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Bonjour, et bon vendredi ensoleillé à Montréal.
Monsieur le président, dans un univers médiatique de plus en plus fragmenté, où se multiplient les services de radiodiffusion classiques comme les nouvelles fenêtres et plateformes de diffusion, il est plus que jamais essentiel de conserver ce point d'ancrage qui relie tous les Canadiens que constitue un diffuseur public national, un diffuseur dont la programmation distinctive, diversifiée et très majoritairement canadienne est largement accessible dans toutes les régions du Canada et se décline dans les deux langues officielles aussi bien à la radio qu'à la télévision et dans les nouveaux médias. Pour nous, la reconnaissance de ce principe est primordiale, car elle est au coeur de ce qui caractérise le système canadien de radiodiffusion depuis des décennies et qui devrait continuer, croyons-nous, de le caractériser pour le siècle à venir, c'est-à-dire l'existence de composantes publiques et privées, toutes deux solidement enracinées et fortes, qui se complètent et s'émulent, offrant ainsi aux citoyens canadiens une réelle diversité de programmation et de voix éditoriales.
Il va sans dire qu'un tel diffuseur public national ne peut jouer pleinement son rôle qu'à la condition de disposer de ressources financières adéquates. Il est très important que ces ressources proviennent majoritairement de l'État, des crédits parlementaires. En effet, ce qui distingue un diffuseur public d'un diffuseur privé, c'est que le premier n'est pas majoritairement dépendant des lois du marché et des revenus commerciaux. C'est cette indépendance qui lui permet d'accorder préséance à l'intérêt public et aux objectifs sociaux et culturels de la loi. C'est cette indépendance qui est garante du caractère distinctif et complémentaire de sa programmation et de sa capacité à remplir sa mission de service public.
D'autre part, les ressources financières en provenance de l'État doivent être d'une ampleur suffisante pour lui permettre d'accomplir dans toute sa plénitude le mandat que lui confie la Loi sur la radiodiffusion. À cet égard, s'il est vrai, comme le soutient CBC/Radio-Canada, qu'entre 1990 et 2005, les crédits parlementaires qui lui ont été alloués n'ont progressé que de 2,3 p. 100 en dollars courants et ont régressé de 33 p. 100 en dollars constants, soit près de 375 millions de dollars canadiens, il y a de quoi s'inquiéter, monsieur le président. Il est surtout urgent de corriger le tir et de redonner à CBC/Radio-Canada les moyens de ses ambitions et la pleine capacité de remplir la mission que lui a confiée le législateur. Il est aussi essentiel, selon nous, que les réseaux de télévision de base de Radio-Canada continuent d'être généralistes et d'offrir à la population canadienne une gamme diversifiée et équilibrée d'émissions d'information et de divertissement de tous les genres.
Radio-Canada doit tenter de rejoindre tous les segments socioéconomiques et groupes d'âge au sein de la population canadienne en proposant des émissions et des genres variés susceptibles de répondre aux besoins, aux goûts et aux attentes des hommes, des femmes et des enfants canadiens. Bien sûr, cette mission généraliste n'est pas incompatible avec la nécessité d'accorder la priorité à certaines catégories d'émissions qui sont insuffisamment présentes dans la composante privée du système de radiodiffusion ou qui revêtent une importance exceptionnelle en matière de valorisation de la créativité artistique et de l'identité culturelle québécoise et canadienne. Dans le contexte actuel, Radio-Canada devrait consentir des efforts particuliers pour encourager la production d'émissions originales canadiennes dans les secteurs suivants: les dramatiques, les émissions pour enfants, les documentaires et les émissions culturelles.
La Loi sur la radiodiffusion stipule que la programmation offerte par le système canadien de radiodiffusion doit faire appel de façon notable aux producteurs canadiens indépendants. Cette obligation contribue à une diversification essentielle des lieux de création et offre en retour à des milliers de créateurs, d'artistes et artisans canadiens pigistes une diversité des voies d'accès au système canadien de radiodiffusion. Ce sont là des acquis essentiels qui ne doivent être ni remis en question ni compromis.
En cette époque où, dans le secteur privé, le niveau de concentration de propriété, de convergence, d'intégration verticale et de propriété croisée multimédia s'accroît sans cesse, il est indispensable que le diffuseur public national joue un rôle exemplaire et accru en matière de soutien au développement d'un milieu de production indépendante canadien polyvalent, pluriel et dynamique.
C'est pourquoi nous croyons qu'une portion croissante des dépenses annuelles de programmation originale canadienne de Radio-Canada devrait être statutairement allouée au financement d'émissions indépendantes produites par une grande variété de producteurs canadiens dans tous les champs de programmation que nous avons identifiés comme prioritaires.
Claire, voulez-vous conclure?
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Monsieur le président, messieurs, je vous présente Lise Lachapelle, qui est directrice générale de l'Association des réalisateurs et des réalisatrices du Québec. Merci de nous accueillir.
On pourrait s'en aller, car on est d'accord sur ce que viennent de dire les producteurs. D'ailleurs, qui dira que nous ne sommes pas d'accord avec eux? Donc, il y aura unanimité, en quelque sorte, entre ce que nous avons à vous dire, ce que nous vous avons écrit et ce que les producteurs viennent de vous dire.
Je vous rappelle que nous représentons environ 550 réalisateurs pigistes au Québec et que nous avons la reconnaissance de tout le territoire québécois pour tous les films tournés en toutes langues, sauf ceux tournés en anglais, qui appartiennent à nos collègues du Conseil du Québec de la Guilde canadienne des réalisateurs. Donc, nous sommes les premiers clients de Radio-Canada. Nous sommes sur la ligne de front avec les producteurs. Pour cette raison, nous souhaitons à peu près que les mêmes choses se maintiennent, d'une part, et, d'autre part, qu'elles soient accrues dans d'autres secteurs.
Je vais lire brièvement le préambule que vous avez sans doute entre les mains. Depuis sa fondation, la Société Radio-Canada a joué un rôle historique indéniable et capital dans le développement de la communication et de la création au Canada et peut-être encore davantage au Québec, où elle a permis l’enracinement et la floraison d’une langue et d’une culture uniques en Amérique du Nord.
Certes, le paysage télévisuel, celui qui nous concerne directement, s’est substantiellement transformé depuis une quarantaine d’années avec la venue des chaînes privées, de la télé à péage, des chaînes spécialisées et de l’Internet. Ces bouleversements, toutefois, plutôt que de mettre en jeu le rôle de la SRC, en démontrent au contraire l’absolue nécessité. Ils démontrent qu’à l’instar de son modèle originel, la BBC, elle doit rester le lieu privilégié d’échanges et de créations démocratiques, libres de diktats politiques et commerciaux. Nous affirmons même qu’elle ne survivra qu’à la condition de se démarquer de ses concurrents directs et indirects, et d’ouvrir ses antennes aux populations et aux cultures diverses qui cohabitent d’un océan à l’autre, soit le Pacifique, l’Arctique et l’Atlantique, et non pas, comme l'a déjà dit Jean Chrétien, « d'un Atlantique à l'autre ».
Enfin, si le seul paysage télévisuel constitue l’objet de nos réflexions, nous croyons que le modèle de la radio de la SRC, toutes chaînes confondues, montre la voie à suivre en consacrant de belle et efficace manière l’ensemble de ses activités à l’information et à la culture.
Je ne ferai pas lecture des onze principes et recommandations que vous retrouverez dans notre mémoire. Nous voulons que Radio-Canada soit indépendante, pluraliste, qu'elle ne soit pas privatisée, qu'elle soit une télévision de pointe qui montre l'exemple, une télévision populaire, mais pas populiste.
J'insisterai peut-être sur un point, soit la recommandation n° 8 qui dit que:
La SRC doit contribuer davantage à la croissance du cinéma québécois et canadien en investissant de manière substantielle — ou peut-être même obligatoire — dans le développement, la production et la diffusion des films.
C'est curieux à dire, mais je pense que cela aiderait beaucoup, surtout le Canada anglais, si une telle mesure existait. Vous savez que le Canada anglais a beaucoup de difficulté à l'égard du contact à faire avec son auditoire. Le Québec réussit beaucoup mieux. N'empêche qu'il pourrait aussi profiter d'une aventure conjointe entre l'industrie privée du long métrage ici, au Canada, et la société d'État.
Ce système existe dans plusieurs autres pays du monde. En particulier, le modèle français produit un nombre incroyable de longs métrages pour la télévision. Nous y avons toujours vu une façon de mettre de l'avant des productions en plus grand nombre et aussi de former tous les niveaux de techniciens, de comédiens de même que le public.
