JUST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 17 novembre 2005
Á | 1105 |
Le président (M. John Maloney (Welland, Lib.)) |
M. Roy Jones (directeur, Centre canadien de la statistique juridique, Statistique Canada) |
Á | 1110 |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
Á | 1125 |
Le président |
M. Vic Toews (Provencher, PCC) |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
Á | 1130 |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
M. Roy Jones |
M. Vic Toews |
Le président |
M. Vic Toews |
Le président |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ) |
M. Roy Jones |
M. Richard Marceau |
M. Roy Jones |
M. Richard Marceau |
M. Roy Jones |
M. Richard Marceau |
M. Roy Jones |
Á | 1135 |
M. Richard Marceau |
M. Roy Jones |
M. Richard Marceau |
M. Roy Jones |
M. Richard Marceau |
M. Roy Jones |
M. Richard Marceau |
Le président |
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD) |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
Á | 1140 |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
Le président |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
M. Joe Comartin |
M. Roy Jones |
Le président |
M. Borys Wrzesnewskyj (Etobicoke-Centre, Lib.) |
Á | 1145 |
M. Roy Jones |
M. Borys Wrzesnewskyj |
M. Roy Jones |
M. Borys Wrzesnewskyj |
Le président |
M. Borys Wrzesnewskyj |
Le président |
M. Borys Wrzesnewskyj |
M. Vic Toews |
M. Borys Wrzesnewskyj |
M. Vic Toews |
Le président |
M. Roy Jones |
Le président |
M. Borys Wrzesnewskyj |
M. Roy Jones |
M. Borys Wrzesnewskyj |
M. Roy Jones |
M. Borys Wrzesnewskyj |
Á | 1150 |
M. Roy Jones |
M. Borys Wrzesnewskyj |
Le président |
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC) |
M. Borys Wrzesnewskyj |
M. Garry Breitkreuz |
M. Roy Jones |
M. Garry Breitkreuz |
M. Roy Jones |
M. Garry Breitkreuz |
M. Roy Jones |
M. Garry Breitkreuz |
Le président |
M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ) |
Á | 1155 |
M. Roy Jones |
M. Marc Lemay |
M. Roy Jones |
M. Marc Lemay |
M. Roy Jones |
M. Marc Lemay |
M. Roy Jones |
M. Marc Lemay |
M. Roy Jones |
M. Marc Lemay |
M. Roy Jones |
M. Marc Lemay |
M. Roy Jones |
M. Marc Lemay |
Le président |
L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
 | 1200 |
M. Roy Jones |
L'hon. Roy Cullen |
M. Roy Jones |
L'hon. Roy Cullen |
M. Roy Jones |
L'hon. Roy Cullen |
M. Roy Jones |
L'hon. Roy Cullen |
M. Roy Jones |
L'hon. Roy Cullen |
 | 1205 |
M. Roy Jones |
Le président |
M. Richard Marceau |
Le président |
M. Vic Toews |
M. Garry Breitkreuz |
Le président |
M. Borys Wrzesnewskyj |
Le président |
M. Borys Wrzesnewskyj |
M. Garry Breitkreuz |
M. Borys Wrzesnewskyj |
Le président |
M. Joe Comartin |
Le président |
M. Joe Comartin |
Le président |
M. Joe Comartin |
L'hon. Roy Cullen |
Le président |
M. Steve Sullivan (président, Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes) |
 | 1215 |
Le président |
M. Vic Toews |
 | 1220 |
M. Steve Sullivan |
 | 1225 |
Le président |
M. Vic Toews |
Le président |
M. Richard Marceau |
M. Steve Sullivan |
M. Richard Marceau |
M. Steve Sullivan |
M. Richard Marceau |
 | 1230 |
M. Steve Sullivan |
Le président |
M. Joe Comartin |
M. Steve Sullivan |
M. Joe Comartin |
Le président |
L'hon. Judy Sgro (York-Ouest, Lib.) |
 | 1235 |
M. Steve Sullivan |
L'hon. Judy Sgro |
M. Steve Sullivan |
L'hon. Judy Sgro |
M. Steve Sullivan |
 | 1240 |
Le président |
L'hon. Judy Sgro |
M. Steve Sullivan |
Le président |
M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC) |
 | 1245 |
M. Steve Sullivan |
M. Myron Thompson |
Le président |
M. Myron Thompson |
Le président |
M. Myron Thompson |
Le président |
M. Steve Sullivan |
M. Myron Thompson |
Le président |
M. Marc Lemay |
Le président |
M. Steve Sullivan |
M. Marc Lemay |
M. Steve Sullivan |
M. Marc Lemay |
 | 1250 |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.) |
 | 1255 |
M. Steve Sullivan |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC) |
· | 1300 |
M. Steve Sullivan |
M. Rob Moore |
M. Steve Sullivan |
M. Rob Moore |
M. Steve Sullivan |
M. Rob Moore |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile |
|
l |
|
l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 17 novembre 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
Á (1105)
[Traduction]
Le président (M. John Maloney (Welland, Lib.)): La séance est ouverte.
Nous accueillons aujourd'hui M. Roy Jones, directeur du Centre canadien de la statistique juridique à Statistique Canada. Ayant beaucoup d'information à nous transmettre, M. Jones a demandé un peu plus de temps pour sa déclaration.
Nous vous accordons cinq minutes de plus. Votre déclaration sera suivie d’une période de questions et réponses.
Monsieur Jones, nous vous écoutons.
M. Roy Jones (directeur, Centre canadien de la statistique juridique, Statistique Canada): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie le comité de m'avoir invité à lui présenter aujourd'hui des informations. Je vous donnerai un bref aperçu des statistiques sur les crimes commis avec une arme à feu et la détermination de la peine au Canada, en fonction des données que nous avons recueillies dans le cadre de trois enquêtes nationales.
Le Programme de déclaration uniforme de la criminalité a été créé en 1962 pour assurer la collecte de données sur les infractions au Code criminel ainsi qu'à d'autres lois fédérales. Les données provenant de la police qui ont servi à cet exposé étaient à jour à la fin de l'année 2004.
La deuxième source de données est l'enquête sur les homicides. Il s'agit d'un recensement national des homicides déclarés par la police. Dans mon exposé, les données se rapportent à l'année à laquelle l'homicide a été signalé et non pas à laquelle le décès s'est produit. Dans le cadre de cette enquête, on recueille des données sur l'accusé et la victime dans le cas, bien sûr, des homicides qui ont été élucidés.
Nos données proviennent troisièmement de l'enquête sur les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes, dans le cadre de laquelle on recueille des données sur les causes dont traitent les tribunaux pour adultes. Il s'agit d'un recensement des accusations d'infractions aux lois fédérales dont sont saisies les cours provinciales et supérieures. Malheureusement, la mise en oeuvre de cette enquête à l'échelle du pays n'est pas terminée. Il y a actuellement 10 administrations qui fournissent des données dans le cadre de cette enquête, pour une couverture d'environ 90 p. 100. Pour l'instant, nous n'avons pas de données provenant du Manitoba, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, ni des cours supérieures de Terre-Neuve-et-Labrador, du Québec, de l'Ontario ou de la Saskatchewan.
Enfin, nous avons quelques données sur les homicides commis en Angleterre et au pays de Galles provenant du Home Office, ainsi que des données américaines provenant du FBI.
Tout d'abord regardons les tendances du taux d'homicides du Canada, des États-Unis, de l'Angleterre et du pays de Galles. Comme vous le savez, l'homicide comprend le meurtre au premier et au second degré, l'homicide involontaire coupable et l'infanticide. Les taux d'homicides sont généralement à la baisse depuis deux ans. Après avoir atteint le taux le plus bas en 36 ans en 2003, le taux d'homicides au Canada a augmenté légèrement en 2004. Bien que c'était le taux le plus élevé depuis 1997, il était le plus bas qu'il avait été en 10 ans.
En 2004, le taux d'homicides au Canada a été de 1,95 par 100 000 habitants. Au total, 622 homicides ont été signalés au Canada l'an dernier. En Angleterre et au pays de Galles, le taux d'homicides a été de 1,58 par 100 000 habitants, soit un total de 833 homicides. Aux États-Unis, le taux d'homicides a été de 5,5 par 100 000 habitants, soit 16 137 homicides signalés par le FBI.
Le taux d'homicides aux États-Unis est généralement de trois à quatre fois supérieur à celui du Canada. En Angleterre et au pays de Galles, le taux d'homicides est généralement inférieur à celui du Canada, mais les deux taux nationaux ont commencé à converger dans les années 1990. D'ailleurs, en 2003, le taux d'homicides en Angleterre et au pays de Galles a dépassé celui du Canada.
Passons maintenant aux taux d'homicides commis avec une arme à feu dans ces mêmes pays. Au Canada, en 2004, le taux d'homicides commis avec une arme à feu par 100 000 habitants a été de 0,54, soit 172 homicides commis avec une arme à feu. En Angleterre et au pays de Galles, ce taux a été de 0,14 par 100 000 habitants, pour un total très bas de 73 homicides. Aux États-Unis, environ 9 300 homicides ont été commis avec une arme à feu, pour un taux de 3,18.
La tendance du taux d'homicides commis avec une arme à feu aux États-Unis a été à la hausse à la fin des années 1980 et au début des années 1990, puis à la baisse. Le Bureau de la statistique des États-Unis a attribué ce changement au nombre de crimes violents commis avec une arme à feu par les jeunes et les jeunes adultes aux États-Unis.
Au Canada, le taux d'homicides commis avec une arme à feu a baissé depuis la fin des années 1970; il était alors de 1 par 100 000 habitants et est maintenant autour de 0,5, depuis environ 2001. En 2004, plus d'un quart ou 28 p. 100 de tous les homicides ont été commis avec une arme à feu au Canada. Aux États-Unis, ce sont deux tiers ou 66 p. 100 des homicides qui ont été commis avec une arme à feu, et en Angleterre et au pays de Galles, moins de 10 p. 100. Il y a une différence considérable entre les trois pays au chapitre de la proportion d'homicides commis avec une arme à feu.
Á (1110)
Le tableau 4 illustre les taux d'homicides selon la méthode principale pour la période allant de 1974 à 2004. Nous y voyons que les armes à feu ont constitué la principale méthode de perpétration des homicides au Canada au début de la période. En 1985, les armes blanches ont été utilisées le plus souvent pour la première fois. Depuis, les deux taux sont restés relativement semblables.
Sur les 622 homicides commis en 2004, comme je l'ai mentionné, 172 ont été commis avec une arme à feu, 205 avec une arme blanche, 136 par coups et 109 autres par une autre méthode telle que la strangulation, la suffocation ou le feu. Il y a aussi d'autres causes de décès associées à ces autres méthodes.
Les homicides par armes à feu représentaient 28 p. 100 de tous les homicides perpétrés en 2004. Il y a 30 ans, ils représentaient 47 p. 100 de tous les homicides; il y a donc eu une baisse de cette proportion. On a utilisé une arme de poing dans deux tiers des homicides commis avec une arme à feu en 2004. Avant 1990, on employait plus souvent une carabine ou un fusil de chasse.
Le tableau 5 nous montre les taux par 100 000 habitants d'homicides commis avec une arme à feu dans les cinq dernières années dans les neuf plus grandes régions métropolitaines de recensement. On emploie une moyenne sur cinq ans étant donné les fluctuations assez importantes d'année en année dans le nombre d'homicides commis avec une arme à feu dans les grands centres urbains. Les trois plus grands centres urbains au Canada — Vancouver, Toronto et Montréal — avaient les taux les plus élevés sur cinq ans, environ 0,7 à 0,9 par 100 000 habitants — autrement dit, sept à neuf par million d'habitants. C'est aussi dans ces trois grandes régions métropolitaines de recensement qu'on a vu les taux les plus élevés, sur cinq ans, de vols qualifiés commis avec une arme à feu. À Montréal, ce taux était d'environ de 28 par 100 000 habitants; à Vancouver, de 24 par 100 000 habitants et à Toronto, de 19 par 100 000 habitants.
Le tableau 6 nous montre les taux de vols qualifiés selon l'arme utilisée, de 1977 à 2004. Le total des vols qualifiés — la ligne rouge au haut du tableau — a atteint son point culminant en 1991, année où approximativement 120 vols qualifiés ont été commis par 100 000 habitants. Depuis, de façon générale, ce taux est en baisse. En 2004, la police a signalé environ 27 000 vols qualifiés, l'équivalent d'un taux de 86 par 100 000 habitants. Ce taux est de 14 p. 100 inférieur à ce qu'il était il y a 10 ans et de 28 p. 100 inférieur à ce qu'il était à son apogée, en 1991.
Le taux de vols qualifiés avec une arme à feu — la ligne noire au bas du tableau — a atteint son sommet au début des années 1980, plus précisément en 1981, année où il y a eu 36 de ces crimes par 100 000 habitants. Le taux de vols qualifiés avec une arme à feu diminue généralement depuis. Il a atteint 12 par 100 000 habitants en 2004, le taux le plus bas depuis 1977. Par rapport à l'ensemble des vols qualifiés, les vols commis avec une arme à feu sont en baisse constante depuis 1977 et représentent 40 p. 100 de tous les vols qualifiés.
Vous constatez aussi, en regardant ce tableau, que le déclin des vols qualifiés commis avec une arme à feu s'est accompagné d'une augmentation générale des vols commis avec d'autres armes. Plus de la moitié de ceux-ci ont été commis avec une arme blanche. Vous pouvez aussi voir que le taux de vols qualifiés sans arme est resté relativement stable pendant toute la période en question.
Á (1115)
En conséquence, en 2004, environ la moitié des vols qualifiés ont été commis sans arme, 35 p. 100 ont été commis avec une arme autre qu'une arme à feu et 14 p. 100 ont été perpétrés avec une arme à feu.
Le tableau 7 vous présente le pourcentage d'incidents violents mettant en cause une arme à feu ou un couteau en 2004. Dans l'ensemble, ces données proviennent d'un groupe de 120 services de police non représentatifs actuellement en mesure de signaler ces incidents dans le cadre de notre collecte de données par incident qui nous donne beaucoup plus de détails sur la nature des infractions. Celles-ci représentent environ 58 p. 100 du volume national de crimes d'après nos données d'ensemble, mais je dois souligner qu'elles ne sont pas représentatives de la situation qui prévaut dans quelque région géographique que ce soit. Elles représentent simplement les données que ce groupe de 120 services de police a pu nous transmettre.
