:
Premièrement, je vous remercie tous de m'avoir fait confiance pour que je continue à présider le comité pendant une autre session. Je félicite les deux vice-présidents du comité, Jean et Todd.
D'accord. Chers collègues, la situation est un peu délicate parce que votre sous-comité s'est réuni, sous sa forme antérieure, il y a deux semaines, le 15 septembre, pour examiner les travaux qu'entreprendrait le comité au cours de la session d'automne. Dans ce contexte, nous aimerions, si le comité l'accepte, recevoir le rapport du sous-comité sur notre programme de travail pour cet automne.
Je rappelle aux membres du comité que nous siégeons encore publiquement. Si le comité le souhaite, nous pouvons siéger à huis clos pour cette discussion. À mon avis, il n'y a rien dans ce programme qui l'exige. Il faudrait quitter la salle, et le reste. Donc, si le comité l'accepte, nous allons siéger en public pour examiner les travaux du comité. Vous êtes d'accord? Très bien.
Le rapport a été distribué et la principale question dont a discuté notre sous-comité était notre programme de travail pour la session d'automne.
Vous constaterez que nous proposons dans le rapport de tenir quatre séances/réunions d'information sur quatre sujets différents, que vous avez sous les yeux, de façon à entendre les deux nouveaux chefs élus de l'APN et de l'AFAC. Je ne devrais pas parler de deux parce qu'il y a trois organisations, qui viennent chacune d'élire un nouveau président: l'APN, l'Association des femmes autochtones du Canada et le Congrès des Peuples Autochtones. Cela se ferait en une séance.
La deuxième serait une séance d'information sur la question des services à l'enfance et l'aide sociale et, en particulier, le plan d'action qui a fait l'objet de commentaires et la réponse qu'a fournie le gouvernement au comité des comptes publics.
Troisièmement, c'est un aspect qui a été mis de l'avant par M. Bélanger et qui concerne l'honneur de la Couronne, ce qui donnerait lieu à une séance d'information. Je pourrais vous fournir le moment venu des mises à jour sur cette question.
Il y aura ensuite une séance d'information sur la question découlant de la contestation judiciaire de McIvor au sujet du projet de loi C-31 et des questions que pose le statut d'Indien.
C'étaient là les quatre sujets. Après ces quatre séances, nous aurions des séances d'information et nous pourrions alors procéder à une étude plus approfondie du développement économique du Nord, et plus particulièrement entendre des témoins sur les difficultés auxquelles notre pays fait face, d'après eux, pour ce qui est des obstacles au développement économique du Nord, dans le but de formuler une série de recommandations touchant les politiques et les programmes que le gouvernement pourrait adopter dans le but d'améliorer la situation et de faire avancer ces questions en ce qui concerne le Grand Nord. Cette étude pourrait démarrer une fois terminées les quatre premières séances.
La seule exception touche la question de l'honneur de la Couronne pour laquelle nous avions demandé à un auteur connu, Timothy McCabe, de nous en parler. Il ne pouvait nous rencontrer aux dates que nous avions proposées mais nous aimerions le convoquer plus tard, j'espère au milieu ou à la fin novembre, à un moment qui lui convient.
Monsieur Bélanger.
Lorsque nous reviendrons le premier mardi après l'Action de grâces, le 20 octobre, nous parlerons du plan d'action pour les services à l'enfance et à la famille et nous entendrons encore une fois des représentants du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Je pense même que les documents d'information concernant ce sujet ont peut-être déjà été distribués. Cette réunion aura lieu le mardi 20 octobre.
À partir du jeudi 22 octobre, nous étudierons le développement économique du Nord. J'aimerais également vous signaler que pour cette étude, nous vous avons distribué un document qui propose des catégories très larges de témoins et nous aimerions recevoir vos conseils et vos suggestions au sujet des témoins que nous pourrions convoquer.
Nous allons également prévoir un moment pour examiner le volet déplacements pour cette étude. Il y aura un voyage, de quatre jours sans doute, pour le volet Whitehorse et Yellowknife et un deuxième déplacement à Iqaluit. Ce voyage se fera probablement en novembre. Vous savez que tout cela doit passer par le comité de liaison. Avant de le faire, nous allons examiner cette question ensemble et présenter un projet de dépenses.
M. Bagnell et ensuite, M. Lemay.
Monsieur Bagnell.
