JUST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 21 juin 2005
¿ | 0905 |
Le président (M. John Maloney (Welland, Lib.)) |
M. Pierre Beaumier (président, Maxxam, à titre personnel) |
¿ | 0910 |
Le président |
M. Barry Beyerstein (professeur de psychologie, Université Simon Fraser, à titre personnel) |
¿ | 0915 |
¿ | 0920 |
¿ | 0925 |
Le président |
M. Vic Toews (Provencher, PCC) |
¿ | 0930 |
M. Barry Beyerstein |
M. Vic Toews |
M. Pierre Beaumier |
M. Vic Toews |
M. Pierre Beaumier |
M. Vic Toews |
¿ | 0935 |
Le président |
M. Vic Toews |
Le président |
M. Vic Toews |
M. Pierre Beaumier |
M. Vic Toews |
M. Pierre Beaumier |
Le président |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ) |
M. Pierre Beaumier |
M. Richard Marceau |
M. Pierre Beaumier |
M. Richard Marceau |
¿ | 0940 |
M. Pierre Beaumier |
M. Richard Marceau |
M. Pierre Beaumier |
M. Richard Marceau |
M. Pierre Beaumier |
M. Richard Marceau |
M. Pierre Beaumier |
M. Richard Marceau |
M. Pierre Beaumier |
M. Richard Marceau |
M. Pierre Beaumier |
M. Richard Marceau |
M. Barry Beyerstein |
¿ | 0945 |
Le président |
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD) |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
¿ | 0950 |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.) |
M. Pierre Beaumier |
L'hon. Paul Harold Macklin |
M. Pierre Beaumier |
L'hon. Paul Harold Macklin |
M. Pierre Beaumier |
L'hon. Paul Harold Macklin |
¿ | 0955 |
M. Barry Beyerstein |
Le président |
M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC) |
À | 1000 |
M. Barry Beyerstein |
Le président |
M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ) |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
À | 1005 |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Barry Beyerstein |
À | 1010 |
M. Serge Ménard |
Le président |
M. Barry Beyerstein |
Le président |
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.) |
M. Barry Beyerstein |
Mme Anita Neville |
M. Barry Beyerstein |
À | 1015 |
Mme Anita Neville |
M. Pierre Beaumier |
Mme Anita Neville |
M. Pierre Beaumier |
Mme Anita Neville |
Le président |
M. Vic Toews |
M. Barry Beyerstein |
M. Vic Toews |
M. Barry Beyerstein |
À | 1020 |
M. Vic Toews |
M. Barry Beyerstein |
M. Vic Toews |
M. Barry Beyerstein |
M. Vic Toews |
M. Barry Beyerstein |
M. Vic Toews |
Le président |
M. Barry Beyerstein |
Le président |
M. Serge Ménard |
À | 1025 |
M. Barry Beyerstein |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Pierre Beaumier |
M. Serge Ménard |
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD) |
Le président |
M. Serge Ménard |
Le président |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
M. Pierre Beaumier |
M. Joe Comartin |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
À | 1030 |
Le président |
M. Pierre Beaumier |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 21 juin 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¿ (0905)
[Traduction]
Le président (M. John Maloney (Welland, Lib.)): La 47e séance du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile est ouverte.
Ce matin, nos témoins sont M. Pierre Beaumier, président de Maxxam, et M. Barry Beyerstein, professeur de psychologie à l'Université Simon Fraser.
Messieurs, êtes-vous prêts? Comme d'habitude, vous aurez chacun 10 minutes pour faire votre exposé. Je crois savoir que M. Beaumier aimerait nous montrer des dispositifs, s'il les reçoit dans l'heure et demie qui suit. Il y aura ensuite une période de questions pendant laquelle nous prévoyons environ cinq minutes pour chaque question et sa réponse.
Je cède maintenant la parole à M. Beaumier. À 10 h 30, nous passerons au point suivant à l'ordre du jour, soit la motion de M. Toews et celle de M. Thompson sur l'interrogation des témoins.
Monsieur Beaumier, vous avez la parole.
M. Pierre Beaumier (président, Maxxam, à titre personnel): Merci, monsieur le président.
Je crois que vous avez des exemplaires de mon mémoire que je tenterai de résumer.
Je voulais faire connaître au comité le système adopté par le département du Transport des États-Unis. Dans le cadre de ce régime, on contrôle les conducteurs, surtout les conducteurs du secteur commercial, pour détecter la présence de drogues qui pourraient réduire leur capacité de conduire. On y a établi des seuils pour ces drogues. Ces seuils ne visent pas à déterminer l'affaiblissement des facultés, mais indiquent plutôt que vous ne devriez pas prendre le volant si vous avez une quantité donnée de drogues dans votre organisme.
Je tiens à ce que le comité comprenne bien qu'une disposition du projet de loi C-16 permet à l'agent de la paix de demander un échantillon d'urine ou de salive aux fins du dépistage de drogues, même si l'alcootest indique une alcoolémie inférieure à celle permise par la loi, s'il constate des symptômes d'affaiblissement des facultés. Je vous signale qu'il existe déjà des dispositifs, et on est en train d'en concevoir d'autres, qui permettent d'analyser la salive sur place. Bien des gens ne savent pas que ces dispositifs existent déjà. Je vais d'ailleurs faire circuler l'un de ces dispositifs pour que vous puissiez le voir par vous-mêmes.
Il est aussi question des données qui corroboreront devant le tribunal les accusations de facultés affaiblies. Ce dispositif de dépistage de drogues vous indiquera s'il y avait une drogue dans l'organisme du conducteur dont les facultés semblaient affaiblies, mais le dispositif utilise un anticorps pour détecter la drogue, et le résultat peut être faussé par la présence d'autres drogues. Ainsi, la consommation d'amphétamines et de métamphétamines est de plus en plus répandue au Canada, comme l'indiquent les reportages aux actualités. Or, si vous avez pris un décongestionnant contenant de la phénylpropanolamine, l'analyse vous donnera un résultat positif. Ces résultats doivent donc être confirmés en laboratoire. C'est extrêmement important, car cet appareil n'est qu'un appareil de dépistage. C'est comme pour l'alcool : le résultat de l'alcootest devra être confirmé par des analyses faites selon une méthode approuvée. Le résultat de l'analyse de salive faite sur place devra être confirmé en laboratoire.
Les laboratoires judiciaires du Canada sont actuellement extrêmement occupés. Il y a un énorme arriéré de travail, notamment pour les analyses d'ADN. Je suis le président de la société qui a reçu le premier contrat de la GRC pour l'analyse d'ADN. Nous avons aussi l'agrément du département du Transport des États-Unis pour les analyses de drogues et nous avons obtenu l'agrément du Canada.
À l'heure actuelle, il y a trois laboratoires privés au Canada qui pourraient effectuer les analyses de confirmation des tests faits sur place, au besoin. À mon sens, il est important de faire appel au secteur privé. Au Canada, en ce moment, nous pouvons transmettre les résultats négatifs d'analyse d'urine en 24 heures et les résultats positifs dans une période allant de 48 à 72 heures. Pour que justice soit faite, il importe que ces analyses soient faites dans les meilleurs délais. L'an dernier, notre entreprise a effectué plus de 100 000 tests de dépistage de drogues chez des Canadiens. Les analyses de drogues se font donc déjà au Canada.
Je tiens aussi à souligner que les concentrations seuils utilisées actuellement ne sont pas les mêmes selon qu'il s'agit du test de dépistage sur place ou de l'analyse de laboratoire. Cela s'explique notamment par le fait que l'une des drogues les plus consommées au Canada est la marijuana, et que les anticorps peuvent indiquer la présence de l'ingrédient actif de la marijuana, mais aussi de simili drogues. La concentration seuil du test de dépistage n'est donc pas la même que celle de l'analyse de laboratoire, surtout pour les échantillons d'urine, car, dans l'urine, on recherche le métabolite.
¿ (0910)
Encore une fois, je souligne que ces analyses confirment la présence de drogues dans l'organisme, et non pas l'affaiblissement des facultés. C'est l'agent de la paix qui, en observant le conducteur, détermine si ses facultés sont affaiblies.
On a mené des études au Québec et en Ontario sur les accidents de la route, et on a constaté que dans la majorité des accidents mortels impliquant la consommation de drogues, les benzodiazépines étaient en cause, des drogues semblables au Valium. Les benzodiazépines et l'alcool forment un mélange mortel, comme on a pu le constater. Ces drogues venaient au deuxième rang dans les cas d'accidents mortels en Ontario et au Québec. Par conséquent, si vous envisagez d'établir des concentrations seuils pour les tests routiers de dépistage de drogues, il faudrait envisager d'inclure les benzodiazépines. Justement, ce dispositif d'analyse de la salive peut détecter les benzodiazépines.
Ce dispositif ne peut dépister toutes les drogues, mais il peut détecter la plupart des drogues dont on abuse. C'est un système américain. On pourrait le modifier pour qu'il ne dépiste que la marijuana ou pour qu'il détecte d'autres drogues, mais, pour l'instant, il détecte les opiacées, la PCP, les amphétamines, la cocaïne et la marijuana. La plupart des dispositifs disponibles sur le marché de nos jours, sauf celui que je vais vous montrer, détectent ces drogues-là.
Voilà essentiellement ce que je voulais vous dire. Je voulais que les membres du comité sachent qu'il y a des laboratoires privés au Canada qui sont en mesure d'aider le système de justice. Nous le faisons déjà avec l'analyse d'ADN et nous pourrions le faire pour le dépistage de drogues.
Merci.
Le président: Merci.
Monsieur Beyerstein, vous avez la parole.
M. Barry Beyerstein (professeur de psychologie, Université Simon Fraser, à titre personnel): Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, merci beaucoup de m'avoir invité à vous faire part de mes observations sur cet enjeu crucial pour tous les Canadiens. Je suis très heureux de pouvoir en discuter avec vous.
