et nous avons des indicateurs comme l'impact sur le PIB dans le Canada atlantique, la création d'emplois, etc.
M. Charlie Penson: J'aimerais que vous soyez un peu plus précis...
M. George Baker: Un peu plus précis, c'est-à-dire comment les investissements de l'APECA se comparent-ils à d'autres investissements dans l'économie? Comment nous comparons-nous par rapport...?
Est-ce la question que vous posez?
M. Charlie Penson: Non. Ce qui m'intéresse, ce sont les prêts accordés aux entreprises. Quel genre d'évaluation faites-vous pour vous assurer que...? Quel est le taux d'échec? Y a-t-il des vérifications internes? Comment faites-vous le suivi?
M. Paul LeBlanc: Pour ce qui est de l'évaluation, le processus est très rigoureux, notamment en ce qui concerne la politique de remboursement de 1995. Toutes les demandes doivent répondre aux critères rigoureux de l'analyse financière. Nous exigeons un plan d'affaires, nous exigeons un coinvestissement de la part des promoteurs. Nous évaluons la viabilité compétitive, la viabilité financière, la capacité de remboursement.
M. Charlie Penson: S'agit-il de vérifications internes?
M. Paul LeBlanc: Oui, certainement. Elles se font en temps réel au moment de la demande et chaque projet, dès qu'il bénéficie d'un investissement, est contrôlé pendant toute sa durée.
M. Charlie Penson: C'est ce que je veux savoir, j'imagine. Pour ce qui est de l'argent des contribuables, soit 100 millions de dollars par année, je veux être sûr que ces prêts en valent la peine et qu'ils sont remboursés. Quel est le taux d'échec? Pouvez-vous rendre publiques certaines vérifications afin de nous montrer qu'il s'agit d'un bon investissement, que les fonds sont remboursés et que le programme fonctionne comme il le faut?
M. Paul LeBlanc: La politique de remboursement a commencé en 1995...
M. Charlie Penson: Cela fait cinq ans.
M. Paul LeBlanc: ...et elle est relativement récente. Pour l'instant, de 79 à 80 millions de dollars environ ont été remboursés et ce portefeuille est encore relativement récent. Nous avons un bon taux de rendement en matière de remboursement. Au cours de l'exercice qui vient juste de commencer, nous allons réinvestir près de 35 millions de dollars—déjà remboursés à l'APECA par les entreprises du Canada atlantique—dans d'autres entreprises et pour répondre à d'autres priorités dans le Canada atlantique.
M. Charlie Penson: J'aimerais vous poser deux questions précises, une à vous-même, et l'autre au ministre, avant d'épuiser mon temps de parole. En ce qui concerne les échecs en matière de taux de risque, pouvez-vous donner des renseignements pertinents au comité pour les cinq dernières années, depuis que le changement a été apporté?
M. Paul LeBlanc: Oui.
M. Charlie Penson: Pour ce qui est de la question que j'aimerais poser au ministre, je remarque que l'APECA finance la mission commerciale qui doit se rendre dans les États de la Nouvelle-Angleterre en mai. À mon avis, c'est probablement l'un des meilleurs investissements de l'APECA.
Je me demande, monsieur le ministre, si vous pouvez nous parler des genres d'obstacles au commerce qu'il faudrait surmonter entre les États de la Nouvelle-Angleterre et les provinces de l'Atlantique afin de résoudre des problèmes qui se posent depuis longtemps. Comme vous le savez fort bien, cette zone commerciale fonctionnait très bien, mais elle s'est détériorée ces 100 dernières années. Que faudrait-il remettre en place—quel genre d'infrastructure?
M. George Baker: Pour ce qui est des vérifications, j'ai ordonné récemment de publier toutes les vérifications internes.
Combien ont été publiées? Trente-neuf, ou quelque chose du genre, monsieur le président?
M. Michael Horgan: Il y en a eu 36.
M. George Baker: Il y a eu 36 vérifications que, je crois, vous devriez maintenant avoir dans votre bureau, si vous ne les avez pas reçues la semaine dernière.
Pour ce qui est de la question posée à propos de la mission commerciale dans les États de la Nouvelle-Angleterre, je peux demander à l'un des fonctionnaires d'indiquer qui va y participer, mais autant que je sache, les premiers ministres des provinces vont tous y participer, ainsi que des représentants du gouvernement fédéral. Toutes les parties intéressées ont jugé, je pense, que c'était probablement le meilleur genre de mission commerciale que l'on pouvait avoir dans l'est du Canada.
Peut-être que le président aimerait donner plus de détails à ce sujet.