Dans l'ensemble, au sein de ce groupe, plus de 200 000 incidents violents ont été signalés. Dans environ 6 p. 100, on a utilisé une arme blanche et dans environ 2,5 p. 100, une arme à feu. Globalement, on utilise deux fois plus d'armes blanches que d'armes à feu dans les incidents violents.
Le tableau nous montre qu'il y a des différences considérables dans la présence d'armes à feu et d'armes blanches selon l'infraction. Ainsi, dans les cas d'agression sexuelle de niveaux 2 et 3 et de voies de fait de niveaux 2 et 3, on a utilisé un couteau dans une grande proportion des incidents — soit environ un tiers et un quart respectivement. C'est un taux considérablement supérieur à celui des armes à feu utilisées lors de la perpétration de ces deux genres d'infractions, soit 8 p. 100 et 3 p. 100 respectivement.
Dans environ un tiers des homicides, on a utilisé un couteau. À l'autre extrême, on constate que ce n'est que dans une petite proportion des incidents de menaces ou de harcèlement criminel qu'on a utilisé une arme à feu ou un couteau.
Dans l'ensemble, ces informations transmises par ce groupe de 120 services de police nous indiquent qu'environ trois quarts des incidents violents signalés par la police ne mettent en cause aucune arme de quelque genre que ce soit, et cela comprend les voies de fait simples.
Passons maintenant au tableau 8 qui nous donne des informations sur les tribunaux et les peines. Je dois d'abord souligner deux ou trois choses sur les données. J'ai déjà précisé que nous ne recueillons pas encore de données pour tout le pays. Nous avons des informations provenant de tous les tribunaux provinciaux — sauf le Manitoba — mais nous n'avons pas de données provenant des cours supérieures des provinces et territoires que j'ai mentionnés plus tôt. Cela nous empêche donc de tirer des conclusions sur les peines les plus lourdes qui sont imposées par les cours supérieures. Les données incluses dans ce tableau comprennent toutefois les données que nous recevons de la cour supérieure de l'Alberta depuis six ans, de la cour supérieure du Yukon depuis cinq ans, de la cour supérieure de l'Île-du-Prince-Édouard depuis quatre ans, des cours supérieures du Nouveau-Brunswick et de la Colombie-Britannique depuis trois ans et de celle de la Nouvelle-Écosse depuis deux ans.
Nous avons regroupé les données des huit dernières années, de la période de 1996 à 2003-2004, dans ce tableau afin d'avoir suffisamment de données pour faire des distributions et des résumés statistiques.
Nous avons inclus les dix infractions pour lesquelles une peine minimale de quatre ans d'emprisonnement est prévue, soit les infractions aux articles 220, 236, 239, 244, 272, 273, 279, 344 et 346. Malheureusement, plus de 60 p. 100 des accusations qui sont déposées à ces articles ne sont pas codées d'une façon qui nous permette de déterminer si une arme à feu était présente ou non. Autrement dit, on s'est contenté de donner l'article du Code criminel ayant été violé, ce qui ne nous dit pas si on a utilisé une arme à feu ou non dans plus de 60 p. 100 des cas. Un tiers de ces infractions renvoyaient à l'alinéa b) de l'article du Code criminel ayant été violé, ce qui nous indique qu'une arme a été utilisée, mais pas nécessairement une arme à feu. Par conséquent, pour seulement 6 p. 100 de ces dix infractions, nous avons des informations codées nous indiquant qu'une arme à feu a été utilisée.
Á (1120)
Avant de passer à ce tableau, je dois dire que nous avons considéré trois infractions mixtes passibles d'une peine minimale obligatoire d'un an, dans le cas où le procureur procéderait par mise en accusation en vertu de l'alinéa 95(2)a), pour la possession d'une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte, de l'alinéa 96(2)a) pour la possession d'une arme obtenue lors de la perpétration d'une infraction et de l'alinéa 102(2)a) pour la fabrication d'une arme automatique. Nous avons considéré ces trois infractions mixtes lorsqu'il y avait insuffisamment de données de tribunaux pour les mises en accusation, pour appuyer une analyse et une présentation par répartition des statistiques sommaires.
Vous avez ici le résultat que nous avons obtenu pour les dix infractions que j'ai citées. Prenons les deux colonnes de gauche: nous avons un total de 97 condamnations en vertu de l'article 244, infliction intentionnelle de lésions corporelles au moyen d'une arme à feu. Dans ces affaires, le plaidoyer final de l'accusé était coupable dans les deux tiers des cas. Des plaidoyers finaux de culpabilité ont aussi été présentés dans 90 p. 100 des cas de condamnation pour vols qualifiés avec une arme à feu, en vertu de l'alinéa 344a) ainsi que pour les vols qualifiés sans arme à feu, en vertu de l'alinéa 344b). Enfin, le plaidoyer final de culpabilité a été donné dans environ les trois quarts des cas de condamnation pour vols qualifiés se rapportant à l'article 344, pour lesquels on ne pouvait pas déterminer à partir des données reçues si une arme à feu ou une autre arme était en cause.
À la page 9, il s'agit des mêmes affaires impliquant une arme à feu qui ont fait l'objet de décisions des tribunaux provinciaux et supérieurs, pour lesquelles nous avions des données pour cette même période de huit ans. Nous pouvons voir que dans la grande majorité des cas où il y a eu condamnation, une peine d'incarcération a été imposée. Signalons toutefois que pour les infractions à l'article 244 et à l'alinéa 344a), pour lesquelles il y a une peine minimale obligatoire, il y a aussi une peine plus lourde que l'incarcération, dans 10 à 14 p. 100 des condamnations. Il s'agit habituellement de cas pour lesquels on a tenu compte de la détention préalable au procès ou à la détermination de la peine.
Au tableau 10, on voit les peines moyennes et médianes pour ce même groupe d'infractions. Les peines moyennes et médianes d'incarcération ont une durée nettement plus élevée pour ces infractions passibles d'une peine minimale obligatoire, soit l'article 244 et l'alinéa 344a). Une incarcération moyenne pour l'infliction intentionnelle de lésions corporelles avec une arme à feu et le vol qualifié est dans les deux cas de 1 460 jours. Cela correspond à quatre années. Le quatre-vingtième percentile de détention pour ces deux infractions était de six ans, ce qui signifie que 20 p. 100 des condamnations pour lesquelles nous avions des données étaient associées à une peine d'incarcération d'au moins six ans. La peine médiane pour les 7 700 condamnations pour vols qualifiés sans arme à feu, soit l'alinéa 344b), était d'une durée de 600 jours, soit environ 20 mois.
Nous savons que la détention préalable à la détermination de la peine est prise en considération au moment où est imposée la peine. Malheureusement, notre enquête ne disposait pas de données sur le temps d'incarcération préalable à la détermination de la peine, non plus que sur les circonstances aggravantes ou atténuantes qui auraient pu être prises en considération dans la décision relative à la peine.
Á (1125)
En conclusion, les statistiques ici présentées, même si elles sont minces, sont celles qui étaient facilement disponibles à partir d'une base de données existante. Pour comprendre de manière plus détaillée les tendances en matière de détermination de la peine, il faudrait faire une recherche et une analyse visant à compléter la codification par les tribunaux des infractions, pour chaque paragraphe de la loi. Il nous faudrait aussi des données sur la durée de la peine purgée. Il faudrait une analyse des liens pour bien comprendre les antécédents criminels et il faudrait recueillir des données sur les circonstances entourant la commission de l'infraction et sur le contrevenant dont on a tenu compte au moment de la détermination de la peine.
Il importerait aussi, pour que ces répartitions soient mieux faites, de combler les lacunes dans les données des cours supérieures, pour l'ensemble du pays, puisque ce sont certainement ces tribunaux qui entendent les causes les plus graves et qui font la détermination de la peine dans ces affaires.
Voilà qui termine mon exposé.
Le président: Monsieur Toews, vous avez sept minutes.
M. Vic Toews (Provencher, PCC): Merci beaucoup.
J'ai cru comprendre, monsieur, qu'en général, on peut dire qu'il y a très peu de recherche sur l'efficacité des peines minimales obligatoires au Canada, particulièrement en ce qui touche les lois sur les armes à feu, n'est-ce pas?
M. Roy Jones: En effet, oui.
M. Vic Toews: Mais nous pouvons constater que là où il y a des peines minimales obligatoires, comme on le voit au tableau de la page 10, les peines sont nettement plus lourdes, n'est-ce pas?
M. Roy Jones: Quand nous avons l'information, oui, elles sont plus lourdes.
M. Vic Toews: C'est ce que nous disent les données?
M. Roy Jones: Oui.
M. Vic Toews: Vous avez formulé un commentaire au sujet du tableau numéro 8, au sujet du plaidoyer final de culpabilité et des pourcentages s'y rapportant. Je présume que lorsque vous dites « plaidoyer final » de culpabilité, vous voulez dire aussi les déclarations de culpabilité, et non simplement les plaidoyers.
M. Roy Jones: Oui. C'est le plaidoyer final, la décision finale dans chaque cas.
M. Vic Toews: Merci.
D'après des données américaines, l'une des raisons pour la chute du taux d'homicides, outre les peines minimales obligatoires d'emprisonnement pour l'utilisation d'une arme à feu, c'est une intervention médicale opportune. Ce qui aurait été un homicide il y a dix ans est une voie de fait grave ou une tentative de meurtre, en raison des interventions médicales faites à temps. Avez-vous des données canadiennes à ce sujet?
M. Roy Jones: Nous n'avons pas orienté nos efforts de recherche de manière à expliquer la tendance dans le taux d'homicides, à partir de ce point de vue. On nous a dit qu'il ne semblait pas y avoir de lien de ce genre. Nous ne voyons pas de changement correspondant au nombre d'accusations ou de condamnations pour tentative de meurtre, en raison de l'intervention de professionnels de la santé... Mais nous n'avons pas fait cette analyse.
M. Vic Toews: Envisagez-vous de faire cette analyse?
M. Roy Jones: C'est une analyse qui serait très intéressante. Nos activités statistiques sont fonction des priorités fixées par les sous-ministres fédéral, provinciaux et territoriaux qui font partie de notre conseil d'administration. En gros, ce sont eux qui fixent les priorités de notre plan de travail.
M. Vic Toews: Merci.
Au sujet du deuxième tableau. Pour la situation en Angleterre et au pays de Galles, où le taux d'homicides croît constamment, avez-vous cherché à savoir pourquoi? Je comprends que le nombre d'homicides dans ces pays est bien inférieur à celui des États-Unis, par exemple. Mais il semble augmenter de manière à rejoindre le taux canadien.
Nous savons qu'il y a quelques années, on a interdit les armes à feu pour les citoyens ordinaires dans ces pays. Pourtant, le taux d'homicides a continué de croître. A-t-on cherché à savoir pourquoi?
Á (1130)
M. Roy Jones: Nous n'avons pas analysé cette information et je n'ai pas de renseignements du Home Office sur une analyse qui aurait pu y être faite.
M. Vic Toews: En outre, j'ai appris qu'en Australie, où les armes à feu ont été interdites, il y a eu une augmentation marquée des homicides, des vols et d'autres infractions violentes commises avec des armes à feu. Avez-vous des commentaires à formuler ou des données à ce sujet?
M. Roy Jones: Je n'ai pas de chiffres là-dessus non plus.
M. Vic Toews: En conclusion, je dois dire que les renseignements que vous nous avez donnés sont très utiles pour voir ce que les statistique peuvent prouver, et ce qu'elles ne prouvent pas.
Le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et le ministre de la Justice lui-même nous disent constamment que les peines minimales obligatoires ne sont ni efficaces, ni dissuasives, qu'en gros, elles ne marchent pas. Pourtant, d'après votre tableau, on voit que lorsqu'une peine minimale obligatoire d'emprisonnement existe, l'incarcération imposée est plus longue et c'est à peu près la seule conclusion qu'on peut tirer de vos chiffres, ne diriez-vous pas?
M. Roy Jones: C'est vrai, oui.
M. Vic Toews: Merci.
Le président: C'est tout, monsieur Toews?
M. Vic Toews: Oui.
Le président: Monsieur Marceau, c'est à vous.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci beaucoup, monsieur Jones, de nous avoir livré votre témoignage ce matin.
L'analyse comparative que vous nous avez présentée se limite à des pays majoritairement anglo-saxons. Disposez-vous à cet égard de statistiques sur d'autres pays occidentaux, de l'Europe occidentale, par exemple?
[Traduction]
M. Roy Jones: Je n'ai pas les chiffres sous la main, non.
[Français]
M. Richard Marceau: Par contre, est-ce que c'est le cas de votre bureau?
[Traduction]
M. Roy Jones: Nous pourrions les obtenir, oui. Nous ne les avons pas actuellement.
[Français]
M. Richard Marceau: Est-ce que ce serait possible de nous les faire parvenir par l'entremise de la greffière? Nous pourrions alors établir des comparaisons avec des cultures qui ne sont pas majoritairement anglo-saxonnes.
[Traduction]
M. Roy Jones: Oui, nous le ferons volontiers.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci beaucoup.
Par ailleurs, je ne suis pas tout à fait sûr d'avoir bien compris certaines données qui figurent au tableau de la page 9. Il est question de l'article 244, en l'occurrence de l'infliction intentionnelle de lésions corporelles au moyen d'armes à feu. Est-ce à dire que pour ces 85,6 p. 100 de cas où il y a une incarcération, 14,4 p. 100 des cas ne donnent pas lieu à une incarcération?
[Traduction]
M. Roy Jones: Cela montre que la peine la plus lourde inscrite au dossier et rapportée par Statistique Canada ne comprenait pas une ordonnance de détention. Comme je l'ai dit pendant l'exposé, cela peut résulter de la détention préventive purgée avant la détermination de la peine et qui est créditée.
