Merci de me donner l'occasion de discuter avec vous du développement économique, surtout en ce qui concerne les Inuits. Comme on l'a dit, je m'appelle Belinda Webb et je suis directrice du Service du développement social, culturel et économique au sein d'Inuit Tapiriit Kanatami. ITK est l'organisme inuit national et nous représentons les quatre revendications territoriales des Inuits, à savoir le Nunatsiavut, la région d'où je viens, c'est-à-dire le nord du Labrador; le Nunavik, qui est la partie nord du Québec; le Nunavut; et l'Inuvialuit, qui fait partie des Territoires du Nord-Ouest.
Dans mon exposé, je vais discuter de cinq besoins et proposer certaines solutions concernant le développement économique de l'Inuit Nunangat. Juste pour vous donner les grandes lignes, ces cinq besoins particuliers sont le besoin de traiter l'Inuit Nunangat comme une région; la nécessité de reconnaître les réalités de l'Inuit Nunangat, la nécessité d'avoir de la souplesse; la nécessité de mettre en application les revendications territoriales et la nécessité d'élaborer des politiques et des procédures de gestion de collaboration.
Premièrement, il est nécessaire de traiter l'Inuit Nunangat comme une région. Comme nous l'avons dit plus tôt, nous représentons les quatre régions du Canada où il y a eu des revendications territoriales des Inuits. Le processus de développement politique au Canada a eu pour effet de créer des obstacles de compétence qui, historiquement, ont nui aux objectifs de développement économique et politique de l'Inuit Nunangat. On peut le voir très clairement dans la politique arbitraire du gouvernement fédéral qui établit des distinctions entre les régions qui sont situées au nord du 60e parallèle, qui comprennent deux de nos régions, l'Inuvialuit et le Nunavut, et les régions situées au sud du 60e parallèle, qui comprennent le Nunavik et le Nunatsiavut.
Je suis consciente que dans votre mandat d'étude actuel, vous n'étudiez que les trois territoires; alors, je vous recommanderais fortement d'inclure également les deux autres régions inuites qui ne sont pas comprises dans votre mandat d'étude actuel qui sont, comme nous l'avons dit, le Nunavik et le Nunatsiavut. La raison, c'est que la réalité veut que toutes les régions de l'Inuit Nunangat partagent un environnement arctique de même qu'une culture, une langue et un héritage communs. La conclusion d'ententes sur des revendications territoriales globales signifie qu'elles partagent toutes un cadre juridique et réglementaire semblable. Les groupes de revendication territoriales de l'Inuit Nunangat ont élaboré des mécanismes efficaces, à la fois par l'intermédiaire de leurs ententes et en termes de prestations de programmes, pour établir des ententes de partenariat efficaces avec leur gouvernement provincial et territorial respectif et leurs homologues.
Ainsi, un cadre fédéral qui traiterait l'Inuit Nunangat comme une région dans une perspective de politique démontrerait une compréhension de ces réalités sous-jacentes et accroîtrait l'efficacité et l'efficience de la prestation de programmes fédéraux pour le développement économique communautaire.
Le deuxième besoin, c'est de reconnaître les réalités de l'Inuit Nunangat. Un des obstacles les plus importants que doivent surmonter les Inuits, c'est l'absence de compréhension de l'environnement total au sein duquel les Inuits essaient de promouvoir le développement des entreprises et le développe économique. Les programmes qui ne conviennent pas et les gens qui ne comprennent pas les réalités du Nord représentent deux des principaux obstacles auxquels les Inuits doivent faire face quotidiennement.
Beaucoup de temps et d'efforts ont été consacrés au cours des dernières décennies à expliquer les réalités de l'Inuit Nunangat, à éduquer et à éclairer les gens au sujets de ces réalités. Les Inuits partagent un héritage commun, une longue histoire de vie dans l'Arctique, mais une très courte histoire de participation dans une économie typiquement du Sud. Dans tout l'Inuit Nunangat on constate une économie d'entreprise inuite immature et un important déficit d'infrastructure si l'on compare avec ce qui existe dans le reste du Canada.
Un autre obstacle au développement économique de l'Arctique, c'est le fait de ne pas comprendre ce qu'il en coûte pour faire des affaires dans l'Inuit Nunangat et les répercussions de ces coûts sur le développement économique. En plus des coûts accrus, le pouvoir d'achat est réduit, les clients ont besoin d'un capital de base plus élevé, les marchés sont extrêmement restreints et les occasions, surtout lorsqu'on les définit comme on le fait dans le Sud, sont rares.
