:
Merci infiniment. Je vois l'horloge derrière vous, alors ce matin, je gérerai le temps de 10 minutes qui m'a été accordé afin de ne pas le dépasser.
Bonjour aux membres du comité.
Merci, monsieur le président.
[Le témoin parle dans sa langue maternelle.]
Je viens du petit village d'Ahousaht, au large de la côte Ouest de l'île de Vancouver, et c'est notre façon de saluer le peuple Algonquin.
Merci beaucoup au comité de m'avoir invité ici ce matin. Pendant les 10 minutes qui m'ont été accordées, j'aimerais vous faire part de certaines idées préliminaires.
Je n'y avais pas vraiment pensé de cette façon, mais oui, il y a de nouvelles personnes dans les divers postes de direction. C'est ce qui se produit également au sein de l'Exécutif national. Nous avons de nouveaux chefs régionaux en Colombie-Britannique, en Alberta et au Yukon. C'est ce qui semble se passer actuellement à grande échelle dans les premières nations du pays.
Pour commencer les discussions sur les sujets que nous devons aborder ici aujourd'hui, j'aimerais faire des commentaires d'ordre général, puis vous faire part de certains points de vue sur une façon possible d'aller de l'avant, car bien entendu, nous venons tout juste d'avoir une élection... Je m'excuse d'emblée auprès de M. Lemay pour les 24 heures et les huit tours de scrutin que le processus a nécessités, et je m'excuse également auprès de toute autre personne qui a dû subir ce processus, comme cela a été le cas partout au pays. Mais bien entendu, tous les candidats ont travaillé très fort pendant cette élection. Les candidats ont été soutenus par leurs familles et leurs communautés, et ils sont tous très préoccupés et dédiés à l'amélioration de la vie et des conditions de notre peuple.
Nous travaillons tous dans un contexte stratégique très complexe. Bien sûr, les besoins de nos communautés sont criants partout au pays. Nos communautés doivent affronter des pressions en permanence. En tant que chef national, il est de mon devoir d'appuyer les chefs des gouvernements des premières nations, du moins ceux qui doivent signer des traités. Nous devons composer avec un plafond de 2 p. 100 depuis 1997.
Au cours de notre histoire, nous sommes passés d'un conflit à l'autre, si je peux décrire la situation de cette façon. Ces soubresauts ont eu lieu devant la cour, à la suite d'un très grand nombre de décisions de la cour, et sur le terrain. Il y a des exemples quasi quotidiens de ces soubresauts dans les relations entre les premières nations et le gouvernement.
Je peux énoncer très rapidement un certain nombre de ces situations, notamment à Akwesasne actuellement, en ce qui concerne les gardes-frontières. Je joins ma voix à celle du grand chef Mitchell pour demander une solution négociée à un autre conflit lié à des opinions divergentes sur les juridictions qui doivent être respectées. Cette communauté doit composer avec cinq juridictions différentes. Il y a beaucoup de frustrations en ce qui concerne l'incapacité à régler certaines questions.
Nous avons connu de nombreux conflits, et je crois qu'il est maintenant temps pour nous d'examiner attentivement la situation et de réfléchir sur la façon dont nous pourrions faire les choses différemment. Comme vous le savez, notre communauté — et les membres du comité le savent mieux que quiconque — est très jeune. J'ai vu des statistiques indiquant que 49 p. 100 de notre population est âgée de moins de 19 ans, ce qui fait de moi, à l'âge de 42 ans, un membre du groupe le plus âgé de notre groupe. Cette situation est très réelle, et nous manquons d'emplois rémunérés dans nos communautés.
L'attention portée récemment à la grippe H1N1 met l'accent non seulement sur les questions relatives à la planification en vue d'une éventuelle pandémie et sur la nécessité de s'assurer que nous sommes bien préparés pour faire face à la grippe H1N1, mais elle laisse entrevoir également des enjeux comme les conditions sanitaires globales, les maladies chroniques, la question du soutien en matière de santé dans nos communautés et l'accès aux services de santé. Nous savons que dans nos communautés, les taux de diabète sont trois fois plus élevés que dans le reste de la population. Nous devons faire face à des enjeux importants en matière de fiscalité et de structure dans des domaines comme l'habitation, ce qui a des répercussions sur la santé. Nous avons des besoins en matière d'infrastructure, et il y a un besoin pour un travail permanent à cet égard.
Nous avons besoin d'une guérison pour surmonter les effets non seulement des pensionnats, mais aussi les effets à long terme du colonialisme dans nos communautés et les contraintes imposées par la Loi sur les Indiens. Je reviendrai sur ce sujet et j'y ajouterai certaines idées.
De plus en plus, les premières nations tentent de s'en sortir et créent de nouvelles structures et de nouveaux pouvoirs afin de faire des affaires. Nous voyons beaucoup d'exemples de cela dans tout le pays, des exemples de la façon de travailler de manière autonome et interdépendante avec les autres ordres de gouvernement, y compris les municipalités. J'ai vu un exemple de cela récemment en ce qui concerne le territoire visé par le Traité 8, dans le nord-est de la Colombie-Britannique. Et bien entendu, il existe de nouvelles dispositions avec l'industrie.
Nous savons très bien ce qui a été dit dans la Commission royale sur les peuples autochtones. En voici un extrait :
C'est une mauvaise ligne de conduite qui a été suivie pendant plus de 150 ans par les gouvernements coloniaux, puis par les gouvernements canadiens ultérieurs. Il faut laisser les autochtones exercer leur autonomie et élaborer leurs propres solutions.
Il s'agit encore de l'aspect le plus important de ce que nous avons à suggérer aujourd'hui. Nous devons être en mesure de concevoir et de mettre en oeuvre conjointement les solutions qui ont des répercussions sur notre vie. Cette idée a été encore plus appuyée par le projet Harvard en 2006 dans un rapport rédigé par Stephen Cornell, qui a déclaré que les trois facteurs clés sont l'autonomie, des institutions exerçant un pouvoir responsable et une concordance culturelle. D'autres travaux effectués par Chandler et Lalonde dans le domaine du suicide ont également soutenu ces notions.
