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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 17 février 2005




¿ 0900
V         Le président (L'hon. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.))
V         M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands)

¿ 0905

¿ 0910
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC)

¿ 0915
V         M. Gary Lunn
V         M. Garry Breitkreuz
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz
V         M. Gary Lunn
V         M. Garry Breitkreuz
V         Le président
V         M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ)

¿ 0920
V         M. Gary Lunn
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD)

¿ 0925
V         M. Gary Lunn
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         M. Gary Lunn
V         Le président

¿ 0930
V         L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)
V         M. Gary Lunn
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Gary Lunn

¿ 0935
V         Le président
V         M. Mark Warawa (Langley, PCC)

¿ 0940
V         M. Gary Lunn
V         Le président
V         M. Gary Lunn

¿ 0945
V         Le président
V         Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ)
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. John Maloney (Welland, Lib.)
V         M. Gary Lunn
V         M. John Maloney
V         M. Gary Lunn
V         M. John Maloney
V         M. Gary Lunn
V         M. John Maloney
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Gary Lunn
V         Le président
V         Le président
V         M. Michael Zigayer (avocat-conseil, Division des politiques en matière de droit pénal, ministère de la Justice)

¿ 0955
V         Le président
V         M. Michael Zigayer

À 1000

À 1005
V         Le président
V         M. Louis Davis (avocat-conseil, Section du droit administratif et constitutionnel, ministère de la Justice)
V         Le président
V         M. Vic Toews (Provencher, PCC)
V         M. Michael Zigayer
V         M. Vic Toews
V         M. Michael Zigayer
V         M. Vic Toews
V         M. Michael Zigayer
V         M. Vic Toews
V         M. Michael Zigayer
V         M. Vic Toews

À 1010
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Louis Davis
V         Le président
V         M. Richard Marceau

À 1015
V         M. Louis Davis
V         M. Richard Marceau
V         M. Louis Davis

À 1020
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. Michael Zigayer

À 1025
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         M. Michael Zigayer
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Gary Lunn

À 1030
V         Le président
V         M. Michael Zigayer
V         M. Gary Lunn
V         Le président
V         M. Gary Lunn
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         M. Michael Zigayer
V         M. Joe Comartin
V         M. Michael Zigayer
V         M. Joe Comartin
V         M. Michael Zigayer
V         M. Joe Comartin

À 1035
V         M. Michael Zigayer
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Louis Davis
V         L'hon. Roy Cullen

À 1040
V         M. Michael Zigayer
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Michael Zigayer

À 1045
V         Le président
V         M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC)
V         M. Michael Zigayer

À 1050
V         M. Rob Moore
V         Le président
V         L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.)
V         M. Michael Zigayer
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         M. Michael Zigayer

À 1055
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         M. Michael Zigayer
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz
V         M. Michael Zigayer
V         M. Garry Breitkreuz
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


NUMÉRO 021 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 17 février 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0900)  

[Traduction]

+

    Le président (L'hon. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.)): Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile. Nous poursuivons l'étude du projet de loi C-13, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et la Loi sur la défense nationale.

    Nous accueillons Gary Lun, député de Saanich-Gulf Islands, qui a une présentation à nous faire. M. Lunn, vous avez un projet de loi d'initiative parlementaire qui a un rapport avec l'objet du projet de loi C-13. Je vais vous demander de faire votre présentation. Normalement, nous prévoyons une dizaine de minutes pour la présentation, puis nous passons aux questions.

+-

    M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands): Merci, monsieur le président.

    Je suis reconnaissant à tous les membres de me donner cette occasion de venir devant votre comité. Pour moi c'est une première expérience que d'être assis de ce côté-ci de la salle.

    Je ne veux pas tellement lire. Je vais seulement parler de ce que je sais, donc si vous voulez bien m'avertir quand il ne sera qu'une ou deux minutes, cela m'aiderait.

    Je voudrais commencer par remercier mes collègues, particulièrement Richard Marceau, du Bloc québécois, qui a eu la grande indulgence de proposer mon nom comme témoin. Je voudrais aussi remercier un autre de mes collègues, l'honorable Wayne Easter, qui a appuyé sans fléchir mon projet de loi d'initiative parlementaire. Je tiens à ce que ce soit au compte-rendu aussi.

    Permettez-moi d'essayer de résumer de quoi il s'agit. Il y a deux ou trois ans, Judy Peterson, dont la fille avait disparu, est venue me voir. À ce moment-là, cela faisait déjà une dizaine d'années que sa fille avait disparu. On ne l'avait jamais retrouvée. Il y a des centaines de corps dans les morgues du pays. Des empreintes génétiques ont été prises et versées dans un index des restes humains non identifiés. Les empreintes génétiques recueillies sur les scènes de crime sont versées dans un autre index. Mme Peterson était vraiment frustrée parce qu'elle avait des éléments d'ADN de sa fille mais qu'il n'y avait aucun moyen, légalement, de les comparer à la basse de données. Elle a exprimé le désir de tourner la page. Selon elle, il y a d'autres personnes disparues, et peut-être pourrions-nous parvenir à clore ces dossiers. C'est de là qu'est née l'idée.

    Après avoir écrit des lettres à tous les ministres provinciaux et parlé avec les ministres fédéraux, la GRC et les experts, pour essayer d'en apprendre plus sur la question, nous avons pu mettre de l'avant un projet de loi d'initiative parlementaire. Je tiens à souligner que tout ce temps-là, j'ai joui de l'appui de députés de tous les partis. Donc, ce n'est pas un enjeu partisan, ou qui soit lié à aucun parti politique. Je l'appellerais la loi de Lindsey, du nom de la fille de Mme Peterson.

    Bien entendu, en vertu des règles qui s'appliquent au projet de loi d'initiative parlementaire, il n'a encore jamais vu la lueur du jour, et ce n'est qu'une affaire de procédure.

    C'est vraiment là la place de ce projet de loi, dans le projet de loi C-13. Je vais brièvement décrire le projet de loi. Je vais le distribuer, monsieur le président, à tous les membres du comité. Il porte appelle maintenant le numéro de projet de loi C-240. En fait, il vise à pour créer un autre index, une basse de données génétiques des personnes disparues, et il établirait un lien entre ces données, celles des scènes de crime et celles des restes humains non identifiés.

    Les Services nationaux des enfants disparus traitent quelque chose comme 60 000 dossiers d'enfants disparus par année. Bien qu'une majorité de ces cas soient résolus en quelques jours ou une semaine, il reste toujours 2 000 cas non résolus en tout temps. Les enfants qui ne sont pas trouvés dans la première semaine, souvent, ne le sont jamais.

    À ce que je comprends, jusqu'à maintenant, plus de 15 000 profils génétiques non identifiés ont été recueillis sur diverses scènes de crime dans tout le pays. On a aucune idée de l'identité de ces victimes.

    L'objet de tout cela, c'est de créer un lien entre les basses de données. Si nous pouvons établir au moins quelques correspondances, je pense que ce serait déjà beaucoup. Disons qu'on établit une correspondance avec la base de données des scènes de crime. Le coût d'un échantillon génétique, actuellement, est une centaine de dollars. Une enquête sur un meurtre coûte 750 000 $.

    L'objet de mon projet de loi est d'aider des familles à tourner la page. Si quelqu'un a disparu, dont elles ont les empreintes génétiques et qu'on établit une correspondance entre ces éléments et les empreintes génétiques recueillies sur les lieux d'un crime...

¿  +-(0905)  

    Le cas le plus évident, qui est relaté dans les médias depuis quelques années, c'est celui du procès pour meurtre de Pickton, à Vancouver. De nombreux échantillons d'ADN ont été prélevés sur la scène du crime et n'ont pas été identifiés. Si on peut comparer ces échantillons aux profils des personnes disparues, on peut trouver une piste pour approfondir l'enquête. Ce serait évidemment un outil très important pour la police.

    Je crois que les avantages sont évidents. Ce n'est pas une question de coût. Je me suis entretenu avec les experts qui tiennent ces fichiers. Ils m'ont dit que la technologie est en place. Il n'en coûterait presque rien. Il n'y a aucun risque de mêler les profils. Tout cela était très rassurant.

    Certaines préoccupations ont été soulevées, et la prudence exige que je les expose également. La plus importante concerne la protection de la vie privée. On s'inquiète qu'une personne innocente pourrait être incriminée si ses empreintes génétiques étaient relevées sur la scène d'un crime; par ailleurs, des personnes portées disparues pourraient aussi ne pas souhaiter être retrouvées. Je crois que nous avons répondu à ces préoccupations dans le texte législatif.

    Premièrement, si une personne disparue est retrouvée vivante, elle n'a pas à rendre compte de ses allées et venues. Ses empreintes génétiques sont effacées immédiatement du registre. Si on ne dispose pas des empreintes génétiques d'une personne disparue, les experts me disent que celles d'un proche parent sont assez semblables pour pouvoir établir une comparaison.

    Deuxièmement, l'échantillon—tout échantillon d'ADN que fournit la famille—est fourni uniquement sur une base volontaire par les membres de la famille biologique, ceux qui cherchent la personne disparue. Ce n'est pas obligatoire. Il est très clair dans le projet de loi qu'il s'agit d'une possibilité qui est offerte aux personnes qui ont demandé pareille recherche.

    Troisièmement, le profil d'identification génétique servira uniquement à la recherche de la personne portée disparue. C'est ce qui est écrit dans les amendements proposés. Je reconnais que certaines personnes aimeraient qu'il serve aux enquêtes criminelles, mais ce n'est pas là l'objectif de mon projet de loi. Je ne me suis pas engagé dans cette voie et je vais vous dire exactement pourquoi. J'en ai parlé précédemment. Le profil pourrait devenir un tel outil, et on voudra peut-être se pencher sur la question éventuellement. Toutefois, je ne veux pas risquer que ce projet de loi soit rejeté sur le fondement de la Charte, entre autres. Le but de ce projet de loi est d'aider à trouver des personnes portées disparues et à établir ce lien. C'est pourquoi je n'ai pas inclus les enquêtes criminelles.

    Il y a d'autres préoccupations. J'ai eu une conversation très positive hier avec mon honorable collègue, et ce dernier a soulevé d'autres questions. Il m'a fait remarquer que le but du projet de loi C-13 est d'identifier des criminels. Je crois avoir fait une synthèse en ajoutant un amendement à cet article du projet de loi pour préciser qu'il vise aussi à identifier les personnes portées disparues.

    À mon avis, l'argument le plus puissant qui sera avancé portera sur le partage des compétences. On a laissé entendre que ce domaine relevait de la compétence provinciale. J'aimerais dire tout d'abord que ce que je vous demande de faire, c'est de permettre aux familles des personnes portées disparues de soumettre des empreintes génétiques pour que des rapprochements puissent être faits avec les bases de données génétiques fédérales.

    À l'instar de Mme Peterson, j'ai écrit à chaque ministre provincial à ce sujet. Permettez-moi de vous lire quelques extraits des réponses que j'ai reçues. Je serai ravi de remettre toutes ces lettres au comité.

    Voici ce que dit le ministre de la Colombie-Britannique :

La Colombie-Britannique est d'avis que la législation actuelle concernant les empreintes génétiques devrait être élargie pour permettre de recueillir les empreintes génétiques des personnes portées disparues. J'appuie entièrement l'élaboration et l'application de pareille mesure législative.

    Voici la réponse de l'Alberta :

Je conviens que des mesures doivent être prises pour qu'on puisse mieux utiliser les nouvelles technologies afin d'identifier les restes humains et aider les familles des personnes portées disparues à tourner la page, dans la mesure du possible. L'élargissement de la banque de données génétiques existante que vous proposez à cette fin est une mesure à la fois novatrice et opportune.

C'est avec plaisir que j'appuie sans réserve l'adoption du projet de loi C-441.

¿  +-(0910)  

    Certaines personnes s'inquiètent au sujet de la protection de la vie privée, mais en général elles ont été très réceptives. De l'Ontario :

Comme vous le savez, l'examen et la modification de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques sont du ressort du gouvernement fédéral. L'Ontario a été un ardent défenseur de la banque nationale de données génétiques par l'intermédiaire du Centre des sciences judiciaires et des services de police de la province. De plus, le Bureau du coroner en chef de l'Ontario s'est engagé à utiliser rigoureusement toutes les technologies au service de la science légale afin d'identifier les personnes décédées.

Soyez assuré que l'Ontario continuera de collaborer avec le gouvernement fédéral à l'étude d'un fichier national des personnes disparues.

    De la province de Québec, qui soulève également certaines questions concernant la protection de la vie privée :

Le Ministre fera en sorte que des garanties et des protections soient mises en place pour éviter que des rapprochements soient faits entre les profils d'identification génétique de personnes innocentes et les profils qui se trouveront dans le fichier de criminalistique.