:
Mary vient de m'informer que vous allez recevoir un document qui décrit les diverses catégories de témoins et contient des exemples d'organisations qui entrent dans ces catégories. N'oublions pas que 80 p. 100 de cette étude va s'effectuer à Ottawa par l'audition de témoins. C'est une étude qui prendra probablement plus de 20 séances de notre calendrier, de sorte que la plus grande partie s'effectuera à Ottawa. Lorsque nous serons dans le Nord, nous donnerons la préférence aux organisations pour lesquelles il est difficile ou impossible de venir ici.
Je signale aux membres du comité que, pour tirer le meilleur parti possible du temps que nous passerons dans le Nord, nous aurons un horaire très chargé et nos journées seront très longues parce que nous rencontrerons beaucoup de gens.
Y a-t-il d'autres éléments à discuter au sujet de l'étude sur le développement économique du Nord?
Nous allons entendre aujourd'hui des témoins qui vont nous parler de l'arrêt McIvor et des questions qui touchent le statut des Indiens. Si le comité est d'accord, nous allons commencer notre séance d'information avec les représentants du ministère.
Nous allons entendre Caroline Davis, sous-ministre adjointe, secteur de la résolution et des affaires individuelles. Nous allons également entendre M. Martin Reiher, avocat conseil, Affaires indiennes et Développement du Nord Canada, du ministère de la Justice sur cette même question.
Bienvenue à tous les deux et je vous remercie d'avoir fait preuve de souplesse parce que notre horaire d'aujourd'hui n'était pas très fixé. Je suis heureux que vous ayez pris le temps de vous joindre à nous. Comme vous le savez déjà sans doute, nous allons commencer par entendre un bref exposé d'une dizaine de minutes et passerons ensuite aux questions des membres du comité.
Nous sommes en train de distribuer à l'heure actuelle deux mémoires. Vous avez également reçu à l'avance des documents concernant la décision de la Cour suprême ainsi qu'un document de discussion sur l'affaire McIvor et les questions concernant le projet de loi .
[Français]
Monsieur Lévesque.
:
Merci de nous avoir invités aujourd'hui.
Il y a de cela plusieurs mois, c'est du moins ce qu'il me semble maintenant, le 16 juin, j'ai eu la chance, avec ma collègue Pamela McCurry, sous-ministre adjointe principale du secteur des politiques et de l'orientation stratégique du MAINC, de présenter un exposé aux membres du Parlement au sujet de la décision Mclvor et de son importance pour l'inscription des Indiens. Je suis ici aujourd'hui pour vous mettre au courant des mesures prises par le gouvernement du Canada depuis le mois de juin à la suite de l'arrêt Mclvor.
Je suis accompagnée par Martin Reiher, avocat-conseil du ministère de la Justice. Il travaille au sein du portefeuille des affaires autochtones et connaît bien l'affaire Mclvor. Il présentera également certaines observations pour faire le point sur les questions touchant l'affaire McIvor.
Avant d'aborder plus en détail les mesures prises par le gouvernement, j'aimerais décrire brièvement aux membres du comité le contexte dans lequel s'inscrit l'affaire Mclvor, le moment où la décision a été rendue, notamment, aspects qui me semblent être utiles pour notre discussion.
[Français]
Le 6 avril 2009, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a déterminé, dans l'affaire McIvor, que deux paragraphes des dispositions de la Loi sur les Indiens portant sur l'inscription étaient invalides en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. Les appelants, Sharon McIvor et son fils, demandaient le même traitement à l'égard de l'inscription que celui accordé à son frère et à ses enfants en vertu de la Loi sur les Indiens.
Le jugement de la cour portait sur certains droits à l'inscription, mais pas sur l'ensemble de ces droits. Elle n'a pas abordé le droit d'appartenance ni aucun autre aspect de droit sur les Indiens, par exemple les terres de réserve ou l'exercice des pouvoirs. La cour n'a ordonné aucun redressement en particulier, mais pour donner au Parlement le temps d'en proposer un, elle a suspendu l'effet de son jugement pour 12 mois.
Le redressement requis pour respecter le jugement de la cour et pour rendre la Loi sur les Indiens conforme à la Charte exigera une modification législative. Nous devons nous assurer que l'inégalité reconnue par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique soit corrigée et que ceux qui ont perdu le statut d'Indien du fait d'un mariage contracté avant 1985, de même que leurs descendants, soient traités équitablement.