M. Michael Horgan: Certainement, du point de vue du Canada atlantique et si l'on veut parler de possibilités d'exportation et commerciales, il faut vraiment s'attarder sur ce qui, à notre avis, sera le plus rentable. De notre point de vue, il faut se concentrer sur le nord-est des États-Unis. Il ne faut en effet pas oublier l'existence de cet énorme marché juste au sud de la frontière et c'est un domaine sur lequel nous devons nous concentrer. Dans un certain sens, c'est la raison pour laquelle nous appuyons la mission commerciale en Nouvelle-Angleterre.
Pour ce qui est des obstacles au commerce, la politique commerciale entre le Canada et les États-Unis suscite des questions. Certaines d'entre elles ont bien sûr un impact particulier sur la région de l'Atlantique, notamment celles liées à la politique commerciale agricole. Ce sont les questions qui se posent.
Cette mission vise deux objectifs. Le premier, c'est la promotion du commerce, le resserrement de nos liens économiques traditionnels avec les États de la Nouvelle-Angleterre, la promotion continue du commerce avec cette région, qui, sur le plan économique, est importante pour la région de l'Atlantique. Le deuxième c'est la promotion de l'investissement. Le Canada atlantique est un bon endroit pour l'investissement provenant de cette région des États-Unis.
M. George Baker: Vous voulez en savoir plus au sujet des restrictions commerciales. Le Canada atlantique ne connaît pas les même restrictions que d'autres provinces. Prenons par exemple, les restrictions commerciales sur le bois d'oeuvre. Nous n'avons pas ici de tels systèmes de quota. Nous n'avons pas de restrictions commerciales pour ce qui est de l'accès aux États-Unis, ce qui est à notre avantage.
Je pense que la plupart des députés de Terre-Neuve l'expliqueraient en disant que c'est probablement grâce à la réputation de notre bois aux États-Unis—le bois de la circonscription de M. Byrne ainsi que le bois provenant de la région plus au nord. Comme l'a dit un entrepreneur de Floride, lorsque l'on plante un clou dans un morceau de bois qui vient de Terre-Neuve, il est impossible de l'en sortir. C'est parce qu'il s'agit d'un bois plus condensé dont la croissance prend de 30 à 40 ans. Il n'y a donc pas de restriction. En outre, il coûte deux fois plus que...
M. Charlie Penson: Monsieur le ministre, je suis allé dans cette région et j'ai pu constater la qualité du bois. Toutefois, lorsque je parle d'obstacles, je parle davantage d'obstacles physiques. Y a-t-il des problèmes d'infrastructure? Leurs chemins de fer permettent-ils d'établir des liaisons ferroviaires? Leurs routes sont-elles adéquates? De quoi allez-vous parler avec vos homologues américains pour essayer de renouveler ces échanges commerciaux historiques importants, maintenant que les tarifs douaniers qui existaient depuis si longtemps n'existent plus? C'est ma question.
M. Michael Horgan: Certainement, les liaisons d'infrastructure sont très importantes. Notre infrastructure routière qui permet d'accéder aux États-Unis pose un problème. Essentiellement, la route qui part du Nouveau-Brunswick, qui passe par Saint John et qui assure la liaison avec le nord-est des États-Unis, ainsi que le réseau routier entre États, posent un grave problème d'infrastructure qui n'est pas encore réglé.
• 1645
Les liaisons ferroviaires, quant à elles, sont en fait assez
bonnes, mais ironiquement, à certains égards, les liaisons
ferroviaires avec le Midwest américain sont aujourd'hui meilleures,
avec le CN. Le CN fait maintenant la liaison avec Chicago et
ensuite va de Chicago jusque dans la vallée du Mississipi. Nous
avons maintenant, à mon avis, des liaisons ferroviaires de première
qualité avec le Midwest, ce qui rend le Canada atlantique
extrêmement concurrentiel pour ce qui est du transport du fret de
l'Europe à destination du Midwest.
Une question reste en suspens, bien sûr, celle du port de Halifax et de sa revalorisation afin que cette ville puisse répondre aux nouvelles exigences des marchés internationaux du transport maritime, notamment celles des navires post-Panamax. C'est un défi pour un endroit comme le Canada atlantique et certainement pour Halifax en particulier, vu que le port devra être doté de l'infrastructure voulue afin de recevoir ces navires de manière très efficiente.
Un troisième élément qui devrait nous préoccuper au sujet du Canada atlantique, non pas tant dans une perspective commerciale, c'est véritablement la question de nos liaisons aériennes internationales ainsi que la viabilité de nos aéroports, celle des liaisons et de l'accès dont ont besoin les Américains—qu'il s'agisse de voyageurs d'affaires ou de touristes—pour se rendre sans difficulté dans les endroits clés du Canada atlantique.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Penson.
Monsieur Byrne, s'il vous plaît.