    Voilà quelques-unes des préoccupations exprimées, mais encore une fois—et je vois que le temps presse, alors je vais tenter de résumer, monsieur le président—je suis prêt à travailler avec les ministres provinciaux ou les provinces pour apporter les changements qui sont nécessaires à l'adoption du projet de loi. Mon but est d'aider les personnes qui ont désespérément besoin de cet outil.

    Par ailleurs, le commissaire adjoint de la GRC m'a envoyé une très longue lettre pour me signifier son appui.

    Je suis prêt à déposer tous ces documents devant le comité et je vous demande d'appuyer cette initiative. Je suis prêt à travailler avec les députés, avec quiconque, avec les experts que vous entendrez ultérieurement, s'ils ont des suggestions et des amendements constructifs et positifs qu'ils jugent nécessaires. Je suis plus que disposé à engager la discussion avec l'une ou l'autre de ces personnes. Le but est de créer une banque de données des personnes portées disparues.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, monsieur Lunn.

    Nous donnerons la parole à M. Breitkreuz pour la première intervention de cinq minutes.

+-

    M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC): Merci, monsieur le président.

    Merci, monsieur Lunn, pour votre initiative et tout le coeur que vous y mettez depuis de nombreuses années. Vous méritez toutes nos félicitations et j'apprécie tout particulièrement les efforts que vous avez déployés pour faire avancer ce projet de loi. Je crois que tous les membres du comité seront d'accord avec moi à cet égard.

    J'ai examiné et étudié le projet de loi, et il me semble être l'évidence même. Qu'attendons-nous? Voilà quelque chose qui est bon pour nous. C'est une question de compassion et de justice, dans bien des cas.

    Je dois toutefois faire une remarque sur une chose que vous avez dite, à savoir que le projet de loi C-13 ne vise qu'à identifier les criminels. Ce n'est pas vrai; il vise aussi à innocenter des personnes. Je crois que votre projet de loi pourrait s'insérer dans le projet de loi C-13, parce que le prélèvement d'échantillons d'ADN pourrait être profitable aux personnes innocentes, parmi lesquelles se trouveraient celles dont vous avez parlé.

    Ne croyez-vous pas qu'il s'agit d'une question d'équilibre? S'il y a tant d'avantages, ne feraient-ils pas contrepoids aux effets négatifs possibles? Je sais que vous avez prévu des mesures de protection, mais tout compte fait, les avantages ne seraient-ils pas plus nombreux que les inconvénients?

    Mon autre question est la suivante : cette initiative peut-elle être mise à l'essai, puis revue comme tous les autres textes législatifs, et même cette loi? Pourrions-nous en faire l'essai pendant un certain temps? Si les avantages sont comme ceux que vous avez décrits, nous pourrions ensuite améliorer la loi et poursuivre dans ce sens, ou nous pourrions l'abolir si ça ne va pas. Cette approche pourrait-elle être utilisée?

¿  +-(0915)  

+-

    M. Gary Lunn: Permettez-moi de répondre très rapidement en respectant les limites de temps, que je comprends très bien.

    D'abord, je veux qu'il soit écrit dans le compte rendu que je ne suis que le porte-parole. Ce n'est pas mon initiative, mais celle de Judy Peterson, et je dois rendre à César ce qui revient à César. Si elle ne m'avait pas parlé de ce projet, je ne serais pas ici aujourd'hui.

    Qu'attendons-nous? Voilà une bonne question. Vous savez, je fais des pressions... nous étudions parfois les choses trop longtemps. Je sais que certaines personnes vont proposer que nous attendions jusqu'à l'automne prochain. Je crois que nous avons couvert tous les angles et que nous pouvons aller de l'avant maintenant. Si des amendements sont nécessaires, faisons-les.

    Si, comme vous le dites, certains problèmes surviennent durant une période d'essai, on pourra y remédier. Encore une fois, le but est de créer une banque de données des personnes portées disparues. Nous tiendrons compte de tous les commentaires et de toutes les critiques constructives pour essayer de l'améliorer.

    En ce qui a trait à la protection de la vie privée, je suis d'accord avec vous pour dire que les avantages l'emportent considérablement sur les inconvénients éventuels. Or, à l'époque où nous vivons, ces préoccupations sont toujours présentes, et je crois qu'il faut mettre en place des mesures de protection, et c'est ce que nous avons fait.

    Seule une participation volontaire est prévue. Personne, dans le cadre de mon projet de loi, n'est obligé de soumettre un profil d'identification génétique. Par le fait même, je crois que ces questions sont réglées.

    Le seul autre commentaire que je voudrais faire à propos de l'équilibre porte sur le partage des compétences. Nous faisons des recoupements. Même si quelqu'un pouvait faire valoir qu'il s'agit d'un domaine de compétence provinciale, rien ne montre dans toute la correspondance que j'ai reçue que cette question soit problématique. Au contraire. Ce sont des banques de données nationales, fédérales. Je ne crois pas que la solution serait de créer une mosaïque de 10 banques de données différentes dans l'ensemble du pays.

    Chaque province est prête à collaborer de toutes les façons possibles, alors je ne vois pas de problème de compétence. Comme le ministre de l'Ontario l'a dit, les provinces croient qu'il s'agit d'une compétence fédérale. Tout compte fait, si cet argument est avancé... je ne sais pas si quelqu'un contesterait cela, parce qu'il est très évident que cet projet doit être réalisé.

    Merci d'avoir posé ces questions.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Vous avez raison.

    S'il reste du temps, j'aimerais le partager avec M. Warawa.

+-

    Le président: Il est le prochain sur la liste.

    Il reste 15 secondes—c'est tout un partage, mais très peu équitable.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Permettez-moi un dernier commentaire.

    Je connais très bien un autre domaine où la compétence fédérale a été contestée par les provinces devant la Cour fédérale, et il s'agit du registre des armes à feu. Les tribunaux ont décidé que puisque toutes les provinces étaient touchées, le gouvernement fédéral aurait compétence en la matière. Je crois donc que votre argument est valable.

    Vous vous demandiez sans doute comment j'allais pouvoir amener le registre des armes à feu dans la discussion.

+-

    M. Gary Lunn: Je pense que vous en savez plus que quiconque dans ce domaine.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci, monsieur Breitkreuz.

[Français]

    Monsieur Marceau, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci, monsieur le président.

    Je n'ai aucun doute que dans n'importe quel débat, notre collègue Garry Breitkreuz serait en mesure de soulever la question du registre des armes à feu, en parlant de n'importe quoi.

    Monsieur Lunn, merci beaucoup d'être ici aujourd'hui. Merci aussi pour votre présentation. Vous n'êtes pas sans savoir, après les discussions que nous avons eues, vous et moi, de même qu'à la lumière de mes interventions à ce comité, que je suis en principe très favorable à l'idée que vous soulevez. Je pense que c'est une excellente idée.

    Le problème, vous ne serez pas surpris, est le partage des compétences. Tout à l'heure, vous avez lu les lettres de quelques ministres provinciaux de la Justice. Je suis toujours jalousement protecteur des pouvoirs des provinces, pour des raisons évidentes. Je vous ai déjà mentionné que ma crainte est qu'une bonne idée serve de raison pour envahir les champs de compétence des provinces, ce à quoi, en tant que souverainiste, je ne voudrais pas qu'on en arrive.

    Par contre, j'apprécie l'offre que vous avez faite lorsque vous avez dit très ouvertement, ici et à l'extérieur--je le souligne--, que s'il y a des façons de faire en sorte que ce projet de loi, ce mécanisme, puisse être mis en place sans empiéter dans les champs de compétence des provinces, vous êtes ouvert à cela. Vous nous avez invités à vous faire des suggestions, en ajoutant que vous étiez prêt à travailler avec tout le monde. J'apprécie cela et je tenais à le souligner.

    Est-ce que vous avez une opinion juridique, qu'on aurait rédigée pour vous, sur le partage des compétences, à savoir si c'est correct? Sinon, serait-il possible de nous en fournir une?

    S'il y a des modifications à apporter à votre projet de loi pour s'assurer que le partage des compétences soit respecté, est-ce que vous seriez ouvert à l'idée d'y apporter des amendements?

¿  +-(0920)  

[Traduction]

+-

    M. Gary Lunn: Tout à fait.

    D'abord, d'après toute la recherche que j'ai effectuée, je crois que le gouvernement fédéral et quelques provinces ont affirmé que ce domaine relève du gouvernement fédéral. Les banques de données existantes que nous voulons recouper sont des banques fédérales.

    Cela dit, dans pareille situation, la collaboration des provinces est nécessaire; ce sont elles qui prélèveraient et soumettraient les échantillons et qui auraient accès à cela. Même si nous en faisions l'essai, comme M. Breitkreuz l'a mentionné, et si ses préoccupations étaient soulevées ou abordées, je serais plus qu'heureux de les considérer.

    Je ne suis pas certain que vous l'avez compris, mais je vous remercie d'avoir proposé que je comparaisse devant le comité pour discuter de ces questions. Je serais plus que disposé à m'entretenir avec l'une ou l'autre des provinces si cette question fait problème. On ne m'en a pas parlé directement. Dans les lettres, quelques provinces ont laissé entendre qu'il fallait se pencher sur le sujet, mais il ne me semble pas, du moins selon mon interprétation... Nous voulons simplement faire en sorte que ce projet soit réalisé.

    Je ne crois pas que ce soit un problème. Je crois, en fait, que ce domaine relève entièrement de la compétence fédérale. Il est difficile de répondre à cette question, et nous pourrions fournir l'opinion écrite d'un juriste, mais lorsqu'on a rédigé les articles 91 et 92 et qu'on a examiné les pouvoirs qui y étaient conférés, je ne crois pas que personne à cette époque pensait aux profils d'identification génétique. Notre objectif est purement humanitaire. Encore une fois, je ne crois pas qu'il y ait une province... elles aimeraient toutes que ce soit fait, tout simplement.

    Nous parlons de compétences provinciales, mais nous pouvons aussi regarder plus loin. Certains experts ont dit que lorsque cette banque sera créée... il y a d'autres pays qui ont des banques semblables, et ce pourrait être la prochaine étape à franchir dans le partage des renseignements. Comme vous le savez, les personnes disparues ne sont pas confinées à un pays; elles peuvent traverser les frontières. Nonobstant les questions de compétence, ce sont les prochaines étapes. Ce n'est pas là ma préoccupation pour l'instant, mais si vous tenez compte de l'objectif que nous essayons d'atteindre, je crois que nous pouvons aller plus loin.

    S'il y a des problèmes, je serais le premier à modifier mon projet de loi ou les amendements ou même à inviter quelque d'autre à le faire, pour que ce projet devienne réalité.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Marceau.

    Monsieur Comartin, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Permettez-moi de dire d'abord que je crois que tout le monde autour de la table est du même avis, à savoir que cette banque de données doit être créée. Reste à savoir comment nous le ferons.

    Revenons d'abord à une des questions que vous avez soulevées concernant la protection de la vie privée. J'ai examiné votre projet de loi. Si nous prenons le cas d'une jeune personne qui s'enfuit de chez elle parce qu'elle est victime d'abus, le parent abusif peut-il se servir de ce mécanisme pour retracer son enfant?

¿  +-(0925)  

+-

    M. Gary Lunn: Je ne vois pas comment cela pourrait être possible, parce que les seuls fichiers avec lesquels on pourrait faire des rapprochements, ce sont le fichier des restes humains non identifiés—dans lequel on ne retrouverait pas les empreintes génétiques d'une personne qui fait une fugue—et le fichier de criminalistique. Il est possible qu'un profil d'identification génétique se retrouve sur le lieu d'un crime et que la personne concernée soit toujours vivante, mais je crois que nous avons mis en place les protections nécessaires pour faire en sorte que dans pareil cas, cette personne n'aurait pas à divulguer ses allées et venues et son profil serait effacé immédiatement. Les experts m'ont assuré que cela peut être fait.

    J'aimerais ajouter que ce que vous dites est possible. Est-ce probable? Vous devez reconnaître que dans cette situation particulière—et nous avons tenté de mettre en place les mesures de protection nécessaires—, les avantages éventuels dépassent les inconvénients éventuels... Je ne suis même pas convaincu qu'il s'agisse d'un inconvénient, mais si c'est le cas—et les mesures de protection ont été prévues—, ça vaut quand même la peine d'aller de l'avant.

+-

    M. Joe Comartin: Monsieur Lunn, je ne sais pas ce que vous allez en penser. Le comité est allé au laboratoire fédéral, ici à Ottawa. Dans le cadre de cette visite, nous avons déterminé qu'il était impossible de détruire les échantillons une fois qu'ils étaient prélevés, parce qu'ils sont mêlés à plus de 90 autres—ce n'est pas le terme exact, mais je peux l'utiliser dans mon propre langage. Le profil reste toujours là. Si nous devons être en mesure de les détruire, il faudrait mettre au point une nouvelle méthodologie pour les entreposer. C'est là un des problèmes techniques.

