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Oui. Cela donne au comité des renseignements à ce sujet.
Nous allons commencer aujourd'hui les consultations prébudgétaires. Au cours de cette séance, nous aborderons le thème de la montée du dollar canadien. Le régime fiscal sera notre sujet de la semaine prochaine.
Sans plus tarder, j'aimerais vous présenter les témoins.
Au cours de la première série, nous entendrons l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada...
Je vais procéder en nommant d'abord vos titres. Je vous présenterai individuellement quand viendra votre tour de prendre la parole.
Nous allons entendre l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada, les Manufacturiers et exportateurs du Canada, Cascades Paper Products, le Groupe financier de la Banque Toronto-Dominion et Toyota Canada Inc. Voilà les témoins de la première série.
Nous allons vous céder la parole dans cet ordre. Vous disposerez de cinq minutes pour votre allocution, puis nous vous poserons des questions et entendrons vos réponses.
Commençons d'abord par David C. Adams, président de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada.
La parole est à vous.
Monsieur le président et honorables membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole aujourd'hui.
Comme vous l'avez mentionné, je m'appelle David Adams. Je suis président de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada. L'association est composée de 13 fabricants, importateurs et distributeurs de véhicules légers et de camions dont les sièges sociaux se trouvent à l'extérieur du Canada et des États-Unis. Ces fabricants sont BMW, Honda, Hyundai, Kia, Mazda, Mercedes-Benz, Mitsubishi, Nissan, Porsche, Subaru, Suzuki, Toyota et Volkswagen.
En 2006, les membres de l'AFIAC ont vendu plus de 733 000 véhicules neufs au Canada, ce qui représente environ 45 p. 100 du marché canadien des véhicules neufs. Les membres de l'AFIAC ont investi plus de 6 milliards de dollars dans les installations de fabrication. La production annuelle en 2006 a atteint un record de 900 839 nouveaux véhicules sur les 2,54 millions de véhicules produits, plus de 77 p. 100 de ces véhicules ont été exportés.
Honda, Toyota et Suzuki, avec General Motors, qui a une coentreprise 50-50 à Ingersoll, ont des installations de production au Canada.
L'appréciation de 20 p. 100 du dollar canadien par rapport au dollar américain a présenté des difficultés graves pour diverses composantes de l'industrie de l'automobile: le secteur de l'assemblage automobile, la fabrication de pièces d'automobile et les ventes.
Les fabricants membres de l'AFIAC comme Honda, Toyota et Suzuki, qui assemblent des véhicules au Canada, sont plus intégrés verticalement et ont amené des fournisseurs clés au Canada pour assurer l'approvisionnement local de pièces essentielles. Par conséquent, ces membres sont moins en mesure de profiter d'une partie de l'avantage intégré dont profitent les autres fabricants qui importent une grande partie de leurs pièces des États-Unis. Ainsi, l'appréciation du dollar présente un véritable enjeu.
Puisque nous exportons environ 80 p. 100 de notre production automobile aux États-Unis, la santé économique de ce marché s'avère essentielle pour les producteurs canadiens. En plus de l'appréciation du dollar, plusieurs autres facteurs importants touchent les ventes d'automobiles. Songeons notamment aux coûts de l'énergie qui sont plus élevés, aux retombées du rajustement des prêts hypothécaires à taux variable, aux normes de prêt plus rigoureuses et à la baisse générale du niveau de confiance des consommateurs. Tous ces facteurs ont contribué à une baisse des ventes aux États-Unis. Il y a eu une chute de 2,4 p. 100 en octobre et on prévoit que les ventes baisseront davantage en 2008. Certains suggèrent même que nos chiffres de vente pourraient chuter de 9 p. 100.
Pour ce qui est des fabricants de pièces au Canada, l'appréciation du dollar les rend moins compétitifs que leurs homologues américains. Cela a contribué à la perte de 11 000 emplois, à la baisse de 41 p. 100 du profit et à la réduction de 4,5 p. 100 de la production au cours de cette année, d'après un rapport du Conference Board du Canada. Toutefois, plusieurs autres facteurs ont une incidence sur les fabricants de pièces, notamment, les coûts plus élevés de l'énergie et des produits de base, la diminution de la production des principaux clients, le manque d'investissement en capital adéquat et la mondialisation des sources d'approvisionnement de la part des fabricants d'équipement. J'exhorte le comité à inviter Gerry Fedchun, le président de l'Association des fabricants de pièces d'automobiles, à comparaître devant le comité pour expliquer plus en détail les incidences du dollar sur ce secteur essentiel de l'industrie automobile du Canada.
Pour ce qui est de la vente des véhicules, lorsque la devise canadienne a atteint l'égalité et a dépassé le dollar américain, les consommateurs canadiens ont pu comparer les prix de ce qu'ils croyaient être les mêmes véhicules dans les deux marchés et se sont inquiétés à juste titre lorsqu'à la télévision, dans les journaux et sur Internet, on laissait entendre que les prix aux États-Unis étaient plus bas que ceux affichés au Canada. Il est important de remarquer que les véhicules en vente dans les marchés canadien et américain sont rarement les mêmes à cause des différents équipements de série offerts dans les véhicules et des normes réglementaires différentes. Comme on l'a vu dans les journaux aujourd'hui, le Canada a une norme unique relative à l'interruption d'allumage. Ces différences de normes font en sorte que les prix des véhicules sont plus élevés.
Cela dit, même si les véhicules étaient identiques à tout point de vue et que nos règlements étaient harmonisés, la structure de coût diffère dans les deux pays. Ainsi, par exemple, les États-Unis ont un plus grand pouvoir d'achat, des coûts de distribution inférieurs, des coûts en électricité inférieurs et des taux d'imposition inférieurs à ceux du Canada. Dans notre industrie, les tarifs sur les véhicules importés sont de 6,1 p. 100 par rapport à 2,5 p. 100 aux États-Unis. Ces différences ajoutent de 1 000 $ à 30 000 $ au prix du véhicule.
Mais les consommateurs ne se soucient pas tellement des coûts structuraux et des différences réglementaires. Ils se concentrent sur les prix. Si on tient uniquement compte des prix du marché, on voit que les fabricants les comprennent et réagissent. S'ils n'avaient pas agi ainsi, les consommateurs n'auraient pas acheté des véhicules, auraient attendu que les prix baissent ou seraient allés aux États-Unis pour y acheter des voitures à plus bas prix.
Bien que l'on s'inquiète de l'augmentation du nombre de véhicules importés des États-Unis, nous avons affiché des ventes nationales robustes, avec une augmentation de 2,1 p. 100 en octobre par rapport à l'année dernière. Les ventes annuelles ont augmenté de 3,8 p. 100 par rapport à l'an dernier. D'ailleurs, 2006 a été la deuxième meilleure année de vente dans l'histoire du secteur.
L'appréciation du dollar touche tous les secteurs de l'industrie automobile et nous souhaitons donc vous faire part des recommandations suivantes:
Nous vous encourageons à annoncer immédiatement la remise écoAUTO pour les modèles 2008 admissibles. Bien que les critères d'admissibilité à la remise aient été fixés pour ce programme, la liste des véhicules admissibles pour 2008 n'a pas encore été annoncée. Comme vous le savez, ce programme offre des remises de 1 000, 1 500 ou 2 000 $ aux consommateurs, ce qui leur donnerait une autre raison d'acheter des véhicules au Canada.
Nous prônons également une réduction temporaire des tarifs pour les véhicules provenant de toutes sources, le retrait de la taxe d'accise sur l'air climatisé, les normes canadiennes uniques comme priorité, un financement approprié du programme de mise à la ferraille de véhicules, des crédits d'impôt à l'investissement et un message clair du gouvernement sur la valeur juste du dollar canadien.
J'ai hâte de répondre à vos questions.
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs, de m'avoir invité.
Le Syndicat des travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile représente environ 260 000 membres dans les industries canadiennes et pour la plupart dans le secteur privé. Près d'un tiers de nos membres travaillent dans le secteur de l'automobile, l'un des secteurs les plus durement touchés par l'augmentation de la valeur du dollar.
Le secteur des pièces automobiles en a subi les conséquences presque immédiatement. Depuis 2002, lorsque le dollar a commencé à augmenter, ce secteur a perdu plus de 15 000 emplois. J'ai appris qu'une douzaine d'entreprises de pièces automobiles risquent de fermer d'un jour à l'autre. On a notamment annoncé une de ces fermetures aujourd'hui. Si j'ai bien compris, Lear Seating, à Windsor, devra fermer ses portes. Si l'on n'apporte pas un changement draconien à l'industrie, je m'attends à ce que l'on perde au moins 10 000 emplois additionnels cette année dans le secteur des pièces automobiles.
La situation du secteur de l'assemblage automobile n'est pas aussi catastrophique, mais demeure néanmoins très difficile. Ce domaine a perdu environ 10 000 emplois au Canada depuis la fin des années 90. Des milliers d'emplois additionnels seront perdus au cours des prochains mois en raison de la fermeture d'entreprises et de mises à pied.
Bien entendu, on ne peut pas uniquement blâmer la valeur du dollar pour les problèmes auxquels fait face l'industrie automobile. Quoi qu'il en soit, l'augmentation du huard a rendu cette situation encore plus pénible.
On peut en dire autant pour le secteur des fabricants. Les fabricants canadiens ont perdu plus de 300 000 emplois depuis que le dollar a commencé à augmenter en 2002. Les pertes d'emplois auxquelles on fait face aujourd'hui proviennent de l'augmentation du huard il y a deux ou trois ans. En raison de la planification d'investissements des entreprises, les contrats multiannuels, les opérations de couverture et d'autres secteurs de transition, on peut voir qu'on accuse un retard considérable dans les ajustements. Nous n'avons donc pas encore commencé à ressentir les conséquences de l'augmentation du dollar à 90¢ et puis à plus de 1 $ par rapport à la devise américaine.
Si le dollar canadien reste à parité avec le dollar américain à moyen terme, on peut s'attendre à une perte additionnelle de 300 000 emplois dans le secteur manufacturier au cours des deux à quatre prochaines années.
Certains commentateurs ont indiqué qu'il s'agissait d'un problème mondial qui provenait de la faiblesse du dollar américain plutôt que de la force du huard. Cette observation n'est pas validée empiriquement. Nos problèmes ne proviennent pas du fait que le dollar américain est faible, mais plutôt du fait que le dollar canadien est particulièrement fort. Examinons les faits. Par rapport au niveau moyen de 2005, notre dollar a augmenté de 25 p. 100 par rapport au dollar américain. Par rapport à l'ensemble de devises pondéré par les échanges, le dollar américain a chuté de 10 p. 100 par rapport à la devise de tous ses partenaires commerciaux. Il a donc chuté de 10 p. 100 par rapport aux autres. Notre devise a augmenté de 25 p. 100. Cela permet de voir que moins de la moitié du problème est due à la faiblesse du dollar américain et que plus de la moitié du problème sera liée à la force du huard.