Le troisièmement besoin, c'est la souplesse. L'appui du gouvernement au développement économique de l'Inuit Nunangat doit être fondé sur des principes solides, mais doit également inclure la souplesse nécessaire pour lui permettre de répondre aux différents styles de gouvernance en place. Il doit également reconnaître que chacune des ententes sur les revendications territoriales globales est légèrement différents des autres et que des arrangements et des pratiques de planification existent déjà entre les organismes de revendication territoriale et leur gouvernement provincial ou territorial respectif.
Les programmes doivent arriver en temps opportun et doivent tenir compte des exigences liées au transport maritime ou sur des routes de glace. Les coûts élevés et le manque d'infrastructure exigent un degré de collaboration plus élevé entre tous les paliers de gouvernement, le secteur privé, les institutions inuites et les autres partenaires en cause.
Toutes le parties en cause doivent travailler pour éliminer les restrictions, pour faire des accommodements pour les autres et pour chercher à rationaliser le processus afin de maximiser les avantages pour la collectivité. Les occasions doivent être définies dans le contexte des collectivités éloignées de l'Arctique. Elles ne peuvent pas correspondre à la définition utilisée dans le sud du Canada.
Le quatrième besoin, c'est la mise en application des ententes sur les revendications territoriales globales. La Loi sur les Indiens ne s'applique pas à l'Inuit Nunangat. Les cinq ententes sur les revendications territoriales globales précisent les principes que doit respecter le gouvernement fédéral lorsqu'il traite avec les organismes de revendications territoriales inuits. Chacune des ententes sur les revendications territoriales globales est unique, et la responsabilité pour la mise en application varie d'une entente à l'autre. Mais dans chacune des ententes, les négociateurs ont clairement compris la nécessité et l'importance de préciser clairement le rôle du gouvernement fédéral dans le processus.
Malheureusement, le dossier sur la mise en application des revendications n'est pas acceptable pour les organismes inuits. L'entente sur le Nunatsiavut est encore nouvelle et nous espérons que ces Inuits auront une expérience plus positive. Ceci dit, les titulaires des ententes sur les revendications territoriales globales continuent de travailler à mieux faire comprendre la réalité de l'Inuit Nunangat tout en espérant que cela mènera à la mise en application qui est précisée dans leurs ententes.
Le cinquième besoin, c'est la gestion de collaboration. Tous les domaines de responsabilité clé dans le cadre des ententes de l'Inuit Nunangat, comme la gestion de la faune, la planification de l'utilisation des terres, l'évaluation environnementale et les régimes d'examen des projets, sont fondés sur les principes de la cogestion. L'esprit de ces ententes devrait également se refléter dans l'élaboration des politiques, des programmes et des arrangements destinés à répondre aux besoins de développement économique communautaire dans l'ensemble de l'Inuit Nunangat.
La création du Comité national pour le développement économique de l'Inuit Nunangat, comptant des Inuits, des Inuvialuits et des représentants gouvernementaux à titre de membres à part entière, représente une occasion d'aller de l'avant d'une manière collaborative pour élaborer des stratégies pratiques afin de répondre aux besoins et aux priorités de développement économique actuels et futurs.
En 2006, les organismes de développement économique communautaire inuits, ou ODEC, des quatre régions inuites se sont rencontrés pour discuter des problèmes communs. Ils se sont entendus pour travailler à la création d'un comité composé d'Inuits, d'Indiens et de fonctionnaires de l'administration centrale et des bureaux régionaux d'AINC.
En 2008, un protocole d'entente a été signé entre le sous-ministre d'AINC et les dirigeants inuits qui a mené, comme on l'a dit, à la création du Comité national pour le développement économique de l'Inuit Nunangat, ou CNDEIN. La création de ce comité comptant des Inuits, des Inuvialuits et des représentants gouvernementaux à titre de membres à part entière, représente une occasion d'aller de l'avant d'une manière qui fait appel à plus de collaboration.