Ma propre communauté enregistrait un taux de suicide très élevé. Heureusement, non seulement le gouvernement a travaillé avec nous à ce moment, mais la population canadienne a également travaillé avec nous. Les entreprises et l'industrie ont réagi et ont dit « Que pouvons-nous faire pour vous aider à aborder ces enjeux? » Cela a donné lieu à une initiative en matière de leadership couronnée de succès qui sert d'exemple sur la façon dont les premières nations et les gouvernements peuvent collaborer pour rejoindre l'ensemble de la société canadienne et dire « Vous savez, ces enjeux existent ici même au Canada aujourd'hui; nous devons trouver des façons de travailler ensemble efficacement. »
L'avenir repose peut-être sur cette notion, une notion habilitante, qui passe de la contrainte et du contrôle imposé au respect et à la reconnaissance. L'idée d'aller de l'avant en se fondant sur l'interdépendance et la responsabilisation mutuelle constitue toujours le fondement de la relation créée par le traité, c'est toujours le cas aujourd'hui, et ça le sera dans l'avenir. Nous voulons passer d'une relation fondée sur la dépendance à un financement soutenable et d'une délégation de pouvoir unilatéral à une harmonisation tripartite. Nous avons des exemples d'ententes tripartites où nous avons pu surmonter les problèmes de juridiction, et parfois les querelles de juridiction. Cela sous-entend également une responsabilisation partagée.
L'approche doit permettre de surmonter les divisions et de faire un rapprochement, de créer des processus ouverts et inclusifs, et de faire en sorte que la culture et l'identité constituent une source de confiance et de force pour les premières nations. Par conséquent, si, comme le premier ministre l'a déclaré, la période des pensionnats a constitué une erreur, que cela n'aurait jamais dû survenir et que cela ne devrait jamais survenir de nouveau — on reconnaît que de grands dommages ont été faits sous le couvert d'une politique en matière d'éducation — ne devrions-nous pas étudier la question relative à l'éducation comme s'il s'agissait d'un des outils visant à soutenir l'établissement de nouvelles relations des gens avec la famille, avec la terre, avec la culture et avec plus de cinquante langues autochtones au pays qui, selon les spécialistes, ont un grand besoin de soutien?
J'ai fait campagne et j'ai été élu en proposant quatre thèmes principaux, dont le premier était lié au soutien aux familles et aux communautés des premières nations. Le deuxième thème était lié à l'exercice et à la mise en oeuvre des droits, à savoir les droits liés aux traités et aux titres autochtones. Le troisième thème était lié aux besoins de se concentrer sur les intérêts économiques et environnementaux — il s'agit de concilier une planète en péril et les questions des changements climatiques pour lesquelles nous avons tous une responsabilité, mais nous devons également aborder les grands enjeux liés aux marchés qui ont été soulevés récemment.
Les premières nations n'ont pas vraiment été intégrées dans l'économie de marché dans son ensemble d'une manière importante. Si la situation économique commence à s'améliorer comme le laissent entendre les spécialistes, les premières nations ne veulent pas de nouveau être en reste. Les premières nations veulent elles aussi profiter de la manne et être à l'avant-plan de la nouvelle économie, une économie qui aborde les questions de moralité que nous devons traiter, qu'il s'agisse des combines à la Ponzi ou de l'effondrement du marché à Wall Street. Je sais que les premières nations peuvent contribuer de façon positive à la discussion relative à l'établissement d'une économie vigoureuse et durable, et qu'elles veulent le faire dans le respect de l'environnement.
En ce qui concerne les familles des premières nations, l'éducation constituera toujours un domaine de première importance dans lequel nous consacrons beaucoup d'efforts. Un rapport des Fondations communautaires du Canada sera publié aujourd'hui et portera le titre « Signes vitaux 2009 ». Je n'ai pas vu ce rapport. Je crois comprendre qu'il a été publié aujourd'hui et qu'il portera sur les taux de diplomation dans les écoles secondaires des premières nations. Ce ne sera pas un rapport très positif. Nous attendrons de voir les constatations, mais je vous fais part de cette information car elle est vraiment importante. Alors que nous faisons des progrès dans un certain nombre de domaines, il y a certains indicateurs, comme le taux de diplomation dans les écoles secondaires, qui continueront d'être importants pour déterminer la réussite future des premières nations dans tout le pays.
Dans le domaine de la santé, je suis ravi que nous ayons été en mesure de signer un protocole de communication sur la grippe H1N1. Il est important que ce protocole soit pleinement mis en oeuvre, que les gouvernements des premières nations partout au pays travaillent de très près avec les autorités de la santé et les autres administrations pour s'assurer que l'information est complète, que nous comblons les lacunes dans la planification, et que nous travaillons à partir de connaissances partagées pour ce qui est de notre préparation à tous égards.
Lorsque je suis entré en fonction et que le problème de la grippe H1N1 s'est posé, il était très clair qu'il y avait différents niveaux d'information ou de compréhension entre les administrations. Cela n'aide pas les individus. Cela n'est pas utile à la planification d'urgence. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire et nous devrons continuer de faire preuve d'une grande diligence à ce chapitre.
En ce qui concerne les services à l'enfance — je pense au principe de Jordan et à un concept similaire —, nous devons surmonter les difficultés interadministratives, nous occuper des besoins des enfants et régler les questions entourant le soutien au financement. Nous savons qu'il y a beaucoup trop d'enfants placés partout au pays, et c'est là une autre question importante qui nous préoccupe.
Nous voulons continuer d'illustrer que le Canada fait partie de la très petite minorité qui n'a pas appuyé la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Je crois que l'Australie a progressé et qu'elle a exprimé son appui. J'ai entendu l'ancien rapporteur spécial des Nations Unies dire que les États-Unis avaient commencé à exprimer un appui tacite envers la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, et nous en sommes heureux.
Il y a eu des idées précises concernant la question des traités et la mise en oeuvre des traités, dont un bureau du commissaire national aux traités. Pour ce qui est des revendications globales, étant donné que la politique remonte à 1986, je crois que nous devons préconiser le retrait des barrières qui font obstacle à l'atteinte de résultats positifs et qui n'arrivent pas à appuyer la mise en oeuvre des accords qui sont signés dans le cadre de cette politique. Je songe, tout dernièrement, à mes discussions au Yukon concernant l'entente sur l'autonomie gouvernementale du Yukon.
J'ai parlé de l'économie et de l'environnement. Nous avons encore beaucoup de travail à faire dans le domaine des consultations et des accommodements des groupes autochtones par les gouvernements. L'approche doit être systématique et fondée sur le respect des droits, des titres et des traités des premières nations.