Ce tableau devient donc plus clair lorsqu'on adopte une perspective à long terme. Si l'on utilise les niveaux de 2002 comme point de départ, le huard a augmenté de 60 p. 100 par rapport au dollar américain. Le dollar n'a chuté que de 20 p. 100 par rapport à l'ensemble de devises pondéré par les échanges. Cela signifie que pour chaque sou de dépréciation par rapport à cet ensemble de devises, nous avons reçu trois sous d'appréciation de notre devise. Donc, deux tiers à trois quarts du problème sont attribuables à la force du dollar canadien.
Toutes les devises n'ont pas augmenté par rapport au dollar américain. Certaines sont restées stables et se sont même affaiblies. Ainsi, le yen, le yuan, le peso ou le dollar taïwanais et d'autres monnaies sont restées plus ou moins stables ou ont chuté. Il est empiriquement faux de prétendre que l'appréciation rapide du dollar canadien est un phénomène universel.
Le huard a augmenté plus rapidement, par rapport au dollar américain, que toute autre devise d'un autre partenaire commercial d'exportation important. Consultez la liste des 10 plus grands exportateurs vers les États-Unis. Notre devise a augmenté bien plus rapidement que les autres, deux fois plus rapidement que la moyenne. Toutefois notre pays, comme le Mexique, est le plus dépendant de ses exportations vers le marché américain. La combinaison de cette augmentation rapide du huard et de notre dépendance sur les exportations vers les États-Unis a placé le Canada dans une catégorie unique pour ce qui est des risques auxquels il doit faire face aujourd'hui sur le marché des changes.
Comment devons-nous comprendre l'augmentation de la devise? Bien qu'elle soit importante, la politique monétaire n'est qu'une partie de l'équation. Notre banque centrale a augmenté ses taux alors que la banque américaine a fait le contraire. Ces différences déterminent notre taux de change. Cette mesure, de la part de la Banque du Canada, était clairement une erreur. Ils ont, à tort, adopté une perception étroite de leur mandat qui consistait à cibler l'inflation.
La banque devrait sur-le-champ réduire considérablement les taux. De plus, elle devrait indiquer plus clairement qu'à l'avenir les décisions portant sur le taux d'intérêt seront prises en tenant compte de la volatilité du taux de change et des risques économiques à long terme posés par cette volatilité.
À elles seules, ces mesures permettraient de relâcher la pression exercée sur le huard, mais elles ne suffiraient pas. Le dollar canadien a augmenté en même temps que les prix mondiaux du pétrole. Certains disent que le huard est un pétrodollar. Ce qui ne se justifie aucunement du point de vue économique. Nous exportons plus d'automobiles que de pétrole. Pourtant, c'est ainsi que fonctionnent les marchés financiers grâce à des prix records dans l'exportation des minerais et de l'énergie, des profits inégalés chez les producteurs de minerais et d'énergie, à un boom dans l'investissement dans les industries des ressources naturelles et de l'énergie, à l'augmentation subite de placements de portefeuilles de la part d'investisseurs étrangers qui achètent des entreprises canadiennes de ressources naturelles.
L'arrivée de dizaine de milliards de dollars d'investissements étrangers au Canada a été l'une des causes fondamentales de l'augmentation de la valeur du huard au cours de la dernière année. Le gouvernement peut aussi agir sur ce point. Il peut contrôler plus attentivement le rythme de développement des ressources canadiennes. Il peut garantir que les Canadiens reçoivent un juste retour de ces développements des ressources en termes d'impôts et de redevances dont on reconnaîtrait la logique. Le gouvernement peut par ailleurs examiner les prises de contrôle par des intérêts étrangers afin de s'assurer qu'elles génèrent une vraie valeur pour l'économie. Le simple fait d'annoncer ces mesures fera en sorte que le Canada ne serait plus à vendre et ralentira les achats spéculatifs qui font augmenter la valeur du dollar canadien.
Le gouvernement fédéral et la Banque du Canada ont tous deux déclaré qu'ils ne peuvent rien faire pour contrôler la devise canadienne. J'estime qu'il s'agit là d'un exemple probant du refus d'assumer leur responsabilité économique.
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Merci beaucoup, monsieur le président, et merci au comité de se pencher sur cette question très importante et urgente pour deux des plus importants secteurs de l'économie canadienne, le secteur manufacturier et le secteur de l'exportation, ainsi que pour tous les emplois dans le secteur des services tributaires de la fabrication et de l'exportation. Je crois que cela souligne également l'importance et l'urgence de la mise en oeuvre des recommandations du comité de l'industrie de la Chambre des communes qui ont été déposées plus tôt cette année.
Je suis le porte-parole de Manufacturiers et Exportateurs du Canada, mais je parle aussi au nom des 37 associations industrielles membres de la Coalition des manufacturiers du Canada. Celle-ci regroupe tout le secteur manufacturier; nous vous avons remis la lettre que nous avons envoyée au premier ministre et dans laquelle nous exposons nos priorités stratégiques pour le secteur manufacturier pour l'année à venir.
J'ai distribué mon exposé à tous les membres du comité. Vous vous réjouirez d'apprendre que je ne vais pas le lire, page par page, mais vous y trouverez néanmoins les conséquences de l'appréciation du dollar canadien sur les ventes du secteur manufacturier, ainsi que sur la tarification. C'est le fruit d'une enquête menée plus tôt cette année auprès de 1 014 manufacturiers pour qui l'appréciation du dollar est la question la plus pressante; vous trouverez également leurs réponses dans ce document.
Évidemment, la flambée du dollar canadien a pour effet de réduire le prix des produits d'exportation de bien des entreprises qui établissent leurs prix à l'exportation en dollars américains ou qui doivent ajuster leurs prix pour demeurer compétitives dans leur principal marché aux États-Unis. En effet, certaines de ces entreprises exportent entre 85 et 90 p. 100 de leurs produits vers les États-Unis. Quelles sont les conséquences sur les prix à la production? Vous constaterez que les prix des produits finis ont baissé de 6 p. 100 au cours des cinq dernières années. De même, les prix des produits de consommation ont chuté de 12 p. 100, les prix du matériel et outillage de 14 p. 100, les prix des produits automobiles de 32 p. 100, et ce, durant la même période. Pour l'essentiel, cela est attribuable à l'appréciation du dollar canadien.
Qu'à cela ne tienne, les deux facteurs qui contribuent à la montée du dollar ont aussi d'importantes conséquences sur les décisions d'investissement et sur les bilans des manufacturiers et des exportateurs. Pour revenir aux prix plus élevés des produits de base et de l'énergie, auxquels Jim faisait allusion, le secteur manufacturier étant le plus grand consommateur de produits de base et d'énergie, ses coûts de production augmentent alors que ses prix sont à la baisse. Cette pression exercée sur leurs chiffres d'affaires signifie que, l'année dernière, sur un quart de production moyen de huit heures, les manufacturiers canadiens ont pu réaliser des bénéfices sur environ six minutes, c'est-à-dire après avoir soustrait l'amortissement, les coûts d'exploitation, les taxes et les frais de financement, six minutes pour faire des bénéfices, et c'est de cet argent dont ils auront besoin pour investir dans de nouveaux produits, de nouvelles technologies, la réorganisation, la conquête de nouveaux marchés et la mise à niveau des compétences. Voilà les domaines où ils doivent investir s'ils veulent rester compétitifs.
Donc, les liquidités constituent le principal problème auquel se heurtent les entreprises actuellement. En effet, bien que le problème fondamental soit la flambée du dollar canadien, flambée qui a atteint 25 p. 100 au cours des six derniers mois seulement ou en fait depuis février, disons au cours des huit derniers mois. À cause de cette montée rapide, les contrats signés il y a un an rapportent maintenant aux entreprises concernées environ 800 000 $ plutôt que 1 million de dollars comme prévu. Bref, l'appréciation du dollar canadien a tout simplement obnubilé la stratégie d'établissement des prix et la capacité d'ajuster les coûts. La situation actuelle est telle que bon nombre d'entreprises sont tout simplement en train d'essuyer des pertes sur leurs ventes et leurs contrats à l'exportation.
Le problème majeur à l'heure actuelle est donc celui des liquidités, mais nous constatons aussi un autre problème: la chute du dollar américain a affaibli le rendement de nos principaux marchés industriels aux États-Unis, à savoir le logement, le secteur automobile et, tout particulièrement, les marchés de consommation. Ainsi, nous constatons une augmentation du nombre de fermetures d'usines, Jim en a parlé, mais il y a un dénominateur commun. En effet, le marché nord-américain est tout simplement saturé. Les entreprises sont en train de faire le ménage, et avec la hausse du dollar canadien, les entreprises canadiennes même celles qui sont bonnes, efficaces et de classe mondiale, sont condamnées à la fermeture, car elles ne peuvent plus être productives en restant ici.
Je veux simplement aller à la toute fin, c'est-à-dire aux recommandations stratégiques décrites dans notre rapport au premier ministre.
Nous recommandons que le créneau de deux ans pour la passation par perte et profit de l'investissement dans l'équipement manufacturier soit prolongé à cinq ans. Cela dit, je crois qu'il est aussi important qu'en ce moment, en ces circonstances très extraordinaires, on envisage des mesures qui permettraient aux manufacturiers de monnayer les pertes qu'il sont en train de subir, d'offrir aux sociétés qui ont été rentables au cours des dernières années la possibilité d'un report des pertes ou une forme de crédit d'impôt à l'investissement qui pourrait les aider à monnayer leur perte à l'heure actuelle.
Nous recommandons que soient remboursables les crédits d'impôt pour la R-D. En ce moment, les entreprises devraient faire preuve d'innovation, mais si elles ne font pas de bénéfices, elles pourront alors difficilement se prévaloir des crédits d'impôt pour la R-D. Il est donc important que ces crédits soient remboursables.
De plus, nous recommandons l'instauration d'un crédit d'impôt lié au commerce qui pourrait être calculé en fonction des cotisations à l'assurance-emploi. Toutes ces mesures suivent les liquidités, des concepts de conjoncture urgente, c'est précisément ce dont a besoin le secteur manufacturier, le secteur de l'exportation ainsi que d'autres secteurs.