Vous savez peut-être que je suis psychopharmacologiste. J'enseigne et je fais de la recherche dans ce domaine, celui des effets des drogues psychoactives, de leurs effets sur le cerveau et de la façon dont ces changements au sein du cerveau modifient la conscience et le comportement. Le plus utile serait peut-être pour moi de répondre, après mon exposé, aux questions que vous avez peut-être sur les effets des drogues comme telles, la façon dont elles sont détectées, et ainsi de suite. Je serai très heureux de répondre à vos questions, si cela peut vous aider.
Il va sans dire que nous voulons tous réduire l'incidence de conduite avec les facultés affaiblies au pays et, du coup, les terribles conséquences qu'elle peut avoir sur tous les Canadiens. La question est bien sûr de savoir quelle est la meilleure façon d'atteindre cet objectif. Nous devons d'abord et avant tout retenir la solution la plus efficace dans son ensemble, celle qui nous permettra de réduire l'incidence de la conduite avec les facultés affaiblies et ses conséquences.
Deuxièmement, nous devons tenir compte des coûts qui seront assumés par les contribuables. Comme l'a mentionné mon collègue, le professeur Boyd, nous devons adopter des mesures qui n'ajouteront pas au fardeau déjà très lourd que doit assumer le système judiciaire. Nous devrions envisager tout moyen de lutter contre ce problème efficacement sans recourir au droit pénal.
Enfin, comme Mme Stoddart, la commissaire à la protection de la vie privée, l'a déjà fait valoir à votre comité, nous voulons adopter la solution qui constitue la violation la moins importante de la vie privée, qui a le moins de conséquences pour les droits et privilèges protégés par notre constitution.
Vous avez peut-être deviné que j'ai lu certains des témoignages que vous avez entendus. De tous ceux auxquels j'ai pu jeter un coup d'oeil avant ma comparution d'aujourd'hui, c'est avec celui de M. Therien, le président du Conseil canadien de la sécurité, que je suis le plus en accord. Dans son exposé, M. Therien a fait valoir que la façon la plus efficace de s'attaquer à ce problème est d'employer un ensemble d'approches relevant de la justice pénale, de l'action communautaire, des codes de la route des provinces et, surtout, de la sensibilisation.
Ce que j'ai appris de mes 30 années à étudier les drogues et le comportement, c'est que si nous voulons changer le comportement, il ne fait aucun doute que le meilleur moyen, c'est de faire en sorte que ce comportement devienne ringard. M. Souccar, de la GRC, y a fait allusion lors de son témoignage, je crois; il a fait remarquer que nous avions assez bien réussi—même s'il y a encore beaucoup à faire—à faire comprendre aux jeunes que l'alcool au volant est loin d'être « cool ». Cela est essentiel et doit être fait dès le plus jeune âge.
Mais peut-être aurions-nous pu faire mieux en ce qui a trait aux autres substances qui influent sur les facultés. Il serait bon que nous tablions sur les programmes tels que celui que M. Therien vous a décrit, la stratégie de réduction de la conduite avec facultés affaiblies, qui est déjà en place et a déjà apparemment réduit de façon importante le nombre de décès dans les accidents de la route. Je vous encourage à suivre ses recommandations car, même si les mesures de justice pénale ont leur place, il ne faut pas négliger les autres aspects.
Mon collègue de l'Université Simon Fraser, le professeur Boyd, a aussi souligné qu'une approche trop axée sur la justice pénale pourrait exacerbée les problèmes existants. Les tribunaux sont déjà engorgés, bon nombre de ces dispositions pourraient faire l'objet d'une contestation judiciaire, ce qui ferait intervenir des avocats et d'autres parties intéressées. Cela entraînerait d'autres problèmes qu'on pourrait peut-être éviter en donnant suite aux suggestions de M. Therien qui a recommandé qu'on envisage une démarche moins axée sur la justice pénale, soit des mesures telles que la suspension du permis de conduire et d'autres peines relevant des codes de la route des provinces.
Je crois savoir, que dans le cours de vos délibérations, vous avez déjà abordé la question des peines et que vous en traiterez dans vos recommandations. Certains réclament des peines plus lourdes, ce qui est peut-être justifié. Je ne suis certainement pas un expert en la matière.
¿ (0915)
Un grand nombre de rapports d'étude en psychologie nous disent que, si nous voulons changer un comportement par le biais d'un châtiment, le facteur le plus important, c'est la certitude de ce châtiment et non pas sa sévérité. Si les gens craignent de faire l'objet d'une peine s'appliquant à un comportement particulier, cela a un effet dissuasif, alors que la peine la plus lourde n'aura aucun effet si les gens croient de façon subjective qu'ils ne seront pas visés.
Comme on vous l'a déjà dit, dans le domaine des accidents de la route causés par la conduite avec les facultés affaiblies, les statistiques montrent qu'un nombre disproportionnément petit de conducteurs est responsable d'un nombre disproportionnément élevé des infractions, des accidents, des décès, etc. C'est ce problème qu'il faut régler. Des peines plus lourdes ne sont pas susceptibles de dissuader les personnes, à mon avis, parce que leur logique tordue les amène à croire qu'ils risquent moins d'être condamnés à une peine, quelle que soit cette peine. Ils trouvent des façons très bizarres de rationaliser leur comportement Nous devons trouver une façon de cibler ce nombre relativement petit de conducteurs qui représentent dans l'ensemble le plus grand risque pour nous tous.
J'aimerais aussi vous toucher quelques mots des experts en reconnaissance de drogues. Je connais ces programmes. S'ils sont bien administrés, si le personnel est bien formé, ces programmes sont utiles. Toutefois, j'ai quelques réserves, notamment au chapitre de la formation des formateurs, de cette approche boule de neige qui veut que ceux qui ont reçu la formation soient en mesure d'en former d'autres.
J'estime que si les programmes d'experts en reconnaissance de drogues ont été jugés constitutionnels par les tribunaux américains, c'est en grande partie grâce à la rigueur de la formation de ces experts, dont la formation est exhaustive et qui doivent, après avoir obtenu leur première accréditation, subir la même épreuve régulièrement par la suite.
Je regrette de devoir dire qu'il n'y a pas de façon simple et peu coûteuse de dispenser cette formation. Si nous ne suivons pas l'exemple des États-Unis, je crains, comme le professeur Boyd, que des avocats grassement payés ne viennent contredire les conclusions des experts en reconnaissance de drogues lors des procès. Je vous encourage donc à examiner cette disposition pour vous assurer qu'elle prévoit des normes élevées de formation. Si les ERD sont bien formés, leur opinion aura du poids devant les tribunaux, et c'est ce que nous voulons.
MM. Therien et Boyd ont aussi souligné les problèmes de l'approche en trois étapes dans les cas de conducteurs aux facultés affaiblies. Les deux premières étapes ne présentent pas de difficulté, selon eux ou selon moi. Elles me semblent tout à fait raisonnables, acceptables et seront probablement efficaces.
La troisième étape, toutefois, est celle de la confirmation par l'analyse d'un échantillon d'urine, de salive ou de sang. Comme on vous l'a déjà dit, le prélèvement d'un échantillon de liquide corporel constitue une violation de la vie privée. Mme Stoddart, la commissaire à la protection de la vie privée, en a déjà parlé. Je partage ses préoccupations à cet égard.
Le principal problème est celui que vient de mentionner M. Beaumier, soit celui des concentrations seuils, les concentrations pour les analyses permettant de déterminer le niveau d'ingrédients actifs d'une drogue dans l'organisme. Le ministre Cotler vous a déjà indiqué qu'on dispose peu de bonnes données scientifiques nous confirmant ce qui est un niveau acceptable ou non de drogue dans l'organisme quand on prend le volant. Je crois que M.Therien vous a dit qu'on n'aurait pas de critère pouvant être défendu devant un tribunal.
¿ (0920)
On m'a informé qu'on vous avait dit que du travail sur ce sujet se faisait en Europe et peut-être en Grande-Bretagne. Je suis convaincu que c'est le cas. On étudie aussi la question aux États-Unis. Je suis toutefois assez pessimiste, plus que les témoins précédents. Je ne pense pas qu'on aura des résultats, parce que ce qui détermine l'incapacité de quelqu'un est bien plus compliqué qu'un simple relevé relatif à ce qu'il y a dans son urine ou dans son sang.
Je vais vous en donner un petit exemple. Quand j'explique cela à mes étudiants, il me faut des heures mais, en somme, nous savons tous que lorsque nous consommons une drogue, sa teneur dans notre sang augmente. Elle atteint un sommet et si vous cessez de prendre cette drogue, des enzymes l'éliminent de l'organisme et la teneur dans le sang baisse. Cela fait une courbe en forme de cloche. Sur ce genre de courbe, vous voyez bien qu'il y a deux points, dans la courbe ascendante et dans la courbe descendante qui ont la même valeur, pour ce qui est de la concentration de la drogue dans le sang. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, d'après les recherches effectuées, l'intoxication n'est pas la même pour ce qui est des effets négatifs sur la conscience ou le comportement, pour une même teneur dans le sang, sur la courbe descendante et sur la courbe ascendante. Autrement dit, vos facultés sont plus affaiblies lorsque vous consommez la drogue et que sa teneur augmente dans votre organisme, que lorsque sa teneur est la même, mais que votre organisme est en train de l'éliminer.
Il y a bien d'autres choses dont je pourrais vous parler, si j'en avais le temps. En bref, je suis bien moins optimiste que certains de vos témoins précédents au sujet de la possibilité de déterminer bientôt l'incapacité d'une personne à partir d'un test de sang ou d'urine, par exemple.
En conclusion, j'aimerais vous faire part d'une autre chose qui pourrait être utile à vos délibérations et à vos recommandations finales et qui pourrait régler le problème du manque de critères fondés sur un test de sang ou quelque chose du genre. C'est le domaine des tests d'aptitude au service. Je ne sais pas si on vous en a déjà parlé, mais c'est assez courant dans le secteur industriel, particulièrement aux États-Unis. Il s'agit d'un test de comportement qui porte sur diverses capacités essentielles pour le travail, dans ce cas-ci. Mais on pourrait modifier ces tests, assez simplement, disons-le, pour en faire un test routier permettant de vérifier la capacité de conduire. Je dis que c'est de bien des façons supérieures aux tests chimiques parce qu'on y vérifie, par exemple, le temps de réaction, la coordination motrice, la capacité d'accomplir des tâches malgré une attention réduite, la mémoire à court terme, toutes choses essentielles pour la sécurité automobile.