En conclusion, nous disons que Radio-Canada doit être le véhicule privilégié d'information, de connaissances et de culture entre et pour tous les Canadiens. Nous insistons sur le fait que, comme je l'ai dit, elle peut être une télévision populaire, mais il lui faut à tout prix éviter les pièges du populisme.
Sans Radio-Canada, sans CBC, nous ne voyons pas comment pourrait se maintenir et progresser la culture au Canada. La culture, c'est une chose qui se cultive, qui s'enseigne. Prenez l'état de la gastronomie aujourd'hui à Toronto par rapport à il y a 40 ans et vous vous rendrez compte que le Canada anglais a fait un bon extraordinaire. Donc, il ne faut pas penser donner aux gens le fast food culturel qu'ils réclament à tout prix sous prétexte que c'est plus payant que le culturel. Il ne faut pas tomber dans ce piège. Au contraire, il faut que Radio-Canada et le gouvernement fédéral affirment de plus en plus leur mission d'informateurs, d'agents culturels canadiens pour tous et entre tous les Canadiens.
C'était là l'essentiel de ce que nous avions à vous dire, en plus de ce que je n'ai pas lu. Merci beaucoup de votre attention.
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Merci, monsieur le président.
Bienvenue et merci pour vos présentations.
En fait, je crois que tout le monde ici est sur la même longueur d'onde. On comprend tous le rôle du radiodiffuseur public et on veut qu'il affirme la culture, la diversité d'opinion, une programmation généraliste mais pas superficielle. On est tous d'accord à cet égard.
Évidemment, beaucoup de groupes comme les vôtres se présentent devant nous pour demander parfois des sommes additionnelles afin d'appuyer leur radiodiffuseur public. Certains diraient que vous prêchez pour vos paroisses. Vous dites que vous voulez développer davantage de produits, et SRC/CBC est la seule qui s'intéresse aux oeuvres culturelles canadiennes. Il faut le dire, je crois. Donc, comme le gouvernement est le distributeur des fonds, vous aimeriez qu'il en donne davantage à Radio-Canada. Vous avez mentionné l'idée de statuer sur l’octroi d’une enveloppe budgétaire dédiée à la production de films. En ce sens, je pense que vous avez raison.
Par ailleurs, il faut parler un peu d'imputabilité. Vous ne l'avez peut-être pas mentionné, mais d'autres ont dit qu'en même temps, on enlève les publicités parce qu'il faut enlever l'impératif commercial si on veut un vrai bon produit culturel. Alors, d'où vient l'imputabilité? À la longue, qui va juger de la pertinence du produit que SRC/CBC met en onde? Qu'est-ce qui empêcherait SRC/CBC de diverger vers un champ où les Canadiens ne sont plus, faisant en sorte que cela joue contre ses intérêts à long terme? Les Canadiens et les Canadiennes pourraient dire, à un moment donné, qu'ils ne l'écoutent pas, alors, pourquoi cela devrait-il être subventionné? On a même accueilli des gens qui haïssent SRC/CBC. J'en connais beaucoup qui n'écoutent pas SRC/CBC. Ils se demandent de plus en plus pourquoi on la subventionne.
Dans l'intérêt de tous, comment pourrait-on assurer une imputabilité? Il faudrait peut-être conserver la publicité afin de savoir si les commanditaires jugent que la programmation est pertinente, et ce, sans aller trop loin ou sans que cela devienne un impératif commercial.
Je vous pose en quelque sorte une question philosophique.
[Français]
Je vous remercie de votre présentation. Je crois que la conversation d'aujourd'hui va être profitable. Bien sûr, on nous a dit qu'il fallait augmenter le financement, contribuer au développement de dramatiques et de variétés à la télévision, et nous avons écouté ce message. Cependant, je voudrais discuter aujourd'hui de la nécessité de développer un plan pour les nouveaux médias.
[Traduction]
Nous avons entendu dire que les amis de Vidéotron voulaient modifier le FCT parce qu'ils estiment ne pas avoir les coudés franches pour programmer les émissions sur les plates-formes multiples pour une question de droits, et ils aimeraient bénéficier des droits accessoires.
C'est là une autre question que nous devons aussi soulever. Nous avons vu que l'ensemble du catalogue de la BBC peut être vu à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit parce que la BBC possède tous ses droits. Où que vous soyez dans le monde, il vous est possible de voir la BBC.
Pourtant, nous avons encore au Canada un système qui nous amène à payer des émissions que l'on va peut-être voir deux ou trois fois et qui resteront ensuite dans les archives. On peut donc bien évidemment se demander si nous parviendrons à entrer dans le XXIe siècle à partir du moment où nous n'avons pas réglé cette question. Nous avons cherché à obtenir ici une réponse à la question de savoir si nous parviendrons à faire passer nos émissions sur toutes les plates-formes multiples.
Certains radiodiffuseurs accusent les producteurs, certains producteurs accusent les radiodiffuseurs.
Nous ne savons pas quelle est la valeur financière des émissions diffusées sur Internet. Ce ne sont encore que des spéculations. Mais ne pourrait-on pas élaborer une simple formule en termes de pourcentage pour nous assurer qu'une production, à partir du moment où elle est indépendante, pourrait être vue ad vitam æternam, en fonction d'un certain pourcentage, ou diffuser pendant 10 ans, cinq ans, pour être sûr au moins qu'elle soit disponible partout sur Internet?
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Je pense qu'il y a quelque part une solution. Il y a un an et demi, l'APFTQ a entrepris d'étudier au sein d'un comité des nouveaux droits et les nouvelles plates-formes. Nous avons fait notre travail. Nous avons fait un certain nombre de recherche, par exemple, pour savoir quels étaient les différents modèles dans le monde et comment ils opéraient. Nous avons cherché à aller voir ce qui se faisait ailleurs. Nous avons rédigé un rapport que nous avons remis à tous les radiodiffuseurs du Québec, et nous avons eu la possibilité d'en discuter avec eux.
Bien entendu, comme vous nous le dites — et vous avez bien raison de le faire — on ne connaît pas encore le modèle économique. Nous ne savons pas encore qui gagne de l'argent sur toutes ces choses, que ce soit YouTube ou toutes les autres productions que nous voyons apparaître dans le monde. Mais bien entendu, nous restons ouverts. Les producteurs ont bien fait comprendre aux radiodiffuseurs que nous étions prêts à examiner le nouveau modèle économique. Nous sommes prêts à en discuter avec les détenteurs des droits: auteurs, comédiens, metteurs en scène, etc. Nous sommes disposés par ailleurs à étudier un modèle de partage des recettes pour ces nouvelles plates-formes. Jusqu'à présent, toutefois, aucun radiodiffuseur n'est venu nous demander ce que nous voulions et quelle était la meilleure façon de faire les choses. Quelle est la part qui doit être conservée par les radiodiffuseurs? Que doit-on attribuer aux détenteurs des droits? Que doivent conserver les producteurs? Dans la pratique, en fait, le radiodiffuseur demande au producteur tous les droits sans limite de temps.
On ne peut pas les leur vendre. Dans le cadre juridique actuel des relations de travail au Québec, ce n'est pas quelque chose qu'on peut vendre parce qu'on n'en dispose pas. Nous n'avons simplement que des licences d'exploitation d'un produit donné sur une plate-forme XYZ. Cela nous obligerait à revoir l'intégralité de la façon dont nous exploitons nos entreprises depuis 40 ans. Ça ne risque pas de se produire dans l'immédiat. Ce n'est pas quelque chose que l'on peut faire en quelques semaines ou en quelques mois. On ne peut l'envisager qu'à partir du moment où l'on se rendra compte que les radiodiffuseurs sont prêts à prendre part à la discussion. Nous ne pouvons pas décider par nous-mêmes. Jusqu'à présent, les radiodiffuseurs ne nous ont pas indiqué qu'ils étaient intéressés.
Nous sommes convaincus, d'ailleurs, que la CBC/SRC devrait faire preuve d'initiative dans ce cas précis. C'est le radiodiffuseur public. Si CBC/SRC faisait preuve d'initiative en ce qui a trait à sa façon d'opérer dans ce nouveau cadre, cela ouvrirait certainement une voie dans laquelle pourraient s'engager tous les autres radiodiffuseurs, qu'il s'agisse de Vidéotron, de la COGECO ou de Shaw.