Pour que nous sachions combien de temps a été passé en prison dans l'attente du procès, il faudrait que nous nous adressions au Service correctionnel du Canada, que nous obtenions l'information pour chaque dossier, ce qui représente beaucoup d'analyses sur le terrain et ce qui prendrait beaucoup de temps et coûterait cher. Nous n'avions tout simplement pas le temps de recueillir ces données. Il faudrait que des ressources y soient exclusivement consacrées.
Á (1135)
[Français]
M. Richard Marceau: Que comprennent les 6,2 p. 100 qui figurent à la colonne rouge représentant toutes les autres peines?
[Traduction]
M. Roy Jones: Il s'agit de tous les autres types de peines, à part l'incarcération et la probation. Il s'agit des amendes et de toutes les conditions qui peuvent avoir été imposées. Je cherche mes notes là-dessus, mais je ne les trouve pas. Ça comprendrait aussi les absolutions inconditionnelles, les absolutions sous condition et les sursis à l'emprisonnement.
[Français]
M. Richard Marceau: J'aimerais savoir — et nous sommes toujours à la même page — quelles sont les peines imposées à nos amis vivant au sud du 49e parallèle pour les infractions correspondant à chacune des colonnes.
[Traduction]
M. Roy Jones: Je n'ai pas les données détaillées sur les peines aux États-Unis, ici, aujourd'hui. Je peux vous obtenir ces renseignements et les envoyer au comité, par l'intermédiaire de l'attaché de recherche.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci beaucoup.
Ma dernière question n'est pas tout à fait liée à des statistiques. M. Kramp a déposé le projet de loi C-215 au sujet duquel vous venez témoigner . L'annonce faite récemment par le ministre de la Justice allait un peu dans le même sens. C'est du moins ce qu'il m'a semblé. Selon vous, l'annonce de M. Cotler correspond-elle aux objectifs du projet de loi C-215?
[Traduction]
M. Roy Jones: Je suis désolé, je n'ai pas d'opinion à ce sujet.
[Français]
M. Richard Marceau: D'accord. Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Comartin, c'est à vous.
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Merci d'être là aujourd'hui, monsieur Jones.
Au sujet de la validité de ces statistiques, que vous sachiez, est-ce que des études universitaires ont remis en question leur exactitude, ou celle d'autres études, universitaires ou autres?
M. Roy Jones: Les universitaires se servent de ces bases de données pour faire leurs analyses et jusqu'ici, il n'y a pas eu de controverse ou de préoccupations importantes au sujet de la fiabilité de l'information présentée, compte tenu des contraintes et des limites du volume de données que nous avons et de la qualité de la codification dont nous disposons, par rapport à chacune des infractions.
M. Joe Comartin: Soyons un peu plus précis. Nous savons, par exemple, que beaucoup d'agressions sexuelles ne sont pas déclarées. Je présume qu'on ne pourrait pas en dire autant des crimes dont parlent les statistiques que vous nous avez présentées aujourd'hui. Il n'y a pas de disproportion dans la déclaration de ces crimes, qu'elle soit exagérée ou insuffisante: pour cela, les chiffres sont aussi exacts que possible?
M. Roy Jones: Ils se rapportent aux infractions de cette nature qui sont portées à l'attention du système judiciaire. Comme vous le savez, il peut y avoir des variances dans le taux de déclaration à la police pour ces incidents, pour que la police en fasse un suivi.
M. Joe Comartin: Mais on pourrait dire que pour le meurtre et la tentative de meurtre, il y a très peu de ces incidents qui ne sont pas déclarés?
M. Roy Jones: Oui, absolument.
M. Joe Comartin: Au sujet du taux d'homicides au Canada en 2005, pourriez-vous nous dire un peu où nous en sommes? On en a beaucoup parlé, particulièrement au sujet des grandes villes; pourriez-vous nous dire s'il y a plus ou moins de meurtres par rapport aux années précédentes?
M. Roy Jones: C'est difficile à dire. L'information n'est ni recueillie ni divulguée pour une période inférieure à un an. Il faut attendre que les services policiers aient terminé la préparation de leurs rapports, avant que nous puissions dire à quoi l'on peut s'attendre pour l'année.
Il est clair que les médias ont beaucoup parlé de ce qui se passe dans certains centres urbains comme Toronto, où il y a eu bon nombre d'homicides avec arme à feu, dans certains quartiers. Mais nous ne divulguons pas à l'avance l'information que nous recevons des corps policiers, pour l'année en cours.
M. Joe Comartin: À quel moment de l'année suivante aurez-vous ces données, pour 2005?
M. Roy Jones: Notre première publication de statistiques sur les homicides aura lieu à la fin juillet ou au début août 2006.
M. Joe Comartin: Merci.
Vous avez fait des comparaisons au sujet des accusations pour lesquelles il y a une peine minimale obligatoire. Est-ce que votre agence a fait une étude comparative du temps d'incarcération pour ces mêmes infractions, avant que soit mise en oeuvre l'imposition de peines minimales obligatoires?
M. Roy Jones: Non, nous n'avons pas fait d'analyse par rapport à ce qui se faisait auparavant. Cela ne fait pas partie du programme de recherche qu'on nous a demandé de faire en priorité. Pour répondre à votre question: non.
M. Joe Comartin: Est-il possible de le faire?
Á (1140)
M. Roy Jones: Nous pourrions nous adresser aux juridictions pour lesquelles nous avons des données. Plus nous remontons loin en arrière, moins nous aurons de données des juridictions participantes et plus il faudra aller sur le terrain recueillir de l'information pour en avoir une quantité suffisante, si l'on veut faire des comparaisons.
Techniquement, oui, c'est possible. Mais en pratique, il faudrait beaucoup de temps et d'efforts pour avoir des données comparatives cohérentes, avant la mise en oeuvre des peines minimales obligatoires.
M. Joe Comartin: Qui devrait en donner l'autorisation? Qui a le pouvoir d'autoriser cela?
M. Roy Jones: Les analystes avec lesquels je travaille au Centre canadien de la statistique juridique pourraient le faire, si cela devenait une priorité à laquelle nos ressources devaient être consacrées. Il y a toutefois d'autres façons de faire. Nous pourrions participer à un partenariat, en donnant accès à certaines de données à ceux qui voudraient faire cette recherche. Il pourrait s'agir de l'un des ministères fédéraux, d'un groupe d'universitaires dotés d'une bourse du CRSH, par exemple. Il s'agit simplement de trouver les ressources ou de fixer de nouvelles priorités pour les ressources dont nous disposons déjà au centre. Dans ce cas, une autre tâche prioritaire devrait être mise de côté.
M. Joe Comartin: Qui fixe les priorités?
M. Roy Jones: Nos instructions nous sont données par des sous-ministres provinciaux, territoriaux et fédéraux.
M. Joe Comartin: Auriez-vous une idée du temps que cela prendrait, si l'autorisation était donnée?
M. Roy Jones: J'hésite à vous donner un chiffre, juste comme ça. Nous pourrions préparer une proposition, présentant des options pour que soit menée une étude de ce genre, ou nous pourrions discuter d'un partenariat de recherche avec le service de recherche et de la statistique du ministère de la Justice, et vous donner un estimé.
M. Joe Comartin: Monsieur le président, j'aimerais qu'on discute de cela à l'une de nos séances sur les travaux futurs.
Le président: Nous espérons en avoir une aujourd'hui même, après cette séance.
M. Joe Comartin: Merci.
Au sujet de la baisse du taux d'homicides aux États-Unis, il y a deux théories. D'une part, on dit que c'est en raison du vieillissement de la population criminelle, si je puis dire, aux États-Unis, et j'aimerais que vous me disiez si cette opinion est valable. D'autre part, bien qu'on ne le reconnaisse pas toujours, une série de mesures de contrôle des armes à feu ont été mises en oeuvre aux États-Unis, particulièrement dans certains États. Cela a-t-il eu un effet sur le taux d'homicides?
M. Roy Jones: Je n'ai pas de renseignement sur les facteurs qui influencent le taux d'homicides aux États-Unis, du moins pas avec moi. Je sais qu'on s'est beaucoup penché là-dessus aux États-Unis, mais je n'ai pas l'information sous la main.
M. Joe Comartin: Pourriez-vous nous transmettre ces deux données, s'il vous plaît?
M. Roy Jones: Oui, volontiers.
Le président: Merci, monsieur Comartin.
C'est à vous, Borys.
M. Borys Wrzesnewskyj (Etobicoke-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.
Quelque chose m'inquiète quand je regarde la page 5. Je comprends pourquoi, du point de vue statistique, on emploie une moyenne sur cinq ans, mais quand la vie des gens est en jeu, cinq ans, c'est très long pour attendre des données statistiques. C'est ce que nous vivons actuellement à Toronto.
Il aurait été très utile de voir la ventilation pour chaque année, afin d'établir une tendance semblable à celle que vous avez présentée auparavant. Vous avez fait remonter cela à 1977. Pourriez-vous nous préparer quelque chose à partir de 1977, et jusqu'à aujourd'hui, pour qu'on puisse au moins voir une tendance?
Cette tâche vous répugne peut-être à vous qui êtes statisticien, mais pour nous, devoir attendre cinq ans pour pouvoir dégager une tendance ne nous aide guère à intervenir lorsque la vie des gens est menacée. Vos statistiques ne nous servent à rien. Ne pourrions nous pas avoir un tableau nous montrant la tendance depuis 1977?
Á (1145)
M. Roy Jones: Oui, nous pouvons préparer un graphique qui vous donne une ligne année après année, pour les RMR.
M. Borys Wrzesnewskyj: Iriez-vous encore plus loin? Les données peuvent être encourageantes dans l'ensemble, pour une ville de la taille de Toronto, mais il faut reconnaître qu'il y a des quartiers plus à risque. S'il y a une tendance positive pour l'ensemble de la ville, peut-on savoir s'il y a des quartiers où la tendance est nettement négative? Avez-vous des chiffres qui vous permettraient de voir ce qui se passe dans des quartiers particuliers?
M. Roy Jones: Nous avons bien des renseignements sur les lieux où se sont produits la plupart des incidents, et certainement dans le cas des homicides. Certains renseignements des services de police ont une codification géographique qui nous permet d'observer des tendances dans les crimes violents et les homicides au sein des collectivités.
Récemment, avec le financement du Centre national de prévention du crime, nous avons en partenariat étudié la répartition des tendances de la criminalité et des conditions socioéconomiques au sein de diverses collectivités du pays. Ce travail commence à produire des résultats intéressants, pour des régions plus petites que les RMR.
M. Borys Wrzesnewskyj: Il serait très utile que vous nous procuriez ces résultats.
Le président: Vous engagez-vous à nous fournir ces renseignements?
M. Borys Wrzesnewskyj: Il s'agit de fournir au comité des renseignements sur les quartiers à risque, ou des tableaux sur les lieux où se produisent les crimes avec arme à feu.
Le président: S'ils disposent de ces données.
M. Borys Wrzesnewskyj: Oui, et encore une fois, nous voudrions avoir des données statistiques année par année, sur plusieurs années.
M. Vic Toews: Je pense que ce serait là des renseignements très utiles, mais je crois comprendre qu'il y a des crimes...
M. Borys Wrzesnewskyj: Un instant, s'il vous plaît.
M. Vic Toews: Non, c'est tout à fait dans la même veine que ce que vous disiez.
On peut avoir une ventilation de la criminalité par circonscription, je l'ai déjà vue. On peut voir, pour chaque circonscription, exactement quels crimes y sont commis. Statistique Canada pourrait peut-être fournir ces données.
Le président: Monsieur Jones, pouvez-vous nous obtenir ces renseignements?
M. Roy Jones: Nous pouvons en effet fournir l'information que nous avons pour des régions ou des parties de collectivités. Nous n'avons pas des renseignements détaillés pour tous les types d'infractions, à ce niveau-là, parce que les chiffres sont trop petits, mais nous avons commencé à nous pencher là-dessus. Si nous avons de l'information, nous vous la fournirons volontiers.
Le président: Merci.
Continuez, monsieur Wrzesnewskyj.
M. Borys Wrzesnewskyj: Merci.
On a beaucoup parlé des statistiques, surtout américaines, sur les peines minimales obligatoires, pour dire qu'elles n'avaient aucun effet, mais je crois aussi que pour les crimes commis avec une arme à feu, ce n'est peut-être pas vrai, d'après certains rapports. Est-ce que je trompe?
M. Roy Jones: Je n'ai pas ces renseignements ici.
M. Borys Wrzesnewskyj: Comme je le disais, on cite très souvent des études américaines. N'est-il pas vrai qu'aux États-Unis, la culture est très différente de la nôtre? Là-bas, la constitution garantit le droit de porter des armes. Essentiellement, les Américains ont une culture des armes à feu. Ces statistiques, même si elles montrent une certaine tendance, pourraient ne pas s'appliquer à un milieu culturellement très différent comme le Canada.
M. Roy Jones: Je ne suis pas en mesure de faire une déclaration sur l'incidence des différences culturelles entre les Américains et les Canadiens. Je le répète, nous avons commencé à faire une analyse par rapport aux conditions socioéconomiques d'une collectivité, et nous commençons à voir les associations statistiques qui sont disponibles, mais nous n'avons pas tenu compte des différences culturelles.
M. Borys Wrzesnewskyj: Merci.
Je suis désolé, je vous presse parce que j'ai beaucoup de questions. Quand on vous cite des chiffres qui disent une chose, mais que vous voyez autre chose sur le terrain, c'est inquiétant.
Les études dont on parle constamment font aussi allusion à l'effet de dissuasion. Est-ce que des études montrent le taux de récidive pour quelqu'un qui revient chaque six mois dans sa communauté, après avoir commis un crime. Est-ce que le taux de récidive serait le même si cette personne ne revenait dans son milieu qu'après six ans? Je ne parle pas de sa récidive personnelle, mais de l'effet de dissuasion de la violence dans un quartier?
La tendance que je constate, sans pourtant détenir de données statistiques qui le prouvent, c'est qu'il y a une ghettoïsation de ces quartiers à risque, où reviennent constamment les criminels. Outre l'effet dissuasif sur le criminel même, il y en a peut-être un... Si ces gens sont retirés de leur milieu...