Ce qui est intéressant, c'est que cette technique est relativement peu coûteuse actuellement, grâce notamment aux fabricants de jeux comme le Game Boy. La technologie existe et les protocoles sont déjà au point. Ces appareils peuvent être utilisés par du personnel avec une formation moins importante que celle des experts en reconnaissance de drogues, assurément. Et puisqu'on vérifie des comportements, je crois que cela résisterait bien à l'examen des tribunaux. Plus important encore, cela permettrait de constater un affaiblissement des facultés lié à diverses causes. Comme on vous l'a déjà dit, le problème de l'affaiblissement des facultés ne se rapporte pas seulement à ceux qui ont consommé de l'alcool, des drogues illégales ou des médicaments, mais aussi à des personnes qui ont des problèmes émotifs, qui ont diverses maladies, notamment neurologiques, et à des gens qui viennent d'avoir une scène de ménage. Toutes sortes de choses peuvent nuire à la capacité de conduire.
Il va de soi que la fatigue et le manque de sommeil sont aussi de graves problèmes. D'après des études réalisées au moyen de simulateurs de vol, du moins dans le cas auquel je pense, une nuit sans sommeil peut nuire au rendement tout autant qu'un taux d'alcoolémie de 0,08.
Ce qui est intéressant dans le texte d'aptitude au service, c'est qu'on vérifie les mêmes facultés pour le travail que pour la sécurité au volant. Pour moi, peu importe ce qui nuit aux facultés. Ce pourrait être n'importe lequel des facteurs dont j'ai parlé. Nous ne voulons pas ces conducteurs sur nos routes. Ce type de test vérifie la capacité de bien conduire.
Si quelqu'un a des questions là-dessus, je ne suis pas un expert en la matière, mais je peux certainement vous dire à qui vous adresser, et quelles publications lire à ce sujet. Je le ferai volontiers.
¿ (0925)
Je vais m'arrêter ici. Merci de votre attention.
Le président: Merci, monsieur Beyerstein.
Monsieur Toews, à vous la parole. Vous avez cinq minutes pour poser votre question et obtenir une réponse.
M. Vic Toews (Provencher, PCC): Merci beaucoup.
Votre témoignage est très instructif, monsieur Beyerstein. Je souscris tout à fait à votre opinion selon laquelle il faut mettre moins d'accent sur le volet criminel et se diriger davantage vers le système civil provincial. Cela s'est révélé très efficace. J'ai participé à la mise sur pied de ce processus à la fin des années 80 au Manitoba, la première province qui s'est dotée de ce régime.
Vous vous dites également préoccupé par la formation des formateurs. Je partage votre inquiétude pour ce qui est non seulement de la pénurie de formateurs qui peuvent administrer un test rigoureux, mais aussi du nombre insuffisant de policiers qui, de façon générale, patrouillent nos routes.
En effet, il y a quelque temps j'ai eu une conversation avec un policier de ma circonscription. Il s'agit d'une circonscription rurale qui comprend des axes routiers qui sont parmi les plus importants au Manitoba, notamment une route qui relie la frontière internationale à la ville de Winnipeg. Ce policier m'a appris qu'il arrivait parfois qu'un seul agent soit responsable, pour une période de six heures, d'une zone de 1 700 milles carrés. C'est la réalité. Ainsi, les efforts déployés en vue d'implanter ce genre de test peuvent être presque inutiles. Le seul policer qui patrouille dans cette zone n'a tout simplement pas suffisamment de temps. Il a déjà beaucoup de pain sur la planche. Par conséquent, il ne faut pas simplement former les formateurs, il faut également embaucher des policiers. De plus en plus de détachements sont éliminés et le délai d'intervention des services policiers atteint désormais une heure, voire une heure et demie. C'est un grave problème.
Vous avez parlé du caractère intrusif de ces tests. Je crois aussi que c'est un aspect important, mais, dans une certaine mesure, la Cour suprême du Canada s'est déjà prononcée sur cette question dans une décision qui vient d'être rendue au sujet d'une cause provenant du Manitoba. La Cour estime que les policiers ont le droit d'exiger des suspects qu'ils se conforment à ces demandes sans les aviser de leurs droits découlant de la Charte. Selon la Cour, il s'agit d'une violation raisonnable du droit qu'ont les suspects à consulter un avocat.
En revanche, vous croyez que le problème réside dans le fait que certains de ces appareils, ces appareils de type Game Boy, si je peux utiliser ce terme...
Je sais que ce n'est pas ce que vous avez dit dans votre témoignage, mais...
¿ (0930)
M. Barry Beyerstein: En fait, j'ai utilisé ce mot précisément, monsieur.
M. Vic Toews: Très bien, utilisons ce terme pour simplifier...
Vous avez cerné un problème : Ce ne sont pas seulement l'alcool et les drogues qui peuvent nuire à la capacité de conduire. Or, seule la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool ou les drogues est illégale, alors que ces appareils détectent l'incapacité de conduire due à des facteurs émotionnels ou physiologiques, ce qui ne constitue pas une infraction. En effet, certaines personnes ont un handicap physique et conduisent une voiture. Ce n'est pas illégal. Seule la conduite sous l'effet d'alcool ou de drogue est interdite.
Comme ancien procureur de la Couronne, je crains que si l'on introduit une telle preuve, que l'accusé dise : « Il est clair que je n'avais pas toutes mes facultés. J'étais submergé par les émotions. Je venais de me disputer avec ma femme. Ce n'est peut-être pas souhaitable, mais ce n'est certainement pas illégal. » Par conséquent, cela risque de nous empêcher de recourir à cet appareil comme élément de preuve efficace. Croyez-moi, monsieur, j'ai entendu toutes sortes d'excuses, par exemple : « Mon chien est mort », ou « Ma femme m'a jeté à la rue », entre autres justifications de cette nature. Quoi qu'il en soit, il s'agit dans tous les cas de bons moyens de défense.
Je ne sais pas si vous avez la réponse à toutes ces questions. Je crois que vous avez très bien cerné les problèmes et cela correspond à mes préoccupations.
Je m'adresse maintenant à M. Beaumier. Je voudrais parler des appareils de détection. Je tiens dans mes mains un objet que l'interprète ne peut décrire. Ce petit appareil s'appelle Oratect. Il ressemble un peu à un gros bâton de popsicle, mais en bleu et blanc.
Maintenant, nous avons l'appareil de détection d'alcool de marque Alert, qui indique les niveaux d'incapacité, soit succès, avertissement ou échec. L'appareil est calibré de telle sorte qu'un taux d'alcool dans le sang de 0,05 p. 100 constitue le seuil de succès, ou est-ce plutôt d'échec? Je n'en suis pas certain. Les différents services policiers ont chacun leur façon de procéder. Il n'en reste pas moins que cet appareil détecte un niveau d'incapacité puis que le policer, sur la base de ces motifs raisonnables et probables, demande au suspect de se soumettre à un test d'ivressomètre qui lui est administré par la suite.
Dans une telle situation, il n'y a pas de preuve de l'affaiblissement des facultés. Les policiers recueillent simplement des preuves de la présence de drogues dans le corps de cette personne. Je suppose que cela se fait par l'entremise de la salive.
M. Pierre Beaumier: Oui, on utilise la salive.
M. Vic Toews: La salive. Les policiers ne demanderaient pas à un suspect d'uriner au bord de la route.
M. Pierre Beaumier: Non, on prélève un échantillon de salive puis le test est terminé en moins de cinq minutes.
M. Vic Toews: Très bien, cela prend un peu plus de temps qu'avec l'appareil Alert, mais c'est tout de même assez rapide.
Par conséquent, cet appareil n'indique pas le niveau d'incapacité mais détecte tout simplement la présence de drogue. Quelles sont les étapes suivantes? Vous avez indiqué que le policier doit alors déterminer quels sont les symptômes qui prouvent l'affaiblissement des capacités puis se sert de ces éléments de preuve. Je suppose que cela ne vient qu'étayer les arguments selon lesquels il y a présence de drogue. Par conséquent, l'accusé n'aura pas la possibilité d'affirmer ultérieurement qu'il ne se trouvait aucune drogue dans son système. Ces éléments de preuve viendraient réfuter ce moyen de défense, mais l'appareil ne permet d'effectuer aucun autre test.
Ce qui me préoccupe précisément...
¿ (0935)
Le président: Pouvez-vous en venir à votre question?
M. Vic Toews: Oui, je sais, mais ce témoignage est très intéressant.
Le président: Je le comprends, mais vous avez épuisé votre temps de parole.
M. Vic Toews: Oui, je comprends cela.
Ce que je veux faire valoir, c'est que la plupart des procureurs ne s'occupent plus des accusations de conduite avec facultés affaiblies. Ils essaient tous de trouver le 0,08 p. 100, parce que la conduite avec facultés affaiblies est pratiquement impossible à prouver devant un tribunal pénal. Alors, comment cet appareil de dépistage, conjointement avec l'observation que la personne a les facultés affaiblies, peut faire mieux que dans le cas du problème que nous avons au sujet des accusations de conduite avec facultés affaiblies suite à une consommation d'alcool, alors qu'il n'y a pas d'ivressomètre? En quoi cela nous aide-t-il?
M. Pierre Beaumier: Je pense que le problème est qu'il y a de nombreux conducteurs dont les facultés sont affaiblies, mais pas par l'alcool, ou dont le taux d'alcoolémie est inférieur à 0,08 p. 100, et ceci aiderait à corroborer l'élément de preuve que l'agent de la paix constate sur le bord de la route, c'est-à-dire des facultés affaiblies. Il fait passer un test à la personne et cet appareil lui indiquerait, oui, mes observations sont exactes : son système contient une drogue.