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C'est une possibilité; bien entendu, c'est une possibilité. Dans l'idéal, les radiodiffuseurs, les producteurs et les détenteurs des droits réussiront à établir entre eux la répartition qu'ils jugent équitables. Si nous partons du principe que tout le monde va se montrer raisonnable et de bonne foi, tout va bien. Toutefois, pour y parvenir, nous devons nous pencher sur l'ensemble de la situation financière... à tous les niveaux de l'exploitation.
Je vais vous donner un exemple. Vous nous avez parlé de Vidéotron. Nous connaissons le principe de fonctionnement d'Illico, par exemple. Imaginons que mon producteur crée une émission pour TVA, que TVA la fasse passer sur Illico, vidéos à la demande, tout en décidant de ne rien faire payer aux téléspectateurs qui voient cette émissions chez eux. Ces téléspectateurs peuvent voir l'émission ainsi produite à toute heure du jour ou de la nuit, tous les jours de la semaine. Ils n'ont rien à payer en retour.
TVA dit alors à mon producteur qu'elle ne tire aucune recette de cette émission. Pourtant, au bout du compte, elle en tire des recettes. Elle vend la technique et la machine. Le client paie 87 $ par mois pour avoir la machine chez lui et pouvoir télédécharger l'émission à toute heure de la journée ou de la nuit.
Il n'est donc pas vrai qu'il n'y a pas de recettes correspondantes. Il y a une société qui bénéficie de cette technique quelque part. C'est la même chose pour Internet. C'est pourquoi tout le monde au sein de l'industrie est prêt à revoir l'ensemble du système. Tout le monde veut s'assurer que l'on ne va pas revoir ce que l'on a vu ces 50 dernières années. Ceux qui ont gagné de l'argent ces 50 dernières années sont surtout les radiodiffuseurs et les distributeurs de film. Malheureusement, il n'y a jamais eu...
J'ai été radiodiffuseur. J'ai vendu de la publicité pour financer mes émissions. Il ne m'est jamais arrivé, en tant que radiodiffuseur, d'appeler un producteur indépendant pour lui dire : Vous savez, cette émission que vous m'avez vendue? Je pensais avoir 600 000 téléspectateurs, mais finalement elle a été vue par un million de personnes. J'ai pu vendre plus cher les publicités que je ne l'avais prévu, et je vous envoie donc un chèque correspondant à la différence; notre rentabilité a été bien plus grande que prévu.
Voilà 35 ans que je travaille dans le secteur, et je n'ai jamais agi ainsi. C'est une chose que je n'ai jamais vue.
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Cela se fait, puisque cela s'est toujours fait. Jusqu'à maintenant, Radio-Canada a réussi, au fil des ans, à garder son autonomie en grande partie, je crois. Il y a peut-être déjà eu des tentatives d'influence quelconques, mais pendant les années où j'y ai oeuvré, on n'en a pas ressenti les secousses à l'interne, évidemment.
Par contre, cela fait partie de l'histoire de Radio-Canada. La société a été remise en question de façon cyclique. Tous les cinq ou six ans, on se demande si on devrait fermer ou continuer et quels sont les besoins nécessaires pour opérer. Je pense que c'est l'histoire de Radio-Canada, et il en sera toujours ainsi. J'imagine que c'est la même chose pour toute télévision publique. Il existe des modèles partout dans le monde où on pense que cela s'exerce assez bien. Tout cela est inscrit dans l'esprit d'une loi. De toute façon, le gouvernement qui déciderait de fermer Radio-Canada demain matin devrait livrer toute une bataille auprès de la population canadienne, du moins une bataille nationale importante au Québec.
Par contre, au Canada anglais, les gens sont peut-être moins portés à appuyer Radio-Canada, malheureusement, parce que leur habitude de consommation est plus axée vers les émissions américaines et leur vedettariat est beaucoup plus américain que chez nous, au Québec. Alors, pendant qu'à Toronto on regarde Entertainment Tonight, au Québec, les gens regardent Flash, qui est une émission du genre de Entertainment Tonight, mais qui est consacrée aux vedettes du Québec. Donc, il y a une différence énorme entre les deux marchés.
Je pense que le gouvernement qui tenterait d'abolir SRC/CBC demain matin aurait toute une côte à remonter au Québec, du moins en ce qui concerne l'appui de la population à son diffuseur public.
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Je vais poursuivre dans la même veine. Quand le gouvernement, avec beaucoup de subtilité — je ne désigne pas l'un contre l'autre ou un en particulier — arrive, parce qu'il en a la capacité, à nommer à sa tête des décideurs auxquels il confie le mandat d'atteindre tel ou tel objectif relativement à la société d'État et que ce mandat n'est jamais public, y a-t-il, selon vous, de quoi se poser des questions?
Nous avons été confrontés à cette réalité sous le gouvernement libéral antérieur et, cette fois-ci, sous le gouvernement conservateur. Nous avons demandé quel était le mandat réel qu'on donnait à telle personne nommée à un poste de décision important sans jamais pouvoir tirer quelque information que ce soit? C'est l'opacité totale. C'est la raison pour laquelle je vous posais la première question, qui n'était pas innocente.
Normalement, quand un mandat est donné à quelqu'un pour diriger une société comme celle-là, ce devrait être un exercice transparent, mais ça ne l'est pas, dans les faits. C'est ce qui inspirait les craintes qui entouraient la proposition à l'effet de renforcer l'enveloppe parlementaire à l'endroit de la société d'État.
Ailleurs, par exemple à la BBC ou même en Australie, le diffuseur public se nourrit à même la redevance, ce qui permet le maintien d'une certaine indépendance. En Australie, il est même inscrit dans son mandat la nécessité de maintenir une indépendance vis-à-vis du politique, ce qui n'est pas le cas ici. Ce n'est pas une télévision publique, mais sans faire de procès d'intention, les faits, dans une perspective historique, nous montrent que c'est une télévision d'État, veux veux pas.
Compte tenu du fait que nous subissons en ce moment ce qu'on peut qualifier de pensée unique, la logique de marché, qui s'applique même dans des institutions publiques avec beaucoup de finesse, dans l'hypothèse où cette logique s'emparerait de la société d'État, c'est-à-dire où l'État se retirerait progressivement de son devoir de soutenir financièrement la SRC, en l'occurrence, quels sont les autres types de financement que l'on devrait envisager, mis à part la publicité? C'est de l'anticipation, c'est une hypothèse.
On sait ce que cela peut avoir comme conséquences chez un diffuseur public. Plus il y a de la publicité, plus on rejoint le profil d'un diffuseur privé et plus on dégage du contenu canadien, en l'occurrence, et plus celui-ci perd de sa spécificité. Donc, à part la publicité, y a-t-il d'autres avenues de financement, selon vous?
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Je vais plutôt aborder les grandes lignes du document.
La position de l'Union des artistes est celle des artistes, mais aussi celle de citoyens canadiens. Dans un monde où la convergence est de plus en plus présente, le rôle du télédiffuseur public est majeur sinon primordial. Le mandat de Radio-Canada est très large: il doit couvrir des régions, des dualités voire des pluralités linguistiques. Ce mandat doit aussi faire en sorte que l'ensemble des régions et des valeurs canadiennes, notre identité canadienne et les identités régionales soient représentées de la côte ouest à la côte est. Je ne pense pas que les sociétés privées de diffusion ou de télévision soient à même de remplir le rôle assumé par Radio-Canada. Pour nous, il est important que Radio-Canada soit maintenue et largement financée, peut-être même plus qu'elle ne l'est maintenant, compte tenu de l'envergure de son mandat.
Par ailleurs, j'aimerais parler de la présence des femmes. L'équité entre les hommes et les femmes est l'une des valeurs que défend le Canada. Si cette équité existe, il faudrait, en vertu du mandat de Radio-Canada, voir à ce que ce soit visible à l'écran. C'est important pour l'Union des artistes et, je pense, pour l'ensemble des Canadiens.
En outre, le CRTC a déréglementé récemment un bon nombre d'objectifs reliés à la production de téléromans, de téléséries, d'émissions dramatiques et d'émissions jeunesse. On note que depuis cette déréglementation, les émissions de ce genre sont en perte de vitesse. Or, s'il y a un endroit où Radio-Canada pourrait se démarquer, c'est bien dans ces domaines.
Nous constatons aussi que notre télévision, de façon générale — et je ne parle pas ici de Radio-Canada, qui diffuse de plus en plus d'émissions de format étranger —, diffuse des émissions un peu adaptées à la sauce d'ici. Nous pensons que c'est dommageable pour l'identité de l'ensemble canadien.