Nous avons seulement jusqu'au 6 avril 2010 pour apporter une modification législative à la Loi sur les Indiens avant la fin de la période en suspension. Si aucune modification n'a été apportée à la date d'échéance, le processus d'inscription sera mis en doute en Colombie-Britannique. À notre avis, bien que la décision ne s'applique qu'à la Colombie-Britannique, nous devons modifier la Loi sur les Indiens parce qu'il s'agit d'une loi fédérale et nous désirons que les mêmes règles s'appliquent à l'échelle du pays.
[Traduction]
Comme l'a annoncé le le 2 juin dernier, le gouvernement du Canada a accepté le jugement de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. Il a été déterminé que pour le gouvernement, la meilleure façon de se conformer au jugement de la Cour d'appel et d'éviter aussi la création d'un vide législatif en C.-B., ce qui se produirait si rien n'était fait d'ici le 6 avril prochain, serait d'introduire une modification de portée relativement limitée à la Loi sur les Indiens qui corrigerait les violations de la Charte qu'a mentionnées la Cour d'appel.
Nous sommes conscients du fait que la question de l'inscription et de l'appartenance touche un certain nombre de sujets plus vastes et que de nombreux Autochtones et intervenants estiment que la Loi sur les Indiens est désuète et qu'elle doit être entièrement remaniée. Nous savons cependant qu'il faudra beaucoup de temps et de longues discussions avec les personnes qui seront les plus touchées par un tel projet pour en arriver à un consensus. C'est pourquoi nous avons décidé de nous concentrer pour l'instant sur la mise en oeuvre de la décision qu'a prononcée la cour dans l'affaire Mclvor et d'apporter une modification législative à la Loi sur les Indiens qui soit conforme à ce jugement.
Le 24 août, le a officiellement annoncé que le gouvernement allait élaborer une modification législative, et le même jour, Affaires indiennes et du Nord Canada a lancé un processus d'engagement avec la publication d'un document de discussion publique sur le site Internet du ministère. Les gens sont invités à lire le document de discussion pour mieux connaître le plan d'action du gouvernement et à transmettre ensuite leurs commentaires au ministère. Une adresse de courrier électronique spéciale a été créée pour recevoir les commentaires et, bien sûr, les gens peuvent également écrire au ministère par courrier ordinaire.
Le gouvernement organise une série de séances régionales d'engagement auprès de diverses organisations des premières nations et d'autres groupes autochtones pour leur transmettre directement l'information concernant le jugement Mclvor et solliciter leurs commentaires sur l'approche législative proposée par le gouvernement. Jusqu'ici, il y a eu quelques séances et nous allons veiller à ce qu'il y ait au moins une de ces séances dans chacune des régions géographiques du Canada, pour un total d'environ 15 séances. Des exposés sur les aspects techniques ont aussi été donnés aux organisations autochtones nationales.
Le processus d'engagement prendra fin le 13 novembre 2009, pour nous donner le temps d'analyser les observations reçues et de tenter de les intégrer à nos travaux avant qu'un projet de loi modifiant la Loi sur les Indiens soit déposé au Parlement.
Comme vous le savez fort bien — et j'espère que vous ne penserez pas que je vous manque de respect — le processus de modification législative est parfois très long et imprévisible. Si nous voulons respecter la date limite du 6 avril 2010, la date butoir pour apporter des changements législatifs, il nous faudra prévoir du temps pour l'examen parlementaire et l'adoption du projet de loi et également, pour que nos processus internes d'approbation soient respectés avant le dépôt du projet de loi. Sur ce point, l'échéancier est très serré et j'espère que les intéressés comprendront que cela explique en partie pourquoi le processus d'engagement ne sera pas aussi long que certains le souhaiteraient.
[Français]
J'aimerais parler quelques instants des répercussions du jugement McIvor. La recherche démographique se poursuit pour déterminer combien de personnes pourraient désormais avoir le droit de s'inscrire par suite de cette décision, et alors que les premières indications se situaient entre 20 000 et 40 000 personnes, nous sommes maintenant d'avis que le total pourrait avoisiner les 40 000 personnes.