La seule chose que je n'ai pas donnée dans mon exposé—j'ai regardé le projet de loi C-16, qui mentionne les liquides corporels, le sang, la salive ou l'urine... Le problème avec l'urine—nous analysons l'urine maintenant, c'est l'analyse la plus courante, mais nous trouvons des appareils analysant également la salive—est que la marijuana va être la drogue la plus détectée sur le bord des routes, les gens fument dans la voiture en conduisant, et cette substance reste dans l'urine pendant une semaine. Alors en quoi cette preuve peut-elle vous aider? Quelqu'un va vous dire : J'ai fumé un joint il y a quatre jours, alors c'est normal qu'il y en ait dans mon urine. Pour qu'un test de salive soit positif, il faut que vous ayez pris de la marijuana le même jour.
M. Vic Toews: C'est comme la défense des rouliplanchistes.
M. Pierre Beaumier: Oui, tout à fait. Mais sur la salive, ce n'est pas une semaine plus tard, c'est le même jour.
Le président: Merci, monsieur Toews.
Monsieur Marceau.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
Si j'ai fait des études en droit, c'est parce que je ne connaissais rien aux sciences et que je détestais cela. Alors, si mes questions vous paraissent un peu naïves, c'est probablement parce qu'elles le sont.
Docteur Beaumier, j'essaie de comprendre le petit test qui ressemble à ce qu'on voit à l'émission de télévision Voilà. Au premier coup d'oeil, cela ressemble un peu à un test de grossesse. En vertu du projet de loi qui est devant nous, dites-moi si, de façon concrète, les choses se passeraient de la façon suivante si on utilisait ce test. Le policier voit quelqu'un dont la conduite est erratique et l'arrête, lui fait passer des tests en lui demandant de se toucher le nez, de marcher droit, etc. Quelque chose ne va pas chez l'individu en question, ça paraît. Le policier lui demande d'ouvrir la bouche et de faire « ah », puis lui gratte la langue, et en l'espace de cinq minutes, dites-vous, on pourrait démontrer que la personne a consommé de la drogue.
M. Pierre Beaumier: On pourrait voir s'il a consommé une des drogues que cet instrument peut déceler.
M. Richard Marceau: Je vois « Me », « Th ». Pouvez-vous me dire quelles sont les drogues que l'instrument peut déceler?
M. Pierre Beaumier: La lettre « C » correspond au mot « cocaïne », « Am » correspond à « amphétamine », « Op » correspond à « opiacé », « Me » correspond à « méthamphétamine », « Th » correspond à « THC » et « Co » correspond à « cocaïne ».
M. Richard Marceau: La lettre « C » correspond à « cocaïne », de même que « Co »?
¿ (0940)
M. Pierre Beaumier: Pour la cocaïne, c'est « Co ».
M. Richard Marceau: À quoi correspond le « C » inscrit en haut?
M. Pierre Beaumier: Je n'en suis pas certain. C'est quelque chose que je viens de recevoir. On fait des tests là-dessus en ce moment dans notre laboratoire et on a trouvé que c'est une chose très utile qui donne des résultats en cinq minutes ou moins.
M. Richard Marceau: Quelle est la fiabilité de ce test? Devant un tribunal, la fiabilité de ce test serait-elle de 100 p. 100, aussi grande que celle d'un alcotest?
M. Pierre Beaumier: La lettre « C » en haut à gauche et à droite est un contrôle. Si le contrôle fonctionne, cela veut dire que les anticorps qui décèlent la présence de drogue fonctionnent. Quand on envoie un échantillon à un laboratoire d'hôpital pour qu'on y fasse un dépistage de drogue, les gens au laboratoire se servent des mêmes anticorps que ceux utilisés dans cet instrument.
M. Richard Marceau: Combien cela coûte-t-il?
M. Pierre Beaumier: Vingt dollars.
M. Richard Marceau: Je ne me suis jamais fait arrêter, sauf pour excès de vitesse, alors je ne sais pas comment cela fonctionne. Dans une soirée ordinaire où on arrête les voitures à un barrage, combien en arrête-t-on normalement? Est-ce que vous le savez?
M. Pierre Beaumier: Je ne le sais pas.
Je sais qu'au Québec, on a fait une étude dans le cadre de laquelle on a arrêté des automobilistes pour faire un dépistage de drogue. Le but n'était pas de les poursuivre, mais seulement de compiler des statistiques. Je pense que l'étude a démontré qu'entre 10 et 12 p. 100 des conducteurs avaient de la marijuana dans leur système. C'est un pourcentage assez élevé.
M. Richard Marceau: Retournons aux paramètres du projet de loi qui nous intéresse. Il y a trois étapes: d'abord, la personne conduit tout croche; deuxièmement, on lui fait passer un test sur l'accotement; troisièmement, on lui fait passer un test de toxicologie au poste de police que l'on envoie ensuite au laboratoire.
Est-ce que vous me dites qu'avec ce petit truc, la troisième étape telle que déterminée dans le projet de loi devant nous serait redondante parce que cet instrument permettrait d'obtenir le même résultat?
M. Pierre Beaumier: On obtiendrait le même résultat dans 90 ou 95 p. 100 des cas. Le laboratoire serait en mesure de confirmer qu'on a décelé la présence de drogue dans l'organisme du conducteur. Cependant, il faut que cela soit confirmé par un laboratoire où on a les instruments requis pour donner une empreinte de la drogue.
M. Richard Marceau: D'accord.
Professeur Beyerstein, vous n'êtes déjà pas très favorable à la troisième étape prévue au projet de loi; vous la trouvez trop intrusive, si j'ai bien compris.
Est-ce que la suggestion du Dr Beaumier vous satisferait? Si le test était fait avec un petit truc comme celui-là sur l'accotement de la route, est-ce que le critère du trop ou pas intrusif serait balayé? Est-ce que cela constituerait une alternative raisonnable? Selon vos connaissances scientifiques, puisque vous êtes ici en tant que scientifique, est-ce que c'est un test qui pourrait fonctionner et que vous, en tant que scientifique, nous suggéreriez d'adopter à titre de législateurs?
[Traduction]
M. Barry Beyerstein: Non, je pense que vous auriez toujours le même problème. M. Beaumier et moi discutions justement de ce point avant le début de la séance. En ce qui concerne la technologie, dans ce test, c'est un bon dépistage et c'est sur la bonne voie, mais il souffre du même problème.
La technologie permettant d'identifier la substance active est un agent de dépistage immunologique et il y a des difficultés avec ce que l'on appelle la réactivité croisée. Cela signifie que certaines substances inoffensives, si l'on utilise cette technologie, pourraient contrarier un test à chaud, comme s'il s'agissait de quelque substance illégale ou de quelque chose du genre. Ce n'est également pas suffisamment quantifiable pour résister à une contestation devant un tribunal. Donc, ces problèmes subsisteraient.
¿ (0945)
Le président: Merci.
La parole va à M. Comartin.
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Merci, monsieur le président.
Merci de votre présence.
Monsieur Beaumier, sur la seconde page du document écrit que vous nous avez fourni, vous donnez certains chiffres, en parties par milliard, pour les différentes drogues. Je ne crois pas que cela soit très différent de tout ce que nous avons entendu jusqu'à présent, mais je voulais juste le confirmer. Les chiffres qui sont là ne pourraient résister à une contestation devant les tribunaux, en ce qui concerne un lien de causalité. Autrement dit, si vous aviez 300 parties par milliard de cocaïne dans le sang, il n'y a pas moyen d'établir de façon scientifique que vos facultés en sont automatiquement affaiblies. Est-ce exact?
M. Pierre Beaumier: Je pense que c'est exact. Ce que je dis, il me semble, est que cela aide à vérifier les observations de l'officier de police qui arrête quelqu'un. L'ivressomètre vous donne des résultats négatifs, cet appareil vous donne des résultats positifs; donc, une drogue agit sur le comportement de la personne. Quand nous en avons discuté avant cette réunion, pour établir un niveau d'affaiblissement des facultés par rapport à une drogue, tout d'abord, cela ne peut se faire que par une analyse de sang; on ne pourrait le faire par une analyse d'urine, qui prendrait probablement 20 ans de recherche avant de pouvoir l'établir pour une drogue. Il y a encore des articles de chercheurs qui sont publiés sur l'analyse d'haleine aujourd'hui. On fait des recherches sur ce sujet depuis longtemps.
Je pense que nous sommes très naïfs si nous pensons pouvoir établir des niveaux et taux de ces drogues mesurables qui vous donneraient la certitude que les facultés sont affaiblies. Je crois que ce que nous disons, c'est que si un officier de police observe un comportement précis, il n'est pas forcément causé uniquement par l'alcool. Très souvent, il peut s'agir d'un mélange. Il peut s'agir d'un mélange de plusieurs de drogues. L'officier de police a observé des facultés affaiblies. Cela lui permet d'établir des preuves, à savoir que ces drogues étaient présentes au moment de l'infraction.
M. Joe Comartin: Je comprends le but derrière cela—aider le policier à confirmer ce qu'il a observé. Mais ma préoccupation, c'est que je ne comprends pas ce que les résultats signifient. Si quelqu'un a une concentration de 300 parties par milliard de cocaïne dans le sang, qu'est-ce que cela m'indique en tant juge au sujet de l'accusé, comparativement à quelqu'un qui aurait 600 ou 100 parties par milliard?
M. Pierre Beaumier: Une concentration de 300 parties par milliard est le seuil. Si le résultat est 290, il est négatif.
M. Joe Comartin: C'est le seuil de quoi?
M. Pierre Beaumier: De la présence d'une drogue dans le corps.
M. Joe Comartin: C'est donc pour les fins du dépistage; il n'y a pas de lien avec la capacité de conduire un véhicule.
M. Pierre Beaumier: C'est pour les fins de dépistage. Les analyses sur place donneraient un résultat de 300 parties ou plus. Le laboratoire produirait un chiffre plus exact, si c'est ce que vous cherchez, si vous vouliez en faire un lien avec l'affaiblissement des facultés. J'ai déjà vu des niveaux de marijuana de 20 000, 30 000 et 40 000. C'est le laboratoire qui vous donnerait ces chiffres, et non ces appareils, qui indiquent seulement que la concentration dépasse le seuil.