D'ailleurs, comme parlementaire, j'ai l'obligation de veiller à la sécurité de la société. Que le temps d'incarcération soit dissuasif ou non, nous avons l'obligation de protéger la société. Est-ce que des statistiques prouvent que lorsque ces personnes sont retirées de leur milieu pendant six mois, le nombre d'actes violents dans ces voisinages à risque baisse?
Á (1150)
M. Roy Jones: Comme je le disais, nous n'avons pas fait d'analyse sur les récidivistes violents dans leur milieu ni sur l'incidence des diverses peines d'emprisonnement sur le taux de criminalité. Cette analyse n'a pas été faite, que je sache. Certainement pas chez nous, du moins.
M. Borys Wrzesnewskyj: Me reste-t-il encore du temps?
Le président: Non, vous avez même dépassé votre temps de trois secondes et je vous interromps tout de suite.
Monsieur Breitkreuz, vous avez la parole.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC): Ah, vous ne lui donnez pas une autre minute. Bien.
M. Borys Wrzesnewskyj: Si vous voulez bien me céder...
M. Garry Breitkreuz: Vous aurez une autre occasion de parler.
Dans la même veine : d'après ce que vous nous avez dit, il semble y avoir une corrélation entre une augmentation des peines — résultant de peines minimales obligatoires — et une réduction du nombre de vols qualifiés commis au moyen d'une arme à feu, puisque ces gens ne sont pas dans la collectivité.
Ne pourrions-nous pas faire cette extrapolation, à partir des données de la page 10?
M. Roy Jones: J'aurais quelques réticences à accepter une telle extrapolation en l'absence d'une analyse des autres options de programme.
M. Garry Breitkreuz: Bien; vous pourriez peut-être faire cette analyse.
J'aimerais poursuivre les questions de mon collègue sur la culture et tout le reste, car j'ai trouvé des statistiques — et j'espère que vous me les fournirez — selon lesquelles 70 p. 100 des actes criminels à main armée commis aux États-Unis se produisent dans 3 p. 100 des États. Si vous faites l'analyse pour le Canada, il serait utile de la faire également pour les États-Unis, car je connais une étude qui comparaît les cultures dans l'Ouest canadien avec celles des États-Unis. Par exemple, dans les provinces des Prairies, le taux des crimes où une arme à feu est utilisée est beaucoup plus élevé que dans les États américains situés à proximité, notamment le Dakota du Nord et le Montana, où la culture est très semblable et où il n'y a presque pas de lois sur les armes à feu. Pourtant, dans ces régions, la criminalité impliquant des armes à feu est beaucoup plus élevée au Canada.
Pourriez-vous également nous fournir une analyse portant sur deux régions frontalières de culture semblable?
M. Roy Jones: Nous pourrions vous fournir des renseignements de cette nature au niveau provincial, mais nous ne pouvons pas analyser les points de convergence ou de divergence culturelle. Nous pouvons vous fournir des chiffres mais nous ne faisons pas d'analyses dans le domaine culturel.
M. Garry Breitkreuz: Il faudrait essayer d'établir le rapport entre les deux.
Est-ce que vous pouvez nous fournir les statistiques circonscription par circonscription au Canada ainsi que dans les comtés américains limitrophes?
M. Roy Jones: Je vais demander à nos homologues américains les renseignements pertinents et nous pourrons étudier en détail le niveau des infractions pour chaque zone géographique.
M. Garry Breitkreuz: Oui, car nous aimerions comparer les provinces des Prairies aux États américains limitrophes, qui font aussi partie des Prairies. Une telle comparaison me semble pertinente.
Si vous revenez, nous pourrons approfondir la question.
Le président: Merci, monsieur Breitkreuz.
À vous, monsieur Lemay.
[Français]
M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ): Bonjour, monsieur Jones.
J'aime bien discuter de statistiques parce qu'on peut leur faire dire à peu près n'importe quoi. Pour ce qui est des tableaux des pages 8 et 9, êtes-vous d'accord pour dire que pour ce genre de crimes, l'emprisonnement est la règle et les autres sentences, l'exception? Est-ce qu'on s'entend sur ce point?
Á (1155)
[Traduction]
M. Roy Jones: Oui, c'est exact.
[Français]
M. Marc Lemay: Savez-vous si des statistiques existaient avant l'apparition des sentences minimales d'emprisonnement? On a commencé à appliquer ce type de sentences dans le cas de certains crimes il y a quelques années. Dans le cadre de ma pratique, j'ai vu appliquer des sentences minimales d'emprisonnement dans des cas comme l'utilisation d'une arme à feu en vue de commettre un délit. On commence par imposer une peine d'un an, puis de trois ans.
J'aimerais savoir si vous disposez de statistiques datant d'avant et d'après l'imposition de ces sentences minimales d'emprisonnement. Le cas échéant, pourriez-vous nous les faire parvenir assez rapidement?
[Traduction]
M. Roy Jones: Oui, nous allons essayer de vous les fournir le plus vite possible.
[Français]
M. Marc Lemay: Vous disposez de ce genre de statistiques?
[Traduction]
M. Roy Jones: Nous n'avons pas fait d'analyse comparative de la situation avant et après l'imposition des sentences minimales obligatoires, mais les bases de données de certaines juridictions ont de l'information sur la période antérieure à l'imposition des sentences minimales obligatoires et nous devrions pouvoir faire des compilations pour voir l'évolution des sentences.
[Français]
M. Marc Lemay: Obtenez-vous vos données auprès des corps policiers ou des ministères de la Justice? D'où viennent les chiffres que vous accumulez?
[Traduction]
M. Roy Jones: L'information judiciaire nous est transmise directement par les systèmes de gestion de l'information; elle provient des ministères provinciaux et territoriaux responsables des cours de justice. Nous avons des interfaces électroniques informatisées qui consultent leurs bases de données avec des protocoles normalisés, qui recueillent l'information et nous la livrent à des fins analytiques et statistiques. Nos données viennent donc de l'information compilée à partir de chaque greffe de tribunal.
[Français]
M. Marc Lemay: Depuis combien d'années procédez-vous de cette façon?
[Traduction]
M. Roy Jones: Notre première collecte de renseignements dans les différentes juridictions a commencé en 1994, soit il y a une dizaine d'années. Les juridictions commencent à participer au programme à mesure que leurs systèmes automatisés d'information deviennent capables de répondre aux exigences nationales et de fournir des données acceptables quant à leur qualité et leur exhaustivité.
[Français]
M. Marc Lemay: Est-ce que les statistiques dont vous disposez comprennent aussi les causes entendues à la cour des assises criminelles, c'est-à-dire, dans le cas de certaines provinces, à la Cour supérieure?
[Traduction]
M. Roy Jones: Oui, car les juridictions ont souvent des systèmes d'information séparés et il faut créer des interfaces distinctes pour les tribunaux des différents niveaux. Une fois les systèmes intégrés, nous sommes en mesure de recueillir, grâce au même protocole de collecte, des données provenant des tribunaux et des cours de tous les niveaux.
[Français]
M. Marc Lemay: Enfin, au chapitre des crimes commis, on observe d'une part une diminution sensible de l'utilisation des armes à feu, et d'autre part une augmentation sensible de l'utilisation d'armes blanches, que ce soit des poignards, des couteaux ou d'autres armes du genre. Êtes-vous d'accord sur cette observation?
[Traduction]
M. Roy Jones: Nous constatons effectivement une augmentation relative du nombre des infractions violentes avec utilisation d'une arme autre qu'une arme à feu.
[Français]
M. Marc Lemay: Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Cullen, s'il vous plaît.
L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur Jones.
À la page 10, on voit: « 244 — Infliction intentionnelle de lésions corporelles — arme à feu »; excusez mon ignorance, je ne suis pas avocat, mais est-ce que cette rubrique comprend les meurtres?
 (1200)
M. Roy Jones: Non.
L'hon. Roy Cullen: Bien. Avez-vous les données correspondantes pour les meurtres?
M. Roy Jones: L'information sur les meurtres ne figurent pas sur ce tableau, mais nous avons les renseignements concernant les meurtres et les homicides involontaires dans les juridictions qui transmettent leurs données. Pour les meurtres au premier et au second degré, du fait de la juridiction exclusive des cours supérieures et en l'absence de la participation de l'Ontario, du Québec et de plusieurs autres juridictions, nous n'avons pas beaucoup d'information sur les sentences imposées. Nous en recevons en petite quantité chaque année. Nous pourrions vous la communiquer pour chaque niveau de tribunal, mais cela ne figure pas dans le document.
L'hon. Roy Cullen: Ce n'est pas dans le document. Dans ce cas, je ne comprends pas très bien votre travail. Les meurtres sont pourtant des crimes assez graves. Vous dites que c'est un problème de collecte de données?
M. Roy Jones: C'est une question d'accès aux données de certaines juridictions. Nous ne recevons pas d'information des cours supérieures des deux plus grosses provinces du pays. Nous travaillons avec l'Ontario. Nous devons rencontrer cette semaine des gens du gouvernement de l'Ontario pour tenter de régler le problème à partir de l'année prochaine.
L'hon. Roy Cullen: Dans ma circonscription de Toronto, les meurtres avec utilisation d'une arme à feu sont nombreux.
À la colonne 244, vous dites que la durée médiane était de 4 ans et qu'il y a eu 20 p. 100 de sentences sur au moins six ans. Ce sont des sentences prononcées par un juge, n'est-ce pas? Il ne s'agit pas de la durée de la peine purgée. Je ne vous demanderai pas de données supplémentaires, car vous en avez déjà pour deux ans de travail avec toutes les données que nous vous avons demandées; néanmoins, avez-vous une idée ou des données sur la durée des peines effectivement purgées pour la médiane des sentences, soit quatre ans?
M. Roy Jones: Les services correctionnels nous fournissent une information limitée sur la durée des peines purgées. Cette information ne nous est pas fournie par les tribunaux. Malheureusement, les services correctionnels ne nous fournissent pas, actuellement, d'information spécifique aux différentes activités criminelles. Nous sommes en train de préparer une étude de microdonnées concernant des cas concrets. Nous avons commencé l'année dernière. La Saskatchewan nous envoie de l'information à titre expérimental, nous l'analysons, mais nous n'avons pas accès à cette information dans les autres juridictions pour l'instant.
L'hon. Roy Cullen: À Toronto, on constate que les individus condamnés pour agression à main armée deviennent souvent des récidivistes. Il y a aussi un problème de libération sous caution. Je sais que cela ne relève pas vraiment de votre compétence, mais est-ce que vous avez des données concernant la récidive et les conditions de la libération sous caution? Arrive-t-il fréquemment que les individus condamnés pour agression grave à main armée récidivent alors qu'ils sont en libération sous caution ou après avoir purgé leur sentence?
M. Roy Jones: Jusqu'à présent, nous avons fait des analyses pour détecter les cas où un individu déjà condamné se retrouve en contact avec la police ou avec les tribunaux. Les chiffres sont relativement modestes en général, compte tenu des données dont nous disposons, car pour faire ce genre d'analyses, il faut des données portant sur une période assez longue. Je serais heureux de vous fournir les résumés que nous avons produits jusqu'à maintenant à ce sujet. Malheureusement, nous n'avons pas beaucoup d'information correspondant aux différentes catégories d'infraction.
L'hon. Roy Cullen: L'information dont vous disposez nous serait utile.
Je vous pose ma dernière question, même si elle sort du cadre de vos activités, pour le cas où vous auriez des données à ce sujet. Vos données indiquent, je crois, qu'en plus des crimes avec recours à une arme à feu, il faut aussi considérer les crimes commis avec d'autres armes, des couteaux, par exemple. C'est un sujet dont le comité a débattu et on semble considérer majoritairement qu'il faut d'abord s'occuper des crimes avec recours à une arme à feu. En tant que député de Toronto, j'aimerais effectivement qu'on s'occupe des armes à feu, mais il y a d'autres villes, comme Winnipeg ou Regina, où les homicides sont commis par des gens qui se battent à coups de couteau.
Ma question concerne sans doute davantage les sciences comportementales, mais il est très facile, malheureusement, de se procurer un revolver. Dans les émissions comme W-FIVE, on vous dit qu'il suffit de prendre le téléphone pour obtenir un revolver en quelques heures. Et malheureusement, je pense que c'est assez vrai.
Pour tuer quelqu'un avec une arme à feu... Pour celui qui veut tuer quelqu'un, il est facile de tirer sur la détente. C'est assez propre, en un sens, alors que tuer quelqu'un avec un couteau, c'est assez affreux et brutal. Je me demande pourquoi il faut faire une différence entre les armes à feu et les couteaux, mais j'aimerais qu'on fasse une telle différence, car dans ma circonscription, les couteaux ne sont pas très en vogue, alors que les armes à feu le sont.
Est-ce que vous avez travaillé dans ce domaine?
 (1205)
M. Roy Jones: Non.
Le président: S'il n'y a pas d'autres questions du côté conservateur, nous allons passer à M. Macklin. Je ne peux encore vous donner la parole, monsieur Toews, car tout le monde a droit à une première question.
[Français]
M. Richard Marceau: Excusez-moi, monsieur le président. Ne devions-nous pas terminer à midi, de façon à pouvoir entendre M. Sullivan?
[Traduction]
Le président: J'ai encore deux noms sur ma liste. Compte tenu de toute l'information sur laquelle nous avons demandé des engagements, il semble probable que le témoin devra revenir une autre fois.
J'ai sur ma liste les noms de M. Macklin et de Mme Sgro, ainsi que Borys pour un deuxième tour, et M. Toews vient d'indiquer qu'il souhaite intervenir une deuxième fois.
M. Vic Toews: Non, je veux simplement une précision. D'après les règles suivies dans ce comité, chaque membre du comité a le droit d'intervenir avant le deuxième tour, mais si un conservateur renonce à intervenir, il peut donner son tour à quelqu'un d'autre, de n'importe quel parti. Un conservateur qui a la parole pourrait la céder à M. Cullen s'il le souhaite, mais pas à M. Macklin. Je crois que les règles prévoient spécifiquement qu'on ne peut donner la parole à M. Macklin.
Des voix: Ah, ah!
M. Garry Breitkreuz: M. Cullen vient de poser une excellente question.
Le président: Est-ce que vous souhaitez que M. Jones revienne devant le comité?