    À la fin de votre projet de loi, je remarque que la destruction des échantillons est prévue. Or, à l'heure actuelle, si nous utilisons une méthode semblable pour le prélèvement et l'entreposage des échantillons, nous ne serons pas en mesure de les détruire. Dans le cas de la personne victime d'abus dont nous venons de parler, le profil resterait dans le fichier.

+-

    Le président: Monsieur Comartin, une simple question de procédure. Nous abordons ici certains détails du projet de loi. Or, ce n'est pas ce projet de loi que nous examinons, mais bien le projet de loi C-13. Le sujet est connexe, alors je ne sais pas, d'un point de vue technique, s'il faut se préoccuper du libellé du projet de loi en soi. C'est le sujet qui nous intéresse.

+-

    M. Joe Comartin: Seriez-vous en train de suggérer, monsieur le président, que mes propos ne sont pas pertinents?

+-

    Le président: Non. Je ne ferais jamais cela.

+-

    M. Joe Comartin: Permettez-moi d'aborder un dernier point, parce que je suis certain que mon temps est presque tout écoulé. Il s'agit de la question de compétence.

    On pourrait contourner ce problème en concluant des ententes avec les provinces. Savez-vous si des efforts quelconques ont été faits dans ce sens par l'une ou l'autre des provinces auprès du gouvernement fédéral?

+-

    M. Gary Lunn: Oui. Encore une fois, je félicite l'honorable Wayne Easter à cet égard. Lorsque je lui ai parlé, il s'est montré très favorable. En fait, c'est M. Easter qui a abordé cette question à la rencontre fédérale-provinciale-territoriale. J'ai une note manuscrite ici, de Richard Coleman, ministre de la Colombie-Britannique, qui dit « Gary, lors de la réunion fédérale-provinciale des ministres de la Justice, nous avons convenu à l'unanimité de faire avancer ce dossier ». Alors les choses bougent.

    J'ai toujours agi ainsi, en parallèle avec mon initiative parlementaire. Je crois comprendre qu'ils vont publier un rapport—peut-être dans quelques semaines, peut-être avant que nous procédions à l'étude article par article du projet de loi C-13. Ils vont de l'avant et je dois admettre qu'ils se sont montrés très favorables également.

    J'aimerais ajouter toutefois que j'ai encore l'intention de poursuivre mon initiative, simplement parce que les rouages ont bougé trop lentement. S'il est possible d'avoir enfin une loi, je veux saisir cette occasion pour Judy Peterson.

+-

    Le président: Merci, monsieur Comartin.

    Monsieur Cullen, vous avez cinq minutes.

¿  +-(0930)  

+-

    L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Monsieur Lunn, j'ai déjà vécu dans votre circonscription, alors...

+-

    M. Gary Lunn: Je le sais. Vous faisiez une sortie à chaque campagne.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Je tiens à vous féliciter de faire avancer ce dossier. Je sais ce que cela implique. Nous le savons tous, dans une certaine mesure. Le projet de loi que j'avais parrainé sur les frais d'utilisation a pris environ trois ans, alors je connais le processus à suivre pour les projets de loi d'initiative parlementaire, comme tous les députés.

    Comme Joe Comartin l'a dit, nous sommes probablement tous sympathiques à votre cause. Lorsque nous nous adressons à des ministres, nous constatons tous que les gens appuient nos efforts, mais je suis surpris qu'aucun procureur général provincial à qui vous avez parlé jusqu'à présent n'ait soulevé la question de compétence. Je crois que les avocats du gouvernement feront valoir que certaines questions de compétence sont en cause.

    Vous savez également que les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Justice travaillent également au fichier des personnes portées disparues. Ils en ont fait une priorité. En fait, ils vont bientôt publier un document en vue d'une consultation publique sur toute une gamme de sujets, y compris la compétence, la protection de la vie privée et diverses questions d'ordre juridique et opérationnel. Je suis certain que vous participerez à cet exercice.

    J'aimerais vous poser une question technique, mais je voulais dire, pour le compte rendu, que je suis préoccupé par la question de compétence.

    Ce que vous proposez ici vise à soulager les familles des personnes portées disparues. Nous comprenons votre motif et nous l'appuyons tous, j'en suis convaincu. Il est clair que le principal objectif que vous poursuivez avec la création du fichier des personnes portées disparues est d'ordre humanitaire.

[Français]

    Étant donné le motif humanitaire fondamental associé à la création d'un fichier de personnes disparues basé sur des données génétiques et le fait que celui-ci ne serait pas utilisé expressément pour mener des enquêtes criminelles ou à d'autres fins d'application de la loi, il faut se demander si le Parlement fédéral a vraiment compétence pour légiférer en cette matière.

    Par ailleurs, l'identification de restes humains, par exemple ceux d'une personne disparue, à l'aide d'un fichier de personnes disparues aurait vraisemblablement des conséquences d'ordre juridique sur des questions telles que le statut des proches parents, le testament, la propriété, les assurances, etc.

[Traduction]

    Je crois donc qu'il existe certains problèmes d'ordre juridictionnel. Le projet de loi pose aussi, sur le plan de la protection des renseignements personnels, des problèmes qui, avec un peu de chance, ne seraient pas insurmontables. J'attire votre attention, chers collègues, sur le fait que le profil d'ADN de toute personne que l'on sait avoir été victime, même si elle n'a pas été identifiée, n'est pas, sur interdiction du Parlement, inclus dans le fichier criminalistique. Le Parlement pourrait revenir sur cette décision. Même une comparaison du fichier des personnes disparues et du fichier criminalistique ne servirait pas, en fait, aux fins prévues.

    Le profil d'ADN d'un parent qui fournit un échantillon volontairement donnerait lieu à certaines préoccupations, toujours sur le plan de la protection des renseignements personnels, dont il serait utile de discuter dans le cadre de cette consultation fédérale-provinciale-territoriale et, peut-être même, lors du renvoi de votre projet de loi.

    Je ne fais que souligner ces points, monsieur le président.

    Peut-être pourriez-vous nous parler plus particulièrement de celui-là, monsieur Lunn, c'est-à-dire du fait que le Parlement a limité l'utilisation de l'ADN tiré du fichier criminalistique et des problèmes de protection des renseignements personnels auxquels donnera lieu l'utilisation d'un échantillon d'ADN fourni volontairement par un proche de la personne disparue. Cela permettrait-il d'accomplir votre mission et de dissiper les inquiétudes sur le plan de la protection de la vie privée?

+-

    M. Gary Lunn: Je suis très heureux que vous ayez posé la question, qui est d'ailleurs excellente. Elle a été soulevée hier dans le cadre de nos discussions.

    Voici ce dont il est question. On dit que le profil d'ADN est obtenu sur le lieu d'un crime. Si l'on réunit tous ces profils, sachant que certains d'entre eux sont en réalité ceux de victimes, ils ne sont pas versés dans le fichier criminalistique. On cherche à faire verser dans le fichier seulement les empreintes génétiques de criminels ou d'auteurs de crimes. Pourquoi voudrions-nous alors les verser dans le fichier des personnes disparues?

    Revenons-en à l'affaire Pickton. Quand vous réunissez ces profils d'ADN, vous ignorez lesquels n'ont pas été identifiés. Vous ne savez pas s'il s'agit de l'auteur du crime. Vous ignorez s'il y a d'autres victimes. Quand vous réunissez ces profils d'ADN sur le lieu d'un crime, vous parlez en réalité de ceux de personnes qui n'ont pas été identifiées. Donc, bien que vous ayez peut-être dit que le fichier criminalistique avait pour seul objet de réunir le profil d'ADN d'éventuels criminels, vous ne savez pas de qui ils proviennent. Ce sont des échantillons d'ADN non identifiés.

    Ils pourraient aussi inclure les profils identifiés de criminels connus, mais comme je l'ai dit, dans l'affaire Pickton, qui est probablement l'affaire la plus suivie dans toute l'histoire canadienne en matière d'ADN, il existe plusieurs profils d'ADN non identifiés.

    Pensez à Mme Peterson et au profil de Lindsey. Qu'arriverait-il si l'on comparait son profil à ceux qui ont été prélevés sur la ferme de Pickton? En fait, c'est ce qui est arrivé. La police menant l'enquête est allée voir la famille, a reçu le feu vert et a fait la comparaison. Voilà qui illustre parfaitement comment on pourrait retrouver le profil d'ADN d'une personne disparue sur le lieu d'un crime, ce qui permettrait à certaines familles de faire leur deuil. Voilà ce dont il est question.

    Pour ce qui est de la protection des renseignements personnels, je souligne qu'il s'agit d'un programme volontaire. Personne, mais alors absolument personne ne devrait être obligé ou forcé d'une façon ou d'une autre de produire un échantillon d'ADN. Nous pourrions prendre toutes les mesures qui s'imposent pour le prévenir. Le projet de loi à l'étude vise les personnes qui cherchent désespérément un parent disparu.

    Pour ce qui est des problèmes de compétence, toutes les recherches que j'ai effectuées jusqu'ici m'indiquent qu'il s'agit d'une compétence fédérale. Nous pourrions en débattre longtemps. Nous pourrions passer des mois et des années à étudier cette question—pourquoi? À mon avis, nous devrions tout simplement passer à l'action. Je ne crois pas que qui que ce soit dans les provinces vienne nous dire qu'il s'agit de leur compétence. Je conçois par contre qu'on puisse dire au gouvernement fédéral qu'il peut assumer le coût de l'analyse de l'ADN.

    Retarder l'adoption du projet de loi pour cette unique raison mettrait vraiment en doute notre rôle de législateurs. Je vous implore de ne pas opter pour cette voie. Je serais ravi d'en discuter avec les provinces d'ici à ce qu'ait lieu l'étude article par article de manière à régler les problèmes, s'il y en a.

¿  +-(0935)  

+-

    Le président: D'accord. Je vous remercie, monsieur Lunn.

    Chers collègues, je répète que, sur le plan procédural, la réunion de ce matin a pour objet de réunir de l'information, de poser des questions concernant la teneur du projet de loi de M. Lunn qui pourrait ou pourrait peut-être ne pas, selon les souhaits des membres du comité, venir modifier le projet de loi C-13 quand nous aborderons l'étude article par article. J'estime que c'est dans cette optique qu'il faut l'examiner. Nous devrons peut-être régler des problèmes de procédure à ce moment-là, discuter de problèmes juridictionnels, mais je crois qu'actuellement, il vaut mieux se concentrer sur la teneur du projet de loi que sur les détails. Pour l'instant, nous ne faisons que réunir l'information.

    Monsieur Warawa, allez-y. Vous avez cinq minutes.

+-

    M. Mark Warawa (Langley, PCC): Merci, monsieur le président.

    Moi aussi, j'aimerais remercier M. Lunn d'être venu ici aujourd'hui et le féliciter de tout le travail qu'il a fait, un travail énorme. Je lui en suis reconnaissant.

    Avant de poser une question au sujet de la compétence provinciale, j'aurais quelques observations à faire rapidement.

    Mardi dernier, c'est-à-dire il y a deux jours, nous avons accueilli un témoin expert qui nous a parlé de la banque de données génétiques du Royaume-Uni. Ce fut très instructif. J'ai été étonné d'apprendre que les préoccupations relatives à la protection des renseignements personnels, qui sont légitimes, n'ont pas été soulevés au Royaume-Uni, comme on aurait pu s'y attendre. La population appuyait en règle générale la banque de données génétiques qui est beaucoup plus volumineuse que ce que nous avons au Canada.

    Autre fait intéressant, lorsqu'il a été prié de faire des recommandations quant à ce que devrait inclure leur banque de données, ce témoin expert a laissé entendre que l'idée d'une banque de données sur les personnes disparues serait très bonne. Or, c'est justement ce que vous proposez ici aujourd'hui.

    Le témoin expert nous a également précisé qu'il existe un lien entre le profil de la personne et celui de ses proches et que les frères et soeurs ont des marqueurs génétiques très analogues. Donc, si une personne est disparue et que vous avez une banque nationale de données, il y a moyen de s'y brancher et d'apprendre qui cette personne peut bien être. Comme vous l'avez également dit, si l'on se fie à l'exemple de la ferme Pickton, il y aurait peut-être moyen également de trouver une correspondance et de découvrir l'identité de la personne grâce à des marqueurs familiaux, qui présenteraient des similarités.