M. Joe Comartin: Est-ce qu'ils indiquent combien la personne a consommé?
M. Pierre Beaumier: Non, et ils n'indiquent pas non plus le moment de la consommation, mais étant un test de salive, les niveaux seront plus près du niveau de concentration dans le sang qu'un test d'urine ne le serait.
L'autre étape du processus, comme je l'ai déjà dit, est d'en envoyer un échantillon à un laboratoire reconnu pour analyse. Il faut préserver l'échantillon, car il fait partie des preuves. Il doit accompagner l'échantillon pour qu'il ait une valeur juridique si on décide d'utiliser ces preuves en cour.
M. Joe Comartin: Y a-t-il un produit chimique sur le tampon de cet appareil que vous avez apporté ici aujourd'hui? C'est comme cela qu'on fait des dépistages?
M. Pierre Beaumier: Le tampon goûte un peu la menthe. Il sert au fond à stimuler la salive. Il sert de mèche. La salive monte dans l'appareil, qui contient les anticorps de ces drogues.
¿ (0950)
M. Joe Comartin: Ils sont à l'intérieur?
M. Pierre Beaumier: Oui, ils sont à l'intérieur.
M. Joe Comartin: Savez-vous si l'appareil a déjà fait ses preuves en cour?
M. Pierre Beaumier: Je sais que plusieurs États américains commencent à utiliser la salive pour le dépistage. Nous avons ici un appareil de deuxième génération. La première génération a été testée en Europe pour le dépistage sur place. La mèche du premier appareil était trop longue, voici donc la deuxième génération.
Je l'ai utilisé vendredi. Je l'ai reçu récemment, et je suis très optimiste concernant son potentiel. Il peut aider notre système.
M. Joe Comartin: Existe-t-il des articles publiés dans ces États où on l'utilise plus couramment?
M. Pierre Beaumier: J'ai déjà publié moi-même des articles sur le fonctionnement de l'appareil, et je peux les fournir au comité.
M. Joe Comartin: Oui, s'il vous plaît. Vous pouvez les faire parvenir au personnel du comité.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Comartin.
Monsieur Macklin.
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être venus.
Je reviens au projet de loi lui-même, avec l'éclairage que vous avez donné dans votre témoignage. J'essaie de voir, du moins au début, si votre appareil a sa place dans le système que nous essayons d'établir. Je pense que cet appareil a sa place dans un test aléatoire, disons, ou dans l'équivalent du programme RIDE de l'Ontario, pour constater la fréquence de drogues dans un certain groupe. Cependant, à 20 $ la pièce, cela reviendrait cher de tester le public, selon moi.
Mais au bout du compte, qu'établissons-nous? Selon votre témoignage, un échantillon de laboratoire, finalement, serait la meilleure façon de prouver qu'il existe des drogues actives dans le système d'une personne. Ceci dit, je ne suis pas sûr que cet appareil ferait l'affaire, dans le cadre du régime que nous proposons en vertu du projet de loi C-16. Pouvez-vous me donner une raison pour laquelle je devrais considérer que votre appareil correspond au régime proposé et peut aider?
À l'heure actuelle, s'il y a affaiblissement des facultés, nous effectuons des tests de sobriété sur place après en avoir fait la demande. Nous faisons ensuite passer l'ERD, qui donne davantage d'information sur ce que nous avons recueilli, puis, en dernier lieu, nous obtenons un échantillon de sang ou d'urine que l'on soumet à un examen toxicologique. Où votre appareil nous serait-il utile dans ce processus, monsieur Beaumier?Je suis un peu perdu, est-ce que vous pouvez m'aider à y voir clair?
M. Pierre Beaumier: Je crois que c'est un appareil qui serait utile pour l'ERD. Il s'agit d'un dispositif de dépistage et, en dernière analyse, s'il doit y avoir des poursuites juridiques contre une personne, vous avez besoin de confirmer ce que le dispositif de dépistage fait, de la même façon que vous devez le faire pour le système Alert en bordure de la route.
Je pense qu'il pourrait être utilisé de la même manière que le système Alert. Si un officier de police soupçonne un affaiblissement des facultés, il a le droit d'utiliser un système Alert. Il devrait avoir le droit d'utiliser un dispositif de dépistage. Peut-être avant d'utiliser l'ERD, en présence d'un résultat positif mais négatif pour l'alcool, alors on peut passer à l'ERD pour vérifier s'il y a affaiblissement des facultés. L'ERD prendrait alors un échantillon officiel qui serait envoyé au laboratoire.
L'hon. Paul Harold Macklin: Mais vous continuez de soutenir que le test qui compte est celui qui est fait en laboratoire.
M. Pierre Beaumier: Oui, c'est exact.
L'hon. Paul Harold Macklin: D'accord. Donc vous considérez que cet appareil ne peut pas remplacer ce test.
M. Pierre Beaumier: Non.
L'hon. Paul Harold Macklin: D'accord. En ce qui concerne le professeur Beyerstein, je pense que la question de l'éducation est une question très importante. Je pense que nous serons tous d'accord pour dire que l'éducation a une importance extraordinaire pour ce qui est de changer les habitudes du public, puisqu'il considère différents types de consommation de drogues.
Pour moi, la question cependant est la suivante : à défaut de devenir pharmacologiste, comment pouvez-vous exprimer au public les effets en général, et plus particulièrement les effets croisés du fait de mélanger des drogues, d'une façon significative et que le public pourrait accepter et comprendre? Je vois cela comme un domaine extraordinairement compliqué, que nous n'arrivons pas à définir de façon significative à l'heure actuelle. Nous ne pouvons pas toujours comprendre les spécialistes. Certains d'entre eux ont de la difficulté à vous expliquer ce qui se passe quand vous prenez un médicament en vente libre ou un médicament sur ordonnance et que vous le mélangez à de l'alcool, de la cocaïne ou quelque chose d'autre.
Que devrions-nous faire pour éduquer le public, si l'éducation est si importante, afin qu'il puisse comprendre quand il fait quelque chose de mal ou est sur le point de faire quelque chose qui va manifestement affaiblir ses facultés, et en particulier celle de conduire une automobile?
¿ (0955)
M. Barry Beyerstein: Bien entendu, vous avez tout à fait raison. C'est un domaine très compliqué. Je ne suis pas un expert de l'éducation antidrogue, mais il est clair que certaines personnes en font une carrière. Les bons auteurs scientifiques sont des gens très précieux. Ces spécialistes écrivent des articles pour les journaux locaux, préparent des documentaires, notamment. Ils peuvent vulgariser les notions scientifiques et les exprimer dans des termes que les non-initiés comprennent. Il existe suffisamment de spécialistes qui sont capables de remplir cette mission. En revanche, ce qu'il faut c'est la volonté d'agir et le financement nécessaire.
En outre, comme je l'ai mentionné précédemment et comme l'ont souligné d'autres témoins que vous avez entendus, il y a un autre facteur qui revêt une importance particulière : l'intervention précoce. En effet, le représentant de la GRC vous a dit que son fils, qui est maintenant un jeune adulte, ne conduirait jamais s'il avait consommé de l'alcool. Ce jeune homme a été sensibilisé efficacement au danger de la conduite avec facultés affaiblies. Ses parents ont commencé à lui en parler alors qu'il était très jeune et ont insisté sur ce message tout au long de sa vie. Par conséquent, cela va de soi.
Certains facteurs ont un effet réel sur le comportement. Comme l'a dit M. Toews, les policiers ne sont pas assez nombreux pour que nous nous inquiétions constamment de leur présence, alors il faut faire en sorte que nous acceptions les règles et que l'idée de mettre en danger la vie d'une autre personne en conduisant avec les facultés affaiblies devienne inconcevable.
La télévision et les autres moyens de communication sont des outils merveilleux qui nous aident à faire passer le message, pourvu que nous ne tombions pas dans le discours moralisateur, car cela ne donne pas les résultats escomptés. Au contraire, il faut susciter l'intérêt des gens et leur transmettre des informations. Bien entendu, c'est là mon domaine de spécialisation, que je trouve fascinant. Mais j'aime beaucoup éveiller l'intérêt de mes étudiants de cette façon. La plupart d'entre eux apprécient beaucoup les efforts de sensibilisation que nous déployons. Il faut retenir l'attention des gens en leur donnant des informations, en véhiculant un message sur les effets de certains comportements et sur les raisons pour lesquelles on doit s'abstenir de faire certaines choses.
Je crois que nous pourrions atteindre de meilleurs résultats à cet égard. Il existe d'excellents éducateurs qui ont les connaissances spécialisées que je ne possède pas et qui peuvent faire ce travail.
Le président: Merci, monsieur Macklin.
Monsieur Thompson, s'il vous plaît.
M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC): Merci à vous deux d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
À la lecture de ce projet de loi, il me semble que ses dispositions vont contribuer à remédier au problème grave auquel nous sommes confrontés, c'est-à-dire le fait que la conduite avec facultés affaiblies, pour quelque raison que ce soit, fait beaucoup trop de victimes sur nos routes.
Je comprends tout à fait l'importance des programmes de sensibilisation, dont mon collègue vient de dire qu'ils sont essentiels. Nous savons qu'il existe des programmes d'éducation civique par lesquels on demande aux gens de ne pas conduire s'ils ont l'intention de... mais nous savons également que les gens se mettent au volant alors que leurs facultés sont affaiblies, et ce, malgré ces programmes. Nous tentons de faire adopter un projet de loi qui contribuera à l'amélioration de la situation. Une fois que ces dispositions seront adoptées, j'espère que le gouvernement consacrera des fonds à la mise en vigueur du projet de loi, en fonction des besoins. Ainsi, il faut investir dans l'équipement. Je crois que la formation est également essentielle, et il faudra allouer des sommes à l'élaboration d'un plan très solide de soutien au projet de loi.