Bien sûr, des répercussions budgétaires seront associées à ces nouvelles inscriptions potentielles, principalement en ce qui a trait aux services médicaux et à l'aide financière à l'éducation postsecondaire.
Pour terminer ma présentation, j'aimerais ajouter que si tout va comme prévu, le gouvernement proposera un projet de loi bien avant avril prochain afin d'éviter un vide législatif en Colombie-Britannique.
J'invite maintenant mon collègue Martin Reiher, du ministère de la Justice, à prononcer quelques mots au sujet du jugement de la Cour d'appel.
Merci beaucoup.
:
Merci, monsieur le président.
Je comprends que le comité a exprimé le désir d'avoir un résumé de la décision McIvor de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique et de ses impacts.
[Traduction]
Au cours de mes brèves remarques, je vais vous résumer l'arrêt de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique et vous dirai quelques mots au sujet des répercussions de cette décision; bien entendu, je serais heureux de répondre ensuite à vos questions.
Quelle était la demande? Mme McIvor soutient — et continue de soutenir devant la Cour suprême, parce qu'elle a demandé l'autorisation d'interjeter appel — qu'elle ne peut pas transmettre le statut d'Indien à ses petits-enfants de la même façon que son frère le peut. M. Grismer, son fils, affirme qu'il ne peut pas transmettre le statut d'Indien à ses enfants de la même façon que peut le faire son cousin.
Pour faciliter mon exposé, j'ai préparé un petit tableau qui vient d'être distribué. J'invite les membres du comité à examiner ce tableau.
:
Sur le côté gauche, vous pouvez voir la situation des plaignants telle qu'elle était avant et après l'adoption du projet de loi C-31, qui est le nom sous lequel sont désignés les amendements qui ont été adoptés en 1985 au sujet de l'inscription des Indiens et de l'appartenance à une bande. Du côté droit du tableau, vous voyez la situation d'un groupe de comparaison aux fins de l'analyse fondée sur l'article 15.
La Cour d'appel de la Colombie-Britannique a procédé à l'analyse prévue de l'article 15 en acceptant le groupe de comparaison proposé par les plaignants et elle a comparé la capacité de M. Grismer de transmettre le statut d'Indien à ses enfants avec celle des personnes nées avant le 17 avril 1985; la capacité des Indiens qui ont épousé des femmes non indiennes. Si vous regardez le tableau — cela se trouve dans la case du tableau située en bas à gauche — vous remarquerez qu'après le projet de loi C-31, étant donné que M. Grismer avait un parent qui était un Indien inscrit, il est lui-même inscrit aux termes du paragraphe 6(2) et les enfants qu'il a eus avec une femme non indienne n'ont pas droit à cette inscription. Par contre, son cousin, le fils du frère de Mme McIvor, avait le droit d'être inscrit avant 1985, et avait aussi le droit de l'être après le projet de loi C-31 aux termes de l'alinéa 6(1)a) et les enfants qu'il a eus avec une conjointe non indienne ont le droit d'être inscrits. La cour a donc conclu qu'il existait une différence entre la capacité de M. Grismer de transmettre son statut d'Indien à ses enfants et celle de son cousin.
Cette différence de traitement découle du sexe de Mme McIvor, qui est un des motifs énumérés à l'article 15 de la Charte et cette différence est considérée comme discriminatoire aux termes de la Charte parce que le projet de loi C-31 perpétue, selon la cour, des pratiques discriminatoires antérieures, même si c'est sur une petite échelle.
Comme vous le savez, lorsqu'une disposition législative va à l'encontre d'une disposition de la Charte, elle peut quand même être validée si elle se justifie dans une société libre et démocratique, aux termes de l'article premier de la Charte. La Cour suprême a élaboré un critère à quatre volets pour effectuer l'analyse aux termes de l'article premier qui exige que soient abordées quatre questions. La première de ces questions est de savoir si les objectifs du texte législatif répondent à une « préoccupation réelle et urgente ». La deuxième question consiste à déterminer s'il existe un lien rationnel entre le texte législatif et les objectifs. Troisièmement, est-ce que le texte constitue une atteinte minimale au droit en question? Enfin, l'effet préjudiciable de la violation de la Charte l'emporte-t-il sur les effets salutaires du texte en question?