La première réunion du CNDEIN a eu lieu en avril et on y a adopté un plan de travail qui prévoyait un certain nombre de priorités. Les domaines que j'ai énumérés ci-dessus faisaient tous partie de ce plan de travail particulier. Les membres inuits du CNDEIN ont préparé une réponse inuite au cadre fédéral proposé pour le développement économique des Autochtone. Lorsque la création de l'Agence canadienne de développement économique du Nord, aussi appelée CanNor, a été annoncée, les membres inuits du CNDEIN ont préparé une position inuite sur cette agence et comment elle pourrait être structurée pour répondre à nos défis communs.
En plus de ces documents, d'autres ébauches de documents ont été préparées sur les questions suivantes: ce qu'il en coûte pour faire des affaires dans l'Inuit Nunangat, le document de discussion sur la gestion de collaboration, le besoin d'un financement pluriannuel pour les Inuits, les répercussions sur le développement économique des ententes sur les revendications territoriales globales, ce que veut dire un développement économique communautaire dans l'Inuit Nunangat et l'accès des Inuits vivant en milieu urbain à l'aide et au financement en matière de développement économique.
Ces documents et un certain nombre d'autres documents qui sont en préparation sont conçus pour expliquer, pour éduquer et pour fournir une feuille de route pour guider tous les partenaires dans l'Inuit Nunangat sur tous les aspects des obstacles que doivent surmonter les Inuits. La gestion de collaboration est une des meilleures façons de reconnaître les circonstances uniques que l'on retrouve dans l'Inuit Nunangat et d'y répondre. Les Inuits ont survécu pendant des milliers d'années dans un environnement arctique en travaillant ensemble pour résoudre des problèmes communs. Le CNDEIN fournit un nouveau moyen de bâtir sur ce processus. Lorsque vous regardez le développement économique dans une perspective inuite, vous devez regarder toutes nos ententes sur les revendications territoriales, à savoir celles du Nunatsiavut, du Nunavik, du Nunavut et des Inuvialuits.
Comme on l'a dit antérieurement, je suis accompagnée aujourd'hui de Gordon Miles qui est le coordonnateur du CNDEIN.
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Merci, monsieur le président, et bonjour à vous deux.
Belinda, il est agréable de vous voir. Évidemment, je connais la famille de Belinda, du temps qu'elle était au Maine, et elle a beaucoup de parenté au Labrador. Il est bon de vous voir. J'espère que les gens de votre famille se portent bien et que j'aurai l'occasion de leur rendre visite avant longtemps.
Bonjour également, monsieur Miles.
Premièrement, un petit mot de félicitations pour la Journée internationale des Inuits, qui est célébrée le 7 novembre. C'est une célébration des Inuits dans l'Arctique, en Russie, au Groenland, en Alaska et au Canada. Je crois que cette journée a été proclamée en 2007. Elle met certainement en relief la grande contribution des Inuits dans tout le Canada et, évidemment, j'en suis un témoin privilégié au Labrador.
Je veux me concentrer sur un certain nombre de questions. Vous avez parlé de la nécessité d'arrangements de collaboration pour travailler ensemble. Essentiellement, les revendications territoriales définissent souvent ces arrangements par le biais de conseils de cogestion et d'autres types de mécanismes. C'est une question tellement fondamentale du point de vue du processus et du point de vue des résultats.
Le gouvernement fédéral a rendu publics deux éléments importants de sa politique. L'un d'eux est le cadre fédéral pour le développement économique des Autochtones et l'autre est la stratégie pour le Nord. Quelle a été la participation d'ITK à l'élaboration de ces politiques? Sont-elles un reflet des valeurs, des préoccupations et des intérêts d'ITK? Sont-elles d'une utilité quelconque pour les Inuits de la région? Je veux savoir, à travers ce prisme, s'il y a eu un effort de collaboration dans l'élaboration du cadre, qui porte spécifiquement sur le développement économique des Autochtones, et de la stratégie pour la Nord, qui comporte des éléments de développement social et économique.
Mon autre question fait suite à une observation de Belinda concernant le fait de reconnaître les réalités. Je crois que personne autour de cette table ne contesterait le fait qu'il y a un besoin énorme d'investissement dans l'infrastructure, qu'il s'agisse du logement ou d'infrastructures plus publiques, comme des quais, par exemple, pour les activités maritimes, ainsi que des infrastructures sociales comme des écoles et l'éducation. Pensez-vous que les investissements consentis jusqu'ici vont permettre de s'occuper des questions de logement et d'éducation? Dans quelle mesure considérez-vous que l'absence d'infrastructures physiques et sociales constitue un obstacle au développement économique?