Je sais également qu'un jour ou l'autre nous devrons embaucher de nouveaux policiers. Dans ma circonscription, je ne vois plus autant de policiers patrouillant les autoroutes qu'auparavant. Je sais qu'il y a des compressions et que, dans certains cas, la croissance démographique rend la tâche des autorités plus difficile. Nous connaissons tous ces facteurs, mais nous avons pour mandat d'élaborer un projet de loi qui permettra de remédier au problème. Du moins, nous l'espérons. Il faut que le projet de loi soit accompagné d'un plan si nous voulons obtenir les résultats escomptés.
J'aimerais maintenant vous parler d'un plan grâce auquel un comté au Colorado a presque éliminé la conduite avec facultés affaiblies en 1960. Il s'agit de la région où j'habitais à l'époque où j'étais un jeune étudiant à l'université. Les conducteurs avec facultés affaiblies étaient passibles d'une confiscation de leur véhicule. Ceux qui étaient déclarés coupables perdaient leur véhicule qui devenait la propriété du comté. Peu importe s'il s'agissait du véhicule du père de l'accusé ou d'une voiture appartenant à une entreprise. C'était la peine associée à cette infraction, un point c'est tout. Lorsque les gens ont appris qu'ils risquaient de perdre leur véhicule, et qu'il leur faudrait le racheter à sa valeur marchande pour le récupérer, alors je peux vous dire que le nombre de déclarations de culpabilité a connu une chute spectaculaire.
Vous avez fait allusion aux étapes finales du processus. Je suis d'accord avec vous pour dire que la sensibilisation, la planification et la formation sont nécessaires, mais, il faut également un élément dissuasif dans la peine. Je ne sais pas si vous l'avez mentionné tous les deux, mais je sais qu'un de vous l'a fait. Je n'ai entendu qu'une partie de vos observations. Pourriez-vous préciser votre pensée? Pour ma part, j'estime que les peines qui sont infligées aux conducteurs avec facultés affaiblies sont trop clémentes. Il faut les empêcher de circuler sur nos routes avant qu'ils ne fassent une victime. C'est notre intention.
À (1000)
M. Barry Beyerstein: Si je me souviens bien, lors de son exposé, mon collègue le professeur Boyd a dit qu'il était possible que la conduite avec facultés affaiblies ne soit pas punie assez sévèrement au Canada. Je ne suis pas du tout contre les peines sévères. Par contre, si nous les rendons sévères, et cela semble être le cas dans l'exemple que vous venez de nous donner, alors il faut que les gens soient certains que la peine leur sera infligée pour qu'ils modifient leur comportement. On obtiendra alors rapidement le résultat voulu.
Je ne connais pas l'exemple que vous avez mentionné, mais il semble d'après vos propos que la peine était appliquée rigoureusement. C'est le facteur qui permet d'obtenir le résultat désiré, et tout autant que la sévérité de la peine. Par conséquent, pour toutes les infractions pénales, les peines doivent être proportionnelles aux dommages causés par l'accusé. Ce principe ne me pose aucun problème.
Tout ce que je voulais dire, c'est qu'il est peut-être bon de durcir les peines. Vous avez bien plus de connaissances spécialisées dans ce domaine que j'en ai. Nous voulons faire en sorte que les gens sachent que la peine sera imposée automatiquement et rapidement, qu'elle soit modifiée ou non. Il semble que ce soit l'élément le plus dissuasif à long terme, à tout le moins, c'est ce que concluent les études que je connais sur ce sujet.
Le président: Merci, monsieur Thompson.
Monsieur Ménard.
[Français]
M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ): Monsieur Beaumier, serait-il possible, lorsqu'on prend un échantillon d'une personne sur la route ou au poste de police, de mettre un autre échantillon dans un flacon que l'on remettrait à cette personne afin qu'elle le fasse analyser par un laboratoire indépendant?
M. Pierre Beaumier: Oui. J'ai ici une trousse pour prendre un échantillon qu'on peut envoyer au laboratoire. C'est la trousse dont on se sert le plus en ce moment aux États-Unis. On envoie un échantillon de salive au laboratoire.
M. Serge Ménard: Je veux savoir s'il pourrait y avoir deux échantillons de salive: un que la police enverrait au laboratoire, et un autre qui serait remis à la personne pour qu'elle puisse, si elle ne se fie pas au laboratoire de la police, le faire analyser par un laboratoire indépendant.
M. Pierre Beaumier: Cela ne pose pas de problème, on peut prélever deux échantillons.
M. Serge Ménard: Je comprends qu'un échantillon n'est pas une grande quantité de salive.
M. Pierre Beaumier: Je peux toutefois dire que si on donne un échantillon à quelqu'un, on ne sait pas ce qu'il va en faire. Il est préférable que la police garde les deux échantillons dans un contenant scellé. Si la personne veut avoir un échantillon pour le faire analyser par un autre laboratoire, on peut l'envoyer à ce laboratoire.
À (1005)
M. Serge Ménard: Oui. Ou on peut le lui donner dans un contenant scellé, et le laboratoire va constater s'il est scellé ou non.
Cela m'amène à ma question suivante. Est-ce qu'on doit garder ces échantillons dans des conditions particulières? Par exemple, est-ce qu'il est préférable de les mettre dans un réfrigérateur, de les congeler, ou peuvent-ils être gardés à la température de la pièce, qui peut parfois monter en été?
M. Pierre Beaumier: Quand on regarde les analyses, on constate que l'instabilité de la drogue pose un problème. Une des drogues le moins stable est la marijuana. Cela veut dire que lorsqu'on prend un échantillon, on doit l'envoyer au laboratoire aussi vite que possible, à l'intérieur d'un délai de 24 à 36 heures. Si on attend une ou deux semaines, l'agent actif de la marijuana, le THC, va se décomposer.
M. Serge Ménard: D'accord. À ce moment-là, il faut qu'il soit analysé en laboratoire dans les jours qui suivent.
M. Pierre Beaumier: Le laboratoire doit recevoir l'échantillon dans un délai de 36 ou 48 heures.
M. Serge Ménard: Vous dites « recevoir ». Est-ce que le laboratoire doit analyser l'échantillon à l'intérieur de ce délai?
M. Pierre Beaumier: Normalement, le laboratoire analyse les échantillons dans un délai de quelques heures après les avoir reçus.
M. Serge Ménard: Vous parlez peut-être de votre compagnie, mais je ne suis pas sûr que les choses fonctionnent de cette façon au gouvernement.
Ensuite, vous faites remarquer qu'aux États-Unis, je crois, les tests sont développés pour les drogues interdites.
M. Pierre Beaumier: C'est cela.
M. Serge Ménard: Mais beaucoup de drogues permises affectent aussi les facultés.
M. Pierre Beaumier: Disons que nous n'avons pas de test qui permette de déceler la présence de toutes les drogues que l'on peut retrouver dans l'organisme des conducteurs. C'est impossible.
M. Serge Ménard: D'accord.
Je constate que vous êtes bilingue.
M. Pierre Beaumier: Un peu.
M. Serge Ménard: À peu près comme moi. Je parle aussi bien l'anglais que vous parlez le français. Vous êtes conscient des « faux amis » qui existent parfois dans les langues. Par exemple, one billion, en anglais, c'est un milliard, en français.
Quand vous parlez de « 4 ppb » dans votre texte...
M. Pierre Beaumier: Ce sont quatre parties par milliard.
M. Serge Ménard: C'est ça, et non pas quatre parties par billion. En français, un billion équivaut à 1012, tandis qu'en anglais, c'est 10 9.
M. Pierre Beaumier: Je devrais vous parler des quatre parties par milliard. Les autres drogues viennent du sang et se transfèrent à la salive. Dans le cas de la marijuana, ce n'est pas la même chose. L'échantillon provient de la marijuana qu'on a dans notre bouche. Or, comme on lave notre bouche assez souvent, cela veut dire que les traces de marijuana ne durent pas longtemps.
M. Serge Ménard: D'accord.
Il y a des substances dans les trousses qu'on donnerait aux policiers sur la route pour déceler la présence de drogue dans l'organisme des conducteurs. Ces substances sont valides pendant combien de temps environ?
M. Pierre Beaumier: Un an. On parle de la trousse que j'ai ici.
M. Serge Ménard: En fait, je ne sais pas si c'est de cela qu'on parle. De notre côté, pour le moment, nous abordons la question de manière théorique.
M. Pierre Beaumier: Je crois que ces substances sont valides pour un an.
M. Serge Ménard: D'accord.
Cela suppose donc qu'on doit changer tous les ans les équipements qu'on donne aux policiers. On doit avoir un système qui fait que, au bout d'un an, on vide la voiture et on change...
M. Pierre Beaumier: C'est peut être un an ou deux ans, je n'en suis pas sûr. C'est peut être deux ans.
M. Serge Ménard: Enfin, c'est une durée de cet ordre.
M. Pierre Beaumier: Oui.
M. Serge Ménard: C'est ce que je voulais savoir.
Ma prochaine question s'adresse aux deux témoins. Si je comprends bien, monsieur Beyerstein, il est très difficile, dans le cas de substances autres que l'alcool, de déterminer quelle quantité affecte les facultés d'une personne de telle sorte qu'elle ne devrait pas conduire.
Est-ce que je comprends bien que le test le plus fiable pour déterminer si les facultés d'une personne sont affaiblies par l'usage d'une drogue au point où elle ne devrait pas conduire est encore le test de réflexes?
[Traduction]
M. Barry Beyerstein: Monsieur Ménard, je suis tout à fait d'accord avec vous. C'est exactement ce que je disais. D'ailleurs, comme les membres du comité le savent probablement, ce n'est pas si clair même pour l'alcool. Dans une certaine mesure, le seuil de 0,08 relève de la fiction juridique. En effet, il est possible que les facultés de certaines personnes soient amoindries même si elles ont consommé moins d'alcool que ce seuil, alors que d'autres personnes peuvent acquérir une tolérance et ne ressentir que très peu d'effets même si elles consomment beaucoup plus d'alcool que le seuil prévu.