Pour la première partie de ce critère, le gouvernement a présenté les cinq objectifs du projet de loi C-31: mettre un terme à la discrimination sexuelle, rétablir le statut de ceux qui l'avaient perdu en raison des dispositions antérieures qui étaient discriminatoires; le troisième principe, à savoir que personne ne devrait perdre ou obtenir le droit de s'inscrire comme Indien en raison d'un mariage; le quatrième, qu'il convient de préserver les droits acquis et cinquièmement, que les premières nations devraient avoir le droit d'établir leurs propres règles d'appartenance.
Parmi ces principes ou objectifs, la cour a conclu que l'objectif consistant à préserver les droits existants était particulièrement important dans cette affaire. Dans le cadre de son analyse, la cour a décidé que le projet de loi C-31 avait pour but d'établir un régime non discriminatoire fondé sur l'obligation d'avoir plus qu'un grand-parent indien pour obtenir le statut d'Indien. La cour a reconnu que ce but était valide et a examiné les dispositions du projet de loi C-31 par rapport à cet objectif.
La cour a conclu qu'il aurait été anormal de donner le statut d'Indien aux enfants de M. Grismer sous le nouveau régime, parce qu'il n'avait qu'un seul grand-parent indien. Par contre, la cour a reconnu que certains membres du groupe de comparaison avaient droit au statut d'Indien avec le nouveau régime même s'ils n'avaient qu'un seul grand-parent indien, à savoir ceux qui étaient touchés par la disposition mère et grand-mère avant 1985. Je reviendrai brièvement sur le critère mère et grand-mère dans un instant.
La cour a déclaré que cette anomalie aurait été justifiée par l'objectif réel et urgent consistant à préserver les droits existants si le projet de loi C-31 avait uniquement eu pour effet de préserver leurs droits antérieurs. De l'avis de la cour, le projet de loi C-31 ne résiste pas à l'examen de l'atteinte minimale de l'analyse de l'article premier: au lieu de préserver le droit des personnes touchées par la disposition mère et grand-mère, le projet de loi a amélioré leur situation.
Avant le projet de loi C-31 adopté en 1985, le petit-fils aurait perdu le statut d'Indien à l'âge de 21 ans à cause de la disposition mère et grand-mère. La règle mère et grand-mère a été adoptée en 1951. Elle précisait que lorsqu'un enfant avait un père inuit mais que sa mère et sa grand-mère avaient obtenu le statut d'Indien par mariage et non par naissance, l'enfant perdait ce statut à l'âge de 21 ans. C'était la situation qui existait avant 1985.
Après le projet de loi C-31, les enfants qui avaient perdu leur statut avec l'ancien système avait le droit de le récupérer aux termes des alinéas 6(1)c), 6(1)f) ou du paragraphe 6(2) de la Loi sur les Indiens, selon que leur mère était ou n'était pas une Indienne. De toute façon, le petit-fils a le droit d'être inscrit.
Par contre, les enfants de Jacob Grismer n'ont pas le droit d'être inscrits. Pour ce qui est de la transmission du statut, le projet de loi C-31 a encore réduit les droits que possédait M. Grismer et son groupe.
Pour citer la cour au paragraphe 140:
Si le projet de loi de 1985 avait uniquement préservé le droit de posséder le statut d'Indien jusqu'à l'âge de 21 ans pour les enfants des personnes faisant partie du groupe de comparaison, le gouvernement aurait pu invoquer le fait que le projet préservait les droits acquis conformément à un objectif réel et urgent au sens de l'art. 1. Une telle mesure législative aurait constitué une atteinte minimale au droit à l'égalité de M. Grismer. En fait, le projet de loi de 1985 semble avoir accordé un avantage supplémentaire à un groupe qui était déjà avantagé...
Pour terminer mon résumé, la cour a déclaré que les dispositions de la Loi sur les Indiens étaient ni sexistes ni discriminatoires pour l'avenir mais que les règles de transition entre l'ancien et le nouveau régime avaient introduit une inégalité. Le projet de loi C-31 accordait le droit au statut d'Indien aux personnes touchées par la disposition mère et grand-mère — les personnes qui avaient un seul parent indien de naissance avant 1985 et qui avaient un seul grand-parent indien de naissance et uniquement lorsque ce grand-parent était un homme. L'amendement proposé remédie à cette inégalité. Il a pour but d'accorder le droit d'inscription à toutes les personnes qui se trouvent dans la même situation, mais dont le grand-parent est une femme.