    Je crois donc que vous êtes dans la bonne voie. J'appuie votre initiative. Si la volonté d'en faire une réalité, d'aider des familles et de faciliter également les enquêtes policières existe, je crois que nous sommes capables de trouver le moyen. Si, par contre, cette volonté n'est pas au rendez-vous, on trouvera le moyen de vous empêcher de faire ce que vous préconisez. Pour ma part, j'espère que nous pourrons trouver des moyens de concrétiser votre idée de manière convenable.

    Ma question concerne la juridiction provinciale. Vous avez dit que vous aviez reçu des lettres des procureurs généraux des différentes provinces. Sont-ils tous ou majoritairement favorables à ce que vous leur demandez et ont-ils soulevé la question de la compétence provinciale?

¿  +-(0940)  

+-

    M. Gary Lunn: En réponse à la dernière question—je vais commencer par celle-là—, tous les procureurs généraux appuient le projet de loi en principe, comme toutes les personnes ici présentes semblent le faire. Certains ont affirmé d'emblée qu'ils appuieraient tout de suite notre projet de loi. Un autre a dit qu'il s'engageait à lui faire franchir toutes les étapes, et ainsi de suite. C'est clair.

    La question à laquelle nul...

+-

    Le président: Monsieur Lunn, si je puis vous interrompre un instant, seriez-vous disposé à fournir copie de cette correspondance au comité?

+-

    M. Gary Lunn: Tout à fait. Nous pouvons les déposer.

    Toutefois, j'aimerais revenir à la question de juridiction, parce qu'elle semble être problématique.

    Dès 1998, il était possible de régler le problème. En effet, cette année-là, il fut question d'une loi concernant un fichier des personnes disparues et une banque de données génétiques. En fait, toute l'idée remonte au début des années 90, mais elle ne s'est pas concrétisée quand fut adoptée, en 1998, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques. Quand le projet de loi C-3 a été modifié en juin 2000, malheureusement, il n'en n'a pas été question. À nouveau, en 2002, on a fait l'examen de la loi. Un fichier des personnes disparues n'y a pas été inclus.

    Je dois également préciser à nouveau que le projet de loi C-13 fournit une autre occasion, mais qu'il est muet à ce sujet. À mon avis, il s'agit d'une question névralgique. J'en suis convaincu. J'en fait la promotion depuis quelques années déjà. Je dois avouer que le seul ministre qui a vraiment manifesté la volonté d'agir—on sait quand quelqu'un nous appuie—est l'honorable Wayne Easter. J'ai éprouvé des difficultés à obtenir l'engagement des autres ministres.

    Mais revenons au point soulevé par M. Breitkreuz. Si nous adoptons ces amendements au projet de loi C-13, puis qu'il fallait par la suite en changer certains, par exemple lors de l'étude article par article, pour dissiper certaines inquiétudes, je serais le premier à le faire.

    Cela n'empêche pas le gouvernement de poursuivre sa stratégie. Si, dans six mois ou un an d'ici, il repère une autre préoccupation, nous pouvons régler le problème. En fait, cela pourrait probablement se faire presque avec le consentement unanime, parce qu'il ne s'agit pas d'un problème politique. Cela nous permettrait de commencer dès aujourd'hui.

    Ma crainte, si nous ne profitons pas de l'occasion qui s'offre, est qu'il faille attendre un an ou deux avant d'en avoir à nouveau l'occasion. Quand la limite est-elle atteinte et faut-il agir?

    Tous les motifs d'agir sont bons. Nous adoptons, au Parlement, des tonnes de lois qui ne sont pas parfaites. Il faut y revenir et les peaufiner. Si c'est le cas ici, alors réglons le problème. Par contre, agissons dès maintenant.

¿  +-(0945)  

+-

    Le président: Monsieur Lunn, je vous remercie.

    Madame Bourgeois.

[Français]

+-

    Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Non. Ça va.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Comartin, avez-vous d'autres questions?

+-

    M. Joe Comartin: Non, je vous remercie.

+-

    Le président: Monsieur Maloney.

+-

    M. John Maloney (Welland, Lib.): Monsieur Lunn, vous parlez de bases de données analogues dans d'autres juridictions. Pouvez-vous nous dire quels pays en ont déjà?

+-

    M. Gary Lunn: J'en suis incapable. Je parlais à certains experts du domaine. À leur avis, il est possible d'élargir le concept. Je crois qu'ils faisaient allusion à divers États des États-Unis, mais j'ignore lesquels au juste.

+-

    M. John Maloney: S'il existe déjà de pareils systèmes dans d'autres juridictions, j'aimerais savoir quels problèmes, si problème il y a eu, se sont posés.

+-

    M. Gary Lunn: Oui, ce serait bon de le savoir également.

+-

    M. John Maloney: Nous n'avons pas de renseignement de cette nature?

+-

    M. Gary Lunn: Désolé, mais je n'en n'ai pas.

+-

    M. John Maloney: C'est tout, monsieur le président.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Comme il n'y a plus de questions,...

    Oh! Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: Au sujet de cette dernière question, nous avons interrogé M. Maguire alors qu'il s'apprêtait à partir. Il va nous fournir une liste des juridictions qui ont en fait le fichier.

+-

    Le président: Excellent.

    Monsieur Lunn, je vous remercie beaucoup d'être venu ici aujourd'hui. Nous saluons votre initiative.

+-

    M. Gary Lunn: Merci, monsieur le président, pour cette extraordinaire occasion de venir témoigner devant vous et d'obtenir l'appui de tous les membres du comité. Avec un peu de chance, nous pouvons ensemble régler les problèmes et nous organiser pour que le fichier devienne une réalité.

    Je vous remercie.

+-

    Le président: C'est nous qui vous remercions.

    Nous allons suspendre nos travaux pour quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de prendre place.

¿  +-(0946)  


¿  +-(0952)  

+-

    Le président: Nous allons reprendre nos travaux et accueillir le second groupe de témoins.

    Que le compte rendu précise que nous avons cinq minutes d'avance.

    Des voix: Oh, oh!

    Le président: C'est du jamais vu en cet endroit.

    Nous accueillons, du ministère de la Justice, Michael Zigayer, avocat-conseil, Division des politiques en matière de droit pénal, et Louis Davis, avocat-conseil, Section du droit administratif et constitutionnel.

    Je suis sûr que nous allons entendre parler plus des questions constitutionnelles dont nous avons parlé avec le témoin précédent, M. Lunn.

    Monsieur Zigayer, vous avez la parole.

+-

    M. Michael Zigayer (avocat-conseil, Division des politiques en matière de droit pénal, ministère de la Justice): Merci, monsieur le président.

    Messieurs et mesdames du comité, bien le bonjour.

    Question simplement de me présenter, sachez que je suis entré au ministère de la Justice en tant que substitut du procureur général en 1981. Comme vous l'avez mentionné, je suis l'avocat-conseil de la Division des politiques en matière de droit pénal du ministère de la Justice et je travaille essentiellement à élaborer la politique et les lois en matière de droit pénal.

    Plus particulièrement en ce qui concerne l'ADN, j'ai participé à la rédaction de la disposition législative sur les mandats autorisant le prélèvement d'échantillons corporels à des fins d'analyse génétique et du cadre législatif régissant le prélèvement de substances corporelles à des fins d'analyse génétique. Les Presses de l'Université de Sherbrooke ont publié un de mes papiers. Il a depuis lors été remanié et distribué plusieurs fois et il est utilisé comme matériel didactique en droit. Il est même utilisé par la magistrature de l'Alberta, la Conférence des juges de cour provinciale, le Barreau du Québec, pour n'en nommer que quelques-uns.

    Le comité sera particulièrement intéressé d'apprendre, dans le contexte du projet de loi C-13, que je travaille de concert avec l'Institut national de la magistrature à l'élaboration de manuels électroniques qui aideraient les juges à appliquer les lois en matière d'empreintes génétiques.

    Mon collègue, Lou Davis, est un avocat-conseil de la Section du droit administratif et constitutionnel du ministère. Il a fait son stage à la Cour suprême du Canada en 1976 et, en tant qu'avocat du ministère de la Justice, il est conseiller constitutionnel du gouvernement fédéral depuis 1978. Il est également l'auteur d'un ouvrage de référence en droit constitutionnel.

    Monsieur le président, le ministre de la Justice et la ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile tiennent à remercier le comité d'avoir donné au ministère de la Justice la possibilité de commenter le projet de loi C-240. De fait, ils souhaitent également remercier M. Lunn, que vous venez tout juste d'entendre, pour l'intérêt soutenu qu'il marque au fichier des personnes disparues.

    Nous aimerions commencer notre exposé de ce matin par une courte déclaration, après quoi nous répondons avec plaisir aux questions.

    L'idée de créer une banque nationale de données génétiques sur les personnes disparues suscite un intérêt croissant non seulement au Canada, mais également à l'étranger. Mardi dernier, le comité a entendu M. Chris Maguire du Royaume-Uni qui a informé le comité qu'il n'existe pas actuellement, au Royaume-Uni, de bases de données analogues. Pour sa part, cependant, il serait favorable à la création d'une pareille banque.

    C'est pourquoi, à nouveau, j'estime que nous devrions féliciter M. Lunn d'avoir soulevé la question. Il en ferait porter le crédit à Mme Peterson, mais il est impossible de nier que c'est grâce à lui que nous sommes ici aujourd'hui.

    Les ministres fédéral et provinciaux chargés des questions de justice ont manifesté leur appui au principe d'un fichier des personnes disparues créé à des fins humanitaires, faisant remarquer toutefois qu'il faudrait exécuter des travaux préparatoires consciencieux pour en assurer la plus grande efficacité possible.

¿  +-(0955)  

[Français]

    Sous la direction des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux, un groupe de travail composé de fonctionnaires de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Québec et de la Nouvelle-Écosse et des représentants des ministères de la Justice et de la Sécurité publique et de la Protection civile ainsi que de la GRC ont élaboré un document de consultation publique visant à établir s'il y a une volonté d'élaborer à l'échelle nationale un répertoire de données génétiques des personnes disparues.

    Ce document de consultation vise à connaître l'opinion de la population canadienne en ce qui concerne les questions juridiques, opérationnelles et liées à la protection de la vie privée qui sont soulevées par la création d'une banque de données génétiques relative aux personnes disparues, permettant d'identifier des restes humains.

    Ce document devrait être rendu public dans quelques semaines.

[Traduction]

    En fait, j'en ai une copie ici. Le document a été soumis à l'approbation des sous-ministres fédéral, provinciaux et territoriaux comme étape suivante du processus.

    Comme l'a mentionné tout à l'heure M. Lunn, nous espérons que le document sera publié rapidement, durant les premières semaines de mars. Nous aimerions sans aucun doute qu'il soit public avant l'étude article par article. Ce n'est pas que je veuille que vous retardiez l'étude article par article du projet de loi C-13, mais c'est ce que je préférerais.

+-

    Le président: Il y a parfois d'heureuses coïncidences.

+-

    M. Michael Zigayer: Les recommandations issues de cet exercice seront examinées par les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux. Si un fichier des personnes disparues devait être créé, il faudrait se doter d'un cadre législatif convenable qui reconnaîtrait les compétences fédérales et provinciales, qui prévoirait la protection des renseignements personnels et qui reconnaîtrait les intérêts divergents de la police, des médecins-légistes, des familles et des personnes disparues elles-mêmes. Il faudrait qu'il établisse sous quelle forme et de quelle manière se ferait le consentement des membres de la famille pour la collecte de données génétiques à partir de ce qui a appartenu à la personne disparue et des proches. Il faudrait aussi qu'il établisse la façon de procéder à la collecte, à l'analyse, à la conservation et à la protection des données génétiques. La forme précise que prendrait ce cadre législatif serait fonction de décisions prises à l'égard du modèle de répertoire.

    Pour ce qui est des dispositions précises du projet de loi C-240, il serait peut-être utile que nous soulignions quelques points.

    La banque nationale de données génétiques que le Parlement a créée dans la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques a pour objet d'identifier les récidivistes. Je vous cite l'article 3:

La présente Loi a pour objet l'établissement d'une banque nationale de données génétiques destinée à aider les organismes chargés du contrôle d'application de la loi à identifier les auteurs présumés d'infractions désignées, y compris de celles commises avant l'entrée en vigueur de la présente Loi.

    Pareil objet n'est pas très compatible avec celui d'un fichier des personnes disparues. La possibilité, plus particulièrement, d'utiliser le profil d'ADN dérivé des substances corporelles d'une personne disparue ou d'un de ses proches, même avec son consentement, pour le comparer aux données du fichier criminalistique ou du fichier des condamnés soulèverait probablement d'importantes préoccupations en matière de protection des renseignements personnels.