Sur la question du travail avec les gouvernements des premières nations, je propose d'appuyer la protection des droits collectifs et individuels de nos citoyens. On en trouve des exemples lorsqu'on regarde la question de la citoyenneté. Par opposition, encore une fois, au fait que les gouvernements optent pour une prise de décision unilatérale pour trancher les questions entourant le statut, nous aimerions l'élargir pour y ajouter la citoyenneté. Après tout, ce sont les nations qui déterminent qui sont leurs citoyens. Les nations qui disposent de droits issus de traités sont celles qui déterminent qui ont des droits en vertu d'un traité en particulier. Nous voulons présenter ce genre de notion aussi.
Donc, de quelle façon pouvons-nous travailler ensemble? Ces points serviront de conclusion à ma déclaration préliminaire.
Nous avons des idées concernant des études parlementaires et/ou des comités spéciaux, par exemple, que votre comité pourrait songer à mettre sur pied dans plusieurs domaines, comme constituer un comité mixte entre votre comité et le Comité permanent de la justice et des droits de la personne afin d'examiner la violence envers les femmes et les filles autochtones et de s'assurer que le Canada trouve une réponse complète pour mettre fin à la discrimination envers les femmes dans le rapport du comité qui doit être déposé en novembre 2009. J'aimerais présenter cela à titre d'exemple précis.
En second lieu, un comité spécial pourrait examiner les obstacles fondamentaux inhérents au cadre actuel de la Loi sur les Indiens. J'ai parlé de la citoyenneté ou de la question du statut. Pourquoi ne pouvons-nous pas adopter une vision plus globale de questions comme celle du statut, et l'examiner à travers la lentille plus globale de la citoyenneté? Les biens immobiliers matrimoniaux en sont un autre exemple. Il y a les questions de justice et de mode alternatif de règlement des conflits.
Quand je soulève ces questions, je pense à la CRPA, qui a dit que depuis les 150 dernières années, l'élaboration de politiques est inappropriée et que nous devons faire quelque chose de nettement différent. Je pense au rapport Penner. Je pense aux négociations qui ont lieu en Colombie-Britannique depuis environ 15 ans, à la nouvelle expérience dans les provinces de l'Atlantique en ce qui concerne le processus de négociations de la Nouvelle-Écosse, et évidemment à l'expérience des tribunaux et des conflits, qui sont beaucoup trop nombreux, et qui ont touché durement notre relation.
Merci, monsieur le président. C'était ma déclaration préliminaire.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour, chef national. C'est avec plaisir que nous vous accueillons. En mon nom et au nom du Parti libéral, j'aimerais vous féliciter encore une fois pour votre victoire historique.
J'étais à Calgary à ce moment-là et comme je manquais de sommeil à environ 6 h 30, j'ai décidé que le sommeil serait un peu plus imminent que les résultats éventuels. C'était merveilleux d'être là, par contre. C'était la première fois que j'assistais à une assemblée générale annuelle de l'APN.
Vous avez abordé bien des sujets pendant les 10 à 12 minutes qui vous ont été accordées, mais j'ai été frappé par votre commentaire selon lequel nous passons d'un conflit à un autre, et que c'est la nature de votre relation avec la Couronne depuis de nombreuses générations. Vous avez parlé de la question de la frontière à Akwesasne. Certains d'entre nous diraient même que des conflits surviendront dans le cadre de la politique sur la grippe H1N1, assortis de querelles de compétences pour savoir qui en est responsable.
Je pense à certaines des lois qui ont été présentées devant le comité. Lorsqu'une loi est présentée devant le comité sans la participation appropriée des premières nations ou des Autochtones, il semble y avoir beaucoup plus de tensions autour de cette table en particulier. Il y a certainement beaucoup plus de conflits entre les buts et les aspirations des Autochtones et ce que le gouvernement veut imposer. Il y a également la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, et toutes ces choses font partie de l'équation.
Vous avez parlé de certains processus que nous pourrions utiliser, d'un point de vue parlementaire, pour faciliter le règlement de certaines de ces questions, au lieu de passer d'un conflit à un autre. Vous avez parlé de comités spéciaux sur des sujets en particulier. Cependant, j'aimerais revenir un peu en arrière. Vous avez parlé de la CRPA, et j'aimerais que vous vous arrêtiez un peu sur l'accord de Kelowna. Je sais que certaines personnes sont surprises ou hochent la tête lorsque nous mentionnons Kelowna, mais il semble que le processus a permis, du moins en partie, de résoudre certaines des difficultés que nous avons et de mettre fin à l'état d'esprit de conflits.
Je me demande si ce processus vous a été utile. Ce processus pourrait-il nous aider à établir des relations futures entre la Couronne et les peuples autochtones? Quelle est l'importance d'un processus respectueux pour vous, à titre de chef national?
:
Merci, monsieur le président et monsieur Russel.
Je crois sincèrement qu'un bon processus peut produire de bons résultats. Personne n'aime entreprendre un processus dans le seul but de l'entreprendre. Je crois que nos gens et nos communautés exigent beaucoup plus que cela.
Quand je songe à 2005 et aux discussions qui ont eu lieu, et que je pense au travail qui a été accompli depuis, un exemple ressort, soit notre capacité de s'appuyer sur ce processus en 2005. Nous avons présenté un rapport au nom des premières nations. J'ai rédigé conjointement un rapport avec Dave Nahwegahbow destiné aux chefs et à l'assemblée, et intitulé Recognition and Implementation of First Nation Governments. C'est une oeuvre que les chefs ont approuvée au printemps 2005 et qui s'inscrit dans le prolongement de la CRPA et du rapport Penner, et qui, du point de vue des premières nations, affirme très fortement qu'il existe une façon d'élaborer conjointement des politiques et d'apporter des changements législatifs. Les gouvernements des premières nations doivent participer et l'Assemblée des Premières Nations peut, avec l'appui des chefs, agir à titre de facilitateur et de coordonnateur.
Nous avons plusieurs exemples qui laissent entrevoir des résultats. L'un d'eux est le travail qui a été accompli en Colombie-Britannique. Lorsque j'étais le chef régional de la Colombie-Britannique, nous avons signé un accord de transformation pour le changement avec l'ancien premier ministre, M. Campbell, et le Conseil des leaders des Premières nations de la Colombie-Britannique. L'accord a donné lieu à des travaux dans plusieurs domaines, dont la santé et l'éducation.