Je veux dire quelques mots au sujet des répercussions de la décision. La Cour d'appel a déclaré que les alinéas 6(1)a) et 6(1)c) n'étaient pas valides et avait suspendu sa déclaration pour une durée d'un an. Cela veut dire que le statu quo est maintenu jusqu'au 6 avril 2010. L'article 6 demeure en vigueur tel quel. À la fin de la période de suspension de l'effet du jugement, si aucune modification n'a été adoptée, les alinéas 6(1)a) et 6(1)c) seront pratiquement abrogés, comme s'ils n'avaient jamais existé en Colombie-Britannique. Cela empêcherait le registraire des Indiens d'utiliser ces dispositions pour inscrire des résidents de la Colombie-Britannique ou des personnes qui ont des liens avec des bandes indiennes traditionnelles. Il est toutefois important de noter que toute personne inscrite avant le 6 avril 2010 demeurera inscrite et aura droit à tous les avantages associés à l'inscription, à moins que la personne ne soit radiée du registre pour d'autres motifs.
Voilà qui termine mes remarques sur l'arrêt de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique et ses répercussions; je serais heureux de répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous les deux de nous avoir présenté des exposés.
Je dois dire que je ne sais pas très bien ce que tout cela veut dire en pratique. Je crois qu'essentiellement, la Cour d'appel de la C.-B. a annulé un certain nombre d'articles de la Loi sur les Indiens. Cela va permettre d'inscrire un plus grand nombre de personnes en attendant le nouveau projet de loi et cela pourrait toucher de 20 000 à 40 000 personnes, d'après les prévisions du gouvernement.
Je ne suis pas sûr que ce projet de loi réglera tous les problèmes. Il me semble que nous avons adopté le projet de loi C-31 et qu'il est contesté; nous allons avoir un autre projet de loi et il sera peut-être contesté — voilà ce qui se passe.
J'aimerais vous poser une question au sujet du processus. Je comprends que vous devez respecter un échéancier parce que la cour a ordonné que certaines choses soient faites avant une certaine date, qui est le 6 avril de l'année prochaine.
Quelle a été la réponse des intéressés au processus d'engagement? Vous avez utilisé le mot « engagement » et non pas « consultation ». J'imagine que ces deux mots ont des connotations différentes pour le gouvernement. Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de parler d'« engagement » et non de « consultation »? Pensez-vous que le gouvernement a l'obligation de consulter les intéressés?
Est-ce que cela soulève des inquiétudes dans les communautés autochtones, en particulier chez ceux qui sont le plus directement touchés? Quelles ont été jusqu'ici les réactions au processus d'engagement? Si vous voulez mettre un terme à ce processus d'ici novembre et en même temps tenir 15 réunions régionales, cela vous donne environ un mois pour tout faire, pour prendre note des commentaires et les transmettre ici. Compte tenu de la rédaction du projet de loi, parce que je suis sûr qu'il y a déjà quelqu'un qui travaille sur le projet de loi pendant que tout ceci se fait — il ne semble pas que l'un va se faire après l'autre — dans quelle mesure les gens peuvent-ils avoir confiance dans ce processus particulier?
:
Je pourrais peut-être vous répondre sur un certain nombre de points.
Pour ce qui est de l'engagement, vous avez tout à fait raison, nous utilisons le mot « engagement » et non pas « consultation ». Le mot « consultation » est relié à l'idée que la mesure proposée risque de toucher les droits ancestraux ou le titre aborigène. Les dispositions de la Loi sur les Indiens en matière d'inscription ne touchent pas ce domaine. Nous avons expliqué à tout le monde qu'il s'agissait de séances d'engagement. De la même façon, les personnes que nous avons rencontrées ont déclaré qu'elles souhaitaient qu'il soit bien noté qu'elles n'avaient pas été consultées. Nous avons pris bien soin d'être très clair à ce sujet.
Pour ce qui est des résultats préliminaires, je vais commencer par le système des courriels; nous avons reçu jusqu'ici environ 25 courriels qui étaient très favorables au document de discussion et à l'approche que le gouvernement souhaite adopter pour mettre fin à cette discrimination.