À (1010)
[Français]
M. Serge Ménard: On a peu de temps. Je comprends votre confirmation. Maintenant, je voudrais aborder un autre point.
Parmi les tests objectifs, il y en a qui sont nécessairement subjectifs, parce que la nervosité occasionnée par l'arrestation et par le fait de devoir passer un test varie d'une personne à une autre et peut affecter les résultats.
Au comité, on nous a parlé de tests où la nervosité des personnes n'aurait aucune influence sur les résultats. Je crois qu'il s'agit des tests avec les yeux. Pourriez-vous nous en parler? Si on veut un critère qui soit valable pour tout le monde, je pense que c'est celui-là qu'on devrait retenir. Comprenez-vous?
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Ménard.
M. Barry Beyerstein: Oui, d'ailleurs, si j'ai affirmé que je privilégiais les tests de comportement, c'est parce qu'avec ces tests, on ne cherche pas à déterminer la cause du comportement. Peut-être permettre seulement de savoir si une personne se trouve à un certain moment dans un état qui soit compatible avec la conduite sécuritaire de son véhicule. Je crois qu'une bonne partie des éléments que les officiers ERD recherchent correspondent exactement à ce que vous venez de décrire. Par conséquent, ils sont plus objectifs.
Dans une certaine mesure, les tests de comportement sont encore plus objectifs, car on demande aux personnes concernées d'exécuter certaines tâches qui reflètent les capacités nécessaires pour conduire un véhicule en toute sécurité. Ainsi, si l'on évalue ces capacités et que les conducteurs échouent le test, il y a un résultat objectif qui permet d'affirmer que ces conducteurs ne devraient pas être au volant. Après cette étape, on peut passer aux autres tests afin de déterminer si ces conducteurs ont consommé de l'alcool ou des drogues.
Le président: Merci, monsieur Ménard.
La suivante du côté libéral est Mme Neville.
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci à vous deux. Je suis désolée d'être arrivée en retard, j'étais retenue à mon bureau.
J'ai deux types de questions et je vais les poser toutes les deux parce que je regarde l'heure également.
Monsieur Beaumier, manifestement vous avez un intérêt, mais je me demande si vous pourriez développer vos commentaires sur les laboratoires privés et sur le fait que le projet de loi C-16 devrait faire intervenir des laboratoires privés. J'aimerais savoir si selon vous il y aurait des coûts supplémentaires si nous utilisions des laboratoires privés, et quels en seraient les avantages. J'ai lu votre document.
Monsieur Beyerstein, j'ai été frappé par votre observation, je ne sais pas si c'était en réaction à une question, concernant la réactivité croisée et le fait que les drogues agissent différemment en fonction de l'importance de la consommation. Je me demande si vous pourriez préciser un petit peu. J'ai trouvé que c'était une observation intéressante. Cela complique encore plus la question.
M. Barry Beyerstein: Madame Neville, les deux questions que vous posez sont distinctes. La réactivité croisée fait référence au fait qu'il existe des tests de spécificité différente. Les tests les plus rapides, les moins coûteux, ceux qui peuvent être administrés plus facilement, sont ceux qui auront tendance à donner le même résultat pour une substance illicite et pour différentes substances qui ne le sont pas.
Mme Anita Neville: D'accord. Je suis désolée, je n'avais pas entendu cela.
M. Barry Beyerstein: L'exemple que j'ai donné était un exemple parmi tant d'autres pour exprimer la difficulté que nous avons à établir une relation de cause à effet entre le niveau d'une drogue dans le système d'une personne et le degré d'affaiblissement des facultés que cette personne peut ressentir. Je vous ai juste donné cet exemple parce que c'est quelque chose d'assez spectaculaire : deux personnes qui ont exactement la même quantité d'une substance dans le sang, et l'une est plus affectée que l'autre.
On pourrait prendre aussi une personne qui prend de la drogue le matin après une bonne nuit de sommeil, pleine d'entrain et d'énergie, prête à affronter le monde. La même quantité de drogue sera moins affaiblissante le matin, qu'elle le serait après une dure journée de travail, ou après avoir conduit toute la journée, ou après s'être couchée tard le soir ou quelque chose du genre.
Ainsi, l'effet d'une drogue varie selon la situation dans laquelle se trouve une personne et ce qui se passe dans son cerveau. L'expression que nous utilisons en psychopharmacologie est « contexte et circonstances », qui fait référence aux caractéristiques de l'individu et aux caractéristiques de la situation : sociales, psychologiques et même physiques, dans lesquelles cette personne prend la drogue.
Pour cette raison, les effets d'une drogue peuvent être extrêmement variables. Lorsque je témoigne devant un tribunal, la question que je déteste le plus est la suivante : « Dites-moi, professeur, quel est l'effet du LSD »? Eh bien, pour répondre, je devrais savoir qui l'a consommé, son âge, la quantité, dans quelle situation, etc. etc. Toutes ces choses influent sur l'effet et parfois même sur la qualité de l'effet que cette drogue a sur la conscience et le comportement d'une personne.
Pour cette raison, peu importe les recherches que nous faisons, je me demande si on pourra en arriver un jour à dire avec certitude : « Vous avez 0,00 parties par milliard de cela dans votre urine ou dans votre sang, donc vos facultés sont affaiblies ». Mais cela ne fonctionne pas ainsi, malheureusement. J'aimerais que ce soit différent, cela rendrait nos tests beaucoup plus faciles.
À (1015)
Mme Anita Neville: Vous hochez la tête, monsieur Beaumier.
M. Pierre Beaumier: Non, je suis d'accord avec lui, tout à fait.
Vous avez posé une question sur le recours au secteur privé. Je pense que c'est important que le gouvernement comprenne que la qualité se trouve dans le système des laboratoires du secteur privé. Nous sommes inspectés, vérifiés et agréés. Et à cause des gains de rendement que nous intégrons à notre système, les coûts sont généralement plus bas que ceux que vous obtenez dans le système public.
Par exemple, si vous avez lu les journaux ces derniers jours, la vérificatrice générale fait une vérification du délai, à la GRC, pour les analyses d'ADN. C'est nous qui effectuons le surplus pour la GRC à l'heure actuelle et nous renvoyons les échantillons en 30 jours ou moins. Je pense que c'est le type de rythme dont vous avez besoin pour que le système judiciaire fonctionne correctement.
Si ces tests font partie de la loi et que les échantillons commencent à arriver dans les laboratoires judiciaires publics où cela prend six mois pour effectuer une analyse, je ne pense pas que nous servions le public comme nous pourrions le faire. La plupart des échantillons qui arrivent dans notre laboratoire en sortent le même jour. Nous avons des gains de rendement et nous sommes vérifiés pour nous assurer que ces analyses sont défendables devant les tribunaux. Chaque étape du processus est consignée.
Mme Anita Neville: Est-ce que vous dites que ces gains de rendement n'existent pas dans les laboratoires publics ou dans les laboratoires de la GRC?
M. Pierre Beaumier: Je dirais qu'ils ne sont pas là dans la plupart des laboratoires publics. Il s'agit d'une attitude différente.
Mme Anita Neville: Merci.
Le président: Monsieur Toews et monsieur Breitkreuz, est-ce que vous partagez votre temps?
Monsieur Toews, allez-y.
M. Vic Toews: Merci beaucoup.
Monsieur Beyerstein, lorsque vous avez indiqué votre préoccupation par rapport à l'influence actuelle d'une drogue sur une personne, j'ai remarqué votre frustration. Finalement, vous avez besoin de témoins experts dans tous les cas, à l'heure actuelle, afin de déterminer l'influence que cette drogue a sur cet individu-là. Il ne s'agit tout simplement pas d'une réaction physiologique objective, c'est également quelque chose de psychologique ou autre. Est-ce exact?
M. Barry Beyerstein: C'est exact, monsieur.
M. Vic Toews: Vous avez exprimé votre frustration dans le contexte du LSD, par exemple. Essayons d'approfondir la chose. En gros, le projet de loi C-16 est un projet de loi d'accompagnement pour le projet de loi C-17 et la légalisation de la marijuana. Ce projet de loi essentiellement est proposé par le gouvernement afin de justifier la légalisation de la marijuana et, en même temps, afin de dire que nous nous occupons de cette question de la sécurité publique. Je crois que, dans notre cas, nous avons besoin de nous concentrer sur la marijuana.
Dans ce contexte, il est quelque peu plus facile de déterminer, physiologiquement ou objectivement, l'effet de la marijuana en termes d'affaiblissement des facultés, de la même façon que nous mesurons l'affaiblissement des facultés par l'alcool chez une personne?
M. Barry Beyerstein: Il est certainement possible de mesurer l'affaiblissement des facultés. Nous avons cependant encore le même problème que nous rencontrons dans la plupart des questions déjà posées, qui est que la recherche scientifique démontre qu'il n'existe pas une corrélation très solide entre le niveau de tétrahydrocannabinol, l'ingrédient actif, dans le sang et le degré d'affaiblissement des facultés dans lequel se trouve un individu donné. Cela complique la tâche de libeller une loi qui dit, si vous avez tel taux, vous êtes coupable, si vous êtes en deça de ce taux, vous êtes acquitté.
Ni moi ni personne d'autre ne pouvons nous lever et vous donner en toute honnêteté un chiffre qui vous permettra d'établir que cette personne subira un affaiblissement de ses facultés et pas celle-là. Bien sûr, nous pourrions établir les extrêmes. Par exemple, quelqu'un à ce niveau, manifestement aura du mal à se tenir debout ou inversement le niveau peut être si faible que personne ne penserait que cela pourrait causer du tort. Bien sûr, c'est la zone grise entre les deux qui crée toujours les difficultés.