Pour ce qui est du reste, vous le trouverez en majeure partie dans le document qu'on vous a remis. Je pourrais vous en faire la lecture, mais j'imagine que vous avez eu l'occasion d'en prendre connaissance. Vous le répéter n'ajouterait pratiquement rien à ce qu'on a dit ou écrit jusqu'à maintenant.
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Bonjour, monsieur le président.
Nous représentons les auteurs, donc la base même de la pyramide de la culture télévisuelle, puisque ce sont nos membres qui écrivent les textes. La Loi sur la radiodiffusion disait entre autres ce qui suit:
(ii) favoriser l’épanouissement de l’expression canadienne en proposant une très large programmation qui traduise des attitudes, des opinions, des idées, des valeurs et une créativité artistique canadiennes, qui mette en valeur des divertissements faisant appel à des artistes canadiens [...]
Cette loi existe depuis 1991, et nous considérons qu'elle est encore tout à fait d'actualité. Le mandat culturel de Radio-Canada est très important. Il a bien servi les francophones du Canada, particulièrement au Québec. On dit souvent que la télévision anglaise fonctionne moins bien, laissant entendre par là que la télévision française ne fait face à aucun problème. Nous nous inscrivons en faux contre cette idée.
Dans le cas de la télévision francophone, sur les dix missions les plus écoutées en 2001, neuf étaient des dramatiques. En 2005, ce chiffre était tombé à trois. Il y a donc eu une baisse. Bien sûr, je parle des dramatiques parce que parmi tous les domaines prioritaires, c'est celui qui compte le plus pour nos membres, les auteurs. Il permet d'exprimer la culture canadienne au moyen d'histoires écrites par des Canadiens pour des Canadiens.
Radio-Canada a bien joué son rôle de chef de file pendant le XXe siècle, et nous croyons qu'elle doit continuer à le faire au XXIe siècle. En ce qui concerne la création de dramatiques, elle doit considérer la culture comme la base même de son existence. On doit lui octroyer, bien sûr, le financement qui lui permettra de poursuivre son mandat, mais en plus, il faut absolument faire en sorte que les objectifs culturels soient les mêmes pour les nouvelles plateformes technologiques. Il faut donc trouver le modèle d'affaires qui permettra aux nouvelles plateformes du XXIe siècle d'être payantes pour tout le monde, de façon à ce que tous puissent en vivre et que Radio-Canada reçoive de ces plateformes les fonds lui permettant de continuer à générer des dramatiques. N'oublions pas que les télévisions généralistes, privées et publiques confondues, dont Radio-Canada, sont dans 95 p. 100 des cas celles qui génèrent les fonds pour les licences permettant la création des émissions écoutées par les Canadiens.
En 2005, les chaînes spécialisées ne consacraient que 1,9 million de dollars sur 41 millions de dollars à la création de dramatiques. On ne peut pas s'attendre à ce qu'elles augmentent cette proportion considérablement. On ne peut pas non plus s'attendre à ce que les producteurs généralistes privés pensent d'abord à la culture plutôt qu'à leurs actionnaires. Pour protéger cet univers culturel, il reste donc Radio-Canada. Voilà pourquoi nous appuyons fortement le mandat passé, présent et futur de Radio-Canada.
Il s'agit là de bien belles paroles, mais si l'argent nécessaire ne vient pas les appuyer, il va arriver à notre culture ce qu'il advient quand on ferme un pipeline. Dans 15, 20 ou 30 ans, il n'y en aura plus.
Merci.
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Dans les canaux spécialisés, mais surtout dans les réseaux de télévision disponibles du secteur privé, il y a de plus en plus d'émissions de télévision américaines traduites, avec surimpression vocale. Je parle également des formats américains achetés. On achète le format et on le refait à la sauce d'ici.
Le Banquier en est un exemple. C'est ce à quoi je faisais allusion. Je ne veux pas dire qu'il ne faut pas que ces émissions existent, mais avec la disparition de la réglementation du CRTC et l'avènement d'objectifs par rapport aux émissions jeunesses et aux émissions dramatiques, ce type d'émissions entre dans le contenu canadien.
On a donc assisté, avec la déréglementation, à un déplacement sur le temps d'antenne occupé par les stations. Il devient donc d'autant plus important pour moi qu'une télévision publique soit là et maintienne les objectifs par rapport à ce que soulignait Marc Grégoire tout à l'heure, c'est-à-dire une culture d'ici, des auteurs d'ici, et que ces derniers puissent trouver un endroit où s'exprimer. Je pense aux séries lourdes, qui sont probablement plus onéreuses mais dont la qualité est supérieure à ce qui se fait dans l'ensemble. Je pense beaucoup au modèle de la BBC en Angleterre. Le financement de la BBC lui permet de produire des émissions de qualité qui sont vendues à travers le monde. Alors, je ne crois pas que les investissements dans des émissions de qualité soient nécessairement déficitaires.
Il y a dans le monde des marchés pour la télévision. De plus en plus, les nouvelles plateformes qui se développent ont besoin de contenu. Or, ce pourrait être une bonne occasion pour Radio-Canada de produire des émissions dont le contenu pourrait être à l'échelle du monde, un peu comme le modèle de la BBC. Évidemment, la BBC est largement subventionnée à partir de redevances. Est-il possible qu'on imagine d'autres modèles qui permettraient à CBC d'avoir de l'argent qui lui permettrait de remplir ce mandat? Le mandat est tellement large, mais en même temps, à l'intérieur de ce mandat très large, je pense qu'il y a possibilité de trouver des moyens pour financer encore plus de production de la part d'une société ou d'un organisme qui est plus neutre et moins assujetti aux lois du marché en termes de profits et d'actionnaires.
En ce moment, dans le contexte du développement des nouvelles technologies, j'y vois même une opportunité. J'ai souvent eu l'occasion de me rendre sur le site internet du Canada, de même que sur celui du Québec. Toute l'information véhiculée là est phénoménale. Cela donne une chance à chaque région du Canada d'avoir une vitrine pour montrer sa spécificité, puisque le Canada est quand même très large. Vancouver est très différente de Montréal, de Moncton, de Fredericton. Ces nouvelles technologies permettent justement l'apport d'une vision qu'on pourrait avoir de l'ensemble des régions du Canada. Si Radio-Canada, qui est déjà présente sur Internet, est capable de trouver d'autres façons de permettre à moindre coût la présence des régions... Arriver à ce que chaque région soit présente à l'intérieur de la télévision radio-canadienne est souvent un problème, dans le mandat de Radio-Canada.
Tout au long des entretiens auxquels nous avons assisté à l'échelle du pays, nous avons pu constater chez de nombreux intervenants que Radio-Canada a eu sa période de gloire, notamment pour ce qui est de la CBC en anglais, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. On nous a dit que de nombreux téléspectateurs suivaient alors les émissions. Eh bien, je me souviens moi aussi de cette période: nous regardions tous les mêmes émissions parce qu'il n'y avait qu'une seule chaîne. Les émissions n'avaient rien d'extraordinaire, mais comme c'est tout ce qu'il y avait à voir, tout le monde les regardait.
Désormais, nous avons un millier de chaînes. Par conséquent, lorsqu'une chaîne a 10 p. 100 de ce marché d'un millier de concurrents, les gens lui disent: « Vous aviez alors 40 p. 100 du marché lorsqu'il n'y avait que deux chaînes et maintenant vous en avez plus de 10 p. 100. » Nous nous efforçons de déterminer l'utilité d'un radiodiffuseur public dans un monde à plates-formes multiples et à chaînes multiples. L'existence d'un radiodiffuseur public m'apparaît plus que jamais nécessaire.
Prenez la radio, par exemple, je suis le plus souvent dans mon automobile, parce que ma circonscription a la taille de la Grande-Bretagne. J'écoute tout le temps la radio. J'entends dire par les stations de radio privées que les auditeurs écoutent la radio parce qu'ils veulent entendre leur propre voix; ils veulent entendre la voix de leur communauté; ils veulent entendre leurs propres annonces. Le matin et l'après-midi, il y a une pléthore d'excellentes émissions locales. Ensuite, c'est comme si on avait appuyé soudainement sur un bouton, et la radio locale rend le même son que 600 autres stations de radio du pays, parce que le propriétaire de cette station en possède 600 autres. Il y a une intégration verticale des médias. Aujourd'hui, nous avons les mêmes éditorialistes dans 300 journaux, parce que le propriétaire de ces journaux est le même. Pourquoi avoir 300 éditorialistes? Il suffit d'en avoir un, qui va travailler dans tous les journaux.