    Le projet de loi C-240 propose que soient comparées deux ou peut-être trois collections de profils provenant de restes humains non identifiés, de biens personnels ayant appartenu à la personne disparue ou de proches de celle-ci avec les fichiers judiciaires déjà versés dans la Banque nationale de données génétiques. Une pareille comparaison serait problématique, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, compte tenu du fait que le fichier des personnes disparues a pour objet d'identifier des restes humains non identifiés, le comité prendra peut-être note que la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques prévoit une exigence précise, à l'article 8.1, aux termes duquel tout renseignement contenu dans le fichier de criminalistique doit être rendu inaccessible une fois pour toutes s'il concerne un profil d'identification génétique établi à partir d'une substance corporelle d'une victime, même si cette victime est non identifiée. Cette disposition a été insérée dans la loi suite aux préoccupations exprimées au sujet de la protection des renseignements personnels concernant les victimes de crime.

    Fait plus important, les profils d'ADN versés dans le fichier criminalistique sont anonymes. Leur comparaison avec les profils d'ADN de restes humains anonymes du fichier des personnes disparues ne mènerait pas à l'identification des restes humains. Elle n'aiderait pas à atteindre l'objectif de la Loi.

    Un des problèmes importants sur lesquels portera la consultation et dont il faut discuter dès qu'est envisagée la création d'un fichier des personnes disparues à des fins humanitaires, est celui de la compétence. Étant donné l'objectif humanitaire, soit l'identification de restes humains anonymes, et étant donné que les enquêtes sur les personnes disparues sont faites par la police locale et que les médecins-légistes provinciaux ont juridiction sur les restes humains non identifiés, l'établissement d'un fichier des personnes disparues relèverait, à notre avis, de la compétence provinciale et, comme tel, ne tomberait pas sous le coup d'une loi du Parlement du Canada.

    Quoi qu'il en soit, il existe des moyens grâce auxquels le gouvernement fédéral pourrait aider les provinces et les territoires à mettre sur pied une banque nationale de données génétiques sur les personnes disparues. Ainsi, le ministère de la Justice pourrait travailler de concert avec ses homologues provinciaux et territoriaux à l'élaboration d'une loi uniforme qui s'appliquerait à l'exploitation de pareilles bases de données et qui faciliterait le réseautage de fichiers de personnes disparues provinciaux et territoriaux de manière à créer un fichier virtuel.

À  +-(1000)  

    Dans une certaine mesure, cette approche serait similaire à celle adoptée par les États-Unis : en effet, chaque État possède sa propre banque de données qui, elle, est reliée à une banque nationale et virtuelle de données génétiques. Au Canada, la banque nationale de données génétiques est centralisée. Elle procède à l'analyse des échantillons recueillis dans toutes les régions du pays.

    Le cadre proposé nous aiderait à établir l'état civil d'une personne, autrement dit, à définir les conséquences juridiques qu'entraînerait le fait de déclarer une personne disparue comme décédée. Cette démarche, comme vous l'expliquera peut-être plus tard mon collègue, M. Davis, a un impact sur, par exemple, les testaments et les successions. Cette question, et tout ce qui s'y rattache, relève de la compétence des provinces, celles-ci étant responsables, par exemple, de tout ce qui à trait à la propriété et aux droits civils et, généralement, de toutes les matières d'une nature purement locale ou privée dans la province.

    Le gouvernement fédéral n'est manifestement pas fondé à jouer un rôle à cet égard, puisque le droit criminel relève du fédéral et que les bases de données ne seront pas utilisées à des fins de poursuites pénales. Si c'était le cas, ce chef de compétence pourrait faire l'objet d'une loi fédérale.

    Pour terminer, la création d'un répertoire des personnes disparues demeure un objectif louable. Toutefois, à notre avis, de nombreuses questions fondamentales et complexes restent à régler, qu'elles soient d'ordre opérationnel, technique ou juridique, ou qu'elles soient liées à la protection de la vie privée. D'après le gouvernement, la mise sur pied d'un répertoire efficace consacré aux personnes disparues, un objectif que nous partageons tous, a plus de chances d'être réalisée si nous procédons par voie de consultations fédérales-provinciales-territoriales, et non par voie législative.

    Je vais m'arrêter ici.

À  +-(1005)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Zigayer.

    Monsieur Davis, avez-vous une déclaration à faire?

+-

    M. Louis Davis (avocat-conseil, Section du droit administratif et constitutionnel, ministère de la Justice): Non, monsieur le président. Comme mon collègue a abordé la question des compétences, je me contenterai de fournir des précisions aux membres du comité, s'ils souhaitent explorer le sujet plus à fond.

+-

    Le président: D'accord. Nous allons donc passer aux questions.

    Monsieur Toews, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Vic Toews (Provencher, PCC): Merci.

    Sauf votre respect, je ne vois pas quelles préoccupations concernant la vie privée pourraient être soulevées s'il y a consentement éclairé de la part de toutes les parties qui fournissent des échantillons d'ADN. Quelles préoccupations pourrait-il y avoir?

+-

    M. Michael Zigayer: Il faut tenir compte du fait que la personne disparue n'a pas donné son consentement. Vous conviendrez avec moi qu'il s'agit là d'une question grave, car les personnes disparues ne sont pas toutes des victimes. Elles ne souhaitent pas toutes être retrouvées. On a parlé, ce matin, des fugueurs. Or, il y a des personnes...

+-

    M. Vic Toews: Un instant. Je pensais que nous parlions des restes humains.

+-

    M. Michael Zigayer: Oui, mais ils ne constituent qu'une partie de l'équation. Je parle d'autre chose. Pour ce qui est des restes humains, vous avez raison. Ce n'est pas une question qui soulève de sérieuses préoccupations.

+-

    M. Vic Toews: Donc, la question des restes humains ne soulève aucune préoccupation en matière de protection de la vie privée.

    Passons à l'autre point. Qu'en est-il des préoccupations concernant la vie privée des personnes disparues? Tout le monde doit donner son consentement. Êtes-vous en train de dire que, parce qu'une personne est disparue depuis plusieurs années, il faut obtenir son consentement avant de pouvoir enclencher le processus?

+-

    M. Michael Zigayer: Ce n'est pas ce que je dis. Bon nombre des préoccupations en matière de vie privée, étant donné qu'il faudra concilier les intérêts relatifs à la protection de la vie privée et les intérêts de la société, auront...

+-

    M. Vic Toews: Et vous ne pensez pas qu'il est important de concilier les intérêts de la personne disparue depuis plusieurs années et ceux de la famille, qui se demande où elle se trouve? Les gens pourront à tout le moins la retracer, et si la personne ne veut pas qu'on communique avec elle, alors la question sera réglée.

+-

    M. Michael Zigayer: Vous allez uniquement comparer le profil d'ADN que vous avez obtenu par suite du consentement de la personne avec le profil des restes humains qui ont été trouvés. Il est peu probable qu'on s'en serve pour identifier des personnes encore vivantes.

    Le répertoire des personnes disparues regroupe, en termes simples, trois catégories de profils d'ADN : les profils établis à partir des restes humains non identifiés qui ont été retrouvés dans la forêt, en ville, ou ailleurs; les profils établis à partir d'objets personnels, comme, par exemple, une brosse à cheveux ou une brosse à dents; et les profils établis à partir d'échantillons fournis par un parent .

    L'intérêt relatif à la protection de la vie privée varie dans chaque cas. Cet intérêt est pratiquement inexistant, voire nul, dans le cas de restes humains qui sont trouvés ou abandonnés. Il doit, par contre, être protégé dans le cas des personnes qui acceptent de fournir volontairement des échantillons de substances corporelles pour aider à identifier un parent décédé. Le projet de loi de M. Lunn reconnaît ce fait, puisqu'il exige le consentement de la personne.

    Toutefois, M. Maguire vous a parlé, l'autre jour, des liens qui ont été établis grâce à l'appariement des empreintes génétiques, le profil d'ADN d'un membre de la fratrie ayant permis, dans un cas, d'identifier le contrevenant.

    Cette question n'a pas été examinée en profondeur. C'est là un nouvel aspect de l'analyse et de la technologie de l'ADN. C'est un point qu'il faudrait aborder lors des consultations publiques.

    Je m'excuse de prendre tellement de temps.

+-

    M. Vic Toews: Ce n'est pas grave. Je voudrais poser une question très brève, car je sais que mon temps est presque écoulé.

    Vous avez dit que cette compétence relève en quelque sorte des provinces. Si le ministère de la Justice avait su faire preuve de la même ingéniosité dans le cas du registre des armes à feu... On a l'impression qu'il cherche par tous les moyens à se dégager de ses responsabilités. En fait, il s'agit tout simplement d'une question de coûts. Je le sais, parce que j'étais procureur général à l'époque. Le gouvernement fédéral a tout simplement refilé un programme aux provinces pour éviter d'en assumer les coûts. C'est aussi simple que cela.

    Avant d'accepter le fait qu'il n'y a pas, comme vous le dites, de problème d'ordre constitutionnel, j'aimerais voir les avis qu'a reçus le ministre à ce sujet. Autrement, je ne peux accepter ce que vous dites.

À  +-(1010)  

+-

    Le président: Je ne sais pas si nous avons le temps de nous pencher là-dessus aujourd'hui, mais il y a, ici, un spécialiste des questions constitutionnelles.

+-

    M. Vic Toews: Non, je veux voir ce qu'ils ont dit au ministre, pas les arguments qu'on leur a dit d'invoquer ici aujourd'hui.

    Merci.

+-

    Le président: Il est sur place. Il y a, ici, un spécialiste des questions constitutionnelles qui vient du ministère de la Justice. Nous pouvons peut-être entendre ce qu'il a à dire.

    Monsieur Davis, avez-vous des commentaires à faire?

+-

    M. Louis Davis: Tout ce que je peux dire, c'est que, d'après ce que j'ai constaté jusqu'ici, le ministère de la Justice ne fournit pas d'avis au comité. Toutefois, comme on l'a mentionné plus tôt, le comité a le pouvoir d'entendre le point de vue d'experts indépendants.

    Par ailleurs, sauf votre respect, on a souvent tendance, au cours de discussions au Parlement, de contourner les faits ou de ne pas les expliquer clairement. Je pourrais peut-être profiter de cette occasion-ci pour clarifier un point ou deux.

    D'abord, je suis d'accord, à bien des égards, avec ce que dit M. Lunn. Il y a toutefois des questions qui, en fait, ne constituent pas un enjeu.

    M. Lunn a dit que, d'un point de vue constitutionnel, si on voulait comparer les empreintes génétiques d'un enfant disparu, par exemple, à celles contenues dans une banque fédérale déjà établie, on pourrait le faire sans problème aucun, et je suis plutôt d'accord avec lui. Le ministère de la Justice ne dit pas que cette question, entre autres, soulève un conflit de compétence.

    Je tiens à préciser, toutefois, que dans les cas où il peut y avoir conflit de compétence, des accords de collaboration peuvent être conclus entre le fédéral et les provinces. Cette question fait d'ailleurs présentement l'objet de discussions. Il y a donc de nombreuses options qui s'offrent à nous. Or, le fait qu'elles existent ne signifie pas qu'il y a un problème, mais que les autorités provinciales et fédérales doivent arriver à s'entendre pour qu'un programme fonctionne. Si, pour une raison ou pour une autre... Les provinces ont peut-être des raisons légitimes d'agir comme elles le font, mis à part... Je respecte le point de vue des députés du Bloc, même si leurs motifs ne sont pas partagés par d'autres. Toutefois, il y a également d'autres provinces qui ont des préoccupations légitimes à ce sujet.

    Permettez-moi de vous donner un exemple. Si l'on veut établir une banque de données composée d'échantillons prélevés sur des restes humains et non comparer l'ADN avec les empreintes génétiques contenues dans une banque de données fédérale existante, on peut très bien le faire si, comme l'a indiqué M. Lunn—et je suis d'accord avec lui—tout se fait sur une base volontaire. Encore une fois, nous ne contestons pas ce qu'il dit. Toutefois, comment allons-nous verser les échantillons d'ADN prélevés sur des restes humains dans la banque de données? Qui va s'en occuper? La collecte des restes humains est assurée, dans une large mesure, par les policiers locaux et les coroners. Or, ces personnes relèvent de la compétence des provinces. Si on veut les obliger, légalement à envoyer les échantillons d'ADN prélevés sur des restes humains à une banque quelconque, il faut obtenir la collaboration de la province. C'est- là un détail technique.

    Comme l'a dit le président, ce sont des points qui peuvent tous être réglés, si le comité veut se concentrer sur le sujet en tant que tel. Je ne dis pas, pour ce qui est des compétences, qu'il y a des obstacles qui ne peuvent être surmontés. Nous ne faisons qu'énoncer une vérité d'évidence, à savoir qu'il y a des intérêts provinciaux qui doivent être pris en compte, et que les provinces et le gouvernement fédéral sont en train d'examiner diverses options.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Marceau, pour cinq minutes.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Merci, maîtres, d'être venus nous présenter votre point de vue. Vous étiez là tout à l'heure. J'ai souligné la question juridictionnelle, évidemment. Vous y avez répondu. Si vous avez une opinion juridique écrite sur ce sujet précis, sur des problèmes de juridiction potentiellement soulevés par le projet de loi et les amendements de Gary Lunn, j'aimerais bien pouvoir la lire à tête reposée.