Pour ce qui est des séances que nous avons eues jusqu'ici dans les différentes régions du Canada, un certain nombre ont déjà été tenues mais une date a été fixée pour les autres dans la région de l'Atlantique, au Québec, en Alberta, en Colombie-Britannique et dans les Territoires du Nord-Ouest. Nous nous sommes donnés comme objectif de poursuivre dans cette direction et de rencontrer les groupes qui souhaitent nous parler. Je crois avoir mentionné dans mes remarques d'ouverture que nous avons également veillé à ce que les organisations autochtones nationales aient la possibilité d'étudier le document de discussion avec nous.
Pour ce qui est du genre de discussions qui ont eu lieu, les groupes autochtones ont tenu à souligner que ce projet de loi ne devait pas toucher les droits issus de traités, les droits ancestraux ni aucun titre et que les modifications de la loi ne réglaient pas les problèmes plus vastes que pose la Loi sur les Indiens.
Je vais vous en donner un exemple. Il existe à l'heure actuelle une règle qui veut que si deux générations épousent des non-Indiens, la génération suivante n'a pas le statut d'Indien. Cela touche les collectivités dans lesquelles un fort pourcentage des mariages concernent des non-Indiens, principalement celles qui sont situées près des villes; leurs membres quittent la réserve, vont travailler en ville et forment des unions avec des personnes étrangères à la collectivité.
On a également déclaré que ces modifications ne touchaient pas les dispositions de la Loi sur les Indiens qui donnent aux premières nations le pouvoir de définir leurs propres critères d'appartenance. La Loi sur les Indiens accorde certains avantages. J'ai mentionné les deux principaux à savoir les études postsecondaires et les prestations de santé destinées aux premières nations et aux Inuits. J'estime que l'appartenance et le fait de faire vraiment partie d'une collectivité est une notion tout à fait distincte des relations financières qui sont prévues par la Loi sur les Indiens. Un grand nombre de premières nations nous ont fait savoir qu'elles préféraient avoir le pouvoir de fixer leurs propres règles en matière d'appartenance.
Le gouvernement savait bien entendu que cela risquait fort de se produire. Nous n'avons pas encore pris des mesures concrètes pour régler ces questions plus vastes mais il n'est absolument pas exclu que nous le fassions à l'avenir. Nous aimerions déposer cette modification et souhaitons que le Parlement l'examine soigneusement de façon à éviter qu'il y ait un vide législatif et pour que les décisions prises en Colombie-Britannique en matière d'inscription après la date butoir du 6 avril soient vraiment valides.
J'espère que cela répond aux deux questions que vous avez posées.
:
Vous venez de prononcer les mots les plus importants de votre discours, c'est-à-dire « on a cristallisé ». Je ne sais pas comment c'est traduit en anglais, mais c'est ce que la Cour suprême a dit dans le cadre de plusieurs décisions. Lorsqu'on cristallise, c'est comme si on arrêtait le temps à un moment précis.
Je vais maintenant faire un grand saut dans l'Histoire. En 1985, il y a le projet de loi C-31, et ainsi de suite.
Aujourd'hui, ce n'est vraiment pas clair pour moi. Vous voulez amender le paragraphe 6(2) pour — excusez l'expression — mettre un plaster sur un bobo qui risque de s'aggraver beaucoup. C'est la raison pour laquelle vous voulez inclure toutes les personnes qui sont dans la situation de l'enfant mentionné au point b. C'est extrêmement important, monsieur le président, permettez-moi de le lire:
b. dont l'enfant né de ce mariage a eu un enfant avec une personne non Indienne après le 4 septembre 1951 [...]
Si je comprends bien, ceux qui n'ont pas été « cristallisés » en 1951 pourraient être inclus aujourd'hui, à condition qu'ils soient nés après 1951.
:
C'est l'étape qui a précédé celle où nous nous trouvons aujourd'hui.
Le problème vient du fait que cette cour ne nous a pas donné le temps d'examiner les répercussions, à la différence de la situation actuelle, où nous disposons d'un an entre le moment où la décision a été rendue et le moment où elle entrera en vigueur. Le juge de première instance au niveau de la Cour suprême n'a pas agi de cette façon, ce qui nous aurait placés immédiatement dans une situation difficile.
Franchement, lorsque j'ai lu cette décision — et tout comme vous je ne suis pas avocate — j'ai trouvé qu'elle n'était pas très claire mais nous aurions dû veiller à ce que notre réponse corresponde exactement à la décision prononcée.