Je vous remercie.
Mesdames et messieurs, membres du comité, Cascades est une multinationale spécialisée dans la fabrication et la transformation de produits d'emballage et de papier tissu fait principalement de fibres recyclées. Elle possède plus d'une centaine d'unités de production et d'exploitation au Canada, aux États-Unis et en Europe. Active depuis 1964, elle emploie plus de 14 000 femmes et hommes, et génère un chiffre d'affaires d'environ 4 milliards de dollars canadiens.
La hausse du dollar canadien par rapport à son homologue américain est devenue un enjeu très important pour Cascades et le secteur dans lequel elle évolue. Je tiens à remercier les membres du comité, qui tient des consultations prébudgétaires sur le dollar canadien, de nous offrir la possibilité de présenter l'ampleur de l'impact de la valeur du dollar sur nos activités, mais aussi et surtout quelques solutions qui pourraient nous aider à nous en sortir.
Compte tenu du fait que 90 p. 100 de nos ventes sont affectées par la fluctuation du dollar, que Cascades fabrique 40 p. 100 de sa production aux États-Unis et 50 p. 100 au Canada, et que ses coûts de main-d'oeuvre par rapport à ceux observés au sud de la frontière ne sont plus compétitifs, il est évident que Cascades est frappée de plein fouet par la hausse du dollar.
À elle seule, la hausse de notre devise, entre 2002 et 2007, nous a coûté plus de 300 millions de dollars annuellement. Cette fluctuation subite nous a forcés à fermer trois unités de fabrication au Canada, en Ontario et au Québec, et deux autres usines de manière temporaire. Et à elles seules, ces fermetures ont entraîné la perte de plus de 1 000 emplois en région. Alors que le modèle d'affaires de Cascades a toujours consisté à relever les entreprises en difficulté, la décision récente de fermer des usines a été très difficile pour mes frères et moi, notre équipe de direction et nos employés.
De plus, les coûts de nos matières premières ont continué d'augmenter, en raison de la demande accrue pour le vieux papier, demande venant de l'Asie, où le tri par une main-d'oeuvre bon marché est nettement avantageux. Sans le recentrage de certaines de nos activités et de nos efforts pour réduire les coûts, notre entreprise ne serait plus rentable aujourd'hui, comme c'est le cas, d'ailleurs, de plusieurs organisations de notre secteur qui ont été obligées soit de réduire leur taille de façon importante, soit de fusionner avec des entreprises américaines.
Si la flambée du huard se maintient, Cascades n'aura d'autre choix que de fermer d'autres entreprises au Canada et de déplacer sa production aux États-Unis, si elle veut demeurer rentable comme elle l'a toujours été. D'ailleurs, nos investissements stratégiques se feront à l'avenir aux États-Unis ou dans d'autres pays où les coûts sont moins élevés. C'est tout un changement pour une société qui a commencé, il y a plus de 40 ans, avec une usine canadienne achetée d'une faillite et qui exportait près de 100 p. 100 de sa production aux États-Unis.
La monnaie américaine va continuer d'être l'unité de mesure de référence pour toutes les raisons fondamentales que nous connaissons. Et en raison de notre importante base d'actifs au Canada, nous désirons poursuivre nos exportations aux États-Unis. Je ne suis pas un expert en politique monétaire, mais un opérateur et un fabricant de produits d'emballage et de papier tissu. Je ne peux vous dire quoi faire, mais je vais cependant vous faire quelques suggestions.
Oui, il est possible de vivre avec un dollar canadien à parité. Cascades a su s'adapter et continuera de le faire. Non, il n'est pas possible de vivre avec la direction et la volatilité actuelles, et tenter de planifier des investissements au Canada. Il faut donc accroître la compétitivité des entreprises canadiennes en mettant en place des incitatifs accrus, accélérés et remboursables pour notre secteur, notamment en recherche, développement et innovation, en soutien à l'immobilisation et à la main-d'oeuvre, ainsi que des programmes d'amortissement accéléré, comme l'a suggéré mon voisin. Comme c'est le cas en Scandinavie, la période d'amortissement très courte a permis à l'industrie des pâtes et papier de se moderniser et de demeurer compétitive. Nous aimerions que le gouvernement fédéral considère sérieusement l'incidence de la montée du dollar canadien sur la base manufacturière du Canada à moyen et à long terme, particulièrement dans des secteurs comme le nôtre, où nous essayons de faire différemment tout en faisant notre part pour l'environnement.
En ce qui a trait à l'environnement, une dernière mesure pourrait être d'une grande aide, et je veux parler de la mise sur pied d'une bourse du carbone. Comme plusieurs autres entreprises présentes en Europe, Cascades a profité et profite encore avantageusement du marché du carbone de la zone Europe. De ce côté-ci de l'Atlantique, pour l'année financière se terminant le 31 décembre 2006, nous affichons une diminution de plus de 10 p. 100 des 125 000 tonnes de nos émissions de gaz à effet de serre. Une jolie somme malheureusement non monnayable en Amérique du Nord.
Il faut rapidement mettre en place un marché d'échange de crédits de CO2 au Canada. Cela pourrait très bien se faire par l'intermédiaire de la Bourse de Montréal, dont la candidature est de loin la plus intéressante pour ce type de bourse. Un tel système reconnu comme étant potentiellement le plus efficace dans la lutte contre le réchauffement de la planète serait un puissant incitatif pour les entreprises, qui en profiteraient aussi financièrement.
Il est aussi impératif que l'établissement de ce marché du carbone ait comme année de référence 1990, car il ne faudrait surtout pas pénaliser les entreprises qui ont été les premières à faire le choix de l'environnement avant que cet enjeu ne devienne la préoccupation de tous.
Enfin, un tel système ne peut vraiment fonctionner dans des délais raisonnables sans la mise en place de plafonds contraignants pour chaque secteur industriel, selon des modalités à déterminer.
Je vous remercie pour le temps que vous m'avez alloué et je demeure à votre disposition pour répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président. Je promets également de ne pas utiliser ces cinq minutes.
Je voudrais vous remercier, vos collègues et vous, de nous donner l'occasion de nous adresser à votre comité. Chez Toyota, nous croyons qu'il est très important, en ces temps incertains, de maintenir un dialogue avec les Canadiens, et manifestement, le comité joue un rôle important à cet égard.
Monsieur le président, la forte performance du dollar cet automne s'est accompagnée d'un certain nombre de difficultés pour tous les manufacturiers canadiens, et Toyota n'est pas une exception. Face à la flambée de leur devise, les Canadiens ont dit, sans ambages, qu'ils recherchaient une parité des prix avec nos voisins du sud.
Toyota est une entreprise mondiale, mais nous croyons fermement à l'importance de construire des véhicules là où nous les vendons, et à ce chapitre, je suis heureux de dire que Toyota a investi des milliards de dollars dans des usines de fabrication canadiennes pour justement construire des véhicules pas seulement pour nos clients canadiens mais pour le marché nord-américain dans son ensemble.
En construisant nos modèles les plus populaires ici au Canada, Toyota a réussi à protéger les consommateurs canadiens des répercussions de la dépréciation du dollar canadien au début de la décennie et à accroître, en même temps, nos ventes à l'exportation aux États-Unis. À l'heure actuelle, le défi pour nous consiste à trouver des moyens d'améliorer les produits que nous offrons à nos clients américains et canadiens tout en continuant à faire des bénéfices.
Une chose est certaine: nous nous engageons à réagir de façons qui sont viables dans le contexte réglementaire économique canadien, qui répondent aux besoins des clients actuels et futurs et qui respectent nos employés.
Il va peut-être sans dire que la fabrication commence par les ventes, mais je pense qu'il est important de se rappeler que sans un marché, il n'y aurait pas de raison de fabriquer un produit. Il convient aussi de rappeler que les clients sont motivés par la valeur, qu'il s'agisse d'acheter un livre ou une voiture. Je mentionne les livres, car les prix en devises canadienne et américaine sont imprimés sur la couverture des livres, et les livres sont devenus le symbole de la disparité en matière de prix.
Je ne saurais parler au nom de l'industrie de l'édition, mais je pense qu'il existe néanmoins un parallèle avec le secteur automobile dans la mesure où les consommateurs voient les véhicules portant le même nom au Canada et aux États-Unis, constatent les différences de prix annoncées dans les publicités sur Internet et dans d'autres médias, et ont donc l'impression d'être lésés. Comme le veut le vieux dicton: « On ne peut juger un livre par sa couverture ».
Tous nos véhicules destinés au marché canadien, par opposition au marché américain, sont équipés des caractéristiques exigées par la réglementation fédérale; même que certaines de ces caractéristiques ne sont pas exigées par les autorités américaines. D'autres caractéristiques de véhicules fabriqués au Canada, encore une fois par opposition aux véhicules fabriqués aux États-Unis, ont trait aux choix que nous faisons en tant que distributeurs en fonction d'un certain nombre de facteurs, que ce soit les caractéristiques qui permettent aux véhicules de survivre à la rigueur de l'hiver canadien ou les caractéristiques qui se sont avérées les plus populaires auprès de notre clientèle par le passé.
La parité du dollar a suscité une nouvelle conversation avec les clients visant à mettre en relief les nombreuses différences entre les produits canadiens et américains. Nous devons examiner la façon la meilleure de réduire au maximum ces différences, soit en harmonisant pleinement les normes réglementaires à l'échelle de l'Amérique du Nord, soit en modifiant les caractéristiques normatives de sorte que les véhicules canadiens et américains puissent davantage faire l'objet d'une comparaison directe. Je peux vous dire que nous agissons sur les deux fronts.
Par ailleurs, nous sommes en train de repositionner les prix et les caractéristiques de nos véhicules qui jouissent d'une popularité auprès des Canadiens. En effet, nous offrons un éventail de taux de location, bail et de financement. Nous offrons aussi une valeur ajoutée sous forme de service complémentaire, de cartes d'essence, d'équivalent en espèces et d'autres programmes. Comme nous l'avons fait au cours des 40 dernières années, nous allons continuer de surveiller le marché et d'ajuster nos activités, nos produits et nos services pour garantir la meilleure valeur aux conducteurs canadiens.
Cela étant, les sociétés canadiennes réussissent bien en dépit de la taille relativement petite du marché intérieur. Mais nous réussissons davantage quand la conjoncture économique est favorable, et c'est là que le gouvernement fédéral peut jouer un rôle clef.