Il y a donc une homogénéisation du discours et une disparition des forums. Il m'apparaît que la radio de CBC et de Radio-Canada a terriblement gagné en efficacité parce qu'elle est originale. La population l'écoute parce qu'il y a un contenu.
Je me demande encore pourquoi la télévision lutte sans succès pour reprendre ce que la radio a su si bien faire. Dans un monde où le discours commence à être partout le même, on voit disparaître les milliers de choix qui s'offraient à nous — le contenu ayant de moins en moins d'importance — nous avons besoin d'un radiodiffuseur solide diffusant des émissions originales qui ne pourront pas manquer d'attirer un public, parce que les gens veulent un contenu.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
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Je m'excuse, mais je vais répondre en français.
Je ne sais pas comment cela fonctionne. Je connais mal la réalité anglaise. Je sais que du côté francophone, beaucoup d'émissions ont ou ont eu des cotes d'écoute — et je ne parle pas de l'ancienne Radio-Canada; je parle de la Radio-Canada actuelle — de 1,2 million, 2 millions, 3 millions, 4 millions de téléspectateurs. Évidemment, la fragmentation des marchés existe à l'heure actuelle. De plus en plus, effectivement, les gens regardent... Il faut que la télévision canadienne développe aussi d'autres marchés, qu'elle développe des canaux spécialisés. La télévision privée — pour ne pas la nommer, TVA ou Quebecor, et j'imagine que Shaw doit le faire du côté de l'Ouest — fait une télévision plus généraliste, plus spécialisée. Radio-Canada doit aussi être présente dans ces contenus, doit aussi y assurer sa présence.
Comment dirais-je? Pour moi, c'est extrêmement important. Il faut que notre identité et notre culture canadiennes transcendent, à un moment donné, la stricte notion de profit. Or, beaucoup de choix sont faits uniquement en fonction des profits. C'est pourquoi je parlais des émissions qui sont des reprises de formats américains servis avec une sauce canadienne. Dans votre cas, il n'y a pas vraiment de reprises, puisque l'émission est vendue telle quelle. Même Canadian Idol est une reprise d'American Idol. En ce sens, on doit favoriser les artistes et les auteurs qui sont ici, afin qu'ils ne s'en aillent pas nécessairement enrichir la culture américaine. Il faut qu'on ait notre propre identité. Je pense qu'au Canada, on a une identité culturelle différente des Américains. Il faut miser là-dessus pour renforcer notre sentiment d'identité et d'appartenance à nos pays. Quoi de mieux que la culture, selon moi, pour traduire tout cela?
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Vous parlez de la radio. Bien sûr, l'âge d'or de la radio, lorsqu'il y avait des feuilletons à la radio, est disparu. Je ne crois pas que cela reviendra à court terme, à moins de vouloir avoir une radio nostalgique. Donc, je pense que la radio n'est plus le médium le plus approprié pour les auteurs et pour les histoires à raconter.
Par contre, la radio française de Radio-Canada connaît un énorme succès depuis plusieurs années, d'abord parce que le contenu est important et que les gens qui y participent sont de haut calibre du point de vue intellectuel, et ensuite parce qu'il n'y a pas de publicité. Il faut bien se rendre compte que la publicité est un irritant monstrueux à la télévision et à la radio. On est obligé de vivre avec, puisque notre système a été un peu calqué sur celui des Américains, mais si on l'avait calqué sur celui de la BBC, on serait peut-être mieux aujourd'hui. Mais c'est ainsi. Alors, un des grands arguments de la radio francophone, à tout le moins ici, c'est que lorsqu'il n'y a pas de publicité pendant 60 minutes, il y a 60 minutes de contenu, ce qui est magistral.
En ce qui concerne les nouvelles économiques, culturelles et de l'ensemble de la vie de la communauté québécoise, la radio est extrêmement présente et écoutée. L'émission du matin à Radio-Canada intitulée C'est bien meilleur le matin était en première position de toutes les cotes d'écoute, il y a quelques mois. L'an dernier, elle était en deuxième ou troisième position. C'est donc une radio extrêmement dynamique.
Par contre, je ne pense pas qu'on puisse revenir aux dramatiques. À la SARTEC, les contrats reçus pour des oeuvres dramatiques à la radio ne s'élèvent même pas 100 000 $ par année. Selon moi, c'est disparu, et je ne vois pas comment cela reviendrait.
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Mon Dieu! En ce moment, les enjeux sont majeurs. En fait, c'est beaucoup un enjeu économique, je pense. Tout est une question d'équilibre. Ce qu'on appréhende, c'est qu'à cause d'enjeux économiques, le mandat de Radio-Canada soit changé. Je connais plus la réalité québécoise.
C'est sûr que la télévision généraliste a perdu des auditeurs, même si le nombre d'auditeurs reste important. Les revenus publicitaires ont diminué et, d'après moi, continueront à le faire. Ce n'est pas seulement un problème relié aux télévisions généralistes, ce le sera également du côté des canaux spécialisés, parce que de plus en plus, les gens ont des enregistreurs numériques, coupent les commerciaux. Les gens qui font de la publicité durant les temps d'antenne opteront de plus en plus pour d'autres médias ou d'autres façons de faire de la publicité. Il risque donc d'y avoir une diminution des revenus publicitaires non seulement pour les télévisions généralistes, mais aussi pour les canaux spécialisés, au profit d'autres médias, peut-être plus Internet, d'où la nécessité de s'assurer, pour n'importe quel diffuseur, qu'il soit public ou privé, d'occuper aussi le champ de l'Internet, des canaux spécialisés, pour s'assurer que sa base de revenus soit multiple.
Dans ce contexte, ce qu'on appréhende, c'est qu'il y a toujours un lien. Le virage de Radio-Canada, on l'a vu. Auparavant, il y avait beaucoup moins de temps de publicité, les choix étaient... Maintenant, beaucoup de choix sont des choix économiquement viables. Je ne veux pas dire par là qu'une émission de qualité n'a nécessairement pas de public, mais il y a parfois un lien direct. Des émissions, des séries lourdes ont été coupées parce que les revenus n'étaient pas suffisants. Notre crainte, c'est cela. Nous craignons que la logique économique fasse qu'il y ait une pression énorme à l'endroit de Radio-Canada. Des pressions ont déjà été faites, entre autres au Fonds canadien de télévision, où on juge insatisfaisant, en tout cas chez des diffuseurs privés, que Radio-Canada puisse profiter de 37 p. 100 du budget du Fonds canadien de télévision. Ce sont des pressions de ce type qui nous font craindre et appréhender que la pression finisse par changer le mandat de Radio-Canada. C'est notre crainte par rapport à cela et c'est ce qu'on appréhende.
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Non, surtout pas. On pense que c'est important.
Je vais ajouter une autre chose. Radio-Canada, dans les conditions qu'elle accorde aux artistes, particulièrement dans ses productions maison, est un leader, un exemple à suivre. Quand le déplacement de la production s'est fait de Radio-Canada vers les producteurs indépendants, pour les artistes, comédiens, interprètes, cela a marqué une diminution très nette de leurs conditions de travail, de façon générale. Je ne sais pas ce qui en est pour les auteurs, mais pour nous, il y a eu une très grande différence par rapport à ce qui existait auparavant et par rapport à la qualité, par rapport au temps qu'on avait pour réaliser une émission de télévision quand Radio-Canada assurait la production et la diffusion des émissions. Cela a beaucoup changé lorsqu'on s'est tourné vers la production indépendante, où les gens voulaient rentabiliser tout cela.
Je ne suis pas certain du coût que représente, dans l'équation, la production indépendante par rapport à ce qui existait auparavant, car beaucoup de crédits d'impôt sont donnés pour les producteurs indépendants, beaucoup d'argent est investi là-dedans.
C'est un léger commentaire qui rejoint un peu la question dont M. Scarpaleggia parlait tout à l'heure.
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Il nous semble assez aberrant actuellement qu'il y ait deux poids, deux mesures entre les généralistes et les spécialisés. Au départ, la télévision spécialisée était fragile. On a donc créé des conditions extrêmement particulières pour permettre à ces télévisions de s'installer dans l'univers télévisuel. Aujourd'hui, la télévision spécialisée — vous avez vu comme moi les rapports des compagnies, entre autres Astral Media, qui est très présente chez nous — font beaucoup de profits et remettent assez peu en termes de licences de production. Comme je le disais tout à l'heure, c'est de l'ordre de peut-être 10 ou 15 p. 100.