M. Gerry Byrne (Humber—St. Barbe—Baie Verte, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.
J'aimerais poursuivre dans ce sens. L'histoire du bois m'intrigue. Charlie, vous avez soulevé toute la question des exportations et de son importance pour l'économie nationale. Bien sûr, le Canada est un pays exportateur.
Monsieur le ministre, j'ai plusieurs questions que je vais résumer en une seule. Elles sont probablement reliées les unes aux autres, tout comme le seront vos réponses, j'imagine.
Quelle est la position du Canada atlantique et comment peut-il contribuer aux capacités nationales d'exportation de notre pays? Sa position est-elle équivalente à celle du pays, ou le Canada atlantique doit-il regagner du terrain? Bien sûr, ce sont les exportations qui sont les véritables moteurs de l'emploi et de la croissance et ce sont elles qui ont propulsé notre pays dans la position économique qu'il occupe aujourd'hui. Je me demandais simplement comment le Canada atlantique s'en sort à cet égard.
Par ailleurs, dans ma province de Terre-Neuve et du Labrador, la situation est très positive, vu que cette province affiche le meilleur produit intérieur brut du pays. D'après les prévisions de certaines entreprises du secteur privé, des banques à charte et d'autres, nous allons poursuivre sur cette extraordinaire lancée. Ce qui est intéressant, c'est que notre chômage—ou en fait, notre emploi—ne semble pas suivre le rythme de cette croissance du PIB. Nos taux de chômage augmentent pendant que notre PIB augmente, ce qui semble quelque peu paradoxal ou contradictoire.
Avez-vous quelque chose à dire sur ces deux points, monsieur le ministre?
M. George Baker: Oui. C'est un phénomène intéressant, n'est-ce pas, qu'à Terre-Neuve, comme vous le faites remarquer, le PIB a un taux de croissance plus rapide que dans n'importe quelle autre région du pays? Le PIB bien sûr n'est pas aussi élevé à Terre-Neuve que dans d'autres régions, mais le taux de croissance est plus élevé et le taux de chômage augmente, vous avez raison. Il est de 17,8 p. 100 à l'heure actuelle, alors que l'an passé, il était de 17,6 p. 100. Les gens sont également de plus en plus nombreux à quitter la province.
Je suppose que c'est un phénomène intéressant. Lorsque vous lisez les nombreux rapports que nous publions ainsi que les analyses faites par les économistes, vous remarquez qu'il est toujours indiqué que l'APECA ne marche pas, puisque le PIB n'est pas si élevé que cela dans le Canada atlantique. De manière objective, le PIB du Canada atlantique est de qualité, tout comme dans de très nombreuses régions rurales du Canada où les taux de chômage sont élevés. Par PIB de qualité, je veux parler d'un PIB défini comme étant la somme des dépenses de consommation, des dépenses liées à l'investissement, des dépenses de l'État à laquelle s'ajoute, entre parenthèses, la différence entre exportations et importations... C'est le PIB.
• 1650
Prenons une des collectivités de votre circonscription. Le PIB
y serait sans doute peu élevé, du fait que les dépenses de
consommation sont faibles, tout comme le sont les dépenses
d'investissement et les dépenses publiques, surtout si vous dites
que le régime d'assurance-emploi est en train d'être privatisée.
Toutefois, vos dépenses en matière d'exportation sont très élevées,
n'est-ce pas? Cette collectivité vit peut-être entièrement de la
pêche, et voilà pourquoi le PIB est très faible.
Considérons, par exemple, le PIB d'Ottawa. Les dépenses de consommation, les dépenses d'investissement et les dépenses publiques sont très élevées. Mais jetez un coup d'oeil sur les exportations. Le tourisme, dans une certaine mesure, attire des capitaux étrangers. Mais vous avez un PIB qui est faible, et un autre qui est plus élevé. Le fait est qu'il faut, comme vous l'indiquez, pouvoir compter sur les exportations. Ce PIB-ci, en fait, influe sur l'autre.
La réponse se trouve peut-être là. Il est malheureux que des institutions financières et ces économistes—disons—de droite, qui portent des jugements au nom de certains organismes, comme nous le savons tous, se permettent de faire des déclarations qui laissent entendre que tout va mal dans la région de l'Atlantique et que les agences ne remplissent pas un rôle efficace. Or, quand ils parlent du PIB, ils devraient dire ce que celui-ci englobe. Nous saurions à ce moment-là s'il s'agit d'un PIB positif, ou d'un PIB qui est tributaire du PIB d'une autre région.
Est-ce que cela répond à votre question?