Toyota Canada voudrait proposer trois façons dont le gouvernement pourrait aider. Premièrement, il y a les mesures d'appui aux dépenses d'investissement. Chaque fois que Toyota change son équipement pour construire un nouveau modèle, elle doit investir des centaines de millions de dollars en équipement et en technologie. Les vieilles usines sont évidemment moins productives et les législateurs américains en sont très conscients. À titre d'exemple, dans l'État du Kentucky, on offre une mesure d'incitation visant précisément ce type d'investissement.
Deuxièmement, il y a les effectifs. Ainsi, nous devons continuellement former nos effectifs pour améliorer les procédés et accroître la productivité, mais il n'existe pratiquement aucune mesure d'incitation ou programme pour nous aider dans cet effort au Canada. L'appui à l'investissement dans la technologie et la formation des effectifs aideraient le Canada à livrer une concurrence plus efficace à d'autres pays.
Troisièmement, comme mon collègue Dave Adams vous l'a déjà dit, les exigences réglementaires canadiennes qui manquent d'uniformité et les autres politiques qui ont un effet contraignant sur les consommateurs canadiens devraient être éliminées pour encourager ces derniers à acheter canadien. J'ai déjà évoqué les normes relatives aux véhicules qui ne sont pas harmonisées, mais ce n'est pas la seule raison pour laquelle les Canadiens doivent payer davantage pour acheter les véhicules. En effet, les voitures sous-compactes ne sont pas fabriquées en Amérique du Nord, mais le Canada comme les États-Unis appliquent des droits à l'importation de ces véhicules. La raison pour laquelle on appliquerait des droits nous laisse perplexe, mais c'est particulièrement vrai au Canada où le marché réclame des petites voitures, puisque ce droit est de 6,1 p. 100 contre à peine 2,5 p. 100 aux États-Unis.
En bref, nous apportons les ajustements à l'échelle de nos activités canadiennes pour faire en sorte que Toyota puisse offrir des prix et des caractéristiques compétitives à notre clientèle à l'échelle de l'Amérique du Nord. Les gouvernements peuvent nous aider en élaborant des stratégies économiques et fiscales qui rétabliront la stabilité dans le marché, élimineront les coûts inutiles au moyen de l'harmonisation de la réglementation et des tarifs et en aidant les constructeurs automobiles à se rééquiper et à reformer leurs effectifs pour accroître leur productivité.
Je me ferais un plaisir de discuter de ces propositions avec vous et de répondre à vos questions.
Je vous remercie, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président, et merci beaucoup également à tous les témoins qui ont accepté de venir.
Comme ceci est la première de six sessions sur ce sujet, j'ai jugé bon de commencer par expliquer rapidement pourquoi les libéraux ont insisté pour que ces audiences de neuf heures soient consacrées au lien entre le dollar fort et l'emploi. Je suis également reconnaissant à nos collègues de l'opposition d'avoir bien voulu appuyer cette proposition. Si nous insistons sur la question, c'est que selon nous, le dollar fort et la situation de l'emploi sont à la veille de provoquer une situation de crise et que c'est maintenant qu'il faut agir.
Je dis cela en ma qualité d'économiste, parce qu'il est parfaitement exact de dire que lorsqu'une devise augmente autant, cela ne peut qu'avoir des conséquences sur l'emploi et sur le secteur manufacturier, comme sur d'autres secteurs de l'économie sensibles à l'évolution du cours des changes, peu importe l'état de santé de l'économie en général. Je ne parle ici que des secteurs de l'économie qui sont sensibles au cours du change. Or, les effets en question ne se produisent qu'après un certain temps. Les entreprises peuvent fort bien continuer à fonctionner pendant un certain temps, mais lorsqu'elles établissent leurs nouveaux plans d'activités, si le dollar est toujours fort et si on escompte qu'il le restera, les entreprises envisageront d'aller produire ailleurs, aux États-Unis par exemple. Il est fort probable que nous n'ayons vu jusqu'à présent que la partie visible de l'iceberg que représentent les mises à pied. Ces dernières semaines, il y en a eu 1 100 chez Chrysler et 800 dans le secteur forestier.
Je formule l'hypothèse que, si notre dollar demeure à parité, ou environ, avec le dollar américain pendant un an ou un an et demi, ce que nous avons pu constater jusqu'à présent ne sera que la partie visible de l'iceberg dans les secteurs de l'économie qui sont sensibles à la situation du change. Le secteur pétrolier pourrait très bien s'en tirer. L'économie elle aussi, mais ce qui me préoccupe ici, ce sont toutes les industries qui, comme la vôtre, sont sensibles à l'évolution du taux de change. Pour utiliser une métaphore à la Wayne Gretzky, je pense que le gouvernement devrait s'inquiéter plutôt de ce qu'il adviendra de la rondelle que de la position actuelle de celle-ci. Nous savons déjà que d'ici 12 mois, si les deux dollars sont toujours à parité — et c'est là une hypothèse — la situation risque d'être encore pire.
Je pourrais également dire en guise d'introduction qu'à notre avis, le gouvernement n'a aucun plan, de sorte que ces audiences ont en partie pour but de vous demander vos conseils afin qu'il puisse en élaborer un.
Je voudrais poser mes questions de la façon suivante. Ma première question s'adressera à ceux d'entre vous qui représentez des industries dans lesquelles le niveau d'emploi est à risque — et commencer peut-être par M. Myers — et je vous demanderais donc si vous êtes d'accord avec cette hypothèse. Vous avez d'ores et déjà des problèmes. Mais ne conviendriez-vous pas que si le gouvernement ne fait rien et si le dollar demeure à son niveau actuel, d'ici 12 à 18 mois votre situation sera pire encore?
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Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup d'avoir répondu à notre invitation. Le comité a unanimement reconnu qu'il lui fallait commencer ses consultations prébudgétaires sur la question du dollar, parce qu'il croit qu'elle marque déjà l'économie de façon importante et qu'elle marquera le prochain budget. Je pense que tous les membres du comité ont jugé cette question importante et prioritaire.
Monsieur Stanford, j'ai été très touché par ce que vous avez dit. Vous dites que s'il ne se passe rien, on risque de perdre 300 000 emplois d'ici deux à quatre ans. Les propos de M. Myers m'ont également frappé. Je suis probablement touché par le fait que ce sont autant les employeurs que les syndiqués qui viennent nous dire aujourd'hui que c'est une question prioritaire. Je crois comprendre que les mesures de l'énoncé économique, par exemple la baisse d'impôt uniforme, ne règlent pas vos problèmes.
Pourriez-vous étayer vos positions pour savoir ce qu'il faudra de plus, à court terme, pour qu'on soit capable de produire des biens que les gens pourront acheter et qui seront quand même compétitifs?
M. Myers peut répondre le premier.
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Je pourrais peut-être commencer.
Don a parfaitement raison, il y a des problèmes à plus long terme dont nous devons nous occuper du point de vue de l'amélioration de la productivité, de l'innovation, du développement des compétences et ainsi de suite, problèmes qui sont exacerbés par cette montée très rapide de notre dollar. À mon sens, cet état de choses est tel qu'il devient encore plus urgent de s'en occuper.
À mon avis, les recommandations que nous avançons — envisager une forme de crédit d'impôt à l'investissement qui permettrait de monétiser l'amortissement accéléré, le remboursement des crédits d'impôt à la R-D, un genre ou un autre de crédit d'impôt à la formation des salariés — sont non seulement des mesures qui, à mon avis, pourraient venir en aide dès maintenant aux manufacturiers, mais elles contribueraient également à mettre en place les mesures qui leur permettront de s'adapter à long terme à ces éléments de compétitivité. Toutes ces recommandations que nous vous avions soumises l'an dernier, nous les avions formulées à l'époque où le dollar valait 84 ¢. Pour moi, elles sont d'autant plus importantes aujourd'hui alors que notre dollar se transige dans une fourchette possible de 1,02 à 1,10 $, selon l'évolution du marché. C'est plus important que jamais.
Les problèmes à plus long terme que sous-tendent les recommandations présentées par la coalition en faveur du développement des compétences, d'une adéquation directe entre la recherche et l'innovation dans l'industrie, d'une solution à tous les problèmes qui entourent l'application des règles commerciales — tout cela revêt également une importance extrême.
Par ailleurs, cette montée en puissance rapide du dollar a en fait mis l'accent sur des mesures fiscales qui iraient au coeur même de l'édification d'une économie industrielle compétitive, une économie capable de trouver sa place sur le marché planétaire: l'investissement, la formation et l'innovation.
Monsieur Drummond, je voudrais commencer par vous en vous posant une ou deux questions.
Pour commencer, il me semble que la cherté de notre dollar — et c'est évidemment ce que les plus éminents économistes nous disent — est plus symptomatique de la faiblesse du dollar américain et de l'économie américaine ainsi que des problèmes que connaissent les États-Unis en général. Certes, dans ce contexte — et je pense que vous en avez déjà dit un mot dans votre réponse — les États-Unis n'ont pas été à l'abri des problèmes que nous connaissons dans notre secteur manufacturier. Il est certain que le Michigan, qui a perdu bien plus de 200 000 emplois dans le secteur manufacturier depuis 18 mois je crois, n'est guère affecté par la cherté du dollar canadien.
Je voudrais donc vous demander très rapidement, en ce qui concerne l'état du dollar, si vous seriez d'accord pour dire que cette situation est davantage symptomatique des problèmes que connaissent les États-Unis, ainsi que la vigueur du secteur des ressources, que d'une simple politique monétaire de la Banque centrale.
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Merci. Je vous remercie de ce commentaire.
J'ai assisté la semaine dernière à une réunion lors de laquelle Derek Burney a prononcé une allocution. Je suis convaincu que vous savez qui est M. Burney. Il a dit — et c'est un commentaire avec lequel j'étais d'accord — que le Canada doit concentrer ses efforts, comme le ministre des Finances l'a dit à plusieurs reprises, sur les façons d'accroître la productivité. Notre gouvernement a annoncé une déduction pour amortissement accéléré, et, c'est encore plus important, le 30 octobre, nous avons annoncé au monde entier que nous adoptions des mesures fiscales très dynamiques afin d'aider nos grandes compagnies à pouvoir livrer concurrence sur le marché international, pour trouver une place concurrentielle pour le Canada et pour intéresser les investisseurs étrangers.
Ce qui m'inquiète c'est que lorsque nous avions des taux d'imposition très élevés et un dollar à faible valeur, nous ne nous étions pas du tout attardés à la productivité. C'est pourquoi le Canada doit essayer de rattraper le temps perdu dans ce secteur.
Convenez-vous que la décision du gouvernement de réduire les taxes et de faire la promotion de l'investissement par l'entremise des déductions pour amortissement accéléré est un pas dans la bonne direction?