Il semble également que cette décision remontait plus loin dans le temps et ne se limitait pas, comme Martin l'a expliqué, aux mesures de transition entre 1951, l'ancienne loi, et la loi de 1985. Elle remontait en fait beaucoup plus loin et semblait indiquer que nous devrions inscrire les descendants de toutes les femmes qui avaient épousé des non-Indiens.
C'est la raison pour laquelle le gouvernement a pensé qu'il ne fallait pas qu'une décision judiciaire donnant un effet rétroactif à la Charte soit maintenue, étant donné que la transition qui s'est effectuée en 1985 était postérieure à l'entrée en vigueur de la charte. C'est pourquoi nous avons pensé que la décision qui a été rendue cette fois-ci était une décision administrative claire, appropriée et que nous pouvions la mettre en oeuvre.
:
Merci, monsieur le président.
Mes questions s'adresseront plus à M. Duncan qu'aux autres témoins.
Je veux m'assurer qu'il m'écoute.
Tout d'abord, peut-on connaître les intentions du gouvernement relativement au dépôt d'un projet de loi, quel qu'il soit, visant à se conformer à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique? Je ne m'attends pas à ce que M. Duncan ait la réponse tout de suite, mais je pense qu'il serait important que l'on sache, d'ici la prochaine réunion peut-être, quel est l'échéancier du gouvernement en ce qui a trait à la présentation d'un projet de loi.
Ensuite, quelles sont les juridictions où il y a d'autres appels ou d'autres causes semblables à celle-ci et qui pourraient mener à une décision semblable à celle de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique? À quelle étape en est-on dans ces différents cas?
D'autre part, madame Davis, vous avez fait référence à une étude qui a été faite par un expert quelconque et qui identifierait possiblement jusqu'à 40 000 citoyens qui auraient le droit d'être inscrits. Ce chiffre est-il valable pour tout le Canada? Si oui, combien y en a-t-il en Colombie-Britannique?
Ma dernière question s'adresse à vous et à M. Duncan. Dans le cas où la Cour suprême ne permettrait pas d'interjeter appel et où l'on n'adopterait pas de projet de loi, quels seraient les plans du gouvernement pour protéger les gens qui se trouveraient dans un vide juridique, et dont le nombre nous sera fourni par Mme Davis?
Je vous remercie.
:
Je vais essayer de préciser ce dont nous parlons à propos de l'appartenance.
Depuis 1985, la Loi sur les Indiens autorise les bandes, les premières nations, à fixer leurs propres règles d'appartenance. Pour ce faire, elles doivent demander à leurs membres de voter et les décisions sont prises à la majorité. Elles doivent ensuite présenter des règles d'appartenance et adopter de telles règles pour cette fin. On applique ensuite ces règles d'appartenance pour décider qui est membre de la bande ou de la première nation. Voilà ce qu'autorise la Loi sur les Indiens.
Il existe, dans la Loi sur les Indiens, des dispositions en matière d'appartenance qui s'appliquent aux bandes qui ont décidé de ne pas adopter leurs propres règles d'appartenance. Il y a donc deux séries de règles, si vous voulez.
Avec ces amendements, le droit d'appartenance, pour les bandes qui n'ont pas adopté de règles d'appartenance, serait déterminé par les règles qui s'appliquent actuellement à ces membres. Quant aux bandes qui ont décidé d'adopter leurs propres règles d'appartenance, ce sont ces règles qui vont déterminer si le nouvel Indien inscrit a le droit d'être membre de cette bande ou non.
Eh bien, chers membres du comité, c'est un sujet que nous allons devoir suivre de très près au cours des prochains mois pour voir comment la situation évolue. Les membres du comité voudront peut-être revoir cette question, en fonction du déroulement des événements. Comme cela nous a été mentionné, nous serons peut-être amenés à examiner un projet de loi au cours de cette session.
Puisqu'il n'y a pas d'autres questions ou commentaires, j'aimerais remercier nos deux représentants du ministère d'être venus nous aider à étudier cette question assez complexe et je remercie les membres d'avoir posé des questions.
Nous nous reverrons mardi, en fait, dans une salle plus grande, la salle des chemins de fer ou la salle de lecture, pour entendre de 11 heures à 14 heures les exposés de nos chefs autochtones nouvellement élus.
Je vous remercie. Bonne fin de semaine.