Au niveau national, je songe au processus relatif à la Loi sur le Tribunal des revendications particulières, un processus conjoint entre les premières nations et le gouvernement, duquel a découlé une approche qui a changé fondamentalement la façon dont les revendications particulières sont traitées, grâce à un nouveau tribunal indépendant qui n'est pas encore entièrement opérationnel. Mais nous nous attendons à ce que cette approche amène un élément d'équité et d'indépendance au processus et, comme le laissent entendre de nombreuses premières nations, fera en sorte que le gouvernement ne sera plus à la fois juge et jury dans le cadre du processus des revendications particulières.
Plus récemment, j'ai rencontré les premiers ministres à Regina il y a environ deux mois. Ils ont convenu d'établir un groupe de travail national des ministres sur les affaires autochtones. L'un des intérêts que les premiers ministres ont exprimés, et que je partage, était l'idée de tenir une rencontre des premiers ministres en 2010. Je crois qu'il existe une notion selon laquelle un bon processus équivaut au besoin d'établir de bonnes relations de travail afin de surmonter ces grands murs d'incompréhension qui surviennent et qui engendrent des conflits sur le terrain. Je crois qu'en tant que dirigeants, il nous incombe d'examiner chaque façon possible de prendre part à un processus qui produira différents résultats.
Le principe fondamental ici, c'est que pour s'éloigner de l'élaboration unilatérale de solutions, de politiques ou de lois en faisant abstraction des premières nations, nous devons renverser la vapeur et, si nous le pouvons, apprendre de nos expériences les plus récentes qu'il est temps de retourner à un processus d'engagement réel.
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais souhaiter la bienvenue au chef national à Ottawa.
J'ai moi aussi assisté à la réunion de l'Assemblée des Premières Nations à Calgary. Comme je viens de la Colombie-Britannique, je dois admettre que c'était un honneur et un privilège de voir les aînés et tous ceux qui sont venus donner leur appui. Toutes mes félicitations à vous, à votre communauté et à vos aînés, car je sais qu'ils vous ont donné un appui solide.
J'aimerais faire un bref commentaire avant de poser mes questions.
Vous avez parlé de la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Dans un rapport récent qu'il a publié en septembre 2009, Paul Joffe a parlé de l'isolement croissant au Canada. Il a souligné qu'en avril 2009, le gouvernement travailliste d'Australie a annoncé qu'il appuyait la déclaration; qu'au printemps 2009, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis ont indiqué qu'ils étaient en train de reconsidérer leurs positions opposées; et que le Canada était de plus en plus isolé sur la scène mondiale. Je crois que vous avez fait ressortir un point important: la déclaration fournit des précisions sur les droits inhérents aux peuples autochtones, qui n'ont pas été respectés au cours de l'histoire.
Voilà donc le contexte qui nous mène à la question que je vais poser.
Ce que le comité sait et ce que nous savons, c'est que depuis la Confédération en 1867, nous avons connu des décennies de négligence et de refus absolu des droits inhérents. Nous savons également que nous disposons de nombreux rapports. Nous avons des rapports de la vérificatrice générale. Nous avons la Commission royale sur les peuples autochtones. Nous avons des arrêts et des études. Ils ont tous essentiellement révélé que les conditions des premières nations, des Inuits et des Métis au pays sont déplorables et qu'il faut faire quelque chose.
Nous pouvons parler du financement, des logements, de l'eau et de l'environnement, mais si nous ne réglons pas certains des problèmes sous-jacents, nous n'avancerons pas. On peut investir dans les logements, mais il faut d'abord régler certains des problèmes concernant l'autonomie gouvernementale.
Pourriez-vous commenter précisément le fait que ce qui semble manquer ici, c'est la reconnaissance du fait qu'il faut traiter de nation à nation? Une fois qu'ils ont été signés, les traités et les ententes sur l'autonomie gouvernementale ne sont pas reconnus et mis en oeuvre. Il existe un manque de reconnaissance relativement à l'honneur de la Couronne et à la responsabilité de fiduciaire.
Je me demande si vous pourriez nous dire si le fait de régler ces problèmes qui semblent être à la base de tous les autres pourrait nous aider à aller de l'avant.
(Île de Vancouver-Nord, PPC):
Merci, monsieur le président.
J'aimerais d'abord vous présenter nos plus sincères félicitations pour votre élection du 23 juillet et vous souhaiter la bienvenue dans ce comité. Je crois que tout au long de votre carrière vous avez fait preuve d'un leadership fort et que vous faites de même encore aujourd'hui.
Vous avez parlé de la complexité de l'environnement politique dans lequel nous vivons. J'ai été dans l'opposition pendant de nombreuses années à la tête du même portefeuille. Il est très instructif de faire partie du gouvernement et de réaliser combien les sujets dont vous avez parlé sont, à plusieurs égards, les mêmes dont nous devons traiter. Vouloir changer les choses comporte de nombreux défis. Si nous pouvons collaborer et résoudre le plus grand nombre de défis possible, je crois que nous accomplirons de grandes choses.
Il a été discuté du plafonnement de 2 p. 100 en éducation. Nous sommes au courant des négociations qui y ont cours avec 13 premières nations de la Colombie-Britannique, le processus LDCIPN, et je crois que ce sera un modèle pour le reste du pays en termes de comparabilité.
Vous avez parlé également des revendications particulières. Je crois que c'est une grande percée. Elle a été faite conjointement et le Sénat a joué un rôle important.
Du côté de l'éducation nous savons que les jeunes Autochtones sont très importants pour le Canada et notre futur à tous — ce n'est pas une question spécifique aux premières nations, c'est une question qui concerne tout le pays.
J'apprécie l'importance que vous accordez au rôle du développement environnemental et économique.
Vous avez dit vouloir vous éloigner d'un processus décisionnel unilatéral. J'aimerais vous parler de la différence qui sépare le processus et l'action. Comment pouvons-nous passer du processus vers l'action? Vous avez énuméré quatre comités mixtes pour traiter de sujets importants: la violence, la citoyenneté, les biens immobiliers matrimoniaux ainsi qu'un mode alternatif de règlement de conflit. Je crois que c'était là les quatre comités.
Nous avons dû suivre un processus très douloureux pour modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne afin qu'elle inclut les peuples des premières nations du pays. Sans le leadership du gouvernement, je crois que ce processus n'aurait jamais abouti. Je crois que le défi que nous devons relever est de créer un processus encore meilleur. L'exemple que j'aimerais prendre est celui des biens immobiliers matrimoniaux. Vous avez dit que nous devrions déposer une proposition. Nous devrions peut-être étudier la question dans un comité mixte. Comment pourrais-je être certain que cette façon de faire donnerait des résultats différents que de maintenir le statu quo — en d'autres mots, est-ce qu'aucune amélioration ne pourrait être faite parce qu'aucun consensus ne pourrait être atteint? C'est là ma question.
[Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
Mon peuple vous adresse ses meilleurs voeux. Je suis de la réserve indienne non cédée de Wikwemikong situé sur l'île Manitoulin. Je suis Anishinabe de la nation Anishinabek.
Il y a de cela plusieurs années, je me suis présentée devant un comité tel que celui-ci pour conserver mes droits comme membre de ma communauté, parce que c'est elle qui me définit. C'est moi et mon pays, le pays de mes ancêtres et le pays des générations futures auxquelles je participe.
J'aimerais partager avec vous les enseignements avec lesquels j'ai été élevée et vous montrer comment je souhaite les utiliser pour remplir mon rôle de présidente de l'Association des femmes autochtones du Canada. Peut-être que certains d'entre vous ont déjà entendu parler des enseignements des grands-pères. Ce sont des pratiques que nous cherchons à suivre tous les jours.
Le premier est l'honnêteté, et à titre de présidente j'aspire à la transparence et à la responsabilisation.
L'humilité. Si l'on observe les membres de nos associations provinciales et territoriales, nous constatons qu'ils sont au dernier rang et nous devons nous assurer que leur voix soit entendue. Ce sera donc une de mes principales initiatives.
Le respect. Le respect est inhérent à toute relation entre deux individus. Lorsque l'on parle de respect, on parle de droits de la personne et des biens immobiliers matrimoniaux qui sont proposés, parce qu'ils veillent à ce que le respect persiste.
Pour ce qui est de la vérité, nous nous pencherons sur le développement économique, l'emploi, l'éducation et la formation, tout spécialement pour les femmes. Les résultats auront une influence positive sur nos familles et nos communautés.
Le courage. Il faut beaucoup de force et de courage pour affronter la législation. Pensons au dossier Sharon McIvor et à nos droits à titre de citoyens au sein de nos nations.
L'amour. L'amour de nos peuples, l'amour de notre communauté, l'amour de nos familles, nous souhaitons éliminer la pauvreté et tout ce qu'elle entraîne.
La sagesse. Nous nous tournons vers la sagesse de nos aînés et la sagesse de nos enseignants pour obtenir la santé, le bien-être et un esprit d'équilibre au sein de nos communautés.
C'est donc ma façon à moi d'assumer mon rôle de présidente de l'Association des femmes autochtones du Canada.
J'aimerais également mentionner que nous sommes ici à travailler et à parler avec vous sur les terres du peuple algonquin et j'aimerais le remercier de nous accorder ce privilège.
L'Association des femmes autochtones du Canada, pour ceux qui ne nous connaissent pas, est une organisation nationale composée de 11 associations provinciales et territoriales de partout au pays. Nous sommes dédiés à l'amélioration de l'aspect social, économique, médical et politique du bien-être des femmes des premières nations, des femmes métisses ainsi que des femmes inuites du Canada. Un grand nombre de nos organisations provinciales sont composées de membres de ces trois groupes.
À la séance de ce comité, j'aimerais présenter les questions prioritaires auxquelles l'Association des femmes autochtones du Canada souhaite s'atteler, les questions que toutes les femmes autochtones du pays souhaitent résoudre. Nous faisons référence aux dispositions discriminatoires de la Loi sur les Indiens, avec lesquelles nous devons encore traiter. Nous souhaitons nous attaquer également aux biens matrimoniaux ainsi qu'à la violence contre les femmes autochtones.
Nous aborderons également la question de la nécessité pour l'Association des femmes autochtones du Canada d'être dotée d'une capacité accrue pour être en mesure d'accomplir son importante mission, en particulier au vu du fait que l'AFAC est la seule organisation nationale à faire entendre le point de vue des femmes autochtones.
Prenons la Loi sur les indiens. En avril 2009, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a rendu un jugement dans l'affaire McIvor. Il se trouve que je connais Sharon McIvor et que j'appuyais son initiative. Les dispositions de la Loi sur les Indiens qui faisaient l'objet d'un examen étaient les alinéas 6(1)a) et 6(1)c), qui régissaient l'inscription ou le statut d'Indien. La Cour d'appel a jugé ces alinéas inconstitutionnels et ordonné qu'ils soient modifiés avant la fin de l'année.
Voilà une conséquence de la clause discriminatoire limitant la deuxième génération incarnée dans le projet de loi C-31, qui fait que frères et soeurs ne seront peut-être pas également aptes à transmettre le statut d'Indien à leurs enfants. Les mères qui récupèrent leur statut grâce au projet de loi C-31, en particulier, ne seront pas capables de transmettre ce statut à leurs petits enfants aussi facilement que celles qui le détenaient avant le projet de loi C-31.
Cet article particulier me touche directement. J'ai récupéré mon statut aux termes du projet de loi C-31. Pendant 15 ans, j'en avais été privée bien que je sois tout à fait intégrée à ma communauté. Maintenant, aux termes des dispositions du projet de loi C-31, deux de mes petits enfants ont le statut légal; trois de mes petites filles, que j'aime tant — ce sont elles qui perpétueront ma génération — ne l'ont pas en raison de cette disposition de la Loi sur les Indiens.
La décision rendue dans l'affaire McIvor est jusqu'à un certain point la bienvenue du point de vue des femmes des premières nations du Canada qui se battent depuis longtemps pour qu'il soit mis fin à la discrimination, comme le fait le projet de loi C-31. Mais ce n'est pas ce que nous avions en tête.
J'ai porté mon propre cas personnel devant la Cour suprême du Canada — c'était il y a longtemps, en 1970 — dans une tentative de ma part pour faire retirer la discrimination fondée sur le sexe qui était incarnée dans l'alinéa 12(1)b) de la Loi sur les Indiens. Je l'ai fait pour protéger les droits de mes enfants et de mes petits enfants.
Aujourd'hui, près de 40 ans plus tard — je le sais d'autant mieux que mon fils a 39 ans — nous savons tous que le projet de loi C-31 n'a pas à ce point instauré l'égalité. Le système compliqué établi aux termes des paragraphes 6(1) et 6(2) relativement aux Indiens inscrits selon la Loi sur les Indiens a non seulement laissé persister une discrimination résiduelle à l'endroit des descendants des femmes — mes petites filles — mais il entraînera également l'élimination, à terme, du statut d'Indien pour nombre de nos premières nations. C'est une injustice et il faut nous en occuper sans délai. Je crois que le moment est venu de nous y attaquer.