Voilà mes deux questions. L'une porte sur la collaboration et l'autre, sur l'infrastructure.
Monsieur Russell, ce sont d'excellentes questions.
En ce qui concerne d'abord la cogestion, les membres inuits — ou le caucus inuit, si vous voulez — du CNDEIN a préparé un document qui cerne 11 ou 12 besoins inuits dont on devrait tenir compte dans ce nouveau cadre fédéral pour le développement économique des Autochtones. Ce document a été présenté en janvier dernier, il a été discuté et lorsque le cadre fédéral a été rendu public, les principes énoncés dans ce document reflétaient en majeure partie la position des Inuits.
Nous étions heureux de cette situation, mais il y a une prochaine étape, et c'est la reformulation du programme qui aura lieu au cours de la prochaine année. Le CNDEIN est un comité conjoint. Il comprend des Inuits, mais il comprend également des gens de l'administration centrale d'AINC ainsi que des gens des bureaux régionaux d'AINC et, avec la création de CanNor, nous espérons inclure cette agence dans ce processus.
Comme vous l'avez dit, la cogestion est comprise dans toutes les ententes sur les revendications territoriales. Il en est question dans ces ententes et il y a des articles portant précisément sur la gestion de la faune et des ressources. Le développement économique n'en fait pas partie, de façon générale; alors, ce que le CNDEIN a dit — et les membres inuits du CNDEIN —, c'est que nous devons nous assurer que le même principe est adopté dans l'avenir. Le CNDEIN lui-même est fondé sur le principe qu'il faut se réunir, définir les défis et ensuite, travailler pour trouver des solutions qui satisfont à toutes les parties.
En ce qui concerne la stratégie pour le Nord qui a été rendue publique — et Belinda pourrait vouloir en parler davantage, parce que cela ne concerne pas précisément le développement économique —, le point de vue du CNDEIN était encore une fois, qu'en principe, c'était une bonne chose. Nous voulions nous assurer que les quatre régions inuites étaient comprises dans cette stratégie pour le Nord, ce qui n'était pas le cas dans la documentation initiale. Cela a été inclus par la suite.
Un des premiers besoins signalés par Belinda dans son exposé était la nécessité de traiter l'Inuit Nunangat comme une région. Et pourquoi cela est-il important? C'est important parce que dans tout le Canada, il y a environ 55 000 Inuits ou Inuvialuits, et ils ont en commun une histoire, un héritage, une langue et un environnement arctique. Beaucoup de problèmes qu'ils affrontent se retrouvent dans les quatre régions, et ils sont tous très différents de ceux que l'on retrouve dans le sud du Canada ou dans les collectivités non éloignées. Il y a très peu de routes dans l'Inuit Nunangat, et la plupart des collectivités sont accessibles par avion et, peut-être, par eau pendant l'été ou par des routes de glace en hiver.
Pour ce qui est de la deuxième question, c'est-à-dire reconnaître les réalités et le déficit d'infrastructure, un des besoins que les Inuits ont fait ressortir, c'est la nécessité d'avoir une bonne compréhension des répercussions socio-économiques des infrastructures et du déficit d'infrastructure. Vous avez parlé de l'initiative en matière d'habitation et c'est très important. Cette question a été traitée de manière différente dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, mais dans chaque cas, on s'occupe du déficit.
Y a-t-il suffisamment d'argent? Non. La réalité, c'est qu'il y a un besoin énorme en matière d'infrastructure. Du point de vue de l'édification d'une nation, il y a des coûts qui ont été déterminés qui vont au-delà de ce qui est réaliste de dépenser par habitant. Dans le Nord, nous parlons de souveraineté et nous parlons du fait que les Inuits sont là depuis des milliers d'années. Ils ont besoin de l'infrastructure que le sud du Canada est venu à considérer comme normale.
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Je vais répondre à la première question et je vais laisser l'autre à Gordon.
À l'heure actuelle, ITK travaille avec les provinces et les territoires sur la stratégie d'éducation. Récemment, une entente dans le domaine de l'éducation a été signée entre ITK et les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Avec la signature de cette entente particulière, ce groupe de travail particulier dispose d'une année pour élaborer une stratégie d'éducation nationale pour les Inuits. Il a tenu sa première réunion sur cette stratégie le mois dernier et il travaille sur cette question.