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Merci, monsieur le président. Je tiens également à remercier les témoins.
C'est assez inhabituel d'entendre les MEC et les TCA chanter à peu près le même thème — peut-être pas nécessairement la même chanson — et de voir les représentants de la banque TD faire un peu bande à part.
J'aimerais signaler en passant que la moitié de l'assiette fiscale présentée dans le mini-budget du mois de novembre a été absorbée par une réduction de la TPS, ce qui tout compte fait ne fait absolument rien pour vous aider. D'après ce que je saisis, tout ce que cette réduction permet d'accomplir en fait est d'augmenter l'inflation et d'entraîner des taux d'intérêt plus élevés, ce qui m'amène à poser ma première question, qui s'adresse à M. Myers — j'aimerais lui parler du coût de l'argent et du resserrement du crédit. Je crois que vous avez dit qu'il était difficile d'obtenir de l'argent. Est-ce que cela est lié à la crise des prêts à risque que vit actuellement les États-Unis. Est-ce que vous êtes touché par cette crise?
Ma deuxième question porte sur la croissance différentielle de la force du dollar canadien par rapport au dollar américain. Je me demande ce que M. Drummond pense de l'analyse qu'a présentée M. Stanford à ce sujet.
Ma troisième question porte sur le commentaire que M. Standord a fait sur le contrôle du rythme de développement des ressources naturelles et la prise de contrôle par les sociétés étrangères. M. Myers, pouvez-vous nous en dire un peu plus long là-dessus également.
Je sais que j'ai posé plusieurs questions, mais je pense qu'il serait utile de lancer en fait un dialogue entre les divers témoins.
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J'aimerais tout d'abord expliqué certains des commentaires que j'ai faits sur la disponibilité de crédit.
À mon avis l'incertitude qui caractérise les marchés du crédit américains explique dans une large mesure pourquoi le dollar américain connaît une telle volatilité, une volatilité qui se reflète dans le taux de change canadien. Je crois que ça fait partie de la situation.
J'entends bien des choses. Tout d'abord, les entreprises qui exportent vers les États-Unis constatent que leurs clients prolongent leurs délais de paiement. Plusieurs dépassent la période de 90 jours habituellement prévue comme délai de paiement. Certains ont de plus en plus de difficultés à trouver l'argent nécessaire pour payer les factures, particulièrement dans les secteurs comme ceux de l'automobile, des produits de grande consommation et du logement. Je crois qu'il s'agit des trois principaux marchés américains.
De plus, certains disent, évidemment, que les banques sont beaucoup plus disposées à accorder du crédit lorsque les liquidités sont importantes que lorsqu'elles ne le sont pas. Plusieurs de nos membres ont communiqué avec nous récemment pour nous dire que leurs marges de crédit avaient été réduites et qu'on leur demandait maintenant de rembourser une partie de la marge de crédit en cours, ce qui ne fait qu'ajouter au problème qu'ils vivent actuellement.
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Je vous remercie tous d'être présents.
J'aimerais poser quelques questions à M. Lemaire. J'ai beaucoup aimé votre présentation, d'une part parce qu'elle a apporté une rare touche de français aux délibérations du Comité permanent des finances et, d'autre part, parce que vous nous avez parlé de l'importance de mettre en place un marché d'échange pour les émissions de gaz à effet de serre. Il y a longtemps que le Bloc québécois parle de l'importance d'aller de l'avant avec le Protocole de Kyoto, de fixer des objectifs contraignants et des plafonds absolus de réduction de gaz à effet de serre pour des raisons environnementales, puisqu'il faut prendre soin de notre planète et parce que cette bourse du carbone crée de nouvelles possibilités économiques pour les entreprises de chez nous.
Le gouvernement nous a toujours répondu qu'au contraire, les cibles absolues de réduction de gaz à effet de serre du Protocole de Kyoto étaient, à toutes fins pratiques, une catastrophe économique. Or, j'entends ce que vous me dites. Vous êtes un homme d'affaires, vous voulez que votre compagnie fasse des profits, et je suppose que vous y voyez, au contraire, une occasion d'affaires.
J'aimerais que vous nous expliquiez plus en détail en quoi, selon vous, cette bourse du carbone est une réelle occasion d'affaires pour les industries québécoises et canadiennes. Vous avez également parlé du fait que la bourse du carbone serait à Montréal. Pourquoi pensez-vous que Montréal est l'endroit tout désigné pour accueillir cette bourse du carbone?
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Diminuer la TPS est un excellent moyen de rendre de l'argent des impôts aux gens parce que c'est un magnifique outil de distribution des revenus, mais cela ne présente à mon avis aucun autre avantage.
Pour ce qui est des défis économiques dont nous parlions, et en particulier dans le secteur manufacturier, le secteur forestier et en particulier les conséquences plus générales sur la productivité au Canada, cela ne sert strictement à rien. Cela ne peut que stimuler la consommation.
Très franchement, la Banque du Canada déclare qu'avec un taux de chômage de 5,8 p. 100, il n'y a pas de problème de consommation et le taux d'épargne est donc très faible.
Nous avons d'autres problèmes que le gouvernement a essayé d'attaquer très positivement en allégeant la fiscalité des entreprises.
Le problème énorme qui demeure sur le plan fiscal, c'est l'effet marginal extrêmement élevé des taux d'imposition sur les familles ayant un revenu allant jusqu'à environ 50 000 $. Si elles essaient de gagner 1 $ de plus, elle n'en garde que 30 cents et cela détruit tout incitatif à travailler, à économiser et à investir.
Il faudrait environ 10 milliards de dollars pour régler ce problème et c'est là à mon avis ce qui est tristement ironique dans la diminution de la TPS parce que ce sont 10 milliards de dollars qui auraient pu être utilisés plus efficacement dans ce sens.
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Nous allons reprendre nos travaux.
Nous accueillons à présent, pour la deuxième partie de notre étude, l'ACTRA, l'Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio, le Congrès du travail du Canada, l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, la Fédération des chambres de commerce du Québec, et, de l'Université de Toronto, par téléconférence.... Lorsque Roger Martin, doyen de la Rotman School of Management se joindra à nous par téléconférence, nous le présenterons, mais il n'est pas encore arrivé.
Nous allons commencer nos travaux, selon l'ordre prévu, avec les témoins qui sont là.
Silence, s'il vous plaît, pour que nous puissions bien entendre M. Richard Hardacre, dans un premier temps.
Vous avez la parole, monsieur.
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Merci, monsieur le président. Merci aux membres du comité.
Comme vous l'avez dit, je m'appelle Richard Hardacre. Je suis un acteur canadien, formé professionnellement pour ce métier. Je suis également le président élu de l'ACTRA, le syndicat qui représente les intérêts des interprètes pour les films, la télévision, les enregistrements sonores, la radio et les nouveaux médias. Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui pour vous parler des préoccupations des plus de 21 000 membres de l'ACTRA qui vivent et travaillent partout au pays, des artistes anglophones dont les prestations divertissent, éduquent et informent les Canadiens et le public international par le biais des médias les plus puissants qui existent.
Voilà notre description passe-partout.
Ce que j'ai à dire aujourd'hui est très sérieux, parce que pour nous, l'art au Canada est quelque chose de très sérieux. Selon Statistique Canada, en 2002, la contribution de l'industrie culturelle au produit intérieur brut du Canada était de 40 milliards de dollars. Il y a plus de gens qui travaillent dans le domaine de la culture que dans les secteurs combinés de l'agriculture, de la foresterie, de l'exploitation minière, pétrolière et gazière. Au cours de la dernière année pour laquelle nous avons des données statistiques, le secteur de la production cinématographique et télévisuelle représentait 4,8 milliards de dollars et employait 125 000 personnes.
J'espère que vous avez des copies de notre mémoire du mois de septembre. Je vais parler brièvement des éléments principaux, puis j'évoquerai l'incidence de la valeur du dollar sur le secteur du cinéma et de la télévision, monsieur le président. Le greffier m'a dit que c'est ce qui vous intéressait.
L'ACTRA a fait plusieurs propositions dans son mémoire, dont vous avez reçu copie. D'abord, nous demandons au Comité des finances de recommander un financement adéquat stable à long terme du Fonds canadien de télévision, de Téléfilm et de CBC/Radio-Canada. Ce financement est nécessaire si l'on veut porter les histoires canadiennes sur nos écrans de télévision et de cinéma. Il est très important pour nous de créer une industrie d'ici.
Notre deuxième recommandation consiste à rétablir l'étalement du revenu sur les années suivantes pour les artistes professionnels. Comme l'indiquent beaucoup de rapports, les artistes professionnels ont un revenu extrêmement variable d'une année à l'autre et le régime fiscal actuel les pénalise. Tout comme les artistes doivent pouvoir étaler leurs revenus sur plusieurs années pour survivre, il faut que la responsabilité fiscale puisse également être étalée sur plusieurs années. Le Canada permettait cet étalement par le passé. Beaucoup de pays utilisent encore ce système, notamment pour les artistes. Le Québec a proposé un système dans son budget de 2004 pour aider les artistes de cette province à étaler leur fardeau fiscal sur plusieurs années.
Je vais maintenant fournir au comité certaines perspectives du secteur du cinéma et de la télévision au sujet de l'augmentation de la valeur du dollar. La flambée actuelle du dollar est en effet une menace importante pour le secteur du cinéma, de la télévision, des nouveaux médias et de la production commerciale.
Pour comprendre cette incidence sur notre secteur, vous devez savoir qu'il existe deux types de production au Canada: il y a les producteurs canadiens qui créent des programmes et des films destinés principalement au public canadien. À l'échelle nationale, moins de la moitié de notre production, actuellement, représente du contenu canadien. Plus de la moitié de cette production concerne les services: la production de programmes, de films et de publicité pour le marché américain, au Canada.
C'est ce type de production qui a valu au Canada son surnom de « Hollywood north ». C'est précisément ce secteur, le secteur des services situé au Canada pour le marché américain — que l'on appelle « production de services », qui est touché par la forte valeur du dollar.
Un rapport du secteur de 2004 a mis en évidence les sept facteurs qui ont une influence sur la compétitivité du Canada en tant que lieu de tournage. Sur ces sept facteurs, le plus important est la valeur du dollar canadien par rapport à celle du dollar américain. La formule est simple: plus le dollar canadien est faible, plus il y a de travail; plus le dollar est fort, moins il y a de travail dans ce secteur.
Souvenez-vous que les producteurs prévoient leur travail longtemps à l'avance. Pour les films à gros budget, la planification peut facilement prendre plus d'un an. Les producteurs n'avaient pas prévu la valeur sans précédent de notre dollar au moment où il choisissait leur lieu de tournage pour les productions actuelles.