M. Gerry Byrne: Oui, monsieur le ministre. J'aimerais soulever un autre point.
Ce que vous dites, c'est qu'on ne tient pas compte d'où provient le premier dollar, d'où proviennent les ressources, qui font essentiellement tourner l'économie. Si vous n'avez pas d'industrie primaire, vous ne pouvez engendrer des retombées et avoir une économie intégrée. C'est bien cela, n'est-ce pas?
M. George Baker: Oui. Si vous n'avez pas d'exportations... Bien entendu, les exportations s'entendent de capitaux étrangers qui entrent au pays, que ce soit via le tourisme ou une autre industrie.
En ce qui concerne les exportations réelles, vous n'êtes pas sans savoir, monsieur Byrne, que la province de Terre-Neuve et du Labrador, qui est considérée comme étant la plus pauvre au Canada et qui doit composer avec une baisse du taux de chômage et le phénomène de l'émigration, a du minerai de fer; vend de l'énergie électrique aux États de la Nouvelle-Angleterre; possède trois papeteries, dont une se trouve dans votre circonscription, ainsi que des usines de transformation du poisson. Vos exportations de poisson atteignent 1 milliard de dollars cette année, ce qui constitue un record pour la province. La province n'a peut-être jamais connu un taux de chômage aussi élevé dans le secteur de la pêche, mais la valeur de nos exportations n'a jamais été aussi importante. On exporte tout pour un demi-million d'habitants. La province de Terre-Neuve et du Labrador se classerait au premier rang au titre des contributions réelles à l'économie, si on tenait compte des exportations par habitant.
M. Gerry Byrne: Que devons-nous faire, monsieur le ministre, et quel est le rôle de l'APECA dans ce domaine?
M. George Baker: Je pense que l'APECA remplit un rôle très intéressant, un rôle que certains partis politiques ne reconnaissent pas toujours. L'APECA n'est pas seulement un organisme de base qui agit pour le compte des autres ministères et agences fédérales, mais peut-être celui qui... Si l'Agence n'existait pas, vous seriez obligé d'avoir une bureaucratie plus lourde à Ottawa. Si l'APECA n'existait pas dans la région de l'Atlantique, vous auriez besoin d'une bureaucratie plus lourde à Ottawa pour accomplir le travail que fait l'Agence.
Pour ce qui est de la pêche, qui est considérée comme une ressource primaire, l'APECA a encore beaucoup à faire dans ce domaine. On a parfois tendance à dire que les industries de l'information sont la voie de l'avenir. C'est vrai. Toutefois, il est bon d'avoir une économie diversifiée et c'est là un de nos objectifs. Mais il reste encore beaucoup à faire, comme vous l'avez mentionné, avec nos ressources naturelles, si nous voulons les transformer en produits raffinés. Il y a un grand vide de ce côté-là.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Byrne.
M. Gerry Byrne: Je voudrais tout simplement ajouter un commentaire, madame la présidente.
Concernant l'APECA, nous accueillons aujourd'hui devant ce comité le plus grand défenseur des intérêts de la région de l'Atlantique. Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Byrne, de ce commentaire.
Monsieur Riis.
M. Nelson Riis: Nous devrions peut-être laisser le professeur Baker parler durant toute la soirée, et ensuite organiser une table ronde. Mais comme je n'ai que quelques minutes, monsieur le ministre—et je vous remercie, vous et vos collègues, d'être venus nous rencontrer—je voudrais parler du rôle de l'APECA.
Je constate, quand je me rends dans les différentes régions du Canada, que les entrepreneurs, les travailleurs de l'industrie de l'information, ainsi de suite, n'ont pas une haute opinion de l'APECA, du Fonds de diversification de l'économie de l'Ouest et de nombreux autres programmes qui sont offerts. Cette situation est peut-être attribuable au fait qu'on comprend mal le rôle de l'APECA—et je veux parler exclusivement de cet organisme.
Monsieur le ministre, vous conviendrez avec moi que le rôle du gouvernement est d'assurer des chances égales à tous les citoyens du pays, peu importe où ils vivent. Autrement dit, que vous viviez à Terre-Neuve ou au Labrador, vous bénéficierez des mêmes possibilités que celui qui vit à Toronto. Idéalement, c'est ce qu'on voudrait.
Or, l'APECA a été créé dans le but de défendre les intérêts du secteur des entreprises essentiellement—les investisseurs, les entrepreneurs—de sorte que si vous vivez à l'Île-du-Prince-Édouard, au Labrador ou à Saint-John, vous pourrez faire des affaires tout comme si vous viviez à Ottawa, Toronto ou Montréal—qui est une sorte de corridor urbain.
Voilà pourquoi, à mon avis, l'APECA a été créée. Votre collègue a dit que l'Agence s'attache, entre autres, à mettre sur pied des programmes de promotion du commerce, comme dans les États du nord-est. Oui, cela va peut-être aider les entrepreneurs locaux à pénétrer de nouveaux marchés qui, autrement, seraient hors de prix. Vous avez dit aussi que l'amélioration du système de transport pourrait contribuer à aider les entrepreneurs situés dans les régions reculées.