J'ai également été commissaire à la citoyenneté pour la Nation anishinabek. Dans le cadre de mon travail auprès de mes communautés, les 42 premières nations, on m'a dit et je me suis rendu compte que, d'ici trois ans, certaines des premières nations de la Nation anishinabek verront naître leur dernier membre ayant le statut d'Indien. Après, cette communauté ne comptera plus personne ayant ce statut. Cette histoire se passe dans le centre-sud de l'Ontario et elle est vraie. Voilà ce qui nous guette avec l'actuelle Loi sur les Indiens.
Il y a également l'injuste obligation pour nos femmes de déclarer l'identité du père de leurs enfants. Si elles refusent, le père des enfants est réputé être un Indien non inscrit. C'est totalement inacceptable. Je ne sais pas si vous exigeriez de vos femmes de faire la même chose pour pouvoir conserver leur citoyenneté. Il y a de nombreuses raisons d'ordre social et culturel à cet état de choses dans nos communautés et il faut examiner la question sans faute.
La semaine dernière à peine, on nous a dit, au cours d'un exposé présenté par Affaires indiennes et Nord Canada, que le gouvernement fédéral prévoyait apporter les modifications requises pour faire en sorte que les dispositions relatives à l'inscription soient conformes à la Charte canadienne des droits et des libertés. Nous nous réjouissons de cet engagement. C'est un pas dans la bonne direction. J'ai mentionné plus tôt que nous étions partiellement favorables à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, partiellement, parce qu'elle est toujours trop étroite. Elle ne règle pas la situation de mes petits-enfants ni de ceux de Sharon Mclvor. Il faut se pencher là-dessus. Si nous pouvions le faire de façon conséquente au point de garantir la conformité à l'exigence constitutionnelle de consulter notre peuple et de tenir compte de ses droits ancestraux et issus de traités, nous ferions, je crois, un premier pas dans la bonne direction.
L'exposé que le gouvernement du Canada nous a présenté vendredi dernier, je crois, annonçait la tenue de séances de consultation avec des organisations autochtones nationales et quinze séances de consultation régionales. Il s'agissait de faire connaître l'approche que le gouvernement privilégie en matière de modification législative et de donner l'occasion d'examiner et d'entendre le point de vue de tous les délégués autochtones auxquels il s'adressait. Mais il ne s'agissait que d'une séance d'information, ce que le MAINC a reconnu. Si c'est ainsi que l'on compte procéder pour en arriver à formuler une modification législative, vous pouvez être sûrs que jamais au cours de ce processus on n'aura vraiment cherché à connaître les points de vue et les perspectives des membres des communautés des Premières nations.
L'AFAC presse le comité de demander au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien de dégager des ressources suffisantes pour tenir avec les organisations autochtones nationales et avec nos communautés partout au Canada des pourparlers significatifs sur les modifications législatives. Nous vous demandons instamment de faire en sorte que les commentaires recueillis soient pris en compte dans la rédaction des modifications en question. Il doit y avoir une analyse comparative entre les sexes des modifications proposées qui soit pertinente sur le plan culturel . Nous aimerions avoir une certaine assurance que cela sera fait.
Encore une fois, il faut se pencher sérieusement sur la question de la présomption en cas de paternité non déclarée, car nous voulons épargner tout préjudice supplémentaire aux femmes de nos communautés. Encore une fois, seules les femmes de nos communautés sont touchées et encore une fois, il y a un double préjudice. Je sais que la question n'est pas simple, elle rejoint l'essence de nos droits en tant que Premières nations, en tant que nations au sein de ce pays, le Canada. Nous sommes des nations et nous devrions avoir le droit d'exercer nos droits nationaux dans notre beau pays. C'est là tout ce que nous demandons.
Si nous pouvons exercer ce droit de décider qui sont nos citoyens, qui sont nos membres, le droit de parler notre langue, le droit de nous réclamer de notre propre histoire, le droit de pratiquer nos propres cérémonies, je crois que nous aurions fait un pas dans la bonne direction. Pour moi, c'est la seule voie que nous puissions emprunter.
:
D'accord. C'est maintenant inscrit au compte rendu.
Il serait temps de conclure. J'en reviendrai également au précédent rappel au Règlement mais, si vous le permettez, mesdames et messieurs, j'aimerais discuter de deux choses avec vous. Tout d'abord, en teminant, j'aimerais vous remercier, madame la présidente, de nous avoir présenté cet exposé aujourd'hui. Celui-ci tombait à point. Veuillez accepter nos meilleurs voeux de succès au cours des mois à venir, dans l'exercice de vos importantes fonctions.
Mesdames et messieurs, je fais un bref aparté pour vous parler de procédure. J'aimerais que vous preniez connaissance des documents qui vous ont été remis, après quoi nous tenterons de réserver quelques minutes à la fin de la prochaine heure pour passer au vote. Je vous soumets cette question maintenant parce que le comité de liaison pourrait se réunir dès cette semaine et qu'à défaut d'adopter aujourd'hui un budget de voyage provisoire, nous ne pourrons le faire qu'après le congé. Voilà pourquoi je vous demande de prendre connaissance dès aujourd'hui des documents. Bien entendu, vous aurez remarqué que rien n'était insctrit aux travaux du comité dans l'ordre du jour, alors je vous demande votre bénédiction.
Enfin, mesdames et messieurs, pour ce qui est du recours de M. Duncan au Règlement, les comités n'ont pas l'autorité ni le pouvoir de prendre des mesures disciplinaires à l'égard de membres particuliers qui utilisent un langage non parlementaire, si tel est bien l'objet du recours de tout à l'heure. Par contre, j'encouragerais tous les membres, que leurs micros soient ouverts ou non, à se laisser guider par l'esprit du Règlement pour ce qui est du langage à utiliser en séance de comité. Il s'agit d'un point important à ne pas négliger, d'une marque de respect et de civisme pendant les délibérations. Cela n'empêche en rien le maniement des propos, mais c'est un principe que je vous demanderais de respecter. Notre seul pouvoir d'intervention, si certains membres persistaient à utiliser un tel langage, serait de ne pas leur reconnaître de droit de parole une fois leur tour venu. Seule la Chambre peut prendre des mesures disciplinaires à cet égard, si le comité en fait la demande.