Cela nous amène à 2007 et 2008. Actuellement, les niveaux de production en Amérique du Nord ont été touchés par les débuts de grève et la grève complète actuelle des scénaristes aux États-Unis. Vous savez certainement que la Writers Guild of America est en grève depuis trois semaines. L'ACTRA les appuie, parce que les créateurs, où qu'ils soient, méritent une part équitable du rendement des médias numériques.
Les producteurs et les productions américains s'attendaient à des manifestations syndicales depuis quelque temps. Cela veut dire que les studios ont essayé à tout prix de terminer leurs projets avant la grève des scénaristes. La production a donc augmenté de façon artificielle en 2007, de sorte que nous avons été épargnés de l'incidence de l'augmentation du dollar pour l'instant. Cependant, la grève des scénaristes continue de nous toucher; deux grosses productions tournées en Colombie-Britannique ont déjà été arrêtées, et il y en aura d'autres. Les acteurs et les équipes de tournage canadiens travaillent pour ces productions et les grèves nous ont déjà fait perdre plus de 1 000 emplois, en Colombie-Britannique seulement.
Ce qui nous amène maintenant au dollar. Le plein effet du dollar surchauffé, le dollar canadien, ne se fera pas sentir avant le milieu ou la fin de 2008. Nous savons que les studios comptent aller de l'avant avec les projets déjà prévus, mais n'envisagent pas beaucoup de nouvelles productions en raison de la surchauffe. L'effet se fera surtout sentir en Colombie-Britannique, qui se trouve dans le même fuseau horaire que Los Angeles, ce qui est une des raisons de sa popularité.
Mais nous avons trois suggestions au sujet de ce que vous pouvez faire pour nous aider. Certaines figurent déjà dans le mémoire que nous avons soumis au comité. Voici ce qu'il faut faire. Il faut renforcer l'industrie canadienne, en créer une qui ne dépende pas des productions étrangères qui viennent ici. La façon d'y parvenir est d'augmenter les crédits fiscaux et d'élargir la base des crédits d'impôt. Les crédits d'impôt existent au Canada depuis bien des années. Nous savons qu'ils entraînent une grande activité économique et que les recettes fiscales sont plus grandes que les impôts non perçus.
Nous avons suggéré deux formules destinées à augmenter les crédits d'impôt. L'une s'applique à la vidéo cinéma et télévision, le crédit d'impôt pour les productions nationales. Élargir la base, c'est ce qui compte le plus, pour que cela ne porte pas seulement sur un petit segment de la main-d'oeuvre, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
J'ai remis un court document aux membres du comité. Un groupe d'économistes du monde syndical a rencontré la Banque du Canada ce matin. Le document a servi de point de départ à la discussion.
À notre avis, le dollar canadien est largement surévalué par rapport aux données fondamentales de l'économie. Le plus nécessaire actuellement, c'est une réduction du taux d'intérêt par la Banque du Canada. Ce n'est pas la solution complète du problème, loin s'en faut. En revanche, c'est la solution immédiate à portée de main la plus propice à régler le problème. Sur le long terme, il y a toute une série de questions liées au régime international d'échange. Le fait que les devises de la Chine et de la plupart des autres pays asiatiques sont, dans les faits, adossés au dollar américain ne fait qu'exacerber la surévaluation de notre dollar.
À notre avis, un taux de change égal ou supérieur à la parité fera disparaître la compétitivité-coûts de grands et importants secteurs de l'économie canadienne — pas seulement le secteur de la fabrication, mais aussi, comme mon collègue l'a dit, celui de la culture, du tourisme, de tous ceux qui vendent des biens et des services aux États-Unis et, en fait, sur le marché asiatique, vu son lien avec la devise américaine.
L'histoire nous enseigne que les taux de change dépassent parfois le niveau que justifieraient les facteurs fondamentaux de l'économie et que la situation peut perdurer longtemps et provoquer des dégâts structurels permanents. On en voit un exemple dans ce qui est arrivé au secteur manufacturier américain ces dernières années, quand le dollar américain était surévalué.
Comment fixer ou corriger le taux de change? Une façon de faire serait de se servir de la parité du pouvoir d'achat, ce qui le placerait dans la tranche inférieure des 80 cents. Un autre point de repère important pour le secteur manufacturier, c'est le taux de change nécessaire pour égaliser les coûts unitaires de la main-d'oeuvre entre le Canada et les États-Unis; d'après la plupart des estimations, le taux se situerait dans la tranche inférieure des 70 cents. C'est en raison de notre productivité plus faible que celle des États-Unis. Le fait est qu'actuellement, en dollars, les taux de salaire dans le secteur manufacturier canadien sont égaux à ceux des États-Unis. À moins d'avoir en moyenne un taux de change qui compense le désavantage de la productivité, on assistera à une contraction importante du secteur manufacturier canadien.
En chiffres arrondis, le secteur manufacturier a déjà perdu 300 000 emplois. C'est la conséquence de l'appréciation du dollar canadien depuis deux ans. Les effets du taux de change sont décalés dans le temps pour plusieurs raisons. D'après notre estimation, si le dollar reste à parité, nous allons perdre 300 000 emplois de plus dans les deux ou trois prochaines années, à moins qu'il ne régresse plus tôt.
À quoi attribuer la flambée du dollar? L'explication conventionnelle, évidemment, c'est le cours du pétrole, le fait que le dollar canadien est un pétrodollar et que c'est ce qui est à l'origine de l'augmentation du taux de change. En fait, il est faux de dire que le dollar canadien est un pétrodollar. À peine 12 p. 100 des exportations canadiennes sont du pétrole ou des produits pétroliers raffinés. Les exportations énergétiques sont plus grandes, mais elles comprennent le gaz naturel. Le prix du gaz, lui, n'est pas monté en flèche. Le cours n'est pas plus élevé qu'il y a un an.
À première vue, le fait que notre dollar s'ajuste si rapidement aux cours pétroliers est plutôt absurde. Si l'augmentation du cours du pétrole améliorait vraiment notre balance des paiements grâce à l'augmentation de nos exportations, le prix du pétrole aurait pour effet d'améliorer notre balance commerciale. Or, ce que l'on commence à observer, c'est l'apparition d'un déficit commercial manufacturier immense qui ne cesse de s'alourdir et une détérioration grave de notre balance commerciale due à la surévaluation de notre devise. Vous n'avez qu'à prendre connaissance des données commerciales du mois dernier.
L'autre facteur qui pousse l'appréciation de notre dollar, c'est la chute du dollar américain. Et c'est effectivement important. Mais plus de 30 p. 100 de la dépréciation du dollar américain, si l'on considère sa corbeille d'échanges avec le reste du monde, s'explique par les échanges avec le Canada seulement. Nous supportons 30 p. 100 du poids de la dépréciation du dollar américain. La plupart des autres grands exportateurs sur le marché américain, qu'il s'agisse de la Chine, du Japon ou des autres pays en développement d'Asie, ont lié leur devise au dollar américain, si bien qu'ils échappent à cette dépréciation.
De fait, la baisse de notre part du marché des exportations aux États-Unis n'est pas compensée par la production américaine mais bien par des exportateurs asiatiques, pas plus que les États-Unis ne pénètrent davantage notre marché au fur et à mesure que le dollar américain se déprécie. En fait, ce sont les importations asiatiques qui comblent l'écart.
Dans ce cas, quelle est l'explication? Pourquoi notre dollar s'est-il tant apprécié tout dernièrement?
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Merci, monsieur le président, et merci à tous de l'occasion qui m'est donnée de comparaître devant vous aujourd'hui.
Le groupe de témoins précédent vous a parlé de l'autre face de l'industrie automobile, en quelque sorte. L'ACCV quand à elle est l'association nationale qui représente les plus importants constructeurs de véhicules légers et lourds au Canada, comme Chrysler Canada Inc., Ford Canada Limitée, General Motors et International Truck and Engine Corporation. Ensemble, ces entreprises représentent plus de 70 p. 100 de toute la production nationale de véhicules, 55 p. 100 des ventes de véhicules et, grâce à l'ensemble de leurs opérations, font vivre 150 000 travailleurs et retraités canadiens.
À première vue, l'industrie automobile canadienne semble se porter assez bien, spécialement quand on lit des articles au sujet des ventes quasi records de nouveaux véhicules au pays et les importants investissements récents du secteur automobile au Canada, dont ceux de nos compagnies membres. Cette façade cache toutefois une réalité bien différente. Aujourd'hui, nous affrontons ce que j'appellerais la tempête du siècle, secouée de plusieurs rafales et qui soufflera encore longtemps.
L'appréciation rapide du dollar canadien a été un des plus durs coup de tabac, cela ne fait pas de doute. Mais ce n'est qu'un des nombreux coups qu'a dû encaisser notre industrie au Canada, parmi lesquels je compte une réglementation à impact profond, notamment en matière d'économie de carburants, une réglementation canadienne incohérente et unique en son genre, des importations records de véhicules, des infrastructures commerciales périmées et les bouchons à la frontière, pour n'en nommer que quelques-uns.
Il n'y a pas si longtemps, le Canada jouissait d'un avantage concurrentiel en Amérique du Nord et il pouvait attirer des investissements. Il y avait d'abord le dollar canadien plus bas par rapport au dollar américain et ensuite, comme on nous l'a souvent répété, l'avantage de la main-d'oeuvre et des soins de santé. Toutefois, les dernières négociations de conventions collectives aux États-Unis entre les compagnies mères de nos membres et les TUA ont modifié la dynamique: des fiducies de santé ont été créées pour alléger le fardeau alors que l'appréciation rapide du dollar canadien a eu des effets tout à fait clairs sur l'autre facteur.
La montée du dollar canadien touche de plusieurs façons la fabrication au Canada. En général, tous les intrants de la production sont calculés en dollars américains pour pouvoir permettre de comparer les coûts entre les usines de montage des diverses juridictions. Le coût de tous les intrants locaux a augmenté considérablement depuis l'augmentation rapide du dollar. Les conséquences sont multiples, notamment sur la main-d'oeuvre, les avantages sociaux, l'impôt des entreprises, les pièces et les services et l'approvisionnement, etc.
Vu ces réalités, je suis devant vous aujourd'hui pour présenter une occasion pour le Canada de développer et d'appliquer une stratégie automobile qui aidera notre secteur à faire face à l'augmentation rapide du dollar canadien, et aux autres impacts et créer une position pour que le Canada soit un lieu de prédilection pour les investissements automobiles.