Sur le site Web d'ITK, il y a de la documentation qui a été préparée avant un sommet sur l'éducation qui a eu lieu à Inuvik. Ces documents sont disponibles et ils définissent clairement certaines des lacunes touchant l'éducation des Inuits. Simplement pour souligner quelques-unes des lacunes fondamentales touchant l'éducation, l'une d'elles serait certainement le fait de recevoir une éducation dans sa langue maternelle. Dans l'ensemble de l'Inuit Nunangat, nous avons de nombreux dialectes inuits. Faire en sorte que les enfants puissent comprendre leur propre langue et apprendre dans cette dernière est une priorité. C'est un des principaux domaines.
De même, le système d'éducation tel qu'il existe à l'heure actuelle est un système adapté pour le Sud: par exemple, en biologie, vous pourriez parler des girafes ou des grenouilles ou de quelque chose du genre. Mais pour un Inuit qui vit dans le Nord, non seulement vous devez expliquer ce qu'est la biologie de la girafe, mais vous devez également expliquer ce qu'est une girafe et dire d'où elle vient. Le fait d'avoir un système d'éducation inspiré du Sud pour instruire les Inuits dans le Nord qui n'ont pas vu certaines de ces réalités est un autre domaine sur lequel travaille ce comité particulier.
Si vous êtes intéressés par les développements qui surviennent dans ce groupe de travail, nous pouvons certainement vous garder informés de ses travaux.
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Je vais ajouter quelques commentaires avant de parler de connectivité.
L'éducation est d'une très grande importance et joue un rôle majeur, particulièrement à ce qui concerne la formation axée sur les compétences et la formation professionnelle. Il y a sept organismes de développement économique communautaire, ODEC, et ils sont tous des signataires de l'EDRHA. Ils offrent les programmes de RHDCC au sein de leur région et c'est là une façon — encore une fois, je reviens à la notion de cogestion — de travailler ensemble. Les ODEC, en tant que signataires de l'EDRHA, offrent également dans les collectivités les programmes relatifs au développement économique des Autochtones. Alors, cela devient une vitrine et vous pouvez faire de l'intégration entre les projets.
À titre d'exemple, il y a au Nunavut un groupe de stratégie sur les compétences pour les métiers liés à l'activité minière qui est sur pied et auquel participent des entreprises minières, des représentants du gouvernement du Nunavut et des Inuits signataires de l'EDRHA. Travaillant ensemble, ils essaient de reconnaître quels seront les besoins et ensuite, ils mettront sur pied des programmes de formation pour y répondre. Du point de vue du CNDEIN, c'est un autre exemple de ce dont nous avons besoin. Il s'agit de prendre les ressources disponibles et de s'assurer que nous ne faisons pas de dédoublement, mais que nous bâtissons à partir des institutions qui existent actuellement dans l'Inuit Nunangat pour s'assurer qu'elles peuvent offrir les meilleures solutions possibles aux gens.
En ce qui concerne la connectivité, je pense que la situation varie dans les quatre régions. Je crois que le Nunavut, et c'est une certitude, dispose de la large bande dans toutes les collectivités. Je pense que c'est le cas aussi de l'Inuvialuit et du Nunavik. Je ne suis pas certain de la situation au Nunatsiavut. Dans tous les cas, la bande passante n'est pas suffisante pour répondre aux besoins. En conséquence, pour des programmes qui pourraient être très utiles, qu'il s'agisse de l'éducation à distance ou de la vidéo interactive, il n'y a pas suffisamment de bande passante dans la plupart des cas pour permettre de genre d'activité. Dans l'avenir, il deviendra de plus en plus important de corriger ce déficit et de s'assurer que les Inuits dans l'Arctique ont accès à la même bande passante et à la même vitesse que ce qui est accessible partout ailleurs au Canada.
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Je ne suis pas sûr de ce qu'est la stratégie du Nunavut. Je peux vous faire part de certains avis d'organisations inuites. Qulliq Energy Corporation est chargé de l'électricité au Nunavut et cet organisme étudie un projet hydroélectrique à Iqaluit, ou proche de cette localité, pour produire des ressources renouvelables. Je suis sûr qu'ils étudient aussi d'autres technologies.
Les contraintes relatives à l'emprunt de capitaux imposées aux sociétés d'État constituent l'un des problèmes auxquels ils se heurtent. Ils ne peuvent pas dépasser un certain plafond. J'ai oublié le montant, mais il me semble que pour le projet hydroélectrique, c'était 500 millions de dollars ou quelque chose près. Les directives fédérales les empêchaient d'emprunter autant d'argent. Je pense que c'est une question qu'il faut régler car en se basant sur le prix du pétrole il y a un an — sachons qu'il a considérablement baissé depuis — la période de récupération de l'investissement fait pour ce projet hydroélectrique était de quatre ans.