Donc, comme M. Legault le disait, la publicité diminuant comme source de financement accessoire, il nous semblait à tout le moins logique qu'une partie des redevances données aux satellitaires ou aux câblodistributeurs soit remise à Radio-Canada, parce que la valeur de Radio-Canada fait augmenter la valeur du bouquet offert par Vidéotron, Cogeco ou Bell ExpressVu. On disait qu'une partie de cet argent devrait revenir, bien sûr, à Radio-Canada, mais à la condition qu'une partie de cette nouvelle redevance soit obligatoirement remise dans les émissions prioritaires et spécialement dans les dramatiques, afin que la roue tourne.
Vous parliez d'Internet, tout à l'heure. On s'entend: rien n'est gratuit. S'il était gratuit d'écrire, de jouer, de réaliser, je ne vois pas pourquoi ces gens feraient cela, à moins d'être des gentlemen artists. Cela n'a aucun sens. Il faudra, bien sûr, légiférer Internet, faire en sorte que nos structures conventionnelles avec ces gens soient reproduites d'une façon ou d'une autre, puisque la seule façon pour un artiste de gagner sa vie, c'est de faire en sorte d'être payé pour le travail qu'il fait. S'il n'est pas payé, je ne vois pas pourquoi il ne serait pas chauffeur de taxi ou autre chose. Donc, c'est la mort de la création et d'une culture générale si une société ne parvient pas à faire vivre ses artistes.
Internet ne change rien à la donne autre que... Autrefois, il y avait de grandes forges, des chevaux et des gens très équipés en clous et en fers à cheval. Aujourd'hui, il n'y en a plus: on vend des pneus. On a beau avoir la plus belle forge au monde, qui serait l'ancienne télévision, si personne ne l'écoute, il faut emprunter le chemin que prend la culture pour s'exprimer.
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Comme vous avez reçu le mémoire, je vais en aborder rapidement le contenu.
Sports-Québec est une corporation privée qui regroupe 64 fédérations et 17 Unités régionales de loisir et de sport. Pour nous, il est important de rappeler que nous ne sommes pas un organisme gouvernemental mais bel et bien une corporation privée qui rejoint 800 000 membres, québécois et québécoises, 60 000 entraîneurs et 400 000 bénévoles.
Ce dossier nous intéresse et nous interpelle particulièrement. À l'heure actuelle, les investissements dans le domaine du sport sont minimaux. Aucun investissement majeur et significatif ne s'y fait par les temps qui courent, et il y a des conséquences à cela. Ça nous amène à solliciter les entreprises privées. Or, les exigences de ces entreprises sont de plus en plus importantes. Comme il y a beaucoup de concurrence, les choix qui leur sont offerts sont plus nombreux. Ça augmente d'autant plus leurs exigences, et il est difficile de répondre à celles-ci. Comme les investissements sont minimaux, nous sommes obligés de chercher de nouveaux fonds pour nous financer. Qu'il s'agisse de gens de la base, du niveau de l'initiation ou de haut niveau, les attentes et les exigences de notre clientèle sont grandes, ce qui exerce une pression sur l'ensemble du système.
Il y a aussi des besoins accrus chez les entreprises. Parce qu'elles ont plusieurs choix, elles demandent que nous leur offrions beaucoup d'avantages. Elles disent avoir besoin de visibilité et vouloir que l'argent investi chez nous soit rentable. Nous avons par le passé entretenu des liens beaucoup plus significatifs avec Radio-Canada. La société offrait gratuitement certains services. Elle a non seulement cessé ses subventions et son soutien en matière de visibilité, mais elle s'est carrément retirée de la présentation. À preuve, sa participation est inexistante ou presque dans le cas des Jeux du Québec et des Jeux du Canada ainsi que des championnats nationaux et internationaux.
Pour notre part, nous considérons qu'à titre de société d'État, Radio-Canada a des responsabilités. En ce qui a trait aux saines habitudes de vie, on peut dire que le sport est un élément de solution important. En ce sens, le rôle joué par la SRC est vraiment insuffisant.
Dans notre mémoire, nous avons voulu mettre l'accent sur certains moments particuliers. En 2002, la SRC a mis fin à l'émission Les jeux sont faits. En 2003, c'est le bulletin de nouvelles sportives qui a été retiré de l'antenne, ce à quoi nous avons réagi intensément. C'était une perte importante, compte tenu que c'était diffusé sur le réseau national de Radio-Canada. En 2005, le magazine hebdomadaire Adrénaline a lui aussi été retiré de l'antenne, et une seule émission quotidienne de 30 minutes, soit Au-dessus de la mêlée, a été mise en ondes. Or, celle-ci traite quasi exclusivement de sport professionnel. Enfin, en 2005, la Société Radio-Canada n'a pas obtenu les droits de diffusion pour les Jeux de Vancouver. On parle pourtant ici d'un événement qui aura lieu au Canada. Pour nous, il s'agit d'une perte et d'un effet significatifs.
Pour voir nos propres athlètes, il faut avoir recours au réseau anglais. Il y a de quoi se poser des questions. Le temps d'antenne alloué aux sports fédérés diminue constamment, et quand ce n'est pas le cas, des frais sont imposés. Cette situation devient difficile voire intenable pour des organismes de notre niveau. Les organismes sans but lucratif doivent assurer leur financement, mais la chose devient d'autant plus difficile, compte tenu des besoins et des attentes.
Pour ce qui est du mandat de la SRC, nous allons nous attarder aux articles 2, 4 et 7, au sujet desquels nous avons des commentaires à formuler. Nous considérons que le sport fait partie de la culture d'un pays. Quand on parle de culture, on pense naturellement aux arts. Pour nous, le sport a la même signification au sein de la culture d'un pays. Dans ce domaine, la Société Radio-Canada ne joue pas vraiment son rôle. En matière de sports fédérés, sa présence est insuffisante.
Quand on parle de sports amateurs, on parle maintenant de sports fédérés, c'est-à-dire qu'ils sont rattachés à un organisme qui est fédéré. Ils sont peu présents dans la grille de la Société Radio-Canada. Il y a effectivement une disparité. Ce n'est pas une comparaison entre la CBC et la SRC, c'est plutôt une constatation. Il y a vraiment un monde entre le temps consacré au sport à la CBC et le temps consacré au sport à la SRC. Il y a, à ce niveau, des aspects du mandat qui ne sont pas respectés, si on parle de présentations anglophones et francophones. On pense que le sport, pour l'ensemble des francophones hors Québec, est absent ou a une présence insignifiante. L'information que nous avons provient des communautés auxquelles on rend des services dans l'ensemble du Canada.
J'en viens aux recommandations parce que je pense que c'est l'aspect important. On recommande que le mandat législatif de la Société Radio-Canada inclue la responsabilité de contribuer à la promotion de saines habitudes de vie et du sport fédéré. On veut que cela soit inscrit, qu'il soit reconnu et précisé que la Société Radio-Canada a cette responsabilité envers les francophones, y inclus ceux hors Québec.
Nous recommandons que tous les revenus générés par la couverture olympique et le sport professionnel soient réinjectés systématiquement et automatiquement dans la production d'émissions orientées vers la promotion de saines habitudes de vie et du sport fédéré.
Nous recommandons également que la Société Radio-Canada établisse des partenariats avec d'autres diffuseurs. Cela s'est fait. Prenons l'exemple de RDS. Comme il est toujours question de coûts, on pense que c'est possible de réaliser une présence et des interventions qui sont à la mesure des moyens financiers de la société.
Nous recommandons l'établissement d'un véritable service des sports à la Société Radio-Canada. On connaît l'intégration des technologies et des moyens. Le sport fédéré est davantage présent sur Internet, mais quasi absent de la radio et de la télévision. On pense que l'intégration et la mise en place d'une véritable équipe des sports à la Société Radio-Canada serait un avantage et que cela entraînerait une utilisation maximale des compétences de tous les journalistes. Cela se fait et cela devrait se faire dans le domaine du sport.
Nous recommandons une programmation sportive dédiée aux sports fédérés et offerte par la SRC sur les réseaux conventionnels et spécialisés. À titre d'exemple, on sait fort bien qu'à Montréal, tout le monde n'a pas le câble. Par conséquent, il faut vraiment que la Première Chaîne puisse rejoindre ces gens.