Des voix: Oui.
Le président: Monsieur Jones, nous allons vous demander de revenir avec l'information que vous nous avez promise. Nous reprendrons contact avec vous et nous poursuivrons notre étude.
Oui, Borys.
M. Borys Wrzesnewskyj: Une précision, monsieur le président — étant donné que nous allons demander au témoin de revenir — nous sommes évidemment dans une situation particulière, puisque ce gouvernement risque de ne plus durer très longtemps, et je suis un nouveau député. Y a-t-il un mécanisme qui permette d'éviter qu'un projet de loi à l'étude en comité ne disparaisse lorsque le gouvernement est défait? Est-ce que les leaders à la Chambre peuvent se mettre d'accord ou est-ce qu'un comité...
Des voix: Il disparaît.
Le président: À la dissolution, tout disparaît.
M. Borys Wrzesnewskyj: Il n'y a donc pas de mécanisme...
Une voix: Même en cas de prorogation?
M. Garry Breitkreuz: Pour la prorogation, c'est différent; le projet de loi peut être présenté de nouveau. Si vous préférez une prorogation, je suis sûr que le gouvernement vous écoutera avec bienveillance.
M. Borys Wrzesnewskyj: Merci pour cette précision.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Jones. Votre témoignage a suscité beaucoup d'intérêt.
 (1208)
 (1210)
M. Joe Comartin: Oui, monsieur le président, au sujet de nos travaux futurs dont nous devions discuter à la fin de la séance: je vous signale que je dois prendre l'avion à 14 heures et que je dois donc partir vers 12 h 45. D'un point de vue pratique, étant donné l'incertitude qui règne actuellement au Parlement, pourrions-nous reporter cette discussion d'une semaine, en attendant de voir les conséquences de ce qui se produira à la Chambre la semaine prochaine? Je crois qu'on a déjà prévu l'ordre du jour de nos deux prochaines séances, ainsi que du mardi suivant.
Le président: Et même du jeudi suivant, monsieur Comartin. Nos séances sont organisées pour les deux prochaines semaines.
M. Joe Comartin: Nous ne serons peut-être plus ici, à cette date-là.
Le président: Vous êtes préoccupé parce que l'opposition propose de faire tomber le gouvernement lundi prochain, ou plutôt lundi en huit?
M. Joe Comartin: Toutes sortes de rumeurs de ce genre circulent en effet, monsieur le président.
L'hon. Roy Cullen: Attendons que le juge Gomery ait présenté son rapport final.
Le président: On demande de reporter le...
Des voix: Adopté.
Le président: D'accord? Merci.
Monsieur Sullivan, nous sommes ravis de vous revoir. Vous pouvez nous donner votre exposé.
M. Steve Sullivan (président, Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes): Merci, monsieur le président.
Je suis toujours content de comparaître devant le comité. C'est un moment intéressant de notre histoire. Je n'étais pas convaincu que le gouvernement tiendrait si longtemps et je suis ravi de voir que c'est le cas.
Je félicite M. Kramp pour tous les efforts qu'il a consacrés à ce projet de loi et à son dépôt. Je pense qu'il a certainement contribué au débat public sur cette question et incité le Parlement à en discuter: il s'agit d'agression à main armée et de la façon dont notre pays et ses institutions peuvent y réagir.
D'abord, je dois me prononcer pour les principes du projet de loi et je dirais qu'il y a consensus, certainement au Parlement mais aussi au sein du public, sur la nécessité de lutter plus sérieusement contre l'agression à main armée. Je pense même que beaucoup s'entendent pour dire que les peines minimales obligatoires peuvent être l'une des solutions à ce problème. C'est à vous, comme comité, de décider de la durée des peines minimales obligatoires. Certains d'entre nous n'aiment pas cette idée, mais les préoccupations exprimées par le ministère au sujet de la constitutionnalité de la durée de ces peines sont légitimes. Mais il y a sans aucun doute des personnes plus compétentes et plus expérimentées que moi, pour vous parler de cette question.
J'ai rencontré hier le ministre de la Justice, pour parler de diverses questions. Il m'a annoncé qu'il espérait présenter plus tard ce mois-ci un ensemble de mesures qui comprendraient aussi, si j'ai bien compris, des peines minimales obligatoires. Il semble donc qu'il y ait un consensus là-dessus. Il s'agit simplement de déterminer quelle sera la durée de ces peines.
Je ne sais pas si j'ai beaucoup de statistiques à vous fournir pour alimenter votre discussion. J'ai entendu une partie du témoignage précédent qui vous a donné beaucoup de renseignements à assimiler et prendre en considération. Voici plutôt ce dont j'avais l'intention de vous faire part ce matin. Je répondrai aussi volontiers à vos questions. Nous parlons de crimes et de violence et je suis content de voir que le comité, dont j'ai lu la transcription des délibérations, parle des victimes de la criminalité, puisque ce sont ces victimes qui assument le coût de la violence.
Le ministère de la Justice a fait une étude et a constaté qu'en 2003, le coût de la criminalité était d'environ 70 milliards de dollars, dont environ 67 p. 100 étaient supportés par les victimes. Dans une autre étude, on a constaté que pour la déclaration de crimes avec violence par les victimes, et non par la police, quand on considère uniquement les douleurs et les souffrances subies par la victime d'un acte criminel violent, cela représentait plus de 20 milliards par année. Pour les infractions contre les biens, il s'agissait de plus de 15 milliards de dollars par année. Et il ne s'agit que des douleurs et souffrances de ceux qui ont été le plus touchés par le crime.
Ces chiffres sont énormes et je pense que même les chercheurs reconnaîtront qu'ils ne tiennent pas compte de toutes les incidences des crimes avec violence. Nous travaillons auprès de nombreuses familles ayant vécu un homicide, avec une arme à feu, avec une arme blanche ou au moyen d'une autre forme de violence. L'incidence sur ces familles va bien au-delà des époux ou des parents. Au-delà de la famille immédiate, elle touche aussi les amis, les proches et les compagnons de travail.
Nous travaillons actuellement avec quelques victimes qui ont subi une violence physique mais qui y ont survécu. L'une d'elles a perdu un oeil quand son mari lui a tiré dessus avec un fusil de chasse, pendant une scène de ménage. Un des hommes avec qui nous travaillons a été battu à coups de marteau sur la tête et a subi des lésions cérébrales; essentiellement, il a perdu la garde de sa fille parce qu'il n'est plus capable de s'occuper d'elle. Voilà les incidences concrètes de la criminalité. Je sais qu'à Toronto, ces derniers mois, on a vu des incidents vraiment horribles. Un garçon de quatre ans a été blessé. Ce garçon subira les séquelles de ses blessures toute sa vie, comme ses parents qui prennent soin de lui.
Voilà quels sont les vrais effets du crime. Quand on parle du système judiciaire, la détermination de la peine est certainement un aspect important qui permet aux victimes de déterminer si, à leurs yeux, justice a été faite. Mais ce qui est tout aussi important, c'est la façon dont nous traitons les victimes d'actes criminels. Nous devons nous assurer que des mesures existent pour qu'on prenne soin d'elles, qu'il s'agisse de counselling, d'indemnisation ou de détermination des peines des criminels.
Vous le savez, la détermination de la peine est une procédure très complexe. Votre comité en a certainement déjà beaucoup parlé. Certaines victimes que nous aidons doivent témoigner, par exemple, pour une agression sexuelle armée — l'arme pouvant être une arme à feu — et entendent que la peine maximale pourrait être de 14 ans. Après la détermination de la peine, procédure que personne ne leur explique, elles ne comprennent pas que leur agresseur puisse avoir une peine de moins de deux ans.
 (1215)
Comment pouvez-vous expliquer à quelqu'un qui doit vivre avec ce traumatisme que la peine maximale pour la plus grave infraction est de 14 ans, mais qu'en réalité, les peines imposées sont bien en deçà de cela? Je ne prétends pas, pas plus que M. Kramp, je pense, que des peines plus longues ou plus sévères sont la solution, mais c'est certainement un élément important.
Quelle que soit la durée fixée pour les peines minimales, je pense qu'il est aussi important de sensibiliser le public à ce sujet. Je crois qu'il est vrai que beaucoup de criminels ignorent tout de ces choses et pensent tout simplement qu'ils ne se feront pas prendre.
Nous avons fait récemment une étude sur l'effet des homicides non résolus sur les membres des familles des victimes. Nous avons étudié des dossiers remontant à 20 ou 30 ans. D'après ce que nous avons constaté, aux États-Unis comme au Canada le nombre d'homicides non résolus semble croître. Prenons la situation de Toronto, cette année: on comprend alors pourquoi. Il y a une réduction du nombre d'homicides qui sont relativement faciles à résoudre comme l'homicide de conjoints ou de membres de la famille. Ils représentent tout de même la majorité des homicides au Canada, mais leur nombre a un peu diminué. L'augmentation, du moins certainement cette année à Toronto, se voit chez les crimes associés aux gangs et à la drogue, qui sont les plus difficiles à résoudre. Au cours des dernières années, pour le quart des homicides au Canada, on n'a pas trouvé le coupable. Les ressources consacrées à ces enquêtes sont colossales, de même que l'effet sur les familles.
Pour résoudre le problème, on peut d'abord, par la détermination de la peine, s'assurer que ceux qui se livrent à ce genre d'activité comprennent de quelle peine ils sont passibles et aussi, augmenter la chance qu'ils soient arrêtés. Beaucoup de gens pensent qu'ils ne se feront pas prendre et malheureusement, certains d'entre eux ont raison. Et dans ces situations de violence associées aux gangs et aux drogues, les témoins sont réticents.
Je pense que c'est une partie importante du débat public et je félicite le comité. Je sais que vous avez entendu divers témoins. Je félicite M. Kramp d'avoir lancé le débat. Je ne sais pas si nous verrons des mesures proposées par le gouvernement, mais nous avons certainement hâte d'en voir.
Je répondrai volontiers à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Sullivan.
Monsieur Toews, vous avez sept minutes.
M. Vic Toews: Merci, monsieur Sullivan, merci pour votre dévouement et le travail que vous effectuez au centre pour les victimes de violence.
Il y a deux questions dont j'aimerais vous parler. D'abord, les droits des victimes, non seulement dans la loi mais dans la Constitution. Je suis de plus en plus séduit par la théorie selon laquelle l'article 7 de la Charte des droits, qui porte sur le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne, ou le droit de ne pas en être privé, pourrait donner aux victimes des raisons constitutionnelles d'exiger certains droits du gouvernement, lorsque le gouvernement se désintéresse de ce qui leur arrive. C'est la première question.
La deuxième question que vous soulevez se rapporte à la sensibilisation du public. Dans un débat récent sur la détermination de la peine, dans le contexte du projet de loi C-53 sur la cruauté contre les animaux, l'un des députés libéraux a déclaré que le problème, ce n'était pas la loi, mais le système judiciaire. Peut-être que le député libéral avait enfin compris quelque chose que nombre de personnes ont compris depuis déjà des années.
Il ne s'agirait donc pas tant de sensibiliser le public que de renseigner la magistrature. Par nécessité, les juges sont indépendants. Nous protégeons ardemment leur indépendance dans l'application et l'administration de la loi. Ils devraient tout de même comprendre le contexte social des lois qu'ils appliquent. Souvent, ils l'oublient. Un précédent qui était tout à fait pertinent il y a cinq ans peut ne plus l'être aujourd'hui. Mon collègue de Toronto vient de parler des fusillades dans la métropole. Il est clair que des précédents qui étaient pertinents il y a dix ans ne le sont plus, dans ce contexte.
La théorie dont je fais la promotion, c'est que l'une des responsabilités du Parlement, lorsqu'il s'agit de renseigner les juges d'une manière constitutionnelle, c'est de fixer des peines minimales obligatoires d'emprisonnement, pour dire essentiellement que les précédents ne conviennent plus et qu'il faut en créer de nouveaux, en suivant l'orientation donnée par le Parlement aux juges, par l'adoption de mesures législatives. Nous avons constaté que la création dans les lois de peines maximales plus lourdes n'a pas eu pour résultat une augmentation correspondante des peines imposées en réalité.
J'aimerais savoir ce que vous pensez, monsieur, de ces deux questions.
 (1220)
M. Steve Sullivan: Merci, monsieur Toews.
En ce qui concerne l'article 7 de la charte, cela fait un bon moment que nous parlons maintenant de la question de la relation entre la charte et les victimes de la criminalité.
Vous savez peut-être qu'il existe, aux États-Unis, un mouvement visant à modifier la Constitution américaine. Le président actuel, M. Bush, appuie cette tendance et elle avait également l'appui de l'ancien président, M. Clinton. En fait, ils ont presque failli l'obtenir l'an dernier, mais n'ont pas eu le nombre de voix nécessaires. Il y a donc eu un compromis. Mais il y a quand même un mouvement pour que cela se fasse. Je crois que la majorité des États américains ont modifié leur propre constitution de façon à défendre les droits des victimes.
L'une des discussions que nous avons eues hier avec le ministre portait... Pour le gouvernement fédéral, je crois qu'il s'agit d'un problème sérieux, parce que les provinces ont compétence en ce qui concerne les victimes. Toutefois, nous devons vraiment trouver des moyens de rendre les droits des victimes plus importants dans le système. Le ministre a parlé d'une loi canadienne pour les victimes de la criminalité.
Je crois que cela nous amène, en quelque sorte, à votre deuxième observation, au sujet de l'éducation. Le mouvement de défense des droits des victimes a eu des succès importants au cours des dix ou vingt dernières années, mais l'attitude des intervenants du système judiciaire — les juges, parfois les procureurs et, certainement, les avocats de la défense — n'a pas beaucoup évolué. Ces gens-là ne pensent toujours pas que les victimes sont une partie intégrante du système et je crois que les éduquer, au niveau le plus élémentaire... Je crois que la charte va leur transmettre un message bien senti.