Premièrement, il faut s'assurer que nous avons un régime de fiscalité d'entreprise et de fonds d'investissement compétitifs. Le deuxième élément essentiel est d'appuyer les efforts de l'industrie automobile et la durabilité environnementale. Le Canada a vraiment besoin d'introduire des normes nationales pour les véhicules, en particulier des normes d'économie de carburant, qui soient alignées sur la norme américaine dominante. Dernièrement au Canada plusieurs provinces ont publiquement exprimé le désir d'adopter leurs propres normes ou les normes de la Californie. C'est ce que j'appelle des normes à impact profond qui ont énormément d'effet sur notre industrie.
Le troisième élément, c'est de créer un régime réglementaire intelligent, efficace et collaboratif entre le Canada et nos principaux partenaires commerciaux.
Agrandir l'infrastructure commerciale essentielle et simplifier les formalités frontalières sont le quatrième grand élément de la stratégie d'investissement automobile. En termes simples, il est 27 000 fois plus difficile et plus cher du point de vue des douanes de faire entrer 4 500 véhicules construits en Amérique du Nord sur notre marché que cela ne l'est de les importer d'outre-mer. C'est parce que, pendant la production de ces véhicules en Amérique du Nord, les pièces et les composants peuvent traverser la frontière six ou sept fois, et chaque fois doivent être accompagnés des papiers nécessaires et des contrôles de sécurité alors que les véhicules importés sont dédouanés une seule fois au moment du débarquement de la cargaison, 4 500 unités à la fois.
Le dernier mais non le moindre élément du plan d'investissement automobile pour le Canada est d'ouvrir les marchés étrangers au moyen d'accords de libre-échange loyal. L'industrie automobile canadienne, et le Canada par conséquent ont beaucoup profité du libre-échange loyal, surtout avec ses partenaires de l'ALENA. Toutefois, la mise en oeuvre d'accords commerciaux qui créent un commerce déséquilibré, dans une seule direction, de véhicules sans accès réciproque compromettra tous les autres aspects de la stratégie d'investissement automobile s'ils devaient être mis en oeuvre.
Le Canada négocie actuellement un accord de libre-échange avec la Corée du Sud qui aboutirait au maintien d'un commerce de véhicules automobiles dans un seul sens, sans avantages économiques élargis pour les Canadiens. Dans la plupart des cas, les produits peuvent être bâtis n'importe où à l'intérieur d'une entreprise mondiale et vendus sur des marchés partout dans le monde. Si les manufacturiers canadiens ne peuvent tout simplement pas avoir accès aux marchés étrangers, leur mission de production sera placée dans d'autres juridictions.
En résumé, je ne saurais trop insister sur la situation difficile de nos compagnies membres du secteur des pièces originales de fabrication. La montée rapide du dollar canadien n'est que le dernier coup asséné à notre industrie, qui donne de l'emploi direct et indirect à 570 000 Canadiens.
Nous exhortons le gouvernement à élaborer et à mettre en oeuvre immédiatement une stratégie automobile afin de redonner un avantage concurrentiel à l'investissement dans l'industrie automobile essentielle du Canada.
Merci, monsieur le président.
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Bonjour, mon nom est Jean Laneville. Je suis l'économiste de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je suis bien heureux d'être ici pour vous parler de l'impact qu'a eu l'appréciation du dollar sur nos membres, particulièrement ceux du secteur manufacturier.
La Fédération des chambres de commerce du Québec représente 162 chambres de commerce regroupant plus de 55 000 membres. Nous prétendons être le réseau d'affaires le plus important et le plus représentatif du Québec. En effet, nous avons des membres dans toutes les régions administratives du Québec, et nous avons également des membres dans tous les secteurs économiques du Québec.
Au cours des trois ou quatre prochaines minutes, je vais aborder l'impact de l'appréciation du dollar selon une approche structurelle. Je vais aussi parler de la théorie du mal hollandais. Si vous avez des questions par la suite pour éclaircir le contexte économique, je me ferai un plaisir de vous répondre.
La hausse du prix des matières premières a eu un effet sur l'économie canadienne, car le Canada est un exportateur net de ressources naturelles. Cette hausse a surtout eu un effet sur notre monnaie. Au cours des cinq dernières années, le dollar canadien s'est substantiellement apprécié. On parle d'une moyenne de 10 p. 100 par année. Évidemment, pour les exportateurs et les manufacturiers, cette situation a été relativement difficile parce que la marge bénéficiaire des exportateurs a diminué, étant donné que la majorité d'entre eux sont des preneurs de prix sur les marchés étrangers, particulièrement sur le marché américain.
Lorsqu'on sépare l'économie canadienne en trois secteurs, on retrouve le secteur des ressources naturelles, le secteur des industries orientées vers l'économie domestique et les services, et le secteur manufacturier. On se rend compte que l'appréciation du dollar a provoqué beaucoup de chamboulements. Au cours des dernières années, au Canada et au Québec, on a pu voir que le secteur des ressources naturelles allait relativement bien: très bien dans l'Ouest du pays et un peu moins au Québec. Cela a amené beaucoup de richesses qui ont contribué au secteur des services, donc à la consommation domestique.
Il y a eu un déplacement de ressources, qui sont allées vers le secteur des ressources naturelles et le secteur des services, alors que le secteur manufacturier allait très mal. Vu l'appréciation du dollar, ce secteur avait de plus en plus de difficultés à exporter, mais il avait également de moins en moins de ressources. On commence donc à voir, au Québec, quelques situations de pénurie dans certains types d'emplois. Cela est plutôt difficile dans un contexte où la concurrence est féroce. La situation est difficile à cause de l'appréciation du dollar.
En ce qui concerne le PIB, du côté de la production manufacturière, on a observé au Québec, depuis 2002, une décroissance annuelle moyenne d'environ 0,4 p. 100. Ce n'est pas beaucoup, mais on a observé, du côté de l'emploi, une diminution annuelle moyenne d'environ 4 p. 100 depuis 2003. Il s'agit donc d'un impact substantiel.
Il y a un fait alarmant: au cours des trois dernières années, de 2003 à 2006, on a observé une diminution de l'investissement dans le secteur manufacturier. Or, on refuse de le voir et on nous dit que l'appréciation du dollar va faciliter et rendre moins dispendieuse l'acquisition de machinerie et d'équipement, ce qui est totalement faux. Nos membres, eux, nous disent qu'il faut certaines conditions pour investir. On n'investit pas parce que la machinerie ne coûte pas cher, mais parce qu'on obtient le meilleur rendement. C'est sous cet angle qu'il faut le voir. Il ne suffit pas de se dire que l'appréciation du dollar va permettre d'acquérir de la machinerie moins chère. Le premier point que nous voulions faire valoir, c'est que l'appréciation du dollar rend la situation moins rentable pour les manufacturiers québécois.
Au Québec, on observe une diminution de la production, de l'emploi et de l'investissement. C'est très alarmant. Tout porte à croire qu'il y a un début de désindustrialisation. Le mot est peut-être fort, mais certains indicateurs me mènent à la théorie du mal hollandais.
Comme son nom l'indique, c'est apparu pour la première fois aux Pays-Bas. À la fin des années 1950, on a découvert du gaz naturel dans la mer du Nord. Une espèce de prospérité est apparue aux Pays-Bas, ce qui a apporté énormément de richesses et fait augmenter la valeur de la monnaie du pays. Avec les années, à long terme, sur une période de 15 ans, le secteur manufacturier a diminué. Lorsque la prospérité économique due aux ressources naturelles est disparue, les Pays-Bas se sont retrouvés sans secteur manufacturier comme moteur de l'économie. C'est ce dont on a peur. C'est ce qui risque d'arriver, particulièrement au Québec, parce qu'on est plus orientés vers le secteur manufacturier que les États-Unis et l'ensemble du Canada.
Il y a certaines pistes de solution très intéressantes qu'on peut retrouver dans l'exemple norvégien. La première solution serait d'être prudent quant aux politiques fiscales. Lorsqu'on a une croissance potentielle et une consommation très élevées, il ne faut pas trop stimuler l'économie, en diminuant la TPS par exemple, parce que cela crée des pressions inflationnistes.
Ce qui fait mal aux manufacturiers québécois, c'est la fluctuation du dollar, qui est incontrôlable. Il serait intéressant de s'inspirer de la Norvège et de créer un fonds de stabilisation du dollar. Il faut utiliser les ressources naturelles et les revenus du gouvernement et les investir dans le fonds, puis utiliser cet argent sur le marché des échanges afin de stabiliser le dollar.
Je n'ai que cinq choses à dire.
Pour le moment, un dollar élevé est bon et bon pour le pays. Jusqu'où il a grimpé et avec quelle rapidité, c'est une autre question. Mais le dollar élevé ne me désespère pas.
Deuxièmement, se trouver en-deçà de la parité du pouvoir d'achat, comme Andrew Jackson l'a dit tout à l'heure, alors que la parité du pouvoir d'achat est restée constante pendant les 30 dernières années, autour de la tranche inférieur de 80 cents... Je pense que c'était mauvais pour le Canada d'avoir le dollar régulièrement en-dessous de ça, à 75 cents ou moins, pendant la décennie de 1992 à 2002. Pourquoi? Parce qu'on vend alors toute l'économie à rabais par rapport à nos coûts de fonctionnement.
Quel est le problème? Je pense que le problème, comme tout le monde l'a dit, est évident. Il a monté trop rapidement et trop haut.
Juste pour vous donner un peu de perspective, c'est vraiment sans précédent. Si on regarde en arrière, sur une longue période, si l'on remonte à son sommet de mai 1974, à 1,04 $, le dollar a mis 11 ans à baisser de 31 p. 100, jusqu'en décembre 1985, à 72 cents, et a ensuite fait sa grosse progression. La plus forte augmentation que le dollar ait jamais connu avant celle-ci s'est déroulée de décembre 1985, sur une période de six ans, jusqu'à octobre 1991, pour atteindre 89 cents, soit une augmentation de 24 p. 100. Il a ensuite fallu une autre décennie pour tomber jusqu'à 63 cents, puis six autres années pour atteindre les niveaux actuels, soit une augmentation de 60 p. 100. Considérez donc cela comme une augmentation qui est plus du double, sur la même période, que l'augmentation précédente plus rapide et elle a largement dépassé tout ce qui se rapproche de la parité du pouvoir d'achat.