Pourriez-vous, vous ou vos collègues, nous dire quels sont les programmes offerts par l'APECA qu'on ne retrouve pas dans des endroits comme Ottawa, Toronto ou Montréal? Autrement dit, quels programmes spéciaux offre-t-on aux entrepreneurs ou aux gens d'affaires de la région de l'Atlantique et qu'on ne trouve pas ailleurs, du moins, pas sous cette forme, afin que tous aient accès à des règles du jeu équitables, peu importe l'endroit où ils vivent—dans ce cas-ci, la région de l'Atlantique par opposition au coeur industriel du pays?
M. George Baker: Je vais d'abord répondre à la question de façon générale, et laisser ensuite les fonctionnaires vous fournir des précisions.
Je trouve cela intéressant de voir des partis politiques critiquer le gouvernement du Canada parce qu'il continue d'appuyer des agences qui ont pour mander de favoriser le développement de l'industrie dans les régions à fort taux de chômage. Monsieur Riis, vous savez par expérience que certains partis politiques à la Chambre des communes ne cessent de dire qu'il faudrait accorder non pas des prêts ou des subventions, mais des allégements fiscaux. Or, comme vous le savez, un allégement fiscal est une dépense qui n'est pas toujours comptabilisée. De nombreux vérificateurs généraux ont noté, au fil des ans, que les dépenses fiscales grèvent l'économie, qu'elles sont parfois cachées, que de nombreuses entreprises importantes paient moins d'impôt à cause de celles-ci, comme vous le savez.
Donc, il faut, à mon avis, uniformiser les règles du jeu, non seulement pour attirer de nouvelles entreprises, mais pour venir en aide aux régions, comme celle de l'Atlantique, qui possèdent de nombreuses ressources, mais qui disposent de peu de capitaux privés. Le gouvernement a un rôle à jouer à ce chapitre, un rôle qu'il n'a peut-être pas à jouer ailleurs au Canada. Sans cette aide, il serait impossible de créer des entreprises.
Malheureusement, on entend très peu parler des réussites, et il y en a eu beaucoup. On entend uniquement parler des échecs. Je trouve cela regrettable.
Souhaitez-vous ajouter quelque chose?
M. Michael Horgan: Oui. Je dirais que l'APECA a six grandes priorités. D'abord, elle veut favoriser l'accès aux capitaux. On a l'impression que les marchés financiers et autres sont parfaits, que les entreprises n'ont aucune difficulté à obtenir des capitaux.
• 1700
Le fait est que les petites entreprises notamment, non pas les
grandes, ont beaucoup de difficulté à avoir accès à des capitaux.
L'APECA s'attache donc, plus que toute autre agence du gouvernement
fédéral, à faciliter l'accès à ces capitaux. Par conséquent, nous
offrons aux petites et moyennes entreprises un programme de prêts
à taux favorables qui vise à répondre à un besoin précis dans la
région de l'Atlantique. C'est là une de nos principales activités.
Deuxièmement, et nous en avons parlé plus tôt, nous consacrons beaucoup d'efforts à la promotion des échanges. Nous consacrons beaucoup de ressources à ce secteur d'activité. C'est très important. À certains égards, la région de l'Atlantique, surtout en ce qui concerne les petites entreprises, est en retard sur les autres régions du Canada pour ce qui est des exportations et du commerce à l'exportation. Or, il est important de savoir où on se situe par rapport aux meilleurs dans le monde. Les entreprises de la région de l'Atlantique doivent commencer à se comparer aux autres. L'APECA essaie vraiment de mettre l'accent là-dessus.
La troisième priorité est celle de l'innovation et de la technologie. Encore une fois, il existe des lacunes à ce chapitre dans la région de l'Atlantique, surtout dans le secteur des petites entreprises. Nous essayons de combler ce vide en venant en aide non seulement aux petites entreprises, mais également aux universités et aux établissements de recherche. Nous voulons développer des grands groupes d'activité, mettre l'accent sur l'innovation pour favoriser les investissements dans les collectivités, miser, à l'avenir, sur l'innovation et la technologie.
M. Nelson Riis: Si je puis me permettre, sauf votre respect, comme nous n'avons pas beaucoup de temps, l'accès aux capitaux qu'assure l'APECA est également assuré ailleurs au Canada par l'entremise de la Banque de développement du Canada ou du programme de développement des collectivités. Il y a divers programmes fédéraux qui facilitent l'accès aux capitaux. Il y a les programmes de promotion du commerce. Vous avez Équipe Canada qui se rend partout dans le monde avec le premier ministre et les premiers ministres provinciaux, ainsi de suite. Il en va de même pour l'innovation et la technologie. Nous venons de produire un rapport sur la question, et il existe toutes sortes de possibilités dans les grandes villes.