    D'après ce que je peux lire, il y a un grand intérêt au sein du comité pour une banque de données pour les personnes manquantes. Je vous dirais que s'il n'y a pas de problèmes de juridiction, peu importe ce que voudront nos collègues d'en face, cela passera et arrivera. Je ne demande qu'à être convaincu qu'il n'y a pas de problèmes de juridiction. Je l'ai annoncé à M. Macklin, je vais voter en faveur. Les conservateurs voteront aussi en faveur. Pour avoir eu des conversations informelles avec le NPD--et je ne veux pas parler au nom de son député--, il semblerait que ce parti soit à tout le moins favorable au principe.

    Partant de ce principe, partant de la prémisse qu'il y a un intérêt pour cela et pour le faire rapidement... Même M. Cullen a dit que s'il faut trois ans pour adopter un projet de loi privé, nous nous lassons nous-mêmes. En tant que députés, nous voulons avoir un input, nous voulons faire une différence. Nous faisons de la politique pour faire une différence, et M. Lunn ferait une différence dans la vie de plusieurs personnes si son projet de loi était adopté.

    S'il y a un problème de juridiction, y a-t-il une façon de formuler les amendements ou le projet de loi de sorte, premièrement, que la banque d'ADN pour personnes manquantes puisse fonctionner et, deuxièmement, qu'on puisse éviter tous ces problèmes de juridiction et, troisièmement, que cela puisse être fait maintenant, alors qu'il y a une petite occasion qui se présente et qui s'appelle: « on travaille sur une banque de données d'ADN »?

À  +-(1015)  

+-

    M. Louis Davis: Je pense que oui, en ce sens que M. Lunn a rédigé un tel projet de loi. Cependant, pour retourner à ce que j'ai essayé d'expliquer plus tôt, le problème est le suivant. On peut créer un système volontaire, ce qui signifie qu'on créera une banque de données, mais comment va-t-on s'assurer que les données requises y seront entrées? Pour cela, il faut la coopération des provinces. Si cela devait se produire, de façon pratique et juridique, on n'aurait pas de problèmes. Si les provinces disent toutes oui, qu'elles aiment cette approche et qu'elles donnent l'assurance que les données vont aller dans la banque d'ADN qui sera créée, il n'y a pas de problèmes. Tant que c'est volontaire, qu'il n'y a pas de pression de notre part ni de mesure législative afin de forcer...

+-

    M. Richard Marceau: J'aime votre approche pratique, maître Davis. Je ne suis pas policier, mais il me semble que si je l'étais et que je trouvais le corps de quelqu'un quelque part, mon travail consisterait d'abord à essayer de résoudre ce problème. Deuxièmement, cela paraît bien si je résous le crime. Non seulement c'est mon travail, mais meilleure est ma performance et meilleures sont mes chances, humainement, d'augmenter... Alors, si j'avais la possibilité d'y arriver en utilisant volontairement une ressource, je le ferais, si j'étais policier.

    C'est la même chose si on se met dans la peau d'un ministre provincial de la Justice qui doit faire un rapport sur l'efficacité de sa police, par exemple, ou dans la peau d'un maire qui doit faire la même chose au sujet de la police municipale. Si on leur offre la possibilité d'utiliser un tel outil, y a-t-il une raison humaine, policière, politique ou légale, selon vous, qui ferait en sorte que l'une de ces personnes refuserait de l'utiliser?

+-

    M. Louis Davis: Je ne peux pas parler pour les provinces, mais je pense, d'après ce que mon collègue a dit, que les provinces sont impliquées dans des discussions. Bien qu'il me semble que tout le monde soit d'accord que ce serait outil valable, il y a des différences. Je ne suis pas un expert, mais je sais ce que j'ai lu. Il y a des différences sur des questions de technologie.

    De quelle sorte d'ADN s'agit-il? Il y a différentes sortes d'ADN. Je ne suis pas du tout un expert pouvant faire des comparaisons, mais il faut que ce soit la même sorte d'ADN. Certaines provinces, pour diverses raisons, préfèrent une sorte à une autre. Il y a des points de vue différents au sujet de les opérations relatives à la banque. Par exemple, combien de temps va-t-on garder ces données? C'est une question qui peut tomber dans la juridiction provinciale.

    Il faut avoir une coopération, un consensus. C'est à cause de cela, bien que tout le monde soit d'accord que ce serait une bonne chose et que tout le monde veuille le faire, que je ne peux pas dire que les questions de juridiction ne sont pas pertinentes. Elles ne sont pas un obstacle, mais il s'agit de résoudre ces questions d'une façon pratique.

À  +-(1020)  

+-

    M. Richard Marceau: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Zigayer, avez-vous quelque chose à ajouter?

+-

    M. Michael Zigayer: Oui, j'ai quelque chose à ajouter à quelque chose que M. Davis a mentionné il y a quelques minutes. Il y a la question de la collecte des échantillons. Nous avons parlé ce matin du fait qu'il s'agirait d'échantillons obtenus sur consentement ou d'échantillons tirés des restes humains qui sont trouvés.

    La question est de savoir qui va le faire. M. Davis et moi avons déjà parlé du fait que c'est la police locale qui fait les enquêtes. Vous avez dit dans votre exemple que c'est la police locale qui trouve un corps et que c'est le coroner provincial qui va s'occuper de cette situation. Dans le projet de loi, on dit que c'est le commissaire de la GRC qui va aller demander des échantillons à la famille. Mais ce n'est pas son rôle, dans la province de Québec, de faire des enquêtes de ce genre.

    Plus important encore, vous avez sans doute remarqué que dans la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, on ne parle pas de la collecte mais simplement de l'analyse, de l'entreposage et de la comparaison entre des profils génétiques tirés soit des personnes condamnées ou des sites où il y a eu des crimes. Nous avons mis dans le Code criminel toute l'autorité pour obtenir les échantillons, de même que la procédure qui régit la collecte elle-même, le fait que cela doit être fait dans des situations où on vise à protéger les intérêts publics, etc.

    Je soulève une autre préoccupation qu'on pourrait avoir face au projet de loi C-240 et je vous fais part d'une autre raison pour dire qu'il y a un rôle pour les provinces là-dedans. Ce sont les provinces qui gèrent la police locale et les coroners. En affirmant que nous sommes d'accord pour la création d'une banque de données pour les disparus, il faut aussi reconnaître qu'il y a un intérêt provincial là-dedans, un intérêt familial et d'autres intérêts. Ce n'est peut-être pas

[Traduction]

    —et le mot est peut-être mal choisi—prématuré,

[Français]

parce que nous sommes sur le point de faire de publier ce document de consultation qui pose des questions. Comme mon collègue l'a dit,

[Traduction]

    est-ce qu'on utilise de l'ADN mitochondrial ou de l'ADN nucléaire? Ce sont deux choses différentes. Allez-vous utiliser l'ADN nucléaire uniquement pour des raisons de coûts? La question est importante, et il faudra la poser.

    Nous proposons un délai de 90 jours pour que le public puisse répondre. À mon avis, les procureurs généraux des provinces n'ont pas encore examiné le volet compétences. Ils appuient tous le principe de la chose. Mais une fois que la question sera posée, ils vont s'y attaquer.

À  +-(1025)  

[Français]

+-

    Le président: Soyez bref, monsieur Marceau.

+-

    M. Richard Marceau: J'aimerais faire deux commentaires sur le dernier point soulevé: le document de consultation. Bien que j'appuie le projet de loi C-13, je ne suis pas très à l'aise face au fait qu'on aurait très bien pu attendre la révision globale de ce document. Si vous voulez des changements avant cette révision globale, vous êtes prêts à les faire, la preuve étant que nous travaillons sur le projet de loi C-13 et qu'on en a parlé régulièrement autour de cette table. C'est une première chose.

    Deuxièmement, tenons pour acquis qu'il y a de l'intérêt. Je sens même qu'il y a une volonté d'aller dans ce sens. Dans le projet de loi C-13, par exemple, c'est le commissaire de la GRC qui dit d'aller chercher un échantillon d'ADN, alors que dans certaines provinces, c'est le coroner. Compte tenu des ressources immenses dont vous disposez et de la présence d'avocats très compétents du ministère de la Justice, seriez-vous en mesure, d'ici l'étude article par article, de nous faire des suggestions pour faire en sorte que le but visé par M. Lunn puisse cadrer parfaitement avec le projet de loi C-13? Comme la volonté est là, cela va se faire. Je vous dis simplement que nous devrions travailler ensemble pour le faire correctement, parce que, selon moi, cela va se faire cette fois-ci.

+-

    M. Michael Zigayer: Premièrement, M. Lunn et moi, nous nous sommes rencontrés pour la première fois hier. Dans un intervalle de cinq minutes, alors que nous attendions les autres personnes qui devaient se joindre à nous, nous avons regardé brièvement son projet de loi et nous avons identifié deux ou trois petits changements qui pourraient l'améliorer. Alors, il y a une volonté de coopération. À mon avis, les ministres appuient également le principe de ce projet de loi. Ce qui est important, c'est la façon de faire ce que l'on veut faire.

    Deuxièmement, pourquoi le projet de loi C-13 a-t-il été présenté maintenant plutôt que d'attendre la révision parlementaire qui sera faite plus tard cette année? La raison honnête et claire est que pour les procureurs généraux des provinces, les amendements contenus dans le projet de loi C-13 sont très importants. Certains ont fait l'objet de demandes depuis 2001. Nous avons fait des consultations, en 2002, sur les modifications voulues par les procureurs généraux des provinces. Entre le moment où nous avons reçu les demandes de modification, il y a eu les événements du 11 septembre aux États-Unis. Nous avons donc dû travailler à la rédaction du projet de loi C-36 et au projet de loi sur le crime organisé, qui était à l'étude en même temps, ce qui a retardé un peu les choses. Depuis 2002, nous ne sommes pas les seuls à avoir des projets de loi d'intérêt public qui devraient être à l'étude. Nous avons attendu jusqu'à récemment pour vous soumettre ces propositions. Les députés ne sont donc pas les seuls à devoir attendre pour que leurs projets soient soumis pour étude.

+-

    Le président: Merci beaucoup, messieurs Zigayer et Marceau.

    Nous passons maintenant à M. Comartin.

[Traduction]

+-

    M. Joe Comartin: Je vais en fait céder mon temps de parole à M. Lunn, puisque je veux entendre ce qu'il a à dire.

    Je voudrais poser une seule question. Allons-nous avoir l'occasion de rencontrer les témoins à nouveau pour discuter du projet de loi C-13, ou est-ce la dernière fois qu'ils comparaissent devant nous?

+-

    Le président: Nous ne prévoyons pas, pour l'instant, reconvoquer les représentants du ministère, sauf si le comité l'exige. Nous pouvons toujours accepter de le faire si nous le jugeons nécessaire, si nous voulons leur poser d'autres questions.

+-

    M. Joe Comartin: J'en ai, mais je vais céder mon temps de parole à M. Lunn. Nous verrons ensuite s'il y a lieu de reconvoquer les témoins.

+-

    Le président: D'accord.

    Monsieur Lunn.

+-

    M. Gary Lunn: Merci beaucoup, monsieur le président.

    J'ai quelques brèves questions à poser.

    Je tiens à revenir sur ce qu'a dit mon collègue, M. Marceau. Je suis tout à fait disposé à accepter des amendements qui vont contribuer à renforcer le projet de loi. En fait, il y a environ deux ans, quand nous avons commencé à nous pencher sur la question, nous avons communiqué avec M. Sigayer pour avoir des renseignements, et il nous a été d'une grande utilité.

    Vous voulez savoir quel type d'ADN doit être utilisé: je dirais celui qui donne des résultats. C'est aussi simple que cela. Nous voulons être en mesure de faire des renvois entre les banques de données nationales pour que les échantillons d'ADN qui se trouvent dans ces banques correspondent au genre d'échantillons qui nous voulons utiliser.

    Pour ce qui est de savoir qui s'occupe de la collecte, je crois comprendre qu'il pourrait y avoir des problèmes au niveau du libellé et de la rédaction, car ce ne sont pas toutes les provinces qui... cette responsabilité ne relève pas du commissaire de la GRC en Ontario et au Québec. Je suis tout à fait disposé à examiner la procédure à suivre dans ce cas-ci.