C'est une option. Y en a-t-il d'autres? Je suis sûr que oui. Ce qui nous inquiète, nous les Inuits, c'est de savoir comment assurer la participation des organisations inuites à ces projets et leur part de bénéfices pour éviter un contrat aux termes duquel des travailleurs viendraient du Sud pour construire les installations et repartir à la fin des travaux. Il serait avantageux d'avoir les coûts les plus bas, mais les Inuits veulent participer à ces projets et former des travailleurs inuits pour occuper les emplois dans la construction et l'exploitation du projet. Le Nunavut et Qulliq Energy, en particulier, ont un programme d'apprentissage. Je crois que le nombre d'apprentis qui ont obtenu le statut d'ouvrier spécialisé a été annoncé la semaine dernière.
C'est grâce aux grands projets que la plupart des formations seront assurées, que ce soit dans l'exploitation minière, les grands projets d'électricité ou la construction de logements. La Société d'habitation du Nunavut a été créée de façon à ce qu'aujourd'hui... Le prix des maisons a augmenté parce qu'ils offrent aux apprentis une formation pour devenir compagnons d'apprentissage dans toutes les collectivités où ils construisent des maisons. Par conséquent, l'échéancier dans la construction a été prolongé, les coûts ont augmenté, mais au bout du compte, il y aura des logements et des ouvriers spécialisés sur place pour réaliser d'autres projets.
Il y a des avantages et des inconvénients, mais ce qui est important, c'est de travailler ensemble pour avoir à l'avenir des ouvriers spécialisés sur place qui occuperont les emplois.
Je vais utiliser l'un des temps de parole accordés au gouvernement pour parler de quelques affaires administratives. Je poserai ensuite deux ou trois questions, si le temps me le permet.
Dans votre déclaration préliminaire, madame Webb, vous avez mentionné un certain nombre de documents différents. Serait-il possible de faire parvenir ces documents au comité? Le premier que vous avez mentionné est un protocole d'entente signé par AINC et des dirigeants inuits en 2008. Ce protocole a conduit à la mise sur pied du Comité national pour le développement économique de l'Inuit Nunangat. Deuxièmement, vous avez mentionné un plan de travail élaboré par ce même comité. Il serait très utile que vous nous en envoyez également une copie. Troisièmement, vous avez évoqué le poste que vous avez occupé pour travailler avec CanNor et des rapports avec cette agence. Vous avez mentionné, par exemple, un poste qui permettrait à ITK de collaborer avec l'agence. Finalement, un assez grand nombre d'ébauches de documents ont été mentionnées à la fin de votre exposé. Je comprends, bien sûr, qu'ils ne sont qu'à l'état d'ébauches, mais il nous serait extrêmement utile de les avoir à des fins de consultation.
Je passe maintenant à mes questions.
Premièrement, vous avez fait référence de manière détournée à la façon de procéder au Sud du Canada et que cette façon de faire les choses pose problème quand on l'applique dans le Nord. Je pense que vous faisiez allusion au programme d'éducation et à d'autres choses. Quel serait, selon vous, le meilleur moyen de surmonter cette différence culturelle? Que proposerez-vous pour régler ce problème et pour s'assurer que les programmes ou les initiatives tiennent au moins compte de ce problème lors de leur application dans le Nord?
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Le changement climatique nuira surtout à l’économie traditionnelle. Par économie traditionnelle, nous entendons l’économie basée sur la terre. Cela représente un énorme pourcentage de l’économie arctique.
Je vais vous raconter une histoire et essayer d’être bref.
J’étais à Resolute Bay lorsqu’un groupe de narvals a pénétré dans la baie à 8 h. À 9 h le même matin, j’étais en train de parler à un de mes clients, à sa résidence, quand j’ai vu approcher sur la route un VTT qui tirait une remorque. Dans la remorque, il y avait un tas de muktuk, de peaux de narval. Le conducteur a visité toutes les résidences de la ville et, selon le nombre d’occupants, il a livré une portion du muktuk. Quel est l'impact de ce geste? Comment mesurer cela? C’est un mode de vie.