Donc, dans un sens, vous ne répondez pas de manière satisfaisante à la question que j'ai posée. Quels sont les programmes offerts par l'APECA qui permettent à la région de l'Atlantique de bénéficier d'un avantage supplémentaire?
Je vais utiliser comme exemple, pour que vous puissiez répondre à ma question—il est évident que je ne me suis pas bien exprimé—la Norvège, un pays que je connais bien. Si vous êtes un fabricant et que vous vous trouvez loin du grand centre urbain d'Oslo, vous bénéficiez d'une subvention pour couvrir les frais de transport jusqu'au port d'Oslo. Le fabricant qui se trouve à x distance du port a ainsi accès aux mêmes possibilités, sans avoir à assumer des frais de transport supplémentaires. S'ils ont pris cette mesure, c'est pour éviter que tout le monde s'installe près du port d'Oslo. Autrement dit, on accorde une attention spéciale aux entreprises qui se trouvent loin du centre urbain.
Voilà ce que je veux savoir. Ce que vous me dites, dans un sens, c'est qu'elle offre les mêmes services qu'on retrouve ailleurs au pays. Est-ce que j'ai mal compris?
M. George Baker: Oui.
M. Nelson Riis: D'accord.
M. George Baker: Ce que vous n'avez pas compris, c'est que, dans les exemples que vous avez cités, par exemple la Banque de développement du Canada, le taux d'intérêt exigé est assez élevé; il est plus haut que la normale. Ils utilisent une formule qui représente 75 p. 100 de... de quoi?
Ensuite, vous avez parlé des sociétés d'aides au développement des collectivités. Elles consentent des prêts allant de 5 000 $ à... elles disposent chacune d'un budget total d'environ 2 millions de dollars.
Donc, l'Agence assure l'exécution du programme de développement des collectivités dans la région de l'Atlantique, et c'est ce qui permet de combler le vide qui existe. C'est elle qui est l'autorité en la matière. Autrement, elle s'occupe de toutes les autres ententes fédérales-provinciales ou ententes à frais partagés.
Si vous prenez—l'exemple est peut-être mal choisi... non, c'est un bon exemple—le Fonds transitoire pour la création d'emplois ou le Fonds du Canada pour création d'emplois, l'APECA tient des consultations avant qu'un organisme d'un gouvernement provincial ou un autre organisme du gouvernement fédéral ne décide de participer à un projet. Disons que... comme c'est habituellement le cas—les banques, DHRC, une agence de prêt provinciale et l'APCA participent à un projet. Habituellement, ils suivent les conseils de l'APECA, qui est considérée comme étant l'autorité en la matière. Si je sais cela, c'est parce qu'on me fait toujours des reproches quand quelqu'un a des problèmes avec une autre agence fédérale ou provinciale. Donc, l'APECA remplit ce rôle, et elle a tout un vide à combler.
• 1705
Vous avez parlé de l'aide qui est accordée aux régions rurales
en Norvège, afin de permettre à l'entreprise implantée dans une
région rurale de faire des affaires tout comme si elle se trouvait
dans une région très peuplée. Comme vous le savez, monsieur Riis,
nous avions tout un train de mesures en place, et ces mesures ont
disparu au fil des ans. Elles ont disparu quand les Conservateurs
sont arrivés au pouvoir, et quand nous avons été obligés
d'introduire des restrictions budgétaires. L'aide au transport,
l'aide au transport des aliments du bétail, tout a disparu, de
sorte que ces mesures n'existent plus.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Riis.
Monsieur Lastewka.
M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.
Je voudrais vous poser une question, mais j'aimerais avant cela faire un commentaire.
J'ai visité de nombreuses localités et collectivités de la région de l'Atlantique où vous êtes venu en aide aux PME, et vous avez fait de l'excellent travail. Elles sont devenues des moteurs de croissance dans la région atlantique. Je vous en félicite.
La Société de développement du Cap-Breton collabore avec l'APECA, mais pas de façon directe. Nous sommes tous au courant de la fermeture de la mine Phalen, des problèmes de DEVCO, des aciéries, ainsi de suite. Pouvez-vous nous dire comment vous arrivez, en collaboration avec la SDCB, à changer les mentalités, à amener les travailleurs des mines et des aciéries à se lancer dans la petite entreprise, compte tenu de l'annonce récente qui a été faite concernant EDS?