    Si cela devait nous empêcher d'aller de l'avant avec le projet de loi, et je ne crois pas, en fait, que la question de compétence va... Au pire, les membres de la famille qui acceptent volontairement de fournir des échantillons d'ADN pourraient se rendre à un laboratoire indépendant, faire faire les prélèvements, payer les frais exigés et soumettre les échantillons à la banque nationale pour que l'on procède à une vérification de concordance. Nous ne devons pas perdre notre objectif de vue. Si cela constitue un obstacle, je suis prêt à me pencher là-dessus.

    Si vous avez des suggestions à faire au sujet du libellé de cette disposition-ci ou d'une autre, je vous demanderais de les faire parvenir au comité, parce que nous visons tous, ici, le même objectif.

    Encore une fois, merci de vos commentaires.

À  +-(1030)  

+-

    Le président: Une réponse.

+-

    M. Michael Zigayer: Je tiens à préciser que la banque nationale de données génétiques utilise l'ADN nucléaire aux fins d'analyses. Dans le cas du fichier criminalistique, nous utilisons l'ADN nucléaire, aux fins d'enquête, pour intenter des poursuites.

    L'ADN mitochondrial est utilisé quand les échantillons commencent à se dégrader. C'est l'ADN qu'on a utilisé, si je ne m'abuse, quand on a découvert les restes de la famille du tsar. On a utilisé l'ADN mitochondrial pour vérifier s'il s'agissait bel et bien de la famille du tsar. Ils ont comparé les échantillons avec ceux du prince Philip, qui est un parent de l'ancien tsar.

    C'est une question qui pose problème. Doit-on utiliser les deux types d'ADN? Cela entraîne des coûts. On ne peut comparer les deux ensemble. Encore une fois, ce sont des facteurs qui doivent être pris en compte par ceux qui défrayent la note.

+-

    M. Gary Lunn: Il me semble que l'ADN nucléaire coûte moins cher. Si c'est le type d'ADN que l'on recueille pour les banques de données nationales, c'est celui qu'on doit utiliser. Toutefois, ce sont les experts techniques qui doivent décider. Ce n'est pas à nous de prendre cette décision.

+-

    Le président: Merci.

    Est-ce tout, monsieur Lunn?

+-

    M. Gary Lunn: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Il vous reste une minute, monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: Je vais l'utiliser.

    Qu'en est-il de l'affaire Milgaard-Fisher? Nous avons été obligés de revenir plus de vingt ans en arrière. On a utilisé l'ADN nucléaire dans ce cas-là, n'est-ce pas?

+-

    M. Michael Zigayer: Je n'en suis pas sûr, mais je pense que oui.

+-

    M. Joe Comartin: C'est donc un problème relativement mineur.

    Je m'explique. L'Ontario et le Québec utilisent à l'heure actuelle l'ADN nucléaire, n'est-ce pas?

+-

    M. Michael Zigayer: Pour les enquêtes et les poursuites au criminel, on utilise, de manière générale, l'ADN nucléaire.

+-

    M. Joe Comartin: Le ministère a-t-il préparé u un avant-projet de loi, une loi-type, qu'il pourrait soumettre aux provinces?

+-

    M. Michael Zigayer: Non. C'est quelque chose que l'on pourrait faire. Lorsque les consultations fédérales-provinciales ont été lancées, des représentants des provinces et des territoires se sont réunis, à Ottawa, dans le but de préparer un document. Nous comptons le rendre public et recueillir les points de vue des Canadiens. S'ils l'appuient, nous allons entreprendre l'élaboration d'un texte standard, si je peux m'exprimer ainsi, d'un cadre législatif uniforme pour assurer une certaine cohérence, avant de décider où entreposer des échantillons.

    Je n'écarte pas l'idée d'entreposer les échantillons dans la banque nationale de données génétiques, à Ottawa. J'ai cité, en exemple, le modèle américain. Aux États-Unis, ce sont les laboratoires régionaux qui s'occupent des analyses. Ils conservent les substances corporelles et le produit—le profil d'ADN—sauf qu'ils transfèrent les données relatives aux échantillons d'ADN, et c'est tout ce qu'il faut pour vérifier la concordance, vers un ordinateur central. Donc, si une personne était portée disparue à Terre-Neuve et que des restes humains étaient trouvés en Colombie-Britannique, on pourrait déterminer le sort malheureux qu'a connu la personne de Terre-Neuve en comparant les profils d'ADN que contient le fichier des personnes disparues.

+-

    M. Joe Comartin: C'est ce qu'essaie de faire M. Lunn : mettre sur pied une banque nationale de données pour que les provinces, au fur et à mesure qu'elles participent au programme, puissent y intégrer les données qu'elles ont compilées et effectuer des comparaisons. C'est ce que prévoit le projet de loi qu'il a déposé. Il mettrait ce processus en branle.

À  +-(1035)  

+-

    M. Michael Zigayer: Le projet de loi de M. Lunn modifierait la loi qui régit la banque nationale de données génétiques dans le but de lui donne cet objectif à caractère humanitaire. Je ne parle pas au nom des responsables de la banque nationale de données génétiques, mais je crois comprendre que cette démarche présente certains défis qui peuvent sans doute être relevés.

    Reste toutefois à savoir qui va s'occuper des analyses. Les autorités régionales? Il faut se poser la question.

+-

    Le président: Merci, monsieur Comartin.

    Monsieur Cullen, vous avez cinq minutes.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Merci, monsieur le président.

    Merci, monsieur Zigayer et monsieur Davis.

    J'aimerais poser quelques questions sur le fichier des personnes disparues, ou son fonctionnement. Concernant les compétences, je sais que M. Lunn a présenté un projet de loi qui traite du sujet, mais il faudra attendre un certain temps avant qu'il ne soit déposé au Parlement. Il a également proposé quelques amendements qui visent à incorporer les principes qu'il défend au projet de loi. Car c'est de cela dont il est ici question.

    Le gouvernement estime que nous devrions tenir des consultations fédérales-provinciales-territoriales sur les points que vous avez abordés. Il se peut que, une fois les consultations terminées, le projet de loi de M. Lunn se retrouve devant la Chambre et que nous soyons mieux fixés.

    Supposons, toutefois, que les choses ne se déroulent pas de cette façon, et j'espère que ce ne sera pas le cas, que le comité adopte des amendements qui incorporent certains des principes mis de l'avant par M. Lunn, que d'autres modifications sont apportées, que le projet de loi finit par être adopté par la Chambre et le Sénat, et que vous arrivez ensuite à la conclusion que le projet de loi n'est pas constitutionnel, qu'il ne peut être mis en oeuvre parce qu'il soulève des questions de compétence. Que va-t-il se produire? Va-t-on essayer de faire en sorte que les dispositions soient déclarées nulles et sans effet et, si oui, qui va entreprendre cette démarche? Ou est-ce que ces dispositions vont tout simplement rester telles quelles dans la loi, jusqu'à ce que une province ou un territoire accepte de les appliquer?

    Pouvez-vous nous parler un peu des conséquences qu'un tel geste pourrait avoir?

+-

    M. Louis Davis: Certainement.

    Le tout est fonction du libellé et des détails. Si les parlementaires optent pour cette politique fédérale, il n'est pas difficile d'imaginer que le libellé du projet de loi fédéral pertinent pourrait expressément préciser que l'application se ferait avec l'accord des provinces. Naturellement, il s'agirait là d'une condition régissant l'application du projet de loi sur le plan pratique, de manière à ce que l'aspect constitutionnel soit pris en considération, si je peux m'exprimer ainsi. Si une province ne veut pas collaborer et souhaite adopter une autre solution, il va sans dire qu'au moins cette province ne sera pas visée, et il pourrait y en avoir d'autres. C'est un scénario possible.

    Voici un autre scénario. Un tel accord pourrait être exclu du libellé; naturellement, la banque nationale de données génétiques deviendrait une coquille vide, et les provinces pourraient volontairement l'alimenter si elles le souhaitaient. Il est inutile de préciser expressément un tel accord, mais il n'en demeure pas moins que l'application sera impossible sans la participation des provinces. Cela ne veut pas dire que ce serait inconstitutionnel; le tout sera simplement sans aucun effet réel.

    Je répète et j'essaie de faire comprendre que la question des compétences porte vraiment autant sur les problèmes que sur les options et la collaboration. À mon avis, il s'agit presque de déterminer ce qui doit venir en premier. Selon certains, nous devrions peut-être élaborer le système dans un cadre législatif, ce qui pourrait par la suite être appliqué avec la collaboration nécessaire. Par contre, comme l'a proposé, je pense, mon collègue, on consulte habituellement les provinces pour convenir d'un mécanisme qui constitue le meilleur outil pour s'attaquer à la situation. Par la suite, le projet de loi est libellé en fonction de ce consensus.

    Ce sont les choix sur le plan des politiques, mais je ne voudrais pas vous quitter en vous laissant l'impression, comme le reflétaient, je pense, les propos que j'ai entendus de la part de M. Toews au début—que le tout est impossible en raison de certains obstacles sur le plan des compétences. Ce n'est pas le cas. Il existe bel et bien des options, et les provinces ont manifesté leur intérêt. Il s'agit de trouver la meilleure solution pour faciliter la collaboration avec elles.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Donc, selon vous, si nous ajoutions des dispositions rendant le tout conditionnel—, ce qui, selon vous, découle de la nécessité d'obtenir la collaboration des provinces et des territoires—, le projet de loi contiendrait des principes qui seraient inapplicables faute d'accord avec les parties. Les principes seraient intégrés au projet de loi, mais celui-ci ne serait pas applicable, selon vous, jusqu'à ce que ces difficultés soient aplanies.

    Pour m'aider à comprendre la question des empreintes génétiques et du respect de la vie privée, j'aimerais prendre quelques exemples. Prenons l'exemple d'un jeune fugueur porté disparu depuis dix ans. Les membres de sa famille sont disposés à offrir leurs empreintes génétiques pour qu'elles soient comparées à ce qui figure dans la banque de données. On découvre que, deux semaines auparavant, les empreintes génétiques de ce jeune, qui est peut-être maintenant dans la mi-vingtaine, ont été prélevées sur le lieu d'un crime. Que se passe-t-il?

    Mon deuxième exemple est le suivant : un membre de la famille est prêt à offrir ses empreintes génétiques pour qu'elles soient comparées avec celles contenues dans la banque de données éventuelle. Que se passe-t-il si l'on découvre que les empreintes génétiques de cette personne ont été prélevées sur le lieu d'un autre crime. Cette personne n'a peut-être pas commis le crime, mais le lien a pu être établi grâce aux empreintes génétiques. Même si elle a autorisé volontairement le prélèvement, peut-elle renoncer à ses droits en matière de protection de la vie privée?

À  +-(1040)  

+-

    M. Michael Zigayer: En décembre 1998—je pense—, lorsque le projet de loi C-3 a été examiné au Sénat, la Cour suprême du Canada a rendu son jugement dans l'affaire Arp, qui portait sur le consentement et le degré de consentement nécessaire dans le cadre d'une enquête.

    On soupçonnait que M. Arp, qui habitait la Colombie-Britannique, avait commis un crime. Il s'est soumis volontairement à un prélèvement de substances corporelles à des fins d'analyse génétique et n'a pas été accusé de ce crime particulier. Cependant, on a conservé ces échantillons et le profil d'identification génétique. Quelques années plus tard, le même M. Arp a été impliqué dans un autre crime, et ce profil que les autorités avaient obtenu antérieurement a servi dans les poursuites pour cette deuxième affaire.

    La Cour suprême a fait valoir que M. Arp n'avait pas autorisé l'utilisation de ce profil et qu'il n'avait pas mis une limite à son consentement. C'est donc une question dont vous devez tenir compte dans l'élaboration du projet de loi. C'est la nature de cette renonciation ou de ce consentement qui est très importante. Par conséquent, si mon frère ou l'un de mes enfants est porté disparu et si je veux recourir à la banque nationale de données génétiques, mais si je crains, ce faisant, d'être inculpé d'un autre crime, que je pourrai commettre ou que j'aurais pu commettre, je suppose que je pourrais donner mon consentement pour que mes empreintes génétiques ne soient utilisées qu'afin d'identifier mon frère ou mon enfant disparu.

    Je ne vous dis pas que j'ai commis un crime ou que j'ai l'intention d'un commettre un, mais il n'en demeure pas mois que cela est possible. En fait, je me demande s'il n'est pas dans votre intérêt sur le plan de la protection de la vie privée de conserver le contrôle sur l'usage de vos données génétiques afin qu'elles ne soient pas utilisées publiquement. Je pense que M. Rondinelli—

+-

    L'hon. Roy Cullen: Qu'en est-il du fugueur?