Je pense que suffisamment de travail a été effectué sur les niveaux de tétrahydrocannabinol dans le sang et les divers index de performance pour prouver qu'il existe des différences individuelles énormes dans la population en général et même dans la même personne—pour répondre à la question de Mme Neville—à différents moments de la journée ou par rapport à différents aspects du bien-être psychologique de la personne à ce moment-là et des choses de ce genre. Je suis tout à fait pour cette recherche, parce que c'est ce que j'aime faire, mais je ne pense pas que nous allons un jour arriver à un point où nous pourrons être certains qu'au-delà d'un certain chiffre, une personne les facultés affaiblies et non en deçà de ce chiffre.
À (1020)
M. Vic Toews: J'ai lu certaines études américaines—les Américains semblent avoir fait beaucoup de recherches sur tout cela—sur les effets de consommer de la marijuana en même temps que l'alcool, par exemple. Si je comprends bien, l'effet est plus grand—les facultés sont plus affaiblies. Fumer un joint c'est comme boire une bière, mais quand on mélange la marijuana et l'alcool, les facultés sont beaucoup plus affaiblies, comme s'il y avait un effet multiplicateur. N'êtes-vous pas du même avis?
M. Barry Beyerstein: Peut-être l'effet n'est pas un effet multiplicateur, mais il est certainement plus marqué. Certains diraient peut-être que l'ensemble est plus grand que la somme de ses parties, mais en tout cas c'est vrai—le mélange de la marijuana et de l'alcool est toxique, et les effets sont plus marqués.
Il y a un aspect intéressant dont je pense qu'on vous a déjà parlé. Une des grandes différences entre la marijuana et l'alcool c'est que l'alcool a tendance à faire ressortir l'aspect macho, l'attitude de bravade. Les gens sous-estiment le degré d'affaiblissement de leurs facultés et foncent—leur attitude « bien oui, je peux le faire ». La marijuana semble avoir l'effet contraire. Les gens surestiment le degré d'affaiblissement de leurs facultés et essaient de compenser, souvent très bien, une chose qui est assez surprenante.
Une étude faite en Grande-Bretagne, si je ne m'abuse, donne un résultat assez intéressant. Dans des conditions contrôlées, on a essayé de voir comment les gens réagissent au volant avec ce mélange. Ce qui est intéressant—et cela ne contredit pas les commentaires que j'ai déjà faits ni l'intention de votre question—c'est qu'avec le mélange de marijuana et d'alcool, l'effet total ressemblait plus à l'effet de la marijuana. Les gens avaient tendance à être plus prudents. En tout cas, la marijuana n'a pas exacerbé l'impact négatif de l'alcool mais a même compensé un peu.
En tout cas, c'est toujours un risque de mélanger ces substances-là. Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus.
M. Vic Toews: Dites-vous qu'en consommant de la marijuana les gens qui ont bu trop d'alcool pourraient mieux masquer le fait que leurs facultés sont affaiblies?
M. Barry Beyerstein: Dites-vous qu'ils pourraient mieux masquer leur facultés affaiblies pendant un test?
M. Vic Toews: Vous disiez que la bravade indique que quelqu'un a les facultés affaiblies par l'alcool. Donc en regardant quelqu'un qui a aussi consommé de la marijuana, un agent de police aurait tendance à penser que ses facultés n'avaient pas l'air si affaiblies que ça. Est-ce que la marijuana pourrait avoir un tel effet?
M. Barry Beyerstein: C'est une question très intéressante. Franchement, je ne pourrais pas y répondre. En tout cas, je m'attendrais à ce que la marijuana masque l'un des effets de l'alcool dans des tests comportementaux.
M. Vic Toews: Il n'y aurait aucun changement sur le plan physiologique. On parle de la capacité de déterminer l'affaiblissement des facultés en utilisant des symptômes visuels.
Le président: Merci, monsieur Toews.
Monsieur Beyerstein, allez-y.
M. Barry Beyerstein: Je disais que les gens qui consomment de la marijuana ont tendance à conduire avec plus de prudence parce qu'ils reconnaissent que leurs facultés sont affaiblies. Leurs facultés ne sont pas aussi affaiblies que celles de ceux qui ont consommé de l'alcool à des niveaux comparables. Je disais seulement que quand on mélange les deux substances l'effet est un peu contre-intuitif. L'effet de la marijuana semble compenser cet aspect de bravade ou de machismo dont les gens pourraient faire preuve, et ceux qui ont consommé les deux substances pourraient donc conduire un peu plus prudemment que ceux qui n'avaient consommé que de l'alcool.
Je mentionne cela simplement parce que c'est un fait qui pourrait vous intéresser. Je n'essaie pas de promouvoir le mélange parce qu'il est plus sécuritaire. Ce n'est certainement pas le cas.
Le président: Merci.
Monsieur Ménard.
[Français]
M. Serge Ménard: Je voudrais revenir à la dernière question que je vous avais posée.
Nous cherchons à avoir un système qui soit rigoureux sur le plan scientifique, mais aussi le plus simple possible, pour en disséminer l'application le plus rapidement possible et de la façon la plus fiable possible. Parmi les tests ordinaires de sobriété que l'on suggère, lequel est le plus fiable pour distinguer les gens qui sont nerveux de ceux qui ne le sont pas?
Il y a des gens qui seront très nerveux devant les policiers. Par conséquent, cela affectera leur façon de marcher sur une ligne droite ou d'avoir des réflexes, n'est-ce pas? Cependant, sans nous expliquer les détails, on nous a dit ici que certains tests qui avaient trait aux mouvements de l'oeil n'étaient pas du tout affectés par la nervosité.
Quels sont les tests qui fonctionnent le mieux sur ce plan, afin que nous puissions avoir un test qui écarte le facteur de la nervosité?
À (1025)
[Traduction]
M. Barry Beyerstein: Je crois que vous parlez du test du Nystagmus du regard horizontal, qui fait partie de la batterie de tests de l'expert en reconnaissance de drogue. Je pense qu'il faudrait dire que ce sont ces tests-là que les pressions sociales et le traumatisme ou le stress de la situation dérangeraient le moins.
Les mesures des facultés que je préconisais seraient dérangées jusqu'à un certain point, mais non pas autant que certaines autres, peut-être. Je crois qu'il faudrait les administrer de façon à ce que les gens aient le temps de se calmer. Il faudrait leur expliquer que cela pourrait les innocenter tout aussi bien que les inculper, et qu'il est possible de très bien réussir ces tests si on se concentre, etc. Grâce à ce genre d'influence calmante, je pense que les problèmes que vous avez soulevés—et ce sont des problèmes réels, j'en conviens—seraient quelque peu améliorés.
[Français]
M. Serge Ménard: Vous nous avez parlé des tests d'ADN; je ne sais pas pourquoi. Mais puisque vous en parlez, je vais vous demander combien coûte un test d'ADN.
M. Pierre Beaumier: C'est une bonne question.
Parlons d'un cas. Il y a beaucoup de spécimens, mais prenons un cas particulier. Je pense que le coût est de 700 $ par spécimen analysé. C'est un prix comparable à celui de la GRC, qui nous a dit que cela leur coûtait le même montant.
M. Serge Ménard: On m'avait dit qu'au Québec, on avait les meilleurs prix au Canada, dans les laboratoires de médecine légale.
M. Pierre Beaumier: Pour les analyses d'ADN?
M. Serge Ménard: Oui, pour les tests d'ADN. On m'avait dit que cela nous revenait moins cher qu'à la GRC, en tout cas, ce qui ne m'étonne pas.
M. Pierre Beaumier: Je ne le sais pas.
M. Serge Ménard: Dans les provinces, c'est toujours moins cher qu'au fédéral.
Des députés: Oh, oh!
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): On n'est pas d'accord avec toi.
Le président: Avez-vous terminé, monsieur Ménard?
M. Serge Ménard: Oui, ça va.
[Traduction]
Le président: Monsieur Comartin.
M. Joe Comartin: Que ce soit la salive, l'urine ou le sang, lorsque l'échantillon est prélevé, est-il toujours possible d'en avoir un deuxième, de façon à permettre à l'accusé, s'il le souhaite, de le faire analyser de façon indépendante?
M. Pierre Beaumier: En matière d'urine et de sang, c'est très évident. En matière de salive, on peut prélever deux de ces ampoules de la personne. Dans notre laboratoire, nous avons un procédé en vertu duquel, s'il n'y a qu'un échantillon, il ne faut pas tout l'utiliser. Il faut en laisser, en prendre une partie, et sceller le contenant de nouveau. L'échantillon est alors disponible si la personne désire l'envoyer à un autre laboratoire pour confirmer les résultats.
M. Joe Comartin: Est-ce qu'il existe maintenant un protocole établi au Canada, que ce soit dans les laboratoires privés ou publics, régissant la prise d'échantillon et la quantité à prélever?
M. Pierre Beaumier: Je ne crois pas qu'il existe un tel protocole en matière de salive.
M. Joe Comartin: Qu'en est-il de l'urine et du sang?
M. Pierre Beaumier: Je ne le sais pas.
M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Macklin.
L'hon. Paul Harold Macklin: J'aimerais simplement faire ressortir une précision pour les fins du compte rendu.
Malgré le fait que M. Toews ait dit que le projet de loi C-17 légaliserait la possession de la marijuana, c'est inexact. Si on l'adoptait tel quel, il ne légaliserait pas la possession de la marijuana.
Le président: Merci de cette précision.
L'hon. Paul Harold Macklin: Merci.
À (1030)
Le président: Merci beaucoup de vos témoignages ce matin. C'était très intéressant.
M. Pierre Beaumier: Merci de votre attention.
J'ai une trousse pour la salive qui n'a pas encore servi, au cas où il y aurait quelqu'un qui aimerait faire un test.
Des voix : Oh, oh!
Le président: Nous allons maintenant poursuivre à huis clos. Nous sommes saisis de la motion de M. Toews, et il faut quitter la salle à 11 heures.
[La séance se poursuit à huis clos.]