Ils ont mené des études, et ils ont constaté qu’au moins 60 p. 100 des Inuits mangeaient des aliments locaux hebdomadairement : du phoque, du caribou, du narval et de l’omble chevalier. C’est leur principale nourriture. Évidemment, le changement climatique aura une incidence sur les animaux sauvages. Ils vont changer d’habitat et, lorsque cela se produira, les chasseurs devront se déplacer pour les atteindre. Dans certaines régions, il se peut que la faune se rapproche des collectivités, ce qui rendra les choses plus simples. Dans d’autres régions, les chasseurs devront parcourir de plus grandes distances. Les coûts et les répercussions qu’entraîneront ces déplacements prolongés seront considérables.
Comment peut-on appuyer l’économie traditionnelle de l’Arctique? Comment mesure-t-on la contribution d’un chasseur qui s’absente pendant 10 jours et qui revient avec 70 carcasses de caribou et les partage avec sa collectivité? Qui paiera pour cela, car ces chasses coûtent de plus en plus cher, au fur et à mesure qu’elles s’éloignent? Les chasses au caribou et au bœuf musqué qui sont organisées dans l’Ouest constituent d’incroyables sources de revenu et de nourriture, tant sur le plan commercial que sur le plan traditionnel.
Nous devons trouver des moyens d’appuyer ces activités, tout en veillant à ce qu’il y ait un équilibre. Les ententes sur les revendications territoriales comportent toutes des ententes sur la gestion de la faune, et elles doivent être respectées. Mais d’un point de vue économique, nous devons comprendre à quel point ces activités sont importantes et comment nous pouvons les favoriser et les soutenir.
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Oui. Malheureusement, je crois que la crise économique a bouleversé cet échéancier, et personne ne sait combien de temps durera le report.
Premièrement, dans chacune des régions, les accords de revendications territoriales demandent la conclusion d'ententes inuites sur les répercussions et les avantages pour tous les projets importants, pour que l'on fasse des négociations au début de tout projet en vue de garantir l'accès ou la participation des Inuits à ces projets dans une certaine mesure. Et c'est important.
Par ailleurs, chacun des quatre organismes inuits dispose de sociétés de développement très solides. Et, dans tous les cas, ces sociétés cherchent activement à former des partenariats, à entreprendre des projets conjoints et à signer des contrats avec ces entreprises privées.
Je crois que les activités minières ont un potentiel énorme, notamment au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest — et dans les quatre régions. Vous avez Voisey's Bay au Labrador, Raglan au Nunavik, en plus d'une autre mine potentielle au Nunavik dont les activités sont, je crois, maintenant en suspens.
Mais encore une fois, le Nord est rempli de potentiel pour des changements de taille.
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Merci beaucoup, monsieur Duncan. Il semblerait que cela nous aide tous à être au diapason.
J'aimerais d'abord remercier tous les témoins de s'être joints à nous aujourd'hui et de nous avoir donné un survol très instructif de la question à l'étude au sujet du développement économique, à tout le moins en ce qui touche les Inuits du Canada. Vos témoignages ont été très utiles.
Mesdames et messieurs, avant de lever la séance, j'aimerais couvrir un point, ou peut-être deux, de plus.
Le premier point se rapporte au titre de notre étude. Vous vous rappellerez que nous avons considéré qu'il s'agissait du « Développement économique du Nord ». Nous avons également suggéré que l'étude s'attache aux barrières et aux solutions. Nous pourrions, si le comité le désire, préciser et, en fait, changer le nom de notre étude. Vous verrez qu'elle apparaît sur notre ordre du jour sous le titre de « Développement économique du Nord ». Nous pourrions en quelque sorte modifier ce titre et le préciser en y ajoutant les deux points, suivis de « barrières et solutions ». Ce serait certainement plus clair pour le public.
En passant, puisqu'il est question du public, j'ai remarqué que le Whitehorse Daily Star a aussi publié notre article au sujet de la visite dans son édition d'aujourd'hui.
Pour en revenir à l'étude, mesdames et messieurs, le changement de titre impliquerait que les points qui figurent à l'ordre du jour se limiteraient davantage à ces barrières et à ces solutions — ce qui réduirait peut-être la portée de nos discussions.
Voici la question que j'aimerais vous soumettre. Est-ce que quelqu'un s'oppose à ce qu'on modifie le nom de notre étude pour y ajouter « barrières et solutions »?