M. George Baker: Je vais laisser les fonctionnaires, dans un instant, vous fournir d'autres précisons, s'il y a lieu, mais comme vous le savez, c'est la Société qui assure l'exécution des programmes dans l'île du Cap-Breton pour le compte de l'APECA. C'est une société d'État distincte et indépendante du gouvernement.
Vous avez parlé de l'annonce concernant EDS. C'est une véritable histoire à succès pour la Société de développement.
D'après ce que j'ai appris récemment, ce ne sont pas 900, mais 1 500 emplois qu'on prévoit créer, si l'on se fie à l'annonce qu'a faite le premier ministre à Sydney. J'ai vu dans le journal que les deux députés néo-démocrates se trouvaient aux côtés du premier ministre quand ils ont pris la photo par après, car il s'agissait effectivement d'une très bonne nouvelle. C'est une de ces...
M. Nelson Riis: C'étaient des députés locaux.
M. George Baker: C'étaient des députés locaux de l'île du Cap-Breton—j'espère que ce sera des Libéraux la prochaine fois.
C'est une histoire à succès, car la Société de développement du Cap-Breton a assumé un rôle de chef de file, a exercé des pressions auprès de l'entreprise, a pris les mesures nécessaires pour l'encourager à quitter les États-Unis et s'installer à l'île du Cap-Breton. Cela a eu un effet de damier sur l'économie de l'île du Cap-Breton, ce qui est très positif.
Souhaitez-vous ajouter quelque chose, monsieur Horgan?
M. Michael Horgan: Je voudrais tout simplement dire que le gouvernement, au moment d'annoncer la fermeture d'une des deux mines et la privatisation possible de l'autre, a également précisé qu'un fonds d'adaptation de 68 millions de dollars serait mis sur pied.
Un groupe composé essentiellement de représentants locaux de l'île du Cap-Breton a été créé en vue de tenir de vastes consultations sur l'utilisation de ce fonds. Le groupe aura bientôt terminé son travail. Un rapport provisoire a été distribué, et nous nous attendons à ce que le rapport définitif contienne des recommandations, à l'intention du gouvernement, sur l'utilisation de ce fonds de 68 millions de dollars.
M. Walt Lastewka: Je sais qu'il s'agit d'une société distincte qui collabore avec l'APECA, mais on pourrait peut-être remettre une copie du rapport au comité, une fois celui-ci déposé.
La présidente: Merci, monsieur Lastewka.
Monsieur Pickard.
M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier, vous et vos fonctionnaires, d'être venus nous rencontrer.
Je pense que, en ce qui concerne l'APECA et la région de l'Atlantique, nous sommes confrontés à un problème majeur, et je ne suis pas sûr que notre approche soit la bonne.
Comme je ne vis pas dans la région de l'Atlantique, il m'est difficile de concevoir ce que veut dire le fait d'avoir un taux de chômage de 17 p. 100 ou un taux de chômage élevé. Il faut s'attaquer à ce problème, et je ne suis pas sûr que les mesures que nous avons prises soient efficaces. Elles le sont peut-être, parce qu'il est impossible de solutionner des problèmes d'un coup de baguette magique. Nous ne pouvons pas, d'un coup de baguette, ramener le taux de chômage à 8 p. 100 ou 7 p. 100.
Par ailleurs, il y a eu des fermetures dans le secteur de la pêche, les industries de bases éprouvent de sérieuses difficultés, et les ressources diminuent. Nous savons tout cela. L'avenir, en fait, s'annonce peu prometteur. Que faisons-nous pour améliorer la situation dans la région de l'Atlantique? Nous ne pouvons pas faire preuve de pessimisme. Nous devons être positifs.
Je ne crois pas que le gouvernement puisse à lui seul régler ces problèmes, mais je constate qu'on se pose aussi beaucoup de questions au sujet de la règle de l'intensité dans le domaine de l'assurance-emploi. Cela me donne à penser qu'on ne s'attend pas à ce que la situation change à court terme, ou encore même à long terme.
Nous sommes confrontés à toute une foule de problèmes, mais ce dont nous avons surtout besoin, ce sont des emplois. Nous devons faire encore plus dans la région de l'Atlantique pour améliorer la qualité de vie de ces habitants.
Est-ce que le mandat de l'APECA lui permet d'intervenir à ce chapitre, ou devons-nous prévoir d'autres mécanismes? Je ne crois pas que nous puissions compter uniquement sur l'industrie primaire pour survivre. Les ressources s'épuisent, mais les gens restent. Qu'est-ce qui est en train de se passer?
M. George Baker: Il y a deux réponses à votre question. Prenez l'île du Cap-Breton, par exemple, où l'effondrement de l'industrie minière, entre autres, a amené le gouvernement fédéral à débloquer quelque 68 millions de dollars—est-ce bien cela?—pour diversifier l'économie. De plus, le groupe a formulé des recommandations, et on prévoit bientôt annoncer un plan... qui totalisera, en fait, près de 80 millions de dollars.