Pour ce qui est de votre deuxième observation, sur l'éducation des magistrats, nous éprouvons une très grande frustration à l'endroit des juges en ce qui concerne les droits des victimes, parce qu'il existe une disposition du Code criminel — elle a été examinée par ce comité et adoptée en 1999 — selon laquelle les juges doivent, au moment du prononcé de la peine, demander aux procureurs s'ils ont examiné les déclarations d'impact sur la victime présentées par les victimes. D'après ce que nous entendons vaguement dire, il y a, au mieux, un tiers des juges qui posent vraiment ces questions. Le Parlement leur a pourtant dit « vous devez faire ceci », et ils ne le font pas. Il est donc très frustrant d'avoir ce qui est censé être un dialogue avec le Parlement et les tribunaux lorsque les tribunaux finissent en réalité par faire ce qu'ils ont toujours fait.
C'est un peu plus tôt cette année que ce comité a adopté des peines minimales obligatoires pour possession de pornographie juvénile et pour d'autres infractions du même type. Les tribunaux ne traitaient pas ces infractions avec la sévérité que le Parlement et que, selon moi, les Canadiens estiment qu'elles méritent. Il a donc fallu que vous leur fassiez parvenir un message.
Je crois que cette question-ci est semblable. La gravité des crimes violents à main armée est telle que nous devons envoyer un message aux tribunaux.
Je ne comprends pas très bien pourquoi les tribunaux sont si réfractaires à se faire éduquer au sujet d'un vaste nombre de problèmes. Nous avons essayé, avec les droits des victimes. Je crois que l'on se sert de l'indépendance de la magistrature comme d'un bouclier. J'imagine pourtant qu'obtenir plus d'information de tous les milieux — pas uniquement les victimes — sur toutes les questions permettrait aux magistrats de prendre de meilleures décisions, d'imposer des conditions plus appropriées, et ainsi de suite.
Je suis donc d'accord avec vous pour les deux questions soulevées.
 (1225)
Le président: Vous avez une minute, monsieur Toews, pour la question et la réponse.
M. Vic Toews: Oui. Bon, laissons tomber.
Le président: Merci.
M. Marceau.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Sullivan, c'est un plaisir de vous revoir à ce comité. Je veux simplement m'assurer d'avoir bien compris vos propos. Vous êtes venu témoigner en faveur du projet de loi C-215. Or, j'ai l'impression — et corrigez-moi si je me trompe — que vos opinions et votre sensibilité vous porteraient davantage à opter pour des campagnes d'éducation portant sur les conséquences trop souvent dramatiques de l'utilisation des armes à feu plutôt que pour l'application de peines minimales. Est-ce que je fais erreur?
[Traduction]
M. Steve Sullivan: Je ne crois pas qu'il s'agit de choisir entre les deux. Nous appuyons les principes du projet de loi C-215. Je le répète, je ne suis pas sûr de savoir quel est le bon chiffre, parce que je ne suis pas sûr de pouvoir contrer une contestation en vertu de la charte, mais en outre, nous sommes favorables à une plus vaste éducation des magistrats et de la population au sujet de l'impact des actes violents commis avec une arme à feu.
[Français]
M. Richard Marceau: Les statistiques qui nous ont été présentées immédiatement avant votre témoignage révélaient que les crimes à l'arme blanche étaient beaucoup plus nombreux que ceux commis au moyen d'armes à feu. Considérez-vous, selon la même logique, qu'on devrait dans de tels cas opter non seulement pour une campagne d'éducation mais aussi pour des peines minimales?
[Traduction]
M. Steve Sullivan: Bien sûr, et je crois qu'il est logique qu'il y ait une plus grande incidence des crimes à l'arme blanche. Si les armes à feu sont faciles à obtenir, les couteaux le sont encore bien plus.
Je crois qu'il serait bon d'éduquer la population et les magistrats au sujet de l'impact de la violence en général. J'ai parlé de la violence par armes à feu parce que c'est de cela que nous traitons dans ce projet de loi. Les gens lisent les journaux et tournent ensuite la page, après avoir lu un article sur un crime horrible. Devrait-on donc multiplier les efforts de sensibilisation? Absolument.
Il serait peut-être opportun d'envisager des peines minimales pour les crimes à l'arme blanche. Je crois que, d'après les statistiques de l'an dernier, il y a eu augmentation des homicides à l'arme blanche. Toutefois, soyons prudents. Comme les couteaux sont si faciles à obtenir, on ne voudra pas nécessairement imposer une peine minimale obligatoire à une jeune personne qui est en possession d'un couteau pour se protéger, par exemple. Il faut songer à ce genre de choses. Il peut y avoir une certaine différence de motifs entre les personnes qui ont une arme à feu et celles qui ont un couteau. Il doit donc y avoir une certaine souplesse. Cela dit, pour ceux qui commettent des actes de violence, et qui se servent donc réellement des couteaux, il est peut-être approprié d'envisager le recours à des peines minimales obligatoires.
Pour être tout à fait honnête, je ne sais pas quelles sont les durées moyennes des peines actuellement, et je ne suis donc pas sûr de pouvoir vous donner des conseils à ce sujet.
[Français]
M. Richard Marceau: Bien sûr, le sujet a été abordé autant à l'intérieur qu'à l'extérieur de ce comité. Chaque acte de violence, chaque crime fait des victimes. Il est triste de penser aux souffrances physiques, morales et psychologiques qui peuvent en résulter.
Malheureusement, certaines contraintes budgétaires existent également. Un groupe de victimes, que j'ai eu l'occasion de rencontrer dans mon bureau, m'a fait part du manque de ressources affectées aux victimes. Pour ma part, je suis d'accord pour dire que les victimes sont les laissés pour compte du système judiciaire. Dans certains cas, on pourrait même considérer qu'elles sont victimisées une deuxième fois.
Dans des cas comme ceux-ci, les peines minimales garanties n'auraient-elles pas pour effet d'imposer au système de justice des coûts additionnels assez élevés? Le cas échéant, compte tenu que les ressources ne sont pas illimitées, cela pénaliserait-il certains groupes de victimes? Je ne vous dis pas que l'un est plus important que l'autre. Je vous pose la question tout à fait innocemment. Garder quelqu'un en prison coûte cher. Je ne dis pas qu'il ne faut pas le faire. Je ne veux pas non plus qu'on me cite hors contexte, en l'occurrence qu'on dise que je veux réduire le nombre de gens incarcérés parce que les coûts sont trop élevés. Ce n'est pas ce que je dis.
Ne risque-t-on pas de priver de ressources des secteurs du système judiciaire qui n'en ont pas suffisamment, entre autres celui de l'aide aux victimes? Merci.
 (1230)
[Traduction]
M. Steve Sullivan: Je n'ai pas entendu tous les témoignages que vous avez entendus ce matin, et il y aura peut-être d'autres témoins qui défileront devant vous, s'il y a assez de temps. Je crois que les peines minimales obligatoires peuvent être une partie de la solution, mais il faudra voir si elles fonctionnent.
En général, dans notre pays, nous n'avons pas eu recours aux peines minimales obligatoires autant que nos voisins du sud. S'il existe des preuves que les peines minimales peuvent réduire la violence future, par exemple, nous dépensons donc de l'argent initialement, mais nous empêchons peut-être qu'il y ait plus de victimes ultérieurement.
Au sujet de l'aide aux victimes — et c'est une question importante, parce qu'il faut trouver l'argent quelque part — rappelons que la plus grande part de l'argent consacré à l'aide aux victimes actuellement, dans la plupart des provinces, provient des surtaxes pénales pour les victimes, qui, en réalité, sont financées aux moyens de contraventions de stationnement et de sommes perçues à cette fin par les gouvernements provinciaux et fédéral. Malgré tous nos efforts, les provinces et le gouvernement fédéral n'investissent pas beaucoup d'argent dans les services aux victimes.
Vous le savez peut-être, le gouvernement fédéral a cessé en 1993 d'accorder aux provinces de l'aide pour financer les programmes d'indemnisation. Depuis lors, les régimes d'indemnisation ont été réduits et, dans certaines provinces et certains territoires, entièrement éliminés. Ce n'est pas donc comme s'il existe actuellement de vastes sommes dans le système judiciaire pour venir en aide aux victimes de la criminalité.
Vous posez une excellente question lorsque vous dites que nous dépensons peut-être beaucoup trop pour les peines d'emprisonnement et pas assez pour les programmes de prévention ou de réinsertion. Il faut examiner l'impact de ces peines. Est-ce qu'elles fonctionnent? Je crois que le témoin qui m'a précédé a parlé d'évaluer les constatations faites au sujet des peines minimales obligatoires actuelles. Quel a été l'impact? Je crois que cela aidera à répondre à votre question. Si cela permet d'éviter la violence à l'avenir, c'est probablement la voie à suivre.
Le président: Monsieur Comartin.
M. Joe Comartin: Monsieur Sullivan, merci d'être venu nous voir.
Monsieur le président, dans la foulée des propos que vient de tenir M. Sullivan, je crois qu'il conviendrait que le comité examine certains des témoignages que nous avons entendus hier au sujet des réductions des budgets d'indemnisation des victimes et de promotion de leurs droits.
Hier, notre Sous-comité de la sécurité publique nationale a entendu des membres des familles des victimes de l'attentat d'Air India ainsi que l'épouse d'un des hommes tués lors de l'attentat du World Trade Centre, à New York. Dire que la façon dont ces personnes ont été traitées par le gouvernement, par le Canada, a été atroce et abjecte, c'est encore être généreux. Vous voudrez peut-être jeter un coup d'oeil sur les témoignages qu'ils ont présentés. En fait, il y a deux mémoires. Je les transmettrai peut-être au comité et nous pourrons les faire circuler pour les deux groupes.
Monsieur Sullivan, j'ai vraiment une seule question à poser et, désolé, je vais devoir partir ensuite. Vous nous avez fourni une donnée sur laquelle je m'interroge. Vous dites que 25 p. 100 des meurtres restent sans solution au Canada. La dernière fois que j'ai examiné les statistiques portant là-dessus, le taux était d'environ 10 p. 100. Je ne sais pas si ce chiffre se limite à certaines régions du pays ou si c'est une donnée pancanadienne. Si elle concerne tout le Canada, d'où tirez-vous ce chiffre?
M. Steve Sullivan: Dans le rapport statistique de 2004 sur les homicides, sur 622 homicides, 161 restent sans solution au moment de la publication du rapport. Ce chiffre va changer. Évidemment, il y aura un certain rattrapage. Cela dit, de façon générale, au cours des deux ou trois dernières années, nous constatons qu'environ un quart de l'ensemble des homicides restent non résolus. Bien sûr, ce chiffre change grâce aux preuves axées sur l'ADN et sur d'autres nouvelles méthodes.
Nous avons examiné de la documentation préparée par des chercheurs américains qui ont examiné la situation aux États-Unis et au Canada. Bien que ce ne soit pas la constatation faite au Canada relativement aux crimes de violence en général, ces chercheurs ont trouvé que le taux de solution des crimes de violence était plus bas aux États-Unis. Ils ont comparé les États-Unis et le Canada et ont constaté que, pour les homicides, le taux de solution au Canada est plus faible. Si l'on examine également nos chiffres, le taux d'homicides a généralement diminué au cours des dernières années. On pourrait donc s'attendre que plus de ressources soient consacrées à chaque homicide, mais ce n'est malheureusement pas le cas.
Mes statistiques sont tirées de Juristat.
M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Comartin.
Madame Sgro, s'il vous plaît.
L'hon. Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Merci beaucoup, monsieur Sullivan, d'être des nôtres aujourd'hui, et je vous remercie aussi pour tout le temps et les efforts que vous consacrez à toute la question des victimes et le reste.
J'ai des véritables préoccupations, qui rejoignent ce que M. Comartin a dit, mais qui sont plus personnelles, étant donné que Louise Russo et l'enfant de quatre ans que vous avez mentionnés habitent tous les deux dans ma circonscription. Je suis parfaitement au courant de la violence qui a cours dans ce milieu et de la nécessité, non pas nécessairement d'avoir de nouvelles lois, mais de faire respecter celles qui sont en vigueur. Quand certains de ces problèmes me touchent personnellement et que je regarde autour de moi, je vois que les lois existent. Il s'agit pour la magistrature de faire respecter les lois que nous avons.
Même si je suis favorable à l'idée de peines obligatoires minimales et à pratiquement tout ce que vous pourriez suggérer, le fait est que nous devons obliger la magistrature à faire respecter les lois que nous avons déjà. Il nous faudra peut-être plus de victimes, malheureusement, qui prendront la parole publiquement et qui exigeront que la magistrature se serve des outils qu'elle a déjà.
Ce que M. Kramp veut ici, c'est fortifier le système, mais si nous ne faisons pas respecter les lois que nous avons déjà, je me demande si cela va nous aider à long terme.
Ce que je veux savoir, c'est ce que fait exactement votre organisation et comment vous aidez les victimes.
 (1235)
M. Steve Sullivan: Notre organisation est toute petite. Nous n'avons que deux employés à temps plein, dont moi, mais il y a plusieurs étudiants des universités locales qui nous donnent un coup de main.
Nous aidons les victimes de toutes les régions du pays. La majorité des victimes qui s'adressent à nous sont des personnes qui éprouvent des difficultés avec le système: parfois c'est le procureur de la Couronne qui ne communique pas avec elles, ou alors elles ne peuvent pas savoir où en est l'enquête de la police. Une bonne partie de notre travail a trait aux Services correctionnels et aux libérations conditionnelles. Quelqu'un vient d'être transféré à une prison à sécurité minimale, cette personne vit à proximité de la victime, et les gens se préoccupent de ce genre de choses. Nous allons souvent aux audiences de libérations conditionnelles avec des victimes de crime ou en tant que leurs représentants.
Notre mandat est très général. Comme l'a dit M. Comartin, les familles de l'affaire Air India et du 11 septembre ont témoigné hier. Nous collaborons avec elles en ce moment pour les aider à mieux faire entendre leurs voix dans le système.
Nous n'assurons pas de counselling, mais nous pouvons aider les victimes à en obtenir dans leurs régions. Nous aidons les victimes à faire des demandes d'indemnisation, si cela leur est offert dans la province d'origine.
En fait, ce sont les victimes qui nous disent de quoi elles ont besoin, et de là, nous tâchons de les aider, en dépit du fait que nous sommes une toute petite organisation. Je ne prétends pas parler en leur nom ni pouvoir aider toutes les victimes du pays.