Je suis d'accord avec Jean Laneville qui vient de parler des messages contradictoires que ceci envoie aux manufacturiers ou à tous ceux qui achètent des machines et de l'équipement, du matériel et du logiciel. Toutes les industries de service achètent d'énormes quantités de matériels et de logiciels aussi. D'une part, tous les produits, toutes les machines et tout le matériel importés coûtent beaucoup moins cher mais d'autre part les gens ont peur parce qu'ils ne savent pas où va le dollars. Le dollar a monté si rapidement qu'il est difficile de s'adapter. C'est pourquoi, comme Jean l'a dit, ils ne se précipitent pas pour devenir rapidement plus productif parce qu'ils ont peur et vivent quelque chose qu'ils n'ont jamais connu auparavant. Si cela se trouve, il y a un décalage avant que l'on observe une relance des investissements dans la machinerie et l'équipement. Cela ne se produira que lorsque les manufacturiers se sentiront à l'aise et auront confiance que leur équation économique sera efficace pour eux maintenant dans ce nouveau régime plus élevé.
Qu'est-ce que cela signifie? En matière stratégique, ce sont les points quatre et cinq, il y a deux choses que je dirais. D'abord que c'est le moment idéal pour le Canada pour finalement régler le problème de la fiscalité des entreprises et de ses effets sur les investissements dans les sociétés. Comme l'a dit notre groupe de travail il y a plusieurs années, le Canada a l'un des pires régimes qui soient pour les nouveaux investissements dans le monde, et a parmi la plus lourde fiscalité pour les investissements de société. Comment pouvons-nous penser être un grand importateur de capitaux et un pays où les entreprises veulent s'établir et où nos propres sociétés veulent croître et prendre de l'expansion alors que c'est nous qui pénalisons à peu près le plus les nouveaux investissements. Cela me dépasse.
Je suis ravi que nous ayons enfin un dialogue à Ottawa sur la question et que tant les Libéraux que les Conservateurs disent qu'ils vont alléger les impôts des sociétés. Tout ce que je dis, c'est que je profiterais de la situation très avantageuse du Trésor actuellement pour accorder des réductions plus fortes que ce qui est prévu et placer le Canada en-deçà de la moyenne de l'OCDE pour le taux d'imposition réel des investissements en capital.
Alors faites-le. Je me réjouis de voir que la mise à jour de l'automne en parle, mais il est maintenant temps d'aller plus loin et d'aider nos entreprises.
Enfin, je pense que cela revient à la question de l'établissement du taux de change en fonction du dollar. Je connais l'argument formulé chaque fois que cette idée est soulevée, où tout le monde dit: « Cela va réduire notre souveraineté et notre souplesse », par exemple. À ces personnes, je dis de voir où nous en sommes, ce dont nous parlons et ce que nous disons maintenant. Est-ce que c'est vraiment si extraordinaire d'avoir une telle souveraineté, alors que nous faisons face à cet immense problème parce que le dollar a augmenté de 60 p. 100 en six ans, c'est-à-dire de 10 p. 100 par année en moyenne, et que nous devons maintenant nous efforcer de faire quelque chose? Personne dans le monde n'est à l'abri des effets de l'économie mondiale. Ainsi, l'idée selon laquelle nous sommes souverains parce que nous avons notre propre devise, plus souverains que si nous l'établissions en fonction de la devise de notre principal partenaire économique est, selon moi, dépassée. J'aimerais que les Canadiens se fassent tout simplement à l'idée et mettent en application cette idée qui créera une plate-forme stable qui permettra à nos entreprises d'investir et de croître.
Merci beaucoup.
Je suis d'accord, en grande partie, avec ce que Roger Martin a dit. Nous sommes le parti des importantes réductions de l'impôt des sociétés, et j'aimerais que le Canada soit l'Irlande de l'Amérique du Nord. Mais aujourd'hui, mon point de vue est plus ciblé. J'ai déjà avancé une hypothèse selon laquelle cette importante augmentation du taux de change aura des effets négatifs majeurs sur l'emploi. Ce que nous avons vu jusqu'à maintenant n'est qu'un aperçu de ce qui arrivera dans un an, puisqu'il y a des délais, si l'on présume que la valeur du dollar demeurera environ la même. Il nous faut donc un plan maintenant, parce que les gouvernements doivent être tournés vers l'avenir, et non pas se concentrer simplement sur aujourd'hui.
Premièrement, j'aimerais sonder nos témoins. Êtes-vous d'accord pour dire que si la valeur du dollar demeure la même, les mises à pied et les pertes d'emploi qui se produiront dans 12 mois seront beaucoup plus nombreuses que ce que nous voyons aujourd'hui?
Je ne demanderai pas à M. Hardacre de répondre, parce qu'il a confirmé que les effets se feront sentir en 2008, mais peut-être que MM. Jackson, Nantais et Laneville pourraient répondre.
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Quelle question subjective!
Voici ce que j'ai à dire. Je pense que le gouvernement précédent a fait de grandes choses pour l'industrie de l'automobile et que nous pouvons facilement donner notre appui à l'énoncé économique d'il y a environ un mois. Je pense que nous sommes en bonne position maintenant pour profiter des possibilités dont j'ai parlé.
Mettons de côté la question de la valeur du dollar pour l'instant. Nous devons prendre des mesures pour compenser les effets de cette situation. Comme nous l'avons toujours dit, il nous faut une stratégie détaillée et équilibrée pour l'industrie automobile, une stratégie qui comporte bon nombre des éléments qui ont été annoncés et qui, plus important encore, ramène les mesure de soutien à l'investissement à grande échelle.
Tous les pays au monde qui souhaitent conserver ou mettre sur pied une industrie de l'automobile au sein de leur économie lui fournissent du soutien. Nous pouvons être très créatifs. L'Australie est très créative, par exemple, puisqu'elle injecte les recettes provenant des droits d'importation dans l'industrie pour financer ces investissements à grande échelle; cette méthode est très fructueuse. Ainsi, la clé, lorsque nous irons de l'avant, sera de mettre en place une stratégie efficace, équilibrée et détaillée pour l'industrie automobile qui tienne compte d'éléments comme les incitatifs à la recherche et au développement ainsi que de nombreux investissements à grande échelle, comme je l'ai dit.
Oui, il nous faut abolir certaines choses qui ont des effets très négatifs sur nous. Par exemple, le programme de remise écoAUTO. Il est évident que ce programme, entre autres...
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Je suis d'accord avec mes collègues là-dessus. Le secteur manufacturier est important parce qu'il s'agit d'un secteur où la productivité est relativement élevée et qu'il a la capacité de générer une productivité toujours plus grande.
La plus grande partie des dépenses en recherche-développement au Canada se fait dans le secteur manufacturier. Si nous souhaitons jouer un rôle important dans l'économie mondiale de l'avenir, nous ne pouvons tout simplement pas abandonner le secteur manufacturier, le secteur qui fabrique des choses.
Bon nombre d'industries des services importantes apportent une très grande contribution. Elles sont, à leur tour, liées à la fabrication. Il ne s'agit pas de fétichiser les emplois manuels qui consistent à cogner sur du métal. Je pense qu'il faut comprendre que le secteur manufacturier est en train de changer. Mais la parité du dollar va détruire notre potentiel dans bon nombre d'industries — des industries qui seront importantes à l'avenir, comme l'automobile et l'aérospatiale, qui sont des composantes de base absolument essentielles pour notre avenir.
Selon moi, il ne s'agit pas de préserver le statu quo. Le secteur manufacturier doit subir des transformations. Nous avons grimpé dans la chaîne de valeurs et nous somme devenus beaucoup plus novateurs. Mais, comme l'a dit M. Martin, nous n'obtiendrons pas les investissements, l'innovation, la formation et tout ce dont nous avons besoin si la valeur du dollar détruit toute perspective de profit provenant d'un nouvel investissement, et je suis tout à fait d'accord avec lui.
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Monsieur le président, puis-je y mettre mon grain de sel?
Je pense qu'il est très important de comprendre ce qui se passe dans le secteur manufacturier, à l'échelle mondiale, dans les économies avancées. Mesurer nos résultats en fonction des emplois que nous avions dans le secteur manufacturier est, selon moi, tout simplement inutile.
Que les taux de change soient élevés ou non, le secteur manufacturier canadien et américain prend une place de moins en moins importante au sein de l'économie.
Je suis d'accord avec Andrew. Il ne faut pas fétichiser un type d'emploi ou un autre. Il faut se demander quels sont les emplois bien rémunérés dans les industries, et peu importe s'ils relèvent du secteur des services ou du secteur manufacturier, comprendre les liens qui existent entre les deux et avoir une vue d'ensemble qui ne se limite pas à dire que nous perdons des emplois du secteur manufacturier et que c'est mal.
Une partie de la question, c'est que l'industrie devient plus productive et, ce faisant, le nombre total d'emplois diminue. Le même phénomène s'est produit dans le domaine de l'agriculture.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à nos témoins.
Il est intéressant de voir que M. Martin a mentionné, dans son dernier commentaire, l'agriculture. Je pense qu'il est possible d'établir des liens intéressants, parce que l'agriculture a réussi à survivre et à prospérer en devenant plus concurrentielle, selon moi.
Je suis très inquiet lorsque j'entends M. Jackson parler de la perte de 82 000 emplois. En fait, cette année seulement, le Canada dans son ensemble a gagné 345 000 nouveaux emplois; et 655 000 nouveaux emplois depuis que le gouvernement conservateur est au pouvoir, dont 80 % sont des emplois de très haut niveau. Ainsi, lorsque vous laissez entendre que 82 000 emplois ont été perdus... je ne veux pas minimiser l'importance de ces pertes d'emplois, bien entendu, mais il y a de nouveaux emplois.
Pour répondre à l'observation de M. Martin, sur la nouvelle façon de faire des affaires au Canada... les gens changent leur profil d'emploi, ce qui est positif.
Une petite précision pour M. McCallum: c'est le gouvernement libéral qui a entrepris les négociations en vue de conclure un accord de libre-échange avec la Corée...
Une voix: Non.
M. Ted Menzies: ... si je me souviens bien, et je crois avoir raison. Il a indiqué que l'accord avait été conclu, mais je ne pense pas que cela soit le cas, à moins qu'il ait accès à des renseignements que je ne connais pas. Le ministre a dit que l'accord ne serait pas finalisé avant que nous ne soyons sûrs de protéger les entreprises canadiennes.
J'ai une petite question, que je pose à tous les témoins. J'aimerais que vous répondiez brièvement, parce que le timbre retentit et que nous devons partir. Le gouvernement canadien devrait-il intervenir auprès de la Banque du Canada pour influer sur la valeur du dollar canadien?
Une réponse rapide, oui ou non, de la part de chacun d'entre vous, s'il vous plaît.