+-

    M. Michael Zigayer: Le fugueur impliqué dans le crime? Je suppose qu'il n'est pas la victime mais l'auteur du crime et que nous avons pu établir le lien. Ses empreintes génétiques ont pu être prélevées sur le lieu du crime. Il est un suspect, et comme il est possible de comparer l'information du fichier des personnes disparues avec les données du fichier de criminalistique, nous pouvons établir qu'il est un suspect dans ce crime particulier.

    C'est un point qui est souligné à mon avis. Je ne veux pas vous faire part de mon opinion à cet égard, mais il s'agit d'une question qui est soulevée et qui fera l'objet de consultations fédérales-provinciales.

À  +-(1045)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Cullen.

    Monsieur Moore, vous disposez de cinq minutes.

+-

    M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC): Merci.

    Il me semble simplement que, si la volonté politique était acquise, vous seriez en train de nous expliquer les modalités d'application plutôt que de justifier pourquoi cela est impossible. Je sais que ce n'est pas ce que vous avez dit, mais comme l'a souligné M. Breitkreuz, nous nous sommes récemment rendu compte que le registre des armes à feu comportait de réels problèmes en matière de compétences provinciales. Et il y a maintenant la question du programme national de garde d'enfants.

    Ces dossiers ont été controversés. Celui-ci ne le serait nullement. Chaque province a déjà fait parvenir à M. Lunn des lettres d'appui pour indiquer sa participation. Je me demande donc pourquoi nous attendons. Dans les témoignages entendus l'autre jour, nous avons appris que des policiers ont donné des échantillons à des fins d'analyse génétique pour les exclure de la liste des suspects lorsque leurs empreintes génétiques sont prélevées sur le lieu d'un crime, ce qui arrive souvent. Cependant, ils craignaient et ne voulaient pas que ces empreintes soient utilisées lors d'une recherche de paternité. On a donc trouvé rapidement une façon d'exclure ces échantillons.

    Par conséquent, si l'on craint vraiment que... Dieu merci, nous avons obtenu un échantillon et l'auteur du crime a été trouvé. Cependant, je me demande pourquoi il semble y avoir absence de volonté politique. Pourquoi ne voulons-nous pas aller de l'avant sans tenir compte de ces légers problèmes sur le plan des compétences?

    En ce qui concerne mon autre point, je ne vois pas où se trouvent les problèmes en matière de protection de la vie privée. D'une part, vous avez des personnes qui sont prêtes à donner leur empreinte génétique pour retrouver leur enfant ou un parent disparu. Il ne semble pas y avoir de problème à cet égard. D'autre part, la personne recherchée est peut-être décédée, ce qui règle le problème au chapitre de la protection de la vie privée, ou encore elle est encore vivante mais son profil d'identification génétique ne figure peut-être pas dans la banque de données. Il serait donc uniquement possible d'établir un lien avec les personnes qui n'ont aucun problème en matière de protection de la vie privée parce qu'elles sont décédées.

    Vous pouvez peut-être répondre à mes interrogations sur ces deux aspects.

+-

    M. Michael Zigayer: Je le ferai avec plaisir. Il existe une volonté d'aller de l'avant. Ce n'est qu'une question de choix du moment.

    Sur le mécanisme que nous avons examiné, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux ont appuyé le principe, sous réserve qu'ils puissent examiner les répercussions sur les plans opérationnel et juridique. Pour aller de l'avant, il faut notamment consulter les Canadiens et les partie intéressées. Le document de consultation contenait 14 questions distinctes. Il s'agit d'un document très détaillé, et je suis sûr que, lorsqu'il sera publié, vous en recevez un exemplaire et pourrez constater les différentes questions et problèmes soulevés.

    Nous n'avons pas dit qu'il y a absence de volonté. Cette volonté existe, mais il faut également tenir compte du fait que nous collaborons avec les provinces et les territoires dans cette initiative. Si le document de consultation est transmis au début de mars et si nous dégageons les conclusions 90 jours plus tard, nous serons rendus en juin. C'est le mois où le Parlement ajourne. En théorie, nous pourrions soumettre nos conclusions au Parlement cet automne. Il pourrait s'agir du projet de loi C-240 avec des amendements. Les autorités fédérales pourraient s'engager à collaborer avec leurs homologues provinciaux et territoriaux pour élaborer le projet de loi nécessaire.

    Pour faciliter le tout, il faudrait peut-être que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux adoptent des projets de loi. Comme M. Davis, mon collègue, l'a souligné, si nous le construisons, ils y viendront, comme dans le film...

    Une voix: Champs de rêves.

    M. Michael Zigayer: Champs de rêves. Je me fais vieux. Ma mémoire flanche.

    Si nous élaborons un mécanisme législatif fédéral, le Parlement pourra s'en charger. Comme M. Davis l'a souligné, lorsque les provinces adopteront leur loi et pourront participer, les progrès seront très rapides. L'intérêt est peut-être grand en Colombie-Britannique. J'ignore si l'intérêt est aussi grand dans les autres provinces. Mais c'est certainement une autre façon de faire les choses.

    Nous avons indiqué qu'il y avait une volonté. En règle générale, il faut solliciter l'avis des intéressés. Nous n'avons pas encore demandé ni obtenu l'opinion de l'Association du Barreau canadien, du Barreau du Québec ou de la commissaire à la protection de la vie privée—j'ignore si elle a fait connaître ses commentaires à cet égard.

À  +-(1050)  

+-

    M. Rob Moore: L'Association du Barreau canadien a multiplié ses observations au sujet du projet de loi C-13, et je suis sûr que l'opinion de ses représentants serait utile. Mais si je reprends l'analogie avec ce film sur le baseball, le projet de loi de M. Lunn ne permettrait-il pas d'atteindre cet objectif? Construisons-le, et ils y viendront.

    L'examen de cette question nous offre une possibilité. Nous avons appris la très grande efficacité des empreintes génétiques. Nous devons élucider ces affaires de personnes disparues. Je suis sûr qu'il se dégagera un appui indéfectible de vos consultations, comme nous l'avons déjà vu. Si les autorités fédérales et les ministres provinciaux responsables sont prêts à s'engager, nous devrions alors mettre le tout en branle le plus tôt possible.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Moore, nous devrons céder notre place à un autre comité à 11 heures. Il faut donc conclure.

    Je cède la parole à M. Macklin, suivi de M. Breitkreuz. Soyez très brefs.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci infiniment.

    À titre indicatif, avez-vous tout d'abord une idée du nombre de personnes disparues au Canada?

+-

    M. Michael Zigayer: J'ai apporté le document de consultation, et c'est l'un des points qui y sont abordés. Les chiffres sont expliqués dans la partie portant sur la définition d'une personne disparue. Annuellement, environ 270 nouvelles personnes sont portées disparues et sont considérées comme telles, je suppose, par les autorités policières. Ces personnes sont disparues depuis longtemps. Cependant, il existe différents critères pour qu'un nom figure sur cette liste, chaque province ou territoire abordant le tout différemment.

    Je pense que le nombre estimatif de personnes disparues depuis longtemps s'établit entre 4 500 et 4 800. Lorsque je plaidais dans les Territoires du Nord-Ouest, j'ai connu une gentille dame qui est disparue en faisant une promenade. Était-ce un accident? Était-ce les ours? Nul ne le sait. Les personnes disparues peuvent être atteintes d'Alzheimer. Il peut s'agir d'enfants qui se perdent ou qui font une fugue. Il peut s'agir de personnes qui sont victimes d'un crime.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Je voudrais faire valoir un deuxième point.

    Sur les méthodes utilisées par les laboratoires, vous dites que, actuellement, les travaux sur les échantillons recueillis s'effectuent souvent grâce à la technologie nucléaire. Vous ajoutez que les l'analyse des ADN mitochondriaux est un moyen utilisé dans les établissements qui exécutent fréquemment ce genre de travaux. Y a-t-il des motifs justifiant le recours à ce moyen si nous légiférons à ce chapitre? Autrement dit, pourquoi n'agissons-nous comme il faut, le cas échéant? Quelle est la meilleure méthode que nous pourrions utiliser? L'analyse des ADN mitochondriaux devrait-elle être notre objectif?

    Quel est le coût? En avez-vous une idée? Par exemple, nous savons ce que contient actuellement la banque de données à Ottawa; nous l'avons vue. Cependant, j'ignore si nous saisissons bien ce que coûteraient les modifications pour passer à l'analyse des ADN mitochondriaux, outil à la fine pointe de la technologie en matière d'enquête. Si mon enfant était porté disparu, je voudrais être sûr que nous utilisons les techniques d'enquête de premier plan pour le retrouver et, s'il est décédé, pour l'identifier.

+-

    M. Michael Zigayer: Je crois comprendre que cette technologie nucléaire des tests par PCR utilisée par la GRC, le FBI américain et les organes analogues dans les pays occidentaux—comme M. Maguire le soulignait l'autre jour—est la plus perfectionnée et la plus efficace.

    L'analyse des ADN mitochondriaux comporte l'avantage de vous aider à analyser des échantillons particulièrement dégradés. Cependant, vous voudrez utiliser le même langage, si vous voulez comparer les résultats avec ce qui figure dans la banque nationale de données génétiques, le fichier des condamnés ou le fichier criminalistique. Par conséquent, comme M. Lunn l'a proposé, vous souhaiteriez peut-être employer essentiellement la technique nucléaire tout en conservant la capacité de recourir à l'analyse des ADN mitochondriaux dans des affaires complexes.

À  -(1055)  

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Je comprends que vous n'êtes pas un généticien, mais il n'en demeure pas moins que, pour permettre l'identification, on utilise actuellement 13 marqueurs, si je me souviens bien, parmi les nombreux marqueurs décelables, si je comprends bien, ou encore les renseignements abondants susceptibles d'être obtenus grâce à la technologie d'évaluation nucléaire... Dans quelle perspective devrions-nous envisager cela? Devrions-nous continuer à utiliser la norme des 13 marqueurs ou devrions-nous utiliser une norme supérieure si, en fait, nous empruntons cette voie?

+-

    Le président: Nous devons quitter la salle, et M. Breitkreuz aurait une brève question.

+-

    M. Michael Zigayer: Je demanderais aux experts de répondre à cette question.

+-

    Le président: Oui, et je pense qu'il s'agit là d'un aspect qui ne devrait pas figurer dans la mesure législative. Ce sont peut-être également des questions opérationnelles.

    M. Breitkreuz, soyez très bref. Nous devons quitter la salle.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Oui, je veux revenir à ce que vous avez dit lorsque vous avez signalé que le choix du moment est très important. Je suis d'accord vous à cet égard.

    En écoutant les propos de tous nos témoins et les questions posées, il m'est apparu que nous abordons presque ce problème comme s'il s'agissait d'une enquête sur le lieu d'un accident, au cours duquel une voiture a happé un coureur, qui souffre de douleurs atroces. Nous ne pouvons cependant pas lui venir en aide parce que nous ignorons qui il est et parce qu'il ne porte aucune pièce d'identité. Nous nous trouvons à la limite d'un canton et nous ne savons pas qui contacter. Le facteur temps est également important pour les victimes—vous savez, à cause des douleurs et des souffrances qu'ils endurent.

    Ma question est donc très simple. Si le ministre de la Justice vous demandait de rédiger des amendements pour tenir compte des questions liées aux compétences et à la protection de la vie privée ainsi que pour établir ce fichier des restes humains et ce fichier des personnes disparues afin de favoriser l'application de la loi, pourriez-vous le faire d'une façon efficace et pertinente de sorte que les provinces soient libres de participer à ce système? Cela pourrait-il se faire rapidement? Nous sommes saisis de cette question depuis des années. De tels amendements pourraient-ils être rédigés si le ministre vous le demandait?

+-

    M. Michael Zigayer: Les provinces ayant manifesté leur intérêt à cet égard, nous ne pourrions pas le faire sans les consulter exhaustivement. Cela ne pourrait donc pas se faire du jour au lendemain.

    Si vous passez outre à cette consultation et si vous demandez de ne pas attendre jusqu'en juin ou en automne et d'exécuter le tout d'ici un mois environ, je vous dirais que nous y sommes déjà parvenus dans certains dossiers que nous avons abordés minutieusement et rigoureusement. Cependant, je vous répète que, selon nous, ce sont les provinces qui détiennent les pouvoirs législatifs pour établir les bases de données génétiques en ce qui concerne les personnes disparues. Enfin, si le ministre nous enjoignait de mettre immédiatement à contribution les provinces dans la rédaction de la mesure législative, nous lui obéirions certainement.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Dans le dossier du registre des armes à feu, on est allé de l'avant sans consulter qui que ce soit. Je ne comprends pas...

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    Le président: Il m'en coûte beaucoup de vous interrompre pendant que vous traitez de votre sujet favori, mais nous devrons lever la séance.

    Je vous remercie infiniment. La séance est levée.