L'hon. Judy Sgro: Nous étudions en ce moment le projet de loi C-46, et dans le C-46, comme vous devez le savoir, on prévoit des mesures d'aide aux victimes. Veuillez nous dire ce que vous pensez de ces mesures.
M. Steve Sullivan: Les amendements au projet de loi C-46 concernant les victimes sont une chose que nous réclamons depuis longtemps. Presque toutes les victimes avec lesquelles nous travaillons, et dont les agresseurs sont incarcérés dans des pénitenciers, nous ont dit vouloir savoir ce que le détenu faisait en prison comme effort de réadaptation. Est-ce qu'il suit des programmes? Que ce soit le cas ou non, les victimes veulent le savoir.
Dans la plupart des cas que nous traitons, les victimes savaient ce qu' était leur agresseur le jour de la détermination de la peine ou le jour de l'infraction. C'était peut-être il y a 15 ou 20 ans or, elles n'ont aucune idée de ce qu'il est devenu aujourd'hui. Peut-être qu'il a complètement changé. Peut-être que ce n'est pas le cas, mais les victimes vivent dans ce genre de cocon, se souvenant uniquement de leur agresseur à une certaine époque et redoutant terriblement le jour de sa libération. Lorsque nous participons aux audiences de libération conditionnelle avec les victimes —et la déclaration du gouvernement relativement au fonds permettant aux victimes d'assister à ces audiences est très favorablement accueillie par l'ensemble des victimes — celles-ci participent au processus et comprennent pourquoi la Commission des libérations conditionnelles a décidé de libérer ou non l'agresseur. Elles ne sont pas toujours d'accord avec cette décision, mais elles sont bien plus à même de l'accepter et de passer à autre chose.
J'ai assisté à des audiences avec des victimes complètement terrifiées à l'idée que l'homme qui a tué leur fils, par exemple, soit libéré. Elles sont sorties de l'audience en disant qu'elles n'avaient plus rien à craindre et que si elles avaient su cela dix ans plus tôt, elles n'auraient pas vécu aussi longtemps dans une telle crainte.
Les propositions du projet de loi C-46 relativement aux victimes de crime sont grandement appréciées.
L'hon. Judy Sgro: Au-delà de cela et je suis passée par là deux fois moi-même, alors quand vous parlez de ces questions... Mais ce n'est qu'une partie du problème. Qu'en est-il du niveau d'indemnité financière? Comment le gouvernement peut-il mieux les aider à refaire leur vie? Vous vous êtes sûrement penché sur ces questions, ou bien est-ce que vous vous êtes uniquement concentré sur le côté judiciaire?
M. Steve Sullivan: Nous essayons d'étudier ces questions également. Un des problèmes de notre société et de notre système, c'est que nous attendons du système judiciaire qu'il réponde aux besoins des victimes. Il n'a jamais été établi pour cela. En fait, il a été créé de façon à les exclure. En tant que mouvement de défense des victimes, nous avons progressé dans certains domaines, comme le résumé d'impact, les audiences de libération conditionnelle, et ce genre de choses, et les lois sont là pour ça. Nous essayons à présent de changer l'attitude des gens du système, pour que les victimes se sentent réellement plus acceptées.
La recherche nous a appris que les victimes accordent moins d'importance à la peine si elles ont le sentiment d'avoir participé au processus, c'est-à-dire d'avoir été consultées par les avocats de la Couronne. Nous savons que lorsque les avocats de la Couronne discutent avec les victimes et leur expliquent les négociations de plaidoyers, la plupart du temps, les victimes sont d'accord avec eux, car elles comprennent qu'il peut y avoir des questions touchant la preuve.
Ces droits à présent font partie du système. Il faut mettre l'accent sur la sensibilisation, mais également bâtir un système parallèle pour les victimes de crime pour leur montrer que leur satisfaction ou leur traitement ne dépend pas de ce qui arrive à l' agresseur. Ce sont deux choses indépendantes.
Actuellement, les programmes d'indemnisation qui existent dans chaque province exigent que les victimes coopèrent avec le système, avec la police et la Couronne, et si elles ne le font pas, elles ne sont pas indemnisées. Nous savons que 50 p. cent des victimes ne déclarent pas les crimes et sont donc exclues. Je pense que nous devons essayer d'édifier un système parallèle de justice ou d'aide sociale pour répondre aux besoins des victimes, qu'il s'agisse de counselling, de recyclage professionnel ou autre; ensuite, une fois que vous participez au système, vous pouvez assister à l'audience de libération conditionnelle et faire toutes ces choses, mais votre bien-être n'en dépend pas.
C'est un rêve pour nous, mais je pense que nous sommes en train d'apprendre que nous devons d'abord satisfaire aux besoins sociaux des victimes de crime. Les cicatrices sont permanentes. Il existe des besoins immédiats d'information, mais les effets à long terme sont permanents. Il existe des programmes de recyclage professionnel — nous travaillons avec des victimes qui ne peuvent tout simplement pas reprendre leur ancien emploi — et ce genre de choses. Il y a également du counselling à long terme. Pour les homicides non résolus dont j'ai parlé, si vous ne faites pas une demande de counselling la première ou la deuxième année, on ne vous l'accordera jamais, alors si votre agresseur est arrêté 20 ans après, tout refait surface, mais vous ne pouvez pas obtenir de counselling.
Je pourrais continuer indéfiniment.
 (1240)
Le président: Merci, monsieur Sullivan.
Monsieur Thompson, c'est à vous.
L'hon. Judy Sgro: J'essaye actuellement d'organiser une séance plénière au mois de mai précisément sur la question des victimes et l'aspect social de la question. Je vous inviterai à y participer.
M. Steve Sullivan: Si nous pouvons vous aider de quelque façon...
Le président: Monsieur Thompson, s'il vous plaît.
M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC): Merci, Steve, d'être avec nous et merci pour tout le travail que vous faites pour aider les victimes.
Je ne sais pas combien de personnes au comité ou d'autres à l'alentour ont déjà vécu ce genre de choses, mais il y a environ 45 ans, quelques-uns de mes copains et moi-même avons été tenus sous la menace d'un revolver. On a dû poser nos affaires sur le sol, jeter à terre nos portefeuilles et nous ne savions pas si on allait nous tirer dessus. Quand on évoque ce genre de choses, je ne peux pas vous décrire ce que l'on ressent, même 45 ans plus tard. J'imagine à peine l'impact que cela doit avoir sur les victimes lorsque ça tourne mal. Ce n'est pas beau à voir.
Je pense que la tentative de M. Kramp et le travail du comité qui essaye de faire ce qu'il faut pour éviter que ce genre d'incidents se produisent, afin de protéger les citoyens honnêtes — ce sont des efforts louables. Il y a toujours des gens pour s'opposer à ce que vous voulez faire.
En ce qui concerne votre travail — je parlerai uniquement des victimes pour l'instant — je me rappelle beaucoup d'incidents où les criminels en faute ont reçu toutes sortes de thérapies psychologiques ou psychiatriques, tous ces services qui doivent leur être offerts, à juste titre. Cependant, j'ai vu plusieurs cas où la victime n'a pas pu obtenir ce genre de service. Je crois qu'il existe un réel déséquilibre et je vous félicite du travail que vous faites pour essayer d'y remédier. Je sais que cette situation se produit, et chaque membre du comité en est tout à fait conscient.
J'ai entendu un argument contre ce projet de loi. J'étais dans la rue, je rendais visite à l'un de mes collègues d'un autre parti et on m'a dit: vous savez, vous ne pouvez pas appuyer ce genre de projet de loi, parce qu'il empêchera les gens de plaider coupables. S'ils se rendent compte que la peine est déjà sévère, ils vont plaider non coupables. Or, cela implique plus de démarches juridiques, de plus longs procès, etc. Si vous adoptez ce genre de mesure, vous aurez ce type de réaction.
Je m'oppose catégoriquement à cette observation. Nous en avons débattu férocement dans la rue — et ce n'est pas un bon endroit pour débattre de quoi que ce soit.
Que pensez-vous de cette observation, comme quoi il y aura moins de plaidoyers de culpabilité, où vous pouvez négocier avec l'accusé, et plus de plaidoyers de non-culpabilité, ce qui va coûter énormément d'argent aux systèmes judiciaire et juridique? Qu'avez-vous à répondre à cette observation?
 (1245)
M. Steve Sullivan: Je crois que l'un des dangers... Je ne devrais pas dire danger. L'un des effets de cette mesure, c'est que vous pourriez en fait vous retrouver avec plus de plaidoyers de culpabilité, mais pour des infractions qui ne font pas intervenir ce genre de peines. Nous savons qu'avec les peines minimales obligatoires que nous avons en ce moment, bon nombre d'entre elles font l'objet de négociation de plaidoyers. Je crois que c'est ce qui va arriver. Rien dans le projet de loi n'interdit au procureur de la Couronne d'accepter un plaidoyer de culpabilité pour éviter ce genre de sentences.
Chose certaine, il y aura des procureurs de la Couronne qui ne vont pas changer leur fusil d'épaule et qui vont imposer la peine. Si vous êtes accusé, et qu'on vous donne le choix entre telle peine ou un plaidoyer de culpabilité, et si vous optez pour un procès, vous pourriez vous en tirer, mais il y en a qui vont jouer le tout pour le tout et qui vont plaider coupables s'ils n'ont aucune marge de manoeuvre le jour où la peine sera déterminée. Je crois que l'un des problèmes que l'on aura comme c'est le cas avec la mesure actuelle, à savoir que les procureurs de la Couronne vont continuer de transiger. Cela n'aura pas l'effet que nous recherchons, et on enverra ainsi le genre de message dont nous ne voulons pas.
Au sujet de ce que vous dites à propos des personnes qui sont contre, c'est ce que nous avons entendu lorsqu'on a proposé de permettre aux victimes de faire une déclaration. C'est ce que nous avons entendu lorsqu'on a proposé d'autoriser les victimes à assister aux audiences de libération conditionnelle. C'est ce qu'on entend chaque fois qu'on propose de faire entendre davantage la voix des victimes dans le système. Ce que nous avons toujours dit, c'est qu'il faut absolument protéger les droits des accusés, et les droits des victimes ne les diminuent en rien, et ne devraient pas les diminuer en quoi que ce soit.
Mais il s'agit d'un système que des gens ont bâti, le système judiciaire. Ce système n'a pas été bâti du jour au lendemain. Vous le savez, c'est nous qui l'avons bâti, nous pouvons aussi le changer. Nous pouvons le changer de telle manière à accorder davantage d'attention aux victimes des crimes, ce genre de choses. Il y a des gens qui se contenteraient du statu quo dans une foule de dossiers. Il faut parfois du courage aux parlementaires pour faire ce qu'il y a à faire.
M. Myron Thompson: Merci de votre témoignage.
Je sais que dans mon vécu à moi — je n'aime même pas m'en souvenir, encore moins en parler — la chose qui nous traversait l'esprit, c'était, mon Dieu, j'espère qu'ils vont attraper ce gars-là et qu'ils vont le mettre sous les verrous, et comme ça, personne d'autre n'aura à vivre le même genre de choses. Enfermer le criminel, c'était la seule chose qui nous traversait l'esprit comme victime: il faut enfermer ce gars-là et pour longtemps. Je sais que c'est la première chose qui nous vient à l'esprit. C'est pour qu'il n'y ait pas d'autres victimes. Je ne sais pas comment éviter cette réaction.
Le président: Monsieur Thompson, votre temps de parole est écoulé.
Monsieur Lemay.
M. Myron Thompson: Peut-il répondre?
Le président: S'agissait-il d'une question?
Je crois que ce n'était qu'un commentaire.
M. Myron Thompson: Avez-vous quelque chose à dire en réponse à mes remarques? Je devrais avoir droit à cela.
Le président: Voulez-vous répondre rapidement à monsieur Thompson?
M. Steve Sullivan: [Note de la rédaction :Inaudible ]
M. Myron Thompson: Heureux de vous l'entendre dire.
Le président: Merci.
Monsieur Lemay.
[Français]
M. Marc Lemay: Connaissez-vous l'organisme québécois appelé le CAVAC, soit le centre d'aide aux victimes d'actes criminels ? Êtes-ce que vous travaillez en étroite collaboration avec cet organisme?
[Traduction]
Le président: Monsieur Sullivan.
M. Steve Sullivan: Nous leur envoyons souvent du monde. Nous dirigeons vers le CAVAC les victimes qui nous contactent.
[Français]
M. Marc Lemay: J'étais auparavant avocat en droit criminel, et dans ce contexte, j'assurais la défense des accusés. En effet, il s'agit ici d'une procédure mise en vigueur récemment. Elle permet aux procureurs de la Couronne et aux juges de s'adresser aux victimes. Toutefois, il y a un problème et j'en ai fait l'expérience une dizaine de fois au moins au cours des deux dernières années. J'exclus bien sûr mon année et demie en tant que député.
Les juges et les procureurs de la Couronne ne savent pas que les victimes sont dans la salle. Parce que je défendais les accusés, ces derniers me demandaient comment il se faisait que la victime se trouvait dans l'auditoire. Or, c'est permis en vertu des nouvelles dispositions. Souvent, c'est à moi qu'incombait la responsabilité d'avertir les procureurs de la Couronne de la présence de la victime. Il y a donc là un genre de vide. Selon une disposition du Code criminel, le juge doit, avant de prononcer sa sentence, permettre à la victime de s'adresser à la cour. Toutefois, s'il ne sait pas que la victime est présente, il n'est pas en faute. Il est neutre. Par contre, le procureur de la Couronne devrait le savoir.
Qui ne fait pas son travail? Je ne voudrais pas blâmer les centres d'aide aux victimes. De plus, vous avez raison de dire que bien souvent, ce que les victimes ont à dire est important. Vous avez raison en ce qui concerne tout ce que vous avez dit plus tôt. Pour ma part, j'ai plaidé dans le cadre d'une affaire de meurtre qui a duré deux mois. À la fin, les victimes comprenaient un peu plus le système. Je ne parle évidemment pas de la personne décédée, mais de sa famille et de son entourage.