Nous recommandons que la SRC contribue à la promotion du sport fédéré par la production et la diffusion de bulletins de nouvelles sportives répartis équitablement entre le sport fédéré et le sport professionnel. Nous souhaitons un retour de la société dans les bulletins de nouvelles et aux heures de grande écoute. On en trouve sur les réseaux spécialisés comme RDI, de la chaîne Radio-Canada même et qui rejoint le réseau conventionnel. Il y a peu de présence ou peu de références aux sports fédérés.
Nous recommandons que la Société Radio-Canada produise et diffuse des éléments de promotion sur l'amélioration de la condition physique des Canadiens et des Canadiennes: des capsules publicitaires, des émissions spéciales, des séries régulières et, au besoin, des magazines spécialisés, en se servant des modèles qui existent et en mettant en évidence nos athlètes. Quand on veut changer la culture et les façons de faire des gens dans l'ensemble, on leur présente des modèles qui sont connus et reconnus.
Finalement, nous recommandons que la programmation pour les enfants et la jeunesse inclue des segments de vulgarisation des saines habitudes de vie. Il faudrait qu'on profite de ces émissions qui s'adressent particulièrement aux jeunes pour diffuser des messages concernant les saines habitudes de vie.
On pense qu'en touchant l'ensemble de ces éléments, la SRC jouera véritablement son rôle de société généraliste et nationale pour le Québec et le Canada.
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Je suis venu ici aujourd'hui en compagnie de Tim Paul, président de Maliseet Nation Radio Inc. Voilà deux ans que je collabore avec Tim au développement de cette station de radio au Nouveau-Brunswick et dans les Maritimes.
Je tiens à remercier votre comité de nous avoir invités.
Je veux vous donner aujourd'hui en quelques minutes un aperçu rapide des principaux points soulevés dans votre mémoire. Nous traiterons tout d'abord du mandat de CBC/Radio-Canada dans la mesure où il s'applique aux premières nations du Canada; en second lieu, nous ferons état de l'action de Patrimoine Canada face à la nécessité de revitaliser les langues des premières nations au Canada; enfin, nous vous parlerons du réseau de Maliseet Nation Radio Inc., qui s'efforce de répondre à cette nécessité de revitaliser les langues des premières nations.
Tout d'abord, le mandat de la Société Radio-Canada, tel qu'il est énoncé aux alinéas 3(1)l) et m) de la Loi sur la radiodiffusion de février de 1991 ne semble pas envisager, de quelle que façon que ce soit, de répondre aux besoins des premières nations du Canada en matière de radiodiffusion. Ce mandat vise les besoins des minorités linguistiques francophones et anglophones, mais il n'y est pas question des quelque 61 langues autochtones actuellement employées au Canada dont plusieurs figurent parmi les langues menacées qui sont énumérées par le Groupe de travail sur les langues et les cultures autochtones de Patrimoine canadien dans le rapport publié en juin 2005.
Maliseet Nation Radio Inc. estime qu'il est impératif que le mandat de CBC/Radio-Canada soit élargi pour répondre aux besoins et tenir compte de la situation des diverses langues parlées couramment par les membres des premières nations du Canada et que ce mandat devrait renvoyer expressément aux besoins des premières nations du Canada.
Ces besoins comprennent, entre autres, la question de l'instruction linguistique, des émissions en langue maternelle, des émissions relatives à la culture, le patrimoine et l'histoire et de la transmission intergénérationnelle. Le mandat de la SRC doit être élargi pour qu'il soit tenu compte directement ou indirectement de ces questions, éventuellement par le biais d'un partage de services et d'infrastructures ou d'un partenariat entre le secteur public et le secteur privé.
Pour commencer à combler le manque actuel de contenu radiophonique à l'intention des premières nations, Maliseet Nation Radio Inc. (MNRI) a créé et fait fonctionner un modèle réussi de radiodiffusion autochtone qui tient compte des besoins exprimés dans le rapport publié en juin 2005 par le Groupe de travail sur les langues et les cultures autochtones. Cette station de radio diffuse des cours en langue autochtone ainsi que des émissions traitant des questions que j'ai évoquées précédemment: la culture, le patrimoine, l'histoire et la transmission intergénérationnelle.
Compte tenu des recommandations du Groupe de travail et du succès du modèle appliqué par MNRI, l'entreprise a élaboré une stratégie qui prévoit la création d'un réseau radiophonique autochtone dans les Maritimes, appelés Wabanaki Voices East, lequel pourrait être le précurseur d'un réseau national, pour faire rayonner partout le message des premières nations.
Je vais maintenant vous exposer rapidement les nouvelles politiques de Patrimoine canadien visant à la revitalisation et à la préservation des langues et de cultures autochtones.
En décembre 2002, la ministre du Patrimoine canadien annonçait que le Canada créerait un centre des langues et des cultures autochtones dans le cadre de l'engagement pris dans le discours du Trône de 2002 à l'égard de la préservation, de la revitalisation et de la promotion des langues et des cultures des Premières nations, des Inuits et des Métis. Au début de 2003, la ministre a créé le Groupe de travail sur les langues et les cultures autochtones, dont les avis orienteraient cette nouvelle initiative. C'est en juin 2005 que le Groupe de travail a publié son rapport. En février 2007, Maliseet Nation Radio Inc. (CKTP-FM) a élaboré un document conceptuel pour créer un réseau radiophonique autochtone du nom de Wabanaki Voices East, qui offrirait, comme je l'ai déjà indiqué, des cours de langue et des émissions en langue maternelle aux Autochtones.
Ce document conceptuel est issu du succès du modèle de réseau radiophonique proposé par Maliseet Nation Radio Inc. et répond aux principales constatations et recommandations du rapport du Groupe de travail publié en juin 2005. Dans son rapport, le Groupe de travail formule un certain nombre de besoins, de priorités et d'objectifs concernant la revitalisation, la préservation et la perpétuation des langues et des cultures des premières nations, des Métis et des Inuits, et propose également quelques stratégies qui permettraient de réaliser quelques-uns des buts et objectifs les plus nobles.
Le réseau radiophonique Wabanaki Voices East sera orienté en fonction des recommandations formulées par le rapport du Groupe de travail et nous permet de disposer, à mon avis, d'un moyen efficace et rentable de mettre en oeuvre nombre des recommandations du rapport du groupe de travail qui, en l'absence d'un tel réseau de stations radiophoniques des premières nations serait impossible à mettre en pratique, et coûterait, de toute façon, bien trop cher.
J'aimerais conclure sur un certain nombre des principales constatations faites par le rapport du groupe de travail pour bien vous montrer que Wabanaki Voices East s'inscrit dans le cadre de la revitalisation et de la perpétuation des langues autochtones. Elles ont toutes été reprises dans notre mémoire, mais je tenais à en souligner trois ou quatre.
Tout d'abord, la diversité des premières nations, des Inuits et des Métis ainsi que la vitalité actuelle de leur langue peuvent aussi bien être florissantes comme se trouver en grand danger. Même les langues ayant un grand nombre de locuteurs peuvent être florissantes dans certaines régions ou certaines communautés et se trouver en grand danger dans d'autres. Les études et les enquêtes qui ont été faites nous donnent une image très diverse des langues des premières nations, des Inuits et des Métis. Certaines d'entre elles ne sont parfois parlées que par quelques anciens, alors que d'autres ont des dizaines de milliers de locuteurs. Les grands groupes linguistiques comme le cri, l'ojibway ou l'inuktitut sont viables, puisqu'ils comptent au moins 25 000 locuteurs, des plus jeunes aux plus âgés. Il n'en reste pas moins que toutes ces langues, même celles qui sont jugées viables, perdent du terrain et sont jugées en danger.
Le réseau Wabaniki Voices East permet l'installation stratégique de ses stations et répéteurs. C'est donc ainsi que fonctionne le modèle — une station à partir de laquelle les émissions sont créées et diffusées, et un certain nombre de répéteurs installés dans les différentes réserves qui ont besoin de cours de langue et qui apprécient les émissions culturelles et en langues autochtones.
Il est intéressant de constater que l'on peut mettre en place ces stations là où la langue est viable et, par l'intermédiaire du répéteur, de diffuser dans les régions où la langue est éventuellement menacée. On peut donc cibler très précisément les groupes linguistiques en danger au moyen des émissions.
Je tiens aussi à signaler que les efforts de conservation et de revitalisation des langues ne doivent pas être du ressort exclusif des établissements officiels et doivent s'étendre aux collectivités, aux familles et aux différents groupes sociaux. C'est une recommandation du rapport du groupe de travail. Bien entendu, notre réseau participe à cette action en produisant des émissions créées par et pour le peuple.