M. Michael Horgan: La province doit verser 12 millions de dollars.
M. George Baker: La province versera également 12 millions de dollars.
Et cela ne concerne qu'un secteur.
Pour ce qui est des régions du Canada atlantique qui affichent un taux de chômage très élevé, prenons la côte sud de Terre-Neuve. D'après les chiffres publiés cette semaine par Statistique Canada, le taux de chômage le long de la côte sud de Terre-Neuve atteint 39,7 p. 100.
Le problème avec les usines de transformation du poisson qui se trouvent le long de cette côte, et au Québec, le long de la côte allant de Blanc-Sablon aux Îles-de-la-Madeleine et la péninsule acadienne, c'est qu'elles comptaient beaucoup sur la pêche du poisson de fond. Or, entre 1985 et 1990, le gouvernement fédéral a permis à des chalutiers étrangers, qui sont à mon avis les principaux responsables de la destruction de l'industrie, de venir pêcher dans cette zone. C'était une décision absolument scandaleuse. Ces chalutiers ont détruit l'environnement, de même que l'industrie de la pêche tout le long de la côte atlantique.
Or, il y a d'autres ressources dans l'océan. Il n'est pas nécessaire de fermer ces zones de pêche.
Permettez-moi de vous donner un exemple. Nous avons récemment signé une entente avec le gouvernement de Terre-Neuve en vue de mettre sur pied, par l'entremise de l'APECA, un programme qui vise à diversifier ces industries et à favoriser, disons, la mytiliculture. Il y a de magnifiques zones qui se prêtent bien à l'élevage des moules—l'eau possède les éléments nutritifs nécessaires pour l'élevage des moules—et des diverses autres ressources que l'on trouve dans l'océan.
• 1715
Donc, il nous faut un programme de diversification, comme
celui que nous avons mis sur pied, de sorte que si l'industrie du
poisson de fond est détruite par un gouvernement qui permet à des
pays étrangers de venir pêcher dans ses eaux, si cela devait un
jour se produire—et cela n'arrivera pas sous un gouvernement
libéral, mais peut-être dans 40 ans, quand les autres gouvernements
seront au pouvoir.
L'économie doit être diversifiée. Si l'industrie de la pêche est la seule qui existe le long de la côte sud de Terre-Neuve, alors il faut chercher à diversifier l'économie. C'est ce que nous essayons de faire avec nos programmes actuels.
La présidente: Ce sera votre dernière question, monsieur Pickard.
M. Jerry Pickard: D'accord. Merci, madame la présidente.
Avons-nous fixé des objectifs et établi des paramètres qui nous permettent de mesurer les progrès que nous avons réalisés dans ce domaine? Étant donné que le taux de chômage est élevé et que les perspectives sont plutôt mornes, nous devons prendre des initiatives, et sans délai.
M. George Baker: Vous avez tout à fait raison. Malheureusement, quand il est question de développement côtier, de transformation secondaire, on ne peut agir seul. Les gouvernements provinciaux jouent un rôle déterminant, puisque ce sont eux qui fixent les objectifs à long terme, qui délivrent les permis aux pêcheurs, aux exploitants forestiers. Ce sont eux aussi qui s'occupent des permis, des règles, des règlements qui régissent l'industrie minière.
Donc, vous pouvez être confronté à des situations identiques à celles que nous avons connues au sein de l'APECA depuis mon arrivée ici, qui est encore toute récente. J'ai vu des cas où un entrepreneur nous soumettait un projet fort intéressant, mais que l'APECA ne pouvait appuyer parce que la province refusait d'y participer sous prétexte que cela ne faisait pas partie de ses plans à long terme.
Donc, chaque fois que vous voulez intervenir même dans le secteur de la pêche, pour encourager par exemple la mytiliculture, il faut que la province dise oui, nous allons délivrer un permis de transformation secondaire à cette usine-ci. Il faut collaborer avec les provinces. Voilà pourquoi nous avons des ententes fédérales-provinciales, des ententes sur lesquelles nous comptons depuis des années.
Mais vous avez raison de dire que la province a un rôle majeur à jouer dans ce domaine. Malheureusement, dans certains cas, elle ne le remplit pas tellement bien.
M. Jerry Pickard: Merci beaucoup, monsieur le ministre.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Pickard.
Je tiens à présenter mes excuses à ceux qui n'ont pas été en mesure de poser des questions.
Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier, vous et vos fonctionnaires, d'être venus nous rencontrer. Nous aurions pu poursuivre la discussion encore longtemps, mais nous sommes heureux d'avoir eu l'occasion de discuter avec vous aujourd'hui.
La séance est levée.