Qui ne fait pas son boulot?
[Traduction]
M. Steve Sullivan: Je crois que le problème tient au manque de ressources dans la plupart des juridictions. Prenez seulement par exemple le cas d'Ottawa, ici. Au Service d'aide aux victimes chez le procureur de la Couronne, il y a trois ou quatre personnes qui travaillent. La violence conjugale constitue le gros de leur travail. Je dirais que trois ou quatre d'entre elles ne s'occupent que de violence conjugale, et c'est évident. Il y a d'autres problèmes qui ont trait à la sécurité, au logement, ce genre de choses. Les autres employés s'occupent des agressions sexuelles. Mais toutes les autres victimes — les victimes d'homicide, de vols à main armée, d'agressions — reçoivent généralement très peu d'aide de qui que ce soit au cours des procédures criminelles. Elles ont rarement des contacts avec le bureau des Services aux victimes. C'est ce qui se passe ici à Ottawa. En Colombie-Britannique, on a récemment supprimé complètement les services aux victimes chez les procureurs de la Couronne.
Donc le gros des ressources, lesquelles sont limitées, est réservé à la violence conjugale, le domaine qui exige le plus de travail, si bien que les autres victimes n'ont aucun contact avec la justice. Souvent, comme vous le savez, on négocie un plaidoyer de culpabilité, si bien que les procureurs de la Couronne n'ont pas à convoquer de témoins, il n'y a donc aucune communication entre le procureur de la Couronne et la victime.
Dans un monde idéal, il y aurait quelqu'un des Services aux victimes du bureau de la Couronne qui aiderait cette victime. Dans un monde idéal, les procureurs de la Couronne auraient le temps de rencontrer ces victimes et de leur expliquer ce qui se passe, de leur expliquer qu'il y aura peut-être une négociation de plaidoyer et pourquoi ils sont d'accord ou non.
Dans un monde idéal, nous n'aurions pas à nous en remettre aux juges pour qu'ils demandent aux procureurs de la Couronne de produire une déclaration de la victime, parce que les procureurs de la Couronne sauraient quoi faire... Il y a beaucoup de victimes qui ne veulent pas faire de déclaration. C'est leur choix. Vous n'êtes pas obligé d'en faire une, mais à l'heure actuelle, dans le Code criminel, comme vous savez, les juges ont l'obligation de demander au procureur de la Couronne, dans le processus conduisant au prononcé de la sentence, s'il a demandé à la victime de faire une déclaration? Et si le procureur de la Couronne dit non, le juge peut ajourner les procédures jusqu'au moment où cela aura été fait. On ne pose pas ces questions.
À qui la faute? Je crois que nous sommes tous un peu responsables dans ce processus, et malheureusement, on ne peut pas blâmer l'un ou l'autre. C'est seulement le système en général... les ressources.
[Français]
M. Marc Lemay: Merci.
 (1250)
[Traduction]
Le président: Monsieur Macklin.
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci, monsieur Sullivan.
Vos revendications sont très importantes, et nous sommes heureux que quelqu'un fasse avancer la cause des victimes. Lorsque je songe à ce dont il est question ici aujourd'hui, je constate qu'il y a tout cet énorme mouvement en faveur de peines obligatoires minimales d'une sévérité excessive, à mon avis. Quand on en arrive au point où l'on dit que la personne qui a commis un meurtre sera condamnée à perpétuité plus 15 ans, c'est sûr qu'on envoie un message, mais je ne suis pas sûr que ce soit bien pratique ou pragmatique.
Mais permettez-moi de revenir à votre propos, parce que vous représentez les victimes ici, et la question pour moi et le ministre de la Justice est celle-ci, comment allons-nous faire en sorte pour qu'il n'y ait plus de victimes? C'est la première question.
Deuxièmement, nous pouvons aussi discuter de la victimisation et aider ceux qui en font l'objet.
Il y a sûrement une chose sur laquelle nous pouvons tomber d'accord, et je crois que toutes les victimes vous diront qu'elles ne veulent pas qu'il y ait d'autres victimes. Par conséquent, il est important à mon avis de faire l'historique des pénalités du genre dont nous discutons aujourd'hui. Cet historique, pour moi et le ministre... Mais comme le ministre le dit, on peut parfois penser que les peines minimales obligatoires vont produire le résultat qu'on attend, qu'elles seront efficaces, qu'elles vont non seulement contrer mais en fait réduire le récidivisme et dissuader les autres criminels. Mais d'après les preuves que j'ai vues, dans le rapport de la Commission canadienne sur la détermination de la peine de 1987, celle-ci est parvenue à la conclusion que les peines minimales obligatoires n'ont aucun effet dissuasif ou éducatif, et qu'elles ne réussissent pas plus à prévenir le crime que des sanctions moins graves.
Deuxièmement, il y a cette étude plus récente de 2001 où deux professeurs d'université, l'une de l'Université Carleton, Nicole Crutcher, et l'autre de l'Université d'Ottawa, Tom Gabor, ont pris la peine d'étudier les peines minimales obligatoires et leurs effets sur la criminalité. Leurs recherches portaient non seulement sur notre pays, mais aussi sur les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Malaisie et le Royaume-Uni. Ces chercheurs ont conclu que les peines minimales obligatoires n'avaient pas d'effet dissuasif.
Donc, si, au bout du compte, on dit que la recherche sur l'efficacité des peines minimales obligatoires a démontré qu'elles n'avaient pas d'effet dissuasif ou éducatif particulier, alors pourquoi y seriez-vous favorable, pourquoi êtes-vous favorable à ce projet de loi? Les preuves révèlent que les moyens que nous allons prendre ne seront pas nécessairement efficaces, et qu'il conviendrait plutôt de s'attaquer à d'autres aspects du crime et à ses causes, et à d'autres moyens de le contrer en utilisant d'autres formes de sensibilisation. Cela ne me semble tout simplement pas être la méthode appropriée, quoi qu'on en pense de prime abord.
J'aimerais avoir votre avis à ce sujet.
 (1255)
M. Steve Sullivan: De manière générale, je ne suis pas un grand partisan des peines minimales obligatoires. Je crois qu'il est utile dans une certaine mesure de laisser à la magistrature le soin d'imposer une peine qui tiendra compte de la personnalité du délinquant. Je peux vous assurer que les victimes ne sont pas unanimes quant aux recours à des peines plus longues. Nous faisons affaire avec des victimes qui veulent ce genre de punition, avec d'autres victimes qui tiennent plus à la réinsertion sociale, et avec des victimes qui s'intéressent davantage à la réinsertion et qui ne croient pas que la prison soit la meilleure solution pour y parvenir.
Les victimes, à mon avis, veulent que l'on soit juste dans le prononcé de la sentence. Elles veulent avoir le sentiment que l'on a tenu compte du tort qui leur a été causé, et elles veulent que la sentence le reflète. Cela ne veut pas nécessairement dire qu'elles tiennent à une peine de prison; cela pourrait vouloir dire qu'elles tiennent plutôt à un dédommagement. Certaines de ces personnes vont avoir des problèmes pendant toute leur vie, et elles veulent être dédommagées. Les victimes veulent que l'on adresse des excuses et une foule de choses diverses.
Donc je ne suis un grand partisan des peines minimales, et comme je l'ai dit plus tôt, je ne crois pas que ces chiffres soient exacts. Que les gens pensent que ça va ou non, il y a de fortes chances que la Cour suprême dise que ces mesures sont contraires à la Constitution.
Vous avez mentionné la peine à perpétuité plus 15 ans. Je ne suis même pas sûr que ces 15 années auraient un effet sur la sentence. Je suis au courant de cas où des personnes ont été déclarées délinquants dangereux mais qui ont été condamnées à vie. La prison à perpétuité à priori. Même avec les 5, 10, 15... Si vous avez 5 ans, vous pouvez demander la libération conditionnelle après un tiers de votre peine; si vous avez 15 ans, vous pouvez demander la libération conditionnelle après 5 ans. Donc je ne suis pas sûr que ces chiffres reflètent la pensée des gens.
Cela étant dit, je crois qu'il y a peut-être un rôle pour certaines dispositions lorsque nous faisons affaire à certains genres de crimes et peut-être à certains problèmes de société. J'étais favorable à la peine minimale pour les infractions relatives à la pornographie infantile. Je croyais qu'il s'agissait là de crimes d'une nature épouvantable et que les tribunaux ne les punissaient pas assez sévèrement. Je crois qu'il y a peut-être une place pour cela, mais je pense que lorsqu'on étudie les effets des peines minimales obligatoires qu'on a en ce moment, ce qu'il faut vraiment déterminer, c'est: a) quels sont les chiffres, et b) si ces peines donnent les résultats voulus.
Le président: Je crois que votre temps de parole est écoulé.
L'hon. Paul Harold Macklin: Permettez-moi seulement de conclure, avec votre permission, monsieur le président, en faisant une seule observation.
Le président: Soyez très bref, monsieur Macklin.
L'hon. Paul Harold Macklin: Lorsque nous nous sommes penchés sur les peines minimales relativement à la pornographie infantile, nous les avons gardées au minimum absolu juste pour nous assurer d'envoyer un message instructif aux tribunaux, mais nous avons quand même autorisé une certaine souplesse. Malheureusement, je pense que certaines des sentences que l'on propose dans ce projet de loi n'offrent pas de souplesse.
Le président: Merci.
La dernière question sera posée par M. Moore.
M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC): Merci.
Pour ce qui est d'envoyer un message, je me demande comment l'on pourrait envoyer ce message autrement. Avez-vous songé à d'autres moyens?
Ce sont nous, les législateurs, qui faisons les lois. Nous pouvons modifier le Code criminel, nous pouvons imposer les peines maximales et nous pouvons imposer aussi des peines minimales. Mais à part les peines minimales, lorsqu'il s'agit de former les juges, si la société dans son ensemble, dont on trouve le reflet à la Chambre, est mécontente des peines que l'on impose à ces personnes... vous avez dit que les victimes voulaient avoir l'impression que justice avait été rendue. Ces personnes doivent vivre comme victimes, peut-être pour toujours, ou avec les séquelles de ce qui leur est arrivé, et elles ont devant elle une personne qui n'ira peut-être pas en prison ou alors pour très peu de temps. Il y a cette confusion, où une personne peut-être condamnée à 10 ans de prison, mais en réalité, elle n'y sera pas aussi longtemps.
Y-a-t-il un autre moyen d'envoyer ce message? Il est évident que le comité peut réfléchir au minimum exact, mais est-ce que le minimum aura pour effet d'envoyer un message aux tribunaux?
· (1300)
M. Steve Sullivan: Oui, cela peut avoir cet effet. Vous pouvez décider de la durée de la peine, mais si vous souhaitez signifier aux magistrats que vous n'êtes pas satisfait de la façon dont ils imposent actuellement des sentences aux auteurs d'agressions à main armée, l'indication de la durée minimale de la peine à purger enverrait certainement un message significatif.
Je ne veux pas dire que ce n'est pas ce qu'il faut faire, mais le problème, actuellement, c'est notamment d'appréhender les coupables. C'est un problème considérable à Toronto. Le message ne se rend pas jusqu'aux tribunaux, parce que les criminels ne sont pas traduits devant les tribunaux.
M. Rob Moore: Je reconnais que la difficulté de traduire les coupables en justice pose un tout autre problème. M. Macklin a demandé ce que nous faisons pour qu'il n'y ait plus de victimes. Évidemment, dans un monde idéal, il n'y aurait ni victime ni criminel, mais il y en a actuellement et il y en aura toujours. Il s'agit donc de savoir comment faire pour qu'il y ait moins de victimes et moins d'activités criminelles. Je pense que c'est...
M. Steve Sullivan: Excusez-moi de vous interrompre. En envoyant un message... qu'est-ce que la Couronne va en faire? Peut-être faudrait-il entendre les procureurs de la Couronne, qui risquent d'écarter ces sentences minimales lors de la négociation de plaidoyers, ils le font quotidiennement. Quatre-vingt pour cent, sinon plus, des procès donnent lieu à une négociation de plaidoyers. Pour connaître l'effet réel de ce projet de loi, il faut donc s'adresser au procureur de la Couronne.
M. Rob Moore: Vous avez raison. C'est exactement le problème. Du fait de la confusion suscitée par les négociations des plaidoyers, les gens s'imaginent que la sentence maximale correspond au tarif courant, alors qu'en réalité, la sentence prononcée est moins lourde. Il faut donc en tenir compte. C'est un cas sur lequel le Parlement peut agir.
Il me reste une seule autre question: Vous dites qu'on est de plus en plus d'accord sur la question de la peine minimale obligatoire, mais le ministre a dit à maintes et maintes reprises que cette formule n'est pas efficace. C'est là une critique très générale. Ce n'est pas efficace pour qui? Ce n'est pas efficace de quel point de vue?
Où trouve-t-on des peines minimales obligatoires efficaces? J'estime que si quelqu'un passe quatre ou cinq ans en prison, il ne voudra plus s'en prendre aux gens de son entourage ou aux passants dans la rue. C'est donc efficace à certains égards. Qu'en pensez-vous?
M. Steve Sullivan: Les agents correctionnels et ceux qui s'occupent des programmes de traitement en milieu correctionnel vous diront que le plus gros problème en prison, ce sont les individus qui purgent une courte peine, de deux ou trois ans. On ne peut rien en faire. Une fois qu'on leur a assigné un niveau de sécurité approprié et tout le reste... Je ne veux pas dire que la prison soit le meilleur endroit pour leur faire subir des traitements, mais ce sont les options dont nous disposons.
Quant aux avantages des peines minimales obligatoires, on peut dire ceci: si le condamné restait plus longtemps en prison — à condition qu'il réagisse bien au traitement — est-ce qu'on aurait de meilleures chances d'infléchir son comportement, une fois la peine purgée? Même si l'on croit en l'efficacité des programmes de réhabilitation, il leur faut du temps pour agir. Voilà donc l'argument qu'on peut formuler.
M. Rob Moore: Merci.
Le président: Merci, monsieur Moore.
Monsieur Sullivan, je vous remercie de votre présence parmi nous et de vos commentaires. Ils nous seront certainement utiles dans nos délibérations.
La séance est levée.