Je tenais donc à apporter ces précisions afin que tous comprennent bien les implications du recours au Règlement; les autres commentaires ont maintenant été ajoutés au compte rendu.
Je crois avoir vu quelques mains levées.
[Français]
Monsieur Lemay.
:
Bonjour, monsieur le président Stanton, membres du comité permanent et autres dirigeants d'organisations nationales autochtones. Je suis honorée d'être des vôtres aujourd'hui en ce territoire traditionnel et non cédé du peuple algonquin, pour m'adresser au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.
Je suis une Indienne d'appartenance Mi'kmaq originaire de Geary, au Nouveau-Brunswick. J'ai vécu hors réserve toute ma vie et j'occupais anciennement le poste de chef et présidente du New Brunswick Aboriginal Peoples Council.
Le 12 septembre dernier, j'ai été élue au poste de chef national du Congrès des peuples autochtones. Nous représentons les droits et les intérêts des Indiens inscrits et non inscrits vivant hors des réserves et ceux du peuple métis.
J'aimerais d'abord souligner le caractère historique de cette journée, où deux des trois dirigeants autochtones ici présents sont des femmes. Cela témoigne de manière très éloquente façons de faire autochtones. Historiquement parlant, la culture Mi'kmaq en est une matrilinéaire, dirigée par des femmes.
Emma LaRocque, érudite autochtone réputée, a dit que la colonisation avait eu des effets dévastateurs sur tous les peuples autochtones, mais peut-être encore davantage sur les femmes autochtones. La Loi sur les Indiens continue d'être discriminatoire à l'endroit des femmes autochtones, mais grâce aux courageux efforts de personnes comme Sharon McIvor et Sandra Lovelace, nous en sommes à démanteler cette loi, petit à petit. Nous n'avons jamais accepté les diktats de la Loi sur les Indiens et avons continué de défendre nos intérêts et de vivre dans nos territoires traditionnels.
En vertu de cette loi odieuse, nous devons renoncer à des droits acquis à la naissance et sommes traités comme des citoyens de deuxième ordre. Je suis une Indienne inscrite, au sens du paragraphe 6(2). En vertu de la loi, mon fils n'est pas admissible au statut d'Indien. Nous sommes catégorisés comme du bétail. Il s'agit de discrimination pure et simple. La priorité centrale du congrès est de lutter contre ce traitement inhumain et cette idéologie coloniale.
Le problème fondamental auquel nous devons faire face est le refus du gouvernement fédéral de reconnaître sa compétence à l'égard des Métis et des Indiens non inscrits en vertu du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867. La Commission royale sur les peuples autochtones a déclaré que ce refus était au coeur de la discrimination pratiquée par le gouvernement fédéral. Nous sommes d'avis que ce refus de reconnaître est mal fondé en droit et cherchons à obtenir une déclaration judiciaire sur cette question. Une telle déclaration ferait en sorte d'éliminer une des principales entraves aux négociations dans divers dossiers qui se rapportent aux droits et aux intérêts des Métis et des Indiens non inscrits.
Le gouvernement fédéral a refusé ou omis de négocier de bonne foi avec nous. En raison de la prise de position juridique du gouvernement, les Métis et les Indiens non inscrits ont fait l'objet de discrimination du point de vue des soins de santé, de l'éducation et d'autre part, et n'ont pas eu la possibilité de négocier ou de conclure de traités liés aux droits inaliénables des Autochtones ou d'autres types d'accords. Nos priorités englobent la santé, l'éducation, le développement économique, le logement et les sans-abri.
Il est difficile de parler en 10 minutes de tous ces enjeux. De nombreux autres points pourraient être ajoutés à l'ordre du jour, dont certains propres aux Autochtones et d'autres qui concernent l'ensemble des Canadiens. Les questions liées aux anciens combattants autochtones, aux droits matrimoniaux, à l'environnement et à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones revêtent toutes beaucoup d'importance aux yeux du CPA.
Tous les membres de ce comité de la Chambre des communes sont au courant de l'état de santé des peuples autochtones, qui sont beaucoup plus mal en point que les Canadiens dans l'ensemble. Prenez n'importe quel problème de santé et vous constaterez probablement que sa prévalence dans nos collectivités est beaucoup plus élevée, qu'il s'agisse de diabète de type 2, de maladies cardiaques, d'abus de drogues et d'alcool ou du syndrome d'alcoolisation foetale. Ce sont tous d'importants problèmes de santé présents dans nos collectivités.
La priorité clé du CPA est de travailler avec les gouvernements fédéral et provinciaux en vue de résoudre des questions de compétence complexes qui ont une incidence sur la qualité des soins de santé offerts. Nous voulons nous assurer que les gens de nos collectivités bénéficient du même accès et du même soutien que tous les autres Canadiens, qui tiennent ces choses pour acquises.
La pandémie de grippe H1N1 nous préoccupe grandement. Elle représente l'un des enjeux les plus pressants des Autochtones en matière de santé et met en évidence le vulnérabilité de nos collectivités.
Soyons clairs à propos de la santé: le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux doivent changer leurs politiques en matière de santé, notamment en ce qui a trait aux virus à l'origine de pandémies. Les gouvernements doivent coordonner leurs activités avec toutes les organisations nationales autochtones pour accroître leur niveau de préparation à l'égard de la pandémie de grippe actuelle et de toutes les autres situations susceptibles de menacer notre santé.
Notre principale préoccupation, notre priorité centrale, c'est l'état de santé des gens de nos collectivités et l'important écart à combler par rapport à l'ensemble de la population. Nous devons nous doter de politiques intelligentes en matière de santé, de manière à aplanir ces disparités. Les gouvernements doivent nous inclure dans leurs démarches. Nous devons avoir la possibilité de participer et appliquer un processus intégré et transparent grâce auquel nous pourrons en arriver à des solutions.
J'ai récemment écrit à la ministre Aglukkak à propos de l'importance de renouveler l'Initiative sur le diabète chez les Autochtones. Le diabète de type 2 est un véritable fléau dans nos collectivités. Le Dr Stewart Harris, une des autorités canadiennes en la matière, a rapporté que le taux de prévalence de cette maladie est monté en flèche. Si l'Initiative sur le diabète chez les Autochtones n'est pas renouvelée à temps, les Métis et les Indiens vivant hors réserves perdront leur réseau de coordonnateurs de première ligne en matière de prévention et d'éducation. Tous nos gains des dix dernières années seront perdus et l'épidémie continuera de progresser dans nos collectivités.