Nous allons dans les réserves, nous nous attachons les services de linguistes spécialisés et nous faisons appel à des établissements — dans notre cas, l'Institut Mi'kmaq-Maliseet de l'Université du Nouveau-Brunswick — qui se chargent d'élaborer des cours de langue en tenant compte de la vitalité de chaque langue. Ce sera l'équivalent d'un cours de langue de première année dans les régions où la langue est menacée, et éventuellement d'un groupe de langue de quatrième ou de cinquième année, c'est-à-dire plus élaboré, là où la langue est mieux parlée.
Il y a encore un ou deux points à souligner. Le groupe de travail recommande par ailleurs dans son rapport que les anciens mettent l'accent sur la langue, la culture et les valeurs spirituelles, qui sont des notions inséparables pour assurer l'identité des premières nations, des Inuits et des Métis. Il me paraît évident que la langue est essentielle dans toute culture. Lorsqu'on perd sa langue, la culture elle aussi se perd et lorsqu'il n'y a plus de culture, la population est essentiellement elle aussi perdue. Elle a perdu ce qui fait le fondement de son existence. Lorsque nous perdons notre langue et notre culture, nous perdons les racines même de notre être.
Notre réseau fait appel à la participation de linguistes spécialisés dans chaque collectivité pour assurer la conception et la mise en place de programmes et de cours de langue. De par leur nature, ces personnes sont, au départ, sensibles à ce lien qui existe entre la langue et l'identité d'une population.
Sur un dernier point, je relève que le groupe d'étude a souligné dans son rapport que tout le monde reconnaissait la nécessité d'établir une stratégie de revitalisation partant de la collectivité et engageant la collectivité à définir les priorités et à concevoir et mettre en oeuvre des projets impliquant les personnes de tout âge au sein de la population.
Par l'intermédiaire de CKTP, notre station FM, Maliseet Nation Radio Inc. demande à chaque participant au réseau de diffuser au minimum six heures d'émission à contenu autochtone tout en prévoyant au minimum dix heures de cours par semaine en langue autochtone. On s'assurera ainsi que le projet contribue à la mise en oeuvre d'une stratégie de revitalisation inspirée par la collectivité.
Nous recommandons donc à votre comité que le gouvernement fédéral et/ou Radio-Canada envisage la restauration d'un partenariat public et privé pour piloter la mise en place d'un réseau radiophonique des premières nations dans les Maritimes et, au bout du compte, à l'échelle du Canada.
Je vous remercie.
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On est conscients des coûts et de ce que cela représente. Mais on sait aussi qu'une société comme Radio-Canada a des responsabilités à assumer. On vous en a nommé quelques-unes, entre autres valoriser l'activité physique. Quand on pense aux problèmes d'obésité, d'embonpoint et d'inactivité, il y a là une responsabilité de la part de la Société Radio-Canada, mais également de la société canadienne.
La société canadienne a peu d'emprise sur les diffuseurs privés. Ils sont soutenus grâce à des fonds privés. À partir du moment où on parle de fonds publics, je pense qu'on doit identifier des cibles majeures pour la société canadienne et québécoise. Alors, en ce sens, il faut retourner à la couverture des sports fédérés pour présenter le plus souvent possible, dans le meilleur contexte et au meilleur coût possible, les modèles dont on dispose.
Qu'on pense à des personnes comme Alexandre Despatie, aux nageuses, etc. Actuellement, on est en train de créer le Centre d'excellence des sports aquatiques à Montréal, où on a regroupé quatre sports. Il n'y a pas de couverture à ce niveau, et pourtant, c'est un événement majeur, c'est une situation particulière au Canada. On aimerait que ces événements soient couverts.
En ce qui concerne les bulletins de nouvelles, si on ne revient pas régulièrement pour tenir les gens informés et soutenir leur intérêt, on perd toute une partie de l'influence, d'autant plus que les informations sont facilement disponibles. Au Québec, on a mis en place un organisme qui s'appelle Sportcom, qui est une agence de communication du sport amateur. Toutes les informations sont connues. Les athlètes, les entraîneurs et les organisations peuvent rejoindre ce réseau 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Alors, si on veut diffuser de l'information, on n'est pas nécessairement obligé d'avoir des gens sur place, on peut se servir de ce qui existe. Des collaborations avec RDS, entre autres, seront possibles. C'est une autre manière d'utiliser les fonds publics de façon appropriée.
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Merci, monsieur le président.
Messieurs, mesdames, bienvenue.
Monsieur Côté, vous avez dit une chose fort intéressante dans votre présentation, à savoir que le sport était une forme d'expression qui s'inscrivait dans la culture d'un pays, en d'autres mots, un élément qui servait à forger l'identité collective. Il est intéressant que vous le rappeliez ici, mais on peut constater que les Canadiens le savent déjà puisque la CBC présente beaucoup de sport. En fait, elle en présente beaucoup plus que la Société Radio-Canada. Vous avez dit qu'au cours des dernières années, la proportion d'émissions sur le sport, entre autres le sport fédéré, présentées sur les ondes de la SRC avait diminué de façon assez significative. Aujourd'hui, il n'y en a pratiquement plus.
Dans votre première recommandation, vous suggérez de donner à la Société Radio-Canada un mandat supplémentaire incluant la responsabilité de contribuer à la promotion du sport fédéré et de saines habitudes de vie. Quand on parle de créer de saines habitudes de vie, on sait que le sport fédéré est en effet un outil important. Étant donné que le mandat actuel de la SRC lui permet de trouver des façons de ne pas présenter de sport, vous avez décidé d'inclure un critère beaucoup plus restrictif, qui l'obligerait à le faire. Je trouve cette recommandation très intéressante et je vous en félicite.
Pour ce qui est de ma question, j'aimerais savoir si quelqu'un à la SRC vous a dit à un certain moment que le sport n'était plus vraiment important et que la société comptait tranquillement se désengager de tout cela. Comment les choses se sont-elles passées?
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On ne pourrait pas s'exprimer de façon aussi précise parce que, évidemment, on n'est pas dans les bottines ni dans les bouquins de la Société Radio-Canada. Cependant, on sait que parmi les jeunes athlètes en cheminement, on peut prendre quelques têtes d'affiche. Mais il n'y a pas qu'eux dans le sport fédéré. Les autres sont moins visibles, moins vus, on les présente moins. Aux yeux des téléspectateurs, c'est moins attirant. Si on veut faire une émission de sports fédérés, les commanditaires vont se demander qui cela va toucher exactement. Cela devient donc une clientèle très étroite.
Quand on pense à une culture, il faut comprendre que cela ne fait pas référence qu'aux élites. La culture présente une réalité, c'est-à-dire la réalité des jeunes qui se sont engagés dans un cheminement sportif afin d'atteindre l'excellence.
L'émission Adrénaline couvrait l'ensemble de ce réseau ou l'ensemble de ce palmarès. Quand on limite la couverture à quelques individus, le marché devient beaucoup plus mince et les commanditaires se disent qu'à moins de couvrir certains d'entre eux, ils ne participeront pas. Pour nous, cela représente une perte.
Il faut une volonté, une exigence à l'endroit d'un organisme comme la Société Radio-Canada de présenter le sport comme un élément de culture, donc, dans sa réalité sur le terrain, dans ce que c'est tous les jours ou de façon régulière, et non seulement quand on présente des championnats internationaux. Telle est la réalité qui devrait être présentée et qui devrait rejoindre les gens. Quand on voit les athlètes grandir, on s'y intéresse davantage et on les suit. Par contre, quand on ne les voit apparaître qu'une seule fois ou quand on n'exploite pas une telle personnalité sportive, cela n'a pas un grand impact. C'est le cas des Jeux olympiques. On voit les athlètes pendant 15 jours, puis ils disparaissent pour réapparaître quatre ans plus tard. Il faut donc entretenir l'intérêt. On souhaite que le mandat de la Société Radio-Canada soit exigeant à cet égard et qu'elle soit présente constamment et au quotidien.
Le bulletin de nouvelles est un bon exemple; les magazines également. Il peut aussi y avoir des présentations publicitaires où on rappelle des éléments importants pour la société canadienne. Il y a 1001 façons de le faire. Il est certain que cela implique certains montants d'argent. Je pense que le seul réseau sur lequel on peut avoir une certaine influence ou exigence, c'est la Société Radio-Canada, les autres étant des réseaux privés, donc, à moins qu'on ait de l'argent pour les financer, c'est impossible.
Il est difficile d'en sortir.