L'éducation de nos enfants et de nos jeunes est une priorité de premier plan en matière de politique publique. Les jeunes autochtones affichent les plus hauts taux de décrochage, les plus faibles niveaux d'alphabétisme et les plus faibles niveaux de développement des compétences. L'éducation améliore nos vies. Elle est inhérente à la réduction de la pauvreté dans nos collectivités. Nous voyons comme prioritaires les besoins des enfants et des jeunes autochtones, de la période prénatale jusqu'à l'université. Les autorités fédérales, provinciales et territoriales doivent s'engager clairement à améliorer l'expérience scolaire des jeunes autochtones et faire de leur éducation une priorité. Pour cela, il faudra changer fondamentalement la façon dont fonctionnent les systèmes d'éducation; nous nous devons d'être consultés en ce qui concerne l'élaboration des politiques, des outils et des règles et la mise en oeuvre des structures.
En 1996, la Commission royale sur les peuples autochtones a recommandé que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux travaillent ensemble pour soutenir l'éducation de tous les jeunes enfants autochtones, peu importe où ils vivent. Nous voyons l'éducation des jeunes enfants comme un programme essentiel grâce auquel nos enfants partiront leur vie du bon pied, puisque tout y est axé sur la stimulation des enfants et leur développement cognitif. De la maternelle à la douzième année, l'objectif devrait être de diplômer des élèves solidement éduqués, et ce dans le respect de la culture, des valeurs et de l'histoire des Autochtones.
En février dernier, au sommet autochtone sur l'éducation, nous avons été encouragés par les discussions au sujet de la consolidation des acquis autochtones en matière d'éducation. Les ministres provinciaux et territoriaux de l'Éducation ont reconnu que d'ici 15 ans, les élèves autochtones représenteront plus de 25 pour cent des élèves du primaire dans certaines provinces et certains territoires. Les familles autochtones qui vivent en milieu urbain sont en position particulièrement difficile étant donné qu'elles y perdent l'influence culturelle et le soutien des leurs.
Les Métis et les Indiens non inscrits sont les Autochtones qu'on trouve en plus grand nombre en milieu urbain. Ces derniers n'ont pas accès aux services de soutien à l'éducation postsecondaire qui sont offerts dans les réserves et aux Inuits. Cet obstacle majeur entrave l'accès des Autochtones aux études postsecondaires. Le CPA recommande l'expansion des programmes fédéraux d'éducation postsecondaire, de manière à inclure les Indiens inscrits et non inscrits et les Métis. Nous cherchons également à obtenir des ressources pour verser des bourses à nos élèves et ainsi les encourager à poursuivre des études supérieures et à perfectionner leurs compétences.
Notre troisième priorité est le développement économique. Le CPA est déterminé à travailler avec les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux afin de mettre en place des programmes et des services qui appuient pleinement notre participation à l'économie canadienne. Nous voulons avoir la possibilité de participer à des programmes de développement économique au lieu d'essuyer des refus. Il est essentiel pour nous d'avoir accès à ces programmes, y compris aux initiatives régionales de développement économique, et d'avoir la possibilité de mettre en oeuvre un réseau d'agents autochtones du développement économique.
La priorité du CPA en matière de développement économique repose essentiellement sur la stratégie de développement des ressources humaines autochtones, une assise fondamentale qui est appelée à disparaître parce que le programme vient à échéance à la fin mars 2010. Cette stratégie du CPA doit être maintenue, car sans cette plateforme organisationnelle, il sera impossible de coordonner les nouvelles initiatives.
Les initiatives de développement économique doivent être axées sur les besoins des femmes autochtones. Compte tenu de leur manque d'éducation, de compétences professionnelles et de formation, leur capacité à subvenir aux besoins de leur famille et à leurs propres besoins est limitée. Toute entente relative au marché du travail doit tenir compte des coûts associés à la garde d'un enfant.
Le Congrès des Peuples autochtones défend depuis longtemps les droits des Autochtones qui souffrent d'un handicap. Il est impératif que des programmes d'emploi et de formation soient mis sur pied pour ces gens, qui sont les pauvres les plus défavorisés et les plus laissés pour compte des pauvres qui habitent nos collectivités.
Une dernière priorité: le logement et l'itinérance. La crise du logement à laquelle fait face notre collectivité nécessite la création d'une stratégie et d'un plan d'action national concernant le logement des Autochtones. Notre organisation a été l'instigatrice du Rural and Native Housing Program, qui a donné lieu à l'établissement de mesures visant à répondre aux besoins de nos comtés en matière de logement et de refuge, qui avaient depuis longtemps été négligés, et à l'apport de milliers de logements aux quatre coins du Canada, dont un grand nombre doivent maintenant être remplacés ou réparés. Le Congrès des Peuples autochtones vient tout juste de renouveler un protocole d'entente avec l'Association nationale d'habitation autochtone, qui défend depuis 1994 les intérêts des Métis qui habitent à l'extérieur des réserves.
Nous appuyons entièrement la demande de l'Association nationale d'habitation autochtone concernant la mise sur pied d'une stratégie nationale en matière de logement. C'est incroyable qu'aucune stratégie de ce genre n'existe au Canada. Il existe un grand nombre de rapports et d'études sur la crise du logement qui touche les Autochtones, et de plus en plus d'éléments indiquent que la situation en matière de logement dans laquelle se trouvent les Autochtones qui habitent en ville se détériore. En 1998, le Caucus des maires des grandes villes a déclaré que l'itinérance était un désastre national. Il ne devrait pas y avoir de sans-abri dans un pays riche comme le Canada. C'est une honte pour tous les Canadiens. C'est un scandale que la Colombie-Britannique mette tout en oeuvre pour chasser les sans-abri des rues pendant les Jeux olympiques. L'itinérance, qui est attribuable à la pauvreté, est une épidémie qui frappe les villes, et les Autochtones représentent la majorité des gens touchés, ce qui illustre avec éloquence à quoi ressemble le déménagement de nos confrères dans les centres urbains.
La population canadienne imagine encore que les Autochtones sont des Indiens qui habitent sur une réserve. Mais en réalité, 80 p. 100 de la population de descendance autochtone habite à l'extérieur des réserves, dont 60 p. 100 dans des régions urbaines. Il s'agit là du principal facteur démographique dont devraient tenir compte les décideurs, mais c'est à cet égard qu'on agit le moins.
[Le témoin parle dans sa langue maternelle.]
Merci.